"Un bonbon ou un sort" de Charles Mazarguil - Extrait

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un bonbon ou un sort ?

Halloween c’est nul.

J’aime pas les bonbons. Mais c’est l’occasion de sortir mon sublime déguisement de princesse…

boomerang, une collection de courts romans recto verso. Pile ou face ? Commencez par l’un ou par l’autre et laissez-vous surprendre…

© Éditions du Rouergue, 2024 www.lerouergue.com

Illustration de couverture : Marta Orzel

Graphisme de couverture : Olivier Douzou Ouvrage réalisé par Cédric Cailhol Infographiste. Reproduit et achevé d’imprimer en septembre 2024 par l’imprimerie Laballery à Clamecy.

Dépôt légal : octobre 2024 N° d’impression : ISBN : 978-2-8126-2643-2

« loi n° 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse »

illustrations de Marta Orzel boomerang

Charles Mazarguil

un bonbon ou un sort ?

Je me recoiffe une énième fois devant le miroir et je souris à mon reflet : on a beau dire qu’il ne faut pas juger un livre à sa couverture mais je suis tout bonnement é-pou-stou-flante ! Mes incisives sont si blanches qu’on croirait de petites perles. Mes cheveux si blonds que j’en suis presque éblouie ! Y a pas à dire, mais bon, je le dis quand même : « Nelly, tu es “canonissime”, on dirait la Reine des neiges en mieux ! »

Ce serait vraiment trop dommage de ne pas me montrer aux gens. Les pauvres méritent de contempler un peu de beauté de temps en temps. Alors, même si je ne suis pas une super fan des bonbons parce que ça abîme les dents et que c’est juste l’horreur pour les pores de la peau, je vais la faire cette stupide soirée d’Halloween ! Pour les autres. Par pure bonté d’âme.

Voilà, je suis prête. Je prends mon petit panier d’osier trop chou et je passe la porte après un « bisou de loin » à maman pour éviter qu’elle me laisse l’empreinte de son rouge à lèvres sur la joue. Elle me rappelle alors pour la cent dixième fois que j’ai la permission de vingt et une heures tapantes

– Tapantes ! – comme si je ne le savais pas ! Bref, je sors enfin et il fait si frais que je ne peux pas m’empêcher de frissonner un peu. Face à moi, les tombes paraissent encore plus lugubres que d’habitude avec cette brume accrochée aux croix et aux statues couvertes de mousse grise. Je déteste habiter devant un cimetière ! Mes parents plaisantent souvent sur le voisinage – « Pas vraiment pratique quand on manque de sel mais pas de tapage nocturne, même le 31 décembre » – mais ils ne se rendent pas compte de la difficulté de rester la fille la plus populaire de l’école lorsqu’on vit dans une maison sortie d’un mauvais épisode

de Chair de poule ! Mes parents sont des monstres d’égoïsme, je sais, et je me demande souvent comment deux êtres aussi imparfaits ont pu concevoir une enfant aussi sublime, aussi lumineuse que moAAAARGH ! PAF ! Le choc m’envoie balader sur le trottoir, les quatre fers en l’air ! Un garçon vient tout juste de me rentrer dedans ! Au sol, lui aussi, il me regarde d’un air idiot rendu plus stupide encore par son ridicule déguisement de vampire. Un maquillage grossier, de proéminentes dents en plastique, une cape rouge toute crottée : quelle originalité ! Tous les accessoires du comte Dracula d’opérette ! Déjà que le vampire, c’est devenu ultra-ringard mais alors là, on touche le

fond ! Je me relève, furieuse : j’ai une trace de boue sur ma robe bleue ! Je la frotte avec l’énergie du désespoir tout en pestant sur l’imbécile heureux : — Tu pouvais pas faire attention !?

C’est censé être la chauve-souris, ton animal-totem, pas la taupe !

L’autre continue à me regarder les yeux ronds en émettant de petits grognements bizarres, genre chat qui ronronne mais en pas mignon du tout. Ça doit être la sidération de me rencontrer. Réaction classique. Bon, la tache a plus ou moins disparu, du coup je laisse Simplet sur le carreau et je file rejoindre Brenda et Lucas. *

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