5 minute read
Île de La Réunion
Jonathan Payet, au coeur de l'île intense
Jonathan Payet, photographe spécialiste d’images par drone, émerveille les internautes tout aulong de l’année par ses clichés du volcan, des cirques et remparts... 109 000 abonnés le suivent sur sa page Facebook ! Rencontre avec un « influenceur » qui n’a pas fini de nous étonner...
Advertisement
INTERVIEW
JONATHAN PAYET
PHOTOGRAPHE ET « SOCIAL MEDIA INFLUENCER »
• Quel regard portez-vous sur la nature que vous photographiez et quel message voulez-vous transmettre aux personnes qui vous suivent ?
- Je porte un regard admiratif sur la nature réunionnaise. Nous avons ici des paysages remarquables inscrits au Patrimoine mondial de l’Unesco ou en tant que zones protégées, notamment par la Réserve marine. L’île de La Réunion héberge l’une des plus importantes biodiversités de France. Le spectacle de cette nature nous apprend à être humbles, car on se rend compte en la côtoyant de sa puissance insoupçonnée, lors d’un cyclone par exemple ou d’une éruption du volcan qui nous replonge vers nos racines, là où l’île est née.
Mon message serait de faire prendre conscience que la nature est là et qu’elle n’a pas besoin de nous pour exister, mais qu’en y mettant du nôtre, nous pouvons faire en sorte de peu l’impacter lors de notre passage sur Terre. Admettons que nous détruisions la nature.
L’humanité ne serait alors plus là mais la nature, elle, reprendrait le dessus, les graines des arbres regermeraient, le volcan refaçonnerait le paysage, les cyclones finiraient par détruire ce que nous avons fait, il y aurait toujours une suite... Sauf bien sûr si des espèces déjà rares et menacées venaient à disparaître, ce qui serait alors pour elles irréversible. En fait si nous ne prenons pas soin de ce qui nous entoure, c’est notre qualité de vie que nous mettons en danger. On se pénalise nous-mêmes, on pénalise notre prochain et les générations futures en ayant des actions négatives envers l’environnement. C’est comme si l’on sciait la branche sur laquelle on était assis ! La nature est notre garde-manger, notre eau, notre air. Elle est un deuxième organisme pour l’être humain.
• Dans quel état de préservation vous apparaissent les milieux naturels que vous sillonnez ?
- Les endroits que j’arpente sur l’île sont globalement bien préservés, parce que souvent ce sont des lieux retirés, avec très peu de passages d’êtres humains. En ce qui concerne les zones fréquentées, elles sont assez bien entretenues grâce aux actions des collectivités, des communes et des associations pour gérer les déchets. Mais c’est vrai qu’aux abords des villes, dans les ravines, il y a beaucoup de dépôts sauvages. Récemment, j’ai découvert une grotte sous-marine du côté de Saint-Leu qui, à mon avis, est inconnue du public. Eh bien, même cette grotte renferme un amas de déchets. On voit bien qu’ils n’ont pas été déposés là directement par l’homme, mais qu’ils ont été ramenés par la mer. Ce qu’on jette disparaît peut-être de notre vue, mais pas de la surface de la planète...
• Quand vous découvrez un site naturel magnifique et encore inexploré, communiquez-vous sa localisation à vos abonnés ?
- Quand une cascade, un point de vue ou tout autre bel endroit n’est pas connu, je n’en divulgue jamais la position exacte, pour éviter qu’il ne soit ensuite pollué. Les charmes du lieu seront dévoilés aux personnes qui le trouveront par elles-mêmes... Les réseaux sociaux peuvent créer des phénomènes de « buzz » et donc une surfréquentation des sites. Les personnes ont envie de se rendre là où est allé le photographe ou l’influenceur pour s’y afficher, faire des selfies... Et on risque vite de retrouver sur place des plastiques, résidus de pique-niques, etc.
C’est dommage quelque part de ne pas dire où se trouvent ces endroits. Cela ferait le bonheur de personnes responsables. De plus, l’immersion dans un cadre naturel sauvage est d’après moi un moyen très efficace de sensibilisation. Mais certains ne sont pas toujours respectueux...
• Un photographe peut-il jouer un rôle moteur dans la sensibilisation à l’environnement ?
- La photo sert de support pour entrevoir ces sites qui restent difficiles d’accès. C’est un art qui permet de montrer le beau, et cette beauté doit encourager à ne pas dégrader la nature et à conserver notre patrimoine local, une notion à laquelle les Réunionnais sont d’ailleurs très attachés. Vis-à-vis de toutes les personnes qui me suivent, notamment chez les moins de 30 ans, j’ai sans doute un rôle à jouer, car j’ai cette chance de véhiculer des messages qui sont lus et partagés. J’espère que mon travail photographique pousse à adopter de petits gestes écoresponsables dans le quotidien... Pour moi, une image est bien plus parlante qu’un texte quand il s’agit de sensibiliser. Je pense en particulier aux textes réglementaires. Il faut connaître les lois bien sûr, mais les consignes moralisatrices sur l’écologie peuvent rebuter. L’image via les réseaux est un nouveau vecteur de communication et d’influence, qui a cette capacité de toucher les gens et, ce qui est formidable, de les connecter entre eux !