Jean-Claude Chabloz en collaboration avec
JoĂŤl Reymond
POUR AIDER LES MALADES et ceux qui prient avec eux
Chapitre 1 :
L’amour pour rien Aujourd’hui, je visite un grand malade. Je suis prêt . Enfin, je pense l’être. Car j’ai assez vécu la maladie moi-même : à ce jour, le temps de ma vie passé sur un lit d’hôpital ou confiné sur le mien se compte en mois et même en années. Je veux commencer par parler de moi-même, brièvement. Beaucoup de personnes sont venues me voir : des camarades d’école pour m’apporter les devoirs, des amis, des voisins. J’attendais d’abord et surtout du réconfort, une assurance, simplement sentir que quelqu’un était là, comme le dit si bien Philippe Yancey. Ceux qui étaient embarrassés au point de ne pas pouvoir dire grand-chose m’ont finalement fait plus de bien que les autres. Beaucoup ont tenté d’expliquer ma souffrance. « La malchance », disaient-ils ou « l’école de la faiblesse qui va te grandir en humanité ». Croyants, ils avaient leurs théories : Dieu me punissait. Ou c’était le diable. Les plus spirituels me disaient que j’avais été sélectionné par Dieu soigneusement pour qu’il se glorifie au travers de ma vie, sous-entendu : qu’un témoignage de foi, de joie et d’espérance rendu au Tout-Puissant, malgré ou grâce à la souffrance, avait un grand prix. Ces discours m’ont perturbé plus qu’ils ne m’ont apporté de l’aide. Aussi, dans la visite que je m’apprête à rendre, je serai économe de mes mots. Le malade est fatigué, il peut être un public tout trouvé pour des gens qui voudraient, en définitive, travailler à leur propre sanctification. Je serai sensible et délicat. Car la douleur décuple la sensibilité. Je ne plaindrai pas mon 9
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hôte ; ça ne se fait pas. J’écouterai, bien sûr. Son histoire, je la connais déjà. Je la connais même bien. Je l’ai entendue une soixantaine de fois. Mais je veux l’entendre tout à nouveau. La visite des malades est un service quelque peu oublié. Il est pourtant adressé à tous les croyants. C’est le cœur même de la foi chrétienne, tel que le voit Jacques, le frère du Seigneur : « Visiter les orphelins et les veuves et se garder des salissures du monde » (Jc 1,17). Une notion fondamentale transparaît dans cette déclaration : Jésus s’identifie aux opprimés, aux affamés, aux mal-vêtus, aux étrangers, aux malades, aux prisonniers, à tous ceux qui ont besoin d’aide. Dans le Premier Testament, on appelle toutes ces personnes les anavim, c’està-dire « les petits ». « Le bien que vous faites à tous ces gens qui ont besoin d’aide, vous le faites à moi, le bien que vous leur refusez, c’est à moi que vous le refusez », a dit Jésus. La première chose prescrite par notre Seigneur envers les malades n’est pas de les guérir, mais de les visiter, de les rencontrer (on peut être ensemble dans un lieu sans se rencontrer vraiment) et de leur rendre service. Ces trois termes sont employés tour à tour dans l’un des derniers discours de Jésus à ses disciples. Il rapproche aussi maladie et prison. Tant de malades nous disent : « Je suis en prison dans mon propre corps ». La question de la guérison viendra après la visite. Telle est la priorité. Nous sommes peu à nous rendre au chevet du grand malade que je visite aujourd’hui. Lui et moi sommes de la même génération. Cela nous rapproche. Il a des enfants adultes – il en avait, devrais-je dire, car il les a perdus et il les pleure. J’ai moi aussi l’âge d’être grand-père, même si je n’ai jamais eu d’enfants dans la chair. Mais l’épreuve qu’il traverse est extrême. De loin, je l’aperçois. Le retrouver est toujours un choc. Je ne m’y fais pas et je crois que c’est bien ainsi. Il a fait sa demeure à l’écart des tentes, là où l’on jette cendres et détritus. La cendre, c’est aussi le seul environnement qui n’irrite pas ses plaies. Il est à moitié nu, décharné, méconnaissable, ce patriarche déchu. Il est ridicule même, avec ce morceau de poterie qu’il a toujours à la main pour se gratter. 10
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Les maladies de la peau ont toujours une dimension particulière. C’est un organe à nul autre pareil. Il enveloppe nerfs, os, sang et muscles. Il est le plus relationnel de tous, celui qui à la fois nous délimite et nous relie au monde. Les liens entre la peau et le psychisme remontent à notre constitution dans le sein maternel. J’arrive en catimini. Trois autres visiteurs, chenus et graves, l’entourent déjà. Six jours qu’ils sont prostrés à côté de lui sans rien dire. Si je ne suis pas venu plus tôt, c’est parce que je me connais trop bien : une journée de silence me semble déjà mission impossible. Je m’assieds aussi. C’est bien de se mettre au même niveau que la personne souffrante que l’on visite. Il ne doit pas y avoir de différence d’altitude. J’arrive juste à temps pour entendre Job rompre le silence. Il maudit le jour de sa naissance. Je n’étais pas là, mais j’imagine assez facilement la liesse qui a accompagné sa venue au monde. « Un fils nous est né ! ». Les enfants couraient de tente en tente, la rumeur se répandait, les pères frappaient des mains et les mères se fendaient d’un large sourire attendri. Quand un Oriental maudit sa propre naissance, c’est fort. C’est terrible. Job est en deuil et en dépression. « Pourquoi ne suis-je pas mort dans le ventre de ma mère ? Pourquoi n’ai-je pas rendu le souffle en voyant le jour ? Pourquoi deux genoux m’ont-ils accueilli ? Pourquoi ma mère m’a-t-elle nourri de son lait ? (...) Pourquoi donner la lumière du jour au malheureux ? Pourquoi donner la vie si c’est pour qu’elle soit si amère ? » Les premiers visiteurs sont parvenus, une semaine durant, à porter les signes visibles du deuil avec Job sans piper mot, puis c’est assez. Élifaz, le premier : « Pour une fois que le malheur tombe sur toi, tu craques ? Rappelle-toi qui était toujours là pour redresser les autres dans la galère : c’est toi ! Relève-toi, Job. Pense à tous ceux qui te regardent et que tu as aidés jadis. Veux-tu donner l’impression que tes paroles n’étaient que du vent ? » 11
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Cela part mal. Le malade sent à la seconde s’il y a du jugement dans le cœur de celui qui le visite. Un tel soupçon se lit immédiatement dans le regard. Quand j’étais malade, alité, je l’ai lu chez des visiteurs distanciés de la foi, chez des visiteurs croyants et chez des pasteurs. Chez Élifaz, c’est évident. Et le rappel des exploits passés de Job ? J’ai été pasteur et je confirme que quand on est malade, on a beau « savoir », on a quand même besoin des autres pour nous le dire. Dans ces moments-là, on n’attend pas d’abord une manifestation tangible de l’amour de Dieu, mais de celui de notre visiteur, qui nous aidera, comme un tremplin, à retrouver celui de Dieu. J’ai conscience de mon propre avantage, outre celui de ma santé, sur mon ami souffrant et même sur ses conseillers : je sais la scène étonnante qui s’est produite dans l’assemblée des fils de Dieu, dans le conclave céleste où le Satan, le Calomniateur, a parié avec le Très-Haut qu’aucun être humain ne pourrait en définitive l’aimer pour rien . L’amour de l’humanité pour son Créateur dépend toujours de ce qu’elle reçoit de sa main, voilà le pari de Satan. Comment ce secret m’a-t-il été révélé ? Cela est un mystère en soi. Mais aujourd’hui comme hier, je ne suis pas certain que cela aide Job de savoir ce qui s’est tramé en haut lieu. Du reste, Élifaz lui-même a une révélation à faire valoir. Un fantôme lui a déclaré solennellement : « Le mortel serait-il plus juste que Dieu ? L’homme serait-il plus pur que son Auteur ? Non ! » Voilà l’équation posée : il n’y a pas lieu de prendre un air choqué quand la souffrance s’abat sur vous, parce que vous récoltez ce que vous avez semé. Le Ciel est en train de vous donner la monnaie de votre pièce. Faites le bien et vous serez prospères et en bonne santé. Faites le mal et le mal vous poursuivra. Quoi de plus simple ? Job cache quelque faute. Il est temps de la confesser et il sera rétabli. Job est d’accord que Dieu est derrière son épreuve. Et il le dit de manière forte et crue : « il me cible, il me décoche des flèches, il me vise, il me fouette, il ne me laisse pas reprendre mon souffle, il me gave d’amertume jusqu’à la nausée ! » 12
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Dieu en accusation : il n’y a pas un grand malade qui ne se soit posé cette question. J’ai l’impression d’avoir une plus grande mesure de sympathie pour Job que ne l’ont ses amis de longue date. Il faut dire que je suis un homme du xxe siècle. Nous autres modernes aimons ceux qui se révoltent contre l’injustice du monde. Et surtout, nous avons mis Dieu en accusation à cause de la souffrance. Le grand écrivain britannique C. S. Lewis fait observer que pendant très longtemps, nous nous sommes approchés de Dieu comme un coupable devant le juge et que les rôles se sont depuis inversés : du haut de la chaire du tribunal, on s’approche d’un Dieu qu’on imagine dans le box des accusés. « Ah, combien je voudrais que l’on pèse ma peine et que tout mon malheur soit mis sur la balance ! » C’est la demande de beaucoup de souffrants. Puis Job parle de ses nuits. Je le suis sans peine. C’est tout différent, la nuit. Quand on dort, on fait des cauchemars. Quand on ne dort pas, on ne peut pas bouger dans son lit comme on le voudrait. Il y a souvent du bruit, particulièrement dans les hôpitaux. Les heures s’égrènent très lentement. Job, lui, n’en peut plus. Sa condition est insupportable. Le deuxième visiteur prend la parole à son tour. Bildad en appelle à la mémoire des siècles : les fautes sont rétribuées, ainsi en va-t-il depuis que le monde est monde. Job ose-t-il penser qu’il en aille autrement pour lui ? Et d’inviter son ami souffrant une nouvelle fois à considérer sa conduite et à faire son mea culpa. Qu’il se tourne vers Dieu ? Job veut bien se tourner vers Dieu, mais à quoi bon ? Ce dernier est le plus fort. Dieu l’a dépouillé comme on pille une ville vaincue, mais Job ne peut lui faire de reproches. C’est un impossible procès intenté au Très-Haut. Il entre donc dans un marchandage. « Si j’ai péché, Toi qui scrutes tout, cela t’a-t-il vraiment atteint ? Pourquoi ne pardonnes-tu pas ma faute ? » Que peut-il bien avoir fait de si grave ? Job ne voit pas – en tout cas rien qui justifie pareille déchéance. À moins que Dieu ne le pourchasse pour une faute 13
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de jeunesse dont il se serait subitement souvenu – mais la jeunesse est connue pour ses excès. Et une faute confessée, couverte par un sacrifice, est oubliée, non ? Job se déclare non-coupable. Ces paroles ont le don d’irriter le troisième visiteur, qui lui reproche son entêtement. Le ton se durcit. Tsofar le confronte : « Tu dépasses les bornes, l’ami. Vraiment. Il faut que quelqu’un te fasse taire. Montre plus de respect envers Dieu et rappelle-toi qui tu es. Oui, Dieu pardonne, mais tu dois faire ta part. Là, il te répondra. » Il est vrai que Job se prend pour le centre du monde. C’est typique de tant de malades chroniques et c’est vrai que cela met nos nerfs de visiteurs parfois à rude épreuve ! Job se sent inférieur. Il se compare avec les bien-portants : « J’ai tout aussi bien que vous de l’intelligence. Je ne vous suis pas inférieur ! » Et pourtant, c’est évident qu’il le ressent ! « Le malheureux n’a droit qu’au mépris ! » – beau proverbe, facile à prononcer quand tout va bien pour vous ! Job demande maintenant le silence. Y a-t-il quelqu’un qui l’écoute ? Y a-t-il quelqu’un qui prenne du temps pour accueillir ses paroles ? Les propos d’un grand souffrant ne sont pas agréables à entendre ni à dire : ils peuvent être teintés de tristesse, de dépression, d’angoisse, mais aussi de violence, de haine ; cela peut être un cri. Qui veut écouter cela ? « Moi aussi je pourrais parler comme vous, si j’étais à votre place. Je vous ferais la leçon. Je hocherais la tête en signe de pitié. » Il est plus facile à un malade de se mettre à la place d’un bien-portant que le contraire. Il est difficile de se mettre dans la position du malade. C’est même 14
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un piège. Personne ne peut dire, « je me mets parfaitement à votre place ». Seul le Christ en est capable. Nous autres visiteurs, il nous faut être beaucoup plus modestes. En même temps, un grand malade a besoin de se sentir compris. Il sera soulagé que quelqu’un marche dans ses babouches ou ses mocassins un bout de chemin. « Le nombre de mes jours touche à sa fin », dit Job. Il y a tout un jeu sur les mots avec les grands malades. Ils évoquent leurs maux par métaphores. Ils disent leur « grande maladie » mais pas « le cancer ». Ils parlent de la mort sans la nommer. Ce langage feutré, censé mettre une barrière entre eux et leur maladie, met en définitive une barrière avec ceux qui les entourent. Job a demandé la mort. Mais elle ne vient pas. Dès lors, il estime que ses prières stridentes sont des cris dans le vide. Et il demande un médiateur. Qui le défendra devant Dieu ? Ses visiteurs ? Ils veulent le protéger, c’est certain. J’ai l’impression qu’ils ont peur, en fait. Mais de quoi ? Du toupet de Job. Le pauvre péquin qui s’accrocherait au manteau d’un dignitaire en le suppliant pour ci ou pour ça serait immédiatement écarté manu militari par son entourage, rossé pour l’exemple aussi, sans nul doute. Mais là ? Il s’agit du Tout-Puissant, de celui devant lequel s’agenouillent les rois les plus puissants. On ne peut pas laisser Job brailler pour recevoir de Dieu une explication personnelle, il s’expose à de graves châtiments. Et la peur des visiteurs est en train de passer à la colère, alors qu’ils s’enferrent dans leur logique. Les trois sages ont perdu leur calme initial. Quant à Job, il semble s’être calmé après ses éclats incontrôlés des débuts, quand il frôlait le blasphème – quand il laissait aller son imagination à se demander si Dieu n’était pas, au fond, un sadique qui ressentait du plaisir à le faire souffrir. Mais il est obsédé par sa souffrance et plus encore, par son idée de procès. Je comprends son dilemme : reconnaître que son malheur est mérité compromettrait son intégrité, alors qu’il a beau chercher, sa conscience ne l’accuse pas. Mais rejeter Dieu ? Il ne peut ni l’un ni l’autre. C’est un bizarre combat entre le bien et le bien. 15
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Tout en l’écoutant, je repense à Abraham que Dieu a pareillement placé dans l’étau de la contradiction, quand il lui a commandé de lui sacrifier son fils, son unique, celui qu’il aimait. Comme à une vulgaire divinité païenne ? Comme chez les peuplades de la contrée où la pratique était monnaie courante ? Cela ne tient pas debout ! C’est le même combat que Job, dans un autre contexte. Il avait fallu à Abraham des dizaines d’années pour accepter que la promesse de Dieu se réaliserait et qu’il aurait un fils. Et voilà que son rêve se brisait de la main même de celui qui en avait toujours été le garant. Mais Abraham a obéi malgré tout. Robert Schuller, un pasteur qui a aussi visité Job par le passé, résume la posture de ses trois visiteurs de la sorte : « La souffrance émane de Dieu ; Dieu est juste ; tu es coupable ». La posture de Job ne diffère que d’un paramètre : « La souffrance émane de Dieu ; Dieu est juste ; je suis innocent ». Cela peut paraître paradoxal, mais Job, tout en mettant en doute la bonté de Dieu, refuse de lui tourner le dos, voire de le maudire en face, comme le lui a lancé son épouse qui a complètement craqué – et qui peut la juger ? Job s’accroche même à Dieu, comme à son dernier espoir. Le Tout-Puissant est son persécuteur mais il est aussi son sauveur, il ne le lâchera donc pas. Jamais. « Même si Dieu voulait me tuer, je m’attendrais à lui ! » Quand je trouve une telle attitude chez un souffrant, je me dis qu’il est en train d’entrer dans la lumière. Je n’ai pas peur pour lui. Il va trouver le chemin. Mais ce n’est pas tout. Job appelle d’abord Dieu son juge. Il voudrait le prendre par la main et l’amener aux assises. Pour l’instant, Dieu se dérobe. Puis il le nomme son arbitre – la même chose, mais la hauteur du magistrat en moins. Ensuite son témoin, celui qui va se tenir à ses côtés. Finalement, il appelle Dieu sa caution, son garant auprès de lui-même. Dans les moments les plus tristes et les plus sombres surgissent parfois des paroles qui sont des diamants bruts. Il n’est pas rare de voir les ténèbres des malades déchirées par des éclairs de révélation et de prophétisme. Les plus hautes révélations sont celles qui concernent la personne de Dieu et c’est de là 16
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que procède la véritable théologie. Une petite lucarne s’est ouverte sur le ciel, éphémère, pour mon grand malade. Saisit-il le mystère qu’il est en train de toucher ? Il est en pleine révélation de la rédemption, car il va plus loin : « Je sais que mon sauveur est vivant. Il se lèvera le dernier sur la terre après que ma peau aura été détruite. Je le contemplerai en personne ; moi-même et personne d’autre. Oh combien je voudrais déjà voir ce jour... » Ses visiteurs (mais les entend-il encore ?) sont maintenant agressifs, accusateurs et même mesquins, alors que Job se fait de plus en plus paisible et posé. Le voici qui retombe cependant dans le déni, la révolte, « pourquoi moi ? », la négociation et le désespoir. Et finalement, le répit, l’acceptation. Le cycle se répète. Puis il se lance dans un nouveau monologue. Il est intarissable. L’évocation nostalgique des jours du bonheur perdu, la misère d’aujourd’hui, alors qu’il est la risée de personnages dont le rang est dix fois inférieur au sien, un long examen de conscience, les derniers instants de son existence qui s’approchent, tout y passe. Même si ce sont les mêmes confidences et les mêmes griefs, sans cesse ressassés, il faut écouter les grands malades. Il y aura un temps pour briser, peut-être, cet enfermement sur soi, ce cycle infernal ; c’est chaque fois une grâce lorsque c’est possible, mais ce n’est pas maintenant, en tout cas. Ses visiteurs sont scandalisés, en effervescence. « Tu prétends être en règle avec Dieu. Au moins, maintenant, il est clair que tu es en faute : une audience auprès du Tout-Puissant ? Mais c’est inconcevable ! » Ces trois visiteurs bien-portants ne sont pas des hommes de paille. Ils ont de l’âge et argumentent avec brio. Leur problème, c’est que leur saine théologie ne s’applique pas à Job. Cela fait maintenant plusieurs heures que ma visite a commencé. C’est devenu un concert de cris. Ces monologues âpres et passionnés ne se rencontrent plus depuis un certain temps. Les invectives fusent de part et d’autre : « consolateurs de pacotille ! », « tête de mule », « bourreaux ! », « pauvre fou ! ». Tsofar ne 17
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dit plus rien, mais je crois que c’est parce qu’il bout intérieurement. Ses rictus et sa couleur en disent suffisamment. S’il ouvre la bouche, il va dire des horreurs. Après avoir dressé une liste de crimes dont il est innocent et lancé un dernier défi, Job sombre dans le mutisme, brisé. Mais voilà que le quatrième visiteur s’exprime à son tour. Il est plus jeune. Il a laissé les aînés discourir et a bridé sa fougue jusqu’à présent. « Job vous a cloué le bec, c’est ça ? Donc il a raison : c’est la faute de Dieu... Vous les anciens, vous n’avez plus rien à répondre ? J’en conclus que la sagesse ne rime pas avec le nombre des années ! » Comme il les rudoie ! À Job, il explique que Dieu parle de mille manières et qu’on n’y prend pas assez garde. Mais surtout, il dit que Dieu ne fait pas d’erreurs. Pour la première fois, je vois l’homme que je visite esquisser un semblant de sourire. Élihu le répète : « Je ne comprends pas tout, mais Dieu ne se trompe jamais ! » Étonnamment, Job n’a rien à répondre. Les couleurs du ciel sont en train de virer à l’orange. On dirait le crépuscule. Il est tard et tout a été dit. Job va mourir avec ses questions sans réponse, mais la tête haute, convaincu d’emporter dans l’au-delà son intégrité, à défaut de toute autre chose. Ses visiteurs vont s’en retourner chez eux avec leur propre certitude, celle d’avoir tout fait pour ramener celui qui était leur ami de sa folle et coupable obstination. À l’horizon, on ne distingue plus le djebel, mais ce n’est pas le crépuscule. Tout est orange et le vent lourd qui se lève annonce une tempête de sable. Il faut que les autres visiteurs aident Job à aller se mettre à l’abri, mais il est quasiment indéplaçable et de toute façon, il n’a visiblement aucune intention de se sauver. Les visiteurs plus âgés déguerpissent après avoir supplié Job de venir. Élihu lui a saisi le bras pour l’emmener, arrachant au vieillard un cri sourd de douleur, mais en vain. Les alizés, qui soufflent toujours de l’Est, charriant le sable rouge du wadi, environnent déjà le campement. Tout le monde s’est mis à l’abri. La tempête est telle qu’elle assourdit tout cri. 18
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Et voilà qu’une voix retentit, dominant la fureur des vents : « Qui est-ce qui dénigre mes plans en discourant sur ce qu’il ignore ? Debout, Job. Sois un homme ! Nous allons nous expliquer, toi et moi ! » Combien de fois ai-je moi-même souhaité pouvoir amener de grands malades à lever les yeux afin de voir la situation dans son ensemble, sans y parvenir ? Je suis soulagé. Cet homme-là, dans une épreuve aussi extrême, seul Dieu pouvait le rejoindre et surtout, le confronter – il n’y a que cela qui puisse l’aider. Et bien justement, il va l’avoir, son audience ! Job a posé trente questions, Dieu lui en retourne le double. « Où étais-tu quand j’ai fondé le cosmos ? Sais-tu combien il y a d’étoiles et à quelle fréquence vibre chacune ? Bien sûr que tu le sais, tu les entends toutes chanter et tu les a comptées avec moi alors que toutes les créatures du ciel criaient hourra ! » Il ose se moquer de Job ! « Est-ce toi qui as fixé la limite des océans comme on lange un nouveauné ? Est-ce toi qui as donné au cheval la force et la bravoure, à l’aigle la hauteur, et qui as refusé l’intelligence à l’autruche ? » C’est une déferlante de contre-questions insolubles, les pluies battantes d’un orage. J’ai toujours pensé que nous n’avons pas les bonnes réponses parce que nous ne posons pas les bonnes questions. Si nous posons les bonnes questions, nous avons déjà une partie des réponses. Voilà maintenant Job sur le banc des accusés, qui découvre un dessein beaucoup plus vaste que sa propre destinée. Le Tout-Puissant ne répond pas aux interrogations fondamentales qui ont tant tourmenté le pauvre homme. Dieu n’illumine pas, par la connaissance, l’obscurité de la question du mal et de la souffrance, si ce n’est en se donnant lui-même à connaître. Cela suffira-t-il ? Attendons de voir.
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Manifestement, le Tout-Puissant ne manifeste aucune sympathie pour la condition physique et psychique de Job. Il lui offre un époustouflant tour de la nature : le ciel, les montagnes, les rivières, les prairies, les fleurs, les animaux, les minuscules qu’on néglige et les grands qui nous effraient , les grosses bêtes repoussantes et les petites qui nous attendrissent. La nature fait partie de la liste impressionnante des moyens que Dieu a donnés à l’humanité pour sa guérison. En décrivant les merveilles de la nature, en se délectant tout particulièrement de son aspect sauvage, Dieu pointe les limites de la loi naturelle chère aux visiteurs de Job ; il montre aussi qu’en donnant toutes ces lois à l’univers, il lui a conféré une grande mesure d’autonomie afin de ne pas intervenir lui-même en permanence. Mais surtout, il révèle sa majesté et le soin qu’il prend de chaque élément de son œuvre, des étoiles du firmament au brin d’herbe sur lequel la goutte de rosée se dépose le matin. Cette exposition de force implacable et de splendeur en équilibre avec le soin et la tendresse fait craquer Job. « Enfin ! », me dis-je. « Je ne fais pas le poids. Je vais me taire. » Dieu n’adresse aucun reproche à Job pour ce qu’il a dit, mais seulement d’avoir parlé sans savoir. Il critique seulement son point de vue limité. Et le voilà qui reprend de plus belle avec son barrage de questions et élargit la vision de Job à l’univers tout entier. Cette fois, le patriarche craque en profondeur. Il comprend : il a fondé ses jugements sur des preuves insuffisantes. En somme, avec infiniment de poésie, Dieu lui dit à peu près ceci : « Job, jusqu’à ce que tu en saches un peu plus sur la manière de diriger l’univers physique, évite de me dire comment diriger l’univers moral. » Job accepte la vision globale qui lui est donnée. Il accepte que Dieu soit Dieu. Sa présence même a fait que ses doutes se sont dissipés. Job n’a pas tout compris, mais il est satisfait. Ce que Dieu lui a dit lui convient. « J’ai parlé de choses qui me dépassent. Je retire tout ce que j’ai dit. » Job n’est plus dans l’apitoiement, il est vraiment dans la repentance, maintenant. La grâce a opéré. Son caractère, sa nature profonde, tiennent bon. Il a gagné. Et Dieu aussi. 20
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Il est un homme que cette démonstration divine a laissé sur sa faim, avec le sentiment d’une profonde injustice qui demeure, c’est Élie Wiesel. Le prix Nobel de la paix, survivant des camps d’extermination nazis, a co-écrit Job ou Dieu dans la tempête en 2000. Dans cet ouvrage, il se révolte contre Job parce que ce dernier ne s’est pas suffisamment révolté contre Dieu. Je n’aurais pas cédé à sa place, assure Élie Wiesel. C’est un autre cri en réponse au cri de Job. À une échelle plus grande encore que le supplice de Job, la Shoah a été une épreuve si extrême et une injustice si massive qu’elle ne peut être expliquée par aucune des catégories habituelles de la théologie. Où était Dieu pendant la Shoah ? La question a été posée par des sceptiques et par des croyants. Élie Wiesel lui-même a formulé une réponse à cette question dans la plus sordide des situations : lorsqu’un enfant a été exécuté publiquement à Auschwitz à côté de deux adultes. Quelqu’un derrière lui a posé par trois fois la question, « Où donc est Dieu ? ». La dernière fois, en passant devant l’enfant agonisant au bout de sa corde, Élie Wiesel répond alors : « Où il est ? Le voici, il est pendu ici, à cette potence ». C’est un de ces éclairs prophétiques qui jaillissent du sein même de la nuit des grands souffrants. Auprès de Job, mystérieusement, Dieu était là. Job a beaucoup parlé, plus que ses visiteurs. Il a vidé son sac. Et Dieu a entendu. Il ne l’a pas interrompu. Au travers de Job, Dieu dit : « Je t’écoute ». Et : « Je suis d’accord avec tes plaintes contre ce monde qui ne tourne plus rond. » Dieu aime se montrer à ceux dont la foi est si déterminée que le bien ou le mal ne changeront rien à leur croyance. Job goûte d’abord ainsi à une nouvelle mesure de la personne de Dieu. Sa guérison et sa récompense sont premièrement d’ordre spirituel. Cela, je le dis aux malades. « J’avais entendu parler de toi. Maintenant, je t’ai vu de mes propres yeux ! » J’aimerais être aussi solide que Job dans l’épreuve. Si je me suis révolté et que j’ai dressé le poing contre le ciel, ce ne fut jamais avec autant de puissance que le patriarche. Peut-être aurais-je dû ? Ma connaissance de Dieu serait-elle aussi plus profonde aujourd’hui ? 21
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Mais quand va-t-on avouer à Job ce qui s’est passé en coulisses ? Quand va-t-il avoir vent de cette rencontre choquante entre le Tout-
Puissant et le Satan qui ont disposé de ses biens, de la vie des siens et même de sa peau ? C’est Dieu qui a parlé le premier au Malin, en le provoquant : « As-tu vu mon champion ? ». Job est le meilleur représentant de l’espèce humaine. S’il avait su tout cela, cela aurait faussé l’issue du concours ; je comprends qu’il ait dû rester dans l’ignorance. Mais maintenant que c’est fini ? Eh bien non finalement, ni Job ni ses faux amis n’en sauront rien. Sa guérison est en marche et elle touchera son être tout entier, sa peau attaquée, sa paix intérieure, sa confiance en Dieu, son statut économique, sa vie de famille et ses relations sociales. Le voilà maintenant qui prie même en faveur de ses visiteurs, car Dieu est irrité contre eux. Ils ont rendu un mauvais témoignage et il le leur fait savoir. Un malade priant pour des bien-portants ! Quel retournement ! Je prends donc congé de Job, une nouvelle fois sous le charme. Entre nous, ce pari lancé tout au début dans le ciel ne ressemblait pas à la rencontre de deux poids lourds se retrouvant sur un ring pour en découdre, comme on a pu le dire et le croire. Dieu ne milite pas dans la même ligue que son contradicteur. Il demeure un abîme infranchissable entre le Créateur et sa créature révoltée. Chaque fois que le second a voulu s’en prendre à Job pour le détruire, il a dû demander l’autorisation du premier, qui lui a fixé une limite claire, afin de protéger son poulain. Il n’en reste pas moins que le Tout-Puissant a accepté de remettre sa réputation entre les mains d’un simple homme. Coup de poker ?
Élifaz avait dit à Job : « Un homme peut-il être utile à Dieu ? Cela faitil plaisir au Tout-Puissant que tu sois juste ? Si tu es intègre et honnête, qu’y gagne-t-il ? ». C’est une déclaration très spirituelle mais complètement fausse. Il a fallu que Job reste attaché à Dieu alors que tous ses avantages personnels lui étaient arrachés, pour rabattre le caquet de l’Accusateur, qui a perdu son pari. Oui, quelqu’un a aimé Dieu, alors qu’il avait tout perdu. Quelqu’un est resté attaché à Dieu envers et contre tout. On peut aimer Dieu pour rien, selon le titre du fameux commentaire d’Alphonse Maillot. Pour rien, par amour. Quelqu’un l’a fait. Dieu a dévoilé à Job les merveilles de sa Création, mais la merveille qui a le plus impressionné Dieu, c’est Job 22
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lui-même. La foi d’un simple homme a envoyé une onde de choc dans la galaxie tout entière. L’activité surnaturelle qui se déroule autour de nos épreuves et de nos combats reste la plupart du temps cachée à notre entendement. Parfois, elle nous est connue dans certains détails. Restons modestes : nous ne saurons jamais au cours de cette vie la portée de nos actions sur cette terre. Cela, je le dis aux malades. J’ai longtemps pensé que le parcours de Job était le traitement le plus complet de la souffrance qu’on puisse trouver et, à la suite d’Osvald Chambers, une sorte de manuel pour nous apprendre comment souffrir. Aujourd’hui, je suis persuadé que la souffrance n’est pas le sujet principal de son histoire. C’est la foi. La foi qui traverse l’épreuve. Job a tout perdu. Nos pertes ne sont peut-être pas aussi sévères – licenciement, accident, deuil, divorce, difformités, addictions, etc. Mais elles nous poussent aux mêmes questions : « Pourquoi moi ? Qu’ai-je fait ? À quoi me sert Dieu s’il reste sourd à mes cris ? ». Nous prenons facilement les circonstances comme nos ennemis. Nous prions Dieu de changer les circonstances malheureuses et adverses, voire les gens qui nous entourent, alors que son projet est de nous changer, nous, et de nous conduire à croire en lui dans toutes les circonstances. Chaque vie a son lot de souffrances, mais j’ai souvent dit qu’elles étaient mal réparties. Moi, j’écopais de tout, un vrai paratonnerre à maladies et mes copains, rien. Je me souviens en particulier d’un camarade de classe pétant de santé. Il est mort, il y a longtemps. Je suis toujours là, par la grâce de Dieu. Je n’ai plus les mêmes pensées que jadis. Ce qui compte, c’est la manière dont je me positionne face aux épreuves et jusqu’où je suis prêt à aller avec Dieu. Cela, je le dis aux malades. Je réfléchis aussi aux épreuves subies par les « préférés » de Dieu, dans toute l’histoire sainte : Job, Noé, Daniel, trois géants de la justice cités en exemple par le prophète Ézéchiel. David, lui aussi, a souffert dans le silence de Dieu. Toutes ces souffrances sont un test de caractère et une école de l’obéissance. À travers ces épreuves déchirantes de la foi, tous ces croyants ont atteint un 23
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niveau de fidélité qui n’était pas accessible autrement. L’apôtre Paul a parlé de la communion aux souffrances du Christ. Il a même parlé d’y ajouter ce qui manque. C’est une parole énigmatique, parce que le sacrifice du Christ sur la croix est amplement suffisant. Si je ne comprends pas ce texte, je veux tout de même le recevoir. Ma souffrance prend une autre signification quand je la comprends comme une partie intégrante de ce que mon Seigneur et Sauveur a enduré au Calvaire. Cela, je le dis aux malades. Visiter Job m’a rappelé que pour tenir debout dans la tempête, j’ai besoin d’une foi tenace, endurcie, qui croit contre toute attente. C’est ce qui fait la différence dans la maladie. Comme Job, nos réactions à la maladie et aux épreuves ont un impact sur nous, sur notre entourage, sur le monde et sur Dieu. Nous sommes assurés que nos propres épreuves ont un lien avec ce qui se passe dans tout l’univers. Job s’est accroché à un fil, le plus ténu, celui de la foi, face au grand plan de Dieu pour sauver toute la terre, et il a gagné. Dieu a fait la grâce aux gens ordinaires de participer à la rédemption du cosmos en entrant dans ce combat contre le mal, et en étant ses champions. Notre obéissance à Dieu, notre amour et notre confiance en lui : voilà qui contribue à renverser l’injustice et la souffrance de ce monde. Il y a encore une leçon pour nous qui nous intéressons à la maladie et à la guérison : Dieu se soucie davantage de notre foi que de notre bien-être. Dans le post-modernisme, tout est axé sur notre bien-être. Dieu est là pour exaucer nos demandes. Et la santé est un droit. Dieu nous la doit. Or, il ne nous doit rien du tout. C’est un cadeau qui nous est fait. Cela, je le dis aux malades. Le projet de Dieu pour chasser le mal de cette planète dépend aussi de la foi de ses disciples. La Création tout entière attend la manifestation de ceux qui souffrent, pestent, protestent comme Job mais qui gardent la foi que Dieu ne commet pas d’erreur et que tout sera rétabli à la fin, dans son jugement. C’est en rétrospective que j’écris tout cela. Pour ceux qui restent « au milieu du tunnel » où ils se languissent du secours de Dieu, rappelons-nous de les visiter. -o24
L’amour pour rien
Le projet de Dieu pour l’humanité n’est pas la maladie, la souffrance et la mort, mais la santé, le bonheur et la vie éternelle. Quand on veut aborder la guérison divine ou miraculeuse, il faut bien sûr ouvrir la Bible – non seulement à partir de la vie de Jésus racontée dans les quatre évangiles puis dans les premiers pas de ses apôtres, mais aussi du Premier Testament : dans « l’histoire sainte », Dieu n’attend pas longtemps avant d’ouvrir le sujet.
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Chapitre 1
Le banc des disciples Note : plusieurs chapitres de cet ouvrage sont agrémentés d’une telle section, destinée à ceux qui voudraient creuser davantage les différents sujets abordés. Les dix choses que je retiens de cette visite : 1. Dieu n’est pas directement la cause des problèmes de Job. Il les a seulement permis, mais c’est Satan qui a causé la souffrance. Dieu ne peut pas infliger le mal, qui est contraire à sa nature profonde. Il lui suffit de retirer sa grâce, de relever son aile protectrice, comme quelqu’un l’a dit, pour que le mal reprenne ses droits et nous frappe. 2. Les déistes pensent que Dieu s’est retiré du monde après l’avoir créé. Or, les lois naturelles montrent que Dieu prend soin durablement de toutes ses créatures et qu’il veille sur elles. 3. Job offre une réfutation de la théorie simpliste selon laquelle la souffrance est une résultante directe des péchés individuels (la théorie des trois visiteurs). Cela peut être le cas mais on ne peut en faire une règle. Attention à nos jugements dans ce domaine. 4. La justice de Dieu ne se manifeste pas entièrement dans cette vie, comme le défendaient là encore les amis « naturalistes » de Job. 5. Dieu n’a pas condamné le doute et le désespoir de Job, ni sa révolte ni ses paroles exagérées. Tant de grands malades disent des choses terribles... 6. Dieu montre que personne ne détient toutes les données en rapport avec la souffrance humaine. Job a cru qu’il était juste devant Dieu et Dieu injuste. Ses trois amis défendaient l’inverse. Dieu n’était pas en train d’humilier Job, mais de l’exalter. Tous ont dû apprendre qu’ils avaient perçu la situation à partir d’une perspective limitée.
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L’amour pour rien
7. Dieu n’est jamais complètement silencieux ou absent. Il parle au travers de la nature et de personnes que nous n’aurions jamais imaginées. Même la souffrance peut être l’un des langages de Dieu. « Dieu murmure dans nos moments de joie, il nous parle par notre conscience, mais il tonne dans nos souffrances. C’est son mégaphone pour réveiller un monde engourdi », a dit C. S. Lewis (The problem of pain, Harper Collins Publishers). 8. Un conseil religieux bien intentionné peut faire plus de mal que de bien. La certitude d’avoir raison peut étouffer la compassion. De la part des visiteurs de Job, le silence aurait été meilleur. Leur semaine initiale de silence restera le meilleur moment de leur visite. 9. Un hymne à la nature ? Dieu n’a pas répondu directement aux questions de Job. Parce que l’enjeu était ailleurs. Aux « pourquoi ? » de Job, on peut dire que Dieu a répondu : « pour que… ». La maladie et l’épreuve, une fois qu’elles sont installées et si terribles soient-elles, peuvent-elles servir au bien ? 10. Dans le projet de Dieu, la souffrance peut être rachetée ou servir un but plus élevé. Dans le cas de Job, une période de grande épreuve a été utilisée par Dieu pour remporter une victoire importante, personnelle, familiale, cosmique même. À travers sa souffrance imméritée, Job l’Intègre a préparé l’univers à la plus grande des révélations, celle du Juste vivant une vie absolument parfaite et endurant pourtant le Calvaire pour remporter la plus grande des victoires : le Christ.
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Table des matières
1. L’amour pour rien ............................................................................ 9 2. Celui-qui-te-guérit ......................................................................... 29 3. Guérir ou prévenir ? ........................................................................ 49 4. Jésus guérisseur ............................................................................... 71 5. Les malades & leur entourage ......................................................... 89 6. Quand on a tout essayé ................................................................ 105 7. Allez, guérissez ! ............................................................................ 121 8. Quand la guérison tarde ............................................................... 137 9. Le ministère de la guérison divine de A à Z .................................. 159 10. Quelques leçons à tirer de nos pères et de nos mères ..................... 203 11. Posfaces ........................................................................................ 215