n°15 OCT. 2013 • AVRIL 2014
LA REVUE SEMESTRIELLE GRATUITE DE LA LIGUE REIN ET SANTÉ
DOSSIER SPÉCIAL
TECHNIQUES DE DIALYSES page 21 à 39
SENSIBILISATION page 06 à 20
EXPLICATIONS page 40 à 57
NUTRITION
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[ Rein Échos n°13 | www.rein-echos.fr ]
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DU CHANGEMENT EN 2014
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ous lisez actuellement Rein échos et vous ne connaissez pas la L.R.S. (Ligue Rein et Santé) c’est tout à fait normal. En effet notre association, reconnue d’intérêt général, n’a pas pour but de se mettre en avant, juste d’informer (travail dépourvu d’actions commerciales et totalement bénévole) et d’être utile. La philanthropie dans le cadre des maladies chroniques qui nous concernent a un seul but : «un partage de savoir faire ». Pour preuve : - La campagne de sensibilisation et de dépistage menée par 8 600 pharmacies entre le 16 et 28 septembre 2013, sous l’égide de Pharmagest – LRS, pour la seconde année consécutive. - Et chaque matin ces centaines de personnes qui suivent l’actualité de la « Ligue Rein et Santé » sur Facebook et Twitter ; accessible à tout le monde, cette sorte de veille sanitaire se révèle fort utile aux malades rénaux chroniques et personnels de santé. - Enfin, nous avons réalisé jusqu’ici et depuis 8 ans 15 numéros de la revue Rein
échos, notamment grâce à vos contributions, nous vous en remercions. Notre but n’est pas de faire un journal papier pour nos adhérents mais de l’information santé pragmatique, étayée et gratuite. Aujourd’hui nous disposons d’un multimédia (non militant) suffisant (lecture : papier, électronique, sons et vidéos) pour répondre aux attentes. Nos revues sont en ligne au format catalogue ainsi que nos newsletters, confortées de vidéos et podcasts, de nos blogs et de notre présence sur les réseaux sociaux. Nous ne ferons plus d’envois papier systématiques et onéreux chaque semestre, mais nous publierons des recueils à thème, numéros spéciaux, tirés à part ou à la suite : élaborés et pertinents... Ainsi pourrons-nous mieux correspondre à vos plus justes besoins et à moindre frais. Notre idée est aussi de réaliser une encyclopédie participative et contributive personnalisée, avec une production de contenus interactifs dédiés à la santé rénale. Egalement nous impliquer pour faire émerger des coordinateurs de santé. Cela
ÉDITORIAL
PAR MICHEL RAOULT DE LA LIGUE REIN ET SANTÉ
3 AXES 2014 LRS • LA CRÉATION D’UNE ENCYCLOPÉDIE VIRTUELLE PARTAGÉE ; • ENCOURAGER LA SENSIBILISATION ET LE DÉPISTAGE PRÉVENTIF DE L’IR ; • LA FORMATION DE PATIENTS COORDONNATEURS (COACH EN SANTÉ RÉNALE)
parce qu’il n’est pas question de vivre sur nos acquis, nous voulons nous remettre en question et sans cesse innover comme vous et avec vous. En effet : « malade ou pas, il faut que les choses changent et que ce monde change ». Nous espérons que ce numéro composé majoritairement d’interviews ayant fait l’objet également de podcasts (www.reinechos.fr) se révélera une fois de plus une source d’information très utile au plus grand nombre. Merci à toutes et tous. \\\
SOMMAIRE Crédits photos : Nephrocare, Rein échos et tous nos encouragements pour l’excellent travail de notre collègue dialysée Anne Franski.
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Merci aux partenaires sponsors et auteurs bénévoles qui nous permettent de réaliser cette revue depuis 8 ans.
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TECHNIQUES DE DIALYSE 21
hémodialyse S’hémodialyser soi-même Interviews La dialyse péritonéale Interview avec la pharmacienne de l’association AURA Transports et dialyse Comment la dialyse va-t-elle évoluer ? Et si la télémédecine rapprochait les individus
20 questions 20 Rapports patients infirmiers en
VERS UNE NOUVELLE DEFINITION
Portraits croisés 6 L’insuffisance rénale 16 Les États généraux du rein 17 É propos des pharmaciens et des génériques 18 Vers une sensibilisation et un dépistage de masse 19 La seconde campagne de dépistage des maladies rénales 20
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DE LA MALADIEs
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A PROPOS DE L’IRCT
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L’insuffisance rénale aiguë 46 Préserver l’équilibre l’importance du calcium 49 L’observance thérapeutique et dialyse 51 Améliorer l’observance en transplantation rénale : une priorité 53
VOYAGES PONS
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GESTION PRIVEE ET MEDECINE, DES UNIVERS OPPOSÉS ? C’est la question que la rédaction a posée à Jacques Bellamy-Brown Directeur Général de La Française AM Gestion Privée, une société du groupe d’Asset management La Française qui soutient la revue Rein Echos.
N’est-ce pas un peu provocateur ?
Jacques Bellamy-Brown, Directeur Général de La Française AM Gestion Privée
Pas tant que cela : d’ailleurs notre vocabulaire professionnel est parfois similaire à celui de la médecine. Etablir un diagnostic fait partie de notre quotidien. En fait si le gestionnaire de patrimoine souhaite exercer son activité de façon professionnelle il doit impérativement respecter plusieurs étapes.
Alors que tout semble les opposer, la gestion privée et l’univers médical ne sont peut-être pas aussi éloignés l’un de l’autre… Certes, à première vue, on ne voit pas de point commun entre le médecin et le gestionnaire de patrimoine : alors que le premier se penche sur les pathologies de ses patients afin de les traiter au mieux, le second se penche sur le patrimoine de ses clients afin d’en favoriser le développement et la transmission. Et pourtant ! En 1979 l’un de mes premiers clients m’a confié : « Il y a trois personnes auxquelles je dis tout : mon curé, mon toubib et mon banquier ».
Le premier rendez-vous avec un futur client est tout d’abord une rencontre : rencontre d’un homme ou d’une femme arrivant avec ses interrogations et parfois ses idées préconçues et d’un professionnel apparaissant comme celui qui a la solution mais dont on ne comprend pas toujours l’activité. Lors de cette première rencontre il est nécessaire que la confiance s’installe très rapidement. Sans confiance il ne sert à rien de vouloir entamer une relation professionnelle. Et seule cette confiance permet d’engager la première étape indispensable de notre métier : écouter notre interlocuteur. L’écoute est en effet la seule façon de bien connaître non seulement le
patrimoine de notre interlocuteur, sa situation financière, son régime matrimonial… mais surtout de comprendre ce qui le motive réellement et ce qui l’a conduit à nous rencontrer. En effet nous ne devons pas nous arrêter aux premières réponses reçues : il est souvent nécessaire de pousser le dialogue avec notre interlocuteur pour arriver à discerner ses véritables freins et moteurs. J’ai le souvenir d’une épouse accompagnée par son mari qui souhaitait nous confier la gestion d’un portefeuille. Après plus de trente minutes d’entretien il m’est apparu qu’en fait cette personne était fatiguée des soubresauts des marchés financiers et n’aspirait plus qu’à une seule chose : avoir l’esprit dégagé de l’angoisse générée par les variations des marchés. Nous lui avons donc proposé une solution autre que celle pour laquelle elle était venue. Après cette première étape, vient celle de la proposition de solutions. Son succès dépend de la qualité de notre diagnostic. En effet comprendre le véritable profil de nos interlocuteurs est primordial pour
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que nos préconisations soient réellement adaptées aux besoins de nos clients. Certes il existe parfois des solutions qui, à première vue, s’imposent comme étant les plus pertinentes compte tenu du patrimoine de notre client, de son âge, de sa situation familiale et de ses objectifs. Mais si cette solution heurte un de ses freins cachés, nous saurons respecter ses décisions. Il est par contre de notre responsabilité de l’alerter s’il souhaite à tout prix faire un choix qui nous semble inadapté à ses objectifs voire même parfois dangereux. Alors oui c’est un peu provocateur mais très sincèrement nous avons une démarche sur certains points similaire à celle du médecin.
Quels types de questions avez-vous le plus souvent à traiter ? La fiscalité est un thème qui revient constamment dans nos entretiens. Mais les principales préoccupations concernent, pour les actifs, la préparation de la retraite et la chute anticipée des revenus futurs, pour tous, la protection du conjoint en cas de décès et la transmission du patrimoine y compris de son vivant, tout ceci bien évidemment dans les meilleures conditions fiscales possibles.
Et y a-t-il encore des solutions intéressantes ? Comme je l’évoquais, il n’y a pas de solution qui s’imposerait à tous. Mais il est sûr qu’il y a toujours des outils qui présentent de multiples avantages : ce n’est pas sans raison que l’assurance-vie est le placement préféré des français… Il existe par ailleurs beaucoup d’autres
solutions, comme par exemple la SCPI, une façon d’accéder à l’immobilier pour se ménager des revenus complémentaires, possible aussi en nue-propriété pour, par la même occasion, préparer sa succession. Nous savons
PUBLIREPORTAGE ÉDITORIAL
être créatifs, de multiples possibilités existent pour la satisfaction et la sérénité des épargnants. Il ne faut pas hésiter à consulter un spécialiste, et même à prendre plusieurs avis !
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PORTRAITS CROISÉS
3 HOMMES, 3 MÉTIERS, 3 APPROCHES
PORTRAITS CROISÉS 3 HOMMES
raissent habituellement les kystes. Les trois autres grandes cibles du dépistage sont l’âge supérieur à 60 ans, l’hypertension artérielle (HTA) et le diabète. HTA et diabète qui représentent environ la moitié des insuffisances rénales graves, imposent une surveillance régulière afin de dépister la survenue de complications rénales.
INTERVIEW DU PR FRANCIS DIDELOT Consultant en santé, auparavant néphrologue au Val de Grâce, Professeur agrégé de médecine aéronautique et spatiale (Institut de médecine Aérospatiale du Service de Santé des Armées)
Professeur pouvez-vous SVP nous expliquer les étapes de la maladie rénale du dépistage aux soins ? Les maladies rénales sont fréquentes et insidieuses. Elles concernent en particulier les personnes âgées. Ce n’est que récemment que cette réalité a été dévoilée au grand public. Heureusement, seule une faible proportion de patients doit être traitée par dialyse ou transplantation. Par contre, ce nombre restreint de malades engage une part importante du budget de la santé publique. Les actions de prévention et de dépistage sont d’une importance évidente. La détection précoce permet soit d’obtenir la rémission, guérison quand elle est
définitive, soit de stabiliser la maladie, soit au moins de retarder son évolution vers l’insuffisance rénale chronique dite terminale (IRCT). Le dépistage précoce est ainsi une préoccupation primordiale. Il s’appuie sur l’identification de groupes de personnes à risque de développer une maladie rénale. Les maladies congénitales, heureusement rares, représentent une occasion particulière de dépistage précoce dans la famille. La plus fréquente des maladies rénales congénitales est la polykystose rénale dominante de l’adulte. Le dépistage chez les parents des personnes atteintes doit être réalisé à partir de 20 ans, âge auquel appa-
Les autres facteurs de risque de développer une maladie rénale sont : - l’obésité - les maladies cardio-vasculaires athéromateuses - l’insuffisance cardiaque - les maladies de système ou autoimmunes - les affections urologiques - les antécédents familiaux de maladie rénale avec IRCT - les antécédents de néphropathie aiguë - l’exposition à des toxiques professionnels (plomb, cadmium, mercure) - l’exposition aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), à une chimiothérapie, aux produits de contraste iodés, à certains antibiotiques comme les aminosides. Une situation plus originale de dépistage est la recherche d’une insuffisance rénale méconnue par le dosage de la créatinine plasmatique avant l’administration de certains médicaments ou produits de contraste pour
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une imagerie, en raison du risque de conséquences parfois dramatiques. Parmi ces situations, citons : - les examens radiologiques avec produit de contraste iodé (scanners et coronarographie essentiellement) - la prescription de substances dont l’accumulation serait dangereuse s’ils étaient insuffisamment éliminés ; c’est le cas de nombreuses molécules pour le diabète, de certains produits pour les affections cardio-vasculaires - les AINS qui représentent des médicaments à haut risque de complications rénales, d’autant plus dangereux que certains sont en vente libre et font l’objet de publicité télévisée. Il ne faut pas oublier les visites obligatoires scolaires, du travail (embauche, visites systématiques annuelles pour les militaires) et pour la pratique d’activités sportives. Avec les bilans de santé proposés par certaines institutions, ces visites sont autant de bonnes raisons de dépister une maladie rénale. Le dépistage comporte dans tous les cas : - la mesure de la pression artérielle - un examen d’urines par bandelette urinaire ou par dosage dans un laboratoire - enfin le dosage sanguin de la créatinine. La présence anormale de protéines, d’albumine, de leucocytes, de glucose, est un signal orientant vers une maladie rénale. L’unité fonctionnelle du rein est le néphron qui comporte quatre parties : le glomérule qui filtre le sang, les tubes rénaux responsables de la composition des urines, le tissu interstitiel au sein duquel se trouvent glomérules et tubes, enfin les vaisseaux rénaux (artères, artérioles,…). Le glomérule filtre le sang de l’organisme avec un débit d’environ 120 ml/ min/1.73m2. Cette valeur est rapportée à la surface corporelle pour obtenir une valeur indépendante de la morphologie. Le dosage de la créatinine plasmatique est le moyen de préciser le fonc-
tionnement rénal, car cette substance n’est pas influencée par l’alimentation et est filtrée par les glomérules, sans transfert significatif dans les tubes rénaux (sauf au stade d’IRCT). Par contre, son taux ne reflète pas précisément et fidèlement la filtration glomérulaire, car son taux dépend de l’importance de la masse musculaire. C’est pourquoi nous avons recours à des formules qui intègrent la masse musculaire à partir de l’âge, du sexe et de l’origine caucasienne ou africaine. Ainsi, le débit de filtration glomérulaire (DFG) était-il calculé jusqu’à une période récente à partir de la formule de Cockcroft et Gault, puis avec la formule MDRD (Modification of Diet in Renal Disease) simplifiée. La Haute Autorité en Santé (HAS) préconise depuis 2012 la formule CKD-EPI (Chronic Kidney Disease Epidemiology Collaboration), mais peu de laboratoires d’analyses ont pour l’instant intégré cette recommandation. La diversité des formules est la traduction des difficultés rencontrées pour évaluer précisément le fonctionnement rénal. Il faut bien comprendre que la diminution du DFG qui définit l’insuffisance rénale est un événement qui est habituellement tardif au cours au cours des maladies rénales chroniques (MRD) ; il succède à une agression d’un ou plusieurs éléments constitutifs du néphron. L a s o u f f ra n c e g l o m é r u l a i r e e st exprimée par la présence anormale et souvent abondante d’albumine dans les urines et selon de type d’atteinte, d’hypertension artérielle et d’hématurie.
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C’est dans les tubes (ou tubules) rénaux que s’élabore la composition des urines, grâce à des échanges bidirectionnels entre le sang et l’urine en cours de formation à partir de l’ultrafiltrat glomérulaire. Certaines substances sont éliminées de l’organisme, d’autres y sont réabsorbées. Ce phénomène est vital ; à titre d’exemple, le rein élimine 1.5 litres d’urines par jour, soit 1 p100 de l’ultrafiltrat glomérulaire ; 99 % de l’eau filtrée est réabsorbée dans l’organisme au niveau des tubules. Certaines maladies rénales peuvent être responsables d’une élimination urinaire excessive de sodium, de potassium, de calcium, de phosphore ou de sucre (même en l’absence de diabète, cette glycosurie pouvant d’ailleurs être isolée et ne pas être une maladie). La souffrance débutante du tissu interstitiel est peu expressive ; parfois, une leucocyturie élevée, une protéinurie modérée. L’atteinte des vaisseaux rénaux peut se traduire par une HTA ou une hématurie. Il convient de rapprocher les anomalies morphologiques, appréciées par l’imagerie : échographie, scanner ou IRM. Elles peuvent être la conséquence d’une des atteintes précédentes : - atrophie par sclérose du rein ou diminution de l’apport sanguin par rétrécissement d’une artère rénale - kystes rénaux d’autant plus fréquents que l’insuffisance rénale est avancée. Elles peuvent parfois expliquer la MRC : kystes rénaux bilatéraux multiples de la polykystose rénale.
IL NE FAUT PAS OUBLIER LES VISITES OBLIGATOIRES SCOLAIRES, DU TRAVAIL (EMBAUCHE, VISITES SYSTÉMATIQUES ANNUELLES POUR LES MILITAIRES) ET POUR LA PRATIQUE D’ACTIVITÉS SPORTIVES. AVEC LES
BILANS DE SANTÉ PROPOSÉS PAR CERTAINES INSTITUTIONS,
CES VISITES SONT AUTANT DE BONNES RAISONS DE DÉPISTER UNE MALADIE RÉNALE.
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Cette schématisation est en fait artificielle, car le néphron est un ensemble fonctionnel. Toute atteinte d’un constituant retentit sur les autres, et ce d’autant plus que l’affection progresse.
La MRC doit ensuite être caractérisée : - préciser son mécanisme et sa cause, à partir d’un faisceau d’arguments pouvant nécessiter une biopsie rénale - la classer selon son niveau de gravité.
Une fois dépistée, la maladie rénale doit être confirmée. La définition de la «Maladie Rénale chronique» (MRC), terminologie préférable au terme «insuffisance rénale chronique» (IRC) car prenant en compte les situations dans lesquelles le rein souffre sans que son fonctionnement global soit déjà diminué, se fonde sur la persistance pendant plus de trois mois, - soit d’anomalies fonctionnelles : DFG inférieur à 60 ml/min/1,73 m2 - soit de marqueurs d’atteinte rénale : présence anormale dans les urines d’albumine, d’hématies, de leucocytes, d’autres substances témoignant d’une anomalie des tubules rénaux, ou d’anomalies morphologiques, enfin d’anomalies histologiques étudiées grâce à la biopsie rénale qui n’est pas systématique.
La maladie est classée selon des stades de gravité croissante :
La phase suivante est la détection des situations urgentes, nécessitant une prise en charge spécialisée rapide ; HTA menaçante, débit d’albumine important dans les urines, surtout si associé à une hématurie, DFG nettement diminué et surtout si la baisse est rapide, signes rénaux dans un contexte de maladie polyviscérale.
- Stade 1 : il existe des anomalies structurelles, mais le DFG est normal, supérieur ou égal à 90 ml/mn/1.73 m2 ; la présence d’un greffon rénal même fonctionnant parfaitement, est classée dans ce stade - Stade 2 : le DFG est compris entre 60 et 89 ml/mn/1.73 m2 ; la MRC est dite «légère» - Stade 3 : DFG entre 30 et 59 ml/ mn/1.73 m2 ; la MRC est dite «modérée». Ce stade est subdivisé en deux sousgroupes : • stade 3A : DFG entre 45 et 59 ml/ mn/1.73 m2 • stade 3B : DFG entre 30 et 44 ml/ mn/1.73 m2 ; les complications de l’IRC apparaissent surtout à partir du stade B - Stade 4 : DFG entre 15 et 29 ml/ mn/1.73 m2 ; la MRC est dite «sévère» - Stade 5 : DFG en deçà de 15 ml/ mn/1.73 m2 ; la MRC est dite «terminale» (pour le rein) ; c’est à ce stade que sont proposées la dialyse ou la greffe rénale.
Plus récemment, l’albuminurie a été intégrée dans la classification en raison de son importance pronostique. Il a été également convenu que : - le terme « microalbuminurie » devait être remplacé par « albuminurie » - le dosage de l’albuminurie était préférable à celui de la protéinurie dont elle est le principal constituant, mais non le seul - ce dosage devait être rapporté à celui de la créatininurie et effectué sur un échantillon d’urines émises lors du réveil, ce qui évite le fastidieux recueil des urines pendant 24 h00. Trois stades sont distingués : - Stade A1 : en dessous de 30 mg d’albuminurie par g de créatininurie, situation normale - Stade A2 : entre 30 et 300 mg/g (appelé jusqu’à présent stade de la microalbuminurie) - Stade A3: au-dessus de 300 mg/g. Un avis néphrologique, puis une prise en charge conjointe entre le médecin traitant et le spécialiste est en général nécessaire, mais pas toujours indispensable au début de la maladie. Ainsi à 80 ans, une diminution modérée et isolée du DFG sans hypertension artérielle sévère, ni protéinurie ou hématurie, ne nécessite pas de consultation du néphrologue, mais une surveillance et l’éviction des situations susceptibles d’aggraver la maladie rénale. La HAS a publié en février 2012 le «Guide du parcours de soins – Maladie Rénale Chronique de l’adulte». Ce document précise les différentes étapes de la prise en charge ainsi que le rôle des différents professionnels de santé.
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La MRC est-elle une maladie du sujet âgé ? Oui et non. Les MRC sont préférentiellement des maladies du sujet âgé, mais elles surviennent à tout âge, parfois dès la naissance.
MALHEUREUSEMENT, LES SUJETS JEUNES NE SONT PAS ÉPARGNÉS. LES MALADIES CONGÉNITALES S’EXPRIMENT PARFOIS AVANT LA NAISSANCE OU DANS LA PREMIÈRE PÉRIODE DE LA VIE ; L’INTÉRÊT EST DE
L’être humain naît avec dans chaque rein un million de néphrons qui sont les unités fonctionnelles rénales. Physiologiquement, ce nombre diminue au cours de la cinquième décennie. Ce déclin est très progressif et est responsable d’une réduction du DFG de l’ordre de 1 ml/min/1.73m2 par an. En l’absence d’événements intercurrents, la réserve fonctionnelle est suffisante pour la vie entière. Par contre, l’homme âgé est plus vulnérable aux différentes agressions telles qu’HTA, toxiques divers, déshydratation. Ceci explique la plus grande fréquence de la MRC chez les sujets âgés, et la durée de vie augmentant, le plus grand nombre de patients âgés traités pour MRC sévère ou terminale. Malheureusement, les sujets jeunes ne sont pas épargnés. Les maladies congénitales s’expriment parfois avant la naissance ou dans la première période de la vie ; l’intérêt est de pouvoir les rechercher dans la fratrie et pour certaines d’entre elles mettre en place des actions curatives ou préventives. Les maladies acquises ont des âges de survenue très variables selon leur nature et les mécanismes en cause. On distingue les MRC secondaires (à une maladie identifiée) et les MRC primitives (pas de maladie causale détectée). Parmi les secondaires les plus fréquentes, il y a l’HTA et le diabète sucré qu’il soit insulino-dépendant ou non ; elles représentent environ la moitié des MRC au stade V. Les autres MRC répondent à de nombreuses causes : infections, malformations et obstruction des voies urinaires, toxiques médicamenteux ou non, maladies immunologiques au premier rang desquelles se situe la maladie de Berger (néphropathie à dépôts mésangiaux d’immunoglobuline A).
POUVOIR LES RECHERCHER DANS LA FRATRIE ET POUR CERTAINES
D’ENTRE ELLES METTRE EN PLACE DES ACTIONS CURATIVES OU PRÉVENTIVES.
Qu’elles soient primitives ou secondaires, il est important de préciser le mécanisme responsable de l’atteinte rénale et quelle est ou sont la ou les structures rénales concernées ; glomérule (le filtre), tubes rénaux (détermination de la composition des urines), tissu interstitiel, enfin les vaisseaux rénaux. Cette précision importante d’un point de vue thérapeutique et pronostique, justifie souvent la biopsie rénale pour étude microscopique du tissu rénal.
Quels sont les déterminants de l’évolution des MRC ? L’évolution d’une MRC dépend de plusieurs facteurs, parmi lesquels, - le mécanisme et la cause sont des déterminants essentiels ; le traitement d’une obstruction des voies urinaires peut permettre la guérison ou la stabilisation de l’insuffisance rénale. - la persistance d’une pression artérielle trop élevée ou d’un débit élevé d’albumine dans les urines a un rôle défavorable - les situations à risque avec l’exposition à des médicaments dangereux comme les anti- inflammatoires non stéroïdiens ou aux produits de contraste iodés pour imagerie (scanners, angiographies). Ce qui ne doit pas être oublié, c’est le caractère silencieux de la MRC. En dehors de sa cause parfois expressive, aucun signe n’alerte le patient ou son médecin. Les symptômes qui traduisent les complications de l’insuffisance rénal sur-
viennent à partir du stade IV et surtout du stade V, alors que ces complications évoluent de manière insidieuse depuis plusieurs semaines ou mois. Les symptômes cliniques sont liés en particulier à l’anémie (fatigabilité, manque d’entrain), parfois aux désordres phosphocalciques (crampes, démangeaisons) ou aux troubles de l’hydratation pouvant se traduire par des œdèmes. Le caractère silencieux de la MRC ne signifie pas qu’elle puisse être négligée. C’est au contraire une opportunité à saisir pour mettre en place les différentes actions pour prolonger le plus longtemps possible cette phase peu troublée. L’information et l’éducation thérapeutique sont les piliers fédérant la stratégie ; comment accepter sinon, les contraintes hygiéno-diététiques, les multiples médications, les examens répétés, alors que l’état clinique paraît parfait ? Il faut également comprendre qu’une fois installée, la MRC ne peut en général régresser, et ceci même si la cause initiale et/ou les mécanismes de l’agression sont contrôlés. C’est la stabilisation dans le meilleur des cas, la diminution de la vitesse de progression de l’IRC qui représentent les véritables objectifs, avec pour les cas qui évolueront vers l’IRCT, la préservation de l’état clinique le meilleur possible par le contrôle optimal des facteurs d’évolution et des complications. L’obtention d’une pression artérielle adaptée à la situation (130/80 à 135/85
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mmHg la plupart du temps), le maintien de l’albuminurie en dessous de 500 mg/g de créatininurie et si diabète en deçà de 30 mg si possible et en tout cas de 300 mg/g de créatininurie, représentent les objectifs prioritaires. Ce sont d’ailleurs certains médicaments utilisés pour contrôler la pression artérielle qui permettent de diminuer l’albuminurie. Les autres facteurs qui peuvent être qualifiés de généraux sinon universels, ne doivent pas être oubliés, tous intervenant dans la vitesse de progression : tabagisme, activité physique, consommation de sel et de graisses animales. Les actions plus spécifiques de la prise en charge de l’IRC prennent place aux stades avancés de la MRC : prise en charge de l’anémie, des troubles phosphocalciques. Un aspect plus moderne de la prise en charge est l’importance de l’information précoce du patient et de son entourage, dès le stade IV voire au cours du stade III, afin de préparer l’avenir, participer au choix de la méthode de substitution de la fonction rénale le moment venu. Au stade V (MRC «terminale»), il existe une auto-aggravation qui finit par imposer la substitution de la fonction rénale, décidée à partir de différents éléments. Il n’existe pas de seuil universel pour débuter le traitement substitutif. La décision est prise au cas par cas en fonction de la tolérance clinique et biologique ainsi que du contexte général. Dans certaines situations, le traitement dit «conservateur» est la seule option raisonnable. C’est le cas de certaines maladies graves évoluées, mais aussi de décisions personnelles du patient. Ces situations particulières font l’objet d’échanges pour concertation entre les différents professionnels de santé, l’intéressé et son environnement proche.
Professeur où exercez-vous actuellement ? Le professeur Francis Didelot a exercé dans les Hôpitaux d’Instruction des Armées (HIA) et notamment dans le service de néphrologie de l’HIA du Val de Grâce à Paris qu’il a dirigé jusqu’en
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assistance médicale publique gratuite aux profits des populations locales ; c’est une particularité française. Cette action humanitaire s’inscrit dans la continuité de la médecine tropicale au profit des territoires et départements d’outre-mer où nos grands anciens se sont illustrés, en particulier dans la lutte contre les grandes endémies.
2009. L’HIA du Val de Grâce est le seul à disposer d’un service de néphrologie clinique. Deux des neuf HIA sont dotés d’une unité d’hémodialyse : le Val de Grâce et l’HIA Sainte Anne à Toulon. Depuis la fin du service militaire obligatoire, le format du Service de Santé des Armées (SSA) a été réduit puisque disparaissaient de son champ de responsabilité les appelés qui non affiliés à un régime de sécurité sociale, étaient intégralement pris en charge par le SSA. A cette époque, existaient des Centres Hospitaliers des Armées dans les villes de garnisons et les ports militaires. Actuellement, nous disposons de neuf HIA, trois en région parisienne (Bégin à Saint Mandé, Percy à Clamart et le Val de Grâce dans le cinquième arrondissement de Paris), les six autres en province (Bordeaux, Brest, Lyon, Marseille, Metz et Toulon). Les HIA assurent le soutien des forces en métropole et engagées en opérations extérieures ; c’est leur première mission. Le deuxième rôle essentiel est la formation des professionnels de santé avec un enseignement complémentaire à celui dispensé dans les facultés pour les préparer à leurs futures missions. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’enseignement néphrologique pour les médecins des forces appelés à prendre en charge des pathologies néphrologiques, parfois en urgence et souvent en situation opérationnelle précaire. Il faut également savoir que le SSA assure en opération extérieure une
Le rôle de formation des HIA comporte également l’ouverture de terrains de stage pour les étudiants civils des différentes filières médicales : étudiants hospitaliers et internes en médecine ou pharmacie, élèves infirmiers en particulier. Les HIA assurent également la préparation d’officiers stagiaires étrangers aux différents concours ouverts par le Service de Santé des Armées, agrégation de médecine ou de chirurgie y compris. Le SSA dispose également de l’Institut de Recherche Biomédicale des Armées, chargé en particulier de l’étude de la physiologie appliquée aux contraintes opérationnelles et de la conception de contremesures de protection des personnels. Enfin, les HIA font partie de l’offre régionale de santé et sont donc accessibles à tout citoyen français disposant d’une couverture sociale. Les liens entre les communautés médicales civiles et militaires sont nombreux et d’excellente qualité. Pour la néphrologie, les relations sont d’autant plus faciles que notre spécialité comporte un nombre peu important de spécialistes et que nous nous connaissons bien, partageant les formations initiales, puis diverses réunions nationales ou internationales. Les concertations et partenariats sont fréquents. Ainsi, il n’est pas paru opportun de développer une activité de transplantation rénale dans l’HIA du Val de Grâce, compte tenu du nombre de centres en Ile de France, du nombre restreint de spécialistes militaires fréquemment sollicités pour des opérations extérieures de plusieurs mois. Les patients du Val de Grâce concernés par la greffe sont inscrits dans les centres de la région parisienne et pour certains en province, en fonction de leur lieu de résidence, car tous nos patients ne sont pas franciliens. \\\
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SENSIBILISATION
PORTRAITS CROISÉS 3 HOMMES
INTERVIEW PROFESSEUR BENOÎT BARROU À LA PITIÉ SALPÉTRIÈRE Secteur Pitié - Secteur Vincent Auriol Secteur Salpêtrière. Transplantation rénales. Responsable : Professeur Benoît BARROU
UNE CARACTÉRISTIQUE ET UN MOT CLÉ : “ TRANSVERSALITÉ”
Qui êtes-vous Professeur, quel est votre métier précisément ? Pas facile de décrire le Professeur Barrou ; il aurait pu être un barreur de navire de course au large en équipe (la voile est l’une de ses passions), c’est un patron d’équipage à la barre comme dans sa vie professionnelle. Difficile de le cerner, ce n’est pas un néphrologue, mais un urologue chirurgien un peu atypique, comme on va le voir ici. Il nous précise dès le début de son interview : « J’ai une position particulière, je suis un peu en décalage. Si j’ai une caractéristique et un mot clé c’est transversalité et multi-disciplinarité. Qui l’on est, est peu important, ce qui compte c’est ce que l’on fait et comment on le fait. On a souvent tendance à confondre les outils et la finalité. Je suis transplanteur dans le sens anglo-saxon du terme. Mon profil est transversal et non vertical.» Les dysfonctionnements rencontrés par manque de transversalité sont courants. La transversalité est nécessaire mais en pratique très difficile à mettre en place, ce qui est dommage à l’heure où l’on ne parle que de parcours du patient.
Ainsi la prise en charge optimale de l’IRC ne concerne pas que la transplantation mais aussi les autres modalités de remplacement de l’insuffisance rénale (hémodialyse et dialyse péritonéale) et l’équipe pluridisciplinaire doit échafauder une prise en charge qui s’inscrit d’emblée dans le long terme et qui fait appel aux 3 méthodes dans un ordre variable, adapté à chaque cas particulier. Lorsque je vois un patient en consultation pour création de FAV, je me pose d’emblée la question de son possibles accès à la transplantation, car le type d’abord que je vais proposer peut en dépendre directement. Prenons un exemple concret: celui d’un jeune patient que nous avons vu pour la première fois en octobre 2011. Il arrivait en urgence au stade terminal de son insuffisance rénale qu’il ignorait jusque là. Il a fallu lui annoncer d’emblée la nécessité d’une première séance de dialyse et celle de remplacer au long cours sa fonction rénale. En lui en présentant les différentes modalités, il est apparu que son père se proposait de lui donner un rein. Plutôt que de faire une fistule artério-veineuse, nous avons pris l’option de le dialyser sur un cathéter tunnelisé et de réaliser le bilan du papa
aussi rapidement que possible. Mais au bout d’un mois et demi, le patient est venu me voir en disant qu’il ne pouvait se résoudre à accepter le rein de son père et qu’il souhaitait ne pas être redevable. J’ai dans ces conditions proposé de faire la fistule artério-veineuse, ce qui ne l’enchantait pas. Après négociation, examen de son dossier de greffe et des probabilités qu’il avait de recevoir un greffon dans des délais pas trop lointains, j’ai programmé la création de la fistule artério-veineuse deux mois plus tard. L’appel pour greffe est arrivé 48 heures avant le jour prévu pour création de son abord vasculaire. Il est désormais greffé avec une fonction rénale normale et son capital vasculaire resté intact, ce qui est une bonne option pour son avenir. A l’opposé, lorsque je dois créer un abord vasculaire chez un patient dont je sais qu’il sera difficile à transplanter (soit du fait de son groupe sanguin, soit du fait d’une immunisation HLA très importante), je privilégierai la longévité de la FAV, quitte à utiliser des techniques plus compliquées (en 2 temps avec superficialisation par exemple). Une fois le patient transplanté, la question se pose de savoir ce que l’on fait de l’abord vasculaire : faut-il le supprimer ? Faut-il le conserver ? Plutôt que d’avoir une position systématique de suppression ou de conservation de l’abord ? Il faut évaluer la balance bénéfices-risques au cas par cas. Cette évaluation va tenir compte de la qualité du greffon rénal et de sa longévité prévisible, du risque de récidive de la maladie initiale, du risque immunologique, du type d’abord vasculaire concerné, de l’amputation du capital vasculaire que représentera sa suppression, de son retentissement sur le cœur et enfin des possibilités de créer un autre abord vasculaire si une reprise en dialyse s’avère nécessaire un jour. On le voit, les différentes modalités de remplacement de la fonction rénale sont en fait imbriquées et il faut en permanence faire des choix qui ménagent au maximum l’avenir.
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Comme tous les transplanteurs, vous avez été marqué par la disparition tragique de deux jeunes chirurgiens partant prélever un foie. En effet, l’accident d’avion survenu à Besançon le 19 octobre 2006, dans lequel deux jeunes chirurgiens partant prélever un foie à Amiens ont été tués, a profondément bouleversé le monde de la transplantation. Nous nous sommes aperçus, à cette occasion que nous n’étions pas ou très mal assurés pour partir en mission et notre premier combat mené avec l’Agence de la Biomédecine et la Fédération Hospitalière de France (FHF) a été de faire créer un contrat d’assurance pour tous les personnels médicaux et paramédicaux en mission. Ce contrat a été créé en 2009 et renouvelé depuis. Un gros travail de suivi a été réalisé et on peut dire maintenant qu’en 2013 tous les Centres Hospitaliers envoyant des équipes médicales prélever des organes, sont désormais assurés. Cet accident a été également le point de départ d’une réflexion sur la réorganisation possible de l’activité de prélèvement multi organe. La règle veut qu’en France chaque équipe de transplantation se déplace pour prélever l’organe qu’elle va transplanter (sauf pour les reins bien sûr où une seule équipe se déplace pour prélever les deux reins). Il existe, pour les autres organes, quelques arrangements locaux qui ne sont pas toujours inscrits dans la durée. Pour pouvoir proposer une amélioration de cette
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organisation, il fallait d’abord un «diagnostic» de la situation actuelle. J’ai fait ce travail il y a quelques mois, qui a consisté à étudier le nombre d’équipes déplacées, les modalités de transport, les distances parcourues au cours de l’année 2011 pour prélever des organes. Les chiffres confirment que l’activité est très importante, très coûteuse et très fatigante pour les équipes. Nous avons parcouru en 2011 plus d’1 360 000 km, soit trois fois et demie la distance terre – lune et brûlé l’équivalent de 240 tonnes-équivalent de CO2. Ces transports représentent une dépense de 20 millions d’euros. J’ai imaginé différents scénarios de mutualisation des équipes chirurgicales pour rationaliser l’organisation et réduire la pression sur les équipes. Ceci nous permettrait d’économiser pratiquement 11 millions d’euros, ce qui nous permettrait de financier les dispositions nécessaires à la mise en place de cette mutualisation. En effet, dans les conditions actuelles, elle n’est pas réalisable. Elle nécessite notamment de former différemment et plus complètement les jeunes chirurgiens pour qu’ils soient en mesure de prélever tous les organes, soit l’étage thoracique pour les chirurgiens thoraciques, soit l’étage abdominal pour les chirurgiens abdominaux. Il serait également nécessaire de revoir complètement le système de paiement des équipes déplacées (certaines le font encore bénévolement !) et d’instaurer un système de contrôle qualité en temps réel pour que cette
nouvelle organisation conduise non pas à une dégradation de la qualité des organes, mais au contraire à une augmentation de leur qualité et de l’efficience du prélèvement en général. Ces mesures nécessitent d’être financées mais leur coût est nettement inférieur aux économies que nous pourrions réaliser en nous réorganisant. Cette réflexion est partagée par de nombreux collègues et par les Tutelles ; un groupe de travail sera mis en place avant la fin de l’année pour travailler sur ce projet de réorganisation de l’activité de prélèvement. On retrouve dans ce projet la notion de transversalité à laquelle je crois fortement.
La pénurie d’organes persiste. Que peut-on faire ? Comme dans la plupart des pays européens, nous sommes effectivement confrontés à cette difficile question de la pénurie d’organes. L’indice de pénurie reste aux alentours de 4 receveurs pour 1 donneur. Des efforts très importants ont été réalisés au travers des différents plans Greffe, permettant d’augmenter le nombre de donneurs recrutés et prélevés. Compte tenu des modifications de l’épidémiologie de la mort encéphalique, ces nouveaux donneurs sont surtout des personnes âgées, avec parfois des antécédents médicaux lourds. Leurs greffons sont logiquement plutôt proposés à des receveurs plus âgés, si bien que l’on arrive au paradoxe que les receveurs jeunes ont un accès à la greffe plus difficile. Cette situation préoccupe bien sûr tout le monde de la transplantation. Plusieurs pistes sont suivies pour apporter des solutions : • Augmenter le nombre de donneurs vivants : on sent bien dans nos consultations que la population est maintenant beaucoup plus informée de cette possibilité ; les modifications de la loi bio-éthique ont permis d’élargir le cercle des donneurs vivants, si bien que l’on peut espérer augmenter le
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nombre de transplantations à partir de donneurs vivants en France. Ce chiffre est encore actuellement aux alentours de 10 %. Notre objectif est d’atteindre le taux de 20 à 25% des transplantations. C’est un effort très important qui est demandé aux équipes car la préparation d’une transplantation à partir de donneur vivant demande beaucoup plus de temps. Il est très important que des coordinateurs(trices) de transplantation viennent renforcer les équipes si l’on veut atteindre cet objectif. Malheureusement, les besoins ne sont pas encore satisfaits et cela représente certainement un frein important. • Une seconde piste consiste à développer la transplantation d’organes prélevés sur des donneurs décédés par arrêt cardiaque. Relativement peu d’équipes se sont lancées dans ce programme depuis 2007 en France car cela demande de gros moyens techniques et humains et représente une charge de travail, là encore, très importante que toutes les équipes ne peuvent supporter. Nous avons pourtant montré que les résultats étaient de bonne qualité, comme l’avaient fait les espagnols avant nous. Nous sommes autorisés en France à ne prélever que les donneurs décédés par arrêt cardiaque dits non contrôlés, c’est-à-dire les arrêts cardiaques survenant de manière inattendue, dans l’immense majorité des cas en dehors de l’hôpital. Nous allons avoir désormais l’autorisation de prélever des donneurs décédés par arrêt cardiaque dits contrôlés, comme cela est fait dans beaucoup d’autres pays (Angleterre, Pays-Bas, Belgique, USA, Espagne, etc…). Il s’agit de patients hospitalisés pour des pathologies très graves, sans plus aucun espoir thérapeutique, et pour lesquels les équipes de soins décident avec la famille d’interrompre les mesures de réanimation. Un protocole national est en cours de rédaction et l’on peut espérer que ce programme débute dans les mois à venir, permettant d’augmenter le nombre de greffes.
• La troisième piste est de progresser dans la prévention des lésions d’ischémie-reperfusion. Il s’agit des lésions que subissent les organes entre le décès du donneur et le moment où ils sont remis en circulation chez le receveur. Ces lésions peuvent être très importantes et compromettre la fonction à long terme de l’organe. Ces lésions sont de plus en plus déterminantes pour les résultats à long terme, du fait de l’utilisation de greffons provenant de donneurs âgés ou de donneurs décédés par arrêt cardiaque (car les organes sont subi une ischémie chaude, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas été irrigués alors qu’ils étaient encore à 37°). Certaines de ces lésions d’ischémie-reperfusion sont réversibles, si nous utilisons des techniques sophistiquées de protection des greffons. Un exemple est l’utilisation des machines de perfusion pour la préservation rénale. Cette technique est en train de se généraliser. Les greffons sont perfusés à 4° pendant toute la période de préservation plutôt que d’être simplement immergés dans un liquide à 4° sans perfusion (préservation statique). De même, les greffons pulmonaires peuvent maintenant être perfusés in vivo (après explantation sur le donneur mais avant la réimplantation chez le receveur), ce qui permet de greffer des poumons qui autrefois auraient été jugés de mauvaise qualité et non transplantés. Bien d’autres améliorations
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de ces techniques sont en vue dans les laboratoires de recherche et il est très important, me semble-t-il, de favoriser autant que possible leur arrivée dans le domaine clinique pour lutter contre la pénurie d’organes. Il n’est pas déraisonnable de penser que les progrès vont être tels, que l’on aura besoin un jour de laboratoires spécialisés de préservation d’organes, dans lesquels seront appliquées des techniques sophistiquées par un personnel hautement qualifié, et qui permettront de corriger les lésions infligées aux organes, de juger de leur fonction et de leur caractère transplantable ou non, donc peut-être d’élargir encore les critères d’acceptation des organes et de prolonger leur durée de fonctionnement. \\\
Retrouver l’ Intervention du Pr Barrou en 2009 aux premiers Etats Généraux inter associatifs de l’Insuffisance Renale (EGIRE 2009) http://www.dailymotion.com/video/xca3cr_egire2009-7-8-etats-generaux-de-l_lifestyle Interview Pr Barrou http://www.franceinfo.fr/societe/le-plus-franceinfo/don-d-organes-en-parler-pour-juguler-lapenurie-de-greffons-1030381-2013-06-21
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PORTRAITS CROISÉS 3 HOMMES AMM, la promotion pour le bon usage et la pharmacovigilance des médicaments. Leur rôle est accru du fait de la forte valeur ajoutée des molécules et des dispositifs médicaux ainsi que des exigences réglementaires. Les médecins de l’industrie ont aujourd’hui un rôle d’expert interne et un rôle d’interface avec les médecins praticiens (médecins cliniciens des hôpitaux publics universitaires et privés, médecins des Autorités de Santé). Cet article décrit schématiquement leur rôle et les principales évolutions actuelles. Il s’agit d’une opinion issue d’une expérience professionnelle.
INTERVIEW DR DAVID ATTAF Médecin dans l’industrie de la Santé, Médecin des Affaires Médicales, Fresenius Medical Care
Le médecin de l’industrie est, avec le Pharmacien responsable, le garant scientifique de la communication ? L’industrie de la santé (pharmacie, biotechnologie et dispositif médical) est un secteur important sur le plan économique et sociétal. Il regroupe les activités de recherche, fabrication et de commercialisation pour la médecine humaine. Les médecins y occupent une place de choix. Les métiers médicaux de l’industrie de santé sont divers. Les « médecins chercheurs » sont impliqués dans l’identification des molécules. Les « médecins cliniciens » évoluent plutôt dans le développement péri ou post-
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre métier Docteur ? L’industrie du médicament est un secteur dynamique mettant à disposition des médicaments issus d’une recherche active ; le recrutement de médecins est inscrit dans ses gènes. Les études de médecine ne préparent pas aux métiers des industries de santé. L’entrée dans ce secteur nécessite des compétences spécifiques (management, connaissances économiques et sociales des entreprises, travail en équipe sur des projets transversaux, coordination d’acteurs impliqués dans le développement d’un produit et compréhension du rôle de chacun). L’industrie du médicament a récemment développé une communication institutionnelle pour se faire connaître des médecins. Un laboratoire a par exemple signé une convention avec l’Assistance Publique Hôpitaux de Paris (APHP) pour accueillir des médecins de santé publique. Le nombre de médecins dans l’industrie
L’INDUSTRIE DU MÉDICAMENT EST UN SECTEUR DYNAMIQUE METTANT À DISPOSITION DES MÉDICAMENTS ISSUS D’UNE RECHERCHE ACTIVE ; LE RECRUTEMENT DE MÉDECINS EST INSCRIT
DANS SES GÈNES. LES ÉTUDES DE MÉDECINE NE PRÉPARENT PAS
AUX MÉTIERS DES INDUSTRIES DE SANTÉ.
pharmaceutique et du dispositif médical (comme la dialyse par exemple) a été multiplié par quatre au cours de cette décade. Cette augmentation est liée en particulier à une évolution de l’exigence des hospitaliers (communication scientifique requise) et des autorités de santé (besoin en données médico-économiques ; dossier d’AMM plus complexes). Les médecins attendent de la part de l’industrie – en dehors d’autres modes relationnels – une information de haute valeur scientifique et sont réfractaires à la «publicité ». Le médecin de l’industrie est, avec le pharmacien responsable, le garant scientifique de la communication. Il représente un passage obligé puisque légalement, l’information hors AMM ne peut en principe être délivrée à un praticien que par un confrère médecin. Le besoin en médecin est tel qu’un médecin qui a une expertise et un profil adapté (connaissance de la spécialité, envie de travailler en équipe, facilité d’adaptation, goût pour la communication…) peut évoluer au sein d’un laboratoire pharmaceutique. Le recrutement de médecins est actuellement difficile pour les structures de santé et l’industrie n’y échappe pas à l’instar de l’hôpital ou de la médecine libérale. Les causes principales sont le déclin de la densité médicale dans les dix ans à venir (cf. encadré) et la difficulté à motiver des médecins sollicités par l’activité clinique. Les postes occupés par les médecins dans l’industrie pharmaceutique sont variés et dépendent du niveau d’activité du laboratoire. On peut, schématiquement, les diviser en deux groupes de métiers : - Recherche de nouveaux médicaments (médecins préclinique, médecins développeurs), - Activités médicales visant à garantir le bon usage du médicament (médecins des affaires réglementaires, médecins des affaires médicales, médecins médicomarketing, médecins en charge de la communication institutionnelle, médecins de pharmacovigilance, médecins en charge de l’information
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médicale, médecin formateur…). L’évolution des métiers médicaux est actuellement nécessaire. Elle accompagne celle de l’industrie (internationalisation, développement de la biotechnologie, rôle accru de la santé publique et de l’économie de santé…). En tant qu’acteur responsable du système de santé publique, l’industrie pharmaceutique doit en effet asseoir sa légitimité et générer de la confiance auprès des patients, des soignants et de la société civile. En effet, les enjeux de santé publique évoluent (diabètes, maladies cardiovasculaires, IRC, cancer…), les aspects économiques sont désormais importants (coût des biotechnologies), les Autorités de Santé sont exigeantes (plan de développement clinique, données économiques, données de sécurité du médicament) et la société civile exige à juste titre un droit de regard (poids des associations de patients). Ainsi, les métiers médicaux des entreprises de santé évoluent actuellement pour répondre aux enjeux de santé actuels (critères économiques dans les décisions de santé). Il n’est pas rare d’avoir des médecins en charge des aspects médico-économiques pour des médicaments coûteux traitant des maladies chroniques. En effet, les données de santé – économiques, épidémiologiques, pharmacoépidémiologique et de santé publique – vont devenir les outils de légitimité de l’industrie pharmaceutique face aux autorités de santé. Les métiers médicaux deviennent ainsi stratégiques pour l’entreprise, car ils sont les plus adaptés pour créer et exploiter ces données de santé. A côté des enjeux commerciaux, l’industrie aura ainsi besoin de se médicaliser davantage pour devenir un contributeur des connaissances en santé. La nécessité de disposer de données du suivi des médicaments dans « la vraie vie » est ainsi à l’origine de la création de postes où les médecins assument en particulier d’importantes responsabilités de pharmacovigilance. A titre d’illustration voici ci-après une description de ma fonction actuelle au sein des laboratoires Fresenius Medical Care en tant que médecin des affaires médicales. Fresenius Medical Care développe des générateurs de dialyse et des «
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Fresenius étant impliquée dans la Recherche et Développement de médicaments et du dispositif médical, ma fonction intègre une obligation d’esprit d’équipe (nombre de projets concernent différents métiers de l’entreprise avec obligation de réunir de différentes expertises) et une curiosité dans un domaine médical pointu (la néphrologie) en perpétuelle évolution. Il faut avoir en particulier un goût pour la lecture d’articles scientifiques et la rédaction de documents médicaux. La connaissance de la néphrologie (les maladies et les médicaments qui les traitent) est essentielle pour pouvoir parler avec les experts du domaine (= « leaders d’opinion ») sur des études et projets cliniques.
reins artificiels ». Récemment, ce laboratoire a étendu son activité aux médicaments utilisés en néphrologie (anémie, troubles minéraux…). Ma fonction nécessite une expérience du soin et du contact avec les patients. Une expérience en recherche clinique à l’hôpital est également recommandée Ceci a été mon cas à Lyon, où j’ai obtenu mon doctorat en médecine suivi d’une expérience clinique sur Lyon et sa région.
DÉMOGRAPHIE MÉDICALE EN BERNE : PÉNURIE DURABLE DE MÉDECINS TOUCHANT TOUS LES SECTEURS DONT L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE Entre 2006 et 2030, la population française devrait croître d’environ 10 %, mais le nombre de médecins diminuera. La densité médicale (nombre de médecins/habitant) chutera alors davantage que les effectifs. Pour la France (métropole + DOM), elle passera de 327 à 292 médecins/100 000 hab. entre 2006 et 2030, diminuant ainsi de 10,6 % pour retrouver son niveau de 90. Elle atteindrait un point bas en 2020 où l’on compterait 276 médecins / 100 000 hab., et ne repartirait à la hausse qu’en 2024. (DREES février 2009).
Mon poste m’implique dans le développement clinique de molécules. En effet, il faut identifier les services de néphrologie experts pouvant participer aux essais cliniques. Il faut donc connaître les médecins et/ou chercheurs en participant activement aux congrès de néphrologie, à la lecture des publications du domaine et des travaux scientifiques tels que les thèses de recherche. Ma fonction m’amène donc à collaborer avec les équipes d’essais cliniques qui mènent les travaux nécessaires à l’Autorisation de Mise sur le Marché d’un produit ou à sa pérennité au sein d’une classe thérapeutique. Cette collaboration avec les experts médicaux va de la mise au point des protocoles de développement clinique au début d’un essai puis, plus tard, à la rédaction des rapports d’études cliniques pour les autorités de santé et la publication dans les revues médicales. En résumé, c’est une fonction où il ne faut pas oublier son premier métier, où la curiosité est nécessaire, où le travail en équipe en interne (les autres métiers de Fresenius impliqués dans le développement des médicaments) et en externe (les médecins praticiens qui connaissent la maladie et les malades au quotidien) sont nécessaires pour contribuer, à leur niveau, à la réussite des missions. \\\ Rein échos 2013 (les podcasts des interviews de MM. B. Barrou et F. Didelot sont disponibles sur le portail Web de l’association : www.rein-echos.fr )
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L’INSUFFISANCE RÉNALE RADIO MALHERBE GRENOBLE «RMG OFFICIEL»
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ous admirons ces auteurs d’ouvrages grand public qui publient en dehors de leur profession, mais font aussi découvrir leur métier : ils sont diabétologues et ici néphrologue.
Communiqué « La Ligue Rein et Santé – Rein échos est une association reconnue d’intérêt général qui s’est destinée depuis 8 ans à fournir de l’information en santé rénale à partir de ses médias gratuits (papier et électronique). Parce que plus de deux à trois millions de personnes sont potentiellement concernées par une insuffisance rénale et que dans certains cas celle-ci reste associée à un diabète ; nous regrettons que malgré leurs risques ces malades ne sont pas systématiquement dépistés. Parce qu’au stade terminal de l’insuffisance rénale, les reins ne fonctionnent plus et qu’il faut suppléer à la fonction rénale (épuration, régulation) défaillante : soit par un rein artificiel (donc
séances de dialyse) ou transplantation du rein d’un donneur ; et que cela concerne directement plus de 70 000 personnes devant être suffisamment informées de la marche à suivre pour une prise en charge et un choix éclairé. Vous retrouverez à partir de notre portail www.rein-echos.fr l’ensemble de ce que nous mettons à disposition du plus grand nombre comme informations validées à ce sujet, pour éviter ou ralentir ce gros problème de santé publique. Le lundi 24 juin c’est au parrain de notre association, le docteur Olivier Kourilsky, que nous avons souhaité laisser la parole, parce que c’est un praticien de terrain en exercice qui accompagne souvent le travail de notre association et que vous saurez le retrouver (si besoin) le moment venu sur nos sites Web, pour compléter votre propre savoir : http://www.rein-echos.fr/nosmedias/podcast/ .
Vous pourrez ainsi comprendre les méandres de cette maladie chronique trop discrète et insidieuse, comprendre pourquoi l’homme de l’art dans ce domaine est le néphrologue et que nous avons choisi comme parrain Olivier Kourilsky parce qu’il est non seulement un médecin reconnu, mais un excellent pianiste et l’auteur de nombreux romans policiers qui nous font connaître son univers médical et sa pratique. Un médecin doit être complet, c’est bien son cas. Nous vous souhaitons à toutes et tous un très bon moment en sa compagnie, riche des recommandations qu’il prodiguera et qui pourront éviter à beaucoup d’entre vous de se retrouver (comme malheureusement tous les bénévoles de notre association), avec une « affection de longue durée, dite ALD », - un léger euphémisme pour une maladie… irréversible - Tout à votre écoute : Michel Raoult président de la Ligue Rein et Santé ». \\\
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LES ETATS GÉNÉRAUX DU REIN : ET APRÈS ? JEAN-PIERRE GRÜNFELD,
PRÉSIDENT DU CONSEIL SCIENTIFIQUE DES EGR
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’aucuns ont pu croire que les Etats Généraux du Rein (EGR) étaient clos le 17 juin 2013, qu’il fallait tourner la page et parler d’autre chose. En fait l’essentiel reste à faire, tout recommence : il convient de faire connaître largement les propositions des EGR et de les mettre en pratique. Passer des phrases aux actes. Le rapport final des EGR est disponible sur le site (1). Six axes de recommandations ont été mis en exergue mais elles ne doivent pas cacher les autres propositions qui portent sur tout le champ des maladies rénales. La dialyse, l’accompagnement social, la bientraîtance, les soins dits de support, par exemple, ont fait l’objet de plusieurs tables rondes et ont toutes généré des propositions concrètes pour améliorer la vie des personnes malades. Comment faire pour mobiliser les acteurs, faire progresser les différents dossiers et transformer le rapport en actions ? Tout cela doit se faire en lien étroit avec les patients, leurs proches et leurs Associations. Je reste très favorable à la méthode choisie parw les EGR : partir de la base, c’est-à-dire des personnes malades, de leurs témoignages, de leurs vies et de leurs souhaits. Mais le travail en commun avec les autres acteurs est indispensable. Deux objectifs : tout d’abord conserver la cohésion et répartir les tâches entre les Sociétés savantes et les organisations professionnelles, les Fédérations hospitalières et les Institutions publiques. Dès la fin de la première phase des EGR, les Sociétés savantes ont été à nouveau sollicitées pour mettre en pratique les mesures qui s’inscrivent dans leurs champs d’expertise. C’est là que vient le second objectif : accepter de faire une expérimentation dans une région, dans une ville, dans un groupe professionnel,
dans un congrès pour tester et définir au mieux les modalités d’application d’une proposition des EGR. Par exemple, comment élargir le cercle des acteurs de la prévention avec les médecins généralistes, les responsables des laboratoires d’analyse biologique, les pharmaciens d’officine, les infirmières/infirmiers, les travailleurs sociaux, les anesthésistes, les radiologues ; comment dessiner les parcours de soins ; ou comment mettre en œuvre les dispositifs d’orientation pluriprofessionnels et pluridisciplinaires au stade de suppléance. Les objectifs concrets ne manquent pas : cela va de l’environnement de la session de dialyse aux personnes âgées ou très âgées, de l’insertion ou la réinsertion professionnelle à l’accès aux prêts et aux assurances. Un autre chantier est de mobiliser les Agences régionales de Santé (ARS) ; certaines d’entre elles, comme celle des Pays de Loire, ont participé aux EGR. Cette ARS, avec les Associations de patients et les professionnels de santé de sa région, mène une expérimentation très intéressante. Le dialogue avec les ARS demande à être soutenu et organisé ; de nouvelles études ou expérimentations peuvent être suscitées sur différents thèmes abordés dans les EGR. Alain Coulomb, rapporteur des EGR, a la volonté de faire progresser cette coopération. Les EGR re-commencent, re-naissent. Bon été à toutes et à tous. \\\ JP GRÜNFELD
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REIN ECHOS RÉPOND
Les Etats Généraux du Rein se sont terminés le lundi 17 juin 2013 par une conférence de presse, plébiscitant la greffe rénale. La presse apparemment n’a retenu qu’un appel dithyrambique à la transplantation rénale sur l’ensemble des articles qu’elle a alors consacrés aux EGR. Faisant ainsi penser au public que la greffe était le seul remède à l’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT), ne tenant pas compte des réalités du terrain (âge moyen des patients, pathologies, comorbidités, etc.). Dans les faits l’insuffisance rénale est une contrainte d’autant plus difficile à gérer que le patient n’en est pas responsable, mais le plus souvent sont en causes sur le long terme : l’hérédité et l’environnement (métaux lourds, aluminium, malbouffe), la toxicité médicamenteuse et les effets indésirables (des médicaments dialyse et greffe) auxquels s’ajoutent aussi : les emballages aluminium des médicaments utilisés et leurs adjuvants divers, comme pour les vaccins, etc. Aussi nous paraîtrait-il plus urgent de développer la prévention et le diagnostic précoce des insuffisants rénaux que le curatif. Cela à la place d’objectifs délirants de donneurs vivants (sans dons croisés) et en ajoutant des polémiques insidieuses sur l’attente de greffons. Faire de l’un des traitements proposé en IRCT la panacée pour un malade, c’est vouloir ignorer son long parcours chronique entre deux compléments : dialyses et transplantations et donc ses souhaits : à la fois de facilitation des diverses étapes de survie (quand ses reins ne fonctionnent plus) et de l’avancement plus rapide de la recherche médicale pour améliorer sa prise en charge. Pour nous l’unanimité de la presse à ne parler que de la greffe rénale a altéré profondément les travaux de ces EGR et leur objectivité. Et cela continue malheureusement…Nous verrons ce qu’en retiendra la nouvelle loi de santé publique*. A ce détail près Professeur, mais en vous remerciant chaleureusement de ce nouvel article. *(le collectif Alliance Reins Patients était déjà intervenu fin 2012 auprès du Ministère et de la DGOS pour que l’on n’oublie pas l’IRC et ses besoins, complétés ensuite par les propositions des EGR) (1) http://www.renaloo.com/e-g-r/le-rapportet-les-propositions-des-egr
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A PROPOS DES PHARMACIENS ET DES GÉNÉRIQUES POUR LES MALADES RÉNAUX CHRONIQUES Quelques échanges entre la Ligue du Rein et les pharmaciens Rappel : Article L5125-23 Modifié par LOI n°2011-2012 du 29 décembre 2011 - art. 20 Le pharmacien ne peut délivrer un médicament ou produit autre que celui qui a été prescrit, ou ayant une dénomination commune différente de la dénomination commune prescrite, qu’avec l’accord exprès et préalable du prescripteur, sauf en cas d’urgence et dans l’intérêt du patient. Si la prescription libellée en dénomination commune peut être respectée par la délivrance d’une spécialité
multiple d’un traitement mensuel, et qu’un grand conditionnement est disponible pour le médicament concerne ou pour sa forme générique, le pharmacien doit délivrer ledit conditionnement. figurant dans un groupe générique mentionne au 5° de l’article L. 5121-1, le pharmacien délivre une spécialité appartenant a ce groupe dans le respect des dispositions de l’article L. 162-16 du code de la sécurité sociale. Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, il peut délivrer par substitution a la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique a condition que le prescripteur n’ait pas exclu cette possibilité, pour des raisons particulières tenant au patient, par une mention expresse portée sur la prescription sous forme exclusivement manuscrite, et sous réserve, en ce qui concerne les spécialités figurant sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, que cette substitution s’effectue dans les conditions prévues par l’article L.162-16 de ce code. Lorsque le pharmacien délivre par substitution a la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique, il doit inscrire le nom de la spécialité qu’il a délivrée. Il en est de même lorsque le pharmacien délivre une spécialité au vu d’une prescription libellée en dénomination commune. La prescription libellée en dénomination commune est obligatoire pour les spécialités figurant dans un groupe générique mentionne au 5° de l’article L. 5121-1. Lorsqu’un traitement est prescrit pour une durée d’au moins trois mois, y compris au moyen du renouvellement
Ce que les pharmaciens nous ont écrit JJe suis pharmacien et après une double oblitération des artères rénales je suis devenu insuffisant rénal. Je me soigne avec des génériques et mon suivi médical se passe bien. J’ai été surpris de votre article sur les génériques et je suis à votre disposition pour vous donner toutes les informations nécessaires pour vous éclairer sur ce sujet. Le non respect de la mention «non substituable» est un problème éthique qui concerne un nombre restreint de pharmaciens et le patient doit faire respecter son droit si le médecin l’a noté sur l’ordonnance. Régler le problème du générique à un problème de marge du pharmacien est encore un manque d’informations. Pour ce qui concerne les produits eux mêmes, je prépare une intervention sur la bioéquivalence pour le groupement giphar et il est clairement établi que les écartstypes sont absolument similaires aux princeps. Je ne manquerais pas de vous rappeler les autogénériques que je référence au maximum dans mon officine pour lesquels on ne peut remettre en cause leur efficacité par rapport au princeps. Pour ce qui concerne le rapport de l’académie de médecine, je reprendrais votre titre «c’est un scandale!» car il est honteux de la part de professionnels d’étayer des théories sur des médicamenteux non vendus en France; il est évident que l’on connaît plus la Colombie pour son trafic de cocaïne que pour ses études sur les génériques ! Restons sérieux ! Je vous remercie de m’avoir lu et reste à votre disposition si je peux vous informer ou vous rendre service pour tout autre chose. Bien cordialement. \\\ Suite : www.rein-echos.fr
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VERS UNE SENSIBILISATION ET UN DÉPISTAGE DE MASSE “REINS-DIABÈTE”
N
ouveau pari réussi pour Pharmagest et la Ligue Rein et Santé : Insuffisance rénale chronique, 8 600 pharmaciens se mobilisent http://www.jim.fr/e-docs/00/02/24/ C0/document_actu_pro.phtml
Les outils mis à disposition des équipes officinales dans leur logiciel de gestion, le LGPI Global-Services. En amont de la campagne : - Un article de présentation de l’opération disponible sur le portail du LGPI Global-Services. - Un module de formation sur « Tout savoir sur l’Insuffisance Rénale Chronique » afin qu’ils puissent se former sur la pathologie proposée par la Ligue Rein et Santé. Pendant la campagne : Un questionnaire en ligne sera proposé automatiquement sur les logiciels LGPI Global-Services par les équipes officinales aux patients ayant un risque particulier de développer une insuffisance rénale chronique (IRC). Les résultats du test ainsi qu’une fiche conseil pourront être remis aux patients. A l’initiative du pharmacien, un test urinaire sur bandelette pourra être proposé aux personnes présentant un risque majoré. S’il le juge nécessaire, le pharmacien oriente alors le patient vers son médecin traitant pour un dépistage (examen sanguin et diagnostic).
En parallèle de la campagne, une communication sur le site www.carevox.fr. Une présentation de l’opération est publiée sur Carevox, à destination du grand public avec un accès direct sur un cahier pratique dédié à l’insuffisance rénale chronique proposé par la Ligue Rein et Santé. Potentiel de l’opération : plus de 8 600
officines en France sont équipées du LGPI Global-Services soit plus de 50 000 professionnels de santé et 2 millions de patients par jour dans les officines Pharmagest. Les enquêtes directement intégrées dans le logiciel de gestion Pharmagest, sont déclenchées selon le profil du patient. Les questions sont évolutives et prennent en charge un système de scoring qui permet de cibler le message délivré par le pharmacien, au patient. Les fiches conseil imprimables diffèrent également selon le scoring obtenu et sont donc appropriées à chaque patient. A l’issue de l’opération, le nombre de pharmacies ayant participé ainsi que le nombre de patients interrogés sont quantifiés. Les données collectées mais anonymisées pendant ces sondages sont traitées et analysées. Cette démarche s’inscrit dans les nouvelles missions du pharmacien et facilite la prise en charge et le suivi longitudinal des patients. Il est trop tôt pour apporter les résultats des d’enquêtes obtenus dans ce numéro. Mais ils seront publiés dès leur sortie sur nos sites Web, comme ce fut le cas dans le
SENSIBILISATION
La seconde campagne annuelle de sensibilisation aux anomalies rénales par les pharmaciens, réalisée avec Pharmagest et son réseau de 8 600 officines, toujours avec la participation de la LRS.
précédent Rein échos (numéro 14). Nous espérons ; qu’outre le réseau d’officines utilisant les logiciels de la Société Pharmagest avec laquelle nous avons un partenariat, qu’en effet les pharmaciens vont consacrer un peu plus de temps à la sensibilisation et pré dépistage des maladies chroniques (A savoir : La prime «génériques» devrait s’élever globalement à 150 millions pour l’année 2013, ce qui représenterait en moyenne 7500 € par officine). La sécurité sociale via la convention pharmaceutique les aide à faire un suivi des malades chroniques, mais avant tout pour vendre plus de génériques ; il faut aussi savoir que les médecins touchent également environ 7500 € à cet effet. La prévention secondaire, à notre avis, serait déjà une belle source d’économie pour l’assurance maladie. Vous retrouverez les résultats de cette campagne sur www.rein-echos.fr \\\
ACTUALITÉS
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LA SECONDE CAMPAGNE DE DÉPISTAGE DES MALADIES RÉNALES EN BRETAGNE Déjà en 2012 en Bretagne (CISS et AIR Bretagne) :
Rappel Enquête auprès des personnes ayant participé au dépistage de l’Insuffisance rénale chronique Principaux résultats 2012 ! Le but de ce dépistage est de proposer à la personne à risque de rencontrer son médecin pour un examen et la réalisation d’un dosage de créatinine. Un objectif secondaire pourrait être d’évaluer la mise en oeuvre de la fiche HAS « Parcours de soins dans l’insuffisance rénale ». Il ne peut s’agir d’une étude épidémiologique mais d’une action de sensibilisation à la maladie rénale qui est dans la plupart des cas une affection symptomatiquement silencieuse. En effet, du fait des conditions de réalisation, les résultats ne peuvent avoir la prétention de représenter le risque de la population bretonne à l’insuffisance rénale. Le recrutement de la population est biaisé par le fait que les lieux de dépistage étaient situés dans des établissements de santé ce qui peut représenter une sur représentation de personnes ayant des risques de maladie et par une sous représentation d’une population jeune.
Quelques remarques - Le nombre important de personnes signalant un antécédent ou l’existence d’une anomalie rénale confirme que se présente volontiers au dépistage des personnes déjà informées sur la maladie rénale. - Le dosage de la créatinine, si l’on en croit les recommandations de l’HAS qui prévoit un dosage annuel pour les plus de 60 ans et chez tout sujet présentant un facteur de risque, devrait être beaucoup plus fréquent qu’il n’a été constaté ici. Il faut cependant reconnaître qu’un peu plus de la moitié de ceux qui avaient un antécédent familial lourd avait bénéficié d’un dosage. En revanche, le couplage maladie cardiovasculaire et atteinte rénale n’est pas encore passé dans le
réflexe des praticiens. - L’hypertension artérielle est un facteur de constitution et d’aggravation de l’insuffisance rénale. Il apparaît au travers de cet échantillon et avec les réserves imposées par une seule prise tensionnelle qu’une partie de la population est sous traitée ou non traitée. Ce constat a déjà été fait de façon générale. - Le diabète qui est un risque important de maladie rénale puisqu’il représente 40% des causes de l’insuffisance rénale ultime nécessitant dialyse et transplantation dans l’Est et le Nord de la France est ici peu représenté. Ce constat rejoint celui de l’épidémiologie de l’insuffisance rénale en dialyse en Bretagne qui met en évidence une faible prévalence de personnes diabétiques. - Il est peu étonnant de trouver une faible prévalence d’anomalie urinaire. IL est vrai que près de la moitié des examens a été écartée arbitrairement du fait d’une densité urinaire élevée (possibles faux positifs dans cette population). Cependant dans 13 cas elle est n’avait auparavant pas été recherchée et se trouve donc dépistée à l’occasion de cette opération. Dans 5 cas, où elle est significative elle s’associe à une hématurie pouvant, après confirmation, révéler une maladie glomérulaire chronique Quelques suggestions : - Le dépistage de l’insuffisance rénale ne peut se passer d’un dosage de la créatinine. L’HAS a produit une fiche de recommandation (ci-joint) qui indique les circonstances dans lesquelles un dosage de la créatinine est opportun et qui indique la technique et les valeurs du dosage de la protéinurie. Est-il envisageable que l’ARS et les associations donne à cette publication une publicité importante afin qu’elle soit connue des médecins traitants et des cardiologues. - Au cours d’une opération ultérieure de dépistage, serait - il envisageable de
remettre aux personnes présentant des risques d’insuffisance rénale et/ ou une anomalie urinaire et/ou un chiffre anormal de la pression artérielle non connue de la personne une fiche reportant ces données que cette personne pourrait communiquer à son médecin traitant. Une standardisation des bandelettes urinaires et un protocole rigoureux de prise tensionnelle apporteraient une meilleure lisibilité des résultats. Les dépistages avaient eu lieu entre le 15 et le 30 novembre 2012 auprès de 17 établissements bretons. Pendant ces 15 jours, 1628 personnes ont participé à ce dépistage et un questionnaire a été rempli pour chacune d’elle fournissant des informations sur leurs facteurs de risque (antécédents familiaux et personnels) et sur le résultat de leur analyse d’urine. En 2013, cinquante établissements ont œuvré pour le dépistage des maladies rénales en Bretagne du 3 au 18 octobre et JY Grall DGS avait lancé l’opération mi septembre. Il est trop tôt pour apporter les nouvelles conclusions des organisateurs et participants dans ce numéro. Mais ils seront publiés dès leur sortie sur nos sites Web. Voilà donc une mobilisation sans précédent de cinquante établissements an action derrière l’ARS Bretagne dans le cadre du Plan Régional de Santé, avec le Ciss Bretagne, l’AIR Bretagne et l’AFD ainsi que les acteurs de santé et médicosocial en région. Une mobilisation là encore sans précédent sur une région où le dépistage s’est fait à l’unisson, en 2012 comme en 2013. En savoir plus : http:// ars.bretagne.sante.fr/Diabete-et-maladiesrenales.161297.0.html \\\ Nous communiquerons également les résultats de cette campagne sur notre portail Web.
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TECHNIQUES DE DIALYSE
L’HÉMODIALYSE
DOSSIER SPÉCIAL INTERVIEWS DIALYSE, TOUT SAVOIR SUR LES TECHNIQUES UTILISÉES QUAND UN REIN ARTIFICIEL VIENT SUPPLÉER LES REINS NATIFS DÉFAILLANTS QUE SE PASSE T-IL ? Vous retrouverez les interviews ci-dessous en podcast sur le portail Web de la LRS : www.rein-echos.fr et nos vidéos « La dialyse, où, quand, comment » ayant fait l’objet de CD encore disponible sur les trois principales méthodes de dialyse, vidéos You tube Liguereinetsanté : https://www.youtube.com/user/LigueReinetSante
MICHEL ARNAUD, Directeur centre Avitum Manosque
La Ligue Rein et Santé accompagne ce dossier avec un glossaire des termes utilisés en dialyse et des abréviations usuelles, à la fois en tiré à suivre et à disposition via www.rein-echos.fr . Le projet est de réaliser, in fine, une encyclopédie participative et contributive personnalisée ; comme cela était précisé dans l’éditorial de ce numéro.
/// 20 QUESTIONS D’USAGERS
20 RÉPONSES DE PROFESSIONNELS COMPRENDRE POUR ÊTRE ACTEUR Qu’est ce que l’hémodialyse ? Vous avez besoin de dialyse parce que vous souffrez d’insuffisance rénale. Vos reins se sont arrêtés de fonctionner, ou presque. Lorsque les reins ne fonctionnent plus correctement, ils ne peuvent plus remplir leurs fonctions. Une des fonctions des reins est : l’épuration. Les reins vous débarrassent des déchets et des éléments chimiques dont vous n’avez pas besoin, et retiennent les éléments chimiques et le liquide dont vous avez besoin. En hémodialyse, un rein artificiel (hémodialyseur) est utilisé pour éliminer les déchets ainsi que les éléments chimiques et le liquide en excès dans le sang.
La dialyse permet-elle de guérir l’insuffisance rénale ? La dialyse effectue certaines des fonctions des reins sains, mais elle ne guérit pas l’insuffisance rénale. Vous aurez besoin de traitements de dialyse toute votre vie, à moins de pouvoir bénéficier d’une greffe de rein.
A quel âge on se retrouve en dialyse ? il n’y a pas véritablement d’âge pour entrer en dialyse ; Aujourd’hui en France, le plus jeune malade a moins d’un an et le plus âgé 103 ans. Sur un plan statistique, en France, l’âge moyen des patients débutant la dialyse est aux alentours de 70 ans ; 36 % ont plus de 75 ans. Les hommes sont plus touchés par cette maladie avec 60% des cas.
Que se passe t il avant le démarrage de mes séances ? Une consultation dite de « pré dialyse » est organisée. C’est un moment privilégié qui a pour objectif d’informer l’usager et son entourage sur les différents traitements (hémodialyse, dialyse péritonéale, greffe) mais aussi une fois celui-ci validé, sur le déroulement des séances et de façon plus générale sur la globalité de la prise en charge. C’est une étape préalable importante. L’usager est libre de choisir son type de traitement.
Quelles sont les différentes structures d’accueil pour les dialysés ? On note 4 modalités de prise en charge : - Le centre d’hémodialyse, qui est qualifié souvent de centre lourd, avec une présence médicale permanente. - L’unité de dialyse médicalisée (ex centre allégé) : ces structures de traitement par hémodialyse sont réservées aux patients dont l’état de santé nécessite une pré-
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à la dialyse. Si votre métier comporte des tâches physiques (soulever des charges, creuser, etc.), il sera nécessaire de s’entretenir avec le médecin du travail. De même, les étudiants peuvent poursuivre leurs études. Dans les deux cas, discutez de vos besoins avec l’équipe de dialyse et elle essaiera d’adapter vos séances de dialyse pour vous permettre de travailler ou d’étudier.
Les patients dialysés peuvent-ils voyager ? Oui. Il y a des centres de dialyse dans toutes les parties du monde. Le traitement est normalisé. Vous devrez prendre rendez-vous pour un traitement de dialyse dans un autre centre avant de partir. Le personnel de votre centre vous aidera à vous organiser. sence médicale intermittente. - L’unité d’autodialyse : ces unités sont dites simples ou assistées selon la nécessité d’une présence de personnel infirmier. Elles ne prennent en charge que des patients formés, en mesure d’assurer eux-même les gestes nécessaires à leur traitement. - A domicile : l’hémodialyse et la dialyse péritonéale peuvent être mises en œuvre à domicile.
Est-ce que la dialyse me permettra de me sentir bien ? La dialyse vous aide à vous sentir bien car elle remplace les fonctions que vos reins ne font plus. De nombreux patients dialysés mènent une vie normale en dehors des séances de dialyse.
Peut-il y avoir des effets secondaires au traitement en dialyse ? Plusieurs complications courantes sont associées à l’insuffisance rénale et à la dialyse. Ce sont : l’anémie (Faiblesse, état maladif dû à une diminution du nombre de globules rouges dans le sang), les crampes, la peau sèche et les démangeaisons, la perte de poids, la fatigue.
Quels sont les professionnels de santé qui m’accompagnent dans ma thérapie ? La prise en charge en hémodialyse est pluridisciplinaire. Si le médecin néphrologue est le prescripteur, les infirmières et les
aides soignantes assurent le déroulement de la séance. De même la diététicienne apporte les conseils nutritionnels permettant une hygiène de vie adaptée. L’assistante sociale permet d’accompagner la personne malade dans les dispositifs administratifs et sociaux. La psychologue apporte son soutien à la prise en charge psychologique. Enfin, la mise en place de programme d’éducation thérapeutique permet aux personnes malades de bénéficier d’un accompagnement individualisé pouvant intégrer la gestion des médicaments. Le métier de soignant en hémodialyse nécessite une formation complémentaire spécifique réalisée avec un tuteur durant plusieurs semaines.
Combien de temps durent les séances d’hémodialyse ? La durée nécessaire pour votre dialyse dépend des éléments suivants : • le fonctionnement de vos reins • votre prise de poids hydrique (en eau) entre les traitements • la quantité de déchets présents dans votre organisme • la corpulence • le type de dialyseur (rein artificiel) utilisé Le plus souvent, une séance d’hémodialyse dure environ quatre heures et a lieu trois fois par semaine.
L’hémodialyse permet elle de poursuivre une activité professionnelle ? De nombreux patients dialysés peuvent retourner au travail après s’être habitués
En arrivant dans le centre de dialyse : que se passe-t-il ? Il y a un parcours commun à chaque patient lorsque vous venez pour une séance de dialyse. Avant de rentrer dans la salle de dialyse on vous demande de vous lavez les mains pour prévenir les risques d’infections nosocomiales (infections contractées dans un établissement de santé). Ensuite, on vous pèse pour que l’infirmière puisse calculer la quantité de liquide (le poids) qu’il faut éliminer pendant la dialyse. Avant de commencer la dialyse, l’infirmière évalue votre état général en vérifiant votre tension artérielle, votre pouls, et peut-être votre température. Si vous êtes porteur d’une fistule artérioveineuse elle l’observera avant de la ponctionner. Il est important de dire à l’infirmière à ce moment-là, avant de commencer votre traitement, si vous ne vous êtes pas senti bien depuis votre dernière séance, ou s’il y a quoi que ce soit qui vous inquiète.
Pourquoi l’abord vasculaire est-il important ? Pour pouvoir réaliser une dialyse, nous devons créer une voie d’accès pour accéder à votre sang, le faire circuler dans le dialyseur où il est épuré, puis vous le restituer en toute sécurité. Ces actions devront être réalisées à chaque fois que vous viendrez pour un traitement, il est important de pouvoir le faire par un moyen d’accès sûr, propre et facile. Il est également important de pouvoir faire ces
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manipulations en toute sécurité. L’abord vasculaire doit être fonctionnel et en bon état car il conditionne l’efficacité du traitement, sans abord il n’y a pas de dialyse et donc pas de vie possible… Par conséquent, un accès permanent est créé par une petite opération qui nous permettra de vous dialyser de façon sûre et efficace. Il existe trois types d’accès : • La fistule artério-veineuse (fistule AV). • Prothèse vasculaire ou greffon. • Le cathéter veineux central
corporel. Ce circuit permet d’amener le sang à circuler dans un dialyseur, ou rein artificiel. Le dialyseur possède deux compartiments séparés par une mince membrane. Le sang passe d’un côté de la membrane alors que le liquide purifiant, appelé dialysat et fabriqué par la machine, passe de l’autre. Les déchets et le surplus d’eau passent, du sang vers le dialysat à travers la membrane. Le dialysat récupérant les déchets de l’organisme est jeté et le sang épuré est réintroduit dans la circulation sanguine.
Qu’est ce qu’une fistule ? La fistule est le type d’abord le plus courant en dialyse. La création d’une fistule implique une petite opération sur le poignet ou sur le bras pour relier une veine et une artère. Cela prend environ une heure. L’opération est généralement réalisée sous anesthésie locale et vous devrez passer une journée à l’hôpital. Le raccordement d’une veine à une artère crée un débit sanguin plus important dans la veine. La conséquence du raccordement est une dilatation de la veine qui va se développer, devenir visible sous la peau, et ressembler un peu à une grosse varice. Lorsque vous la touchez, vous pouvez sentir un «frémissement» que l’on appelle le thrill. Cette sensation est très importante parce qu’elle signifie que la fistule fonctionne correctement.
Qu’est ce qu’un rein artificiel ? Le rein artificiel est un dispositif thérapeutique permettant d’assurer de manière temporaire ou définitive les fonctions d’un rein défaillant.
Qu’est ce qu’un générateur de dialyse ? Le générateur d’hémodialyse est l’ensemble de l’appareillage technique qui permet la réalisation de l’hémodialyse. Il prépare et contrôle le dialysât (solution saline à base de bicarbonate de sodium préparée par le générateur d’ hémodialyse qui va permettre d’épurer le sang), assure la circulation extracorporelle du sang, met en contact ces deux fluides par l’intermédiaire d’un dialyseur, et assure le bon déroulement de la séance de dialyse.
Pourquoi me fait-on des analyses de sang si souvent ? Chaque mois, nous prélevons une série d’échantillons sanguins pour vérifier si vous êtes bien dialysé, et si vous avez une bonne réponse à vos traitements contre l’anémie et à votre régime. Nous prenons souvent ces échantillons sanguins afin d’avoir la possibilité de changer votre prescription assez tôt pour vous éviter de souffrir de complications. La connaissance de vos résultats sanguins vous permettra: • d’évaluer vous-même comment se passe votre traitement • d’expliquer certains de vos symptômes • de savoir si votre traitement a besoin d’être modifié
Qu’elles peuvent être mes activités pendant la dialyse ? Une fois que vous avez été «connecté à la machine» et que le traitement de dialyse a commencé, vous êtes libre de faire ce que vous souhaitez - du moment que vous n’oubliez pas de rester sur le fauteuil de dialyse ! Vous pouvez faire diverses choses pendant votre traitement : discuter avec d’autres patients, lire un livre, écouter de la musique ou un livre sur cassette, jouer
TECHNIQUES DE DIALYSE
à des jeux vidéo portatifs, faire des mots croisés, faire du courrier, faire la sieste, faire de l’exercice. Dans certains centres des exercices avec un kinésithérapeute, des massages ou encore de la relaxation peuvent vous être proposées. Pendant la durée de la séance de dialyse, l’infirmière vérifiera aussi votre pression artérielle et votre pouls au moins toutes les heures, et notera les paramètres du générateur pour s’assurer que votre traitement se poursuit correctement. Vous aurez aussi le temps de poser des questions sur la dialyse.
Dois-je suivre un régime spécial ? Bien que la dialyse élimine la plupart des déchets de votre sang, vous devez faire attention à votre alimentation pour ne pas tomber malade. L’objectif du régime alimentaire de l’hémodialyse est de maintenir une nutrition optimale tout en limitant l’accumulation de déchets. Une fois que vous aurez commencé la dialyse, vous verrez un diététicien qui vous expliquera les changements nécessaires dans votre régime alimentaire et dans votre apport en liquides On vous conseille généralement de suivre un régime «sans sel ajouté», ce qui signifie ne pas ajouter de sel dans vos aliments à table et utiliser uniquement de petites quantité de sel en cuisinant. Le sodium contrôle l’équilibre hydrique (Fonctions relatives à la régulation du niveau ou la quantité d’eau dans l’organisme); trop de sodium peut faire monter la pression artérielle, entraîner une sensation de soif et vous faire boire davantage.
Dois-je adapter mon apport en eau ? L’une des principales fonctions du rein est de maintenir la balance hydrique dans l’organisme. En insuffisance rénale,
IL Y A UN PARCOURS COMMUN À CHAQUE PATIENT LORSQUE VOUS VENEZ POUR UNE SÉANCE DE DIALYSE. AVANT DE RENTRER DANS LA SALLE DE DIALYSE ON VOUS DEMANDE DE VOUS LAVEZ
Que se passe-t-il pendant le traitement par hémodialyse ? Lors du traitement, une partie du sang circulant dans la veine dilaté est dévié dans une tubulure appelé circuit extra-
LES MAINS POUR PRÉVENIR LES RISQUES D’INFECTIONS NOSOCOMIALES (INFECTIONS CONTRACTÉES DANS UN ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ).
DOSSIER
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un problème courant est que l’organisme n’élimine pas le liquide en excès. Cela entraîne une surcharge liquidienne. Elle peut provoquer une augmentation de la pression artérielle, des lésions à long terme sur les vaisseaux sanguins voire des lésions cardiaques. Votre restriction hydrique dépend de votre diurèse (l’élimination urinaire dans son ensemble) qui peut diminuer avec le temps. Votre équipe soignante vous indiquera combien vous pouvez boire. Pour garder le contrôle sur votre soif, étalez répartissez vos boissons uniformément dans la journée en utilisant des tasses/ verres de petite taille. Vous pouvez aussi vous gargariser avec de l’eau glacée, sucer des glaçons (ceux-ci contiennent tout de même 10 à 15 ml de liquide par glaçon) ou mâcher des chewing-gums. Évitez le sel et les aliments salés comme les chips, le bacon et la soupe car cela augmenterait votre soif. N’oubliez pas de faire attention aux liquides cachés, notamment l’eau pour la prise de comprimés, les sauces, les crèmes dessert et le lait avec les céréales. Le volume de liquide autorisé pour chaque patient est calculé à partir de la diurèse sur une période de 24 heures, plus 500 ml ou 700 ml de liquide si vous n’urinez plus. Les 500 ml couvrent approximativement la perte de liquide par la peau et les poumons. La prise de poids entre les séances de dialyse ne doit pas dépasser 1 à 1,5 kg en un jour sans dialyse et 1,5 à 2,5 kg sur 2-3 jours. D’une manière générale, plus vous êtes de petite taille, moins vous devez prendre de poids
Que voulez vous dire lorsque vous parlez de mon poids sec ? Lorsque vous commencez la dialyse, vous entendrez parler de votre poids sec. C’est le poids que devrait avoir votre corps sans liquide en excès. C’est également le poids
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que nous utilisons pour calculer combien de liquide vous avez pris entre les séances de dialyse et donc, combien nous devons en éliminer à chaque séance. Votre poids sec peut changer avec le temps. Il faudra peut-être l’augmenter après quelques mois si, maintenant que vous êtes dialysé, vous commencez à manger plus et à vous sentir mieux. Mais il faudra peut-être aussi le diminuer si vous avez été souffrant et que vous avez perdu du poids.
Comment puis-je comprendre et apprendre le fonctionnement du générateur pour être plus autonome ? Le générateur d’hémodialyse comporte plusieurs fonctions différentes, toutes destinées à rendre votre traitement aussi efficace et sûr que possible. C’est comme un gros ordinateur avec une pompe. Lorsque le générateur pompe le sang de votre corps et le fait circuler dans le circuit extracorporelle pour l’amener jusqu’au dialyseur, la machine réalise
N’OUBLIEZ PAS DE FAIRE ATTENTION AUX LIQUIDES CACHÉS, NOTAMMENT L’EAU
POUR LA PRISE DE COMPRIMÉS, LES SAUCES, LES CRÈMES DESSERT ET LE LAIT AVEC LES CÉRÉALES.
LE VOLUME DE LIQUIDE AUTORISÉ POUR CHAQUE PATIENT
EST CALCULÉ À PARTIR DE LA DIURÈSE SUR UNE PÉRIODE DE 24 HEURES.
des contrôles du débit sanguin, de votre tension artérielle, de la quantité de liquide éliminée de votre sang ainsi que des contrôles de nombreuses autres pressions et informations vitales qui aident le personnel infirmier et médical à vous garantir le meilleur traitement possible. Lors du branchement au générateur, l’infirmière programme des valeurs limites de mesures, qui en cas de dépassement alerteront le personnel soignant. Pour certaines alarmes il peut être nécessaire d‘arrêter la pompe à sang ou l‘ultra filtration (L’ultrafiltration est une technique de séparation des éléments contenus dans un liquide). Ces actions sont parfois nécessaires afin d‘assurer votre sécurité le temps de la résolution du problème. L‘alarme sonore retentit également quand il est temps pour vous de rentrer à la maison!
Comment se passent les trajets de mon domicile vers le centre de dialyse ? Seuls les transports entrant dans le cadre de l’affection de longue durée (ALD) et directement liés aux soins, sont intégralement pris en charge par la Sécurité Sociale. La prise en charge de l’insuffisance rénale chronique rentre dans ce contexte. Vous ne pouvez pas décider de vous-même de l’utilisation d’un transport médical. Seul le médecin prescripteur d’un examen ou d’un acte peut vous établir un bon de transport et déterminer par la même occasion le type de transport (taxi, véhicule sanitaire léger, ou ambulance). Vous aurez par contre le libre choix de votre société de transport. Si vous le pouvez, vous pourrez utiliser votre voiture personnelle pour vous rendre au centre d’hémodialyse. Un bon de transport en voiture personnelle vous sera remis et vous permettra de vous faire rembourser votre déplacement sur la base d’indemnités kilométriques forfaitaires, établies par votre caisse de Sécurité Sociale. La dialyse c’est aussi cela dans les centres Avitum des Alpes, les massages : Félicitations également pour la clarté de la « Charte de bientraitance » du Centre Aquitain pour le développement de la dialyse à domicile (CA3D) à Gradignan et pour le voyage des dialysés sur le chemin de Compostelle. \\\
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TECHNIQUES DE DIALYSE
/// RAPPORTS PATIENTS ET INFIRMIERS
EN HÉMODIALYSE : COMPRENDRE POUR ÊTRE ACTEUR Interview d’un infirmier de l’Andra Paris.
L
‘accueil avant la dialyse en UDM, un rendez-vous est nécessaire avant de commencer les dialyses pour expliquer simplement ce qui se passe. La visite peut se faire entre 2 séances ou pendant la séance afin de connaître, pour le patient, la salle des machines et se situer, afin de comprendre ce qui s’y passe. En fait comment se passe la séance en pratique doit être expliqué initialement au patient, afin de l’accompagner et de lui laisser le temps de comprendre le traitement d’eau notamment en Hémodiafiltration. L’infirmier doit prendre le temps de la visite du service de fond en comble, de bien préciser les horaires, les recommandations diététiques pour le patient. Il faut que pour lui, en dialyse, la vie continue. Le personnel soignant deviendra pour lui entre les soins et sa vie privée. Que va-t-il se passer pendant les 4 heures de dialyse, comment se déroule la séance. On lui expliquera le piquage, le branchement, le paramétrage des machines, les alarmes, le fait de comprendre lui donnera moins d’appréhension et limitera son stress. L’infirmier doit établir la confiance et faire de la dialyse une parenthèse supportable dans la journée et non pas un traitement mal accepté, souvent à cause de défaut d’explications. Ainsi l’infirmier devra fournir au patient, du sourire, de l’empathie et de la chaleur.
Ensuite il faudra instaurer une connivence avec la machine et le générateur de dialyse. Comprendre pourquoi il est nécessaire de soutirer le sang par la veine artérielle et l’amener au dialyseur (pièce maîtresse). Le sang qui passe et rencontre le bain de dialyse (provenant de l’osmoseur et allant à l’égout) pour un échange entre le sang et le bain de dialyse nécessaire pour retirer à la fois des molécules et l’eau en trop du dialysé. Enfin le retour du sang vers le patient et sa voie veineuse. La dialyse en 4h. verra passer dans le dialyseur 70l. de sang. Nous possédons 5l. de sang dans le corps, donc nous l’épurerons 15 fois par séance. On trouvera sur le générateur des pièges à bulle sur l’air, des alarmes de pression
artérielle et veineuse surveillée par la machine, grâce au capteur d’alarme on surveillera le bain de dialyse et dans le pire des cas nous restituerons le sang et changerons de machine. En effet la surveillance pendant la séance de la pression artérielle et de la chute de tension entraînée par le volume d’eau en trop épuré, sont surveillés par des infirmiers qui en connaissent bien les signes avant coureur. Il est possible aux patients d’aller au delà dans l’autonomie quand ils le souhaitent, on leur donne alors une formation à l’autonomie pour gérer sa séance. En fait il existe des patients qui veulent ignorer comment cela se passe et à l’opposé ceux qui veulent se gérer eux-mêmes. Bien souvent l’UDM comme l’auto dialyse sont médicalement assistées.
L’INFIRMIER DOIT ÉTABLIR LA CONFIANCE ET FAIRE DE LA DIALYSE UNE PARENTHÈSE SUPPORTABLE DANS LA JOURNÉE ET NON PAS UN TRAITEMENT MAL ACCEPTÉ,
SOUVENT À CAUSE DE DÉFAUT D’EXPLICATIONS.
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Au sein de l’équipe infirmier, nous trouvons 3 référents : - Hygiène - ETP - Technique Ils expliquent aux patients les fonctions utiles. Nous avons ici les séances du lundi, mercredi et vendredi à raison de 3 séances par jour (le matin, l’après-midi, le soir). Mais également les séances du mardi, jeudi, samedi avec 2 séances (matin, après-midi).
Si nécessaire les IDE peuvent appeler le médecin à tout moment en cas de coup dur. Dans notre centre il y a aussi une secrétaire médicale qui prend les rendez-vous pour les examens des patients, s’occupe des plannings et de gérer les vacances. En fait il s’agit d’une équipe pluridisciplinaire dont une aide-soignante qui prépare le matériel. En UDM les IDE montent les machines et ont un timing serré notamment pour des branchements rapides (et débranchements) attendus par les patients.
© Anne Franski
En autodialyse le patient assure le montage de sa machine, se pique et gère sa séance.
© Anne Franski
Dans notre UDM le médecin passe au début de la séance. Il fera une mini consultation ici il voit les 16 patients en début de séance. Pour ces 16 patients nous avons 17 machines, dont une en secours et en réserve 3 machines disponibles en sous-sol.
A l’Andra qui fait à la fois de l’UDM et de l’autodialyse nous disposons de : - 12 infirmières - 2 secrétaires - 2 médecins - 1 surveillante de soins (super infirmière) - 1 directrice - 2 aides soignantes (ménage et collation sont en sous traitance) - 1 pharmacien - 1 technicien de dialyse en permanence - 1 diététicienne qui passe régulièrement
Dans l’unité il y a ceux qui se préparent à la greffe. Le moment de l’appel est souvent un moment difficile avec une fragilité psychologique pour le passage de la dialyse à la greffe. Il s’agira de même du retour de greffe notamment ceux pour qui cela ne s’est pas bien passé. Il leur faudra trouver la philosophie du retour et le choix d’une nouvelle greffe quand cela sera possible. Il leur faudra une responsabilité vis à vis des autres patients en attente afin de ne pas la déconseiller. Même si chaque cas est particulier. Le personnel de dialyse préparera le moment de la greffe donnant au patient confiance et perspective. Il lui faudra pour se mettre à la place du patient bien appréhendé son degré de compréhension et son savoir. Il y a une psychologie particulière de la dialyse due aux effets délétères des contraintes de longue durée. L’infirmier apportera confiance, sérénité et qualité de vie s’il est capable de gérer les habitudes et les angoisses. Le personnel en dialyse très présent est mobilisé. Cela fonctionne comme une grande famille où chacun doit accompagner et comprendre ce qui se passe au delà des indicateurs de la séance. L’état du patient peut être variable de jour en jour. L’IDE a un rôle social et de proximité en aidant le patient au delà du soin. grâce à un dialogue permanent et un équilibre dynamique, il assurera une meilleure veillance au patient s’il trouve le feeling avec celui-ci ; sans cela donner au patient une exclusivité. En effet le patient sera pris en charge par toute l’équipe qui se relaiera pour lui assurer une bonne dialyse tout au long de la semaine. \\\
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TECHNIQUES DE DIALYSE
/// S’HÉMODIALYSER SOI-MÊME VIA L’HDQ (hémodialyse quotidienne à domicile)
L
’hémodialyse chronique à domicile est la forme la plus autonome des procédures d’hémodialyse pour les patients insuffisants rénaux chroniques. En effet, comme son nom l’indique, elle se pratique au domicile même du malade, aux heures qui lui conviennent le mieux, habituellement en soirée. Cette liberté thérapeutique permet en outre de moduler la fréquence et la durée des séances, en respectant un minimum de 12H/semaine, réparties de manière homogène. Cette flexibilité conduit à une meilleure intégration de la dialyse à la vie de tous les jours, avec possibilité d’améliorer la performance globale et la tolérance des séances. La réalisation des séances en soirée réduit l’impact de la fatigue qui se prolonge inévitablement dans les heures qui suivent une séance, cette phase de rééquilibration de l’organisme s’opérant durant le sommeil de nuit.. Enfin, le traitement au domicile réduit l’impression d’être malade et permet un gain de temps considérable en transport. Toutes ces particularités conduisent à une amélioration globale du bien-être et offre au patient la possibilité d’une activité professionnelle ou scolaire à plein temps. La technique utilisée pour l’hémodialyse à domicile est similaire à toutes les autres procédures d’hémodialyse. Seuls les moniteurs diffèrent quelque peu, la machine étant plus simple à manipuler, avec des sécurités supplémentaires pour éviter au maximum les erreurs de manipulations. En effet, cette procédure fait abstraction complète de tout professionnel de la santé, la séance étant entièrement gérée par le patient lui-même, ou par un membre de son entourage proche. Habituellement, le branchement se fait par biponction de fistule artérioveineuse en technique « button hole » que le patient doit apprendre à réaliser lui-
même, ou à faire réaliser par un membre de son entourage. Lors d’un accident de ponction la dialyse peu aussi s’effectuer en uniponction, grâce à un kit de secours en «Clic-Clac». Plus rarement, l’abord vasculaire se fait sur un cathéter central à double lumière, avec alors un respect strict de toutes les règles d’hygiènes et de stérilité. La mise en place d’une hémodialyse à domicile nécessite donc un apprentissage rigoureux, avec un passage obligatoire dans l’unité d’autodialyse. Le patient doit-être valide, demandeur et pleinement conscient des contraintes et des risques que la procédure implique. Son domicile doit-être adapté ou adaptable. L’écolage prend habituellement deux mois. Durant cette phase, toutes les adaptations techniques sont réalisées au domicile (choix d’un local avec arrivée et évacuation d’eau adaptée), et le médecin traitant est consulté et informé. Après ce
délai, tout le matériel médical nécessaire est livré à la maison, directement par la firme de dialyse (Sociétés Gambro ou Frésénius) qui réalise encore une ultime vérification de l’installation en collaboration avec le personnel spécialisé de l’hôpital. Ce n’est qu’alors que les séances d’épurations peuvent débuter au domicile. http://www.nephro-liege-chr.be/index. php?Option=techniques&Module=hemo dialyse_a_domicile La société s’appelle NxStage et le modèle de dialyseur ou cycleur est The System One Cycler. Cet appareil permet de se dialyser quotidiennement. Vous trouverez une vidéo de montage ici h t t p : / / w w w. yo u t u b e . c o m / watch?v=YTq52j9ViSk&sns=em Vous trouverez le laïus de la machine sur le site du fabriquant ici (en anglais) : http://www.nxstage.com/homehemodialysis Selon NxStage : Le principe est simple. Un appareil compact, mais lourd, permet de positionner une sorte de cassette sur laquelle se trouvent les lignes, le dialyseur, et d’accrocher des poches de dialysat déjà prêtes à l’emploi. La préparation de la machine prend moins de 15 minutes, le temps de prendre sa tension, de se peser, et d’inscrire les données dans son journal de dialyse. Le temps de dialyse varie bien évidemment en fonction des individus, pour moi, il est de deux heures. Mais comme la machine fait des tests pendant son travail, je reste branché 2h20 en tout. La restitution dure moins de 3 minutes, et comme tout est en cassette, le démontage de la machine met moins d’une minute ! \\\
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/// INTERVIEWS REIN ÉCHOS
RÉALISÉS À L’HÔPITAL TENON Docteur Claire Cartery, assistante du docteur Fessy à l’hôpital Tenon et en charge de l’hémodialyse.
À
A l’hôpital Tenon il y a un centre lourd avec des patients âgés rassurés d’être à l’hôpital (que l’on préfère garder du fait d’histoires compliquées). Néanmoins celui-ci présente et offre plusieurs techniques afin de répondre aux différentes attentes et ainsi propose la dialyse à la carte adaptée à leurs attentes et besoins personnels. Le Docteur Cartery, comme l’hôpital Tenon était au tout début de la technique d’hémodialyse quotidienne au domicile, nous parle du matériel NxStage de Théradial et nous a exposé le cas d’un patient avec une polykystose pour laquelle la dialyse péritonéale n’était pas adaptée. Elle a accueilli ce patient depuis 6 mois avec des retours très bons : une reprise d’activité pour ce patient complètement autonome pour son traitement, la fin de ses médicaments hyper tenseurs, ce qui l’a intéressé et la liberté au niveau des horaires par rapport à la dialyse péritonéale, un risque infectieux moins important et pas de risque de péritonite. Une expérience positive pour un patient qui avait des horaires décalés en restauration et un projet à concrétiser dans son activité professionnelle malgré la maladie. Il fut difficile pour lui de se piquer au départ. Se piquer de manière autonome n’est pas évident mais lorsque c’est nécessaire et que cela permet l’autonomie, il faut y réfléchir car il n’y a pas plus d’accident. En fait les patients se connaissent bien et ressentent les choses mieux que l’infirmière. Pour ce patient aujourd’hui, juste le besoin d’un chélateur du phosphore (car il mange très bien), aucun symptôme de syndrome d’urémique.
Il s’agit d’un patient de 40 ans particulièrement volontaire qui fait des séances journalières de 2h30, qu’il réalise (dans son cas) parfois jusqu’à 4h le matin. En fait l’âge n’est pas une contre indication, c’est souvent les patients qui se mettent des barrières et ont peur de l’autonomie. Mais aussi le manque de place pour stocker le matériel reste un facteur qui ne permet pas cette autonomie et on les retrouve par défaut en hémodialyse conventionnelle. Ainsi l’hôpital s’adapte aux techniques pour chacun, le plus jeune patient ayant 18 ans, le plus âgé 86 ans. Le patient de la brasserie a son blog « Hémodialyse quotidienne à domicile, dialyse quotidienne avec fistuline émoussées et NxStage System One » http://dqad.blogspot.fr/2013/01/une-histoire-personnelle-resumee.html Nous avons assisté à la séance de formation d’une jeune femme diabétique de type 1, au diabète mal pris en charge qui a débouché sur une IRCT, la création difficile d’une FAV et son souhait d’autonomie dans son travail en libéral. Une infirmière présente un jour sur deux, lui a permis de prendre ses repères et accéder dorénavant à l’autonomie souhaitée.
Avantages et inconvénients de l’hémodialyse à domicile via le matériel NxStage de Theradial L’hémodialyse quotidienne à domicile sans assistance requiert une autonomie pour monter seul sa machine et auto-piquer sa FAV. Cette technique est adaptée aux patients capables d’une auto ponction. Comme elle oblige le patient à manier lui-même le matériel ce sont souvent quelques détails qui les
empêchent de s’impliquer dans cette technique. En dialyse péritonéale il y a souvent une personne qui monte le cycleur. Lorsqu’ils sont formés les obstacles sont levés. La dialyse quotidienne dure de 2h30 à 3h, il faut compter 1/4 d’heure de préparation et 1/4 d’heure de purge. Il s’agit d’un nouveau principe : avec un temps de dialyse propre à l’ultrafiltration et au volume du dialysat. Avec un montage du circuit sanguin différent (utilisation d’une plaquette en plastique prémoulée). Le dialyseur ainsi que les lignes (à sang et à dialysat) sont préfixées sur cette cassette. En moyenne, le patient utilise 4 à 5 poches de 5 litres de dialysat prêt à l’usage ; le cycleur ne requiert pas de désinfection particulière. En effet, NxStage n’est pas un générateur de sang, son raisonnement est très différent, la machine détermine le temps de dialyse en fonction de 3 données : l’ultrafiltration, le volume de dialysat et le débit sanguin du patient. L’ensemble de composants fournis qui viennent s’adapter à la machine, sont disposés sur un moulage en plastique, il y a juste la partie des tubulures à dérouler pour le dialysat et la purge, c’est un prêt à l’emploi ou l’on ne touche à rien. Pas d’arrivée d’eau à la machine, pas de circuit de dialysat externe (dialysat mis en séance soit 20 à 25 litres en moyenne).
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Donc pas de désinfection aucun circuit dialysat, pas de temps de désinfection pas d’entretien d’osmoseur en fait tout fini à la poubelle, soit un gros volume de matériel jetable que les associations récupèrent. Le montage du circuit sanguin est lui aussi différent : il n’y a pas de choix de membrane différente. La programmation est simplifiée : le patient rentre sa perte de poids horaire et sa perte de poids totale. Concernant le débit, la vitesse de la pompe à sang est de 420 à 450 ml/min, le dialysat passe à 200 l par heure et l’échange est plus long. Le dialysat est non sucré et n’agit pas sur le diabète. L’hypotension amène un apport de sel comme l’hémodialyse en apporte aussi. On dispose d’un raccord de 5 m (capacité d’en relier plusieurs entre-elles) pour l’évacuation à l’égout. Il faut raccorder toutes les poches suspendues à une potence au-dessus de la machine, à une seule poche reposant le réchauffeur ; les dialysat contenu dans les poches suspendues va descendre pas gravitation dans celle du réchauffeur. Le sérum physiologique est utilisé pour faire la purge au démarrage. Par sécurité, on récupère les bulles d’air via un accès situé à la tête du dialyseur. Il n’y a pas de piège à bulles, on récupère à la seringue le sérum phy.
Il n’y a pas de problème de coagulation et les séances se font sans héparine. On ne peut rien ajouter ni rien prélever sur le circuit veineux ; les injections de fer se font en per os et l’érythropoïétine en sous cutanée. Il y a 2 alarmes principales sur la machine : l’une jaune qui est un avertissement ; l’autre rouge et bloque alors toutes les pompes. Des numéros d’erreur s’affichent alors sur les écrans que l’on retrouve sur le manuel du patient. Lors du montage de la machine par le patient, le réchauffeur est allumé, le sérum phy pour la purge est préparé il y a 4 à 6 poches de dialysat (selon le gabarit du patient) à suspendre. La cassette est à insérer, les détecteurs d’air et de pression artérielle sont à enclencher. Il faut faire les tests de branchement sachant qu’il y a 1/4 d’heure d’amorçage. Pendant le temps de purge et en attendant la fin de celle-ci, on détermine le poids sec et sa tension
TECHNIQUES DE DIALYSE
Le patient ne rentre que son ultrafiltration, il n’a pas accès aux paramétrages de la machine qui eux sont relatifs aux prescriptions médicales. Il existe un fascicule sur les paramétrages de la machine qui est remis par Théradial aux infirmières d’éducation. La dialyse quotidienne est souvent pratiquée le soir en rentrant du travail. Concernant la fistule et les prothèses implantées, les risques infectieux sont levés, l’auto ponction n’est pas toujours évidente, avec le button hole on a deux points qui sont toujours au même endroit, beaucoup d’hygiène est néanmoins requise, il faut trouver le passage et le clapet dans la partie tunnelisée. Il n’y a pas d’aiguille coupante et pointue pour ne pas déchirer la fistule, ce sont des aiguilles à bout mousse et si l’on n’est pas dans le passage, elles ne rentrent pas dans la fistule, pas d’hématomes ni de gros anévrisme, cette technique est uti-
IL S’AGIT D’UN NOUVEAU PRINCIPE : AVEC UN TEMPS DE DIALYSE PROPRE À L’ULTRAFILTRATION ET AU VOLUME DU DIALYSAT. AVEC UN MONTAGE DU CIRCUIT SANGUIN DIFFÉRENT (UTILISATION D’UNE
PLAQUETTE EN PLASTIQUE PRÉMOULÉE). LE DIALYSEUR AINSI QUE LES LIGNES
(À SANG ET À DIALYSAT) SONT PRÉFIXÉES SUR CETTE CASSETTE.
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Lorsqu’il y a trop de poids à perdre, le temps de séance est alors augmenté et dans ce cas autant aller en hémodialyse 4 heures, 3 fois par semaine.
lisée depuis longtemps en Belgique et en Angleterre. Les points se ferment bien mais il est parfois difficile le lundi de s’autopiquer. Une fois la gestuelle acquise il est possible ensuite d’utiliser des aiguilles classiques et ainsi de recréer un anévrisme, l’avantage de l’auto ponction et du button hole est qu’il n’y a pas de douleur. Une programmation simplifiée et pour le patient une perte de poids horaire et totale, avec bien sûr pas trop de poids à perdre. On n’utilise pas de termes techniques différents, sinon le Button hole (aiguille à bout mousse) tunnelisation et clapet dans la fistule (pas d’hématome, d’anévrisme et de douleur). Le patient n’a plus d’hypertension et vit sans traitement médical à cet effet en cas d’hypotension il apprend à faire des bolus soit en automatique, soit un bolus de dialysat car il n’y a pas de sérum phi. Les patients arrêtent beaucoup de leur traitement, grâce à la dialyse quotidienne, ils n’ont plus à prendre de Kayxalat, pas de chélateur du phosphore et pas de calcium
Quelques inconvénients néanmoins Le matériel est lourd (35 kgs par machine) mais il est contenu dans une valise. La machine est lourde et bien que rangée dans une valise, n’est pas toujours facile à transporter. Le matériel est à stocker au domicile, il faut donc disposer de place, des espaces sont à sacrifier. Il faut à la fois de la place pour la machine et les 24 cartons de deux poches, auxquels il faut ajouter le petit
matériel (environ 9 cartons), sachant qu’à Paris le patient est livré tous les 15 jours, mais qu’en principe les livraisons se font tous les mois et dans ce cas il faut alors doubler les cartons indiqués ici (mais il peut aussi se faire livrer également sur son lieu de vacances). Tel est le prix à payer, c’est un mal pour un bien. La dialyse quotidienne dure de 2h30 à 3h avec la préparation mais il n’y a plus de purge finale. Il faut une bonne fistule avec un bon débit, parce qu’en effet, le dialysat passe très doucement à 200 ml par heure.
Il faut aux patients 3 ou 4 mois pour lui assurer son autonomie, au départ 6 à 7 ponctions sont réalisées par l’infirmier pour définir les points du button hole. Parfois, au début, le piquage peut s’avérer un peu difficile, il est nécessaire de dilater la fistule pour un débit rapide ensuite le piquage devient moins douloureux et le patient n’utilise plus de pommade Emla. A la fin de la séance on jette tout le kit cela fait beaucoup de déchets dans l’environnement, par contre l’avantage est que cela élimine beaucoup de médicaments via la dialyse quotidienne (plus d’hypertension à traiter) et l’on est bien dialysé. On peut regretter le manque d’autonomie pour : les analyses de sang et les consultations ou contrôles, de petites contraintes à gérer. \\\
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TECHNIQUES DE DIALYSE
/// LA DIALYSE PÉRITONÉALE,
LE SECOND CHOIX DES DIALYSÉS EN FRANCE Entretien Docteur G. Hufnagel sur la dialyse péritonéale.
L
a dialyse péritonéale (D.P.) est l’une des deux techniques de dialyse, cela avec le même objectif que l’hémodialyse, qu’elle satisfait elle aussi. Le bénéfice de la D.P. est reconnu à travers le monde par les sociétés internationales de dialyse : dont l’Europe du Nord, la Chine, l’Amérique, le Mexique, etc. Elle se développe moins en France, nous y reviendrons. En quoi cela consiste, qu’est-ce qui différencient les deux méthodes : 1) L’hémodialyse est une technique extracorporelle où le sang passe dans un filtre pour être épuré avec de l’eau de dialyse, ou dialysat, à contre courant. 2) Le péritoine est une membrane intra abdominale richement vascularisée qui sert de membrane d’échange (membrane naturelle d’environ 2m2 de surface utile). On y introduit un liquide de dialyse qui stagne un certain temps dans la cavité abdominale, les impuretés étant évacuées par drainage pour réaliser ce qu’on appelle un échange de dialyse. Cet échange est répété 3 à 4 fois par 24h. ou automatisé via un cycleur, chaque jour. Dans les deux cas on épure le sang et on
enlève de l’eau et du sel si le malade a retenu de l’eau sous forme d’œdèmes.
Explications de la technique utilisée Un cathéter est un petit tuyau souple en silicone de 4 mm de diamètre introduit sous anesthésie locale dans la cavité abdominale. Il en sort par une émergence qui fait suite à un tunnel sous cutané. Il est raccordé à un prolongateur comportant une connexion assez sophistiquée qui permettra l’entrée ou la sortie du dialysat. Les échanges se font grâce à des poches de dialyse de 1,5 à 3 litres de dialysat, selon besoins et la corpulence du malade. Les poches seront connectées au cathéter puis au moyen d’un système dit de double poche (une poche vide et une poche pleine reliées entre-elles par une tubulure en Y) permettront de remplir et de drainer la cavité . La D.P. est utilisée en première intention quand le malade à une diurèse résiduelle et qu’il urine normalement. En fait en D.P. il s’agit d’un complément de dialyse et non d’une substitution. Ce
complément est à déterminer selon la fonction rénale et la diurèse résiduelle. Le but est de s’appuyer sur la diurèse résiduelle du malade et de lui délivrer la dose de dialyse dont il a besoin. Trois échanges sont programmés par jour en moyenne (soit 3 manipulations 24h/24h, 5 à 7 jours/7). On passera à 4 à 5 échanges par jour si la diurèse résiduelle vient à se dégrader, ou on proposera la dialyse automatisée de nuit. Il faut mesurer la clairance rénale résiduelle une fois par an. Le malade fait lui-même ses propres é c h a n ge s , s ’ i l e st s u f f i s a m m e n t autonome, inversement la dialyse est assistée pour les sujets de grand âge. Les échanges manuels, ou automatisés via un cycleur de nuit, sont adaptés au mode de vie du malade. Le bon profil est celui du malade très jeune ayant besoin d’autonomie ou au contraire celui du malade très âgé tirant bénéfice d’un maintien à domicile. C’est une bonne chose pour un jeune patient de ne pas avoir de FAV au début de traitement par dialyse. Après la greffe rénale, le cathéter sera enlevé et une petite cicatrice disparaîtra au fil du temps.
Quel est l’investissement en termes de temps pour le malade en D.P. ? Après le temps de se laver les mains, avec une solution hydroalcoolique, puis de mettre un masque, il lui faut installer le matériel de connexion. Pour un échange de 2 litres il faut compter moins de 15 mn pour le drainage, et 5 mn pour le remplissage. Tout peut être opérationnel en une vingtaine de minutes, au domicile ou même au bureau. Le malade consa-
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crera donc à sa dialyse péritonéale moins d’une heure par jour. En dialyse automatisée, c’est deux fois 1/4 heure qu’il faut prévoir ; ce n’est donc pas lourd et le malade peut aller en vacances où il veut (livraisons directes) des poches sur place où qu’il aille ; cela sans les contraintes des périodes estivales qui concernent l’hémodialyse. La qualité de la formation initiale des malades est capitale. Lors de la première hospitalisation ou lors de la première consultation après la pose du cathéter, on prévoira une formation en D.P. Il s’agit de comprendre les tenants et aboutissants d’une hygiène parfaite et du respect des règles d’asepsie pour les manipulations. On fera manipuler le malade pendant 6 à 8 séances de 2 h environ. En DP automatisée, il apprendra à utiliser le cycleur. Ses compétences seront évaluées avant le démarrage à domicile. Dans tous les cas un maximum de 10 séances de 2h, chacune est à prévoir en formation. Une technique simple, vite apprise par le malade. Les infirmières libérales intervenant à domicile seront opérationnelles après une formation de trois séances. Elles devront se déplacer 3 fois par jour à domicile y compris les week-end et jours fériés. Le malade n’aura de son côté rien à débourser. Les poches, cycleurs, etc… sont prises totalement en charge par la logis-
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tique de l’AURA. La surveillance se fera à partir d’une consultation par semaine puis par mois, on ajoutera 2 fois par an la 1/2 journée, d’évaluation des clairances rénale et péritonéale, afin de valider la dose de dialyse recherchée. L’information pré-dialyse doit être délivrée avec tout le temps nécessaire. Un malade sur deux choisit la D.P. Le malade doit choisir la méthode la meilleure pour lui, pour sa vie personnelle et sa vie sociale, en tenant compte de son état de santé. Lorsqu’il n’y a pas d’indication préférentielle, c’est au malade de faire son choix, et au médecin de l’aider à faire un choix éclairé (une technique ou l’autre, très comparables et mêmes complémentaires).
Comparons les avantages et inconvénients des deux techniques On ne doit pas opposer deux méthodes de dialyse D.P./hémodialyse, des techniques qui se complètent et se succèdent dans le temps avant ou après greffe. La D.P. est particulièrement adaptée : - Pour ceux qui veulent éviter de perdre du temps en transports (dialyse à domicile), - ceux qui ne veulent pas de FAV, ou redoutent les ponctions veineuses, - ceux qui accordent de l’importance à
une certaine souplesse de régime alimentaire (moindres restrictions car la dialyse péritonéale est quotidienne). Certains trouveront des inconvénients : 1) échec de la période initiale du à un cathéter qui dysfonctionne. En effet, si la technique est très simple (un cathéter dans la cavité abdominale, et un liquide qui rentre et sort à intervalles réguliers) le cathéter peut dysfonctionner pour des raisons anatomiques sans qu’il soit toujours possible d’y remédier. On peut alors être en échec avec passage à l’hémodialyse. Environ 10 % à 20 % de patients/an ont un cathéter qui dysfonctionne dans les suites de la pose, c’est l’une des limites de la DP. 2) L’infection du malade (péritonite) qui peut être parfois très douloureuse et parfois grave. Le fait d’ouvrir à l’air libre le cathéter induit un risque bactériologique. Le malade doit impérativement assimiler des notions d’hygiène et d’asepsie sans jamais baisser la garde pendant des années. 80 % des patients ne font jamais de péritonite, ce n’est donc pas une fatalité. Probabilité : 1 épisode pour 50 mois de traitement, soit 1 péritonite tous les deux mois dans notre unité. S’il y a très peu de problèmes infectieux sur les fistules natives, par contre les malades pris en charge en urgence en hémodialyse ont la même problématique lorsqu’ils sont dialysés sur cathéter veineux d’hémodialyse, mais joue également la typologie du malade et la maladie qui qui sous-tend l’IRC : grand âge, effets de la dénutrition.
Quand peut-on faire le choix de la D.P. ? Il est mieux de commencer un traitement par la D.P. pour éviter une FAV, avant la greffe, et ainsi conserver son capital veineux. Si un patient veut retourner en D.P. après la greffe, il faut être très prudent. Ses reins fonctionnent encore grâce aux
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immunosuppresseurs, mais lorsque ceux-ci seront progressivement interrompus, la fonction rénale résiduelle risque de s’effondrer, compromettant ainsi l’efficacité de la D.P. Il risque donc d’être rapidement dirigé vers l’hémodialyse. Chez les sujets jeunes, de grand gabarit, ayant besoin d’une dose de dialyse élevée, le risque de baisse précoce de la diurèse rénale résiduelle doit être présent à l’esprit au moment du choix de la technique. Le passage à l’hémodialyse peut être nécessaire moins d’un an après le début de la D.P. en cas de perte de diurèse. Par contre, en fin de course de DP, il peut être intéressant d’utiliser les deux techniques à la fois : le cathéter de D.P. sera conservé pour effectuer un échange déplétif (perte d’eau) les jours sans dialyse ; pour limiter la prise de poids entre 2 séances d’hémodialyse. Un élément impondérable et imprévisible qui conditionne le résultat de la D.P. et son avenir est la nature du transport péritonéal ou « perméabilité du péritoine « (ce sont les petits vaisseaux qui assurent la diffusion des molécules toxiques). On ne sait pas si le malade va être un transporteur lent ou rapide, moyennement rapide ou moyennement lent (c’est ainsi que l’on catégorise les différents types de perméabilité), avant de mettre en place le cathéter. On pourrait penser à priori qu’un péritoine très perméable est meilleur qu’un péritoine qui ne l’est pas et bien tout au contraire : moins le transport est rapide moins la perméabilité est bonne, et meilleurs sont les résultats. Cela est en partie liée à l’absorption du glucose (molécule présente dans le liquide de dialyse) et lorsque le transport est rapide la perméabilité élevée, il y a une réabsorption du glucose qui est plus importante que lorsque le transport est lent. Cela peut être une source de complications : pertes de protéines, prise de poids. En fait la question ne se pose que dans un nombre de cas réduits. Il y a en D.P. des aléas, bien entendu, mais
ils ne doivent pas remettre en cause la qualité de la technique. Il en va de même par exemple en hémodialyse lorsqu’une sténose bouche la fistule artério-veineuse parfois rapidement parce que le tissu veineux ne va pas supporter l’hyperpression du flux artériel qui fait fonctionner la fistule, alors que dans la plupart des cas une FAV peut fonctionner sans complications pendant plusieurs décennies. Il peut voir des complications en D.P. comme en hémodialyse, celles-ci étant différentes. En hémodialyse, on gère les complications sans remettre en cause la légitimité de la technique. Il doit en aller de même pour la D.P. ce qui n’est pas toujours le cas.
Le développement de la D.P. Parlons maintenant de la progression de la D.P. en France. On constate qu’il y a moins de 10 % des dialysés en D.P., un taux très bas lorsque l’on compare aux pays semblables aux nôtres On l’a dit c’est une technique qui marche
TECHNIQUES DE DIALYSE
(notamment pour les jeunes et au grand âge), mais qui reste peu proposée dans certaines régions en France. L’enseignement est-il en cause ? La faculté n’a peut-être pas fait son travail de formation ni stimulé assez de vocations dans ce domaine.
Certains médecins ne pratiqueraient pas volontairement la D.P. pourquoi ? La D.P. est une technique très simple. Tout néphrologue peut acquérir les bases, mais elle requiert de l’expérience clinique avec une formation initiale dans des unités ayant une bonne expertise. Ainsi, nombre de néphrologues s’abstiennent de recourir à la D.P. par crainte de mal faire essentiellement (défaut de formation et d’assurance). Les critiques qui opposent les différentes techniques n’ont pas de raisons d’être. Pour progresser, la D.P. doit se développer et être enseignée plus largement à travers le territoire dans les structures hospitalo-universitaires. \\\
LE MALADE DOIT IMPÉRATIVEMENT ASSIMILER DES NOTIONS D’HYGIÈNE ET D’ASEPSIE SANS JAMAIS BAISSER LA GARDE PENDANT DES ANNÉES. 80 % DES PATIENTS NE FONT JAMAIS DE PÉRITONITE, CE N’EST DONC PAS UNE FATALITÉ.
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/// INTERVIEW AVEC LA
PHARMACIENNE DE L’ASSOCIATION DE DIALYSE L’AURA PARIS
E
n effet il peut choisir l’hémodialyse conventionnelle dans un établissement de soins à raison de 3 fois 4 h par semaine. Ou encore la dialyse à domicile, soit la dialyse péritonéale : • DP machine de nuit via un cycleur • Ou DP manuelle dans la journée 3 à 4 fois par jour • et enfin l’hémodialyse quotidienne à domicile via un nouveau type de générateur pour une dialyse de 2h à 2h1/2 quotidienne. L’Aura Paris fournit l’ensemble de ces méthodes aux patients en Ile de France, répondant aux attentes de chacun.
En fait l’autonomie du patient pour le domicile est souvent reliée : - à des critères de logistique et de volume, - à l’environnement du malade et son entourage pour l’aide à domicile, - enfin à son travail et ses horaires de disponibilité. Concernant la partie financière, la prise en charge se fait via des forfaits que les tutelles fixent chaque année. Il existe donc des forfaits pour la dialyse péritonéale, l’hémodialyse au domicile ou en structure de soins. Dans le cadre de la dialyse péritonéale, l’infirmière libérale intervenant au
Rappel : une information préalable du patient est nécessaire pour lui rappeler qu’il existe plusieurs méthodes de dialyse, parfois imposées aux patients selon leur état de santé ou (le plus souvent) laisser au choix de celui-ci selon son souhait d’autonomie.
domicile du patient est prise en charge par la sécurité sociale. L’ensemble des prestations médicales et logistiques sont comprises dans le forfait.
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Document sur la tarification : http:// www.parhtage.sante.fr/re7/lim/doc.nsf/ VDoc/F598DF4FC0616163C12572C000 2F107D/$FILE/Annexe%20VII%20%20 Dialyse%20priv%C3%A9.pdf Concernant la pharmacie de l’Aura Paris, très présente pour aider les patients à domicile en Ile de France, ces patients ont souvent de domiciles exigus et il leur faut disposer de place pour leur dialyse et le stockage du matériel. En effet les quantités de médicaments pour le domicile ont trois particularités : - le volume, - le poids, - circuit du médicament à respecter avec la sécurité de ce circuit. Parlons du circuit notamment des poches en dialyse péritonéale. Un volume conséquent de matériel est délivré nominativement aux patients, aussi faut-il une logistique adaptée (variable d’une fois par semaine à une fois par mois) selon : volume, poids et surfaces disponibles chez le patient. En effet le matériel de dialyse péritonéale sera livré et rangé chez le patient par le livreur de l’association. Il faut savoir que le poids du matériel est toujours conséquent en dialyse : - environ 600 kg par mois en DP - 700 à 800 kg par mois en HDQ - 200 kg par mois en hémodialyse conventionnelle. Et il faut donc pouvoir stocker ce matériel avant son utilisation.
De même en hémodialyse conventionnelle où à chaque fois les matériels sont commandés nominativement par patients, selon ses besoins propres. Il faut savoir que les poches de DP et le dispositif médico-stérile suivent le même circuit que le médicament (AMM et réglementation) et que la pharmacie de l’association est responsable à la fois de la qualité et de la logistique. La logistique doit être adaptée à la fréquence, les lots sont numérotés et les dates de péremption indiquées. Nous trouverons donc : - des assistantes de logistique assurant la saisie de la commande du patient, - des préparateurs magasiniers pour les poches, - des contrôleurs pharmaceutiques avant le départ de palettes au nom des patients. - des livreurs à domicile. Sachant que le pharmacien est responsable des conditions de transport pour les poches dans des camions réfrigérés. L’ensemble des prestations de l’AURA,
TECHNIQUES DE DIALYSE
médicales techniques et logistiques sont intégrées au forfait dont nous avons parlé plus haut. Le principe est le suivant : Les patients retournent chaque mois à l’Aura un calendrier ou relevé d’activité sur lequel ils cochent les jours de dialyse. C’est à partir de ce document que l’établissement établit la facturation qu’elle envoie aux caisses de sécurité sociale, lesquelles effectuent si elle le souhaitent un contrôle en vérifiant les relevés. Il est donc important que les relevés d’activité soient bien remplis par les patients et que l’AURA soit informé rapidement si le patient est en repli, hospitalisé ou greffé pour adapter la facturation transmise aux caisses. Il y a eu un souci de sécurité sanitaire sur les poches fournies par un laboratoire il y a 3 ans. L’ANSM a alors donné l’alerte car il n’était pas possible d’arrêter le traitement des malades et que parallèlement il n’existait pas beaucoup de fournisseurs de poches. Aussitôt les lots incriminés furent remplacés par des poches provenant de pays où il n’y avait pas de soucis à ce propos. Un suivi au cas par cas et au quotidien lors de cette crise sanitaire fut nécessaire pour voir vers quel patient l’on pouvait contingenter en poches pour une courte période. La Pharmacie est le lieu par lequel transit le circuit du médicament et par lequel on sécurise sa distribution au destinataire en respectant les prescriptions médicales formulées pour chaque patient. \\\ Ecoutez les podcasts enregistrés à cet effet sur notre page Web : www.rein-echos.fr
IL EST DONC IMPORTANT QUE LES RELEVÉS D’ACTIVITÉ SOIENT BIEN REMPLIS PAR LES PATIENTS ET QUE L’AURA SOIT INFORMÉ RAPIDEMENT SI LE PATIENT EST EN REPLI, HOSPITALISÉ OU GREFFÉ POUR ADAPTER
LA FACTURATION TRANSMISE AUX CAISSES.
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/// TRANSPORTS ET DIALYSE
L
es transports de patients se sont élevés, pour l’année 2012, à 3,7 milliards d’euros pour un volume de 65,4 millions de trajets, soit 2,1 % des dépenses d’assurance maladie (vérifier). Sur les 50 millions de bénéficiaires du Régime Général. 3,9 millions de patients ont été transportés en 2012 soit 8 %. Les mesures mises en place depuis 2006 afin de réguler le transport de malades, principalement axées sur les offreurs de soins, ont permis de ralentir l’évolution de ce poste de dépenses. Néanmoins la dynamique est très variable selon les modes de transports. Ainsi entre 2009 et 2012, les dépenses de taxi ont cru à un rythme de plus de 10% par an. En 2012, 35% des patients transportés ont eu recours à ce mode de de transport, 53% à l’ambulance, 34% au VSL et 11% à leur véhicule personnel ou au transport en commun (un patient peut utiliser plusieurs modes de transports dans l’année). Les dépenses de taxi représentent aujourd’hui 36% du total, les ambulances 42% et les VSL 19%.
Qui a recours au transport ? La cartographie des dépenses en fonction des grandes pathologies permet de voir que 23% des dépenses concernent des patients atteints de cancer, et 17% des patients en insuffisance rénale chronique terminale (dialyse). Les pathologies psychiatriques représentent 15 % et les pathologies cardiovasculaires également.Des variations géographiques importantes. Le recours aux transports est très hétérogène sur le territoire. Des disparités concernent notamment le mode de transport utilisé. Le nombre de trajets moyen par patient transporté, le coût moyen annuel par patient transporté qui peut présenter un écart de 1 à 2 entre les départements. Transports des patients hémodialysés (en Centre, en Unité de dialyse médicalisée, ou en autodialyse) au premier semestre 2012. Si le taux de recours au transport est très
Les transports sanitaires selon la F.H.P. homogène par département et proche de 100% quel que soit le département, on constate par mode de transport de fortes disparités départementales. Une partie de ces écarts peut s’expliquer par une disparité départementale de l’offre de transport et des modes de transport disponibles. Concernant la dialyse en agglomération urbaine l’on rencontre plusieurs modes de prises en charge : • L’ambulance (majoritaire) • Le VSL (minoritaire selon les régions) • Les taxis conventionnés : 1) des grandes compagnies (G7 etc…) 2) indépendants Il y a des abus (un exemple) Fraude : un ambulancier aurait roulé sa CPAM, le RSI et la Mutuelle de la SNCF de 280 000 euros.
Le gérant d’une société d’ambulances de l’agglomération rouennaise (Seine Maritime) a été mis en examen pour escroquerie. L’homme est soupçonné d’arnaque à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), au régime social des indépendants (RSI) et à la mutuelle de la SNCF pour un montant de 280 000 euros. En 2011, la CPAM est informée par un patient « de discordances entre les transports assurés par l’ambulancier et la facturation transmise » indique un communiqué de la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) de Seine Maritime. Le fraudeur présumé aurait transformé le mode de transport prescrit par un médecin, soit un véhicule sanitaire léger (VSL), en transport allongé par
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ambulance, beaucoup plus onéreux. Il faut aussi multiplier les transports en réutilisant d’anciennes prescriptions habilement modifiées. L’inadéquation entre l’augmentation croissante du nombre de patients en insuffisance rénale terminale et celle beaucoup plus faible, voire négative, des moyens économiques et surtout des personnels soignants mis à leur disposition semble devoir inéluctablement s’aggraver dans les années à venir et contraints déjà la plupart des pays industrialisés à mener une politique de développement plus ou moins forcée de la dialyse hors centre. Dit la SN…. De plus : pour une même durée hebdomadaire de traitement (12 à 15 heures), un schéma de dialyse quotidienne double le temps et le coût du transport. Article « coût de la prise en charge de la dialyse en France » (Néphrologie et Thérapeutique). Coût moyen annuel élevé (50-80 keuros/malade/an). Selon les représentants des sociétés savantes, les publications montrent qu’il
n’y a pas de différence en termes d’efficacité entre les différents traitements. Les études qui retiennent la durée de vie comme critère d’efficacité montrent, sur des groupes de patients comparables, une supériorité de la greffe rénale ; si le critère d’efficacité est la qualité de vie, alors la dialyse péritonéale est supérieure aux autres modalités de traitement, quel que soit l’âge des patients. Les transports sanitaires ne sauraient être un obstacle au choix du patient de sa méthode dialyse et de la qualité de prise en charge.
Il faut donc Optimiser les pratiques • En rappelant aux prescripteurs les bonnes pratiques et les référentiels de prescription des transports • En incitant les transporteurs à respecter les bonnes pratiques (adaptation du mode de transport à l’état de santé du malade, transport partagé) par la signature de contrats d’amélioration de la qualité et de la coordination des soins, en faveur du développement de l’usage de véhicule sanitaire léger (VSL). Réguler l’offre de transport sur le territoire (ambulances, VSL) • Le décret du 29 août 2012 renforce le pouvoir de décision du directeur général de l’ARS sur l’organisation de l’offre de transport ; son accord préalable est requis pour les transferts d’autorisation de mise en service des véhicules sanitaires, en tenant compte, notamment de la satisfaction des besoins sanitaires locaux de la population et de la maîtrise des dépenses de transports de patients. \\\
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RAPPELS RÉGLEMENTAIRES Les textes de référence : Articles L 322-5, L 162-1-15, L 162-2-1, L 162-4-1, R 322-10 et suivants du code de la sécurité sociale ; - Articles L 6312-1, R 1211-3 et suivants du code de la santé publique ; - Arrêté du 23 décembre 2006 fixant le référentiel de prescription des transports prévu à l’article R 322-10-1 du code de la sécurité sociale ; Circulaire DHOS/F4/DSS/1A/2007/330 du 24 août 2007 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses liées au transport de patients. http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Facturation-Fiche_021_les_transports.pdf Décret du 1er avril 2011 : http://maladieschroniques.free.fr/crbst_5.html
INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES A signaler : revue Echanges de l’AFIDTN n° 96 septembre 2011 cahier scientifique « Qualité de vie et dialyse » A écouter : Un rein artificiel portable et externe de moins de trois kilos qui libérerait les patients des séances de dialyse en milieu hospitalier ? Telle est l’ambition du projet européen Nephron+, auquel participe le Centre suisse d’électronique et de microtechnique de Neuchâtel (CSEM). L’avis de Michel Burnier, chef de service en néphrologie au Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), recueilli par Anne Baecher : http://www.rts.ch/la-1ere/ programmes/cqfd/5018129-chroniquele-rein-artificiel-de-demain-22-08-2013. html?f=player/popup
SI LE TAUX DE RECOURS AU TRANSPORT EST TRÈS HOMOGÈNE PAR DÉPARTEMENT ET PROCHE DE 100% QUEL QUE SOIT LE DÉPARTEMENT, ON CONSTATE PAR MODE DE TRANSPORT DE FORTES DISPARITÉS DÉPARTEMENTALES. UNE PARTIE DE CES
ÉCARTS PEUT S’EXPLIQUER PAR UNE DISPARITÉ DÉPARTEMENTALE
DE L’OFFRE DE TRANSPORT ET DES MODES DE TRANSPORT DISPONIBLES.
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SUPPLÉMENT DOSSIER
/// COMMENT LA DIALYSE VA-T-ELLE ÉVOLUER ? L’hémodiafiltration à hautvolume, un nouveau paradigme dans le traitement de l’insuffisance rénale chronique ultime : de la théorie aux preuves cliniques. Dès à présent, il apparaît difficilement concevable, voire discutable au titre du principe universel de précaution, de ne pas proposer à tous les patients urémiques l’HDF à haut volume comme traitement de suppléance conventionnel
Pourquoi faut il améliorer le traitement de suppléance par dialyse ? La suppléance rénale artificielle par dialyse est un traitement reconnu et largement éprouvé de l’urémie chronique. La dialyse et la transplantation rénale
représentent le socle thérapeutique et nécessairement complémentaire de l’insuffisance rénale chronique ultime. En fin d’année 2011, l’hémodialyse assurait la survie de près de 3 millions de patients urémiques dans le monde dont près de 40 000 en France. En dépit des progrès considérables accomplis au cours de ces dernières décennies, dans la compréhension de la physiopathologie de l’insuffisance rénale chronique et de son traitement (caractérisation des toxines urémiques; identification des réactions de bioincompatibilités aux dispositifs d’épuration extracorporels ; identification des facteurs de risques etc. et dans l’amélioration des performances et de la tolérance des séances (généralisation du dialysat tamponné au bicarbonate, des hémodialyseurs à haute perméabilité et des maitriseurs d’ultrafiltration ainsi que de nombreuses autres options techniques), l’hémodialyse conventionnelle intermittente courte demeure entachée d’une morbidité (hospitalisation 9 à 12 jours annuellement) et d’une mortalité élevées (12 à 16 % par an en Europe).
Comment améliorer les résultats du traitement de suppléance rénale ?
PROFESSEUR BERNARD CANAUD Medical Board FMC, Bad Homburg-Germany & Université de Montpellier - UFR Médecine, Montpellier-France
De façon intéressante, comme le souligne l’étude internationale DOPPS, les résultats du traitement de l’insuffisance rénale par hémodialyse varient considérablement d’un pays à l’autre. De nombreuses raisons sont avancées pour expliquer ces différences. Pour ne citer que les principales soulignons : les profils médicaux des patients traités (âge avancé, prévalence des comorbidités en particulier du diabète sucré et des maladies cardiovasculaires…) ; la grande hétérogénéité des pratiques médicales tant au niveau national, régional que local; les méthodes thérapeutiques prescrites ; les ressources économiques et/
ou les prestations médicales (médicale et/ou médicosociale) allouées à l’insuffisance rénale ; la variabilité des systèmes de contrôle de qualité et d’indicateurs de performances ; etc. Quel qu’en soient les explications, force est de constater que le gain de vie ou de qualité de vie des patients en hémodialyse, ne progresse pas aussi vite que les progrès réalisés dans le domaine médical et technique. Ce constat souligne la complexité métabolique de la maladie rénale chronique et le fait que les lésions urémiques s’installent bien avant la prise en charge en dialyse, mais également met en évidence les lacunes de l’hémodialyse conventionnelle courte. Sans entrer dans les détails, trois éléments sont clairement identifiés dans ce contexte : 1. La capacité d’épuration des toxines urémiques est limitée par le caractère diffusif de l’hémodialyse et par la durée trop courte des séances d’hémodialyse ; 2. L’intermittence du traitement est responsable d’un déséquilibre permanent de la composition du « milieu intérieur » responsable notamment de variations volémiques et tensionnelles délétères survenant au cours des séances de dialyse (épisodes d’hypotension artérielle perdialytiques); 3. La répétition des réactions d’hémoincompatibilités induites par la circulation extracorporelle et le contact avec un dialysat microbiologiquement contaminé.
Qu’apporte l’hémodiafiltration dans ce contexte ? L’hémodiafiltration « en-ligne » (HDF), a été introduite dans le traitement de l’insuffisance rénale chronique dans les années 80. L’originalité de cette méthode est double : d’une part, elle associe aux transferts diffusifs classiques de l’hémodialyse, les transferts convectifs de l’hémofiltration permettant d’éliminer des toxines urémiques de haut poids moléculaires ; d’autre part, elle repose
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sur la production « en-ligne » du liquide de substitution par stérilisation à froid (double ultrafiltration stérilisante) du dialysat frais produit par le moniteurgénérateur d’hémodiafiltration. L’HDF « en-ligne » apporte ainsi une réponse plus appropriée aux besoins du patient urémique : 1. Elle accroît l’efficacité de l’épuration en élargissant le spectre moléculaire des solutés éliminés en se rapprochant de la filtration glomérulaire naturelle ; 2. Elle requiert l’utilisation de dialysat ultrapur qui prévient l’activation des systèmes cellulaires et protéiques sanguins et améliore l’hémocompatibilité du dispositif d’épuration extracorporel ; 3. Elle produit un liquide de substitution à faible coût et en quantité virtuellement illimitée ; 4. Elle permet le développement de méthodes thérapeutiques innovantes (automatisation des procédures, rétrocontrole volémique…). L’HDF « en-ligne » n’est plus une méthode expérimentale réservée à quelques unités d’élite ou à des patients sélectionnés. L’HDF fait actuellement partie de l’offre thérapeutique courante du traitement de l’insuffisance rénale chronique. Le taux de progression de l’HDF est linéaire (de l’ordre de 2% par an) dans l’ensemble des pays Européens. À ce jour, l’HDF assure le traitement régulier de plus de 18% de la population urémique en Europe (plus de 50000 patients) dépassant ainsi largement la prévalence de la dialyse péritonéale. La sécurité de cette méthode n’est plus à prouver au vu du nombre de séances réalisées annuellement (plus de 7 millions) et des milliers de mètres cubes de liquide de substitution infusés annuellement sans événements particuliers. L’efficacité de l’HDF a été également très largement démontrée dans des études de courtes ou de moyennes durées. Le gain d’épuration par rapport à l’hémodialyse conventionnelle porte essentiellement sur les toxines de haut poids
moléculaires. De façon schématique, il est de 10 à 15% sur les solutés de faibles poids moléculaires (urée et créatinine), de 15 à 20% pour des solutés intermédiaires (phosphates inorganiques) et de 50 à 200% sur les solutés de haut poids moléculaires (B2M, Leptine…).
Qu’apporte les études cliniques évaluant l’hémodiafiltration ? Comme toute thérapie, la suppléance rénale doit être évaluée sur des résultats à long terme et sur des critères robustes de morbi-mortalité. C’est le principe même de la médecine basée sur les preuves. Avant 2006, de nombreuses études avaient rapportées les bénéfices de l’HDF « en-ligne » par rapport à l’hémodialyse conventionnelle. De façon globale, l’ensemble des études soulignait la meilleure tolérance des séances, la plus grande effi-
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cacité basée sur des biomarqueurs originaux et suggérait une morbi-mortalité réduite pour les patients traités par HDF. Cela dit, les études étaient de courte durée, portaient sur de faibles effectifs et pour la plupart n’étaient pas randomisées, ce qui en a réduit beaucoup la portée scientifique. En 2006, DOPPS (Dialysis Outcomes Practice Patterns Study), une étude internationale utilisant les données de sa branche Européenne incluant 2165 patients a rapporté pour la première fois un gain de survie de 35% chez les patients traités par HDF haute efficacité (volume de substitution compris entre 15 et 20 litres par séance) par rapport à ceux traités par hémodialyse basse ou haute perméabilité, y compris ceux traités par HDF mais à faible efficacité (5 à 15 litres par séance). Cette étude prospective randomisée non-interventionnelle, utilisant des modèles statistiques appropriés (modèles de régression
COMME TOUTE THÉRAPIE, LA SUPPLÉANCE RÉNALE DOIT ÊTRE ÉVALUÉE SUR DES RÉSULTATS À LONG TERME ET SUR DES CRITÈRES ROBUSTES DE MORBI-MORTALITÉ. C’EST LE PRINCIPE MÊME
DE LA MÉDECINE BASÉE SUR LES PREUVES.
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© Anne Franski
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Cox avec ajustement pour différentes variables confondantes : age, 14 comorbidités, dose de dialyse, effet des pratiques du pays et du centre…) a été la première à montrer la supériorité de l’HDF par rapport aux autres méthodes de dialyse et à suggérer que le volume de substitution, considéré comme un substitut de la dose convective, jouait un rôle majeur dans le gain de survie des patients. De plus, cette étude a retrouvé des effets bénéfiques sur différents indicateurs d’efficacité de l’HDF (réduction du profil inflammatoire, facilitation de la correction de l’anémie et réduction des besoins en EPO…). Faisant suite aux résultats de l’étude DOPPS, cinq études randomisées contrôlées (Pays-Bas, Italie, Turquie, Espagne-Catalogne, France) ont été lancées de façon quasi simultanée en Europe pour confirmer le rôle bénéfique de l’hémodiafiltration sur la survie des patients insuffisants rénaux chroniques. Quatre ont été rapportées et la dernière en France est en cours d’analyse. Sans entrer dans les détails de ces différentes études, nous résumerons les principaux éléments de la façon suivante. L’étude italienne (Italian Convective vs Diffusive Study) a exploré essentiellement la tolérance hémodynamique (quantifiée par le nombre d’épisodes d’hypotension artérielle par séance) des
séances de dialyse chez 146 patients randomisés en trois groupes (2/1/1) traités respectivement par hémodialyse basse perméabilité (70), hémofiltration prédilutionnelle (36) et hémodiafiltration prédilutionnelle (40) sur une période de 24 mois. De façon intéressante, l’HDF apporte une réduction de 50,9% des épisodes hypotensifs, alors que l’HF ne les réduit que de 18,4% et que l’HD basse perméabilité tend à les accroitre de 9,9%. Il est intéressant de constater que cette réduction des épisodes hypotensifs est obtenue en dépit d’une fréquence relativement faible (7,5%) des hypotensions sur près de 30 000 séances. Aucune différence significative de mortalité ou de morbidité n’est observée avec l’HDF ou l’HF, mais il est important de souligner que la mortalité annuelle dans cette cohorte est de moins de 7%. L’étude des Pays-Bas (CONTRAST) a comparé la morbi-mortalité (toutes causes et d’origine cardiovasculaire) chez plus de 714 patients insuffisants rénaux prévalents randomisés en deux groupes traités soit par hémodialyse basse perméabilité (356pts), soit par hémodiafiltration postdilutionnelle (358 pts) sur une période de 36 mois. Basée sur les objectifs primaires et secondaires, cette étude a été considérée comme non conclusive et n’a pas permis d’affirmer la supériorité de l’HDF. Deux points méthodologiques méritent cependant
d’être soulignés dans cette étude : d’une part, près de deux tiers des patients n’atteignirent par les volumes d’ultrafiltrations établis par le protocole (soit 6 litres par heure) et peuvent être considérés en violation de protocole alors qu’ils sont inclus dans l’analyse finale ; d’autre part, une analyse en sous-groupes établis selon les volumes ultrafiltrés (tertiles <18,17 ; 18,18-21,95 et >21,95) montre clairement un effet bénéfique des hauts volumes (>21.95) par rapport aux plus faibles (<15litres) avec une réduction de mortalité globale de 39% et de 28% pour les événements cardiovasculaires. L’étude Turque (Turkish HDF study) a comparé la morbi-mortalité (globale et d’origine cardiovasculaire) chez plus de 782 patients insuffisants rénaux prévalents randomisés en deux groupes recevant, soit un traitement par hémodialyse haute perméabilité (391), soit un traitement par hémodiafiltration postdilutionnelle (391). Basée sur les objectifs primaires et secondaires de l’hypothèse de base, cette étude n’a pas apporté pas la preuve de la supériorité de l’HDF par rapport à l’HD haute perméabilité. Un certain nombre de points méthodologiques méritent également d’être soulignés : d’une part, près de 50% des patients en HDF ont reçus un volume de substitution inférieur à 17,4 litres par séance, soit inférieur au volume prévu de 5 litres par heure ; d’autre part, le groupe de patients qui a bénéficié de plus de 17,4 litres de volume de substitution par séance soit près de 20 litres ultrafiltrés (incluant la perte de poids) a un gain de survie hautement significatif avec une réduction du risque relatif de mortalité globale de 46% et cardiovasculaire de 71%. Dans cette étude également, le volume ultrafiltré total, considéré comme un substitut de la dose convective, a un rôle essentiel protecteur sur la mortalité des patients.
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du nombre de patients traités de près de 2% par an. La supériorité de l’HDF qui avait été suggérée par l’étude DOPPS est maintenant confirmée par les études interventionnelles récemment rapportées. En dépit de l’absence de preuves formelles, en partie liées à des problèmes méthodologiques, les études Hollandaise et Turque suggèrent néanmoins un effet bénéfique des doses convectives élevées sur la survie des patients. L’étude Catalane (ESHOL) ayant respectée des pratiques cliniques très homogènes, a clairement démontré le rôle bénéfique de l’hémodiafiltration à haut volume (> 21 litres par séance) sur la survie globale et cardiovasculaire des patients. De façon intéressante, cette étude a également mis en évidence une réduction significative des complications cardiovasculaires (ischémiques, accidents vasculaires cérébraux) et infectieuses ainsi qu’une réduction significative des hospitalisations.
Sans être positive au plan statistique, les études Hollandaise et Turque apportent néanmoins un élément de réflexion clinique intéressant en suggérant un effet dose convectif direct sur la réduction de mortalité. L’étude Catalane (ESHOL study) très récemment rapportée a comparé les effets de l’HD haute perméabilité et de l’HDF postdilutionnelle sur la morbimortalité chez 906 patients insuffisants rénaux prévalents randomisés pour recevoir l’une ou l’autre de ces méthodes. Basée sur ses objectifs primaires et secondaires, cette étude apporte pour la première fois la preuve que l’hémodiafiltration haut volume est supérieure (450) à l’HD haute perméabilité (456) en réduisant la mortalité globale de près de 30% à 36 mois. L’analyse complémentaire multivarié par modèle de régression de Cox retrouve également une réduction de la mortalité cardiovasculaire (33%), des accidents cérébraux (61%), une réduction des épisodes hypotensifs (28%), hospitalisation (22%), infection (22%)… Au plan méthodologique, cette étude apporte également des éléments importants à souligner : d’une part, une très grande homogénéité des pratiques cliniques au sein des différents centres participants marqués par des débits sanguins proches de 400ml/min, des durées de traitements de 240 minutes et des fistules AV chez près de 90% des patients; d’autre part, l’obtention chez près de 90% des patients d’un volume d’ultrafiltration total supérieur à 22 litres par séance ; enfin, les critères d’efficacité de dialyse apparaissent atteints dans la grande majorité des patients. L’étude Française (PHRC HDF) est en cours d’analyse. Elle a ciblé une population spécifiquement plus âgée (plus de 65 ans) en comparant les effets de l’HD
TECHNIQUES DE DIALYSE
haute perméabilité à celle de l’hémodiafiltration postdilutionnelle sur la tolérance des séances, la qualité de vie et la morbi-mortalité. Elle apportera un complément d’information utile aux études précédemment citées en évaluant notamment une population plus fragile mais aussi plus représentative de la population actuellement traitée.
Que retenir en pratique ? En 2013, l’hémodiafiltration « en-ligne » peut être considéré comme une méthode sure et très efficace qui a atteint sa phase de maturité. L’HDF assure le traitement de plus de 50 000 patients en Europe et bénéficie d’une augmentation régulière
Au plan clinique, l’HDF peut être considérée actuellement comme supérieure aux autres méthodes de suppléance rénale dans la mesure où la dose convective optimale est atteinte (> 22litres par séance pour un poids sec moyen de 70 kgs). La technologie moderne permet une mise en œuvre facile à un coût virtuellement équivalent à celui de l’hémodialyse haute perméabilité avec dialysat ultrapur. Dès à présent, il apparaît difficilement concevable, voire discutable au titre du principe universel de précaution, de ne pas proposer à tous les patients urémiques l’HDF à haut volume comme traitement de suppléance conventionnel. L’HDF représente à ce titre, un nouveau paradigme thérapeutique pour l’insuffisance rénale chronique.
EN 2013, L’HÉMODIAFILTRATION « EN-LIGNE » PEUT ÊTRE CONSIDÉRÉ COMME UNE MÉTHODE SURE ET TRÈS EFFICACE QUI A ATTEINT SA PHASE DE MATURITÉ. L’HDF ASSURE LE TRAITEMENT DE PLUS DE 50 000 PATIENTS
EN EUROPE ET BÉNÉFICIE D’UNE AUGMENTATION RÉGULIÈRE
DU NOMBRE DE PATIENTS TRAITÉS DE PRÈS DE 2% PAR AN.
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/// ET SI LA TÉLÉMÉDECINE
RAPPROCHAIT LES INDIVIDUS
C
’est avec ce titre volontairement un peu provocateur que nous abordons le sujet passionnant de la télémédecine et plus particulièrement de l’impact de la télémédecine dans la relation professionnel de santé et personne dialysée.
Le déploiement de la télémédecine : une réponse opérationnelle, sécurisée et reproductible Le déploiement de la télémédecine constitue dans les territoires, une réponse organisationnelle et technique aux nombreux défis épidémiologiques (vieillissement de la population, augmentation du nombre de patients souffrant de maladies chroniques et de poly-pathologies), démographiques (inégale répartition des professionnels sur le territoire national) et économiques (contrainte budgétaire) aux-
quels fait face le système de santé aujourd’hui. C’est aussi une attente des personnes malades et de leur famille afin de réduire les temps de transports et d’améliorer, par là, la qualité de vie. Le centre BBRAUN AVITUM d’hémodialyse des Alpes a déployé une offre de soins couplée avec la télémédecine sur le territoire de santé des Alpes de Haute Provence, territoire présentant un contexte géographique difficile et des temps de trajet longs pour les usagers.
• Développer le « hors centre » • Améliorer les séjours de vacanciers avec une offre plus médicalisée sur 2 nouvelles destinations • Améliorer la qualité de vie des usagers en raccourcissant les temps de transport et la fatigue induite • Valoriser le logiciel de surveillance médicale NEXADIA en lui conférant une reconnaissance régionale et nationale dans le domaine de la télémédecine.
Le centre d’hémodialyse des Alpes propose 3 sites de dialyse, Manosque, Digne les bains et Sisteron . Les deux derniers sites étaient jusqu’alors des unités d’auto dialyse. Ils proposent aujourd’hui une prise en charge en Unité de Dialyse Médicalisée avec la fonctionnalité télémédecine.
L’Unité de Dialyse Médicalisée sous télémédecine : Une réponse adaptée et encadrée
Cette démarche innovante présente plusieurs objectifs : • Diversifier et renforcer l’offre de proximité
L’équipe de Direction du Centre d’hémodialyse des Alpes, pilote d’un projet à taille humaine
Pour obtenir l’autorisation d’UDM sous télémédecine, le centre d’hémodialyse des Alpes a du mettre en place les 2 modalités suivantes : la télésurveillance et la téléconsultation. – La télésurveillance d’une séance de dialyse, via NEXADIA MONITOR : est un acte de surveillance ou de suivi continu qui a pour objet de transmettre au professionnel médical pour interprétation des indicateurs cliniques ou biologiques de l’état de santé du patient.. – La téléconsultation est un acte de consultation réalisé à distance et valorisé en tant que tel ; il se réalise en présence du patient pris en charge dans les centres décentralisés de Digne et de Sisteron et assisté de l’infirmière et du néphrologue de l’équipe médicale à Manosque qui assure la téléconsultation. Grace à ces deux modalités, ces centres décentralisés peuvent désormais assurer une prise en charge en UDM. Les visites médicales hebdomadaires sont réalisées par le médecin néphrologue par téléconsultation.
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La réalisation de cette téléconsultation s’effectue grâce à une solution logicielle qui via internet utilise les technologies de l’information et de la communication appropriées à la réalisation d’un contact visuel et oral et à la consultation partagée du dossier médical du patient, des données collectées par NEXADIA, des bilans sanguins etc.
Une solution favorisant l’accessibilité des usagers à l’information Avec un ordinateur portable équipé d’une Webcam professionnelle et d’un audiophone, le tout posé sur une tablette ou un petit guéridon, la solution mise en place se veut simple. Elle est aussi pédagogique car le partage
TECHNIQUES DE DIALYSE
visuel d’information facilite l’appropriation et la compréhension des informations médicales expliquées par le médecin néphrologue. Cette simplicité a facilité l’accord des usagers pour entrer dans cette nouvelle approche. De même l’évolution vers la prise en charge à domicile, l’éducation thérapeutique, ou la coopération avec les EHPAD est envisageable dans les années à venir.
Une opportunité unique d’évaluation : des usagers rassurés , des professionnels sécurisés En collaboration avec la faculté de médecine de Nice , UFR Médecine, Master I2S « Ingénierie du système de santé », une évaluation de la perception de la télémédecine au regard de la qualité de vie a été conduite durant l’été 2012. Les résultats attestent d’une perception positive des 8 premiers usagers vis-à-vis de la télémédecine. Pour exemple : • Pour 100 % des patients, la télémédecine apporte aux patients une plus grande confiance dans les soins qui leurs sont délivrés.
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A SAVOIR
• Concernant la relation avec le néphrologue, 20% des patients considèrent que la relation s’améliore grâce à la télémédecine, les 80% autres considèrent que la relation ne change pas. • 100 % des patients considèrent que la télémédecine ne change rien dans les rapports avec les infirmières. • 100 % des patients sont tout à fait convaincus que l’utilisation de la télémédecine a ou aura un impact positif sur leur qualité de vie. En effet, dans l’ensemble ils ont plus confiance dans leur prise en charge et se sentent plus sereins. • 80 % des patients considèrent que le logiciel de surveillance médicale a permis une meilleure prise de conscience de l’importance du poids dans leur maladie. Les 20 % autres estiment que cela n’a rien changé. • 100 % des patients pensent que la télémédecine peut apporter des bénéfices dans la surveillance médicale de leur maladie. Ils pensent que les soins seront
meilleurs, le suivi médical aussi et que le médecin sera plus présent pour eux. Ce dernier résultat témoigne de l’impact psychologique très positif pour ces personnes malades pris en charge dans des unités souvent de petites tailles et sans présence journalière de médecins. En parallèle, une analyse de la perception de la télémédecine a été conduite auprès des professionnels soignants travaillant dans ces unités décentralisées. Le sentiment de renforcement de la sécurité est partagé par tous les professionnels et cela aussi bien par l’apport de la télésurveillance que de la téléconsultation : « Nous sommes moins seuls », « on ne court plus après les prescriptions », « plus besoin de téléphone », « c’est une aide précieuse dans la gestion des séances »… Pour Michel Arnaud, le directeur du Centre d’hémodialyse des Alpes : « la télémédecine est en train de gagner son audacieux pari : sécuriser la prise en charge de proximité, améliorer la qualité de vie des usagers et la qualité de vie au travail des soignants de ces unités décentralisées ».
Saint Pierre et Miquelon : Depuis avril 2012 (première télédialyse transatlantique), le centre hospitalier François DUNAN, dans cet archipel Français de 6 500 habitants situé près du Canada dans l’océan Atlantique, assure des séances de télédialyse en lien avec des centres experts d’hémodialyse de métropole notamment le CH St Brieuc depuis avril 2012 puis transfert d’activité avec l’ECHO (PSS Le Mans) à partir du 23 septembre 2013. Fort d’une activité de télémédecine en plein déploiement (téléradiologie, télédermatologie et bien sur télédialyse, déjà opérationnelles ainsi que téléconsultations et téléexpertises en oncologie, soins palliatifs, douleurs, nutrition , obésité, diabétologie à très court terme), l’unité de télédialyse bénéficie à partir du 23 septembre 2013 de nouveaux locaux et générateurs de dialyse dans le tout nouvel hôpital de St Pierre et Miquelon. Une équipe de professionnels de santé renforcée et bénéficiant de formation régulière, propose une prise en charge adaptée tant pour les insuffisants rénaux chroniques vivants dans l’archipel que pour ceux de passage depuis la métropole ou d’autres pays comme le Canada. » Enfin : signalons aussi à Dax la mise en place d’une télé dialyse UDMTS au 1er mars 2012.
Le Centre d’Hémodialyse des Alpes a été nominé lors des Trophées de l’Hospitalisation privée 2013 pour son programme de télémedecine en dialyse, voir la vidéo. http://www.youtube.com/ watch?v=u0JnLDKnyeM&feature=c4-ove rview&list=UUs8CXGkiYMHYQr48ub Dl5uw \\\
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SYMPOSIUM SUR LA NEPHROPATHIE A IGA DE NANJING, JUIN 2013
VERS UNE NOUVELLE DEFINITION DE LA MALADIE
LAURELINE BERTHELOT PhD, INSERM U699
L
es participants médecins et scientifiques étaient nombreux pour assister au dernier symposium sur la néphropathie à IgA organisé cette année par l’université de Nanjing en Chine. Ce symposium a lieu environ tous les trois ans et plusieurs équipes ont présenté cette année de nouveaux résultats de recherche sur la maladie. La néphropathie à IgA est une maladie rénale conduisant dans 30% des cas à l’insuffisance rénale et touche le glomérule. Des dépôts d’anticorps de type IgA caractérise la maladie avec une protéinurie et hématurie. La seule façon de la diagnostiquer est d’effectuer une biopsie rénale qui montre alors des dépôts d’IgA et une prolifération des cellules mésangiales, une conséquence vraisemblable des dépôts qui semblent activer ces cellules in situ. Une autre caractéristique de la néphropathie à IgA encore mal comprise est l’anomalie de glycosylation des IgA. Chez les patients sont retrouvées des IgA hypoglycosylées (manque de galactose) dans leur sérum et ces IgA se déposent dans le rein. L’origine de cette hypoglycosylation n’est pas clairement déterminée. Il a en effet été montré que chez 50% des patients, cette caractéristique est héritée. De plus, des infections pourraient
induire cette anomalie. La néphropathie à IgA est donc une maladie complexe semblant associer facteurs génétiques et environnementaux, un seul évènement n’est pas suffisant à induire la maladie. Le nouvel état des lieux au symposium montre une répartition des patients atteints de la néphropathie à IgA très hétérogène dans le monde. Certaines régions sont très touchées en Asie comme le Japon et la Chine de l’est où les cas de néphropathie à IgA peuvent représentés de 15 à 45% des biopsies rénales. L’Afrique et l’Amérique latine sont beaucoup moins touchées, en Europe et aux Etats-Unis la prévalence de la maladie est d’environ de 0,5%. Les études et analyses présentées au symposium ont adressé de nombreuses spécialités différentes. De vastes études de génétique sur des cohortes importantes de patients (références 2 et 3) en Chine et Etats-Unis/Europe ont pu identifier plusieurs régions chromosomiques qui semblent caractériser ces patients Ces analyses ont permis également d’établir un score de risque génétique de développer la maladie qui corrèle bien avec la répartition géographique de la maladie (Figure 1, extraite de la référence 1). Les analyses des gènes trouvés dans ces régions sont actuellement en cours. Ils pourraient permettre de comprendre les mécanismes pathologiques de la maladie et de trouver de nouvelles cibles thérapeutiques. Notre groupe (INSERM U699, équipe qui s’intéresse aux immunorécepteurs et pathologies rénales) a identifié le récepteur aux IgA : le CD89 comme molécule participant à la pathogénie de la maladie. En effet, on retrouve ce
Analyse du risque géo-spatial dans le monde de la néphropathie à IgA en fonction des études génétiques
RECHERCHE
récepteur soluble également déposé dans les glomérules des patients (référence 4). D’autres équipes ont montrés des dépôts de molécules du complément (molécules impliquées également dans les réponses immunes et ici inflammatoires) associées aux dépôts d’IgA. Donc ces dépôts contiennent des IgA mais aussi plusieurs autres molécules associées et certainement d’autres encore non identifiées. Ces dépôts activent les cellules mésangiales qui possèdent un récepteur aux IgA (le TfR), induisant leur prolifération. Elles produisent également plus de récepteurs TfR et une autre protéine la transglutaminase 2 (référence 4) stabilisant les dépôts et aggravant le processus. Enfin, ces cellules produisent également de petites molécules chimiques appelées cytokines qui attirent les cellules immunitaires induisant une inflammation plus grande. Une équipe suédoise a montré au symposium que lorsqu’ils extraient les cellules mésangiales de biopsies de patients atteints de néphropathie à IgA, ces cellules sont plus réactives aux IgA que des cellules d’autres patients (référence 5). L’origine de cette hyperactivation des cellules des patients n’est pas connue, elle pourrait résulter de l’activation continue par les IgA des cellules mésangiales des patients rendant ces cellules hypersensibles aux IgA ou avoir une origine génétique. Pour conclure ce congrès, une nouvelle définition de la néphropathie à IgA a émergé des nouveaux résultats. La maladie est n’est pas seulement caractérisée par des dépôts d’IgA polymériques dégalactosylées mais ils sont associés à des dépôts de CD89 et de molécules du complément (C3 et MBL) avec une prolifération des cellules mésangiales. Cette maladie reste complexe mais de nouvelles pistes semblent prometteuses. \\\
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A PROPOS DE L’IRCT
L’INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË : ELLE PEUT ÉVOLUER VERS L’INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE
I. Introduction L’insuffisance rénale aiguë est définie par la baisse brutale du débit de filtration glomérulaire en quelques heures ou quelques jours. Elle se traduit par une élévation rapide de l’urée et de la créatinine sanguines. Elle peut être liée à : 1) une baisse de la perfusion des reins lors d’hypotension artérielle quelle qu’en soit la cause (déshydratation sévère, hémorragie, choc septique), 2) à un obstacle sur les voies excrétrices (lithiase ou tumeur des voies urinaires), ou enfin, 3) à une atteinte du tissu rénal luimême, constituant l’insuffisance
ERIC RONDEAU néphrologue Hôpital Tenon
rénale aiguë organique. Dans près de 80% des cas d’insuffisance rénale aiguë organique, l’agression rénale est soit ischémique (manque d’oxygène) soit toxique, entraînant essentiellement des lésions de nécrose tubulaire aiguë. Ces lésions sont classiquement complètement réversibles dans un délai de trois semaines à un mois, avec retour progressif de la fonction rénale à la normale. La réversibilité habituelle de l’insuffisance rénale aiguë organique par nécrose tubulaire aiguë est progressivement remise en cause par les études épidémiologiques récentes.
II. Pronostic actuel de l’insuffisance rénale aiguë Autant une intervention précoce au cours de l’insuffisance rénale aiguë fonctionnelle ou de l’insuffisance rénale aiguë obstructive permet une restitution rapide de la fonction rénale avec un retour de la créatininémie à l’état antérieur, autant les données épidémiologiques concernant la nécrose tubulaire aiguë restent incertaines. Dans une grande étude multicentrique ayant inclus plus de 29 000 patients de réanimation l’insuffisance rénale aiguë a été observée dans 5,7% des cas, dont deux tiers ont nécessité le recours à l’hémodialyse. La cause la plus fréquente de ces insuffisances rénales aiguës est l’infection sévère présente dans environ un cas sur deux. Environ 30% de ces
malades avaient une insuffisance rénale chronique préexistante, montrant que l’insuffisance rénale aiguë peut survenir sur un terrain prédisposé. La mortalité hospitalière de l’insuffisance rénale aiguë dans cette étude était de 60% et 13,8% des patients survivants nécessitaient le recours à la dialyse chronique à la sortie de l’hôpital, indiquant donc la persistance de séquelles rénales chez ces malades. Dans cette étude, il n’y a pas eu de suivi à long terme des survivants, et c’est tout l’enjeu des études actuelles que de déterminer ce pronostic à long terme. En effet, l’étude des registres américains incluant plus d’un million d’hospitalisations montre que l’insuffisance rénale aiguë a une incidence en constante augmentation depuis les années 1990 avec une croissance d’environ 11% par an dans toutes les classes d’âge, aussi avant 60 ans que 85 ans, dans les deux sexes et quelle que soit l’origine ethnique. Ces insuffisances rénales aigues sont des facteurs de risques de mortalité hospitalière bien définis aujourd’hui avec un risque augmentant en fonction de la sévérité de l’atteinte rénale. Cette sévérité est cotée selon la classification RIFLE (Risk – Injury – Failure et 2 stades chroniques Loss of function and End stage renal disease) ou son dérivé AKIN. Dans une étude effectuée à l’hôpital Tenon, chez des patients de réanimation et de soins intensifs néphrologiques, nous avons pu montrer que cette classification permettait une prédiction
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Figure 1 : Évaluation de la mortalité de l’insuffisance rénale aiguë (hôpital Tenon) en fonction de la classification RIFLE
du pronostic vital chez les patients qui avaient une insuffisance rénale aiguë associée à d’autres défaillances viscérales. En revanche, elle n’a pas d’intérêt pronostic en cas d’insuffisance rénale aiguë isolée (figure 1). La répartition des sévérités de l’IRA isolée ou associée à d’autres défaillances viscérales, selon la classification RIFLE, est indiquée dans la partie supérieure de la figure. Les courbes de survie des patients sont représentées dans ces différents groupes. Aucune différence n’est observée en cas d’IRA isolée (courbe en bas à gauche) ; en revanche la survie diminue en fonction de la sévérité de l’IRA lorsque celle-ci est associée à d’autres défaillances viscérales (courbe en bas à droite). Plus récemment, les études à long terme des patients survivant d’insuffisance rénale aiguë hospitalière montrent une augmentation significative du risque de décès et une augmentation
également du risque de maladies rénales chroniques à la suite d’une insuffisance rénale aiguë qui pourtant avaient semblé récupérer au moment de la sortie de l’hôpital. Ce risque de maladie rénale chronique nécessitant le recours à l’hémodialyse chronique augmente progressivement jusqu’à dix ans après l’épisode d’insuffisance rénale aiguë (figure 2). Ces résultats posent la question des séquelles possibles d’un épisode de nécrose tubulaire aiguë qui est sensé récupérer intégralement sans séquelle. Cela peut aussi témoigner d’une susceptibilité individuelle des malades qui développent l’insuffisance rénale aiguë, susceptibilité ou fragilité du tissu rénal à l’agression, qui va se traduire ultérieurement par le développement de la maladie rénale chronique. La figure 2 (page suivante) montre une augmentation significative et progressive du risque de développer une IRC nécessitant la dialyse chronique chez les patients ayant eu une IRA (trait pointillé) par rapport à ceux qui n’en ont pas eu (trait plein). Le risque est multiplié par 2,5 à 10 ans.
EXPLICATIONS
III. Mécanismes de l’agression rénale aiguë et progression de la fibrose rénale Si l’on considère la nécrose tubulaire aiguë, cause la plus fréquente d’insuffisance rénale aiguë organique dans les situations d’urgence et de réanimation, trois grands mécanismes sont impliqués : l’ischémie reperfusion observée au cours des états de choc, le sepsis avec ou sans hypotension artérielle et les toxiques notamment médicamenteux. L’analyse des biopsies rénales effectuées chez ces patients montrent en microscopie électronique des lésions de l’endothélium des capillaires péri-tubulaires et des lésions à type de feuilletage et d’amincissement voire de rupture de la membrane basale tubulaire, associées à des infiltrats macrophagiques juxtatubulaires. La lésion prédominante reste cependant l’atteinte du tubule notamment proximal, avec une diminution de l’épaisseur de l’épithélium, une diminution des villosités de la bordure en brosse, voire une disparition complète de cette bordure en brosse, et souvent des images d’apoptose et
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Figure 2: Incidence de l’IRC nécessitant l’hémodialyse chronique après hospitalisation pour IRA
de nécrose cellulaire. Le scénario communément admis pour expliquer l’apparition, puis la disparition de ces lésions, est qu’au cours du phénomène d’ischémie ou de l’agression toxique, les cellules tubulaires qui sont déjà dans une région pauvre en oxygène, vont avoir des troubles métaboliques avec une carence en ATP, ce qui va entraîner soit la nécrose cellulaire, soit des phénomènes d’apoptose. Les cellules survivantes vont proliférer et progressivement recoloniser le tube pour remplacer les cellules qui se sont détacher ou qui sont mortes et l’épithélium va progressivement se redifférencier pour revenir à l’état antérieur. Au cours de ce phénomène de réparation, il faut supposer que les lésions cellulaires aboutissent également au développement de la fibrose rénale. Le développement de la fibrose rénale est un phénomène complexe qui fait intervenir dans tous les cas une fibrose interstitielle, c’est-à-dire l’accumulation de protéines de la matrice extracellulaire dans l’interstitium rénal, et une atrophie tubulaire progressive, donc une disparition du parenchyme rénal normal. Ce phénomène de fibrose peut être le fait de cellules spécialisées qu’on appelle des fibroblastes et qui peuvent proliférer dans l’interstitium. Notre équipe s’est intéressée au rapport qui existait entre les cellules tubulaires et les fibroblastes de l’interstitium et nous avons montré qu’au cours de l’agression rénale, quelque soit son mécanisme,
les cellules épithéliales tubulaires pouvaient changer leur morphologie mais également leur capacité de synthèse et acquérir des propriétés de type mésenchymateux : c’est le phénomène de transition épithélio-mésenchymateuse. Ces cellules à différenciation mésenchymateuse pourraient soit migrer dans l’interstitium et s’associer au contingent de fibroblastes, soit envoyer des signaux aux fibroblastes interstitiels pour leur faire fabriquer davantage de matrice extracellulaire. Ce concept permet donc de relier l’agression des cellules épithéliales tubulaires et la fibrose interstitielle progressive du parenchyme rénal. Au cours des dernières années, nous avons effectué de nombreux travaux démontrant ces phénomènes de transition épithélio-mésenchimateuse dans le rein greffé, dont on sait qu’il peut fibroser progressivement avec le temps. De façon intéressante, nous avons démontré que l’ischémie initiale au moment de la greffe et la reprise retardée de la fonction rénale étaient des facteurs de risques de transition épithélio-mésenchymateuse à distance de la greffe (troisième mois) et étaient des facteurs de risque de développement progressif de fibrose interstitielle et de dégradation de la fonction rénale jusqu’à quatre ans après la transplantation. D’autres auteurs ont par ailleurs montré que la reprise retardée de fonction chez le greffé du fait d’une ischémie froide prolongée avait un retentissement sur le pronostic à long
terme de la greffe avec une différence de survie moyenne des greffons qui peut aller jusqu’à quatre à cinq ans. Nous pensons donc aujourd’hui qu’au cours de l’insuffisance rénale aiguë par nécrose tubulaire aiguë, une récupération « complète » de la fonction rénale est possible, mais il est probable que le parenchyme rénal et notamment la cellule épithéliale tubulaire garde la mémoire de l’agression ischémique ou toxique initiale. En cas de nouvelle agression ou en cas de vieillissement, la cellule tubulaire devient alors fibrogénique, c’est-à-dire qu’elle va stimuler la fibrose du rein via un processus de transition épithélio-mésenchymateuse. Nous avons des arguments pour dire que cette mémoire de l’agression initiale, plusieurs mois ou années après l’accident toxique ou ischémique, serait liée à des modifications de type épigénétiques dans les cellules tubulaires rénales. Les modifications épigénétiques correspondent non pas à des mutations de l’ADN, mais à des changements durables des protéines sur lesquelles est entouré l’ADN. Nos études actuelles essaient de confirmer cette hypothèse.
IV. Conclusion L’insuffisance rénale aiguë a aujourd’hui une incidence croissante. La récupération complète de la fonction rénale chez les patients qui survivent à cet épisode d’insuffisance rénale aiguë est la règle, mais à long terme, le risque d’insuffisance rénale chronique est au moins multiplié par deux à dix ans. Un suivi prolongé des patients est donc nécessaire et il convient évidemment de limiter au maximum les agressions surajoutées. Les mécanismes de fibrogénèse impliqués sont en cours d’identification. Il pourrait s’agir de modifications épigénétiques induites à la phase aiguë de la maladie. \\\
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EXPLICATIONS
CALCIUM
PRÉSERVER L’ÉQUILIBRE L’IMPORTANCE DU CALCIUM
DR DAVID ATTAF MÉDECIN DANS L’INDUSTRIE DE LA SANTÉ, MÉDECIN DES AFFAIRES MÉDICALES, FRESENIUS MEDICAL CARE
N
otre organisme a besoin de calcium pour maintenir la solidité et la santé de nos os et de nos dents. Le calcium est également utilisé par le cœur et les vaisseaux (il aide à la contraction du cœur et des vaisseaux), il aide le sang à coaguler, et est essentiel pour nos muscles et nos nerfs. Nous perdons du calcium par des processus corporels normaux tels que les selles, l’urine et la transpiration, et les phanères (perte des cheveux, ongles et l’épiderme). Si notre alimentation ne contient pas suffisamment de calcium pour remplacer celui qui a été utilisé, l’organisme prélève du calcium à partir des os, ce qui les affaiblit et les rend plus fragiles, et sujet aux fractures. Les symptômes de l’insuffisance de calcium dans le sang sont notamment des crampes musculaires, des spasmes,
et des contractions ou des picotements autour de la bouche ou dans les doigts. D’un autre côté, les symptômes d’un excès de calcium dans le sang peuvent être une faiblesse, une perte d’énergie, une perte d’appétit, des nausées et des vomissements, une constipation, un besoin fréquent d’uriner, des douleurs abdominales. En tant que patient dialysé, vous pouvez présenter certains symptômes de fluctuation des taux de calcium dans le sang, mais vous pouvez les éviter dans une large mesure en respectant quelques règles simples.
Aspects nutritionnels fondamentaux : le calcium Le calcium dont nous avons besoin pour alimenter la croissance des os et maintenir une bonne densité osseuse provient de notre alimentation. Le calcium se trouve à l’état naturel dans les produits laitiers tels que le lait, le fromage et les yaourts. Les autres sources de calcium sont les légumes de couleur vert (par exemple le chou, le chou vert) et les poissons tels que les sardines en boîtes avec leurs arêtes (riches en calcium).
Notions intéressantes à propos du calcium • Le corps humain adulte contient en moyenne environ 1 kg de calcium. • Le nom «calcium» n’a qu’à peine plus de 200 ans. En 1808, Sir Humphry Davy a tiré le nom du mot latin calx (qui signifie «calcaire») car on le trouve dans le calcaire. • La plus ancienne construction au monde est en carbonate de calcium. La pyramide de Khufu, peut-être mieux connue sous le nom de «grande pyramide de Giseh », est la structure la plus ancienne au monde et est constitué de 2,5 millions de blocs de calcaire.
Essentielle pour l’absorption du calcium : la vitamine D Toutefois, le calcium n’est pas suffisant à lui seul. Notre organisme a également besoin de la vitamine D pour fixer le calcium dans l’os essentiellement. La vitamine D est présente en petites quantités dans certains aliments tels que les poissons gras, le foie de bœuf, le fromage et les jaunes d’œufs et dans les aliments enrichis en vitamine D,
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notamment certains produits laitiers et le lait de soja. Seulement environ 20 % de la vitamine D dont nous avons besoin provient de notre alimentation. Un organisme en bonne santé peut produire par lui-même la vitamine D nécessaire si la peau est exposée à la lumière du soleil. Pour cette raison, la vitamine D est appelée parfois la « vitamine du soleil «. Avec l’aide du foie, les reins transforment ensuite la vitamine D en calcitriol, la forme biologiquement active de la vitamine D. Une fois parvenue dans la circulation sanguine, la vitamine D (sous forme de calcitriol) régule la concentration du calcium et du phosphate, favorisant ainsi la croissance normale et le remodelage osseux. En tant que patient traité par dialyse, vous pouvez facilement souffrir de carence en vitamine D, c’est pourquoi votre médecin pourra prescrire un complément en vitamine D dans le cadre de votre programme diététique.
Aspects nutritionnels fondamentaux : le phosphate/ phosphore Il est impossible de parler du calcium sans mentionner le phosphate, étant donné que l’équilibre des taux de calcium dans notre organisme est directement lié aux taux de phosphate. Le phosphate est un minéral qui est essentiel à une bonne résistance des os et des dents, à l’activité musculaire, ainsi qu’au métabolisme de chaque cellule de notre organisme. Le phosphate est absorbé dans l’intestin à partir du phosphore de notre alimentation. Le phosphate en excès est éliminé par les reins via l’urine, mais lorsque la fonction rénale est insuffisante, le phosphate ne peut plus être éliminé correctement.
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Avec l’évolution de l’insuffisance rénale, le niveau de phosphate sanguin augmente. Il en résulte une diminution du niveau de calcium dans le sang car le phosphate en excès capte du calcium pour constituer des complexes phosphocalciques. Il en résulte une diminution du calcium sanguin avec un prélèvement lent à partir des os du calcium nécessaire au cœur, aux muscles et aux nerfs. Comme expliqué plus haut, cela signifie que les os deviennent plus fragiles et que les articulations peuvent être douloureuses. Une élévation des niveaux de phosphate dans le sang augmente également le risque de maladie cardiaque coronarienne et d’accident vasculaire cérébral. Étant donné que les aliments riches en calcium sont également très riches en phosphore, ils ne sont pas toujours recommandés pour les personnes atteintes de maladie rénale, si vous suivez un régime faible ou réduit en phosphate. Dans ce cas, il est préférable de choisir des aliments enrichis en calcium, tels que des céréales, du pain, des jus, de la margarine ou des boissons nutritives. Votre diététicienne sera ravie de vous aider à faire les meilleurs choix.
Garder le phosphate élevé sous contrôle Pour faire baisser la concentration élevée de phosphate dans le sang, vous devez suivre scrupuleusement les recommandations sur votre traitement de dialyse et sur votre nutrition de votre médecin ou de votre nutritionniste. De plus vous devez veiller à prendre les agents chélateurs du phosphate alimentaire selon la prescription de votre médecin. Les agents chélateurs du phosphate vous aident à faire baisser
POUR FAIRE BAISSER LA CONCENTRATION ÉLEVÉE DE PHOSPHATE
DANS LE SANG, VOUS DEVEZ SUIVRE SCRUPULEUSEMENT
LES RECOMMANDATIONS SUR VOTRE TRAITEMENT
DE DIALYSE ET SUR VOTRE NUTRITION
DE VOTRE MÉDECIN OU DE VOTRE NUTRITIONNISTE.
la concentration en phosphate dans le sang en liant le phosphate alimentaire en excès dans l’intestin et en l’éliminant par l’intermédiaire des selles. Les agents chélateurs du phosphate peuvent être pris pendant chaque repas (selon les traitements). Comme vous pouvez le voir, le calcium est un élément vital pour des os sains et une bonne santé générale. En tant que patient dialysé, il est extrêmement important que vous portiez une attention particulière à votre nutrition et à l’utilisation correcte de vos agents chélateurs du phosphate, pour assurer l’équilibre de vos taux de calcium et de phosphate.
Recommandations générales à propos des agents chélateurs du phosphate • Évitez de les prendre en même temps que d’autres comprimés non compatibles (votre néphrologue vous les indiquera). • Prenez les agents chélateurs du phosphate en même temps que les aliments riches en phosphore. • Une grande partie du phosphate que nous ingérons est contenu dans les additifs alimentaires des aliments préparés vendu par l’industrie agroalimentaire. Veuillez éviter les additifs suivants: E240, E332, E338, E340b, E341, E450a, E450c, E540, E543, E544. • Adaptez les agents chélateurs du phosphate au type d’aliments que vous consommez et selon la décision médicale de votre néphrologues (toujours de la manière indiquée par votre néphrologue). Il existe 2 types de chélateurs : - Chélateurs contenant du calcium qui sont privilégiés lorsque la quantité de calcium dans le sang est basse et/ou la quantité de calcium dans l’organisme diminuée. - Chélateurs ne contenant pas de calcium qui sont donnés dans les autres situations. \\\
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RECHERCHE
L’OBSERVANCE THÉRAPEUTIQUE ET DIALYSE
L
a non-observance dans les maladies infectieuses est un problème de santé publique, puisque elle est facteur de résistance et/ ou de propagation de la maladie. Dans les maladies chroniques comme l’HTA, le diabète ou l’insuffisance rénale, la nonobservance est certes un problème de santé publique mais aussi et surtout un problème pour le patient qui devra faire face à des complications plus précoces ou plus graves. La littérature médicale et les termes employés nous apprennent que la « compliance » consiste à prendre correctement son traitement. Ce terme implique une certaine soumission et obéissance aux décisions du médecin. L’observance, quant à elle, est un terme qui suppose la capacité à prendre correctement son traitement, mais aussi à suivre les recommandations, qui ne se limite pas aux médicaments mais prend en compte le régime et l’activité physique. L’observance varie dans le temps en fonction d’éléments extérieurs et de la motivation du patient. Ce terme suppose aussi une certaine soumission aux dires de l’équipe médicale. Le terme d’adhésion thérapeutique suppose une interaction et une collaboration entre le patient et l’équipe mettant davantage en avant le rôle acteur et participatif du patient. De très nombreux facteurs interviennent dans la non-observance. Les études laissent apparaître que les patients en insuffisance rénale se comportent
EXPLICATIONS
L’observance thérapeutique pourrait se définir comme la conformité et la capacité du patient à suivre les prescriptions du médecin. Cependant la non-observance, c’est-à-dire la non-adhésion du patient à ce qui est recommandé par l’équipe médicale, est un problème fréquent dans les maladies chroniques. En effet, la chronicité d’une maladie nécessite l’adhésion du patient sur une longue durée à des traitements médicamenteux, à un régime vécu le plus souvent comme contraignant et dans le cas de la dialyse à un attachement contraint au centre et à la machine.
comme la population générale. Le premier facteur reste la polymédication. Le nombre de médicaments prescrits est habituellement élevé, supérieur à 8 par jour. Les études les plus anciennes mais aussi les plus connues sont discutables aujourd’hui, car on ne connaît pas l’information donnée au patient. En effet, la diffusion de l’éducation thérapeutique , auparavant plutôt méconnue en néphrologie, fait revoir l’information transmise au patient sur son traitement et surtout l’information communiquée sur les complications au long court. L’évolution de la société fait que la parole du médecin ne suffit plus et la définition de la compliance comme « la conformité, la soumission et l’obéissance aux prescriptions » est remise en cause. La principale source d’informations du patient sur sa santé n’est plus uniquement l’équipe médicale. Les principales sources d’information et les facteurs de décision viennent en premier des proches et de la famille, en second des médias, journaux, télé et ensuite seulement des professionnels de santé. Lorsque des médecins professeurs de médecine assurent dans les médias que 50% des prescriptions au mieux ne servent à rien, le patient est en droit de se poser des questions, sur l’utilité de son propre traitement, surtout si celui ci comporte des médicaments prescrits par différents spécialistes dont les avis quelquefois divergent ( comme la polémique autour des statines relayée par la presse). Le médecin apparaît comme soumis aux
pressions des laboratoires ce qui va dans le sens du questionnement sur l’utilité du traitement et dans le sens de la nonadhésion du patient aux recommandations de l’équipe. En effet cet aspect est aussi vrai pour les médicaments, le régime, l’activité physique, le mode de vie …
PHILIPPE CHAUVEAU,
NÉPHROLOGUE
LAETITIA IDIER,
PSYCHOLOGUE AURAD-AQUITAINE, BORDEAUX
DOSSIER
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D’autre part l’information transmise au patient mais aussi à l’équipe médicale est un facteur très important. Les études récentes sur l’impact de l’information montre que celle ci favorise l’observance et secondairement les résultats biologiques, si l’on suppose que ces derniers reste un bon critère de jugement. En effet, si l’on prend en exemple le cas du phosphore, un taux élevé dans le sang n’est pas toujours en relation avec la non prise des chélateurs (la qualité de la dialyse, le type d’alimentation, les problèmes osseux sont aussi en cause). Pourtant, lors du bilan mensuel, celuici reste souvent un critère de jugement pour l’équipe : « avez vous bien pris vos médicaments ? ». L’efficacité du traitement dépend nettement de l’information donnée : quand prendre le médicament, comment adapter la prise à sa nutrition et son mode de vie ? La motivation du patient peut aussi dépendre de l’information donnée sur les complications à long terme, puisque l’on ne voit pas immédiatement les effets sur le cœur ou les vaisseaux, comme on peut le voir sur ses chiffres de tension, à la prise du médicament hypotenseur. Ce constat met en avant l’intérêt des programmes d’éducation thérapeutique pour favoriser l’observance à partir de meilleures connaissances et compétences. L’information donnée à l’équipe (souvent oubliée) est aussi très importante. Quand une difficulté survient à la prise du médicament, le patient s’adresse en premier à l’infirmière, à l’aide-soignante ou au médecin traitant. L’information doit ainsi être relayée mais aussi, et surtout, les informations transmises au patient doivent aller dans le même sens. Ceci suppose une bonne information de l’équipe et une bonne information destinée aux patients, à son entourage et aux autres acteurs de santé. A coté de la non-observance intentionnelle/volontaire (ne pas prendre un médicament car « je ne crois pas que ce médicament m’est utile, je ne suis pas sûr des informations données par le médecin, le médicament à sur moi des effets secondaires néfastes … »), la non-observance non-intentionnelle est possible. Elle est un acte involontaire de non-observance suite à des difficultés de compréhension de l’ordonnance ou des consignes données. Cet aspect souvent évoqué est
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finalement rarement pris en compte. En effet, la parole du patient ou son environnement sont peu pris en considération : par exemple la difficulté à prendre le traitement en dehors des repas ou en dehors du domicile ; difficulté à prendre plusieurs cachets en même temps ; difficulté à mâcher ou à avaler ; incompréhension sur les explications données qui ne paraissent pas claires lorsque les patients sont interrogés à la sortie du cabinet (pas assez claires, lorsque la consultation est trop rapide ou quelquefois trop complexes dans un langage médical non compris). En effet, la clarté de l’ordonnance est rarement prise en compte. Elle est sans doute « conforme » aux règles de prescriptions, mais elle est souvent peu compréhensible pour le patient, d’autant plus qu’elle comporte fréquemment plus de 8 médicaments chez l’insuffisant rénal. Le nom de spécialité est souvent remplacé par le nom de la molécule dans le cadre des génériques, ce qui demande de la part de l’équipe et du pharmacien un décodage pour des patients qui souvent prennent la même spécialité depuis longtemps.
Les préférences du patient quand à la forme du médicament (liquide, en comprimé, à mâcher, à avaler) ou à son goût lorsqu’il s’agit de compléments sont également rarement prises en compte alors que ces préférences sont essentielles pour favoriser une bonne adhésion et observance au traitement. Comme nous l’avons vu, de nombreux facteurs liés à l’observance dépendent de l’environnement et de la culture. Les études internationales nous apportent des éléments de réflexion mais il a paru utile, afin de proposer des voies d’amélioration dans l’information aux patients, dans l’éducation thérapeutique et dans l’information des équipes de réaliser une enquête Française (l’étude CHEOBS). Cette enquête comporte deux aspects : des questionnaires chez 350 patients dialysés en France et aussi des entretiens individuels qui permettent de recueillir les témoignages des patients sur le traitement médicamenteux et d’analyser plus finement le ressenti, la pratique, les difficultés, les croyances … Les résultats devraient pouvoir être communiqués début 2014 pour aider à la réflexion de tous les acteurs. \\\
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EXPLICATIONS
RECHERCHE
AMÉLIORER L’OBSERVANCE EN TRANSPLANTATION RÉNALE : UNE PRIORITÉ La non adhésion
L
a transplantation rénale a aujourd’hui un taux de réussite élevé et la plupart des patients sont, à la fin de la première année, vivants avec un greffon fonctionnel. Ce résultat est en grande partie du aux nouvelles stratégies immunodépressives. Mais pour prévenir le rejet aigu ou le rejet chronique, le traitement immunodépresseur doit être pris de façon indéfinie. De plus d’autres médicaments sont souvent nécessaires, pour traiter une maladie préexistante, pour prévenir ou traiter une complication ou un effet secondaire, augmentant encore la complexité de la prise en charge thérapeutique et rendant l’observance encore plus difficile. L’observance (compliance en anglais) est définie par la façon dont le comportement d’une personne face à la prise de médicaments, au respect de consignes diététiques ou au changement de mode de vie, coïncide avec les consignes médicales qui lui ont été données.. Le terme adhésion (adherence en anglais) est également utilisé , il regroupe l’observance qui caractérise le fait de prendre ses médicaments comme prescrits et la persistance qui est le fait de les prendre au long cours. Chez les transplantés non observants 3 types de comportement ont été décrits: Les non observants « acccidentels » oublient de prendre leurs médicaments, ils sont mal organisés et la prise régulière n’est pas considérée comme une priorité. Par ailleurs les troubles de la mémoire sont fréquents chez les
au traitement immunodépresseur est fréquente en transplantation rénale et a des conséquences graves sur la survie du greffon à long terme.
transplantés rénaux. Ces patients ont besoin qu’on les aide à constituer des rituels qui leur permettra d’améliorer leur observance. Ils représentent 47% des non observants. Ils sont plus âgés que les autres patients non observants et comportent plus de diabétiques. Malgré leur mauvaise observance, ils sont convaincus de l’efficacité des médicaments immunodépresseurs. Les non observants « invulnérables » (ou immortels) sont persuadés que leur comportement n’aura aucune conséquence. Ils cachent leur mauvaise observance et ont des croyances irréalistes. Celles-ci sont renforcées, du moins au début, par la constatation qu’une dose manquée ou diminuée n’entraîne pas d’effet délétère. Ils représentent 28% des non observants. Ils sont plus jeunes, peu éduqués et moins de 20% croient en l’efficacité de leur traitement. La non observance « décisionnelle » est la conséquence d’une décision active d’ignorer la nécessité du traitement. Elle relève d’une volonté ou d’un refus explicite de suivre des consignes thérapeutiques. Elle est présente chez 25% des non observants. Bien que plus éduqués, ces patients ont beaucoup d’idées fausses sur le mode d’action des immunodépresseurs.
La non observance peut être totale, le patient ne prenant pas ou arrêtant le traitement prescrit. Elle est très rare en transplantation où on observe habituellement une non observance partielle beaucoup plus insidieuse. Cela va d’une seule prise manquée à un nombre arbitraire de prises manquées ou à une prise erratique. Ce peut être un oubli ou un retard dans la prise. La mesure de l’observance thérapeutique est difficile et les méthodes utilisées nombreuses. Elle peut être directe par l’évaluation de la concentration du médicament dans le sang mais sa valeur est limitée. Par exemple une prise régulière juste avant la consultation peut masquer la non observance habituelle. Malgré cela les médecins suivant les transplantés continuent à donner beaucoup
MICHÈLE KESSLER
SERVICE DE NÉPHROLOGIE CHU DE NANCY
DOSSIER
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Fréquence de la non observance chez le transplanté
d’importance aux dosages d’immunodépresseurs pour le maintien d’une immunodépression adéquate. A l’inverse le fait d’avoir un taux d’immunodépresseur inférieur à la cible souhaitée est plus fréquent chez les non observants. Elle peut être indirecte à travers des questionnaires remplis par le patient ou des interviews, une appréciation par le médecin ou l’infirmier(e). L’Interview confidentiel semble être la meilleure méthode pour détecter à la fois les doses non prises et le caractère erratique des prises. Le suivi des renouvellements d’ordonnance peut être réalisé en partenariat avec les pharmacies d’officine. Il mérite d’être développé dans notre pays où le métier de pharmacien est en train d’évoluer dans les sens d’une plus grande implication des pharmaciens d’officine dans la prise en charge des maladies chroniques. Des systèmes électroniques ont été développés : ils utilisent des puces électroniques miniaturisées incorporées dans le couvercle du flacon contenant le médicament qui enregistrent la date et l’heure ou le flacon a été ouvert et refermé ou des piluliers intelligents. Bien que semblant supérieur aux méthodes traditionnelles ces systèmes ont des limites car le fait d’avoir ouvert le flacon n’est pas synonyme d’ingestion et seule l’utilisation combinée de plusieurs méthodes augmente la précision du diagnostic
Les caractéristiques de la transplantation liée au don d’un organe par un vivant ou une personne décédée pourraient conduire à penser intuitivement que les receveurs sont plus observants vis-à-vis des prescriptions que les autres patients atteints de maladie chronique. En fait il a bien été montré que la sévérité de la maladie (cancer ou sida) ou la gravité du pronostic n’est pas associée à une meilleure observance. La non observance est fréquente chez le transplanté qu’il soit greffé d’un rein ou d’un organe vital . Il existe néanmoins des différences selon la nature du traitement et la non observance est 2 fois plus importante pour les traitements non immunodépresseurs que pour les traitements immunodépresseurs Compte tenu des problèmes méthodologiques inhérents à la définition et à la méthode de mesure utilisées, la prévalence de la non observance chez le transplanté rénal varie entre 15 et 30% et peut être beaucoup plus élevée dans certains groupes de patients.
Les conséquences de la non observance sont médicales et économiques Elle joue un rôle dans la survenue du rejet aigu, du rejet chronique et dans la perte du greffon. On estime qu’environ 1/3 des pertes de greffons sont associées à une mauvaise observance et que comparés aux patients observants, les non observants ont un risque d’échec de greffe 7 fois plus important. L’impact de la non observance peut être soudain et dramatique avec un rejet aigu mais il peut être plus insidieux. Une analyse rétrospective des comportements suggérant une non observance (rendez-vous
DES SYSTÈMES ÉLECTRONIQUES ONT ÉTÉ DÉVELOPPÉS : ILS UTILISENT
DES PUCES ÉLECTRONIQUES MINIATURISÉES INCORPORÉES DANS LE COUVERCLE DU FLACON CONTENANT
LE MÉDICAMENT QUI ENREGISTRENT LA DATE ET L’HEURE OU LE FLACON
A ÉTÉ OUVERT ET REFERMÉ OU DES PILULIERS INTELLIGENTS.
manqués, concentrations d’immunodépresseurs fluctuantes) a montré qu’elle serait responsable de la moitié des pertes de greffons attribuées à un rejet chronique. Bien qu’elles aient été relativement peu étudiées, les conséquences économiques de la non observance sont probablement importantes. La mauvaise observance augmente le risque de rejet aigu qui génère des hospitalisations, des examens complémentaires (biopsie) et des traitements anti rejet. Par ailleurs, le renforcement de l’immunodépression nécessite des traitements prophylactiques anti infectieux, et peut entraîner des complications infectieuses voire tumorales (syndrome lympho prolifératif). Enfin la survie des greffons est diminuée avec la nécessité du recours à la dialyse ou à une retransplantation. Tout ceci sans compter les pertes de productivité. Aux Etats-Unis le coût additionnel annuel des seules hospitalisations liées à la non observance a été estimé à 900 dollars par patient. Les déterminants de la mauvaise observance sont multifactoriels et peuvent être classés en 3 catégories :
Facteurs liés au patient L’âge est un facteur incriminé dans de nombreuses études qui montrent que la non observance est associée avec le jeune âge. Ce sont les adolescents qui constituent le groupe le plus à risque de non observance surtout s’ils reçoivent un rein d’un de leur parent sans dialyse préalable. Ayant l’impression d’être immortels et pensant peu aux conséquences à long terme de leurs actes, ils peuvent facilement rejeter l’autorité parentale ou celle du centre de transplantation qui exige d’eux des consultations régulières et la prise régulière des médicaments. A ceci s’ajoutent les effets cosmétiques de certains immunodépresseurs qui à cet âge sont très mal ressentis. La non observance est associée avec l’isolement social et le rôle de la famille et en particulier du conjoint a bien été mis en évidence. Il a également été montré qu’un emploi à temps plein était un facteur associé à une moins bonne observance. Certaines caractéristiques telles que dépression, anxiété, hostilité, sentiment que l’évolution de la maladie est le fait du hasard, cer-
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EXPLICATIONS
Facteurs liés au système de santé et à la prise en charge
titude que les médicaments immunodépresseurs ne sont pas indispensables pour la bonne fonction du greffon ou que leur prise peut être repoussée sans risque, sont liée à la mauvaise observance. L’acceptation de la maladie et de ses traitements est également déterminante et explique pourquoi les patients les plus jeunes et ceux dont la maladie est connue depuis peu sont moins observants. Les connaissances sur le traitement et l’existence d’une mauvaise observance avant la greffe sont également corrélées avec l’observance après la greffe. Cette relation n’est pas univoque et si une mauvaise observance avant la greffe doit alerter l’équipe de transplantation qui doit être plus vigilante et mettre en œuvre des interventions ciblées, parfois, le patient conscient que la transplantation lui redonne un semblant de vie normale peut changer son attitude face aux traitements. L’addiction à l’alcool, au tabac ou à des drogues illégales est un autre facteur favorisant la non observance.
Facteurs liés au traitement La durée de la dialyse avant greffe ou le fait d’être retransplanté n’influence pas l’observance. Par contre il semble que plus la greffe est ancienne et moins bonne est l’observance. Dans la plupart des services de transplantation, la fréquence des contrôles et interventions diminue avec le temps alors qu’il a été démontré que l’observance s’améliore immédia-
tement avant et après une consultation, reste élevée pendant plusieurs jours puis revient à son niveau antérieur au bout d’un mois. Une augmentation de la fréquence des consultations est donc susceptible d’améliorer l’observance. Le type de médicament, son goût, sa taille peuvent influencer la décision du patient de le prendre ou pas. La lecture de la liste exhaustive des effets secondaires potentiels contenue dans les boites de médicaments peut conduire à une mauvaise observance qu’il est possible de prévenir par une discussion avec le patient sur les bénéfices et risques des traitements prescrits. La survenue d’un effet secondaire a un impact majeur sur la décision de ne pas prendre un médicament même lorsque celui-ci n’en est pas responsable. Concernant la complexité du traitement et le nombre des prises les résultats sont discordants, certaines études ont montré qu’ils sont des facteurs favorisant la non observance alors qu’une étude française récente a retrouvé une association inverse, les patients ayant les traitements les plus simples ayant une moins bonne observance. L’arrivée des médicaments génériques a introduit une nouvelle source de non observance liée à la difficulté d’identifier le médicament du fait de la multiplicité des présentations possibles et la non substitution des traitements est conseillée quand il y a un risque majeur de non observance ou de perte de l’autonomie dans la gestion du traitement.
Un taux plus élevé de non observance a été observé chez les patients US comparés aux patients européens. L’une des hypothèses est que ces variations s’expliquent par les différences dans les systèmes de santé concernant la couverture sociale et le mode de remboursement des traitements. Dans les pays ou les médicaments sont à la charge des patients en totalité ou partiellement, le coût a un impact majeur sur l’observance.
Comment améliorer l’observance Le rôle de l’équipe de transplantation Les patients ne peuvent être les seuls responsables de leur observance. Après la greffe ils doivent assumer un régime thérapeutique nouveau et complexe qui vient s’ajouter aux traitements des pathologies associées ou des complications du traitement immunodépresseur et pour certains le nombre de médicaments et de prises est énorme et des effets secondaires déplaisants sont fréquents. Ils ont donc du mal à percevoir le bénéfice d’une bonne observance et celle-ci repose pour beaucoup sur la prise de conscience qu’elle diminue le risque immunologique. Avant la greffe il est important d’identifier les candidats porteurs d’une affection psychiatrique non contrôlée ou présentant une non observance évidente. Que faire en particulier avec les patients ayant perdu un greffon du fait d’une non observance avouée ? La contre-indication pourra être levée après une prise en charge appropriée et une période probatoire permettant d’observer une amélioration de l’observance. Une mauvaise communication entre le patient et son équipe médicale est un facteur important de non observance. L’inscription sur la liste d’attente ou la préparation à une greffe avec donneur vivant doit donc comporter une large
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information sur les changements que la greffe va apporter dans la vie du receveur, la justification des traitements, les effets secondaires potentiels et les conséquences d’une non prise ou d’une prise irrégulière. Cette information peut être faite par un médecin, une infirmière ou un autre professionnel de santé. Le but est d’aboutir à un partenariat dans lequel le projet thérapeutique est négocié, l’observance est discutée et le suivi planifié. En cas de greffe avec donneur vivant, les problèmes liés à la non observance doivent être discutés en présence du donneur et du receveur de telle façon que le donneur puisse reconsidérer sa décision si le receveur apparaît clairement non observant
Après la greffe Une approche éducationnelle parait essentielle bien pour améliorer l’adhésion au traitement. L’éducation du transplanté doit commencer avant que le patient ne quitte l’hôpital et être ensuite poursuivie avec des ateliers collectifs et des rencontres individuelles avec un soignant. Elle doit intégrer des dimensions médicales, psycho-sociales et comportementales avec des professionnels bien formés et donner aux patients un rôle actif et une autonomie qui serait susceptible d’améliorer l’observance et les résultats de la greffe. L’importance de la prise régulière et indéfinie des médicaments immunodépresseurs doit être bien comprise. Les effets secondaires doivent être discutés et des conseils pratiques pour les éviter ou les minimiser doivent être donnés. De son côté le médecin doit faire l’effort de choisir les médicaments ayant le moins d’effets secondaires et le régime d’administration le plus simple possible. Une stratégie individualisée doit être mise ne place utilisant tout ce qui permet de limiter les oublis : instructions écrites, calendrier, prise des médicaments à l’occasion d’activités journalières rituelles telles que le brossage des dents, la pose ou la dépose des lentilles de contact, le petit déjeuner, le déjeuner ou le dîner, piluliers à compartiment, alarmes électroniques pour rappeler l’heure des prises, demande de rapporter tous les médicaments lors des consultations.
Au cours des visites dont la fréquence sera établie en fonction non seulement des données médicales mais aussi des besoins éducationnels du patient, les patients doivent être encouragés à exprimer les problèmes qu’ils rencontrent avec leur traitement, y compris la non observance, dans une discussion au cours de laquelle ils ne doivent pas se sentir jugés. Tous les membres de l’équipe doivent ou peuvent être concernés : infirmièr(e) d’education, diététicien(ne), assistante sociale, pharmacien connaissant bien les immunodépresseurs, psychologue. La proportion de patients ayant une observance ≥ 80% à 1 an est significativement plus importante quand un pharmacien est impliqué dans l’équipe. Idéalement le pharmacien d’officine devrait également être associé à cette démarche. C’est le professionnel de santé que le patient voit le plus souvent. Il peut renforcer les messages qui ont été délivrés dans le centre de transplantation, il peut jouer un rôle sécuritaire face à l’automédication et aux interactions médicamenteuses. Il est le meilleur spectateur du suivi médicamenteux. La réponse du médecin face aux effets secondaires joue également un rôle important dans l’observance. Un effet considéré comme mineur par le médecin, comme par exemple une acné, peut considérablement affecter un adolescent et aboutir à la non prise du médicament. Il a également été suggéré que des rappels téléphoniques ou par courriers effectués entre les visites pourraient améliorer l’observance.
En conclusion La non adhésion au traitement immunodépresseur est fréquente en transplantation rénale et a des conséquences graves sur la survie du greffon à long terme. Elle représente une cause modifiable de perte de greffon et on ne peut que partager l’opinion de 2 transplanteurs américains disant que nous disposons aujourd’hui de stratégies efficaces pour prévenir la perte du greffon liée au rejet et que la prise régulière des traitements actuellement disponible serait vraisemblablement plus efficace que la mise sur le marché d’un nouvel immunodépresseur ! Il reste à développer des méthodes standardisées pour mesurer l’observance et à déterminer le niveau d’observance qui augmente le risque d’échec de greffe. Une meilleure compréhension des facteurs conduisant à la non observance devrait permettre d’identifier les facteurs potentiellement modifiables sur lesquels des stratégies d’intervention conduites de façon multidisciplinaire doivent être focalisées avec pour objectif d’aider le patient transplanté à atteindre un haut niveau d’observance. \\\
Références 1. Kiryluk K et al. Plos Genet 2012 2. Yu XQ. et al. Nat Genet 2012 3. Gharavi AG. et al. Nat Genet 2011 4. Berthelot L. et al. J Exp Med 2012 5. Ebefors K. et al. Présentation au symposium de Nanjing 2013.
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[ mars - octobre 2013 ]
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VOYAGES
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Association La Ligue Rein et Santé 10 rue Montéra 75012 Paris Tél. : 06 87 93 21 54 www.rein-echos.fr Adresse mail annonceurs lrsasso@orange.fr Écrire à la revue auprès de l’association ou e-mail : rein.echos@orange.fr ISSN : 1958-3184, dépôt légal 2012 Imprimé à 15 000 exemplaires REVUE REIN ÉCHOS Directeur de la publication Michel Raoult Comité de rédaction (bénévoles) : Alain Blanchard, Ginette Rousseau (Vice–présidente), Marie Rampnoux, Virginie Vergnaud.
qui les accompagnent. Nous remercions toutes et tous ceux qui nous ont aidé à créer ce partage d’informations utiles, nous espérons continuer à générer cette contribution éclairée, participative interactive, en coopération mutuelle « médecins – patients » autour des maladies rénales et diabétiques. Ce travail caritatif est donc un travail collectif qui appartient à notre communauté d’intérêt pour éviter, sensibiliser, dépister, ralentir et gérer les conséquences de ces maladies dans une compréhension des besoins de chacune et chacun, dans la concertation et le dialogue et dans le libre choix éclairé de tous. Une philanthropie et un mécénat d’avenir - reproductif pour d’autres ALD.
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Comité scientifique Mmes Berthelot et Girard Médecins Mme Pengloan, MM. Berthelot, Glotz, Herody, Hufnagel, Martinez. Auteurs participants Sans leur contribution gracieuse nous ne pourrions vous offrir ce numéro Mesdames : L. Berthelot, C. Cartery, L. Idier, M. Kessler, également : pharmacienne Aura Paris, IDE dialyse Tenon et patiente Messieurs : M. Arnaud, D. Attaf, B. Barrou, B. Canaud, Ph. Chauveau, F.Didelot,J.P. Grünfeld, G. Hufnagel, E. Rondeau, , Rein échos et infirmier Andra Crédits photos Pharmagest, FMC, A. Franski. auteur(e)s. Direction artistique et réalisation Laurent de Sars 20, place Carnot - 69002 Lyon 06 73 68 06 32 - LDESARS@MAC.COM www.laurentdesars.com Imprimeur et ROUTEUR Imprimerie Chirat, 42540 St-Just-la-Pendue. Ont permis la gratuité de cette revue, nos soutiens : Amgen, B. Braun, Avitum, Frésénius Medical Care, Genzyme, G. Pons, contributeurs que nous remercions et qui permettront à Rein échos de passer sa huitième année au service de l’information en santé rénale.
[ octobre 2013 - mars 2014 ]
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ÉDITORIAL
NUTRITION
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[ Rein Échos n°13 | www.rein-echos.fr ]