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Une classification conflictuelle
from Histoires, ou Contes du temps passé, Charles Perrault - Mémoire de master de Marie-Sophie Bercegeay
Perrault se réduisent à presque rien. Le Petit Chaperon rouge est étourdi jusqu’à l’invraisemblance. Grisélidis est douce jusqu’à la bêtise : elle endure sans ciller les cruautés de son mari […] Tout se passe comme si le héros méritait à peine qu’on s’intéresse à lui, ou qu’on s’attarde à le considérer » 13 . La théorie qui voit le jour à la fin du XIXe siècle et se développe au début du XXe siècle sur les contes populaires ou littéraires, comme ceux écrits par Charles Perrault, génèrent de nombreuses études et tentatives de classification.
Une classification conflictuelle
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Dès 1910, Antti Amatus Aarne, folkloriste finlandais, tente de classifier les contes oraux. Il en recense cinq cent cinquante dans Verzeichniz des Märchentypen14 . Les contes sont divisés en trois catégories : contes d’animaux, ordinaires ou facétieux. Dès 1928, le catalogue est régulièrement revu par Stith Thompson, et renommé The Types of the Folktales15. Il est élargi en 1961 et 1973, où deux mille trois cent quarante types de contes sont alors répertoriés. Il s’agit du « catalogue systématique de tous les contes populaires du monde » 16. Une quatrième catégorie est ajoutée : celle des contes-chaînes (ou énumératif, contesformules), et celle des contes ordinaires devient « contes merveilleux ou contes de magie ». Les contes sont distingués entre le conte-type et les versions (états successifs d’un récit), ainsi que les variantes (versions d’un texte qui diffèrent de celles communément racontées). Le conte-type correspond à la forme originelle ou archétypale, d’où viennent toutes les variantes et versions attestées ou perdues. Dans L’Histoire des contes, Catherine Velay-Vallantin définit les distinctions de l’école finnoise de la manière suivante :
« Les récits dont les ressemblances l’emportent sur les différences appartiennent au même conte-type. Chaque version écrite attestée constitue un texte, dont les épisodes particuliers peuvent être considérés comme des variantes par rapport au conte-type » 17 .
Wilhelm Maximilian Wundt propose pour sa part dans Völkerpsychologie, paru en dix volumes de 1900 à 1920, de classer les contes selon sept catégories : contes et fables mythologiques, contes merveilleux, contes et fables biologiques, fables pures sur les animaux, fables sur l’origine, contes et fables humoristiques, fables morales. Cette classification, comme tant d’autres, n’est que peu utilisée, contrairement à celle de Aarne-Thompson. De fait, la classification des contes est une entreprise extrêmement complexe et délicate car la catégorisation entraîne de nombreuses confusions. De plus, l’indexation des récits par sujets demeure impossible, car trop alambiquée. Il faut noter en outre qu’il n’existe pas habituellement (notamment chez Aarne-Thompson) de catégorie comique, car
13 CARLIER, Christophe, La clef des contes, Paris, éd. ellipses, coll. Thème & études, 1998, p. 62. 14 AARNE, Antti, Verzeichniz der Märchentypen, Université d’Helsinki, coll. Folklore Fellows Communication, 1910. 15 AARNE, Antti, THOMPSON, Stith, The types of the folktales : A Classification and Bibliography, Helsinki, éd. Academia Scientiarum Fennica, 1961, 588p.
16 VELAY-VALLANTIN, Catherine, L’histoire des contes, op. cit., p. 13. 17 Idem.