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Comment les jeunes influencent les marques

C’est la génération de tous les paradoxes, dont le comportement aussi fascinant que complexe a obligé les marques à revoir complètement leur stratégie marketing. Mais comment ces jeunes ont-ils révolutionné la façon d’acheter et de consommer ?

Ils et elles sont né(e)s entre 1997 et 2010. Ces jeunes ont toujours connu un monde où l’informatique et internet tiennent une place prépondérante, ont grandi avec Amazon et les réseaux sociaux et voient aussi la société et leurs relations avec les autres par le prisme de plateformes virtuelles. Une vision qui inclut les marques et qui fait bouger les lignes car, « si vous n’êtes pas une marque désirée par la jeunesse, les parents ne vous désirent pas non plus car la jeunesse est reine », explique Eric Briones, co-fondateur de la Paris School of Luxury, directeur de la rédaction du Journal du Luxe, co-auteur de Le choc Z.

Or, en termes de cible marketing, cette génération, qui est déjà dans la consommation très active, ne rentre pas dans les cases habituelles. Eric Briones : « Elle ne supporte pas les stéréotypes légués par les plus anciens, et est, par exemple, complètement allergique à la notion de genre alors que la base du marketing a toujours été de séparer les hommes et les femmes ». Alors, pourquoi et comment les marques ont-elles dû s’adapter à ces codes ?

L’influence des réseaux sociaux

L’une des clés de compréhension, c’est sans doute les réseaux sociaux, devenus un micro pour amplifier le message de ces jeunes qui se sont construits dans l’hyper visuel. « On a assisté à une période de libération incroyable en 10 ans. Avec les réseaux, on voit tout ce qui se passe partout. C’est une fenêtre sur le monde qui permet de voir les propositions, les besoins et envies des gens », selon Astrid Lefèvre, créatrice du podcast

“ We love belgian brands ” et experte en développement commercial dans la mode. « Plus de gens ont envie de prendre la parole, de s’exprimer. C’est une réelle demande de la société et les marques se sont vite rendu compte du potentiel d’internet et des réseaux sociaux. »

La nouveauté amenée par les réseaux sociaux, c’est ce niveau d’extimité - le fait de se raconter - qui a libéré la parole et les modes d’expression, et permis à tout un chacun de se mettre en avant. Cela a généré aussi l’apparition de personnalités très suivies, comme les influenceurs qui ont apporté de nouvelles idées, des propositions créatives et donné la possibilité à des jeunes d’avoir de nouveaux modèles d’identification.

« Tout cela amène une évolution de société car il y a encore 15 -20 ans, le modèle dominant était blanc, élitiste. Les choses ont énormément changé depuis », explique Astrid Lefèvre. Et le phénomène touche tous les domaines et toutes les marques.

Il faut dire que la génération Z a aussi un pouvoir qu’elle utilise sans se priver : « Elle s’indigne en permanence car elle a compris que ça boostait son influence. Alors, grâce à ce pouvoir, elle peut se permettre d’être très exigeante avec les marques. C’est une génération qui vit pleinement l’e-commerce et qui a un niveau d’exigence exceptionnel sur la façon de vendre, de communiquer et de livrer un produit », explique Eric Briones. Résultat : « Les marques ont peur d’elle, de son pouvoir de boycott et de censure. »

L’attrait des marques engagées

Aujourd’hui, les marques sont aussi devenues politiques. À travers leurs messages, leurs mannequins (en mode, avec des tops plus size comme Ashley Graham, ou atteinte de vitiligo, comme Winnie Harlow, des tops transgenres…) ou leurs produits : des cosmétiques inclusifs, des vêtements non genrés, des jeux représentant des personnes de couleur ou des personnes avec un handicap… Que ce soit sur la durabilité, l’éthique ou la diversité, toutes les marques considérées comme désirables par les jeunes sont des marques engagées. Et si ce critère se double d’un marketing et d’une image bien ficelés, c’est banco.

Même l’industrie du luxe l’a bien compris en développant des partenariats avec des personnalités qui sortent du cadre. « Quelqu’un comme Virgil Abloh chez Louis Vuitton a été déterminant par tout ce qu’il a apporté à la mode en termes d’ouverture, de diversité, d’influences puissantes, de créativité », relève Astrid Lefèvre. En politique, un Barack Obama a montré au monde que « c’était possible ». Quel message puissant ! On a besoin de représentations, de modèles qui font évoluer les schémas établis ».

Besoin d’authenticité

Il faut dire que dans un contexte environnemental, économique et géopolitique incertain, le curseur des valeurs s’est déplacé. Aujourd’hui, les générations actuelles réfléchissent à leur bien-être avant tout, à « ce qui est mieux pour moi et qui fait sens ». Et cette question du sens, on l’adresse aussi aux marques que l’on consomme. Du côté des marques, il faut donc accepter le fait que l’autopromotion ne suffit plus, même si « Être engagé sur un ou plusieurs aspects, c’est un vrai choix. Ce n’est pas parce que le marché est là que tout le monde a envie d’y aller», explique Astrid Lefèvre.

L’authenticité est donc un critère-clé, qui permet à beaucoup de se reconnaître et de se projeter dans les valeurs d’une marque… tout en n’ayant pas forcément peur de la contradiction. On le voit bien dans la mode où, même si elle revendique l’aspect écologique, une majorité de la Génération Z consomme encore de la fast fashion. Cela illustre le paradoxe de ces jeunes qui exigent des marques ce qu’ils n’arrivent pas toujours à faire eux-mêmes. La bonne nouvelle finalement, c’est que les marques les écoutent. Et c’est positif car cela fait évoluer ces dernières vers plus d’ouverture et de transparence. 

Garder les yeux ouverts sur la violence

L’an passé, plus de 9 000 citoyens ont appelé la ligne d’assistance téléphonique 1712 pour signaler des cas de violence, d’abus ou de maltraitance d’enfants. Pourtant, les obstacles au signalement des abus peuvent encore être réduits. Tant pour les personnes touchées par la violence que pour celles qui en sont témoins.

La ligne d’assistance 1712 a été mise en place pour les citoyens ayant des soupçons quant à la violence sous toutes ses formes : de la violence physique à la violence psychologique ou financière. L’an passé, six pour cent d’appels supplémentaires ont été enregistrés par rapport à l’année précédente. Les trois quarts d’entre eux concernaient des violences intra familiales. Près d’un quart concernait des violences sexuelles. Et plus de la moitié des appels concernaient la maltraitance d’enfants.

« En soi, c’est une bonne chose que les citoyens semblent de plus en plus enclins à signaler les cas ou les soupçons de violence dans leur entourage », déclare le coordinateur flamand du 1712, Wim Van de Voorde. « La pratique et la recherche nous ont appris que les victimes, en particulier les mineurs, ne font généralement pas la démarche d’aller consulter un psychologue ou de se rendre à la police. C’est pourquoi il est si important de rester attentifs aux signes. Car la prévalence de la violence est extrêmement élevée. Chaque année, un Européen sur quatre est victime d’un acte criminel. Les chiffres belges sur la violence domestique indiquent qu’environ un homme sur dix et une femme sur sept ont été confrontés à la violence d’un (ex) partenaire au cours de l’année précédente. La violence, ce n’est pas les autres. C’est vous et moi ».

Pourtant, nous avons parfois tendance à considérer la violence comme une affaire privée. C’est cette attitude que cherche à combattre la campagne de l’Union européenne «Je garde les yeux ouverts’’. « La violence est un problème social pour lequel nous avons tous une responsabilité individuelle », explique M. Van de Voorde. « Dans cette campagne, nous voulons briser ensemble le tabou de la violence. En outre, nous faisons passer le message qu’il est possible d’obtenir de l’aide : vous pouvez contacter un service d’assistance téléphonique professionnel pour lui faire part de votre témoignage, gratuitement et de manière anonyme. En plus d’une oreille attentive, nous offrons des informations et des conseils : que se passet-il si vous portez plainte, quels sont vos droits, à quels services spécialisés pouvez-vous vous adresser ? »

Pour ceux qui ont des questions ou des inquiétudes, M. Van de Voorde a un bon conseil à donner : agissez. « Ne laissez pas tomber votre ami, votre parent ou votre camarade de classe. Faites part de vos doutes avec eux au lieu de faire comme si de rien n’était ».

Ligne d’assistance 1712 et Je garde les yeux ouverts

La ligne d’assistance 1712 est une ligne d’assistance professionnelle destinée à toute personne ayant des doutes en matière de violence, d’abus ou de maltraitance des enfants. Ce service est gratuit et anonyme. Vous pouvez la joindre par téléphone, par courrier électronique ou par chat. Le 1712 est le fruit d’une collaboration entre les Centres for General Welfare et les Child Abuse Trust Centres. Ces partenaires soutiennent également la campagne «Je garde les yeux ouverts» de la Commission européenne, qui attire l’attention sur les droits des victimes.

Plus d’informations et horaires d’ouverture sur 1712.be

Foto: © Sigrid Spinnox

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