Pour P - Adèle Nègre & Philippe Agostini

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Adèle Nègre

Philippe Agostini

P our P

Ce

qui

reste



Adèle Nègre

Philippe Agostini

P our P

Ce

qui

reste


J'étais l'assise nue dévoilée de la peinture (et toi le peintre de son corps l'architecte de sa chair) je vivais je donnais la vie tu peignais. Tu épousais et peignais.



Le geste tranquille apaisĂŠ entre entre toutes choses va et vient entre palette et toile avec la couleur la main le geste pansant opĂŠrait. rapprochement pansement de la plaie recouvrement


Tu prenais soin du temps dans sa forme citron œil orbe fleur ou bucrane une veine bleue irriguait la toile ton monde où poussaient des forêts de pinceaux sur d'arides éboulis d'objets éblouis par la géométrie des névés vibrants clapiers pentes ô pentes vertigineuses et parfois gouffres noirs que patiemment tu pansais tu as pansé jusqu'à ce qu'eau et lumière coulent ensemble et donnent forme aux courants dans un seul mouvement couvrent et creusent dans le même geste emmaillotent et dénudent.


Hors champs rien sous l'espace le vide sous les corps les courants. Tu montres la force qui les rapproche les broie les serre les sĂŠpare contractions fibrillaires dilatations expansions Ă la surface un souffle un frisson s'expose remous quand quelque chose bouge vacille tu bouges avec dans le mouvement.



Dans les replis tortueux les creux coule quelque chose en rĂŠseau fibrine de l'huile insoluble elle a les qualitĂŠs



La couleur irrigue le blanc oui et l'éclaire ravive le fond de sillons inouïs où sourd le blanc au lit de la toile tension décharnée sécheresse toucher des chairs en montant la couleur des chairs peintes chairs atteintes attentes ce à quoi tu te tiens. Ce à quoi tu attentes.




Un papier froissé un paquet de cigarettes une rose trémière un galet un citron sec étaient des chairs probables un flacon était une présence un corps un ruban bleu une veine le lacet d'un sentier abrupt le lacs d'un amoureux soupirant prêt à rompre rendre le souffle – lacs d'amour – le gage sera donné plus tard à la plus douce pour sa compagnie pour les mille et une nuits peintes mille nuits et toujours une nuit enchâssée mille fois peinte mille fois plongée dans les failles les orbites et les orifices – et perdue


– et mirée mille fois à la lumière réfléchie des regards des verres des bouteilles réveil ampoule orbes charnus l'œil cave des pairs miroir où se joindre Pour repousser le terme la mort toujours plus loin nuit après nuit tout faisait feu.



Descendre dans les ravins de la toile ou du papier jusqu'au blanc silence loin chercher ériger remontée des couleurs par paliers cette blanche réserve visible à la fin seulement. En peinture tu explores les failles les filons tu ramènes à la surface les joyaux des dessous pris dans la gangue du temps les dépôts les boues de mémoire le pinceau creuse lève les poussières se déploie alors à même la toile et dans toutes les dimensions l'architectonie d'une fleur secrète solidifiée d'une émotion particulière.




Dans tes mains bâtisseuses restent les mots au-dessus en suspend sur la dÊchirure du collage la rÊserve de la toile mes fissures



Les auteurs



Adèle Nègre « Études d'arts à Aix en Provence et de chinois ancien à Aix puis à Langues O. Après une longue interruption de pratique, le temps d'aimer, d'élever mes cinq enfants et de cultiver un jardin, suis née autre dans un Cahier-journal en février 2014, c'était in extremis. J'ai retrouvé le plaisir de faire des images en 2015. J'ai depuis publié, mais très rarement, des photographies en accompagnement de textes de K. Ozier Lafontaine dans L'autre quotidien Nuit&Jours, des textes et des photographies dans la Revue 17 Secondes. Collaboré à quelques Livres Pauvres, texte ou images. Plusieurs projets à cœur et en cours... Et un site en bonne voie ! » La revue Babel heureuse : www.gwencatalaediteur.fr/babel-heureuse Son blog : adelenegre.blogspot.fr Sur Facebook : www.facebook.com/profile.php?id=100009468918666


Philippe Agostini né en 1964 à Toulon (Var), vit en Haute-Saône Exposition collectives 2014/2016 – Exposition collective, Galerie Josef Nisters (Spire) 2014 – « Im licht der Farbe » – Exposition collective, Galerie Josef Nisters (Spire) 2004 – « Hosties Noires, Hommage aux Tirailleurs Sénégalais », Ancien Collège des Jésuites (Reims) 2004 – « Peindre/ Écrire/ Exister, autour de l'oeuvre de Hubert Hadadd », Les Silos (Chaumont) 2001 – « In situ » (Exposition organisée par L'ORCCA) au Moulin au bois (Aube) 2000 – « Escales » et « Les dunes du désir », organisé par Mohamed Rachdi (Amiens-Beauvais) 2000 – Biennale Internationale de la gravure en Île de France (Versailles) 1991 – Biennale Internationale de la Gravure, Sapporo (Japon) 1987 – « Pierre-Onche », Salon de la Jeune Sculpture (Paris) Expositions personnelles 2015 – « Variations à propos de la Piéta de Villeneuve-les Avignon », Galerie Josef Nisters (Spire) 2014 – « Entre les plis (Zwischen den Falten) », Galerie Josef Nisters (Spire) 2014 – « Dialogues (Kunst im Dialog) », Galerientage (Mannheim) 2006 – « Vues » Gal. La Fontaine, (Charleville-mézières)


2001 – « In situ », Hotel Beury, Exposition organisée par L'ORCCA (L'échelle – Ardennes) 1998 – « Éclats d'atelier », Galerie Adrien Maeght (Paris) 1996 – « Carnets et Peintures », Galerie Adrien Maeght (Paris) 1987 – « Désirer le pilier », Cloître de la Cathédrale Saint Sauveur (Aix-enProvence) Publications 2016 – « Ce doigt qui manque à ma vue » ill. pour le texte d’Armand Dupuy, Editions Æncrage&Co (Baume-les-Dames) 2009 – « Etats des lieux », ill. pour le texte de Danielle Faugeras, Editions Propos2éditions (Manosque) 2007 – Participation à la revue « Propos2 campagne N°16 – Natures Mortes » ( Manosque) 2005 – « Petite suite pour Philippe Agostini » avec Hubert Hadadd, Editions Rencontre, Coll. Tête à Texte n°1 (L'échelle – Ardennes) et participation à la revue « Bleeker Street 3-4 », Editions Dumerchez. (L’Echelle/ Paris) 1998 – Participation aux numéros de la revue « atelier revue » n°1, 2, 3, Editions Accent circonflexe (Chartres) 1996 – « N.O. », avec Véronique Vassiliou, Livre d’artiste, Boîte de peintures, exemplaire unique



La revue Ce qui reste RALENTIR POÈME Un poème est un pont jeté en travers du temps Jean-Michel Maulpoix

Prendre le temps de lire un poème est un acte de résistance libérateur, une manière de rester dans l’instant présent, d’échapper à la fuite en avant permanente que nous impose le rythme de notre époque. C’est reprendre sa respiration avec l’inspiration des autres. La revue Ce qui reste, coéditée par Cécile A. Holdban et Sébastien de Cornuaud-Marcheteau, vous propose de marquer cette pause en vous faisant découvrir chaque semaine un auteur. La création n’étant pas que langage, la revue ouvre également son espace à des artistes plasticiens.

© Avril 2017 — Poèmes d'Adèle Nègre Peintures de Philippe Agostini La revue Ce qui reste pour la présente édition 16, chemin des Androns 33710 Bayon sur Gironde www.cequireste.fr — revue.cequireste@gmail.com Revue numérique hebdomadaire - ISSN 2497-2363


J'étais l'assise nue dévoilée de la peinture (et toi le peintre de son corps l'architecte de sa chair) je vivais je donnais la vie tu peignais. Tu épousais et peignais. Adèle Nègre Peintures de Philippe Agostini Ce

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