Le Ligueur des parents

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P 5013555 DONNER SON LAIT ? DES JEUNES MAMANS JOUENT LA CARTE DE LA SOLIDARITÉ LA GUERRE AUX BOUTONS PLAN DE BATAILLE POUR LUTTER CONTRE L’ACNÉ LITTÉRATURE JEUNESSE TROIS OUVRAGES QUI NE MANQUENT PAS DE CHIENS P.8 P.12 P.30 31 05 23 MOTIVATION DEUX FOIS PAR MOIS | 73e ANNÉE | 2,50€ | DÉPÔT POSTE À BXL X | LE LIGUEUR | 109 AVENUE ÉMILE DE BECO | 1050 WWW.LELIGUEUR.BE
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15 COMMENT MOTIVER SON ENFANT À TRAVAILLER POUR L’ÉCOLE ?

En 1 coup d’œil

Jour après jour, l’actualité parentale sur leligueur.be

VOS MEILLEURS VŒUX

Par Thierry Dupièreux

« Je voudrais remercier le Ligueur de sa présence dans ma vie depuis mon enfance jusqu'à aujourd'hui en tant que papa. Il est pour moi une référence journalistique pour les parents et un phare pour aider à me guider quand il y a de la brume dans la vie de papa ». Quand on a reçu ce message à la rédaction, cela nous a donné la banane. Recevoir ceci en guise de meilleurs vœux, ce n’est que du bonheur. Vous avez été ainsi plusieurs à nous partager vos souvenirs ces deux dernières semaines, tous liés autour de notre magazine qui vient de souffler ses 75 bougies. Comme Christian, vous nous avez confié des anecdotes, décrit votre attachement au Ligueur. Témoignages de jeunes papas et de jeunes mamans, bien sûr, qui avancent le côté utile et pertinent de nos articles. Mais aussi messages de lecteurs très très fidèles, abonnés de longue date, comme Sylvie : « 1963 et 1966, naissance de nos fils ; de 1995 à 2002, naissance de six petitsenfants ; 2023, tous sont envolés mais nous restons abonnés par solidarité ». Et Sylvie de nous inciter à persévérer pour perpétuer « ces moments de halte de vérités pour réfléchir ». D’anciens collaborateurs, d’anciennes collaboratrices nous ont aussi fait part de leurs souvenirs et transmis leurs bons vœux. Parmi cette glorieuse équipe, Colette Nys-Mazure, qui a notamment présenté dans nos pages des romans écrits par des femmes dans la foulée d’une recherche de doctorat consacrée à ce type de littérature. « Je célèbre avec vous cette réussite de longue haleine. C’est relativement facile de commencer, mais durer et persévérer en qualité, c’est autre chose ». Colette se révèle ambassadrice de notre titre : « Je ne jette jamais le Ligueur. Je le fais circuler. Mes voisins franco-belges l’accueillent avec reconnaissance ».

On épinglera aussi la réaction de Bernard Hennebert, infatigable défenseur de la culture accessible à tou•tes et plume en verve, dans le Ligueur, sur plusieurs périodes et cela dès les années 60. Au début des années 2000, il se fend de chroniques fort bien senties et très engagées. « C’est par ce moyen que se sont développés des combats nombreux toujours actuels (car le Ligueur est une vraie force de frappe) que sont, pour ne prendre que deux exemples fort différents, la gratuité pour tous les musées chaque premier dimanche du mois ou la bataille pour la suppression totale de la publicité du sponsoring à la RTBF ». Merci pour ces mots, ces souvenirs, ces remarques, ces partages. Ils nous font plaisir et nous galvanisent. Votre fidélité et votre soutien sont les plus beaux cadeaux qui soient.

Chaque semaine, la rédaction répond à vos questions. redaction@leligueur.be

Des propositions d’activités pour vos enfants. facebook.com/leligueur

Les coulisses du Ligueur, des sources d’inspiration. @leligueur

PÉPITES EN VRAC 4 ACTU PARENTS Accueil Temps Libre : une réforme qui prend son temps 6 0-2 ANS Transit de l'or blanc au sein d'un lactarium 8 5-11 ANS L’art délicat de perdre la partie 10 12-18 ANS Acné : balance ton pore LE MONDE À L'ENDROIT Embarquez à bord de la galaxie école 22 RENCONTRE Solaÿman Laqdim : « Il n’y a pas d’enfants pauvres » 24 ÉDITO 26 TRIBU CURIEUSE 28 LITTÉRATURE JEUNESSE 30 DAD 31 4  24  28  10  30 31 MAI 2023

LE CHIFFRE DE LA SEMAINE 1 SUR 2

C’est le nombre de piéton·nes qui utilisent leur téléphone en traversant la chaussée selon une étude de l’AWSR (agence wallonne pour la sécurité routière) réalisée en mars sur plus de 1 000 personnes. Ce manque d’attention, aussi courant à vélo et à trottinette, est lié à la réponse à un appel (94% des répondant·es), à la lecture ou à l'écriture d'un message (76%) ou encore à l’utilisation d’internet (69%). Des chiffres impressionnants à garder en tête et, éventuellement, à montrer aux ados. L’AWSR va en faire usage dans une campagne de sensibilisation. Pour rappel, en cas d’accident, ce sont évidemment les usagers les plus vulnérables qui subissent les plus gros impacts…

LE COIN DES GOURMAND · ES LES GALETTES

MAI 81 : APPEL AUX ADULTES RESPONSABLES

QUI FONT BIEN DORMIR

Une recette inspirée par notre bonne copine Burçu. Le mücver, c’est une sorte de galette turque qui s’accompagne d’un yaourt à l’ail. Elle aurait le pouvoir magique de faire dormir comme une pierre, parents et enfants. Pour confectionner ce mücver magique pour quatre personnes, vous épluchez sommairement trois courgettes, un oignon. Vous râpez, puis essorez ce mélange. Vous émincez une demi-botte de persil, deux branches de fenouil. Vous mélangez le tout à trois œufs, trois cuillère à soupe de farine, une cuillère à café de levure chimique, un trait d’huile d’olive, une généreuse pincée de sel.

À l’aide d’une cuillère à soupe, vous confectionnez des petites crêpes avec le mélange que vous faites frire à la poêle des deux côtés. Vous accompagnez le tout de ce fameux yaourt mélangé à de l’ail pressé, un trait d’huile d’olive, du sel, une pincée de thym et un peu de menthe ciselée, si ça passe auprès de vos enfants. Vous nous direz si ces crêpes turques vous ont aidées à dormir d’un sommeil de Sultan.

Y.-M. V.-L.

C’est dans les colonnes d’une tribune libre qu’on vous invite, cette fois. Deux signatures s’y côtoient, celles de Muriel (21 ans) et Ellen (20 ans). Ces lectrices du Ligueur portent une parole jeune, chacune dans son style, mais avec une évidente volonté d’en découdre avec la société dans laquelle elles vivent. Elles n’appellent pas à une révolution bas du front, mais à une réflexion profonde et à une responsabilisation des adultes. Ellen, dans sa lettre, s’attache au problème de l’enseignement. Trop étriqué, trop monolithique. Elle rêve d’une école où « toutes les personnes seraient heureuses de se retrouver parce qu’elles y apprendraient les choses essentielles pour elles et non les choses qu’un groupe restreint juge essentielles, selon ses critères et ses expériences exclusives ». Les mots clés ? Ils s’égrènent. Spontanéité, franchise, compréhension, épanouissement, symbiose, confiance, imagination… Objectif de ce programme scolaire ? Former « des gens sains d’esprit (au sens le plus large) et capable de ne plus se laisser manipuler ». Dans son projet, Ellen en appelle aux bonnes volontés. Notamment à certains adultes, plus « marginaux », qui ne sont pas dans un moule et ont assumé le choix de se retirer de cette « société démocrasseuse ». Engagée, oui, Ellen l’est. Et elle entend en remontrer à ces « grandes personnes à principes » et elle doute que celles-ci « puissent, après la réalisation d’une telle école de la vie se gargariser des mots faciles et pitoyables tels que drogués, BOF génération, jeunesse en désarroi, paumés, etc. ». Les adultes, Muriel les prend aussi à partie. « Ne comptez pas sur nous pour bouleverser la société : faites le vous-même ! ». L’entrée en matière est cash. En poursuivant la lecture on se rend compte que si Muriel exhorte les adultes à se bouger, elle ne compte pas non plus rester « les bras ballants ». Mais là, elle est gavée de certains propos et attitudes : « Arrêtez de projeter sur nous l’idéal de votre jeunesse, tâchez plutôt de l’appliquer à votre vie et reconnaissez-nous nos qualités propres. (…) Vous nous avez si bien habitués à la passivité et, maintenant, vous voulez que nous agissions ».

Dans sa missive, Ellen navigue entre espoir et pessimisme. « J’ai le sentiment qu’il est déjà trop tard, que les jeunes sont déjà devenus les spectateurs de leur vie à la place d’en être les acteurs : ils ont peur d’agir. (…) J’espère que les gens ne sont qu’endormis, qu’ils se réveilleront, qu’ils feront ce qu’ils ont réellement envie de faire et que main dans la main, ils construiront un monde à la mesure de chaque individu ». En lisant ces lignes, on ne peut s’empêcher de penser à Greta Thunberg qui quarante ans plus tard portera aussi la voix des jeunes au-devant de la scène… Dans les rapports entre générations, il est parfois sain et bon que la jeunesse titille le sens des responsabilités des adultes…

DU LIGUEUR
L’ARCHIVE
4 LE LIGUEUR N°11

L’ACTION DE LA SEMAINE

Balade vélo militante

Faites signe avec vos dix petits doigts

Joindre l’utile à l’agréable, c’est ce que se propose de faire le CNCD 11.11.11 avec cette balade à vélo militante. La boucle de 14 km vous emmènera à travers des sentiers forestiers et urbains jalonnés par six étapes symboliques, liées à la justice fiscale, aux droits humains, sociaux ou environnementaux. Pour vous mettre l’eau… au mollet, il sera question d’une histoire d’exploitation de la forêt de Soignes, du célèbre square des Milliardaires à Ixelles ou encore des pratiques frauduleuses de certaines multinationales. Bonne nouvelle, l’itinéraire est accessible à toutes et tous, quel que soit votre niveau sportif. Une seule condition : s’inscrire à cette balade qui aura lieu le dimanche 11 juin de 14 à 17h au départ de la gare de Boitsfort. Vous ne pouvez en être ? Un roadbook vous permettra d’effectuer le parcours en toute autonomie. Infos et inscription auprès de lea.gros@cncd.be ou au 02/250 12 60. C.R.

L'INITIATIVE

DE LA SEMAINE

SENSIBILISATION URBAINE

Les violences conjugales et intrafamiliales dénoncées par une œuvre d’art urbain ? Oui, et c’est à Namur que ça se passe ! Depuis quelques jours, une fresque s’offre aux regards des passant·es et des automobilistes, juste en face du nouveau service des urgences du CHR. Réalisée par Iota du collectif Propaganza, l’œuvre évoque la violence au sein de la famille. Un fléau qui s’incruste et, même, gagne en importance, 12% de cas supplémentaires ayant été signalés en 2022 par rapport à l’année précédente.

Derrière son titre léger, Hide and Seek (Cache-cache), cette création « street art » entend faire réfléchir sur ces violences dont sont essentiellement victimes les femmes et les enfants. Initiateur du projet, le service de Cohésion sociale de la ville de Namur insiste : l’objectif est « d’informer et de sensibiliser la population car chaque communication à l’égard de cette thématique favorise la sortie du silence des personnes concernées ». Pour que l’info soit complète, un QR code permet d’obtenir les coordonnées des services compétents. Audacieux, complet, porteur de sens, voilà un projet qui méritait d’être épinglé. T. D.

Pour entrer plus facilement en communication avec leur bébé, certains parents choisissent de le faire par la voie des signes (sans que bébé ne soit sourd ou malentendant). L’idée, ici, est de réduire les causes de frustration ou de colère en apprenant à son bébé à reconnaître et à s’exprimer par des gestes pour des situations simples : bonjour, merci, faim, soif, pipi… Si vous avez envie de vous lancer avec votre tout-petit, on ne peut que vous conseiller Mes p’tits doigts de l’autrice belge Anne Crahay chez la non moins belge maison d’édition CotCotCot. L’ouvrage raconte en quarante pages le déroulement d’une journée d’un bambin, soit autant de situations qui permettent de signer et donc d’accompagner vers le langage en jouant avec la répétition de sonorités, le rythme des syllabes ou encore la poésie des mots. On apprécie particulièrement ce livre destiné aux 0-24 mois pour son approche simple qui permettra aux parents de s’y mettre, évidemment, mais aussi aux petits frères et petites sœurs ou aux papys et mamys de se lancer dans l’aventure.

LE LIVRE DE LA SEMAINE
5 31 MAI 2023

Accueil Temps Libre : une réforme qui prend son temps

Garderies. Stages. Écoles de devoirs. Tout cela est au cœur d’une réforme qui intéresse les familles au premier chef. On fait le point entre revendications, contreproposition et réalités de parents.

Le constat avait été posé dans un dossier publié il y a un an dans le Ligueur. L’ATL (Accueil Temps Libre) ne veut pas dire grandchose pour les parents. Peu lisible, peu connu et donc peu utilisé, cet acronyme ne sert pas le secteur qu’il est censé représenter. Entre méconnaissance totale (« C’est quoi ce truc ? ») et vision partielle (« Ce sont les garderies, c’est ça ? »), l’Accueil Temps Libre détient ce triste privilège d’être utilisé par les parents et fréquenté par les enfants durant toute l’année sans pour autant être clairement identifié. Bref, les enjeux de l’ATL restent flous aux yeux du grand public. Et pourtant ils sont essentiels au quotidien, car ils recouvrent des réalités aussi diverses que celles de l’accueil extrascolaire, des écoles de devoirs, des stages et centres de vacances. L’avenir de l’Accueil Temps Libre se joue en ce moment. Une réforme est annoncée, mais tarde à se concrétiser. Une note d’orientation a bien été produite du côté de

la Fédération Wallonie-Bruxelles, mais elle a été critiquée par des acteurs de l’ATL qui ont sorti une carte blanche épinglant plusieurs points de tensions. Une contre-proposition leur a été demandée.

La Ligue des familles, elle, vient de sortir une analyse sur le sujet épinglant les priorités verbalisées par les papas et les mamans. « La ministre garde bon espoir qu’une nouvelle mouture puisse être co-construite dans les meilleurs délais, nous glisse-t-on du côté du cabinet de Bénédicte Linard. Son souhait n’est pas d’aller à l’encontre des volontés des acteurs, mais bien de travailler et d’avancer de concert ». Bref, ça discute ferme. Dans son analyse, la Ligue des familles insiste dans sa première recommandation : il est essentiel de travailler sur la lisibilité et une meilleure compréhension du secteur. L’organisation parentale considère cela comme une « étape utile pour rendre plus accessible un secteur très disparate ».

Justement, par rapport à ce secteur, quel est son état d’esprit face à la réforme qui s’annonce ?

En avril dernier, plusieurs de ses représentant·es et diverses institutions ont donc co-signé une carte blanche où une certaine inquiétude pointait au vu des premières ébauches de la réforme en cours. Ses craintes ? Voir mise de côté la notion de temps libre ou « l’esprit de vacances » des activités. Se retrouver face à une offre trop centralisée en opposition avec les vrais besoins des enfants. Faire primer la quantité sur la qualité. Tout miser sur une centralisation au niveau des écoles au détriment de l’ouverture à d’autres réalités.

TOUT À PARTIR DE L’ÉCOLE ?

Le dernier point de friction est intéressant. Dans ses pistes de solutions (voir ci-contre), la Ligue des familles évoque justement le rôle des écoles dans le dispositif global de l’accueil temps libre. Son souhait ? « Davantage d’activités extrascolaires organisées à l’école ou à proximité de celle-ci dans le fil de la journée scolaire (en prévoyant alors l’organisation des trajets) : pour qu’un maximum d’enfants ait l’occasion de pratiquer des activités et afin que les parents puissent mieux concilier travail et vie de famille ».

Hélène, maman de trois filles dont deux en âge de fréquenter l’extra-scolaire, souscrit à cela. « Organiser des activités au départ de l’école, c’est logique selon moi. Quel est le sens de voir tous ces parents qui véhiculent leurs enfants, chacun de leur côté ? Quelle est la logique globale ? On peut même y voir une aberration environnementale ».

Renforcer l’offre ATL dans ou au départ de l’école pourrait effectivement faciliter la

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vie des papas et des mamans pour les activités de semaine. « Parce que franchement, poursuit Hélène, je ne vois pas comment se débrouille une maman solo sans soutien. Moi, j’ai la chance d’avoir une grand-mère disponible un jour par semaine. Je peux aussi compter sur le temps que me laisse mon 4/5e pour m’occuper des petites le mercredi. Mais tout le monde n’est pas dans ce cas-là ». On sent qu’il y a là une logique organisationnelle et cohérente, mais le secteur ATL précise ses réserves dans sa carte blanche. « Avons-nous réellement envie d’une société dans laquelle les enfants ne connaîtront plus que les murs de l’école et les murs de leur maison ? De nombreux enfants sont en souffrance à l’école, en phobie scolaire. N’ont-ils pas le droit d’explorer des horizons différents où ils pourront s’essayer à d’autres relations, d’autres activités et attentes ? ». Ces questions peuvent être posées, mais n’excluent pas la possibilité d’organiser davantage des activités dans les écoles où cela peut l’être. Elles sont à prendre en compte, certes, mais il y aussi l’équilibre familial global à envisager, cet équilibre étant aussi primordial pour le développement des enfants. En termes de « vie de parent », le temps libre des enfants organisé à partir des établissements scolaires est donc une piste à creuser. Mais harmoniser l’ensemble demande de la réflexion et des aménagements périphériques.

Ainsi, la situation en milieu rural est très différente de la réalité urbaine, l’offre d’activités y est moins nourrie, les problèmes de distance et de manque de transport en commun surgissent rapidement. Même en ville, comment organiser structurellement des déplacements d’une activité à l’autre lorsque les horaires des bus sont allégés, par exemple, dès 18h ? On le voit, ce débat autour de l’organisation de l’ATL touche vite à des questions de société plus larges comme celle de l’adéquation des services publics aux besoins réels, quotidiens des familles et singulièrement de celles qui doivent composer avec des heures de travail non standardisées (voir ci-contre).

L’ARGENT, NERF DU TEMPS LIBRE

Lorsque l’on discute avec Hélène, maman du Brabant wallon, la question du coût de l’ATL est rapidement évoquée. Encore une fois, elle s’estime plutôt bien lotie avec un coût de

« garderie » à l’école qui n’est, selon elle, pas prohibitif. « On parle de 2€ par jour ou 20€ par mois, ce qui reste abordable pour une garderie accessible jusque 18h. C’est une garderie de qualité, on ne les laisse pas devant la télé ».

Si le coût n’inquiète pas Hélène, d’autres familles perçoivent cela comme un défi. Dans son Baromètre des parents, la Ligue des familles constate que 48% des parents trouvent les garderies trop onéreuses. Ce pourcentage augmente en fonction du profil des tribus (56% pour les familles monoparentales, 53% pour les familles dont le revenu mensuel net se situe entre 1 500 et 3 000€ nets, 61% pour celles dont le même revenu est inférieur à 1 500€).

Pour ce qui est stages de vacances, les places de qualité, pas trop onéreuses, sont rares. Un exemple, les stages de l’Adeps, près de chez Hélène, à Louvain-laNeuve. « Pour les stages de fin août, il fallait s’inscrire en avril. Pour réserver, il faut être bien organisé et rapide. Ce sont des stages qui se remplissent en un jour. Les inscriptions étaient ouvertes à 9h, et à 10h, tout était parti ». Hélène s’interroge sur le fait d’harmoniser les inscriptions à ces stages pour éviter stress et surcharge mentale. Mais, en creux, elle pointe par son exemple, l’offre trop faible de stages qui financièrement sont plus accessibles.

Dans sa dernière étude, la Ligue des familles relève qu’en moyenne les parents payent 359€ pour les stages de l’ensemble de la fratrie pendant les grandes vacances. Ce montant est évidemment très variable. Il dépend du nombre d’enfants, de la quantité de jours de congé des parents, de la possibilité de recourir à des proches pour garder les enfants ou pas, etc.

Pour l’instant, la réforme qui permettrait de mieux cadrer tout cela peine donc à avancer. L’agenda reste un peu flou et laisse les parents dans l’attente d’aménagements et de nouvelles directions qui pourraient, sans nul doute, faciliter leur vie de tous les jours.

CINQ RECOMMANDATIONS DE LA LIGUE DES FAMILLES

„ Un « chèque stage » par enfant. Cela permettait de réduire le coût des vacances scolaires pour les familles et de s’assurer que tous les enfants peuvent participer à un minimum d’activités sportives ou ludiques.

„ Un forfait de cinq heures de garderie scolaire gratuites par semaine et par enfant. Pour la Ligue des familles, ce serait une manière très concrète de diminuer les frais d’accueil des enfants. Autre atout, cette mesure soutiendrait les parents dans leurs efforts de conciliation des temps entre boulot et tribu.

„ Davantage d’activités extrascolaires organisées à l’école dans la foulée de la journée scolaire. Celles-ci pourraient aussi se dérouler à proximité de l’établissement scolaire tout en prévoyant alors l’organisation des trajets. Pour la Ligue des familles, cela donnerait l’occasion à un maximum d’enfants de pratiquer des activités tout en facilitant la conciliation travail/ vie de famille.

„ Objectiver les besoins des parents travaillant selon des horaires atypiques. On pense au secteur de l’Horeca, au secteur hospitalier, à la grande distribution, etc. Ce qui serait à analyser ? L’offre existante sous tous ses aspects (horaires, prix, localisation, volume) ou encore les besoins non couverts. Tout cela permettrait, notamment, de développer sur base d’infos factuelles des structures plus adaptées au besoin des parents qui ont des horaires atypiques.

Sur leligueur.be, notre dossier : Extrascolaire, explorons leur 3e univers

„ Améliorer les conditions de travail des encadrant·es de l’accueil extrascolaire. Objectif ? Soutenir la qualité de l’accueil extrascolaire dans les écoles avant et après les heures de cours.

POUR ALLER + LOIN
À
7 31 MAI 2023
LIRE
Lieu, accessibilité, coût, horaires… autant de contraintes difficiles à globaliser autant côté professionnel•les que parents

0 2 ANS

Transit de l'or blanc au sein d'un lactarium

Du sein d’une maman, biologique ou donneuse, jusqu'à la bouche d’un bébé prématuré, le lactarium assure la collecte d'un produit riche en amour et en nutriments.

Mais comment ça fonctionne, un lactarium ?

Rencontre avec des parents et les professionnel·les qui font tourner la banque de lait.

D'un pas pressé, Mathilde, 32 ans, transporte à l'épaule un petit pactole. Sous la tirette de son frigo-box, une dizaine de blocs plastifiés de couleur blanche, légèrement jaunâtre. Le butin est réfrigéré, anonyme. La livraison, attendue. Direction : le lactarium de la Clinique CHC MontLégia, à Liège, à quelques kilomètres de son domicile.

Dans un petit sas, les pochettes de lait congelé de la jeune maman sont soigneusement recueillies. Ses quelque 700 ml de lait sont immédiatement placés par l’infirmière pédiatrique dans un tiroir du congélateur du lactarium, que l'on nomme ici « la banque de

lait ». Est stocké et traité ici le lait maternel des bébés hospitalisés en néonatalogie, celui de leur propre maman ou celui provenant de donneuses.

Comme Mathilde, celles-ci ont été au nombre de dix-sept à faire don au MontLégia. En 2022, 58 bébés ont bénéficié de ce lait de don, pour un total de 76 litres collectés. Bien plus qu'un lieu de collecte et de réserve, le lactarium est un réservoir d'amour et d'émotions, qui se gère rigoureusement sept jours sur sept, dès l'aube, telle une cuisine-laboratoire de boissons lactées, dont chaque goutte compte.

QUAND LE LAIT COULE DE SOURCE

Au même étage, entre deux soins en couveuse, Fabienne Hesbois, infirmière pédiatrique et conseillère en lactation, s'installe auprès d'une jeune maman, seule dans sa chambre, pour lui souffler ses conseils. « Surélevez vos pieds et installez-vous confortablement, dit-elle de sa voix douce et calme. Même si bébé est né à 5 mois, votre glande mammaire est prête ». La lumière du service est tamisée. Il fait calme. Deux appareils accompagnent la maman : un tire-lait et un smartphone, pour visionner la dernière vidéo de son bébé. Et le lait jaillit, avant de couler dans le biberon collecteur.

Ces séances s'ensuivront huit à douze fois sur la journée et la nuit, en ce début de postpartum. Et de petits rituels s'instaurent, « comme respirer le body de son bébé. Il faut y penser, car le nouveau-né n'est pas toujours proche pour manifester ses appels de lait, par ses bruits et ses massages du sein ».

LA VOIE DE SECOURS LACTÉE

« Les mamans font toujours de leur mieux. Certaines parviennent difficilement à extraire 5 à 10 ml par recueil, d'autres arrivent à 100 ml... Idéalement, 500 à 750 ml par 24 heures sont recommandés, mais nous ne donnons pas d'objectif aux parents pour ne pas induire de stress ». Cependant, lorsque les gouttes peinent à perler ou si le souhait d'allaiter n'est pas au rendez-vous, une décision doit être prise pour administrer l'aliment le plus adéquat. La banque de lait vole alors au secours du bébé.

« Le lait maternel, pour le bébé né prématurément, contient des composés irremplaçables d'origine humaine que sont les immunoglobulines, anticorps, les hormones, les facteurs de croissance, des enzymes, des prébiotiques et probiotiques, les cellules du système immunitaire, des acides gras polyinsaturés..., précise Anne Vervoort, pédiatre responsable de la banque de lait du CHC. La composition en nutriments est la mieux adaptée à la croissance d'un nouveau-né. »

Outre les bébés prématurés, d'autres petit·es patient·es doivent pouvoir bénéficier de ce lait. « Les bébés nés à terme avec un petit poids ou avec une pathologie digestive ou une malformation ou une maladie intestinale », complète la pédiatre.

Donner « le lait d'une autre maman », pour certaines mères, la proposition est mal digérée. Alors, ce lait maternel prend d'autres appellations. « Nous le présentons comme du ‘lait de banque’ ou du ‘lait humain’ tout simplement, voire même comme un médicament indispensable. Puis ce n'est que temporaire », raconte Fabienne Hesbois. Par ail-

8 LE LIGUEUR N°11

leurs, les conditions strictes validant les dons rassurent les parents.

Quant aux premiers bénéficiaires du lait du lactarium, ils reçoivent leur repas principalement par sonde naso ou oro-gastrique ou par la tasse ou le biberon pour les plus âgés. Parfois en peau-à-peau avec leur parent.

AU MENU : FRAIS OU PASTEURISÉ ?

On frappe à la porte. Plusieurs fois par jour, l'infirmière en charge de la biberonnerie passe en chambre pour collecter le lait. De retour au lactarium, elle planifie les pasteurisations. « Le lait frais d'une maman pour son propre enfant est privilégié explique Rita Schaus, infirmière pédiatrique. La pasteurisation entraîne la destruction des cellules, de certaines enzymes, d'hormones... diminuant un peu la qualité du lait maternel, même si elle restera supérieure à celle d'un lait de substitution. » La pasteurisation est prévue pour les prématurés à haut risque, pesant moins d’un kilogramme, nés avant vingthuit semaines ou avec certaines pathologies. Les bébés du groupe à bas risque, quant à eux, profitent directement du lait nonpasteurisé ». Entre ces deux extrêmes, des prélèvements sont analysés pour donner le feu vert au lait frais pour les bébés du groupe intermédiaire.

Le lait de don, lui, est systématiquement pasteurisé. « Il est livré congelé par la donneuse et directement stocké. Nous le décongelons. Un prélèvement de chaque poche est mis en culture pour détecter des germes. Si le résultat est négatif, ce lait est pasteurisé et de nouveau congelé. Il est presque prêt à l'emploi ! Les dons sont très rarement jetés », ajoute Rita Schaus.

Bonne nouvelle, les stocks de la banque sont pleins. « Pour l'instant, nous ne devons pas faire d'appels sur les réseaux sociaux ». Actuellement, trois bébés du service reçoivent ce lait de don.

COLLABORATION LACTÉE ?

Et sans lactarium, que font les services de néonatalogie ? Ils collaborent avec les banques les plus proches. Le CHR Sambreet-Meuse à Namur, par exemple, n'en dispose pas. « S’il y a un risque d'accouchement prématuré, nous aborderons la question de l'allaitement avec la maman, lui expliquant que son lait maternel extrait sera très utile », explique Élisabeth Henrion, chef de service de néonatologie.

Dans ce service de l'hôpital labellisé Amis des Bébés, 90% des mamans allaitent. Si le bébé n'est pas prêt à boire directement au sein, le surplus de lait est mis en réserve pour quelques jours. Et si le don est nécessaire,

une livraison est effectuée par le lactarium du CHR de la Citadelle à Liège. Dans le sens inverse, le CHR de Namur est un point relais pour les mamans donneuses du Namurois, région sans lactarium, souhaitant faire don de lait. « Une ou deux mamans par mois font don ici, constate l'infirmière en chef du service. Actuellement, pour un service de taille moyenne comme le nôtre, la gestion d'un lactarium serait trop coûteuse, soit 80 € à 200 € par litre de lait traité. Nous restons dans l'attente de l'organisation d'un lactarium régional ou fédéral, sur lequel un comité de l'allaitement planche ».

Élisabeth Henrion met aussi en garde contre des dérives commerciales. « Une firme américaine nous a récemment présenté un lait maternel complémenté au coût prohibitif de 10 000 € par bébé... De plus, ce lait provient de mamans ayant été rémunérées. C'est inenvisageable en Belgique, la démarche commerciale s'éloigne de l'éthique autour du don ». À noter que l'administration de lait maternel est remboursé en grande partie par l’assurance soins de santé (l'INAMI estimant le coût du lait maternel à 0,32 €/10 ml, avec un montant forfaitaire à charge des parents de 0,30 € par jour pour une quantité de 200 ml).

EN SAVOIR +

DON ANONYME OU PARFOIS DIRIGÉ

Les parents ne peuvent pas connaître l'identité de la donneuse, le don étant anonyme, comme pour le don de sang. Cependant, des souplesses sont accordées, le statut du lait maternel étant « entre deux », à la fois liquide biologique comme le sang et produit alimentaire. Exceptionnellement, des dons « dirigés » se font à la demande des parents. « Comme la sœur d'une jeune maman dont la lactation ne démarre pas, et qui a proposé de donner son lait pour son neveu. La solution a été acceptée par l’hôpital. Cela peut arriver parfois entre dames de confession musulmane, pour qui deux bébés ayant reçu le même lait deviennent ‘frère ou sœur de lait’ », se souvient l'infirmière pédiatrique Fabienne Hesbois. Ce don « dirigé » est pasteurisé au lactarium, puis donné à l'enfant concerné.

QUI PEUT DONNER SON LAIT ?

Toute maman peut donner son lait en répondant à certains critères : avoir du lait extrait avant les 6 mois de l'enfant, ne pas fumer, ne pas boire d'alcool. Elle doit répondre à un examen et un questionnaire médical, faire une prise de sang. Son lait doit être conservé au frigo (5°C) maximum 48h et au congélateur maximum deux mois. Elle amène elle-même son lait au lactarium ou en hôpital relais. Les quatre lactariums en Belgique sont à Bruxelles (Érasme et HuderfUDERF) et à Liège (CHR de la Citadelle et CHC MontLégia).

EN PRATIQUE « J'AURAIS DÛ JETER CE LAIT »

TÉMOIGNAGES

« À 4 mois, Zoé a refusé le biberon. Inutile donc de congeler mon lait tiré pour notre consommation personnelle. J'aurais dû jeter ce lait. C'est en voyant ma surproduction que ma sagefemme m'a proposé faire don. J'ai donné douze litres, puis j'ai reçu un gentil courrier de l’hôpital, adressé à ma fille Zoé, la remerciant, elle, d'avoir aidé d'autres bébés. Ça m'a émue. »

„ Sophie Van Cauwenberghe

« UN GRAND SENTIMENT DE FIERTÉ »

« Lorsque nous avons quitté le service de néonatalogie avec mon petit garçon, j'ai décidé de faire don de plusieurs litres qui m'attendaient au lactarium. Avec un grand sentiment de fierté. À ma grande surprise, ma lactation était généreuse et en inadéquation avec mon bébé prématuré qui ne réclamait qu'une dizaine de ml par jour en début de vie. J'ai pu côtoyer des mamans en chambre commune pour qui la lactation était pénible... Je connais la valeur du lait. »

„

9 31 MAI 2023

L’art délicat de perdre la partie

« Qui perd, gagne », dit-on. Mais avant d’atteindre ce niveau de sagesse suprême, il est parfois inévitable de passer quelque temps sur la case « mauvais·e perdant·e ». Pour ne pas y rester coincé·e, rien de tel que de faire appel… à la magie du jeu.

Vous aimez vous faire piler, vous ? Bon, d’accord, on est prêt à supporter n’importe quelle humiliation pour venir à bout d’une partie de bataille qui n’en finit pas. Ou pour permettre à un·e petit·e de goûter aux délices de la victoire. Mais, franchement, avouez : en règle générale, c’est plus rigolo de gagner. Pourtant, nous sommes parfois désemparé·es face aux enfants qu’on dit mauvais perdants.

APPRIVOISER LA FRUSTRATION

La capacité à accepter de perdre la partie est d’abord une question d’âge, explique Mireille Pauluis, psychologue :

« Il faut attendre que l’enfant ait 4 ans, 4 ans et demi, avant qu’il puisse percevoir que dans le jeu, il y en a un·e qui gagne et un·e qui perd. Avant qu’il com-

prenne que l’autre va être content·e ou pas, parce qu’il ou elle a gagné ou perdu. C’est très subtil, cette affaire… ». Il faut en effet du temps au jeune enfant pour prendre conscience, graduellement, qu’il n’est pas tout-puissant et que les autres peuvent penser autrement. « Au-delà de 5 ou 6 ans, l’enfant commence à savoir qu’il ne peut pas tout avoir et à apprivoiser la frustration, continue la psychologue. Mais c’est progressif, et c’est important de reconnaître que c’est difficile, à tout âge ». C’est pourquoi elle conseille, pour accompagner les petit·es perdant·es désemparé·es, de mettre des mots sur leur difficulté : « Je comprends que tu ne sois pas content·e. Tu aimerais bien gagner. C’est tellement plus gai. Mais tu vois, Louis aussi, il avait

envie de gagner. Et peut-être que la prochaine fois, c’est toi qui gagneras. C’est ça, le jeu ».

« ÊTRE ‘MAUVAIS.E PERDANT.E’ N’EST PAS UNE FATALITÉ »

Des enfants qui jouent, Grégory De Backer – alias « Monsieur Mouche » – en rencontre souvent. Bibliothécaire spécialisé en sciences et techniques du jeu, il est responsable de la ludothèque à la Biblif, la bibliothèque communale de Forest (Bruxelles). « C’est en général vers 5, 6 ou 7 ans que les enfants découvrent les jeux à règles. À cet âge-là, ils ont un rapport particulier à la règle et peuvent avoir peur de l’échec », observe-t-il lors des animations de jeux qu’il encadre. Aux parents qui se demandent comment

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réagir lorsque la partie tourne au drame, Mireille Pauluis recommande non seulement d’en reparler avec l’enfant une fois la tempête passée, mais aussi d’éviter de se fâcher ou de porter de jugement négatif. « Se fâcher sur un enfant en colère parce qu’il perd, cela revient à en remettre une couche. ‘Non seulement, j’ai perdu, mais, en plus, je me fais engueuler !’. Ce n’est pas mal d’avoir du mal à perdre. Je pense que l’enfant pourra plus facilement faire un effort si on reconnaît que c’est difficile ». Grégory De Backer confirme : l’idée n’est certainement pas de pointer du doigt l’enfant qui râle ou triche. « J’essaye plutôt de prendre le joueur ou la joueuse à part après la partie, ou de plus encadrer le groupe, explique-t-il. Avoir du mal à perdre n’est pas toujours un problème, mais cela peut prendre des proportions désagréables par la suite. Y être attentif et encadrer ces enfants peut donc être une bonne chose ». Et d’ajouter : « Je pense sincèrement qu’on peut éviter à certains enfants d’être trop mauvais perdants en leur apprenant la défaite. Ce n’est pas une fatalité ».

FAUT-IL LES LAISSER GAGNER ?

La tentation peut être grande de donner un coup de pouce à l’enfant en difficulté, en particulier lorsqu’il ou elle joue face à des adultes ou à des enfants plus âgés. Hésitation. Si je le laisse gagner, est-ce que je ne l’induis pas en erreur ?

Ne sera-t-il pas trop déstabilisé s’il perd un jour contre quelqu’un d’autre ?

Mais si je ne le laisse jamais gagner, ne risque-t-il pas de se décourager ?

« Je suis un partisan de ne pas systématiquement laisser gagner les enfants », explique Grégory De Backer, qui n’exclut toutefois pas de les aider de temps en temps, pour les encourager. Il se souvient par exemple d’avoir accompagné une petite fille de 8 ou 9 ans qui commençait à pleurer parce qu’elle avait perdu sa première partie d’échecs face à un adversaire plus âgé. « Je l’ai un peu aidée, mais discrètement. Heureusement, l’enfant avec qui elle jouait a compris. Elle a pu gagner sa revanche et reprendre confiance ». Le jeu est avant tout affaire de plaisir partagé, rappelle Mireille Pauluis, qui estime aussi que cela peut

valoir la peine de soutenir un peu les jeunes enfants, pour éviter une situation d’échecs répétés.

LE BON JEU, DANS LES BONNES CONDITIONS

Eh oui, « le plaisir du jeu, c’est le plus important ! », affirme Grégory De Backer. Et on sent que cela vient du cœur. D’un cœur de joueur. Son principal conseil pour aider un enfant à apprendre à perdre pourrait se résumer ainsi : le bon jeu, dans les bonnes conditions.

« Je commence toujours par demander aux enfants ce qu’ils aiment dans les jeux. Cela me permet de leur soumettre des jeux qui ne vont pas les mettre mal à l’aise, et d’essayer de réduire les situations de doute et d’échec. Il y a plein de types de jeux différents, on est là pour essayer de les orienter. »

Le « bon » jeu varie donc d’un enfant à l’autre et il n’y a pas de remède miracle, continue-t-il : « En général, les plus jeunes aiment bien les jeux de hasard, qui ont l’avantage de laisser aux enfants de bonnes chances de gagner ». Et les jeux collaboratifs ? « Ils ne sont pas forcément la solution à tous les problèmes. Parce que dans un jeu collaboratif, on ne peut pas gagner tout seul. Or les joueurs et joueuses qui n’aiment pas du tout perdre aiment en général beaucoup gagner. Ce qui n’est pas grave. Le jeu compétitif a aussi ses vertus et il y en a qui ne sont absolument pas agressifs ». Jouer dans de bonnes conditions, c’est aussi une question de groupe, de choix de partenaires. Grégory De Backer aime les rassembler en fonction de leur âge, mais reconnaît que c’est rarement possible quand on joue en famille. « Dans les fratries, les différences d’âge font beaucoup. Les enfants de 6-7 ans et de 8-9 ans ont des centres d’intérêt et un rapport à la règle différents.

Pour les plus jeunes, changer les règles peut être une façon de se les approprier. Mais cela peut énerver les plus âgés, et c’est là que les conflits commencent ».

Pour que chacun y trouve son compte et quand le jeu s’y prête, pourquoi ne pas rééquilibrer les forces en attribuant un handicap aux joueurs et joueuses plus expérimenté·es, voire se mettre d’accord ensemble sur des règles adaptées ?

« J’AI PERDU, MAIS JE SUIS TOUJOURS LÀ »

Au sein d’un groupe ou d’une fratrie, chaque petit·e joueur ou joueuse est différent·e. « C’est le côté magique du jeu : c’est un espace de liberté, un révélateur de la psychologie des joueurs, de leur rapport à la règle, au doute, à la victoire, à la défaite », constate le ludothécaire. Qui se dit aussi que « parfois, il y a autre chose qui s’exprime dans la peur de l’échec. Des situations familiales, scolaires, psychologiques qui dépassent complétement le cadre de la ludothèque ». « C’est souvent une question de tempérament de l’enfant, estime Mireille Pauluis. Ce sont souvent les plus enthousiastes, qui jouent avec tout leur cœur qui ont le plus de mal à perdre. Mais c’est aussi avec eux que c’est le plus gai de jouer, parce que leur plaisir est à la hauteur de leur frustration. Cela dit, si dès qu’il perd, l’enfant fond en larmes en disant : ‘Je suis nul·le’, on sent bien qu’il faut le soutenir autrement, en reconnaissant que sa détresse est grande ». En disant « Aïe, aïe, aïe, j’ai perdu ! Mais peut-être que la prochaine fois je gagnerai. Et je me suis bien amusé·e en jouant. On refait une partie ? », on aide l’enfant à apprivoiser la défaite précise encore la psychologue. À travers ses propres réactions, l’adulte qui joue est en effet un modèle pour l’enfant, « J’ai perdu, mais je ne suis pas détruit, je suis toujours là », lui dit-on en somme. « Qu’on perde ou qu’on gagne, on a bien rigolé. C’est l’apprentissage de la vie ».

ZOOM

« C’est ce que disent tous les joueurs d’échecs professionnels », affirme Grégory De Backer, ludothécaire à la Biblif, bibliothèque communale de Forest. Il donne régulièrement son avis sur les jeux que nous testons avec vous dans la chronique « Jeudi, c’est jeux, dis ». À retrouver tous les… jeudis sur leligueur.be, ainsi que sur Facebook et Instagram.

11 31 MAI 2023
« Jouer est un apprentissage, la victoire tout comme la défaite font partie… du jeu  »
« CE N’EST PAS EN GAGNANT, MAIS EN PERDANT, QU’ON APPREND »

Acné : balance ton pore

« Balance ton pore, un jour tu sais ça paiera ». Non la chanteuse Angèle ne prépare pas un spot pour l’acné. Pas encore. Ce qui ne nous empêche pas de nous y intéresser. Des progrès pour la soigner. Des bonnes pratiques. Des bons usages. Une guerre des boutons placée sous l’égide du professeur Dominique Tennstedt, dermatologue.

Des boutons encore des boutons. Des rouges, des purulents, des jaunes, des noirs, des petits mignons cachés, des gros gras par dizaines. Toujours en bourgeons, jamais en fleurs, un éternel printemps. Une maman, auto-proclamée spécialiste des questions d’acné, nous a affirmé que tout ce feu d’artifice épidermique est en voie de disparition chez les ados, parce qu’« on a fait de tels progrès qu’ils et elles en seraient presque débarassé·es ».

Vraiment ?

Dominique Tennstedt : « Non. L’acné n’est pas en baisse, c’est même plutôt le contraire. En revanche, ce qui est vrai, c’est que l’acné grave a diminué. »

Les parents d’ados d’aujourd’hui ont à la grosse louche entre 40 et 50 ans, ils ont été ados dans les années 90. Qu’est-ce qui a changé dans la façon dont on traite l’acné ?

D. T. : « Pas grand-chose. Il est important de rappeler que l’acné est d’origine géné-

tique. Elle ne provient donc pas de ce que l’on mange, ce que l’on boit ou ce que l’on respire. La question numéro 1, c’est : est-ce que les parents, oncles, tantes, grandsparents de l’ado ont eu de l’acné ? »

Pourtant, nous-même au Ligueur avons interviewé certain·es de vos homologues qui nous ont assuré qu’il y avait un lien entre la façon de s’alimenter et l’acné. C’est une erreur ?

D. T. : « Presque. De manière générale, l’acné n’a aucun lien avec la façon de s’alimenter. Mais il y a quelques nuances : le lait, par exemple. C’est certainement lié aux résidus d’hormones qu’on injecte dans les vaches qui le produisent pour les rendre plus grosses. Le médicament passerait dans le lait, c’est une des explications les plus plausibles. Idem pour la cigarette. On suppose qu’il y a un lien. Sans études plus abouties que ça. C’est toujours très difficile de démontrer ce type de lien avec rigueur. »

L’acné touche combien d’adolescent·es ?

D. T. : « Près de 80% de la population fait ou a fait de l’acné. Comme je l’ai dit précédemment, plus il y en a dans la famille, plus le risque est élevé. Et elle ne concerne pas que les ados. Elle s’étend de l’acné du nourrisson, au moment de la naissance, qui disparaît avec les hormones de la maman, jusqu’au 35-40 ans avec sa forme d’acné vulgaire classique. À ne pas confondre avec l’acné rosacée qui est une autre forme de trouble dermatologique. »

À quel moment parle-t-on d’acné ?

D. T. : « Il existe cinq grands symptômes. Les papules plus ou moins élevées, des petits boutons rouges. Des pustules, des sortes de points jaunes. Des comédons ouverts ou fermés, les fameux points noirs. Et la peau grasse. Sans oublier la forme grave, plus rare, l’acné kystique. L’apparition de ces grands symptômes se fait à partir des glandes sébacées présentes dans tout l’épiderme. Donc jamais de formes d’acné

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12 18 ANS

sur la paume des mains ou sur la plante des pieds. Ce sont des glandes accrochées au poil qui la provoquent. La peau grasse, elle, provient du d'un fonctionnement accru des glandes sébaccées. »

Quand et comment un parent d’ado intervient-il ?

D. T. : « C’est très simple, le parent part du ressenti de son enfant. Il ou elle est complexé·e ? On n’hésite pas. Même si on estime qu’il n’y a pas de quoi s’inquiéter outremesure. À l’inverse, il ou elle se contrefiche des deux-trois petits boutons ? Pas la peine de faire quoi que ce soit dans ce cas. Traiter les jeunes contre leur gré ne marche pas bien. Dès que les parents ont le sentiment que les papules sont importantes, il faut convaincre l’ado d’aller consulter soit un·e pharmacien·ne, soit un médecin traitant. Les arguments pour le faire sont on ne peut plus simples : il suffit d’expliquer que plus on attaque tard, plus les risques de cicatrices que l’on garde à vie sont élevés. Facile, non ? »

Est-ce que le parent peut intervenir ?

D. T. : « Bien sûr. Le mieux est de toujours le faire dans une salle de bain bien fermée après une douche bien chaude, dans un bain de vapeur pour traiter les comédons ouverts, avec l'extrémité noire (parce qu'oxydée) ou fermés. Pour ces derniers, ils sont sans orifice, mais vous pouvez les ouvrir en faisant une petite incision via les tire-comédons vendus en pharmacie. On agit toujours avec les doigts propres, éventuellement recouverts d'une compresse stérile, et, bien sûr, avec prudence. On dit dans ces cas-là qu’on fait ‘exprimer’ les comédons. On peut le faire avec les pustules, mais, en revanche, jamais avec les papules rouges. Elles se percent et vont faire d’autres boutons. On ne touche ni aux papules et encore moins aux kystes. »

Il semble que certains médicaments favorisent l’acné ?

D. T. : « En effet, les pilules à prédominance progestatives qui diminuent les règles abondantes favorisent l’acné. La testostérone et ses dérivés fabriqués par les glandes surrénales également. Tout ce qui contient également des hormones mâles androgènes, naturelles ou syn-

thétiques, qui stimulent ou contrôlent une forme de développement peut provoquer des formes d’acnés. Signes cliniques également du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) du fait, là encore, de la production excessive d'androgènes. N’oublions pas que le stérilet ou les implants hormonaux bourrés de progestérone stimulent la production de sébum. Attention aussi à l’acné cosmétique. Je pense aux applications de corps gras qui entraînent l’obstruction des glandes sébacées et vont provoquer boutons ou points noirs par rétention de sébum. Enfin, les hormones mâles chez une jeune fille qui fait une transition pour devenir garçon favorisent également l’apparition d’acné. Mais pas l’inverse, puisque dans ce cas, les garçons qui opèrent une transition pour devenir filles, se voient administrer des œstrogènes qui sont des anti-acnéiques. »

Comment se soigner ?

D. T. : « D’abord, j’insiste sur l’hygiène. L’idée, c’est d’éliminer le gras sur la peau. Pour cela, se laver deux fois par jour avec un savon doux, se shampouiner les cheveux et bien se rincer à chaque fois, c’est un excellent début. Côté traitement, on trouve une variété de produits antibiotiques locaux ou à base de peroxyde de benzoyle. Il existe également des solutions à base de vitamine A pour l’acné comédonienne. Au niveau des traitements locaux, je recommande quelques marques qui se vendent en pharmacie : Bioderma, La Roche-Posay, CeraVe, Avène, Uriage ou SVR. Je n’ai aucun intérêt avec ces marques là, ce sont des gammes que les pharmacien·nes connaissent bien. Parfois mieux que les médecins puisqu’ils ont une formation en cosmétologie. »

Et quand ça ne marche pas, on passe aux médicaments ?

D. T. : « C’est ça. Quand rien de tout cela ne fonctionne et que les formes sévères persistent, on consulte son médecin traitant ou son/sa dermatologue. Les médicaments peuvent être à base de tetracycline, efficaces, sans grande toxicité, sauf en cas de grossesse. D’ailleurs, une femme enceinte ne doit jamais rien prendre par voie orale, parce que cela peut entraîner des problèmes fœtaux. Le mieux est de commencer le traitement au moment des

règles et ne pas tomber enceinte jusqu’à un mois après l’avoir arrêté. Il existe aussi les fameuses gélules d’isotrétinoïne, comme le célèbre Roaccutane. On l’a associé à des effets secondaires telle que la dépression, et aurait malheureusement entraîné le suicide d’ados, surtout aux États-Unis. Je préfère être très prudent quant à ce genre de rapprochement. Je ne dis pas que ça n’existe pas, mais c’est très, très rare. Et il est difficile de le démêler de cette tranche d’âge où le taux de suicide est le plus important. Ce que l’on sait plus, c’est que les médicaments à base de tetracycline peuvent entraîner parfois des nausées, parfois des mycoses vaginales. Et que ceux à base d’isotrétinoïne peuvent entraîner assécher les lèvres et les yeux, et plus rarement les muqueuses. »

TENDANCE

INFLUENCEURS/ INFLUENCEUSES, PAS DERMATOLOGUES

Pas mal de parents nous ont parlé des nombreux faux-amis qui entourent nos ados, les influenceur ses. Dominique Tennstedt, lui, a un avis tranché sur la question.

« TikTok et consorts, c’est bien gentil, mais je doute des connaissances des un·es et des autres. Et encore plus des groupes mal intentionnés qui profitent de cette manne pour faire la promo de leurs mauvais produits. Vous pouvez l’expliquer simplement à vos enfants : quand vous avez un problème mécanique avec votre voiture, est-ce que vous allez voir un influenceur ? Non, vous filez voir votre garagiste. Dans le cas très précis de l’acné, votre garagiste, c’est le dermatologue. À savoir, une personne formée pour expliquer la mécanique du corps, des hormones, vous rassurer et vous conseiller sur la prise de médicaments. »

Mais la meilleure protection face à ces phénomènes émergents, c’est bien vous, les parents. Vous devez rester attentifs à ce que votre enfant vous dit, à ce qu’il ressent. Sans l’affoler. Comme vous le faites pour tout d’ailleurs, non ?

13 31 MAI 2023
« Avec l’acné, plus on attaque tard, plus les risques de cicatrices que l’on garde à vie sont élevés »

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Les bébés-rencontres invitent les mamans, les papas, les grands-parents... à venir avec leur petit de 0 à 3 ans pour un moment de tranquillité et d'échange.

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Éditeur responsable : La Ligue des familles BE0413 220 493

COMMENT

Ça y est, nous sommes engagés dans la dernière ligne droite de l’année scolaire.

Le compte à rebours est lancé, les examens sont dans moins d’un mois. Pour ce numéro, nous avions envie de nous intéresser la clé de la réussite : la motivation.

Dossier réalisé par

La motivation se hisse au statut de colonne vertébrale de la réussite, tant elle joue un rôle central. Sans motivation, pas d’engagement. Sachant que les savoirs et apprentissages ne coulent pas de source et qu’il faut s’y prendre à plusieurs reprises pour les acquérir, c’est dire si la motivation est cruciale. On la pensait simple à définir, il n’en est rien ! La motivation ne se saisit pas comme ça, en deux coups de cuillère à pot. Pour exister, elle a besoin d’ingrédients de base. Une poignée de sens, une dose de compétence, plu sieurs unités de contrôle et une farandole de besoins satisfaits.

Des ados en carence

Cette motivation, elle fait malheureusement souvent défaut chez les ados. C’est ce qui nous a le plus marqué dans la préparation de ce dossier. En réponse à la question de savoir comment motivez-vous votre ado à travailler pour l’école, souvent un silence s’installe. Suivi généralement d’un long soupir. Une manière de signifier la difficulté de la tâche. Tout ceci n’a rien de surprenant. La baisse de motivation constatée à l’ado lescence est tout à fait normale. Parce que les jeunes sont pris dans des transformations physiques et psychologiques. Parce qu’ils/elles aspirent à gagner en liberté et autonomie à l’école. Parce qu’ils/elles ne perçoivent pas la valeur et l’utilité des apprentissages. Et aussi parce que leurs parents sont moins derrière eux. On pourrait encore allonger la liste des motifs de démotivation, mais

LES PILIERS De la MOTIVATION SCOLAIRE

Motivation. Dix lettres qui, ensemble, forment un mot quasi magique. Indispensable aux apprentissages et à la réussite scolaire. Mais que recouvre exactement ce terme et quelles résonances prend-il quand on l’invoque dans les couloirs de l’école ?

Attelons-nous directement à la tâche : définir la motivation scolaire. Un de nos interlocuteurs nous prévient, il existe plus de mille définitions du mot motivation. Alors, nous en donner une, comme ça, clé sur porte, c’est mission impossible. Au fil des échanges, trois éléments communs ressortent : le sens, la compétence, la contrôlabilité.

un trio sacré

La motivation convoque des questions de sens. Si l’élève juge la tâche utile et intéressante, il y puise sa motivation. « Quand l’enfant comprend l’utilité de ce qui lui est demandé, ça donne du relief à la matière », confirme Lorraine Lasserre, coach scolaire. Lucas, 9 ans, rechigne à apprendre ses tables de multiplication. Mais si ses parents tissent des ponts entre ce savoir et son quotidien, tout s’éclaire. Tout à coup, ce n’est plus une table de trois figée dans un cahier de mathématiques, mais une compétence vivante à mobiliser qui permet de savoir combien de boules de glace à 3€ il va pouvoir s’acheter avec un billet de dix.

Deuxième pilier de la motivation : la compétence. Ou plutôt la perception qu’a l’élève de sa compétence. Plus l’élève se sent capable d’effectuer une tâche, plus il sera motivé pour l’accomplir. Dans le cas inverse, il peut jouer les prolongations par manque de confiance. Comme Marguerite, 13 ans, qui bloque sur son

devoir de néerlandais. Son vocabulaire ne lui permet pas de s’acquitter de sa tâche, elle se sent nulle. À ce niveau aussi, le parent peut intervenir et questionner : qu’est-ce qui pourrait t’aider ? Identifies-tu une ressource (un cours de remédiation, un dictionnaire, un camarade de classe) à ta portée ? Troisième pilier : la contrôlabilité. Un enfant sera d’autant plus motivé à s’engager, s’il sent qu’il a prise sur le cours des choses. Que ses réussites et ses échecs dépendent de lui. Le cours de philo d’Adam, 19 ans, est hyper brouillon. Il ne cerne pas ce qu’on attend de lui et ne voit pas comment se préparer pour l’examen. Ce sentiment de perte de contrôle est source de démotivation. Ici encore, le parent peut questionner le jeune : « Que peux-tu faire pour y voir plus clair ? » ; « L’enseignant·e se montret-il/elle disponible aux questions ? » ; « Peux-tu solliciter l’aide d’ami·es ? » ; « Peux-tu déjà avancer sur certaines parties ? ».

Sens, compétence, contrôle. Ces trois piliers indispensables figurent dans la définition proposée par Roland Viau. Selon le chercheur canadien en pédagogie,

la motivation scolaire est « un état dynamique qui a ses origines dans les perceptions qu’un élève a de lui-même et de son environnement et qui a pour conséquence qu’il choisit de s’engager à accomplir l’activité pédagogique qu’on lui propose et de persévérer dans son accomplissement, et ce, dans le but d’apprendre ».

Gaëtan Gabriel, accrocheur scolaire à la Fédération Wallonie-Bruxelles, ajoute un quatrième pilier à la motivation, celui de l’affectif. « L’élève éprouve toute une série de besoins. Des besoins de sécurité, de bien-être, d’appartenance, d’authenticité. La satisfaction de ces besoins va aussi avoir un impact sur son niveau de motivation à fréquenter l’école, être actif/active en classe, fournir un travail à la maison, s’impliquer de manière générale ». Selon lui, cette dimension ne doit pas être négligée.

la motivation ne se décrète pas

À ce stade de la réflexion, un constat s’impose : vous aurez beau dire à votre enfant « travaille, c’est important », s’il ne perçoit pas de sens dans ce qui lui est demandé, ne se sent pas compétent pour le faire, estime ne pas avoir de prise sur la situation ou souffre d’un besoin insatisfait, sa motivation sera en berne. Aldo, élève de 3e secondaire, en fait les frais. Au désespoir de sa mère, il ne s’y met pas. Elle doit tout le temps être sur son dos. Pourtant, elle est convaincue qu’il a les capacités pour réussir son année.

« Rien ne sert de prêcher le travail, il faut comprendre pourquoi le fait de ne pas travailler prend sens pour lui », suggère Gaëtan Gabriel. L’accrocheur rencontre Aldo et constate que sa méthode de travail est bonne. Au niveau des apprentissages, pas de lacunes non plus. En discutant avec l’adolescent, le professionnel constate qu’il ne se sent pas en sécurité dans cette grande école. L’institution est élitiste, cultive la compétition, les enseignant·es sont peu accessibles quand Aldo a besoin d’un cadre plus sécurisant pour déployer son potentiel. Les exemples cités par nos experts sont encourageants. Ils démontrent que rien

« Il y a une méprise courante : penser que la motivation est l’impulsion de départ qui mène à l’action.
C’est l’inverse, c’est par l’action qu’on se motive »
Valentine Anciaux de Psychoeducation.be
16 LE LIGUEUR N°11

n’est irréversible. Que si on est à l’écoute de son enfant, on peut cerner ce qui cause la démotivation. C’est aussi par

BON À SAVOIR

le dialogue qu’on peut le questionner pour voir comment agir positivement sur son contexte.

Motivation intrinsèque ou extrinsèque

AU COMMENCEMENT, LA MOTIVATION

NATURELLE

Jean-Luc Aubert est l’auteur de Comment motiver son enfant à l’école ? (Odile Jacob). Il y explique comment la motivation surgit naturellement chez l’enfant qui cherche à gagner en autonomie. Reste aux parents à embrayer pour cultiver sa soif d’apprendre.

La matière suscite de l’intérêt chez l’élève, elle lui procure du plaisir et de la satisfaction.

Cette motivation est guidée par des objectifs stratégiques comme obtenir une récompense, éviter une sanction ou encore coller aux attentes parentales.

trois types d'engagement

L’engagement affectif : l’élève est intéressé et son attrait nourrit son investissement.

L’engagement comportemental : l’élève se conforme aux attentes du milieu et fait preuve d’une bonne conduite.

L’engagement cognitif : l’élève a la volonté d’apprendre. Il déploie des efforts mentaux et met en place des stratégies (gestion du temps, répétition, mémorisation) pour y parvenir.

Dès son plus jeune âge, l’enfant active ses sens. Il teste, explore, expérimente. C’est ce qu’on appelle « la pulsion épistémophilique », explique Jean-Luc Aubert. « Cette pulsion surgit spontanément dès la naissance et jusqu’aux 6 ans de l’enfant. Comme toutes les pulsions, elle correspond à un besoin. Dans ce cas-ci, gagner en autonomie ». Cette quête d’autonomie opère d’abord sur le plan moteur. Puis, vers l’âge de 3-4 ans, embraye sur l’autonomie intellectuelle. C’est la fameuse phase des pourquoi et des comment. L’enfant cherche à mieux appréhender les choses qui l’entourent. Sa curiosité est intarissable. Tous les parents en font l’expérience avec les « Pourquoi il pleut ? », « Comment la voiture avance ? », « Pourquoi l’herbe pousse ? », « Comment la vache fabrique du lait ? ». La source des questions ne tarit pas et quand l’enfant ne questionne pas, il joue, il invente, il crée.

une flamme à entretenir

Pour Jean-Luc Aubert, pas de doute, la curiosité naturelle est le moteur de la motivation. Tous les enfants en sont dotés. Comment la cultiver ? C’est là qu’intervient le parent. « Quand cette pulsion se manifeste, c’est important que le parent accompagne cette soif de savoir et réponde positivement aux sollicitations, explique Jean-Luc Aubert. Les réponses du parent procurent du plaisir à l’enfant. Plaisir de la découverte qu’il va spontanément chercher à renouveler ». Rassurez-vous, vous ne devez pas avoir réponse à tout. Le simple fait de prêter attention à ses questionnements, d’y répondre dans la mesure du possible suffit, ajoute Jean-Luc Aubert.

À l’inverse, l’enfant qui n’a pas l’occasion de poser des questions ou à qui on ne prête pas une oreille attentive va progressivement perdre sa curiosité naturelle. Piégé dans cette carence, il éteint sa flamme sensée entretenir sa motivation. Pour Jean-Luc Aubert, cette lacune peut être compensée par la suite, mais c’est toujours plus compliqué d’inverser le cours des choses si on a laissé s’éteindre la petite flamme. Bref, celle-ci doit s’entretenir dans l’écoute et le dialogue.

cercle
vertueux ou vicieux
e ngagement motivation persévérance performance d é s e ng agement démotivation échec abandon 1 2 3 17 31 MAI 2023

LEUR (Re) D’AVOIRL’ENVIEDONNER ENVIE

La motivation se situe au carrefour des questions de sens, de compétence, de contrôle et de besoin . Comment agir sur ces ingrédients ? Deux coachs scolaires, un conseiller en orientation, un enseignant, une psychoéducatrice et une psychologue nous livrent leurs pistes.

SENS

TROUVER LA BONNE ORIENTATION

La question de l’orientation est essentielle pour injecter du sens. On la développe avec Philippe Fonck, directeur du CIO (centre d’information et d’orientation de l’UCLouvain).

La question du sens s’invite surtout à l’adolescence. Avant cela, l’élève fait son petit bonhomme de chemin sans trop se poser de questions. C’est vraiment en secondaire qu’il/elle opère ses premiers choix : qu’est-ce qui le/la fait le plus vibrer, latin ou néerlandais ? Dans quelle carrière se projette-t-il/elle ?

Philippe Fonck constate un besoin de sens généralisé chez les jeunes. Selon lui, trois raisons peuvent l’expliquer. Primo, l’élève a sous-estimé la charge ou la méthode de travail de l’enseignement choisi. Deuxio, son choix ne correspond pas ou plus à son aspiration profonde. Tertio, des éléments perturbateurs (problème familial, difficultés relationnelles…) le polluent.

Le CIO a développé une offre de service pour y répondre. Les entretiens individuels permettent aux conseillers et conseillères d’orientation de cibler la nature du problème. Si la difficulté porte sur l’apprentissage, la remédiation est la bonne piste. Si c’est un choix mal posé, c’est à la réorientation qu’il faut penser. Des ateliers de réorientation sont organisés à plusieurs moments de l’année. « Ils se déroulent sur trois jours et permettent au jeune de se retrouver avec des pairs confrontés à la même situation. Ensemble, ils vont travailler sur leurs intérêts, leurs compétences, le

tout dans une dynamique de groupe ». Le centre a également créé une série de capsules vidéo dans laquelle des jeunes témoignent de leur parcours de réorientation (à voir sur le compte YouTube du pôle académique de Louvain). Dans l’une de celles-ci, Jonathan utilise l’image du slinky, petit ressort qui descend les escaliers, pour illustrer son parcours. Après une formation en menuiserie, il décide d’embrayer sur des études d’anthropologie. Monté sur ressort lui aussi, l’étudiant explique comment cette première expérience professionnelle lui a servi à gagner en maturité et à aborder avec confiance ses études universitaires.

Les questions sociétales sont aussi très prégnantes chez les jeunes. Le contexte multi-crises est source d’anxiété. Le CIO a développé pour les 5e et 6e secondaire un atelier « S’orienter dans un monde en changement » pour répondre à cette préoccupation.

le conseil aux parents :

Rien ne sert de s’enferrer dans un rôle de contrôle ou de prescripteur, le jeune en quête de sens a besoin d’écoute. Ne focalisez pas tout sur l’école, valorisez aussi ce qui est positif en dehors pour son estime de lui.

à lire

Sur leligueur.be, notre dossier : Orientation en secondaire : l’avenir commence aujourd’hui

COMPÉTENCE

RENFORCER SA CONFIANCE

Lorraine Lassere est coach scolaire, elle accompagne des groupes d’élèves dans la préparation de leurs examens. C’est par le prisme de la compétence, et plus particulièrement de la confiance en soi, qu’elle aborde la motivation.

« La seule personne que l’on peut motiver, c’est soi-même. Le parent n’a qu’un accès indirect à la motivation de son enfant. En revanche, il peut emprunter le chemin de la confiance pour agir dessus.

L’élève a besoin d’avoir confiance en ses compétences pour se mettre en action et persévérer. Je pars toujours de ce qu’ils/elles aiment faire et qui suscite leur motivation.

C’est une manière de faire tomber les barrières entre l’école et l’extra-scolaire. On essaye de voir ensuite comment ils/elles peuvent transposer cette énergie positive dans la sphère scolaire.

Une autre manière d’y parvenir est de leur

18 LE LIGUEUR N°11

ADAPTER SON ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL SUR MESURE

Gaëtan Gabriel est accrocheur scolaire à la Fédération Wallonie-Bruxelles. Il évoque l’environnement de travail comme un levier sur lequel l’élève a prise.

« Pour commencer, on dédramatise l’Everest à gravir. Oui, il va falloir travailler, mais on va fixer un début et une fin et les définir en fonction du temps pendant lequel l’élève est capable de se concentrer. Structurer le temps, c’est aussi identifier les moments où son esprit est vif et ceux où placer les pauses. Il y a d’autres éléments de l’environnement à prendre en compte : l’élève travaille mieux seul·e ou à

plusieurs ? Dans sa chambre ou dans un lieu de vie ? Assis·e ou en mouvement ? En récitant tout haut ou en faisant des fiches visuelles ? La plupart du temps, il lui sera difficile de répondre à ces questions. C’est là que le parent intervient, en aidant son enfant à tester différentes formules. C’est un processus d’affinage que de construire un environnement de travail adapté. Tout le rôle du parent sera d’accompagner, il n’y

a pas de baguette magique, à chacun de trouver la formule qui convient. »

le conseil aux parents :

Avec un élève démotivé, la première chose à faire, c’est de normaliser. C’est normal de ne pas être motivé par tout, tout le temps. En tant que parent aussi, on éprouve de la démotivation. Le simple fait de le reconnaître apaise et rassure.

LES AMENER À SE PROJETER

Valentine Anciaux, fondatrice de Psychoeducation.be, mise sur la piste de la projection pour doper la motivation des élèves qu’elle reçoit en consultation. Se définir un projet, un rêve, une destination, c’est injecter du sens, mais aussi reprendre le contrôle sur sa situation.

demander d’écrire sur des bouts de papier ce qui les rend fiers, que ce soit à l’école ou non. Si un de ces petits papiers est ‘la danse à la fancy-fair’, l’objectif, c’est de voir avec l’enfant ce que cette réussite a mobilisé comme compétence. Ici, ce sera par exemple le respect des consignes et la mémoire pour retenir la chorégraphie. »

le conseil aux parents :

« Je pense qu’il faut réhabiliter deux choses aux yeux des parents : l’erreur et la pause. Il y a toujours quelque chose à apprendre d’une erreur. C’est une opportunité, et comme le dit bien l’expression, c’est en se plantant qu’on fait les meilleures racines. La pause, elle, est souvent sous-estimée. Elle joue pourtant un rôle important dans l’apprentissage : éviter au cerveau de surchauffer et mettre de l’ordre dans les idées. Une pause doit être relaxante, récréative ou relationnelle. Comme le cerveau imprime mieux les informations en début et en fin de séance de travail, deux courtes séances de travail entrecoupées d’une pause valent mieux que une longue, on multiplie ainsi par deux les opportunités de retenir. »

« J’utilise souvent un mètre et je marque une croix en dessous du chiffre qui correspond à leur âge. C’est une manière de leur faire réaliser qu’ils ne sont qu’au début de leur vie. Je leur demande ensuite de se projeter : comment te vois-tu quand tu auras 18 ans ?

Selon la personnalité, l’âge de l’enfant ou de l’ado, on peut choisir différentes portes d’entrée comme les quatre questions de Fred Pellerin, un conteur québécois : c’est quoi ton rêve ? C’est pour quand ? Qu’est-ce que tu as fait pour lui aujourd’hui ? En quoi ton rêve est bon pour le bonheur des autres aussi ? Autre approche, jalonner les choses dans le temps. On peut le conscientiser avec la technique du 5-4-3-2-1  : qu’aimerais-tu faire dans cinq ans, dans quatre mois, dans trois semaines, dans deux jours et dans une heure ? Cette projection à échéances multiples fait que le cerveau s’enclenche et s’anime,

cherche des perspectives à égrainer dans le temps pour l’aider à atteindre sa destination finale.

Le tableau de visualisation (vision board) fonctionne aussi très bien avec les plus visuels. C’est un collage géant composé d’éléments visuels inspirants que l’on place à un endroit de passage. Devant une photo d’un foulard scout et d’une plage, le cerveau comprend que s’il ou elle veut profiter de son camp scout et partir en vacances en famille, il faudra réussir sans examen de passage. »

le conseil aux parents :

Peu importe la méthode, l’objectif est identique : sortir de l’instant présent et offrir de nouvelles perspectives. Chercher le truc plus grand qui allume son feu intérieur. Toucher du doigt sa motivation profonde et voir comment on peut l’amener sur cette voie.

19 31 MAI 2023
CONTRÔLE SENS + CONTRÔLE

BESOINS

CHOISIR EN FONCTION DE SES BESOINS

Francine Belair est une psychologue canadienne. Depuis plus de trente ans, elle forme des professionnel·les à la théorie du choix.

Selon l’approche de la théorie du choix, nous éprouvons toutes et tous cinq besoins : sécurité, appartenance, pouvoir, plaisir et liberté. Aucun n’est supérieur à un autre, si ce n’est celui qui est en souffrance et qui va alors devenir prioritaire. La force de cette approche ? C’est à l’enfant ou au jeune de choisir en fonction de ses besoins. D’habitude, c’est le parent qui décide pour son enfant. Ici, on permet à ce dernier de réfléchir et de poser des choix. Cela implique de la part du parent qu’il sorte de son rôle de prescripteur ou de conseiller, ce qui est assez inhabituel. Plutôt que de dire « Va travailler », il interroge : « Tu as du travail pour l’école ? Est-ce que travailler t’aidera à réussir ? Qu’as-tu fait jusqu’à présent pour réussir ? Est-ce suffisant ? ». En fonction des réponses, on pourra cibler le besoin en souffrance. Il a peut-être envie de jouer avant pour satisfaire son besoin de plaisir. Ou d’inviter un·e ami·e qui comprend mieux la matière pour satisfaire son besoin d’appartenance. Ou de se soustraire à la contrainte pour exprimer son besoin de liberté. Résultat : l’enfant fait l’expérience des conséquences de

PRÉSENTER UNE PROPOSITION DE TRAVAIL SÉCURISANTE

Maurice Cornil est enseignant et directeur d’un service d’accrochage scolaire (SAS). Il reçoit chaque année des élèves qui ont décroché à qui il soumet une nouvelle proposition de travail.

« Il y a quelque chose dans le parcours des décroché·es qui est venu casser la dynamique scolaire. Ça peut être leur estime de soi qui a été abimée, le fait qu’on les catalogue ‘mauvais·e élève’, un problème de harcèlement ou familial… Tout à coup, ils/elles décrochent, pas seulement de l’école, de la vie sociale aussi. Au SAS, on leur soumet une proposition qui allie un travail personnel et une dynamique collective. Notre approche est très organisée et explicitée. On les informe du cadre de travail très structuré avec des règles, un horaire, l’interdiction d’avoir leur téléphone pendant les ateliers. Contre toute attente, c’est très bien accepté, c’est même sécurisant pour eux. Notre travail se concentre surtout

BESOINS à lire

déconnectés humainement. Pour leur développement, ils doivent rencontrer d’autres jeunes. C’est tout autre chose de se confronter à l’autre en présentiel que sur les réseaux sociaux. Les jeunes sont beaucoup trop plongés dans un monde rêvé avec leur smartphone, ils se construisent une identité virtuelle idéalisée plutôt que de s’affirmer tels qu’ils sont. Il y a un décalage entre ce monde imagé et la réalité de la vie. Certains s’enferment dans ce monde factice et sont de moins en moins aptes à se frotter au réel. »

le conseil aux parents :

« N’ayez pas peur de fixer des balises avec votre jeune. Bien sûr, elles ne seront pas toujours respectées, mais ce n’est pas pour ça qu’il ne faut pas en mettre. Elles serviront de base au dialogue. Je reçois tellement d’appel de parents désespérés qui n’arrivent plus à réveiller leur ado le matin tout ça parce qu’il n’y a pas eu de cadre, qu’il a passé la moitié de la nuit sur son téléphone. »

Sur leligueur.be, notre dossier : Décrochage scolaire, symptôme d’une jeunesse fragilisée

20 LE LIGUEUR N°11

tRuCs et astuCes PouR MOTIVER VOS ENFANTS À TRAVAILLER

TESTÉS ET APPROUVÉS PAR LES PARENTS

Il n’y a pas de recette prête à l’emploi pour motiver son enfant à travailler. Ce qui est vrai pour l’un·e n’est pas forcément valable pour l’autre. Puisqu’il faut tester pour trouver le bon filon, voici quelques idées en guise d’inspiration.

« L’objectif, c’est qu’ils connaissent la matière. On ne fait pas de différence entre un devoir, une leçon, un bilan ou un examen. C’est une manière de ne pas mettre la pression, mais aussi de s’assurer que les enfants fournissent un travail régulier tout au long de l’année. »

Isabelle, maman de trois enfants de 7 et 9 ans

« Pour le petit, je fonctionne avec un minuteur que j’actionne sur cinq minutes. C’est un contrat de confiance entre nous, il sait que je ne dépasserai pas ce temps. Par contre, s’il se met à faire autre chose, je mets sur pause. Avec le grand, j’ai mis en place une routine : maison, devoir, jeu. Les choses doivent être claires, sinon le cerveau a la capacité de trouver un plan B en moins de cinq secondes. On évite ainsi les discussions. Il sait que dès qu’on rentre, on travaille pour l’école. »

Lorraine, maman de deux garçons de 6 et 9 ans

« C’est la question du sens qui pêche. Elle ne voit clairement pas l’intérêt de résoudre une équation à double inconnue. Pour les maths, je sais que je dois bloquer du temps et me mettre à côté d’elle pour créer le déclic. Pour le reste, heureusement, elle s’en sort seule. Mon rôle est plutôt de veiller à ce que le travail soit fait à temps et pas à la dernière minute. Pour profiter de la danse et des copines le week-end, elle doit anticiper son bilan de maths et répartir la matière sur les cinq jours de la semaine. C’est clairement l’extrascolaire qui la motive à travailler pour l’école. »

Aude, maman d’une ado de 15 ans

« Avec ma fille de 7 ans, le plus compliqué, c’est la lecture. Après quelques essais-erreurs, j’ai trouvé un système qui fonctionne. On choisit ensemble des livres à la bibliothèque et chaque soir on en lit un. Elle commence à lire la première page, puis moi la suivante et ainsi de suite sauf si elle fait plus de trois fautes alors c’est elle qui poursuit. Mon fils a des difficultés à canaliser son énergie. Il m’a fallu un an pour comprendre que ça lui coûtait de rester assis. Depuis que j’ai compris ça, je lui laisse la liberté de réviser dans la position qui lui convient. Je le fais aussi réciter dans le mouvement, parfois même sous forme de jeux de balle. Ça ajoute un petit côté ludique, il en oublie même parfois qu’il travaille. »

Christelle, maman de deux enfants de 7 et 9 ans

« Son niveau de motivation est assez catastrophique. On en est au stade où on fait les comptes : il reste six semaines à travailler pour pouvoir profiter des sept semaines d’été. J’utilise clairement une carotte morale. Puisqu’elle subit l’école, autant ne pas jouer les prolongations et réussir son CE1D. Le fait d’aller voir un coach scolaire a été bénéfique, cela a permis de mettre en avant son esprit compétitif. Je joue là-dessus pour l’inciter à se fixer des défis et des objectifs. Elle a aussi pu bénéficier de conseils méthodologiques qui lui permettent d’être plus efficace dans son étude et ça se ressent au niveau de ses résultats. Mine de rien, ça joue aussi sur sa motivation. »

Vanessa, maman d’une ado de 13 ans

« On discute beaucoup et on la laisse décider des choses à mettre en place. Par exemple, pour les maths, elle ne veut pas entendre parler du cours de remédiation, ni de celui qui prépare au CE1D. C’est finalement auprès d’un de nos amis qu’elle a demandé de l’aide. Avec lui, elle se décrispe et je la sens plus disponible pour les explications. Il a vraiment une chouette approche, par exemple, au lieu de lui dire ‘Tu t’es trompée’, il lui dit ‘Là, je ne suis pas d’accord avec toi’, c’est tout bête mais ça passe crème !

L’autre ressource qu’elle a bien voulu prendre, c’est l’aide à la planification proposée par sa titulaire. C’est une vraie compétence d’estimer le temps de travail pour chaque matière, de le planifier dans le temps et de l’anticiper. C’est en discutant qu’elle s’est rendue compte qu’elle perdait du temps à se demander à chaque fois ce qu’elle devait faire et quelle matière travailler. »

Delphine, maman d’une ado de 14 ans

21 31 MAI 2023

EMBARQUEZ À BORD DE LA GALAXIE ÉCOLE

On en entend des abréviations quand on parle du fonctionnement d’une école. Trop souvent, les parents sont largués et n’osent pas demander ce qui se cache derrière telle ou telle appellation. Voilà donc l’univers de l’école de votre enfant. Embarquement immédiat.

FÉDÉRATION DES ASSOCIATION DE PARENTS

FAPEO

UFAPEC

L’Union des Fédérations des Associations de Parents de l'Enseignement Catholique.

CONSEIL DE PARTICIPATION (CP)

Fédération des Parents et des Associations de Parents de l'Enseignement Officiel

ASSOCIATION DE PARENTS

PA R ENTS

Constituée au minimum d’un·e président·e et d’un·e trésorièr·e. C’est autour de l’AP que s’organisent les différents groupes d’activités menés par les parents. L’AP facilite les relations école-famille. Fait remonter des problématiques et organise les possibles. Plus une association des parents est dynamique, plus la vie de l’école l’est.

CEF

Comité des Élèves Francophones

DÉLÉGUÉS

Un conseil qui réunit le ou la chef·fe d’établissement ainsi que des travailleurs ou travailleuses dans l'environnement de l'établissement, des membres élu·es et des parents, ainsi que le ou la délégué·e des élèves. Sur le papier, le Conseil de participation se réunit au moins quatre fois par an, ce qui est rarement le cas. Les parents sont souvent cantonnés à un rôle consultatif. En réalité, le CP est aussi le lieu pour aborder tout ce qui est lié aux coûts, à ce que vous payez, aux grands projets et à la direction que vous voulez leur donner, à l’accompagnement des familles les plus précaires et aux allersretours avec les pôles territoriaux. N’hésitez pas à saisir cet important outil démocratique.

EXTRA S C OLAIRE ÉLÈVES
22 LE LIGUEUR N°11
ATL GARDERIES LIBRE ÉCOLE

OFFICIEL

PO (OFFICIEL)

Même rôle que pour l'officiel, mais est composé de personnes issues de la société civile. Il ressemble fort au fonctionnement d’une association. Il est composé d’un·e président·e, de membres qui appartiennent tant à des diocèses qu’à des congrégations religieuses, de parents ou de membres d’asbl. Souvent, le PO participe au Conseil d‘entreprise (CE), aux Conseils de Participation (CP) et aux Comités pour le Prévention et la Protection du Travail (CPPT) de chaque école.

PÔLES TERRITORIAUX

Leur rôle ? Accompagner les élèves à besoins spécifiques dans l’enseignement ordinaire. Soit dans un protocole d’aménagement raisonnable, soit dans l’optique d’une intégration permanente totale. Le tout chapeauté par une coordination composée de conseillers et d'accompagnateurs : enseignants, ergothérapeutes, logopèdes… qui siègent au côté du PO pour coller au mieux aux réalités de chaque école.

SYNDICATS

ÉCOLES DES DEVOIRS

CPEONS

CANTINES

CECP

ÉCOLE SPÉCIALISÉE

CPMS

D I R ECTION 23 31 MAI 2023
WBE
ORDINAIRE FELSI
SEGEC FÉDÉRATIONS DES PO PO (LIBRE)
Le Pouvoir Organisateur. Il détermine le choix des méthodes pédagogiques, le programme, l'engagement des enseignants, les valeurs principalement véhiculées ainsi que le Règlement d’Ordre Interiéue (le ROI). Il est composé de la Wallonie-Bruxelles Enseignement (WBE) des provinces, des villes, des communes et de la Commission Communautaire française (COCOF).

Solaÿman Laqdim :

n’y a pas d’enfants pauvres »

Classé premier parmi les candidat . es au poste, Solaÿman Laqdim est le troisième Délégué général aux droits de l’enfant (DGDE) de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Au-delà de ses compétences amplement reconnues, nous avons rencontré un homme à l’histoire humainement riche et aux convictions fortes, parfaitement en phase avec la fonction.

C’est dans ses bureaux, tout simplement, que nous rencontrons Solaÿman Laqdim, 43 ans, père de deux filles, en ayant pu nous glisser dans un agenda hyper chargé depuis sa prise de fonction au 1er février 2023. Son prénom se prononce ‘Soulémane’, un prénom chargé de sens comme il l’explique lui-même.

« On est tous le produit de notre histoire. Or le O n’existe pas en arabe. Solaÿman, c’est la traduction de Salomon dont l’étymologie touche à la sagesse et Laqdim veut dire l’ancien. Mais Laqdim n’est pas mon vrai nom. Dans la région de mes grands-parents, on se définit par la généalogie, mon père peut ainsi remonter jusqu’à neuf ou dix générations. Mais quand mon grand-père

est venu dans les charbonnages belges, il s’est présenté à l’état civil où l’on ne parlait que flamand. Au lieu de donner son nom, il a donné celui du petit hameau d’où il venait, le vieux marché du lundi. La préposée a noté ce mot : Laqdim, vieux. »

Est-ce que ce nom rend le Délégué davantage porte-parole des enfants d’origine étrangère ? « Le Délégué général est le délégué de tous les enfants sans aucune distinction, mais, à ma nomination, j’ai découvert un aspect dont j’avais sous-estimé la portée symbolique, celle du référent positif pour la communauté arabo-berbère. J’ai reçu énormément de demandes d’amitié sur Facebook de filles et de garçons de quartier qui me félicitaient. J’ai aussi eu des témoi-

gnages d’enfants devenus adultes dont je m’étais occupé professionnellement. Cela m’a beaucoup touché ».

L’ENFANCE DU DÉLÉGUÉ

AUX DROITS DE… L’ENFANT

Au fond, quelle a été l’enfance du Délégué général aux droits de l’enfant ? Il se définit lui-même en quatre mots : « Bruxellois d’origine, Liégeois d’adoption ». Et complète : « Mon père, après mon grand-père, est venu très jeune en Belgique pour travailler dans les charbonnages du côté de Zolder, début des années 1970. Ma maman, Marocaine qui a grandi à Oran en Algérie, arrive aussi très jeune. Elle est mariée à mon père à 16 ans et donne naissance à mon

« Il
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frère un an plus tard. Je suivrai assez vite. Je suis né dans une famille modeste avec des parents qui n’ont pas eu la chance de suivre des études et qui ont travaillé très tôt, une famille modeste mais qui n’a manqué de rien et était profondément heureuse ».

Solaÿman Laqdim avait 11 ans quand la fonction du Délégué a été créée en 1991, une institution plutôt récente en Belgique, même si notre pays est le deuxième à l’avoir instituée après la Norvège. En pensant à l’enfant qu’il était, qu’aurait-il eu envie de dire au Délégué de l’époque ?

« Si je repense à cette époque, je me définis comme un mec de quartier. J’ai vécu beaucoup de choses dans ma vie et cela m’a donné la capacité de comprendre les mécanismes d’exclusion vécus par certaines personnes, bien au-delà de la question ethnique. Je sais ce que c’est d’être rejeté, cela m’a rendu plus fort et peut-être plus humain. Beaucoup d’amis sont devenus ce qu’ils ne voulaient pas être malgré les valeurs transmises par leurs parents. Ils avaient reçu une bonne éducation, mais je voyais qu’ils tournaient mal. Je trouvais cela injuste. Si j’avais rencontré le Délégué à l’époque, je lui aurais demandé de mettre tout le monde sur la même ligne de départ, avec les mêmes chances, car il y a un potentiel dingue dans les quartiers, d’offrir les mêmes accès au sport, à la culture, aux loisirs. Et puis de proposer un accompagnement parental de qualité qui parte du principe que les parents ont des compétences, où on respecte leurs choix éducatifs, pour peu qu’ils ne mettent pas en danger l’intégrité physique, psychologique ou sexuelle de l’enfant. Cela permettrait de favoriser des trajectoires qui auraient un tout autre sens. Je lui aurais aussi dit : ‘Donnez-nous notre chance et ne nous considérez pas comme des enfants illégitimes de Belgique’ ».

MERCI AU SPORT ET À L’ÉCOLE

Deux domaines ont été déterminants pour Solaÿman Laqdim : le sport et l’école. « J’étais un fan de basket, se souvient-il. Je jouais en club à l’UAAE (Union des Anciens Athénées d’Etterbeek). Les gens du club nous donnaient notre chance. Si nos parents ne pouvaient pas payer la cotisation, ce n’était pas un problème. Ce club était dans une logique d’inclusion. Et j’ai été scolarisé à Bruxelles, à Saint-Stanislas où, pour l’anecdote, a également été Bernard De Vos. Cette école a donc formé deux Délégués généraux aux droits de l’enfant, ajoute Solaÿman Laqdim en riant. Certains professeurs nous considéraient dans une relation d’équité, en nous transmettant du savoir d’une manière ludique et respectueuse. J’ai un prof de

maths qui me les a tellement bien enseignées que je regarde encore des démonstrations sur YouTube tellement cela me passionne. Nos cerveaux sont câblés pour apprendre par le jeu ».

Solaÿman Laqdim poursuit ses études à l’ULB avec un master en criminologie, qui lui offre une grille de lecture des mécanismes d’exclusion, ainsi qu’en coopération au développement, qui est une ouverture sur le monde avec un mémoire sur l’immigration rifaine de Belgique comme facteur de développement pour sa région d’origine. Très tôt, à 17, 18 ans, il veut gagner sa vie en aidant des gens qui galéraient.

« J’ai toujours voulu me rendre utile, préciset-il, parce que j’ai eu cette grande chance d’avoir eu des parents bienveillants, d’appartenir à cette première génération née en Belgique et je me sens profondément Belge et fier d’être Belge. J’ai surtout été entouré de bonnes personnes, qui m’ont permis de développer des passions, ce qui évite d’être attiré par d’autres choses. Je dis souvent aux enseignants, aux travailleurs sociaux, aux éducateurs de ne pas sous-estimer l’influence qu’ils peuvent avoir sur les trajectoires, parfois à travers une simple phrase. »

DES VICTOIRES INVISIBLES

Professionnellement, Solaÿman Laqdim est riche d’une expérience de vingt ans dans le secteur de la jeunesse et de la protection de la jeunesse, où il a multiplié les expériences. D’abord comme éducateur au CEMO et à SOS Jeunes, puis dans un service résidentiel qui accueille des jeunes qui ont subi des violences, Copain Park, où il a été référent scolaire.

« Le but était de leur permettre d’acquérir les apprentissages à l’école et de leur apporter un vrai soutien. C’était un vrai défi, mais cela apportait aussi une vraie reconnaissance. L’un d’eux est devenu docteur en économie. C’est ce que j’appelle les victoires invisibles que ce secteur produit et dont on parle peu. »

Il migre ensuite dans le petit village de Poucet, près de Waremme, et travaille comme criminologue au Parquet de Huy et Liège en section jeunesse, puis comme directeur-adjoint au Service de la Protection de la Jeunesse de Liège chargé de la mise en œuvre des décisions judiciaires dans le cadre de l’aide contrainte.

« On sautait d’urgence en urgence, se sou-

vient-il, on prenait des décisions qui impactaient considérablement la parentalité et la trajectoire de vie des enfants, avec un manque de moyens mais beaucoup de créativité. Je me suis beaucoup questionné à l’époque sur l’équilibre à trouver entre vulnérabilité des enfants et mécanismes de protection. Je suivais 400 jeunes de manière permanente, des dossiers judiciarisés où l’on est au bout d’un processus avec des situations de danger manifeste pour les jeunes. J’ai vu des profils socio-économiques très faibles, en décrochage scolaire et surreprésentés dans l’enseignement spécialisé, dans des familles recomposées pour la sixième ou septième fois, à tel point que les fratries n’étaient pas claires. J’ai pleinement pris conscience que si on veut changer les choses, cela passe par de l’accompagnement parental bienveillant et préventif, ce que recommande d’ailleurs la Convention, par une politique scolaire plus inclusive et par une politique sociale plus ambitieuse qui permette de ne plus placer des enfants pour des raisons de pauvreté, d’autant que le coût d’un placement est de 55 000€ par jeune et par an. Je ne dis pas qu’il ne faut pas placer, je ne suis pas dans l’angélisme, mais on ne travaille pas assez avec les parents, en vue d’une éventuelle réintégration familiale. »

LA PRIORITÉ DU DÉLÉGUÉ

On verra encore Solaÿman Laqdim passer par le cabinet d’un ministre de l’Aide à la jeunesse, puis à la tête du service de prévention à Liège-Huy-Verviers, juste avant de devenir Délégué. Délégué à qui nous avons eu envie de demander, pour conclure, quelle était sa priorité des priorités.

« Si je décline mon plan d’actions, ce que l’on retrouve en toile de fond, c’est la question de la précarité. Et j’insiste souvent : il n’y a pas d’enfants pauvres. Par contre, il y a des enfants qui vivent dans des familles pauvres. On ne peut pas dissocier les enfants et leurs parents. Notre public cible, c’est les jeunes et les familles vulnérables. Les parents sont les principaux agents socialisateurs. Ils sont des partenaires incontournables pour faire appliquer les droits de l’enfant. Si on veut aider ces enfants et éviter les atteintes à leurs droits, on doit avoir une réflexion globale et une action sur la pauvreté grandissante. »

25 31 MAI 2023
« Les parents sont des partenaires incontournables pour faire appliquer les droits de l’enfant »

Où sont passés les nouveaux pères ?

Nous entendons régulièrement autour de nous parler des nouveaux pères, plus impliqués dans l’éducation et les soins aux enfants, qui font les lessives, préparent les repas, changent les couches, trient les vêtements, assistent aux réunions de parents… Mais, en réalité, cette expression est utilisée depuis plus de quarante ans et masque un statu quo dans les statistiques de répartition de l’emploi du temps entre les femmes et les hommes et dans la prise des congés parentaux par les pères.

Par Lola Galer, chargée d’études à la Ligue des familles

Les chiffres parlent d’eux-mêmes concernant la répartition inégalitaire des tâches ménagères et des soins aux enfants. Les hommes effectuent davantage de travail rémunéré et disposent de plus de temps libre, tandis que les femmes prennent en charge davantage de tâches ménagères et s’occupent plus des enfants.

Les mères qui ont de jeunes enfants (moins de 7 ans) consacrent en moyenne deux fois plus de temps que les pères à la garde et à l'éducation des enfants (16h06 par semaine pour les mères contre 8h34 pour les pères).

Pour les femmes, le nombre moyen d’heures de travail rémunéré diminue considérablement lorsqu’elles ont des enfants. Les tâches ménagères augmentent beaucoup et restent très présentes, même lorsque les enfants grandissent. Les tâches domestiques représentent 20h32 par semaine pour les mères, 12h25 pour les pères.

En moyenne, par semaine, les mères consacrent 13h35 de moins au travail rémunéré que les pères, 15h39 de plus à la garde des enfants et aux tâches domestiques (chiffres Institut pour l’Égalité des Femmes et des Hommes). Des chiffres qui ont tendance à très peu évoluer dans le temps. Récemment encore, la crise du coronavirus a mis en évidence la persistance de différences dans la répartition des tâches entre les hommes et les femmes.

Avec les pères et les mères confiné·es à la maison, on aurait pu espérer une révolution en la matière, mais, au contraire, le confinement a renforcé l'inégalité entre les genres. Bien que les hommes aient été à la maison en moyenne 4 heures de plus chaque jour pendant le lockdown, ils n'ont fait que six minutes de plus de travaux ménagers.

LES CONGÉS PARENTAUX SONT EN GRANDE MAJORITÉ UTILISÉS PAR LES FEMMES

Les chiffres en matière de prise de congés familiaux ou de réduction du temps de travail montrent que lors de la naissance des enfants, ce sont les femmes qui supportent les changements nécessaires pour rendre possible la conciliation vie de travail-vie de famille.

En 2022, à peine 5 000 pères ont pris un congé parental à temps plein ou à mi-temps alors que les mères étaient quatre fois plus nombreuses. 4 travailleurs à temps partiel sur 5 sont par ailleurs des femmes. Les femmes qui travaillent à temps partiel sont 45% à expliquer le faire pour concilier travail et vie de famille, contre 28% des hommes.

COMMENT FAIRE DES NOUVEAUX PÈRES UNE RÉALITÉ ?

Les compétences parentales s’apprennent. Lors de la naissance de l’enfant, ni le père ni la mère n’est plus compétent.e que l’autre pour en prendre soin. Mais en passant dix semaines de plus que le père à s’occuper de l’enfant, la mère développe des compétences et un savoir autour de l’enfant. Le père, quant à lui, n’a pas ce temps puisqu’il bénéficie de vingt jours seulement de congé de paternité. Plus le temps avance, plus le différentiel est important… et plus les inégalités s’installent.

La Ligue des familles appelle à allonger le congé de paternité/coparentalité à quinze semaines. Objectif : le rendre identique à celui de la mère et instaurer ainsi une réelle coresponsabilité parentale entre les femmes et les hommes dès les premières semaines de vie de l’enfant. Elle plaide également pour le rendre obligatoire (dans ses vingt jours actuels, puis progressivement les neuf premières semaines, comme le congé de maternité) et permettre ainsi à tous les pères/coparents d’y recourir sans craindre des conséquences professionnelles négatives. Ces seules mesures ne sont pas suffisantes pour rétablir complètement les déséquilibres actuels, mais on sait que ces inégalités se cristallisent lors de la naissance des enfants. Il est dès lors nécessaire d’agir dans les premières semaines de vie de l’enfant car, après, les habitudes sont difficiles à changer. Ces mesures ambitieuses sont possibles, l’Espagne l’a fait en augmentant le congé de paternité à seize semaines et en rendant les six premières semaines obligatoires. À quand en Belgique ?

26 LE LIGUEUR N°11
ÉDITO
En moyenne, par semaine, les mères consacrent 13h35 de moins au travail rémunéré que les pères, 15h39 de plus à la garde des enfants et aux tâches domestiques

AGENDA JOB

BROCANTE

ENGHIEN

Livres – Jeux vidéo

Dimanche 18/06 de 8h à 13h

Où ? Collège St-Augustin –Pavé de Soignies

Contact : 02/395.92.61

PETIT DÉJEUNER

DOTTIGNIES

Dimanche 11/06 de 8h à 11h30

Où ? Hall de l'Europe – rue de l'Arsenal

Contact : 0479/87.38.11

ACTIVITÉS DIVERSES BRUXELLES (SAINT-GILLES)

La face cachée du clic – rencontre des Ami·es du Clic Éthique

Samedi 17/06 de 10h à 14h30

Où ? CEMEA – Rue de la Porte de Hal, 39

Contact : a.randazzo@liguedesfamilles.be

ATELIERS DES PARENTS

Ce perfectionnisme qui m’enchaîne : des outils pour m’en libérer

Jeudi 8/06 de 20h à 22h

Où ? En ligne via Zoom

Contact : 0479/49.32.02

Faire de mon/ma partenaire du couple, mon allié·e dans la parentalité

Mardi 13/06 de 20h à 22h

Où ? En ligne via Zoom

Contact : 0479/49.32.02

Burnout parental : des clés pour le prévenir et en sortir

Mardi 20/06 de 20h à 22h

Où ? En ligne via Zoom

Contact : 0479/49.32.02

OVERIJSE

Permaculture et pleine

conscience : revenir à l’essentiel Mercredi 21/06 de 9h15 à 11h45

Où ? « Sous les Tilleuls »Langeweg, 27

Contact : 0479/49.32.02

ACCOMPAGNEMENT INDIVIDUEL

L'accompagnement individuel est un moment d’écoute active, de disponibilité et d’empathie. L'occasion de faire le point, prendre de la distance et mobiliser les ressources qui sont les vôtres.

„ Il se déroule sur une période définie qui permet d’atteindre des résultats concrets de changement dans votre sphère privée et/ou professionnelle.

„ L'objectif est de vous aider à voir les solutions que vous portez en découvrant tout votre potentiel.

„ Pour changer de regard et permettre des choix en conscience.

Plus d’infos : n.velu@ liguedesfamilles.be

Webetic

ANDERLECHT

Lundi 12/06 de 20h à 21h30

Où ? Salle Le Cap – Place Bizet, 35

Contact : 0472/75.03.32

WOLUWE-SAINT-PIERRE

Jeudi 15/06 de 19h30 à 21h30

Où ? École du Sacré-Cœur de Stockel – Rue Félix De Keuster, 58

Contact : cfescs@gmail.com

JOURNALISTE

La Ligue des familles recherche un·e journaliste pour renforcer la rédaction en charge du magazine le Ligueur et du site internet leligueur.be

COMPÉTENCES ET PROFIL

„ Master en information et communication (journalisme).

„ Parfaite maitrise de la langue française et excellentes capacités de rédaction (papier et web )

„ Esprit structuré et synthétique

„ Connaissance passive (à minima) du néerlandais et de l’anglais

„ Permis de conduire B

„ Curiosité intellectuelle et très bonne culture générale

„ Flexibilité et proactivité

„ Être reconnu.e comme journaliste professionnel·le

CONDITIONS

„ CDI de 3 jours/semaine (23h15)

„ Salaire Echelon 4.2 de la CP 329.02

„ Chèques repas, télétravail et congés extra légaux

„ Entrée en fonction immédiate

Les candidat.es sont invité·es à envoyer un CV ainsi qu’une lettre de motivation à Christophe Cocu avant le 10 juin 2023.

+ d’infos sur liguedesfamilles.be/jobs

Retrouvez toutes les infos sur liguedesfamilles.be/agenda

Schoebroekstraat 50, 3583 Paal – T. 011 45 01 00 | Photos : Shutterstock – Getty Images (sauf mention contraire)

Le Ligueur adhère au JEP et s’efforce d’éliminer de ses pages la publicité trompeuse. Si malgré cet effort, nos lecteurs ont des réclamations à formuler, il leur est demandé d’écrire au Jury d’Éthique Publicitaire, rue Bara 175 à 1070 Bruxelles. www.jep.be. Membre de l’Union des Éditeurs de la Presse Périodique.

Éditeur responsable : Christophe Cocu | Avenue de Béco, 109 – 1050 Bruxelles | Renseignements :

27 31 MAI 2023
Rédacteur en chef : Thierry Dupièreux | Journalistes : Valentine De Muylder, Marie-Flore Pirmez, Clémentine Rasquin, Martine Gayda, Michel Torrekens, Yves-Marie Vilain-Lepage, Romain Brindeau | Email : redaction@leligueur.be | T. 02/507 72 11 | www.leligueur.be | TVA : Be 413 220 493 | Compte : BE06 7320 1536 1922 | Publicité : Publicarto – Tramstraat 63 B1, 9052 Zwijnaarde. T. 053/82 60 80 – com@publicarto.be | Graphisme et pré-presse : SOL – www.sol-agency.be | Imprimerie : Moderna –
02/507 72 11 – 66 € pour un abonnement d’un an ou 5,50 € par mois. – Europe : 141 € – Hors Europe : 156 €

À la découverte des dessous de Bruxelles

Le musée du Coudenberg (Bruxelles) est un habitué de nos colonnes, tant ses offres à destination des familles sont intéressantes. Ici, ce n’est pas une, mais bien deux activités que l’on vous propose : un Family Day le 18/6 et un City Game accessible jusqu’au 24/8. Côté Family Day, vous serez plongé•es au cœur du palais de Charles Quint, costumé•es en chevalier de la Toison d’Or ou en dame de la Cour. Vous pourrez alors découvrir les secrets de beauté de la Renaissance, le tir à l’arbalète ou le maniement d’épée.

Au niveau du City Game, La quête de la clé d’or, votre tribu se mettra sur les traces de Joris, un jeune architecte. Celui-ci devra faire ses preuves dans la construction du quartier Royal dans les années 1615.

Infos : coudenberg.brussels

Un voyage et un grand malade

Ne vous fiez pas au titre un peu étrange de ce spectacle jeune public… Turista, la démangeaison du voyageur est joué sur scène, ici à l’ancienne école de Séviscourt le 11/6, par Rudy Goddin du Potaufeu Théâtre. Ce que ça donne ? Un très chouette moment, un peu foutraque, très visuel, avec d’étonnants bruitages et des ambiances musicales particulières avec un clown globetrotter à l’humour ravageur. Vos petit•es adoreront se laisser emporter dans ce voyage hors du temps.

Infos : cclibramont.be

L’eau dans tous ses états

Le Centre de culture scientifique de l’ULB (Couillet) propose jusqu’en mars 2024 une très intéressante exposition, L’or bleu. Immersive et interactive, elle a pour ambition de sensibiliser les plus jeunes à la gestion de l’eau, à la pollution et à l’impact sur la biodiversité. Pour cela, trois espaces sont dédiés avec des thématiques de départ : la molécule, la source de vie, les ressources.

Infos : ccs.site.ulb.be

Apprendre à petits pas

Territoire sonore, par la compagnie Murmures et Chocolats, c’est une initiation aux arts plastiques, à la musique et à la danse pour les tout-petits déjà en mouvement, mais qui ne savent pas encore marcher. Avec une danseuse et une violoncelliste, les apprenti·es marcheurs et marcheuses découvriront le rythme et le fonctionnement de leur corps. Pour participer, rendez-vous le 18/6 à Waremme pour une représentation dans le cadre du festival Éclosions.

Infos : passage9.be

6   18 MOIS

Des contes et légendes dans la grotte

4 ANS ET+

Vive le vent, vive le vent de printemps

À l’occasion de son traditionnel rassemblement des fameux Combi Volkswagen (+ de 200 véhicules attendus), la plage de Westende (Middelkerke) accueillera le week-end des 10 et 11/6 un festival de cerfs-volants. Des centaines d’ailes en tous genres zèbreront le ciel, mêlant chorégraphies et vols stationnaires. De quoi largement donner des couleurs supplémentaires à une journée à la Côte.

Infos : middelkerke.be

Treize légendes du Namurois et de l’Entre-Sambre-et-Meuse et une grotte installée dans l’ancienne gare de Fosses-la-Ville, il n’en faut pas plus pour s’évader à travers la lecture. Ce moment particulier, c’est la Grotte aux Légendes qui l’offre jusqu’au 29/10, avec en bonus, un dimanche par mois, une conteuse qui vient faire vivre personnages et lieux avec tout son talent narratif (prochain rendez-vous le 25/6, sur réservation).

Infos : regare.be

6 ANS ET+
6 ANS ET+
4 ANS ET+
TOUT PUBLIC 28 LE LIGUEUR N°11

La plus belle pour aller danser

Récit d’apprentissage sur l’adolescence et la quête d’identité, cette comédie centrée sur une jeune collégienne explore avec tendresse autant les marivaudages adolescents que les relations intergénérationnelles. Un film plein d’humour et de légèreté à découvrir en famille avec vos jeunes ados.

À la manière du Jeu de l’amour et du hasard, travestissements et quiproquos sont au cœur de cette intrigue amoureuse à la fois touchante et tragicomique. Orpheline de sa maman, Marie-Luce, 14 ans, vit avec son père dans la résidence pour seniors qu’il dirige, anime et entretient à lui seul. Un peu délaissée, elle est aussi très renfermée et passe beaucoup de temps avec son ami Albert (Pierre Richard), un pensionnaire un peu fantasque âgé de 80 ans. Bientôt les vacances se terminent et elle appréhende la rentrée scolaire dans sa nouvelle école. Et elle a raison…

Exclue et moquée par ses camarades de classe dès les premiers instants, elle tombe amoureuse d’Émile, lui aussi nouveau au collège, qu’elle ne sait comment approcher. Mue par ses sentiments, elle décide alors de s’incruster, en cachette de son père et avec la complicité d’Albert, à la fête qu’organise la fille la plus populaire de la classe, qui ne l’a évidemment pas invitée. Métamorphosée grâce au costume de mariage du vieil homme et à une perruque subtilisée à un pensionnaire, c’est en garçon qu’elle séduit Émile et s’attire la sympathie de toutes et tous.

Surprise, mais ravie de l’effet qu’elle produit sur l’assemblée, désireuse également de rester proche de son amoureux en dépit des complications immanquables qui se profilent, la jeune fille mènera désormais une double vie : pour Émile et sa nouvelle bande de copains, elle sera Léo, un garçon ouvert et sûr de lui, tandis qu’à l’école et à la maison, elle restera Marie-Luce, la jeune fille gauche et effacée que tout le monde connaît…

La plus belle pour aller danser, un film de Victoria Bedos (France, 2023, 1h32). À partir de 12 ans. Sortie le 14 juin

Sur la piste des loutres à Bertogne

La région de Bastogne regorge de promenades diversifiées. Pour tous les âges. Pour tous les tempéraments sportifs. Les balades, c’est aussi l’occasion de découvrir les secrets des endroits traversés, d’aller au-delà de ce qu’on voit, de comprendre les enjeux écologiques et environnementaux liés à la préservation de la nature. Dans ces cas-là, les sentiers didactiques sont de bons outils ludiques qui allient marche et pédagogie. C’est le cas à Bertogne où un tel parcours se déroule sur un peu plus de 6 kilomètres entre bois et campagne.

Le point de départ, c’est l’église du village. À partir de là, il faut trouver les flèches rouges qui vont vous guider pendant toute la promenade. À propos de celles-ci, soyez sur vos gardes. Elles ont parfois perdu de leur superbe, à certains endroits leur peinture s’est écaillée, de temps en temps, mutines, elles se dissimulent. Bref, tout le monde au cœur de la tribu aura à cœur de dénicher ce balisage qui néanmoins, dans l’ensemble, fait plutôt bien son job.

Des roues, des moteurs et bien plus encore

On le confesse, sachant ce que coûtent les énergies fossiles à notre planète, cela pourrait paraître malvenu de mettre en avant une exposition consacrée à des véhicules fonctionnant principalement à base de dérivés de pétrole. Pourtant, Rétro-Mobile, à l’abbaye de Villers-la-Ville le 4/6, mérite le détour. Pourquoi ? D’une part parce qu’elle s’intéresse aux voitures, motos et tracteurs anciens, ce qui permet de faire une sortie intergénérationnelle avec les papys et mamys qui pourront raconter des souvenirs. D’autre part parce que c’est aussi un point d’entrée pour parler écologie, environnement et préservation de la Terre avec la jeune génération.

Infos : villers.be

La boucle est ponctuée de panneaux qui s’attardent sur les rapaces, les bienfaits des prairies humides, les chênaies, les haies, mais aussi… les loutres. Eh oui, sur le chemin emprunté, il y a un coin où ces petits mammifères semblent avoir leurs habitudes. On ne va pas vous mentir, lors de notre périple, les loutres ont joué la carte de l’invisibilité. C’est que l’animal est plutôt du genre discret et préfère les virées nocturnes aux sorties diurnes. Il a donc fallu se contenter des photos imprimées sur le panneau ad hoc, mais, au passage, que d’infos récoltées sur cette espèce protégée !

Si l’itinéraire est plutôt facile, une descente en forêt, plus rocailleuse, exclut l’utilisation d’une poussette. Pour le reste, le dénivelé reste tout-à-fait raisonnable. Ce qui n’est pas toujours le cas des échappées pédestres dans la région qui taquinent les rives escarpées de l’Ourthe.

Si les sentiers didactiques vous séduisent, sachez que le parc naturel des Deux Ourthes en compte dix. Tous sont repris dans une brochure intitulée Les sentiers didactiques : apprendre en pleine nature. Elle est en vente dans les syndicats d’initiative des différentes communes concernées.

La balade du Ligueur
TOUT PUBLIC 12 ANS ET+ 29 31 MAI 2023

Voici une rubrique qui a du chien. Et même plusieurs, avec des albums où nous assistons à une vraie déferlante des ami·es à quatre pattes de nos enfants.

Le garçon qui comptait les chiens

Une belle complicité unit le jeune Louis à sa grand-mère, laquelle est classique par certains aspects et très engagée par ailleurs. L’idée de départ du récit peut paraître farfelue, mais emmène loin, l’air de rien. Louis se demande combien il y a de chiens dans le quartier. Il écrit aux pouvoirs locaux pour obtenir l’info, à l’instar de son aïeule qui écrit régulièrement des interpellations citoyennes. Mais les réponses reçues déçoivent. Tout comme sa grand-mère qui estime qu’il ne faut pas attendre les autorités pour agir, Louis se lance dans un recensement des chiens du coin. Le texte est rythmé par les toc-toc et ding-dong de ce porte-à-porte original et par des phrases courtes. Les illustrations croquent avec humour chaque canidé, mais aussi leurs maîtres et maîtresses, leurs maisons, leur environnement de sorte que se profile la vie d’un quartier urbain dans sa diversité. Les chiens Thelonious et Monk vivent avec des musiciens africains, il faut lire le harnais sur le dos d’un autre pour deviner que son propriétaire est aveugle, etc. Rien n’est dit, tout est suggéré. La grand-mère n’est pas restée inactive. On découvre à la fin pourquoi elle taille, scie, peint sur un terrain communal qui devient communautaire. Un dernier épisode ajoute un supplément de tendresse et d’humanité à cet album qui en est pétri dans le propos comme le dessin.

Le garçon qui comptait les chiens, de Philip C. Stead et Matthew Cordell (Le Genévrier/coll. Est-Ouest). À partir de 4 ans.

Chien Pourri ! Le grand Fourre Toutout

Avec près de vingt aventures à son actif, Chien Pourri a déjà conquis le cœur de bien des lecteurs et lectrices. Le toutou affreux, sale et gentil, plein de poux, cerné de mouches, tendre avec son comparse Chaplapla, inféodé à sa poubelle, revient dans cet albumbonus sous forme d’abécédaire. Celui-ci tient du grand fourre toutout comme son titre l’indique à merveille à grand renfort de jeux de mots pourris, d’humour cracra, d’un sens débridé de l’absurde et de parodies de jeux comme on peut en trouver dans les magazines pour enfants.

Chien de caniveau au museau proéminent à la Cyrano, hostile au basset à petit manteau et au caniche à frange ainsi qu’à leurs frangins et frangines, le zinneke plein d’humour est aussi le reflet d’une société aux inégalités marquées.

Chien Pourri ! Le grand Fourre Toutout, de Colas Gutman et Marc Boutavant (L’école des loisirs). De 6 à 8 ans.

Chiens Portraits brossés

Jacob, un chien né d’un croisement entre un Teckel et un Jack Russel, a 8 ans. On lui demande souvent ce qu’il veut faire plus tard. Il ne sait trop quoi en penser. Aussi se tourne-t-il vers ses copains et copines qui exercent des professions passionnantes pour stimuler sa vocation, vingt chiens et chiennes racé·es (Staffordshire, Dalmatien, Korthal, etc.), ce qui passionnera les curieux et curieuses de découvertes canines). Si l’on peut regretter le peu de métiers manuels, on appréciera les textes courts agrémentés de jeux de mots canins d’Adeline Tillier. Spécialiste des peintures animalières à l’encre de Chine et aquarelles qu’elle réalise notamment à la demande de particuliers, Prune Cirelli offre une galerie de portraits joliment croqués avec des détails insolites dans leurs costumes. Quant à Jacob, il préfère continuer à dormir, jouer, courir, ronger son os… Bref, profiter de son enfance !

Chiens Portraits brossés, d’Adeline Tillier et Prune Cirelli (L’Étagère du bas).

À partir de 7 ans.

30 LE LIGUEUR N°11

DAD Album n° 7 | La force tranquille | Page 37

Retrouvez les aventures de Dad, père célibataire au foyer qui s’occupe de ses quatre filles au caractère bien trempé et pas vraiment du genre à s’écraser devant leur éternel ado de père....

31 31 MAI 2023

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