THÉÂTRE TEMPORAIRE
Rimbault Samuel
MFE AAP Juin 2011 Enseignants : X. Fabre & Y. Rocher
Une « Usine à Spectacles » à Pantin pour la Seine-Saint-Denis
-2-
SOMMAIRE
AVANT-PROPOS
p.5
INTRODUCTION
p.9
L’IDÉE D’UN THÉÂTRE - Le Théâtre en théorie(s)
p.10
- Expériences du lieu
p.11
- L’idée d’un Théâtre
p.13
Pantin : territoire d’expérimentation - Aperçu historique
p.15
- Présentation & Analyse urbaine
p.16
- Equipements scéniques : situation actuelle
p.18
L’envers du « décor » urbain : site d’intervention - Enjeux
p.20
- Propositions
p.21
manifeste du Théâtre Temporaire - Principe
p.24
- Programme & Fonctionnement
p.26
ANNEXES
p.29
BIBLIOGRAPHIE
p.37 -3-
-4-
Avant-Propos
Il y a longtemps, bien avant d’avoir choisi de m’engager dans la voie des études architecturales, et encore avant de décider d’une orientation scientifique au lycée, je me suis découvert un profond attrait pour le théâtre. Cette passion m’a emporté, depuis l’âge de sept ans, de MJC en conservatoire, d’activités scolaires en troupes amateurs, sur des planches aux quatre coins de la France. Les études supérieures n’ont pas estompé cet intérêt et cette attirance pour la scène, et j’ai récemment nourri cette activité parallèle avec la mise en pratiques de mes quelques acquis architecturaux, concevant décors et scénographie pour une compagnie que j’ai co-fondée, me risquant même à la mise en scène. Cependant, l’apport était jusqu’à présent à sens unique ; principalement parce que je ne pensais pas qu’une pratique de la scène avait sa place dans le contexte d’une école d’architecture. Néanmoins, pour dessiner le projet qui doit clore mes années d’études et prétendre au diplôme d’état d’architecte, j’ai décidé de mêler mes connaissances théâtrales d’amateur à ma formation professionnelle ; et c’est en ce sens que le projet que je propose de soutenir porte plus sur la vie et l’existence des troupes de théâtre que sur l’accueil du public, sujet plus souvent traité lorsque l’on aborde la conception de lieux scéniques.
-5-
-6-
Au commencement, il y a un espace. Vide, mais pas forcément dénué d’intérêt. Des êtres s’y incarnent, s’y déplacent, y parlent, y expriment leurs corps. Certains mentent sûrement. Peut-être tous. Ils inventent des vies qu’ils n’ont pas vécues. D’autres personnes s’arrêtent pour les regarder. Ils ne sont pas forcément passés par ici au hasard, mais peut-être que si, que pas un d’entre eux n’avait prévu de consacrer un peu de son temps à voir des mensonges prendre corps. Certains stationnent un instant, d’autres restent plus longtemps, tant que les textes s’enchaînent, que les acteurs/menteurs s’entêtent à vivre un autre vérité. Alors il faut les abriter. Et voici un théâtre. L’Écume des Jours, d’après Boris Vian, par la compagnie Place Quidam, Septembre 2010.
-7-
-8-
IntroductioN théâtre (n.m.) : 1 1 Lieu où l’on représente des ouvrages dramatiques, où l’on donne des spectacles. 2 Scène, partie élevée où les acteurs, vus de tous les points de la salle, exécutent les représentations dramatiques. 3 (Par extension) Art dramatique, de l’œuvre dramatique. 4 Ensemble des pièces d’un auteur, d’un peuple. 5 (Figuré) Lieu où se passent des actions remarquables, où des hommes figurent et sont, pour ainsi dire, en spectacle.
Le mot « Théâtre » prend notamment trois significations : il est à la fois une littérature (un texte), une pratique (une interprétation) et un lieu (un espace). Les trois sens sont constamment imbriqués lorsque l’on aborde le théâtre. De manière générale, les praticiens du théâtre (acteurs, metteurs en scène, scénographe, etc.) tiennent compte de ces trois sens pour créer un spectacle vivant. L’architecte, quant à lui, ne semble se concentrer que sur l’espace, laissant la pratique de ce même espace à d’autres. Et si c’était justement la pratique de cet espace qui pouvait le mieux le définir ? Et si les praticiens construisaient leur propre théâtre ? Qu’est-ce qui définit un espace comme lieu scénique ? De quoi est finalement constitué un espace de représentation ? Pour répondre à ces questions, nous allons aborder le théâtre sous sa forme de pratique spatiale, dans un premier temps à travers les idées théoriques de la mise en scène, puis en suivant plusieurs expériences spatiales d’hommes de théâtre, et nous dresserons ensuite un bilan des outils liés aux pratiques contemporaines pour tenter au final de (re)définir l’essence spatiale des lieux de théâtre.
1 Dictionnaire Le Larousse, 1985 -9-
L’IdÉE D’UN THÉÂTRE - THÉORIES DU THÉÂTRE
D’après Samuel Beckett, la scène, et donc le théâtre, est principalement constituée de la lumière. Dans Cap au Pire, une de ses dernières production en matière de texte théâtral, propose à sa manière une réflexion sur ce que le théâtre peut avoir d’essentiel, et comment tirer au maximum sur cette essence pour la réduire encore « vers le pire » c’est à dire vers la plus pure des essences. Au fil du texte, on note principalement la présence du corps dans un espace, et la scénographie essentiellement en clair-obscur (jeu d’ombres et de lumières) servant à camoufler et/ou à révéler les sentiments, les sensations et la parole même. Par extension de cette réflexion, on peut retenir que n’importe quel espace illuminé (et dont on peut modifier cette luminosité) peut être théâtre ; on dresse alors un parallèle avec la définition de l’architecture selon Le Corbusier « l’architecture, ce sont des volumes sous la lumière. » Si le langage est omniprésent dans Cap au Pire, il est néanmoins réduit à sa simple fonction indicative (phrases courtes, style direct), comme le fil d’une pensée ou plutôt comme une immense didascalie permettant de mettre en place une pièce non encore écrite. D’où le paradoxe de jouer ce texte. Beckett interroge également la place du corps et de l’espace dans le théâtre : « D'abord le corps. Non. D'abord le lieu. Non. D'abord les deux. Tantôt l'un ou l'autre. Tantôt l'autre ou l'un. Dégoûté de l'un essayer l'autre. Dégoûter de l'autre retour au dégoût de l'un. Encore et encore. Tant mal que pis encore. Jusqu'au dégoût des deux. »2
Du côté d’Antonin Artaud, on trouve aussi l’idée de l’ombre (donc de la lumière) dans l’art, et plus spécifiquement dans le théâtre.
« Toute vraie effigie a son ombre qui la double ; et l’art tombe à partir du moment où le sculpteur qui modèle croit libérer une sorte d’ombre dont l’existence déchirera
2 Samuel BECKETT, Cap au pire, Paris, éd. de Minuit, 1983 - 10 -
son repos. (...) Comme toute culture magique que des hiéroglyphes appropriés déversent, le vrai théâtre a aussi ses ombres ; et, de tous les langages et de tous les arts, il est le seul à avoir encore des ombres qui ont brisé leurs limitations. »3
Mais Artaud aborde aussi la question du langage, qui selon lui est voué à disparaître progressivement du théâtre, pour ne plus laisser que l’expression du corps (des corps) dans l’espace : « la fixation du théâtre dans un langage : paroles écrites, musique, lumières, bruits, indique à bref délai sa perte, le choix d’un langage prouvant le goût que l’on a pour les facilités de ce langage ; et le dessèchement du langage accompagne sa limitation. »
- Expériences du Lieu
De 1971 à 1982, Jean-Louis Barrault et sa troupe, chassés successivement du théâtre de l’Odéon et de l’ancienne salle de catch de l’Elysée Montmartre, prennent possession de la gare d’Orsay. Ils installent au coeur de l’immense gare désaffectée un «chapiteau», en fait une charpente en bois permettant de créer un espace de scène isolé, avec la maîtrise du son et de la lumière. Cette expérience du lieu peut être résumée ainsi : un chapiteau nomade qui se sédentarise dans un lieu en friche, et voici un théâtre. Finalement, tout espace permettant d’accueillir un équipement, des comédiens et un public est susceptible de devenir un espace de représentation, apte à présenter et à représenter le théâtre. La charpente apportée et montée par Barrault dans la gare d’Orsay souligne le fait qu’il faut « construire » pour mettre en place un théâtre. Concevoir un abri, limiter un espace. Il faut signaler la présence d’un lieu de représentation, il faut contrôler l’acoustique, canaliser les éclairages, cacher l’envers du décor, masquer les changements de costumes et d’accessoire, marquer la frontière entre le mensonge et l’imaginaire. Tout ce qui se produit en dehors de la scène est encore plus mensonge que ce que l’on y montre. Le théâtre est un art de l’illusion. Il ne faut pas « rompre le charme »
Une autre expérience théâtrale, plus récente, est également à rapporter : celle du Théâtre Permanent de 3 Antonin ARTAUD, Le Théâtre et son Double, Paris, éd. Gallimard, 1938 - 11 -
Coupe de l’actuel Théâtre du RondPoint à Paris, avec la charpente utilisée par la compagnie Jean-Louis Barrault à la gare d’Orsay.
Gwenaël Morin. Il s’agit d’un projet de diffusion théâtrale chargé de contraintes bâti sur cette question énoncée par le metteur en scène :
« Comment créer un point dans la ville, un point qui rassemble autour du théâtre ? »4
La troupe doit donc, pendant une année complète et à compter du 1er Janvier 2009, présenter gratuitement cinq soirs par semaine six pièces classiques ou contemporaines (Lorenzaccio de Musset, Tartuffe de Molière, Bérénice de Racine, Antigone de Sophocle, Hamlet de Shakespeare et Woyzeck de Büchner), à raison d’une nouvelle pièce tous les deux mois. Les journées de la troupe sont découpées entre des séances ouvertes aux habitants d’Aubervilliers de découverte de l’expression théâtrale et des textes le matin, parallèlement à des tournées de porte à porte pour communiquer l’existence du théâtre ; l’après-midi est destiné aux répétitions et préparations de costumes et d’accessoires du spectacle suivant, et la soirée accueille le public pour la pièce programmée. D’abord, un temps de travail très court, peu de préparation pour la mise en scène, pour les décors, les accessoires, jusqu’à l’apprentissage du texte ; ce qui implique la nécessité d’être minimal mais percutant (pour faire fonctionner le théâtre). À ceci s’ajoute la contrainte de la gratuité (pour amener au théâtre le plus de personnes possible, venant d’horizons différents sans sélection liée aux revenus) qui entraîne la nécessité d’obtenir une salle subventionnée, et aucun autre compte à rendre que le compterendu d’une expérience sociale ; d’où l’établissement du Théâtre Permanent dans les Laboratoires d’Aubervilliers. Le plus marquant dans cette expérience, c’est d’une part qu’elle a très bien fonctionné (malgré quelques tensions au sein de la troupe) et qu’en décembre 2009 le public devait fréquemment être refoulé faute de place pour l’accueillir, mais surtout c’est qu’elle démontre par là ce dont un théâtre a besoin pour fonctionner : une troupe active et un public présent. Le reste, technique et moyens mis à dispositions, qu’ils soient matériels ou financiers, n’ont finalement qu’une importance minime dans le fonctionnement du théâtre « pur et dur. » L’expérience du Théâtre Permanent, par Gwenaël Morin et sa troupe, aux Laboratoires d’Aubervilliers en 2009.
Bien sûr, en parlant du Théâtre Permanent, on pense tout de suite au théâtre de rue, qui n’a pas besoin de structure, ni d’éclairage (outre la lumière naturelle ou l’éclairage public) et ni de scène, de salle, de loges, de coulisses, de régie. Juste un public. « C’est le regardeur 4 Gwenaël MORIN, Théâtre Permanent, Quatre-Chemins, Aubervilliers 2009, Paris, éd. Xavier Barral, 2010 - 12 -
qui fait le tableau » comme disait Duchamp. Pour en finir avec les pratiques théâtrales actuelles, faisons un petit tour d’horizon des présentations « en vogue » présentées en 2010 au Festival d’Avignon. Ce qui est intéressant à observer, c’est à la fois la structure éphémère de scène et de gradins qui vient se greffer, comme chaque année, dans la cour d’honneur du Palais des Papes, mais aussi et plus particulièrement les moyens mis en oeuvre par les metteurs en scène pour montrer le théâtre d’aujourd’hui : projecteurs vidéo (Un mage en été, d’Olivier Cadio et Ludovic Lagarde5) espaces de scène défiant les règles de l’architecture (Der Prozess, de Franz Kafka, mise en scène Andreas Kriegenburg), absence totale de décor et jeux de lumières (Délire à deux, d'Eugène Ionesco, mise en scène Christophe Feutrier)...
Scène dans la Cour d’Honneur du Palais des Papes, lors du Fersival d’Avignon
En somme, ce qui définit le théâtre aujourd’hui, et plus spécifiquement l’espace de représentation, l’espace scénique, c’est essentiellement une incarnation, par le texte, par la présence, par la lumière, y compris dans les pratiques les plus extrêmes et les plus minimalistes (jusque dans les tentatives de désincarnation du théâtre par Beckett), plus qu’une forme architecturale. Mais cette incarnation ne saurait exister sans le regard des spectateurs. Le théâtre aujourd’hui conserve cependant tous ses artifices (décors, costumes...) et se pare de nouvelles technologies (vidéo...) mais reste néanmoins l’expression de sensations dans un espace.
- L’IDÉE D’UN THÉÂTRE
En conclusion de cette première partie, notons que le théâtre, en substance, est un lieu adaptable, ouvert à toute sorte d’exploitation, pouvant être établi même de manière temporaire dans un espace délaissé. Pour qu’une pratique théâtrale existe, il faut avant tout un échange entre des corps incarnant un texte et des corps pour le recevoir, dans l’ombre ou la lumière. Un théâtre est donc un lieu de rencontre. La pratique théâtrale actuelle reste cependant, dans la tête de beaucoup de gens, un loisir intellectuel, un passetemps pour élites. La plupart du temps, c’est le théâtre de boulevard avec des comédiens vu à la télé ou au cinéma qui parvient le plus à conquérir des spectateurs. Ajoutons à cela les idées reçues sur le théâtre, taxant les pratiques 5 Sur cette question des nouveaux outils mis en pratique dans le théâtre aujourd’hui, voir les entretiens entre Florence MARCH et Ludovic LAGARDE (Ludovic Lagarde : un théâtre pour quoi faire, éd. Les Souvenirs Intempestifs, 2010) - 13 -
Vision actuelle du théâtre.
1815
1815
1878
1878
contemporaines d’« intellos » et d’« incompréhensibles », et les textes classiques de « barbants » et de « poussiéreux » (la faute peut-être à des professeurs de français trop peu motivés par des conditions de travail déconcertantes...). Toujours est-il que, bien que la fréquentation des théâtres se porte bien, le théâtre rencontre toujours le même public, et la progression n’est pas fulgurante. Il est nettement plus simple de se rendre au cinéma que de se prêter aux antiques rituels de la représentation théâtrale. Quant aux troupes associatives, aux formations amateurs et autres prestations d’autodidactes, leur public se limite le plus souvent aux habitant du quartier dans lequel ils vivent et/ou travaillent. Comment amener de nouveaux publics au théâtre ? Comment promouvoir auprès d’un vaste public des spectacles aux petits moyens ? À l’image de Gwenaël Morin et de son « Théâtre Permanent », j’ai décidé de travailler sur le concept d’un théâtre de proximité, qui aille à la rencontre des habitants. Cette idée de théâtre, je la conçois mobile, temporaire, se muant de friche en délaissé dans la ville. Ce Théâtre Temporaire (par opposition à celui de Morin) serait une sorte d’organisme vivant qui phagocyterait la ville et ses habitants en plusieurs points disséminés sur le territoire. Vivant par les acteurs, bien sûr, et par les spectateurs, mais aussi par sa structure même, mobile, déplaçable, adaptable aux terrains sur lesquels il s’établirait, le temps d’une saison, avant de repartir, ailleurs dans la ville, et même au-delà.
1936
1936
1973
1973
2003
2003
- 14 -
PANTIN : TERRITOIRE D’EXPÉRIMENTATION
1815
- APERÇU HISTORIQUE
Pour tester ce dispositif scénique mobile, et avant dans détailler son fonctionnement et sa matérialité, il convient de présenter le territoire d’expérimentation retenu et étudié pour l’implantation d’un tel système. Pantin, commune de Seine Saint-Denis limitrophe de Paris, est marquée par de nombreuses mutations au fil des siècles passés, qui en fait un territoire particulièrement riche en problématiques urbaines.
1878
Depuis la création du hameau Pantin en 1067, la surface de la ville s’est vue morcelée par l’ampleur grandissante de la capitale ; voici, en quelques dates un aperçu historique des principales modifications qu’a subi la ville : 1936
1790 : Création du Pré-Saint-Gervais, amputation importante d’un hameau au sud de la Paroisse de Pantin 1802 : Ouverture du Canal de l’Ourcq 1816 : Mise en eau du Canal 1840 : Création d’un terrain de défense de 250m de large aux portes de Paris, les limites est de Pantin sont modifiées
1973
1849 : Création de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg : Pantin est coupé en deux par l’emprise des voies ferrées, parallèlement au canal (pas d’arrêt à Pantin alors). 1850 : Construction du fort d’Aubervilliers, amputant Pantin de 33ha au nord, commençant la séparation avec l’actuel quartier des Courtillières 1859 : Annexion par Paris des communes environnantes. Pantin devient limitrophe de la Capitale. 1860 (à partir de) : développement considérable des industries aux portes de Paris ; l’essor industriel gagne progressivement le coeur de Pantin, colonisant progressivement les abords du canal et des voies ferrées. 1864 : Ouverture d’une gare à Pantin 1867 : Amputation de la commune des Lilas, au sud. 1870 : Création d’une gare de marchandise ; l’emprise ferroviaire à Pantin grandit. 1886 : Création du cimetière communal de Paris, à la fois - 15 -
2003
sur la commune de Pantin et sur celle de Bobigny ; la partie nord de la ville se trouve un peu plus isolée. 1889 : Edification d’une nouvelle Mairie, sur la rive nord de l’Ourcq ; le « centre ville » s’en troupe déplacé. De 1918 à 1939 : Grands projets urbains (école de plein air, cité jardin rue des pommiers, premières HBM…) 1929 : Construction des Magasins Généraux en bord de l’Ourcq, sur la rive sud. 1930 : Le territoire de fortification militaire (« la zone ») est annexée à Paris, encore un recul des limites est de Pantin. 1942 : Ouverture de la station de métro « Eglise de Pantin ». De 1955 à 1978 : Grande opération de réaménagement du centre ville de Pantin (avenue Jean Lolive et quartier de l’église) par Denis Honegger ; nombreuses destructions et édifications de barres de logements dans le centre ; Honegger émet l’hypothèse de transformer l’avenue Jean Lolive en autoroute quatre voies (en écho au Plan Voisin de Le Corbusier ?) 1979 : Prolongation de la ligne 7 du métro avec deux nouvelles stations (« Quatre-Chemin » et « Aubervilliers »). 1995 : Incendie des entrepôts de la CCIP sur la rive nord du canal. 1999 : Projet de réhabilitation des Magasins Généraux en école d’Architecture (abandonné) ; ouverture d’une gare RER E à Pantin Pantin est donc aujourd’hui une ville au passé marqué par une forte industrialisation, dont subsiste quelques vestiges remarquables et de nombreux délaissés.
- Présentation et analyse urbaine
(Pour tous les lieux numérotés, se reporter à la carte ci-contre) Ville véritablement bipolaire, la commune de Pantin s’organise, en partie sud, principalement autour de la RN3 (avenue Jean Lolive) (1). La partie nord partage avec Aubervilliers l’armature de la RN2 (2). Elle est séparée de la partie sud par la vaste coupure mise en place au 19ème - 16 -
siècle autour du canal de l’Ourcq (3), du faisceau ferré de l’Est (4), des vastes emprises de service qui les accompagnent et des tissus industriels interstitiels. Cet ensemble est adossé, au nord, à la considérable emprise du cimetière parisien de Pantin (5), et du fort d’Aubervilliers (6). C’est dans ce contexte qu’ont été mis en place dans les années 1860, les premiers éléments d’une centralité (7), avec la Mairie et la Gare voyageurs, renforcés dans les dernières décennies par d’autres bâtiments publics : un Palais de Justice (devenu Centre National de la Danse (12) depuis 2004), une annexe de la mairie, ... PANTIN L’ensemble du territoire de la commune de Pantin Ville véritablement bipolaire, la ville de Pantin s'organise, en partie sud, principalement connaît de multiples projets, la plupart commandités par la autour de la RN3 (1) . La partie nord partage avec Aubervilliers l'armature de la RN2 (2) . municipalité, mais ceux qui font sens par rapport au canal Elle est séparée de la partie sud par la vaste coupure mise en place au 19ème siècle autour du canal de l'Ourcq d'abord (3) , du faisceau ferré de l'Est ensuite (4) , des vastes emprises de service qui les accompagnent et des tissus industriels intersticiels enfin. et à ses abords s’organisent autour de trois objectifs : réCet ensemble est adossé, au nord, à la considérable emprise du cimetière parisien de Pantin (5) , suivi du fort d'Aubervilliers (6) . sorption des coupures nord-sud, exploitation d’opportunités foncières et requalification des espaces publics.
Au nord l’ambition est de restructurer la vaste emprise SNCF (8) située à l’ouest de la départementale 115, autour d’une voie nouvelle (la RD 20) qui rejoindrait la place de la porte de La Villette en passant par la rue du Chemin-de-Fer (9). Le canal est directement ou indirectement l’armature de nombreux projets; les principaux sont : - la concession de la CCIP et ses abords (10) ;
copyrigt MICHELIN 2003 d'après carte n°19 18e édition autorisation n°0309396
La RN3 (1) est perçue par les habitants comme le coeur de la ville, malgré la densité de la circulation et l’aménagement routier de la voie. Elle devrait être réaménagée, avec l’ambition d’en faire un boulevard urbain. Entre la RN3 et le canal (3), la morphologie d’un tissu industriel aux assez amples îlots a été peu ou pas retouchée: on chercherait maintenant à trouver ici une nouvelle perméabilité.
60
(Carte plus grande p.31)
- les Grands Moulins de Pantin (11) ; l’aménagement des abords du Centre National de la Danse (12) ; - le réaménagement des berges du canal (3), entre le pont de la Mairie et la darse de la CCIP. Enfin au sud-est le projet de base de plein-air «de Romainville» (13) , pose un problème d’accessibilité vers la RN3 et ses transports en commun, voire vers les berges du canal au niveau de la darse «de la CCIP». L’emprise de la CCIP (10) est la zone qui nous intéresse plus particulièrement. Ce territoire de 6,5 hectares environ est la propriété de la Ville de Paris et fait partie du domaine public fluvial ; il est marqué par l’imposant bâti- 17 -
ment (aujourd’hui délaissé) des Magasins Généraux. Elle est également, depuis 1929, concédée à la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris pour des activités et de l’entreposage liés à la L’emprise, dont l’ampleur est comparable à celle du Bassin de La Villette à Paris, présente deux particularités : d’être un lieu irrégulier, singulier, et d’être un lieu enclavé. Elle est bordée au sud par les arrières des parcelles desservies par la RN3 (il n’existe qu’une seule connexion entre les deux infrastructures), au nord par les vastes emprises SNCF du réseau de l’est.
- Equipements scéniques
À Pantin, on dénombre plusieurs salles dédiées à la danse et à la musique (notamment le Centre de la Danse et le complexe de salles musicales Banlieues Bleues, de l’agence Périphériques), et aussi deux petits théâtres : celui lié au conservatoire de musique de Pantin, une petite salle servant le plus souvent à des concerts qu’à des représentations théâtrales, et le Théâtre au Fil de l’Eau, petite scène installée au bord du canal de l’Ourcq dans un ancien entrepôt réhabilité. Cependant, la municipalité de Pantin cherche à investir dans une salle de spectacle municipale, un véritable lieu dédié au théâtre dans la ville. Un point de rassemblement axé autour des arts de la scène. Parallèlement à cela, on observe une présence importante d’associations et de troupes théâtrales, qui ne disposent cependant pas de l’espace nécessaire à la création de pièces (ateliers de fabrication, salles de répétition, lieux de stockage). De plus, la plupart de ces associations éprouvent des difficultés à investir des salles pour représenter leurs créations, du fait principalement du trop faible nombre de lieux dédiés au théâtre dans la ville, et aussi de l’impossibilité pour les deux théâtres en présence de programmer plusieurs spectacles en même temps. Cartographie des délaissés urbains actuels à Pantin, et réseau potentiel de leurs exploitations mobiles et temporaires
Revenons un instant à l’idée du Théâtre Temporaire : sur le territoire de Pantin, on pourrait envisager une colonisation progressive et provisoire des nombreuses friches à disposition pour les muer, le temps d’un spectacle, en lieux de représentation. La municipalité de Pantin, qui possède la plupart des parcelles délaissées, mettraient celles-ci à disposition des troupes pour jouer et accueillir le public certains soir, le temps de l’exploitation ; elle n’investirait donc pas dans une salle unique pour regrouper les pantinois, mais sur plusieurs salles en différents points
- 18 -
de la ville, fidélisant les habitants des différents quartiers au théâtre, et les amenant à se déplacer à chaque fois dans un quartier différent pour suivre une programmation théâtrale dans la ville. Pour qu’un tel dispositif mobile (comprenant plusieurs salles exploitées dans des temporalités différentes mais pouvant se chevaucher) puisse fonctionner, il faut bien évidemment un point fixe dans la ville, servant d’espace de stockage et d’entretien des dispositifs inutilisés, mais proposant aussi aux multiples troupes présentes sur le territoire un lieu de création confortable et accessible, afin de pouvoir monter de toute pièce les spectacles vivants qui seront ensuite représentés dans les salles mobiles. Ce lieu bâti, plus usine de fabrication de théâtre qu’espace d’exposition, devrait être situé dans la ville, en un point accessible aux transports pour les livraisons comme les exportations de matériel (humain ou technique). Son implantation se ferait sur un délaissé urbain (en résonance avec le protocole d’établissement provisoire des salles mobiles), et irait de paire avec une restructuration urbaine permettant de reconnecter les îlots d’habitations séparés, et de réunifier, à long terme, le territoire de Pantin.
Lieux scéniques, associations théâtrales et collectivités exploitables à Pantin.
- 19 -
L’envers du « décor » urbain : site d’intervention - Enjeux
Le site d’implantation et d’expérimentation du Théâtre Temporaire se situerait à l’est de Pantin, à proximité de l’emprise de la CCIP. Il s’agit d’une vaste zone d’intervention de plus de 6 hectares, située entre le canal de l’Ourcq et l’avenue Jean Lolive, et représentative, d’une certaine manière, des mutations de la ville. D’une part, sur le front bâti de l’avenue, plusieurs immeubles décrépits et insalubres coexistent avec de nouvelles constructions et des rénovations récentes, ainsi qu’avec de grandes emprises d’entrepôts désaffectés. Le parcellaire en longueur témoigne du passé agricole de la ville, et les fonds de parcelles, côté canal, présentent essentiellement de petits bâtiments industriels en friche. Puis, en continuant vers le canal, s’étale un vaste espace vierge au milieu duquel trône l’imposant bâtiment des Magasins Généraux. Sur la rive nord, des entrepôts plus récents font tampon devant les faisceaux de voies ferrées de la gare d’entretient des TGV Paris-Strasbourg. Cette frange urbaine, sur la rive sud du canal, est, de par son statut de délaissé territorial, une « arrière-scène » de la ville, une sorte d’envers du « décor » urbain, peu accessible, ne possédant aucun équipement urbain, et pourtant théâtre d’une activité humaine importante. En toute saison, joggers et cyclistes déambulent sur le chemin de halage, au pied des Magasins Généraux, en direction soit de Paris soit de Bobigny. Aux beaux jours, des pantinois promènent leur chien, ou viennent pêcher dans le canal ; les Magasins Généraux eux-même, souvent squattés bien que sous surveillance, témoignent par leurs murs recouverts de graffitis d’une importante activité humaine et surtout d’un besoin d’appropriation de ce territoire. Dans cette zone particulière peut se jouer une reconnexion par dessus l’importante rupture territoriale que représentent le canal et l’emprise des voies ferrées. En raccordant les quartiers résidentiels du sud de la commune au canal en traversant l’actuel tissu urbain de la frange qui nous occupe, on ouvre des possibilités de raccordement avec les quartiers du nord et du nord-ouest, aujourd’hui isolés du coeur de la ville. De plus, une revalorisation du canal et de ses alentours s’inscrirait dans la continuité des aménagements des berges de l’Ourcq depuis le bassin de La Villette jusqu’à Noisy-le-Sec. En effet, aujourd’hui cette promenade pédestre et cycliste au fil de l’eau est aménagée uniquement - 20 -
en pointillĂŠs, principalement dans la partie plus proche de Paris et dans la continuitĂŠ avec Bobigny et Noisy-le-Sec.
- Proposition
En 2005, la MunicipalitÊ de Pantin a proposÊ un projet de restructuration urbaine pour cette zone. Elle propose notamment l’ouverture de deux nouvelles voies d’accès aux berges depuis l’avenue Jean Lolive, à proximitÊ des Magasins GÊnÊraux, et une importante densification de cette même berge avec la construction d’Îlots de 300 à 360 logements. Certains fonds de parcelle et certains dÊlaissÊs sur rue sont dÊtruits, et au total, la frange qui nous occupe abriterait entre 550 et 610 nouveaux logements. Quant aux Magasins GÊnÊraux, ils seraient rÊhabilitÊs soit en espace d’enseignement supÊrieur (une Êcole d’architecture a ÊtÊ plusieurs fois ÊvoquÊe) soit en bureaux. Dans les deux cas, la mairie Êmet l’hypothèse, à l’intÊrieur du bâtiment, d’installer un espace Êvènementiel polyvalent, qui pourrait donc lui aussi faire office de thÊâtre de la ville.
+ , $
,
3 E
Longtemps discutÊ et remaniÊ, ce projet urbain n’a toujours pas abouti. Depuis 2005, seules quelques destruction d’entrepôts autour de la zone ont fait office de prÊparation discrète du terrain, mais aucun chantier n’est encore prÊvu pour la construction. Sur la rive nord, cependant, des emprises industrielles cèdent la place à des complexes de bureaux, livrÊs vers 2012. La question des Magasins GÊnÊraux est problÊmatique : la surface à disposition est immense (près de 25 000m2 de planchers), et l’importante structure industrielle contraignante, sans compter que le bâtiment appartient au patrimoine industriel de la ville, rare et imposant vestige de cette Êpoque encore rÊcente, et à ce titre il pourrait être considÊrÊ comme les Grands Moulins, plus à l’ouest. Cependant, y installer des bureaux me semble rÊducteur de la force de ce bâtiment. De même, la trame structurelle ne permet pas d’apporter le jour au coeur des Êtages (contraignant pour des logements) et surtout empêche d’y Êtablir un lieu dÊdiÊ au spectacle (à moins de se retrouver avec d’Êpais poteaux au milieu de la scène et du public). En revanche, rien n’empêche une troupe d’y monter une crÊation in situ, à l’image de la compagnie de Jean-Louis Barrault ; de même, une telle surface rÊsoudrait les problèmes de stockage de dÊcors des troupes et des thÊâtre de la ville, et aussi des alentours. C’est pourquoi, dans un premier temps, je prÊvois de ne pas intervenir sur les Magasins GÊnÊraux, de les laisser libre à une colonisation progressive par la pratique du thÊâtre.
- 21 -
-//E$-//D
(
-//F$-/AA
-//E$-/A
-//E$-/AA
Projet de restructuration urbaine par la municipalitĂŠ de Pantin en 2005.
(
Quant au projet de la mairie de Pantin, je n’en conserve qu’une idée, celle de la traversée. En multipliant les percements du tissu urbain entre l’avenue Jean Lolive et la berge sud du canal, je reconnecte cet « envers du décor » au reste de la ville, envisageant également une passerelle piétonne de transition entre les rives nord et sud, qui pourrait par la suite se prolonger par-dessus les voies ferrées pour aller rejoindre les autres quartiers séparés de Pantin. En ce qui concerne la berge sud, les destructions d’entrepôts ont entraîné l’apparition d’une zone de végétation sauvage. Laissée telle quelle, et en suivant le concept du Tiers-Paysage selon Gilles clément, cette végétation, incarnation spécifique de la bio-diversité, pourrait devenir un parc naturel, voire une forêt au coeur de la ville. « Si l’on cesse de regarder le paysage comme l’objet d’une industrie on découvre subitement [...] une quantité d’espaces indécis, dépourvus de fonction sur lesquels il est difficile de porter un nom. Cet ensemble n’appartient ni au territoire de l’ombre ni à celui de la lumière. Il se situe aux marges. En lisière des bois, le long des routes et des rivières, dans les recoins oubliés de la culture, là où les machines ne passent pas. Il couvre des surfaces de dimensions modestes, dispersées comme les angles perdus d’un champ ; unitaires et vastes comme les tourbières, les landes et certaines friches issues d’une déprise récente. Entre ces fragments de paysage aucune similitude de forme. Un seul point commun : tous constituent un territoire de refuge à la diversité. Partout ailleurs celle-ci est chassée. Cela justifie de les rassembler sous un terme unique. Je propose Tiers paysage, troisième terme d’une analyse ayant rangé les données principales apparentes sous l’ombre d’un côté, la lumière de l’autre. »6 Pour cette raison, je propose de laisser cette végétation croître d’elle-même, et de la préserver tout en la rendant accessible : par des passerelles et des cheminements hors-sol, il sera possible de la traverser pour joindre le canal à la ville. Parallèlement à cette volonté de laisser s’exprimer le Tiers-Paysage sur cette frange urbaine, j’établis une densification du bâti existant par un recul du front parcellaire nord, et par la construction sur cette surface récupérée d’un alignement Les Magasins Généraux, faisant office partiellement de stockage pour le Théâtre Temporaire, resteront 6 Gilles Clément, Manifeste du Tiers-Paysage, texte disponible, p.4 - 22 -
un espace colonisable pour les troupes théâtrales, tout en proposant en rez-de-chaussée des commerces visant à favoriser la fréquentation des abords du canal, apportant un peu de la ville dans ce délaissé. La berge sud, ainsi réhabilitée, sera dorénavant théâtre d’une activité urbaine plus importante. L’implantation du Théâtre Temporaire sur ce territoire fait partie de cette opération de reconnexion avec la ville. L’existence d’une salle de théâtre fixe sur l’avenue Jean Lolive est d’autant plus judicieuse que celle-ci, en plus d’être l’axe majeur de Pantin, dispose d’une station de Vélib’ et d’une station de métro (Eglise de Pantin, ligne 5).
- 23 -
manifeste du Théâtre Temporaire - Principe
Le Théâtre Temporaire est un lieu dans la ville, un lieu de rencontre et de création théâtrale couplé à un dispositif spatial permettant à plusieurs troupes de théâtre, professionnelles et amateurs, de fabriquer un spectacle vivant et de l’exporter en différents endroits de la ville, prenant place aussi bien au sein de véritables structures d’accueil (théâtres, salles de spectacle, MJC...) que dans les délaissés urbains (parcelle en friche, entrepôts abandonnés, esplanade déserte, pied de tours et de barres...). Le projet du Théâtre Temporaire comporte donc deux parties, deux temporalités distinctes et néanmoins liées. D’une part, le dispositif scénique exportable, constitué d’un matériel de représentation adaptable et transportable, en plusieurs exemplaires de tailles et capacités différentes, en fonction du type de spectacle et du lieu de représentation. Il est important de garder à l’esprit que ce dispositif peut répondre à toutes les formes théâtrales et à tous les registres de texte (comédie, drame, vaudeville, théâtre contemporain, tragédie antique...) en fonction de la volonté des troupes et des compagnies qui l’exploiteront. En cela, ce dispositif consiste essentiellement en un kit de pièces détachées permettant :
Entre Usine et Théâtre, le Théâtre Temporaire est un lieu d’échange, de fabrication et de représentation.
- l’établissement d’un espace de jeu modulable et adaptable (blocs de scène, draperies, supports de décors) - la mise en lumière à distance (spots, poutres tridimentionnelles, madarines et console de lumière) son)
- la diffusion d’éléments sonores (sono et console
- l’accueil d’un public dans un lieu choisi (sièges transportables, gradins démontables, couverture des lieux extérieurs)
La coexistence de plusieurs troupes de théâtre dans un même lieu entraîne une inertie créative qui peut produire plusieurs spectacles de qualité simultanément.
- le confort des acteurs et des spectateurs (toilettes sèches mobiles, loges et coulisses occultables, couverture des lieux extérieurs pour abriter des intempéries - type chapiteau) En fonction des espaces retenus par les compagnies pour représenter leurs créations, tout ou seulement des parties de ces éléments mis à disposition peuvent être utilisés, remplissant un ou plusieurs camions pour le transport.
- 24 -
D’autre part, le Théâtre Temporaire est constitué d’une structure fixe stratégiquement implantée dans la ville, permettant à la fois de gérer les dispositifs mobiles et leurs déplacements sur le territoire (à la manière d’un « vaisseau mère » de film de science-fiction), mais aussi assurant le stockage et l’entretien de ces dispositifs lorsqu’ils sont inutilisés. En outre, cette structure fixe aura valeur d’exemple en tant qu’« usine à spectacles ». Les compagnies théâtrales, nombreuses à Pantin et plus généralement en Ile de France, désireuses de monter une pièce ou tout autre spectacle vivant, pourront disposer ici de l’espace nécessaire pour réaliser leur projet de A à Z. Constitué de plusieurs salles de répétitions, de tailles différentes, permettant de mettre en scène à proprement parler des pièces de théâtre, le bâtiment offre également la possibilité de fabriquer et de stocker des décors, costumes et accessoires nécessaires aux compagnies en manque de place et de moyens techniques. En cela, la structure « usine » est ouverte à tous, aussi bien aux troupes pantinoises qu’aux compagnies venues d’autres villes, en passant par les associations, les groupes scolaires et les autodidactes. Il est à prendre en compte également la question des professionnels présents dans la structure pour l’animer (soit en tant qu’exploitation soit en tant qu’ateliers), ainsi que le personnel administratif chargé de gérer le planning des espaces à disposition et celui des parcelles colonisables. Et plus spécifiquement, il est important de prévoir leur logement, de même que celui des comédiens et metteurs en scène « invités » c’est à dire non pantinois. C’est pourquoi ce lieu dispose également d’appartements et de studios faisant office de « résidences d’artistes », un bar/restaurant et des espaces de vie commune. Mais comme cette structure ne serait pas réservée à des « résidents », elle propose en outre un magasin de location de matériel électronique, son et lumière, à l’usage de particuliers ou encore de troupes présentes ailleurs dans la ville. De même, tous les espaces destinés à la fabrication de spectacles (ateliers, salles et stockages) seront ouverts à la location, voire à la découverte de l’envers du « décor » à des groupes scolaires, des centres de loisirs ou des associations. Quant au principe d’occupation des sols par les petites salles, ou dispositifs scéniques exportables, il est à la fois simple et difficile à définir à l’étape de projet. Selon l’idée d’une série d’espaces de représentations éphémères, ces lieux éphémères n’imprimeront pas d’empreinte durable sur le territoire. Ces « salles » prendront place sur un délaissé urbain, le temps d’une saison ou deux, d’un spectacle en somme, et partiront colporter leurs espaces scéniques sur d’autres délaissés, peut-être juste à côté, - 25 -
Une colonisation par le théâtre, douce et progressive, pilotée par un point fixe, un vaisseau mère.
peut-être à l’autre bout de la ville. Les parcelles d’implantation seront prêtées pour la durée d’exploitation de la pièce. En aucun cas le Théâtre Temporaire ne perturbera la destinée d’une parcelle vouée à un projet de construction, qu’il soit municipal ou privé. Néanmoins, durant les négociations ou les études pré-projet, il prendra place dans les interstices de la ville et sur les territoires en devenir pour diffuser l’art dramatique. Puis, s’en allant, il trouvera bien un autre délaissé où s’installer, tel un bernard-l’ermite prenant place dans une coquille vide. Et lorsqu’il n’y aura plus de place à Pantin, il ira voir ailleurs. Restera finalement, je l’espère, l’essence même du théâtre : un jeu d’échanges perpétuel. La position de cette structure fixe est donc envisagée à proximité des axes majeurs de Pantin, pouvant ainsi bénéficier d’un support logistique par voie terrestre (la RN3 qui est également l’avenue Jean Lolive) et fluviale (en vue d’une possible exportabilité des spectacles le long du canal de l’Ourcq, pourquoi pas jusqu’à Meaux ?). Saisissant l’opportunité d’une requalification du centre historique de Pantin à l’initiative de la municipalité, j’ai choisi d’établir la fabrique de spectacles du Théâtre Temporaire dans le tissu urbain de l’avenue Jean Lolive, en regard des Magasins Généraux, permettant de revaloriser ce bâtiment et de l’ouvrir sur la ville, tout en s’inscrivant dans une logique urbaine offrant un nouveau regard sur le quartier, et de nouvelles pratiques des berges aujourd’hui délaissées. Le bâtiment, inscrit dans le tissu urbain, ouvre une vue et un passage sur le patrimoine délaissé du site.
- Programme & Fonctionnement
Le Théâtre Temporaire est constitué de deux bâtiments, situés de part et d’autre d’une nouvelle rue, semi piétonne, qui relie l’avenue Jean Lolive au canal de l’Ourcq en traversant le rez-de-chaussée des Magasins Généraux. À l’est, le complexe de création propose cinq salles de répétition, dont une pouvant accueillir du public. Depuis l’avenue, un accès public sur un accueil/librairie équipé d’un vestiaire et de sanitaires oriente les spectateurs vers une grande salle semi-enterrée de 300 places de capacité. Au-dessus de cet espace d’accueil, principal lieu d’interaction avec le public, deux niveaux de bureaux administratifs gèrent à la fois le bon fonctionnement de « l’usine » et les programmations des spectacles dans la ville. Le reste du bâtiment présente un grand plateau de jeu au premier niveau, de 15x20m, équipé d’une régie son et lumière, d’un dispositif d’accrochage de spots et de ponts roulants, et assez vaste pour y installer des décors et répéter dans des conditions de spectacle. Le dernier niveau dispose de deux petites salles de 10x13m et d’un - 26 -
grand plateau de répétition de 17x23m, ouvert vers le nord sur la façade des Magasins Généraux. La distribution des salles se fait par un bloc de circulations verticales situé au 6/10e du bâtiment, accessible depuis la rue semi-piétonne, et par un couloir de circulation en façade, parallèle à cette même rue, présent à tous les étages. La dernière partie du bâtiment en rez-de-chaussée, située au nord, comporte les ateliers de fabrication et les espaces de stockage, ouverts en direction de la berge pour les accès aux camions de livraisons et pour l’exportation des spectacles et des dispositifs scéniques mobiles. Ces deux espaces sont en connexion avec les salles et les plateaux par un monte-charge situé dans le bloc de circulations verticales. Au-dessus de ces lieux de fabrication et de stockage, une grande terrasse équipée de gradins se tourne vers les Magasins Généraux, comme un théâtre de plein air ayant pour décor naturel l’aspect industriel de la façade des Magasins. Deux passerelles permettent l’accès au premier niveau des Magasins, à la fois pour y entreposer des décors en surplus et pour le connecter aux activités créatives de « l’usine » : on peut ainsi l’utiliser comme loges et coulisses d’un spectacle extérieur, ou le coloniser temporairement avec une création in situ entre ses murs. La forme générale de « l’usine » évoque à la fois un trou du souffleur, dispositif scénique aujourd’hui rare, permettant de rappeler discrètement son rôle à un acteur en représentation, et une machine optique qui révèlerait en le cadrant le « décor » que constituent les Magasins Généraux. Quant aux matériaux employés pour la construction et à l’aspect extérieur, la structure acier apparente et le remplissage briques empruntent au vocabulaire industriel de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle, avec des rajouts constructivistes ; le bâtiment rappelle ainsi visuellement une fabrique, tout en présentant des particularités incongrues qui questionnent sur son statut et son fonctionnement. En regard de cette « usine », de l’autre côté de la rue semi-piétonne, un bâtiment plus discret, en retrait des constructions existantes sur l’avenue Jean Lolive, abrite les ateliers de confection de costume et la draperie en rezde-chaussée, ainsi que le magasin de location de matériel son et lumière, ouvert à tous. Au nord, face aux Magasins Généraux, un bar/restaurant attire les promeneurs et les fait rencontrer le personnel et les troupes au travail sur le site aux heures des repas. Dans les trois étages supérieurs, 45 studios meublés hébergent les comédiens, et peuvent être convertis en logements sociaux ou étudiants lorsque peu de troupes sont en résidence. Chaque étage dispose en sus d’un espace commun et de douches collectives. Ces étages - 27 -
Salles de répétition Salle de représentation Logements Ateliers Circulations Restaurant Administration Volumétrie fonctionnelle du Théâter Temporaire
communiquent avec « l’usine » par des passerelles enjambant la rue semi-piétonne, favorisant l’accès aux salles de répétition. L’ensemble constitue donc une ouverture vers les Magasins Généraux et le canal, et un espace de rencontre et de découverte du théâtre pour les habitants en ce point de la ville.
- 28 -
ANNEXES
- 29 -
- 30 -
0
copyrigt MICHELIN 2003 d'après carte n°19 18e édition autorisation n°0309396
Elle est séparée de la partie sud par la vaste coupure mise en place au 19ème siècle aut canal de l'Ourcq d'abord (3) , du faisceau ferré de l'Est ensuite (4) , des vastes emprises de s ce qui les accompagnent et des tissus industriels intersticiels enfin. Cet ensemble est adossé, au nord, à la considérable emprise du cimetière parisien de Pan ) , suivi du fort d'Aubervilliers (6) .
Sites remarquables à Pantin (voir p.16)
- 31 -
Cartographie des friches et délaissés à Pantin en 2010 - 32 -
Lieux scéniques, associations théâtrales et collectivités exploitables à Pantin.
- 33 -
3 E -//E$-//D
-//F$-/AA
-//E$-/A
-//E$-/AA Projet de la municipalitĂŠ en 2005.
Existant Projet personnel.
Nouveau bâti Territoire en devenir ThÊâtre Temporaire Jardins du Tiers-Paysage
- 34 -
Progremme du ThÊâtre Temporaire
- 35 -
- 36 -
BilblioGRaphie
Le théâtre vu par des auteurs de théâtre : - Samuel BECKETT, Cap au pire, Paris, éd. de Minuit (1983) - Bertolt BRECHT, Ecrits sur le théâtre, éd. La Pléiade (réédition 2000) - Antonin ARTAUD, Le Théâtre et son Double, Paris, éd. Gallimard, (1938)
Vu par des praticiens : - Gwenaël Morin, Théâtre Permanent, Quatre-Chemins, Aubervilliers 2009, Paris, éd. Xavier Barral, 2010 - Denis Guénoun & Karine le Bail, Jean-Louis Barrault, Une vie sur scène (Entretiens avec Guy Dumur), Paris, éd. Flammarion, 2010 - Dialogue avec les classiques, OutreScène n°5, mai 2005, Strasbourg - Arts de la scène, scène des arts, vol. 1, Brouillages de frontières : une approche par la singularité, textes réunis par Luc Boucris et Marcel Freydefont, Louvain-la-Neuve, éd. Etudes Théâtrales, 2003
Sites internet : - Under construction Theater : www.underconstructiontheatre.com - Festival d’Avignon : www.festival-avignon.com - Le Théâtre du Soleil, à la Cartoucherie de Vincennes : www.theatre-du-soleil.fr/thsol/index.php - Place Quidam : www.placequidam.fr
- 37 -
http://aedena.over-blog.com MFE AAP Juin 2011 Enseignants : X. Fabre & Y. Rocher
Samuel - 38 -
Rimbault