Milieux Insulaires et Capacité de Charge

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Services télématiques pour les iles ,

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RESEAU DE SERVICES INSULAIRES EUROPEENS Information

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Teleinsula.com est un serveur sur internet qui propose des informations de caractere

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international sur les applications télématiques en faveur d'un développement insulaire durable. Ces informations sont présentées par secteurs d'activités, par le récit d'expériences menées et par programmes de coopération internationale. Ce serveur propose également I'initiative européenne de réseau de services insulaires . Ce serveur permet ensuite d'accéder El certains services publics comme la vidéoconférence, les groupes de discussion ou «chats», les forums et les news groups. Des informations sur le mode d'emploi de ces différents outils sont également proposés. http://www.teleinsula.com


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE

,

PREFACE Le dilemme insulaire

E

n1994, les iles et les petits Etats insulaires ont organisé a la Barbade leur propre version de la Conférence de Rio. Cette rencontre a fait date dan s I'histoire des iles de la planete. Les régions insulaires définissaient de cette maniere leur propre conception de l' Agenda 21, en d'autres mots, le chemin spécifique qu' elles devaient suivre pour un développement durable. Mais il faut rappeler que, au-dela du simple slogan touristique, les iles sont véritablement différentes. Les réflexions sur les défis que les iles doi vent relever et sur leur options pour l' avenir se sont multipliées ces dernieres années. Des 1982, la question des iles est apparue au sein la communauté internationale lors de l' application de la Convention des Nations unies sur le droit maritime. Mais, il faudra attendre dix ans, en 1992, pour que l' Agenda 21 , fruit de la Conférence de Rio, affirme de facon précise que les iles occupent une part essentielle dan s la stratégie mondiale du développement durable. Le chapitre 17de l' agenda 21 affirme ainsi que «les iles représentent un cas particulier, tant pour l' environnernent que pour le développement, et elles présentent des problemes tres spécifiques pour la planification du développement durable. Elles tendent a étre sur le plan écologique, fragiles et vulnérabies». A leur passif, leur petite taille a chacune, leurs ressources limitées, leurdispersion géographique et leur isolement des marchés qui les situent en situation de handicap économique et qui les empéchent d' avoir des économies d' échelle ... «L' isolement géographique implique qu' elles possedent un nombre relativement élevé d'especes singulieres de flore et de faune, d'oü le fait qu'elles réunissent une part tres importante de la biodiversité mondiale. De la mérne maniere, elles ont des cultures riches et diverses particulierement adaptées au milieu insulaire», La Conférence de la Barbade présente en outre dans son avantpropos, une attitude commune, la reconnaissance de la force de l' insularité vis-a-vis de la communauté internationale: «Nous observons que, bien que individuellernent les iles et les petits Etats insulaires représentent des territoires réduits, collectivement ils exercent une juridiction sur un sixierne de la surface de la terre». Et ce, dan s compter I'influence des autres milliers d'iles qui dépendent administrativement des Etats continentaux. L' esprit de la Barbade a perduré et a été actualisé dans ce sens trois ans plus tard, lors de la 1re Conférence européenne sur le développement durable des iles, oü les fondements d'un Agenda insulaire pour le développement furent définis de facon plus précise. L' apparition de cette nouvelle mentalité insulaire a la veille du xxre siecle présente un point commun, la constatation de la part des sociétés insulaires que la richesse et la diversité du patrimoine naturel des iles sont sérieusement menacées, et que les stratégies de sauvegarde de ce patrimoine doivent reposer sur des budgets spécifiques. 11ne s' agit pas d' une situation nouvelle. La colonisation des territoires insulaires sur la base de productions hyper spécialisées et superposées au territoire est une pratique commune depuis plus de trois cents ans. La plupart des iles de la planete a fait l' objet de transformations profondes du fait qu' on les a considérées comme plates-formes périphériques de production: sucre, bananes, thé, peche, nitrates ...

Mais aujourd'hui déja, une nouvelle monoculture ajailli avec une force inusitée aux yeux des insulaires: le tourisme. Un phénomene ambivalent qui apporte des ressources nécessaires aux économies insulaires, mais dont la capacité d' occupation etde concurrence territoriale a des effets imprévisibles. D' apres les chiffres de 1'0MT (Organisation mondiale du Tourisme) portant sur le nombre d'arrivées internationales, les iles seraient devenues la seconde destination touristique mondiale apres les villes historiques. Pour se faire une idée du phénomene touristique insulaire, il suffit de comparer la densité normale de logements touristiques dan s certaines des iles de I'Union européenne les plus spécialisées dan s le tourisme. On trouve ainsi des densités de logements vacanciers qui oscillent entre 75 et 150 places au kilornetre carré, soit des chiffres bien supérieurs dans de nombreux cas au taux de densité normal de population de zones peuplées du continent. Toutefois, si I'on compare en termes d'affluence, les résultats sont encore plus saisissants: les iles grecques recoivent plus de touristes que le Brésil, les Baléares un nombre similaire a celui du Portugal et les iles Can aries recoivent deux fois plus de visiteurs que toute l' Afrique du Sud, la grande destination africaine émergente, qui accueille prés de 5, 5 millions de touristes. Ainsi, les iles idéalisées par les naturalistes, les iles de Rousseau, Linné ou Darwin, ces mémes territoires qui émerveillerent Humboldt, devront faire face a des défis tres complexes dans les années qui viennent. En fait, cette réaction a déja commencé depuis plusieurs décennies. Il suffit de regarder la grande part d' espaces protégés existant dan s les iles par rapport au continent. A titre d'illustration, 30% du territoire de la Nouvelle Zélande, cet archipel complexe avec ses plus de trois cents iles, est protégé; et en.ce qui concerne les Canaries, 42% du territoire de l'archipel est protégé sous une forme ou une autre prévue dan s la loi sur les espaces naturels. Ces pourcentages sont tout simplement inimaginables sur le continent. Malgré cela, la vulnérabilité, l'échelle territoriale et les diverses formes de colonisation de l' espace insulaire représentent des défis de gestion dont la complexité est infiniment supérieure a celle du continent. Et c'estjustement I'un des plus importants appels lancés a la communauté internationale a partir de l' optique insulaire, car l' effort que les communautés insulaires doivent réaliser face aux nouveaux défis du progres est nettement supérieur en termes relatifs a celui réalisé par le continent. La constitution du RITME (Réseau insulaire tropical et méditerranéen) associé a INSULA, s' inscrit pleinement dans ce nouveau courant, en abordant un theme a la fois complexe et controversé d' un point de vue scientifique: la question de la capacité de charge. La recherche d' instruments et de méthodologies intégratives permettant d' obtenir des indicateurs fiables pour le développement des iles est aujourd'hui un devoir inéluctable. Dans ce sens, la réflexion scientifique que cet ouvrage propose et les cas choisis constituent un excellent test a I'heure d'évaluer les efforts insulaires pour répondre aux défis que nous apportent les temps nouveaux. par Cipriano Marin

Insula

3


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SOMMAIRE

•Inaula Revue internationale sur les questions insulaires ISSN 1021 - 0814 Février

PRÉFACE

1999

Anneé 8

Cipriano MARIN

PRESENTATION

Dossier

Direction éditoriale:

3

Gil/es MANDRET, Rémy HUGON

5

APPLlCATION DE LA NOTION DE CAPACITÉ DE CHARGE AU CONTEXTE INSULAIRE: MYTHE OU REALlTÉ? Gilbert DAVID .....

7

Rédacteur en che]:

Pier Giovanni d' Ayala Coordinateur

éditoria/:

Cipriano Marín Comité scienujique consultau]:

Prof. Sal vino Busuttil, MALTE Dr. Ronald G. Parris, BARBADE Prof. Nicolas Margaris, GRECE Prof. Patrick unn, FUI Prof G. Prakash Reddy, lNDlA Prof. Hiroshi Kakazu, JAPON Dr. Henrique Pinto da Costa, SÁO TOMÉ E PRlNClPE Prof. Lino Briguglio, MALTE Coordinatioll

techllique:

Giuseppe

Orlando

Eleana Felici Conception gtaphique:

Luis Mir Payá

Publié par lNSULA, the International Scientific Council for Island Development, avec le soutien de I'UNESCO. Les article pubJiés dans cette revue ne reflétent pa obligatoirement les opinion de Insula ou de l' ESCO. Reproduction interdite sans I'accord préaJable de l'éditeur,

tnsula .la revue internationale sur les questions in ulaires e t distribuée gratuitement aux membres individuels et in titutionnels de INSULA. Pour tout abonnement, veuillez écrire a:

•Ins'ula e/o U ESCO 1, rue Miollis 75732 Paris, FRA CE Te!': +33 l 45.68.40.56, Fax: +33 1 45.68.58.04 E-mail: insula@insula.org

Imprimépar: TENYDEA S.L.lles Canaries, Espagne

4

ELEVAGE ET INSULARITÉ DANS L OCÉAN INDIEN : NOTIONS DE CAPACITÉ DE CHARGE Gllles MANDRET

13

APPORTS ET CONTRAINTES DE LA NOTION DE CAPACITÉ DE CHARGE AU DÉVELOPPEMENT INSULAIRE DANS UNE LOGIOUE DE DÉVELOPPEMENT INTÉGRÉ ET DURABLE: OUELOUES PISTES MÉTHODOLOGIOUES Hetene REY..

19

CAPACITÉ D'INTÉGRATION DE NOUVELLES ORGANISATIONS DE MARCHÉ POUR LES ECONOMIES INSULAIRES: Exemple de la Banane d'Exportation ,¡Rémy HUGON ..

. .. 25

OUTIL DE DIALOGUE ET DE COMMUNICATION DANS LES PECHES: LATLAS DE VANUATU ET SES IMPLlCATIONS POUR LE DEVELOPPEMENT by Espérance CILLAURREN

29

ORGANISATION SPATIALE ET DISCONTINUITÉ: OUTILS ET MÉTHODES D' INVESTIGATION Isabel/e MOR. ... ..

35

DÉVELOPPEMENT SOUTENABLE' ET CAPACITÉ DE CHARGE DES LlTTORAUX EN MILlEU TROPICAL INSULAIRE: LEXEMPLE DE LiLE DE MAHÉ (Archipel des Seychelles, Océan Indien) by Virginie CAZES-DUVAT..... . ..

41

A MADAGASCAR?

REPENSER LA GESTION DES ZONES HUMIDES COTIERES byJacques ILTlS

47

LA PLAINE OCÉANIOUE ABYSSALE ET LASSAINISSEMENT DES PETITES iLES: LE CAS DE LA POLYNÉSIE FRAN~AISE Ir ROUGERIE

53

CAPACITE D'ACCUEIL ET GESTION DES SITES NATURELS DES HAUTS DE LiLE DE LA REUNION Rel/e ROBERT

57

LE TOURISME RURAL DAN S LA DERNIERE ETAPE DU NOUVEAU MODELE TERRITORIAL DE LiLE DE MAJOROUE Jaume BINIMELlS AntoI1I GINARD Joam u1arraSEGUI

61

LOGIOUES UTILlTARISTES ET LOGIOUES SOCIALES: ASPECTS DE LEXPANSION DE LELEVAGE BOVIN EN MILlEU MÉLANÉSIEN DE NOUVELLE-CALÉDONIE Pafrrck PILLON

65

UN MILlEU CONTINENTAL ENCLAVE: LA CUVETTE DU LAC DE R'KIZ (Mauritanie) "G. FORGIARINI F BESSE I TOURE,G. MANDRET. 71 ORGANISATION SOCIALE, GESTION DE LESPACE ET DES RESSOURCES EN MILlEU INSULAIRE " Jeen-Pietre DOUMENGE.

75


MILlEUX INSULAIRES

El CAPAClTf

DE CHARGE •••

PRESENTATION

ITME* (Réseau Insulaire Tropical etMéditerranéen) rassemble des scientifiques et des professionnels (France, Espagne, Italie, Chypre, Malte, Maurice, Trinidad etTobago, Canada) sur l'étude scientifique des écosystemes insulaires, cornme des structures sociales et économiques, a travers un type d' approche qui permet d' appréhender globalement les facteurs limitant du développement et de concevoir des modeles de développement durable des iles. Ce développement est abordé avec la prise en compte de plusieurs écheUes de temps etd' espace permettantde couvrir la grande diversi té des réalités socio-économiques et techniques. L' approche méthodologique du fonctionnement des milieux insulaires est faite a l' échelle locale mais aussi régionale, avec des équipes pluridisciplinaires qui travaillentsur les milieux littoraux etmarins (halieutique, urbanisme ...) et sur les milieux terrestres (Agriculture et Elevage) tout en tenant compte du développement des activités de loisir et de tourisme. En effet, ilest indispensable pour avoir une bonne perception des systemes insulaires de travailler sur deux échelles : • régionale, av~ une dynamique des flux interiles, • tenitoriale avec une dynamique des flux interne al 'ile, L'approcheRITMEréunitdeséquipespluridisciplinaires(agronomes, écologues, sociologues, politologues, économistes, socioéconomistes, géographes, cartographes, urbanistes, architectes ...),

R

tant du monde scientifique que professionnel, impliquées dans des problématiques du milieu insulaire. Fort de cette capitalisation de connaissance, et de son actualisation permanente par les activités de chacun, RITME propose de travailler autour de trois aspects principaux permettant la définition et l'élaboration d' indicateurs de développement durable des milieux insulaires: 1)Elaboration d'un cadred' approcheoriginal par l'échellerégionale pour appréhender la question du développement et de l'aménagementrural desécosystemes insulairescaractérisés par: -leur isolement, -les ressources natureUes et humaines limitées, -les contraintes spécifiques en termes decompétitivité pour l' espace et les ressources face a un fragilité particuliere, a la fois environnementale et économique. 2) Mi se en place d'une démarche novatrice, d'un pointde vue méthodologique, intégrantau niveau de "régions insulaires"des approches diversifiées (systérniques, filieres, thématiques ...) par des équipes pluridisciplinaires. Plus rapidement qu' une approche monodisciplinaire, elle permet de générerdes plus-values au plan du développement économique et social, et de favoriser une dynamique régionale.

5


IESEAU

INSULAIR

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3) Prise en compte des préoccupations de la société pour son environnement naturel a travers l'objectif de durabilité du développement RITME peut travailler sur d' autres thernes de recherches en fonction des demandes des participants ou de l' émergence de problématiques dont l' étude présenterait une priorité reconnue. Dans une prerniere phase RITME a organisé un atelier intemationalles 1 et 2 décembre 1997 a Montpellier (France) sur le therne de "la capacité de charge" des milieux insulaires. Ce theme vise a analyser la viabilité économique et sociale de ces milieux en termes de seuils de boule-versements a ne pas dépasserdans chaque domained'intervention de I'homme (limites qu' une ile peut supporter pour son développement par rapport aux objectifs et aux réalisations). TI permet de prendre en compte la dynarnique des acteurs dans un espace réduit, notarnment par l' étude du tissu des entreprises et des niveaux de décision, et d'analyser les capacités d'intervention du réseau. TI s'agitd'un theme fondamental pour le développement des iles comme des territoires enclavés. Une page web sur le site d'Insula (www.insula.orglritrne/) représente les résumés de la plupart des communications qui ont animé cet atelier. Ce numéro présente des rétlexions approfondies sur lacapacité de charge en milieu insulaire avec des exemples d' applications

concemant le tourisme et l' élevage, des méthodes et outils de représentations et des exemples de réalisation ou proposition novatrice en milieu insulaire qui peuvent avoir valeur de modele pour les Iles intertropicales. C' est le cas pour la gestion des déchets, sujet fort crucial dans les espaces insulaires, en proposant une solution novatrice de traitement des ordures par une solution abysaUe. L' exemple de l' atlas de Vanuatu en tant qu' outil de dialogue et de communication dans les péches peut aussi avoir valeur de modele. La notion de capacité de charge est parfois contrebalancée par un déterminisme d' ordre culturel, social, économique ou politique. Lorsque la dimension politico-sociale des effets de marché modifie les rapports de forces, la notion de capacité de charge, qui est intéressante pour obtenir des équilibres aux niveaux méso et micra, est totalement inopérante et hors course du faitdes déséquilbres a l' écheLlemacra, déséquilibres impulsés par l' économie mondiale et sur lesquels l' espace insulaire n' a aucune prise. D'une maniere générale iIest important de poser le probleme de la capacité de charge d' un milieu en termes de production, d' environnementet de phénomene de société, d' aménagement du territoire et de gestion de l' espace insulaire, mais aussi en termes de recherche d'un équilibre entre ressources, espaces el acteurs.

Gil/es MANDRfr',

* Créé

Rémy HUGON"

en avril 1997, le Réseau Insulaire Tropical et Mediterranéen est coordonné par le Cirad (O. Mandret et R. Hugon),

BP 5035, 34032 Montpellier Cedex I France, en collaboration avec des membres de l'Orstom, du Cheam, du C RS, de l'Inra, des universités de Montpellier I et 3, de Nice, de Perpignan, de Bordeaux, de St Denis de La Réunion, de I'Ifremer, de Creocean, de I'institut d'architecture

de l'université

Venise, de l'université de Basilicata en Italie, de l'université des

Baléares, de l'université Me Master au Canada, du Conseil de l' Agriculture de la Peche et de l' Alimentation des Canaries, de la rnunicipalité de Limassol

a Chypre,

Tobago, de I'observatoire océanographique RITME est associé

a Insula

a Maurice,

du Cardi

a Trinidad

et

européen de Monaco, de la fondation des études internationales de Malte.

(Unesco) et comprend 60 membres.

** Cirad, B.P. 5035, 34032 Montpellier

6

de la Mauritius deer farming cooperative

Cedex 1France.


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITE DE CHARGE •••

APPLICATION DE LA NOTION DE , CAPACITE DE CHARGE AU CONTEXTE , INSULAIRE: MYTHE OU REALITE ? Gilbert David'

Abstract Résumé The stocking rate is usually used in tourism studies to Cet article discute de la pertinence de I'emploi de la notion

assess the maximum human pressure on natural environments.

de capacité de charge dans les contextes insulaires, L'ile est

In this paper several indicators of stocking rate are discussed

bien plus complexe qu'un páturage et la recherche d'indica-

in the context of tourism in Mauricius and La Reunion. The

teurs globaux de capacité de charge intégrant I'ensemble des

global indicators as the number of visitors / total area of the

rapports "activités anthropique - environnement

insulaire"

island or the lenght of the coast, or the beaches area, or the

releve de l'illusion. En revanche, la capacité de charge peut

island population are not enough precised. There is crucial

étre pertinente dans le cas d'activités sectorielles comme le

need to build a synthetic indicator. This indicator should take

tourisme. Acoté d'indicateurs globaux, comme la fréquenta-

into consideration

several parameters : the coastal tourism

tion touristique maximale, qui restent tres réducteurs, il est

population and infrasructures concentration, the damage on

souhaitable de développer une batterie d'indicateurs formant

the reefs ecosystem, the local employment,

un tableau de bord pour piloter la fréquentation touristique

freshwater and the sewage system. More numerous are the

dans le cadre d'une gestion intégrée du littora\.

pa ameters, more precised is the description of the situation

the supply of

but more difficult is the aggregation of the parameters into a synthetic indicator, especially social and cultural parameters. Despite very difficult to quantify, they are very valuable parameters to understand the dynamics of the tourists perception

by the local population

and the perception

of

Mauricius and la Reunion by the visitors which are key concepts to assess the sustainability

and vulnerability

of the

tourism economy in small islands.

Mots e/ef: capacité de charge, tourisme, iles, développement

Key words: stocking

durable, gestion intégrée des zones cótieres, Océan indien.

development, ICZM, lndian Ocean.

'/RD, Centre ORSTOM de Montpellier,

LEA B.P. 5045, 34032 Montpellier

rate, tourism,

islands,

sustainable

cedex 1, France

7


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L

a notion de capacité de charge fai t partie de la rhétorique qui accompagne la notion de développement durable. Son emploi tend a se généraliser parmi les organisations intemationales. Labo-ratoires pour l' analyse des relations hornme-milieu-ressources, les iles sont les espaces idoines pour tester sa pertinence. Dans une premiere partie sera discutée l'application de la notion de capacité de charge a l' ensemble d' une ile, via la métaphore del'ile páturage, Dans une seconde partie, la capacité de charge sera appliquée a une activité sectorielle: le tourisme, les exemples de la Réunion et de Maurice permettant d' examiner la pertinence de plusieurs estimateurs globaux, syn-thétiques et restreints de capacité de charge touristique.

La metaphore de I'ile paturage LA CAPACITÉ DE CHARGE, UNE DÉFINITION OUVERTE

La notion de capacité de charge est courarnment employée pour gérer les ressources naturelles. Elle a été introduite par les pastoralistes qui la définissent par le nombre maximum d'herbivores qui peuvent páturer une surface donnée sans détérioration de la végétation durant un temps déterminé (Hervé, 1998). Cette définition peut étre aisément élargie al' ensemble des milieux naturels et correspond alors au nombre maxirnum ou optimum d' animaux qu'un territoire peuttolérer sans que la ressource végétale ou le sol ne subissent de dégradation (de Bonneval, 1993). Appliquée al' espece humaine, cette définition renvoie a la notion de seuil critique de densité de population que peut supporter un espace donné, seuil a ne pas dépasser au risque d' endornmager le milieu naturel et de compromettre la pérennité des activités économiques faisant vivre cette population -si on integre la composante

8

Notion de capacité de charge

environnementale dans la définition- ou, tout simplement, seuil au dela duquelles capacités productrices de l' espace sont insuffisantes pour répondre aux besoins de la population. Le seuil critique de densité de population peut alors étre assirnilé a un seuil de surpopulation, notion qui depuis Malthus nounit d' ápres discussions parmi les démographes, les écologues, les économistes et les géographes et qui a fait l'objet d' une abondante littérature depuis la date de parution du premier rapport Meadows sur les limites de la croissance en 1971. Cette simplicité de la notion de capacité de charge explique largement sa diffusion. Sa quantification se ramene généralement a un calcul de densité ou de ratio soit entre deux grandeurs de rnéme nature, soit entre un effectif et une distance; et de ce fait, la capacité de charge revét une dimension normati ve, fort appréciée des gestionnaires et des décideurs. Un seuil ayant été fixé pour une activité et un milieu donnés, il suffi t de ne pas le dépasser pour con server le milieu en l' état et pérenniser ainsi l' activité.

CE QUI EST VRAI POUR UN PATURAGE, NE L'EST PAS TOUJOURS POUR UNE ¡LE

páturage gornme cette hétérogénéité au profit d' une valeur moyenne repré-sentant la pression s'exercant sur le milieu, placée en numérateur du ratio exprimant la capacité de charge, et d' une autre valeur moyenne, placée en dénominateur, représentant la taille du milieu ou des ressources qu' il porte. De prime abord, appliquer la notion de capacité de charge a une ile entiere, ou, afortiori , al' ensemble d' un archipel apparait done cornme tres réducteur. Ce caractere réducteur est accentué par le fait que la capacité de charge est considérée comme constante dans le temps. Cette pérennité temporelle du seuil critique a ne pas dépasser renvoie a une conception «c1assique»,tres statique, de l'équilibre en écologie, dominée par la notion de climax. Elle renvoie également a la formulation mathé-matique de la capacité de charge, représentée par un modele logistique dans lequella capacité de charge ne dépend que de la taille de lapression anthropique et de son taux d' accroissement intrinseque, constant au cours du temps. Selon ce modele, toute fluctuation de la pression anthropique tend a se stabiliser en une valeur constante correspondant a

St Denis de La Réunion: le relief escarpé est une puissante contrainte au développement urbain

Aussi facilement que la clóture sépare la prairie de son espace environnant, la mer délimite I'íleoAu dela de cette analogie spatiale, la métaphore de l'ile páturage interroge sur la possibilité d' appliquer la notion de capacité de charge aux ensembles insulaires dont les écosystemes présentent une structure et un fonctionnement bien plus complexeque lepáunage, AI'homogénéité de ce demier en termes d' especes végétales páturées cornme d' animal con-sommateur et d' acti vité économique -1' embouche et/ou la production laitiere - répond l' hétérogénéité de l' espace insulaire et des activités économiques qu' il porte. Or la métaphore de I'ile


MILlEUX INSULAIRES El CAPACITÉ DE CHARGE

la capacité de charge, attracteur stable de la dynamique de la pression anthropique (le Fur, 1998). Or, les recherches de ces 30 dernieres années ont montré que les équilibres étaient essentiellement dynamiques (FrontieretPichot- ViaJe, 1992). En toute logique, la capacité de charge devraitdonc s'inscrire dans un équilibredynamique entre d' une part une pression anthropique qui fluctue selon sa dynamique propre - dont la démo-graphie est la composante principaJe - et selon la réponse du milieu etd' autre partladynamiquedu rnilieu qui se compose égaJement d' une dynamique propre, a laquelle se surimpose une dynamique adaptative a la pression anthropique. L' hétérogénéité de l' espace et des activités qu' iJporte, ainsi que les fluctuations temporelles de ces dernieres, sont les deux principaux enteres de différenciation entre le páturage et l'ile qui invalident la métaphore de I'ile páturage, La nature de l' équilibre entre le milieu et l' agression ou la pression dontil fait l' objetest un troisieme critere, Dans un páturage, cet équilibre est le fait d'un gestionnaire des ressources qui modifie la pression sur le rnilieu de maniere a ce que celui-ci recouvre son potentiel productif. Ce mode de régulation «active» se retrouve dans toutes les

activités requérant une gestion al' équilibre des ressources renouve-Iables. Dans les iles, a cette régulation «active» se conjugue unerégulation «natnrelle», fruitdes interactions négatives entre le milieu et les populations qui l' agressent. Ainsi, les dynamiques intrinseques au milieu ou aux ressources qui le peuplent et aux populations qui les exploitent peuvent faire l' objet de rapides ou profondes transformations, susceptibles de fortement perturber la dynamique globale de la relation rnilieu-population. Les risques naturels, cornme les cyclones ou les sécheresses, ou les mouvements sociaux et politiques en sont lacause (Doumenge, 1983; Dupon, 1988 ; Stoddart et WaJsh, 1992). Les uns comme les autres échappent totalement a la notion de capacité de charge qui, une fois encore, s' avere trop réductrice. Faut-il aJors rejeter de maniere définitive la notion de capacité de charge en milieu insulaire? Oui si la capacité de charge est présentée cornme un parametre devant intégrer l' ensemble des milieux etdes activités insulaires. Non, si elle s' applique de maniere plus restreinte soit a un secteur d' activité unique, soit a un seul milieu ou a une unique ressource, cornme va le montrer l'exemple du tourisme insulaire.

Capacité de charge et pression touristique Le tourisme est le secteur dans lequella notion de capacité de charge est la plus courarnment employée. L' organi-sation mondiale du tourismel'adéfmiten 1981 cornme «le nombre máximum de touristes visitantau rréme moment un sitedonné sans causer a l' envi-ronnement aucune destruction d' ordre physique, biologique, éconornique, et socioculturel ni une inacceptable dégradation du degré de satisfaction des touristes». Cette définition est originale a deux égards: la capacité de charge est repré-

sentée par un simple effectif et non par un ratio; elle integre la perception que le touriste a de son environnement et des dégradations qui ont pu lui étre occasionné, du fait de l' activité touristique d' ailleurs cornmed'autresactivités.Nousdisposons done maintenant de deux parametres pour estimer la capacité de charge dans le secteur du tourisme: l'effectif des touristes ou divers ratios : estimateurs globaux ou estimateurs synthétiques dontla pertinence va étre testée a travers une comparaison entre Maurice et la Réunion.

ESTIMATEURS GLOBAUX DE PRESSION TOURISTIQUE El DE CAPACITÉ DE CHARGE

Ratios Les ratios globaux de pression touristique présentent l' avantage d' étre aisés a élaborer, les statistiques qui les composent étant facilement accessi-bles. Le nombre annuel de touristes rapporté soit a la surface de 1'ile, soit a la population totale sont les deux ratios globaux les plus simples. Le tableau 1 montre que ces ratios ne sont pas concordants. Lorsqu' elle est estimée en fonction du nombre de touristes rapporté a la superficie totale de I'ile, la pression touristique de Maurice est 1,8 fois plus élevée qu' a la Réunion ;en revanche, lorsqu' elle est rapportée al' effectif total de la population, elle est légerement inférieure. Al' évidence, aucun des ces deux ratios n' est un ban estimateur de la pression touristique. Un second probleme se pose: cornment passer d' un estimateur de pression touristique a un estimateur de capacité de charge, ce demier corres pondantau seuiJde pression maximalequi doit s' exercer sur un site touristique sans le détériorerdurablement, ni perturberoutre mesure la population résidente ? Fixer un tel seuil suppose que l' on puisse fixer un seuil de dégradation acceptable pour tous les facteurs environnementaux, culturels et socio-éconorniques susceptibles d' étre

9


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influencés par la pression touristique. La capacité de charge serait done la sornme de ces seuils acceptables de dégradation; mais il nes'agitalors plus d'un estirnateur global mais d'un estirnateur synthétique.

Tableau 1 - Quelques estimateurs globaux de pression touristique insulaire Superficie (km")

nbde touristes en 1995

Population totale de I'ile

Maur;ce

1948

422.463

1,079 millions

217/knr

La Réun;on

2512

304.000

660.000

121/km2

PAYS

Estimateur a nb Estimateur b de touristes/ nb de touristes/ superficie de population I'ile

O,39/hab

Effectifs

Satisfaction maximale des touristes et capacité de charge L' inacceptable «dégradation du degré de satisfaction des touristes» dont ilest fait mention dans la définition de l' organisation mondiale du tourisme suggere qu' iI existe un seuil au-dela duquell' insatisfaction des touristes se solde par une image si négative que la fréquentation de la destination touristique décroit.Le degré de satisfaction des touristes serait done un bon estimateurdelaqualitédel'environnernent et de l' impact de lapression touristique sur celui-ci. Un degré de satisfaction maximal correspond a un équilibre optirnal entre la pression touristique et l' environnement et se traduit par une fréquentation touristique maximalequi peetalorséire assimilée a la capacité de charge touristique. Cet estirnateur a l' avantage d' étre tres simple, est-il robuste? en l'occurrenceestil constant dans le temps? D'une maniere générale, la fréquentation touristique d'une ile ne dépend pas uniquernent de ses qualités intrinseques (beauté des paysages, etc ..), ni de la perception qu' en ontles touristes, ni de la publicité ou de la contre-publicité qu' ils peuvent en faire aupres de leurs relations a leur retour. Elle dépend également des moyens publicitaires mis dans la promotion de la destination touristique et de la réceptivitédu publica cet effort, parametres qui, tous deux, tluctuent dans le temps. Cet outil est particulierernent efficace et une campagne de promotion bien faite, réalisée dans un contexte économique favorable, peu redynamiser une fréquentation touristique «en perte de vitesse». Cette efficacité est-elle toutefois suffisante pour que la fréquentation touristique évolue de

10 Notion de capacité de charge

O,46/hab

maniere analogue au budget qui est alloué asa promotion ?,cequj revienta direqu'il n' existe pas deseuil defréquentation maximal des lors que ce budget est illimité ? La réponse est bien entendu négative. TI existe un seuil de fréquentation au dela duquel l' environnement est tellement dégradé et le degré de satisfaction des touristes tel1ement négatif que la fréquentation diminuera inévitablement malgré les efforts de promotion touristique. Ce seuil correspond a la capacité de charge du milieu dont le nombre maximal de touristes en un espace donné par unité de temps est un bon estirnateur. Sur le court terme, cette capacité de charge est constante. Along terme, elJe peut l' étre également si les capacités de ré-génération ou de restaurarion de l'environnement sont suffisantes pour que la baisse de fréquentation que sa dégradation a induite lui permette de recouvrer un état qui offre au touriste un degré de satisfaction maximal. En revanche, si ces eapacités de ré-génération sont durablement affectés, un nouvel équilibre s' établira autour d' une capacité de charge moindre, correspondant a un moindre degré de satisfaction maximal des touristes.

logie avec l' accroissement de l' effort de peche et la stagnation des captures de poisson lorsqu'on arrive au seuil de surexploitation d'un stock halieutique est ici évidente. Elle est également tres pratique car al' image de la prise maximale équilibrée quj correspond au sornmet de la courbe en «cloche» que dessine le modele de Schaeffer entre l' effort de peche (axe des abscisses) et les captures de poisson (axe des ordonnées), la capacité de charge touristique pourrait étre estirnée de maniere graphique par le point d' inflexion de la courbe de la fréquentation touristique évoluant en fonction du budget de promotion de la destination.

L'analogie du touriste et du poisson Selon l' approche qui vient d' étre développée, plus on s' approche de la capacitédecharge, doncdu seuil de fréquentation maximal, et moins l' accroissement du budget promo-tionnel est efficace en terme de nouveau touriste attiré. L' ana-


MILlEUX

ESTIMATEURS SYNTHÉTIQUES El RESTREINTS DE PRESSION TOURISTIQUE El DE CAPACITÉ DE CHARGE

L'iIIusion de I'estimateur synthétique Estimer la capacité de charge en fonction des seuils acceptables de dégradation du rnilieu est plus précis qu' en utilisant la satisfaction des touristes - peuvent ainsi étre pris en compte divers parametres comme la diversité du paysage, la répartition et la structure de l'habitat, l' économie locale, parametres qui détermirent la «capacité du milieu insulaire» a «recevoir» les visiteurs mais aussi bien plus complexe a calculer. TI fautd' abord estimer une capacité de charge pourchacun des pararretres pris en compte puis ensuite agréger l'ensemble de ces résultats en une capacité de charge synthétique. Compte tenu de I'hétérogénéité des parametres qui le composent, il nous semble illusoire d' essayer de déterminer un tel estimateur synthétique de capacité de charge; en revanche, établir une batterie d'indicateursqui permettrontd'avoirune sorte de tableau de bord de la pression touristique sur l' envi-ronnement parait indispensable. Chacun d' eux sera qualifié de restreint car en dénominateur il n' integre qu'ununiquepararretreenvironrementalá la différence des indicateurs synthétiques qui en integren; plusieurs. Le tableau de bord des indi-cateurs restreints de pression touristique Ce tableau de bord doit permettre une gestion optimale de l'espace linoral qui fait l' objet de la fréquentation touristique en maximisant le rendement économique de cette fréquentation et en minimisant son impact envi-ronnemental. Dans le cas du tourisme balnéaire en milieu récifal, ce tableau intégrera cinq themes : la concentration de la population et des infrastructures touristiques, les dommages occasionnés al' écosysteme récifal, l' emploi et

Zone portuaire de Port Louis, Maurice

l'économie locale, la consommation d' eau par les touristes et leur production de déchets. Chaque therne sera représenté par un ou plusieurs indicateurs restreints. Concentration de la population balnéaire Une premiere estimation de cette concentration peut étre donnée al' échelle de I'ile entiere par: a) le % de localités littorales ayant des équipement touristiques, b) le % de la population littorale habitant des localités littorales ayant des équipement touristiques, e) le nombre de touristes fréquentantceséquipementstowistiques/pop des localités Lorsqu' on dispose de cartes de rnérne échelle ( I1I00 (XX) ou IISO (XX) par exempIe), le nombre de touristes rapporté au linéaire cótier constitue un autre estimateur intéressantde la pression touristiqueen milieu littoral. La comparaison entre la Réunion et Maurice en montre cependant les limites. Maurice présente un vaste lagon et de nombreuses plages toutautourde l'ile; en revanche, la Réunion ne dispose que de 25 km de cates coralliennes sur lesquels se concentre le tourisme balnéaire. Tres 10giquement la pression touristiquesur le littoral doit donc étre bien supérieure a la Réunion qu'a Maurice. La réalitéestcertainementplus nuancéecar, a ladifférence de Maurice, le tourisme a la Réunion est 10m d' étre de nature exclusivement balnéaire. Le positionnement de l'ile sur le marché du towisme intemational est plutót centré sur les circuits de découvertes des paysages de l' intérieur, Or aucune statistique officielle n' établit une différence

INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CHARGE

•••

parmi les touristes entre les adeptes de ce tourisme JUraIet ceux qui séjoument exc1usivement sur le littoral. TI est d' ail1eurs probable que cette distinction soit en partie factice, car le potentiel hótelier de la Réunion étant principalement concentré sur le littoral, la probabilitéestélevée pourque tout touriste visitant l' intérieur séjowne un ou plusieurs jours sur le littoral ou méme décide de rayonner a partir de cet espace. Auquel cas, il contribue en partie lui aussi a la pression touristique sur le littoral, Visiblement, en cas de tourisme mixte, balnéaire-intérieur des terres, utiliser l' effectif annuel global des towistes dans l' estimation de la pression towistique sur le littoral n' est guere satisfaisant. Le nombre annuel de nuitées passées dans les hótels, résidences, gires des communes du linoral est un bien meilleur estimateur. En revanche, lorsque la fréquentation touristique porte exclusivement sur le littoral et le nombre de touristes rapporté au linéaire cótier peut étre utilisé. Le tourisme balnéaire se focalisant sur les plages, uneestimation plus précisede la concentration touristique et des problemes d' assainissement qu' elle génere peut étre donnée par le nombre de chambres 1 linéaire de plage ou 1superficie des plages attenantesaux hótels. Pour identifier d' éven-tuels problemes de coexistence avec la population locale du fait de la saturation de l'espace balnéaire par les touristes la population communale rapportée a la superficie des plages publiques non attenantes aux hótels est un estimateur complémentaire du nombre de touristes fréquentantces équipements touri-stiques rapporté a la population des localités dont il fait mention plus haut. Destruction potentielle des récifs Par son ancrage, toute embarcation est une source potentieLle de destruction mécanique du corail, les rejets a la mer d' eaux usées et de déchets constituent également une atteinte al' environnement Cet état est

11


I

T

estimé par le nombre de bateaux de plaisanceet d' embarcations de peche plaisanciere des résidents que multipLie le nombre moyen de leurs sorties annuelles, nombre auquel s' ajoute le total des bateaux de plaisance de passage que multiplie leur durée moyenne de séjour. Dans les ilots coralliens isolés, le toucher des paquebots peut constituer un autre danger potentiel, les touristes occasionnant unedestruction méca-niquedes coraux par piétinement, ce danger peut étre estimé par le nombre annuel de croisiéristes rapporté au linéaire de platier récifal.

Approvisionnement en eau potable, répurgation Dans les iles OU les sources sont rares et/ou lanappe phréatiqueestlimitéeá une mincelentilled'eau douce, la fréquentation touristique peut étre une grave source de problernes, tout touriste consommant de l' eau et produisant des déchets, avant d' étre une source de devises. Deux parametres rendent compte de cette situation : • consornmation en eau des touristesl consommation totale ouJoffre d' eau potable. • production de déchets des touristesl eapacités de collecte et traitement.

Conclusion

Bibliographie

La capaci té de charge est un concept aisé a concevoir, mais beaucoup plus difficile a quantifier. Dans le cas du tourisme en milieu insulaire, la capacité de charge peut étre appréhender de deux manieres, soit a partir de la réponse de l' environnement a la fréquentation touristique, soit a partir de cette fréquentation dont la dynarnique integre déjá les dégradations qu' elle a pu occasionner al' environnement a travers le degré de satisfaction que les touristes ont de leur destination de vacances. En complément de la fréquentation touristique maximal, indicateur global tres réducteur, et en altemati ve a des indicateurs synthétiques, peu opérationnels, il est souhaitable de mettre en place un tableau de bord de la pression touristique sur le milieu qui pennettra de piloter la fréquentation touristique en concertation avec les professionnels du tourisme et ceux de l' environnementdans lecadred'une gestion intégréedu littoral.

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STODDART, D.R. ET WALSH, R.PD., 1992 : Environmental variabilityarrlenvironmentalextremes as factors in ibeislaodecosysern.Aroll Research BuIletin, Washington,71 p.

Economie nationale Ce therne est complémentaire des themes précédents qui se rapportent al' utilisation de l' espace insulaire et de ces ressources. TI perrnet d' apprécier les retombées du tourisme sur l' éconornie loca1eet peut faire prendre conscience aux décideurs de l' intérét de prendre en compte la composante environne-mentale pour pérenniser les revenus du tourisme. Trois indicateurs seront utilisés pour apprécier cette thématique: • lenombred'emploisdirectsgénéréspar le tourisme/ total emplois salariés, • le nombre d' emplois induits générés par le tourisme/ total emplois salariés, • la place du tourisme et des activités éconorniques induites dans le PNB.

12 Notion de capacité de charge


MILlEUX

INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CHARGE

l'

ELEVAGE ET INSULARITE DANS L' OCEAN INDIEN : NOTIONS DE CAPACITÉ DE CHARGE l'

Gil/es Mandret *

Résumé La notion concoive

de capacité

de charge

les spécialistes

en élevage,

liés al' insularité.

Indien oü le développement

plus en plus d'importance,

telle que la

ne tient pas particulié-

de l'élevage,

rement compte des problémes de I'Océan

Abstraet

l'impact

Dans les iles

du tourisme

sur le paysage

doit étre intégré

dans les plans de développement

activité

afin de combiner

calcul de la capacité

productivité

de la relation

C' est en ce sens qu' une nouvelle insulaire

doit étre élaborée

Cette derniere d' accuei

1 de

cette

fois sur la société

acti vi té

et écologique

socio-économique

et

Insulaire, Océan

livestock

development

productivity

stocking

landscape

balance

are new

The computation

of the by the

constraint,

to the threshold

of dysfunction

relationship. stocking cattle

This

in order to combine

rate must be balanced

socio-economic

of the Ressource/

Actor island

rate which must reflect the potentialities

ofthe

breeding

the insular

is how

so that it can be restricted

we can talk about

consideration

activity

as to be received

and ecologic of the impacts

potential,

in terms of but also in

both on the society

and

ecosystem.

des capacités

termes

de

poten ti el

mais aussi d'impacts

Capacité

programs

and environment.

socio-economical

en

of nature,

planning

goal s, which must be taken into account within the island

ressources/espaces/acteurs. de charge

the protection

and territorial

notion de capacité

et sur l' écosysteme

Mots clés: Elevage, nion.

insulai-

pour étre plus proche de la réalité.

de charge

insulaire,

Le

de charge aux seuils de

doit étre le reflet de l'évaluation

socio-économique

de cette

pastoraux

tourism,

island livestock

naturelles

et environnement.

par la contrainte

pour limiter cette capacité

bouleversements

de l'ac-

et les ressources

de charge des espaces

res doit étre pondéré écologique

prend de

environnemental

tivité d'élevage

Today,

management

a la

insulaire.

de charge,

Indien, Comores,

Capacité

Maurice,

Réu-

Key words: Livestock, stocking

rate,

Indian

Island, ocean,

stocking Comores,

rate,

island

Mauritius,

Reunion.

* ClRAD TERA, Programme ERE,Especes-Ressources, B.P.5035, 34032 Montpellier Cedexl France .

13


La Problematique

'

L

ile, insula en latin, est ]' expres sion de la notion d' isolement a la fois dans le sens d' une séparation «protectrice» et d' une séparation «castratrice» par rapport a un ensemble continental. Longtemps signe d' abondance et de qualité de vie, 1'ile prend actuellement une signification souvent inverse. La vision traditionnelle et idyUique de l'ile, portion de terre entourée d' eau, escale incontournable dans les échanges entre continents a bien évolué. Le développement des réseaux maritirnes et aériens (lignes directes) et informatiques risque d' accentuer l' isolement et le non-développement de nombreuses iles, a moins qu' elles se positionnent al' intérieur de ces réseaux informatiques pour récupérer le róle d' escales nécessaires dans les échanges entre continents qu' elles avaient auparavant (développement d' une stratégie de "noeuds" de réseaux, activités de «service offshore»). Les sociétés insulaires dans l' océan indien ont bien compris cetenjeu. Elles s' orientent de plus en plus vers des activités de «service offshore». L' exportation de biens risque donc de subir une petite révolution car le «virtuel» remplacera de plus en plus le «matériel». Le développement des activités de services favorise l' émergence d'uneclasse moyenne urbaniséeet relativement aisée qui conditionne le marché local des produits de l' agriculture et de l'élevage. On peut prévoir alors une orientation de l'élevage insulaire dans deux directions: • pour les iles prosperes: un élevage a caractere social mais a fortes contraintes environnementales, intégré dans la gestion du paysage (environnement et éco-tourisme) comrne dans celle du déséquilibre spatial entre]' intérieur des terres et le littoral (gestion de l' espace), et orienté sur des produits frais et de qualité, ayant une valeur ajoutée certaine par rapport aux produits irnportés (produitsdu terroir); I'élevagedevient

14 Notion de capacité de charge

un outil d' amé-nagement du tenitoire (la Réunion, parexemple), • pour les iles moins prosperes: une situation qui évolue peu, avec un élevage traditionnel en retard de développement, a faible contrainte environnementale mais soumis a une triple contrainte économique - religieuse - culturelle, et se développant a partir de l'exploitation des ressources naturelles (les Comores, par exemple). Quel que soit le niveau de développement de l'ile, l' élevage sera forcément la résultante, a I'intérieur d'un «espace-temps», d' interactions, plus déterminantes que sur les continents, entre les ressources, les conditions climatiques et le jeu des acteurs. Les systemes herbagers constituent un élément écologique et socio-économique essentiel de la surface agricole utile (S.AU) des milieux insulaires. Ces surfaces représentent une composante marquante de l'espace rural qui ne conceme pas uniquement l' animal dans la relation ressources/espaces/ acteurs. La prise en compte du tourisme, la protection de la nature, la gestion de l' espace et l' équilibre de l' aménagement du teni toire apparaissent comme des objectifs qui doivent désormais compter dan s le développement de l' élevage in-

sulaire afin de limiter I'impact environnemental de ce demier. En élevage, un des indicateurs de l' occupation de l' espace le plus utilisé est celui de la «capacité de charge». Du fait de son mode de calcul, cet indicateur n' est pas le plus révélateur de la relation ressources/espaces/acteurs et il devient indispensable de créer un nouvel indicateur sur la «capacité de charge insulaire». C' est-a-diré une capacité de charge telle que la définissent les éleveurs, mais pondérée par les contraintes socio-économique et écologique pour la limiter aux seuils de bouleversements de cette relation. La capacité de charge insulaire en élevage doit, par exemple, tenir compte a la fois des capacités en eau, des possibilités d' approvisionnement en intrants et des rejets sous forme d' eff1uents, mais aussi de son impact sur la relation ressources/espaces/acteurs. Elle nécessite un regard amontetaval sur l'activité d' élevage elle-mérne. Le développement d'une activité d' élevage ne peut plus faire l' impasse sur]' évaluation des capacités d' accueil de cette activité en termes de potentiel socio-économique et écologique mais aussi d' impacts a la fois sur la société et sur l' écosysterne insulaire.

Gestion de /'espace et élevage en milieu insulaire (cliché Ph. Chardonnet)


MILlEUX INSULAIRES El CAPAC!H

Notion de capacité de charge classique La notion de capacité de charge est une donnée technique particulierement utilisée par tous les spécialistes de l' élevage de ruminants. Elle permet de réduire les risques de dégradation tout en tenant compte d'une productivité suffisantedu bétail. En rnilieu tropical, elle est calculée en fonctiondu nornbred'Ub'I" qui peut étre entretenu sur l hectare de páturage au cours d' une période donnée. Elle dépend de la phytomasse consornmable produite et de saqualité liée a son stade d' exploitation et a son hétérogénéité floristique. Dans des systemes basés essentiellement sur l' exploitation des ressources fourrageres cette notion prend toute sa valeur. La capacité de charge est un indicateur de pression sur le milieu qui est tres appréciable, méme s' il n' est pas tres précis. TI permet, entre autres, des comparaisons d' écosystemes páturés, En milieu insulaire oü l' élevage fonctionne en "flux tendus" du fait de la compétition pour l' eau et pour l' espace, de l' isolement par rapport aux sources d' approvisionnementetdes marchés, il n' est cependant pas adapté. II ne tient pas compte, nous l' avons dit, des eapacités en eau, des intrants et des rejets sous forme d' effiuents.

Notion de capacité de charge specifique aux tles Dans le cas du calcul de la capacité de charge c1assique, les éléments sur lesquels s' effectuent les mesures sont définis quelles que soient les situations. Dans la capacité de charge insulaire, ils dépendent de l' identification préalable des contraintes majeurs de l' écosysteme insulaire.

L'EXEMPLE D'UN ÉLEVAGE TRADITIONNEL: LES COMO RES

Le poids du systeme socio-économique Aux Comores, on peut considérer trois modalités principales de conduite des troupeaux: la divagation des animaux, l' attache au piquet sur le terroir villageois et l' attache au piquet dans les parcelles de l' agricuIteur. La divagation des animaux n'estplus pratiquéequ'á la périphériedes terroirs villageois, mais l' exiguité de ces terroirs ainsi que les besoins de l' intensification de l' agriculture font disparaí'tre progressivementcette pratique (Nuttens et Said, 1995). Le passage de la pratique de la di vagation des bovins a la généralisa-

DE CHARGE •••

tion de celle de la vache au piquet fixe dans les parcelles du propriétaire résuIte des besoins d' intensification provoqués par la pression fonciere qui ont été ressentis a travers une succession de crises : réduction de la jachere, diminution des rendements liée a la réduction des jacheres, destruction par les animaux des cultures dans les parcelles intensifiées, manque de bois pour la construction des clótures, manque de fourrage (Mandret et al., 1992). Les changements de comportement des éleveurs modifient la contrainte sur les ressources naturelles, et de ce fait la capacité de charge insulaire. L' interdépendance de l' élevage et de ]'agricultureestd' autant plus marquéeque la densité de population est élevée. Les superficies disponibles pour les animaux sont de plus en plus étroites et une part importante de l' alimentation du cheptel provient des résidus de culture et de l' exploitation des jacheres, Par ailleurs, l' accroissement du prix des engrais, lié a la dévaluation du franc comorien, augmente la valeur relative des éléments fertilisants des déjections animales (Letenneur et al., 1995), ce qui modifie la conduite de l' élevage. L' attache au piquet sur le terroir n' est pas liée a la capacité de charge de ce dernier. En effet, sur les parcelles éloignées les contraintes de l' abreuvement de l' animal et du gardiennage pour le soir sont importantes. «L' agro-éleveur» va avoir tendance a déplacer son ou ses animaux en fonction des travaux agricoles et de la rationalité de ses déplacements (transport du bois de chauffe, de l' eau, récoltes, plantations etc). Quelles que soient les capacités fourrageres, on peut prévoir que la capacité de charge en élevage ne pourra pas dépasser 2 UBT par «agro-éleveur», compte tenu des contraintes sur les temps de travaux en agriculture et des capacités en eau. Défmir une capacité de charge c1assique dans ces conditions n' aurait pas de sens. C' est pourtant une réalité qui s' affiche de

15


_

.ESEAU

INSUlAI

T

ICAl El Ml

RRANEE

Organisation villageoise traditionnelle aux Comores (cliché P.C Leiévre)

plus en plus dans le monde insulaire: sur l'ile de Tristan da Cunha la capacité de charge a ainsi été fixée a 2 bovins par famille. Le poids du culturel et religieux TI semblerait que les prerniers peuplements des Comores aient été effectués a partir de l' Afrique orientale (Bantou), puis a partir d' Indonésie avant d' étre complétés par des incursions sérnites. A ce mélange de populations africaine, sémite et asiatique, lesArabes chiraziens ont apporté religion etculture musulmanes qui se sont traduites par l' instauration de sultanats en rivalitépermanenteetd'unehiérarchiethéocratique (SaintMartin, 1983) toujours en vigueu; Le poids religieux et culturel de la société comorienne sur l' élevage est important puisqu' il vajuscju' a modifier les schémas de sélection des animaux. Les bovins, de type zébu, sont de petite tailIe (1m al, 10m au garrot)et traduisent bien le mode d' exploitation du troupeau dans lequelles plus beaux males sont sacrifiés pour les cérémonies traditionnelles dont la plus importante est incontestablement celle du «Grand mariage». Par cette pratique culturelle et religieuse, la société comorienne fait une sélection inverse, car les moins beaux males sont gardés pour lareproduc-

16

Notion de capacité de charge

tion. Tout schéma de développement de l' élevage aux Comores doit done intégrer la dimension du «Grand mariage» s' il ne veut pas se heurter aux valeurs essentielles de la société et s' orienter vers des échecs. Le calcul d' une charge théorique Iiée a un plan d' amélioration de la race doit nécessairement intégrer cette dimension culturelle. L'EXEMPLE D'iLES PROSPERES: LA RÉUNION El MAU~ RICE .

Le poids du socio-économique et du politique Si on compare la Réunion et Maurice aux Comores, on s' apercoit que ces trois ñes ont en commun des indicateurs démographiques tres élevés: 261 habitants/knf pour la Réunion, 532 habitants/knf pour Maurice et 274 habitants/krrf pour les Comores (lNSEE- TER 96f)7, 1997). Dans des iles prosperes comme la Réunion et Maurice, de telles contraintes démographiques vont se traduire par des tensions sur l' occupation de l' espace exacerbées par la concurrence entre les différents secteurs de l' éconornie (y compris l'urbanisme).AMaurice, bien qu'elle ne représente que 7 % du PI.B., la canne a sucre occupe 88 % des surfaces agricoles

et, malgré le développement du secteur touristique2, la diver-sification y prend une toute autre orientation que celle du secteur agricole puisque les deux derniers secteurs qui se sont développés sont les services «offshore» et le port francoA la fm 1995, les services «offshore» ont procuré des bénéfices de l' ordre de 7 millions de dollars, sui vis en 1996 par l' enregistrement de plus de 4000 sociétés (INSEE- TER 96/97,1997). La petitesse des surfaces pastoral es oriente l' élevage vers un systeme «hors sol» tres vulnérable du fait que les prix des matieres premieres, servant a la fabrication de nourriture pour animaux, sont en constante hausse sur le marché mondial. La nouvelle politique prónée par le gouvemement va vers la suppression du prix garanti aux producteurs et vers la révision des subventions directes accordées a ce secteur. Ces mesures gouvemementales viennent done remettre en question l' aspect social et équilibrant du róle de I'Etat, A la Réunion, la surface agricole utile ne représente que un quart de la superficie de l'ile dont 50 %, de cette S.A. U. consacrée a la canne a sucre et 20 % aux terroirs pastoraux. Le soutien technique et social, garanti par une volonté politique d' accompagner la mutation de la société agricole etde résoudre le déséquilibre spatial, source de troubles sociaux, permet al' élevage de jouer un róle dé dans l' aménagement du territoire. Si la faible superficie des exploitations constitue un frein al' optirnisation de la capacité de charge, elle permet de maintenir les exploitations dans unedimension tres familiale. Le nombre des exploitations de plus de 5 ha représente maintenant 20 % des exploitations contre 16 % il ya 7 ans et 7 % il Ya 15 ans. Contrairement a Maurice, l'Etat Francaisetlakégionkéunion.aidésparl'Union européenne, s' engagent vers un processus de soutien al' agriculture qui représente plus de 50 % des fonds de l' aide publique (évaluéeaenviron 1 milliardd'écus pour la période 1994-1999) et dont bénéficie


MILlEUX INSULAIRES

largement l' élevage, et plus particulierement le paysage pastoral. En effet les subventions couvrent jusqu' a 70 % du coüt des créations de prairies. Du rnérne ordre, on trouvedes subventions pour l'achat d' engrais, de pesticides, l' installation de cl6tures, la constitution de réserves fourrageres sous forme d' ensilage et de foin, etc, auxquelles s' ajoutent des primes a l' animal (vaches allaitantes ...). Ce systeme d' aide concourt a l' artificialisation de cette production qui est «adrninistrée» mais il asa justification dans la mesure oü l' enjeu irnportantestsocial. Un enjeu purementéconomique ne permettrait pas de rationaliser la capacité de charge de cette lle. L' élaboration d' une capacité de charge spécifique a I'ile est done un excellent indicateur d' utilisation du milieu. Le poids de I'environnement Dans les iles les plus prosperes, les éleveurs sont de plus en plus sensibilisés aux problernes de pro-tection de l' environnement, notarnment en matiere de pollution des eaux. Pour les iles classées zones ultra périphériques de I'Europe, dont la Réunion faitpartie, lagestion deseffluents d' élevage devient un facteur lirnitant du développement de l' élevage. En effet la réglementation européenne prévoit jusqu' al' interdiction de miseen décbargedes déchets fermentescibles tels que ceux issus de l' élevage. TIestévidentquelaplupartdes petits états insulaires qui développent un élevage sur une grande échelle sont confrontés, a plus ou moins long terme, a ce probleme. Le recyclagede ces déchets dans l' agriculture et l' élevage est une voie possible mais elle a ses limites, surtout quand l' élevage «hors sol» domine et que l' on cherche a développer l'éco-tourisme. Le ratio «quantitéd'effluents/SAU» doitdonc intervenir dans lecalcul de la capacité de charge insulaire; bien que nos connaissances sur la capacité d' épuration des différents milieux et supports (pouvoirépurateurdes sois etdu systeroe sol-plante, fabrication de compost a partir de différents supports carbonés ...)

ne soient pas encore tres développées pour affinerce ratio. Lacapacitédu milieu aaccueillir des animaux d' élevage ne dépend pas uniquement de son potentiel a les alimenter mais aussi de la gestion des déchets qu' ilsengendrent et de leur intégration dans lepaysage.

Conclusion Les impératifs écologiques, socio - économiques et techniques, propres a une utilisation rationnelle de l'espace insulaire conditionnent le choix de la capacité de charge decetespace. L'utilisation de lanotion de capacité de charge insulaire a un sens tres fort en élevage puisqu' elle exprime a la fois uneagressivité vis-a-visdu milieu, desseuils de bouleversements, mais aussi un développement harmonieux. Elle permet d' envisager des choix de développement limité ou des transferts d' activités vers des zones mieux adaptées. Dans les iles les moins prosperes, l' activité d' élevage peut se contenter, dans un premier temps, d' une approche oü la capacité de charge est utilisée comme indicateur de son potentiel de développement et non pas du développement insulaire possible. L'élevage

El CAPACITÉ DE CHARGE

Dans les Iles les plus prosperes l' approche du développement de l' élevage doit nécessairement se faire par des méthodes synchroniques de comparaisons de contraintes entre systemes d' élevage d'une part et entre couples «contraintes - productions» d' autre part. L' emploi d' indicateurs de la relation «espaces-ressourcesacteurs», comme la capacité de charge insulaire, sont alors plus proches du potentiel réel de l' espace insulaire pour une activité donnée. Ce type d' indicateur permet d' intégrer les contraintes majeures qui pesent sur le ou les systemes. 11est aussi l' expression des interactions entre la ressource et le jeu des acteurs. Il peut, a terme, devenir un indicateurd' évolution dupaysage. D'unesituation d' élevage tradi-tionnel, soumis a une triple contrainte économique- religieuse- culturelle et basée sur l' exploitation des ressources naturelles, les nouvelles formes de l' élevage insulaire tendent vers un élevage a caractere social, intégré dans la gestion du paysage comme dans celle du déséquilibre spatial entre l' intérieur des terres et le littoral, et orienté sur la production de produits frais et de qualité. Dans les iles, l' éleveur n' est plus le seul décideur du «droit d'élevage».

a la Réunion

a volontairement été concentré sur les terres d'altitude (cliché Ph. Hassoun)

17


IESEAD

INSDLAIRE

TROPICAL

III

RRANEEN

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m-

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18 Notion de capacité de charge

1 L'UBT ou Unité de Bétail Tropical correspond a un bovin de 250 kg vii, poids auquel on applique un coefficient pour les autres animaux (caprins: 0,20 i camelins : 1,2 a 2 i équins : 1,0 a 1,2 i anins: 0,2 a 0,4). La capacité de charge est ca/culée selon la formule: CC=(BA x K) / (DP x 6,25) CC=Capacité de Charge BA=Phytomasse consommable K=Coefficient d'utilisation de la phytomasse par les animaux (0,1 a 0,9) DP=Durée de la Période 6,25=Poids de matiere seche consommée théoriquement par 1 UBT

Le tourisme a représenté en 1996 une augmentation ponctuelle de la densité de population de 44 %.

2


MILlEUX INSULAIRES El CAPACITÉ DE CHARGE •••

APPORTS ET CONTRAINTES DE LA , NOTION DE CAPACITE DE CHARGE AU , DEVELOPPEMENT INSULAIRE DANS UNE LOGIQUE DE DÉVELOPPEMENT

INTÉGRÉ ET

DURABLE: QUELQUES PISTES MÉTHODOLOGIQUES Hélene Rey

Abstraet

Résumé Cette communication veut essentiellement

propose un essai de réflexion qui se

méthodologique

par rapport a I'apport

This paper will discuss, essentially from the methodological point of view, the bringing-in and the validity of the notion of

et la validité de la notion de capacité de charge pour la ques-

«Ioad capacity» about the development in islands. In its first

tion du développement

part, this concept is analyzed from its ecological origins and

insulaire. Dans un premier temps la

notion est définie a partir de ses racines écologiques et ses

possible outcomes

prolongements

in environmental

economics,

notably

au

through the notion of assimilation capacity. We shall then

On peut alors

point out that the logic of the «Ioad capacity» is in fact very

en rnérne temps montrer une logique proche de celle du déve-

akin to that of sustainable development, but involves many

loppement durable et de nombreuses limites tenant a la no-

limits, notably linked to the idea of «treshold» that it includes,

possibles en économie d'environnement

travers de la notion de capacité d'assimilation.

tion de seuil, et par la d'équilibre et de possibilité de prévi-

so by this way ideas of stabilty, and forecasting possibilities.

sion, que sous entend cette notion. Cette revue critique du

This critical examination of the concept will be followed by a

concept est suivie d'un rappel des spécificités majeures des

reminder of the main characteristics of the island systems, to

systernes insulaires de facon a définir ensuite une «Iogique»

define an adapted logic of economical development. That

de développement

adaptée. Celle-ci doit étre

one has to be at the same time adaptative and durable, in

adaptative et durable afin de prendre en compte a la fois les

économique

order to integer new constraints of matching between ecology

nouveaux impératifs d'articulation

and economics, and specificities of the island ecosystems.

entre écologie et écono-

mie et les particularités des écosysternes insulaires.

Mots clés: capacité de charge, développement systernes insulaires, écologie, économie.

durable, iles,

Key words: stocking rate, sustainable development, islands, insular systems, ecology, economy .

. Centre d'Etudes de Projets, Faculté de Sciences Economiques, BP 9606 - 34054 Montpellier Cedex 1, France.

19


EA

I SULAI (T

leA

Mlo

Introduction

L

a question d'un mode de développement durable et intégré des régions insulaires suppose de proposer un modele de développement qui entre dans le nouveau contexte de représentation de l' environnement, e' est-a-diré qui puisse répondre a la propriétédedurabilité. Un tel modeles'inscrit dans une approche différente des rapports NaturelSociété conduisant a la définition d' un objectif de co-viabilité des milieux et dessociétés. Celui-ci s'ajoutead'autres: survie, croissance, répartition .... qui ont scandé le développement de nos sociétés. Il induit une contrainte majeure liée a la notion d'irréversibilité: I'existencede «seuils de boule-versements» a ne pas dépasser. Toutefois l' évaluation de ces seuils pose de nombreux problemes, en premier lieu du point de vue écologique du fait de la complexité des interactions, de l' existence de mécanismes de régulation naturels et plus généralement des difficultés d' observation des change-ments mettant en oeuvre des échelles de temps de tres long terme. Ensuite la «conversion» de ces indicateurs et seuils physiques en objectifs économiques suppose la mesure des impacts des activités par rapport a ces seuils et la hiérarchisation des utilités que la société leur accorde. C' est l' ensemble de ces difficultés qui a conduit a une réponse en terme de référence a un principe de précaution. Si on faitabstraction deces problemes, la question de fond reste bien celle de la définition d' un modele de développement propice a intégrer ce nouvel objectif et les nouvelles propriétés qui lui sontliées.

20

Notion de capacité de charge

Le concept de capacité de charge et sa traduction en terme de développement durable PRÉCISIONS CONCEPT

SUR LE

DE CAPACITÉ

DE CHARGE

Le concept de capacité de charge est issu de l' écologie. Introduit par Verhulst (1938) il montrel' existence d' une limite a la croissance ou al' expansion résultant de ]' interaction entre un organisme et un milieu, une population et son environnement, voire plus généralement d' un contenu et de son contenant. Par exemple sa traduction dans le domaine de I'halieutique fait référence al' existence d'un maximum de pression de peche supportable par une ressource ou un milieu. La représentation formalisée de cette notion fait intervenir une fonction de type logistique, ou la croissance dépend des caractéristiques intrinseques de la ressource considérée et oú le point limite devient alors la cible recherchée dans les approches en terme d' optimisation. (Le Fur, 1997).Ce concept peut étre rapproché de la notion de capacité d' assimilation. Le milieu naturel dispose d' une capacité d' assimilation qui, étantlimitée, devient notamment une contrainte I a l' émission de déchets el, par la, al' activité économique qui les gérere, Cela revient donc a définir des seuils critiques d' activité ou de croissance permettant de ne pas dépasserlacapacitéd'assimilationdel'environnement. Ceux-ci peuventdonner lieu a la défmition de normes techniques dans les fonctions de production.

DE LA CAPACITÉ DE CHARGE

Á LA DURABILlTÉ

On peut caractériser cette approche du point de vue de ses objectifs par le fait qu' elle cherche a maintenir constant le stock global de capital naturel. Le concept de capacité de charge peut ainsi étre envisagé parrapportála notion plus générale de durabilité, a laquelle il entend participer. En effet celle-ci appréhende les questions envi-ronnementales au travers d'une contraintea lacroissancequi est lapréservation ou le maintien d' un stock global de capital. On suppose implicitementqu' ilest possibled'aménager,pardesmécanismes d'incitation, une forme de croissance qui puisse satisfaire au respect de cette contrainte. L' objectif général est d' avoir un usage soutenable de l' envi-ronnement, permettant la préservation des fonctions environnementales pour les générations futures sous deux formes Dans lecas d' une durabilité forte le stock global correspond seulement au capital naturel tandis que dans la version faible de la durabilité il est étendu au capital technologique et humain (Faucheux et Noél, 1995). Ces distinctions sont révélatrices de la pluralité des courants et des conceptions qui prónent aujourd' hui la prise en compte des préoccupations environnementalistes en premier lieu dans les objectifs politiques puis en corollaire dans les politiques publiques économiques. D' un point de vue générique l'évolution des relations NaturelSociété, peut étrecaractérisée par l' opposition des visions naturaliste et rationaliste que l'on peut associer a deux idéal-types de comportement (1) une conception de la nature «comme


MILlEUX INSULAIRES

un objet utilitaire ou agréable, ordonné a I'homme comme un moyen par rapporta une fin» ou (2) «un associé, voire une partie intégrante au sein de laquelle 1'homme doit négocier par des procédures diverses (éthiques, religieuses symboliques ...) la cohabitationetl'alliance» (Ki-Zerbo, 1992). L'histoire de la gestion des ressources en mérne temps qu' elle s' avere érre un point d' entrée intéressant pour l'étudede l' organisationdes sociétés,c1evientcontingentedes représentations que ces sociétés ont de la nature, en fonction de l'histoire, des contextesetplusprécisémentdesparadigmesqui caractérisent l'évolution des conceptions de l' universoPlus généralement si l' on admet que l'objectifc1edurabilitéintroduit une nouveile représentation de ces relations, on est conduit a penser qu' il en résultera, entre autres, des changements institutionnels au niveau de l'organisation des acteurs parrapport aux ressources, avec comme conséquences directes : • l' apparition de nouveiles interactions en particulier entre le niveau global de la société civile et les secteurs d' activités utilisateurs des ressources ; • un changement des modes de représentations dontles objectifs ne sont plus seulement seetoriels (Valarié et Djoulden, 19%).

FONDEMENTS El LIMITES D'UN TEL CONCEPT

Dans ce contexte plusieurs critiques peuvent étre faites a la notion de capacité de charge. La notion de durabilité prévoit la reproduction du capital naturel en admettant la possibilité de substitution de ea-

pita! reproductible au capita! naturel initial. L' objectif est d' en préserver les différentes utilités pour les générations futures. La notion de capacité de charge est a l' origine plus proche d'une approche conservationniste visant plutót un état stationnaire. Sa prise en compte dans la problématique du développement insulairedoit done se faire dans une acception élargie. TI ne s' agit plus d' observer un élément par rapport a son milieu, mais au contraire une chaine d' interactions complexes entre plusieursélémentsconstitutifsd'untoutoud'un systeme dont les échelles de régulation, spatiales et temporelles, sont multiples. L' insularité, dans le cas des Iles de petite dimension, introduit ici une écheile «frontiere» naturelle qui facilite la délirnitation spatiale du systeme a prendre en compte. La problématique ressort plutót de l' anaIyse de la co-viabilité des dynamiques de développement et des Clynamiques des écosysremes définis comme « un réseau de populations en interactions» (Pavé et Barbault, 1992). Des lors le constat de la complexité des relations Nature/Société est au coeur de cette nouveile problématique et va conduire a de nouvelles questions et méthodologies de recherche. La notion de seuil suppose implicitement un raisonnement al' équilibre dans une conception de l'évolution qui admet un certain détenninisme, lequel en corollaire offre la possibilitéd'une prévision etd'une intervention pouvant influencer le devenir du systeme. Or au contraire les nombreuses et récentes recherches menées a propos des relations Nature/Société ont montré l' impossibilité de prévoir l'évolution de ces systemes du fait de la multitude des interactions pouvant amener des bifurcations

El CAPACITÉ DE CHARGE

et de leurforte dépendance aux conditions initiales, qui limite toute possibilité de généralisation. Par ailleurs la prise en compte des dynarniques de tres long tenne complique l'observation du fait de l' existence de phénornene d' irréversibilité ou de rémanence qui induisentdes écarts d' ajustement ou des effets de mémoire du sysreme. TIsemblecommunémentadmis que les états actuels des écosystemes forestiers s' expliquent pour partie par des changements clirnatiques d' origine tres lointaine mais qui ont laissé des traces durables. Ces constats ont donné lieu a un prolongement théorique «théorie du structuralisme dynarnique» (Lordon, 1992) qui met l' accent sur l' identification des indices d' évolution dans les changements de structure, ceux-ci étant appréhendés comme une résultante du fonctionnement propre du systeme, Néanmoins l'introduction du tres long tenne pose la question de la définition des outils d' analyse et des descripteurs ou indicateurs de ces changements, souvent imperceptibles a l' échelle du présent (pavé et Rieu, 1993). Enfin la complexité de l' objet nécessite le recours a la pluridisciplinarité, autre enjeux méthodologique. La rnise en place de programmes pluridisciplinaires a entre autres perrnis d' étudier l' influence des modes de controle social de l' espace et des ressources, montrant ainsi la nécessité de faire évoluer la forme des recommandations en matiere de controle et de régulation, voire le mode de mise en oeuvre des recherches, avec un développement d'un courant de recherche dite action, pennettant une démarche participative avec les acteurs concernés (Catanzano et Rey, 1997).

21


lE

A

I

LA

T

Quel modele de développement pour les systémes insulaires? Ces nouveUes relations aturelSociété en mettant l' accent sur les interactions et les externalités, supposent par essence des approches intégrées tandis que l' on doit par ailleurs prendre en compte certaines spécificités et impératifs particuliers liés au caractere insulaire des écosystemes. Dans le cas des systemes insulaires, notammentceux de petitetaille, lecaractere réduit et l' »isolement- de ces espaces, introduitdes contraintes particulieres du point de vue des dynamiques a la fois écologiques et socio-économiques. MacArthur (1972) montre ainsi que si la richesse spécifique d'un es pace est a un momentdonné la résultanted'un processusd'immigration etd'un processus d'extinction, alors cette richesse dépend dedeux parametres qui conditionnent ces processus: l' éloignement ou isolement et la surface. Des lors il est possible dedéterminer un pointd' équilibreen fonction du niveau de ces parametres. La fragilité particuliere des rnilieux insulaires en matiere d' environnernent, peut étre reliée a leur tai lIe et leur i olement. Toutefois certains constats et analyses, il est vrai controversés, montrent que cette fragilité ne conduit pas forcémenttou jours a des situations d'irréversibilité. On peut en effet citer plusieurs exemples de milieux oü des disparitions d' especes résultant de catastrophes natureUes (éruption de volcan par exemple pour I'ile du Krakatoa en 1883) ou d'interventions humaines (défaunestation d'ilots au large de la Floride) ont été natureUement reconstituées de nombreuses années plus tard (Déléage, 1992). Selon May (1986) ceUes-ci résultent de valeurs critiques du taux de croissanee de la population, dont on a vu qu' iJ était fortement contraint par les situations de confinement, caractéristiques des milieux insulaires. Seules les valeurs moyennes semblent constantes sur le tres long

22

Notion de capacité de charge

terme (Déléage, 1992) et ilest alors possible que les caractéristiques des écosy temes insulaires conduisent a des situations de plus forte incertitude. L'insularité est souvent présentée comme un handicap pour le développement. Ce constat est fondé sur l' identification de problemes spécifiques d' inírasnucture et de taille des marchés conduisant a des contraintes particulieres en terme de compétitivité. Le caractere restreint des tenitoires et par voie de conséquence des ressources explique une plus grande occurrence des problemes d' externalités et de concurrence entre objectifs ou activités au niveau des politiques publiques. Les possibilités de régulation de l'exode rural, ou plus généralement des mutations sectorieUe sont limitée , conduisant a des phénomenes exacerbés de périphérisation, deconcentration des activités sur le littoral et plus généralement a des difficultés majeuresen rnatiere d'aménagementdu territoire. Des lors ces pays sont plus souvent que d'autres dépendant des politiques d' aide intemationale. Enfin le caractere restreint et le «relatif» isolement des tenitoires insulaires engendrent des dynamiques particulieres au niveau sociologiqueet concemant la coordination des acteurs. On peut en effet faire l'hypothese;

• d'une plus forte interconnexion des réseaux de connaissances entre acteurs, situation qui facilite lecontróle ocial et s'avere ainsi favorable a un développement décentralisé et négocié, propice a l'application du principe de ubsidiarité. • d' une plus forte inertie face au changement résu Itant de l'existence de ces réseaux sociaux etd'uncontrólesocial plus fort ainsi que d' une faculté de mémorisation que l' isolement rend plus grande. Le dépassement de ces contraintes rend nécessaire une réflexion sur l'échelle spatiale la plus pertinente pour la définition d'un prograrnmede développement. Un niveau supérieurd' organisation :parexempIe l'écheUe régionale ne serait-il pas suscepti ble de lever certaines contraintes trop lirnitatives au niveau local ?

Conclusion Le caractere intégré de l' analyse suppose de privilégierune approche «syserre» permettant l' étude des interactions entre activités etentreespaces, ainsi qu' entre systemes d'exploitation etsystéme de régulation. En effet la priseen compte des objectifs de durabilitéconduit a une transformation de l' ensemble des composantes des systemes, y compris les systernes de décision etde régulation (Reyetal., 1997). Or dans tout processu de développement il convient de veiller non seulement au développement des compo antes du systeme, mais aussi al' évolution de leurs interactions, celles-ci conditionnant le maintien de la coordination au sein du systeme el",par la, la réussite a moyen terme du processus de développement en termes d' acceptation des acteurs etd' adaptation aux conditions locales initiales. Cette approche conduit a accorder un róle spécifique et une priorité au changement institutionnel. Celui-ci permetd'accompagner cette dynarnique en préservant et/ou adaptant les capacités internes de coordination des systemes sociaux face a des configu-


MILlEUX

rations nouvelles d' organisation (au sens decréation d'ordre) au niveau de lacoordination des acteurs etdes institutions. On se réclame ainsi d'une approche évolutionnisteet néo-institutionnaliste du développementqui metl'accentsur ler61edes innovations ou routines organisationnelles -définjes comme des dispositifs cognitifs collectifs- ainsi quedes dynamiques des institutions etdes processusd' apprentissage des acteurs tant individuels que collectifs. TIs' en suit la nécessité d' une progressivité des objectifs et de la rnise en oeuvre du processus de développement favorisant l' appren-tissage des acteurs et des institutions. TIs' agit done de proposer un développement évolutif concu avec clifférents stades et offrant aux acteurs des itinéraires d' évolution entre ces stades (Rey et al.,l996). Le respect des conclitions de durabilité des systemes conduit a une transformation profonde des modes d' exploitation et de régulation des économies et des écosystemes qu' elles «exploiteno et «utilisent», L' affirmation croissante des préoccupations environnementales sur l'agenda politique modifie profondérnentla conduite des actions publiques, sortant d' une approche sectorielle et tentant de concilier de nouveaux usages et de nouvelles valeurs dites «d' existence» de bien collectif que constitue le capital natureJ des sociétés. La définition de nouvelles normes restrictives de gestion des écosysternes liées aux objectifs de co-viabilité souleve la question du respect et du controle de ces normes en terme de mode et d' échelle d' intervention, laquelle place le principe de subsidiarité au coeur des débats. Question pour laquelle, des J979, Passet (1979) suggérait le principe de «contrainte rninimale» ou encore de «décentralisation par niveau d' organisation» qui stipuJe que toute décision devrait étre prise «au» et «par le» niveau d' organisation oü elle développe ses conséquences, «plus» et «rnoins» étant également néfastes. TIs' agitalors d' abou-

INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CHARGE

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tir a un consensus négocié qui permette de concilier l' ensemble des représentations a priori contradictoires au sein d'un éventail plus large d' acteurs, dont les modes de représentation sont clifférents et dont les objectifs ne sont plus seulement sectoriels mais qui inc1uent des lors aussi des questions de partage entre usages conflictuels et plus largementdes impératifs d' aménagement du littoral et de protection des écosystemes. Cette tension est d' autant plus forte daos un contexte de décentralisation dans lequel systeme de'décision et systeme de régulation deviennent polycentriques etengagent a de nouvelles formes d' organisation des intéréts plus territorialisés (Valarié et Djoulden, 1996). 1 Une autre contrainte majeure est identifiée et intervient conjointement: il s'agit de la capacité de renouvellement des ressources renouvelables.

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23


T

24 Notion de capacité de charge


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE

CAPACITÉ D'INTÉGRATION DE NOUVELLES ORGANISATIONS DE MARCHÉ POUR LES ECONOMIES INSULAIRES: Exemple de la Banane d'Exportation RémyHugon *

Résumé

Abstraet

De nombreuses iles tropicales produisent des bananes dont

Many tropical islands produce bananas, which exported

la partie exportée représente 2,5 millions de tonnes, soit pres

part represents 2.5 million tons, that is to say nearIy 20 % of

de 20% du trafic international de la banane-dessert. La moitié

the international trade in sweet bananas. Half of this produc-

de cette production provient de territoires européens (Marti-

tion comes from European territories (Martinica, Guadeloupe,

nique, Guadeloupe, Canaries, Madere ...) ou de pays ACP (Ja-

Canarian islands, Madeira) or from ACP countries (Jamaica,

a

Dominica, Saint Lucia, Saint Vincent...), allliable to a specific

spécifique de l'Union européenne ten-

europea n regulation which tends to support theses produc-

marque, Dominique, Ste Lucie, St Vincent...), tous assujettis une réglementation dant

a maintenir

ces productions malgré le contexte de libéra-

lisme souhaité par I'Organisation

Mondiale du Commerce

(OMC).

production areas in these islands outline specific stocking

La nature et la taille des aires de production de ces Iles définissent des profils de capacités de charge spécifiques. Les faibles infrastructures et la dépendance aux intrants exogenes liés productivité

tions, in spite of the context of liberalism expected by the WorId Trade Organisation (WTO). The nature and size of the

a

I'insularité, ne permettent pas d'atteindre compétitive

dans un contexte

une

international

ouvert. Ces productions sont pourtant essentielles

a

la vie

économique autant par les retombées directes qu'indirectes. Le respect total des regles de I'OMC reviendrait cette activité agricole et

a pénaliser

a condamner

lourdement I' économie

rates. The poor infrastructures

and the

depedency

on

extraneous inputs linked to insularity do not give the possibility to reach a competitive productivity within an open international context. Nonetheless, those productions are essential for the economic Iife due to both direct and indirect effects. A total respect

of

WTO regulations

would

end up in

condemning this agricultural activity and will heavily penalize the economy of these islands. their poor representativeness does not permit the organization

of a protection efficient

de ces iles dont la faible représentativité ne permet pas d' or-

enough to confront the massive productions of the conti-

ganiser une défense efficace face aux productions massives

nental zones, actively supported by transnational companies.

des zones continentales activement soutenues par les cornpagnies transnationales.

The political decisions, which will direct the banana market organisation,

will

have

huge

repercussions

on the

Les décisions politiques qui orienteront l' organisation du

development in all these islands. They risk a modification of

marché de la banane auront d' énormes répercussions sur le

the outlined stocking rate and they might lead to important

développement de toutes ces iles et risquent de modifier les

economical

profils de capacité de charge et d'induire

political imbalance within some regions.

des régressions

and social declines, risk factors to a serious

économique et sociale importantes, facteurs de déséquilibres politiques graves dan s certaines régions (Caraibes ...). Mots clés: iles tropicales, banane, capacité de charge, mar-

Key words: tropical islands, banana, market, stocking rate,

ché, OMC, pays ACP, Caraibes, mondialisation.

WTO, ACP countries, internationalization.

* Cirad-Flhor, B.P. 5035, 34032 Montpellier Cedex 1, France

25


T

Production mondiale de la banane d'exportation

Importance des productions

e marché de la banane d'exportation est le premier marché mondial des fruits en volume (14 millions de tonnes en I996)ainsi qu'en valeur(4,8 milliarclsUS$ en 1996). Suivant leur origine.ces bananes releveront de regles de commercialisation différentes. Trois systemes sont a considérer suivant la nature géopolitique des pays de productions : -les tenitoires périphériques et ultra périphériques de I'Union européenne (U. E.) constitués des Canaries (Espagne), de Madere (portugal), de la Créte (Grece) et des Antilles francaises. On désignera cette production sous le terme de "banane européenne". - les pays dont les rapports avec les membres de l' U.E. restent forts (so uvent pour des raisons historiques), signataires des accords de Lomé et appartenant de ce fait aux pays d' Afrique-Caraibes-Pacifique (ACP) comme Belize, les Dessous le vent, laRépublique Dorninicaine, leCarneroun, laCóte d'Ivoire, Madagascar ...On parlera alors de "bananeACP". -les autres pays indépendants qui ne peuvent que se placer dans un contexte commercial intemational ou yertoLeur banane d' exportation sera dite ''banane dollars". Dans le cadre de l' acces aux marchés de J'Uníon européenne, les bananes HE, etACP souhaitent conserver certains avantages hérités de leur histoire et se défenclre ainsi d'un libéralismequi favoriserait les bananes doUars. L' organisation communedes marchés (OCM) pour la banane, décidée par 1'u.E., est le cadre mouvantdanslequelchacun des pays producteurs de l' UE et des pays ACP tente de sauver ses intéréts.

Les productions insulaires de bananes représentent 74% de la production européenneetACP(tableau 1). Letonnage qu' elles représentent est tres inférieur a celui des pays aux bananeraies industrialisées. Par contre elles concement de nombreux pays et un grand nombre d' opérateurs par rapport aux quelques compagnies qui régissent les immenses plantations des pays gros producteurs. L'importanced'une production dans un contexte national peut étre également appréhendée en rapportant les chiffres d' exportation au nombre d'habitants. En prenant en compte tous les pays producteurs de banane, on constate par cette approche que quatre iles figurent parmi les cinq premiers pays (c1assement en tonne de bananes exportées par habitant - tableau 2).

L

26

Mondialisation et capacité de charge

insulaires

La banane aux Antilles

Un contexte de production tres varié Le produit final, bien connu des consommateurs, est tres standardisé puisqu' il provient de quelques cultivars d' un méme groupe génétique (un nouveau marché pour d' autres variétés de bananes émerge, mais reste encore embryonnaire et ne sera pas pris en considération dans ce qui suit). Cette homogénéitédu prodctala con-sommation ne doit pas faire oublier une tres grandediversité de conditions de production qui rend périUeuse toute approche qui s' appuierait sur un seul systeme de production. Cettediversité se déclinedepuis les particularités topographiques, pédo-Iogiques, climatiques et géographiques jusqu' aux composantes sociales et politiques dechaque pays. Quelques-unes sont citées iciet peuvent illustrerl' opposition des conditions de cultures entre zones continentales et insulaires tropicales. • Les productions de plaine permettent de culti ver de grandes surfaces homogenes, d' appliquer des itinéraires techniques a grandes échelles, d' optimiser les intrants. Elles s' opposent aux espaces hétérogenes constitués de plaines exigues, de vallons ou de plateaux qui imposent un parcellaire fragmenté et des pratiques culturales souvent plus complexes.


MILlEUX INSULAIRES El CAPACITÉ DE CHARGE

Tableaul: Importance des productions insulaires de bananes (U.E. + ACP) Production

U.E. + ACP

Production

insulaire

Créte Madere Guadeloupe Martinique Canaries

Total U.E.

1.700.000 t (100%)

U.E. 15000 50000 150000t 219000 420000

Production t t

insulaire

Cap Vert Grenade Dominique St Vincent

t t

Ste lucie

4800 14000 71000 82000 105000 127000

Total ACP

403800 t

Iemeique

854000 t

• Les sois profonds et drainant permettant des cultures pérennes contrastent avec lessoIspeu profonds ou asphyxiants qui nécessitent des replantations régulieres avec une préparation importante des sois. • IX nombreuses zones de production sont exposées aux tomades ou aux cyclones auxquels «la plus grande herbe du monde» ne résiste paso • La distance «zones de productions / marchés de consommation» est tres variable (Amérique centrale/ USA-Canada et Caraibes / Europe par exemple) et influe fortement sur les coüts de revient • La nature des statuts fonciers détermine la taille des plantations et sera déterminante dans le choix des systemes de productions (opposition des grandes plantations industrielles etdes exploitations farniliales ).

ACP t t t t t t

• Lasituation politiqueetl'histoiredechaque pays producteur impliquent souvent des relations entre production et marchés (pays indépendants, paysACp, départements ultra-périphériques européens ...)

Historique des regles du marché de la banane d'exportation Des l' origine de I'Union européenne (Traité de Rome), deux organisations de marché ont cohabité pour la cornmercialisation de la banane. • La premierequi rassemble les pays producteurs (France, Espagne, Portugal, Grece) et les pays impliqués dans le développement des ACP (France, Royaume-Uni, Espagne, Belgique ...) commercialise les bananes de 1'U.E. et

Production de banane dessert d'exportation (1996) PRODUCTION

1257800 t (74%)

EN MILLlERS DE TONNES

des ACP a un prix supérieur au cours mondial. Cene pratique perrnenait de maintenir cene activité agricole dans 1'u.E. et de contribuer au développementdans les paysACP. • La seconde, constituée des autres nations européennes (Allemagne, pays nordiques et plus tarclivement les autres paysd'EuropecentraleetduNord),grandes consommatrices de bananes, commercialise les bananes dollars du marché mondial a un coüt moindre. La persistance de ces deux organisations devient anachronique avec I'unité croissante de l' Europe. Les débats ont été nombreux et intenses pour arriver a des accords successifs d' organisationcommunedesmarchés(OCM) toujours plus complexes. Les plaintes déposées aupres de l' Organisation Moncliale du Commerce par les producteurs de bananes dollars ont abouti a une rnise en demeure pour l'Europe de régulariser l' organisation dece marché dans lesens d' une libéralisation pour le Ierjanvier 1999.

27


•••••

T

Ml

TI faut noter que la part importante des

productions insulaires dans les bananes de I'UE.etdesACPaeu unr6leplut6tnégatif dans les négociations. Les lles et leur identité propre tres marquée (phénomene typique de l' insularité) ont été un frein a l'établissementd'un consensus puisquea la difficulté des débats s' ajoutait la spécificitéd' états/tenitoires peu enclins a s'exprimerd'une méme voix.

Menace pour les Iles L' obligation d' organiser le marché bananier au niveau planétaire ne peut se faire qu' au détrirnentdes producteurs de régions aux fortes contraintes. Les territoires insulaires sont donc directement concemés. Les consé-quences éconorniques et sociales seront majeures puisque l' importance de ces productions y est particulie-rement forte (cf. tableau 2). Du faitde l'insularité, certaines activités induites sont particulierement développées [e.g.: lafonction de transport(autant pour laproduction que pour les intrantsexogenes), le secteur de cornmercialisation / trans-formation des sous-produits ou des écarts de production]. Elles seront obligatoirement touchées par l' évolu-tion de la culture de la banane, ce qui contribuera a aggraver la situation éconornique locale.

Ces deux hypotheses sont insatisfaisantes et les solutions devront étre intermédiaires. Leur choix sera facilité par l' utilisation d' indicateurs pertinents oü les notions de capacité de charge, de seuil de tolérance, de durabilité devront étre prises en considération pour chaque zone de production. Ces précautions seront d' autant plus nécessaires qu' elles concementdes marchés tres précis. On peut en effet imaginer d' autres systemes de production (bananes de diversi-fication, mais également d' autres productions horticoles spécialisées) spécifiques des conditions de chaque site, pour lesquels des analyses des contraintes devront étre faites pour déterrniner les seuils et les capacités de charge propres. TI faut déplorer que les effets de la mondialisation ne soient souvent exarninés que dans leurs composantes éconorniques a court terme. La dimension politique est tres souvent reléguée. TI est pourtant facile d' imaginer les effets induits par la déroute d' un secteur éconornique

Tableau 2: Exportation de banane par habitant Pays

Tonne de banane export / habitant

Sainte Lucie

0.900

Costa Rica *

0.642

Martinique

0.538

Dominique

0.533

Saint Vincent

0.505

* pays non insulaire

majeur dans une He au niveau de sa région. Les répercussions en terme d' instabilité politique, d' appauvrisse-ment, de nouveaux flux rnigratoires, de sécurité sont évidents et devraient étre intégrés aux études de prospective pour rnieux situer le réel intérét d' une nouvelle orientation d'un marché.

Conclusion Les solutions a apporter relevent d' une problématique récurrente du développement durable des zones aux conditions de productions défavora-bles. Dans leurs formes extremes, elles relevent de deux scénarios: • un fort assistanat, artificialisant l'ensemble de la vie éconornique ; • une liberté de marché qui sacrifiera tous les secteurs non concurrentiels et entrainera une importante baisse du niveau devie.

28 Mondialisation et capacité de charge

Bibliographie LoEILLETD., 1997. "OCM Banana-Lafiliere canarienne face a la nouvelle donneeuropéenne", FRUIIROP, Nwréro32. l..oBLLETD., 1998. ''OCMBanane-Acteill Scene 1",FRUIIROP, Nwréro43.


MILlEUX

INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CRARCE

OUTIL DE DIALOGUE ET DE COMMUNICATION DANS LES PECHES: L'ATLAS DE VANUATU ET SES IMPLICATIONS POUR LE DEVELOPPEMENT Espérance Cillaurren *

Abstraet

Résumé L'atlas des péches de Vanuatu représente une innovation

The fisheries atlas ofVanuatu innovates in coastal fisheries

dan s le domaine des pécheries cótieres et a été réalisé pour

and is made in order to transmit as better as possible informa-

transmettre au mieux des informations sur la distribution spatio-

tions about the distribution in space an time of the marine

temporelle de la ressource. Ce travail a donné lieu f1exion sur I'analyse et la transmission

a une

ré-

des informations,

ressources abundance. This work give rise to a thouhgt about the analysis and the spreading of informations. Instead, doing

compte tenu de I'identification et de la demande des acteurs

the atlas responds to various targets in relationship with the

sociaux. La carte devient alors un outil de dialogue, de com-

demands of the different social players. Mapping the data

a la décision.

Celle-ci est fortement dé-

leads to build a tool of dialog, communication and decision.

pendante en halieutique avec la capacité de charge qui con-

These last are in fisheries strongly dependent to the carrying

munication et d'aide

a évaluer

En fait, les particu-

capacity which is allows to evaluate a catch potential. Actually,

larités de I'environnement des petites iles semblent avoir plus

the characteristics of the small islands environment seem to

d' influence sur les activités de peche que la simple disponibi-

nave greater influence for the development offishing activities

lité de la ressource. II est done logique d' intégrer I'utilisation

than the simple availibility of the ressource. Therefore the

duit

un potentiel d'exploitation.

de l' indicateur «capacité de charge» dans une analyse glo-

use of carrying capacity should be integrated in a global

bale qui prenne en compte la spatialisation.

analysis which take in account the spatialization.

Mots clés: Vanuatu, peche, atlas, capacité de charge.

Key words: Vanuatu, fishing, atlas, stocking rateo

* ¡RD, Centre ORSTOM de Montpellier,

LEA B.P. 5045, 34032 Montpellier

cedex 1, France .

29


T

III

La place des atlas dans les péches, une démarche entreprise a Vanuatu

L

acartographie des ressources halieutiques est encore peu répandue. Excepté a Hawaii, aucun atlas des péches cótieres n' a été réalisé avant celui de Vanuatu. En fait, la cartographie quantitative est plutót réservée aux ressources pélagiques du large (Fonteneau, 1997). Si des infor-mations concemant les ressources aquatiques sont souvent indiquées sur le support géographique, les réflexions concemant le róle de l' espace dans la dynamique de la ressource et de son exploitation est récente (Caddy et Garcia, 1987). Dans ce sens la modélisation intégrantl'hétérogénéité spatiale de la ressource (petitgas, 1994; Le Page, 1995 ; Pelletier, 1995 ; Hutchings, 1996)estencoreconsidéréecomrnedifficilement applicable par les acteurs sociaux. C' est pourtant dans cette optique que les systernes d' informations géographiques ont été mis au point principalement pour les zones cótieres (Anonymes, 1995, 1996; Maeden et Do Chi, 1996) et ont ainsi permis d' apporter une nouvelle signification al' étude de la répartition spatiale des ressources marines. Cette procédure est d'un coüt élevé et requiert par ailleurs des moyens logistiques et des bases de données qui sont encore peu disponibles dans le Pacifique insuJaire. Vanuatu, archipel de quatre vingt Iles situées au nord de la Nouvelle Calédonie possede une superficie terrestre cinquante fois inférieure a sa zone d' excIusivité économique ((iX)(XX)]an2). Avec ses 150(XX) habitants, le pays est marqué par son insularité et une économie faiblement monétarisée. Le développement d' une peche artisanale cótiere lancé par le gouvemement des 1981 eut pour but de développer les circuits de commercialisation des produits halieutiques frais afín d' amé-

30

Melhodes el oulils

liorer la qualité protéique de l'alimentation et les revenus des populations rurales. Le systeme de recueil d' information en temps réel a perrnis a partir de I'analysede 10 (XX) sorties de peche réparties sur 120 zones de peche et couvrant dix années d' exploitation de suivre dans le temps et sur I'ensemble de l'archipell'évolution des activités de peche. La représentation cartographique a alors été choisie comrne le moyen le plus adéquat et le plus économique de rendre compte de l' état de la ressource et l'évolution de la pécherie, Cette démarche nous a conduit a réfléchir sur le róle de la carte dans l' analyse et dans la diffusion des informations. Ensuite, une proposition de gestion de la pécherie est faite compte tenues des variabilités spatiales observées dans l' effort de peche et dans l' abondance de la ressource. Dans ce cadre, la capaci té de charge exprimée classique-ment par la biomasse exploitable (GulJand, 1983) pararnetre couramment utilisé dans la gestion des pécheries, estreconsidérécompte tenu de la variabilité spatiale de l'exploitation.

Cartes et atlas: les plateformes de I'information Le travail cartographique est basé sur des objectifs pragmatiques; il s'agitde décrire les meilleurs lieux et moments de capture du poisson et d' évaluer par zone de peche les quantités que l' on peut prélever san s épuiser la ressource. Ces informations sont présentées de rnaniere a ce qu'elles puissentétre comprises et utilisées par le public le plus large. A Vanuatu, et de maniere plus généraJe, en Océanie insulaire, l' identité des hommes, acteurs du déve-Ioppement, estfortement liée a leur territoire, e' est a dire aux lieux qu'ils occupent etdont la perception estapparentéeál'utilisationqu'ils en font (Bonnemaison, 1986). Dans ce contexte l' écrit et les tableaux de chiffres ou les diagrarnmes " parlent " beaucoup moins au lecteur que la carte qui au travers de \' irnage géoréférenciée ravive le lien que celui-ci a tissé avec les lieux (Cillaurren et David, 1995) formant son


MILlEUX INSULAIRES

Bnuqainullte

~

I

16HoHHE

17HoHHE

D ~hoiseul ~~ Nouuelle Georgie

~nta

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IHoHHS

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Guadalcanal~

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Epl' C1 Etate

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.,

Situetion géographique

espacequoridien. Nous avons alors distingué trois types de lecteurs ou acteurs sociaux selon 1e5relations qu' ils entretiennent avec l' espace géo-graphique. Les acteurs qui concoivent la poLitique du développement des péches ont une perception du pays dans sa globalité et de sa situation dans LePacifique insulaire, Les agents de l'administration des péches, chargés d' appliquer les directives politiques, s' intéressent al' organisation des activités de peche au sein de l' archipel, et plus particulierement a la comparaison des potentialités d' exploitation entre les iles. Le pécheur des villages esr centré sur sa zone de peche et sur son íleo La représentation des objets sur la carte obéit al' itinéraire cartographique décrit par Deffontaines et Lardon (1994). La carte ressource est un recuei Ides informations collectées, la carte facteur est le résultat de la combinaison de Ce5informations et la carte produit représentera le résultat d'une modé-lisation. Nous concevons alors Lareprésentation cartographique comme une plateformede l' information, 00 acquisition et production deconnaissances sont reliées par un flux aller et retour de l' information. TIs' agit la a la fois «d' un outil de dialogue et de communication» comme pressenti par Desffontaines

o

LeuuOOo

• oRnatom

Cl:,.Lifou

~

Uanua Leuu

{JÓ

Q, Erromango

OUUéa

Nou uell e Calédonie

Fidgi

Pentecost Rmbrym Paama Sheperds

de l'Archipel

de Vanuafu

et Lardon (1994) mais également d' un moyen d'aiderladécision. Pour la peche commerciale des poissons de profondeur a Vanuatu, la carte «ressources» indique pour chaque Ile l' effort de peche déployé et la production obtenue, la carte «facteurs» montre l' évolution annuelle de5 rendements, et la carte «produits» indique 1e5quantités annuelles que l' on peut pécheret le nombred' embarcations qui peuvent étre mises en activité sansépuiser laressource.Il s'agit lad'une représentation de la capacité de charge de cette ressource vis a vis d' un prélevement comme la définit Le Fur (1997).

El CAPACITÉ DE CHARGE •••

source (Beverton et Holt, 19%) tels que La croissance, la mortalité (mortalité naturelle et celle due al' effort de peche) et le recrutement Au départ définie spatialement, la capacité decharge aensuiteétéévaluée parwnegéographiqueselonun simplerapport de surface. Or une forte structuration des habitats des poissons existe en fonction de la profondeur pour Le5vivaneaux représentés par les especes du genre Pristipomoides qui sont les plus superficielles et celles du genre Etelis qui vivent dans les plus grandes profondeurs . Les especes du genre Epinephelus (loches) qui sont en revanche moins bien localisées selon la profondeur apparaissent concentrés sur certaines iles (CilJaurren et al., 1998).Enfrn, l' effort de peche migre en s' intensifiant au cours des ans de la périphérie de l' archipel vers 1e5iles centrales qui regroupent les zones urbaines et 1e5 meilleures infrastructures de communication (Cillaurren etSimier, 1998). Pourétre un outil d' aide a la décision efficace, la capacité de charge ne peut omettre ces variabilités. Si la capacité de charge exprime la disponibilité de laressource selon une quanLa cepecité de charge de la ressource démersale Vanuafu exprimée par la prise maximale soufenue et le nombre de bafeaux pouvanf opérer

a

.La ge~tio!" des

exploitations halieutiques:

la signication de la capacité de charge dans un milieu insulaire fortement marqué par I'éclatement de l'espace A priori la capacité de charge est évaluée soit a partir de modeles globaux de production (Schaeffer, 1954; Fox, 1970) soit a partirde modeles analytiques qui utilisent 1e5parameires biologiques de la res-

31


Ml

tité annuelle que l' on peut prélever, il est judicieux d' établir ces quantités par especes avec un index d'abondance géographique pour les especes intermédiaires. 11s' agit la des especes les plus vulnérables a une peche intensive. Si la capacité de charge s'exprime selon une pression de peche (ie. nombre de bateaux opérant ou nombre de jours de peche), elle sera non seulement tributaire de la disponibilité de la ressource, mais aussi des conditions d' acces a cette derniere, et des contraintes inhérentes a sa commercialisation. En effet, outre la difficulté des conditions de navigation sur les cótes exposées aux houles et aux vents situées al' est de l' archipel, la peche en milieu rural est handicapée par le manque de voies de cornrnunication. Ainsi, les coüts de transport du poisson vers les zones urbaines oü se situe la demande (représentée par les hotel s et les restaurants) sont prohibitifs pour les bénéfices de la peche (David, 1990). Enfin, les revenus des consornrnateurs ruraux ne leur permettent pas d' acquérir ce produit. C' est donc en ville, lieu bien infrastructuré et cornrnunicant avec l' extérieur, que des centres de peche commerciale se sont développés au cours des ans sous l' égide de pécheurs professionnels privés. Cornrne l' a montré l' arrét progressif de la peche a vocation cornrnerciale dans les zones rurales, la gestion de la peche dans un milieu insulaire cornrne celui de Vanuatu est tributaire des particularités de l' espace géographique. Maritime, il influence la disponibilité de la ressource. Terrestre, il est déterminant pour la viabilité de l' activité économique. L' outil "capacité de charge " devrait done étre concu cornrne un élement mixte, résultat de l' expression spatiale de l' abondance de la ressource et de l' effort de peche. La capacité de charge est alors un indicateur flexiblequis'adapte dansletemps aux fluctuations spatiales de l' effort de peche et de la réponse de la ressource a cette pression.

32

Methodes et outils

Conclusion La représentation carto-graphique a été réalisée au départ dans le but de répondre de la rnaniere la plus c1aire et de la facon la plus compréhensible aux questions fonnulées par les acteurs sociaux. La simple présentation des faits dans leur réalité géographique permet déjá de mettre en évidence des informations qui alimenteront de nouvelles problérnatiques.1I est donc essentiel a ce niveau que I'image carte soit évolutive et interactive. Supportfixede I'infonnation a un moment donné, la carte est aussi productrice d'une dynarnique qui permet selon les termes de Desffontaines et Lardon (1994) le passage d' une recherchefinalisée vers une recherche- action. C'est dans ce cadre que s'inscrit l'utilisation d' un indicateur identifié comme la capacité de charge usuellement évalué de rnaniere spatiale. Toutefois, dan s le milieu insulaire océanien, compte tenues des variabilités induites par l'éclatement des espaces occupés par la pécherie, il parait nécessaire d' intégrer la capacité de charge dans une vision globale qui prenne en compte non seulement l' hétérogénéité spatiale de la répartition de la ressource mais aussi les caractéristiques des lieux de peche et leur appropriation par les acteurs sociaux. La capacité de charge deviendra alors un objet spatial tel que le concoivent Lardon et al. (1998) situé al' interface des dynarniques respectives de la ressource et de l' exploitation halieutique et sera ainsi un descripteur utile pour la gestion de la pécherie, Dans cette optique l'utilisation des systemes multi-agents spatialisés parait indiquée, l' objectif recherché étant non seulement de décrire l' état du systerne peche mais aussi d'étudier la flexibilité d'un descripteur, ici la capacité de charge, vis a vis de l'évolution spatio-temporelle du comportement des acteurs ou agents de ce systeme.

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MILlEUX INSULAIRES El CAPAC!H DE CHARCE •••

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LARDONS., BARON C; BOMMEL P, BOUSQUET F., LE PAGEC, LIFRANR., MONESTIEZP., REITZ p., 1998. Modéliserlesconfigurationsetlesstratégies spatiales dans un systeme multi-agents pour la maitrisededynamiques d' embroussaillement Colloque SMAGETClemwnt-Fermnd,5-8//0!98.13p.

DEFFONTAINESJ.P. ET LARDON S.(éd.), 1994. Intinérairescartographiquesetdévelo~mentlNRA éditions.l36p.

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"

33


34 Methodes et outils

T


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE

ORGANISATION SPATIALE ET , DISCONTINUITE: OUTILS ET MÉTHODES D' INVESTIGATION Isabelle Mor *

Abstraet

Résumé Pour appréhender premier

pace, déterminer

modifier

a

Un tableau

il convient

Diverses

notre disposition.

Chacun

les situer afín

d'intervenir

méthodes

en l' es-

et de

et de nombreux

d' eux a une limite

mais peut étre relayé par un autre de ces outils.

d'exploitation

champs

les discontinuités,

les objets susceptibles

leur évolution.

sont

surchargés,

et pour cela il faut analyser

précisément

de mieux connaitre

outils

les territoires

lieu de les délimiter

de synthése

d'investigation,

présente

chacune

ses données,

des méthodes,

ses avantages

ses

et ses

inconvénients.

overcrowded

them fírst. For that purpose

and discontinuities the exact

location

precisely of those

have a better knowledge modification

territories,

settled.

The determination

discontinuities

of the phenomenon

in the evolution

is necessary

of to

able to bring a

ofthe territory. Various methods

and many tools are at our disposal.

Each one has a limit of use

but can be relieved by another one. A synthetic those methods,

we have to

space must be analysed

their investigation

table describes

fields, data, and pros and

cons.

Mots-clés: Discontinuité,

analyse

et dyna-

Key words: discontinuity, spatial analysis, territorial struc-

ile, notion de seuil, capacité

ture and dynamic, modelling, island, limit, stocking rate,

spatiale,

mique territoriales,

modélisation,

de charge,

de concentration,

indices

In order to understand define

structure

indices

de dispersion,

concentration

indicators, dispersion indicators, GIS.

SIa

* Laboratoire d'Analyse Spatiale Equipe "Dynamiques territoriales", CNRS UMR Espace, 06000 Nice, France .

Université de Nice Sophia Antipolis,

UPRESA 6046 du

35


I

,

Ml

Introduction Le caractere commun au milieu méditerranéen réside dans l'inversion existant dans les hiérarchies spatiales et mentales entre l' intérieur et le littoral. Insulaire, la société pastorale s' est transformée au cours des siecles en une société mixte : littoral/ intérieur puis plus récemment quasirnent entierement littoraliste. Ce changement profond organise l'espace en plusieurs zones: une forte concentration urbaine littorale, une péri urbanisation et un mitage de la plaine intérieure, un haut arriere-pays quasirnent désert dominant le bas pays densément peuplé formant ainsi une profonde discontinuité a la fois topographique et hurnaine. L' intérét porte donc sur la délimitation de ces zones afin d' établir les liens qui peuvent a la fois les unir ou les différencier. L'ile est un espace restreint. De ce fait, la petitesse du milieu insulaire entraine une saturation rapide et les conséquences de la surcapacité de charge sont amplifiées. Les problemes d' aménagement du territoire se posent alors dans des termes plus forts. Ils doivent surtout étre résolus plus rapidement puisque nous sommes la al' interface entre deux milieux marin et terrestre. L' intérét de déterminer de maniere précise les discontinuités permet de limiter les différents espaces et d' en établir des typologies en fonction des variables prises en considération. Selon le choix de celIesci, les Limites se modifient mais nous les connaissons toujours précisément. De méme, nous pouvons arriver a comprendre parquelles variables un développement peut étre entrainé. La présence d' une discontinuité spatiale estcontrainte par un nombre restreintde parametres. En modifiant certains de ces parametres, la discontinuitéévolue spatialement, reníorcant ou réduisant l' espace. La capacité de charge du rnilieu évolue en conséquence. Ainsi, la charge tolérée pour telle ou telIe variable peut étre connue comme sa Iimite: la surcapacité de charge.

36 Methodes et outils

Des discontinuités aux répercussions différentes Ces discontinuités provoquent des effets de dissymétriedans larépartition d'une activité d'un phénomene donné comme par exemple des activités motrices, des stations touristiques, des centres urbains dynarniques ... Ces effets de dissymétrie s'observent lorsqu' unediscontinuité sépare deux zones de niveaux socio-éconorniques différents. Al' inverse, des effets de symétrie se rencontrent lorsque les contrastes entre les deux entités territoriales sont faibles ou bien lorsqu' elles exploitent toutes deux une méme richesse. Les effets de dysfonctionnement sont le signe d' une mauvaise intégration et se traduisent par des limites aux aires d'influence ou d' attraction. Par exemple, l' étude de la forme des réseaux de communication permet d' obtenir une bonne indication des dysfonctionne-ments. Lorsque les voies de communication entre les espaces s' apparentent a un systeme de drainage e' est a dire que seuls quelques axes traversent la discontinuité en des passages obligés, l' interdépendance est faible comme on le rencoritre souvent al' intérieur des ilesoAu contraire, si le réseau s' organise selon un systeme d' irrigation, l' interdépendance est élevée.

La discontinuité peut étre considérée comme un obstacle a la réalisation de l'optimurn économique. Parexemple, lescoüts de transport tendent a augmenter lorsque les points de franchissement de la discontinuité sont rares. De plus, les infrastructures de transport empruntent pratiquement le méme itinéraire devenant parfois concurrentes entre elIes mais elIes n' irradient pas norrnalement leur espace, comme l' illustrent les infrastructures de communication des Alpes-Maritimes. Si les touristes sont attirés par certains territoires comme des littoraux, les points de passage obligés par lesquels s' écoulent les flux touristiques ont du mal a les retenir, et bien souvent ils ne font que traverser ces espaces qui ne bénéficient pas de retombées positi ves.

Les outils de calcul de délimitation des discontinuités Définir des seuils, des limites (des frontieres invisibles mais bien réelIes) est possible gráce a diverses méthodes dont nous disposons et qui peuvent étre regroupées en trois groupes : les techniques de c1assification qui découpent l'espace en ensembles régionaux, la recherche des plus forts contrastes entre des unitésspatiales, leuaitement des irnages. Apres avoirétabli une


MILlEUX INSULAIRES

DYNAMIQUE

STRUCTURE

FLUX

Auto corrélation Concentration

Concentration

spatiale

Analyse Analyse

multivariée

Analyse

differentielle

Analyse

differentielle

Modele

de potentiel

Modele

de potentiel

Morphologie

mathématique

Morphologie

mathématique

Filtrage

Filtrage

Filtrage

SIG

SIG

matrice a partir des données récoltées, ce qui n' est pas toujours aisé en milieu insulaire, une classification est établie. Plusieurs méthodes et logiciels permettent apres traitement mathé-matique, de visualiser les résultats al' échelJe zonale, communale, régionale ou autre, ce qui est une approche plus abordable que la lecture d' interminables équations. Pour approcher la scission entre un littoral et un arriere-pays insulaire, pour comprendrequels processus inter-viennent dans larépartition des charges et connaitre la capacité de celui-ci a les gérer, pour détecter les discontinuités, pour en faire une modélisation, pour arriver a prévoir et anticiper, des outils nous permettent d' appréhender la structure spatiale, la dynamique spatiale ou la distance par l' étude des flux et des réseaux. Les moyens de délimitation se positionnent souvent dans l'une de ces trois approches mais seulement quelques-uns arrivent a prendre en compte ces trois composantes. Le coefficient d' auto corrélation spatiale, les indices de concentration spatiale, les analyses de voisinage indiquentla concentration ou non de la population, aquel type de distribution obéit cette concentration et quel phénomene en est responsable. En fait ce sont des analyses de contiguité, Les analyses rnulti-variées, les analyses différentielles mesurent les différences inter régionales. Les analyses multivariées comme les analyses en compo-

de voisinage

Morphologie

SIG

spatiale

mathématique

sante principale permettentde résumer l'information. ElJes évaluent les différences de taux entre deux espaces, elles distinguent les effets structurels des effets régionaux. Les analyses différentielles calculent l' écart par rapport a des modeles géographiques comme Christaller ou Hagerstrand pour connaitre l' existence ou non d' un effet de barriere, l' objectif étant de reconnaitre si la limite constitue un frein aux éléments d' intégration et de déterminer l' inertie du systeme, Les «modeles de potentiel» traduisent quant a eux la différence qui existe entre deux points, et révelent la présence ou non d' un gradient. TIest intéressant d' obtenir par exemple un potentiel d' attraction des principales unités urbaines insulaires en fonction de certains enteres tels que le travail, les services, les logements, le degré d' accessibilité, puis de le comparer avec d' une part la répartition de la population, et

El CAPAClTf DE CHARGE •••

d' autre part les mouvements migratoires. En présence d' un póle particulierement attractif, comme par exemple la ville de Bastia; son potentiel sera couplé avec une carte isochrone afin de repérer au-delá de quelle distance-temps le phénomene s' inverse et devient répulsif. On peut envisager également l'étude de potentiels de certains équipements tels que les bópitaux afin d' observer si leur champ de force s' étend ou s' ils sont sous-utilisés. La «morphologie mathématique» cherche a définir comment évoluent certaines variables et jusqu' a quelle distance leurs effets se font sentir. Peu d' outils statistiques prennent en compte la distance, et lorsque c' est le cas, la distance entre individus est favorisée par rapport a celJe qui séparent ces mémes individus d'un élément géographique donné (littoral, route, frontiére), Seul un nombre restreintd' outils statistiques possede cette caractéristique. Ce sont ceux appar -tenant a la démarche morphologique qui offrent la possibilité de procéder a des analyses de contiguité non pas uniquement entre des éléments de méme nature (points etpoints), mais entre un phénomene ponctuel et un phénomene de surface ou linéaire. Le «graphe perceptuel» détecte les structures spatiales ainsi que leur forme (linéaire, lenticulaire, ponctuelle). TIpermet par exemple de déceler des structures de peuplement, la nature du tissu industriel ou bien encare les zones de déprise agricole, et de comparer les structures obtenues.

Schéma Points/Dilatations/Squelette

ID

Points

•• ·a..•---Dilatations

Squelette

37


T

Ml

Le «squelette» par zone d'influence détermine l' espace d' attraction théorique d'un pointdonné. C'estla distance interpoints qui est prise en compte pour le calculer(ligned' équidistanceentre les points). La forme et la dimension de ces zones d' influence théorique sont les parametres a prendre en compte pour leur interprétation.Ainsi, on considere que des zones d' influence théorique nombreuses el de petite taille sont le signe d' une concurrence spatiale entre les unités, ce sera le cas si la discontinuité joue un róle attractif (frontropismedes villes littorales); inversement, plus la taille de ces zones est grande, et plus on a affaire a une distri bution relativement láche des points (e' est le cas par exemple des communes de montagne). Le centre géodésiqued'un espace se situe al' équidistance des deux points les plus éloignés lorsque l' on se trouve a l' intérieur de l' espace de référence. On y fait appellorsque l'on privilégie un linéaire comme un littoral et que l' on souhaite positionner au rnieux une infrastructure telle qu' une halte-garderie ou un regroupement de classes d' école par exemple. Ces méthodes permettent de déceler un certain nombre d' éléments et d' interrelations majeures. Parexemple, elles rendent possibles ladélimitation des lieux et l' ob-

38

Melhodes el oulils

servation de la maniere dont ilsorganisent l' espace autour d' eux. Elles permettent de comprendre la maniere dont la croissance démographique et éconornique s' inscrit dans I'espace, dedécouvrir les principales mutations spatiales et fonctionnelles. Ainsi, parexemple, un modeledu systeme des arrieres-pays dépendants a été établi. L' objectif de l' emploi des filtres consiste a essayer de faire ressortir des StlUCtures spatiales en déformant la réalité contenue dans l' image d' origine pour mettre en valeur les grandes tendances générales. C' est un traitement mathématique qui s' exerce a partird'une banquededonnées cartographiées: cartes, photographies par satellite ou matrice statistique. Le filtre passe-bas permet de visualiser l' effet régional. Ce filtre atténue fortement les petites anomalies, considérées comme étant un effet local négligeable. Le filtre passehaut renforce ce qui est ponctuel, les éléments résiduels et locaux qui peuventavoir une influence réelle sur des configurations spatiales. Ainsi, l'étude de la répartition des logements principaux et secondaires dans les Alpes maritimes illustre l'utilisation de ces deux types de filtres. Ces deux cartes montrent notamment les oppositions entre zones littorales et intérieííres qui existent a la fois au niveau de la répartition des logements principaux (carte de gauche) que des logements secondaires (carte de

droite) oü apparait un clivage entre le haut arriere-pays (domaine a1pin)et le moyen arriere-pays, entre l' espace inigué par des infrastructures de communication et l' espace délaissé. Les systernes d' information géographique sont I'outil d'une recherche transdisciplinaire. L'utilité d'un SIG est done double : a la fois permettre l'élaboration de cartes plus pertinentes et d' autoriser des calculs d' optimisation dans des processus d' aide a la décision. L' élaboration de caries transformationnelles fait ressortir les disparités spatiales en fonction de la distance ou de l' attraction exercée par certains póles, pour suggérer la meilleure locaIisation d'une implan-tation d'unesurface. LesSIG ont un tripleintérét :permettre une gestion cohérente des données géoréférencées, permettre le traitement de données numériques ou / et logiques :analyse, modélisation et simulation spatiales numériques en mode raster, raisonne-ment spatial et simulation (insertion en site et faisabilité), et enfin permettre une représentation cartographique, Les différents calques thématiques ainsi créés permettent de mettre en relation certaines données et de voir ainsi les contraintes existant tant du point de vue physique qu 'humain, éconornique oujuridique et les aménagements nécessaires pour une meilleure exploitation de ces espaces inCartes des Alpes Maritimes


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE

Tableau de svnthése el de comparaison des outils Méthodes et Outils

Champs d'application

Autoccorrélaton spatiale

Géographie humaine

Indice de concentration spatiale

Géographie humaine, activités, population

Analyse de voisinage

Géographie humaine

Analyse différentielle

Géographie humaine

Modele de potentiel

Démographie

Les données

Description des objectifs el des méthodes

Avantages et Inconvénients

Différence entre milieux contigus et milieux non contigus.

Sa limite débouche sur la morphologie mathématique. Si on recherche plus de différences entre des régions de rnéme nation qu'entre deux régions séparées par une discontinuité.

Analyse de proximité, degré de spécialisation des communes, Type de distribution a laquelle obéit un phénoméne.

Bon indicateur des points d'ancrage

Comparaison des variables ayant un profil voisin en fonction de la distance. Type de distribution a laquelle obéit un phénornene.

En réponse a des questions du type : existe-t-il un rééquilibre entre deux régions contigués ? Inconvénient: d'autres facteurs peuvent aussi influencer.

Étude interrégionale, Écart par rapport au modele géographique ou statistique.

Si on recherche les différences de part et d'autre de la discontinuité. Permet d'établir des niveaux de centralité a comparer ensuite a des modeles comme celui de Christaller par exemple.

Statistiques

Statistiques

Statistiques

Statistiques

Statistiques

Analyse rnultivariée

Géographie humaine

Morphologie mathématique: graphe perceptuel, squelette, centre géodésique

Géographie urbaine, géographie humaine, habitat

Filtre: Passe-bas Passe-haut ...

Géographie physique, géographie humaine

S.I.G.

Géographie physique, géographie humaine, aménagement

Mesure de I'interaction spatiale entre le point considéré et I'ensemble des masses prises en compte Statistiques, Terrain

Statistiques, Cartes

Statistiques, Cartes

Statistiques, Cartes, Terrain, Photos satellitaires POS ...

Explication des différenciations interrégionales, évaluation des différences de taux entre deux espaces. Analyse factorielle, classification, régression multiple, '/.

Beaucoup de variables différentes peuvent étre prise en compte, c'est un avantage car il est rare qu'une seule variable suffise a représenter la complexité des phénornenes.

Étude des formes de la structure spatiale, Zones d'influence théorique, équidistance de deux points les plus éloignés

Analyse de I'empreinte spatiale de la discontinuité. Pour déceler des structures de peuplement, la nature du tissu industriel, les zones de déprise agricole '/. (graphe perceptuel): Pour localiser une implantation au sein d'un espace donné (centre géodésique).

Configurations spatiales: ten dances régionales ou ponctuelles des structures d'un espace donné, écart entre deux zones

Analyse la structure spatiale. Pour déceler les structures de peuplement, les structures physiques. Pour modéliser un processus.

Inventaire puis combinaison des données, fonctions multiples, les SIG raster sont davantage des systemes de traitement que de gestion de I'information cartographique.

Outil puissant dans la gestion et la représentation cartographique. Outil méthodologique et conceptuel. Inconvénients: mauvaise gestion de I'information multidimensionnelle (3D sous forme de blocs diagrammes), Difficulté de gérer le multi-échelle de I'information (les SIG ne peuvent pas déduire une carte au 1/50000 de cartes de la rnéme zone au 1/ 25000), 11 Y a encore beaucoup a faire pour intégrer toutes les données multisources et travailler en raster l1 vecteur, Absence d'un langage spatial, Probleme des transferts de I'information entre logiciels .

39


,

•• 11I1

Ml

sulaires. Ces documents peuvent ainsi constituer une aide a la résolution des problemes les plus divers. Ainsi, les SIG peuvent donner une réponse a la dynamisation des activités agricoles favorables au maintien de certaines especes animales et au maintien de la biodi versité, de réguler les especes introduites ou envahissantes et qui posent un probleme au milieu naturel. Une étude faite sur toutes les communes de l'íle de Corse a partir de données démographiques couplées a la méthode des SIG permet de comprendre certains phénomenes et détermine quelles variables sont a modifier, quels sont les aménagements possibles et nécessaires pour une meilleure utilisation de l' espace et ainsi augmenter la capacité de charge du milieu. Unautreexempledel'utilitédesSIGavec l'aménagementd'une nouvelle plage pour rnieuxrépartirlefluxtouristiqueetlesconséquences qui en découlent sur le centre de la ville(modification du centre de gravité, nouvelles implantations cornrnerciales'á); ou bien la détermination des pentes «exploitables» ou pas dans une autrecommune insulaire,qui complete lesétudes des utilisations de zones agricoles.

40

Methodes et outils

Conclusion Ces méthodes d' analyses répondent a des questions relativement différentes et l' intérét réside dans le fait de les utiliser chacune a ban escient. Les méthodes décrites sont particulierement adaptées a l' étude d' un milieu insulaire :en effet la faibletailleetleconfinementdecemilieu limitent le nombre de facteurs extérieurs perturbants. Les modeles ainsi effectués en sont d'autant plus pertinents. Par ailleurs, les charges exercées par l' utilisation ou l'exploitation du milieu insulaire n' ont pas les rnémes répercussions qu' en milieu plus ouvert. En effet, les surcapacités de charge quelles qu' elles soient, se font sentir plus rapidement. Les aménagements en milieu insulaire perturbent plus rapidement le rnilieu fragilisé par le confinement. La surexploitation d' une Ile entame son capital et modifie son paysage et son image extérieure et a terme

son développement. La nécessité de définir et de quantifier précisément les seuils spatiaux d' exploitation au-dela desquelles le milieu sera saturé et inapte a la réaction rendent absolument indispensables I'utilisation de ces méthodes d' analyses.

Bibliographie 1994. SIc:;,analyse spatiale et modélisation, 3742pp, Géopoint, Groupebupom; Avignon. DUMOlARD P., 1994. Systemes d'infonnation géographique: une vued' ensemble, 9-13pp, Géopoin; GroupeDu¡XJI11, Avignon. M:RI., I<»l. OOoorer¡rurmieux percevor les snctures,257-262¡1J, GIdXJl CJwgeperception, nOI, Géo &Clio,ed. Bianchi&ass.,MiIan,Italy. Mad., 1997. Lemodeledesílesméditerranéennes: applicaioná laCose, Convegno lnternazionale «La Corsica, isola-problema IraEuropa e Mediterraneo», Salema, ltaly V 0IRO'i C, 1993. Espace, structures et dynamiques régionales de l' are méditerranéen,Analyse spatiale RaoulBlanclUird,n0)3&34,Nice. CHARREJ.,

_

> 6096 pas d'ameneqements

O D D

31 -60% néc~ss:ilé d'aménagemenl de reslanQues 16-30% r ebojsernents

sauf coüts pr ohjb itifs

possibles

0-15% aqr icultur e possjble

Carte des Pentes


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARCE

DÉVELOPPEMENT SOUTENABLE* ET , CAPACITE DE CHARGE DES LITTORAUX EN MILIEU TROPICAL INSULAIRE: L'EXEMPLE DE L' ILE DE MAHE .A

,

(ARCHIPEL DES SEYCHELLES, OCÉAN INDIEN) Vírgíníe Cazes-Duvat **

Abstraet

Résumé L' évaluation de la capacité de charge des espaces cótiers

a

vocation balnéaire dominante de l'Ile de Mahé est complexe

The ecological capacity of the touristic coastal zone of Mahé island is very difficult to determine for two reasons:

en raison de la diversité des interactions naturelles et anthro-

the close interactions between natural and human impacts

piques qui régissent le fonctionnement

and the high level of vulnerability of beaches. Changes of

des plages et de la

vulnérabilité spécifique d'unités sédimentaires de petite di-

coastallandscape,

mension. Les dégradations (artificialisation paysagere, pol-

the high vulnerability of the sandy coasts. After several

lution des eaux cótieres et érosion des plages) attestent de la

decades of spontaneous development of the coastal zone,

vulnérabilité des espaces cótiers, Apres des décennies d'amé-

an environmental audit and studies on vulnerability are led

nagement spontané,

puis de gestion sectorielle,

un audit

environnemental et une évaluation de la vulnérabilité spécifi-

water pollution and beach erosion show

,: on the purpose of an integrated, preventive and sustainable management of every site.

que de chacune des plages s'imposent afin qu'une gestion intégrée, globale et systémique puisse satisfaire les objectifs de la politique nationale de développement durable.

Mots clés: archipel environnementale,

des Seychelles,

préservation, audit environnemental,

litique environnementale, gestion des plages.

Mahé, dégradation po-

vulnérabilité, capacité de charge,

Key words: Seychelles environmental

degradation,

audit, environmental

archipelago,

Mahé island,

preservation,

environmental

policy, vulnerability, stocking rate,

beach management.

* L'expression de développement soutenable sera préférée a celle de développement durable. 11est en effet important d'insister sur le cerectére soutenable du développement sur le plan environnementa/. L'objectif est celui d'un développement supportable par le milieu. La traduction développement durable n'intégre que la nécessité d'une gestion prévisionnelle qui permette de valoriser a long terme les ressources du milieu . •. Laboratoire de Géographie de I'Environnement Naturel, Université de la Réunion, BP 7151, St Denis Cedex 9, La Réunion, France.

41


1--- __

1

,

lit

Introduction vec une superficie de 154 km", l'ile de Mahé est la plus vaste de l'archipel des Seychelles, composé de groupes insulaires distribués sur 13cxxxx)km2 de ZEE entre 4 ° et 11° de latitude sud et 45° et 56° de longitudeest Au nord-est de l' archipel, l'ile de Mahé est a la fois la plus peuplée (63 cxx)habitants en 1998, soit 90% de la population nationale) et laplus fréquentée par lapopulation touristique (130 CXX) touristes par an en moyenne sur les trois demieres années,MISD,I995).Ladéterminationde la capacité de charge ou capacitéécologique des cótes sableuses permettrait de passer du développement spontané non contróléet préjudiciable a l'environnement cótier des demieres décennies a une politique nouvelle, préventi ve, sans impact irréversible sur la qualitédes paysages littorauxetsur la biodiversité. TIs'agitde parvenir, par la compréhension des dynarniques spécifiques et par la connaissance de la fragilité des équilibres des milieux littoraux, a définirpourchacun dessites voués au développement un plan de gestion et d' aménagement garant du maintien de l' attracti vité du site.

A

L' évaluation de la capacité de charge d' un espace cótier impose d' abord la réalisation d' un audit environnemental permettant de connaitre l' état de dégradation du site. La capacité de régulation des dégradations par les dynarniques naturelles et la vulnérabilité des écosysternes doivent ensuite etre déterminées avec précision afin que soit mi se en oeuvre une gestion préventive qui propose des solutions aux dégradations prévisibles. La charge anthropique acceptable sur chacun des sites pourrait alors étre contrólée par des quotas hóteliers alors que la distribution des résidents est cornmandée par la politique de construction des logements sociaux.

Audit environnemental: de la charge anthropique la rupture ecologique

a

La réorientation de la politique nationale de développement de la République des Seychelles en faveur d' une "soutenabilité" socio-écono-mique et écologique a long terme date de 1990. En 1995, le Programme Environnement de la Cornmission de l' océan Indien proposait en pre-

Pol/ution naturel/e et érosion sur la cóte artificialisée de /'est de Mahé

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42 Eludes de cas el réflexions . Littoral mari n

....-'....:.... "." .~

rniere phase la réalisation d'un audit environnemental, qui demeure a ce jour inachevé. Des travaux de recherche conduits au cours des trois demieres années permettent de proposer un bilan de l' artificialisation des paysages et de l' érosion des plages; la pollution cótiere d' origine naturelle est mieux connue que la pollution anthropique qui requiert des anaIyses sous conditions strictes. Ces problemes environne-mentaux trouventdans des milieux insulaires confinés une acuitéparticuliere, Le niveau des dégradations montre que les seuils de soutenabilité écologique du développement sont déja dépassés sur un grand nombre de sites. La rnise en place des infrastructures de développement a porté atteinte a la qualité des paysages cótiers, a réduit l' accessibilitédu domaine littoral etdégradé lesécosystemes vulnérables (récifs coralliens et mangroves). Des ledébut des anoées 1970, le dragage du platier récifal peu profond de la cóte orientale entre Victoria et les lles SteAnne a permis de bátir le remblai de l' aéroport intemational inauguré en 1972. Dans les années suivantes, le développement de l'aéroport, l' agrandissernent et l' aménagement du port de peche thonniere, l'ouverturede zones industrialoportuaires,laconstructiondequartiersd'habitat social et de la voie routiere rapide, la création de stations d'épuration, de décharge et de stockage des déchets divers ont rendu nécessaire la construction de nouveaux remblais au nord et au sud du premier. Les espaces ainsi gagnés sur la mer atteindront une superficie de 400 hectares des que les travaux en cours seront achevés. Ces aménagements ont eu plusieurs effets sur les paysages et sur l' environnement littoral.La grande plage de l'est qui faisait face aux iles a disparu et laissé la place a de grandes étendues bétonnées interdites au public sur 12 kilometres de long. Ladestruction mécaniquedu platier aétésuivied'uneasphyxieprogressivedes coraux des secteurs environnants par les particules fines libérées depuis les travaux


MILlEUX INSULAIRES

sur les marges de remblais non imperméabilisés. Le taux de nécrose des récifs est élevé et retire progressivement aux iles du pare SteAnne une attractivité largement fondée sur des beautés sous-marines facilement accessibles. La densification des constructions en domaine cótier s' est effectuée au détriment des mangroves, qui ne demeurent a Mahé que sur de faibles superficies a Port Launay (Pare National), GrandeAnse,AnseBoileau, Anse a la Mouche, Anse Gaulettes, Anse Takamaka,AnseIntendance,Anse Royale etAnse aux Pins. Les paysages cótiers ont été banalisés par les aménagements sur les deux facades principales de l'ile, et dans grand nombre de cas privés de leur arriere-pays attrayant par la construction d'hótels, de villas ou par le passage de voies de communication. L'anthropisation massive des premieres pentes et des espaces cótiers a engendré deux types de pollution: une pollution naturelJe par érosion des pentes déforestées lors des épisodes pluvieux intenses et une polJution d' origine humaine due au rejet d' effluents domestiques et industriels et au lessivage des terres agricoles. Ces polJutions connaissent des effets exacerbés par l'inondation des plaines en période pluvieuse. Les reliefs pentus des massifs centraux ont été progressivement déboisés

pour la construction et l' élargissement des routes transversales et pour l'extension des quartiers d' habitat. Les caracteres sinueux des routes et dispersé de l'habitat multiplient les ouvertures artificielles dans le couvert arboré. Lors des épisodes pluvieux intenses (> 75 mm par jour) relati vement fréquents (3 aS fois par an), une érosion tres active s' exerce sur les pentes a nu. Les eaux courantes prélevent sur les versants la latérite friable qui teinte les eaux d' une couleur rougeátre caractéristique. Eboulements, glissements de terrain et coulées de solifluxion mobilisentdes volumes de matériaux plus importants encore qui sont partiellement pris en charge par les eaux. Les routes goudronnées drainent l' écoulement en nappe, en accélerent la vitesse jusqu' aux plaines littorales oü de grandes étendues d' eau se constituent. A l' aval, dans le domaine cótier, les cours d' eau en débit de crue ouvrent des tranchées dans les hauts de plage par rupture des cordons; d'importantes quantités de sable se trouvent évacuées sur les platiers. L' apportd' abondants matériaux terrigenes a la mer pendant plusieurs jours consécutifs a pour effet l' asphyxie des coraux par dépót des fines et forte turbidité des eaux cótieres, Les inondations provoquent aussi la rnise en circulation de polJuants stockés dans les terres agricoles, dans les sols, dans

El CAPACITÉ DE CHARGE

les fosses septiques peu profondes. En plus des particules terrigenes, se trouvent ainsi véhiculés a la mer des phosphates, des nitrates et une charge bactérienne importante. Les grands épisodes de pollution naturelle provoquent de cette maniere des pointes de pollution anthropique dans les eaux littorales. L' absence de systeme d' épuration généralisé et le recours a des systernes de traitementindividuels ne permettent pas de garantir un retraitement satisfaisant des eaux usées, sans compter que les bidonvilles qui s' égrenent le long des cours d' eau y rejettent directement leurs eaux sales. Par rupture des cordons de plage et évacuation des sables vers la mer, les épisodes pluvieux intenses sont responsables d' un démaigrissement accidentel des plages qui n' est pas forcément compensé par les apports des houles engraissantes de l' année.lls peuvent ainsi constituer un facteur d' érosion. Le probleme de l' érosion est aigu sur I'ile de Mahé et sera classé prioritaire par le Ministere de l'Environnement en 1999. A la part incontestable des facteurs physiques (faibles dimensions des plages et absence de réservoir dunaire, déreglement de la saisonnalité des pluies et des ruptures de cordon de plage, augmentation de fréquence des basses pressions et des surcotes hydrostatiques associées depuis 1982) s' ajoute le poids de certaines pratiques hurnaines dans un pays a déve-Ioppement éconornique récent et mal controlé: la construction de murs de soutenernent des routes littorales et de eanaux transversaux d' évacuation des eaux, les prélevements de sable pour la construction sur les hauts de plage et a l' embouchure des cours d' eau, le ramassage des matériaux a granu-lométrie grossiere qui nuisent au confort des touristes,laconstruction dejetées de remblaiement qui bloquent les transits sédimentaires latéraux ... Sur I'ile de Mahé qui possede de surcroit peu de plages (36 km, soit 34% de la longueur de cóte), l' érosion est un véritable fléau. Les premieres a reculer ont été les

43


'------'

.

,

Ml

titue une sévere menace a terme pour l'activité touristique exclusi vement balnéaire qui constitue une des principales sources de devises du pays et sur laquelle s' appuie le développement actuel. L' acuité de l' érosion et de la pollution tient a des facteurs variés et spécifiques aux petites iles tropicales montagneuses. Elles peuvent étre considérées pour des raisons tant humaines que naturelles cornrne des entités a forte vulnérabilité envi-ronnementale et par conséquent a faible capacité de charge potentielle.

Les facteurs de vulnérabilité des littoraux

N.B.

vioicaoe des pluieI d de r6oou.lement .'out pu pcrais d'cft'ec:tuc:r les mcsares Jur lOUSk,liles

! la

Dégradation et vulnérabilité des milieux littoraux sur I'í'le de Mahé: I'artificialisation des paysages et les eitets des dynamiques hydrologiques sur les plages (situation au 15/8/97: épisode pluvieux intense des 13-17/8/97)

plages de l' est, entre l' aéroport et la Pointe au Sel, oü des épis sans grande efficacité ont été construits. Les petites plages d' Anse aux Pins ont été pratiquement anéanties par le recul, cornrne celles de Baie Lazare et d' Anse a la Mouche sur la facade occidentale. Les plus grandes plages de Mahé sont actuellement en proie a un recul important sur une partie de leur longueur, cornrne cela est le cas a Beau Vallon nord, au centre de la plage de Grand Anse, al' extrémité sud des plages des anses Intendance et Takamaka. La seule

44

Eludes de cas el réflexions . Littoral marin

plage d'unecertaine dimension au nordest, la plage d' Anse Etoile, connait aussi un recul marqué dans sa partie septentrionale. Au cours de l' épisode pluvieux intense d' aoüt 1997, les plages de Grand Anseetd' Anseála Moucheontconnu un recul de plusieurs metres qui a provoqué la chute de gros arbres de la berme, comme les takamakas (Callophyllum inophyllum) et les filaos (Casuarina equisetifolia).L'érosion menace de disparition plusieurs plages et connait une nette reprise depuis quelques années. EIle cons-

Les conditions morphodynarniques qui régissent l' évolution des plages, la nature des échanges hydrologiques entre la zone cótiereet les eaux du large, l' évolution récente des conditions climatiques dans l'archipel constituent des facteurs naturels de vulnérabilité exacerbée des cates de Mahé, auxquels s' ajoute la sensibilité des écosysternes et des especes. Cette situation réduit encore la capacité de charge potentielle des espaces cótiers. L' alirnentation des plages dépend des matériaux foumis par les récifs, les apports continentaux n' intervenant que pour 10% dans leur composition sédimentaire. En l' absence de déflation éolienne (vents faibles), la dynarnique sédimentaire des plages est essentiellement cornrnandée par les courants de dérive et par les vagues de tempéte, aussi les plages sont-elles étroites (30 metres de largeur maximale) et dénuées de dunes-réservoirs. Elles possedent par conséquent une faible capacité d' amortissement des fortes houles exceptionnelles et un stock sableux de réserve quasiment nuloCertaines d' entre elles sont de surcroit situées a l' arriere d'un platier fossile sans dynarnique frontale active qui puisse générer un réapprovisionnement régulier en matériaux biodétritiques. L' importance de la réfraction sur le platier ré-


MILlEUX INSULAIRES El CAPACITÉ DE CHARGE

duit considérablement la capacité de chargedes vagues. Ces plages peuventétre considérées cornme fossiles et tout prélevement s'y traduit par un déficit dans leur budget sédimentaire. L' impact de l'hydrologie continentale sur les cordons de plage accroit encore a leur vulnérabilité al' érosion. Les ruptures de cordon par effet de chasse d' eau lors des crues operen: des prélevements sédimentaires ponctuels mais massifs qui ne sont pas forcément compensés par les houles engraissantes et qui constituent des phases de recrudescence de l' érosion. L' évolution récente du clirnat (période 1982-1998) a eu pour conséquences des ruptures de cordon plus fréquentes et des hausses anormales du niveau de la mer qui ont accru les prélevements sédirnentaires. Pollution et érosion asphyxient les coraux et menacent les herbiers de phanérogames, déja tres dégradés dans l' est, alors qu'ils protegent les plages par arnortissement des vagues. Les sites de reproduction des tortues marines Eretmochelys imbricata sont en dirninution par destruction des bermes et accroisse-ment des nuisances. La concurrence pour l' utilisation des espaces plans est a l' origine de la multiplication d' activités diverses incompatibles entre elles (tourisme, élevage, cultures, conserverie de thon) qui accroissent les pressions sur le milieu écologique. Il n' existe pas de plan d' arnénagement du territoire impératif qui permette de contróler le développement des espaces littoraux en fonction de vocations prédéfmies. Le

Plan d' Aménagement Indicatif du Territoire (PIAT) de 1989 ne définit que des vocations générales a petiteéchelleet n' est aucunement opératoire. Le retard de développement de la République des SeycheUesjusqu'auxannées 1970 aété suivi d' une période de transition démographique et de promotion touristique active cumulées jusqu' a la fin des années 1980. Ces deux décennies de développement ont été caractérisées par un important effet de rattrapage en matiere de croissance économique mais par une négligence des équipements structurels; les réseaux d' épuration et de traitement des eaux usées sont constamment saturés et l'augmentation des besoins ne parvient pas a étre couverte par l' augmentation de la capacité des stations. Le manque de fonds nationaux pourfinancer le développementcontraint l'Etat seychellois a dépendre a la fois d' orientations politiques régionales (dans le cadre de la Commission de l'Océan Indien) etde partenaires financiers privés étrangers dont les investissementssontinversernentpropol1ionnels aux contraintes locales. La dépendance extérieure limitealors lapriseen comptede l' impact environnemental des projets de développement imposée récernment par l'Environmental Act de 1994.

pacité de charge d' autant plus faible que les dynarniques hydrosédimentaires et la fragilité des écosystemes les dotent d' une vulnérabilité plus élevée que par le passé, encore exacerbée par les interventions anthropiques. En cet interface que sont les plages, entre des dynarniques physiques complexes et évolutives et une anthropisation toujours accrue aux formes diversifiées, la vulnérabilité ne peut étre établie qu' au cas par casoLa politique des quotas touristiques (150000 touristes/an pour l' archipel) des années 1980 est dépassée. La constitution, aujourd'hui en cours, d'une base de données standardisées permettra d' évaluer la capacité de charge de sites a développer, tres attractifs par leur cadre paysager et peu vulnérables en raison d'une ouverture sur le large cornme ceux d' Anse Intendance et d' Anse Bazarka dans le sud-ouest de Mahé. Mais alors la charge écologique acceptable sera lirnitée par le retard de développement des infrastructuresélémentaires. TI est certain que nombreuses sont aujourd'hui les contraintes a un développement équilibré et écolo-giquement soutenable de l' espace seychellois. Promouvoir un déve-loppement écologiquement soutenable constitue un véritable défi.

Conclusion Les plages de 1'ile de Mahé, déja sournises a une forte pression anthropique et dégradées, possedent actuellement une ca-

Bibliographie GOVERNMENTOFSEYCHELLES,1990. Achieving sustainab1ereve1opmen~FnvironrrentManagement P1anoftheSeychelles, voLIetII. MARsHALLS., 1996. Diagnostic notes on coral reefs andmarine¡WcsofSeychelles;PRECOllFED,73p. PAYET R., 1996. Anthro¡xJgenic iropats on thecrnsta1 zone; pré-audit phase, Diagnostic report 1st draft, FnvironmentprogrammeCOllFED,l28p. SHAHN.J., 1995. Coastal zone management in the Seychelles; ICZM, proceedings of the nationa1 worl<shop,Stockho1m,p.I4-25,158p. SWDDARTD.R ANDAL., 1984. Biogeographyand eco1ogy ofthe Seychelles is1ands, La Haye/Boston/ l..ancbJster, ff) 1p.

45


,

46

Ml

Eludes de cas el réflexions - Littoral marin


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE •••

REPENSER LA GESTION DES ZONES HUMIDES COTIERES " A MADAGASCAR? Jacques lItis *

Abstract

Résumé

May coastal wetlands in Madagascar be managed differently?

a mangrove

Une cinquantaine de grands marais

jalonne le

domaine cótier de I'Ouest malgache. La pression humaine et

About fifty large tidal marshes stretch along the Western

économique sur cet écosysteme a considérablement augmenté

coast of Madagascar. Human and economic pressure on this

a

I'aune des

ecosystem significantly increased since the end ofthe 1980's.

besoins croissants en terres cultivables, en bois et en char-

Pressure is measurable through the comfortable incomes of

depuis la fin des années 1980. Elle se mesure

bon de bois des populations riveraines, mais aussi aux con-

industrial exploitation of related natural resources, but also

fortables revenus de I'exploitation

through increasing needs in agriculturalland,

industrielle des ressour-

ces naturelles. Avec le risque de cumul et d'interaction

des

impacts, la contrepartie écologique du phénornene commence

a

and charcoal. hazards,

Environmental

especially

domestic wood

experts fear an increase of

around

urban

areas,

because

of

notamment autour de certains centres

accumulated and interacted impacts of heterogeneous pro-

urbains. La montée des enjeux écologiques, mais également

duction systems. Rising environmental, as well as economic,

étre préoccupante,

socio-économiques

et fonciers, fait,

a

présent, ressortir un

ocial and land tenure stakes should now implicate better

besoin d'actions mieux coordonnées entre pouvoirs publics,

coordinated

communautés

communities and economic operators.

locales et opérateurs économiques.

actions between government

agencies, local

«/f you think one year ahead, you will plant rice. 1I you think J O years ahead, you will plant trees. But

if you are thinking J 00 years ahead, you will educate

your people» M.S. Swaminathan

Mots clés: Madagascar, marais, mangrove, gestion cótiere,

Key words: Madagascar, wetlands, mangrove, coastal ma-

capacité de charge, aquaculture, crevette.

nagement, stocking rate, aquaculture, shrimps.

,. ¡RD, Centre ORSTOM de Montpellier,

LEA B.P. 5045, 34032 Montpellier

cedex 1, France .

47


I

T

Introduction

A

u dirigisme des années 197585, ont succédé dans les régions cótieres de Mada-gascar -davantage que dans celles proches de la capitale-, uneprésence amoindrie des services de l' Etat et une perte de dynamisme de la plupart des sociétés nationales, ainsi qu' une dégradation accentuée des infrastructures etde l'environnement Surfond de plan d'ajustementstructurel, futproclamée l'ouverture de l'économie qui, de fait, a commencé a se concrétiser dans les années L990. Sur le domainecótier du versant occidental de LaGrande I1e,les zones humides a mangrove constituent un marqueur paysagique de cette évolution. Dans la période actuelle, elles révelent aussi, au rnéme titre que les foréts de terre ferrne, les besoins croissants en terres cultivables et en bois domestique de communautés locales recherchant des moyens de subsistance et diversifiant au maximum leurs activités. Et, surtout, elles refletent la nouvelle donne économique, celle d' opérateurs industriels pour la plupart extérieurs a "la" cate -mais influents sur la scene nationale-obtenant avec des contre-parties mini mes, tantót des droits de peche

creveniere, tantót des terrains en domaine mari time pour l' aménagementde bassins d'aquaculture. Depuis plusieurs années, les grands marais cótiers de l' Ouest malgache et le domaine mari time qui les jouxte constituent l'écosysterne naturel ayant la valeur économique la plus grande sur la scéne nationale, loin devant les autres écosystemes, continentaux ou littoraux. La mangrove, forét de palétuviers caractéristique de ce milieu et point focal des enjeux environnementaux en zone cótiere, en occupe, dans des pro-portions variables, les deux tiers (320000 hectares), auxquels s'ajoutentdes tannes (presde Loo 000 ha d' étendues sursalées, peu ou pas végétalisées), des prairies et des foréts marécageuses, ainsi que des vasieres, le plus souvent submergées. Cetécosysteme constitue, tout a la fois, la niche écologique des jeunes crevettes pénéides, le substrat foncier d' activités aquacoles -ponctuelles, mais appelées a s' intensifier-, un gisementquasi-inépuisable de sel et, pour des riverains tournés davantage vers l' auto-subsistance, une réserve de terres culti vables en riz et un réservoir de ressources Ligneuses(boisetcharbon de bois). Aveclapécbeetf'aquaculrurecreveméres, il est le support d' un secteur pourvoyeur

Défrichement rizicole illégal de la mangrove de la basse Tsiribihina

48

Eludes de cas el réflexions . Littoral marin

de la prerniere masse de devises du pays. Les seu les exportations de la peche creveniere représentaient en valeur déclarée 41 millions de $ US en 1991 et 58 millionsde$ US en 1994. C'estsur le littoral du Nord-Ouest, qui regroupe laplupart des grandes embouchures fluviales de l'ile, que la pression humaine et économique a le plus augmenté. S'y cumulentet, parfois, interagissent les impacts écologiques et socio-économiques, directs et indirects, de la plupart des activités précitées.

Paupérisation et stratégies de survie des communautés locales Depuis le début des années 1990, on assisteá une prolifération dedéfiichements agricoles, et princi-palement rizicoles, sur le domaine cótier du versant occidental. Le phénomene est de méme nature que celui qui affecte les massifs forestiers de l' arriere-pays -préoccupant du reste les autorités, une bonne partie de l' opinion et de nombreux experts, dont certains n' hésitent pas a prédire le pire-. Les défrichements se sont, surtout, intensifiés sur la frange nord-ouest, de Majungajusqu'a Diego-Suarez. Des rizieres sont apparues dans les marais a mangrove, mais également au contact de la terre ferrne et des marais, oü elles supplantent la végétation naturelle établie sur une nappe d' eau douce quasi-permanente (raphieres, prairies marécageuses, mangroves). Les paysans ont compris le parti a tirer de ces petites zones humides, qui souvent prolongent un basfond cultivé en amont, et qu' ils s' approprient -plus ou moins rapidernent- de rnaniere coutumiere, ignorant généralement l' administration des domaines, en charge du domaine maritime selon le droit formel, mais de plus en plus évanescente. IIen va ainsi également dans le delta de la Tsiribihina (Centre-Ouest), oü, depuis les années 1910, des migrants pratiquent


MILlEUX

un type original de riziculture sans polders ni mémediguenes, faisantappel aux seuls mouvements dedécrue fluviale et de marée. Dans le systeme, vivace et rnéme en cours d' inten-sification, la riziere profite, apres défrichement de la mangrove et repiquage, de l' inondation saisonniere de la plaine deltaique par une eau quasiment dessalée. L' abattage des palétuviers est, depuis des années, proscrit par les agents forestiers; mais l' interdiction s' apparente a un voeu pieux, tant est patente la discrétion des agents et la prolifération des 10pins -certains d' entre eux étant simplement dissimulés derriere un rideau d' arbres conservé sur la berge-. Au bout de 3-4 ans, l' invasion des parcelles par les adventices et les crabes incite les paysans a abandonner le terrain et a rechercher des terres neuves, de plus en plus pres de la mero Autour des villes de la cóte, les prélevements de bois de mangrove sont aussi en nette augmentation. Des exploitants organisés, mais aussi des paysans en a1temance avec leurs activités agricoles, procedent a des caupes destinées a satisfaire la demande du petit marché imrnobilier urbain (perches, gaulettes). D'autres encore se lancent dans la fabrication de charbon de palétuvier. Les grands peuplements matures a Rhizophoracées des estuaires du Nord-Ouest sont les plus convoités, étant a la fois réserves de bois de service et de bois-énergie. lls approvisionnent des agglomérations de taille moyenne, cornme Majunga, ou plus petites, comme Antsohihy etMaromandia. Les riverains, par leurs ponctions spontanées et répétées (petit bois de chauffe, pieux de palissade) , contribuent également a cette pression croissante sur des ressources ligneuses jusqu'alorsmarginales.Al'originedeces pratiques, se trouvent, de rnaniere corrélée, les difficultés éconorniques grandissantes des populations et le tarissement des ressources ligneuses de terre ferme. Au palétuvier, les autochtones préferent généralement les bois de forét dense seche; mais, quand ceux -ei se font rares ou sont vendus

a des prix jugés élevés, leur regard se toume vers la mangrove -source abondante et tres accessible, physique-ment et économiquement. Déli vrer des autorisations de coupe, dans un tel contexte, est devenu un acte un peu surréaliste!

La superexploitation de la crevette et les espoi rs suscités par I'aquaculture Estuaires, deltas et baies du Nord-Ouest et, dan s une mesure moindre, ceux du Centre-Ouest concentrent des potentialités en crevettes pénéides telles que beaucoup ont vu -et continuent a voir - en elles un véritable" orrase". Certainesannées, la peche crevettiere constitue effectivement la premiere source de devises du pays. Chalutiers et pirogues péchent souvent de conserve, mais sur fond d' un profond désaccord. A10rsqu' une exploitation rationnelle impliquerait que la peche industrielle s' intéresse au stock de la plateforme continentale, et la peche artisanale' celui du rivage, l'emballe-mentest tel que les chalutiers s'affranchissent allegrement de la limite des deux milles et que, de leur cóté, les pirogues tiennent peu compte de la période de peche autorisée. á

INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CHARGE

Dans un contexte souvent confus, il est patent, sinon avéré, que la crevette est surexploitée dans certaines zones et, au demeurant, le volume annuel des captures plafonne. La ruée vers la crevette est a la source d' un autre désaccord entre pécheurs, Ceux du "cru" reprochent aux chalutiers, non seulement de pécher quasirnent sur le rivage, mais aussi deles priverdu poisson pris dans les chaluts et presque toujours rejeté dans la foulée. Les autorités ont eu beau légiférer pour inciter les bateaux a débarquer au rninimum 50 % du poisson d'accompa-gnement; la mesure n'est guere suivie. Et en divers endroits, notamment a proxirnité des centres urbains, les riverainspeinentdorénavantaremplirleurs filets. Entre toutes, la question sensible est done celle de la crevette, péchée sans garantie de renouvellement de la ressource et source d' effets éconorniques et sociaux perverso La survie de l' activité paraít liée al' application des dispositions préconisées par certains experts, visant sirnultanément a geler le nombre de licences de peche et a en augmenter le prix, a doter les autorités de moyens de neutralisation des bateaux clandestins et a développer la production de crevettes d' élevage (Griffin et al., 1998). Peut-étre faudra-t-il aussi que les autorités réservent des zones aux seuls

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chalutiers. Adéfaut de mesures efficientes, la filiere pourrait un jour s' effondrer ... dans le fil historique des booms agricoles et des récessions subséquentes que l' Ouest malgache a connus dans la premiere moitié du XXe siecle (pais du Cap, mais, tabac). L'augmentationrégulieredelaconsornmation mondiale de crevettes pénéides et la variabilité des captures rendent le développement de l' aqua-culture inéluctable. Madagascar possede, dans cette optique, des atouts majeurs : ses conditions natureUes, ses réserves foncieres substantielles en domaine maritime -plus de SO (XX) hectares de tannes sont aménageables en bassins de grossissement-, des coüts de main d' oeuvre tres faibles et la libéralisation -quoique inachevée- de son économie. La production potentieUe du secteur a été estimée a plusieurs fois le total des captures de crevettes. En 1997, toutefois, la production effective, amorcée quatre ans plus tót, s' élevait a peine au tiers du tonnage péché; mais, s'agissantexcJusivementde Penaeus monodon -espece appréciée sur le marché des pays du Nord-, eUe représentait bien davantageen valeur.Acette date, deux fermes avaient atteint le stade de la production industrieUe; avant la fin de la décennie, trois autres unités de production devraient voir lejour sur le littoral

nord-ouest -qui focalise l' attention des investisseurs, en particulier le troncon Mahajamba-Majunga-Soalala Etant donné la probable sur-exploitation des stocks de crevette sauvage, les autorités délivrent, a présent, de maniere préférentieUe des licences de peche aux opérateurs en mesure d' investir dans la filiere aquacole. Ceux -ci obtiennent en contrepartie de vastes terrains en marais maritime et bénéficient du cadre fiscal avantageux des zones franches industrielles. En l' absence de cadre juridique et administratif adapté a une activité économique nouvelle, une dérogation aux príncipes de la domanialité est accordée aux sociétés par le biais de baux emphytéotiques, entrainant le déclassement, en général pour une durée de SO ans, des terrains du domaine public maritime, voire de ceux du domaine public légal, et leur affectation dans le domaine privé national. L' impact sur l' environnement des premieres fermesestresté.jusqu'a présent, modéré. En revanche, leur émergence dans des zones peu peuplées et économiquement peu développées a entrainé un afflux de population. La perspective d' un emploi ou de revenus connexes a attiré des milliers de personnes extérieures aux régions concemées et d' origine modeste. CeUes-ci ont, souvent, édifié a la háte un

Débarquement de bois de palétuvier dans le port de Mahajunga

50

Eludes de cas el réflexions . Littoral marin

habitat sornmaire et exercent sur les alentours une pression dont les effets environnementaux sont nettement moins contrólables qu' a la ferme. Face a des problemes inédits, les autorités ontcornmencé a élaborer un schéma national d' aménagement des fermes aquacoles, destiné a ménager l' environnement cótier et a sauvegarder les activités traditionnelles éventuelle-ment menacées. TIest vrai qu'une emprise trop forte des infrastructures aquacoles paurrait remettre en cause, ici ou la, une coexistence jusqu' alors pacifique avec les populations riveraines. TIn' est pas non plus excJu que se développe, a moyen terme, une compétition fonciere entre opérateurs aquacoles eux -mémes, car peu nombreux sont, en définiti ve, les sites possédant l'ensemble des atouts précités, auxquels ilconvientd' ajouterlaproximitéd'un centre urbain etd' équipements collectifs.

Conclusion: une gestion mieux Inte~rée des zones

humldes

cñtieres est-elle posslblet 11 en est, al' heure actuelle, des zones humides cótieres de l' Ouest cornme des espaces naturels terrestres a Madaga-scar: la légalité des institutions et des reglementations offieielles n'y est pas ou plus légitimée, tandis que la légitimitédes logiques et des pratiques locales n' est pas légalisée (O.N.E., 1997). Or, en une décennie, les enjeux écologiques et foneiers et, done, économiques et soeiaux, sont montés considérablement. La néeessité d' une gestion mieux intégrée de ces zones ressort a présent cJairement; elle est redondanted'un besoin deconcertation améliorée entre les parties impliquées : I'Etat et les coUectivités territoriales, les opérateurs économiques et les communautés locales. La domanialité, tres artifieielle, n' est probablement pas le cadre juridieo-


MILlEUX INSULAIRES

administratifle mieux approprié aux réalités de l' heure. Elle est rnéme contestée par les populations riveraines, en tant que symbole de la présence coloniale passée, puis d' une administration centrale interventionniste, du moins al' époque du tout-Bat Dans la période actueUe de reláchement de la présence de I'Etat, ces populations sont, d'ailleurs, tentéesd' occuperou d' exploiter spontanément le domaine public, oü elles trouvent a bon marché des remedes a court terme a leurs difficultés économiques. De leur cóté, les opérateurs éconorniques, notamment ceux de l'aquaculture, sontactuellementen position favorable pour négocier, directement au niveau central, avec les pouvoirs pubLics en vue d' acquisitions foncieres en zone maritime. Dans le proche avenir, iIest important, autant pour l' harmonie des relations entre fermes aquacoles et riverains que pour une gestion durable des ressources naturelles, que les autorités procedent au déclassement du domaine public de maniere mesurée. L'établissement d'un schéma d' aménagement de la filiere devrait les y aider, sous reserve qu' iIprenne réeUement en considération les intéréts des communautés locales, détentrices de droits historiques ou simples usagers des marais. A défaut de pondération, un déve\oppement incontrólé de filieres de production aux rationalités divergentes pourraits' ensuivre et engendrer des formes de concurrence spatiale et de profonds désaccords. Mais pour l'heure, quand désaccord ily a, celuici est rarement exprimé en public et se regle le plus souvent al' arniable. Pour ménager l' avenir, l' exécutif central et le législateur ont, en liaison avec l'appui technique bilatéral et intemational, posé les prerniers jalons d' une réforme administrativeetfonciere a plusieurs composantes. L'une des composantes (Gestion Locale Sécurisée), au stade de loicadre, institue une possibilité de transfert des ressources natureUes publiques aux communautés de base et de gestion contractualisée de ces ressources. Les res-

El CAPAClTf

DE CHARGE

Extraction artisanale de sel sur le tanne de Belo-sur-Mer

sources cótieres, pour certaines du moins, entreraient dans lechamp d' application de la loi, au rnéme titre que foréts et páturages terrestres. L' on peut, toutefois, s' interroger a priori sur l' adhésion a de telles dispositions des opérateurs industriels privés des régions cótieres. Une autre cornposante de la réforme en préparation, en-

core plus hardie, envisage a court terme une décentralisation administrati ve poussée, avec un élargissement des compétences des coUectivités locales et, surtout, provinciales. Dans ce cas, e'est en grande partiedu devenird'une nation etde populations conscientes de leur unité dont il s'agit'

Bibliographie OC/N-SAlN B. ETKNECIfTR. w., 1996. Madagascar - Rapport de l' atelier sur la gestion intégrée de la ZfrecUiere.ONE-Barx¡t.eMorrliale-SIDA-SAREC, Antananarivo,l44p. GRIFFlNW. L., SOMERSI. ETWILSON1. R., 1998. Rapportdu ComitédesSagessur les rnesures poposéesacocrtetrnoyen terrneconcemant la ¡ichea la creveneá Madagascar. MocAlister, Elliott § Partrers L1d,34 p., Lymington, Royaurne Uní lEBIGRE1.-M., 1990. Les marais maritimes du Gabonet de Madagascar. Tbese Unív. Boreaix Ill, Inst de Géogm¡xlÍe, 704p. A Madagascar, on distingue une peche «srtisenele», pratiquée par des embarcations motorisées de moins de 50 Cv, de la peche «treditionnetle», non motorisée ou pratiquée a pied. 1

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51


52

T

Ml

Eludes de cas el réflexions - Littoral marin


MILlEUX

INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CHARGE

,

LA PLAINE OCEANIQUE ABYSSALE ET L'ASSAINISSEMENT "" DES PETITES, ILES: LE CAS DE LA POLYNESIE FRANCAISE Francis Rougerie *

Résumé

Abstract

Alors que la fonction «ressource» de l' océan tend

a attein-

dre ses limites (peche, aménagement des zones cótieres), la fonction «réceptacle» commence seulement

fisheries and coastal management, burthe dumping function

de

start to be rationally used, specially with pipes for waste

des

thrown out. The size of the abyssal zone represent a second

pour le rejet en subsurface des effluents

planet with a considerable potential for waste dumping. This

facon rationnelle, en particulier gráce tuyaux-émissaires

a étre utilisée

The ocean resource function is near the limit point for

a la mise en service

urbains et industriels non toxiques. De par ses dimensions, la

can be a great solution

zone abyssale océanique constitue notre seconde planéte et

treatment. Polynesian islands cover a small part (4 000 km2

to resolve

island urban waste

pos sede un énorme potentiel de charge dont l'usage adéquat

for a hundred or so islands) of the Pacific ocean (4 million

peut alléger de facon significative les problernes de surcharge

km2), and this ocean where the deep part is cold, dark and

des Iles et des cates, en particulier dan s le domaine des dé-

submitted to very high pressures, can be used for waste dum-

chets urbains. A l' inverse de la modestie des superficies in-

ping.

sulaires émergées (4000km2 pour une centaine d'iles), la zone océanique économique

exclusive de Polynésie couvre une

surface de 4 millions de km2 avec une profondeur moyenne de 4 km. La prise en compte de cet arriere-pays océanique, dont la partie profonde est caractérisée par le froid, l' obscurité totale et les hautes pressions, permet de proposer que la plaine abyssale soit utilisée pour le stockage et l'enfouissement des déchets urbains.

Mots clés: Polynésie francaise, abysses, déchets, océan, im-

Key words: French polynesia, abyssal zone, waste, dumping,

mersion profonde, capacité de charge.

stocking rateo

.• IRD (ORSTOM), Observatoíre Océanologíque furopéen, avenue St Martín, 98000 Monaco.

53


T

I

Les abysses,notre

deuxieme planete existe, 1 dans la plupart des bassins océaniques et dans les mers profondes, un découplage entre la couche de surface (0-200 m) et l' océan profond, au dela de 500 metres. Cette stratification vertical e de l' océan assure une forte séparation entre la couche éclairée, oü est photo-synthétisée la matiere vivante, et la partie abyssale froide et obscure, qui fonctionne comme un gigantesque bio-réacteur de régénération et d' accumulation sédimentaire. Tout rejet sous la barriere de densité constitue donc un aller simple et défmitif vers les abysses, et tout dépót d' une charge solide sur la plaineabyssaleconstituel'équivalentd'un enfouissement de type géologique. Dans le cas des ordures ménageres et déchets urbains, le respect de la loi et des contraintes océanographiques implique un processus d' immersion en trois étapes: • compression de lacharge brute avec une presse a orc\ures ménageres; production de baLlesde une a plusieurs tonnes et de densi té proche de l' uni té, cerclées par fil métallique pour éviter leur délitescence. • chargementdecesbaLlesdansunebarge équipéed'une benne abyssaleet transport au proche large, pour atteindre des fonds d' au moins 3 km. • descente de la benne jusqu' a 500 m de profondeur, ouverture automatique et largage des balles. La surpression (50 kglcm2 a 500 m) et les basses températures (inférieures a 10 °Ca500meta5 OCa l000m.)conduisent a une augmentation de la densité des balles,qui couleront jusqu' au fond et tendront a s'enfoncer dans le sédiment argilo-vaseux. Le rejet a partir du méme point permettra de créer un dépotoir abyssal sur une zone occupant quelques km', et done facile a suivre au plan technique et scientifique. TI est important de noter que

1

54

Etudes de cas et réflexions . Littoral marin

les éléments contenus dans les déchets ménagers (matieres orga-niques, métaux, verres), etceux qui serontproduits par leur décomposition éventuelle, ne peuvent en aucune maniere poser un probleme biochimique pour le milieu océanique ou le sédiment marin, oü ils sont naturellement présents sous forme dissoute ou particulaire: les fractions susceptibles de se dégrader en présence d' oxygene (décomposition aérobie) enrichiront le réservoir marin en matieres organiques, seis minéraux et métaux dissous; les fractions plus réfractaires (verres, plastiques) seront progressivement enfouies al' intérieur du sédiment et, sans contact avec l' oxygene, subiront une tres lente décomposition anaérobie analogue a celle qui in fine conduit au pétrole, aux phosphorites ou aux nodules polymétalliques. N' oublions pas aussi que la matiere organique enfouie dans les abysses conserve de ce fait une charge potentielle en gaz a effet de serre (C02, CH4), qui seront ainsi durablement sequestrés en dehors de l' atmosphere,

Application du concept de I'immersion profonde: le cas de la Polynésie Ce territoire est avant tout une province maritime avec seulement 4 (XX) km2 émergés pour une zone océanique éconornique exclusive de4 rnillion de km', située au centre d' un océan qui représente la moitié de la superficie de la planete. De plus les profondeurs sont importantes, de 4 km en moyenne au-dessus de la plaine abyssale. Les iles et atoUsreprésentent les sommets de chaines sous-marines, issues d' un volcanisme intraplaque alimenté par des points chauds, puis ceinturés de récifs coralliens au fur et a mesure de la subsidence desiles,

LE PROBLEME URBAINS

DES DÉCHETS

Avec ses 150000 habitants a haut niveau de vie et une importation de plus de 90% de ce qui est consommé, Tahiti produit 150a300tonnesdedéchets parjour. Ces déchets sont déchargés dans des dépotoirs en plein air installés de facon traditionnelle dans les parties moyennes des vallées; la quasi-totalité des 10 grandes vaLléesde I'ile (a l' exception de la vaLlée de Fataua qui fournit l' eau de Papeete) et des 60 vaLlées secondaires est ainsi défigurée par ces dépotoirs fumants qui constituent des zones d' insalubrité permanente (rats, moustiques, cafards; poLlution des rivieres, nappes phréatiques et lagons; odeurs, fumées, obstacle al' acces des hautes vaLléesetc). En 1987, la décision fut prise de construire a Tahiti une usine de traitement par incinération- méthanisation (procédé Valorga, Arniens). L' usine fut construite a proximité de Papeete, au fond d' un cirque montagneux, et entra en fonctionnement en 1991; cependant, apres une succession de mal-fonctionnements (mauvais triage,


MILlEUX INSULAIRES

insuffisance de rendement de la mét:hanisation, incinération incomplete) et d' atteinte a l' environnement (odeur, bruit, rabattementdes fumées sur la ville), l' usine est définiti vement fermée fin 1993. Cette usine aura coüté 300 millions de francs, et apres beaucoupd'agitation politiqueetsociale est actuellement en phase de démolition. D reste que le probleme des ordures est plus aigu que jamais, et que les tentatives de créer des dépotoirs a enfouissement contrólé en zones reculées se heurtent a l'opinion publique des communes concernées. Tahiti est malade de ses ordures, comme d' ailleurs la plupart des centres urbains des autres archipels polynésiens, iles hautes (Moorea, Bora-Bora, Tubuai) ou atolls (Rangiroa). Le probleme des effluents urbains est également posé et un projet devrait entrer en phase de réalisation: il s'agit de créerun réseau decollecte des eaux usées qui, apres traitement préliminaire, seront envoyées dans un émissaire pour un rejet dans l' océan a 80 metres de profondeur, au droit de la digue du port de Papeete. On pourrait imaginer de coupler les deux futures usines de traitement, celle pour les eaux et celle pour les solides; c' est ce qui a été fait a Monaco en pleine ville, avec : • traitement prirnaire des eaux; • rejet par tuyau-émissaire de 1 rnetre de diametre a 100m de profondeur • incinération totaledes boues, déchets urbains et ordures ménageres en vrac (y compris les matieres plastiques et les pneus); on s' approche d' un degré zéro de nuisance par triple nettoyage des fumées. L'electricitéproduitecorrespond al' éclairage urbain (3% du total); cependant, outre la surface au sol occupée et les contraintes du trafic des bennes de ramassage, le coüt de cette filiere, de l' ordre du milliard pour chaque usine, rend ce choix irréaliste pour des collectivités en voie de développement De plus le probleme resterait entier dans les autres Iles et archipels.

L'IMMERSION-STOCKAGE ABYSSAL

Les Iles de plein océan comme Tahiti semblent particulierement adaptées a la rnise en oeuvre de la filiere presse a ordures- barge- benne abyssale. Le processus se déroulerait comme suit: • Les ordures amenées par les carnions de ramassage sont directement déversées dans une presse a ordure ménagere installée en zone portuaire, et qui, selon les modeles, peut en traiter 10 a 50 tonnes par heure. • Les balles d' ordures compactées et cerclées sont ensuite déposées dan s une barge équipée d'une (ou de plusieurs) benne abyssale. Les jus de pressage sont également stockés dans la barge. • La barge autotractée gagne en quelques heures la zone de rejet, sur des fonds d' au-moins 3 km. • La benne est descendue jusqu' a aumoins 500 mares de profondeurpar déroulement de son cable porteur; le panneau inférieur s' ouvreauto-matiquernent sous l' effet de la pression, libérant les

El CAPACIT~ DE CHARGE

balles compactées qui vont continuer leur descente jusqu' au fondo • Les jus de pressage sont déversés en surface ou refoulés en subsurface (et favoriseront la croissance du plancton). Une bargede25 mdelongpourraitainsi transporter les 100 a 200 tonnes d' ordures quotidiennement produites dans l'He de Tahiti. D' autres presses de plus faible capacité pourraient étre installées sur la presqu'ileetsur l'ile voisinedeMooréa. Une barge-benne abyssale pourrait ramasser réguliere-rnent les balles compactées en différents sites et les amener au proche large pour immersion. Le méme principe peut s' appliquer aux iles sous le vent et dans les autres archipels, chaque ile produisant des balles compactées ramassées lors de la toumée d' une barge. La descente des balles et leur disperssion serontfonction de leurdensitéetde laforee des courants océaniques; celles-ci sont faibles en profondeur, de l' ordre de quelques cm/seconde, ce qui fait que les balles tendront a s' accumuler sur une surface de quelques km', au droit du point de rejet. Leur enfoncement dans le sédiment profond sera progressif, inéluctable et définitifoL' impact sur les organismes bent:hiques sera trés localisé, une partie de la charge organique pouvant, avant eníouisse-ment, étre colonisée par des bactéries aérobies ou exploitée par des oursins, holoturies et étoiles de mer. Ce procédé garanti que les ordures du jour seront dans les profondeurs océaniques avant leur pourissement aterre, ce qui est le cas actuellement Une résorption des anciens dépotoirs pourra étre entreprise, assainissant défi-nitivement les vallées et bandes cótieres. Outre l' impact positif sur la pollution et les diverses nuisanees associées, on peut penser que la valeur des terrains ainsi récupérés sera probablement supérieure au coüt total de la mise en oeuvre de ce procédé. En Juin 1993, apres une enquéte contradictoire et une audition de plusieurs experts et scientifiques, le Conseil Economi-

55


T

I

que et Social de Polynésie Francaise avait émis un avis favorable a un test de mise en service de cette filiere presse a orduresbarge -benne abyssale. Malheureusement, et malgré la fermeture de l' usine de traitement peu de temps apres, les ordures ont continué a étre entassées et a polluer l' envi-ronnement, au point que ce probleme constitue un frein majeur au développement de Tahiti, et une sourcede vive tension socialeet politiqueo Un premier pas vient toutefois d' étre fait (octobre 1997) avec I'immersion decarcasses compactées de voitures et de «monstres» électro-ménagers a 30 milles dans l' ouest de Tahiti, sur des fonds de 3,5 km. Plusieurs milliers de tonnes de ferraille et de plastiques composites ont ainsi rejoint la plaine abyssale, soulageant d' autantla plainecóiere, Un projetde construction d' une barge-benne est al' étude, etpourraitaboutiren 1998.

Conclusion

nexiste cepenc\ant un probleme

d' ordre psychologique dans l'utilisa-tion de l'océan profond, un sorte de tabou diffus basé sur une mauvaise connaissance des réalités océaniques. n faut done que les autorités politiques et scientifiques fassent un gros travaiJ d'information etd'explication. De nombreux plaisanciers et pécheurs se po-

sent en défenseur d' un océan idéal, devant garder sa pureté originelle, sans réaliser qu' ils rejettent eux aussi beaucoup de déchets solides et liquides (la flottille mondialeestde I'ordredu million d'unités) et que la coque de leur báteau est enduite d'un redoutable poison antiplanctonique ! La miseen servicedes tuyaux-émissaires a constitué une prerniere application du concept de rejet océanique en subsurface, et a montré son efficacité. n reste simplement a ajouter que ce qui est vrai pour les rejets liquides l'est également pour les rejets solides. On cornmence a bien connaitre les contraintes et les inconvénients des traitements des déchets a terre, ainsi que les limites du recyclage, de l' incinération (émission de gaz toxiques et a effet de serré) ou du stockage dit controlé (emprise au sol, percolation des eaux, pollution des nappes etc). Dans ce contexte tendu, et c\ans la perspective d' un doublement en 50 ans de la population mondiale (dont la moitié habite a moins de 200 km des rivages), il parait légitimede proposer que l'océan profond soit mis a contribution pour aider les hornmes a mieux gérer leurs déchets, en complément aux multiples procédés utilisés a terre, Et pour les lles et zones cótieres déja surchargées, et bordées d' océans ou de mers profonds, l' immersion océanique peut constituer l' acres a un nouvel espace, une nouvelle ressource pour le siecle a venir.

Bibliographie NAIOSERIES, 1986.Theroleoftheoceansasa disposal optioo, ed. G Kulleobeg, 725p. WOODSHOLE

waste

OCEA OGRAPHIC 1 STITU-

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56

Etudes de cas et réflexions . Littoral marin


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACIT~ DE CHARGE

CAPACITE D'ACCUEIL ET GESTION DES SITES NATURELS DES HAUTS DE L'iLE DE LA REU1JION René Robert *

Résumé

Abstraet More and more tourists and residents visit the high volcanic

Les hautes terres de la Réunion sont de plus en plus visitées. Elles offrent des paysages volcaniques remarquables et

lands of La Réunion

island,

which offer exceptional

aussi des lieux de loisirs familiaux. Terres inhabitées, elles

landscapes. The Forestry National Service created roads that

sont traversées par différentes voies mises en place par l'Of-

made these uninhabited areas accessible. This recent human

fice National des Foréts. Leur fréquentation entraine des dif-

pressure

ficultés de gestiono 11est pourtant souhaitable que I'accueil

necessary to promote a well controlled development.

leads to managements

problems

as it seems

du public y soit favorisé, avec quelques précautions.

...

Mots clés: tourisme, loisirs, capacité d'accueil, les hauts, la

Key words: tourism, recreational activities, ecological capacity,

Réunion, capacité de charge.

Réunion island, stocking rateo

* Laboratoire de Géographie de l'Environnement, Université de la Réunion, BP 7151, St Denis, 97715 La Réunion, Frsnce .

57


-_.

,

Ml

Introduction

L

es difficultés économiques de la Réunion avaient poussé les responsables a promouvoir letourismedans l'ile, comme cela avait été le cas dans les iles voisines (Seychelles, Maurice). La promotion s'est d' abord intéressée aux quelques sites balnéaires de l' ouest et du sud. Puis l' intérét des hautes terres s' est rapidement développé. Des pistes forestieres et des sentiers de randonnée, imaginés et créés par I'ONF, ont perrnis la découverte de sites attractifs. En 1997, des enquétes sur la route forestiere du Volcan ont montré que les utilisateurs étaient différents. Les uns sont des touristes qui viennent découvrir les grands panoramas du volcan de la Fournaise. Les autres viennent y chereher une aire de pique-nique agréable.Les uns vont jusqu' au bout de la piste; les autres, promeneurs du dimanche, s' arrérent le long du chemin des

le moment oü un espace intéressant a été repéré. En semaine les touristes représentent la presque totalité du flux; le dimanche ils ne représentent plus que 50% de ce flux. D' autres enquétes ont montréque le phénomene est identique sur les autres pistes des hauts de l'ile. Les pression exercées sur la nature sont différentes dans l' un et l' autre caso Les passages de touristes vont augmenter dans les prochaines années; les besoins en loisirs dominicaux, également. La qualité des sites est pour le moment maintenue artificiellement avec des fonds publics, mais elle est insidieusement dégradée. L' étude dissocie les valeurs et inconvénients du tourisme de ceux des loisirs dorninicaux.

Les sites uniques: une protection a renforcert L' originalité de la Réunion parmi les iles de I'océanIndien setrouvedans ses par-

Situation des zones de végétation altimontaine et des routes iorestiéres de desserte o;..~_~.;.1Okm

Saint-Derus

ties centrales. La multiplicité des paysages volcaniques originels ou issus de la tectoniqued'effondrementetla variétédes ouvrages de l' érosion torrentielle sont remarquables (Robert, 1996). Les hautes terres de l' intérieur ont aussi un climat agréable et attractif pour les personnes qui vivent sur le littoral a climat tropical chaud.

LES GRANDS

SITES

Ce sont des espaces a petite échelle, faciles a contempler. Dans le nord-ouest, le massif du Piton-des-Neiges, qui culmine a plus de 3 000 m, offre un bastion de hautes ruines centrales entouré de grandes excavations (les cirques de Salazie, Mafate, Cilaos, Bébourg). Ces cirques sont dominés par les remparts des planezes dont les sommets perrnettent de découvrir des panoramas grandioses (Roche Ecrite, Maido, les Makes, Dimitile). Au sud-est, le second volcan, la Foumaise, encore actif, offre une succession de calderas emboitées dont les deux dernieres, les calderas des Sables et de l'Enclos, sont des sites tres attractifs. Tous les documents de publicité touristique proposent la découverte de ces grands sites.

L'OUVERTURE DES GRANDS SITES AU PUBLlC Saint-Benoit Saint-Gilles

Plaint:'des-Cafres

58 Etudes de cas et réflexions . Littoral terrestre et intérieur

L' ONF contrOle environ 100000 ha, soit 40% de la surface total e de la Réunion (Dournenge et Renard, 1989). Pour desservir les grands sites, il a créé des pistes forestieres (350 km), des sentiers de grande randonnée et des sentiers locaux (environ 1000 km). Les principales routes menent vers le Volcan de la Fournaise, vers la Fenétre des Makes (panorama sur Cilaos), vers le Maído (panorama sur Mafate), vers Bébourg et Bélouve (panorama sur Salazie). Les principaux sentiers vont vers les sommets de la Fournaise et du Piton des Neiges ou vers les sommets des pla-


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACIT~ DE CHARGE

nezes : Roche Ecrite (panoramas sur Salazie et Mafate), Grand Bénard (panoramas sur Mafate et Cilaos), Dirnitile (panorama sur Cilaos), Plaine des Fougeres (panorama sur Salazie )... Ces voies sont de plus en plus utilisées.

LES DIFFICULTÉS TlON

DE GES-

Les enquétes faites sur la piste du volcan ne montrent pas une surfréquentation: 300 a 400 véhicules vont jusqu' au bout de la piste le dimanche (soit 1 000 al 200 personnes). Les superbes coulées de mars 1998, visibles du terminus de la route, étaient attendues depuis 1992. Le flux de curieux a été tel que la pratique de la route est devenue rapidement impossible et la gestion de ladifficulté a demandé de nombreux efforts financiers et autres. Les structures d' accueil de J' ONF ont montré leurs limites devant dette invasion touristique: les capacités n' étaient pas prévues pour ces finalités. Sur les grands sites, la premiere difficulté est celle des déchets, laissés sur place, cachés dans les fourrés arbustifs, glissés dans les diac\ases des roches volcaniques. La solution n' ajamais été trouvée et les incitations diverses n' ont jamais été suivies d' effets valables. Le financement public assure un nettoyage, mais la décision de contróle, voire d' attitude répressive, divise les responsables. Les pluies sont rares dans les hauts, en raison de la structure de la basse atmosphere et les structures de surface sont tres perméables. L' écouJement de surface est absent: il est impossible de trouver de l'eau sur place pour les besoins des touristes et les besoins de lutte contre les incendies. La seule solution consisterait a transporter de l' eau de l' aval vers les hauts et a la stocker dans les citemes. Les grands sites font de plus en plus l' objet de réflexions diverses visant a leur utilisation et a leur protection (Robert, a pa-

raitre). Les deux démarches peuvent étre en opposition. Le constat actuel est celui d' un effort considérable pour ouvrir les hauts et accueillir les touristes. En contrepartie, les difficultés apparaissent : contróle et organisation des flux ponctuels, enlaidissement des sites par les déchets, ravitaillement en eau, arrivée d' especes exotiques envahissantes ...La solution ne peut venir que d' une politique globale: la solution du pare naturel est al' ordre du JOUf.

Les espaces de landes et pelouses altimontaines: une adaptation nécessai re? Sur les chernins qui menent aux grands sites, le long des pistes forestieres, s' accumule le dimanche surtout, et aussi pendant les vacances scolaires, un nombre croissant de personnes. Elles ont quitté le littoral pour passer quelques heures agréables dans les hauts. L' association déterrninante est done la voiture / le pique nique / les hauts.

LES RÉGIONS DE LOISIRS DANS LES HAUTS

Toutes les pistes sont utilisées,mais deux seules menent a des altitudes supérieures a 2000 metres, perrnettant de gagner cette région oü l' arbre disparait et oü une lande original e se développe. La plus fréquentée est cel1e du volcan de la Foumaise oü les pique-niqueurs se massent surtout entre 1300 et 1500 m. Les aires aménagées ne sont plus suffisantes depuis longtemps. Ensuite vientcelledu Maído dans les hauts de l'ouest: les flux concement environ 500 a 700 personnes le dimanche. Les aires d' accueil sont de deux types: aires aménagées et aires sauvages. Les aires aménagées profitent de trois ambiances différentes: sous la fütaie de cryptomerias (Cryptomeriá japonica), résineux introduit poursylviculturepar I'ONF), souslafütaie de tamarins des hauts (Acacia heterophylla), endérnique présent sur toutes les pentes moyennes) et sur les landes alti-montaines.

59


I S LA E , OPICA

LES MENACES SUR LA LANDE

La lande a1timontaine s'est développée sur une aire de grande importance: e' est le cas pour l' étage terminal au-dessus de 1800-2CXX)m (Cadet, 1980) oú sejuxtaposent des fourrés et des pelouses. Aucune espere végétale n' y est menacée d' extinction, a la différence des autres strates végétales. Mais pour réchauffer ou cuire les aIirnents du pique-nique, le visiteurs du dimanche utilisent les branches mortes des bruyeres. Ce geste répété par des milliers de personnes en quelques années a fini par réduire les fourrés le long de la route forestiere: iIfaut chercher le bois mort de plus en plus loin. Faute de bois mort a proximité, des arbustes vivants sont maintenant arrachés. Les agents de I'ONF l'ontremarqué sur des sites particuliers.

des deux massifs volcaniques et offre des espaces largement ouverts plus faciles a aménager et a vivre que les sous-bois des foréts situées en aval. S'il est nécessaire de mener une poIitique préventi ve dans le cadre de l' aménagement des hauts pour accueillirdavantage de visiteurs, iIest vrai que les landes offrent un vaste domaine oü la dégradation peut étre évitée au maximum. Les conditions favorables sont multiples: absenceou raretédes sols, ouvertures natureUes disponibles entre les fourrés, situation au-dessus de la couche d' inversion des alizés assurant un ensoleillement plus fort quecelui des pentes moyennes, faibles menaces d'y voir sedévelopper des exotiques envahissantes ...Ces régions ne sont pas accessibles partout par les routes (e' est le cas des sommets de la planeze de la Roche Ecrite) et ne sont pas toutes a mettre en aménagement,

UNE NÉCESSAIRE ADAPTATION

Conclusion

Pourtant cette région de landes est intéressante parcomparaison avec les autres strates de végétation oü se fait l' accueil des visiteurs. ElIe est présente au sommet

Le développement du tourisme et des loisirs est un phénomene de société qui n'a rien d'original. Les différents flux se répartissent sur les stations baInéaires et

dans les hauts. Les discussions portent actueUement sur la capacité d' accueil de ces sites, sur les difficultés rencontrées, en distinguant les sites majeurs dont l' attractivité est le moteur du tourisme dans les hauts et le besoin d' évasion des autochtones. Elles n' ont pas permis encore de décider d' une politique pour demain. Les moyens de controle ne sont que ponctuels et insuffisants : il est possible que cette mésentente vienne du nombre important d' interlocuteurs sur ce méme théme. Beaucoup pensent, dans ces conditions, que la solution la meilleure est celle de la rnise en place d' un pare naturel dans les hauts. L' unicité directionnelle du pare permettrait sans doute de pallier un déficit de décisions nécessaires. ElIe permettrait d' orienter les charges d'un ensemble décosystemes pour éviter la surfréquentation. Le cahier des charges de ce pare a été agréé en février 1988 par le Conseil Régional, et la création est prévue vers 2002-2003. L'adéquation entre besoins de I'homme et possibilités de la nature est au centre des futures discussions.

Végétation altimontaine des Hauts de la Fournaise

Bibliographie CADETTH., 1980. La végétation de l'ile de la Réunion, étude phytoécologiqueet phytosociologique; imprimerieCazal, Saint-Denis, 3 12pages. DoUMENGEC. ETRENARDY., 1989. La conservationdesécosystemesforestiersdel'í'Iedela Réunion; publication de l'Union Intemationale pour laConservationde laNature(UICN),Camtxid"oe, Royairre-Uni, 95pages. ROBooR.,I996.Lespaysagesnaturelsdel'IJedela Réunion; ouvelle lmprimerie Dyonisienne, Sainte-Cloike, la Réunion, 130pages. ROBOOR. - a paraitre -la gestion ella valorisation du domaine public dans les hauts de l'ile de la Réunion (océan inclien);AnnaJes de Géogmphie, Paris

60 Etudes de cas et réflexions . Littoral terrestre et intérieur


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE

LE TOURISME RURAL DANS LA DERNIERE ETAPE DU NOUVEAU MODELE TERRITORIAL DE L'iLE DE MAJORQUE Jaume Binimelis Sebastián, Antoni Ginard Bujosa, Joana Maria Seguí Pons*

Résumé

Resumen

Le développement du tourisme de masse dans les iles Ba-

Al final de siglo, no hay dudas que la transformación

léares a généré un nouveau modele économique, social et

económica, social y territorial producida en las Islas Baleares

territorial. La dominance des es paces ruraux a disparu au pro-

en la segunda mitad del siglo XX es un efecto del impacto del

fit des zones urbaines et de la dynamique d' aménagement du

proceso de desarrollo basado en el turismo de masas, que ha

littoral. Ces dernieres années, les es paces ruraux ont succombé

a

la dynamique globale de la "rururbanisation".

Le

provocado

una ruptura

estructuras

preexistentes,

radical

en la dinámina

acelerando

de las

la introducción

de

tourisme rural et I'écotourisme, formes nouvelles de spéciali-

nuevos modelos de comportamiento

sation du tourisme, représentent un facteur de pénétration

personalidad de las Islas se ha tambaleado en un período de

urbaine vers l' intérieur des terres. Le tourisme rural ne correspond pas

a

une stratégie d'aide au développement

ploitations agricoles mais exprime la réponse

a l' offre

des extouris-

tique, présenté comme une alternative au tourisme de masse.

tiempo

a todos los niveles. La

muy corto: en poco más de treinta años se ha

consolidado el paso de una sociedad tradicional rural y agraria, característica

del sur del Mediterráneo,

a una sociedad

moderna. La impronta ha sido tan profunda que cabe distinguir entre la sociedad de antes y la de después del inicio del turismo de masas. En este sentido, puede hablarse de una sociedad pre-turistica

y de una sociedad nueva, que está devorando

la herencia del pasado reciente y que ha estructurado

un

nuevo esquema económico, social y territorial.

Mots clés: tourisme de masse, Iles Baléares, tourisme rural,

Palabras clave: turismo de masas, Islas Baleares, turismo ru-

écotourisme, insulaire.

ral, ecoturismo, insular.

* Universitat de les lIes Balears, Crts Valldemosa, km 7,5 i 07071 Palma, Mallorca, Espagne.

61


lE EAU I SULAIRE

,

PICAL El Ml

RA

E

Introduction 'éVolutionéconomique, sociale et territoriale qui s' est produite dan s les iles Baléares dan s la deuxieme moitié du Xxeme siecle est la résultante de I'impactdu processus de déve-Ioppement basé sur le tourisme de masse. Ce demier a provoqué une rupture radicale dans la dynamique des structures préexistantes, en accélérant l' introduction de nouveaux modeles de comportements a tous les niveaux. En un peu plus de trente ans, les iles Baléares sont passées d'une société ruraJe et agraire, caractéristique du sud-méditerranéen, a une société moderne. Cette mutation a été si profonde qu' il faut faire une distinction entre la société d' avant et . celle d' apres le début du tourisme de masse. Dans ce sens, on peut parler d' une «société pré-touristique» et d' une nouvelle société, refusant I'héritage d' un passé récent et construisant un nouveau schéma économique, social et territorial.

L

L'évolution du modele territorial Bien que l' on puisse introduire quantité de nuances, l' évolution du modele territorial des iles Baléares (en particulier celui de Majorque) s' est fait en quatre grandes phases.

SOCIÉTÉ AGRAIRE El DÉBUTS DU TOURISME (1930-1950/1960)

La situation qui précéde le développement du tourisme aux Baléares se défini t par la persistance d'une base économique et sociale archaique et apparemrnent immuable, composée par un grand contingent de la population rurale active (plus de 50 % avant ] 950). La «grande propriété» dominante coexistait avec une

62

structure de petites et moyennes propriétés d'artisans, de petites industries et de commercants. Dans la premiere moitié du XXeme siecle, en l' absence des grands courants sur l' industrialisation et l' urbanisation, une économie agraire, pratiquement d' auto-consommation, se maintenait dans un tissu social plutót statique et conservateur. La société traditionnelle se confortait dans un territoire configuré par des espaces ruraux de production agricole et situés al' intérieur des iles (le littoraJ et la montagne étaient des aires marginales). L' occupation des terres agricoles était basée sur des systemes a caractere extensif. Les ilots de population a I'intérieur vivaient le dos tourné a la mer. Exception faite des petits ports, la cate avait une rnaigre activité. Les capitales régionales, surtout Palma (Mayorque) concentraient la fonction directi ve sans que cela atteigne la société tra-ditionnelle. A I'aubedu tourisme,etmalgré la persistance du modele traditionnel agraire, la période des années 50 représente une étape transitoire, avec des effets territoriaux importants. Le secteurprimaire perd une grande partie de ses effectifs au profit d' autres secteurs entrainant un exode rural vers les zones urbaines les plus dynamiques. C' est le début du boom hótelier aux environs de Palma.

Etudes de cas et réflexions . Littoral terrestre et intérieur

TOURISME DE MASSE El DÉCADENCE AGRICOLE (1960-1973)

En 1960débute la grande vague du tourisme qui augmente progressivement jusqu' a la crise économique de 1973. Dans les Baléares, la spécialisation économique basée sur le tourisme de masse joue le róle de facteur de changement du modele économique et territorial qui débouche sur laconstitution d'unesociété urbaineetde services. Le tourisme de masse apparait comrne une conséquence des échanges opérés de l' extérieur plus que comrne un processus a caractere endogene, La croissanee de l' éconornie en Europe Occidentale, ainsi que le développement des moyens de transport (surtout l' av ion) favorisent l' arrivée de grands contingents de touristes dans les régions périphériques de l'Europe du sud a la recherche du soleil et desplages. L' irnage des Baléares (beauté du Iittoral, douceur du climat, société traditionnelJe et bas niveau de vie, proximité géographique) est extréme-ment favorable. Le développement d' une éconornie tres spécialisée dans les services touristiques el dépendante de la conjoncture extérieure, a ainsi bouleversé le modele traditionnel. L'omniprésente agriculture pluviale extensiveentraitdans un déclin irréversible, lais-


MILlEUX INSULAIRES

sant la place aux cultures intensives irriguées, pour réponclre a la demande du nouveau marché urbain et touristique. Le transfert de la population active vers la construction et les services, directement ou indirectementreliés al' activité touristique, vidait ainsi les actifs des zones rurales. Entre 1960et 1973, ledéveloppement du tourisme est concentré sur le littoral. Globalement, le changement du modele tenitorial se caractérise a la fois par l' accroissement des zones urbaines dans une dynamique du littoral et par la marginalisation des espaces agricoles. Les .espaces ruraux, qui avaient été le support de l' économie traditionnelle, perdent leur róle principal et se convertissent en réserves de résidences de loisirs ou d' espaces naturels protégés.

TOURISME, ABANDON

RÉSIDENCE El DE L'AGRICUL-

saturation des anciennes zones touristiques littorales, de nouvelles se créent. Des 1985, on constate un vieillisse-ment alarmant de la population acti ve dans le secteur primaire et un recul des exploitations iniguées auparavant rentables. C' est le début d' un abandon généralisé de l' agriculture. L' altemative au processus de «fossilisation» des paysages et des activités dans les zones rurales est représentée par l'agriculture a temps partiel et lejardinage de loisirs. En mérne temps, l' expansion des grandes zones urbaines s'intensifie. Dans les espaces ruraux, la colonisation urbaine prend la forme de résidences secondaires ou principales destinées a la population locale. C'estaussi I'anivéedes premiers résidents étrangers al' intérieur des terres et le début du tourisme rural.

URBANISATION

RURALE El

SOCIÉTÉ TOURISTIQUE

TU RE (1980-1990)

(1990-2000)

Dans les années 80, apres une période de stagnation etde baisse, on constate une nouvelle période de croissance du tourisme de masse. A l'organisation hóteliere se substitue progressivementcelle des appartements légaux (ou illégaux) et pour répondre a la

Ces dernieres années, cette spécialisation touristique s' est maintenue. La disparition des activités rurales devient un fait incontestable (bien que nuancé par l' agriculture a temps partiel et lejardinage de loisirs). La fonction résidentielle dans les

Répartition des établissements hiiteliers sur /'i/e de Mayorque DISTRIBUCIÓN DE AGROTURISMOS EN LA ISLA DE MALWRCA

y HOTELES

RURALES

ft4~l!l"''''

N

A

Plv.as ofenedas •

0-4

l·10

11-16

.,.,. .11-2>

_ 10

protegidos

15 Kms

f\IiIne~,..-.,...*_ •••c-

Espacios

••J_

••

u..-•........•. ,

El CAPACITE DE CHARGE

zones rurales se consolide, aussi bien pour la population locale que pour les résidents étrangers, et le processus d'urba-nisation des campagnes se généralise. La derniere phase du processus d' urbanisation des carnpagnes a été spécialement étudiée par Jaume Binimelis Sébastien (1996) qui releventl' apparition d'un agent significatif de la colonisation tenitoriale, celui de l' accroissement des établissements d' éco-tourisme,

Le tourisme rural dans la derniere étape de la définition du modele territorial Mayorque

a

Le tourisme rural et l' éco-tourisme forment la partie de ce que communément l'on nomme le tourisme altematif (expressionquidésignel'ensembledel'offretouristique). En principe, le tourisme rural et l' éco-tourisme sont concus comme des dispositifs de relance sociale et économique des zones rurales défavorisées. lis constituent des formes d' offres touristiques favorisées par Bruxelles pourdiminuer l' exode rural et pour offrir une altemati ve a la sauvegarde du patrirnoineculturel et paysager des espaces agraires. Sous réserve de validation, nous considérons que les théories mentionnées ci-dessus ne concement que le tourisme rural et l' éco-tourisme dans I'ile de Mayorque. De notre point de vue, le tourisme rural et l' écotourisme sont des typologies de l'offre touristique qui engendrent la derniere étape dans la construction du modele tenitorial d' origine touristique sur Mayorque. La deuxieme phase de la définition du modele tenitorial se caractérise done par la colonisation des espaces ruraux al' intérieur de l'ile. C' est un processus d' origine urbaine qui transforme les zones agricoles paupérisées en zones résidentielles temporaires ou per-manentes. La demande provient aussi bien de la population locale

63


, (surtout de Palma, princi pal émetteur de demandes urbanistiques), que des résidents étrangers en augmentation depuis les années 1990. Le processus d' urba-nisation rurale se base sur l' utilisation des terres en zones résidentielles comme principal moteur du changement des es paces ruraux de l' intérieur. Néanmoins, nous considérons que le tourisme rural et l'éco-tourisme doiventétreintégrésdansladerniereétape de l' arnénagement du territoire en tant que nouvel élément de colonisation basé sur une nouvelle spécialisation du tourisme. lls suivent, en tantqu'offretowistique plus élitiste, un modele de développement et de comportement spatial tres proche de celui de la demande de résidences étrangeres, La majorité des installations du tourisme rural actuellement en acti vité a donc été créé dans les années 1990. Ainsi, il est possible de détecter différentes zones de prédilection pour le tourisme rural et l'écotourisme: a En premier lieu, la plus grande concentration d' établissements d' éco-tourisme et de tourisme rural se trouve dans la Serra de Tramuntana, surtout dans les communes situées aux alentours de l'axe «Palma-Soller». b Un second groupe d' établissements se situe dans les communes de l'est de l'ile, Il s'agitd'une zonea la topographie accidentée, par oü coulent «las serres de llevant». e Un troisieme groupe forme une ceinture autour du rivage de «Sa Rapita- Es Trenc», au sud de I'ile, comcidant avec un des rares sites oü le littoral a été protégé. d Un demier groupe d' établissements est localisé a proxirnité de «Randa» (dans le centre de I'He) ou de «Raiguer», le piémont de la «Serra de Tramuntana», dans l' axe «Palma-Alcudia». En résumé, le tourisme rural et l' écotourisme se situent dans les zones oü l'agriculture traditionnelJe a été abandonnée ou subsiste de rnaniere marginale. Par con-

64

tre, ce sont des zones privilégiées du point de vu)paysage (montagne et littora! sont toujours présents). Il existe un certain degré de correspondance spatiale entre le développement du tourisme rural et les aires protégées. En défmitive, a Mayorque, le nouveau modele de tourisme alternatif s' articule autour des aires protégées de la prédation urbaine et qui ont une qualité paysagere indéniable. Par conséquent, nous considérons que la disparition des activités agricoles et l' ani vée du tourisme rural et de l'écotourisme ne sontqu'une stratégie de survie de l'exploitation agraire farniliale qui n' estqu' une nouvelJe expression de l' offre touristique de masse etqui, a son tour, est orientée vers une demande socialement différenciée, utilisant l' irnage des aires protégées. Pendant ce temps, les petits espaces ruraux traditionnels de l' intérieur se trouventdans une situation de subsistance, sans doute transitoire, mais en dehors du processus global de transformation.

présentent un facteurde pénétration wbaine vers l' intérieur Dans les années 1990, le tourisrne et la demande résidentielJe se sont concentrés dans les zones rurales en fonction de la qualité du paysage, sans que le tourisme rural ne réponde a une stratégie de survie des exploitations agricoles TIest pluíót l'expression d'une nouvelJe manifestation de l' offre touristique, présentée comme une alternati ve au tourisme de masse. L' expansion urbaine ettouristique vers l' intérieur des Iles apparait comme un processus de transformation a caractere globalisateur. Le secteur tertiaire et les services, en plus de l' activité touristique, repré-sentent un segment stratégique des iles Baléares puisqu' iJgénere entre 60 et 80 % de PIS dans l' économie insuJaire et occupe 65 % de la population active. En définiti ve, les Iles Baléares s' approchent du troisieme millénaire avec une structure économique et territoriale qui répond aux parametres d' une société urbaine et touristique.

Conclusion Le développement du tourisme de mas se dans les Iles Baléares s' est traduit par un modeled' organisation du territoire en opposition au modele traditionnel. Parallelement au déclin de l' activité agricole, l'évolution du secteur touristique a généré une nouvelle image territorialequi sedéfinie par une domination des grandes zones urbaines et une dynamisation des franges littorales. L' étape finale de ce processus est actuelJement la saturation des zones touristiques concentrées sur le littoral et la mise en placed'une politique globaled'urbanisation des espaces ruraux. Le demier chapitre de lacolonisation urbaine affecte pleinement les aires traditionnelJes de l' intérieur, surtout pour un usage résidentiel. Le tourisme rural et l'éco-tourisme (nouvelle forme de spécialisation du tourisme) re-

Etudes de cas et réflexions . Littoral terrestre et intérieur

Bibliographie BINIMELlS SEBASfI' 1., 1996. Caracteritmciá, tipificació ipautes de locauttuciá de les arees rururbanes a l'illa de Mallorca.- Departamentde Ciencies de la Terra Universitat de les llles Balears.Tesis Doctoral (inédita) (3 vols.). PImRNEll. C, 1989. Turisme iTerritori a les IIIes Balears. -Tesis Doctoral (inédita). Universitatde les mes Balears. PICOR ELL e, BENITEZ 1., GI ARD A., 1993. «Turismo, tenitorio y sociedad en las Islas Baleares».Comunicación (en prensa) presentada a Global Economics and Culture: lmplications for Tourism. Ethnographic Seaion onlslands. Malta, 1993. PICORNELL C, SEGUI J.M., 1989. Geografía Humana de las Islas Baleares.- Ed. Oikos-Tau. Barcekm

• 2


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE •••

LOGIQUES UTILITARISTES ET LOGIQUES SOCIALES: ASPECTS DE L'EXPANSION DE L'ELEVAGE BOVIN EN MILIEU MÉLANÉSIEN DE NOUVELLE-CALÉDONIE Patrick Pillan *

Résumé Les i'les et archipels d'Océanie

Abstraet

ne connnaissaient

pas de

production marchande avant que les Européens ne s'y installent et ne les colonisent. Dans des contextes et avec des modalités variables, les formes d'organisation

précoloniale-

Utilitarian and social logics: Aspects of the expansion of cattle breeding in the Melanesian surroundings in New Caledonia The islands and archpelagos in Oceania did not have com-

ou ce qui en tient lieu apres l' imposition des législations et

mercial production before Europeans took over the islands

des dispositions coloniales - y restent le référent de l' organi-

and colonized them. Within variable contexts and modalities,

sation sociale et de la production en milieu rural; me me trans-

the forms of pre-colonial organisation - or what stands of it

formées, les relations sociales y demeurent d'inflexion néo-

after colonial legislations and dispositions were laid down -

traditionnelles,

solidarités ou entraides ne

remain the referent of social organisation and production in

pas dans les échanges marchands ou utilisant

rural areas. Here, social relationships, even altered, keep a

ceux-ci a d'autres fins. Les mouvements identitaires et cultu-

neo-traditional bend, obligations, solidarities and mutual aids

s'inscrivant

les obligations,

rels qui se sont multipliés de par le monde depuis les années

do not fit in commercial trade or else use it for other purposes.

1960 - et en Océanie plus particulierement dan s le courant des

The identification and cultural movements which increased

années J 970 - ainsi que les enjeux économiques et politiques

throughout the world since the sixties, and more specifically

internes aux populations sont allés dans le me me sens. De ce

in Oceania during the se ven ties, as well as the economical

fait, il n'existe fréquemment pas encore de petites paysanne-

interests and the politics connected to the populations, all

rie en Océanie, a savoir d'individus travaillant dans le cadre

followed the same line. Therefore, most of the time there are

"d'une exploitation" et se dédiant de maniere centrale a la

no small peasantry in Oceania that is individuals working

production marchande ; un support de la production aussi

within the structure of a farm to the production of surplus for

essentiel que la terre est souvent d'appropriation

the market. A medium of production as essential as land is

supra-fami-

liale, dépassant le cadre de I'unité domestique, lorsqu' il n' est

often of supra-family appropriation, outgrowing the limits of

pas de ven u d'appropriation

plus ou moins "communautaire"

domestic

dan s le cadre d'évolutions

anciennes ou d'enjeux récents. II

unity, sometimes

" community " appropriation

becoming

more or less a

within the context of ancient

est devenu I'objet d'enjeux majeurs. Dans de tels contextes,

evolutions or new stakes. It has become the subject of major

les politiques et les opérations de développement

interests. Within such contexts, politics and development

ont été

souvent en porte a faux au regard du milieu social ou détour-

process have often been particularly out of place from the

nées a d'autres fins. Les élevages bovins de groupe chez les

social point of view, or they were di verted for other purposes.

montrent aquel point la

Melanesian group cattle breeders in New Caledonia show

mobilisation de la force de travail ou celle de la terre tout

how far the mobilisation of the labour forces, the kind of

Mélanésiens de Nouvelle-Calédonie

comme la nature des engagements dans la production peu-

involvement

vent y étre éloignées des visées et des conceptions qui sont

stocking rate can be from the aims and ideas which are those

celles des services de développement.

of the departments for development.

Mots clés: Océanie, Nouvelle Calédonie, élevage bovin, dé-

Key words: Oceania,

veloppement, logique sociales, capacité de charge.

development, social trends, stocking rateo

* ¡RD,

Centre ORSTOM de Montpel/ier,

LEA B.P. 5045, 34032 Montpel/ier

in production,

or the concerns

New Caledonia,

in terms of

cattle breeding,

cedex 1, France .

65


I

T"u.-"unL

M1

L'impératif du développement

Apercus sur l' élevage bovin en Nouvelle Calédonie

analyses critiques de la notion de «développement», des résupposés dont elle est porteuse et des opérations auxquelles elle a pu donner lieu abondentdans les écrits sociologiques et anthropolo-giques. Le «développement» qui, depuis le début des années 1960 estdevenu un impératif politiqueet idéologique est avant tout intervention d' états ou d' instances intemationales sur des ruraux des pays aujourd'hui dits «du Sud» (et pour certains «moins développés»), ceux-la mérnes qui étaient autrefoisdénommés «sous-déve-loppés». De ces actions concues a des fins d' accroissement de la production, sociologues et anthropo-logues ont montré depuis longtemps qu' elles confrontaient souvent deux logiques, celle instrumentale des promoteurs et des concepteurs des poli tiques de développement (dans laquelle les acteurs sociaux sont percus comme autant «d'homo oeconomicus» inscrits dans des universaux) et celles souvent fort différentes des «sociétés» qui en font l' objet : dépasser cette distorsion inhérente a la nature politique du développement a des lors amené les chercheurs a envisager ces interventions comme des modalités contemporaines du changement social, comme des preces de transformation sociale (Olivier de Sardan, 1997). Avec l' accumulation des connaissanees, l' objecti vation des relations sociales et l' extension des pratiques démocratiques, une autre dimension a dü étre considérée, celled'individus se pensant comme «les acteurs de leur histoire», et pouvant faire autant d' enjeux des interventions les plus diverses. C'estdansce cadre analytique que nous voudrions replacer certains aspects des groupements d' élevage bovin fonnalisés en milieu mélanésien de Nouvelle-CaIédonie au regard de la notion de «capacité de charge».

L'élevage bovin occupe une place centrale dans I'histoire de la Nouvelle-Calédonie, tant au regard des relations entre colonisateurs et populations autochtones qu'acelui de1a mise en valew·agricoledu pays. Ces ten-esdevenues francaises pour l'essentiel en 1853 se composent d' une Ile principaleappelée«Grande-Terre»etd'un archipel des «lles Loyauté» éloignéde cent kilornetres environ ; leur superficie est de 19 100km', laGrande-Terrecomptant pour 168~ krrr.Imroduirs dans lesannées 1840 dans un environnement n' ayant compris avant les atterrages européens d'autres animaux de l' ordre des mammiferes que des rats et des chauve-sowis, les bovidés deviendront le support de la production agricole dominante en valeur et en superficies. Longtemps pratiqué de maniere extensive, l' élevage s' installe tres tót sur ses espaces d' élection en prenant appui sur la volonté de I'Etat d' une mise en va-

U

66

Etudes de cas et réflexions . Littoral terrestre et intérieur

leur rapide de la colonie et sur la modicité du coüt de terres captées aux autochtones. Une forte demande de viande suscitée par l' installation d' un bagne en 1864 étendra I'activité d'autant plus rapidement. En 1881 , le cheptel est de 104(XX) tétes alors qu'il estde 121 (XX) en 1983. PIusieurs traits ressortent de cette périade initiale dont certains demeurent. En premier lieu, la constitution de grands domaines fonciersde plusieurs milliersd'hectares consacrés a l' élevage sous la forme de sociétés détenues par les famiJles européennes les plus fortunées - ceci le plus souvent en association avec des intéréts en secteur rninier et dans le domaine du commerce et de l' import-export. Egalement, la prépondérance des Européens en matiere d' élevage, celui-ci ayant été longtemps leurapanage pour devenir commun a une majorité d' entre eux avec les reconversions entraínées apres la Seconde Guerre mondiale par l'effondrement de la caféiculture et par la montée d' un désengagement agricole multipliant les doubleactifs; I'élevageest aussi devenu I'acti-


MILlEUX INSULAIRES

vité par excellence des ruraux européens du fait de la genere coloniale de l'occupation contemporaine du pays et de la constitution d' une réserve fonciere domaniale pouvant faire l' objet de demandes: l' attrait des Européens pour les propriétés «de brousse» sur lesquelles pécher, chasser et lácher des bovidés a de méme multiplié les troupeaux. L' élevage est devenu emblématiquedu ebroussard» et les «rodéos» ont été intégrés au folklore. De l' implantation colonialedatentaussi les positions foncieres de longue durée des Européens et des autochtones :faites de disproportions quantitatives etqualitatives, elJes débouchent dans les années 1960 sur des compétitions de plus en plus aigues pour les terres domaniales puis a la fin des années 1970 sur des occupations de ten-es de colons. Les réformes foncieres de 1978, de 1982 et de 1985 en sont l' aboutissement. Contrainte par ce partage foncier, la présence des bovins en milieu mélanésien est longtemps restée faible, etdévolue aux tribus de montagne oü les éleveurs européens ont recruté tres tót (pillon, 1989a). Géographie et histoire ont ainsi débouché sur une production marquée par l' opposition entre une cóte ouest de piedmonts et de plaines a1luviales étendues ou se concentre le bétail et une cóteest dont les bandes cótieres n'accueillentque peu d'animaux. Des les origines, l'élevage européen a accaparé la prerniere, notarnment sous la forme des grandes propriétés ; la seconde estdevenue ultérieurement le lieu d'irnplantation d'un petitcolonat, a l'origine plus agriculteur qu' éleveur. L'élevage mélanésien a été longtemps restreint aux zones de montagne avant que les affrontements politiques de 1984-1985 et que les réformes foncieres ne redistribuent les irnplantations par le départ des petits colons de la cóte est et le transfert de propriétés européennes de la cóte ouest. La dualité entre élevages européens et méla-nésiens reste toutefois marquée, les premiers constituant une plus forte proportion du cheptel, étant encore largement représentés sur les ter-

res les plus propices, étantdanscertaines limites plus étendus, plus capitalisés, plus intensifs et plus performants que les seconds (Delzescaux, 1991); les deux populations contrastent également a grands traits une production et une propriété individuelles de la terre et une production et une propriété de groupe qui ne sont pas «radiuonnelles» pour autant. Dans lecadred'uneagriculturequi ne fournit plus depuis la fin des années 1960 qu' une faible part du produit intérieur brut, l' élevage bovin conserve sa place prépondérante : en 1991, le nombre de bovidés est estimé a 125 (XX) téres réparties sur 216 (XX) ha, soitsur94 % de la surfaceagricole utile (I.T.S.E.E., 1993). Dans le courant des années 1960, des efforts d'intensification ont été accomplis, qui se sont accentués avec le retoumement de la conjoncture économique de la seconde moitié des années 1970; ils ont surtout été le fait d' éleveurs européens (Delzescaux, 1991). Plusieurs facteurs d' ordre géographique, social et économique font ainsi que nornbred' élevages de Nouvel1e-Calédonie sont

El CAPACITÉ DE CHARGE

menés selon des approches extensives a la fin des années 1990. Au recensement de 1996, la population est estimée a 196 836 personnes composées a 34, l % d'Européens, a 44, 1% de Mélanésiens et a 9% de WaIlisiens et Futuniens (AhmedMichaux.Roos, 1997: 22).

Les groupements d'élevage formalisés en milieu mélanésien RÉFORMES FONCIERES, MISE EN VALEUR El ENCADREMENT DU SECTEUR RURAL

Des prodromes des années 1860 a la périodecontemporaine, I'élevageen mi. lieu mélanésien s' est effectué dans des conditions diversifiées quant aux caractéristiques des acteurs, aux modalités d' exercice, aux acces fonciers, au cadre juridique, al' encadrement technique et aux moyens financiers ; les parametres ont été ceux des élevages individuels et des éleE1eveur Mélanésien

67


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A

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vages de groupe, de la production en réserve ou sur terres privées, des pratiques informelles ou de celles associées a un statut juridique, a un encadrement technique et a des aides financieres (Pillon, 1989a). Cette recomposition de l' espace social qui se dessine avec la création du prernier organisme d' aide au développement en milieu rural mélanésien peu avant 1978 s' institutionnalise avec la rnise en place des provinces en 1985, et plus encore avec celle des régions en 1989 (Pillon, 1989b). Elle a présidé aux transferts de terres inscrits dans les dispositions de 1982 et de 1985 qui ont été liés deJacto ou par réglementation a des obligations de rnise en valeur.Entre 1978et 1988, l00(xx)hectares environ ont changé de mains, les superficies attribuées revenant a des Mélanésiens (Mapou, 1998) ;les transferts s' accompagnent d' autant plus facilement de la création de groupements que les terres sont déja consacrées al' élevage. Les groupements devant revétir une forme juridique afin de bénéficier d' aides et de subventions, le statut prépondérant a d' abord étécelui du «Groupement d'intérét économique» (ou GIE) jusqu' a ce que les dispositions de 1985 et que la rnise en place des provinces ne généralisent le «Groupemenidedroapaniculierlocal» (ou GDPL) :alorsqu'il n'existait pratiquement que des associations informelles d' élevage en secteur mélanésien jusqu' au rnilieu des années 1970, les réformes foncieres multiplient les groupements a statut juridique, les provinces en faisant a leur tour un cadre légald' intervention.Au nombred' unedemidouzaineen 1975etd' une vingtaineen 1978, les groupements d' élevage formalisés atteignent la centaine en 1987 ; ils sont estimésa 120 en 1992pourla seuleProvince nord a majorité démographique mélanésienne (loor de cóie, 1992: 6). L'expansion de la formule est toutefois souvent allée de paireavec des difficultés de fonctionnernent et de nécessaires évolutions de méme qu' avec la faiblesse des revenus monétaires dégagés et redistribués.

68

LOGIQUES DE DÉVELOPPEMENT El LOGIQUES SOCIALES

A la fin des années 1990, les groupements d'élevage formalisés en milieu mélanésien datent pour les plus anciens de pres de vingt ans. Les études technicoéconorniques indiquent alors que certains d' entre eux ont intégré la fraction des élevages les plus performants du pays au regard des marges brutes et des revenus a I'hectare. Arriventa leursuitedes groupements qui, bien que composés de membres dotés d'une maítrise technique suffisante relevent des pratiques extensi ves et dégagent peu d' argent. La demiere catégorie est faite de groupes en proie a de profondes dissensions dontles activités sont au point mort (Delzescaux, 1991 :47). Ces groupements n' en perdurent pas moins pour autant, ce qui doit ouvrir l' approche analytique a d' autres considérations. En effet, bien que les groupements d' élevage formalisés aient été générés par un contexte ayant débouché sur]' inscription de leur finalité dans la rationalité économi-

Eludes de cas et réflexions . Littoral terrestre el intérieur

que, il doit étre affirmé que nul ne saurait saisir le fonctionnement des espaces sociaux qu' ils constituent en dehors de significations, de pratiquesetd'enjeux d'une tout autre nature - ceci restant vrai rnérne si la dirnension éconornique a pu intervenir dans la constitution de tel ou tel d' entre eux, et méme s' il en est qui dégagent des marges appréciables (pillon, 1993). En secteur rural mélanésien en effet, les phénornenes ne relevant pas des conduites reconnues aux acteurs sociaux par la théorie éconornique classique sont nombreux, sans qu'il puisseétredit pourautant quel'éconorniemarchanclen'yrecompose pas les relations sociales (pillon, 1989a, 1993). Dans lacontinuitédecequi a pu érre noté au débutdu mouvement, nombre de groupements formalisés ne distribuent que fort peu d' argent, les bénéfices étant utilisés aux remboursements d' emprunts, aux versements de quelque salaire et plus fréquernment encore a des rémuné-rations ala tache; certains d'entreeux recourent encore a une main-d' oeuvre bénévole, la pratique ayant été autrefois générale (Pillon, Ward, 1990: 54-55). De méme les accumulations monétaires éventuellement dégagées au fil des année ne sont-elles pas investies. La dimension la plus marquante du fonctionnement des groupements reste toutefois que méme ceux dotés des assises économiques les plus larges ne rapportent que de faibles sornmes a leurs ayant -droit :de maniere générale en effet, ils ne renvoient pas a des associations de producteurs mais aux composantes paren tales dont celJes-ci sont l'émanation : le nombre de membres n' est en rien lié aux capacités éconorniques des élevages ni rnérne a la quantité de travail nécessaire. Quel que soit le statut juridique du groupement - et, dans le cas des GIE, le nombre de membres affiché -, ce sont des groupes de parenté lignagere associés entre eux selon des modalités différentes pouvant aller jusqu'a recouvrir l' ensemble d' une tribu qui sont les tenants des groupements (pillon, 1993). Ceci rend compte

• ,


MILlEUX INSULAIRES

de pratiques aussi di verses que l' importance du bénévolat, que le traitement «social» de l' acres aux rémunérations (effectifs sumuméraires, travaux réservés a telle ou telle catégorie d' actifs) ou que des distributions de profit indépendantes du travail accompli jusqu' a étre affectées a des fins communautaires (et ainsi bénéficier a des individus n' ayant pas travaillé). Relevant de la catégorie que la théorie éconornique appréhenderait comme la relation entre travail etrémunération est la pratique des plus répandues des don s d' animaux aux membres effectifs ou putatifs du groupement ; ces bétes ne sont alors pas pour autant retirées du troupeau commun, des animaux d' appropriation individuelle d' une autre origine pouvant méme s' y ajouter. TIen découle que les páturages sur lesquels reposent projections et rembourse-ments d' emprunt servent a nourrir des retes d' appropriation individuel1e qui sont menées avec le troupeau au titre des frais généraux ; une surcharge en découle généralement. De tels exemples illustrent que deux logiques sociales sont a l' oeuvre, et que la rationalité sous-jacente aux élevages formalisés est ailleurs que dans les visées éconorniques ayant présidé au lancement du mouvement, a savoir dans le rapport parental a la terre et dans la construction d'un espace territorialetd'un ordre socio-politique fait de relations statutaires et fonctionnelles entre les composantes parentales constitutives des groupements. En effet, la position qu' un lignage occupe au regard de la terre sur laquelle se déroule l' acti vité comme au regard de l' ordre socio-politique du territoire local sont les deux dirnensions des forces et des faiblesses statutaires de ce groupe de parenté vis a vis des autres. Avec l' élevage, le droit a la terre en est venu a commander l' acces aux produits et aux productions du fait que des dissensions ancrées dans les disparités foncieres réduiraient l' activité a néant (pillon, 1993 :715-720) ;ceci, allié a l' autonomiedes lignages ou des hiérarchies lignageres qui faitqu'un membred'une

El CAPACITÉ DE CHARGE

Bibliographie AHMf1)-MICHAUXP., Roos W. 1997.lmages de la pcpulation de la Nouvelle-Calédonie. Principaux résultats du recensement de 1996. Institut national de la statistique et des 8:udes économiques, Institut tenitorial de la statistique etdes 8:udeséconomiques, coll. : «ñémograpñie el sodété», n" 55, 64 p. OEU'ESCAUXO. 1991. Elevage bovin en NouvelleCalédonie,(ProvinceNorcl).Institutd'élevageetde médecine vétérinairedes pays tropicaux du Centrede Coo¡:iration intemationaleen rechen::heagronomique poor ledéveloprerrent(CIRAD), Tenitoirede laNoovelle-Calédonie et dépendances (Provinoe Nord), 57 pages, plusannexes. INSTITUT TERRITORIAL DE LA STATISTIQUEET DESETUDES ÉCONOMIQUES(ITSEE). 1993. Recensement généraJ agricole de 1991. Inventaire agricolecommlUlal.Nouméa,Notesetdocumentsn¡64, 86 p.,+annexes,

paren té ne saurait étre dirigé par un ressortissantd'uneautre parenté, rend compte des situations de blocage qui confrontent nombre de groupements. TIest ainsi aisé de comprendre que tant la notion de «capacité de charge» que le traitement des questions d' intensification ou d' accroissement de la capitalisation que les services techniques envisagenttót ou tard sont d' application délicate dans de tels contextes sociaux. Assez fréquemment d' ailleurs, les bases mémes sur lesquelles les groupements se sont établis ont résulté de luttes politiques ou parentales inscrites pour les prernieres dans des projets sociaux alternatifs qui ne sont pas neutres au regard des pratiques éconorniques puisqu' ils visent toujours - quoique sous des formes différentes -le maintien de formes de contróle de groupe de la terre, et tres fréquemment de son utilisation (Pillon, L993). Ce sont de tel1esdirnensions qui conditionnent pourtant l' avenir du projet qu' el1es se donnent que des notions telles que «le développement» ou que «la capacité de charge» opacifient.

MAfu¡L.1998.De 1978 aux Accords de Matignon, dixannéesderéfonnefonciereenNoovelle.caIédonie. In :LaNouvel/e-Calédoniealacroiséedeschemins: rééquilibmge, aménagement euiéveloppemem, SOllS la direction de Gill::ertDavid, DominiqueGuillaudetPatrickPillon. Insinrfraocasderecbercbepcurledéveloprementenc:cqiration(ORSTOM.),Sociétédes Océaoises, 8:udes des sociétés kanak. (Souspresse.) OUVIER DESARDANJ. -P. 1997. Anthropologie et déveloprement Essai en socio-anthro¡xJlogiedu changementsocial.APAD-Karthala,221 p. PIum P. I989a D'un modede produirea l'autre: un siecled' élevage bovin mélanésien en Noovelle-Calédonie. In: La France et lePacifique, sous ladirection dePauldeDeckkeretdePierre-YvesTou1lelan, Revue francaised'histoired'Outre-rrer, t LXXVI, n¡ 284285, pp. :511-529. 1989b. Mobilisations ethniques et genesedes organismesdedéveloprementdu milieu rural mélanésien. In: Nouvelle-Calédonie Essais sur le nationalisme el ladépendance; éditépar Miclrel S¡:en:er,A1an'Mnrl, John Conrell, L' Hannattan, Paris, pp. : 159-185. 1993. Groupements d' élevage mélanésiens et recompositions sociales en Nouvelle-Calédonie. Cahiers des Sciences humaines, 29, 4: 713-730. PILLON,P.,WARD,A. 1990. Groupementsd'élevage autochtonesdans le Pacifique sud. Troisétudesdecas :Noovelle-Zélande,Noovelle-Calédonie, PapouasieNouvelle-Guinée. Editions de I'ORSTOM, coll. : «Étudeseltheses»,Institut~derechen::hescientifique pour le développement en coopération (ORSIDM),I17p. TCJJRCECÓTE. 1992. Dossierélevage: Les GIEd' élevage s' essouffient. Réflexion sur des structures en mutation, n" 25, p. 6-9.

69


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EAU I SUL , E , OPICAL H Ml ITERRANHN

70 Etudes de cas et réflexions - Littoral terrestre et intérieur


MILlEUX INSULAIRES El CAPAC!H

DE CHARCE •••

UN MILIEU CONTINENTAL ENCLAVE: LA CUVETTE DU LAC DE R'KIZ (MAURITANIE) G Forgiarini, F Besse, l. Toure et G Mandret

Résumé

*

Abstraet A continentallandlocked surroundings: the basin of lake R'Kiz in Mauritania

La notion d' insularité s' applique en général aux iles océa-

The notion of insularity generally applies to oceanic islands.

niques. Pourtant de nombreux milieux continentaux enclavés

However, many continental landlocked surroundings, as a

relevent d'une problématique insulaire du fait de leur isole-

result oftheir isolation, come within the insular problematics.

ment. La cuvette du lac de R' Kiz en Mauritanie en est l' exem-

The basin ofthe lake R'Kiz in Mauritania is the very exemple

pie mérne. De nombreuses analogies avec les iles océanien-

of a continental insular surroundings. Numerous analogies

nes sont relevées : es pace restreint, fragilité du milieu, res-

with the oceanic islands can be found (restricted area, fragility

sources Iimitées, isolement... La présence du lac et des syste-

of the surroundings, limited resources, isolation'«). The lake

. mes de production qu'il induit font de cette cuvette un póle

and the production systems induced by it, lead this basin to

d' attraction pour la production agricole et l' élevage. La capacité de charge tres élevée de ce milieu, par rapport páturages dunaires environnants,

a celle

des

attire tous les troupeaux

de la région au risque d'étre dépassée tres rapidement et de

become a centre of attraction for agricultural production and cattle breeding. The very high stocking rate of this area, compared to the stocking rate of the surrounding sand dune pastures, attracts all the cattle of the region, and the risk of

irréversible des ressources

being very quickly overload might lead to irreversible damages

fourrageres naturelles. L' utilisation de modeles de gestion

of the natural fodder resources. The use of insular manage-

déboucher sur une dégradation

des milieux insulaires serait nécessaire pour assurer un dé ve-

ment patterns would be necessary to insure a sustainable

loppement durable de ce type de milieu continental enclavé.

development

La cartographie de la cuvette a permis de mettre en évidence

surroundings.

la dynamique des flux sur cet espace particulier.

the dynamic of the flows in this particular area.

words:

of this type of continental The cartography

landlocked

of this basin has revealed

Motsclés: milieu enclavé, milieu continental, Mauritanie, R'Kiz,

Key

SIG, páturages, élevage, milieu insulaire, capacité de charge.

surroundings, Mauritania, R' Kiz basin, GIS, pasture, cattle

landlocked

surroudings,

continental

breeding, insular surroundings, stocking rateo

* ORAD, départements EMVT, FORET et TERA, Campus international de Baillarguet, BP 5035, 34032 Montpellier Cedexl, France.

71


,

I

III

Présentation

Identification de la capacité charge par I'outil SIG

L

L'OUTIL

a cuvette du lac de R'kiz est située dans la vallée fossile de l' Aftout ech Chergui (ancien litdu fleuveSénégal)au milieu d'unesuccession de dunes et dépressions interdunaires a1ignées parallelementdans la méme orientation que les vents dorninants : nord est - sud ouest. Cette grande région dunaire, couvre une superficied' enviran 500 ()()()ha oü la cuvette du lac de R'kiz ne représente que 8 533 ha. Elle a une a1titudeinférieure au niveau de la mer, etest inondée par le Laouvaja, défluentdu fleuve Sénégal. Cette succession de dunes et dépressions interdunaires accueille 114 villages représentant une popuJation totale de J03 663 habitants (BesseF., etal., 1996).

SIG

La cuvettedu Jac de R'Kiza fait l' objet d'unecartographie préciseetd'un inventaire floristique exhaustif (Forgiarini et al, 1994et 1995). Complé-tées par les limites des ouvrages hydrauliques et celles des parcelJes cultivées, ces données ont formé la base d' un systeme d' information géographique(fouré, 1997). CeSIGconstitue un outil de gestion, de prévision etde suivi indispensable pour un milieu fragiJe oü se cótoient quotidiennement des agriculteurs et des éleveurs . Les enquétes de terrain, saisies dans une base de données, peuvent étre réactualisées en cas de changements dans l'occupation du sol ou dans les sysremes de production.

L'outiJ SIG permet de représenter l' état des ressources naturelJes et de l'environnementet leurévolution afinde mieux identifier la capacité de charge du milieu. ]]est un instrument indispensable de dialogue et d'aidea la prisededécision colJectivedans la gestion de cette cuvette. L' acres al' information spatialisée permet d' orienter la décision des acteurs dans la réglernentation des usages et la gestion du milieu SW" cetespace. La carte numérisée sous SIG de l'occupation du sol, représente onze unités cartographiques identifiées par l'émdedeterrain et leur limites par photo-interprétation, et désignées par le nom de la plante qui domine dans le cortege floristique. D'une superficie de 5741 ha la cuvette oriental e est subdivisée en quatre bassins séparés par des digues, d' a1titudedégressive depuis le déversoir de controle de Gouelid. Les cultures sont localisées es-

Csrte de la cuvette orientale du lac de R'Kiz 1520W

1515

1515

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Cultures

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Indigofera el Cypéracées

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72 Etudes de cas et réflexions - Littoral terrestre et intérieur

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Cypéracées Indigofera

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Riz sauvage el Cypéracées Riz sauvage (parfois avec Vossia) Bourgou el Sol nu

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D'apres

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MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ DE CHARGE

nent aux besoins de cette population, a leur cheptel et aux nomades de passage. De ce fait, la strate herbeuse de certaines zones, relativement importantes et éloignées des points d' eaux, reste intacte et non exploitée. La vallée du fleuve Sénégal, a travers ses hydrosystemes les plus septentrionaux comme le lac de R'kiz, est menacée par des processus érosifs éoliens propres aux conditions désertiques (Dieng, 1997 ; Rognon, 1997) et qui sont accentués par une forte pression animale autour des puits dans un environnement pastoral composé de páturages naturels faits de steppes arbustives épineuses.

sentiellement dans les parties hautes et périphériques de la cuvette. Les cypéracées sont largement dominantes dans la partie centrale. Les cypéracées composées de trois especes ptincipales, préjudiciables pour la culture, non appétées par les animaux et de faible valeur fourragere, sont envahissantes. Le bourgou I et le riz sauvage parfois associés a d' autres especes sont localisés dans la zone d' inondation prolongée sur sols argileux. Le sol nu est situé dans le bassin le plus profond, mais pas exclusivement, car on le trouve aussi en mélange avec le bourgou au fond du chenal d' inondation. Les lndigcfera sont localisées dans la séquence écologique de bordure du lac.

FRAGILITÉ

Capacité de char~e du milieu enclave La cuvettedu lacdeR'Kizconstitue un póle d' attraction important pour le milieu extérieur. La présence du lac et des systemes d' exploitation des ressources qu' elle induit, entraine des flux centripetes du fait du potentiel de développement de cette cuvette pour la région environnante. Avant la construction des barrages de Diama et de Manantali sur le fleuve Sénégal, le lacde R'Kizconstimaitdéjaun point depassageetderassemble-mentdestroupeaux de bovins, de dromadaires, de chevres et de moutons. Apres l' achevement des travaux et la domestication des crues, l'importancedu plan d'eau du lac s'est considérable-ment accrue, tant pour le maintien du bétail que pour la production vivriere, Le systeme est done remarquable parsa bipolarité, production fourragere et production agricole, dan s un environnement social caractérisé par le fait que la cuvette n' est habitée que pendant la période de labour et de récolte, les agriculteurs retoumant ensuite dans leurs villages respectifs disséminés dans un rayon de 40 a50km

Cette cuvette est occupée par des formations végétales hydrophiles pouvant avoir, selon leur cortege floristique, temporairement une valeur et une productivité fourragere exceUentes (de l' ordre de 15 a 20 tonnes de matiere fourragere seche par hectare, soit dix fois plus que la production a J'hectaredu milieu dunaire). Leur intérét vient surtout de leur entrée en production et en accessibilité en saison seche, apres épuisement des páturages dunaires dont elles assurent le relais. La cuvette attire ainsi 76% du cheptel bovin de la région pendant six mois sur une surface qui ne représente que 1,9% de la zone.

Analogies entre milieu continental enclave et milieu insulaire ISOLEMENT

Dans un milieu dunaire caractérisé par l' absence d' eaux de surface, cette cuvette constitue un póle d' attraction tres fort (ile verte au milieu d' un environnement aride) ou de nombreux puits et puisards subvien-

La pérennité des ressources agro-pastorales de cette cuvette est menacée, d' une part par la surexploitation des surfaces páturables par les troupeaux qui convergent de toute la région et, d' autre part, par le niveau d' inondation contrólé al' amont du fleuve Sénégal, dont les conséquences écologiques sont importantes et sous estimées. Le bourgou et le riz sauvage, parfois associés a d' autres especes, représentent 15% de la superficie total e et sont localisés dans la zone d' inondation prolongée, sur sois argileux. IIs constituent les meilleurs páturages a partir de janvier-février et foumissent du fourrage au bétail de la région, a la période de soudure, ce qui représente une charge en bestiaux de 90000UB'P pour un milieu qui ne peut en supporter que 10fois moins. Les conséquences les plus spectaculaires du surpáturage et de l' inondation provoquée sur ces páturages sont la modification de la flore herbacée, notamment J'envahissement par les cypéracées, et la disparition des arbres et arbustes qui ne , Graminée «Echinocloe pyramidalis» Unité de Bétail Tropical

2

73


,

I

Mt

supportent pas l' inondation prolongée de leurs racines et la salinisation des terres par remontées capiJlaires.

RESSOURCES

LlMITÉES

L' envahissement de la zone inondable par les cypéracées, tres difficiles a éradiquer par les moyens traditionnels, est un handicap majeur pour la progression des cultures. Par ailleurs, 3 % de la superficie totale de la cuvette est en sol nu et improductif (partie basse). De ce fait, les cultures n' occupent que 32% de la superficie totale, alors qu' on prévoyait au début de l' aménagement hydro-agricole de cette cuvette la rnise en culture de la presque totalité de la superficie. Ces cultures sont localisées essentiellement cIans les parties hautes et périphériques de la cuvette. Certaines especes végétales de transition, comme les lndigoera; sont localisées dans la séquence écologique de bordure du lacque l' on défriche pourcultiveretqui représentent 13% de la superficie totale. Toutefois, cette espece participe activement au maintien de la fertilité et a la structuration du sol, et son éradication risque de fragiliser encore plus le milieu.

Le róle de régulation et de sauvegarde que joue cette cuvette de R'Kiz, par rapport a la pauvreté du rnilieu extérieur et aux risques de rupture dans la chaine alimentaire que ce dernier entraine, est a l'imagedel'ileprovidencequesefaisaient les voyageurs aux siecles précédents. TI n' est pas habituel d' aborder la gestion d'un espace enclavé en termes d' insularité. Pourtant iJest confronté aux mémes problemes de capacité de charge et de gestion de l' espace qu' une lle océanique. Les dynamiques sociales ne sont pas forcément identiques mais elles ont bien des points communs. La aussi l' information spatialisée permet de mieux appréhender la capacité de charge du milieu a l'échelle régionale, facilitant la participation des acteurs aux décisions stratégiques de gestion de l'espacedans lecadred'un équilibre entre la génération de plus values et une meilleure rnaitrise des risques.

Bibliographie BESSE F., PEYRE DE FABREGUES B., OULD CHEIKHAW., RCXJNON P., 1996. Prograrnme de ocveJ<wmentintégrédelaCJraryXrégiooduLa:de R' Kiz. CFD, CIRAD-Foret/CIRAD-EMVT, SONADE.R. Nogentsur Mame, 204 p. +cartes + anrexes. BESSEF 1995. Un projetdedéveJ<wment régional enMauritanie.LeRamooyantn033,p.I4-16.CJRAD. fore!,Nogentsur Mame Dm:JD., 1997. Morph<xIynamiqueéolienneetproblemesd'ensablementdanslavaIléedutJeuveSénégal- Etudes de cas :le lac Rkizet le Koundi. Tbese de l'universitéBordeaux3,Bordeaux. FORGIARINI0., PEYREDEFABREGUESB., 1995. Cartesde l'occupation du sol du Lacde R'Kiz. CFD,CJRAD.EMVf,SONADERMaisonsAlfat, 2cartesau 112S(XX). FORGIARINI 0., PEYRE DE FABREGUES B., BESSE F. 1994. Carte des unités paysages et géomorphologiques de la "Grande région de R' Kiz.CFD, CIRAD-Foret/CIRAD-EMVT, SO. ADE.R.MaisonsAlfort,p.IO+2cartesau 1/ lOO(XX). RCXJI'O"< P. 1997. L'avancée des dunes. Rev.: Pour la Scienceno235,p.I())..I07.Paris TOUREI.,1997. Cartenurnériquede I'occupationdu sol dul.ac de R'Kiz,Cuvetteorientale.CFD,CIRAJ). EMVf,SONADER Mootpellier.

Conclusion La notion d' insularité est bien souvent attachée a la représentation d'un milieu isolé dans un environnement océanique. Dans le cas de la cuvette du lac de R' Kiz le rnilieu est enclavé dans un ensemble dunaire etrépond aux mémes dynamiques liées a I'isolement, a I'espace restreint et tres fragile, aux ressources limitées et a la compétition pour l' espace qu'un rnilieu insulaire.Il y a des analogies dans la gestion des flux entre un milieu continental enclavé et un milieu insulaire océanique.

74

Etudes de cas et réflexions . Littoral terrestre et intérieur


MILlEUX INSULAIRES

El CAPACITÉ

DE CHUCE

•••

ORGANISATION SOCIALE, GESTION DE L'ESPACE ET DES RESSOURCES EN MILIEU INSULAIRE Jean-Pierre Doumenge*

Les faits de société, les modes de gestion des ressources et l' aménage-ment de l'espace, en milieu insulaire, ont alimenté une littérature volumineuse, depuis des décennies. Pourtant, en 1998, les milieux insulaires inférieurs a 100 (XX) km2, comportant moins de un million d'habitants, ont en général besoin d' aides financieres extérieures pour convenablement fonctionner. La dépendance semble d' autant plus grande que le niveau de vie a préserver est élevé. La notion d' «auto-suffisance» se trouve ainsi dévalorisée ou, du moins, sa pertinence n' apparait plus opérante, sauf peut -étre dans les sociétés acceptant de vivre dans une relative frugalité, en marge de la grande consomrnation de masse induite par la diffusion planétaire des biens et des services, plus connue sous le nom de «mondialisation». Des l' instant oü une société insulaire ouvre son économie sur l'extérieur, le volume et la valeur des importations ont tendance a s' accroitre rapidement, alors rnérne que les exportations peuvent stagner ou s' effondrer, sous l'effet de la concurrence intemationale. Ceci survientaussi en milieu continental, lorsqu' un pays base son économie sur l' écoulement, sur le marché mondial, de produits agricoles ou miniers, peu ou pas transformés, done a faible valeur ajoutée. Mais un pays continental peut parfois obtenir pour un produit une place dominante al' écheUe planétaire. Ce n' estjamais le cas d'un petit pays insulaire. Trop souvent l' espace de mise en valeurd'un pays insulairese limite a des plaines littorales étroites et a quelques pied-

monts. N ulle production agricole de masse ne peut s' y développer pour l' exportation sans ]'aide financiere d'une métropole ou d' une zone d' échanges pri vilégiés (type u.EJ A.c.P), car les coüts de la récolte sont toujours supérieurs a ce qu' ils seraient en milieu continental, compte tenu de surfaces mises en cultures infiniment plus vastes. Néanmoins, pour une ressource rare, al' échelle du monde, un espace insulaire peut tirer sa carte du jeu (cas actueUement d'Hawaii et des Canaries en rnatiere de tourisme de masse, cas aussi de la Polynésie francaise, fournisseur excIusif du Japon pour la perle noire, ou de 1'ile Maurice pour la production, en franchise de taxe, de textiles de qualité pour le marché européen ;précédemrnent, cas de plusieurs lles pour la production d' épices rares et de vanille). Bien évidemment, encore faut -il que l' es pace insulaire ne connaisse pas trop vite de saturation ou de dégradation,

faute de quoi la ressource privilégiée peut devenir calarnité; en effet le caractere fin¡ du territoire insulaireempéche toutereconstruction par les marges. Unecalarnité natureUe(éruption volcanique, tremblement de terre, séisme, tsunarni, cyclone voire grande sécheresse) ou anthropique (épuisernent d' une ressource miniere, surexploitation pastorale, érosion par déficit d' aménagementagricole) majeureestunecatastrophe irrémédiable pour une petite Ile, Dans un contexte de grande fragilité, I'évaluationd'unecapacitédechargeprenant en compte divers aspects de l'activité humaine et de la conservation de son environnement est done extrérnement utile. Selon le milieu culturel de référenceet l'importance d' un stock biologique particulier, la capacité de charge peut varier. Certaines contributions montrent c1airement qu' elle découle d' un processus spécifique de socialisation d'un espace géographique particulier pour une durée donnée : une prédation lirnitée dans le temps peut ne pas entrainer de détérioration du milieu ; parcontre les signes de surexploitation vont apparaí'tre si la prédation se maintient de maniere excessive dans le temps. La capacité de charge a d' abord été utilisée pourévaluer I'étenduede páturage nécessaire a la bonne tenue d' un troupeau sans entrainer de détérioration du stock végétal. Au plan humain, le rapport al' espace est plus complexe; mais il est main* Dírecteur du Centre des Hautes ftudes sur /' Afríque et /' Asíe Modemes, 13 rue du Four, 75006 París, France.

75


·~~~

• SEAU I SULAIRE

, OPICAL El M~

tenant bien eonnu qu' en fonetion de certaines technologies, certains seuils de densité de population ne peuvent pas étre dépassés, au risque de faire éclater l' édifiee social préétabli. Si bien que le développement humain, et pas seulement dans les Iles se fait le plus souvent a travers la résolution de erises. Par ailleurs, un territoire humain a une étendue et une strueture bien plus grande ou complexe qu'un páturage, Toutefois lorsqu' on observe, souvent empiriquement, le rapport qui existe entre le nombre d'habitants et le nombre de touristes séjoumant sur un méme territoire insulaire, on peut eonstater que plus le séjourtowistique par individu est long moins les iliens ne supportent un grand nombre de «gens de passage». Selon l' organisation de la société insulaire, selon la qualité de ses aménagements permanents, un plus ou moins grand «filtrage» des touristes aura lieu. C' est ee qui explique que dans certains eas le maintient d' un équilibre doive passer par l' édietion d' une législation stricte, dans d' autres eas la régulation se

76 Conclusion générale

RRA E N

fait par persuasión ou pression exercée par la population locale sur celle de passage. L' analogie de la gestion des touristes d' avec la gestion des ressources halieutiques est imagée et parfai tement valable a eeei pres q u' on demande al' aeti vité de peche de maintenir un stock halieutique stable alors que la qualité des touristes peut nuancer l' importance de la pression exercée par leur nombre. Sou vent e' est par la eontrainte de l' approvisionnement que l' on situe aquel niveau doit se situer une société insulaire si elle veut bien se reprocluire. Mais la eneore on butera sur des estimations, des approximations, voire des a priori, Selon son idéologie, un insulaire pourra voir dans la ville, capitale «une enclave du monde extérieuret un «lieu d' agression» ou au contraire «un póle d' épanouisse-ment» et «le moteurde la moclemité». A partir de la, on entre dans un débat politique, en saisissant au passage une des caractéristiques majeures des milieux insulaires, celle d' érre des conservatoires de «la tradition», des lieux de conserverisrrewulu.Lamergedemarreuvred'm

individuoud'ungroupeentreprenantyest done toujours limité, ear toutes les parties prenantes de la société tiennent a préserver l'équilibreétabli. C' est ee qui explique qu' il faille beaueoup de temps pour aeelimater une nouvelle technologie, un nouveau moclede prodoction, une nouvelle pratiquecommerciale, leehangementdescomportementspouvant provoquer un déséquilibre fatal. Done on freine, par rétlexe de survie, toute modificarionimempestivedes ereglesconruesdu jeu» social, économique ou politiqueo Méme si les «spécifieités» d' une L1esont diffieiIement transposables dans une autre, rendant ainsi hasardeuse une prévision des problemes par observa-tion analogique, on peut tout de méme préparer des procédures de protection de l' environnement Certaines lois physiques s' expriment indifféremment dans tous les milieux. Done on peut entreprendre la protection des littoraux et des pentes eontre l' érosion, eelui des basses plaines eontre les inondations et done infléehir durablement l' aménagement de l' espaee et son coüt.


MILlEUX INSULAIRES

On a souvent mésestimé le sens empirique de]' observation qu' ont la plupart les iliens et qui explique leurs réflexes conservateurs (car conserva-toires). Le maintien de certaines acti vités agricoles jugées actuellement peu compétitives peuvent toutefois se comprendre, méme fortement sub-ventionnées, si cela permet aux plus grandsnombresd'avoiruneactivitérémunérée et al' environnement de bénéficier d'un entretien. Toutefois, ce n' est plus actuellement le maintien d' une production agricole al' identique des décennies précédentes qui est enjeu, mais sa réutilisation dans une éconornie centrée sur l' acti vité touristique. De plus en plus, l'ile est un espaceculturel de loisir: on vient s'y détendre, oublier les soucis de la vie urbaine continentale, s' y ressourcer. On l' identifie a tort ou a raison cornrne un havre de paix, cornme un espace de «plus grande liberté, de «grande qualité de vie». Une agricuJture florale ou d' épices rares peutétre valorisée par le tourisme, de méme que la peche des crustacés ou une aquaculture a haute technologie. Certains caracteres pittoresques de certaines formes d' éle-

vage peuvent aussi servir de support a des activités ludiques (randonnées, rcx!éos1j¡). De plus en plus le tourisme devra proposer des services diversifiés. Le marché des «Sand, Sun, Sex» est déjá phagocyté par quelques grandes places fonctionnant cornrne des enclaves extra tenitoriales installées dans la Caraíbe, le Pacifique et exceptionneUement l'Océan indien. Le marché du tourisme tres haut de gamme est lui aussi pris. Par contre, ]'élévation générale du niveau de vie dans les pays déveJoppés et le vieillissement rapide de leur population va accroitre rapidement la demande de lieux confortables de séjour hivemaJ. Le phénomene d' extension de « riviera » va se propager dans le monde en développement des iles tropicales et subtropicales comme il existe déjá dans les grands pays développés : en basse Californie, en Floride et aux Hawaii dans la sphere américaine, sur la Cate d' Azur, le littoral du golfe de Genes, la Costa Brava, les Canaries, les Baléares. Le phénomene de propagation d' une «riviera» n' est pas seulement un aspect de l' économie touristique; e' est bien plus la

El CAPACITÉ DE CHARGE

construction d' un espace de développement intellectuel et industriel a haute valeur ajoutée. Pour se référer au seul espace d' Outre- mer francais, certaines iles pourraient proposer, gráce a leurs infrastructures urbaines, des centres de «télétravail» bancaire ou d' assurance et surtout des lieux de confection de produits électroniques de cornrnunication, de produits de haute couture ou de parfumerie, des produits pharmaceutiques (dérivés de simples botaniques endérniques ou d' éléments marins), sans oublier une boisson emblématique, le rhum (dans sa forme agricole, vieilli en füt de chéne comme un cognac). Ce sont les prerniers qui prendront place surces «segments éconorni-ques» qui « récupéreront la rnise; cornrne dans un jeu il ya beaucoup de gain a gagner, mais pour peu de joueurs. TI sera bon d' anticiper ces gains par des équipements adéquats, sans oublier les conséquences d'une pression humaine accrue sur l' environnement (en terme de salubritéen particulier). La problématique insulaire est done loin d' étre épuisée.

77


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TechnO!!~d~enewable Energles Industrial de Granadilla

38594 Tenerife ~

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- Espagne

Tel: +34 922 230 688 Fax:+34 E-mail:

922 200951

ggalvan@iter.rcanaria.es

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