"L'attaque des cubes, tome 2 : gamers, amours et minigun" de Marine Carteron - Extrait

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Illustration de couverture : Gaspard Sumeire Graphisme de couverture : Olivier Douzou © Éditions du Rouergue, 2021 www.lerouergue.com


Marine Carteron

GAMERS, AMOURS et MINIGUN l’attaque des cubes II Illustrations de Gaspard Sumeire



Pour mon filleul Léonard qui est né pendant l’écriture de cette histoire, et pour Monsieur Quinou, le félin familial, qui nous en a inspiré la partie la mieux léchée.



résumé de notre précédente aventure par Antoine

Pour ceux qui ne se souviendraient pas de moi, je m’appelle Antoine, j’ai douze ans, et je suis un pro des jeux vidéo. J’habite avec ma mère et ma grande sœur Mathilde, au dernier étage d’un immeuble à l’ascenseur éternellement en panne. Dans l’immeuble d’en face, il y a ma copine Vénus qui, elle, vit avec son père et son grand frère, Jeremy. Vénus, c’est ma meilleure pote et ma partenaire de jeu en ligne. L’an dernier, un magasin étrange, Cubetout, a ouvert juste en face de chez nous. 9


À l’aide d’une technologie virelle (moitié réelle, moitié virtuelle), son directeur, Max, qui était aussi le fils de notre prof de techno, a envoyé les habitants de notre quartier dans Minecraft où il les a réduits en esclavage. Équipés par monsieur Docku (notre prof de techno et le père de Max) d’armures et d’armes virelles, Vénus et moi sommes allés dans le monde de Minecraft, l’Overworld, pour les sauver. Protégés par la goleme Mimi, nous y avons retrouvé notre plus vieux pote, Adem, qui, comme les autres humains, avait été transformé en villageois. Tous les quatre, après des tas de péripéties palpitantes, nous avons réussi à détruire le cœur de l’Overworld et les ondes virelles qu’il générait. Grâce à nous, les habitants du quartier, même s’ils n’en gardent aucun souvenir, ont pu retrouver leur vie. 10


Malheureusement, pendant la bataille finale, et tandis que la porte permettant d’accéder aux mondes virtuels se refermait, monsieur Docku, Max et Mimi ont disparu dans l’Overworld.


1. bienvenue au Moyen Âge

Juste avant de partir au collège, comme tous les matins, je me pose sur le canapé et allume mon ordi pour vérifier si j’ai des messages. Parce que, oui, c’est la grande nouveauté : j’ai un ordinateur ! En vrai, j’avais demandé un smartphone. Mais maman n’a pas voulu. Soi-disant qu’à douze ans je n’en avais pas besoin… Oui, « PAS BESOIN », elle a dit. Genre… PAS BESOIN de smartphone quand tu es au collège ? C’est à se demander dans quel monde vit ma mère. 12


J’ai eu beau argumenter, rien à faire. La seule chose qu’elle voulait bien, c’était me passer le vieux de mamie (je parle de son téléphone, pas de papi…), mais quand j’ai vu le machin, j’ai failli m’évanouir. C’était un téléphone SANS ÉCRAN. Un téléphone avec des TOUCHES. Bref, un téléphone pour Néandertalien. Si mes potes me voyaient avec ça, je serais bon pour l’exil. La honte absolue. Du coup, j’ai laissé tomber et, à la place, j’ai eu un ordi. Bon, je ne vais pas me plaindre, un ordi, c’est hyper pratique pour faire des recherches pour l’école1 jouer en ligne avec des potes. Mais bref, revenons à notre histoire. J’allume mon ordi quand, tout à coup, je remarque la lumière rouge sous la télévision. 1 Note d’Adem : Faire des recherches pour l’école ??? MDR. Vénus ce serait crédible, mais toi, laisse-moi rigoler… Du coup, je corrige.

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Depuis quelque temps, question Internet, c’est comme si notre quartier était revenu au Moyen Âge : la connexion est aussi mauvaise que mes notes de maths, et les coupures plus fréquentes qu’un gros mot dans la bouche d’Adem. Je louche sur le smartphone tout neuf de ma sœur en train de charger dans la cuisine. Grâce à sa 4G, je pourrais me connecter facilement. J’hésite. Si ça se trouve, j’ai loupé des infos capitales. Comme de savoir si Jade a dit à Fadi, que Lison lui avait dit, que Paul était amoureux d’elle ; ou mieux, si quelqu’un a réussi à récupérer le sujet de DS des cinquièmes A (ce qui m’éviterait de TOUT réviser, vu qu’on a la même prof). La tentation est plus forte que les épices du couscous de monsieur Bouaziz. Je jette un coup d’œil vers la chambre. Mathilde est encore en train de ronfler. 14


J’essaie de résister, mais mes pieds se soulèvent et glissent jusqu’à la table. Ma main s’avance, se pose sur le smartphone. Je sens contre ma paume sa surface froide et lisse. Mes doigts fourmillent. C’est comme si j’étais possédé. – Et puis zut… Je vais appuyer sur le bouton de mise en route quand un grognement de troll me fait sursauter. – Grmmbgrrbl, Toine ! Porte ! Bordel… La dernière fois que j’ai piqué le téléphone de Mathilde, ça s’est mal terminé. Il a disparu dans l’Overworld en même temps que Mimi, la super goleme moitié réelle moitié virtuelle créée par monsieur Docku pour nous venir en aide. Comme elle était un peu amoureuse de moi, Mimi nous a aidés à repousser des hordes de zombies, de creepers et tout un tas d’autres monstres affreux. La vérité, c’est que sans elle on ne s’en serait jamais sortis. 15


Malheureusement, quand nous avons détruit le cœur de l’Overworld, nous avons aussi fait disparaître Mimi. D’un seul coup ses pixels se sont détachés, et notre amie s’est évanouie dans l’espace virtuel en emportant avec elle le téléphone de ma sœur… et j’ai été privé d’écrans pendant un mois (ce qui est carrément injuste car je venais tout de même de sauver la vie des habitants du quartier !!!2). Même si ça fait presque un an, Mathilde ne m’a toujours pas pardonné. Alors si elle s’aperçoit que j’utilise son nouvel appareil en douce, je n’imagine pas ce qu’elle serait capable de me faire. C’est pas que je ne sois pas courageux (après tout, j’ai affronté un dragon légendaire et une armée entière de zombies l’an dernier3), mais ma sœur, c’est un monstre de niveau 100. 2 Note d’Adem : Que NOUS venions de sauver… La joue pas trop perso. 3 Note d’Adem : NOUS, Antoine, pas « JE »… 16


Prudemment, je m’éloigne de son téléphone. Le visage hagard, les cheveux en vrac, les pieds traînant sur le sol façon vieux vampire en manque de sang, Mathilde vient justement de sortir de sa chambre et se dirige sur son portable en me bousculant au passage. – T’es encore là, le microbe… – Bonjour à toi aussi, sœur adorée… Évidemment, elle ne me répond pas. Mathilde, tant qu’elle n’a pas allumé son smartphone, c’est comme si elle n’était pas vraiment là. À croire que son cerveau est dedans. Ses doigts pianotent, l’écran s’allume et l’appareil se met aussitôt à biper pour lui indiquer tout ce qu’elle a raté pendant son sommeil. Plantée au milieu de la cuisine, ma sœur rattrape son retard de nouvelles. À chaque nouvelle info, elle sourit, ricane, fronce les sourcils, soupire, resourit. On dirait qu’elle 17


passe un casting d’expressions du visage… C’est dingue l’effet que ça lui fait. Quand elle repose enfin son smartphone pour attraper un bol dans le placard, je tente ma chance. – Tu pourrais me le prêter deux secondes, y a pas de Wi-Fi et… Les yeux exorbités, Mathilde se retourne d’un coup sans me laisser finir ma phrase. – Même pas en rêve tu le touches ! Son regard me rappelle vaguement celui du dragon légendaire, juste avant qu’il décide de nous attaquer. Sauf que là, je n’ai ni armure, ni casque, ni épée. Alors, courageusement, je bats en retraite, éteins mon ordinateur et pars au collège.


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