4 minute read
Cirad
LA DYNAMIQUE D’INVASION DES ESPÈCES EXOTIQUES SOUS SURVEILLANCE
Advertisement
Ci-dessus : les fruits ailés de la liane papillon facilitent sa propagation et son caractère envahissant dans les forêts semi-sèches. © Éric Rivière | Cirad
À La Réunion, pas moins de 1 800 espèces de plantes sont aujourd’hui recensées comme étant exotiques, dont 150 qui font l’objet d’une attention particulière d’un groupe de travail coanimé par le Cirad et le Parc national de La Réunion.
MATHIEU ROUGET, CHERCHEUR EN ÉCOLOGIE AU CIRAD DE LA RÉUNION
« En collaboration avec un ensemble d’acteurs de la gestion du milieu naturel, dont le Parc national depuis 2018, nous cherchons à caractériser les interactions entre les plantes exotiques envahissantes et le milieu naturel afin d’accompagner les stratégies de lutte.
Nous réalisons actuellement un diagnostic de la situation afin de remettre à jour les connaissances,
à la fois sur les espèces présentes (Quelles espèces posent problème et comment les prioriser ?) ainsi que sur les espaces d’intervention (Quelles sont les zones les plus envahies par les EEE ?). L’idée est, d’une part, de coordonner la collecte de données et de les homogénéiser, dans le but de réaliser des cartes d’invasion ; et d’autre part, de concevoir des protocoles d’inventaire et de suivi sur le terrain, avec l’ensemble de nos partenaires.
Ces actions de connaissance permettent alors la mise en place de projets de lutte biologique spécifiques. En 2022, nous avons notamment monté un projet de recherche afin d’identifier les agents de lutte potentiels contre la liane papillon (Hiptage benghalensis), qui se propage rapidement, étouffe la forêt sèche et provoque la chutes d’arbres ».
PAULINE FENOUILLAS, INGÉNIEURE DE RECHERCHE À L’UNIVERSITÉ DE LA RÉUNION
« Dans le cadre de mon post-doctorat encadré par Mathieu Rouget au Cirad, je travaille au développement de scénarios de lutte contre les EEE. Il s’agit ainsi de mettre en œuvre un panel de scénarios à l’échelle de plusieurs sites pilotes, afin de pouvoir par la suite prioriser au mieux les actions de gestion des EEE et adapter les stratégies d’intervention.
Selon les actions de gestion mises en place et le budget alloué, les bénéfices de la lutte seront différents. Un scénario est caractérisé par un ensemble de paramètres : par exemple le type de lutte, la surface de lutte ou le budget mobilisé. Les différentes combinaisons de paramètres forment divers scénarios que j’évalue ensuite au regard de plusieurs indicateurs : l’évolution du recouvrement d’une espèce exotique ou indigène, la création d’emplois, l’efficience économique, notamment.
Au Maïdo-Grand Bénare par exemple, sur 5 000 hectares, deux types de végétation et quatre niveaux d’envahissement sont observés, ce qui permet de construire différents scénarios, pour lesquels je vais chercher à prédire dans le temps l’évolution des indicateurs, en fonction du type d’habitat et du niveau d’envahissement. En résumé, mon objectif est de développer un outil permettant d’analyser différents scénarios de gestion mis en place et leur efficacité dans le temps ».
ÉMILIE CAZAL, CHARGÉE DE MISSION STRATÉGIE DE CONSERVATION DE LA FLORE ET RESTAURATION DES HABITATS AU PARC NATIONAL DE LA RÉUNION
« Je coanime avec Mathieu Rouget le groupe de travail sur un projet intégré de lutte contre les plantes exotiques envahissantes et de restauration des milieux naturels prioritaires. Ce programme partenarial, qui est piloté par le Parc national, réunit le Département, le Cirad, la DEAL, l’ONF, la Région, le CBNM, l’Université, ainsi que d’autres partenaires gestionnaires d’espaces naturels. Ce programme vise à accompagner et à améliorer les capacités opérationnelles du territoire et produire des outils, afin que les actions de restauration des milieux naturels sur le territoire soient plus efficientes.
Cela passe par une meilleure connaissance de l’état de conservation de ces milieux ; la priorisation des actions de restauration selon les dynamiques d’invasion et scénarios d’intervention possibles ; l’expérimentation d’itinéraires techniques de restauration ; l’accompagnement des partenaires en charge des chantiers ; l’évaluation des actions entreprises pour ajuster nos programmes d’actions.
Les premières sessions de diagnostic de l’état d’invasion de plusieurs massifs en cœur de Parc révèlent des niveaux d’invasion hétérogènes, pour lesquels différentes actions de lutte vont être mises en œuvre.
Le Grand Bénare bénéficie par exemple d’un bon état de conservation, contrairement à la Plaine des Fougères, fortement envahie par le longose notamment, une peste végétale très difficile à éliminer.