Pierre de la chapelle "Le bonheur est avec DIEU"

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LE BONHEUR EST AVEC DIEU LA FOI DANS LA VIE D’UN HOMME D’AFFAIRES CHRÉTIEN

PIERRE DE LA CHAPELLE

PRÉFACE DE CARLOS PAYAN


Le bonheur est avec Dieu

Pierre de la Chapelle


T able de s matiè r e s Préface....................................................................................................... 9 Chapitre 1 Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ? ........ 15 Chapitre 2 Dieu est Trinité ................................................................... 37 Chapitre 3 « Homme et femme, Dieu les créa » .................................. 61 Chapitre 4 « Prions sans cesse » ........................................................... 75 Chapitre 5 L’Église est ma maison....................................................... 85 Chapitre 6 « Qu’ils soient un comme nous sommes un » ................. 109 Chapitre 7 Dieu appelle et envoie....................................................... 119 Chapitre 8 Jésus agit et guérit aujourd’hui....................................... 139 Chapitre 9 Quelques guérisons divines.............................................. 149 Chapitre 10 Pourquoi nos prières ne sont-elles pas toujours exaucées ?.............................................................................................. 165 Chapitre 11 Mon engagement peut-il être source d’espérance ? .... 171 Chapitre 12 Ma vie a-t-elle un sens ? ................................................. 181 Conclusion ............................................................................................ 191


Chapitr e 1 Que l a é té l’itiné r air e de ma re ncontr e ave c Die u ?

Comme beaucoup de « cathos » de ma génération, j’ai reçu une éducation chrétienne, davantage subie que choisie, marquée par des témoins dont je n’ai pas saisi l’importance sur le moment : mes parents d’abord puis mon frère Jean, mort pendant la guerre d’Algérie. J’ai été longtemps animé d’une grande curiosité spirituelle sans bien savoir ce que je cherchais. Dans les années 1970 par exemple, j’ai collaboré au Cercle St-Jean-Baptiste, à Paris, avec le Cardinal Daniélou, personnage aussi fascinant que déroutant, à la fois intellectuel et visionnaire. À la même époque, j’ai participé à plusieurs soirées de prière organisées par la communauté de l’Emmanuel dans la crypte de StSulpice. Elles étaient animées par des laïcs – c’était nouveau pour l’époque – et j’y rencontrais des personnes (laïcs, prêtres, religieuses) en quête d’un peu d’amour et de réconfort pour les aider dans la souffrance et la solitude que je les entendis exprimer. Des pauvres de cœur ! Personne ne leur posait la moindre question, ils venaient et repartaient dans l’anonymat, sûrs d’être respectés et aimés gratuitement. J’observais là quelque chose de nouveau qui m’attira par sa simplicité, sa chaleur et son humanité. Les animateurs étaient des gens


Le bonheur est avec Dieu

« normaux », célibataires ou couples de tous milieux, bien ancrés dans le monde, des gens comme moi ! Après notre installation à Versailles, je collaborai à l’aumônerie du Lycée Hoche sous la conduite du Père Stanislas Lalanne, futur évêque de Coutances. Lors d’un week-end de Carême avec des élèves de 3ème, je leur ai parlé de la Passion puis les ai répartis en groupes, leur disant : « Imaginez que vous êtes journalistes au “Jerusalem Post”. Vous avez suivi les péripéties d’un aventurier nommé Jésus. Vous avez assisté partiellement à sa crucifixion et vous devez rédiger la première page de l’édition du samedi matin ». Chaque groupe s’installa devant une grande feuille, et je les laissai travailler tout en leur faisant noter l’atmosphère d’espoir, mais aussi de haine et de peur qu’avait suscitée Jésus à Jérusalem. Une demi-heure plus tard, je revins et plaçai côte à côte les feuilles rédigées par les différents groupes. Je leur fis constater le travail accompli, leur relation critique des évènements du Vendredi Saint, dénonçant Jésus comme un imposteur. Puis, leur demandant le silence, je déroulais une mince bande de papier en travers de leurs travaux, sur laquelle était écrit en gros caractères rouges : « Dernière minute ! Il est ressuscité ! ». Ma propre démarche, inspirée sans nul doute, les et me bouleversa car elle nous mettait pour la première fois en face du scandale de la Croix. Cet homme arrêté, torturé, injurié et crucifié est mort pour nous sauver, pour me sauver, sans aucune contrepartie de ma part. Je me souvins de cet évènement lorsque, presque trente années plus tard, je vis le film « La Passion » de Mel Gibson, qui me bouleversa malgré ses excès de violence et d’hémoglobine. A Versailles, avant de partir au Venezuela, j’avais entendu parler, en des termes très critiques, de la « théologie de la libération » et des « communautés de base ». Des « apôtres » non-violents en étaient deux ecclésiastiques brésiliens, le Cardinal Arns, dont j’entendis une homélie remarquable à Sao Paulo, et Dom Helder Camara, l’évêque de Recife, dont j’avais lu plusieurs ouvrages. Arrivé au Venezuela, je désirais en savoir davantage. Nous avons rendu visite au Père François, missionnaire français, qui nous invita à l’accompagner dans un village de petits paysans 16


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

pauvres, exploités par des chefs locaux qui les volaient, les rançonnaient. Ils avaient économisé bolivar après bolivar (monnaie locale équivalente à l’époque au dollar US) pour construire un hangar qui leur servait d’église. Durant un temps de prière, chacun exposait aux autres ses difficultés et ses joies. Les responsables de cette « communauté de base » leur répondaient en citant des passages de la Bible qui faisaient écho à leur témoignage. En particulier ce texte d’Isaïe 41, retrouvé souvent en période de découragement, de tristesse ou d’envie d’abandonner ce que j’entreprenais : « Je te choisis. Je ne t’abandonnerai pas. Ne crains pas car Je suis avec toi. N’aies pas peur car Je suis ton Dieu et Je t’aime ». J’étais bouleversé, découvrant la Bible, ce livre de vie d’un peuple qui souffre et se réjouit, à la recherche inlassable de l’Amour que Dieu lui propose et que sans cesse il repousse sous l’emprise de ses idoles. Ils m’ont montré un Jésus proche, à la fois humain et divin. Ce jour-là, Dieu me parla à travers ces gens pauvres et apparemment insignifiants. Il me fit comprendre que la Bible est un « best-seller », non parce qu’elle raconte de belles histoires mais parce qu’elle est un livre inspiré par Lui, à la fois dans et hors du temps. Mais ma perception restait encore extérieure, au niveau de la simple curiosité intellectuelle. Notre séjour au Venezuela puis au Mexique m’obligea à me poser beaucoup de questions sur ma foi, sur l’Église. Quotidiennement, j’étais témoin de contradictions et de paradoxes. Contradictions entre le « Te Deum » qui inaugurait le mandat de chaque nouveau Président de la République vénézuélienne, dont le régime fonctionnait dans une corruption systématique, et les paroisses misérables du Père François ou du Père Oswaldo dont nous fîmes la connaissance. Paradoxe au Mexique entre la liturgie et la dévotion populaire des Indiens qui mélangeaient à la foi « hispano-chrétienne » des croyances issues de leur tradition aztèque. La fête de Notre Dame de la Guadalupe, célébrée le 12 décembre à Mexico, en est une illustration évidente. Tout ce que j’avais reçu, appris, plus ou moins assimilé sans réfléchir, se trouvait remis en cause. Je réalisai, un peu inconsciemment, 17


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qu’il était temps de passer d’une foi traditionnelle et familiale à « ma » foi, c’est-à-dire une foi que je devais choisir de nouveau, en pleine connaissance de cause, et m’approprier. J’avais besoin de « re-naître » à ma foi, à l’image de Nicodème en Jean 3, comme le disait si bien le Père Christian de Chergé, prieur de Tibhirine : « Notre identité d’homme va de naissance en naissance, et de naissance en naissance, nous arriverons bien à mettre au monde l’enfant de Dieu que nous sommes ». Le chemin a été long et semé d’embûches ! En attendant, mon épouse Marie-Françoise et moi avons animé une soirée hebdomadaire de prière à la paroisse française : le mardi, tout le monde savait que nous priions, quel que soit le nombre de participants. Il suffisait de nous communiquer les intentions de prière ou de venir. Nous passions une heure ensemble, quoi qu’il arrive. Cela nous servira d’exemple, vingt ans plus tard, lorsque nous créâmes un groupe de prière, le lundi soir à la paroisse Notre-Dame de Versailles. Au retour en France, je ne pouvais plus vivre ma foi et mon appartenance à l’Église comme auparavant ! Je ne supportais plus cette religion limitée au dimanche et désincarnée. Commença une lente période d’errance et de recherche spirituelles, durant laquelle je ne savais pas bien formuler ce que je voulais ! Pendant quatre années, mon désir se creusa. Un jour, des amis nous invitèrent à un week-end organisé par une communauté nouvelle, des « charismatiques ». Marie-Françoise y participa seule et revint enthousiasmée. Par prudence, je me « défilai ». mais je m’inscrivis au week-end suivant qui eut lieu trois mois plus tard. Je sus immédiatement que c’était ce que je cherchais et désirais à la fois. Pourquoi ? Parce qu’enfin, on prenait en compte l’intégralité de ma personne, dans ses dimensions physique, intellectuelle, psychologique, émotionnelle et spirituelle. Parce qu’enfin, je voyais des gens « comme moi » témoigner d’une foi incarnée, c’est-à-dire vécue dans la banalité quotidienne de leur vie conjugale, familiale, sociale, professionnelle. Parce qu’enfin, chacun se montrait dans sa pauvreté, mais aussi dans sa beauté unique. Parce qu’enfin, je participais à un évènement sans avoir l’impression d’être jugé, moralisé. 18


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

Ce que je vivais là et voyais vivre faisait écho à ce dont j’avais été témoin chez le Père François, au Venezuela. Le dimanche, je me sentis progressivement envahi d’une grande paix intérieure qui me semblait venir d’un “Autre”. J’étais méfiant et inquiet à l’idée d’avoir vécu un week-end euphorique, puis de me retrouver abandonné dans un monde agressif, en contradiction avec cette paix que je désirais continuer à expérimenter. J’avais peur d’avoir été manipulé. J’ai alors adressé une courte et timide prière à Dieu : « Je veux bien Te suivre mais je n’ai jamais pensé à Toi en dehors d’une heure certains dimanches, alors prends soin de moi et appelle-moi pendant la semaine. J’essaierai de dire Oui ». C’est ainsi que, la semaine suivante, j’ai senti de façon concrète que Dieu entrait doucement dans ma vie. Par exemple, avant ou pendant une réunion difficile, le nom de Dieu me venait à l’esprit, ce qui ne m’était jamais arrivé, comme pour me dire : « Je suis là. Tu es libre, quoi que tu décides. Je suis là et Je t’aime ». En septembre suivant, je suis entré dans cette communauté. J’avais l’impression que « Quelqu’un » m’y appelait, m’y attendait. Sans discuter – cela ne m’était jamais arrivé – j’ai accepté les exigences proposées : priorité à Dieu par la prière et la participation sacramentelle, vie communautaire (dans des modalités assez respectueuses des personnes), formation humaine et spirituelle, versement d’une contribution financière (appelée dîme). J’entrais dans une communauté charismatique catholique, composée de laïcs, qui proposait des modalités radicales, mais respectueuse de la vie familiale. Ce fut difficile car je me trouvai intégré à un groupe d’environ vingt-cinq personnes qu’en temps normal, je n’aurais pas choisies comme amies pour des raisons d’âge, de milieu, d’opinion. J’ai beaucoup râlé mais à travers ces personnes que je rencontrais une à deux fois par mois, j’ai découvert Dieu, ce Père incroyablement bon, Jésus, son Fils montrant à la fois sa totale humanité et sa totale divinité, et l’Esprit Saint, souffle d’amour qui m’inspirait, me guidait.

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Le 15 janvier 1990, j’écrivais : « L’expérience de Dieu, c’est pour moi la certitude de la foi et de l’Amour. Elle se sent par la perception de l’amour de Dieu pour moi dans la vie quotidienne et dans la prière, malgré une difficulté constante à reconnaître ce qu’Il me dit. Elle se sent dans un bonheur intérieur constant. Elle se traduit par un regard différent, par un amour des autres, par une écoute. Moi qui aime l’action et qui l’ai toujours privilégiée et même opposée à la réflexion, je découvre l’énergie propre à l’intériorité. Ce n’est pas intellectuel, c’est une réalité. » Au printemps 1991, le fondateur de cette communauté dut démissionner, entraînant une crise interne grave. Cela ne remit pas en cause mon appartenance. Je savais que la Bible, comme l’histoire de notre Église, abondent d’exemples de prophètes et de visionnaires qui, sous l’inspiration de l’Esprit Saint, ont créé telle congrégation ou tel ordre, puis qui ont « craqué », en général pour des affaires de sexe, de pouvoir ou d’argent (ne serait-ce que le roi David !). J’écrivis alors deux lettres successives (la première étant restée sans réponse !), demandant une plus grande transparence de la part des responsables. Du coup, je fus appelé à participer à l’équipe en charge des problèmes financiers. Je pris ainsi conscience de la relation complexe qu’entretiennent les Catholiques à l’égard de l’argent. Contrairement aux Protestants, nous avons tendance à culpabiliser ceux qui gagnent de l’argent. C’est un sujet tabou dont personne n’ose parler ou dont on parle avec autant de pudeur que de sa sexualité. Je découvris progressivement que la responsabilité que j’occupe, le pouvoir que je détiens et l’argent qui en découle ne m’appartiennent pas. Ils me sont confiés, non pour mon unique jouissance mais afin de contribuer à l’épanouissement des personnes avec qui je suis en relation (couple, famille, travail, social). A partir de cette réflexion, j’ai élaboré puis donné des formations un peu partout dans la communauté, en particulier auprès des cadres et dirigeants d’entreprise. J’appris ainsi à parler d’argent et à demander de l’argent ! Je désirais vivre ma foi dans mon milieu professionnel. Mais comment en parler si j’étais interrogé ? Je ne pouvais rester seul. Il me 20


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

semblait évident que le monde professionnel ne peut être évangélisé que par des personnes qui en font partie, dont la foi est solidement quillée (à l’image d’un bateau). Alors, avec quelques amis, j’ai créé, à l’intérieur même de ma communauté, un groupe communautaire, dénommé « Engagement dans la Cité », d’environ vingt personnes. Nous partagions notre expérience professionnelle quotidienne et l’enrichissions à la lumière de notre foi, nous appuyant, entre autres, sur une lettre aux catholiques de France, écrite en 1994 par Mgr Claude Dagens et intitulée « Proposer la foi dans la société actuelle », dans laquelle il est écrit : « Nous sommes en train de changer de monde et de société. Un monde s’efface et un autre est en train d’émerger, sans qu’existe aucun modèle pré-établi pour sa construction. C’est dans cette société cassée que la foi doit être proposée non pas comme un modèle de résignation à l’inacceptable, mais comme un appel à garder le cap de l’espérance, au prix du courage et de l’initiative. Nous voilà appelés à proposer l’Évangile, non pas comme un contre-projet culturel ou social, mais comme une puissance de renouvellement qui appelle les hommes, tout être humain, à une remontée aux sources de la vie. » En parallèle, chaque année, je suivis des formations :  humaines, afin de mieux me connaître et d’apprendre à mieux vivre en relation ;  spirituelles, au Foyer de Charité de La Roche d’Or, dirigé à l’époque par un prêtre au charisme très fort, le Père Florin Callerand. Je me souviens en particulier d’une retraite sur l’Apocalypse de Jean. Je suivis en outre deux formations aux « exercices spirituels de St Ignace » données par des Jésuites.  mixtes au « Centre Entreprise » du Monastère bénédictin de Ganagobie, où j’ai participé à une formation très intéressante sur la règle de St Benoît, modèle de management pour les entreprises. En même temps, je me suis fait « coacher » (terme à la mode), tant au niveau humain et professionnel qu’au niveau spirituel (par un père jésuite). 21


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Il est évident que l’ensemble de ces réflexions et formations ne pouvait qu’avoir une influence profonde sur ma vie personnelle, conjugale, familiale, sociale et professionnelle. Dieu transforma lentement, mais totalement ma vie. La vie de prière que j’essayai de développer porta des fruits étonnants. Arrivant dans mon bureau, j’aimais beaucoup, avant d’ouvrir le moindre tiroir ou d’allumer mon ordinateur, m’adresser à Dieu, Lui offrir ma journée et Lui demander de m’inspirer, de me guider, de me conduire. Je lisais alors la prière suivante : « Au début de cette journée, Seigneur, bénis ce bureau et la responsabilité que j'y exerce. Tu me l'as confiée pour être d'abord Ton serviteur et le serviteur de chaque homme. Apprends-moi le silence qui est réflexion et prière, mais aussi inspirateur de décisions justes. Apprends-moi à être témoin de Ton Amour infini, à Te reconnaître en chaque homme et à savoir T'écouter à travers lui. Que les talents que Tu m'as donnés soient déployés pour rendre à chaque homme sa dignité et sa divinité, tout en respectant les impératifs économiques qui me sont imposés et que j'accepte. Sois loué, Seigneur, de m'appeler en ce lieu pour Te servir. » Avant une réunion professionnelle difficile, je priai et m’aperçus que mes interventions étaient plus posées et plus justes, donc plus efficaces. Autre exemple, chaque année, je devais recevoir chacun de mes collaborateurs pour leur dire ce que je pensais d’eux et parler de leur avenir. Tâche d’autant moins aisée que parmi eux, figuraient toujours le « paresseux sympa » ou le « bosseur râleur ». Dans une courte prière préalable, je confiais l’entretien à Dieu en demandant à l’Esprit Saint de me guider et de m’inspirer. Les résultats m’ont toujours étonné. C’est l’époque où j’ai été invité à donner des témoignages publics : à Angers devant des étudiants de l’association « Chrétiens des grandes écoles », à Zurich lors d’un rassemblement organisé par « Campus, Crusade for Christ », à Pontoise lors d’un rassemblement régional du mouvement MCC, ou devant les responsables de la mission étudiante catholique d’Ile-de-France. En même temps, avec ces mêmes copains, nous avons créé les « matinées-rencontres Cité ». Il s’agissait de petits 22


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

déjeuners, organisés un samedi matin par mois, dans un restaurant parisien. Les invités étaient répartis en table de huit personnes. La matinée se déroulait en trois temps : d’abord, en prenant le petit déjeuner, chacun se présentait aux autres ; puis on partageait sur un thème – celuici étant introduit par un court témoignage – et enfin quelqu’un donnait un petit enseignement qui partait d’une synthèse de ce que nous avions entendu. Les thèmes abordés étaient, entre autres, les suivants : - « Vie professionnelle et vie personnelle » - « La vie professionnelle et mes priorités. Ma vie a-t-elle un sens ? » - « Face aux difficultés, rester debout » - « Vie professionnelle et respect de l’homme : vers des relations plus humaines » - « Faut-il sacrifier sa vie pour réussir dans la vie ? » - « Ma relation à l’argent, à l’autorité, au pouvoir ». On proposait ensuite un cycle de six soirées plus spécifiquement spirituelles. De même, nous organisions des week-ends du type de celui par lequel je suis entré dans la communauté. Expérience passionnante, en particulier lorsqu’un week-end fut donné dans le campus de ThomsonCSF, à Jouy-en-Josas, durant lequel j’eus la joie d’accueillir des personnes avec lesquelles je travaillais. Ainsi ma foi évoluait, s’enrichissait, s’élargissait, s’approfondissait. Le jour de Pâques 1994, j’écrivais : « Comme tout homme, j’ai dans ma vie des zones d’ombre que je recouvre soigneusement. Elles jalonnent ma vie mais je crois que Jésus les a prises tout au long de son chemin de croix. Il a pris la misère de chaque homme qui accepte le repentir et l’a montée au fil des souffrances, des crachats et des insultes jusqu’à la crucifixion au Golgotha. Il emporte ces forces de mort et de destruction dans le feu pour les purifier et les guérir. Il prend la haine, ma haine, mes infidélités, tout le mal que j’ai fait. Je les revois ces événements, un à un, depuis mon enfance jusqu’à maintenant. Jésus les emporte sur son dos avec la Croix. Il les porte et les amène à Son Père pour que je sois sauvé, pour ma rédemption. C’est la première fois que je réalise la puissance incroyable de la mort et de la résurrection de Jésus. Je 23


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comprends ainsi l’amour infini de Dieu, le don de Son Fils, venue préparée et annoncée par les prophètes, et pourtant non reconnue par la majorité de ses contemporains. Il vient chercher chaque homme pour le sauver. Quand je pense que Jésus est cloué sur la croix et me regarde en me disant : “Donne-Moi tous tes péchés et par Ma mort, tu seras sauvé”, il y a dans cet événement quelque chose d’incroyable. Cet homme était vraiment le Fils de Dieu. » En septembre 1996, à Lausanne où nous étions venus passer quelques jours, j’écrivais cette prière : « Seigneur, fais de moi ce que Tu veux, mes talents sont bien limités, mon courage irrégulier, et pourtant je suis ému par la détresse du monde et de tous ceux que je côtoie malgré ma tendance à essayer de ne pas les voir. Fais de moi un être de vérité en toutes circonstances, donne-moi du courage vis-à-vis des tentations du monde. Jésus, me voici ! Je ne me sens pas bien fort ni brillant, et sans Toi, je ne sais pas faire grand-chose. Esprit Saint, conseille-moi, donne-moi la lumière et conduis-moi dans les chemins risqués. Ils sont inconfortables mais c’est là que je retrouve le vrai chemin de l’Amour. » En mars 1997, lors d’une session d’exercices spirituels ignaciens, j’écrivis, après un long temps de prière, l’exhortation suivante qui m’a semblé être un cadeau de Dieu pour la suite de mon histoire, même si je l’avais quelque peu oubliée : « Ma volonté, c’est que tu Me loues et Me serves pleinement, là où tu es, aujourd’hui. Partout où tu es, sois tourné vers Moi. Dans tout ce que tu vois, regarde-Moi. A qui que tu t’adresses, parle-Moi. Car Je suis ton Dieu et Je t’aime. Quoi que tu fasses, fais-le pour Moi. Quoi que tu dises, dis-le pour Moi. Quoi que tu écrives, écris-le pour Moi. Que tu ries ou que tu pleures, que ce soit pour Moi. Car Je suis ton Dieu et Je t’aime. » 24


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Cette communauté ne me suffisait pas. J’avais besoin de recevoir davantage et de donner davantage. Mais quoi ? J’ai alors rencontré un homme, ensuite devenu un père spirituel pour moi, qui m’a fait aimer mon Église catholique, telle qu’elle est. Il a été à l’origine de profondes transformations dans ma vie. Charlie Cleverly, pasteur anglican, fut prêté pendant dix ans à l’Église Réformée de France pour occuper la lourde responsabilité de la paroisse ERF de Paris-Belleville. D’une paroisse moribonde d’une cinquantaine de membres, il a fait avec sa femme Anita une paroisse rayonnante, dynamique et où les conversions sont fréquentes. Charlie est un homme de Dieu, un prophète de notre temps. Il m’embarqua dans l’aventure des Conférences « Embrase nos cœurs », rassemblements où se retrouvent, pour prier Dieu et chanter ensemble, des chrétiens de toutes confessions. Ces conférences furent créées dans la mouvance d’une nouvelle pentecôte vécue en 1994 dans une église de Toronto (Canada). Depuis, plusieurs millions de personnes, dont MarieFrançoise et moi, sont venues dans cette église recevoir un enseignement centré sur l’amour infini de Dieu Père et en faire l’expérience. À notre époque, nous avons une image trop souvent déformée, d’une part de Dieu – on le voit sévère, justicier, moralisateur – et d’autre part du père, compte tenu de l’éducation reçue. Le propos de ces rassemblements est de faire goûter à chacun(e) l’amour infini de la paternité de Dieu – à l’image du père se jetant dans les bras de l’enfant prodigue (voir Luc 15) – dans le souffle à la fois doux et puissant de l’Esprit Saint. Au cours de la première conférence, j’ai vécu une expérience très forte. L’un des intervenants canadiens pria pour moi, je suis alors tombé dans ce qu’on appelle le « repos dans l’Esprit »1. J’y suis resté un long

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“L'expérience du repos dans l'Esprit peut être considérée comme une des formes de communication du Saint-Esprit, qui se saisit de tout notre être : physique (corporel), psychique (émotionnel) et spirituel (théologal). C'est pour ainsi dire une expérience de plénitude de Dieu vécue dans la totalité des composantes de notre être ; comme le dit l'apôtre Paul : « Que le Dieu de la paix lui-même vous sanctifie totalement, et que votre être entier, l'esprit, l'âme et le corps, soit gardé sans reproche à l'Avènement de notre Seigneur Jésus Christ » (1Thes 5, 23). Ce phénomène se produit dans l'invocation et

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moment – presque une heure – durant lequel j’ai eu la vision suivante : j’étais au bas d’un long escalier majestueux, recouvert d’un tapis rouge, en haut duquel se trouvait un trône majestueux sur lequel était assis un agneau immaculé. J’étais en adoration devant « l’Agneau de Dieu », d’une innocence à la fois vulnérable et puissante par Sa pureté. Tout à coup, j’ai vu des bras levés vers l’Agneau, tenant à la main des poignards couverts de sang. J’ai alors hurlé, ne comprenant pas qu’on touche à cet agneau, dont je voyais pourtant que les poignards ne réussissaient pas à l’atteindre. Beaucoup plus tard, j’ai compris que ces poignards ensanglantés représentaient le péché des hommes, mon péché en fait. Cette vision m’a marqué de façon indélébile. Organisées près de Paris, ces conférences accueillent chaque année environ 1 500 personnes de tous milieux, de toute provenance, de toutes confessions chrétiennes : catholiques, protestants, baptistes, anglicans, évangéliques, pentecôtistes, avec des pasteurs, des prêtres, des religieux. Y participent également des juifs messianiques (juifs qui reconnaissent en Jésus le Messie). J’y ai été témoin de conversions, de guérisons étonnantes, tant physiques que psychologiques. Voici ce que j’ai dit de ces évènements devant des membres de ma communauté : « Cette aventure interconfessionnelle m’a permis d’expérimenter, jusque dans ma chair, l’amour infini de Dieu. J’y ai appris à changer mon regard sur mon Église catholique, à aimer et respecter mes frères protestants et évangéliques. Ils m’ont donné une foi et une confiance inébranlables en l’amour trinitaire de Dieu. J’y ai expérimenté que lorsqu’on se tourne vers lui avec foi et patience, rien n’est impossible à Dieu.» Dans le prolongement des conférences « Embrase nos cœurs », nous créâmes « Intercession France ». Nous savons en effet qu’en ce début du XXIème siècle, en tous points de notre planète, des chrétiens de toutes confessions se sentent appelés à s’unir dans un même cri d’intercession pour les nations ! Les sujets de prière ne manquent pas : l'accueil conscientisé du Saint Esprit.” (Extrait d’un texte de la communauté des Béatitudes).

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dégradation des mœurs, insécurité, terrorisme, exclusion, guerres, persécutions, désastres humanitaires ou écologiques. Ces réseaux d’intercession se sont développés, comme spontanément, retrouvant la pratique biblique du peuple d’Israël qui, à l’appel des prophètes, faisait pénitence. Durant les 40 jours du Carême 2000, dans toute la France, « Intercession France » rassembla, pour la première fois dans la prière, des chrétiens de différentes Églises, principalement catholiques, protestantes et évangéliques. L’appel fut si largement entendu que nous avons décidé de poursuivre cette initiative, chaque année et pour une durée de sept ans. Grâce à l’expérience acquise avec « Embrase nos cœurs » et aux fruits constatés auprès de membres de ma communauté charismatique, des responsables m’ont demandé d’animer des cycles de formation à la « Vie dans l’Esprit Saint ». Ils furent organisés dans toute la France (plus d’une vingtaine de week-ends) puis, en espagnol, au Chili et en Colombie, auprès des communautés locales. J’y ai vu l’illustration vivante, concrète de ce verset de Jean 15 : « Ce n’est pas vous qui M’avez choisi. C’est Moi qui vous ai choisis pour que vous portiez du fruit et que ce fruit demeure ». Les fruits, tant au niveau des personnes que des groupes, ont été étonnants (guérisons, réconciliations, …). Pour pouvoir préparer et assurer tous ces week-ends, ainsi que leur nécessaire suivi, je quittai mon activité professionnelle. La conséquence de ces cycles de formation fut que j’acquis une certaine notoriété dans la communauté et qu’en mai 2001, j’en fus élu responsable national. Je n’avais aucune expérience et peu de compétence pour une telle responsabilité. Douze personnes avaient été nominées, j’étais le seul volontaire, peut-être par ignorance de ce qui m’attendait, mais, au moment du discernement, je ne vis aucune raison sérieuse de refuser. Afin de concrétiser et d’ancrer cette nouvelle responsabilité – j’étais élu pour un mandat de quatre ans – je m’engageai « dans la durée » avec mon épouse. Cet engagement eut lieu au cours d’une célébration eucharistique, organisée à Angers en septembre 2001, en présence de l’évêque accompagnateur de la communauté. J’ai alors dit publiquement : « Je m’engage à suivre Jésus-Christ, quoi qu’il arrive, au sein de cette communauté ». En ce qui concerne le « quoi qu’il arrive », j’allais être servi ! Immédiatement après avoir été élu, je suis monté sur le podium 27


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pour remercier ceux qui m’avaient élu et prononcer une première intervention. Dans ma précipitation, j’oubliais que, selon nos statuts, le président international devait confirmer cette élection. Ce qu’il fit avec un certain humour en me surnommant « Petit Tonnerre » et en m’offrant une BD de ce cheval un peu fou. La communauté étant alors implantée dans dix-huit pays, je faisais partie du Conseil International qui se réunissait une fois l’an dans l’un ou l’autre des pays. C’est ainsi qu’en octobre 2001, je me rendis au Chili et en octobre 2002, à Bruges. La communauté française comptait alors environ 1 500 personnes, réparties en neuf régions géographiques. Elle organise de nombreuses activités de formation et d’évangélisation pour les jeunes (12-14 ans, adolescents, 18-25 ans, jeunes professionnels, jeunes en situation d’exclusion), pour les couples et les familles, pour les artistes, pour les séniors et pour les aînés. J’arrivai au « siège », comme un éléphant dans un magasin de porcelaines, dans une atmosphère qui me semblait bien différente de la fraîcheur et du dynamisme des sessions et week-ends ! Il me fallait agir dans la douceur et la recherche du consensus – bien peu mon caractère ! – tout en recherchant des financements nécessaires à nos missions. Je pensais que la base m’avait élu pour apporter de la nouveauté, du « feu de l’Esprit Saint » ! Je me suis alors heurté à une certaine inertie de « l’institution », sa peur de l’inconnu, sa méfiance à l’égard de quelqu’un qui n’avait pas d’expérience de gouvernement dans la communauté ! C’était inévitable, mais sans doute ai-je été maladroit, ai-je voulu aller trop vite et trop fort. De plus, je découvris qu’un certain nombre de problèmes existaient depuis des années – notamment au niveau de la gouvernance – mais peutêtre avaient-ils été recouverts d’une épaisse couche de silence ! Combien d’heures de prière ai-je passé dans l’oratoire à demander à Dieu ce que je faisais là et ce qu’Il attendait de moi ! Que de conflits où j’avais raison sur le fond mais où la forme utilisée devenait désastreuse ? Alors, début 2003, ne supportant plus cette atmosphère étouffante, j’ai démissionné. La situation que je décris n’a rien d’exceptionnel ! 28


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

Combien d’associations chrétiennes vivent ce genre de crise ? Elle fait partie du processus normal de croissance d’une jeune communauté. Toutes les communautés ou congrégations d’Église affrontent périodiquement de telles situations, à commencer par les premières communautés chrétiennes. Il suffit de relire dans les Actes des apôtres, le récit des conflits entre Paul et les responsables de l’Église de Jérusalem. Après son arrestation, Pierre comparaît devant le Sanhédrin, le sage Gamaliel donne alors l’avis suivant (voir Actes 5, 38-39) : « Si cette œuvre est des hommes, elle se détruira d’elle-même ; mais si vraiment elle vient de Dieu, vous n’arriverez pas à la détruire. Ne risquez pas de vous trouver en guerre contre Dieu. » Afin de pouvoir décompresser sans ruminer ni essayer de savoir ce qui se passait à la suite de ma démission, je partis pendant un mois au Chili chez Denis et Graciela Gallet, d’excellents amis, qui m’aidèrent à entrer dans une longue période de deuil, de récupération mais aussi de pardon et de réconciliation. Je désirais en effet que ma séparation de la communauté se déroule paisiblement, dans la transparence et la vérité. Cette période difficile allait m’apporter une certaine sagesse. À mon arrivée à Santiago, Denis me demanda de l’aider, en participant à ses activités de conseil. Associé à Pedro Arellano, il dirige « Desafio », société dont la vocation est de « former et communiquer, par des actions très concrètes, une Espérance, fondée sur un ordre de valeurs qui favorise une Culture au service de l’Être Humain. Un ordre de valeurs, fondé sur notre spiritualité chrétienne, qui se met à la portée de l’homme et de la femme du monde contemporain. Un ordre de valeurs qui place l’être humain au centre de sa préoccupation et comme sujet de son occupation. Un ordre de valeurs qui aide à mettre l’essentiel au cœur de l’important, l’être au milieu du faire et de l’avoir.» Je fus impressionné par l’audace et l’efficacité de « Desafio ». Trois exemples : Le premier en Colombie. À Bogota, ils rassemblèrent 250 personnes, sous le patronage de l’Université catholique. Organisés en petits groupes – un tiers de patrons d’entreprises, un tiers de jeunes étudiants, un tiers de prostituées en cours de réhabilitation, venant de la banlieue la plus pauvre et violente de Bogota – ces hommes et ces 29


Le bonheur est avec Dieu

femmes dialoguèrent pendant deux jours sur le thème de la réconciliation qu’entre Colombiens ils devaient vivre en vue de redonner espoir à leur pays. L’impact de cet évènement fut incroyable. Le second au Chili. À Santiago, ils firent venir de grands témoins, comme Muhammad Yunus, créateur au Bangladesh du microcrédit en faveur des pauvres. Lors de sa venue, ils organisèrent des réunions avec des patrons, des ministres, des parlementaires et même une entrevue avec le Président de la République. Tous écoutèrent, dialoguèrent avec cet homme dont l’initiative s’est répandue dans le monde entier avec l’appui de la Banque Mondiale. Il leur expliqua comment éradiquer ce mal endémique de la société chilienne : le fossé existant et croissant entre riches et pauvres. Des propositions ont été faites, des décisions prises et des réalisations concrètes engagées. Le troisième au Chili également, ce qu’ils appellent « El Encuentro en Lo Alto ». Un premier événement fut organisé en mars 2006 en présence de Mgr Pascal N’Koué, évêque béninois, un rassemblement d’environ 280 personnes pendant trois jours dans une station de ski située à 2 600 mètres, au-dessus de Santiago. Sur le thème « Nous sommes la lumière du monde », les participants – patrons d’entreprise, prostituées en réhabilitation, SDF, chrétiens ou non, jeunes ou vieux, prêtres, religieux ou religieuses, pasteurs – ont ensemble été « à la rencontre de soi-même, de l’autre, de Dieu, de la Création ». Par ailleurs, Denis et Pedro ont créé dix groupes de développement pour dirigeants d’entreprise – chacun avec 15 à 20 personnes de mêmes niveaux hiérarchiques – qui se réunissent pendant une demi-journée, chaque mois. Ce temps convivial se termine avec un intervenant extérieur qui, à partir de sa propre expérience et de ce qu’il a entendu, donne son témoignage, auquel les autres réagissent. Huit fois en 2003, je fus cet intervenant extérieur. Je ne saurai trop remercier Denis et Pedro de m’avoir invité à donner mon témoignage. Les réactions de la centaine de personnes rencontrées m’ont stupéfié pour plusieurs raisons. En premier lieu, parce que je sais depuis longtemps que notre monde vit dans une dynamique exclusive du succès et qu’en général, celui qui tombe, quelle que soit sa part de responsabilité, est poussé dans le fossé. Entendre quelqu’un, qui a laissé une certaine réussite 30


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

professionnelle pour s’engager à plein temps dans l’associatif, parler d’un échec – au moins humain – puis expliquer comment cette épreuve peut être source de « re-naissance », les a beaucoup touchés et même en a rejoint certains qui avaient vécu une épreuve de ce type sans jamais avoir osé l’avouer. L’un d’eux, qui avait souffert d’un échec professionnel important, m’a dit : « Ce n’est pas l’échec qui est difficile, c’est la réussite. La réussite, source d’orgueil et d’intolérance, conduit souvent à l’échec alors que ce dernier peut être source de renaissance et de résurrection ». Alors que ces groupes sont purement non confessionnels, il cita l’exemple de la vie de Jésus qui, limitée à l’aspect humain, est un échec cuisant mais qui pourtant conduit à la résurrection et au salut des hommes. La seconde raison de ma surprise fut que Denis m’interdit de préparer quoi que ce soit avant de parler. Il me demanda simplement d’écouter et de « laisser parler mon cœur ». J’ai prié à chaque fois et j’en ai constaté les fruits à travers mes auditeurs. J’ai donné un peu et reçu beaucoup. Pendant ce séjour, j’ai rencontré les deux responsables de la filiale chilienne de ma communauté charismatique. En parlant avec eux, il m’a alors semblé évident que, quittant cette communauté, je devais œuvrer afin que ce départ soit vécu, de part et d’autre, dans la paix, la vérité et, si possible, dans la réconciliation. Enfin, les responsables de la branche locale des hommes d’affaires me demandèrent d’animer une soirée de prière d’une centaine de personnes le samedi, veille de Pentecôte, alors même que les membres de la communauté française étaient réunis dans un grand rassemblement que j’avais initié. Deux ans auparavant, j’avais animé à Santiago un cycle consacré à la vie dans l’Esprit Saint. J’étais à l’époque « auréolé » du succès de ces cycles en France et de ma récente élection. Mais là, j’arrivais en plein dépouillement et ce fut une belle soirée. De retour en France, il fallait retrouver la réalité, vivre cette épreuve et en sortir. Bien qu’ayant quitté la communauté, je désirais rester fidèle à mon engagement public de « suivre Jésus-Christ, quoi qu’il arrive ». Ce fut long et délicat mais finalement, tous mes liens se 31


Le bonheur est avec Dieu

dénouèrent progressivement dans la paix et la vérité. En attendant qu’un nouvel engagement fort se présente, j’ai pris ou repris quelques activités pas trop lourdes. Outre la poursuite de ma participation aux comités « Embrase nos cœurs » et « Intercession France » (jusqu’en mars 2005), je participai à l’organisation de nouveaux événements avec l’association « Paris Tout est possible » fondée et animée par un ami pour qui j’ai beaucoup d’estime et d’amitié, le pasteur évangélique Carlos Payan. En parallèle, j’ai suivi à l’École Cathédrale un cycle de théologie de deux ans qui m’a passionné et a éclairé mon expérience des vingt années précédentes. A la demande de mon diocèse, j’ai animé un groupe en charge des actions œcuméniques dans le doyenné. L’œcuménisme demande beaucoup d’amour, de patience, de tolérance et d’humilité car les critiques et les susceptibilités fleurissent de tous côtés. Lorsque, sur la demande du curé de la paroisse Notre-Dame de Versailles, nous avons créé un groupe de prière, intitulé « Réconciliation », dans lequel il y a des protestants, des membres du Conseil paroissial ont refusé d’accueillir ces derniers. Il a fallu l’insistance du curé et l’intervention de l’évêque pour y arriver ! Tout cela était intéressant mais je désirais un engagement « lourd », non plus une addition de petits engagements ponctuels. Je cherchais une activité qui me permette, non plus de diriger mais d’aider d’autres à réussir, tout en restant fidèle à mon engagement de « suivre Jésus-Christ, quoi qu’il arrive ». Aussi, j’ai beaucoup prié, en particulier cette prière de Charles de Foucault : « Mon Père, je m’abandonne à Toi, fais de moi ce qu’il Te plaira. Quoi que Tu fasses de moi, je Te remercie. Je suis prêt à tout, j’accepte tout, pourvu que Ta volonté se fasse en moi et en toutes Tes créatures. Je ne désire rien d’autre, mon Dieu. Je remets mon âme entre Tes mains. Je Te la donne, mon Dieu, avec tout l’amour de mon cœur parce que je T’aime et que ce m’est un besoin d’amour de me donner, de me remettre entre Tes mains sans mesure, avec une infinie confiance, car Tu es mon Père. » 32


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

Et puis, un jour de septembre 2004, un ami proche est venu me proposer de lui succéder comme président de la délégation des Hauts-deSeine du Secours Catholique. Il s’agit d’une importante délégation qui comptait alors 1 400 bénévoles, 11 salariés travaillant dans plus de quarante lieux disséminés dans tout le département, au service de nombreuses et différentes activités : accueils de jour et de nuit, écoute et aide de SDF, d’étrangers sans papiers, de demandeurs d’asile et de prisonniers, aides alimentaires, aides au logement, soutien scolaire, formation, organisation de vacances et de voyages, au profit d’environ 20 000 personnes par an. Du fait de l’expérience précédente, j’ai d’abord refusé puis accepté. J’ai rencontré les « décideurs » : les membres du « bureau » de la délégation, Mgr Gérard Daucourt, évêque de Nanterre, et le président du Secours Catholique/Caritas France. Ils m’ont choisi et nommé pour un mandat de trois ans qui s’est terminé en mars 2008 et que je n’ai pas souhaité renouveler. Quel changement ! Découvrir ma propre pauvreté à travers toutes ces personnes, quelle expérience nouvelle ! En décembre 2007, grâce à Denis Gallet, j’ai été invité à parler devant un auditoire très divers en Suisse lors d’une conférence organisée par le Père Nicolas Buttet, un ancien homme politique devenu prêtre puis ermite et qui a fondé la communauté « Eucharistein », basée à St Maurice-en-Valais. Expérience passionnante où je suis intervenu après un professeur d’une université belge qui a traité de « la mondialisation, chaos ou pentecôte », et avant un secrétaire général adjoint de l’ONU qui parlait des opérations humanitaires. Pour ma part, j’ai parlé de « Engagement et espérance », comment un engagement, quel qu’il soit, fondé sur la foi, peut être générateur d’espérance. Je m’appuyais naturellement sur mon expérience au Secours Catholique. En parallèle avec mon mandat au Secours Catholique et en accord avec Mgr Daucourt, je poursuivais mes activités charismatiques. C’est ainsi que j’ai découvert que Dieu m’avait confié un charisme de guérison. Rien de surprenant, de nombreuses personnes ont ce charisme, comme Jésus l’a annoncé : « Si quelqu’un croit en Moi, il fera lui aussi les œuvres que Je fais et il en fera de plus grandes encore » (Jn 14, 12). 33


Le bonheur est avec Dieu

En novembre 2006, Denis Gallet m’invita à participer à son « Encuentro en Lo Alto », organisé au Chili par « Desafio » en mars suivant. J’ai accepté et proposé, si cela lui paraissait juste, d’animer une soirée de prière de guérison. Il m’a immédiatement répondu en me confirmant que cette soirée répondait à une demande exprimée par les participants de la rencontre de mars 2006. C’est ainsi que je partis pour Santiago et constatai les merveilles réalisées par Dieu lors de deux soirées organisées, l’une dans la montagne, l’autre par la filiale chilienne de mon ancienne communauté. Humour de Dieu : lors des semaines précédentes, j’avais préparé plusieurs interventions en français puis en espagnol, de façon à répondre à différentes situations. En fait, à Lo Alto, je m’aperçus que les paroles que j’avais méticuleusement préparées avaient déjà été prononcées par une théologienne argentine tout au long de la journée. Il fallut alors improviser en espagnol ! La seconde soirée a été pleine de bonnes surprises. Elle avait lieu un soir à 19 heures (c’est-à-dire 19 heures 30 à la chilienne) et ils attendaient 40 personnes. Il en est venu 100 et à 19 heures, la salle était pleine. Ce fut une soirée magnifique ! Pendant ce voyage au Chili, j’ai pu visiter plusieurs réalisations financées par une Fondation française : atelier de menuiserie dans la prison de haute sécurité de Santiago, accueil d’handicapés dans le quartier de la Legua (où sévissent des bandes de narcotrafiquants lourdement armés), accueil de prostituées en réhabilitation. J’ai fait la connaissance du Père Gérard, prêtre français, curé de la paroisse de La Legua, dont le mur de l’église reçoit régulièrement des balles perdues lors de conflits entre narcotrafiquants. J’ai été reçu au « Hogar de Cristo », l’équivalent du Secours Catholique, créé par le Padre Hurtado, jésuite béatifié récemment. Un an plus tard, en mars 2008, me voilà de nouveau au Chili pour trois raisons : d’abord participer à « Lo Alto 2008 », puis aller à Valparaiso prier pour des prostituées dans le centre de réhabilitation créé par la sœur Patricia, puis animer une soirée de prière dans la filiale chilienne de mon ancienne communauté charismatique. 34


Quel a été l’itinéraire de ma rencontre avec Dieu ?

D’abord « Lo Alto 2008 » avec environ 320 participants et une surprise de taille : au lieu du beau temps, frais la nuit et chaud dans la journée comme en 2007, nous avons connu la pluie et la neige au point que le chapiteau s’est effondré et que nous nous sommes retrouvés entassés dans une grande salle à manger qu’il fallait aménager avant et après chaque repas. D’où un climat étonnant de proximité, de fraternité et de solidarité entre les participants venant de toutes origines. J’ai ainsi pu recueillir plusieurs témoignages de personnes qui ont vécu depuis l’an dernier une conversion, voire une guérison physique. Deuxième agréable surprise : la présence, comme intervenant principal, du Cardinal Oscar Rodriguez Maradiaga, archevêque du Honduras et président de Caritas Internationalis, « papabile » au dernier conclave, un homme étonnant avec son franc-parler. Il nous a fait un bien immense par des paroles fortes et interpellantes sur notre monde actuel et sur l’attitude que nous, chrétiens, devons avoir pour que notre monde soit davantage juste, fraternel et solidaire. J’en suis sorti plein de réconfort et d’espérance pour notre Église. Après Lo Alto, encore pleins des grâces reçues, nous sommes allés à Valparaiso visiter le centre de réhabilitation créé par la Sœur Patricia pour des prostituées (imaginez une après-midi chez les prostituées du port de Marseille). Quelle souffrance ! Nous sommes venus avec Nohora Cruz, une femme étonnante qui, depuis vingt ans, travaille à la réhabilitation de prostituées dans le quartier le plus dangereux de Bogota et qui venait de participer avec nous à Lo Alto. Après avoir écouté le témoignage d’une trentaine de ces femmes, nous avons prié pour elles et elles ont dit plus tard avoir été remplies de bonheur. Le jour suivant, nouvelle soirée de prière. Belle rencontre, « pleine de douceur, de profondeur et d’intimité » avec encore des témoignages des fruits de la soirée vécue en 2007. Revenons en France aujourd’hui. Ma vie charismatique continue et s’enrichit, que ce soit à travers les soirées du lundi organisées par notre groupe de prière « Réconciliation » ou par la participation à différents événements organisés par l’association « Paris Tout est Possible » du pasteur Carlos Payan. 35


Le bonheur est avec Dieu

De cette vie, de cette intimité progressive avec Dieu, je peux dire aujourd’hui que je retire un bonheur paisible, profond, réel qui me fait vivre.

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LE BONHEUR EST AVEC DIEU PIERRE DE LA CHAPELLE

C

’est au travers d’un parcours riche et atypique que Pierre de la Chapelle témoigne de sa rencontre avec Dieu. Marié et père, maintenant grand-père, il a débuté comme officier dans l’Armée de Terre. Sa carrière se poursuit ensuite dans un groupe multinational pour lequel il sillonnera le monde entier. Expatrié en Amérique latine, il rencontre Dieu de façon intime et concrète, à travers une communauté locale. Cela bouleverse sa vie et le conduira, après un long cheminement, dans une communauté charismatique dont il deviendra l’un des responsables. Une expérience unique et jalonnée par des « pierres vivantes » comme le pasteur anglican Charlie Cleverly et le pasteur évangélique Carlos Payan, avec lesquels il participera à l’organisation d’événements œcuméniques accueillant des milliers de catholiques, protestants, évangéliques et juifs messianiques. En parallèle, il assumera la présidence d’une délégation du Secours Catholique où il fera une rencontre marquante pour sa foi ; celle de Mgr Gérard Daucourt, évêque de Nanterre. Maintenant retraité, Pierre de la Chapelle nous partage son parcours unique de chrétien catholique, engagé dans le monde d’aujourd’hui, expérience intime de la présence de Dieu au quotidien.

15¤ EPP023 ISBN 10: 2-916539-23-9 ISBN 13: 978-2-916539-23-2

www.premierepartie.com

graphisme : www.atomike-studio.com


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