La france ne compte pas que des métropoles

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l'Humanité Politique, mardi 20 février 2018, p. 6

Collectivités

« La France ne compte pas que des métropoles » Propos recueillis par Olivier Morin

Alors que de nombreuses communes rabotent des initiatives pour parvenir à boucler leur budget, Nicolas Langlois, maire (PCF) de Dieppe, lance une campagne dans sa municipalité pour défendre les services publics. Entretien. Vous initiez une campagne #jamaissansmonservicepublic. L'affiche représente un bureau vide, une bibliothèque vide, une assiette vide... Est-ce un vrai danger pour demain ? Nicolas Langlois Ce gouvernement, comme les précédents, asphyxie les collectivités? et en particulier les communes. Il baisse les dotations de fonctionnement mais ce ne sont pas les élus qu'ils ont dans le collimateur? mais bien les services rendus à la population, les solidarités ainsi que l'existence de la commune comme échelon de la démocratie. Nous allons aller à la rencontre des habitants de notre ville avec des cartes pétitions destinées à Emmanuel Macron. Une campagne d'affichage sera déclinée dans tous les lieux publics, de la mairie à la bibliothèque, jusque dans les rues. Nous allons organiser des « journées du patrimoine », mais du patrimoine commun de la municipalité. Des visites des services publics seront proposées par les agents. L'objectif est de montrer aussi l'envers du décor. En faisant par exemple visiter les locaux techniques des piscines avec l'agent qui est là tous les matins à 6 heures pour faire les prélèvements. Quels sont les services publics mis en danger par ces baisses de dotations ? Nicolas Langlois Concernant les rythmes scolaires par exemple, j'aurais souhaité que l'État continue de nous accompagner en prenant en charge le coût supplémentaire des activités proposées aux élèves. Nous avons été contraints de revenir à quatre jours à cause des incertitudes sur les financements. J'aimerais aussi que les tarifs de cantine soient plus incitatifs. Nous avons déjà 75 % des enfants qui mangent gratuitement, mais il faudrait que nous puissions encore élargir. Il y a aussi des projets associatifs qui méritent qu'on les soutienne davantage. On pourrait même créer et inventer des services publics. L'étau budgétaire freine la créativité, mais je ne m'y résous pas. Comme beaucoup de communes, vous allez être amenés à voter bientôt votre budget... Nicolas Langlois Dans quelques jours, nous avons notre débat d'orientations budgétaires et il sera voté fin mars. Il faut comprendre qu'un budget n'est pas seulement technique mais est avant tout la réponse aux besoins des habitants, à leurs projets et la dynamique de la ville. Et puis à Dieppe, c'est la marque d'un haut niveau du service public composé de plus de 100 métiers différents. Gilles Leproust, maire (PCF) d'Allonnes et membre du bureau exécutif de l'Association des maires de France, estime que la casse des services publics met en opposition les populations rurales et urbaines. Qu'en pensez-vous ? Nicolas Langlois La casse des services publics participe d'une idéologie globale de ce gouvernement ultralibéral. Nos services publics sont utilisés par les Dieppois, mais aussi par les habitants de l'agglomération et au-delà. Ils concernent en fait beaucoup de monde, d'autant que les habitants des zones rurales souffrent autant que ceux des quartiers populaires. Il y a alerte pour la République car l'égalité d'accès et l'égalité de droits en sont les garants. Les villes moyennes comme Dieppe ne subissent-elles pas le contrecoup du développement des métropoles ?


Nicolas Langlois On le subit d'autant plus avec la baisse des dotations. Si elles ne diminuent pas cette année, les baisses des années précédentes sont maintenues. Depuis 2012, nous avons perdu 16 millions d'euros cumulés. C'est énorme pour une ville de 30 000 habitants. On subit aussi les grandes régions dans lesquelles s'insèrent les métropoles. Je ne suis pas opposé à ce que l'on réfléchisse à l'échelle d'un territoire, mais quand cela se traduit par une réduction de la proximité, un éloignement des centres de décision, ça pose problème. Cette lutte est l'occasion de dire à Macron qu'il n'y a pas que les métropoles. Les villes moyennes ont des choses à apporter à la France. Votre ville vient de vivre une tragédie avec l'accident de l'usine Saipol, où deux salariés ont trouvé la mort. En quoi l'action publique de proximité revêt-elle un rôle particulier dans de telles circonstances ? Nicolas Langlois Une enquête est en cours. Ce n'est pas acceptable de mourir au travail. En attendant, nous avons un devoir moral vis-à-vis des familles des victimes, à l'égard des salariés et des habitants du quartier. Il faut saluer là encore le rôle de l'action publique : les services d'incendie et de secours, l'hôpital et les services municipaux. Nous avons invité les habitants du quartier à se recueillir et se retrouver dans une salle communale dimanche soir. Ils étaient plus de 200, dont des salariés de l'entreprise. L'intérêt d'avoir de la proximité a là aussi été démontré.

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