carnet de voyage Ouzbekistan

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SUR LA ROUTE

A nouveau

Numéro 4

Toujours plus à l’Est, notre route nous emmène à la découverte de villes comme Samarcande, Boukhara, dont la simple évocation fait voyager.

Bienvenue en Ouzbékistan !

CES VILLES HISTORIQUES

UNE ROUTE STRATEGIQUE

LE DRAME DE LA MER D’ARAL ENVOYER UN COLIS

www.anouveausurlaroute.fr


Notre parenthèse autour du monde

Claudine ARNAUD, 33 ans, professeur et Olivier BOROT, 30 ans, ingénieur.

Nous avons mis de côté nos situations professionnelles pour partir en février 2009 visiter le monde à pied, à vélo ou en train. Au programme six mois le long de la Route de la Soie jusqu’en Mongolie pour revenir à travers la Russie avec le Transsibérien. Puis départ pour l’Afrique sur les routes du sel avant de suivre la Cordillière des Andes en Amérique du Sud. Ensuite cap sur l’Asie du Sud-Est…

Avec La Ligue contre le Cancer

Touché par le cancer en 2007, notre voyage c’est aussi apporter notre soutien à La Ligue contre le Cancer : en vous inscrivant, vous donnez 5 € au comité des Alpes Maritimes. Grâce au soutien du Conseil général des Alpes Maritimes qui participe au financement de notre projet, notre carnet de voyage est diffusé dans plusieurs centres de soins et dans les comités départementaux de la Ligue contre le Cancer. Puisse-t-il être un bol d’air pour ceux qui en ont besoin...

Si notre aventure vous intéresse, vous pouvez nous soutenir et recevoir notre carnet de voyage tous les mois. Indiquez sur papier libre vos coordonnées en précisant si vous souhaitez la version papier ou la version mail et envoyez vos dons par chèque à :

Association A nouveau sur la route 46, avenue de la République 01630 St Genis-Pouilly

Ou bien téléchargez notre bulletin d’inscription sur notre site : www.anouveausurlaroute.fr

Ce journal est imprimé sur papier recyclé


R

épublique de l’ex-URSS, ce pays, carrefour d’échanges sur la route de la Soie, est aujourd’hui très métissé. La langue officielle est l’Ouzbek, mais beaucoup d’habitants parlent russe et de nombreux dialectes. La plupart ont les yeux bridés et leur visage se rapproche davantage de celui des Coréens ou des Mongoles que de celui des Russes.

Avant de partir visiter l’ouest du pays et ses villes mythiques, nous avons dû passer une semaine à Tachkent, la capitale, pour obtenir nos visas pour les pays suivants. Il a fallu s’armer de patience car nous avons découvert certains traits de caractère marquants des Ouzbeks : s’imposer sans gène et se lamenter lourdement pour arriver à ses fins.

Puis nous sommes remontés sur nos vélos pour rejoindre Andijan puis la frontière kirghize. Découvrant ainsi la vie dans les campagnes, nous avons constaté l’importance de la culture du coton, imposée préalablement par Moscou, au détriment d’autres plantations, notamment maraîchères. Conséquence directe : une chemise coûte le même prix qu’un kilo de pommes !

Moynaq O

Noukous O

O

Khiva

Kamchik Boukhara O

Andijan

Samarcande O

O


Ces villes mythiques

L

a route de la Soie. Ou plutôt les routes de la Soie. Il y a en effet plusieurs itinéraires, plusieurs points de départ et plusieurs destinations mais immanquablement, ces routes passent par des carrefours incontournables que nous découvrons au fil de notre périple. Nous avons laissé nos vélos à Tachkent pour partir plus à l’ouest, visiter pendant quelques jours les trois villes les plus célèbres du pays.

Les murailles de Khiva Située au milieu du désert du Karakoum, la ville fortifiée de Khiva était connue pour son marché aux esclaves et pour la férocité des Khan qui l’ont administrée au cours des siècles. Nous sommes tombés sous le charme de la cité et pendant plusieurs jours nous avons arpenté les rues pavées de la vieille ville au milieu des anciennes madrasas (écoles coraniques) et des mosquées superbement décorées.

Les monuments de Boukhara Nous avons ensuite pris la direction de Boukhara. La ville fut au Xème siècle le centre culturel et religieux de l’Asie Centrale. Malheureusement elle fut maintes fois envahie au cours des siècles, chaque nouveau maître des lieux se faisant un devoir de raser proprement la ville. Le plus vieux monument de la cité est le minaret Kalon construit en 1127. Cette tour de 47 mètres de haut a réussi à échapper aux tremblements de terre et aurait tellement impressionné le terrible Gengis Khan qu’il aurait décidé de Samarcande et le portail de la madrasa Chir Dor orné de lions, brisant l’interdit islamique de la représentation d’animaux vivants.


l’épargner. La ville est aujourd’hui un des meilleurs endroits du pays pour acheter des objets d’artisanat et des tapis. Si les « tour-operators » le savent, les vendeurs aussi et les prix sont du coup franchement élevés.

Les coupoles de Samarcande Enfin, nous avons rejoint Samarcande. Cette ville légendaire, décrite par tant de voyageurs et d’aventuriers, évoque à elle seule la Route de la Soie. La ville fut fondée au Vème siècle avant J.-C. et occupait une position clé au carrefour des routes de la Chine, de l’Inde et de la Perse. Les monuments que l’on peut observer sont eux bien plus récents puisque la ville a elle aussi été

C’est dans la ville fortifiée de Khiva que naquit vers 780 avant J.-C. le scientifique et mathématicien Al Khwarismi, qui donna son nom à Algorithme et Algèbre

détruite plusieurs fois. Nous nous sommes plongés dans son gigantesque bazar et nous avons admiré les coupoles et les minarets de la place du Registan. O.

Boukhara,ses madrasas et le minaret Kalon à droite.


Kamchik : une passe stratégique

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assaporte ! Le ton est sans équivoque. Les fusils viennent nous le confirmer, on ne plaisante pas ici. Ils sont quatre militaires, armés jusqu’aux dents et ils gardent l’entrée du tunnel en haut de la passe de Kamchik. Par radio, le préposé à l’examen des passeports rend des comptes à un officier. Il examine toutes les pages et bloque sur le visa Mauritanien de Claudine qui est écrit en arabe. Si les militaires sont si pointilleux, c’est que la zone est stratégique.

Les attaques terrotistes Il y a moins de 10 ans, les attaques terroristes faisaient rage dans ce secteur. Des Moudjahidines entraînés en Afghanistan attaquaient depuis les montagnes tadjiques toutes proches cette unique route qui relie la vallée du Fergana au reste du territoire Ouzbek. Etrange découpage des pays que cette bande de terre. A 30 km au nord c’est le Kazakhstan. A 20 km au sud c’est le Tadjikistan. A l’est, la vallée du Fergana et la ville d’Andijan sont des fiefs de l’extrémisme religieux en Ouzbékistan. En 2005, le gouvernement ordonna une répression sanglante, pour ne pas dire un massacre, des manifestations de soutien à des leaders religieux emprisonnés. Cet épisode qui a divisé le pays, a jeté un froid dans les relations diplomatiques entre l’Ouzbékistan et les pays occidentaux.

Un mauvais départ Après dix minutes pesantes, l’ordre arrive enfin par radio : « Dabei » Ouf ! Il nous a fallu deux jours pour arriver ici à 2200 m d’altitude et honnêtement on n’avait aucune envie de redescendre. L’ascension avait d’ailleurs plutôt mal commencé. Hier matin, 9 mai 2009, nous nous sommes levés en même temps que notre hôte, à l’aube, c'est-àdire à 4h30 du matin. Pendant qu’il nourrissait ses bêtes nous avons chargé nos vélos et après un petitdéjeuner pris avec toute sa famille nous allions partir quand j’ai constaté que le timon de ma remorque était complètement fendu. Nous avons laissé nos vélos, pris la remorque et arrêté une voiture qui nous a ramenés dix kilomètres en arrière jusqu’à la ville d’Angren. Là-bas nous avons trouvé un garage auto Au petit matin devant chez Hassan, un paysan tadjik qui nous a ouvert sa porte pour la nuit.


ouvert et le garagiste a fait venir un soudeur en congé (jour férié oblige) pour réparer ma remorque. A l’aide d’un vieux tube en acier récupéré sur un tas de ferraille, après deux heures de travail et grâce au talent de Mehjad le soudeur, ma remorque était comme neuve. Une réparation qui nous aura coûté 5 euros. Nous avons ensuite récupéré nos vélos et nous avons pu donner le premier coup de pédale à 11h du matin.

Une halte au pied du col Avec ce retard, nous n’avons pas pu franchir la passe de Kamchik dans la journée et nous avons fait étape dans un restaurant ou plutôt une cantine du

Quatre contrôles en moins d’un km La suite, et bien, c’est du sport. Quatre heures de montée pour arriver devant le bidasse, enfin le premier. Quatreheures et cinq minutes pour arriver devant le deuxième à la sortie du tunnel : « Passaporte ! » C’est une blague ? Non, nouveau contrôle minutieux de nos deux passeports, nouveau message radio et « Dabei » jusqu’au contrôle suivant 500 mètres plus loin à l’entrée du deuxième tunnel. A la sortie, vous l’aurez deviné, nouveau contrôle. Différent celui-là, pas de radio et le bidasse qui tient dans sa main nos deux passeports m’entraîne à l’écart de la route derrière une construction désaffectée pour me demander quelle est la monnaie en France et m’expliquer qu’il aimerait bien en contempler de près… Comme je n’ai pas d’euros, c’est délesté de 2000 SUM Ouzbek soit un euro que nous entamons enfin la longue descente qui va nous mener jusqu’à la ville de Kokand 80 km plus loin et 2000 m plus bas.

O.

Nuit sur les “banquettes” surélevées d’une Chaykhana, au pied du col.

bord de route. Là-bas, les hôteliers nous ont restaurés et hébergés gratuitement. Nous avons même signé un autographe à un client épaté par notre épopée (on en a un petit peu rajouté puisqu’on a prétendu être venus de France à vélo…). Au petit matin nous avons été réveillés en sursaut par deux clients affamés qui ont enfoncé la porte du restaurant pourtant fermée à clef. Ca n’a pas semblé émouvoir le patron qui est sorti de la pièce voisine, les a servis, puis est retourné se coucher !

Est-ce que vous avez déjà ...

... vu un sourire si rayonnant ?

Symbole de richesse, hommes et femmes se font poser dès que possible des dents en or. Pour avoir ce sourire éclatant, certains Ouzbeks ne soignent pas leurs carries, même sur les incisives !


Un colis hors du temps

N

ous avions un colis à envoyer pour faire parvenir des souvenirs à nos proches. En arrivant à la Poste Centrale de Tachkent, j’entre dans une salle immense tout droit sortie d’un film en noir et blanc. Tout autour de la pièce les comptoirs sont en bois. Quelques tables et des chaises occupent le reste de l’espace. Des gens font la queue à tous les guichets. Je n’ai pas de mal à trouver celui qui me concerne puisque les écriteaux sont en ouzbek, en russe et en français !

Les impressions d’Olivier

Le meilleur souvenir : Les couchers de soleil en haut des murailles de Khiva.

Le pire souvenir : L’obtention des visas. Un parcours du combattant où il a fallu jouer des coudes et s’accrocher aux grilles des consulats pour arriver à nos fins...

Le plus marquant : L’hospitalité dans la vallée du Fergana. Pour réussir à planter la tente, il fallait résister à toutes les propositions des villageois qui venaient, les uns après les autres, nous inviter à dormir chez eux. Une fois convaincus, et avant de se

Comme dans chaque administration ici, il faut savoir jouer des coudes pour que personne ne vous prenne votre place. Quand vient mon tour, je donne mon colis en échange de quatre papiers jaunis que la guichetière me demande d’aller remplir sur une table. Je dois y mentionner les coordonnées du destinataire et détailler scrupuleusement son contenu en mentionnant le poids et la valeur de chaque objet. La guichetière entre alors les informations du document sur son ordinateur puis prend un marqueur noir pour écrire sur un paquet. Mon paquet ? Oui ! Je ne le reconnaissais pas : il est à présent dans une toile de jute beige cousue transformer en spectateurs attentifs de nos activités, ils nous offraient souvent des fruits, du pain ou du lait. A chaque nouvel arrivant, l’assemblée racontait notre parcours, et celui-ci s’empressait de nous photographier avant de transmettre à son tour l’information à toutes ses connaissances par téléphone.


à la dimension de mon colis. A l’aide d’une sorte de pinceau trempé dans une cire noire, elle enduit certaines coutures puis les marque d’un sceau. Je n’ai jamais vu ça ! Au milieu de cette salle immense baignée d’une odeur de cire je vois partir ce paquet et imagine déjà les yeux émerveillés de mon neveu Arthur ouvrant la boîte aux lettres sur ce colis d’un autre temps...

C.

Les impressions de Claudine

Le meilleur souvenir : L a sérénité du couchant, dans la ville fortifiée de Khiva. Le lieu était si calme et reposant que nous avons prolongé notre séjour dans un hôtel au pied des murailles.

Le pire souvenir : L’état des toilettes. Plus de détails ci-dessous.

Le plus marquant : La conduite en voiture. Les Ouzbeks roulent très vite sur des routes en mauvais état et klaxonnent tout le temps, sans énervement, juste pour se signaler et tout est permis pour se dépasser.

Les toilettes

Demander les toilettes dans un restaurant ne doit se faire qu’en cas d’urgence. Si vous souhaitez uniquement vous laver les mains, des lavabos sont à disposition au milieu de chaque salle de restaurant. Le plus souvent sans savon vous pourrez au moins vous rincer les mains. Si vous avez impérativement besoin des toilettes, vous serez conduit dans un endroit plus ou moins proche du restaurant. Ce sera souvent une cabane qui ne ferme pas et qui se repère très vite à l’odeur. Le sol est au mieux couvert de boue et il faut s’accroupir dans le noir au-dessus d’un trou. Un soir en demandant les toilettes, une serveuse m’a fait traverser les cuisines pour m’emmener à un cabanon. Pas de lumière, ni autour, ni à l’intérieur, mais finalement, il ne valait mieux pas… Je suis entrée ne sachant ni où je mettais les pieds, ni où le trou se trouvait. Comme je ne souhaitais pas m’aventurer trop loin dans le noir, je me suis accroupie à l’entrée, tirant la porte pour ne pas être vue. Dans ce lieu silencieux, je n’entendais plus le rat que j’avais aperçu courir sur un tas de terre lorsque j’avais rejoint le cabanon… M’habituant progressivement à l’obscurité, je détournais le regard et préférais par une fente entrevoir la serveuse qui m’attendait. Il y a certains moments où il vaut mieux se contenter de deviner plutôt que de voir avec certitude… C.


RECETTE

Le Plov

L

Plat national ouzbek Pour 4 personnes

Ingrédients : 5 grosses carottes 2 verres de riz 1 verre de crème fraîche liquide 2 gousses d’ail 1 oignon jaune 1 pomme de terre 2 tomates Une douzaine de dés de viande de mouton préalablement grillées aver et éplucher la pomme de terre et les carottes. Puis les couper en bâtonnets très

fins. Les mettre dans une casserole hors du feu puis y verser la crème fraîche et mélanger. Y ajouter oignons et ail coupés en morceaux et deux verres d’eau. Saler et faire chauffer. Lorsque l’eau bout, ajouter le riz. Couvrir et

laisser cuire pendant 15 min. En fin de cuisson, préparer les assiettes contenant ce riz et quelques dés de viande.

C’est une cuisson Pilaf : la quantité d’eau et le temps de cuisson dépendent du type de riz choisi, donc il est préférable de se baser sur le volume d’eau et la durée indiqués sur le paquet de riz

VIE QUOTIDIENNE

Prix d’un thé : 0,10 € Prix d’un ½ litre de bière : 0,80 € Prix d’un soda : 0,20 € Prix d’un pain : 0,25 € Prix d’une course en taxi : 1,5 € Prix d’un plat au restaurant : 2 € Prix d’un kilo de pommes ou d’une chemise : 3 €

La recette du Plov est celle de Malika institutrice à 30 km d’Andijan, ici en bleu avec sa famille.


La Mer d’Aral : un désastre

A

Les photos satellites de 2004 et 2007 sont éloquantes...

cheval entre l’Ouzbékistan et le Kazakhstan, la mer d’Aral est en train de s’assécher. En 1960 l’URSS a souhaité développer la culture du coton et les deux principaux fleuves alimentant cette mer fermée ont été détournés pour l’irrigation.

Les conséquences sont dramatiques : la mer disparaît peu à peu et l’eau devient de plus en plus salée (de 10 mg/L en 1960 à 44 mg/L en 2007) ce qui a tué quasiment toute forme de vie. C’était le quatrième plus grand lac du monde par sa taille, mais de 1960 à 2007 sa superficie a été divisée par 2,7 et son volume par 5. Et cette décroissance ne fait que s’accélérer ces dernières années.

Nous nous sommes rendus à Moynaq, ancien port de pêche au nord de Noukous : aujourd’hui la mer s’est retirée à environ 200 km et la manufacture de pêche a dû

fermer ses portes en 1979 : 10 000 personnes ont perdu leur emploi. Les habitants les plus aisés ont pu partir chercher du travail à Tachkent ou au Kazakhstan, les autres sont restés dans cette villefantôme. C’est une catastrophe humaine et écologique inimaginable : ici et sur plusieurs centaines de kilomètres, les nappes phréatiques sont salées… Ce qui provoque de gros problèmes de santé et les enfants du village se battaient pour boire notre bouteille d’eau de source. C.

Ci-contre et page suivante : A Moynaq, ancien port du sud de la Mer d’Aral, le spectacle des bateaux de pêche rouillés est désolant.

Dans le prochain numéro : LE KIRGHIZSTAN

Découverte de ce pays si montagneux, à vélo, à pied, à cheval.



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