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Président Specht Dans la continuité de Patrick Spielmann

DANS LA CONTINUITÉ DE PATRICK SPIELMANN

Président Specht

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Depuis le mois d’avril dernier, Léonard Specht est le nouveau président de l’Association sportive du Racing, support légal du club professionnel. Le champion de France 79 prend le relais de Patrick Spielmann qui, après vingt-cinq années de bons et très loyaux services, a décidé de passer la main.

Léonard Specht I l dit que c’est une histoire de famille et, au fond, il ne peut s’agir de rien d’autre. Une famille recomposée ou plus exactement reconstituée après qu’une addition d’égoïsmes et une somme d’incompétences a bien failli totalement détruire, on s’en souvient, il n’y a pas à aller chercher bien loin dans sa mémoire.

De ces années-là, Léonard Specht ne dira pas un mot. D’abord parce que ce n’est pas le sujet et surtout parce que ce n’est pas non plus le genre de la maison, ce qui fait deux raisons suffi santes. Et puis à quoi bon ressasser le passé quand il n’y a rien à en tirer. Reste l’avenir et il est beau. Comme le présent.

Quand on le retrouve en ce début mai dans le bureau dévolu au président de l’Association sportive dans l’enceinte de la Meinau, « Léo » savoure ainsi encore le match de la semaine précédente contre le PSG. Un nul 3-3 arraché au mental, à l’énergie et puis au talent aussi sans quoi rien n’est possible. « Ça fait plaisir » lâchet-il dans un petit sourire et on sent que ce n’est pas là une simple formule, qu’il y a derrière ce « ça fait plaisir » une joie et une fi erté retrouvées.

Il convient peut-être ici de faire une petite pause pour que les plus jeunes, auxquels le nom de Léonard Specht ne renvoie qu’aux stages de foot qu’il organise depuis trente ans, comprennent de qui on parle vraiment. C’est qu’avant d’être une marque synonyme de camp d’entraînement et de perfectionnement pour des centaines de footballeurs alsaciens en J

Jherbe, Léonard Specht a été un immense joueur. L’un des meilleurs centraux français de sa génération, « stoppeur » disait-on à cette époque où les défenses à trois n’existaient pas.

Fin, élégant, bon de la tête et dur dans le duel, doté d’une vision du jeu panoramique qui en faisait à la fois un défenseur efficace et le premier relanceur de son équipe, il était ce que l’on appelait communément un « client ». Son palmarès en témoigne : quatre titres de champion de France (un avec le Racing et trois avec Bordeaux), deux coupes de France, 18 sélections en équipe nationale et deux demi-finales de Coupe d’Europe des clubs champions, l’ancêtre de la Ligue des Champions, dont une d’anthologie contre la grande Juventus de Michel Platini. Lui, comme son rival de l’époque Maxime Bossis, préfigurait Laurent Blanc et plus lointainement Raphaël Varane, ce type de joueurs là pour situer. Des adolescents avaient son poster détaché des pages centrales de Onze ou de Mondial punaisé sur le mur de leur chambre, toujours pour situer.

Pour être roi, il ne lui aura finalement manqué que la couronne, autrement dit une place dans l’épopée espagnole de 1982 et dans celle hexagonale de 1984, ça s’est joué à rien.

Dans cette ère préarrêt Bosman où les transferts à l’étranger étaient rarissimes, Léonard Specht incarnait une forme de fidélité. Il n’aura ainsi connu que deux clubs, le Racing et les Girondins. Le Racing d’abord où il était arrivé en compagnie de son frère Joseph au tout début de la décennie 70. Il avait 15 ans, venait de l’US Mommenheim et s’apprêtait à marquer l’histoire du club avec les Dropsy, Marx, Tanter, Piasecki, Gemmrich et tous les autres, Gress en tête de gondole, qui allaient bientôt renverser la France du foot et embraser l’Alsace.

De 1973 à 1982, il sera l’un des piliers (324 matchs et 20 buts au compteur) de cette équipe mythique. Avant de signer pour les Girondins que venait de quitter Albert Gemmrich et que s’apprêtait à rejoindre le regretté Dominique Dropsy. Il y restera cinq ans, le temps de se construire le palmarès XXL que l’on a dit et puis de revenir au Racing boucler la boucle, parce que c’est toujours ce qu’il faudrait faire et aussi et parce que le club avait besoin de lui.

IL AURA TOUT CONNU AVEC CE CLUB

Joueur pendant douze ans, entraîneur (diplômé) deux saisons d’une équipe

« L’humilité, le goût de l’effort, la solidarité, le respect, cette appartenance à un ensemble, c’est ce que nous voulons inculquer à ces jeunes pour former des hommes et pas que des footballeurs. »

alors en 2e division et puis adjoint, il aura tout connu avec ce club. Jusqu’à devenir administrateur et même quelques mois président après la démission de Philippe Ginestet. Nous étions en 2009 et tout préfigurait la chute. Il y avait dans l’air ce parfum de catastrophe imminente. Un monde allait prendre fin, le suivant serait long à advenir.

« Le Racing venait de rater la montée en Ligue 1, expliquait-il dans le long portrait que lui ont consacré Les Dernières Nouvelles d’Alsace en décembre 2020. Au conseil d’administration, on m’a nommé président. Je ne voulais pas y aller au début, mais Monsieur Lohr (son patron – ndlr) m’a dit qu’il fallait accepter. C’était une période difficile avec un actionnariat en difficulté, ce qui mènera le club au dépôt de bilan deux ans plus tard. J’ai vite compris que je n’avais pas les moyens de bien faire mon travail, je n’étais pas proche de l’actionnaire principal (Philippe Ginestet). Pour le Racing, c’était mieux qu’on en reste là. »

Mais si lui voulait peut-être en rester là, l’histoire, elle, ne pouvait évidemment pas le permettre. Alors, quand Marc Keller, Egon Gindorf, Pierre Schmidt et le groupe d’actionnaires qui les entouraient ont entrepris de retricoter le lien défait, Léonard Specht est revenu. D’abord pour mettre sur pied l’association des anciens joueurs, qui compte aujourd’hui une cinquantaine de membres, ensuite pour diriger l’association sportive qui détient la marque Racing et le numéro d’agrément permettant de disputer les compétitions nationales. « Marc (Keller) tenait beaucoup à renouer le lien, dit-il, pour lui c’était une priorité. Dans son esprit, un club c’est comme une famille et comme dans une famille, les anciens sont importants. L’héritage, ça compte, on le voit au Bayern ou ailleurs. D’ailleurs toutes les entités sont importantes. Avec les supporters, les partenaires ou Femmes de Foot, on appartient à un tout. Ça ne fait pas gagner les matches, mais c’est une force. Dire que c’est un club familial, je trouve que c’est un beau compliment et ça n’empêche pas d’avoir des ambitions. »

À 68 ans, les cheveux ont blanchi, mais la silhouette qu’il entretient dans de grandes randonnées dans les Vosges et sur les parcours de golf de la région, elle, n’a pas changé. Sa ligne de conduite non plus.

Nouveau président de l’association qui a en charge les jeunes et la politique du centre de formation, il n’envisage pas de révolution. « Surtout pas. Je vais aller dans la continuité de Patrick (Spielmann) qui a été un fidèle serviteur du club. C’est beaucoup d’honneur de lui succéder et la machine est tellement bien huilée, avec François (Keller, le directeur du centre de formation – ndlr) aux manettes que mon rôle sera modeste. De toute façon, ça tient beaucoup aux hommes, aux valeurs qui les animent. L’humilité, le goût de l’effort, la solidarité, le respect, cette appartenance à un ensemble, c’est ce que nous voulons inculquer à ces jeunes pour former des hommes et pas que des footballeurs. » Parce qu’au final, ce sont eux qui font les clubs. a

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