AU T O M N E - H I V E R ·17 mer c e d es - mag a z ine .c a 12 ,95 $ C A D
150e anniversaire Célébrons le Canada d’Inuvik à Montréal en passant par Vancouver et Gimli Rencontre électrisante Le nouveau véhicule Concept EQ fait tourner les têtes à Berlin
Nouvelle recrue
Incursion dans l’univers du pilote de F1 Valtteri Bottas
Sur la glace
Des trucs et conseils de l’école de conduite hivernale
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au t om n e - h iver •1 7
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Un goût d’aventure Une dégustation de vin vient conclure une virée en voiture en Afrique du Sud.
Performan 46 IMPLACABLE Depuis le début de la saison de formule 1, Valtteri Bottas court pour l’écurie Mercedes-AMG Petronas Motorsport. Le Finlandais de 28 ans vise rien de moins que le titre mondial.
62 Le choc des générations Franz Joseph Blomendahl et sa fille Jacqueline parcourent l’Afrique du Sud à bord d’un GLE 550e 4MATIC. 68 Intelligence électrisante Ouvrant la voie à une nouvelle génération de véhicules, le Concept EQ de Mercedes-Benz fait déjà tourner les têtes dans les rues de Berlin. 72 classe neige Ou comment devenir un as de la glace grâce à l’édition canadienne du programme de conduite hivernale sportive AMG. 78 Les clients d’abord Britta Seeger siège au conseil d’administration de Daimler AG et elle est responsable des ventes des véhicules Mercedes-Benz. 80 Gelé dans le temps Pour une dernière fois, nous avons parcouru l’exigeante route de glace qui mène à l’accueillante communauté de Tuktoyaktuk, en Arctique.
Brillant Concept Le futur radieux et sans émissions de Mercedes-Benz.
Dans chaque numéro 10 itinéraire 100 innovation 104 mondanités 106 en route
Restez branché Scannez ce code QR pour avoir accès au magazine en ligne et à des suppléments.
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photos Paul Cocks (afrique du sud) ; TIM ADLER/daimler Ag (concept EQ)
54 DU CŒUR À L’OUVRAGE Forgeage, rabotage, rivetage, reprisage… Une poignée d’entreprises restent fidèles au grand art du travail manuel.
mercede s - maga z i n e .
mercedes-magazine.ca
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couleurs locales Des illustrations inspirées de classiques mets montréalais.
voyage
automne - hiver•17
86 séjours Nos hôtels préférés autour du globe.
14 la liste De la gastronomie au style, la culture canadienne tient la route.
88 le nouveau Vieux-Montréal Le centre historique de la métropole s’est métamorphosé en quartier effervescent où convergent artistes et entrepreneurs.
18 design Vous ne resterez pas de glace devant ces créations de designers qui ajouteront du style à votre décor... en plus de vous donner matière à réflexion.
94 une force de l a nature Longtemps isolée, l’Islande est devenue une destination courue. Il est néanmoins encore possible d’apprécier sa beauté brute loin des circuits touristiques.
20 événements Les galeries du pays proposent à la nouvelle génération de découvrir l’art non pas en visitant leurs expositions, mais en participant à des soirées festives.
entre bonnes mains Une incursion dans le monde de la lutherie canadienne.
22 quartier Mount Pleasant, à Vancouver, renaît grâce à sa gastronomie et à l’effervescence de sa scène culturelle. Page
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24 profession : maestro Le chef d’orchestre Yannick Nézet-Séguin poursuit sa mission de démocratiser la musique classique. 28 corde sensible Au pays, des artisans fabriquent des guitares d’exception qui se distinguent sur la scène internationale. 34 AVOIR LA FORCE DE NE JAMAIS ABANDONNER Alex Thomson a été le favori de la régate Vendée Globe. Comment a-t-il composé avec la solitude, la peur et les obstacles ? 44 Quatre secrets pour réussir en affaires ! Guy Kawasaki a travaillé dans la Silicon Valley pendant plus de 30 ans. Voici ce qu’il y a appris.
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Belle découverte Le renaissance du quartier Mount Pleasant, à Vancouver.
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vents et marées Alex Thomson a disputé une régate de 74 jours en solitaire.
photos Knauf and Brown (assiette) ; Guillaume simoneau (luthier) ; ALEX THOMSON R ACING/LLOYD IMAGES (catamar an)
art de vivre
Mot du prÉsident
S
i on réfléchit à la dernière année, force est de constater que 2017 a tenu ses promesses de nous faire vivre des moments mémorables, avec des lancements de nouveaux modèles, des célébrations d’anni versaire et des résultats records. Il est difficile de croire que l’hiver est déjà à nos portes, mais la nostalgie de rouler en cabriolet s’estompe quand on a l’assurance que les mois les plus froids de l’année nous réservent bien d’autres surprises. Ce numéro du magazine Mercedes-Benz vous don nera assurément l’envie d’explorer de nouvelles possibilités. Ensemble, poursuivons les célébra tions du 150e anniversaire du Canada en revisi tant notre territoire et notre culture (de Tuktoyaktuk à Vancouver, en passant par Gimli et Montréal) et prenons le temps de faire un détour pour découvrir ce que l’avenir de l’automobile laisse présager. D’abord, accompagnez-moi dans une expédi tion exceptionnelle sur la route d’hiver de Tuktoyaktuk, un dernier voyage avant que ce chemin de glace soit remplacé par une autoroute quatre saisons (page 80). Ensuite, allons un peu plus au sud pour mettre à jour nos compétences au volant grâce au programme de conduite hivernale sportive d’AMG donné à Gimli, au 10
Manitoba (page 72). On y a transformé le lac Winnipeg gelé en piste digne des plus célèbres circuits du monde, avec des courbes et des vi rages qui procureront des sensations fortes à tous les amateurs de course automobile. Poursuivons cette palpitante aventure dans un contexte plus urbain à Mount Pleasant, une des destinations artistiques les plus efferves centes de Vancouver (page 22). Il y a encore da vantage à explorer de l’autre côté du pays, dans le quartier portuaire du Vieux-Montréal, qui connaît actuellement une revitalisation coïnci dant avec le 375e anniversaire de la ville (page 88). Puis, allons à la rencontre d’influents acteurs de la scène musicale canadienne : le ré puté chef d’orchestre québécois Yannick NézetSéguin (page 24) et les talentueux luthiers qui jouent un rôle essentiel dans l’industrie de la musique mondiale en fabriquant des guitares pour les stars du rock, de la pop et du répertoire classique (page 28). Enfin, changeons de vitesse pour nous mettre au parfum de l’avenir de l’automobile, avec le révolutionnaire Concept EQ de MercedesBenz (page 68). Cet impressionnant véhicule propulsé à batterie est équipé d’un moteur électrique développant 408 ch et doté d’une au tonomie de 500 km, sans oublier ses fonctions intelligentes qui nous rapprochent du rêve de la voiture autonome. Si l’on se fie à cette voiture concept, on peut espérer un futur prometteur pour le tout premier véhicule à batterie entière ment électrique de Mercedes-Benz, qui sera of fert au Canada. Il reste encore beaucoup à faire d’ici là. J’espère que les derniers mois de cette année de festivités ouvriront la voie à un avenir excitant – quoi qu’il vous réserve.
Sincèrement,
Brian D. Fulton Président et directeur général Mercedes-Benz Canada
photos Uli Jooss (progr amme de conduite hivernale sportive); Gabrielle Sykes (MontrÉal) ; TIM ADLER/daimler Ag (concept eq)
itinéraire
Rien n’est trop abstrait pour un conseiller de Gestion privée 1859. Gestion de portefeuille | Services bancaires et financement | Et plus Banque Nationale Gestion privée 1859 est une marque de commerce de Banque Nationale du Canada, utilisée sous licence par Financière Banque Nationale et d’autres de ses filiales.
dé ta i l s de pu bl icat ion Publié par Daimler AG · Communications · HPC E402 · D-70546 Stuttgart Responsables auprès de l’éditeur Thomas Fröhlich · Mirjam Bendak Conseil d’édition Ola Källenius (président) · Thomas Fröhlich · Bettina Fetzer · Jörg Howe Gesina Schwengers · Dr. Jens Thiemer · Andreas von Wallfeld Canada Mercedes-Benz Canada Inc., 98, avenue Vanderhoof, Toronto, ON M4G 4C9 Président et directeur général Brian D. Fulton Vice-présidente du marketing Virginie Aubert Directrice, communications et relations publiques JoAnne Caza Superviseure, relations publiques Sinead Brown C o nc e p t i o n e t r é dac t i o n Allemagne Condé Nast Verlag GmbH · Karlstrasse 23 · D-80333 München Collaborateurs Tim Adler, Marc Bielefeld, Paul Cocks, Steve Etherington, Yannick Fauth, Peter Greve, Jörg Heuer, Chris Neimöck, Thomas Rabsch, Alexandros Stefanidis Canada Bookmark Content and Communications, a Spafax Group Company, 2, rue Bloor Est, bureau 1020, Toronto, ON M4W 1A8 500, rue Saint-Jacques Ouest, bureau 1510, Montréal, QC H2Y 1S1 Chef de la direction, Bookmark Raymond Girard Vice-présidente, stratégie de création et de contenu Ilana Weitzman Gestionnaire de comptes, marques de luxe et art de vivre Elana Crotin Rédacteur en chef Elio Iannacci Responsable de la rédaction Eve Thomas Rédactrice francophone Violaine Charest-Sigouin Rédactrice Renée Morrison Adjointe à la rédaction Kelly Stock Réviseure Louise Richer Collaborateurs Christian Blais, Karen Burshtein, Martin Flamand, Antoine Fortin, Mark Ambrose Harris, Anne-Laure Jean, Uli Jooss, Jasmin Legatos, Tracey Lindeman, Daniel Maurer, Natasha Mekhail, Omar Mouallem, Katie Nanton, Brett Schaenfield, Guillaume Simoneau, Barb Sligl, Justine Smith, Gabrielle Sykes, Isa Tousignant Directeur de l’équipe du design Guillaume Brière Directrice artistique Annick Désormeaux Graphiste Marie-Eve Dubois Recherchiste photo Julie Saindon Directrice de la production Joelle Irvine Responsable de la production Jennifer Fagan Responsable de la production publicitaire Mary Shaw Coordonnateur de production et de circulation Stephen Geraghty Coordonnatrice de la production publicitaire Joanna Forbes Vérificatrice d’information Jessica Lockhart Traducteurs Marie-Paule Kassis, Maude Labelle, PopCom, Isabelle Vialle-Soubranne Correctrice d’épreuves Joanne Deshaies V e n t e s m é di a s e t p u b l ic i ta i r e s sales@bookmarkcontent.com Vice-présidente, médias Laura Maurice, laura.maurice@bookmarkcontent.com Directrice des ventes nationales Tracy Miller, tracy.miller@bookmarkcontent.com Directrice des comptes nationaux, Québec et Est du Canada Dominique Beauchamp, dominique.beauchamp@bookmarkcontent.com Directrice des comptes nationaux, Ouest du Canada Barb Welsh, barb.welsh@welshsalessolutions.com Droits ©Copyright 2017 pour Mercedes-Benz Canada Inc. Tous droits réservés. La reproduction et l’utilisation du contenu de ce magazine, en tout ou en partie, ne sont permises qu’avec l’autorisation écrite de l’éditeur et de Daimler AG. Les points de vue formulés sont ceux des auteurs et ne représentent pas nécessairement ceux de Mercedes-Benz Canada Inc., de l’éditeur ou des chefs de la rédaction. L’éditeur se réserve le droit d’accepter ou de refuser tout matériel publicitaire. L’éditeur n’est pas responsable des manuscrits, photographies ou autres documents non sollicités. Certains véhicules illustrés peuvent inclure des équipements non offerts au Canada, et certains équipements offerts en option peuvent ne pas être disponibles pour tous les modèles. Certains modèles présentés n’ont pas de feux de position latéraux. Pour de l’information mise à jour sur les modèles, les caractéristiques standards, les équipements offerts en option ou les couleurs disponibles au Canada, de même que sur les prix, veuillez contacter le concessionnaire autorisé Mercedes-Benz le plus près de chez vous ou visiter www.mercedes-benz.ca. À notre connaissance, les renseignements contenus dans ce magazine sont exacts, mais nous ne pouvons pas être tenus responsables de toute erreur éventuelle. Retourner les non-livrés à Bookmark Content and Communications, 2, rue Bloor Est, Bureau 1020, Toronto, ON M4W 1A8 Imprimé sur du papier blanchi sans chlore Imprimé au Canada ISSN 1925-4156 Poste-publications numéro de convention 41657520
mercedes-magazine.ca Centre de service à la clientèle Mercedes-Benz 1-800-387-0100 12
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l a liste P r i n t e m p s - é t é •1 7
C u lt u re
Fines fleurs Les bouquets ennuyeux ne prennent pas racine dans l’atelier Anatomie Fleur, à Berlin. Le fleuriste d’origine canadienne Jean-Christian Pullin et son associée Amandine Cheveau y conçoivent des arrangements floraux sculpturaux pour des fêtes branchées ou des photos de mode, révélant le potentiel poétique des pétales. a n at o m i e f l e u r . c o m
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photo Volker Conr adus (anatomie fleur)
De la gastronomie au style, la culture canadienne tient la route.
ac h ats
Peau neuve L’entrepreneure torontoise Brittny Skylar Robins (ci-dessus) change la manière dont les membres de la génération Y perçoivent les soins de la peau. Grâce au soutien de Bonnie Brooks, l’ex-grande patronne de La Baie d’Hudson, elle a lancé une série de masques en hydrogel pour les yeux et le visage, inspirés des cosmétiques coréens. On les applique avant d’importants événements, comme un mariage (Brittny Skylar affirme même les porter en avion). Prochaine étape : une gamme de soins pas compliqués. f l aw l e s s by f r i day. c o m
St y l e
Beauté sauvage
C u lt u re
Prêt-à-tr ansformer Des millions de femmes portent quotidiennement le sari et il existe au moins 100 façons de le nouer. Malika Verma Kashyap, fondatrice du webzine et de l’agence Border&Fall, s’est donné pour mission de démystifier ce vêtement traditionnel. Cette Indo-Canadienne vivant à Bangalore a coproduit plus de 80 tutoriels expliquant les techniques de différentes régions pour s’en draper. Et c’est sans compter trois courts métrages indépendants, réalisés par Bon Duke, Q et Pooja Kaul, traitant de l’histoire, de la signification et de l’avenir du sari, qui ont récemment été présentés au MoMA, à New York. b o r d e r a n d fa l l . c o m
Os, cornes et fourrures ont une seconde vie grâce à la gamme de bijoux Ugly Fish d’Adina Tarralik Duffy. Cette bijoutière du Nunavut transforme des vertèbres de béluga en boucles d’oreilles et des bois de caribou en bracelets, revisitant les traditions vestimentaires nordiques tout en misant sur des valeurs écologiques. Confectionnées à partir de matériaux trouvés, ses créations sont aussi uniques qu’éthiques. fa c e b o o k . c o m/ u g ly f i s h d e s i g n
mercedes-magazine.ca
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L
LA LISTE
VOYAG E
PLAISIRS GIVRÉS La cueillette des pommes évoque de vivifiantes journées automnales... N’empêche qu’aux Vergers Lafrance, c’est en janvier que le public est convié à la récolte. Selon Éric Lafrance, pomiculteur de troisième génération, les grands froids québécois intensifient les saveurs et les sucres des fruits. Il a d’ailleurs recours à un procédé nommé cryoextraction pour transformer ses pommes gelées en cidre de glace (sa Cuvée spéciale s’accorde à merveille avec le fromage bleu et le foie gras). En 2017, les Vergers Lafrance ont également lancé Rouge Gorge, leur premier vermouth de pommes. L E S V E R G E R S L A F R A N C E . C O M
APPÉTIT
COCOS CRAQUANTS Depuis l’ouverture du restaurant torontois La Banane, le chef Brandon Olsen fait jaser avec sa cuisine inventive et ses assiettes dignes d’œuvres d’art. Mais la véritable pièce de résistance y est plutôt servie au dessert : les Ziggy Stardust Disco Eggs. Évoquant les dômes de Richard Buckminster Fuller et les éclaboussures colorées de Jackson Pollock, ces œufs en chocolat recèlent des surprises comme un mélange de truffes, de cerises séchées et de poivre rose. Ils sont aussi offerts à emporter à la boutique CXBO (sigle de Chocolates X Brandon Olsen). C X B O . C A
VOYAG E
Le musée Fear and Wonder, situé à Bergen, en Alberta, vous donnera des frissons dans le dos. Inauguré en octobre 2016 par les frères Brendan et Jude Griebel (respectivement archéologue de l’Arctique et artiste), il rend hommage aux attractions touristiques rurales et aux bibelots d’autrefois. Découvrez des objets étranges du monde entier (incluant poupées anciennes et reproductions d’organes humains) et assistez à des conférences sur nos rapports avec le monde matériel. FE AR ANDWONDER .CA
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PHOTO RYAN CROUCHMAN (CHOCOL AT )
CABINET DE CURIOSITÉS
ST Y L E
PIQUER LA CURIOSITÉ Les épinglettes ont la cote (et on ne parle pas ici des drapeaux ornant le revers d’un veston). Ces marques canadiennes offrent des modèles qui ont du piquant. MOTS D’ESPRIT Dites ce que vous avez sur le cœur (littéralement) en arborant les épinglettes ironiques ou mélancoliques de la marque montréalaise Stay Home Club. S TAY H O M E C L U B . C A
FA N - C LU B Que vous soyez fan de Drake ou obsédé de Morrissey, vous adorerez ces épinglettes de l’entreprise torontoise Sad Truth Supply qui revisitent intelligemment la culture pop. S A D T R U T H S U P P LY. C O M
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PASSE - PARTOUT
Alliant style et robustesse, ce sac en nylon signé BREE pour Mercedes-Benz est doté d’une bandoulière ajustable et détachable, et d’un compartiment pour cellulaire. Il vous suivra aussi bien au bureau qu’au resto !
FA I T AU C A N A DA Affichez votre fierté d’être Canadien grâce à cette collection de l’entreprise Fairgoods, de Calgary, mettant en vedette une poutine, une pierre de curling et un sac de chips au ketchup. FA I R G O O D S . C O M
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design
Miroir, ô miroir ! Vous ne resterez pas de glace devant ces créations de designers qui ajouteront du style à votre décor... en plus de vous donner matière à réflexion. texte Barb Sligl
Deux dans un
F&Y est un studio de design novateur et multidisciplinaire de Montréal, dont la raison sociale associe la première lettre du prénom des fondateurs, Frédérique Beaubien et Yannic Ryan. Sa mission : « une recherche de solutions aux réalités nordiques de la vie québécoise ». Il en résulte des objets utiles d’une beauté épurée, que ce soit un guidon de vélo en bois fabriqué à la main ou la console Miroir, conçue à l’origine pour un salon de coiffure. Alliant des matériaux comme le béton, le bois, le métal et, bien sûr, le verre, ce miroir sur pied inspiré du Bauhaus et de l’Art déco dispose d’une pratique tablette et s’intègre dans n’importe quel espace. f n y- m t l . c o m
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Magie noire
Jeu de miroirs Le célèbre créateur Karim Rashid est diplômé en design industriel à l’Université Carleton, à Ottawa, il détient un doctorat honorifique de l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario et a reçu plus de 300 prix. Il intègre souvent des miroirs dans ses pièces de mobilier, dont environ 3000 sont actuellement en production. « Le potentiel est infini et les miroirs le sont aussi ; la complexité des finis, des revêtements et des teintes est très inspirante », affirme-t-il au sujet de son matériau fétiche. Sa collection Dawn to Dusk, créée pour le fabricant italien Antique Mirror, propose une série de tables et de bancs curvilignes, rehaussés de multiples miroirs reflétant leur environnement.
Évoquant le miroir d’un certain conte de fées, les Black Mirrors de la firme torontoise Castor Design ont quelque chose de magique. En plus d’être légèrement teintés et laqués d’une peinture en poudre noire, la forme arrondie de leur dos donne l’impression qu’ils flottent sur le mur, comme s’ils appartenaient à une autre dimension. À mi-chemin entre l’art et le design, ils sont l’œuvre du sculpteur Brian Richer et de l’architecte et scénographe Kei Ng. castordesign.ca
antiquemirror.it
À toute vapeur Les œuvres du réputé architecte canadien Frank Gehry ont toujours une connotation poétique, qu’il s’agisse de l’emblématique musée Guggenheim, à Bilbao, ou de la bouilloire Pito, conçue pour la marque Alessi. Cette création est bien petite en comparaison aux édifices monumentaux imaginés par le lauréat du prix Pritzker, mais elle possède néanmoins la même apparence sculpturale et miroitante. Faite d’acier inoxydable étincelant et dotée d’une poignée et d’un bouchon en acajou évoquant des poissons, elle émet un sifflement mélodique, d’où son nom, Pito, qui signifie « sifflet » en espagnol.
photos Studio Le Quartier (F&Y ) ; K arim rashid (dawn & dusk collection)
alessi.com
Miroir de poche
Illusion d’optique Les miroirs ont l’étrange particularité d’avoir l’air limpides alors qu’ils sont solides. Ce paravent de la collection Les années folles semble prolonger l’espace tout en le cloisonnant et en lui conférant une élégance rétro. Créé par Janette Ewen pour la chaîne de magasins Mobilia, il combine marbre lustré et miroirs, reflétant à merveille l’opulence du style Art déco. La designer, qui habite Toronto et la Californie, décrit sa collection comme « un clin d’œil aux années 1920 sans en être une interprétation littérale ». mobilia .ca
Tout le monde devrait avoir un vide-poche, c’est-à-dire un plat ou un contenant pour – comme son nom l’indique – y vider le contenu de ses poches. Joli sur une commode ou un bureau, le miroir Elli remplit parfaitement cette fonction : recueillir (et réfléchir) les objets du quotidien, comme des bijoux ou des clés. Cet accessoire de teinte rosée est l’une des nombreuses créations de Knauf and Brown, un duo de designers de Vancouver. Tous deux adeptes de planche à roulettes, D Calen Knauf et Conrad Brown ont fondé leur studio alors qu’ils étudiaient à l’université Emily Carr. Remarqués au salon Maison & Objet, à Paris, ils sont aujourd’hui reconnus pour leur design épuré et irrévérencieux. k n au fa n d b r o w n . c o m mercedes-magazine.ca
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événements
Une nuit au musée
Les galeries du pays proposent à la nouvelle génération de découvrir l’art non pas en visitant leurs expositions, mais en participant à des soirées festives. t e x t e s J a s m i n l e g at o s
M o n t r É a l , au q u Éb e c
Les Nocturnes du MAC
Vivez l’effervescence des nuits montréalaises au Musée d’art contemporain de Montréal lors de ces soirées trimestrielles à mi-chemin entre party et sortie culturelle. Vous pourrez y apprécier des performances de DJ, dont celles des spécialistes du rythme brésilien Tupi Collective, en plus de participer à une visite interactive d’expositions, comme Maison des ombres multiples d’Olafur Eliasson (ci-contre). Et c’est sans compter les ateliers de création qui permettent de s’initier, par exemple, au collage à la façon du peintre québécois Edmund Alleyn (ci-dessus) ou aux techniques mixtes utilisées par l’artiste français Fabrice Hybert dans son œuvre Surproduction (1987). m a c m . o r g 20
Victoria, en colombie-britannique
soirée pyjama au Musée Découvrez les secrets que recèlent les artéfacts du Musée royal de la Colombie-Britannique (dont la photo ci-contre) lors d’une soirée pyjama proposant des activités en lien avec les expositions. En 2016, les participants ont pu déterrer des ossements de mammouth au cours d’une fouille archéologique fictive. Lors de la plus récente édition, le musée s’est transformé en véritable camp de vacances avec des tentes, du bricolage et une bataille d’oreillers géante. Au cours des cinq dernières années, ces soirées conçues pour les jeunes et leurs parents ont été si populaires qu’une version pour adultes a été organisée en août dernier. Qui a dit que seuls les enfants avaient le droit de jouer ? r oya l b c m u s e u m . b c . c a
to ro n to, en o n ta r i o
photos sÉbastien roy (Maison des ombres multiples d‘Olafur Eliasson et sans titre d‘Edmund Alleyn) ; Connor Stefanison (victoria) ; instagram (Regina) ; getty (ottawa)
La fièvre du vendredi soir Au printemps et à l’automne, dansez et socialisez au Musée royal de l’Ontario lors de performances de DJ ou de musiciens, comme le violoniste celtique Ashley MacIsaac et son projet FDLER, ou la légendaire chanteuse Carole Pope. Au fil du temps, l’événement est passé à plus de 3000 participants, qui prennent bien souvent d’assaut le musée au grand complet. Tout en grignotant des bouchées de restaurateurs locaux, vous pourrez parcourir les expositions, dont plusieurs inspirent les thématiques des soirées comme ce fut le cas en 2016, avec celle de l’artiste verrier Dale Chihuly. r o m . o n . c a
Ot tawa , en o n ta r i o
Saveurs du monde r e g i n a , en s a s k atch e wa n
Explor ations scientifiques Faites plaisir au nerd en vous lors des soirées mensuelles qui permettent de parcourir le Saskatchewan Science Centre sans se perdre dans une mer d’écoliers. Une course de tonneaux en voiturettes y a déjà été organisée, en l’honneur d’Agribition, la plus importante foire agricole de la Saskatchewan, de même qu’une version grandeur nature du jeu Hippos Gloutons (imaginez des adultes roulant sur des chariots qui essaient d’attraper des balles avec des paniers). Le concept s’est révélé fort populaire : alors que la première édition n’avait attiré que 8 participants, environ 250 s’y retrouvent désormais chaque mois. s a s ks c i e n c e c e n t r e . c o m
Préparez vos papilles pour les ateliers culinaires mensuels du Musée de l’agriculture et de l’alimentation du Canada, créés en collaboration avec des chefs de restaurants et d’ambassades d’Ottawa. Au cours de la soirée, le chef invité démontre comment préparer plusieurs spécialités de sa contrée natale, des plats qu’on peut ensuite déguster. En juin, à l’occasion du Festival ukrainien de la capitale, Tim Wasylko (ancien chef exécutif du premier ministre Stephen Harper) y a montré comment cuisiner des classiques de l’Europe de l’Est, comme des pierogis, des cigares au chou et du bortsch. c a f m u s e u m .t e c h n o - s c i e n c e . c a
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quartier
Bienvenue à Mount Pleasant
Un quartier de Vancouver renaît grâce à sa gastronomie et à l’effervescence de sa scène culturelle. t e x t e K at i e N a n t o n
Av e c s o n n o m p o é t i q u e et son emplacement stratégique au sommet
d’une colline, à seulement 15 minutes du centre-ville, pas surprenant que Mount Pleasant soit le nouveau quartier tendance de Vancouver. Fondé dans les années 1800 et considéré comme la première banlieue de la ville, ce secteur gagne en popularité grâce à ses cafés, à ses restaurants et à sa scène artistique qui attirent aussi bien des entrepreneurs créatifs que des amateurs de culture alternative. En parcourant le quartier, vous remarquerez ses immenses graffitis – souvenirs de la dernière édition du festival d’art mural de Vancouver [1] – et la vue imprenable sur les gratte-ciels et les montagnes qui se profilent à l’horizon.
le MENU Dans certains quartiers branchés, les lieux pour voir et être vu ne sont pas forcément ceux où l’on mange le mieux, exception faite du restaurant Savio Volpe [2 et 3]. Le chef Mark Perrier y propose une cuisine sans prétention, allant des pâtes maison (comme ses cavatellis à la saucisse, à la menthe et au ricotta fouetté) jusqu’aux viandes et poissons rôtis à la broche. Au Burdock & Co., dégustez les petits plats aux saveurs locales de la chef Andrea Carlson, servis avec des vins nature dans une ambiance feutrée (le plafond suspendu en pin ponderosa de la Colombie-Britannique réduit les bruits provenant de la cuisine ouverte). D’authentiques mets vietnamiens vous attendent au Anh and Chi (qui signifie « frère et sœur aînés »), un resto lounge dont la déco est signée Karin Bohn (admirez le papier peint orné de palmiers dans les toilettes). C’est aux parents des propriétaires actuels qu’on doit le premier restaurant de soupe phô de Vancouver, qui logeait autrefois à la même adresse. 3
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photos Allison Kuhl (mark perrier); Knauf and Brown (assiet tes)
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les ARTS
Inauguré en 1973, le Western Front [4] – un des plus importants centres culturels interdisciplinaires gérés par des artistes au Canada – présente de nombreuses performances. Non loin de là se trouve le Fox Cabaret, qui était le dernier cinéma pour adultes de la ville avant d’être transformé en salle de spectacles, en 2014. (Montez à la salle de projection lors des soirées DJ.) S’il fait beau, promenez-vous dans le Dude Chilling Park. Oui, c’est son nom (inspiré par une fausse enseigne installée par un artiste du coin). Il traduit bien l’atmosphère cool qui règne à Mount Pleasant ! 5
les boutiques Vous trouverez de nombreuses boutiques sur Kingsway et Main Street, l’artère principale de Mount Pleasant (le café Gene, dont l’édifice triangulaire se trouve à l’angle des deux rues, est un bon point de départ). Sarah Savoy, propriétaire de la boutique Much & Little, met en valeur les créations d’artisans locaux, dont les cartes de souhaits de Porchlight Press, les bijoux de Wolf Circus [7] et quantité d’articles en cuir, de chandelles, de tissus et de vêtements faits en Colombie-Britannique. Bien que de nouveaux salons de barbier aient ouvert leurs portes dans le quartier, ces messieurs préfèrent encore le classique Belmont Barbershop, appartenant au musicien Rich Hope. Quand aux adeptes de design, ils aimeront la boutique Vancouver Special [8] pour sa sélection de livres d’art, de meubles scandinaves et d’objets minimalistes japonais (dont les tasses en porcelaine de Hasami).
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les bars Pas étonnant que la bière coule à flots dans le quartier : à la fin des années 1800, on le surnommait Brewery Creek en raison du cours d’eau qui s’y trouvait, idéal pour le brassage. Aujourd’hui, on y compte une demi-douzaine de microbrasseries, ce qui permet de faire une tournée de dégustations à pied. Retenez ces deux adresses : d’abord, le 33 Acres Brewing [6], dont la déco toute blanche (agrémentée de quelques plantes) a attiré de nombreux Instagrammeurs, qui y retournent pour les œufs pochés à l’heure du brunch et les bouteilles de triple belge 33 Acres of Euphoria (qu’on peut acheter et emporter) ; ensuite, la Brassneck Brewery, dont l’espace lambrissé pouvant accueillir jusqu’à 50 personnes est souvent bondé d’amateurs de bières fortes comme la Massive Aggressive (à 8 % d’alcool). Si vous en avez un peu abusé, remettez-vous d’aplomb avec un jus riche en chlorophylle du Juice Truck, la première entreprise vancouvéroise de jus pressés à froid, qui a pignon (et camion) sur rue dans le quartier, ou encore avec un latte ou une infusion à froid des cafés 49th Parallel, Kafka’s [5] ou Matchstick Coffee.
8 mercedes-magazine.ca
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art de vivre Événements, innovations, arts et divertissements à ne pas manquer.
Profession : maestro À 42 ans, Yannick Nézet-Séguin s’apprête à prendre les commandes du prestigieux Metropolitan Opera et compte bien poursuivre sa mission de démocratiser la musique classique. te x te Viol aine Charest- Sigouin photo christian blais
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u chœur de la Maison symphonique de Montréal, j’ai une vue imprenable sur l’Orchestre Métropolitain (OM). Archets dressés, cuivres en mains, partitions ouvertes, les musiciens attendent le signal pour entamer le Concerto pour harpe de Nino Rota. La harpiste Valérie Milot se tient en avant de la scène, face aux gradins bondés de spectateurs. Tous les yeux sont rivés sur une seule personne : Yannick Nézet-Séguin. Dès son premier mouvement de baguette, une mélodie vaporeuse se fait entendre. Ses gestes sont amples et gracieux. Son regard papillonne d’un musicien à l’autre, adressant un sourire à l’un, un clin d’œil à l’autre. En le voyant à l’œuvre, un mot me vient spontanément en tête : bienveillance. Le Montréalais n’a rien de la figure du maestro autoritaire et prétentieux. Et, pourtant, il aurait bien des raisons de l’être : à 42 ans, il est un des chefs d’orchestre les plus réputés du monde. L’an dernier, il recevait l’honneur suprême d’être choisi pour succéder à James Levine, qui s’apprête à prendre sa retraite après 40 ans de loyaux services, au Metropolitan Opera (MET) de New York. Un défi de taille qui s’ajoute à ses fonctions de directeur 24
Je reviendrai à Montréal Bien qu’il soit à la tête de plusieurs grands orchestres à travers le monde, Yannick Nézet-Séguin revient fréquemment dans sa ville natale pour diriger l’Orchestre Métropolitain, notamment à la Maison symphonique de Montréal.
photos Fr ancois Goupil (Orchestre Métropolitain) ; Caroline Bergeron (maison symphonique)
Ici, je suis chez moi. Je sens que mes musiciens sont fiers de ce que j’ai accompli et que ça les pousse à donner le meilleur d’eux-mêmes. C’est pour ça que je reste. musical de l’Orchestre de Philadelphie et de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam, et qui n’a en rien ébranlé sa loyauté envers l’OM, qu’il dirige maintenant depuis 17 ans. « Ici, je suis chez moi. Je sens que mes musiciens sont fiers de ce que j’ai accompli et que ça les pousse à donner le meilleur d’eux-mêmes. Ils ne cessent de m’étonner. C’est pour ça que je reste », me confiait le maestro après une répétition, trois jours plus tôt. La veille, il était en concert au Carnegie Hall de New York, le soir même, dans une église de Verdun, et c’est sans compter la tournée asiatique de l’Orchestre de Philadelphie qui l’attend dans quelques jours. Yannick NézetSéguin a l’habitude de cette cadence effrénée. Il m’assure toutefois que le rythme devrait ralentir lorsqu’il sera officiellement à la barre du MET en 2020, notamment parce que son contrat avec l’Orchestre philharmonique de Rotterdam prendra fin l’an prochain et qu’il acceptera moins souvent d’être chef invité pour des concerts à travers le monde. « Ce sont ces voyages qui sont les plus épuisants. La direction du MET représente beaucoup de responsabilités, mais je séjournerai plus longtemps à New York, à Montréal et à Philadelphie, qui sont relativement proches. Au final, ce sera un mode de vie plus sain. »
Une vocation
Tapis rouge Yannick Nézet-Séguin vient de recevoir l’honneur suprême d’être nommé directeur musical du Metropolitan Opera, à New York.
Déjà, à 10 ans, Yannick Nézet-Séguin rêvait de devenir chef d’orchestre. « J’avais dit à mes parents que c’est ce que je ferais plus tard. À la maison, je mettais des disques et je faisais semblant de diriger des musiciens », raconte-t-il. À 13 ans, il était admis au Conservatoire de musique de Montréal et, à 19 ans, nommé directeur artistique et musical du Chœur polyphonique de Montréal. Il refuse toutefois qu’on le qualifie de prodige. Son succès, il le voit comme un mélange de chance et de talent, mais surtout d’occasions qu’il a su saisir. Comme ce jour où on lui a proposé de prendre la direction de l’OM. Il n’avait que 25 ans. « Certaines personnes considéraient que c’était un orchestre trop local et me conseillaient plutôt de poursuivre mes études en Europe. Je n’avais pas beaucoup d’expérience, mais mon instinct me disait que je devais accepter. » Une décision qui s’est avérée juste. C’est à la tête de l’orchestre montréalais que Yannick Nézet-Séguin a véritablement appris son métier, mais qu’il a surtout découvert sa vocation : démocratiser la musique classique. Déjà à l’époque, l’OM présentait des concerts auprès du grand public dans les quartiers de Montréal. « C’était très avant-gardiste ! Contrairement à mercedes-magazine.ca
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lo a rr t edmei pvsi v u rme
MTL ou NYC ?
Bonne note Au printemps dernier, l’Orchestre Métropolitain de Montréal interprétait le Concerto pour harpe de Nino Rota, sous la direction du maestro.
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aujourd’hui, peu d’orchestres avaient alors ce genre de préoccupations. » Cette mission, le maestro compte bien la poursuivre maintenant qu’il est à la direction du MET. « C’est une maison très internationale, mais je veux que les New-Yorkais se la réapproprient, en donnant des représentations dans les quartiers et en invitant des gens qui ne se sentent pas les bienvenus à l’opéra », dit-il avec enthousiasme. Il n’aura certainement aucun mal à rallier ses troupes. En avril dernier, après la représentation du Vaisseau fantôme de Wagner, le premier opéra qu’il dirigeait depuis sa nomination, ses musiciens lui ont prêté allégeance de la plus belle manière : en lui lançant une pluie de roses. Un soulagement pour le chef d’orchestre. « Les attentes étaient élevées. J’avais la pression d’être digne de leur confiance. C’était une manière de me dire qu’ils étaient derrière moi, prêts à passer à une nouvelle ère. Ça me donne des ailes ! » Quand aux musiciens de l’OM qui, depuis toutes ces années, voient leur chef acclamé aux quatre coins du monde, ils pourront bientôt goûter eux aussi à cet honneur. Dès novembre, ils le suivront lors d’une tournée européenne qui s’arrêtera notamment à Paris, à Amsterdam et à Hambourg… Une première historique pour l’orchestre montréalais, qu’on ne pourra désormais plus qualifier de « local »… Et ça, c’est grâce à Yannick Nézet-Séguin.
Ce qu’il y mange MTL « Les produits de l’érable. Du sirop, du beurre, du sucre, de la tire… J’aime assez ça ! » NYC « La cuisine japonaise y est particulièrement bonne. » Ce qui le rend nostalgique MTL « Marcher dans le VieuxMontréal. Le fleuve, l’architecture… ça me manque beaucoup. » NYC « Les gratte-ciels. »
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Où il va MTL « Au restaurant L’Express. Rien n’est comparable, même pas en France. » NYC « Au restaurant du NoMad, un vieil hôtel qui a été complètement retapé. Le service, la bouffe, la clientèle : pour moi, c’est l’expérience new-yorkaise suprême. »
photos Massimiliano Pieraccin/Alamy Stock Photo ( vieux- montréal) ; Andy Selinger/Alamy Stock Photo (New york) ; Natasha Breen (mets japonais)
Ce qu’il aime MTL « C’est une ville de taille humaine, où il fait bon vivre. » NYC « C’est la ville des villes. »
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Corde sensible Au pays, une poignée d’artisans fabriquent des guitares d’exception qui se distinguent sur la scène internationale. T E X T E T R A C E Y L I N D E M A N p h o t o s g u illa u me S im o nea u
art de vivre
Il y a une liste d’attente d’un an pour les guitares de Linda Manzer et leur prix varie entre 20 000 $ et 55 000 $. Changer d’air
Œuvre d’art La luthière Linda Manzer fabrique une nouvelle guitare à son atelier de Toronto. À gauche : elle a créé son modèle Pikasso il y a plus de 30 ans pour le musicien Pat Metheny.
Cinquante-deux. C’est le nombre de cordes de la guitare Medusa conçue par Linda Manzer pour le musicien jazz danois Henrik Andersen. Aucun autre instrument de cette luthière torontoise n’en possède autant, pas même la Pikasso – elle en compte 42 –, fabriquée en 1984 et ainsi nommée pour souligner son inspiration cubiste. « Le problème avec ce genre de guitare, c’est qu’on ne peut pas monter sur scène et interpréter n’importe quoi. Il faut une pièce qui soit à la hauteur », affirme Linda Manzer. La Pikasso appartient au prodigieux guitariste américain Pat Metheny et il n’a jamais cessé d’en jouer, ni des 25 autres modèles que la luthière a fabriqués pour lui. « Chacune possède un son unique qui exprime l’un des aspects de sa musique », précise-t-elle. Linda Manzer est reconnue pour ses guitares dont elle compare la sonorité au tintement d’une cloche combiné à la richesse acoustique d’un piano. Elle recherche avant tout la profondeur et la clarté. « Un son que certains qualifient de sombre. » Et qui résonne aux oreilles de musiciens de partout dans le monde : il y a une liste d’attente d’un an pour se procurer la douzaine de guitares qu’elle fabrique elle-même chaque année et dont le prix varie entre 20 000 $ et 55 000 $. Au Canada, un petit nombre d’artisans fabriquent des guitares qui peuvent atteindre de tels montants. Ils peaufinent le moindre aspect de leurs instruments, de l’angle du manche à leur complexe ornementation, et comptent une impressionnante liste de clients. Celle de Linda Manzer contient des noms légendaires, tels Carlos Santana et Gordon Lightfoot. Mais sa clientèle est surtout composée d’artistes inconnus du grand public : musiciens de studio, accompagnateurs, guitaristes solistes et auteurs-compositeurs qui créent dans l’ombre des succès parfois planétaires. Linda Manzer perfectionne son expertise depuis 1974 : elle avait déjà fabriqué quelques dulcimers (une sorte de cithare) entre deux cours à l’école des beaux-arts lorsqu’elle a envisagé de faire ce métier, à 22 ans. Elle avait entendu parler de Jean Larrivée, un luthier originaire de la banlieue de Montréal qui s’était établi à Toronto, et lui mercedes-magazine.ca
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avait téléphoné à plusieurs reprises avant qu’il accepte de la recevoir à son atelier pour lui enseigner sa technique. « Dès que j’y ai mis les pieds, j’ai su que c’était ce que je voulais faire. » Jean Larrivée l’a embauchée comme apprentie ; aucune femme n’avait travaillé pour lui auparavant et elle est ainsi devenue la première luthière du pays. Emballée d’avoir trouvé un mentor qui lui apprendrait les bases du métier, Linda Manzer a rejoint la première cohorte d’une école non officielle de lutherie, aux côtés des George Gray, David Wren, Tony Duggan-Smith, William « Grit » Laskin et Sergei de Jonge. Des pionniers qui ont développé un réel savoir-faire et qui sont gardiens d’une tradition canadienne. Tous sont des luthiers accomplis, mais Linda Manzer se démarque par sa propension à créer des instruments singuliers et expérimentaux. « Même ma toute première guitare, fabriquée en tant qu’apprentie pour Jean Larrivée, comportait deux éléments modifiés », raconte-t-elle. En l’occurrence, le joint du manche et la profondeur de la caisse. Des modifications qui n’ont donné aucun résultat spectaculaire, mais qui lui ont appris une importante leçon : « Toute expérimentation doit avoir un objectif. » 30
En coulisses Linda Manzer montre son travail en cours. Ci-dessous : des photos que Jean Larrivée a prises de ses instruments, incluant des manches soulignant le 50e anniversaire de son entreprise.
Jean Larrivée est épuisé. En ce début décembre, il revient tout juste d’Europe, où il a parcouru 7500 km pour rencontrer des distributeurs et des fournisseurs de bois, en plus de donner quelques ateliers de guitare. « Je travaille tout le temps, je n’arrête jamais », affirme le luthier de 73 ans qui, après avoir vécu en Colombie-Britannique, s’est établi à Oxnard, en Californie, près de Santa Barbara. En 2001, il y a mis sur pied un atelier de production afin de se rapprocher du marché américain, où se trouve la majorité de sa clientèle. Né à L’Abord-à-Plouffe, une localité au nord de Montréal qui ne porte plus ce nom aujourd’hui, Jean Larrivée a commencé sa carrière comme mécanicien automobile, ce qui l’a amené, dans les années 1960, à travailler pour une usine de General Motors, près de Toronto. C’est à cette époque qu’il a rencontré le luthier Edgar Mönch, lors d’un concert. Il lui a dit : « Je ferais tout pour apprendre à fabriquer des guitares. » Ce à quoi Edgar a répondu : « Viens demain ! » Sous sa tutelle, il a conçu sa première guitare à l’âge de 22 ans. Il a appris rapidement, développant un style qui le distinguait des fabricants de guitares américains, tels que C.F. Martin & Co. Ses instruments étaient plus petits, dotés de cordes d’acier plutôt que de nylon, habituellement utilisé pour les guitares classiques. Dans le milieu de la lutherie, il est surtout connu pour son type de barrage en forme de X, une méthode qui permet de créer des instruments plus équilibrés et qui a gagné en popularité. « Le barrage, je l’ai conçu sans regarder comment les autres faisaient », affirme-t-il, précisant que les tutoriels pour apprendre à fabriquer des guitares n’existaient pas à l’époque. « Je l’ai joué à l’oreille. » À ce jour, Jean Larrivée Guitars a produit plus de 140 000 instruments, standards ou sur mesure, dont certains pour des musiciens comme Peter Yarrow (Peter, Paul and Mary), Brad Paisley et Bruce Cockburn (qui possède d’ailleurs quelques guitares Manzer). Il lui arrive de revoir ses six anciens apprentis. Récemment, ces luthiers d’exception ont d’ailleurs participé à un projet artistique mandaté par la Collection McMichael d’art canadien, à Vaughan, en Ontario, consistant à créer une guitare pour chacun des peintres du Groupe des sept. Ils se sont réunis au Québec pour en fabriquer une huitième en l’honneur de Tom Thomson, un peintre qui a influencé le Groupe des sept, mais qui est mort avant la formation du collectif. « Ç’a été trois jours incroyables, s’exclame Linda Manzer. J’avais l’impression de voyager dans le temps à l’une des plus belles époques de ma vie, lorsque j’étais apprentie. »
photoS instagr am (@l arriveeguitars)
Le mentor d’une génération
art de vivre
L’essence de la musique Une photo accrochée sur le mur derrière Michael Greenfield le montre en compagnie de Keith Richards. Le luthier montréalais l’a rencontré lorsque les Rolling Stones étaient de passage dans la métropole en 2006. Une connaissance l’avait mis en contact avec son gérant et c’est ainsi que le guitariste a pu tester un instrument conçu spécialement pour lui. Non seulement Keith Richards a acheté la guitare, mais il en a commandé une autre quelques mois plus tard. « C’est difficile de faire mieux. Parlemoi d’une légende ! », lance Michael Greenfield, qui compte parmi ses autres clients le célèbre musicien celtique Tony McManus, ainsi qu’Andy McKee, un guitariste fingerstyle, dont les vidéos ont été vues des centaines de millions de fois sur YouTube. Dans son atelier situé au dernier étage d’un édifice centenaire, Michael Greenfield et son assistant Julien Saint-Jalmes fabriquent à la main des guitares sur mesure. Ensemble, ils en produisent quelques douzaines par année. Le luthier est particulièrement soucieux de leur sonorité, qu’il ajuste en tenant compte d’une série de facteurs interreliés – comme la géométrie de la caisse, le barrage et l’épaisseur du bois –, allant même jusqu’à consulter des physiciens et un modeleur de prototypes de l’Université McGill. Mais, par-dessus tout, Michael Greenfield mise sur le bois, à tel point qu’un article du magazine Acoustic Guitar, publié en 2016, l’a surnommé « the wood whisperer ». Dans son atelier, il empile les planches d’acajou, d’érable, d’épinette, de cèdre et de campêche africain, provenant de plusieurs
LE SOUCI DU DÉTAIL Michael Greenfield fabrique ses guitares sur mesure dans son atelier au dernier étage d’un édifice centenaire de Montréal.
artisans d’ici
D’autres fabricants canadiens d’instruments. Casavant Frères est une entreprise de Saint-Hyacinthe, fondée en 1879, et l’un des meilleurs fabricants d’orgues du monde. On retrouve ses créations dans des églises, des salles de concert et des écoles à travers l’Amérique du Nord et l’Asie.
En famille Joseph-Claver et SamuelMarie : les fondateurs de Casavant Frères.
Louis Bégin Archetier compte parmi la douzaine d’archetiers chevronnés au pays, que ce soit pour le violoncelle, le violon ou l’alto. Les archets de style ancien de Louis Bégin sont parmi les favoris des musiciens professionnels. Son fils, Emmanuel Bégin, est maintenant lui aussi un archetier de talent. Jules Saint-Michel a quitté la France, en 1959, pour s’installer à Montréal, où il a rapidement trouvé
du travail comme apprenti pour une lutherie de violon. Depuis, il est luimême devenu un luthier accompli, dont la réputation n’est plus à faire. James Ham fabrique des contrebasses à Victoria, en ColombieBritannique, en gardant toujours le musicien en tête. Parce qu’il mise sur des manches ajustables, des caisses ergonomiques et des techniques novatrices pour empêcher les éclisses de fissurer, ses instruments sont devenus la référence absolue. Dunbar Bagpipes est une entreprise de cornemuses, fondée par Jack Dunbar dans les années 1960, qui perpétue une longue tradition. Originaire d’Écosse, Jack a appris le
métier chez Peter Henderson Bagpipes, à Glasgow, avant d’immigrer au Canada et d’ouvrir une boutique à St. Catharines, en Ontario, où il a enseigné le métier à quelques apprentis qui l’exercent aujourd’hui partout au pays. Sabian a été fondée en 1981, dans une petite ville du Nouveau-Brunswick, et est devenue l’un des plus importants producteurs de cymbales du monde. Peut-être avez-vous déjà entendu le nom de son fondateur, Robert Zildjian, qui a créé Sabian pour concurrencer le fabricant de cymbales Zildjian à la suite d’une querelle familiale. Son fils Andy (dont le deux premières lettres du prénom, jumelées à celles de son frère et de sœur, forment Sabian) dirige maintenant l’entreprise.
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régions du monde. Chaque essence est destinée à un usage précis : manche, éclisse, table d’harmonie ou fond. « J’aime acheter du bois qui a une histoire », confie-t-il, en désignant une guitare qu’il fabrique à partir de pièces issues d’un seul acajou du Honduras, qu’on appelle simplement « L’arbre ». Il est connu pour être tombé en 1965 et avoir passé deux décennies dans la jungle avant qu’on le ramasse. Ce bois précieux présente de magnifiques motifs écaille de tortue et il est très recherché par les luthiers. Compte tenu de sa rareté, il est extrêmement onéreux, tout comme les guitares qui en sont fabriquées. Quant aux autres créations de Michael Greenfield (qui ne sont pas faites d’acajou du Honduras), elles se détaillent à partir de 10 400 $ US. Le coût d’une guitare confectionnée sur mesure par un luthier de talent peut sembler prohibitif, mais l’expérience qu’elle procure est hors du commun. Un lien profond unit celle-ci à son fabricant (et, par extension, à son propriétaire). « C’est quelque chose de très intime, du début à la fin », affirme Linda Manzer. Et qui ne disparaît pas lorsque l’instrument quitte l’atelier pour être acheminé à son acquéreur. « Cet objet qu’on a fabriqué de nos mains, il le prendra dans ses bras et y mettra toute son âme. » Un jour, alors qu’elle était dans une boutique, la luthière a entendu une chanson dont les sonorités lui étaient familières. Elle s’est arrêtée un instant et a reconnu l’une de ses guitares. « Je ne veux pas m’attribuer le génie des musiciens, mais contribuer à leur œuvre est quelque chose d’extraordinaire. Malgré le mérite qu’ils m’accordent, je ne suis qu’un catalyseur. » 32
leçon de vie De haut en bas : le travail du bois est une étape essentielle de la fabrication de guitares ; Linda Manzer et son mentor Jean Larrivée dans les années 1970.
Comment fabriquer une guitare selon LINDA MANZER 1. Le bois compte pour beaucoup. Chaque luthier a ses préférences ; Linda Manzer privilégie l’acajou, le bois de rose et l’épinette de Norvège. « On sélectionne et achète la meilleure qualité. Puis, on met le bois de côté et on le laisse patienter quelques années », affirme-t-elle.
barrage, qui renforcera la structure de la guitare, avant d’ajouter la table d’harmonie. « Toutes les pièces en bois sont importantes, mais c’est surtout celle‑ci qui influence la sonorité », explique-t-elle. 4. Linda Manzer fabrique ensuite le manche de la guitare, habituellement en acajou ou en érable, sur lequel elle appose la touche en ébène et les frettes, qui y sont soigneusement clouées.
2. Lorsque vient enfin le temps d’utiliser le bois, Linda Manzer détermine quelles pièces conviennent le mieux pour l’éclisse, la table d’harmonie et le fond. Les deux faces de l’instrument doivent être appareillées, donc les plus semblables possibles, pour créer une belle continuité. La luthière courbe ensuite le panneau de l’éclisse qui donne sa forme à la guitare.
5. Puis, elle donne du lustre à l’instrument en y appliquant environ 12 couches de vernis, qu’elle polit pour accentuer sa brillance.
3. Une fois l’éclisse formée, Linda la fixe sur le fond avec de la colle, puis elle met en place le
6. Arrive enfin la minute de vérité : « Le moment magique où on ajoute les cordes ! »
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AVOIR LA FORCE DE NE JAMAIS ABANDONNER Faire le tour du monde sans escale. Être seul sur son bateau pendant 74 jours. Échapper de peu à la première place. Le Britannique Alex Thomson a été le grand favori de la régate Vendée Globe. Comment a-t-il composé avec la solitude, la peur et les obstacles ? E n t r e v u e M arc B ielefeld
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photo Thomas Rabsch
UN HOMME ET LA MER Né en 1974, le skippeur Alex Thomson se révèle un charismatique conteur une fois sur la terre ferme.
art de vivre
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photo ALEX THOMSON RACING/LLOYD IMAGES
LE VENT DANS LES VOILES Alex est à peine visible tandis qu’il est à la barre du Hugo Boss. Les voiliers qui prennent part à la régate Vendée Globe ont environ 18 m de longueur. Peu de navigateurs ont les compétences pour les piloter en solitaire. On peut voir à gauche le foil qui a été gravement endommagé durant la course.
VIF C OMME LE VENT
Au cours de la traversée, Alex Thomson a atteint des vitesses de plus de 37,2 nœuds, soit environ 70 km/h. Il a aussi établi le record mondial de la plus grande distance naviguée en solitaire en l’espace de 24 heures : 536,8 milles nautiques (près de 1000 km). Au total, il a parcouru 40 000 km.
a r t de v i v r e
LES ADEPTES Ci-dessus : la foule se masse aux Sablesd’Olonne, sur la côte atlantique française, pour le départ de la régate. LE PELOTON À gauche : en novembre dernier, 29 bateaux ont franchi la ligne de départ et 11 skippeurs ont dû abandonner la course.
photo ALEX THOMSON RACING/LLOYD IMAGES
LA CABINE Ci-dessous : Alex Thomson dans la cabine. Un téléphone satellite lui permettait de rester en contact avec sa famille et son équipe.
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art de v i v re
Ê
tes-vous parvenu à rattraper votre manque de sommeil ? Plus ou moins. Je suis encore fatigué. Plus que d’habitude. Vraiment ? Vous avez accosté il y a six semaines déjà. C’est vrai. Mais j’ai passé en mer 74 jours pendant lesquels je n’ai jamais dormi plus d’une heure à la fois. En fait, la plupart du temps, je dormais de 20 à 40 minutes toutes les 2 à 4 heures. Pas plus. Ça prend un moment avant de retrouver un cycle normal de sommeil. Ça semble insoutenable. C’est ce qu’implique ce genre de course. On est seul au milieu de l’océan sur un voilier de 18 m filant à une vitesse de 60 km/h. Il y a toujours quelque chose à faire. Dans ces circonstances, le sommeil n’est-il pas justement essentiel ? On dort, mais pas de la même manière. Avant la course, j’ai consulté deux spécialistes. Je les appelle « la police du sommeil ». J’ai commencé à m’entraîner trois semaines avant le départ pour pouvoir me contenter de seulement 20 minutes toutes les 2 heures. Le manque de sommeil est une forme de torture. On peut le supporter en conditionnant son corps. Ça fonctionne. Évidemment, dans une régate du genre, on combat constamment la fatigue. Chaque jour, on navigue au point d’être complètement épuisé. C’est semblable à l’ivresse des profondeurs que les plongeurs ressentent. Notre cerveau ne parvient plus à fonctionner et à résoudre un simple problème mathématique, comme 45 divisé par 9. Tout s’embrouille. Avez-vous perdu du poids ? J’ai déjà perdu 10 % de ma masse corporelle lors d’une course précédente. Cette fois, j’ai apporté davantage de nourriture. Des rations sèches surtout. Comment cuisinez-vous à bord ? Eh bien, voici ma cuisine [désignant une AMOUR À DISTANCE photo sur son téléphone mobile]. Une Ci-dessus : Alex Thomson en petite cuisinière au gaz, c’est tout. Je compagnie de sa femme Kate, chauffe l’eau, je mélange la nourriture... tout juste avant le départ. et le repas est servi ! Le voilier est conçu pour sa performance. C’est rudimentaire : chaque gramme est compté. Pas de couchette, pas d’armoires, pas d’évier. La toilette est un seau en fibre de carbone conçu pour rester droit même quand le bateau s’incline à 50°. Il y a un petit matelas que je déplace selon les conditions de navigation. Le bateau est un cercueil en fibre de carbone. Je n’écoute même pas de musique à bord. Aucun divertissement ? Je veux être entièrement concentré sur la course, que tous mes sens et toutes mes émotions le soient. Je dois ressentir 40
photos alEX THOMSON R ACING/LLOYD IMAGES (à gauche) ; THOMAS RABSCH
TERRE EN VUE ! Alex Thomson franchissant la ligne d’arrivée en France, le 20 janvier 2017. Son temps : 74 jours, 19 heures et 35 minutes, quelques heures à peine derrière le vainqueur Armel Le Cléac’h.
chaque mouvement du bateau, du vent et de la lorsqu’il a franchi le cap Horn. Vous êtes parmer. La musique serait une distraction. Si des alvenu à réduire cet écart à seulement 37 milles [68 km], même si l’un des foils de votre bateau gues s’enroulent autour du gouvernail, était endommagé. Et c’est sans compter votre je le sens immédiatement. Ce doit être extrêmement exigeant. système d’identification automatique qui est Ça l’est. Il m’arrive d’être de très mautombé en panne. Comment avez-vous composé vaise humeur. Je hurle au vent, je crie au avec ça ? Le foil s’est brisé et les 60 jours qui ont ciel. Mais il y a des façons de se mettre suivi ont été extrêmement frustrants. J’ai eu du dans un état d’esprit positif. Par exemple, mal à m’en remettre. J’ai pris du retard, bien que je touche à l’arête de mon nez. C’est une je sois parvenu à reprendre du terrain. Puis, sensation que j’associe à un moment après avoir passé la zone de calme équatorial, je n’ai trouvé aucun vent portant. Mon seul espoir heureux de ma vie. Je parviens ainsi à EN PROFONDEUR était que les choses tournent mal pour Le Cléac’h. déjouer mon mental. Ça nécessite pas L’auteur et navigateur Marc Bielefeld (à droite) s’est entretenu avec Alex mal d’entraînement, mais ça fonctionne. Thomson pour le magazine MercedesDans ce genre de situation, il faut continuer à Les Français désignent l’océan Benz, à Londres. croire que la victoire est possible, ne serait-ce que comme une femme ; les Italiens pour rester motivé. À l’évidence, les chances comme un homme. Que représente-t-elle pour étaient contre moi. vous ? C’est mon terrain de jeu. Les hommes qui passent trop de temps en mer Mis à part la navigation, comment vous deviennent parfois étranges. Diriez-vous que préparez-vous pour la course ? Je m’entraîne vous êtes toujours le même ? Je pense que oui. Quand je pars en mer, c’est pour faire mon travail. 10 heures par semaine, pour l’endurance et la force. Mais le mental est encore plus important Notre équipe est une machine dont je ne suis pour une régate autour du monde. C’est pourquoi qu’un des rouages. Je ne me sens pas seul lorsque je travaille avec un psychologue sportif. je suis sur l’océan. Il y a des photos de ma famille Et que faites-vous ensemble ? Nous discutons partout sur le voilier. Je n’ai pas besoin que de tout ce qui pourrait survenir pendant la quelqu’un soit à mes côtés pour savoir que des course. Comment me motiver si quelque chose gens pensent à moi et s’ennuient. Comment de terrible arrive. Comment garder mon calme si pourrais-je me sentir seul ? Isolé, oui. Mais seul, non. En plus, je peux leur parler quand je veux je dois affronter une tempête dans l’océan avec le téléphone par satellite. Si j’obtiens un bon Austral, que les vagues ont 10 m de hauteur et signal, bien sûr. Il n’y a eu que trois ou quatre qu’il n’y a personne à des milliers de kilomètres jours pendant lesquels je n’ai parlé à personne. à la ronde. Quand ça arrive, notre tête nous dit : Vous arrive-t-il d’apercevoir des pays au cours « Je ne survirai pas à ça ! Je vais mourir ! » Mais il de la régate ? Les îles du Cap-Vert, le cap Horn, existe des techniques pour composer avec ce une île des Açores. C’est tout. Pas beaucoup de genre situation. bateaux, non plus. J’ai aperçu un chaluPouvez-vous nous donner un exemple ? Être tier sur mon radar au sud de la Nouvelledans la cabine lorsque le bateau avance à grande vitesse peut être terrifiant. Les vagues percutent Zélande. Sinon, ce n’est que la mer et la coque, ce qui produit un vacarme horrible. S’il le ciel. fait entièrement noir et qu’un vent fort se met à Et les albatros. Oui, on en voit tous les siffler, la peur nous prend au ventre. C’est une jours dans l’océan Austral. J’ai un rituel : je donne toujours un nom au premier albaréaction très primitive. J’ai une technique de vitros que je croise lorsque je pars en mer. sualisation pour ça. J’imagine que je suis non pas dans la cabine ou sur le pont, mais plutôt à la Je l’appelle George. Ces oiseaux géants SIGNES VITAUX hauteur des nuages. Ça me permet d’avoir une nous accompagnent parfois pendant des Du début à la fin de la course, Alex plus grande perspective sur ce qui se passe. Ce semaines. Ils aiment voler au-dessus et le Thomson a partagé son expérience truc m’aide énormément, mais j’ai dû m’entraîner long du voilier. Ils sont magnifiques. de la régate Vendée Globe en publiant pendant des mois avant de le maîtriser. Y a-t-il des mesures de sécurité lorsque des messages et des vidéos sur vous allez sur le pont ? J’essaie de m’y Comment ça marche exactement ? Dans ma Facebook. Le skippeur est resté en contact avec ses admirateurs pendant tête, je visualise le bateau d’en haut. Et la mer. Je rendre le moins possible. Tout dépend sa grande traversée en solitaire. peux voir qu’il n’y a pas d’iceberg au loin, pas de de la situation, mais je dois évaluer les conteneurs à la dérive, pas de baleines. Cela rérisques chaque fois que je quitte la cabine. Lors duit mon niveau d’adrénaline, qui est très élevé de la dernière course, le voilier a atteint pendant la course. Mon rythme cardiaque ralentit 37,2 nœuds, c’est presque 70 km/h. Lorsqu’on et je peux ainsi parvenir à me reposer et à dormir. frappe une vague à une telle vitesse, tout ce qui Sinon, je finirais par devenir fou. est sur le pont passe par-dessus bord. La houle ne cesse d’accélérer et de ralentir le voilier. On Armel Le Cléac’h, vainqueur de la régate est projeté sur le pont, balancé de part et d’autre. Vendée Globe 2016-2017, avait une avance de C’est comme un match de rugby. Si on avance à 800 milles nautiques [presque 1500 km] 42
photos THOMAS R ABSCH (AVEC NOS REMERCIEMENTS AU HILTON LONDON TOWER BRIDGE) ; ALEX THOMSON/YOUTUBE
art de vivre
photo Thomas R absch
grande vitesse, j’enfile un casque rembourré dès que je sors de la cabine. Quelles sont les pires conditions que vous avez rencontrées ? Le vent soufflait à 40 nœuds, avec des rafales pouvant atteindre 50 nœuds, ce qui représente une force 10 ou 11. J’étais à 1300 milles nautiques [2407 km] au sud de la Tasmanie, naviguant dans une houle de 7 m de hauteur, alors que la température de l’eau avoisinait 0 °C. Il faisait 15 °C avec le facteur de refroidissement éolien. C’était un froid mordant. Mettez-vous votre vie en danger en participant à la régate Vendée Globe ? On est seul au milieu de l’océan. En fait, on risque notre vie chaque fois qu’on fait une course en mer. Mais je ne peux pas m’arrêter à ça. Sinon, je ne le ferais pas. Pourquoi le faites-vous ? Quelle est votre motivation ? Une régate comme celle-ci représente un défi très particulier. Il existe beaucoup plus d’astronautes que de navigateurs qui ont fait le tour du monde en solitaire. C’est un privilège de pouvoir vivre une telle expérience. Et il y a l’aspect compétitif. Naviguer le plus rapidement et le mieux possible. Avoir un parfait contrôle de son bateau, défier la mer. Ça prend une grande maîtrise de soi. Et des éléments. Avez-vous d’autres motivations ? Il y a mon bateau. J’adore les voiliers. Je pilote un IMOCA de 18 m. Une vraie machine de course. Il a été conçu spécialement pour moi, au prix de plusieurs millions de dollars. J’ai eu un contrôle total sur sa conception : largeur, taille, hauteur, voilure. L’aménagement de la cabine. Le rêve. Mais il doit y avoir autre chose. C’est vrai. Peu importe la taille du bateau, il y a toujours autre chose. Ce moment lorsqu’on est en mer, qu’on ne voit plus la terre et qu’on réalise à quel point on est petit. C’est une leçon d’humilité. On est seul avec la nature. Vous avez parlé de la compétition. Mais qu’avezvous expérimenté d’autre à travers elle ? Lorsque j’ai participé à la Vendée Globe 2004, je me suis retrouvé pour la première fois seul dans l’Atlantique. Je me rappelle avoir été dépassé par la situation. Je me disais : « Voilà ce qui m’attend pour les 90 prochains jours. De l’eau et encore de l’eau. » C’était trop. Je me suis couché dans la cabine et, probablement de manière inconsciente, en position fœtale. J’étais roulé en boule. Certains marins disent même qu’il faut être fou pour participer à ce genre de traversée. Je pense qu’on ne fait que repousser ses limites. Une régate comme la Vendée Globe offre une expérience extrême. Une fois le départ donné, on ne peut plus rien prendre à bord ni mettre le pied sur terre. Aucune forme d’aide n’est autorisée. À ce moment, il n’existe pas de plus grand défi sportif. Les concurrents mettent à l’épreuve à la fois leur force physique et mentale.
C’est un privilège de pouvoir vivre une telle expérience.
DÉFI MENTAL Se retrouver seul en mer est très difficile psychologiquement. Alex Thomson s’entraîne aussi pour cet aspect de la compétition.
Y a-t-il un objet fétiche que vous apportez ? Oui, la tortue Speedy. Une peluche que mon fils m’a donnée pour que je l’amène avec moi. Qu’est-ce que ces courses vous ont appris ? J’ai parcouru 400 000 milles nautiques (740 000 km) dans ma vie. J’ai tenté neuf fois de faire le tour du monde. J’ai beaucoup appris en cours de route. Entre autres, que c’est dans la nature humaine de vouloir être le meilleur. Le meilleur photographe, le meilleur joueur de football, le meilleur navigateur. La plupart des gens croient que le succès rend heureux, mais je vois maintenant les choses autrement. Je pense plutôt que le bonheur engendre le succès. J’essaie de cultiver davantage ce bien-être. J’ai aussi réalisé que le succès ne reflète pas nécessairement les résultats, c’est l’aventure qui compte. Et celle-ci doit être exigeante, sinon elle n’aurait pas de valeur. En fin de compte, en mer comme sur terre, il n’y a qu’une chose qui importe : avoir la force de continuer. Avoir la force de ne jamais abandonner. Participerez-vous à la prochaine édition de la régate Vendée Globe ? J’ai terminé troisième, puis deuxième. C’est le temps de passer au niveau supérieur.
ART D E V I V RE
Quatre secrets pour réussir en affaires ! Guy Kawasaki a travaillé dans la Silicon Valley pendant plus de 30 ans, à une époque particulièrement inspirante. Ce gourou de la technologie partage avec nous ce qu’il y a appris. en t r ev u e PETER G RE V E p h o t o s Y ANNIC K FAUT H
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MISEZ SUR VOTRE IGNORANCE Lorsqu’on pense aux entrepreneurs qui ont changé le monde, on réalise que la plupart l’ont fait quand ils étaient jeunes. La raison est simple : à cet âge, on ne sait pas ce qu’on ignore. Et ça joue sur notre aptitude à prendre des risques. Si on sait que le chemin sera parsemé d’embûches, on ne se hasardera peut-être pas à l’emprunter. Dans ma jeunesse, j’ai travaillé pour Apple. J’ai fait de « l’évan gélisation » pour Macintosh, qui était à l’époque un tout nouveau système d’exploitation. Je n’avais aucune idée de l’ampleur de la tâche. Si une entreprise m’appelait aujourd’hui pour me dire : « Guy, nous avons créé un nouveau système d’exploitation… » Est-ce que j’accepterais le même emploi ? Probablement pas. Parce que je sais à quel point c’est difficile. Mais quand on a 20 ou 30 ans, on ignore tout ça et on n’hésite pas à tenter sa chance. Et, étonnamment, on peut même réussir. 44
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ENGAGEZ CEUX QUI AIMENT CE QUE VOUS FAITES
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NE PENSEZ PAS TROP, FONCEZ ! Beaucoup de gens passent trop de temps à se préparer plutôt qu’à agir. Il est inutile d’avoir un plan d’affaires de 50 pages expliquant en détail votre technologie, votre stratégie de lancement, l’expertise de votre équipe et vos prévisions financières quinquennales afin de savoir combien vous dépenserez au quatrième mois de la cinquième année pour une cartouche d’encre. Le meilleur argument de vente que vous pouvez avoir, c’est : « Laissezmoi vous montrer notre produit. » C’est la première étape pour changer le monde : se lancer. Foncer. Vous trouverez des solutions en cours de route. Le plus important, ce n’est pas où on commence, mais comment on arrive à changer rapidement.
GUY KAWASAKI Né en 1954, Guy Kawasaki est une des figures de proue de la Silicon Valley. Il a commencé sa carrière chez Apple, où il a travaillé aux côtés de Steve Jobs pour commercialiser le tout premier ordinateur Macintosh, en 1984. Auteur à succès, conférencier renommé et investisseur en capital de risque, il est également amateur de surf et ambassadeur pour Mercedes-Benz.
Lorsqu’on recrute des employés, on a tendance à se baser sur deux facteurs : leurs études et leur expérience professionnelle. Mais si on veut former une équipe qui nous aidera à changer le monde, on doit tenir compte d’un autre critère : ces gens-là doivent aimer ce qu’on fait. Ils doivent aimer qu’on construise des voitures, qu’on fabrique des planches de surf ou qu’on crée des sites Web… La formation et l’expérience, ce n’est pas tout. Si la passion n’est pas au rendezvous, si les candidats ne sont pas excités à l’idée de travailler sur notre projet, alors ce ne sont pas ceux qu’il nous faut. C’est la première chose qu’on devrait considérer, avant même les études et le parcours professionnel. Si vous avez un doute, optez pour la personne qui aime ce que vous faites. Le reste suivra.
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SAUTEZ LES ÉTAPES Un excellent état d’esprit pour innover est de voir plus loin. Ne restez pas statique en tentant d’améliorer votre produit de 10 % : passez à l’étape suivante. Prenez cet exemple tiré de l’Histoire : l’industrie du commerce de la glace en Amérique du Nord. Dans les années 1900, des hommes taillaient des blocs de glace sur des lacs gelés et les transportaient sur des traîneaux tirés par des chevaux. Trente ans plus tard, des usines de fabrication de glace sont apparues : on congelait l’eau
sur place, puis on la livrait à bord de camions. Aujourd’hui, tout le monde possède sa propre fabrique à glace, qu’on appelle réfrigérateur. Aucun des commerçants qui récoltaient la glace sur des lacs n’a ouvert d’usine et aucune usine à glace n’a tenté de manufacturer des réfrigérateurs. Et c’est là, le problème. La plupart des entreprises se définissent par ce qu’elles font. Si, aujourd’hui, les nouvelles technologies changent le monde, c’est parce qu’on a osé voir plus loin, pas parce qu’on a amélioré ce qui existait déjà.
C’est la première étape pour changer le monde : se lancer.
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p erfor m an c e Le monde de l’automobile, des sports motorisés aux nouveaux véhicules.
IMPLACABLE Depuis le début de la saison de formule 1, Valtteri Bottas court pour l’écurie Mercedes-AMG Petronas Motorsport. Bien que plusieurs le considèrent comme un coureur de seconde zone, le Finlandais de 28 ans vise rien de moins que le titre mondial. PHOTOs STEVE ETHERINGTON
photo Gett y Images
ENTRE V U E ALE X ANDROS STEFANIDIS
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NOUVELLE RECRUE Nouveau pilote de l’Êcurie Mercedes, Valtteri Bottas compte bien devenir le favori en titre.
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BEAUTÉ D’HIVER Valtteri Bottas apprécie la solitude. On le voit ici, sur le quai de son chalet, près de Lahti, en Finlande, où il peut se recueillir dans le silence.
RÉCHAUFFEMENT Valtteri Bottas alimente le feu. Il faut dire que la température extérieure est de -18 °C.
P er f or m ance
photos STEVE ETHERINGTON/MERCEDES - BENZ GR AND PRIX LTD.
L
e casque de Valtteri Bottas pèse 7 kg. Dès qu’il bouge la tête de gauche à droite ou de haut en bas, on peut voir son t-shirt s’imprégner de sueur et devenir sombre en moins d’une minute, tant ces mouvements sont exigeants. Les muscles de son cou sont soumis à un entraînement de 45 minutes. Pendant tout ce temps, ils subissent une force centrifuge comparable à celle qu’on peut expérimenter dans les virages d’une piste de formule 1. En général, les pilotes automobiles sont de corpulence moyenne et pas particulièrement grands. Mais lorsqu’ils sont torse nu, on peut constater le résultat de leurs efforts. Valtteri Bottas mesure 1,73 m et pèse 70 kg. Son cou est large et musclé, et ses triceps s’enroulent autour de ses avant-bras tels des câbles d’acier. Quelques heures plus tard, on a droit à une typique soirée de février en Finlande : venteuse, mouillée, -18 °C. Nous sommes à 100 km au nord d’Helsinki, dans une région couverte de neige la moitié de l’année, les lacs dormant sous une épaisse couche de glace. Ici, la majorité des enfants choisissent le hockey comme passe-temps. Alors, qu’un gars du coin ait fait carrière en F1 relève d’un véritable conte de fées. Valtteri Bottas a grandi à Nastola, un petit village dont la plupart des Finlandais n’ont jamais entendu parler. Il vit aujourd’hui à Monaco, mais possède toujours une propriété dans la région. Un chalet en bois qui, comme le sauna attenant, est peint d’un bleu grisâtre et orné de lattes blanches. La terrasse, surplombant le lac, est bordée de sapins, de bouleaux et de trembles qui s’élèvent, tels les gardiens de cet endroit serein. C’est ici que le pilote trouve refuge. Dans six semaines, il participera à sa première course en Australie (il s’y classera 3e, derrière Sebastian Vettel et Lewis Hamilton). Mais, pour l’instant, il se tient sur la terrasse, chaudement vêtu d’une tuque en laine, d’un manteau en duvet, d’un pantalon thermal et de bottes sombres, pointant un carré que son père a percé la veille dans le lac gelé. Il se demande si, plus tard, il n’ira pas dans le sauna. Plus d’un amateur de F1 a été étonné par l’annonce dévoilant que Valtteri Bottas serait le successeur de Nico Rosberg. Non pas qu’il ait été un mauvais pilote au sein de l’écurie Williams, mais à 28 ans, on ne peut pas dire qu’il s’agit d’un jeune poulain. Le fait qu’il soit sous contrat pour un an seulement a attisé la virulence de ses détracteurs, qui l’ont qualifié de solution provisoire n’arrivant pas à la cheville de Lewis Hamilton. Il est toutefois parvenu à leur prouver le contraire, en livrant de brillantes performances, notamment aux Grands Prix du Canada, de Russie et d’Autriche. Mais qui est ce Finlandais, passé de pilote d’essai
avant la ligne d’arrivée La saison de F1 2017 se déroule à travers 8 pays et sur 4 continents. 3 septembre : Monza, Italie (2e) 17 septembre : Singapour (3e) 1er octobre : Kuala Lumpur, Malaisie (5e) 8 octobre : Suzuka, Japon (4e) 22 octobre : Austin, États-Unis (5e) 29 octobre : Mexico, Mexique (2e) 12 novembre : São Paulo, Brésil 26 novembre : Abu Dhabi, Émirats arabes unis
RETOUR EN CLASSE « Valtteri Bottas a toujours atteint ses objectifs », se remémore son ancien professeur, Ari Siltanen (à droite).
chez Williams à coureur pour Mercedes-AMG Petronas et que plusieurs sous-estiment ? « J’avais 4 ans la première fois que mon père m’a emmené sur une piste de karting », dit Valtteri Bottas, du haut de sa terrasse. Il poursuit en racontant l’histoire du garçon qui est instantanément tombé amoureux du bruit des moteurs et de l’odeur de l’essence. « J’ai pris place dans un des karts et j’ai tout de suite su que c’était ce que je voulais faire ! » À l’époque, il était trop petit pour conduire, ses pieds n’atteignant même pas les pédales. « J’ai dû sortir de la voiture. J’étais incroyablement déçu », ajoute-t-il, avec le sourire de celui qui connaît le dénouement heureux du récit. « Lorsque nous sommes rentrés à la maison, mon grand-père m’a taquiné en me disant : “Si tu manges tout ton muesli chaque matin, pendant un an, tu toucheras aux pédales l’été prochain !” Ce à quoi j’ai répondu : “C’est ce que je ferai, promis.” » Dès lors, le petit Valtteri a mangé son muesli tous les matins. Après les longues et froides journées d’automne et d’hiver, la neige a fondu et, au début de l’été, il a pu retourner sur la piste de karting. Il a embarqué dans un kart et a appuyé son pied sur l’accélérateur. « Je n’oublierai jamais cette sensation », s’exclame-t-il. Ses joues sont rougies par le froid et ses yeux bleus brillent tandis qu’il se remémore la première fois qu’il a ressenti la puissance du kart parcourir son corps, la vitesse le coller à son siège. Mais il préfère plutôt enchaîner sur les bienfaits du muesli. « Parce qu’en fait, je n’aimais pas ça à cet âge », dit-il avec un large sourire. Et lorsque Valtteri Bottas sourit, ses traits anguleux et son menton volontaire ne sont plus aussi sévères. Bien qu’il affiche l’air imperturbable des Finlandais, ses fossettes le trahissent, indiquant < qu’il est plutôt un gars affable et terre à terre.
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BAIN DE VAPEUR Tous les Finlandais ont un sauna, bien souvent dans une cabane en bois attenante à leur maison. Celui de Valtteri Bottas a une vue imprenable sur le lac.
photos STEVE ETHERINGTON/MERCEDES - BENZ GR AND PRIX LTD
Certaines histoires de jeunesse en disent long sur le tempérament de quelqu’un ; elles révèlent des traits de personnalité aussi uniques et distincts qu’un menton volontaire. Si Valtteri Bottas suit aujourd’hui la trace de Mika Häkkinen et Kimi Räikkönen, deux légendaires coureurs finlandais, c’est peut-être grâce à cette importante leçon qu’il a appris très jeune. Quiconque accepte d’avaler un déjeuner qu’il n’aime pas, tous les matins pendant un an, doit être particulièrement têtu… ou ambitieux au point que rien ne l’empêchera de réaliser ses rêves. « Moi, têtu ? » lance le pilote au bout d’un instant, une fois que la question a fait son chemin. Voilà un autre trait distinctif qui le caractérise. Valtteri Bottas réfléchit longuement avant de répondre. Parfois, il reste silencieux – pendant 10 et même 20 secondes – avant de formuler sa réponse. On pourrait croire qu’il s’agit d’une réserve typiquement finlandaise. Mais il suffit de l’accompagner quelques jours dans son pays natal pour s’apercevoir que ce cliché ne s’applique pas à tous les Finlandais et apprendre à apprécier sa nature contemplative. Les pilotes de F1 ne répondent pas tous aussi vite qu’ils conduisent. En fait, lorsqu’il est temps de s’exprimer, plusieurs ne tiennent pas la route. « J’ai une volonté de fer, dit-il, sans laisser apparaître aucune fossette. Si c’est nécessaire, je peux me passer de nourriture et d’eau. Je suis constamment habité par mon désir de m’améliorer. Alors, si “têtu” signifie être tenace et ambitieux, alors, oui, je le suis. » Ses paroles s’élancent de la terrasse jusqu’au lac gelé et résonnent au-dessus de la brèche dans la glace où il ira bientôt se glisser. Une volonté de fer, a-t-il dit. Il ne semble pas être quelqu’un qui se contentera bien longtemps de la deuxième ou troisième place au podium. « Je n’ai rien à perdre et tout à gagner », ajoute-t-il après une courte pause. Lorsque Nico Rosberg a fait l’annonce-surprise de son départ à la retraite, c’est Valtteri Bottas luimême qui a appelé Toto Wolff, le patron de l’écurie Mercedes, pour lui demander sa place dans l’équipe. Dans le passé, il a su compter des points en conduisant une voiture moins performante et est même monté sur le podium, mais il ne considère pas ces réalisations comme des exploits. « Pour moi, la seule véritable réussite est de décrocher un titre et, pour y parvenir, je dois gagner une course. » Ce qui n’a pas tardé à arriver. En avril dernier, il remportait la première victoire de sa carrière en tant que représentant de la Flèche d’argent à Sotchi, en Russie. Valtteri Bottas est reconnu pour être un pilote extrêmement appliqué, un travailleur assidu, qui a un penchant naturel pour la vitesse. Il sait manœuvrer sur la chaussée mouillée et anticiper les risques sur le circuit. De 2010 à 2012, il a été < pilote d’essai pour l’écurie Williams, avant
ENTRE PROS L’hiver, Valtteri Bottas s’entraîne au centre olympique de Pajulahti, en Finlande, où des pros de l’athlétisme se préparent pour la saison.
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Valtteri a ce qu’il faut pour atteindre le niveau de Rosberg. NIKI L AUDA , MERCEDES-AMG PETRONAS
VICTOIRE ! En avril dernier, Valtteri Bottas a remporté sa première course à Sotchi, en Russie (à gauche). Lewis Hamilton (derrière, à droite) et lui forment le duo de Mercedes pour 2017.
En revenant chez le pilote après l’entraînement, nous nous arrêtons au Lähde-Kioski, un cassecroûte sur le bord de la route, qui était autrefois son commanditaire. Des photos de lui sont toujours affichées sur les murs, aux côtés de coupures de journaux relatant ses premiers succès. Les images datent de 10, 15 ou 20 ans. Sur certaines, on peut voir, assis dans un kart, un blondinet joufflu. Le grand garçon à mes côtés sourit timidement. « Pendant un moment, j’ai eu quelques kilos en trop. » Au menu du Lähde-Kioski, un plat est nommé en son honneur : le Bottas burger. Prix : six euros Goût : meilleur qu’escompté. Peut-être est-ce précisément l’atout de Valtteri Bottas. Personne ne s’attend à ce qu’il surpasse des champions du monde comme Lewis Hamilton et Sebastian Vettel. Mais s’il parvient à les battre, il risque bien de remporter la course. Le pilote enfile des sandales et un peignoir, ouvre la porte du sauna et se dirige vers le lac. Il avance prudemment sur la surface gelée, plaçant un pied devant l’autre pour éviter de glisser. Mais une fois qu’il a atteint le trou dans la glace, il n’hésite plus. Pas un tremblement. Pas un cri. Il immerge son corps encore fumant dans le lac, jusqu’à ce que l’eau atteigne sa poitrine. Aucun doute : Valtteri Bottas n’a pas peur de se mouiller.
photos Daimler AG
d’être promu coureur de F1 en 2013. Depuis le début de la saison, il a accumulé 441 points au championnat du monde de F1 en 77 courses. Sur le mur de son gym privé, on peut lire la citation de Mohamed Ali : « Ne lâche pas. Souffre maintenant et passe le reste de ta vie en champion. » Selon Niki Lauda, président d’honneur de l’écurie Mercedes : « Valtteri a ce qu’il faut pour atteindre le niveau de Rosberg. » Et, comme on le sait, le niveau de Rosberg, c’est celui de champion du monde. Niki Lauda sait aussi que Valtteri Bottas n’est pas un pilote macho au gros égo, qui cherche à briller sous les projecteurs. Authentique, il demande poliment à ses visiteurs de retirer leurs chaussures avant d’entrer chez lui. Dès qu’il en a le temps, il retrouve ses anciens camarades de classe pour jouer à NHL sur une console PlayStation. Après ses études secondaires, il a reçu une formation en mécanique. « C’était un choix logique », dit-il, maintenant assis dans le sauna. Il verse de l’eau sur les pierres chaudes, les faisant crépiter tandis que la température monte d’un cran. Ari Siltanen, son ancien professeur, décrit Valtteri Bottas comme un élève calme et concentré. « Il n’était pas le garçon le plus fougueux de la classe, mais il atteignait toujours ses objectifs », affirme l’homme de 58 ans.
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Devenez vite sur vos patins. Cet hiver, la surface glacée du lac Winnipeg se transforme en circuit de course. Expérimentez les courbes extrêmes d’un circuit de glace conçu pour affûter vos techniques de conduite et vous aider à maîtriser la vitesse, la précision et le contrôle. Testez vos compétences et notre gamme de véhicules Mercedes-AMG à la formation en conduite hivernale sportive AMG. Réservez dès maintenant. Les places sont limitées. conduitehivernalesportiveamg.ca
© Mercedes-Benz Canada Inc., 2017.
BIEN AFFÛTÉ Le marteau et l’enclume, la sensibilité et la patience… Lorsqu’il est question du grand art de la coutellerie, la tradition et le travail supplantent même la meilleure des imprimantes 3D.
PERFORMANCE
DU CŒUR À L’OUVRAGE Forgeage, rabotage, rivetage, reprisage… Une poignée d’entreprises restent fidèles au grand art du travail manuel. Résultat : des produits sophistiqués, fabriqués par des artisans chevronnés. ENTREVUE MARC BIELEFELD
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ue faut-il pour construire les meilleurs planeurs du monde ? Pas un ordinateur. Non. Ni une machine à fraiser ou des imprimantes 3D ultraperfectionnées. L’ingrédient essentiel : une main-d’œuvre spécialisée. Nichée dans le massif du Rhön, en Allemagne, la firme Alexander Schleicher est le chef de file mondial dans la construction de planeurs. Les surfaces blanches comme neige de ses élégants appareils sont encore polies à la main. Millimètre par millimètre, en utilisant le plus fin des papiers sablés, jusqu’à ce qu’elles soient douces comme de la soie. Dévouement, dextérité et patience sont ici essentiels. Ces époustouflants planeurs ne sont qu’un exemple parmi d’autres. Plusieurs ateliers et manufactures valorisent encore le savoir-faire traditionnel plutôt que d’avoir recours à des techniques de fabrication de pointe. Une expertise qui s’acquiert avec des années de travail, qui exige un œil de lynx et des mains agiles, de la sensibilité et de la force, mais surtout, de pouvoir réfléchir avec sa tête, son cœur et ses tripes.
Intuition. Passion. Les horlogers se penchent pendant des heures sur le mécanisme d’une montre, manipulant avec soin roues, pignons et mobiles. Les peintres qui décorent les pièces de porcelaine utilisent des pinceaux faits des meilleures soies, prélevées sur l’abdomen de tamias de Sibérie. Les couteliers
qui forgent à la main l’acier de Damas peuvent passer des semaines à le peaufiner, prouvant par son époustouflante beauté que la ferveur l’emporte sur la froide efficacité. Dans une rêverie silencieuse, ils plient et replient les couches de métal, encore et encore. Ces artisans chevronnés sont unis par cette même passion pour le travail bien fait, les surfaces lisses, les angles affûtés, les matériaux de qualité, la parfaite exécution d’une ligne, d’une courbe, d’une forme. Une minutie qui flirte avec l’obsession. Et que les fabricants de boussoles ou d’instruments de musique partagent avec les maîtres pâtissiers, les selliers, les cordonniers et plusieurs autres. Il est difficile de définir ce qui constitue l’excellence de leur savoir-faire. Leur création doit non seulement plaire à la vue, mais aussi au toucher. Elle doit être parfaite. Plus que parfaite. Pour façonner ces objets, ces talentueux artisans font preuve d’une sensibilité extrême. Ils leur insufflent la vie, leur procurent une indescriptible beauté. À une époque dominée par la consommation rapide et la rentabilité, ces créations expriment une vision du monde où le savoir-faire est valorisé. Plusieurs entrepreneurs choisissent ainsi de tourner le dos au cycle infernal de la production en série. Ils disparaissent dans leur atelier pour se consaAMOUR DU DÉTAIL crer à leur unique passion. La qualité d’un produit commence Le fruit de leur labeur est par le choix des matériaux. Tous les reconnaissable entre tous et cuirs sélectionnés pour l’habitacle de suscite la réflexion : « Fait la Classe G de Mercedes-Benz sont avec amour. » méticuleusement inspectés. mercedes-magazine.ca
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TRAVAIL DE PRÉCISION Anita Rathkolb achève la couture d’une poignée de portière en cuir. Surpiqûres et capitonnages exigent une totale concentration.
CUIR
DE FIL EN AIGUILLE Siegfried Schröttner se penche pour examiner une grande pièce de cuir. Il ferme les yeux et la caresse de la main. Il la sent, la ressent. Seuls les cuirs pleine fleur de grande qualité, tannés avec des agents minéraux biologiques, obtiennent son sceau d’approbation. S’il aperçoit le moindre défaut – une piqûre d’insecte ou une impureté quasi imperceptible –, il rejette la pièce sans même sourciller. La qualité est essentielle lorsque vient le temps d’habiller la Classe G. Siegfried Schröttner et ses collègues consacrent beaucoup de temps à la sélection des peaux. Environ 22 000 m2 de cuir non traité sont stockés à la designo manufaktur, tandis que plus de 200 000 m2 passent annuellement entre les mains de leurs artisans. Après cette impitoyable inspection, le cuir est soumis à une batterie de tests afin d’évaluer s’il résiste au déchirement, au rétrécissement, ainsi qu’à diverses conditions climatiques. Seules les pièces qui obtiennent de bons résultats 56
à toutes les étapes de ce contrôle de la qualité sont acheminées à l’atelier de coupe. Là, de multiples presses et des machines à découper au jet d’eau les attendent. Des sections de cuir sont coupées à l’aide de lames d’une précision millimétrique. Mais la plus délicate tâche est encore à venir et elle requiert des doigts de fée. Anita Rathkolb et Klaudia Eicher possèdent toutes deux ce don. Elles maîtrisent une technique de couture d’Indianapolis et utilisent des aiguilles courbes spécialement conçues pour le cuir, afin de faire des surpiqûres à la main sur les poignées des portières à l’intérieur des véhicules de la Classe G. « Il est essentiel d’être concentrée, d’avoir un bon œil et une grande délicatesse », explique Anita Rathkolb. Ces artisanes travaillent sur plusieurs éléments difficilement accessibles, comme la poignée au plafond, côté passager. Il n’existe aucune machine capable de surpiquer l’intérieur d’un objet ainsi arrondi. « Il faut reproduire de
DESIGNO MANUFAKTUR À G R A Z , EN AU T R I C H E
Dans l’atelier, les tailleurs s’affairent – mesurant, taillant, coupant, cousant – comme ils le feraient dans une boutique de Savile Row, à Londres. À la différence qu’ici, à la designo manufaktur, on n’habille pas les gens. Si tout ce monde s’active, c’est pour un véhicule : la Classe G de Mercedes-Benz. Les 178 employés de l’usine travaillent exclusivement à la confection du raffiné capitonnage en cuir de son habitacle. Les rembourreurs taillent le tissu pour les sièges, la boîte à gants, les portières arrière, la console centrale et le plancher. Les couturiers réalisent les surpiqûres et les capitonnages complexes. L’habitacle des VUS de la Classe G peut être aménagé selon les désirs des clients. Les artisans sont appelés à faire preuve de créativité et de savoir-faire : des recouvrements de sièges aux poignées en cuir, chaque Classe G a le potentiel d’être unique. M B 4 . M E/ D E S I G N O - M A N U FA K T U R
PERFORMANCE
PORCELAINE
FORCE ET DÉLICATESSE
NYMPHENBURG À M U N I C H , EN A L L EM AG N E
FAIT MAIN Résistant, sophistiqué, fait sur mesure. Cuir fin, surpiqûres et capitonnages élégants définissent l’allure de la Classe G.
Il y a près de 300 ans, cette fabrique de porcelaine munichoise a découvert le secret de l’or blanc : un mélange particulier de feldspath, de quartz et de kaolin. L’usine emploie plusieurs sculpteurs réputés pour concevoir, entre autres, des figurines, comme celles de la populaire collection Commedia dell’arte. On connaît la suite : depuis sa fondation, Nymphenburg est devenue un chef de file dans la fabrication artisanale de la fine porcelaine.
PHOTOS OLIVER GAST ; DESIGNO MANUFAK TUR ; NYMPHENBURG
NYMPHENBURG.COM
mémoire et avec précision le même motif sur chaque surface », souligne-t-elle. Sans compter que les propriétaires de Classe G ont la possibilité de personnaliser les coutures décoratives, la couleur du cuir et le capitonnage de leur véhicule. D’élégantes surpiqûres mettent ainsi en valeur les miroirs, les appuie-têtes, les sièges – même la console centrale attire l’attention avec ses gracieuses coutures ! Le tout dans une palette de couleurs incluant les brun sellerie, beige soie et bleu du large. Il y a une raison pour laquelle les gens qui font l’expérience de la Classe G la comparent souvent à un luxueux lounge. Et ce n’est pas uniquement dû à sa technologie de pointe. Depuis 70 ans, Mercedes-Benz perfectionne l’art de concevoir des habitacles d’un grand raffinement. Ce niveau de qualité, on ne l’obtient pas avec des bits et des octets. Rien ne vaut du fil, une aiguille, de la dextérité et du cœur.
D’épaisses courroies s’entrecroisent dans le vrombissement des cuves mélangeuses et le sifflement des valves. Rien n’a changé dans ce moulin : depuis plus d’un siècle, on utilise les mêmes machines activées par l’énergie hydraulique pour filtrer et pétrir la pâte de porcelaine. La manufacture de porcelaine de Nymphenburg est la deuxième maison de Dieter Zeus. Depuis 37 ans, c’est lui qui y prépare la pâte, étant un des rares à avoir été initié à cette tâche. Or, réaliser ce mélange particulier de kaolin, de feldspath et de quartz est un art en soi. Le premier confère sa dureté à la porcelaine ; le deuxième, son lustre. La recette exacte est un secret bien gardé. Une fois la poudre de kaolin nettoyée, le quartz et le feldspath sont broyés dans des moulins à tambour pendant environ 30 heures. Les minéraux sont ensuite mélangés dans une cuve et la pâte qui en résulte est pompée dans un filtre-presse. Les étapes suivantes exigent que Dieter Zeus soit à la hauteur de sa réputation. En se tenant près du filtre-presse, il doit appuyer de toutes ses forces sur un levier jusqu’à ce que la pâte en sorte sous la forme d’une galette carrée. Il doit également veiller à ce que la pâte soit souple et homogène. « Ça prend des années d’expérience avant de pouvoir obtenir la consistance parfaite », dit-il. Et aussi pas mal d’huile de coude.
PASSION DES FORMES Dieter Zeus dans son sanctuaire : depuis le xviiie siècle, bien peu de choses ont changé dans ce moulin où l’on fabrique la porcelaine.
MESSER WERK À A S C H AU , EN A L L EM AG N E
C’est dans une forge de 200 ans, située dans la verdoyante région de Chiemgau, à l’ombre du massif de Kampenwand (1700 m), que Luca Distler et Florian Pichler exercent leur art. Le forgeron et l’ex-technicien dentaire sont amis depuis la petite école. Aujourd’hui, ils conçoivent d’élégants couteaux en acier de Damas. S’ils se considèrent comme des artisans, leurs clients affirment qu’ils sont plutôt des artistes. Leurs couteaux conçus pour la chasse sont de véritables trésors pour les chefs, des bijoux précieux et des compagnons à vie pour quiconque a l’honneur d’en posséder un. Beaux, uniques et, par-dessus tout, impitoyablement tranchants. MESSER-WERK.DE
MUSCLES D’ACIER Des étincelles jaillissent lorsque Luca Distler se met au travail : à partir d’une barre faite de 320 couches de métal fondues, le forgeron crée une lame en acier de Damas.
ACIER DE DAMAS
PASSION ARDENTE Debout devant sa forge, Luca Distler examine les braises incandescentes qui crépitent à 1200 °C. Des étincelles jaillissent et des scories brûlantes volent à travers l’atelier. Il plonge une paire de pinces dans les flammes et en retire une « trousse » d’acier de 2,5 kg. C’est à partir de cette masse brute qu’il confectionne ses couteaux. Au-dessus de charbons ardents, le forgeron procède au soudage de cette matière première qu’il transformera en produit fini. Les lames de Luca Distler sont faites d’un alliage spécial de trois types d’aciers (dont il refuse de nous révéler la nature). La « trousse », un assemblage de cinq couches d’acier, doit être chauffée uniformément. Ces bandes de métal rougeoient sous le feu crépitant. Luca Distler les plie sur elles-mêmes, comme s’il refermait un livre. D’une main, il s’empare d’une lourde masse et les frappe à plusieurs reprises. 58
Puis, il les replie de nouveau avant de frapper encore. Les bandes se fondent les unes aux autres tandis que Luca Distler les fait chauffer, les frappant et les repliant, encore et encore, jusqu’à ce qu’elles forment une barre de 320 couches d’acier de Damas de grande qualité. Le secret de ce métal d’exception ? La tradition. Ses multiples couches confèrent à la lame sa dureté et ses magnifiques motifs. Chaque couteau est unique. Chacun possède une personnalité qui lui est propre. Être coutelier est un travail exigeant. « C’est comme passer sa journée à soulever des poids… De lourds et brûlants haltères. Le soir, je suis exténué », confie Luca Distler. Et les couteaux sont alors loin d’être terminés. Il doit forger de nouveau les barres de métal avant de façonner les lames. Puis, les émoudre, les poncer et les affûter. Il traite ensuite les lames à l’acide pour faire ressortir leurs motifs, puis il les polit jusqu’à ce
qu’elles brillent comme un miroir. Les manches sont sculptés dans du bois de fer du désert ou dans des cornes de buffle d’Asie, ou fabriqués avec du chêne des marais et de l’ivoire de mammouth trouvé dans le pergélisol russe. Une fois que tout ce travail est fait, les lames sont gravées puis ornées de rivets en argent et incrustées de nacre. Parfois, Luca Distler et son collègue, Florian Pichler, réalisent des couteaux sur mesure pour des clients ; c’est ainsi que, dans le passé, ils ont créé des manches ornés de nus ou de têtes de léopard. Ces deux perfectionnistes peuvent travailler jusqu’à 300 heures sur un seul couteau, alors que d’autres sont terminés en moins de deux jours. Leur passion semble friser la folie. Mais c’est sans doute la raison pour laquelle leurs lames sont saisissantes de beauté et si tranchantes qu’elles peuvent littéralement couper un cheveu en quatre.
PIANO
photos SEIFERT/UEBLER MESSER WERK ; DAMASZENERSCHMIEDE DISTLER&PICHLER ; C. BECHSTEIN
L’OREILLE ABSOLUE Construire un piano à queue est une entreprise complexe. Le premier défi consiste à sélectionner le bois pour la table d’harmonie – l’âme de l’instrument. Le fabricant C. Bechstein n’a recours qu’à de l’épicéa de montagne, qui pousse à plus de 1000 m d’altitude. Les autres composantes peuvent être en érable, en hêtre ou en acajou. Un piano à queue compte environ 20 000 pièces (dont le couvercle, le boîtier, les touches, les marteaux, le mécanisme et le cadre) et nécessite une année entière de fabrication. Katrin Schmidt exerce un rôle particulièrement délicat dans ce processus : elle doit accorder les 230 cordes de l’instrument afin que chacune ait la bonne sonorité. Sa tâche est d’autant plus difficile qu’elles sont en acier et ont tendance à se distendre avec le temps. Sans compter qu’un jeune piano est sensible à la moindre variation de température et d’humidité. Le travail de l’accordeuse s’apparente à celui d’un funambule ou, mieux encore, à celui d’un chef de chœur qui tente d’harmoniser des voix d’enfants chantant à tue-tête différentes mélodies. Pour accomplir sa mission, Katrin Schmidt accorde l’instrument à plusieurs reprises, ajustant chacune de ses 230 cordes au moins quatre fois. Celles-ci sont retenues par des chevilles qu’elle serre ou desserre à l’aide de clés d’accord afin d’obtenir la bonne tension ; un processus qui requiert une patience d’ange et une bonne oreille. Elle utilise un diapason pour émettre une note de référence, après quoi, elle ne se fie qu’à son ouïe. « Maîtriser cette technique exige beaucoup de pratique, confie-t-elle. Lorsque j’ai commencé mon apprentissage, je passais trois heures par jour à ne faire qu’une chose : accorder, accorder, accorder. » Viennent ensuite les marteaux, dont les têtes frappent sur les cordes. Il est primordial que ceux-ci soient parfaitement alignés. Une variation d’un dixième de millimètre de hauteur ou d’espacement peut affecter considérablement la sonorité du piano. Katrin Schmidt les ajuste jusqu’à ce que l’instrument sonne parfaitement juste. Elle se charge ensuite des 88 têtes recouvertes de laine mérinos d’Australie, dans lesquelles elle plante un piquoir afin de modifier leur forme, leur densité et leur élasticité, et d’obtenir ainsi le timbre et le volume désirés. L’harmonisation est une forme d’art difficilement explicable. C’est comme si chaque marteau avait une personnalité et une vie distinctes. « C’est quelque chose qu’on ressent », dit Katrin Schmidt au sujet de cette étape sacrée de la fabrication d’un piano à queue. C’est en lui insufflant la vie qu’on donne à l’instrument sa propre voix. Un art et une vocation en soi. Et un plaisir pour les oreilles.
BONNES NOTES Katrin Schmidt doit accorder à maintes reprises chacune des 230 cordes d’un piano à queue. Une tâche qui nécessite une bonne oreille.
VIRTUOSE L’instrument fait la musique. Les riches tonalités d’un piano à queue sont obtenues grâce à des mois de travail et à des milliers d’éléments de grande précision.
C. BECHSTEIN SEIFHENNERSDORF, EN ALLEMAGNE
Fondée à Berlin en 1853, la maison C. Bechstein est rapidement tombée dans les grâces de plusieurs familles royales. Aujourd’hui, ses pianos sont fabriqués à Seifhennersdorf, en Saxe, et distribués partout dans le monde. Ils ont été utilisés pour une foule d’enregistrements jazz, classiques et pop ; les concertistes considèrent le logo de C. Bechstein comme un gage de grande qualité. Le timbre de ces pianos est reconnaissable entre tous : chaud, coloré, lyrique et d’une grande pureté, qu’on joue une douce ritournelle ou un puissant fortissimo. Évidemment, seule une oreille aguerrie peut reconnaître un piano d’une telle qualité. Mais pour ceux qui ont ce don, l’expérience est sublime. BECHSTEIN.COM
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PERFORMANCE
NEZ FIN Johann Paintmeier au travail. On peut sentir la qualité d’un bois.
BOIS
PRÉCIEUSES ESSENCES Johann Paintmeier est l’expert en placage de bois du fabricant d’armoires de cuisine Bulthaup. Petit, il avait déjà cette aspiration : « Je voulais travailler le bois. » Aujourd’hui, son emploi consiste à sélectionner les plus belles pièces, des essences avec un magnifique grain. À l’occasion, il lui arrive même de tomber sur du chêne des marais vieux de 2000 ans.
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BULTHAUP À BODENKIRCHEN, EN ALLEMAGNE Entreprise familiale depuis trois générations, l’usine bavaroise Bulthaup est un chef de file dans la fabrication de meubles de cuisine. De magnifiques essences de bois sont au cœur de ses créations. Parce que l’environnement dans lequel on prépare et apprécie la nourriture devrait refléter ses origines : la nature. B U LT H AU P. C O M
Les différentes essences ont-elles aussi un caractère qui leur est propre ? Oui. Par exemple, l’olivier est très expressif. Il suffit de regarder son grain. Ses motifs peuvent être simples ou extravagants. Et les couleurs diffèrent d’un arbre à l’autre. Parfois, jaune. Parfois, presque vert. Ou teinté de rouge. Certaines essences sont-elles plus sérieuses ? Oui, comme le chêne. C’est un classique. Un bois solide qui varie peu dans sa couleur et sa structure. Le chêne vit à nos côtés, dans nos maisons, depuis plus de 2000 ans. Le noyer est plus exotique, avec sa jolie teinte foncée. Il évoque la joie de vivre. Comment transformez-vous un arbre en meuble de cuisine ? Nous faisons d’abord tremper le tronc pendant plusieurs jours dans un bassin entre 50 °C et 60 °C, afin de protéger le bois avant sa transformation. Puis, on le coupe et on le brosse pour lui donner une belle texture. Les feuilles de bois sont ensuite entreposées avant d’être manufacturées. Que faites-vous lorsque vous ne travaillez pas le bois ? Je suis un passionné de gravure, une activité qui me relaxe. Et j’aime passer du temps dans la forêt que j’ai achetée il y a 20 ans. Je regarde les arbres et j’imagine ce qu’ils deviendront dans un siècle, quand les générations futures se promèneront encore, espérons-le, sous leurs feuilles.
photo bulthaup
Allez-vous souvent en forêt ? Évidemment. C’est un lieu contemplatif. J’aime la forêt. Elle est la source de mon travail. Nulle part ailleurs je ne me sens aussi près des arbres. D’où provient le bois que vous utilisez ? Je me rends jusqu’à 12 fois par année chez des détaillants en Allemagne et ailleurs en Europe pour examiner leur stock. On passe la plupart de nos commandes au printemps. C’est le meilleur moment de l’année pour acheter, puisque les arbres sont abattus et transformés en hiver. Est-ce qu’on pourrait comparer le bois d’œuvre à du caviar ? Oui. Il arrive qu’on mette la main sur des essences rares, comme du chêne des marais. Habituellement, les détaillants nous appellent dès qu’ils en ont. Du chêne des marais ? Lorsque ça arrive, c’est un vrai coup de chance, surtout si le bois convient au placage ! Le tronc doit être intact. Pour que ce soit le cas, l’arbre doit être resté enfoncé dans la tourbe, et donc privé d’oxygène, pendant 1000 à 3000 ans. Comment déterminez-vous l’âge d’un arbre ? On peut le savoir très précisément grâce à une analyse au carbone. Récemment, on nous a proposé un chêne des marais de 2970 ans. Qu’est-ce qui le distingue des autres ? Sa coloration très foncée, qui peut aller du gris-noir au brun sombre. C’est une essence très raffinée. Peu de gens ont du bois d’une telle qualité dans leur cuisine. Comment reconnaissez-vous un bois de qualité ? En examinant son grain. Comment l’arbre a-t-il poussé ? Est-ce qu’il plaît suffisamment à l’œil pour être transformé en objet d’une grande beauté ? Je dois sentir le bois. Le toucher. La dureté et le grain sont des facteurs déterminants. Je dois aussi le sentir. Il doit embaumer d’une odeur de nature. Les arbres ont-ils chacun leur personnalité ? Oh oui ! Chaque tronc est unique, comme une empreinte digitale. On peut lire l’histoire d’un arbre dans son grain, le type de sol et le climat dans lesquels il a poussé. C’est une matière vivante. Les arbres ont le pouvoir de rendre nos cuisines uniques.
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performance
Le choc des générations Franz Joseph Blomendahl et sa fille Jacqueline sont on ne peut plus heureux de rouler en Afrique du Sud à bord d’un VUS GLE 550e 4MATIC. Il adore le vin, elle aime l’air pur. Et cette virée en voiture est une nouvelle expérience tant pour l’un que pour l’autre. te x te M a r c B i e l e f e l d p h o t o s P a u l C o c k s Modèle européen présenté
Q
ui conduit ? Voilà une question qui ravive le conflit des générations. La réponse ne se fait pas attendre : papa. Franz Joseph et Jacqueline Blomendahl sont devant leur maison de Grabouw, une ville située à 50 km du Cap, en Afrique du Sud. Ils montent à bord d’un VUS GLE 550e 4MATIC de Mercedes-Benz flambant neuf et en referment les portières. L’odeur du cuir. L’immense écran. Le père s’empare du volant, la fille pianote sur le pavé tactile de la console centrale. Franz Joseph a toujours eu des Mercedes-Benz. À 18 ans, il achetait sa première 240 D (une « Stroke 8 ») et, aujourd’hui, il possède deux cabriolets SL, un S 500 de série 221 et une familiale de Classe C. Le vinificateur est toutefois prêt à essayer quelque chose de nouveau. Un modèle qui le transportera vers le futur et qui appartient à la nouvelle génération de véhicules dotés de la technologie hybride. Le GLE 550e 4MATIC mise sur une multitude de systèmes d’aide, dont l’ionisation de l’air ambiant. Grâce à ces innovations, la conduite est plus sécuritaire, plus efficace et plus agréable. Sans compter que la voiture a une longueur d’avance en matière de protection de l’environnement. C’est la première fois que Franz Joseph Blomendahl est au volant d’un véhicule hybride rechargeable qui allie moteur V6 à essence et propulsion électrique. Sous le capot de ce luxueux tout-terrain, on trouve une batterie lithium-ion qui peut être rechargée au moyen d’une prise standard. En mode électrique, elle permet de parcourir 30 km à des vitesses pouvant aller jusqu’à 120 km/h, tout en maintenant un taux d’émission de CO2 de 0 g/km. Franz Joseph Blomendahl appuie sur le frein et enfonce le bouton de démarrage. Les voilà prêts à partir !
FRANZ JOSEPH BLOMENDAHL, 53 ans Occupation : vinificateur, entrepreneur et distillateur Distance parcourue par mois : de 6000 à 10 000 km Devise : Soyez heureux, vous pourrez ensuite aider les autres à le devenir.
JACQUELINE BLOMENDAHL, 22 ans Occupation : étudiante en mathématiques commerciales Distance parcourue par mois : 2000 km Devises : Rire et apprendre. Plaisir et vitesse.
LE PÈRE Écoute, on n’entend rien ! Le silence absolu. Je n’en crois pas mes oreilles. LA FILLE Il était temps ! C’est un VUS intelligent. Ces véhicules consomment de moins en moins d’essence. C’est là que nous allons. On doit poursuivre dans cette voie. LE PÈRE Chaque fois qu’on freine, on accumule de l’énergie, un principe qu’on appelle la récupération. La batterie se recharge aussi automatiquement quand on roule. N’est-ce pas génial ? Plus de perte d’énergie. LA FILLE C’est ingénieux. Mais ils auraient pu y penser avant, non ? LE PÈRE Tu n’as pas idée à quel point développer ce type de technologie peut être compliqué… Ta génération voudrait un avenir sans émissions de GES, mais ce n’est pas si simple. Ça prend du temps. Ils sont des milliers à y travailler. LA FILLE Je pense que tu peux avancer, maintenant. mercedes-magazine.ca
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Afrique du Sud
Beauté sauvage Dans le sens horaire : la réserve naturelle des Hottentots Holland ; False Bay ; Jacqueline prend enfin le volant.
Franz Joseph Blomendahl appuie sur l’accélérateur. Plutôt que de tourner à pleins gaz, le moteur est activé par l’électricité. Presque sans bruit, le véhicule franchit le portail et prend la direction des régions viticoles de Grabouw et d’Elgin, à l’est du Cap. Le paysage qui s’y déploie évoque la Méditerranée avec ses cyprès, ses cactus et ses protées royales qui poussent à flanc de montagne. L’Afrique du Sud en hiver. Un inspirant panorama. Le fait que cette balade père-fille produise peu d’émissions de CO2 revêt une importance particulière pour Jacqueline Blomendahl. Pour elle, l’expression « sans émissions » n’est pas qu’un simple slogan, elle a une véritable signification. Quand elle-même et sa famille vivaient à Osnabrück, en Allemagne, la fillette souffrait de bronchite, d’asthme et de différentes allergies. Le matin, sur le chemin de l’école, elle était souvent prise de quintes de toux. C’est le médecin qui lui a recommandé de séjourner un bon moment dans une région 64
C’est un VUS intelligent. Ces véhicules consomment de moins en moins d’essence. JACQUELINE BLOMENDAHL
où l’air serait pur et le climat, sec. Les Blomendahl se sont donc rendus en Afrique du Sud pour y passer leurs vacances. À peine une semaine plus tard, Jacqueline cessait de se plaindre : elle respirait librement pour la première fois de sa vie. Un poids énorme qu’on enlevait de ses épaules et un grand soulagement pour sa famille. Franz Joseph, qui avait une formation d’ingénieur spécialisé en vins, de vinificateur et de producteur de whisky, a alors envisagé la possibilité de relocaliser son entreprise. Il a vu les vignobles, les coteaux et les montagnes près du Cap. Il a senti la chaleur du soleil. Lui et les siens n’ont pas hésité longtemps : ils ont plié bagage pour emménager en Afrique du Sud. Le tout-terrain bifurque vers l’ouest et emprunte la route de campagne qui mène à Gordons Bay. L’Atlantique Sud apparaît dans le pare-brise. La houle en provenance de l’Antarctique atteint plusieurs mètres de hauteur. Cette beauté naturelle ne
performan c e
technologie veille sur le père et la fille alors qu’ils parcourent la côte escarpée en direction de Sparks Bay et de Mermaid Pool. LA FILLE Regarde, je peux tout contrôler à partir d’ici : les teintes de l’éclairage intérieur, le dispositif de stabilisation en cas de vent latéral, l’aide à la signalisation. Papa, la batterie est à 70 %. On roule en mode hybride. LE PÈRE Pourtant, je n’ai touché à rien. LA FILLE Ça se fait automatiquement. C’est à mon tour, maintenant ? LE PÈRE Oui, bientôt. Les voilà maintenant qui roulent sur Ocean Road. Les vagues se fracassent sur le rivage et une légère brise s’engouffre à travers la fenêtre. À l’est, les falaises semblent s’illuminer. Franz Joseph emprunte un chemin de terre, contourne un rocher et immobilise le véhicule face à l’océan. Dans l’herbe, une roche porte une inscription : « David Warrior Lilienfeld ». David Lilienfeld était l’un des meilleurs bodyboardeurs d’Afrique du Sud. Le 19 avril 2012, alors qu’il surfait ici même à Koeël Bay, un grand requin blanc de quatre mètres l’a attaqué. Il est mort des suites de ses blessures. Ce pays n’est pas toujours la douceur incarnée. Franz Joseph contemple le large et prend une grande inspiration. En tant que vinificateur, il apprécie le climat sud-africain bien plus pour ses cépages que pour ses vagues. Depuis maintenant plusieurs années, il produit ici ses propres vins et en exporte annuellement quelque 50 000 bouteilles vers la Chine, l’Allemagne et le continent africain. D’excellents crus, mais aussi du brandy, du whisky et des spiritueux de très bonne qualité, comme le Old Swede, qu’il a élaboré dans sa distillerie. Alors que le père et la fille remontent vers le nord, les montagnes de Hottentots Holland se dessinent à l’horizon. Grâce à sa propulsion hybride, le GLE alterne entre les modes électrique et à essence, passant d’un doux ronronnement au grondement du moteur à combustion. Franz Joseph manœuvre adroitement le véhicule à travers les sinueuses routes de campagne.
Joyeux tandem Passage obligé pour une famille de vinificateurs : le père et la fille visitent une cave à vin au terme de leur balade.
parvient toutefois pas à distraire le père et sa fille, tous deux absorbés par les fonctionnalités du GLE. LA FILLE C’est quoi, ça ? Il y a une lumière rouge dans ton rétroviseur extérieur. LE PÈRE C’est l’avertisseur d’angle mort. Il nous prévient quand une voiture nous suit d’un côté ou de l’autre et qu’on ne peut pas la voir à moins de regarder par-dessus notre épaule. LA FILLE C’est ce que je disais : ce VUS pense par lui-même. Il a un œil sur tout ce qui se passe. Est-ce que je peux conduire, maintenant ? LE PÈRE Oui, bientôt. Digne représentante de la génération numérique, Jacqueline fait glisser son doigt sur le pavé tactile pour accéder aux nombreuses fonctionnalités du GLE. Un graphique apparaît à l’écran, illustrant le flux d’énergie et la consommation de carburant. C’est comme si la voiture s’expliquait. Sa
Appuie sur l’accélérateur, tu verras de quoi ce VUS est capable. FR ANZ JOSEPH BLOMENDAHL
LA FILLE Alors, je peux prendre le volant ? LE PÈRE C’est bon. Je te cède la place. LA FILLE C’est fou ! Tout fonctionne uniquement à l’électricité en ce moment. Tiens, regarde l’écran. La batterie est chargée à 50 %. Et c’est un VUS entièrement équipé, rien de moins. LE PÈRE Appuie sur l’accélérateur, tu verras de quoi il est capable. LA FILLE Pourquoi pas… Tu sais à quel point j’aime la vitesse ! Le père et la fille changent de place. Dès que Jacqueline appuie sur l’accélérateur, le mercedes-magazine.ca
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Une bouffée d’air frais Dans le sens horaire : le père et sa fille prennent une pause pour admirer le paysage ; le GLE parcourt le parc national ; les routes vallonneuses de la région viticole d’Afrique du Sud.
i VUS GLE 550e 4MATIC Moteur/Performance Moteur V6 de 3,0 L, 436 ch (moteurs à essence et électrique combinés) de 5250 à 5500 tr/min ; vitesse maximale de 245 km/h
Transmission 7G-TRONIC PLUS
Consommation de carburant (modèle 2017) Ville : 11,8 L/100 km Autoroute : 10,3 L/100 km Moyenne : 11,1 L/100 km
Consommation d’électricité (kWh/100 km) Pondérée : 18,0–16,7
Émissions de CO2 (g/km) Combinées : 84–78 Les données peuvent varier selon les jantes/pneus.
Système de démarrage/d’arrêt ECO Oui Les données ci-dessus ne sont pas celles d’un véhicule en particulier et ne font pas partie de l’offre du produit ; elles ne sont fournies qu’à des fins de comparaison des modèles.
M E R C E D E S - B E N Z . CA
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moteur V6 se met en marche et révèle toute sa force. Le GLE file en direction nord sur l’autoroute qui succède aux routes de campagne. Une fois le rétrogradage activé, le moteur électrique entre en jeu pour décupler la puissance du véhicule. Bientôt, les douces collines des régions viticoles de Stellenbosch et de Franschhoek se profileront à l’horizon, baignant dans la douce lumière rosée de cette fin d’après-midi. Jacqueline ralentit, actionne le clignotant et tourne à gauche sur un chemin poussiéreux. Elle s’arrête sur le côté, car elle vient d’apercevoir des singes.
LA FILLE Il y a des babouins là-haut dans les arbres. Toute une famille. LE PÈRE Oui, je les vois. La mère et ses petits. Le mâle est énorme. Allons voir ce qu’ils fabriquent. LA FILLE En principe, ils devraient s’enfuir, mais je vais avancer tout doucement pour ne pas les déranger. LE PÈRE Ce VUS est mieux qu’un autobus pour les safaris. Le silence dans la nature. LA FILLE C’est ce que je te disais. Propre et silencieux. C’est la voie de l’avenir. Même les singes sont d’accord !
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À L’assaut du bitume Le Concept EQ de Mercedes-Benz parcourt les rues du quartier Schöneberg, à Berlin.
P ER F O R M ANCE
Intelligence électrisante Ouvrant la voie à une nouvelle génération de véhicules, le Concept EQ de Mercedes-Benz fait déjà tourner les têtes dans les rues de Berlin. T E X T E J Ö RG H E U ER
P H O T O S T I M A D LER / D A I M LER AG
C
onduire le sublime et futuriste Concept EQ de Mercedes-Benz, c’est vivre une expérience inoubliable. Ce véhicule suscite le même genre d’effet qu’un rugissant bolide de Mercedes-AMG flambant neuf. Les passants s’arrêtent, bouche bée, se pâmant d’admiration, le pointant du doigt ou brandissant leur téléphone pour le photographier. Pour cette toute première balade à bord du Concept EQ, nous mettons le cap vers le campus de l’EUREF, un centre de recherche du district de Schöneberg, qui est aussi un projet pilote en matière d’énergie renouvelable. Nous parcourons ensuite les rues de cet ancien parc industriel, situé au cœur même de Berlin. Ce coupé VUS à quatre portes est on ne peut plus sophistiqué. Sa carrosserie aux lignes épurées est d’une qualité sans compromis, alors que son habitacle spacieux est à la fois fonctionnel, organisé et agréablement aéré. Bien entendu, il ne s’agit pas d’un bolide de Mercedes-AMG et encore moins d’une voiture sport, mais plutôt d’une révolution sur quatre roues. La Mercedes-Benz de demain.
Direction : innovation Ce véhicule dont le nom est inspiré par « l’intelligence électrique » ne produit pas d’émissions de GES, mais suscite mille émotions. Ses portes s’ouvrent grâce à une commande tactile. Les traditionnels rétroviseurs intérieur et latéraux ont été remplacés par des écrans à affichage en temps réel. Et même s’il est toujours doté d’un volant, d’une pédale de frein et d’un accélérateur, ce sont les commandes intuitives et les fonctions sen< sibles au toucher de la console centrale qui mercedes-magazine.ca
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PERFORMANCE
Grâce à une puissance maximale de
408 ch
, ce véhicule concept est un condensé d’énergie à l’état pur. Comme le promet Mercedes-Benz, les nouveaux modèles offriront énormément de puissance, avec des capacités améliorées côté moteur et batterie.
priment. Son habitacle est agrémenté de touches de cuir, d’un éclairage ambiant et d’écrans à DEL intégrés aux dossiers des sièges avant. Qu’on soit au volant ou simple passager, on ressent l’énergie positive que le véhicule dégage. Mis à part le réglage électrique des sièges (une tradition chez Mercedes-Benz) et les ceintures de sécurité conventionnelles, presque tout a été repensé pour faire place à la sensualité, à la sensibilité et à l’avant-gardisme. Un grand écran semble pratiquement flotter dans l’habitacle. En roulant, on entend à peine les deux moteurs électriques, si ce n’est un léger bruissement. Malgré tout, les gens se retournent sur notre passage. Le Concept EQ se démarque tant par son design léché que son esthétique électrisante. Et dire qu’il s’agit d’un véhicule concept… du moins, pour l’instant. 70
i ÉTOILE MONTANTE La nouvelle sous-marque EQ englobera tous les futurs véhicules électriques, de même que les produits et services qui s’y rattachent. Alimenté par batterie et doté de caractéristiques intelligentes, le Concept EQ est révolutionnaire.
Selon les ingénieurs qui l’ont imaginé, son design laisse entrevoir l’évolution de la mobilité. Cette nouvelle gamme de Mercedes-Benz devrait être offerte au Canada dès 2020. On prévoit également lancer un éventail de services afin de créer un écosystème holistique autour de la marque EQ. En misant sur des données récoltées par différents capteurs, ces modèles se rapprocheront encore davantage de la conduite automatisée.
Le plaisir de conduire Ce véhicule concept impressionne par son moteur électrique développant 408 ch, son auto nomie maximale de 500 km et sa batterie d’une capacité de 70 kWh. Totalement électrique, totalement connecté et totalement fiable sur la route. Sans oublier ses caractéristiques de
irrésistible Le Concept EQ de Mercedes-Benz fascine les passants, dont Janine Kuhla et Michael Nakoinz (à droite), qui ont été invités à en faire l’essai.
performance qui promettent un plaisir infini : de 0 à 100 km/h en moins de cinq secondes. Il y a beaucoup plus de puissance sous son capot qu’on pourrait l’imaginer. Tandis que nous poursuivons notre virée à travers l’ancien parc industriel, le Concept EQ continue d’attirer les regards. Calés dans nos sièges, nous imaginons ce que pourrait devenir notre quotidien avec un tel véhicule. Un jeune homme le dévore des yeux. Pour peu, il se pencherait et embrasserait la calandre virtuelle particulièrement lumineuse. Cette réaction enthousiaste vaut à Michael Nakoinz le premier prix : conduire le Concept EQ. « Je n’en reviens pas. C’est comme si l’avenir venait à notre rencontre », lance-t-il à sa copine, Janine Kuhla, lorsque le Concept EQ passe devant
Ce véhicule concept propose une autonomie allant jusqu’à
500 km.
Avec cette nouvelle gamme de véhicules entièrement électriques, Mercedes-Benz pourrait bien devenir la référence en matière de mobilité.
Je n’en reviens pas. C’est comme si l’avenir venait à notre rencontre. M I C H A EL N A K O I N Z , p a s s an t
eux pour la première fois. En un rien de temps, il s’avance devant elle, s’empare de son téléphone et prend quelques clichés du véhicule. C’est à ce moment-là qu’on lui dit que c’est son jour de chance. Avec un grand sourire, il accepte sa récompense : un essai routier. Le couple monte à bord, chacun boucle sa ceinture et ils s’éloignent doucement du trottoir. Nous les retrouvons, trois tours de quadrilatère plus tard, pour récolter leurs impressions. « Ces quelques minutes étaient magiques, simplement inoubliables, affirme Michael Nakoinz. J’ai l’impression d’être un capitaine Kirk du xxie siècle. Sincèrement, j’adorerais conduire ce genre de véhicule ou plutôt le laisser me conduire. J’en veux un… et le plus tôt sera le mieux ! » mercedes-magazine.ca
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P er f o r m ance
Classe lasse neige
L
e dossier se presse contre la partie gauche de mon dos tandis que je tourne à droite sur la piste. C’est comme si la voiture voulait me réconforter par une étreinte pendant que je dérape sur la glace. Là réside la beauté du siège multicontour pour conduite dynamique de Mercedes-Benz : il se gonfle légèrement pour soutenir notre corps dans les virages. Malgré la surface glissante, je n’ai pas peur. Je veux déraper encore. Après tout, c’est pour ça que je me retrouve à Gimli, au Manitoba, en plein mois de février : tester les récents modèles de Mercedes-AMG sur le lac Winnipeg glacé – tout comme une centaine de participants venus de partout en Amérique du Nord. (Le programme est offert à tous, que l’on soit ou non propriétaire d’une Mercedes-Benz.) Depuis une douzaine d’années, Mercedes-AMG donne des formations de conduite dans une ville de Suède située près du cercle arctique. Lorsqu’il a été question d’organiser une édition canadienne du programme de conduite hivernale sportive 72
Ou comment devenir un as de la glace grâce à l’édition canadienne du programme de conduite hivernale sportive AMG. TEXTE KAREN BURSHTEIN p h oto s U li J o o ss
AMG, on a cherché un endroit similaire de ce côté-ci de la mare. C’est Gimli qui a été choisi. Ce village de pêche situé à une heure de Winnipeg donne sur un des plus grands lacs d’eau douce du monde. C’est accueillant, froid, mais idéal pour ces cours spécialisés d’une durée de trois à quatre jours. On y enseigne la conduite de haute performance avec des exercices de sous-virage, de survirage, de freinage, de glissement et de dérapage sur quatre circuits de glace conçus par des experts. J’entame cette journée de classe en rejoignant le groupe pour la portion théorique quotidienne. Même si nous sommes arrivés seulement la veille, une bonne camaraderie s’est déjà installée entre les élèves. L’ambiance est à la plaisanterie alors qu’un instructeur répond à nos questions sur la courbe de couple à adopter pour éviter que notre véhicule « morde trop la glace ». S’ensuivent quelques précisions sur les manœuvres de dérapage contrôlé enseignées hier. Comme je le remarquerai tout au long la formation, le ton est léger même si les sujets sont sérieux.
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photos Auswahl Kevin (Amg Arena et danny kok)
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Une fois la leçon terminée, nous sommes prêts à partir ! Notre convoi descend la somnolente First Avenue jusqu’au lac. Arrivés au port, nous apercevons Travis Toomey qui balaye une mince couche de neige. Il est resté debout toute la nuit pour aménager et entretenir les pistes. C’est d’ailleurs lui qui s’assurera chaque matin que celles-ci sont en parfaite condition. Le décor devant nous est pittoresque : des cabanes de pêche parsèment le lac sous un ciel infiniment bleu, et des fissures se sont formées autour des pistes, créant de magnifiques motifs. Même s’il n’y a aucun danger à conduire sur la glace – elle fait un mètre d’épaisseur –, c’est une source de préoccupation pour les nouveaux élèves. Du moins, au début. « “ Est-ce que la glace peut céder ? ” C’est la première question qu’on nous pose », lance Danny
Plaisir hivernal Situé sur les rives du lac Winnipeg (le paradis de la pêche sur la glace), Gimli a été choisi pour accueillir l’édition canadienne du programme de conduite hivernale sportive AMG.
Kok, chef des instructeurs de l’Académie de conduite AMG et mon copilote pour la journée. Afin de calmer les esprits, les participants sont amenés à conduire sur le lac dès le premier soir. Un baptême du feu (ou, plutôt, de glace !), mais aussi une excellente initiation sous les étoiles ou, si on est chanceux, les aurores boréales. Les élèves sont divisés en deux équipes, ce qui leur permet d’avoir une formation personnalisée et de passer un maximum de temps au volant. Tandis qu’un groupe prend d’assaut la piste Laguna, un circuit étroit et sinueux de 1,8 km, conçu pour la haute vitesse, l’autre emprunte l’AMG ARENA, une boucle de 500 m en forme d’arachide. Au cours des prochains jours, nous pourrons tester la totalité des véhicules et des pistes, incluant la Tremblant, un autre circuit de 1,8 km composé de larges virages et conçu pour une vitesse moyenne, à l’instar de la Mosport, une piste de 2,1 km, alternant les segments haute vitesse et les chicanes. À bord d’une CLS 63 S 4MATIC, édition Avantgarde de Mercedes-AMG, Danny Kok et moi roulons en direction de la Dynamic, une zone de pratique de 1,6 km. Je fais quelques tours de piste, soulevant une fine couche de neige. Mon instructeur me donne quelques conseils élémentaires (« Regarde aussi loin que possible sur la piste ! » ; « Tout est dans l’usage qu’on fait des freins, de l’accélérateur et du volant. C’est la combinaison des trois qui permet de bien faire glisser la voiture. ») et me voilà prête à essayer les virages transitionnels et les longs dérapages. La plupart des élèves roulent à environ 120 km/h, mais le cours ne concerne pas tant la vitesse que la
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technique. « Au début, tout le monde veut aller vite, observe Danny Kok. Puis, on réalise que la vitesse, c’est bien, mais que le dérapage, c’est encore mieux. C’est lorsqu’on parvient à bien faire glisser la voiture d’un côté à l’autre, en étant parfaitement en contrôle, que le plaisir commence ! » Contrindiqués en ville, mais essentiels ici, les pneus à 400 crampons (fabriqués à la main par un couple de Suédois spécialement pour le programme) contribuent à l’expérience. Reste qu’une fois sur la glace, on part tous de zéro. « Les participants sont de niveaux différents : certains ont roulé sur une piste de course, d’autres ont une seule journée ou même pas du tout d’expérience, explique Danny Kok. Mais pour ce type de conduite totalement différente, ils sont tous novices. Ils font les mêmes apprentissages. C’est pourquoi cette formation d’hiver est si particulière. » En tournoyant sur les pistes, les élèves expérimentent les caractéristiques de maniabilité de chacun des modèles : de la berline C 63 S de Mercedes-AMG à propulsion, qui développe 503 ch, au CLA 45 4MATIC de AMG à traction intégrale, qui développe 375 ch. Sans compter le rapide et robuste CLS 63 S 4MATIC de Mercedes-AMG, qui donne encore plus de puissance aux roues arrière. (En 2018, le CLS 63 S 4MATIC sera remplacé par la berline E 63 S 4MATIC+.) Une fois le cours terminé, la cadence ralentit. C’est au tour de Gimli d’entrer en scène. La ville n’a pas ménagé ses efforts pour accueillir le programme – le maire fait même une apparition pour nous offrir des délices islandais, incluant du vinarterta, un gâteau étagé à la cardamome. Ici se trouve la plus grande communauté islandaise en dehors de l’Islande, et l’influence de ce peuple se fait sentir dans les boutiques et pâtisseries, sans compter le festival viking qu’on y organise chaque été. « Ils sont heureux de notre présence », dit Danny Kok, ajoutant que si Gimli est une populaire destination estivale, avec ses plages, ses bateaux et ses dorés fraîchement pêchés, il en est tout autrement durant l’hiver. L’hôtel peine à garder ses employés et plusieurs boutiques et restaurants ferment pour la saison. Heureusement, le charmant bistro Ship & Plough reste ouvert et c’est là que notre groupe se retrouve après les séances de pilotage sur le lac. Autres lieux de rassemblement prisés : les cabanes de pêcheur, qui sont bien aménagées et où des gens du coin nous ont invités à regarder des matchs des Jets de Winnipeg. Mercedes-AMG possède aussi sa propre cabane sur la glace, qui ressemble plutôt à un luxueux chalet en bois rond où l’on sert des collations, du café et du thé. C’est l’endroit idéal pour se réchauffer près du foyer lorsqu’il fait -30 °C et tisser des liens avec les autres élèves, dont la plupart possèdent une Mercedes-Benz. Sheree, une Torontoise qui travaille dans l’industrie automobile, affirme n’avoir jamais
Performance
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Danse sur glace Les participants mettent à l’essai des véhicules de Mercedes-AMG sur une série de pistes en glace.
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Les participants peuvent se vanter d’avoir conduit sur le lac Winnipeg. photos Auswahl Kevin (danny kok)
vécu une telle expérience et semble prête pour d’autres défis du genre. David, de Vancouver, conduisait aussi pour la première fois sur la glace, mais pour la troisième fois sur une piste. « Sur la glace, c’est très différent, plus rapide et plus technique : il y a plus de dérapages et on passe plus de temps sur le circuit. » L’avantage de ce cours, selon lui ? « Je vais espérer qu’il neigera plus souvent à Vancouver », plaisante-t-il. Israel, originaire de Mexico, a été impressionné par l’ambiance qui régnait pendant la formation, de même que par les modèles de Mercedes-AMG, incluant celui de la Classe G de Mercedes-Benz, utilisé comme véhicule de renfort. « Comme durant le premier jour, lorsque je suis resté pris dans la neige », lance-t-il en riant. Quant à ceux qui vivent dans les environs, ils pourront désormais se vanter d’avoir conduit sur le lac Winnipeg. Allan, de Brandon, au Manitoba, affirme avoir été impressionné par les installations, mais surtout par les instructeurs et leur façon de mettre les élèves en confiance. Même si la plupart d’entre nous n’affrontent pas de telles conditions au quotidien, il suffit de regarder l’impressionnante surface gelée pour mesurer notre chance d’avoir pu tester les limites de ces voitures (et les nôtres). Une expérience qui nous sera utile bien après notre séjour à Gimli.
informations
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Pour plus d’
P er f o rman c e
ARGUMENT DE VENTE Britta Seeger prend la pose aux côtés du nouveau coupé de Classe E de Mercedes‑Benz.
photo Daimler AG
V
LES CLIENTS D ’A B O R D
ous êtes de retour en Allemagne après avoir travaillé pendant de nombreuses années en Corée du Sud et en Turquie. Selon vous, existe-t-il un client « international » ? Autrement dit, les consommateurs désirent-ils la même chose à Séoul, à Istanbul ou à Stuttgart ? Les clients de Mercedes-Benz à travers le monde ont certainement un point en commun : de hautes exigences concernant le service et la qualité. Ils veulent ce qu’il y a de mieux. Leurs attentes sont les mêmes, et c’est ce qui dicte les standards auxquels chaque employé de Mercedes-Benz répond. Cela dit, je remarque que leurs demandes varient beaucoup et sont de plus en plus personnalisées. Pouvez-vous donner des exemples de ces différences ? Prenons l’Asie : Séoul compte environ 10 millions d’habitants. On pourrait croire qu’il y a une forte demande pour les voitures compactes, comme la smart. Mais, en fait, les Coréens aiment particulièrement les berlines, comme celles de la Classe E et de la Classe S. En Chine, les véhicules à sept places sont très populaires. L’usage qu’on fait d’une voiture là-bas n’est pas la même : on veut transporter plus de passagers qu’en Allemagne, par exemple. Enfin, nos clients en Europe et en Amérique du Nord ont un tout autre rapport à la mobilité. Mercedes-Benz résume sa nouvelle stratégie par l’acronyme CASE. Quels sont les quatre piliers sur lesquels elle repose pour satisfaire aux demandes de la clientèle ? CASE cherche des solutions aux problèmes quotidiens, que l’on conduise une smart ou une Mercedes-Maybach. Cet acronyme signifie Connectivité, Autonomie, Service d’autopartage et Électromobilité. La recherche dans chacun de ces secteurs a pour mission première de répondre aux besoins et aux désirs de notre clientèle. C’est un principe que nous appelons « innovation centrée sur l’humain ». Pour y parvenir, nous tentons de répondre à une multitude de questions en gardant nos clients en tête. Par exemple, comment être connecté en permanence pour pouvoir contrôler tous les aspects de son véhicule avec son téléphone intelligent ? Pensons aussi à l’avènement de la voiture autonome. Quelle sera notre expérience routière si on n’a plus besoin de se tenir derrière le volant ? L’électromobilité est également une de nos grandes préoccupations.
Britta Seeger siège au conseil d’administration de Daimler AG depuis janvier 2017. C’est elle qui est responsable des ventes des véhicules Mercedes-Benz. À ce propos, quelle est sa vision ? E n t r e v u e de C H R I S N E I M Ö C K
BRITTA SEEGER Britta Seeger est à l’emploi de Daimler AG depuis 1989. Son travail au sein de l’entreprise l’a menée jusqu’en Corée du Sud et en Turquie.
Comment se rendre du point A au point B de façon écologique (sans produire d’émissions de GES) et pratique (sans avoir à recharger la batterie pour de longues distances) ? Le « S » de CASE, pour Service d’autopartage, est aussi centré sur les gens, car son principal objectif est la mobilité partagée. Comment offrir des solutions de transport individuel qui répondent au désir de flexibilité de beaucoup de gens ? Nous pouvons compter sur de brillants experts pour répondre à ces questions et à bien d’autres encore. Selon vous, le concept de « client » est-il en mutation ? Oui, car éventuellement, nos clients ne seront plus forcément propriétaires d’un de nos véhicules. Nous accordons une importance croissante aux services de mobilité comme car2go, qui permet de réserver un véhicule de MercedesBenz ou une smart quand on en a besoin, ou moovel, une application offrant des solutions personnalisées pour les déplacements individuels. Les tendances actuelles prennent ce genre de direction. Comment Mercedes-Benz peut-elle fidéliser la nouvelle génération, qui est à la fois nomade et connectée ? En leur offrant des produits et services adéquats. L’interconnectivité occupe une importance croissante dans la conception de nos véhicules. Comment restez-vous branchée sur les nouvelles tendances numériques ? En tant qu’entreprise, nous observons attentivement leur progression. Sans compter que j’ai mes propres chasseurs de tendances : mes adolescents et leurs amis. Ils ne lisent pas les journaux ni les magazines, ne regardent pas les nouvelles à la télé, mais cela ne les empêche pas d’être bien informés. Ils sont impitoyables lorsqu’on leur demande leur avis sur la manière dont MercedesBenz fait usage des réseaux sociaux. Vous dites que rien n’égale un contact personnalisé avec les clients. Pourquoi croyezvous ça ? D’abord, j’accorde personnellement beaucoup d’importance aux échanges et aux contacts humains. De plus, Mercedes-Benz a pour objectif d’offrir les meilleurs produits et services à sa clientèle. Nous voulons que notre esprit novateur et notre passion pour l’histoire et la tradition de la marque soient palpables dans tout ce que nous faisons. Et quoi de mieux qu’une vraie conversation pour transmettre ce message ? mercedes-magazine.ca
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performance
Gelé dans le temps Pour une dernière fois, nous avons parcouru l’exigeante route de glace qui mène à l’accueillante communauté de Tuktoyaktuk, en Arctique. T E X T E O m a r Mo u a l l e m p h o t o s D a n i e l M a u r e r
J
e suis assis à un bar au fin fond de l’Arctique et je sirote une bière sous les lumières de Noël… à la mi-avril. Les murs de cette taverne sans fenêtre sont couverts de coupures de journaux portant sur Albert Johnson, un fugitif de l’époque de la Grande Dépression qui était surnommé « Mad Trapper » (le nom de l’établissement). Le seul autre client est un gars du coin, qui n’est pas dans mon champ de vision, mais qui vient de commencer une partie de Pac-Man. Le temps s’écoule différemment ici, à Inuvik, ou du moins, c’est ce que les disparitions prolongées du barman me laissent supposer. J’expédie les dernières gorgées de ma lager Yukon Gold, je laisse une poignée de dollars sur le zinc et je quitte le bar, soudainement ébloui par toute la lumière que réfléchit cette ville enneigée. Le soleil de minuit contribue à l’impression que le temps s’est arrêté dans cette région du Grand Nord qui, pourtant, d’ici moins d’un an, subira une transformation majeure. Un changement attendu que plusieurs accueilleront avec soulagement et si élémentaire qu’il ne fait que mettre en évidence les disparités entre le Nord et le Sud : une route permanente qui reliera les villages d’un chapelet d’îlots où vivent 2500 Inuvialuits (Inuits de l’Arctique de l’Ouest). Jusqu’à ce jour, ils ne pouvaient se rendre à Tuktoyaktuk ou « Tuk » qu’en empruntant une route de glace pendant l’hiver, comme je serai un des derniers à le faire avant qu’elle se transforme en sloche et en eau, pour disparaître à jamais.
Faune locale Sur la route, la flotte de GLE 400 4MATIC de Mercedes-Benz a notamment croisé des traîneaux à chiens.
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performance
Celle-ci traverse le fleuve Mackenzie et s’allonge sur 187 km avant de rejoindre l’océan Arctique, bien au-delà des maisons aux couleurs arc-en-ciel d’Inuvik, qui ressemblent à des taches de peinture sur une toile vierge, et de ses deux dômes d’un blanc immaculé (une église en forme d’igloo et une antenne satellite pour la télévision câblée). Depuis les années 1950, on grattait et déblayait régulièrement cette route de glace (devenue célèbre grâce à la téléréalité Le convoi de l’extrême). Puis, en 2013, on a commencé à aménager une voie beaucoup plus étroite mais plus fiable, faite de géotextiles novateurs conçus pour ne pas trop endommager le pergélisol. Si la fonte de celui-ci est une préoccupation, l’isolement en est une autre. Ainsi, les habitants de hameaux tels que Tuk, Aklavik et Paulatuk n’auront plus à débourser 400 $ pour un vol d’une demi-heure leur permettant de visiter leur dentiste à Inuvik ou ou d’y dépenser 10 $ pour un carton de lait. Il y a 60 ans, le premier ministre John Diefenbaker annonçait la construction de l’autoroute Dempster, permettant de relier les communautés de l’Arctique de l’Ouest sur 736 km, mais celle-ci a connu bien des ralentissements au gré des soubresauts de l’exploitation pétrolière de la région. Cette portion est l’équivalent du « dernier clou » planté dans le chemin de fer du Canadien Pacifique. 82
Esprit d’équipe
Kit de survie à bord de la Classe G : fusées éclairantes, couvertures de sauvetage et crics de course automobile pour un changement de pneu rapide.
Mes compagnons de voyage, des journalistes automobiles britanniques et allemands, sont prêts à tester les limites de notre flotte de VUS GLE 400 4MATIC de Mercedes-Benz. Nous échafaudons notre plan à l’heure du déjeuner : parcourir l’autoroute Dempster d’un bout à l’autre, du cercle polaire aux majestueux monts Richardson, avec Dawson comme ligne d’arrivée. C’est là que la ruée vers l’or a commencé, mais aujourd’hui, cette localité est surtout connue pour son cocktail Sourtoe. « Sour toe ? » demande l’un des journalistes allemands. Je lui suggère de chercher sur Google et en le voyant grimacer, je sais qu’il a découvert la réponse : un orteil noir et racorni servi dans un verre de whisky. J’insiste : « L’orteil doit toucher tes lèvres ». Son téléphone fait le tour de la table, créant des expressions de dégoût, jusqu’à ce qu’il atteigne Danny Kok, un pilote de formule 1 semi-retraité, originaire de Pitt Meadows, en Colombie-Britannique. Il hoche de la tête, confirmant qu’il ne s’agit pas d’une légende. Lui et trois autres membres de l’école de conduite Driving Unlimited sont nos instructeurs (et nos secouristes, si on devait en arriver là) pour ce périple. « On peut rouler pendant six heures sur la Dempster sans jamais croiser un autre véhicule »,
Livraison express L’isolement de Tuk se traduit par le coût élevé de biens de consommation importés comme le lait et les légumes : une situation que la nouvelle route pourrait changer.
affirme Danny Kok, se référant à sa propre expérience à des températures de -50 °C et des vents de 80 km/h. « Dans ces conditions extrêmes, changer un pneu peut être mortel… » D’où le kit de survie qu’il conserve à bord de son véhicule de Classe G : fusées éclairantes, couvertures de sauvetage, téléphone par satellite, crics de course automobile pour un changement de pneu rapide et équipement en cas de sortie de route. « Notre priorité absolue : que tout notre monde revienne en un seul morceau. » Priorité numéro deux ? Vivre une expérience inoubliable.
Sang-froid « J’ai conduit sur tous les continents sauf l’Antarctique. C’est ce qui s’en rapproche le plus », déclare Kyle Fortune, un journaliste écossais, membre du jury pour le prix de la Voiture mondiale de l’année, tout en braquant le volant chauffant de notre véhicule en direction du fleuve. Un panneau indique « Zone sans surveillance :
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nagez à vos risques », mais le système de navigation COMAND confirme l’existence d’une route saisonnière. À travers les rafales de poudreuse, une épaisse couche de glace striée apparaît, reflétant le bleu du ciel entre deux bancs de neige. Les forêts d’épinettes disparaissent peu à peu, tandis que l’écran indique que nous montons de 68° à 69° de latitude et que la température baisse de -14 °C à -20,5 °C. Les vitres se givrent. Je pourrais croire que nous roulons à grande vitesse sur la lune, si ce n’était des vestiges de barges pétrolières prisonnières de la glace. Toutes les 10 minutes, notre convoi de quatre véhicules se fait doubler : des camions lourds, un autobus scolaire modifié, un taxi en provenance de Tuk (une telle course peut s’élever à 200 $) et un beaucoup plus photogénique attelage de huskies tirant des touristes qui sourient sans doute sous leur cagoule. Kyle négocie les virages sans jamais appuyer sur le frein, se contentant de tourner le volant en laissant le programme de stabilité électronique (ESP) se charger du moindre dérapage. « On sent les légers ajustements, dit-il, avant d’ajouter : Je ne suis pas du genre à ménager les voitures. » Bientôt, l’équipe de Danny Kok nous annonce par radio que la voie est libre. Kyle désactive l’ESP, accélère bien au-delà de la limite de vitesse et donne quelques coups de volant. Il passe en mode sport, faisant tourbillonner la poudreuse autour de nous et chamboulant notre estomac au passage. Lorsque notre véhicule dérape, je sens l’étreinte rassurante de ma ceinture de sécurité, qui se relâche doucement quand Kyle reprend le contrôle. Comme je suis impatient de prendre le volant, nous changeons de place à mi-chemin de Tuk, après avoir croisé une chemise brodée suspendue à un poteau, indiquant la direction d’Aklavik. 84
Le grand blanc Le paysage est monochrome sur la route de Tuktoyaktuk (alias Tuk) située sur le bord de l’océan Arctique, mis à part l’Hotel Tuk Inn et une ancienne goélette.
Après trois heures de route à travers la toundra, Tuk nous apparaît comme une version réduite de Manhattan.
Les puissants vents de 90 km/h sifflent sur ma vitre, mais ils ne parviennent pas à faire dévier les pneus pour camion léger dont notre véhicule est équipé. Grâce à de constants micromouvements, ils mordent à la glace tout en franchissant d’inévitables crêtes de pression qui se forment à la surface à proximité du rivage, me forçant à remuer le volant comme si j’affûtais des baguettes en bois. Notre convoi s’arrête de nouveau, cette fois pour prendre tour à tour la pose devant le panneau indiquant l’océan Arctique. La seule chose qu’on peut faire lorsqu’on est au bout du monde.
Chasse au trésor Après trois heures de route à travers l’aride toundra, Tuk nous apparaît comme une version réduite de Manhattan avec ses roulottes beiges et ses maisons sur pilotis. Cette communauté autochtone est aussi traditionnelle qu’il est possible de l’être en 2017, la chasse et la pêche y étant à la fois essentielles et sacrées, le taux de chômage, élevé, et le coût d’une épicerie, astronomique. Nous passons quelques heures à photographier le paysage singulier, nous faisons une pause toilette au poste de la GRC (rien d’autre en vue !), puis nous repartons vers Inuvik, histoire de nous reposer un peu avant d’entreprendre une autre journée de route en direction de Dawson. Mais, bien assez vite, nous apprenons qu’un blizzard soufflant
La fin d’une époque Le journaliste Omar Mouallem a pris part à l’un des derniers convois à avoir parcouru la célèbre route de glace.
À Tuk, la chasse et la pêche sont à la fois essentielles et sacrées.
à 100 km/h force la fermeture de la Dempster, les charrues peinant à déblayer la neige. Pour rentrer à Inuvik, nous devrons prendre l’avion le lendemain, un contretemps qui illustre à merveille ce que les Inuvialuits endurent la majeure partie de l’année et prouve à quel point « la route », comme ils l’appellent, est nécessaire. « Qui fera don de son gros orteil ? », demande Kyle. Après un long silence, je lance : « On va devoir tirer à la courte paille. » Je profite de cette journée de répit à Inuvik – le soleil étant de retour – pour m’acheter un souvenir authentique à la boutique de Mavis Jacobson. Une odeur de peau d’orignal flotte dans l’air et, sous les présentoirs, j’aperçois des chapeaux en fourrure de phoque, des mocassins et des sculptures en pierre d’artisans de la région. La propriétaire, une Inuvialuit qui habite ici depuis l’âge de 12 ans, a grandi à Tuk, où son père était surveillant d’ours (du bout de son fusil, il protégeait les travailleurs pétroliers du plus grand carnivore terrestre). À l’époque, son passe-temps favori était la recherche d’artéfacts. « J’ai trouvé quelques fers de lance et une pièce de monnaie qui a peut-être appartenu à des explorateurs, me dit-elle. Une fois, j’ai rapporté une flèche au centre de recherche. On m’a dit qu’elle
avait 600 ans. » Mavis retourne régulièrement à Tuk pour visiter des membres de sa famille qui y vivent encore, même si la plupart d’entre eux viennent souvent à Inuvik, à grands frais et surtout par nécessité. Dans sa boutique, je choisis une épinglette perlée que j’agrafe à mon anorak. Je pars ensuite à la découverte de cette ville qui est devenue étonnamment multiculturelle, depuis que la Dempster a été inaugurée en 1979. Je mange au Roost, un populaire resto chinois dont le propriétaire est Palestinien, l’hôtesse, Philippine, le livreur, Soudanais, et le cuisinier, Inuit. Puis, je visite la mosquée la plus au nord de l’hémisphère occidental. La diversité est souvent l’indicateur d’un essor économique, mais aussi urbain. De retour à la voiture, en enlevant la glace qui s’est formée sur l’étoile de Mercedes-Benz, je repense à ce que m’a dit Mavis lorsque je lui ai demandé si elle redoutait l’arrivée de la route. Malgré ses avantages, ne va-t-elle pas compromettre les coutumes des Inuvialuits préservées par l’isolement ? « Non, Tuk sera toujours une ville de traditions, répond-elle. La culture a trop d’importance pour ses habitants. Ce sera génial pour eux. Et nous pourrons les visiter plus souvent. » mercedes-magazine.ca
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voyag e Hôtels inoubliables, virées en voiture et destinations dépaysantes.
Séjou r s Nos hôtels préférés autour du globe.
Z u r i c h , en S u i ss e
t h e d o l d e r g r a n d. c o m
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Musée à ciel ouvert Les tourelles de l’hôtel Dolder Grand font une pittoresque toile de fond à sa collection d’art, qui inclut la sculpture Three-Piece Reclining Figure: Draped, de Henry Moore (ci-dessus).
photo Kirstin Mckee (Sorrento)
La chambre des maîtres L’« art » qui orne les murs des hôtels est souvent produit en série et sans intérêt, tandis que la collection du Dolder Grand est digne d’un musée et constitue l’un de ses principaux attraits. Ainsi, l’œuvre Big Retrospective Painting, accrochée au-dessus du comptoir de la réception et qui fait 11 m de long, est signée Andy Warhol. Le tableau Femmes métamorphosées – Les sept arts, de Salvador Dalí, peut être admiré dans le restaurant, tandis que l’imposante sculpture Woman with Fruit, de Fernando Botero, trône sur la terrasse du spa. L’hôtel prête gracieusement des iPad qui permettent de faire une visite guidée de la centaine d’œuvres dispersées sur les lieux.
S o r r en to, en I ta l i e
Antiquité italienne Fondé en 1834 par la famille Fiorentino – qui en est toujours propriétaire – le Grand Hotel Excelsior Vittoria est un incontournable pour son ambiance chaleureuse, son restaurant étoilé, sa vue saisissante sur le Vésuve, mais aussi pour son histoire. e x v i t t. i t C o m m e au m u s é e
Son décor éclectique a des allures de musée avec ses fresques d’origine, ses meubles anciens, ses portraits de personnages historiques qui y ont séjourné et ses sculptures en bronze de la galerie Liquid Art System, à Positano.
Jamaïque
En bonne compagnie
L’hôtel Round Hill, à Montego Bay, est aussi glamour que dans les années 1950, à l’époque où il attirait tout le gratin hollywoodien. Séjournez à la villa numéro 10, dans laquelle Jackie et John F. Kennedy ont passé leur lune de miel, ou optez pour une chambre décorée par Ralph Lauren (qui habite la résidence voisine). r o u n d h i l l . c o m
Barbade
Loin des regards Surplombant la côte atlantique de la Barbade et une magnifique plage de sable rose (qui était autrefois un port de marchandises), The Crane Resort célèbre cette année son 130e anniversaire. L’architecture de ce populaire hôtel des Caraïbes marie d’ailleurs parfaitement le passé et le présent. Autour d’une place publique en pavés, inspirée du patrimoine barbadien, on trouve des boutiques et des restaurants ornés de jolis volets. Les chambres d’origine sont dotées de meubles en acajou (dont un imposant lit à baldaquin) faits à la main, tandis que les résidences privées proposent une déco contemporaine à l’esthétique minimaliste. Avis à ceux qui recherchent encore plus d’intimité : dès 2018, 63 nouvelles villas seront aménagées sur la plage voisine de Skeetes Bay. cra n e r e s o r t s . c o m
Ruines romaines
Selon la légende, l’empereur romain Auguste aurait déjà vécu sur ce site. On peut y apercevoir les vestiges de colonnes en pierre et de bains (semblables à ceux qui se trouvent à Pompéi). H i s t o i r e m u s i ca l e
L’hôtel a accueilli des personnalités telles que Richard Wagner, Luciano Pavarotti et Enrico Caruso, qui y a vécu dans les années 1920. C’est d’ailleurs en séjournant dans la suite qui porte son nom que le chanteur Lucio Dalla a écrit la chanson Caruso. mercedes-magazine.ca
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le nouveau vieux-montrĂŠal
PASSÉ RECOMPOSÉ De gauche à droite : l’espace de travail Crew Collective & Café a été aménagé dans une ancienne banque des années 1920 tandis que le Centre Phi est logé dans deux édifices datant de 1861.
Autrefois port stratégique, puis piège à touristes, le centre historique de la métropole s’est métamorphosé en quartier effervescent où convergent artistes et entrepreneurs. T E X T E B R E TT S C H A E N F I E L D p h o t o s g abr i elle s y k
Pistes à suivre Le restaurant Perché, sur le toit de l’hôtel William Gray (page de gauche) ; la boutique du Centre Phi propose une sélection d’œuvres et de souvenirs d’artisans locaux.
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aissons Toronto devenir Milan. Montréal restera toujours Rome. » Ce sont les mots de Jean Drapeau qui, au cours du xxe siècle, a transformé cette petite ville portuaire en capitale mondiale. Il est le maire qui a été le plus longtemps à la tête de Montréal et l’instigateur de nombreux projets ambitieux : l’Expo 67 ; une île artificielle dans le fleuve SaintLaurent ; les Jeux olympiques de 1976 ; un métro ultramoderne (« Le deuxième après Paris », affirment encore les Montréalais) ; un stade qui possède la tour inclinée la plus haute du monde et dont l’étonnante silhouette n’a d’égale que celle de la Biosphère, un dôme géodésique conçu par l’architecte Buckminster Fuller ; et enfin, la croix du Mont-Royal… autant de symboles qui, au fil du temps, sont devenus de véritables emblèmes. À l’époque, les autres villes canadiennes avaient un air terriblement paroissial en comparaison avec la vitalité et le raffinement de Montréal. Lorsque j’ai choisi d’y faire mes études universitaires, quelques décennies plus tard, mes parents m’ont raconté avec enthousiasme leurs escapades de jeunesse dans la Belle Province. Avec ses attraits « non officiels » aussi emballants que ses attractions touristiques : les poutines en fin de soirée, les terrasses animées et les tamtams chaque dimanche autour du monument à George-Étienne Cartier. À Montréal, on a soudainement l’impression de se retrouver parmi une bande de jeunes branchés. La ville a peut-être perdu un peu de lustre depuis cette grande époque – attirant davantage l’attention pour ses scandales politiques et ses interminables chantiers de construction –, mais voilà qu’elle a de nouveau le cœur à la fête. Profitant du 150e de la Confédération pour célébrer son 375e anniversaire, des festivités ont été organisées à la grandeur de l’île, incluant des marionnettes géantes parcourant les rues, un hommage à Leonard Cohen et une œuvre interactive illuminant le pont Jacques-Cartier. mercedes-magazine.ca
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Une métamorphose incroyable pour un secteur qui avait des airs de musée à ciel ouvert.
Plus qu’une simple excuse pour festoyer, ces célébrations ont été l’occasion pour les Montréalais et les fidèles visiteurs de redécouvrir une ville où innovation et charme du Vieux Monde vont de pair. Une combinaison qui s’exprime particulièrement dans un quartier – pas dans les branchés Mile-Ex et Griffintown –, mais là où on ne s’attend pas vraiment à trouver de la nouveauté : le Vieux-Montréal. Désigné officiellement arrondissement historique en 1964, ce quartier a pendant des années été figé dans le temps comme un fossile dans l’ambre, n’offrant guère mieux que des promenades en calèche, des magasins de souvenirs et des restaurants décevants. Il est vrai que ses rues pavées et ses façades à l’architecture européenne – allant du néogothique à la Renaissance italienne, en passant par l’Art déco – ont servi de décor à plusieurs productions hollywoodiennes. N’empêche qu’aucun Montréalais n’aurait songé à y boire un bon cocktail (ni même à y acheter un carton de lait). « C’était d’un vide pittoresque », déclare sans détour Daniel Notkin, champion écailleur et copropriétaire d’un bar à huîtres (le meilleur en ville !) qui porte son nom. Cette sommité locale a fait du Vieux-Montréal son port d’attache au début des années 2000, quand il a réalisé que les lofts y étaient étonnamment abordables. « Lorsque j’y ai emménagé, il n’y avait nulle part où sortir le soir, se souvient-il. Mais j’avais le pressentiment qu’il suffisait qu’une ou deux personnes prennent le risque pour que le vent tourne. » C’est ce qu’a fait Chuck Hughes. En 2006, le célèbre chef y a ouvert un premier restaurant, le Garde Manger, entraînant une vague de bars, de bistros et de cafés qui, loin du steak-frites-vinmaison, ont transformé le Vieux-Montréal en destination gastronomique. Alors que nous savourons des malpèques à son restaurant, Daniel Notkin me raconte les étés qu’il passait avec sa famille au Massachusetts, à l’époque où il plongeait dans la mer pour pêcher du homard et du crabe. C’est cette nostalgie qui est à l’origine de son sentiment d’appartenance au Vieux-Port de Montréal (où convergeaient autrefois tous les arrivages de fruits de mer) et qui 90
vision unique De haut en bas : une expérience de réalité virtuelle au Centre Phi ; l’hôtel William Gray allie design moderne et édifice patrimonial.
lui a inspiré l’Oysterfest, un événement annuel qui réunit les meilleurs chefs, musiciens, barmans et écailleurs en ville. Cette réussite s’accompagne toutefois d’une part de responsabilités, dont celle de la hausse des loyers. Même s’il est désormais difficile pour un entrepreneur comme lui de trouver un espace commercial accessible, l’amour de Notkin pour le quartier reste inébranlable. « C’était inévitable. Une ville située sur une île ne peut prendre de l’expansion comme les autres. Mais c’est dans l’adversité que naît la créativité. » En marchand dans les rues pavées en direction du Vieux-Port, je comprends à quoi le restaurateur fait allusion. Des édifices autrefois négligés, avec une perpétuelle pancarte « À louer », ont été convertis en condos de luxe, en espaces à bureaux ou en restaurants. En entrant au Crew Collective & Café – une ancienne banque des années 1920 transformée en espace de cotravail –, je tombe sur une foule composée de touristes et de jeunes créatifs. C’est une métamorphose incroyable pour un secteur qui, il y a à peine 10 ans, avait des airs de musée à ciel ouvert. En tournant sur la rue SaintPierre, j’aperçois l’une des plus impressionnantes
Une mer de changements Non seulement Dan Notkin est propriétaire d’un restaurant de fruits de mer dans le Vieux-Montréal, mais il est champion écailleur.
conversions : deux bâtiments datant de 1861 abritent désormais un centre d’art novateur. C’est à Phoebe Greenberg qu’on doit le Centre Phi, fondé en 2012. Cette héritière du groupe immobilier Minto, à Ottawa, s’est d’abord fait connaître sur la scène montréalaise en 2007 avec la Fondation pour l’art contemporain DHC/ART, une galerie indépendante située quelques rues à l’est. Avec ce deuxième projet, elle a voulu créer un terrain de jeu culturel et avant-gardiste, un espace évolutif à la fois pour créer et expérimenter l’art. L’établissement de cinq étages est certifié LEED, doté d’un terrasse, d’un studio de production numérique de pointe (récemment mis à jour pour accueillir l’événement Red Bull Music Academy), d’une salle acoustique multifonction et d’une petite salle de cinéma idéale pour les projections privées et les festivals de films indépendants. Mais son atout le plus étonnant est son Jardin de réalité virtuelle. Cet espace aménagé en 2015 dans la foulée du retentissant succès de l’exposition Sensory Stories (qui présentait notamment le vidéoclip d’une chanson de Jeff Buckley et un film mettant en scène LeBron James) permet de découvrir une nouvelle forme de narration immersive. C’est là que Myriam Achard, directrice des relations publiques et des communications du Centre Phi, me surprend avec un casque sur la tête à regarder (et à tenter de toucher) une immense main de robot virtuelle qui est à la recherche de son corps. « Notre programmation est planifiée environ quatre mois à avance, ce qui nous permet de l’adapter rapidement selon l’offre, m’explique Myriam Achard, avec l’attitude décontractée typiquement montréalaise. On tente d’être aussi flexible que nos installations le sont. On ne sait pas encore ce que 2018 nous réserve, mais ça fait partie du plaisir. » C’est sans doute cette souplesse qui a permis au Centre Phi d’attirer une brochette de musiciens et d’artistes renommés, capables à eux seuls de remplir le Centre Bell. Nonchalamment, Myriam Achard mentionne de mémorables projections en présence de Nick Cave et de Henry Rollins, le premier numéro de stand-up de Yasiin Bey (alias Mos Def) et la fois où Diplo et Madonna ont joué aux DJ en compagnie de Régine Chassagne et Win Butler, d’Arcade Fire, lors de la soirée-bénéfice de KANPE, une fondation qui vient en aide à Haïti. « Les artistes se plaisent bien ici. Nos espaces sont intimes et réconfortants », souligne-t-elle. Elle croit toutefois que la popularité du Centre Phi dépasse ses ambitions artistiques et mercedes-magazine.ca
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Pause café Adresse branchée du Mile-End, l’Olimpico a désormais un comptoir à l’hôtel William Gray, dans le Vieux-Montréal.
tient à la métropole elle-même. « Le Centre Phi n’aurait pu exister nulle part ailleurs, soutient-elle. Les Montréalais sont avides de culture et très ouverts d’esprit. Ils adorent leur ville. » Je poursuis ma route vers la rue Saint-Vincent, qui recèle un autre bijou architectural alliant le passé et la modernité : le nouvel hôtel-boutique William Gray, combinant deux édifices du xviiie siècle (dont un construit par le shérif et marchand Edward William Gray) et une nouvelle tour en verre de huit étages. Il me suffit de franchir l’éblouissante entrée, qui donne sur un vaste atrium et un bar lounge, pour comprendre en quoi cet hôtel se distingue des autres. Les voyageurs amateurs de design se plairont dans ses suites minimalistes au plafond en béton (offrant les produits Le Labo), mais ils seront surtout séduits par ses aires communes qui misent sur les talents locaux. Les couloirs ornés de photos colorées du métro de Montréal croquées par Jesse Riviere. La bibliothèque de la salle de séjour remplie de titres publiés par Drawn & Quarterly, un éditeur indépendant du Mile-End. De l’autre côté du hall, une succursale de la boutique Off The Hook (alias OTH) propose des marques locales comme Naked & Famous Denim, Want Les Essentiels et Chez Nous, une gamme de t-shirts rendant hommage à des quartiers tels que SaintHenri et Villeray. Je fais quelques pas et me retrouve au comptoir de mon établissement montréalais préféré : le Café Olimpico, une adresse 92
Montréal est la ville non conformiste qu’elle a toujours été, en constante évolution.
emblématique qui a pignon sur la rue SaintViateur depuis 47 ans. Le barista Joey Caputo me confirme que les gens du quartier n’ont pas tardé à adopter cette nouvelle enseigne qui est devenue, à son tour, un lieu où on se retrouve pour discuter, travailler et se détendre. Il a d’ailleurs été surpris d’y reconnaître certains visages familiers, des gens qui ne seraient peut-être pas venus dans le VieuxMontréal autrement. « Ceux qui habitent ou travaillent dans le coin attendaient impatiemment ce genre de commerce local, m’explique-t-il en versant adroitement le lait dans mon macchiato. Mais on voit aussi beaucoup de clients réguliers qui viennent dans le Vieux la fin de semaine pour prendre un café et se promener. Ça change beaucoup l’ambiance du quartier, qui n’est plus uniquement touristique. » Le soir venu, sur les conseils de Joey Caputo, je monte à la terrasse aménagée sur le toit de l’hôtel pour admirer ce qui, selon lui, est une des plus belles vues en ville. La soirée est fraîche mais confortable, parfaite pour siroter un cocktail à base de gin avec une touche de bière et de miel d’ici. Tandis que je regarde en direction du fleuve Saint-Laurent, le soleil couchant teinte d’une lumière orangée quelques monuments de Montréal : le pont Jacques-Cartier, l’enseigne Farine Five Roses, Habitat 67 de Moshe Safdie. Ce paysage digne d’une carte postale est intemporel, en dépit des quelques nouvelles constructions qui se sont ajoutées au décor. Même si sa grande époque est révolue, je sais que Montréal entame un nouveau chapitre, le regard rivé vers l’avenir. Elle demeure la ville non conformiste qu’elle a toujours été – créative, artistique, avant-gardiste, épicurienne –, en constante évolution. La bande de jeunes branchés est toujours ici, ils ont simplement un peu vieilli.
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A D RESSES
VieuxMontréal Faites un saut au N o t k i n s pour déguster des huîtres et ce que le propriétaire surnomme la « cuisine américaine côtière ». Traduction : homard vapeur et chaudrée de palourdes. n o t k i n s . c o m
exploration urbaine
Inauguré en 2016, l’hôtel William Gray compte 127 chambres et suites, et un penthouse, le tout réparti sur trois édifices. Pendant les beaux jours, rendez-vous sur la terrasse pour profiter d’une vue imprenable sur Montréal (presque aussi belle que celle du mont Royal) ou goûtez à l’assortiment de fromages du Québec au restaurant Maggie Oakes.
Parcourez les rues pavées du Vieux-Montréal à bord d’un véhicule aussi élégant que la ville elle-même. Le coupé de Classe E de MercedesBenz est le seul de la série à ne pas avoir de montant : aucun cadre ne vient obstruer les quatre vitres latérales à commande électrique et, lorsqu’elles sont baissées, on a presque l’impression de conduire un cabriolet. Sa console améliorée et personnalisable est dotée d’un système de navigation avec cartes 3D qui vous guidera de la Biosphère au Stade olympique en un rien de temps. Sa calandre percutante et ses phares à feux de croisement à DEL ajouteront du style à toutes vos escapades. MERCEDES - BENZ .
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CA
Consultez le site Web du C e n t r e P h i pour tout savoir de sa programmation, des projections de films indépendants aux conférences sur la réalité virtuelle. Et visitez sa boutique pour découvrir des créations éclectiques d’artistes et de designers montréalais. p h i - c e n t r e . c o m
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Je me souviens
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Qui dit qu’un souvenir doit être kitsch ? Ces designers montréalais s’inspirent de leur ville pour créer des objets uniques... qui ne sont pas seulement pour les touristes !
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1 Porte-clés en fourrure recyclée, Harricana par Mariouche h a r r i c a n a . q c . c a 2 Sous-verres ornés des armoiries de la ville, Atelier-D at e l i e r - d. c a 3 Miniature de la Place Ville-Marie, Façades MTL fa c a d e s m t l . c o m 4 Cartes illustrées de poutine, bagel et smoked meat, Paperole pa p e r o l e . c o m 5 Portefeuilles Traces et Skidoo, Ute Wolff u t e w o l f f. c o m 6 Jeu de mémoire Montréal, Jules Mon Poisson Bulle
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julesmonpoissonbulle.com
RESSES
7 Sous-verres et ouvre-bouteille Bar_chitecture inspirés de la Biosphère et du Stade olympique, F&Y f n y- m t l . c o m 8 Meringues Bouts de route, UI Concepteurs de curiosités culinaires u i - da . c o m 9 Minibâtons de hockey, Shed Espace Créatif d e s e n fa n t i l l a g e s . c o m DD 10 A imants, Monumental Love m o n u m e nAta love .com
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VOYAG E
UNE FORCE DE L A NATURE
Longtemps isolée, l’Islande est devenue une destination courue. Il est néanmoins encore possible d’apprécier sa beauté brute loin des circuits touristiques. TE X TE VIOL AINE CHAREST- SIGOUIN PHOTOS MARTIN FLAMAND
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AU SOMMET DU MONDE Les deux colonnes de basalte de Lóndrangar, sur la péninsule de Snæfellsnes, sont les vestiges d’un ancien cratère sculpté par les marées.
a brume est si dense que je suis forcée de ralentir. Pourtant, le soleil étincelait lorsque j’ai quitté Reykjavik à bord d’une Classe B de Mercedes-Benz. Mais l’Islande est une terre de contrastes, où les paysages sont forgés par les volcans et les glaciers, et où on a parfois l’impression de traverser plusieurs saisons en une journée à peine. Je ne suis pas la seule à fendre le brouillard enveloppant la route 1, qui fait le tour complet de l’île sur une distance de 1339 km. Il faut dire que je roule précisément sur le tracé du Cercle d’or, un circuit qui relie Reykjavik aux trois attractions naturelles les plus populaires d’Islande. Chaque jour, une multitude de touristes font le trajet pour admirer les impressionnantes chutes de Gullfoss, enjamber la faille qui sépare les plaques tectoniques nord-américaine et eurasienne dans le parc national de Thingvellir ou s’ébahir de la puissance de Geysir, un geyser pouvant atteindre 70 m de hauteur. L’éruption du volcan Eyjafjallajökull, en 2010, n’est rien en comparaison de la récente explosion de l’industrie touristique qui a permis à l’Islande de se remettre de la crise financière de 2008, tout en devenant son principal moteur économique. En 2016, 1,77 million de touristes ont visité cette île, soit plus de cinq fois sa population. En marchant dans les rues de Reykjavik, il est difficile d’ignorer cette nuée de visiteurs, tout comme les grues qui s’élèvent dans le ciel, transformant à grande vitesse cette ville de 120 000 habitants. « Les gens ont réalisé que nous n’étions pas si loin », me disait Sigurlaug Sverrisdóttir, trois mercedes-magazine.ca
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jours plus tôt. Après avoir parcouru le monde, cette ancienne agente de bord est revenue au pays pour réaliser un rêve fou : transformer le logement de fonction d’une usine géothermique, perdu dans un champ de lave, en hôtel de luxe. C’était en 2013, tout juste avant la déferlante de touristes. Aujourd’hui, le ION Adventure Hotel affiche souvent complet, si bien que Sigurlaug vient d’inaugurer un deuxième établissement à Reykjavik. « L’Islande fait 103 000 km2, c’est la moitié de la superficie de la Grande-Bretagne. Notre île est grande, mais elle est en partie inhabitable à cause des glaciers et des déserts de lave. Il est encore possible de s’y sentir seul au monde », m’assure-t-elle. C’est ce qui me revient en tête, un peu plus tard, tandis que je grimpe un sentier escarpé de Reykjadalur ou « vallée de vapeur ». Bien assez vite, des colonnes de fumée s’ajoutent à la brume qui flotte dans l’air. Ce sont des sources d’eau chaude provenant du volcan Hengill, dont la dernière éruption remonte à 2000 ans. Je m’arrête un instant pour observer un cratère d’eau bouillonnant à 100 °C, laissant quelques randonneurs me doubler. Je devine qu’eux aussi ont enfilé leur maillot pour la récompense qui nous attend après cette ascension d’une heure. Et, de fait, j’aperçois bientôt des baigneurs en train de se prélasser dans une rivière ondulant à travers la vallée. Je ne tarde pas à me glisser dans ce bain tourbillon naturel. Autour de moi, les montagnes dégagent une force brute. Je comprends mieux pourquoi l’Islande exerce un tel pouvoir magnétique.
Monde enchanté Le lendemain, en traversant la péninsule de Snæfellsnes, dans l’ouest de l’île, j’ai l’impression d’explorer une planète inconnue. La route serpente à travers l’immense champ de lave de Búdahraun. Des rochers à perte de vue, créant parfois d’étranges silhouettes qui pourraient appartenir au « peuple caché », les elfes et trolls des légendes islandaises. Si le temps était clair, j’apercevrais les flancs enneigés du glacier Snæfellsjökull (la porte d’entrée pour le Voyage au centre de la Terre, de Jules Verne !). Mais la brume ne s’est toujours pas dissipée, créant ici cette aura de mystère qui a sans doute inspiré plus d’un auteur de polars. Je fais escale à Hellnar, un des jolis villages du littoral, où je me laisse tenter par une soupe au poisson au café Fjöruhúsid. Cette ancienne cabane de pêcheur ne compte que six tables et son décor semble figé dans le temps. « Nous avons ouvert il y a maintenant 20 ans, me confie Sigrídur Einarsdóttir, la propriétaire. Nous voulions simplement servir des gaufres et du chocolat chaud aux pêcheurs. » Je remarque que plusieurs clients portent des lopapeysa, les fameux chandails de laine islandais, mais je doute qu’il s’agisse vraiment de marins… 96
En 2016, 1,77 million de touristes ont visité cette île, soit plus de cinq fois sa population.
Après le repas, je vais sur la grève pour remplir mes poumons d’air frais. Je ne suis pas seule : des centaines d’oiseaux tourbillonnent dans le ciel. Ils m’accompagnent sur la plage d’Ytri-Tunga, où j’aperçois quelques baigneurs peu frileux – de timides phoques ; puis, sur celle de Lóndrangar, où s’élèvent d’impressionnantes colonnes de basalte hautes de 61 m et 75 m, un ancien cratère sculpté par les marées ; enfin, à l’anse de Dritvik qui, jusqu’au xixe siècle, était un port accueillant jusqu’à 600 pêcheurs. Aujourd’hui, cette plage de galets est déserte, mis à part les vestiges d’un chalutier britannique échoué en 1948. En voyant les vagues déferler violemment sur le rivage, je ne peux m’empêcher de penser à quel point la vie devait être rude autrefois sur cette île balayée par les vents, où les heures d’ensoleillement sont rares en hiver.
photos Efr ain Padro/Al amy Stock Photo (cet te page) ; imageBROKER/Al amy Stock Photo (page de droite)
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Délices d’ailleurs Chou grillé, purée de datte tiède et fromage de chèvre : une spécialité d’inspiration méditerranéenne du restaurant Marshall House, à Reykjavik.
La tête dans les nuages Les plus populaires attractions d’Islande, dont les sources d’eau chaude et la salle de concert Harpa (page de gauche), valent aussi la peine d’être visitées... et photographiées.
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adresses
Islande Prises du jour Autrefois usine de transformation du hareng, la Marshall House accueille désormais les galeries Living Art Museum et Kling & Bang, de même que le studio du réputé artiste islando-danois Olafur Eliasson. On peut faire bonne chère au restaurant du même nom, dont les immenses fenêtres donnent sur le port de Reykjavik. Le chef Leifur Kolbeinsson y propose une cuisine aux accents méditerranéens, comme du chou grillé servi avec purée de dattes tiède et fromage de chèvre ou une plie entière garnie de câpres et d’anchois qui fond littéralement dans la bouche. m a r s h a l l r e s tau r a n t. i s
pause détente
Couler de source Les cascades de Hraunfossar sont formées par l’eau qui coule sous les champs de lave. Ci-dessous : Sigurlaug Sverrisdóttir, propriétaire des hôtels ION.
À mi-chemin entre le glacier Langjökull et les magnifiques cascades Hraunfossar, l’hôtel Húsafell est une excellente base pour rayonner dans l’ouest de l’île. Après une journée sur la route, détendez-vous dans les piscines géothermales attenantes ou offrez-vous un repas cinq services au restaurant de l’hôtel, où vous pourrez vous régaler notamment d’oie fumée et de confit de canard accompagnés d’orge crémeuse aux champignons sauvages ou d’un filet mignon servi avec chips d’artichaut et purée de céleri-rave. h o t e l h u s a f e l l . c o m
Royaume des neiges
Chambre en ville
« Avant, personne ne venait jusqu’ici, à part des criminels bannis d’Islande qui trouvaient refuge dans les caves de lave », m’explique Thór Birgisson, mon guide pour cette excursion sur le glacier Langjökull. Nous roulons à bord d’un camion militaire modifié, mais j’ai plutôt l’impression de foncer à toute allure dans un nuage blanc, la neige se confondant avec le brouillard. Cela ne semble pas inquiéter outre mesure notre chauffeur Guttormur qui, à l’aide d’une simple application, modifie la pression des pneus cloutés pour gravir cette montagne de glace. À 1260 m d’altitude, nous nous arrêtons devant une ouverture dans la neige. Il ne s’agit pas
Situé sur Laugavegur, l’artère principale de Reykjavik, le ION City Hotel transporte un peu de la nature islandaise en plein cœur de la ville avec sa déco contemporaine qui évoque les champs de lave et les glaciers. Réservez la suite panoramique pour une vue imprenable sur la mer et le majestueux massif Esja, en plus de pouvoir bénéficier d’une terrasse privée avec sauna où vous pourrez siroter un verre de vin puisé dans le minibar bien garni (et offert gratuitement !). i o n i c e l a n d. i s
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Goût d’autrefois Le restaurant Matur og Drykkur emprunte son nom – qui signifie « nourriture et boissons » – au livre de recettes de Helga Sigurdardóttir, publié en 1947. Le chef Arnar Sævarsson s’en inspire pour offrir une interprétation contemporaine de mets traditionnels. C’est le cas du saltkjöt og baunir, une soupe servie pour le sprengidagur, l’équivalent du Mardi gras, dont il offre une version décomposée : agneau salé, purée de pois, chips de pommes de terre, de carottes et de rutabaga. « La cuisine islandaise était avant tout une affaire de survie, explique le chef. Par exemple, la tête de morue est un mets typiquement islandais parce que nous vendions les filets de poissons aux Britanniques pour leurs fish and chips et que c’est tout ce qui nous restait ! » Celle apprêtée par Arnar Sævarsson est spectaculaire : flambée au chalumeau et servie avec des joues de morue frites. m at u r o g d r y k k u r . i s
Sur la route L’Islande se révèle à son meilleur sur les chemins les moins fréquentés. Renseignez-vous avant de partir, car certaines routes sont fermées durant l’hiver ou ne sont accessibles qu’aux véhicules à quatre roues motrices. La compagnie de location Höldur offre notamment des véhicules de Classe A, B et C, sans compter les GLC, GLE, GLS et Sprinter de Mercedes-Benz, dont l’excellente tenue de route est appréciée lorsque la météo ou les conditions de circulation l’exigent. h o l d u r . i s
Neiges éternelles Une montagne au sommet enneigé près du glacier Langjökull, le deuxième plus important en Europe. Il est possible de le traverser grâce au tunnel qui y a été sculpté (ci-contre). À droite : le restaurant Matur og Drykkur, à Reykjavik.
d’une autre porte vers le centre de la Terre, mais plutôt d’un tunnel traversant le glacier sur 550 m, une prouesse d’ingénierie de l’entreprise Into the Glacier pour percer à jour ce phénomène naturel de taille. Je m’engouffre dans le passage avant d’aboutir enfin dans le ventre de la bête, sous 40 m de glace, un lieu qui ferait un excellent décor pour La reine des neiges.
Après avoir traversé ce géant endormi, je fais quelques pas dans la neige éternelle. Je me sens toute petite devant l’immensité blanche qui s’étend devant moi. Soudain, la brume se dissipe comme par magie, permettant au soleil de briller à nouveau. Comme quoi même si on veut la dompter, la nature finit toujours par avoir le dernier mot. mercedes-magazine.ca
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JARDIN SUSPENDU Pour les urbanistes, il s’agit d’un avant-goût du futur : un gratte-ciel aussi vert qu’un parc ou un jardin. Voilà ce que l’architecte Vincent Callebaut vient tout juste de construire à Taipei. Évoquant la structure à double hélice de l’ADN, l’édifice effectue de sa base au sommet une torsade de 90°, permettant l’aménagement de grandes terrasses qui s’avancent au-delà des étages inférieurs. L’architecte belge compare son concept à une forêt urbaine. « Le jardin n’est pas aménagé autour du bâtiment, il devient le bâtiment lui-même », explique-t-il. Achevé en septembre dernier, le gratte-ciel nommé Tao Zhu Yin Yuan – signifiant « La retraite de Tao Zhu » – compte près de 23 000 arbres et arbustes. Les résidents peuvent admirer cette verdure de leur fenêtre, tout en vivant au cœur de Taipei. L’édifice, qui peut absorber 130 tonnes de CO2 par année, a d’ailleurs été conçu pour combattre le smog de la capitale taïwanaise. VINCENT.CALLEBAUT.ORG 100
IMAGINER LE FUTUR Créateur visionnaire, Vincent Callebaut conçoit des projets d’architecture durable à travers le monde.
photos Vincent Callebaut Architectures/Paris ; WILLIAM BEAUCARDET ( vincent callebaut ) ; Illustration Florian Bayer
Haute technologie rencontre design de pointe à l’échelle internationale.
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Ce pourcentage correspond à l’augmentation des ventes de vinyles en 2017 (celles de CD et de cassettes ont plutôt chuté), et Precision Record Pressing y est pour quelque chose. Fondée en janvier dernier à Burlington, en Ontario (avec le lancement d’une série limitée de Man Machine Poem, de Tragically Hip), cette usine de disques dotée d’installations entièrement neuves est la première à ouvrir depuis plus de 30 ans. Contrairement aux autres entreprises qui n’acceptent pas de commandes en deçà de 300 disques, celle-ci permet de produire des albums en petite quantité et à prix abordable. p r e ci s i o n p r e s s i n g . c o
LA ROUTE SANS STRESS
En collaboration avec le Centre de recherche Daimler, à Berlin, le psychologue Peter Kiegeland a mené plusieurs études au sujet des effets de la fatigue sur les automobilistes. Président de l’Association professionnelle des psychologues allemands, il répond à nos questions sur la conduite et le stress. Qu’est-ce qui est le plus stressant : conduire en ville ou sur l’autoroute ? Je dirais le trafic urbain. Il est d’autant plus exigeant lorsqu’on roule dans un environnement qui ne nous est pas familier. Cela dit, être coincé dans un embouteillage sur l’autoroute est aussi stressant. De quelle façon les systèmes d’aide à la conduite peuvent-ils améliorer les choses ? Ils nous permettent d’être plus détendus en cas de situations difficiles, par exemple quand la visibilité est mauvaise ou que la congestion routière nous force à appuyer continuellement sur le frein et l’accélérateur. C’est rassurant de savoir que ces systèmes prendront le relais en cas d’urgence. Quelles autres avancées technologiques peuvent nous aider ? L’ergonomie est primordiale. Plusieurs sous-estiment son importance. Par exemple, un siège mal réglé ou inconfortable peut être une cause de stress.
À tour de bras La science-fiction devient réalité avec Thalmic Labs. L’entreprise de Waterloo a suscité tout un émoi en créant le brassard Myo, qui permet de contrôler des appareils à distance grâce à la reconnaissance gestuelle. En plus de changer notre manière de jouer à des jeux vidéo (les amateurs de réalité virtuelle en raffolent), cette technologie révolutionne la médecine en permettant la création de prothèses qui s’activent en fonction des mouvements musculaires. T H A L M I C . C O M
Y a-t-il d’autres facteurs de stress ? Le bruit. On se sent mieux lorsqu’on conduit dans un environnement silencieux. La qualité de l’air joue également un rôle décisif. De quelle manière ? Une bonne aération est un élément qui favorise la détente. Des études démontrent que l’air de mauvaise qualité à l’intérieur d’un véhicule peut affecter notre attention de la même façon que l’état d’ébriété. Une fois purifié, l’air contribue à notre bien-être. Le stress est aussi une question d’attitude. Que conseillez-vous aux gens impatients au volant ? Ils devraient réfléchir à la véritable cause de leur comportement. Ont-ils réellement peur d’arriver en retard ou laissent-ils plutôt leurs problèmes personnels prendre le dessus ? mercedes-magazine.ca 101
i n n o v atio n
Silence radio FAITES DU BRUIT
Ajoutez du rythme à votre vie avec ce haut-parleur portatif Bluetooth. Non seulement le Beoplay A1 de Bang & Olufsen est design, mais il ne pèse que 600 g. B E O P L AY. C O M
Des résidents d’une région éloignée de Virginie occidentale ont décrété un secteur « exempt de radiofréquences émises par les appareils sans fil ». Dans le film La zone de silence, les documentaristes canadiens Daniel Froidevaux et Elisa Gonzalez suivent quatre de ces « réfugiés des ondes » pour tenter de comprendre notre relation complexe avec les technologies de communication. q uiet z o n eproj ect. com
AU T O R O U T E
De Miami à Key West D I S TA N C E 182 km
É TAT S - U N I S
USA États-Unis
Mexique
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ROUTE sur mer Parcourir l’autoroute Overseas Highway, en Floride, c’est comme filer sur l’océan. Le soir, le trajet est particulièrement romantique lorsque le soleil rougeoyant plonge sous l’horizon. Assurez-vous d’avoir tout votre temps pour en profiter.
photo B&O Play; Getty Images
D U R É E D U T R AJ E T 2 h 30
Les temps modernes Oubliez votre chargeur et optez plutôt pour une montre Uvolt : non seulement elle indique l’heure, mais elle est dotée d’une pile alimentée à l’énergie solaire qui permet de charger votre cellulaire. Conçu par une entreprise canadienne, cet accessoire aussi pratique que stylé devrait être commercialisé à la fin de 2017. uvolt.ca
MICK LE VITE Obtenir son permis de conduire était une des priorités de Mick Schumacher lorsqu’il a célébré son 18e anniversaire, en mars dernier. Considéré par plusieurs comme un des pilotes automobiles les plus prometteurs, le fils de l’exchampion du monde Michael Schumacher sait déjà comment enfoncer la pédale dans le tapis. Les instructeurs de l’école de conduite Fahrschule Furious, en Allemagne, étaient d’ailleurs plutôt sceptiques à l’idée de lui enseigner. Cinq vidéos permettent de voir le nouvel ambassadeur de Mercedes-Benz tandis qu’il se mesure au code de la route. FA C E B O O K . C O M/ M I C KS C H U M A C H E R O F F I C I A L
photo MICK SCHUMACHER/INSTAGR AM
Retour en classe Les organisateurs de sorties éducatives seront soulagés : le Musée des sciences et de la technologie du Canada, à Ottawa, rouvrira ses portes en novembre prochain. Ce grand favori des écoles et des familles proposera de nouvelles expositions interactives, dont La vapeur : un monde en mouvement, qui relate l’histoire des machines à vapeur au pays, et ZOOOMobile, qui permettra aux enfants de s’initier à la conception automobile. Enfin, selon la rumeur, ce sera le retour de l’attraction la plus populaire du musée : la Cuisine bizarre qui confond tous nos sens.
À toute vapeur Une exposition interactive du Musée des sciences et de la technologie du Canada relate l’histoire de la locomotive.
i n g e n iumca n a da . or g
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MondanitéS
Sous les projecteurs Les événements de Mercedes-Benz les plus courus de la saison, des concerts aux tapis rouges.
Soirée VIP
Le part y du Gr and Prix
La fin de semaine de la formule 1 est un incontournable de l’été montréalais et ceux qui y ont assisté l’ont fait avec style grâce à Mercedes-AMG Motorsport et à Hugo Boss. Les deux marques se sont associées pour présenter la soirée A Night Forged in Time dans la somptueuse salle de bal de la gare Windsor, l’ancien quartier général du Canadien Pacifique. Animé par l’ancien coureur automobile David Coulthard, l’événement tapis rouge célébrant le 50e anniversaire d’AMG a accueilli plus de 700 invités, incluant les pilotes de Mercedes Lewis Hamilton et Valtteri Bottas, ainsi que le légendaire Niki Lauda. 104
Le 30 août dernier, des clients de Mercedes-Benz Winnipeg ont pu assister à la prestation de Bruno Mars, accompagné de Camila Cabello, à la Place Bell MTS, qui était bondée. Pendant la soirée, un goûter, des boissons et une visite exclusive du stade leur ont été offerts. Cet événement Mercedes-Benz Star Access a été rendu possible grâce à un partenariat entre Live Nation Canada et Mercedes-Benz Canada, qui permet à des clients de Mercedes-Benz, de Mercedes-AMG et de smart fortwo de bénéficier de billets de concert.
Tuyaux de pros
En juin dernier, 24 clients passionnés de Mercedes-AMG (qui, grâce à la marque, avaient déjà roulé sur des pistes) ont été sélectionnés pour passer une soirée unique à l’Académie de conduite AMG. Les participants ont pu tester la haute performance des véhicules AMG sur le circuit Gilles-Villeneuve, à Montréal, expérimentant ainsi la conduite de F1 sur un parcours approuvé du Grand Prix.
Shopping thér apie Le centre commercial CF Markvillle, à Markham, en Ontario, abrite désormais le nouveau concessionnaire Mercedes me Store Markham. Frank Scarpitti, le maire de cette municipalité du grand Toronto où l’industrie automobile est en pleine croissance, a offert une plaque commémorative pour son inauguration. « Le magasin a été conçu pour ceux qui voulaient s’arrêter informellement et admirer les derniers modèles, poser des questions ou simplement voir les articles de la Collection Mercedes-Benz », explique Philipp von Witzendorff, vice-président et chef des opérations pour la vente au détail de Mercedes-Benz Canada.
Coup de maître
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Après avoir participé à 19 tournois à travers le Canada de mai jusqu’en août, Karl Reuber, Tim Belter et Real Thibault ont remporté la finale canadienne de la 19e édition du MercedesTrophy, une compétition annuelle de golf. Ceux qui y ont participé – tous des propriétaires de MercedesBenz – ont séjourné au Sherwood Inn, à Muskoka, et joué au club Öviinbyrd, un des parcours les plus cotés du pays. Les trois gagnants ont représenté le Canada à Stuttgart, en Allemagne, à l’occasion de la finale mondiale du MercedesTrophy 2017.
Mégastade Le tout nouveau Mercedes-Benz Stadium, à Atlanta, en Géorgie, est maintenant ouvert pour accueillir les amateurs de sport et de concerts. L’édifice à la fine pointe de la technologie héberge l’équipe de soccer Atlanta United FC, ainsi que les Falcons d’Atlanta de la LNH. Il est doté d’un anneau d’écrans déployés sur 360°, de fenêtres d’une hauteur de 16 étages donnant sur une vue spectaculaire du centre-ville d’Atlanta et de magnétomètres enregistrant les entrées et permettant d’augmenter la fluidité de 40 %. Autre preuve que ce stade joue dans les ligues majeures : il a été réservé pour l’édition 2019 du Super Bowl.
EN ROUTE
Message d’espoir Visionnez le court-métrage Peint avec amour sur mercedes-magazine.ca.
mur à mur
L’art et la fierté vont de pair à Toronto (et en ligne) grâce à un projet alliant plusieurs disciplines. texte Mark Ambrose HarRis
« Ê t r e s o i - m ê m e s a n s r e m o r d s , e n t o u t t e m p s . » C’est le crédo d’acceptation
de soi dédié à la communauté LGBTQ2 qui ressort du documentaire Peint avec amour, de Mark Bone. Ce court-métrage s’inscrit dans une campagne numérique sur l’impact réel des discours homophobes et transphobes, mais aussi sur le pouvoir de l’art pour faire triompher l’amour sur la haine. « Nous voulions mettre en lumière et dénoncer les effets réels des discours haineux », affirme Virginie Aubert, vice-présidente du marketing chez Mercedes-Benz Canada. 106
Nous voulions dénoncer les effets réels des discours haineux.
Mercedes-Benz a fait appel à l’artiste et tatoueuse queer Thomarya « Tee » Fergus (à gauche) pour peindre une murale inspirée de témoignages de membres de la communauté LGBTQ2 de Toronto qui ont été victimes de violence et de harcèlement. Peint avec amour donne un aperçu de sa démarche artistique et de son travail – allant des portraits colorés à de saisissantes toiles de grands formats –, mais dévoile surtout la conversation très personnelle que l’artiste a eue avec des membres de la communauté LGBTQ2. Même s’il s’agit d’histoires d’intimidation et de vandalisme, la vision de Tee Fergus est tournée vers l’avenir. « Cette murale vise à refléter non pas là où nous étions, mais tout le chemin que nous avons parcouru, explique-t-elle. Quand les gens la voient, j’espère que ça leur procure le sentiment qu’il y a des possibilités, que les choses peuvent changer, et qu’ils ressentent une certaine excitation. » Depuis que cette œuvre kaléidoscopique a été dévoilée au coin des rues Dovercourt et Dupont, à Toronto, elle a généré de nombreux messages de soutien et de solidarité, qui ont même inspiré ce mot-clic : #LoveTransforms.
Terre-Neuve, Canada