carnet de voyage Turquie

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SUR LA ROUTE

A nouveau

Numéro 3

Après Istanbul, cap à l’Est pour un mois avec nos vélos. De la Cappadoce jusqu’au lac de Van, la neige est au rendez-vous.

Bienvenue en Anatolie !

SOUS LA NEIGE EN CAPPADOCE

AU SOMMET DU NEMRUT DAGI L’ATTAQUE DES KANGALS

LE LAC DE VAN A VELO

www.anouveausurlaroute.fr


Notre parenthèse autour du monde

Claudine ARNAUD, 33 ans, professeur et Olivier BOROT, 30 ans, ingénieur.

Nous avons mis de côté nos situations professionnelles pour partir en février 2009 visiter le monde à pied, à vélo ou en train. Au programme six mois le long de la Route de la Soie jusqu’en Mongolie pour revenir à travers la Russie avec le Transsibérien. Puis départ pour l’Afrique sur les routes du sel avant de suivre la Cordillière des Andes en Amérique du Sud. Ensuite cap sur l’Asie du Sud-Est…

Avec La Ligue contre le Cancer

Touché par le cancer en 2007, notre voyage c’est aussi apporter notre soutien à La Ligue contre le Cancer : en vous inscrivant, vous donnez 5 € au comité des Alpes Maritimes. Grâce au soutien du Conseil général des Alpes Maritimes qui participe au financement de notre projet, notre carnet de voyage est diffusé dans plusieurs centres de soins et dans les comités départementaux de la Ligue contre le Cancer. Puisse-t-il être un bol d’air pour ceux qui en ont besoin...

Si notre aventure vous intéresse, vous pouvez nous soutenir et recevoir notre carnet de voyage tous les mois. Indiquez sur papier libre vos coordonnées en précisant si vous souhaitez la version papier ou la version mail et envoyez vos dons par chèque à :

Association A nouveau sur la route 46, avenue de la République 01630 St Genis-Pouilly

Ou bien téléchargez notre bulletin d’inscription sur notre site : www.anouveausurlaroute.fr


N

ous avons sillonné la Cappadoce à vélo sous la neige avant d’essayer de rejoindre la ville de Malatya, connue pour sa production d’abricots secs qui sont exportés dans le monde entier; et le site antique de Nemrut Dagi pour voir les statues géantes à plus de 2000 mètres d’altitude. Malheureusement les routes étant enneigées voire fermées, nous avons dû mettre nos vélos dans un bus, et c’est à pied que nous avons gravi le sommet du Nemrut. Puis, c’est autour du lac de Van, à l’extrême Est de la Turquie, que nous avons donné nos derniers coups de pédales. Dans ces régions rurales très modestes, les vêtements occidentaux laissent place aux sarouels, ces pantalons traditionnels très amples et resserrés aux chevilles, et les

femmes portent très majoritairement un foulard en coton léger et au contour brodé. Pendant ce périple, j’ai donc décidé de porter moi aussi le voile, ce qui a été très apprécié. Partout nous avons été accueillis par un peuple curieux, souriant et fier de faire découvrir son pays et nous garderons en mémoire cet accueil chaleureux. C.


Sous la neige en Cappadoce

D

e Kayseri, cap sur la Cappadoce à vélo. A cent kilomètres au sud ouest de la ville, nous avons parcouru cette région si visitée par les touristes aux beaux jours, dans des conditions hivernales. Le vent de face nous a accompagnés durant des kilomètres de routes rectilignes. Péniblement, nous sommes arrivés dans ce paysage lunaire, créé par les volcans environnants puis l’érosion au fil des siècles. Sur un rayon d’environ 15 km, la nature a sculpté dans la roche friable des cheminées de fées ornées d’un « chapeau » en basalte, roche plus solide. Puis l’homme s’est aussi servi de cette particularité géologique pour tailler des habitations troglodytes et des villes souterraines. Là, dans ce relief escarpé,

bravant pluie et neige, nous roulions toute la journée et vers 16 h nous établissions notre campement dans des lieux splendides. Avec – 5°C à l’intérieur de la tente, les nuits ont été fraîches et nous appréciions chaque soir notre plat de pâtes bien chaudes. Pourtant quelques incidents sont survenus durant cette semaine en Cappadoce : l’attache de notre remorque s’est tordue dans une descente chaotique et notre ordinateur a refusé de se réinitialiser : le froid ? Un peu trop de chocs… ? Il nous faudra nous organiser pour remettre tout en état mais ce n’est que du matériel, les attaques des chiens auraient pu, elles, nous causer d’autres dommages… C.


DESSERT AU POULET

Tavuk Gögsü

Ingrédients : 1 petit poulet (1,250 kg environ) 2 litres d’eau 3 litres de lait 600 g de sucre en poudre 300 g de farine de riz 2 cuillérées à soupe rases de cannelle

M

ettre le poulet à cuire dans deux litres d’eau bouillante jusqu’à ce que sa chair soit bien tendre. Puis le retirer de l’eau et l’égoutter. - Dans une casserole, verser la farine de riz et le sucre. Ajouter, lentement et en mélangeant, le lait froid. Mettre à bouillir pendant 10 minutes jusqu’à épaississement, sans cesser de tourner avec une cuillère. - Détacher la chair du poulet. Puis l’écraser en la frottant entre les paumes des mains pour la réduire

en filaments minces comme des cheveux. On peut, pour rendre l’opération plus facile, la tremper de temps en temps dans de l’eau. - Lorsque ce travail est terminé, faire tremper pendant deux minutes ces filaments de chair dans un récipient contenant un verre d’eau. Ensuite les égoutter soigneusement et les transvaser dans la casserole contenant la préparation. Mélanger avec une cuillère et faire bouillir dix minutes. - Puis verser dans des coupelles et saupoudrer le tout de cannelle.

Les caravansérails

Ces lieux fortifiés qui jalonnent la Route de la Soie étaient un refuge pour les caravanes de marchands. Agencés autour d’un point d’eau, ils comportaient des chambres, des écuries mais aussi des commerces. La distance entre les caravansérails correspondait à une journée de marche pour hommes et animaux.


PORTRAIT

Avec Huseyin au sommet du Nemrut Dagi

A

Site de Nemrut Dagi : Tombeau du Roi Antioche 1er, 52 avant J.-C à 2150 mètres d’altitude.

près le refus de nos visas iraniens, c’est devenu notre objectif. Sur nos vélos, nous avons affronté le froid et la neige et aujourd’hui l’Office du Tourisme nous dit que nous ne pourrons pas y aller. La route est coupée par la neige. La déception et le découragement nous rattrapent. Tant de chemin pour rien. Après une nuit morose, et avant de battre en retraite, je retourne essayer d’obtenir autre chose : l’ascension à pied de la montagne enneigée ? Il nous faut deux jours pour tout organiser mais la météo est bonne et si notre condition physique est suffisante, un guide nous emmènera au sommet à 2150 mètres contempler les statues.

Marié et père de famille à 18 ans Après avoir laissé nos vélos à l’hôtel, nous prenons un minibus pour le dernier village accessible. Nous logeons chez Huseyin 30 ans, notre guide. Il vit dans ce village reculé avec sa femme, ses trois filles et sa mère. Ici nous sommes en territoire kurde. La situation très tendue il y a quelque temps s’améliore aujourd’hui : les Turcs et les Kurdes vivent mieux ensemble, nous dit-il. Loin de la modernité des villes nous

partageons son repas. Tous les plats sont servis en même temps et amenés sur un immense plateau en argent. Nous mangeons par terre sur des tapis qui recouvrent le sol et, pendant que sa femme nous sert le thé, il nous raconte son parcours. Lorsqu’il a eu 18 ans, alors qu’il devait partir au service militaire, son père est mort. Pendant 30 mois sa mère serait ainsi restée seule au village. Alors il s’est marié, plus jeune qu’il ne l’aurait souhaité, mais en


fondant un foyer, il savait que sa mère serait prise en charge par son épouse comme le veut la tradition. Son frère est gérant d’un hôtel et il y a travaillé longtemps, apprenant ainsi l’anglais. Et puis avec un de ses collègues, il a eu «big problem» alors il ne veut ou ne peut plus y retourner. Depuis deux ans il part travailler une majeure partie de l’année à Istanbul dans une usine, laissant femme et enfants dans ce village perdu. Un jour peut-être il aura les moyens de les faire venir mais ce n’est pas d’actualité.

Quatre heures d’ascension Le lendemain, après un copieux petit-déjeuner, nous partons pour l’ascension du Nemrut. Il est six heures lorsque nous quittons le village où la vie s’anime déjà. Pendant plus de quatre heures nous marchons dans la neige sur les pentes de ce volcan impressionnant. Lui devant nous ouvre la voie, son fusil en bandoulière. Quand on lui demande à quoi son arme nous servira, il répond « Sometimes bear, but rare. » Ah bon, et bien si c’est rare tout va bien…

Plusieurs fois dans la neige nous verrons des empreintes de loup, mais son fusil ne nous servira qu’à essayer de ramener des perdrix pour le repas du soir. En vain. Tout est blanc, la neige est molle et nous marchons sans raquettes ni crampons. Nous sommes en bonne forme tous les deux et nous ne souffrons pas trop de l’effort : lui en revanche est vraiment épuisé. Il faut dire que si nous marchons dans ses pas, lui en ouvrant la voie s’enfonce fréquemment d’un bon mètre dans la poudreuse. Après 1200 mètres de dénivelé et sous un soleil éclatant, nous nous retrouverons au sommet, au pied de ces statues vieilles de 2000 ans, seuls dans un lieu qui voit chaque jour en haute saison défiler un millier de personnes. Moments magiques.

O.


CARNET DE ROUTE

N

ous n’avons pas pu résister à l’envie de pousser plus à l’Est. C’est le bus qui nous a emportés avec nos vélos jusqu’à Van à 50 km de la frontière iranienne et 100 km de l’Irak. Dans cette région le tourisme est inexistant malgré la beauté du lac, car même si les touristes ont été épargnés jusqu'à présent, le parti terroriste, le PKK, continue à rendre la région peu fréquentable alors même que la situation entre Kurdes et Turcs s’améliore. La région est pourtant magnifique : les montagnes enneigées se jettent dans les eaux bleues du lac et le

Le lac de Van à vélo

dégel fait pousser une herbe verte sur les rives qui servent de pâturages aux troupeaux de moutons.

Un accueil contrasté Dans les rues des villes, avec notre chargement, nous faisons sensation. Souvent sur notre passage les gens sortent de leur boutique et nous invitent à boire le thé, parfois aussi les gamins nous crient des « Hallo, hallo » agressifs avant de jeter des pierres dans notre direction. Ces comportements très opposés nous suivront tout au long des 250 km de routes que nous arpenterons autour du lac.


Des enfants mal intentionnés Un jour d’infortune, alors que les multiples barrages militaires nous rappellent que la zone est sous tension, nous sommes pris au piège par des gamins de 10 à 12 ans. Dans une montée raide où nous avançons laborieusement à 4km/h, ils nous encerclent et sous prétexte de nous aider à avancer en poussant nos vélos, en profitent pour ouvrir les poches des sacoches de Claudine. Heureusement une voiture s’arrête et nous aide à les faire déguerpir. Ils emporteront pour seul butin le flacon contenant notre sel. Un peu secoués, nous entrons dans la ville suivante sous les regards hostiles des jeunes et sous les cris « Tourist, tourist ». Nous nous réfugions dans le seul hôtel de la ville qui pratique par conséquent des prix exorbitants pour une chambre carrément “dégueulasse”. Des hôtels miteux, on en a vu d’autres pourtant... “Est-ce que vous avez déjà ... ... été une curiosité ? ”

- Un allemand qui descend de son bus touristique en Cappadoce, s’approche de nous et sans un mot prend une photo en gros plan de nous deux. - Deux jeunes en voiture nous dépassent, s’arrêtent et sortent pour nous filmer en train de pédaler. - Dans un bar à thé, le patron étonné de servir un couple de touristes, nous immortalise sur son téléphone portable.

Et puis le lendemain, nous pédalons sous les klaxons des chauffeurs de camions et de bus qui nous encouragent. Surpris par le vent de la journée, nous n’avons pas pu atteindre la ville-étape. A 19 h, la nuit tombée, nous frappons à la porte de Bekir. Il nous accueillera pour la nuit, nous offrant sa chambre et le repas.

La chaleur d’une famille Il vit avec ses deux femmes et ses dix enfants, sa belle-fille et son petit-fils. Ce sera pour nous une soirée inoubliable où la conversation se fait par gestes ponctués de grands éclats de rire. Notre petit dictionnaire nous aide un peu mais qu’importe le vocabulaire, certains échanges sont universels. La chaleur et l’atmosphère heureuses de ce foyer où chacun a une place nous ont marqués. Si les femmes portent toutes le voile en notre présence, ce sont elles les plus curieuses, elles nous bombardent de questions. Le partage et l’accueil des voyageurs est une tradition dans les pays musulmans, mais pas forcément avec autant de générosité ! Au petit matin, tous nous sommes émus. Il est des rencontres, fussent-elles brèves, qui vous touchent et vous réconcilient avec la terre entière. O.


L’attaque des chiens

J

’ai d’abord entendu Claudine crier « Vite, fonce ! » avant de voir fondre sur nous, quatre ou cinq chiens errants. Ils ont l’air affamés et nous coursent pendant quelques mètres, mais la pente aidant nous les distancerons facilement. Ouf !! Ce sont des Kangals, chiens de bergers que l’on ne trouve qu’en Turquie. Ils sont dressés pour défendre les troupeaux de moutons contre les loups et les ours, mais affamés ils semblent attirés par les mollets des cyclistes. Une heure plus tard, les choses se compliquent. Clau est devant, je me

Lesimpressionsd’Olivier

Le meilleur souvenir : Tous ces gens qui ont si peu et qui partagent : un fruit offert par un passager dans un bus, les inombrables verres de thé proposés chaque jour et l’hospitalité sans contre-partie pour les voyageurs. Le pire souvenir : Les Kangals bien sûr, mais aussi les salles de bains. Pas une chambre d’hôtel sans fuite d’eau !

Le plus marquant : Le soin apporté aux tenues vestimentaires. Quel que soit leur âge, les hommes portent souvent chemise et veste. On a même vu des bergers guider leur troupeau en costume.

LE KANGAL, OU BERGER D’ANATOLIE

Poids : 40 à 65 kg ; Taille : 71 à 81cm

Race de chiens originaire du plateau d’Anatolie où le climat est continental. Ces chiens sont dehors par tous les temps et sont d’excellents gardes pour les troupeaux. Les bergers turcs reconnaissent que trois kangals suffisent à écraser une meute de plusieurs loups.

traîne à 10km/h quand une voiture fait demi-tour en franchissant le terre plein central. L’homme s’arrête à ma hauteur et affolé, me fait des signes. Je comprends que trois chiens m’attendent prêts à me croquer. Il va m’accompagner pour essayer de les effrayer. Ma vitesse passe d’un coup à 30 km/h : oubliée la fatigue, je me demande où est Claudine. J’arrive à la hauteur des chiens, ils m’attendent et se ruent sur moi. De chaque côté, ils essayent de me mordre les jambes. Mon protecteur klaxonne et fonce alternativement sur l’un ou l’autre des chiens. J’ai le cœur qui bat à tout rompre et je n’ai pas le temps de regarder le compteur mais je sais que je fais un record de vitesse. La plaisanterie dure simplement quelques secondes, mais sans mon chauffeursauveteur, je ne sais pas comment je m’en serais tiré. Un peu plus loin nous retrouvons Claudine qui a réussi à leur échapper seule, en pédalant de toutes ses forces !


LesimpressionsdeClaudine

Le meilleur souvenir : La sensation de sérénité qui se dégage au sommet du Nemrut, qui s’élève au-dessus des chaînes de montagnes enneigées. Le pire souvenir : L’attaque des chiens à vélo, puis l’état d’alerte au moindre aboiement.

On avait entendu parler de ces chiens, mais sur cette route, à l’écart des champs de moutons, on n’avait pas imaginé qu’on se ferait attaquer par des animaux errants. Et dire que sur un forum Internet, on avait lu les conseils d’un érudit qui recommandait de s’arrêter et de s’asseoir en signe de soumission devant ces chiens. Cela devait, on n’en doute pas, les calmer immédiatement… O.

Le plus marquant : Le thé que l’on boit partout, à toute heure. Il est servi dans un petit verre avec soustasse et la théière est composée d’un réservoir pour l’eau chaude en partie basse, surmonté d’un autre plus petit qui contient le thé noir très fort.

Face au Mont Erciyes, 3916 mètres

Page suivante : Les bords du lac de Van.

Dans le prochain numéro : L’OUZBEKISTAN A la découverte de Samarcande et de Tachkent



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