Dossier de recherche (L'île aux âmes perdues)

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Dossier de recherche



Dossier de recherche (L’île aux âmes perdues) Mathieu ONUKI

彷 徨 う 魂 の 島

DNSEP 2012 Option communication Mention Éditions d’auteur, médiatisations EESAB-Site de Rennes



Ce dossier est composé de manière à retracer mes recherches et découvertes qui ont inspiré directement ou indirectement mes travaux plastiques présentés dans le mémoire. Il peut donc être parcouru librement en parallèle au mémoire ou comme un document autonome. Cette recherche est construite de manière chronologique, elle couvre non seulement mes années aux Beaux-Arts mais aussi mes connaissances et mes expériences. Ce dossier est très fortement lié à l’histoire du Japon, car c’est son assimilation et sa confrontation à mes connaissances antérieures qui sont le fruit de ma création. Il était pour moi indispensable de connaître le passé pour pouvoir parler du présent et produire des travaux cohérents dans une continuité historique. Ce dossier est composé d’une première partie traitant de mon choc culturel en arrivant en France, celui-ci m’ayant permis de construire un regard critique par rapport à la société japonaise dans laquelle j’ai été bercé. Cette partie traite de ma recherche et de ma réflexion sur le conditionnement. La deuxième partie est consacrée à l’étude historique, culturelle et politique du Japon, depuis la bombe atomique de Hiroshima en 1945 jusqu’aux années 70. La troisième partie aborde la question du Japon contemporain, celui dans lequel je suis né et dans lequel j’ai vécu. Cette partie se construira dans la continuité de la deuxième et s’appuiera sur ces recherches pour comprendre la situation du Japon actuel.


Questionnement sur la société de consommation, le conditionnement et sa mise en perspective avec la société japonaise du XX/XXIe siècle.

I. Qu’est ce que la société du conditionnement, quels sont les effets sur l’être humain, quelle est sa place aujourd’hui ? -Les differents styles de conditionnements -Étude menée par Pavlov -Relations avec l’art contemporain

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II. Sous quel oeil pouvons nous voir la société japonaise post-seconde guerre mondiale ? Qu’a provoqué cet événement dans la culture du pays, dans ses fondements historiques et religieux ?

Le point de départ : la bombe atomique Témoignages Gembaku-Bungaku Créations dans le domaine artistique et cinématographique

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Les conséquences de la transformation brusque de la société japonaise. Américanisation et capitalisme Le Shintô et le Shintô d’état (le conditionnement des enfants) Discours d’humanité de l’empereur Changement de la constitution Faculté d’adaptation des Japonais Shintô et consommation

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Le contre-courant face à l’édification de ce nouveau Japon capitaliste Le butô ou comment danser après l’apocalypse ? Émeutes d’extrême gauche japonaise des année 60 et 70, Armée rouge japonaise (Nihon sekigun) Extrême droite japonaise, nationalisme extrême

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III. Quel sont les effets sur la société d’aujourd’hui et de demain ? (Les neo-japonais, et les problèmes sociaux dans une société sans pitié.) Sacrifices et champ de bataille, le reste d’un esprit de samouraï? Les licenciés Burnout et karoshi Le suicide

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Ijimé Hikikomori

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La société chez les jeunes et dans les écoles

En réaction à une société qui ne leur correspond plus, Déconnexion et recherche de croyances.

Otaku 42-43 La tétévision 43-44 Underground 45 Miyazaki 45 Les sectes en pleine expansion 46-47

Rébellion : recherche d’un autre Japon

Une jeunesse perdue

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Tokyo de demain, une perte de foi en l’avenir

Synthèse

Glossaire Bibliographie Filmographie Webographie

Imaginaire de l’apocalypse à travers le manga 11.03.11

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Qu’est ce que la société du conditionnement, quels sont les effets sur l’être humain, quelle est sa place aujourd’hui?

Différents styles de conditionnements De nombreux sujets sont apparus dès lors que j’ai commencé mes recherches sur la dictature, la publicité, la culture, l’histoire, la psychologie etc ... mais au final tout était conditionnement, car c’est ce qui forme tout humain à construire sa psychologie et une partie de son instinct. J’ai donc affiné ma recherche et établi trois catégories bien distinctes, tout en essayant d’adopter une démarche plutôt scientifique étayée par mes lectures : Conditionnement naturel Conditionnement sociétal Conditionnement industriel Ces trois parties ont été déterminées afin de bien les distinguer et les étudier sous des angles différents. Conditionnement naturel : C’est la découverte du monde dans lequel nous vivons à travers nos cinq sens. Dès la naissance, nous portons les objets à la bouche ou nous cognons les matières entre elles afin d’en obtenir des informations. La forme, le goût, la texture, la résistance, la température, l’aspérité, la couleur, le poids, l’odeur, le son… toute ces informations permettent de créer un classement avec des catégories pour distinguer chaque matériau. Nous nous créons nos repères grâce à ce classement et nous analysons les espaces. Le monde est codé et ce sont nos sens et notre conscience qui nous permettent de le découvrir. Nous prenons peu à peu conscience de notre existence à travers celle des autres en commençant par la présence maternelle. C’est là le fondement de notre être. Il existe une deuxième forme de conditionnement naturel qui est plus basée sur la notion d’instinct et fait appel à des racines animales enfouies en nous. Cela peut générer des réactions et des intuitions dictées par un soi intérieur, voire peut-être inscrit au fond de nous tel un code génétique. Je suis donc parti du nouveau-né qui était pour moi le point 0 (même s’ il a déjà été influencé par les sons corporels de sa mère et des sons extérieurs). C’est à ce moment, jusqu’à l’âge d’environ quatre ans, qu’il est le plus influençable. J’ai pu découvrir des romans tels que Le Meilleur des Mondes écrit par Aldous Huxley, qui traite de ce sujet à travers la manipulation par l’image, le son et la sensation des

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enfants. Dans L’orange mécanique de Anthony Burgess (ou l’adaptation cinématographique par Stanley Kubrick), le protagoniste est conditionné pour réagir de manière négative à la violence et au sexe.

Stanley Kubrick, Orange mécanique , 1971

Conditionnement sociétal : Ce domaine traite d’une grande partie de notre conditionnement. Une fois après avoir pris conscience de soi et des autres humains, il s’établit des liens et des rapports. C’est à ce moment que l’homme apprend à communiquer. Chaque pays possède son code spécifique, sa gestuelle, son intensité vocale, sa langue. Mais étrangement, il y a toujours dans les différentes communautés des similitudes qui peuvent se retrouver ou se rapprocher alors que celles-ci n’ont jamais eu à se rencontrer auparavant. Par exemple une attirance ou une croyance envers une force ou un personnage supérieur qu’on appelle divinité, le rapport au son qui peut se traduire sous forme de musique ou le rapport à l’esthétique. Peut-être existe t-il une sorte d’instinct communautaire au sein des sociétés humaines. D’autres connaissances ont pu apparaître avec les différentes études que l’homme a pu mener afin d’approfondir sa connaissance du monde dans lequel il vit. Pour cela il invente des codes qui lui permettent une traduction de son entourage, ce sont les

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sciences. Afin d’acquérir ces connaissances, de les perpétuer et de les approfondir : l’école fut créée. C’est là que les enfants apprennent à communiquer et à vivre en communauté. Ils absorbent et se créent leur culture et leur personnalité. L’éducation est le lieu où nous préparons l’avenir. La mentalité est malléable selon l’éducation, c’est ainsi que nous obtenons des sociétés diverses et variées selon l’histoire et la culture du pays. De nos jours, dans les société industrialisées, cette éducation se fait de plus en plus à l’aide de la technologie et la communication de masse. Ceci unifie les connaissances et inhibe la personnalité et l’ individualité. Les romans d’anticipation de la dystopie mettent en avant ces idées de conditionnement et de sociétés ultra contrôlées. Des films tel que THX 1138 (de Georges Lucas en 1971), Bienvenue à Gattaca (de Andrex Niccol en 1997) ou The Island (de Michael Bay en 2005) en ont été fortement inspirés.

Georges Lucas, THX 1138, 1971

Conditionnement industriel : Lorsque le conditionnement est effectué pour manipuler un individu ou un groupe d’individus pour l’inciter à adopter un comportement souhaité, j’ai appelé cela le conditionnement industriel. Cette technique est très développée dans nos sociétés modernes notamment dans la publicité ou la politique.

J’ai choisi de commencer par des réalisations de vidéo car ce médium permet de se connecter avec deux sens simultanément. Les éléments qui m’ont paru importants au départ furent : les formes, les couleurs, le temps, les lettres (mots), les matières, les goûts, la température, les odeurs, etc ... tous ces éléments sont liés entre eux pour former notre

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logique. S’attaquer à la base, à la racine, permet d’éviter le tronc dur et solide. J’ai choisi des éléments universels et fondamentaux pour que chacun puisse être touché. Je me suis particulièrement intéressé aux expériences réalisées par Ivan Pavlov pour comprendre sa théorie sur le mécanisme du conditionnement. Mécanisme simple mais très efficace et qui explique nombre de nos comportements.

Études menées par Pavlov Le conditionnement classique (aussi appelé conditionnement répondant, conditionnement de type I ou conditionnement pavlovien) est un concept du béhaviorisme proposé par Ivan Pavlov au début du xxe siècle. Cette théorie s’intéresse aux résultats d’un apprentissage dû à l’association entre des stimuli de l’environnement et les réactions automatiques de l’organisme.

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L’intérêt originel de ma recherche consistait en la démonstration d’une connaissance logique, qui, approfondie, peut aller jusqu’ à la croyance, pouvant même être la cause de nombreux de nos conflits humains. Le nationalisme, les croyances religieuses, le fanatisme sont ainsi des symptômes du conditionnement. L’ homme a besoin de ces conditionnements pour se situer dans un groupe et il cherche incontestablement à faire accepter ses croyances jusqu’à, pour cela, risquer l’anéantissement des autres.

Relations avec l’art contemporain La communication me semble être la clef d’une nouvelle évolution pour l’homme, c’est son seul moyen de partager sa pensée et de faire accepter sa différence. Le premier problème à combattre est de revaloriser le mot «communication» vers une pensée de partage, et non d’économie, notion en laquelle les gens croient de plus en plus. On fait de moins en moins la distinction entre communication et information. Les affiches, la télévision, la publicité, fonctionnent à sens unique, le regardeur n’ a pas d’autre choix que d’accepter sans répliquer à cette information. Seul le pouvoir économique a la main sur cet engrenage et nous subissons sans interruption, nous consommons massivement et nous jetons. Cette idée a beaucoup été mise en valeur depuis la naissance du Pop Art et la crise économique semble redonner un bon coup de pouce à certains artistes. Chris Jordan et François Seigneur représentent la société contemporaine humaine dans sa consommation massive, et semblent nous dire : «Vous êtes ce que vous consommez et surtout ce que vous jetez».

Chris Jordan, Cell phones #2, Atlanta 2005, 44 x 90

François Seigneur, Des ordres, 2009

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J’ai de même été influencé par des artistes traitant de la surabondance de l’information publicitaire comme Jenny Holzer avec ses bandes de lumières utilisées dans le monde du marché. Ou bien Barbara Kruger qui redonne une autre dimension aux slogans publicitaires en les associant avec des images opposées à la pensée commerciale.

Jenny Holzer, Monument, 2008

L’esthétique que j’ai pu développer dans mes projets est fortement inspirée par ma mémoire visuelle et auditive acquise à Tokyo. La «Communication» y est bien plus agressive qu’en France. Ce n’est que récemment que j’ai pu constater cela. Par exemple à la télévision, la publicité démarre sans prévenir, toutes les 15 minutes. Ces spots durent en moyenne 15 secondes et déploient tous les moyens pour attirer notre attention, s’orientant la plupart du temps vers le ridicule (chants, danses, expressions, déguisements). Dans le bus, métro, train, rue, magasins, où que nous soyons, nous sommes soumis à la publicité. Dans les magasins et dans la rue, des employés crient dans des mégaphones jusqu’à saturation, des phrases en boucle qu’ils répètent toute la journée (le mot d’ordre du patron étant : «crie plus fort que celui d’en face, qu’il y ait des clients ou pas, sans interruption.») Une fois la nuit tombée, les lumières s’allument, brillent, clignotent et défilent dans tous les sens.

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Je voulais que mon travail sur le conditionnement puisse révéler une sorte de bug, une désorientation ou plus précisément un déconditionnement dans un système extrêmement contrôlé et maîtrisé.

Barbara Kruger, Untitled (I shop therefore I am), 1987

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Sous quel oeil pouvons nous voir la société japonaise post seconde Guerre mondiale? Qu’a provoqué cet événement sur la culture du pays, ses fondements historiques et religieux, qu’ a-t-elle bouleversé?

Point de départ : la bombe atomique. Parallèlement et en écho à mes recherches sur le conditionnement, j’ai réalisé un travail sur mon identité. Ce travail accompagne mes questionnements sur la multiculture et multinationnalité à travers mon expérience et mes préférences artistiques. Je me suis intéressé pour cela à la seconde Guerre mondiale, qui n’est qu’une partie de l’Histoire du Japon mais qui a bouleversé toute sa culture et son idéologie. Pour affiner ma recherche, je me suis concentré sur la bombe atomique lancée sur Hiroshima, qui est selon moi l’instant même du basculement de ce pays dans sa destruction. La défaite du pays lors de cette guerre a détruit le territoire, ses barrières ainsi que la pensée de ce peuple, qui a dû se reconstruire sur de nouvelles bases, notamment par l’assimilation des cultures extérieures. La première des cultures à s’installer au Japon après la seconde Guerre mondiale fut celle des Américains. Ces derniers désiraient réorganiser une nouvelle société que les Japonais allaient adopter pour pouvoir se relever et se reconstruire : c’est une société basée sur l’économie où les barrières avec l’étranger tombent. J’ai pris une certaine distance en vivant ici en France et je souhaite désormais pouvoir voir clairement l’évolution de ce pays depuis sa défaite jusqu’au Japon contemporain. Je souligne plusieurs éléments sociaux et culturels, notamment artistiques (cinéma, manga, danse, télévision) pour essayer de faire ressortir les plaies et les cicatrices de ce pays. C’est le désir de comprendre et de connaître cette société où j’ai grandi qui me pousse dans ces recherches. Cette démarche me semble être indispensable pour me permettre de créer et de m’exprimer. Ce dossier contient donc des clefs de lecture indispensables à la compréhension de certains de mes travaux.

Témoignages Durant une première phase, je me suis concentré sur l’événement de la bombe atomique à Hiroshima et à Nagasaki. J’ ai découvert cet événement apocalyptique à travers différents films, témoignages, dessins et restes d’objets, architectures qui ont mémorisé cet instant précis. La lecture de ces différents témoignages a fait naître en moi des images cauchemardesques. J’ai donc essayé de laisser une trace de mon interprétation de ces différentes informations sous forme de dessins afin de me les approprier. Durant cette phase je ne cessais de me poser des questions liées à la vie et à la mort, au corps et à l’esprit. Comment imaginer la disparition de milliers de vies en une fraction de seconde ? Comment voir le monde après avoir vu et vécu cet événement ?

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Gembaku-bungaku Un nouveau genre littéraire appelé Gembaku-Bungaku (littérature de la bombe atomique) est né au Japon suite à ces événements de 1945. Chacun des récits a pu m’apporter des nouveaux champs de vision dans ce paysage de ruine, chaque auteur a pu en témoigner selon son point de vue. Tous les écrivains du Genbaku bungaku décrivent l’instant du cauchemar mais certains se concentrent sur l’instant où la bombe explose en nous décrivant les horreurs durant les quelques mois qui suivent, d’autres nous racontent la vie des irradiés «les Hibakusha» dans la société japonaise d’après guerre. Au départ, je me suis surtout concentré sur la description du désastre, avec des écrivains tels que Masuji Ibuse, auteur de Pluie Noire, Tamiki Hara auteur de Hiroshima fleur d’été, ou enfin Keiji Nakazawa auteur de J’avais six ans à Hiroshima, le 6 août 1945, 8h15. Ce dernier l’adaptera en manga sous le nom de Gen d’Hiroshima. En lisant ces récits, de nombreux événements m’ont marqué et m’ont inspiré. Par exemple le flash lumineux, les ombres gravées sur les murs, les cheveux qui tombent par poignées, les odeurs de chair brûlée, les corps qui se courbent dans les flammes, la peau qui pend au bout des doigts comme si les gens étaient dépecés vivants, les bouts de verre plantés partout dans le corps, les corps déchiquetés et éparpillés, les gens brûlés vivant sous les décombres, les cris, les yeux qui coulent des orbites, les saignements des gencives, les vomissements, les mères portant leurs enfants inanimés serrés contre leurs corps, les victimes marchant les unes après les autres avec les bras tendus et traînant des pieds, la masse de fumée qui plongea la ville dans la pénombre, la pluie noire concentrée de radiations, les victimes qui se ruent pour boire cette eau, les amas de cadavres ...

Créations dans le domaine artistique et cinématographique Suite à tous ces témoignages, je me suis intéressé à l’impact que cet événement a pu avoir sur les artistes japonais. Étrangement, peu d’artistes ont traité ce sujet, comme si tout le peuple japonais ne voulait pas se rappeler de ce cauchemar. Il faut savoir que beaucoup de témoignages étaient censurés, les images étaient contrôlées par les Américains comme s’ ils ne voulaient pas révéler l’horreur qu’ils avaient commise. C’est surtout dans

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le cinéma et dans le film documentaire que j’ai retrouvé des productions, notamment avec des réalisateurs tels que Akira Kurosawa, qui a vécu dans un Japon dévasté, puis moderne et reconstruit. Chaque réalisateur traite un même sujet sous différentes formes avec des volontés très diverses. Ils traitent de la vision apocalyptique juste après l’explosion, de la souffrance physique causée par la bombe, des conséquences de l’irradiation, de la vie des hibakushas dans la société, des transformations causées par la destruction, de la frayeur de la bombe, des traces laissées dans notre monde contemporain.

Akira Kurosawa, Vivre dans la peur, 1955

Akira Kurosawa, Rhapsodie en Août, 1991

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De nos jours, de moins en moins de créations cinématographiques concernant la bombe atomique au Japon sortent en salle, néanmoins, beaucoup de documentaires ne cessent de paraître. Les Hibakusha sont maintenant reconnus par la société japonaise et manifestent sans relâche pour l’interdiction de la bombe atomique dans le monde. Ils ne cessent de diffuser leurs témoignages en allant d’école en école et une nouvelle vague de jeunesse se tourne vers ce passé afin que cette mémoire soit sauvegardée et transmise avant que tous ces irradiés ne disparaissent. Les artistes contemporains japonais traitant de la bombe atomique sont peu nombreux. Les images les plus connues sont les photographies prises sur le terrain par Yôsuke Yamahata, Yoshito Matsushige, Satsuo Nakata, Eiichi Matsumoto. Par la suite, d’autres photographes ont capturé des images des traces laissées sur les corps et les objets. Shomei Tomatsu est l’un des plus célèbres, il a réalisé une image d’une montre arrêtée à 11h02 ou des portraits de victimes avec leurs corps brûlés.

Yoshito Matsushige, 6 août 1945

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Yôsuke Yamahata, 1945

Eiichi Matsumoto, 1945

Tomatsu Shomei, 11h02 Nagasaki

Tomatsu Shomei

Parmi les artistes peintres il y a le couple Maruki Iri et Toshiko qui ont réalisé quinze panneaux de 7 mètres 50 de long entre 1949 et 1980. Ces tableaux montrent des scènes des souffrances atroces des victimes. Yokoo Tadanori a également réalisé quelques affiches inspirées du bombardement.

Iri Maruki et Toshiko Maruki, Fire, 1950

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Ishiuchi Miyako, photographe, a réalisé en 2007 une série nommée KIZU (plaies, cicatrices) constituée d’ images des vêtements que portaient les hibakusha lors du bombardement. Par ailleurs, la crainte de la bombe atomique a poussé certains artistes à réaliser des sculptures empreintes d’une catastrophe nucléaire mêlant une esthétique organique et électronique (Kudo Tetsumi) ou des sculptures qui représentent des combinaisons hightech pour survivre à une nouvelle bombe atomique (Kenji Yanobe).

Kudo Tetsumi, Portrait d’artiste dans la crise, 1980

Ishiuchi Miyako, Kizu, 2007

Yanobe Kenji, Atom, 1997

Des artistes étrangers ont pu eux aussi s’exprimer face à cet événement ancré dans l’histoire. Par exemple Cai Guo-Qiang avec Black Fireworks: Projet for Hiroshima réalisé en 2008. Ce projet était un lancement de feu d’artifice contenant du fumigène noir qui retraçait dans le ciel au dessus du dôme de Hiroshima une masse noire rappelant le champignon atomique. Le photographe Michel Aguilera a réalisé en 2008 une série de photos semblables à celle de Ishiuchi Miyako, en montrant les vêtements conservés au musée du mémorial de la paix de Hiroshima. «Évoquant l’épaisseur de l’ humain dans sa trace fragile et si personnelle du vêtement, il met en scène l’ individu et son absence, son histoire interrompue, le quotidien de sa vie et la brutalité de sa mort.»1

1. Grégoire Lyon, critique, http://shima-project.fr/

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Cai Guo-Qiang, Black Fireworks: Projet for Hiroshima, 2008

Michel Aguilera, vĂŞtements de Hiroshima, 2008

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Les conséquences de la transformation brusque de la société japonaise, américanisation et capitalisme Le Shintô et le Shintô d’état (conditionnement des enfants)

Les bombes atomiques ont été des événements majeurs dans l’histoire du Japon. Tout s’ est effondré ensuite (même si pour de nombreux Japonais la guerre était déjà perdue). La capitulation du Japon montrait au peuple que la nation n’ était pas toute puissante, n’était ni le centre, ni l’origine du monde car c’est ainsi qu’ ils la concevaient depuis leur plus jeune âge. Le Shintô est au centre des croyances, s’étendant jusqu’ à la création du Japon selon la légende écrite dans le Kojiki (Chronique des faits anciens).

-Discours d’humanité de l’empereur La capitulation devenait inévitable même si le sens du sacrifice marquait le symbole de l’honneur. L’ Empereur lui même s’est adressé pour la première fois au peuple (par radio) pour ordonner la fin de la guerre. « ... Que la nation entière se perpétue comme une seule famille, de génération en génération, toujours ferme dans sa foi en l’ impérissabilité de son sol divin, gardant toujours présents à l’ esprit le lourd fardeau de ses responsabilités et la pensée du long chemin qu’il lui reste à parcourir. Utilisez vos forces pour les consacrer à bâtir l’ avenir. Cultivez les chemins de la droiture, nourrissez la noblesse d’esprit et travaillez avec résolution, de façon à pouvoir rehausser la gloire inhérente de l’ état impérial et vous maintenir à la pointe du progrès dans le monde. »1

1. Edward Behr, Hiro-Hito, L’empereur ambigu, Robert Laffont , 1989

Ce texte semble être une nouvelle voie pour ce Japon détruit, une nouvelle

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marche vers une nouvelle guerre, la guerre économique. J’ai appris récemment lors d’une conférence de Jean-Marc Adolphe (rédacteur en chef du magazine Mouvement) sur le Butô, que ce discours avait été préalablement contrôlé par les Américains. Cela expliquerait que le Japon ait été poussé dans cette voie, en utilisant la figure de l’empereur pour diriger le peuple tout entier. Les Américains avaient conscience que ce personnage était la puissance même du Japon et que celui-ci était la clef pour contrôler ce pays. Les Japonais obéirent aux ordres. Pour nombreux d’ entre eux, l’ interrogation sur le sens du sacrifice resta en suspens. L’effondrement du Japon continua avec une déclaration d’humanité exprimant le renoncement de l’empereur à sa divinité, le premier janvier 1946, cinq mois après la fin de la guerre. L’Empereur enregistrant son discours

Changement de la constitution Toutes les croyances s’ effondrent avec la perte de l’aspect divin de l’Empereur. Au lendemain de la guerre il ne reste qu’ un pays en ruine complètement désorienté. S’ ajoutent à cela l’ emprise et l’ invasion par les américains. Une nouvelle constitution fut créée par une poignée d’ américains dirigés par Douglas MacArthur. Leurs projets était de s’inspirer des différentes constitutions de divers pays pour créer une constitution basée sur la paix. La notion de paix elle même fut donc imposée et est toujours existante de nos jours malgré l’opposition absolue de la partie de l’ extrême droite japonaise. La reconstruction et le rétablissement du Japon fut ficelées et maîtrisées par les Américains. Les Japonais optèrent pour une nouvelle stratégie de combat pour exister en tant que puissance dans le monde : la puissance économique. L’ouverture forcée des frontières du pays et la liaison étroite avec les Américains ont transformé le paysage, la pensée, les goûts, la politique, la culture…

Faculté d’adaptation des Japonais Le Japon a toujours été un pays qui s’est approprié les cultures étrangères pour les transformer et les adapter à ses besoins. Par exemple l’écriture ainsi que les religions découlant du Bouddhisme furent inspirées des Chinois et des Indiens, des plats portugais se sont transformés pour devenir des plats quotidiens, le base

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ball (yakyu) est devenu le sport national, les mots étrangers ont été modifiés par contractions et adoptés dans le langage courant etc. Le Japon ne cesse sa transformation. Le langage courant est rempli de mots anglais, les jeunes générations les utilisent comme faisant partie de leur vocabulaire. C’est seulement à l’écrit que nous nous en rendons compte, car l’écriture n’est pas la même selon l’origine du mot. Leur faculté d’adaptation me semble être l’avenir de nombreuses sociétés à venir, avec la mondialisation, les cultures se mélangent pour former une culture mixte. Ce mélange transforme peu à peu leur mentalités. S’ imprégner d’un vocabulaire signifie s’ imprégner de nouvelles notions. Les Japonais intègrent le vocabulaire étranger dans leur langage mais peu nombreux sont ceux qui maîtrisent une langue étrangère.

Shintô et consommation Une chose est restée ancrée chez tous les Japonais : le comportement et l’éthique qui sont l’essence du peuple construit sur le Shintô, qui avait été déclarée religion d’ état par l’empereur en 1871. «Le plus important est la subordination de l’ individu au groupe, que résume une expression japonaise revenant à dire : «Le clou qui dépasse sera enfoncé à coups de marteau». Selon les spécialistes, cette attitude a pour origine le travail collectif nécessité par la culture du riz, laquelle était encore récemment le principal moyen de subsistance au Japon. Introduite au Japon à la fin du premier millénaire avant notre ère, la culture du riz exige une main-d’oeuvre nombreuse: avant l’arrivée de la mécanisation, chaque plant devait être repiqué manuellement dans le sol. Aujourd’hui encore, les membres d’une famille subordonnent leurs aspirations personnelles au travail collectif afin d’assurer une bonne récolte et, par extension, la survie du groupe. Dès le début, solidarité sociale et absence de revendication individualiste ont caractérisé le Shintô. Au travers des siècles, ce dernier a toujours privilégié la subordination au bien-être de l’unité sociale, que cette unité soit la famille, un village cultivant le riz, un domaine féodal, ou une multinationale moderne. Malgré le discrédit qui affecta le Shintô au début de l’après guerre en raison de ses liens avec le militarisme et l’impérialisme japonais, celuici continue de prospérer et de s’attirer la sympathie, sinon une totale adhésion, de la majorité des Japonais. D’ailleurs, à bien des égards, être Japonais c’ est être Shintô, quelles que soient les autres religions pratiquées.»1

1. C.Scott Littleton, Comprendre les religions : SHINTO, édition Gründ, p.10-11

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L’industrialisation et la société de consommation ont explosé avec l’ américanisation du pays combinée à l’ éthique Shintô, c’est l’ un des pays les plus avancés dans ce gouffre de la consommation. Le mouvement de masse est un point majeur pour le développement d’une société de consommation. Le Japon continue une perpétuelle mutation, il absorbe et  adapte à son modèle. C’ est un pays unique mais cette idéologie de la globalisation ne cesse de s’étendre. Ce pays reste puissant mais très fragile de par son système économique. Ne possédant pas de ressources naturelles, il a misé sur le développement de la technologie et de l’ exportation de ces produits. C’est donc un système qui dépend des autres pays, le Japon ne peut plus s’auto-suffire et s’affaiblit au fur et à mesure qu’il s’enfonce dans la société de consommation. Il se trouve dans une situation où il ne peut plus revenir en arrière, mais face à la vue de cette marche collective vers cet avenir incertain, des personnalités ont émergé de cette masse pour protester .

Le contre courant face à l’édification de ce nouveau Japon

Le butô ou comment danser après l’apocalypse Par rapport à ma vision nourrie de ma double culture, je me suis intéressé à une forme d’expression corporelle appelée butô. Entre danse et mime, le Butô est un des éléments majeurs dans ma recherche, tant dans sa forme d’expression que dans son fond. Le Butô est né à la fin des années 50 avec Tatsumi Hijikata et Kazuo Ono. Suite à la guerre, le Japon détruit va emprunter de nouvelles références et inspirations pour combler ce vide qui s’est créé avec l’effondrement des croyances et de l’esprit nationaliste japonais. Ce geste fut au départ une réaction à une tradition sclérosante des arts vivants japonais.

Hijikata Tatsumi

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Hijikata Tatsumi

«Le projet est de libérer le corps humain du conditionnement social, de revenir à un corps « naturel », vrai, où la danse mette en cause les tabous et révèle les traumatismes de la société d’après-guerre. Danser le butô, c’est dénuder le corps et l’esprit ; c’est agresser le spectateur avec un corps-arme, en rompant avec les schémas connus de la danse. Corps en crise, en opposition à la motricité ordinaire.»1 «Le butô a surgi sur un fond de croissance économique et d’émeutes contre le renouvellement du traité de sécurité nippo-americain, il exprime le malaise d’une société qui a perdu ses valeurs traditionnelles et il s’inscrit dans la rébellion des avant-gardes artistiques du moment.»2

1. Bruno Lecat, Article paru en espagnol dans la revue Tragaluz, año, número 7, avril 2003

2. Odette Aslan, Butô(s), CNRS éditions, 2002, p 24

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Ono Kazuo

Hijikata a su lier et mélanger différentes cultures et expressions artistiques pour créer une nouvelle forme. Le butô s’inspire de toutes les cultures et il est totalement libre dans sa forme, chaque danseur se créé sa propre forme de recherche. Ce qui m’intéresse particulièrement est la mixité des cultures que l’ on peut y trouver tout en rejetant toute forme de code, ce qui mène à une certaine animalité de l’ homme. Il cherche à se libérer des conditionnements pour laisser son corps s’exprimer. Ikeda Carlotta

Daisuke Yoshimoto

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Le Japon contemporain est à l’opposé de l’idéologie engendrée par le butô. Rempli de règles et de contraintes, cette société inhibe l’expressivité. Les jeunes générations ne sont plus touchées par la défaite à la guerre, elles sont nées dans un pays reconstruit à neuf. Néanmoins, les conséquences engendrées s’y manifestent dans toute la culture contemporaine.


Émeutes d’extrême gauche japonaise des année 60 et 70, Armée rouge japonaise (Nihon sekigun) Dans les années 70 est apparu au Japon un groupe nommé Nihon Sekigun (Armée rouge Japonaise ou Japan Red Army). Fondé par Fusako Shigenobu, ce groupe comptait environ quarante membres et une centaine de sympathisants à son apogée. Il représentait l’un des groupes terroristes les plus craints dans le monde. Les objectifs de la JRA était de renverser le gouvernement japonais et sa monarchie parlementaire et de commencer une révolution mondiale. Ce mouvement est dû à de nombreuses réactions face à cette société japonaise en pleine évolution au milieu du boom Izanagi (Izanagi faisant allusion à un dieu Shintô). Il existe un livre écrit par Michel Prazan décrivant en détail les idéologies et les actions menées par la JRA. Dans ce livre, j’ai pu recueillir des réactions de jeunes étudiants expliquant leur craintes de ce monstre économique naissant. Il nous permet de comprendre la situation du Japon à ce moment-là et avec le recul de la comparer avec celle du Japon actuel .

Extrême droite japonaise, nationalisme extrême L’extrême droite au Japon telle que nous la connaissons de nos jours est née à la fin de la seconde guerre mondiale, elle est le fruit de la défaite du Japon et de l’emprise du pouvoir américain. De nombreux militaires ne pouvaient imaginer leur sort et abandonner toutes les idées et les croyances de leur nation. Le basculement brusque du système japonais a créé une montée en force d’une idéologie anti-américaine et ultra-nationaliste. La pensée de l’extrême droite a évolué depuis les années 40, et nous sommes actuellement face à la deuxième génération. Cette génération n’a pas connu le Japon d’avant guerre et a été éduquée par les parents qui idéalisaient l’époque où le Japon imposait sa puissance dans l’Asie.

Kôji Wakamatsu, United red army, 2008

Extrémistes devant le sanctuaire Yasukuni

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Les motivations de la première génération sont les bases enseignées à leurs descendants, nourris par la haine et la crainte de ce nouveau Japon qui perd peu à peu son identité. Les anciens se disent émasculés à cause de l’article numéro 9 de la nouvelle constitution leur interdisant la création d’une armée au Japon. Le Japon a toujours été un pays guerrier, la culture liée à la guerre lui est très chère, de là découle une partie de sa philosophie. Éduqués depuis leur plus jeune âge pour les croyances Shintô avec leur empereur divin, ils refusaient de croire en sa défaite et à sa personnification. Ils continuent à vénérer comme des héros les personnalités jugées comme criminels de guerre lors de la Seconde Guerre mondiale. Dans le documentaire Japon : Le retour de l’extrême droite de Michael Sztanke, Yûko Tôjô, petite fille du Général Tôjô, (jugé criminel de guerre par les alliés) a conservé tous les documents et les objets de son grand père comme pour le vénérer. Le Uyoku dantai est un terme générique qui désigne les groupes japonais ultra-nationalistes. Le Japon est très indulgent envers cette idéologie extrémiste et il laisse librement exprimer les idées des Uyoku en public à travers des discours au mégaphone dans le centre ville ou par des moyens de communication de masse. Ils sont redoutés par la population car ils sont connus pour leur violence et leur endoctrinement. Ils sont très facilement reconnaissables avec leurs véhicules (voitures, fourgonnettes, bus) repeints entièrement en noir avec des gros caractères calligraphiés en blanc. Ils utilisent des symboles imposants tels que le drapeau de la marine japonaise utilisé lors de la seconde guerre mondiale ou le chrysanthème, symbole de l’empereur. Ils sont vêtus d’une combinaison noire brodée de caractères avec des significations nationalistes. Ces militants ont été témoins de la transformation de leur territoire et de leur culture. Ils craignent une perte totale de leur identité et rêvent d’un Japon nouveau sur le modèle ancien, gouverné par l’empereur divin. Chaque année, les médias les citent lors de l’approche de la date anniversaire de la capitulation du Japon. Ils se rassemblent au Sanctuaire de Yasukuni où reposent les 14 corps des criminels de guerre dont Tôjô.

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Quel sont les effets sur la société d’aujourd’hui et de demain ? (Les neo-japonais et les problèmes sociaux dans une société sans pitié)

Motoro Mase, Ikigami, 2005

Sacrifices et champ de bataille, le reste d’un esprit de samouraï? Les licenciés Il existe au Japon des problèmes sociaux très importants. Le licenciement est l’une des plus grosses sources de crainte pour les Japonais car il est synonyme de défaite et de déshonneur. Malheureusement la récession due aux multiples crises économiques depuis les années 90 a multiplié les licenciés qui se sont retrouvés à la rue après 30 ou 40 ans de travail intensif. Au Japon, les personnes au-delà de 40 ans ont beaucoup de mal à trouver un nouvel emploi car les entreprises préfèrent embaucher des jeunes pleins d’énergie à bas prix. Les plus âgés n’ont ni la force ni le courage de manifester, ils se retrouvent souvent seuls ne trouvant pas de travail fixe. Le travail est l’activité la plus importante dans ce pays, c’est d’ailleurs souvent le premier sujet de discussion qui permet de connaître et de déterminer le statut de l’interlocuteur. Perdre son travail est synonyme de perdre son statut en tant que Japonais. Les entreprises ne peuvent exercer un licenciement sans justification, la plupart du temps il est lié à la crise économique mais il peut également être dû au manque de travail ou pour remplacer un personnel épuisé. Lorsque le problème provient d’un manque budgétaire, le licenciement se fait de manière très directe, mais lorsque celui-ci ne trouve pas de raison valable au yeux de la justice, les entreprises peuvent employer des moyens très cruels afin de mettre à bout l’employé et qu’il démissionne par lui-même ou qu’il ne soit plus capable de travailler. On les couvre de travail impossible à finir, on les ignore et on les critique. Tous les gestes, tous les regards et toutes les paroles poussent à la dépression. Cette brimade est parfois réalisée de manière très organisée, dans les grandes entreprises, l’objectif premier d’un employé est de réaliser son travail à la perfection afin de monter en grade, il n’est donc pas rare que les brimades soient réalisées en groupe. Il existe au Japon une notion majeure qui régit les pouvoirs entre les individus, cette notion est appelée «Sempai/Kohai», et est enseignée dès le plus jeune âge à l’école. Le Japon est le pays du travail, le travail est le plus important, les Japonais se battent dès leur plus jeune âge pour gagner un bon poste dans une grande entreprise. L’homme, différent de la machine, peut subir des séquelles très importantes à cause du surmenage. Le phénomène nommé Burnout touche de plus en plus de Japonais.

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Burnout et Karoshi Le Burnout (ou syndrome d’épuisement professionnel) est une sorte de maladie psychologique liée au surmenage et au stress chronique. La pression, la fatigue et le manque de plaisir ôtent à ces individus la motivation et l’ambition. Cette maladie est de plus en plus fréquente dans les pays basés sur un système capitaliste. Au Japon cette maladie frappe de nombreux salariés, des plus jeunes aux plus âgés et ces gens ne sont pris en charge ni par les entreprises ni par la société. Ils sont délaissés tels des déchets, vidés de leur énergie productrice. Au Japon, une nouvelle appellation est à la mode depuis les année 90, le «Karoshi» (Mort subite par excès de travail). Cette mort frappe environ 10000 personnes chaque année et ne cesse d’augmenter. Cette mort subite touche non seulement les personnes au-delà de 40 ans mais aussi des jeunes dès 20 ans. Le gouvernement a annoncé qu’il était dangereux de travailler au-delà de 80 heures de travail supplémentaires par mois, mais nombreux sont ceux qui dépassent cette limite et finissent par y perdre la vie. Cette mort est souvent causée par un infarctus ou une apoplexie. Cet acharnement des Japonais au travail est maintenant une part de leur culture et de leur mentalité, mais il est aussi le symptôme d’une société malade où les citoyens sont en perpétuelle recherche d’un bonheur qui leur a été enseigné. Ce bonheur est lié à la satisfaction procurée par la reconnaissance. L’accomplissement du devoir est la raison même de leur existence. Ainsi ils s’acharnent en se sacrifiant pour l’économie de leur pays. Motoro Mase, Ikigami, 2005

Makoto Aida, The Ash Color Mountain(Détail), 2008

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Voici deux artistes contemporains qui illustrent cette condition de vie au sein de la société japonaise.

Makoto Aida, The Ash Color Mountain, 2008


Tetsuya Ishida, Sermon, 1997

Tetsuya Ishida, Supermarket, 1997

Tetsuya Ishida, 2001

Le suicide Chaque année, plus de 30 000 Japonais se donnent la mort, ce qui équivaut à presque une centaine de suicides chaque jour. Cet acte représente l’un des fléaux majeurs de la société japonaise contemporaine. Le suicide fait partie intégrante de le la culture et de l’Histoire du Japon, mais ce sacrifice dans les temps modernes est loin de l’idéologie patriotique ou religieuse qu’à connue ce pays. Dans la tradition, le suicide par Harakiri ou Seppuku représentait une façon de se repentir d’un péché impardonnable ou pour se laver d’un échec personnel. Ce geste vient du XII e siècle et se pratiquait dans la classe des samouraïs. C’est lors de la Seconde Guerre mondiale que le sacrifice humain a connu une grande renommée par les

Kunikazu Utagawa, Seppuku, 1850-1860

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Yukio Mishima, Yûkoku, 1966

Daikyōdō Ohashi, Seppuku, 1869

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Kamikazé (vent divin) et cet acte fut accepté comme un prestige héroïque par la population nippone. Yukio Mishima (de son vrai nom Kimitake Hiraoka) connu dans le monde pour son talent d’écrivain est également célèbre pour sa passion et son engagement pour le patriotisme japonais. Dans cette passion, il honore particulièrement le culte du suicide par Harakiri, qui est pour lui signe de dévouement et de sacrifice pour sa patrie. Dans l’entretien entre Mishima et Jean Claude Courdy filmé en 1966, Mishima dit «qu’il existe deux suicides au Japon, celui des faibles, des vaincus, et celui des forts, des courageux». Son engagement le suit jusqu’à la fin de sa vie, où, le matin du 25 novembre 1970, il fait une tentative de coup d’état en prenant en otage le général commandant en chef des forces d’autodéfense et fait convoquer les troupes en bas du bâtiment. Du balcon il leur tient alors un discours réclamant la mobilisation des forces en présence pour la restauration du Japon traditionnel et de l’empereur. La réaction des 800 soldats est vite hostile. Devant les huées, il se retire. Suivant le rituel, Mishima se donne la mort par Seppuku au sein même du quartier général d’autodéfense, la mort honorable entraînant avec lui la mort de son Japon traditionnel. C’est le dernier cas célèbre de Seppuku. Depuis, la culture du suicide a connu un grand bouleversement, car elle n’est plus un symbole d’honneur mais d’abandon. Le suicidé n’est plus maître de son acte mais une victime de la société. Il représente une forme de sacrifice des temps modernes au nom de la progression et de l’économie. Le fléau touche toutes les catégories sociales, hommes et femmes de tout âge. C’est même devenu la première cause de décès chez les hommes entre 25 et 45 ans, au point que la lutte contre le suicide a été décrétée cause nationale. Le gouvernement dépense 100 millions d’euros chaque année pour lutter contre le suicide. Souvent, les Japonais mettent fin à leurs jours pour se sortir d’une situation financière désespérée. La famille touche alors l’assurance vie et peut ainsi rembourser les dettes. L’homme poussé à bout de ses capacités ne trouve pas d’autres solutions que de se donner la mort. Cette mort touche principalement les adultes à cause de leur situation professionnelle trop intense ou à cause d’un licenciement. Le suicide reste un sujet tabou au Japon, mais les artistes ne peuvent rester spectateurs face à ce problème social. La mort par le suicide s’immisce partout, que ce soit dans la littérature, le cinéma, les mangas, le milieu artistique, dans le spectacle ou à la télévision. Les adultes ne sont malheureusement pas les seules victimes du fléau du suicide, en effet les adolescents et pré adolescents, face à la pression accrue de leurs parents pour leur réussite scolaire ajoutée aux problèmes de brimades, peuvent passer à cet acte désespéré.


La société chez les jeunes et dans les écoles Cette partie sera consacrée à la jeunesse japonaise, notamment dans le milieu scolaire, là où tout l’avenir d’un japonais se joue, l’instant décisif pour une vie mais également pour l’avenir du pays. Le monde adulte n’est que le reflet de cette vie scolaire car c’est à cet instant que l’on devient Japonais et qu’ils sont classés dans des cases qui leur seront attribuées. Je vais notamment m’intéresser aux dérives que cette scolarité engendre et essayer de comprendre l’origine des problèmes que rencontre la jeune génération face à cette société.

Usamaru Furuya, Le cercle du suicide, 2002

Shohei Otomo, Nerukemarebanga, 2010

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Ryuki Yamamoto, The War in an Individual NO.2, 2006

Ijimé, ce mot signifie brimade en français. Au Japon le Ijimé est une notion culturelle qui est ancrée dans leur mode de vie et dans leur façon de penser. La mentalité japonaise impose une norme qui est définie par la communauté, cette norme bannit l’individualité et l’originalité. C’est tout d’abord à l’école que cette norme est enseignée. «Au Japon, l’école fabrique des éléments homogènes et cherche à ne pas avoir de pertes, ce n’est pas seulement à l’école, toute la société marche de cette façon, ça devient une société-école. Il faut réussir à maintenir une identité dans cette société, le système éducatif est le pilier.» Akio Nakamori (écrivain), Jean Jacques Beneix et Jackie Bastide, OTAKU , Cargo film - France 2 1994,

109’10 - 109’30

Usamaru Furuya, Le cercle du suicide, 2002

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À travers cette pensée, il y a une autogestion, voire une autocensure de soi pour maintenir une prospérité au sein du groupe. C’est pour cela que l’enseignement maintient une politique de contrôle de la jeunesse en inhibant les possibilités d’épanouissement de la singularité. Cela peut se constater à travers le costume scolaire. Chaque école possède son modèle d’uniforme et cela facilite l’identification des élèves par la population. Il est également interdit de se teindre les


cheveux ou d’avoir des coiffures originales. Cette uniformité peut aller jusqu’au sac, chaussures ou chaussettes.

Ijimé (brimades) Le Ijimé naît sur cette arène où chacun se bat pour son avenir où ses propres sentiments ne trouvent pas de moyen de s’échapper. Les principales cibles sujettes à subir des brimades sont tous ceux qui sortent de la norme imposée : Les derniers et premiers de classe, les timides, les enfants de parents divorcés, les enfants qui ont des parents à faibles revenus, les Otaku, les obèses, les petits, les simplets, les étrangers etc … Ces brimades peuvent se manifester de manière physique (sévices, pièges, enfermements, coups) ou psychologique (dégradation de biens, lettres de menaces, moqueries sur Internet, rackets, calomnie…) En 2009, 60913 actes de violence et 72778 cas de harcèlement ont été recensés par le ministère de l’éducation.

Exemples d’uniformes

Article de presse, lettres de menaces

La victime est la plupart du temps seule face à ces agressions car tous ceux qui l’aideraient pourraient subir le même sort. Elle n’osera pas non plus demander de l’aide à ses parents où professeurs car cela ne ferait qu’augmenter la colère de ses agresseurs. La victime ne peut s’en prendre qu’à elle-même en se répétant qu’elle est l’origine de sa souffrance. D’un autre côté, les agresseurs subissent eux-mêmes des stress qu’ils ne savent ni où ni comment évacuer.

Ryuki Yamamoto, Aimless, 2006

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Ryuki Yamamoto, Kikazaru, 2006

Cette pratique est loin d’être inconnue par la population, tout le monde reconnaît son existence mais peu nombreux sont ceux qui essaient de lutter contre elle. Les écoles dissimulent leurs problèmes d’Ijimé afin de ne pas salir leur réputation et les parents ne veulent pas croire que leur enfant est rejeté par la majorité. Un des problèmes majeurs face au Ijimé est le manque de communication entre l’enfant victime et ses proches. Le mode de vie a beaucoup évolué, il y a quelques dizaines d’années il était normal que le foyer familial soit composé des parents ainsi que des grands-parents. Les grands-parents avaient pour rôle de veiller sur les enfants et de maintenir une harmonie au sein de la famille. Les enfants pouvaient se confier et apprendre des expériences de leur grand-parents. Les mères étaient au foyer et avaient une position centrale pour régir la stabilité au sein de la famille. De nos jours ces grands-parents ne peuvent plus bénéficier des soins de leurs enfants, et de plus en plus de femmes optent pour une vie active professionnelle. Elles ne veulent plus vivre cloisonnées dans des règles qui leurs étaient imposées. Dans les grandes villes, les maisons familiales sont de plus en plus rares et sont remplacées par des appartements. Les personnes âgées sont mises à l’écart, les parents sont souvent absents au foyer et les enfants doivent s’ autogérer face à des problèmes qu’ils ne savent pas résoudre. Un autre facteur est la baisse de la natalité. Élever un enfant au Japon n’est pas à la portée de tous, l’éducation et la vie coûtent extrêmement cher et les aides sociales sont très faibles. Les enfants uniques sont de plus en plus nombreux (le taux de natalité étant de 1,39 enfant par femme en 2010). Les parents projettent tout leur espoir en cet enfant qui subira une pression considérable pour la réussite professionnelle. Certains écrivains comme Yu Miri, mangaka ou cinéastes ont décidé de mettre l’accent sur ce problème de brimade afin de sensibiliser la population. Les feuilletons télévisés très prisés au Japon sont aussi un moyen de diffusion très important. Malgré cela, les agressions ne cessent d’augmenter et des phénomènes nouveaux liés aux répercussions du Ijimé ont vu le jour depuis trente ans. Ces phénomènes sont appelés Hikikomori et Otaku.

Ryuki Yamamoto, Untitled (Back), 2006

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Hikikomori Le phénomène Hikikomori se caractérise par le retrait complet d’une personne face à la société. Une réclusion volontaire, une recherche de non communication avec les autres si ce n’est peut être, pour certains, par l’intermédiaire d’Internet. Le Hikikomori reste enfermé dans sa chambre, coupe toute relation avec autrui, que cela soit au niveau scolaire, professionnel ou familial. Il reste chez lui dans un cocon de sécurité, se réfugiant dans la télévision, les jeux vidéo, Internet, la lecture ou les mangas. Selon un récent sondage gouvernemental, près de 230 000 personnes ne sortiraientde leurs chambres que pour aller faire des courses. Ce chiffre s’élève à 700 000 si l’on y ajoute les personnes qui ne sortent que pour faire des choses relatives aux loisirs. Selon les résultats du sondage, 70% des Hikikomori sont de sexe masculin. 44% auraient commencé à s’enfermer à cause de problèmes de recherche d’emploi, et 46% ont la trentaine. Par ailleurs, il y aurait près d’1,55 million de «Hikikomori potentiels» ayant déjà pensé à s’enfermer dans leur chambre.

Un Hikikomori dans sa chambre

Ce refus de faire face à la société peut trouver plusieurs sources dont : -la crainte du rejet et d’être jugé, rejet qu’ils ont pu subir par le Ijimé au cours de leur scolarité ou du milieu professionnel. -Une déception face à une société qui ne leur accorde pas de soutien. -Un manque de plaisirs et d’ambitions -une société permettant sans problème l’isolement social chez soi grâce à la technologie et au confort moderne : télétravail, achat sur Internet ... -La structure du pays et l’éducation qui empêchent les Japonais à sortir de leur territoire. -les parents trop protecteurs «Dans la société japonaise il n’est pas toujours permis de se comporter différemment des autres, pour ceux qui ne veulent pas se conformer à la règle, il est plus facile de se replier sur soi.»1 Ishii Akira , Professeur en Criminologie

La chambre d’un Hikikomori

1. Jean Jacques BENEIX et Jackie BASTIDE, OTAKU , Cargo film France 2 1994, 125’18 - 125’38

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Est-ce qu’on est vraiment heureux? Dans ce monde où les adultes considèrent Qu’il suffit d’avoir de l’argent Pour pouvoir se procurer tout ce qu’on veut. Je voudrais m’enfuir De ce hideux troupeau humain Où il n’y a que de fric et du vice Et prendre un train de nuit pour partir au loin Pressés par le temps Lorsque la journée passée à courir partout se termine, C’est déjà le lendemain matin. Avec le lever du soleil, L’implacable tourbillon humain nous submerge. Je n’arrive pas à m’en sortir, Si c’est ça notre avenir, Je voudrais m’enfuir De ce hideux troupeau humain Et prendre un train de nuit pour partir au loin. Inoue Yoshihito (15 ans) Inoue Yoshihito : Agé de 25 ans en 1995, Inoue est accusé d’enlèvement, de meurtre, et est considéré comme le grand planificateur de l’attentat au sarin.


En réaction à une société qui ne leur correspond plus, la jeune génération cherche de nouvelles voies. Otaku Le terme Otaku signifie littéralement maison, demeure ou le chez soi. Il désigne une personne qui consacre la quasi totalité de son temps à une activité d’intérieur obsessionnelle. Les activités peuvent être de toutes formes possibles. Les Otaku sont des passionnés. Cet acte passionnel est le fruit de la société japonaise.

1. Etienne Barral, OTAKU, De Noel Impact 1999, p21-22

«Phénomène social né des années 80, préfigurant la jeunesse de l’an 2000, ces jeunes ont sublimé dans l’excès les trois caractéristiques principales de la société japonaise moderne : l’éducation, l’information et la consommation. Ce mélange s’est révélé détonant et le big-bang qui en résulte et donne naissance au Otaku. Brimés par l’éducation, le groupe, la société, les Otaku se réfugient dans un monde de fantaisie, abreuvés qu’ils sont d’images proposées par les médias modernes. La télévision, les magazines, les mangas sont leur ordinaire, puis ce sont les images d’ordinateur ou de jeux vidéo.» 1

L’apparition des Otaku ne peut être dissociée du système éducatif de ce pays, car c’est l’excès de ce système qui a poussé les jeunes vers cet isoloir. Ils sont victimes du système éducatif englobant le système scolaire mais aussi familial, et ces sacrifices ont permis la réussite économique du pays. L’enfant est pris dans une spirale éducative dès sa naissance et fera de lui un japonais à part entière. Le mot Otaku enferme en lui un refus de souffrir. Les Otaku ont souvent été victimes de Ijimé et c’est l’échappatoire qu’ils ont trouvée pour continuer à vivre dans leur isoloir où, grâce à la télévision, aux vidéos et aux ordinateurs, ils se donnent le droit de transgresser des tabous tels que la pornographie, la mort, la souffrance ou la violence. Les Otaku arrivent sans doute à se convaincre qu’ils vivent à travers l’image. Mais cet acte n’est en réalité que la procuration d’une sensation tout en évitant le risque d’une relation à l’autre qui pourrait le faire souffrir. C’est un repli sur soi qui est devenu pathologique. Les Otaku sont en quelque sorte des jeunes qui refusent de devenir adultes dans cette société inhibée de rêves et d’espoirs. Ils essayent de retrouver ou de découvrir une enfance qu’ils n’ont pas pu connaître. Motoro Mase, Ikigami, 2005

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«La réussite économique d’après-guerre et la fin des idéologies depuis le crépuscule des années 70 a donné naissance à un nombre incomparable de ces jeunes brillants mais totalement inadaptés à la vie de groupe telle qu’elle est de règle au Japon. Réfugiés dans l’univers sécurisant des dessins animés ou des mangas, ils consacrent toute leur énergie à des activités totalement improductives. Plus leurs parents ou l’opinion en général froncent les sourcils en stigmatisant ces activités gamines ou inutiles, et plus ils persistent dans leur improductivité, comme si plus leurs passions étaient inutiles et improductives, plus ils s’en satisfaisaient.»1

1. Etienne Barral, OTAKU, De Noel Impact 1999, p 216-217

Peut-être que cela représente en réalité un combat contre cette société hyperproductiviste. Ils sont désintéressés par le système et n’éprouvent aucun attrait à devenir Japonais. Ils sont décalés par rapport à la pensée de la masse, ne trouvant aucun but, ils se sentent inutiles. On leur a répété depuis leur plus jeune âge que : «L’homme est sur terre pour produire, tant qu’il vit, il doit produire, travailler, accumuler des biens.»

La télévision La télévision détient une place très importante au Japon, elle fait partie intégrante de la vie quotidienne de tous les Japonais. 99% des foyers japonais sont équipés de la télévision. Les jeunes Japonais sont nés avec une télécommande à la main et ont grandi à côté de ces écrans. Inconsciemment, ils sont devenus des victimes de la manipulation médiatique généralisée. Les parents de leur côté sont contents d’avoir des gardes d’enfants si peu coûteux «Tant qu’il est devant la télé, il ne fait pas de bêtises, et au moins je sais où il est.» : Ce genre de discours de parent est très courant. La télévision semble combler le vide créé par le manque de rapports entre les gens, mais cette télévision peut aussi être un des éléments poussant les jeunes à construire leur cocon dans leur chambre autour d’un écran. «Selon l’enquête de l’agence des affaires générales, 70% des jeunes du sexe masculin entre 10 et 30 ans considèrent la télévision comme un média indispensable à leur existence.»2

2. Etienne Barral, OTAKU, De Noel Impact 1999, p 236

L’importance de la télévision au Japon s’explique par le système de vie communautaire de ce pays. Historiquement, pour les Japonais la communication n’est pas indispensable. Ce qui est important c’est le groupe et surtout de faire partie du groupe. L’éducation égalitariste donne la priorité au groupe, tous partagent une pensée unique. Au lieu d’être un moyen de communication, l’information est

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donc un but en soi, qui valorise celui qui la possède et stigmatise celui qui ne l’a pas au bon moment. Pour survivre au sein de ce groupe il est indispensable d’être au courant des informations diffusées par la télévision. Comme pour éviter la communication, la télévision est allumée dans la plupart des foyers lors des repas. Elle semble combler un vide, mais cela ne fait qu’épaissir les murs entre enfants et parents ou entre les différentes générations. La culture people y est très développée et les Japonais sont très friands des scandales. La télévision s’adresse à toutes les générations, c’est sans doute le seul objet intergénérationnel. Le poste de télévision est le meilleur copain de certains et le meilleur des gardes d’enfants pour d’autres. Les émissions présentées sont souvent très ridicules voire niaises, mais c’est ce ridicule que les Japonais désirent, c’est le seul moment où ils peuvent oublier leur travail très strict et carré pour se laisser emporter à travers les spectacles des comiques. J’ai moi-même été un adepte de la télévision dans mon enfance. Au retour de l’école, c’était le geste quotidien d’allumer la télévision et de ne l’éteindre que lorsque j’allais me coucher. Quelque soit l’émission, le spectacle est au centre des intérêts. Accompagnant ma soeur qui a travaillé en tant que comédienne, j’ai pu assister à certains tournages d’émissions télévisées. J’ai été surpris par la manière dont chacun possède son propre personnage et doit jouer avec. Tout est écrit à l’avance par le personnel de l’émission, les comédiens ne font qu’interpréter leur rôle selon les souhaits du spectateur. Il est apparu au Japon, par le biais de la télévision, un phénomène appelé idol (prononcé aidoru). Les idol sont de jeunes artistes très médiatisés, à la fois chanteurs, acteurs, animateurs, modèles, sous contrat pour une durée limitée pendant quelques mois ou années. Les idol sont produites en nombre au Japon depuis les années 60 par une importante industrie du divertissement. Le terme idol désigne principalement de jeunes artistes des deux sexes, sélectionnés adolescents pour leur physique lors d’auditions organisées par des maisons de production et des agences d’artistes. Celles-ci les forment ensuite au chant, à la danse, à la comédie, pour promouvoir leur image dans les médias et l’exploiter dans de nombreux produits et supports à destination d’un public adolescent ou adulescent. Il existe beaucoup d’Otaku fanatiques des idol, pour les plus fanatiques d’entre eux cette passion peut amener au crime ou au suicide. C’est la raison pour laquelle les idol font extrêmement attention à leur discours et actions, ils ne font uniquement que ce que leur producteur leur dit de faire. La télévision au Japon est une sorte de drogue, les gens se sont tournés vers la télévision pour rêver, pour les sortir de leur quotidien monotone. Ils se perdent dans le flot d’images et dans un mirage médiatique. Extraits de la télévision japonaise

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underground Les commerciaux intéressés par le phénomène d’otakisme, ont voulu se l’approprier afin d’en tirer profit. C’est ainsi que s’est développé un marché axé sur la culture Otaku qui, de nos jour s’étend au delà du Japon et de l’Asie. La France est l’un des pays dans le monde où la culture Otaku s’est le plus développée, à travers les mangas et tous les objets dérivés qui en découlent. Les fans des «Idol» se multiplient et cet attrait pour une certaine culture japonaise a donné naissance à la Japan expo en 1999 à Paris.

Japan expo

La commercialisation de la culture Otaku s’est avérée un élément déclencheur pour le développement d’une culture Otaku underground. Il s’est opéré un glissement d’intérêts de certains Otaku vers des domaines où le commercialisme ne pourrait venir à nouveau les narguer. Ces domaines renversent tous les tabous et les éthiques, avec des thèmes occultes, morbides et carrément hors de la compréhension de la société contemporaine. C’est dans des librairies spécialisées et sur des sites Internet que les initiés se retrouvent à l’ombre des regards. Leur quête étant de repousser les limites, des thèmes tel que l’assassinat, le viol, les cadavres, la scatologie ou l’inceste sont devenus des notions banales. De multiples ouvrages traitant de ces sujets sont publiés et il est bien indiqué que s’y adonner reviendrait à enfreindre la loi. L’excès commercial les repoussent dans les mondes des interdits et cela peut pour certains avoir des conséquences irréversibles. Cette génération en crise est en réalité enfermée dans une bulle appelée Japon, ils sont en quête de nouvelles idéologies, où ils pourraient s’épanouir dans des domaines qui leur sont adaptés. Ce pays ultra-sécurisé enferme en lui son mal, cette société crée des éléments dépourvus de volonté et sont incapables de se manifester. Mais il est arrivé par moment que ce mal se retourne contre son système. C’est le cas de Tsutomu Miyazaki qui a fait connaître à toute la population japonaise le nom de Otaku.

Magazine underground

Miyazaki (tueur en serie Otaku) Miyazaki, âgé de 25 ans au moment des faits, était surnommé par les médias «le meurtrier otaku» Ce serial-killer de la fin des années 80 étant un Otaku, a vite entaché la réputation de ces derniers, pour les catégoriser comme étant socialement inadaptés, voire même psychopathes refoulés et donc dangereux et bizarres.

Portrait de Tsutomu Miyazaki

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Sectes en pleine expansion Afin de lutter contre la solitude et dans un désir de se retrouver en communauté, certains jeunes entrent dans des sectes, qui se multiplient depuis les années 80. Ces sectes expliquent la volonté de cette jeunesse désorientée à trouver de nouveaux repères et de nouvelles croyances. Entre 1978 et 1991, 7 nouvelles sectes ont vu le jour, comptabilisant au total 650 000 adeptes. Ces sectes ont pour point commun d’attirer en priorité les jeunes car les fondateurs sont conscients des problèmes que rencontre le Japon et utilisent ce facteur en leur faveur. Leurs objectifs et leur accroche est «l’élévation de l’âme». Cela touche les jeunes qui ont grandi dans le matérialisme de la société de consommation. La spiritualité s’est avérée une échappatoire voire un objectif pour ces jeunes déçus par leur vie dans cette société.

1. Etienne Barral, OTAKU, De Noel Impact 1999, p 274

«Comment vivre en tant qu’individu ? Tant que la société adulte continue de se contenter d’un bonheur familial et de la satisfaction de ses besoins matériels, la quête de ces jeunes pour leur identité et leur individualité lui restera incomprise. Ayant obtenu à la naissance tout ce que leurs parents ont rêvé, les jeunes se sont ouverts à de nouvelles aspirations spirituelles. Et l’un des moyens de les satisfaire, c’est de dépasser l’enveloppe charnelle, la vie et la mort, et de devenir un pur esprit. L’attrait pour l’occultisme, la popularité des mangas traitant de ces thèmes, ne sont que des indices de cette nouvelle quête. À cette quête pour de nouvelles valeurs il faut ajouter le constat des limites de la société actuelle. Le dogme productiviste de la haute croissance à tout prix, de la consommation à outrance et de l’économie reine ne trouve pas d’écho auprès des jeunes qui s’interrogent sur le devenir, ils pointent plutôt du doigt la destruction de l’environnement, les brimades scolaires et les morts par excès de travail. Mais vers quelles autres valeurs se tourner quand la société dominante ne se reconnaît pas d’autres dieux que l’indice Nikkei (bourse) et considère l’ouverture des magasins le dimanche comme une avancée sociale?» 1 Shôko Asahara s’est fait connaître dans tout le Japon dans les années 90 pour son pouvoir de manipulation à travers la secte Aum Shinrikyo (Verité suprême Aum) dont il était le gourou. Cette secte comptait 10 000 fidèles donc était relativement petite. C’est notamment l’attentat au sarin du 20 mars 1995 dans les métros de Tokyo (13 morts et 6300 blessés) qui l’a rendu célèbre. Le Japon a succombé dans la peur et la crainte du pouvoir d’Asahara. Asahara a su dès son jeune âge qu’il était prédestiné à être un meneur et il n’a pas été indifférent face à la vague d’occultisme qui a déferlé sur la jeunesse japonaise pendant les années 80.

Shôko Asahara à la télévision

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Attentat au sarin du 20 mars 1995

Par son talent en matière de rhétorique, il a su convaincre et donner des réponses aux questions métaphysiques qui hantaient de plus en plus de jeunes Japonais. Le système éducatif japonais basé sur l’apprentissage intensif a créé des êtres dépourvus de faculté de réflexion et incapables de juger par eux-mêmes du bienfondé d’une affirmation. De plus anesthésiés par le pouvoir médiatique, ces jeunes étaient des proies idéales pour sa manipulation mentale. La secte Aum est le reflet du mal être d’une partie de la société japonaise, elle a réussi à combler les manques de la jeune génération face à ce système. Grâce à son pouvoir de la parole, Asahara a séduit et réussi à prendre la place du père manquant. Les Otaku se sont sentis en phase et donc à l’aise autour d’Asahara. Ce personnage s’est adapté à la demande, pour mener sa troupe vers sa rébellion. Il a su utiliser et développer le potentiel de violence intérieure des jeunes élites envers la société pour les transformer en machine à tuer. Les personnages comme Asahara vont sûrement de plus en plus émerger du fond d’un Japon en crise. Avec la nouvelle catastrophe nucléaire de Fukushima, les Japonais perdent de plus en plus confiance envers leur gouvernement et ils se remettent en question face à l’évolution effrénée de la science et de la technologie. Ils sont en quête de nouveaux idéaux, en attente de leur «héro» qui les mènera vers un autre avenir que celui promis par la société actuelle.

Rébellion : recherche d’un autre Japon Une jeunesse perdue

Parallèlement au phénomène Otaku, d’autres formes de rébellion sont nées au Japon. Cette rébellion paraît inoffensive à première vue mais elle représente un

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gros problème pour la société japonaise. Étrangement, ces jeunes qui ont choisi ce style de vie n’ont pas de haine ou d’esprit de vengeance contre leur gouvernement, mais il s’agit plus d’une forme de révolte inconsciente, qui s’est organisée à travers les différentes modes chez les jeunes. Ces révoltes, à première vue inoffensives, commencent dès le collège à travers le style vestimentaire. Comme cité précédemment dans la partie compétition, le système scolaire japonais est très dur et rempli de règles à respecter notamment au niveau de l’uniforme scolaire. Ce sont justement ces règles qui ont poussé ces jeunes à passer outre cette uniformisation et à inventer de nouveau styles décadents, pour la plupart du temps provocateurs vis à vis de l’ancienne génération. Un terme a été associé à cette jeunesse en crise, c’est une jeunesse en «moratoire», dit «moratoriamu ningen no jidai» par le psychanalyste Okonogi Keigo.

Couverture du magazine egg

Kigurumin

Hime gyaru

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La jeunesse japonaise ne veut pas grandir, elle ne trouve aucun avantage à devenir adulte dans cette société et de ce point de vue, elle refuse cette société qui ne correspond pas à son idéologie. Ces jeunes veulent également fuir ce monde hypercompétitif, ce qui explique l’augmentation du taux d’absentéisme à l’école. C’est une résistance passive qui s’organise peu à peu, et ces jeunes n’ont pas conscience de leur capacité à changer le pays. Nous sommes face à une jeunesse souffrante et le seul objectif qu’elle a trouvé, ou, qui lui était proposé, était un objectif de consommation. Consommer pour exister. Emprisonnés dans la spirale de la consommation, les jeunes japonais vivent dans la superficialité et le paraître. C’est l’ensemble de ces facteurs qui a donné naissance à de nombreuses modes, ou styles de paraître : gyaru, kogyaru, ganguro, yamamba, bamba, romamba, cocomba, bibimba, kigurumin, femiokun, gyaru-o, center guy, surfer, hosto … Tous ces noms représentent non seulement des façades (ce qu’ils appellent look) mais aussi une mentalité et une manière de vivre. Malgrès leur différence de style, ils partagent une pensée commune : briser les conventions. Ces jeunes ont grandi dans un Japon qui s’est américanisé et avec les regards tournés vers les pays étrangers. C’est ici qu’ils ont puisé leur inspirations et qu’ils ont ensuite combiné avec leur propre culture.

Ganguro

Romamba

Kogyaru


Ces jeunes sont frivoles et superficiels et leur vie oscille entre le paraître et le divertissement. Leur style dénigre complètement la culture japonaise qui avait mûrit jusqu’à lors. Ils sont allés au delà du conditionnement culturel de leur pays et ont montré à toute l’ancienne génération la possibilité de vivre autrement que dans les règles et les conventions préétablies. Ainsi, ils ont réussi à rejeter l’esprit que les Japonais doivent normalement respecter. Ce sont les filles qui, au départ, ont entamé le premier pas, elles ont refusé de rester cloisonnées dans leur foyer à passer leurs journées à attendre le retour d’un mari qu’elles n’ont même pas choisi, elles ont refusé de devenir des serveuses de café dans les entreprises car au Japon le machisme est encore très présent. Elles ont également refusé de devenir des «machines à faire des gosses» (kodomo-o umu kikai) comme l’avait déclaré le 27 Janvier 2007 Hakuo Yanagisawa, ministre de la santé, de l’emploi et de la protection sociale. Elles ont développé une tout autre manière d’expression et de langage basé sur les contractions des mots et les mélanges entre le japonais et les langues étrangères. La douceur, l’autocensure et le physique de la Yamato nadeshiko (beauté traditionnelle au teint laiteux et aux cheveux noirs et lisses) ont été écartées pour laisser place à l’extravagance, la provocation, les peaux bronzées (symbole du pauvre ou du paysan) , le sur-maquillage, les cheveux de toutes les couleurs, les vernis multicolores sur les ongles… Les jeunes hommes ont très vite été séduits et ont inventé leurs looks inspirés par ces femmes. Il se développe au Japon une effeminisation de la jeunesse masculine. Il est devenu normal de trouver dans les magasins de la cosmétique pour homme. Ils passent des heures devant le miroir à travailler leur physique en s’épilant, se badigeonnant de multiples crèmes et à se coiffer. Ce phénomène touche également leur attitude et leur langage.

Couverture du magazine egg

Yamamba

C’est bien sur les commerciaux qui n’ont pas perdu de vue cette jeunesse assoiffées d’achat. Pour acheter, l’argent est indispensable et cette voracité face à la consommation peut pousser certains au enjo kôsai pour les filles ou au racket chez les garçons. Le enjo kôsai est traduit sous la forme de relations dites «assistées» ou «sortie pour soutenir». Ce sont des adolescentes, surtout lycéennes, qui sont payées par des hommes plus âgés pour les accompagner et parfois pour se prostituer. Cette pratique est très connue au Japon et persiste années après années malgré les efforts des politiciens et des campagnes lancées par l’UNICEF pour criminaliser cet acte.

Gyaru-o

Center guy

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飲め 食え 買え


飲め 食え 買え Nomé, nomé, kué, kué, kaé, kaé. (Bois, bois, mange, mange, achète, achète.)


1. Alessandro Gomarasca, Poupées, Robots, La culture pop japonaise, édition Autrement, p53

«Si à l’origine de la modernisation nippone le citoyen en uniforme représentait l’emblème d’un dévouement aveugle à la gloire de son pays, la lycéenne en tenue qui arpente à la fin du siècle les rues de Tokyo symbolise l’absence de foi en une quelconque valeur, si ce n’est la force du marché…l’image de la lycéenne monnayant ses charmes est utilisé comme une puissante métaphore destinée à pointer du doigt l’effondrement du sujet social dans les interstices de la société de consommation japonaise.»1 Sharon Kirsella

Que va construire cette jeunesse dans 20 ou 30 ans? Cette question hante le gouvernement japonais. Cette jeunesse prise par le syndrome «Peter pan» vit au jour le jour avec un but unique : le plaisir de l’instant, sans penser à leur avenir ni même à l’avenir de leur pays. Tout ce que le Japon a construit depuis l’après guerre est en train de s’effondrer. Les rapports inter-génerationels se brisent de plus en plus. Nous sommes face à des adultes qui ne font que critiquer et condamner la jeune génération concernant le manque de dévouement et le manque de respect envers leur pays. En plus de cette perte des valeurs dénoncée par l’ancienne génération, le Japon fait face à des catastrophes allant de la crise financière (surendettement du pays et des citoyens) aux événements tragiques qui ont frappés l’archipel tel que le séisme de Kobe, le séisme et le tsunami du 11 mars 2011 suivi de la catastrophe nucléaire de Fukushima. De ce fait, la foi en l’avenir est désormais bien mise à mal. Les Japonais ne sont pas inconscients face à la situation de leur territoire, la destruction totale de leur pays est un thème qui les hante de plus en plus. Comme par attirance ou par malédiction, certains écrivains, vidéastes, mangaka et artistes décrivent leur paysage de désolation. Les Japonais sont de plus en plus friands des thèmes tel que l’apocalypse ou la troisième guerre mondiale. Ils observent cela avec fascination comme pour se rassurer de leur aspect fictif.

Tokyo de demain Imaginaire de l’apocalypse à travers le manga Le Japon est le pays le plus fortement marqué par la bombe atomique. Les images de cet instant sont à jamais gravées dans leur mémoires, ils ne pouvaient faire

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autrement que d’y faire face. La visite du musée de la paix à Hiroshima fait partie intégrante du programme scolaire, ils ont donc intégré en eu les images apocalyptiques que j’ai montré précédemment. Le thème de l’apocalypse ou de la «fin du monde» ne fait pas partie de la culture japonaise basée sur le Shintoïsme. Ce n’est donc que récemment que ce thème s’est vu prendre une grande ampleur dans la conscience des Japonais. Le Japon a connu de nombreuses catastrophes naturelles, et se situe sur la zone de subduction de 4 plaques tectoniques (Pacifique, Nord-américaine, des Philippines et Eurasiatique), ce qui est à l’origine des nombreux séismes, entraînant des tsunamis et des irruptions volcaniques. Il est aussi victime de violents typhons ou d’inondations. Selon les croyances shintoïste, tous les éléments, de nombreux objets et organismes, abritent des dieux. Les catastrophes qui ont déferlées sur ce territoire étaient donc considérées comme des colères des dieux, c’était cette destruction qui permettait une reconstruction sur de nouvelles bases. De nos jours, avec l’évolution des connaissances et la perte des croyances, peu de gens continuent à penser de la sorte, même si certains rituels peuvent persister à travers les générations dans certaines familles. Les Japonais ont vu la bombe à Hiroshima comme étant le premier pas vers l’apocalypse, jusqu’à lors jamais personne n’avait fait l’expérience d’une puissance aussi spectaculaire et dévastatrice. Ils ne pouvaient la décrire que sous le nom de «pika don» : «pika» étant l’onomatopée de la lumière et «don» le son de l’explosion. Ils ont, suite à cela, pris conscience du génie maléfique humain et de la puissance qu’il pouvait générer. Ils se sont inspirés de cette avancée technologique pour décrire ou imaginer dans leur culture manga, cinéma et jeux vidéo, des possibles futurs ou des mondes imaginaires. Cette fascination pour la destruction totale cache une angoisse profonde, leur permettant sans doute d’exorciser une partie de leur peur.

C’est neuf ans après Hiroshima et Nagasaki que Godzilla apparaît, en exploitant la peur atomique. Enfoui sous terre mais réveillé par des essais nucléaires, il devient furieux et veut anéantir cette humanité dérangeante. Symbole de la purification, conforme à la tradition Shintô, Godzilla matérialise, comme l’affirme son producteur Tomiyuki Tanaka, la volonté des dieux qui se vengent de la vanité de la société japonaise actuelle. Dès les premiers mangas d’après-guerre, sont révélées les cicatrices causées par la bombe atomique. Dans le manga Tetsuwan Atom (ou Astroboy en France) paru en 1952, le mangaka Osamu Tezuka a essayé de changer l’image du nucléaire

Studio Irem, Zettai zetsumei toshi 4, 2011 (date de sortie retardée à cause du seisme du 11 mars)

Ishirô Honda, Godzilla, 1954

Osamu Tezuka, Tetsuwan Atom, 1952

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afin de l’utiliser pour le bien de l’humanité. C’est ainsi qu’est né un nouveau héro nommé Atom, un robot fonctionnant à l’énergie nucléaire. Selon les différents auteurs de manga, leurs opinions face au nucléaire sont très variées et cela se ressent dans leurs créations. Yonezawa Yoshihito : Spécialiste des mangas, fondateur du Comiket ( rassemblement pour la vente des mangas underground )

1. Etienne Barral, OTAKU, De Noel Impact 1999, p286

Keiji Nakazawa, Gen d’Hiroshima, 1973

«Dans un article traitant l’Armageddon dans les mangas et publié par Quick Japan, magazine spécialisé dans la culture underground, Yonezawa Yoshihito fait l’historique du thème de la fin du monde dans la culture japonaise d’aprèsguerre. Il répertorie ainsi 130 séries différentes de manga, publiées entre 1948 et 1994, traitant directement de ce thème, montrant ainsi que c’est un des thèmes favoris des dessinateurs de mangas, et de leurs lecteurs.» 1 Les mangas inspirés par la destruction apocalyptique dégagent des univers très personnels et originaux. Les scénarios peuvent se déployer dans différents époques : historiques avec un aspect documentaire (Gen d’Hiroshima), réalistes se déroulant dans l’époque actuelle (Magnitude 8.0 ou A sprit of the sun), futuristes avec un univers totalement factice (Biomega ou Blame) ou retranscrivant un avenir possible (Nausicaä ou Dragon Head). Il existe principalement deux catégories de scénarios, l’un décrivant l’instant du désastre et l’autre décrivant un univers post-apocalyptique voire dans un univers reconstruit après une destruction totale du territoire. Les histoires se déroulent pour la plupart au Japon, sinon dans un espace factice. Les mangas font partie intégrante de ma culture et ont pu nourrir ma réflexion par rapport à certains travaux tels que la vidéo Table rase ou des travaux plus récents. Outre le style du dessin, c’est d’autant plus l’idéologie de l’apocalypse qui accompagne ces récits qui me fait échos.

Katsuhiro Otomo, Akira, 1982

Hayao Miyazaki, Nausicaâ, 1984

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Masaki Tashimada, Tokyo Magnitude 8.0, 2009

Tsutomu Nihei, Blame!, 1998


Kaiji Kawaguchi, A spitit of the sun, 2002

Hisaharu Motoda, Shibuya Center Town, 2008

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11/03/11 Le séisme du 11 mars 2011 a été pour les Japonais un moment déterminant pour leur avenir. Le tsunami qui a suivi le séisme (à Sendai au nord-est de Tokyo) a emporté de manière spectaculaire les biens des habitants côtiers sur des kilomètres. Plus de 20 000 personnes ont péris dans cette monstrueuse vague qui les a engloutis et enterrés au fond même de leur biens matériels. Cette vague qui a pu atteindre jusqu’à 30 mètres de hauteur a tout détruit sur son passage et n’a laissée derrière elle que des amas de débris mêlés à des cadavres. Les Japonais avaient l’impression de revoir les images de Hiroshima après la bombe atomique, d’autres y ont vu une transposition des images de mangas tel que Dragon head ou des films de Godzilla.

Minetarô Mochizuki, Dragon head, 1995

Sendai, 2011

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Le séisme et le tsunami n’étaient que les deux maillons d’une réaction en chaîne. L’explosion de la centrale nucléaire Daiichi de Fukushima a été une catastrophe majeure du Japon, dont les conséquences touchent l’humanité entière. Tous les yeux étaient tournés vers ce pays. Le Japon a une fois de plus été la victime des problèmes atomiques pour que l’humanité prenne conscience des dangers de l’énergie nucléaire. Je trouve intéressant le rapport que l’on peut trouver entre l’esprit du sacrifice dans la culture japonaise et le cours de l’Histoire qui a fait que ce peuple se retrouve confronté à deux reprises à des problèmes dues au nucléaires. Est-ce un signe envers l’humanité pour qu’elle freine son avancée scientifique? Si nous suivons la pensée traditionnelle japonaise, ce séisme ne peut être autre que la colère des dieux ou de la nature face à l’Homme qui manipule les fondements même de la matière et qui tente de prendre son contrôle. L’affrontement entre tradition et modernité est un thème qui se retrouve dans nombreuses de mes productions et cette crise culturelle me semble être le centre du problème identitaire qu’affronte le Japon contemporain. L’incertitude de l’avenir les poussent à penser qu’à l’instant présent. Le Japon est prit dans une spirale entre construction et destruction dont il ne peut s’échapper. D’un coté la course au développement économique et territorial et de l’autre coté la nature qui se déchaine sur leurs bâtisses. Ce pays traverse une crise généralisée, économique, culturelle et sociale. Il est le pays le plus endetté du monde, c’est une des raisons pour laquelle ils ne peuvent plus se passer du nucléaire qui est l’énergie vitale de leur économie, car ils ne possède aucune autre ressource. Sendai, 2011

Hiroshima, 1945



La catastrophe du 11 mars a également fait émerger un problème enfoui au sein du gouvernement. Celui-ci a longtemps caché ses erreurs et n’a pas agis en faveur de la population. De nombreuses informations étaient filtrées et ils n’ont pas lancé l’alerte d’évacuation autour de la centrale touchée suffisamment tôt. Alors que la centrale avait commencé son altération et dégagé dans l’air des particules radioactives, Tepco (Tokyo Electric Power Company) continuait son discours reniant les dangers de la catastrophe sur la santé humaine. Le peuple japonais n’était pas au courant des faits. Les étrangers étaient informés du danger avant même la population impliquée. Le tsunami a entraîné une vague de protestation et de colère de la population en danger. Les Japonais, connus pour leur esprit de groupe, ne pouvaient plus faire confiance en leur chef. Cet événement a permis aux japonais de prendre conscience de l’infiabilité de leur gouvernement, mais cela a en même temps conduit nombreux d’entre eux vers le désespoir. Les Japonais restent disciplinés et calmes, mais ils dissimulent leurs émotions au plus profond d’eux, derrière un masque. Mais face au danger de nombreux Japonais ont décidé d’agir.

Manifestations antinucléaire de 60 000 personnes à Tokyo le 19 septembre 2011

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Tokyo genso, Stand up Japan, 2011


Synthèse

Le Japon vit actuellement la plus grosse crise économique depuis sa défaite lors de la Seconde Guerre mondiale. Ce pays a non seulement été emporté dans la crise de cette machine économique mais il a également été la victime des déchaînements de la nature. Le boom Izanagi semble loin derrière et le miracle économique a perdu tout son éclat. Le modèle japonais a t-il été une réussite pour l’avenir du pays? Le territoire a connu une transformation accélérée et les habitants vivent dans la peur continuelle d’être délaissés. La culture traditionnelle semble se dissiper dans l’oubli pour laisser place à la culture du profit et du précaire. Nous sommes face à une population désorientée, confrontée à un modèle qui a abouti à l’échec et à l’autodestruction. L’accumulation des différentes failles rend le pays de plus en plus instable et au même moment des scientifiques annoncent des possibilités d’un nouveau séisme destructeur dans la région de Tokyo. De l’autre côté de la mer, d’autres pays d’Asie ont assisté au développement spectaculaire du Japon et semblent vouloir suivre ce modèle. La Chine suit une ascension économique spectaculaire en sacrifiant son territoire, sa culture et sa population. Elle a pris la place du Japon sur le plan économique et semble vouloir défier les États-Unis. La Corée s’inspire du modèle économique japonais et tente de le surpasser. D’un autre côté la culture japonaise s’exporte de plus en plus au-delà des frontières continentales. Par exemple en France, la culture J-Pop et manga s’intègre peu à peu dans la culture du pays. Les boutiques spécialisées dans les mangas, figurines, idol et autres accessoires fleurissent dans toutes les grandes villes. Le manga animé se diffuse de plus en plus sur le petit écran et sur le réseau Internet. La frénésie du système capitaliste touche de plus en plus de pays avec le phénomène de la mondialisation. Mais la crise économique née de ce système n’épargne pas les pays qui l’ont adoptée. Le Japon est un exemple important pour le monde concernant l’exploitation de l’énergie nucléaire. De nombreux pays ont réagi face à l’erreur des Japonais et des changements sont notables même en Europe. La mentalité des Japonais a également connu un grand bouleversement suite à ce désastre et à la protestation des pays étrangers. Des conditionnements culturels sont remis en cause avec l’assimilation et la confrontation de sa culture avec l’étranger. Le XXIe siècle me semble être le siècle de l’échange et de la distanciation. La notion d’acculturation se développe grâce aux échanges et aux déplacements. Cette acculturation entraîne des fractures entre les générations au sein des pays. Au Japon ces fractures apparaissent entre la nouvelle génération qui est ouverte et friande de nouveautés et la génération intermédiaire qui ne pense qu’au profit

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et à l’évolution du pays. Quant à l’ancienne génération elle se retrouve délaissée. Ce phénomène montre la malléabilité de la culture et la possibilité d’une ouverture mentale face aux autres cultures assimilées. Le métissage peut être source de conflit identitaire à l’échelle d’un pays ou d’un individu mais il est également source d’ouverture pour l’espèce humaine et son évolution. La mentalité de l’homme est malléable et en conséquence le conditionnement est à l’origine de l’identité. Le conditionnement est nécessaire à l’homme pour exister mais sa prise de conscience permet une ouverture face aux différences et laisse une possibilité d’échange et de communication.

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Demain est un autre jour




Glossaire Amaterasu Dans le shintoïsme, la déesse du Soleil. Selon la légende, tous les empereurs japonais l’auraient comme ancêtre. Elle aurait introduit la riziculture, la culture du blé et les vers à soie. Elle figure sur le drapeau japonais sous l’apparence du disque solaire, accompagné ou non de ses rayons. On accole parfois à son nom le qualificatif ōkami ou ōmikami signifiant « grande déesse ». Le Kojiki et le Nihon Shoki évoquent tous deux cette déesse. Burakumin Littéralement «personne de la communauté» ou «du hameau»). Terme japonais désignant un groupe social minoritaire japonais discriminé socialement et économiquement. Les «gens des hameaux spéciaux» (tokushu buraku) sont les descendants de la caste des parias de l’époque féodale, issue de deux anciennes communautés, les Eta, littéralement pleins de souillures») et les hinin, «non-humains»). Les burakumin forment une des plus importantes minorités au Japon, avec les Aïnous de Hokkaidō. Butô Danse née au Japon dans les années 1960.(cf.p 26-28) Enjo kôsai Parfois abrégé en enkō, est un mot japonais signifiant «faire connaissance pour aider » ou « sortie pour soutenir». C’est une pratique japonaise où des adolescentes, surtout lycéennes, sont payées par des hommes plus âgés pour les accompagner et parfois pour se prostituer. Gagaku (Littéralement musique raffinée) Ensemble des répertoires de la musique de cour du Japon. Il comprend des répertoires orchestraux, des chants et de la danse. Kogaru Kogaru ou gal (aussi orthographié (ko)gyaru ou kogal) Mode vestimentaire japonaise, affectant particulièrement les jeunes filles et jeunes femmes urbaines. Souvent une kogaru est une jeune fille de 12 à 25 ans, aux cheveux décolorés, au teint parfois artificiellement bronzé, portant des microjupes, des vêtements à la mode et des accessoires tape-à-l’œil. Gyokuon hôsô (Littéralement «Voix radiodiffusée du Joyau») Allocution radiophonique que l’empereur du Japon Hirohito adressa à la population de l’archipel le 15 août 1945, leur annonçant que le pays acceptait les termes de la Déclaration de Potsdam mettant ainsi fin à la Guerre du Pacifique, et donc à la Seconde Guerre mondiale.

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Hibakusha «Victimes de la bombe atomique». Un mot japonais qui désigne les survivants des bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki. Homeless (Prononcé hômu lessu) : SDF Honne Se réfère aux vrais sentiments d’une personne et ses désirs. Cela peu aller à l’encontre de ce qui est attendu par la société ou de ce qui est requis selon sa position et les circonstances, et souvent tenu secret, sauf avec des amis très proches. Ie Maison, demeure. Ijime Littéralement « intimidation ». Mot japonais désignant les brimades que subissent ceux qui sont exclus d’un groupe parce que différents et sont pris pour cible. Ikebana Également connu sous le nom de kadō, la Voie des fleurs ou l’art de faire vivre les fleurs est un art traditionnel japonais basé sur la composition florale. Îles Kuriles Archipel d’îles volcaniques qui forme une ligne discontinue de quelque 1 200 kilomètres de l’extrême Nord du Japon à la pointe sud de la péninsule du Kamtchatka séparant ainsi la mer d’Okhotsk de l’océan Pacifique. Ces îles qui par le passé ont changé plusieurs fois de statut sont aujourd’hui administrées par la Russie bien que certaines d’entre elles soient revendiquées par le Japon. Jinja Lieux de culte du shintoïsme, où l’on vénère un kami. On parle parfois aussi de jingū, ou simplement miya, voire de taisha « grand sanctuaire ». Jisatsu Suicide en japonais. JRA ( Japan Red Army) Groupe armé d’extrême gauche japonais fondé par Fusako Shigenobu en février 1971. Kabuki Forme épique du théâtre japonais traditionnel. Centré sur un jeu d’acteur à la fois spectaculaire et codifié, il se distingue par le maquillage élaboré des acteurs et l’abondance de dispositifs scéniques destinés à souligner les paroxysmes et les retournements de la pièce.


Katana Symbole de la caste des samouraïs, le katana est un sabre de plus de 60 cm. Il est porté glissé dans la ceinture. Certaines périodes de l’histoire japonaise étant plus calmes, le katana avait plus un rôle d’apparat que d’arme réelle. Kojiki Recueil de mythes concernant l’origine des îles formant le Japon et des dieux. Avec le Nihon Shoki, les légendes contenues dans le Kojiki ont inspiré beaucoup de pratiques et de croyances du shintoïsme. Il est généralement considéré comme le plus ancien écrit japonais existant encore de nos jours. Le Kojiki est une compilation des récits du conteur Hieda no Are et par le chroniqueur Ō no Yasumaro sur l’ordre de l’impératrice Gemmei. Il lui fut offert en 712 ap. J.-C. Manga Bande dessinée japonaise. Mangaka Auteur de manga. Matsuri Festivals et fêtes populaires japonaises, ayant généralement lieu durant la période estivale, dans pratiquement toutes les localités japonaises. La plupart d’entre elles sont liées à une célébration religieuse, le plus souvent Shintō. Ère Meiji Période historique du Japon entre 1868 et 1912. Nô Styles traditionnels de théâtre japonais venant d’une conception religieuse et aristocratique de la vie. Le nô allie des chroniques en vers à des pantomimes dansées. Arborant des costumes somptueux et des masques spécifiques, les acteurs jouent essentiellement pour les shôguns et les samouraïs. Le théâtre nô est composé de drames lyriques des XIVe et XVe siècles, au jeu dépouillé et codifié. Ces acteurs sont accompagnés par un petit orchestre et un chœur. Leur gestuelle est stylisée autant que la parole qui semble chantée. O-furo Littéralement bain en japonais. Otaku Personne qui consacre une certaine partie de son temps à une activité d’intérieur. (cf. p 42-43)

Salaryman Terme par lequel les Japonais désignent les «cadres» non dirigeants d’une entreprise ou les employés. Seppuku (ou Harakiri) Forme rituelle de suicide masculin par éventration, apparue au Japon vers le XIIe siècle dans la classe des samouraïs. (cf. p 33-34) Shintô Religion polythéiste, et la religion fondamentale la plus ancienne du Japon, liée particulièrement à sa mythologie. Tatemae Littéralement « façade». C’est le comportement et les opinions qu’on affiche en public. Tatemae est ce qui est attendu et exigé par la société selon sa position et les circonstances, et peu ne pas correspondre à ses Honne. Tepco (Tokyo Electric Power Company) Multinationale japonaise et le plus grand producteur privé mondial d’électricité. La compagnie exploite principalement des centrales thermiques et des centrales nucléaires. Tsunami Onde océanique ou marine provoquée par un mouvement rapide d’un grand volume d’eau (océan ou mer) dont l’origine est géologique (le plus souvent l’effet d’un tremblement de terre ou d’une éruption volcanique). Uyoku dantai Terme générique qui désigne divers groupes japonais ultra-nationalistes. Waka Un genre de la poésie japonaise. Sanctuaire Yasukuni Sanctuaire Shintô situé dans l’arrondissement de Chiyoda-ku à Tōkyō. Il fut construit en 1869 pour rendre hommage aux Japonais « ayant donné leur vie au nom de l’empereur du Japon ». Les âmes de plus de deux millions de soldats japonais morts de 1868 à 1951 y sont déifiées. Considéré comme l’un des symboles du passé colonialiste du Japon et des nationalistes, il est célèbre pour les polémiques qu’il suscite en Extrême-Orient, et notamment dans les pays autrefois partie de la sphère de coprospérité de la grande Asie orientale.

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Bibliographie Conditionnement T.Hall Edward, Dimensions cachées, Éditions Seuil, 1966 Orwell Georges, 1984, Éditions Secker and Warburg, 1949 Huxley Aldous, Le meilleur des mondes, Éditions Pocket, 1931 Klein Naomi, No logo: la tyrannie des marques, Éditions Babel, 2000 Arriès Paul, Putain de ta marque!, Éditions Golias Eds, 2003 Beigbeder Frédéric, 99 francs, Éditions Folio, 2000

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Filmographie Cinéma Conditionnement Lucas Georges, THX 1138, 1971 Gilliam Terry, Brazil, 1985 Bogojevic-Narath Simon, Leviathan, Kenges, 2006 Dabis Cherien, Amerrika, 2009 Niccol Andrew, Bienvenu à Gattaca, 1997 Chaplin Charles, Le dictateur, 1940 McCarthy Thomas, The visitor, 2007 Bouchareb Rachid, London river, 2008 Kubrick Stanley, Orange mécanique, 1971 Verneuil Henri, I comme Icare, 1979 Radford Michael, 1984, 1984 Kounen Jan, 99 francs, 2007 H5, Alaux François, De Crécy Hervé, Logorama, 2009

Japon post Hiroshima Imamura Shohei, Pluie noire, 1989 Yamada Tengo, Gen d’Hiroshima, 1983 Kaneto Shindô, Les enfants d’Hiroshima, 1952 Kurosawa Akira, Vivre dans la peur, 1955 Kurosawa Akira, Rhapsodie en août, 1991 Yoshishige Yoshida, Femmes en mirroir, 2003 Resnais Alain, Hiroshima mon amour, 1959 Périot Jean-Gabriel, 20000 fantomes, 2007 Sokurov Alexender, Le soleil, 2005 Wakamatsu Kôji, Le soldat dieu, 2010 Wakamatsu Kôji, United red army, 2008 Dörrie Boris, Cherry Blossoms, 2007

Japon contemporain Kurosawa Kiyoshi, Tokyo Sonata, 2008 Corneau Alain, Stupeur et tremblement, 2003 Kon Satoshi, Tokyo godfather, 2003 Ooiwa Kenji, Takimoto Tatsuhiro, NHK ni yôkoso!, 2006 Kon Satoshi, Paranoia agent, 2004 Rintarô, Metropolis, 2001 Ötomo Katsuhiro, Akira, 1988 Dômoto Masaki et Mishima Yukio, Yûkoku, 1966 Shimizu Hiroshi, Ikinai, 1998 Takimoto Tomoyuki, Ikigami : The ultimate limit, 2008 Fukasaku Kinji, Battle royal, 2000 Sono Sion, Suicide club, 2002 Kore-eda Hirokazu, Air doll, 2009 Bong Joon-ho, Shaking Tokyo, 2008 Yukihiko Tsutsumi, 20th Century Boys, 2008 Higuchi Shinji, Nihon chinbotsu, 2006

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Documentaire Conditionnement Colville Charles, Privation sensorielle, 2007 Georget Anne, Une télé dans le biberon, 2010 Fourest Caroline et Venner Fiammetta, ONU, la bataille des droits de l’Homme, 2009 Müller Claudia, About Jenny Holzer, 2009

Japon post Hiroshima Wilmshurst Paul, Hiroshima, 2005 Petitjean Marc, Blessures Atomiques, 2005 Pohlmann Dirk, Les héritiers du Dr Mengele, 2009 Muller Florent, Motte Roger, Giet Eric, Bequet Annie-Claude, Hiroshima, la vie malgrès tout, 2001 Viallet Serge, L’Asie en flammes, Nagasaki, 2005 Viallet Serge, Kizu, les fantômes de l’unité 731, 2004 Watanabe Kenichi, Le Japon, l’empereur et l’armée, 2009 Porte Jean Louis, Carnet du Japon-Voyageurs et pèlerins, 2005 Barde Pierre et Stierlin Henri, Shintoïsme et Boudhisme, 2008 Anhalt Gert, Japon-Esprit du bain, 2003 Fernandez Constantin, Le mime Hijikata, 1967 Schmelzer Thomas, Nô Combe David et Barbieux Jean-Marc, Tracks special Kitano Takeshi, 2010

Japon contemporain Marker Chris, Sans soleil, 1983 Mauger Léna, Marrant Alexis, Japon : des cadres à la baguette, 2009 Ouanounou Colette, Trois familles au Japon, 2008 Arte, Xenus : Burnout, 2011 Arte, Yourope : burnout, 2011 A.Dereims, Y.Satoshi, C.Beilvert, Sauveurs de vies, 2010 Besançon Laurent, Reportage : Le suicide au Japon, 2010 Bridcut John, Le suicide au Japon, 1998 Beneix Jean Jacques, OTAKU, 1994 Kobayashi Takahiro, Home, 2001 Tracks : Neet, une jeunesse japonaise, 2010 Fessaguet Renaud, Le Japon au coeur du chaos, 2011 Arte reportage, Japon : Eleveurs de Fukushima, 2011 Le brun Stéphanie, Barreyre Christophe, Simon Constantin, Moulin Frank, Japon : Nucléaire, la filière du silence, 2011 Navarro Jean-Louis, La méga catastrophe de Fukushima, 2011 A.Fried, C.Jaime, A.Saiki, P.Geiger, Reportage Arte, Japon : Tous au vert, 2011 A.Fried, M.Rambaud, Y.Hitomi, B.Selbach, Reportage Arte, Japon : Les parrias de Fukushima, 2011 S.Bonnet, B.Kathofer, S Guisset, L.Wibaux, Nos sociétés face aux risques technologiques, 2011 A.Fried, C.Jaime, E.Sato, Reportage Arte, Japon : the ou radioactivité, 2011 M.Schacht, A-B. Piper, ReportageArte, Exposition : Fukushima et les conséquences, 2011 C.Magne, C.Sourbie, P.Geiger, Reportage Arte, Imaginaire de l’apocalypse dans la culture japonaise, 2011

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Je tiens à remercier l’ensemble de l’équipe enseignante de l’option Communication de l’École des Beaux Arts de Rennes, Clara pour son soutien, sa contribution et sa patience. Puis ma mère pour m’avoir poussé à découvrir la culture française. Je remercie également l’équipe du centre d’art contemporain La Criée, François Verret, l’équipe du TNB ainsi que François Seigneur pour leur encadrement durant mes stages.

http://www.ikunograf.com

Typographie : Arno Pro, KouzanBrushFont Papier : Tradition 120gr Impression : Identic à Cesson Sévigné





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