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Le potentiel exploitable des EMR
L’humanité consomme
20 000 TWh/an
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300 à 800 TWh/an pour les hydroliennes et l’énergie des marées
8 000 à 80 000 TWh/an pour l’énergie des vagues et de la houle
18 500 TWh/an pour l’éolien offshore
10 000 TWh/an pour l’énergie thermique des mers
Il raconte : « Pour exploiter les EMR, ingénieurs et chercheurs en mécanique conçoivent des dispositifs. Notre tâche consiste à introduire un coup d’œil mathématique en apportant des méthodes certifiées, c’est-à-dire basées sur des théorèmes. Plus précisément, à partir d’équations qu’ils nous fournissent et que l’on ne sait pas résoudre, nous développons des méthodes numériques pour approcher le plus rapidement possible leurs solutions avec une estimation de l’erreur commise. »
Aujourd’hui, quiconque réfléchit au design d’une pale d’hydrolienne ou d’éolienne utilise un procédé imaginé dans les années 1920 par le Britannique Hermann Glauert. Approximative, sans équations – ni différentielles ni aux dérivées partielles –, elle consiste en un système de trois équations non linéaires à résoudre par des techniques jusqu’alors non certifiées. Julien Salomon a proposé de nouvelles façons de faire, plus rapides et désormais certifiées. « La méthode Glauert est toujours utilisée, précise-t-il, mais en première instance pour un design initial, celui-ci étant ensuite affiné par des modélisations plus complexes… et plus gourmandes en temps de calcul afin de converger vers un résultat optimal, par exemple sur le plan du rendement. » Ces innovations nées chez Inria ont été utilisées notamment pour une hydrolienne flottante installée sur la Garonne par la société bordelaise Hydrotube Énergie.
Au-delà du dispositif seul, Mario Ricchiuto rappelle que l’on doit imaginer une étape de modélisation supplémentaire, celle de la mise en place d’un parc d’engins déployés sur un site à fort potentiel. Quelle disposition choisir ? Quelles interactions prévoir ? Autant de questions auxquelles seule la modélisation pourra répondre.
À L’ASSAUT DU RAZ
À plus court terme, l’étape suivante pour Julien Salomon consistera à complexifier le modèle qu’il a conçu afin de le rendre plus précis encore, par exemple en prenant en compte la traînée à l’arrière de l’engin. Également dans les cartons d’Ange, un projet sur le raz Blanchard, un courant très puissant (équivalent à une ou deux centrales nucléaires) entre le cap de la Hague et l’île anglo-normande d’Aurigny, que l’on aimerait exploiter. Il convient donc d’en estimer le potentiel (voir la figure ci-contre)
Cette simulation des courants de marée au niveau du raz Blanchard révèle les vitesses moyennées de l’eau (en mètres par seconde, croissantes, du blanc au rouge). Ici, l’instant montré correspond au jusant pour une marée de vives-eaux (coefficient 108).
Les prévisions de météo locale, notamment des vents très localisés et en temps réel, sont utiles pour les éoliennes, mais aussi pour les régates en mer. Aussi Mireille Bossy, spécialiste du sujet et responsable de l’équipe-projet Calisto, au centre Inria d’université Côte d’Azur, est-elle mobilisée pour les Jeux olympiques 2024, dont les épreuves de voile se dérouleront à Marseille.
Quant à l’équipe-projet Cardamom, elle travaille actuellement avec l’équipe-projet Memphis à une expérience de « mélange de modèles » ! Il s’agit de combiner des modèles très aboutis, très fins dans leurs résultats, avec d’autres plus « approximatifs » mais plus rapides, de façon à obtenir un modèle hybride, équivalent à un modèle très onéreux, mais ici avec un coût plus réduit. Cette approche dite « multifidélité » est en cours d’application sur le flotteur de la société Seaturns évoqué précédemment.
Pris parmi de nombreux projets de recherche et d’applications pour exploiter les EMR, ces quelques exemples laissent espérer une augmentation prochaine et notable de leur part dans le mix énergétique. Il sera alors loin le temps où l’énergie des vagues ne servait qu’à actionner des cloches juchées sur des bouées en guise de signalisation maritime, ce que Victor Hugo évoquait dans L’Homme qui rit comme une « sorte de clocher de la mer… »