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L'ART IDEALISTE & MYSTIQUE PRÉCÉDÉ DE
LA RÉFUTATION DE TAINE
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f*ta»-Mm 'Mt»** -«ai
il/
Î)U
MÊME AUTEUR
La Décadence latine
III.
LE VICE SUPRÊME (l884). CURIEUSE (l885). l'initiation sentimentale
IV.
A CŒUR PERDU
I.
II.
(i886). (1887).
ISÏAR (1888). VI. LA VICTOIRE DU MARI (1889). VII. CŒUR EN PEINE (iSgo).
V.
VIII.
IX.
X.
l'androgyne (1891). LA GYNANDRE (189-2). LE PANTHÉE (1893).
(Ethopée)
TYPHONIA (1894). LE DERNIER BOURDON (iSqS). XIII. FINIS LATINORUM (1898). XIV. LA VERTU SUPRÊME (I9OO). XV. « PEREAT » (19OI). XVI. MODESTIE ET VANITÉ (1902). XVIII. PÉRÉGRINE ET PÉRÉGRIN XI. XII.
I
(1904).
XVIII. LA LICORNE (igoS). LE NIMBE NOIR (lgo6).
XIX.
AniphithôâtB*e des Sciences ntortes I.
II.
III.
COMMENT ON DEVIENT MAGE (éthique), in-8% 1891. COMMENT ON DEVIENT FÉE (érotiqUC), in-S", 1892. COMMENT ON DEVIENT ARTISTE (cslliétique), in-8°,
1894.
LE LIVRE i>u SCEPTRE (poliUque), in-S", 1895. l'occulte CATHOLIQUE (mystiquc), in-8°. 1898. V. TRAITÉ DES ANTINOMIES (métaphysique) in-8. 1901. VI. VII. LA SCIENCE DE l'amour igii ("Messcin).
IV.
Les idées et les Fotfntes la TERRE DU SPHINX (Egypte) I90O. LA TERRE DU CHRIST (Palestine), 1901. l'art ochlographe, in-8'', 1888. LE THÉÂTRE DE WAGNER 'los XII Opéras, scène par scène), 1895. LES XI CHAPITRES MYSTÉRIEUX DU SEPHER BERESCHIT, 1894. LA SCIENCE, LA RELIGION ET LA CONSCIENCE, iSgS. LE PROCHAIN CONCLAVE (instpuctions aux cardinaux) IS98. SUPPLIQUE AU PAPE POUR LE DIVORCE, I904. LA DERNIÈRE LEÇON DE LÉONARD DE VINCI, I904. ORIGINE ET ESTHÉTIQUE DE LA TRAGÉDIE, igoS. LA CLÉ DE RABELAIS (sccrct des Corporations), igo5. DE PARsiFAL A DON QUICHOTTE (secrct dcs troubadours, 1906. INTRIIOUCIIÛN A L'ESTHKTIQUE I906. DB LA SENSATION DAET I907. LA D0CTHIN8 DK DANTE I907. RAPPORT SUR LES BEAUX-ARTS I908.
OB l'human 6ME (sccret de la Renaissance PS l'androcyni 1910.
1909).
(H")
l>ELADAN
L'Art Idéaliste
Mystique^
et
PRÉCÉDÉ DE
LA RÉFUTATIOiN DE TAINE
PARIS BIBLIOTHÉCIUE INTERNATIONALE d'ÉDITIOK
E. 7
6t
SANSOT &
^, Rue
de
l'Eteron,
C" "^
et
^
TBÉATRB PUBLIÉ PaiNCE DK BTZA.NCI, iSt)?, épUÎsé LE FILS DES KTOILEB, 1894, épiitsé. BABYLONK, iSgS, épui.sé. LA PROMÉTHKÏDÏ, 1896, épuisé. ŒDIPE ET LE SPHINX, içjoS, MerciiTe de France. SBMiRAMis, 1904, Mercure de France. i.*
Les Manuscrits de 'Léonard de Yinci, LES tVl IWil^ÛSCHlTS DE L'IflSTITÛT DE f^V^Z^L (Extraits et Commentalrea) 1
vol. in-i8° 1909.
(SANSOT).
LA PHILOSOPHIE DE LÉONARD DE VINCI d'après ses Manuscrits
Bibliothèque de philosophie contemporaine (Alcan).
TROISIEME EDITION
TRAITÉ De UR
PEI^SlTUI^B
de LÉONARD DE ViNCI Traduction complète avec un Commentaire perpétuel et i5o figures, in-8». (Delagrave).
TROISIEME EDITION
TEXTES CHOISIS de
LÉONARD DE VINCI {Pensées, Théories, Préceptes,
Fables et Facéties), traduits en français pour la première fois dans leur ensemble et
mis en ordre méthodique, un vol. in-i8. 1907, Couronné par demie Française (prix Charles Blanc) Mercure de Francet
l'Aca*
A LA MÉMOIRE D'OSCAR LE PACIFIQUE
mon ami M. de Son dé relire sa traduction du Testament d'Oscar II roi de Suède, fai été stupéfait de découvrir un autre Marc Aurèle augmenté de Prié par
française
toute la sensibilité chrétienne.
Je sais
mal son histoire. En 1905 il ne voulut pas la guerre Nord et au cours de son règne il sacrifia
contre ceux du
;
sa7is cesse la gloire
à
la sagesse,
Vambitlon à la justice
:
il
aima la Paix, comme François d'Assise aima la pauvreté ce fut un grand roi selon l'Ecangile, un véritable pasteur d'hommes et parmi les monarques philosophes, il apparaît :
comme «
le
prologue la
plus grand.
Ecoutons
la
voix de notre conscience. La vie n'est qu'un
et ses joies
mêmes ne sont que
le
pressentiment de
pure béatitude. Donnez mol votre main, quel que
réce, et
soit votre
ne disputons pas sur ce que l'humanité ignore.
Ainsi s'exprime
le roi
admirable désir d'une paix que dépasse et s'étend
»
des Goths et des Vandales, dans son
jusqu'au for intérieur.
les matériels conflits
l'art idéaliste et mystique
6 Toutes
les
magnanimités qu'on admire chez Tolstoï, a Vétat le roi Oscar nous les offre plus pures,
fébrile et incohérent,
plus sereines et
même
plus lyriques.
Ce fut un poëte, un grand poète idéaliste, que ce prinee,
vraiment et
comme
très chrétien, les
dans toute
la réalité
de l'expression
:
gens de la politique comprendront difficilement
son magnifique idéalisme, célébrer sa mémoire.
il
J'apporte
appartient ici
aux
écrivains
mon hommage
de
à ce génie
de lumière.
PÉLADAN.
Je suis entré dans
dans <r
chie
l'esthétique,
les lettres,
par
cette
l'esthétique, et
première phrase
:
Je crois à l'Idéal, à la Tradition, à la HiérarJ>
en 1882, je reçenais de Rome. Le
c'était
Salon de Paris
Les artistes
me
stupéfia.
m,' apparurent
dans une telle détresse,
ignorants ou bien oublieux des lesquelles nul n'a la
par
de
lois
jamais œuvré), que je
l'art
(sans
me donnai
mission de leur montrer la craie çoie qu'ils
açaient quitté, à leur plus
Derrière
le
Réalisme se dressait
monstre colossal.
Il jy eut
advient chaque fois que
Mais,
grand dam.
comme
le
Matérialisme,
scandale,
le zèle
comme
il
échoue.
idéalement rien ne se perd,
les
esthètes profitèrent de l'enseignement offert
aux
artistes.
La parole
adressée aux créateurs fut entendue
des admirateurs, qui acceptèrent, en grand nombre,
de purifier leur goût
et d' élever leur
jouissance.
l'art idéaliste et mystique
8 C'est
pour eux, pour
qu'on réimprime L'Art L'édition de
nvystes de la Beauté
les
idéaliste et mystique.
i8g4 portait
la trace
de la hâte
et
contenait quelques expressions de combat, sinon injustes, ((
du moins oiseuses aujourd'hui.
La réfutation esthétique de
Tainei> sert d'intro-
duction à cette esthétique inspirée par la contemd" œuvre.
plation des chefs
Elle ne se /latte d'au-
cune originalité, mais d'une piété sincère ençers les maîtres.
Tai rencontré, dans des ruines d'Asie, un parsi qui entretenait
le
témoin, pour que J'imite cet
feu sacré, sans acolyte, sans
le rite
séculaire ne fut
homme, simple
pas
et entêté.
P.
aboli.
LES DEUX ESTHETIQUES
L'ESTHETIQUE POSITIVE
Les questions
d'art,
il
y a un demi-siècle, se
débattaient entre les professionnels et les teurs. Aujourd'hui,
gent en ateliers; et
beaucoup de salons le
peuple, qui trouve à deux
sous une excellente reproduction de
va par bandes aux expositions
En
ama-
se prolon-
la
Joconde,
comme aux musées.
outre, les artistes, professionnels ou dilettanti,
ont pullulé, au point que
le
prestige de l'art en a
souffert.
Superficiels
électeurs
et
ignares se considèrent
comme
au Saint Empire de la beauté. i*
Une
l'art idéaliste et mystique
10
aux gens du monde comme à ceux du peuple. Quant aux gens du métier, on ne
méthode
serait utile
saurait, sans ironie, les convier au
contemnement
d'eux-mêmes. y a des matières où toute nouveauté est une et la métaphysique, qu'elle traite de erreur II
;
ou conceptible, ne peut innover
l'idéal sensible
que dans l'expression.
Nous prenons en rent Galilée et
le
pitié les
cours du
générations qui jugèsoleil d'après la Bible,
nous trouvons légitime d'appliquer
et
le critère
scientifique aux manifestations esthétiques
On
?
ne différencie pas assez, l'imperfection essentielle de l'Esprit, des fautes individuelles. Dès qu'une civilisation adopte
un déterminisme,
que aveuglément, par instinct
elle l'appli-
par
autoritaire,
esprit administratif, par besoin d'unification.
Convention trines
du
changent
droit divin
décisifs la
fut
La
une autocratie enragée. Les doc;
l'homme
agit de
même, au nom
ou contre ce droit
;
et
les
plus
changements sont ceux des vignettes de
paperasserie et de l'avers des monnaies.
Le
rationalisme
l'Acropole
triomphant
artistique
Raison. Sculpture et
devait
envahir
y installer la déesse Peinture ont eu leurs sans-
culottides, et ce fut le
et
grand contempteur de
la
l'esthétique positive
11
Révolution, Hippolyte Taine, qui légiféra l'anarchie et
donna des
aux
textes
comme
réalistes
Jean-Jacques aux conventionnels, pour substituer à l'ancien
régime de
la tradition,
celui
du bon
plaisir individualiste.
Nous allons étudier la théorie qui a produit les Manet et les Caillebotte et nous saurons pourquoi le Musée du Luxembourg ressemble à un salon annuel,
et
un salon annuel
immense
à une
boutique.
Pendant vingt ans, de 1864 à 1870, Taine professa l'esthétique à l'Ecole des Beaux-Arts.
possédons ses leçons sous
la
Personne, en France, n'a occupé
Nous
forme livresque. si
longtemps une
semblable chaire. Cet enseignement concomite avec notre décadence
;
il
plus bas des gâte-métiers
a fourni des formules au !
L'immortel historien des Origines de la France
contemporaine n'a jamais bien su l'art,
même
après l'avoir enseignée
l'histoire
de
!
M. Delaborde {Des opinions de M. Taine sur Vart italien, {Lett7''e
\^^
janvier 1866)
et
M. Venturi
à Giacomo Barzellotti 1900) relevèrent
beaucoup d'erreurs. La plus colossale fut la méconnaissance du trecento
et
quattrocento
inconcevable de deux siècles,
les
:
négation
plus originaux
12
l'art idéaliste et mystique
plus féconds de la Péninsule.
et les
que Taine
Il
importe peu
mauvais connaisseur, prenant
ait été
un Carrache pour un Gorrège. Je ne jugerai que sa pédagogie, et d'après son texte.
Pour
établir la nature de l'œuvre d'art,
dère trois points
:
il
l'ensemble des œuvres du
artiste, les autres artistes
contemporains
consi-
même
et la civi-
lisation de l'époque. «
L'état des mœuf's, de Vesprit est le
pour
le
public et pour
fréquenté
les
les artistes (1). »
moindres rapins
et les
même Qui a
plus petits
poètes n'ignore pas, qu'il existe
un
l'individu qui cherche à créer
cet état, fait d'en-
thousiasme
d'orgueil,
et
et
isole,
L'homme
autre, de l'ambiance.
femme un modèle
;
état spécial de
qu'aucun
plus
qui voit dans la
dans l'amour une excitation
à écrire, qui préfère un certain rêve à la réalité et
contemple vivre,
la vie
dont
la
pour l'exprimer au
lieu
trouver des lignes et des tons, celui-là, n'a pas le
(1)
même
Philosophie de
de la
jouissance majeure consiste
esprit
que
l'art (1895)
Be Vidéal dans Vart
:
à
l'artiste,
le public.
Philosophie de Vart en Italie
la Philosophie de l'art en Grèce (1869). Ces ouvrages ont été réunis en 1880 en deux volumes intitulés Philosophie de l'art.
(1866)
;
(1867)
;
13
l'esthétique positive
artiste,
Pour comprendre un groupe d'artis-
faut se représenter,
avec exactitude,
Taine pose cette règle
une œuvre il
tes,
l'état
d'art,
un
général de V esprit
auquel
«
:
et des
appartiennent
ils
».
mœurs du
temps
Autant dire que
l'historien sera le seul esthéticien.
La forme, langue tuelle, s'entend
universelle et vraiment perpé-
en dehors de toute érudition. Isdu-
bar étoufîant un lionceau, Héraclès en ses travaux, saint Christophe portant Jésus, manifestent, par
leur gigantisme, la
saltante d'Ankor,
expriment à
un idéal de force.
la
la
la
danseuse
tribune de Florence, à la
il
sur un objet,
n'y a le
à la
a
aimé
Maja de Goya,
Femme au
et
à la
perroquet
que des différences de vision
A
Venise, à
comme au
xix'^
siècle,
œuvré, dans un
état
d'âme
identique, et s'est proposé la
pompéienne,
corps de la femme.
Madrid, à Paris, au xvi® l'artiste
Thèbes,
grâce féminine. Des Vénus de Titien,
Rècamier de Gérard, de Courbet,
L'Isis de
représentation de la
un but semblable dans nue. Aucune révolu-
femme
tion,
aucune catastrophe historique ne modifie
l'état
de concupiscence, ni sa transposition pictu-
rale.
ïaine ne trouve que deux préceptes à donner «
Naître avec du génie,
c'est
l'affaire
:
de vos
14
l'art idéaliste et mystique
parents
c'est
votre
L'Ecole de la rue Bonaparte, non plus
qu'aucune autre, n'a ce
beaucoup,
et travailler
;
affaire.))
mot a un sens que
étourdiment
?
pour
été fondée
j'ignore,
Léonard
a
le
ou bien
génie.
il
Ou
s'en sert
du génie, évidemment.
Luini, BeltrafTio, Lorenzo di Gredi et ceux de la
Lombardie en Si les
ont-ils
musées
et
?
même
le
Louvre
se bornaient à
l'exposition des génies,
que d'espace vide
un peintre de génie au
xix® siècle ? Delacroix
puis? on ne s'entendrait pas sur
du génie* à des élèves équivaut devant des séminaristes. Hélas
!
le travail,
«
!
Qui !
fut
Et
les autres. Parler
à évoquer la tiare
Travailler beaucoup. »
même improbe,
n'aboutit pas
sans méthode. Et qu'est-ce qu'un enseignement qui ne donne point de méthode
?
La science est une botanique appliquée aux œuvres humaines)). On va voir ce que « les principes, les précautions, les fonctions des sciences naturelles communiquent de solidité aux sciences morales ». Et aussitôt surgit une
Parmi
les
grands
classification déraisonnable:
arts, qui sont la 2Joésie, la
sculpture, la peinture,
V architecture
et
la
onusique, ne considérons d'abord que les trois
premiers
».
l'esthétique positive
La poésie graphie ou
un
n'est pas le
art,
15
sinon par
la calli-
dessin des caractères d'imprimerie
typographique? Le propre de
et la disposition
tomber sous
l'art
les sens, et la poésie n'y
tombe
pas. Optiquement, la traduction en vers de
Vlmi-
est de
tation et la Pucelle de Voltaire, une colonne du
Bulletin des lois
On
blables.
homme
Tout
une page de Balzac sont sem-
et
on voit l'œuvre
la poésie,
lit
mais chacun ne
voit,
taines langues dont
il
que cer-
sait l'alphabet et les
n'est pas vrai, en outre,
d'imitation,
lit
d'art.
que
la
mots.
Il
poésie soit un art
ce n'est dans les onomatopées, et le
si
«bréké kékex koax» d'Aristophane tient vraiment
peu de place en la
littérature.
la parole
Il est
dont
Pascal,
sont les formes durables.
elles
bien clair qu'une [statue a
un roman,
».
expression,
il
et,
un homme vraiment moins clair qu'un drame,
L'art n'a qu'un instant pour son faut
donc que cet instant
au plus haut point: tandis que
prend,
objet
esso.yede représenter des caractères y
des actions
ficatif
pour
tout près
d'imiter de
vivant... Il n'est pas
la
La pensée de
période de Bossuet n'imitent rien, non plus que
s'il lui plait,
son personnage au berceau,
par une succession de scènes, ne
tombe, ou
même
soit signi-
la littérature
ne
le
le quitte
qu'à
quitte point, et raconte
l'art IDÉALIBTB ET IfYSTIQUE
16
des épilogues.
Homère trouve Ulysse auprès de
Calypso
ramène à Ithaque
et
le
commencer, par et intercaler le
Le
Sparte.
:
il
pu
aurait
l'histoire de Laërte et d'Anti^lée,
voyage de Télémaque à Pylos
et à
que d'un geste
statuaire ne dispose
pour incarner l'astucieux aventurier. Prenez le père Goriot à la table de la pension Vauquer, rien ne
le
caractérise
vermeil,
il
;
que
durée, que d'un aspect unique
la
à d'autres règles
les aspects possibles, obéit
la littérature,
de temps
son
tord
qu'un art qui ne dispose que
d'une seconde dans
parmi
il
s'élève au point pathétique.
est bien clair
Il
moment où
au
et
que ne borne aucune condition
qui
s'étend
à
succession
la
des
mouvements. Taine prétend que
la carrière
d'un artiste com-
mence par une période de sentiment vrai par
la matière.
7iier
Il
cite à l'appui le
et finit
Jugement der-
de Michel-Ange. Cela m'impressionnerait,
sans cette phase
:
«
On peut
remat^que sur icne autre
Michel- Ange français
».
faire la
vie,
même
celle de
notre
Corneille est fort grand,
mais sans analogie avec Buonarotti.
L'infériorité
des dernières pièces de Corneille vient de l'exécution,
non du plan
;
elles
ne sont plus de son
tandis que le dernier croquis
style,
du maître de
la
17
l'esthétique positive Sixtine est
léonin que nul ne se trompera sur
si
A
l'attribution.
gressait encore « //
soixante ans, Fra Angelico pro!
faut imiter
rapports
les
et les
dépendan-
ces mutuelles des parties », dit notre professeur. Il
aurait
pu
simplement,
dire plus
mais Terreur
proportions;
devenue manifeste. Ces rapports
fût
sont précisément ce que
le
modèle donne
ment. « La logique du corps désigne
les
le travail
»,
très rare-
bonne expression
synthétique de
l'artiste qui,
en
face d'une belle partie, corrige les défectueuses.
Qui
Ange
oserait, sans hésitation, écrire
grand
est le plus
que Michel-
artiste italien et le
tombeau
des Médicis son chef-d'œuvre ? Cette assurance
surprend d'autant plus que Taine a mal vu, appelle
rAwrorg
désespérées
et
?
et la
la
Nalt^ des vierges colossales
Les seins de la Nuit ont allaité, et
son ventre a enfanté
Dans
!
kermesse (qu'iront voir
noce dans VAssoïmnoir)
chœur de flamand
le
Lorsqu'il définit
que celui du lion le tigre ?
de courage
Le
les
gens de
professeur découvre
la
un
ivres de paix et de sécurité,
après les guerres de religion
Et
il
le
!
caractère essentiel,
il
trouve
un grand carnassier. un idéogramme de force,
est d'être
lion est
et à la fois
de magnanimité. Plastique-
.
18
l'art idéaliste et mystique
ment,
tout en tête et crinière, correspond
le lion,
à l'idée de majesté
comme
Au
roi.
;
les
lieu
animaux de
donne une phrase de muséum mâchoire montée sur quatre «
gothique
l'infinité,
:
«
la
fantaisie
lion est
la
différentes,
si
Il
est
la verticale étant la ligne
et spiritualiste
une
comme au temps
s'annulent les uns par les autres.
de dire que
Le
il
pattes.
Ces mots, de valeurs
».
reconnaissent
ayant conçu l'étrangeté,
L'architecture
variété,
le
considérations,
ces
si
simple
ascendante
par excellence, l'architecte gothique
devait l'adopter et l'exagérer. Taine croit à
Famour
il cite André le chapelain, sans se demander à quelle chapelle il appartient d'ensei-
chevaleresque,
gner « que l'amour ne peut exister entre époux ce qui doit s'entendre de l'orthodoxie
»
;
romaine en
opposition avec la religion d'amour des Albigeois
*
On fit de la femme une divinité », dit-il, comme si la Dame des Néo-Platoniciens n'était pas la «
Sophia ou
la
Gnose
L'art reflétant les
!
mœurs,
l'historien
point de chercher la cour de Louis
ne manque
XIV
dans
la
tragédie classique.
(\)
Le Secret des Troubadours
(Sansot.)
.
De ParsifalàDon Quichotte.
19
l'esthétique positive
Achille lui paraît
Nous avons vu
un jeune
officier
aux gardes
!
de Siegfried qui serait
la brutalité
insupportable dans un drame sans musique. Les
bienséances du xvii^ siècle sont une des manifes-
rhumanisme.
tations de Si
Taine avait étudié
au
lie
le
joue,
de
1
le
comme
auteur,
juger par la mauvaise façon dont on
se serait
il
le théâtre
aperçu qu'Oreste n'est pas
si
loin de VOrestle d'Eschyle, et qu'on pourrait l'in-
terpréter helléniquement. Lui aussi, faute d'intimité
avec cet art spécial, se laisse tromper par les mots, là
où l'intonation
est tout.
Gluck soulève
le
note
sans
et
devient
il
avec ritournelle. Appeler
d'ariette
Racine
même problème
flamme,
la
chanté à la
;
un musicien le
théâtre de
peinture exquise du grand monde, c'est
regarder aux perruques et non aux visages, aux
modes
Ange
et
non aux passions.
n'est
D'oii vient
que Michel"
jamais plus colossal que dans
les
enco-
gnures de son plafond? Ses figures géantes grandissent par le
même,
les
peu d'espace où
bienséances
l'intensité pathétique, et
de
il
les contient.
De
Racine augmentent
rendent
significatifs des
mots qui seraient nuls dans Shakespeare. «
L'œuvre d'art
est
déterminée par
l'état
général de V esprit et des mœurs environnantes.))
20
l'art idéaliste et mystique
une formule
Cette loi deviendra plus tard et
on dira
:
« L'état
Comment drait
bases, «
En
scolaire,
général doit déterminer
caractériser
une
civilisation
l'art.» Il
!
fau-
convenir de certains points qui fussent des bien décrire
et
Grèce,
le
jeune
race; au moyen-âge, chevalier
le
personnage régnant.
homme nu le
amoureux ; au
de belle
et
moine extatique
xvi^, le
parfait
homme
de cour, de nos jours, Faust ou Werther. trouve que
féminins
:
les
et le
» Il se
principaux chefs-d'œuvre grecs sont
Victoire de Samothrace, Victoire ratta-
chant sa sandale,
Parques
;
que
le
canon
de
Polyclète est androgyne, et surtout que le statuaire
hellénique est idéogrammatique. Les
mouvements
y expriment des idées.
Le chevalier amoureux cache un mystique un ardent hérétique. Quant au type de Renaissance, c'est 1 humaniste et non le la religieux,
courtisan. Faust ïî^uve. l'alchimiste;
peu
même auteur. « Un personnage ses
il
est aussi
représentatif de nos jours que Vlphigénie
formes expressives
du
régnant, ses dominantes, et acceptées
comme telles,
voilà la formule qui ne laisse rien hors de ses prises. »
Celui
qui
désignera
le
personnage
régnant de notre époque sera singulièrement pers-
L*ESTHÉTIQUS POSITIVE
moins
picace, à
qu'il
2i
ne se contente de l'arriviste
ou du jouisseur, qui sont de toutes
les
époques.
« La plus belle période de l'invention italienne comprend le dernier quart du xvi^ siècle et les trente ou quarante premières années du xvii®. »
Oh vue se
oh
!
!
mérite qu'on s'arrête
ceci
et étant
donnée
A
première
l'autorité de l'écrivain,
rend pas compte de l'énormité de
Le dôme de Pise
!
a été
on ne
cette phrase.
commencé en 1063
;
le
Baptistère par Diotisalvi, 1135, la Tour penchée,
par Bonanno, ^174.
Arnolfo
Cambio,
di
Giovanni
Venise sont en
biffés
d'un
Pisano,
les
ceux du palais ducal à
architectes d'Orvieto, et
trait,
Brunelleschi^ mort
1446, ne compte pas, Alberti, mort en 1472,
non plus. L'architecture italienne
de Taine, avec ture,
Palais Strozzi.
le
Pour
la sculp-
les Pisans disparaissent, Donatello est
à 80 ans, en 1466, et
En
commence, aux yeux
Lucca
délia
mort
Robbia en 1482.
peinture, Giotto et son école, Orcagna, dis-
paraissent avec
Fra Angelico
et
Masolino, et
Massaccio, et Lippi.
Car enfin,
le
dernier quart du xv^, c'est l'an
1475.
Pour Taine,
les artistes
accomplis sont Léonard,
L ART IDEALISTE IT MYSTIQUE
22
Bartolomeo,
Piombo,
Andréa
Michel-Ange,
Raphaël,
le
Giorgione,
En
<(
Sébastien
del
bon de discuter cette deçà, dit-il, des chercheurs
Gorrège.
succession,
Fra
del Sarte,
Titien^
encore frustes, secs
Il
serait
et raides, Pollajuolo, Lippi,
Ghirlandajo, Verrochio, Mantegna, Carpaccio,
Jean Bellin
Madone de
! >
Il suffit
Au
au Louvre,
la
la Victoire, le Parnasse, la Crucifixion,
pour estimer ce qui «
d'aller voir
est fruste, sec et raide
des dise (2^) le s exagérés!
delà,
!
»
Il
n'a
souci ni des condisciples, ni des élèves de Léonard,
du délicieux Sodoma,
ni
Véronèse.
a
La
ni
de Tintoret, ni de
floraison dure cinquante ans
!
»
Quant à Massacio, « c'est icn inventeur isolé » Il ignore Masolino, mort en 1440, et ses fresques de 1428 àCastiglione d'Olona.
Le professeur ne
sait pas, et
il
ne voit pas.
Il
ne
voit pas le paysage chez Léonard, chez Titien, et
auparavant chez Gozzoli, Orcagna «
La peinture
paysage
;
les
et Lorenzetti,
italienne dédaigne ou néglige le
arbres^ la campagne, les fabriques,
ne sont pour
elle' que
des accessoires
l » Ils
n'ont
jamais été autre chose jusqu'à nos tristes jours.
«
La peinture
classique n'est ni mystique, ni
dramatique, ni spiritualiste. et « l'Incendie
du Bourg;
)»
»
Et
« la
et la triple
Dispute
»
scène de la
23
l'esthétique positive
prison de Saint-Pierre, pour se borner à Raphaël?
Cet
((
On
nous
qui
esthète^
Scheffer,
cite
Laymioyeur de
le
aux plus bizarres mélanges.
se plait
trouvera chez Beato Angelico, Durer,
brandt, Metzu,
de
logie,
rêves
intenses...
»
Metzu, Potter et
Hogarth, un intimiste, un animalier riste,
et
et
un
caricatu-
mêlés aux maîtres, pourquoi pas Delacroix...
Troyon «
la
Rem-
Potter, Hogarlh, plus de psycho-
!
Pour que V homme puisse goûte?' et produire
grande peinture,
Nullement,
suffit
il
il
qu'il soit
peinture lui représente
Une Bretonne
faut qu'il soit cultivé. croyant
un thème de
qui ne sait pas
lire,
et
que
»
la
sa croyance.
mais qui
dit
son chapelet avec ferveur, goûtera la chapelle des Espagnols et la
Qui examine
Madonna
dell
les lunettes et les
Arena.
voûtes des appar-
tements Borgia au Vatican ne découvre rien dans ces légendes et ces allégories qui ait le
rapport
avec
les
moindre
chroniques de cette terrible
famille. Si Pinturrichio a peint
aucun
reflet
pour Alexandre VI, sans
du temps, où cherchera-t on l'écho
des vociférations de Savonarole? Les nudités sont très rares
dans
introuvables?
la peinture italienne, les obscénités
Une
lunette au Palais
du T.
I
ai
l'art idéaliste et mystique Cellini,
le
devient pour
plus grand hâbleur de son temps,
Taine
le
type de
le
même
tout du ciseleur,
l'artiste. Il croit
sa prétention d'avoir tué
connétable de Bourbon. Cependant ce grand
pendant son
rageur fut très sage,
séjour
en
France.
A
la vie
lire
qu'il n'y eut
des artistes italiens, on s'aperçoit
qu'un
Cellini.
Torrigiani qui cassa célèbre
s'explique par le caractère de
désobligeant et agressif.
L'histoire
des
férocité
le
:
crime
drames
ou mal
réussi.
comme
l'eau
d'art
;
et
on
on décide
s'il
les
voilà la
:
vie
!
Regardez
de Sienne à Pérousse,
pur,
mystique,
il
est
il
On
plaisir.
ne
il
l'art
il
est
un moine
pigeon d'une bouchée
;
il
de Giotto à
doux,
reflète rien des
X fait représenter devant lui
a pour bouffon
Italie
anecdotes on ferait un tableau
Gozzolli,
Léon
juge
le
Arabie, totalement.
on empoisonne, on assassine, à
de
est bien
Le sens moral aianque en
manque en
En accumulant d'enfer
pleins
sinistres
s'étale partout
comme une œuvre
forme un
républiques
petites
enchevêtrement de
viole,
Buona-
rencontrant Léonard lui-même^ se mani-
roti qui, feste,
il
:
Le coup de poing de
nez de Michel-Ange est
le
la
il
mœurs.
Calandre
il
fait
;
un berner un
goinflre qui avale
chassB)
est
1
25
L ESTHÉTIQUE POSITIVE
capucin dont
la
comédie
est
mauvaise, de façon
un grand coup de ventre sur le plancher de la scène. Parcourez les chambres voici Saint Léon arrêtant Attila, Léon IV éteigna7it V incendie du bourg avec un signe de croix. reçoive
à ce qu'il
:
Les personnages sont aussi beaux, aussi nobles qu'il
que
convient. L'art italien ne représente jamais
l'idéalité
des sujets, et chacune de ses œuvres
donne un démenti aux chroniques.
à savoir pourquoi ce grand talent pittoresque a pris pour principal sujet le corps humain. » Ecole d'Athènes et de la Cène de « Il
reste
V
Milan sont drapées le
nu.
Il
Il
Michel-Ange seul affectionne
faudrait dire que ce grand talent a pris
pour sujet «
:
la personnalité
humaine.
ne jmssait à peine un jour que quelqu'un
ne fût tué à Rome. » Il en est de même aujourd'hui. Mais on chercherait vainement dans la pinacothèque romaine un seul tableau reflétant
les
faits divers.
Ni Vasari, ni Salviati au Palais-Vieux, ni
les
Zuccari dans l'histoire domestique des Farnèse au
château Caprarola, n'expriment l'époque historique. Ces décadents correspondraient troublée, tandis que,
aune période
aux pires moments,
semble œuvrer loin du bruit des armées %
l'artiste et
dans
L^ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
2ê
rignorance totale de ce qui se passe, sur
grande
la
place.
En
vain vous chercherez à illustrer
deBurkhardtet Machiavel. La fresque
le
Journal
et le
tableau
aux
de Cimabué à Raphaël, restent étrangers
aux
comme
attentats féodaux,
révolutions
et
l'art italien
avait
moment,
mythologie se mêle au mysticisme,
mais
la
pour
œuvré dans un moutier.
présenter
voluptueuses.
La
ici
un
des images pacifiques
monument
Sixtine,
exhale une humeur de Titan lisme
A
;
si
et
de colère,
mais l'individua-
s'enveloppe de symboles religieux et
le
spectateur attribue au chrétien les accents indignés
du
citoyen.
Comment un
un
chartier,
archiviste
a-t-il
négligé la chronologie des œuvres, au point de se
tromper sur des
siècles;
comment
de Thomas Graindorge ne téristiques
d'une part
saisit-il
de l'œuvre d'art ? et cet
l'observateur
pas
les
carac-
Cette négligence
aveuglement de
l'autre
viennent
peut-être d'une fanatique volonté de positiviste et
servent d'hommages à Auguste Comte.
Quelle que soit
sauve «
pas
une
la
proposition
Uimagination de
gue à
celle des
valeur de la signature, elle ne
comme
celle-ci
:
Vltalie classique est analo-
anoiens Grées et des anciens
27
l'esthétique positive
Romains. Fénelon
;
On
»
l'excuserait au xvii® siècle chez
de nos jours,
Le quattrocento Taine ne
l'a
est
pas su,
elle scandalise. le
grand
lui qui a pris
Sasso Ferrato pour un Titien
siècle italien et
une copie d'après
el
qui parle d'une
Lucrèce Borgia par Véronèse. Si
«
le
grand art
et
son milieu sont contem-
porains, ce n'est pas qio'un hasard c'est
que
guide les
le
les
assemble,
seco7id ébauche, développe, mûrit,
avec soi
et dissout
accidents du
le
premier, à travers
grand pêle-mêle humain
et les
imprévus de l'origi?ialité personnelle. Le milieu apporte ou emporte l'at^t à sa suite. » Voyons: Fra Angelico est mort en 1455, année
jets
où il achevait
la
chapelle de Nicolas V, au Vatican
Masaccio peignait l'Eve du péché originel, première nudité féminine, vers 1420, en 1428. Signorelli,
le
et
:
la
mourut
précurseur de Michel-Ange,
termina la voûte d'Orviéto commencée par Fra Giovanni, en 1499, l'année où Léonard quittait Milan.
Prenons l'année 1455, Masaccio
un quart de relli
siècle,
Léonard a
est
trois
mort depuis
ans
et
Signo-
quatorze. Le mysticisme du dominicain survit
au naturalisme
et
touche au nouveau mysticisme
de Léonard. L'un résume
le
moyen-âge
et l'autre
28
l'art idéaliste et mystique
moderne et son caractère de complexité inexprimable. Le plus ingénu et le contient la synthèse du
plus conscient,
succèdent
V
Nicolas
y
si
pur
le
et le
fol
Faust de
l'art se
exactement, que de la chapelle de
Baptême par
à Fange du
a seulement quinze années
Verrochio,
il
!
Cherchez, entre ces deux dates, ce milieu pantocraie qui apporte ou emporte
génie fantastique, vous ne «
le
quelques noms,
comme
chrétien,
traite ni
lettré
en
Donalello
connaît
ou Bernin.
à la longue lutte de Vesprii chrétien
de r esprit païen sacristie
ne
la sculpture, si ce n'est
la
«
Italie »
mesure où un
passant et dans
Quant
comme un
trouverez pas.
La philosophie de Fart en
de l'architecture ni de
l'art,
qui
»,
cela
et
réédite l'opinion de
appelle païen tout ce qui n'est pas
comme M.
Jourdain
dit
prose ce qui
n'est pas vers.
Considérons
« la
Saint-Anne de Léonard
:
le
mystère remplit ce cadre qui ne contredit pas à un retable
que
;
;
la
l'expression revêt foi
a
pris
un caractère
esotéri-
des traits plus catholiques,
c'est-à-dire universels.
L'humanisme est ce mode de pensée, indépenlieu, du temps et de la race, qui cherche
dant du
aussi viyernent à percer l'horizon qu'à fouiller la
|.'ksthétique positive
29
crypte du passé ei qui découvre les identités et les
radicaux sous la (ïiversité des images minaisons. L'humanisme
d'un beau corps et honore clarté
du
Saint
François devenu
soleil
percevant, au
le
le
face
Créateur pour
l'humanisme,
;
des ter-
et
sa prière en
fait
c'est le
la
cœur de
cerveau de Léonard,
des rapports d'attraction, les
lieu
relations d'harmonie.
Rapprochez
demandez
à
Bacchus
le
et le
Saint- Jean, ou
vraie physionomie
Eleusis la
de
Dionysos. Vous verrez que les catégories corres-
pondent
à
tempéraments
des
d'époque et non à chit l'idéal
la vérité.
de
non du dogme, mais de
Saint François, n'étant pas
peuple
L'humanisme
même
et
afïran-
la discipline.
diacre, reçut la
profession de celle qui fut sainte Glaire. Ainsi l'hu-
manisme
s'affranchit de la formule ecclésiastique.
L'Eglise, accroupie sur le trésor de vérité, répond à l'interrogation
ment point vague de
;
:
«
Je possède et je dors.
elle est la vérité
vie, obéissant à sa
aussi des trésors.
A
Renaissance,
la
mystique en son art que et le lettré,
le
loi,
;
Elle ne
mais
la
découvre
l'artiste,
plus
prêtre en son ministère
avide de connaissances, dépassèrent la
culture des égregores s'éteignit.
immobile
propre
»
;
et
l'hégémonie sacerdotale
l'art idéaliste et mystique
30
Lorsque Sigismond Malatesta rapporte de Morée cendres de Gémiste Pléthon,
les
le
révélateur de
Platon, lorsqu'il prépare des tombeaux fiques à ses pensionnaires
comme
d'autres
la
Tempio Malatesta,
L'homme
honore
et
sainteté, il
ne
fait
qui met dans son blason l'éléphant et la
hommes
choses et des
hommes
1461 appelle des
et :
sa
un
appartient des
lui existent
sont autres que ceux de la vénéra-
«
prince des traîtres, ennemi
hommes
violer
même
criminel, mais
si elle
il
des
pratique une religion
»,
femme,
contre et la tuer est
il
mais ces choses
sacrés,
l'humanisme. Elle ne
assassiner
:
Cet excommunié, que la bulle de
tion générale.
Dieux
élève le
lorsqu'il
à un mysticisme spécial. Pour
ardente
culture
pas œuvre païenne.
rose n'est ni épicurien ni positiviste
et ces
magni-
la
le
la
gêne point pour
dame
résiste,
qu'il
ren-
Sigismond
croit à Platon,
non aux
dieux d'Athènes qui ne lui représentent que des
formes propres à exprimer son rêve de beauté. «
Des
mœurs analogues
sance) avaient produit
(à celles de la Renais-
un art analogue dans
les
nobles gymnases de Va7icienne Grèce. Des mœurs
analogues, mais dans leur genre
un peu moins
perfides, vont produii'-e en Espagne, en et
même en France, un art
analogue.
»
Flandre
l'esthétique positive
L'analogie des niennes,
florentines avec les athé-
espagnoles,
les
françaises
mœurs
31
les
flamandes
et
les
une assertion qui compte sur
est
paresse intellectuelle
du
la
manque
lecteur et son
de coup d'œil panoramique.
Une phrase
affirme et une dissertation seule
pourrait répondre. Sans faire
le
tableau d'Athènes,
de Madrid, de Bruges
de Florence,
de Paris,
et
quelles sont les analogies entre les Métopes, la
Sixtine, la Reddition deBreda^ la Descente de
Croix, d'Anvers
Pendant l'art
en
trois
Italie,
Poussin
et
ans,
?
Taine exposa l'histoire de
sans la savoir chronologiquement,
sans la comprendre esthétiquement. Puis
aux
Pays-Bas, continuant
humaine
à étudier
passa
plante
la
(sic).
Ouvrons VIdéal dans Vart. Aussi
sommes en quête de «
il
nous
bien,
théories et de définitions.
Idéal qui est conforme à l'idée, qui est elle-même
une représentation d'un objet dans Il
serait
mieux de
dire
l'esprit.
»
:
L'Idéal est la qualification suprême d'un objet
dans le
l'esprit
:
esthétiquement, l'idéal est
le
point
plus synthétique d'une forme. Il
n'est pas vrai
de manifester
que l'œuvre
d'art ait
pour but
quelques caractères essentiels ou
ââ
L^ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
saillants
que ne
plus complètement
et
plus clairemen-
le font les objets réels. Celte définition hé
Le but de
convient qu'à
la
d'agir sur la
sensibilité et de l'ébranler dans ur
caricat
ire.
l'art eS'
sens de noblesse, de réaliser spirituellement
1(
une image la recherch( du caractère ne vient que comme méthode. désir de la perfection par
ne
L'idéal
pas un concours de synthèse e
fait
de clarté avec
;
réel
le
emploie
il
:
les
forme:
vivantes pour l'expression de l'âme ou de l'esprit Il
n'y a qu'un caractère pour l'artiste, la perfection
Notre esthète rapproche
du Festm de Véronèse, d'après a peint
un banquet
cCEmmaû
Repas
le
le titre.
Véronèsi
vénitien, le Christ n'y est qu'
pour prétexte.
Le
d'un tableau ne
titre
rien
signifie
:
soj
nomme. Celui qui étiquettera 1 Joconde « portrait d'une dame florentine » classer ce chef-d'œuvre à côté des femmes de Rembrand caractère seul
et
de Rubens, qui ne sont que femmes. Taiiie
muséum
deux manies
a
l'analogie
et
herbier de
l
art,
et sa critique
ni
le
la
démonstration d
littéraire.
Il
a rêvé d'u
d'une classification scientifique
ne se dégage jamais delà littérature
sa littérature
Racine
:
de ses
catégories
est sa victime sempiternelle,
dhistorien il
ne se lass
33
l'esthétique positive
pas de chercher Versailles dans Iphigènie, dans
Phèdre, dans Andromaque. Louis
XIV
Sans cesse
et
chose lue s^interpose entre
En
chose vue. texte,
une ombre sur son papier.
projette la
La perruque de
face d'une statue,
devant un tableau à
temps; en un mot,
il
lui et la
songe à un
il
chronique du
la
considère les maîtres
On
de simples illustrateurs de l'histoire.
comme
n'est pas
plus de son métier.
M. Marcel Raymond en 1883 a tique de Taine,
il
cédé qui décrit
le
montré
a
écrit surl'esthé-
la faiblesse
de ce pro-
paysage, la façon de manger de
l'habitant })our caractériser ensuite l'œuvre d'art.
On trouvera dans
ce
bon
un choix de
travail
contradictions tellement étranges que le professeur
de l'école des Beaux-Arts y apparaît un véritable étourdi. «
Le classique ne
propoyHionner
et
sali
pas voir
d'ordonner.
sort à tout propos,
IL
il
:
a
s'occupe de
en remonte pas
ses règles
poche à la source du beau, du premier coup, et les
les
vrais artistes.
physicien. et
En
comme
Ceci est indigne d'un méta-
Voir, c'est proportionner et ordonner,
quant à
situer?
»
il tie
la
source
du beau,
il
faudrait la
tout cas, on n'y remont© qu'en
portionnant
et
ordonnant.
pro-
34
l'art idéaliste et mystique
«
la
Par
clefd'ime nature cent mille fois plus
La la
Ruhens avait
delà la nature ordinaire,
richesse de la nature, c'est
viande rouge, lourde,
d'Anvers est
le
ici la
?'iche.n
qualité de
abondante. Le peintre
peintre du style jésuite, en pâte
grasse, qui arriva à
Rome au moment
de
la lutte
entre l'école de Caravage et celle des Garrache.
prend à la
première
la
le parti
seconde l'ordonnance
traditionnelle.
d'imitation et peintre de tempérament,
comme
treize cents tableaux et, «
comme
vigoureux
sa verve...!
Mais
».
il
Artiste
a laissé
disent les Belges,
Michel-Ange, il
Il
pris dramatique et à
il
l'
éclipsa par
n'y a que les Belges,
pour
le dire.
La race n'empêche pas
comme
ressembler,
aussi
les
de
primitifs
maîtres
les
et
se les
décadents.
Rapprochez Sienne
et
Cologne
;
voyez
si
les
quatre tempèramments d'Albert Durer ne s'apparent pas aux
figures de
Fra Bartolomeo
Résurrection de Lazare ne esquisse
de
Diétrich,
Van
n'est
pas
Tintoret
cintre
fait
pas penser à une
comparez d'autre
pari
der Verfî et Sasso Ferrato. Le sol
davantage un générateur
promenade sur le
;
et si la
le
grand canal nous
fait
d'art.
Une
voir depuis
roman jusqu'à Tarchitrave palladienne,
3B
L*ESTHÉTIQUE POSITIVE
comme Paris nous montre, non loin de NotreDame et de la Sainte-Chapelle, le Panthéon et le Val-de-Grâce.
De
tous les arts cependant l'archi-
tecture seule subit l'influence
du milieu matériel,
tant pour le choix des formes que pour l'emploi
des matériaux.
L'heure historique ne concorde jamais avec l'heure esthétique. Seul à son époque
Rembrandt
peignait des tableaux bibliques en Hollande.
Race,
sol,
moment,
se fondent en
un quatrième
facteur, le milieu.
Witt, de Taciturne à « Be Barnevelt aux Guillaume III une suite d'hommes supérieurs conduisent les affaires et la guerre » et l'art peint des ivrognes, des servantes, des bourgeoises et
même
des
dessertes et des natures mortes.
Puget, Poussin, Claude, Philippe de Champagne,
Lebrun, toyens
Lesueur,
sont
contemporains,
conci-
!
Le même milieu
n'a-t-il
pas vu simultanément
Ingres, Delacroix, Millet, Marilhat, Corot, Pradier et
Carpeaux, Gavarni, Daurnier? L'esthétique de Taine est tellement fausse que
l'homme qui en
a
le
plus profité, Emile Zola, la
répudie à moitié.
«
La
théorie est trop simple, les
'interprétations sont trop diverses
;
cet
artiste a
36
l'art idéaliste et mystique
obéi aux idées
de son temps
;
œi
autre a réagi
cet autre représente le passé qui s'en va
annonce Tavenir qui
En commençant
;
cet autre
;
vient. »
ces considérations, j'évoquais
temps où Fintransigence théocratique entrait
le
dans
laboratoire
le
du savant
et
opposait à des
expériences des versets bibliques mal traduits et les
promulgait, avec l'aide du bras séculier.
Aujourd'hui, l'Université ne dispose pas de ce bras, seule différence après tant d'années révolues.
Hippolyte Taine, grand inquisiteur dn positivisme, est entré
dans
l'atelier et
des chefs-d'œuvre
le
a opposé au témoignage
déterminisme scientifique.
Par une bizarre vengeance d'Apollon,
cet historien
a subitement ignoré l'histoire, dès l'instant où
voulu en de a et
l'art.
tirer
dommages
à l'école française
faudra un demi-siècle avant que les erreurs
de Taine cessent d'égarer les jeunes sans
a
Sa mésaventure, punition du sectarisme,
causé de grands il
il
des arguments contre la spiritualité
le voir, le
naufrageur de
artistes. Il fut,
l'art latin,
il
alluma
une lueur sur des abîmes où deux générations
se
sont perdues, efforts et œuvres. Eloignons-nous de ces feux trompeurs et mettons le cap sur (jui soit
vraiment de grâce.
un havre,
I
II
L'ESTHÉTIQUE IDEALISTE
Une
réfutation n'est complète, que
une autre doctrine erreurs d'autrui,
pas connue
et
complètement
il
:
il
ne
suffit
si
on formule
pas de signaler les
faut trouver la vérité qu'il n'a
l'énoncer de façon, à remplacer
le
système ruiné.
Je laisse aux esprits d'envergure démesurée la prétention d'imposer un même déterminisme à la Neuvième Symphonie, aux romans de Balzac, aux
métopes du Parthénon, aux dessins de Léonard
et
aux cathédrales. Je ne m'occupe ici que de ce qui se voit,
exactement des
derai-je à
ne pas
arts do l'œil, et encore
deman-
de l'architecture,
comme
traiter
trop sublime et désormais imjjossible à ressusciter.
Aussi bien, et le
il
n'y a plus d'architectes
sculpteur seuls seront en jeu
;
:
le
peintre
jo ne traiterai 9
l'art idéaliste et mystique
â8
donc que des formes
et
propre,
couleur.
le
dessin et
Le dessin
fut la
la
de la langue qui leur est
première écriture
hiéroglyphe conventionnel sina l'objet. Ici la
comme en
apparaît,
nécessité
et
;
toute activité
c'est
avant
le
algébrique, on des-
humaine
première muse
la
et
l'œuvre initiale s'inspira du besoin.
L'homme
primitif,
sur
le roc,
Le jour où
il
préféra
yeux, la
la
sensation
premier
fut le
un pot
sans regardera sa commodité, pour des
il
avec un éclat de pierre,
pour l'étonnement de son foyer. Ce croquis.
oij
un animal inconnu, en traça
avait rencontré
silhouette
au retour d'une chasse
à
un
autre,
la satisfaction
commença.
esthétique
Peut-être l'avait-il déjà trouvée, mais confuse et
mêlée, dans satisfait,
sa
il
la
grâce féminine, lorsque, l'instinct
hanche de
avait regardé le sein ou la
compagne.
A mesure
qu'il évolua,
devint
il
de plus en plus sensible à ce caractère mystérieux et
d'apparence insaisissable qui
plaisir.
Il
rechercha ce
notion de beauté choix
entre
lui vint
comparer aussi
les
autres
venir,
du
donnait du
Si la
première
de la comparaison
deux femmes,
rer à eux. Ses épouses
lui
plaisir.
il
apprit
hommes reste,
et à se
pour
et
bientôt
du à
compa-
se fairebien
avaient naturellement découvert les élé-
il
3Ô
l'esthétique idéaliste
ments décoratifs chapeau de
le
Son de
le collier
:
la coquetterie
par
laient
plume dans
fleurs, la
plaisir sexuel s'en
son désir et
flattaient
des effets de
regard interroge
le
cheveux.
les
augmenta. Ces inventions
entrèrent dans la case;
où
de pierres brillantes,
et,
le réveil-
Les parfums
variété.
avec eux, la rêverie
les objets et les
considère
spéculativement, pour les considérer.
Maintenant, fille
du
les traditions
vont nous dire que
potier Dibutade, en disant adieu à son
amant, aperçut l'ombre portée sur traça le contour.
un
la
Dans
mur
le
ce profil, Dibutade
et
en
modela
relief.
Si
nous rassemblons ces circonstances qui n'ont
aucune rigueur nous
les
sont simplement
résumerons de
farultè
et
sentir,
diinsi:
par
évocatives,
L'homme possède
la contemplation^
la les
qualité? immatérielles des objets.
demande pardon à l'Université actuelle, la qualité qui fait un chef-d'œuvre d'un pot, matériellement semblable à un autre, cette inflexion J'en
de ligne, cette ineffable modulation de galbe que nulle règle
que par térielle
le
n'exprime
et qui n'existe
divin hasard de Tinspiration,
comme
l'âme qui
La conteraplation des
somme est imma-
en
la perçoit.
qualités
immatérielles
l'art idéaliste et mystique
40
produit un plaisir singulier qui peut aller jusqu'à l'enthousiasme
ou
les
et se
manifester par
comme
larmes,
la
divagation
volupté amoureuse.
la
Le sentiment esthétique est une des manifestaet les arts ne sont tions de la sensibilité humaine que des modes pour la satisfaire. ;
L'animalier,
vache révéla
est très
Potter ou
Troyon, qui peint une
au-dessous du chasseur primitif qui
à ses compagnons
Tauroch. Le sauvage
apportait de l'inconnu et Potter, de la banalité
Potter est
Je suppUe que l'on tolère ces termes forts. s'agit
;
un dégénéré.
de la dignité humaine
;
les
Il
animaliers et
leurs amateurs comptent pour peu de chose.
Le sentiment esthétique a découvert un reflet d'absolu, une perfection dans un vase d'argile ou au cou de
la
femme
beauté est partie de
l'étincelle révélatrice
;
l'objet.
L'eau,
le
de
vent,
la
la
lumière, par leur action sur sa sensibiHté, ont littéralement
orchestré
l'impression d'art. Ces éveillent
les
balbutiements
murmures de
la forêt
de qui
l'âme de Siegfried sont les voix cosmi-
ques enseignant à l'homme
le
prodigieux mystère
de sa conscience.
Quelques-uns, plus sensibles que
les autres à ce
41
l'esthétique idéaliste
de beauté fortuitement découvert, se
caractère
consacrèrent à sa rechterche et à sa réalisation. Si la
première création, selon l'archéologie, fut
vase et
le
seconde l'ornementation personnelle,
la
la bijouterie
armes;
l'art véritable
civilisation
où
et
ses
l'on
ne
commença qu'au jour de
chercha l'expression de
exactement à l'heure
plus
sible,
forma
comme aux
appliquée à la parure
dieux,
pour
oii
l'invi-
l'homme
rendre présents
les
et
effectivement protecteurs.
L^humanité,
ne l'oublions pas,
ne
d'une
lit
façon générale que depuis quatre siècles et elle
pense depuis sept mille ans. Tout ce qui tut au grand nombre, pendant par
la
forme.
si
longtemps,
dit
fut dit
Les arts tiennent donc, pour
la
un alphabet morphologique, avant tout phonétisme. Le rébus se trouve au début de chaque écriture et le blason masse, la place des
lettres.
Il
y eut
au fronton de chaque temple. Gatéchistique ou exhortatif, Fart qui donna aux
images divines une demeure ornée devint
le
com-
mentaire des transcendantales pensées, relations de
l'homme avec l'Absolu,
transitions
du temps
avec l'éternité. L'allégorie théologique occupa
pinceau se
et le
mêla aux
ciseau jusqu'au jour sacrés.
oîi le rite
Le despote entra dans
le
royal
la figu-
42
l'art idéaliste et mystique
comme
ration
vicaire du ciel. Bientôt les
ques usurpèrent sur
dieux
les
et
leurs
monarimages
s'élevèrent isolément, mais les attributs restèrent
religieux.
Le passage de
l'art
sacerdotal et royal à la libre
production des Grecs
et
des Latins exigerait une
multitude de points de vue historiques. Je n'ai
voulu en
que
établir
trois:
esthétique, par essence
;
par une volupté spéciale
beauté
la ;
l'homme
et le
est
un
être
lui est révélée
but de Fart
est,
a
été et sera, de rendre visible et virtuelle l'âme des
formes qui Oui,
me
aux formules où
comme résultat. Comme l'âme, invisible du visage
et le
invisible
s'anime
et
la
la
vie s'impose
seuls manifestent, la
ou imprécise dans
la
nature,
rayonne dans l'œuvre.
Qu'est-ce que l'âme
de
et cette
en soi, et que l'expression
mouvement
beauté,
ménal de
des formes
parait applicable aux arts optiques,
préférable
et
harmonie.
beauté est l'âme
la
définition
est leur
la
volonté.
?
sinon l'ensemble phéno-
haute sensibilité, du raisonnement,
Par conséquent,
la
forme
parfaite
résultera d'un dessin expressif, par une confluence
d'imagination
et
La forme pure
de logique. (celle des
métopes du Parthénon
43
l'esthétique idéaliste celle
de Raphaël), typique ou synthétique, ou
sérielle,
correspond au raisonnement. La forme
et
pathétique (de Michel-Ange) subordonne
organique
à l'extériorisation
le
type
sentimentale.
La
forme subtile ou individualisée (Léonard) aban-
donne
tout
à
fait
le
plan
On
d'après
c'est-à-
l'état isolé.
La beauté
se cristallise
parties
la parfaite
l'intensité,
;
et la
donc sommairement, en
et subtilité.
L'harmonie résulte de
qualité,
forme
est forcé de faire des catégories
harmonie, intensité
des
la
caractère dominant, sans prétendre le
le
trouver à
et
un type mental,
passionnelle, pour créer dire abstrait.
sériel
subtilité,
de de
subordination
l'exaltation
d'une
multiplicité
la
des
rapports exprimés.
Cène de Milan sont harmonieuses, et Rembrandt est
h' Ecole d'Athènes et
deux
toutes
intense
Nuit,
comme Michel-Ange. Dans
la clarté
nationaux
et
la
Ronde de
du miracle rayonne sur des gardes
la
cuisine des anges de Murillo a
dans une atmosphère banale.
lieu
A
Assise,
voit de belles les
la
comme âmes
à
Bruges
et à
Cologne, on
à travers des corps imparfaits,
Bolonais nous montreront de beaux corps sans
âme. On ne saurait classer les
artistes par leur titre
44
l'art idéaliste et mystique
de beauté, pour jouer un peu vulgairement sur
le
mot, dans son sens de valeur métallique.
La Vision d'Eséchiel, pour
le
Grâce,
ce tableautin, l'emporte
style sur la fresque de
comme
la
Mignard au Val-de-
Mélancolie de Durer dépasse
toute œuvre allemande.
Il
de Léonard pour balancer
suffirait
d'une sanguine
la gloire des
Pourquoi? Parce que chacune de réunit
portées
un nombre
Chambres.
œuvres
ses
indéfini de rapports sur trois
simultanées
pathétique
plastique,
:
et
spiritualité.
Ces
trois
correspondent à
portées
la
triple
existence de l'homme. Tantôt la mélodie s'inscrit
sur
la
hgne
sérielle
(Raphaël),
tantôt
sur la
pathétique (Rembrandt), plus rarement sur Tin-
les
Mais toujours
hautes
et
basses s'accompagnent, se lisent aisément
et
tellective (Léonard).
qualifient le concept
ou mieux
figure passe par trois états
:
les
le colorent. Si
une
typique, expressif et
symbolique, l'expression elle-même devra résulter
du mouvement circonstanciel
et
du mouvement
individualisé.
Prométhée au Caucase est un patient, il revêt donc les traits généraux d'un supplicié mais son ;
supplice punit
un
acte à la fois
généreux, que
les
accents de douleur organique
si
téméraire et
si
45
l'esthétique idéaliste
doivent se subordonner à la douleur intérieure enfin, cette
;
douleur agissant sur une conscience
plus qu'humaine,
il
faut qu'elle manifeste le dieu
aux dieux,
le
démon sauveur
rebelle
De même, l'état symbolique d'une pond au symbole symbole c'est
abstrait.
un caractère
le lieu et le
pour d'autres
hommes que
contemporain de
le
l'artiste.
est d'autant plus belle qu'elle se diffé-
rencie des œuvres du artistes
au
affectif,
Ce qui constitue l'œuvre d'art, d'universalité permanente, non
temps, d'autres lieux, d'autres
L'œuvre
hommes.
figure corres-
au symbole
type,
individualiste, qui la rend sensible
temps,
des
eux-mêmes
et
même
artiste,
des autres
de leur civilisation. C'est
le
Chambres et de la Sixtine. Le sentiment de la curiosité historique qui nous amuse aux Noces d'Aune de Joyeuse n'emprunte cas de la Cène, des
rien à l'idée de beauté,
sements de
la
non plus que
Kermesse.
Ni
les
les
trémous-
particularités
momentanées de la civilisation, ni les traits animaux et collectifs de l'humanité ne permettent la beauté. Pour comprendre une œuvre
locales
et
esthétiquement, et di;
il
faut oublier la vie de l'artiste
temps. Si Léonard avait voulu nous rensei-
gner sur Louis Le More,
et
la
cour
de Léon X,
peint autrement.
Ces
ils
auraient
Raphaël sur
3*
l'art idéaliste et mystique
46
maîtres n'étaient pas des chroniqueurs et ne se
proposaient nullement de fournir des documents
aux historiens
;
ils
que dans leur
n'a jamais existé
peint
voyaient un monde idéal qui esprit et ils ont
leurs visions. L'artiste n'appartient à son
temps que par
non de
cipent
la
nature de ses visions qui parti-
la
pensée générale, mais de cette
minorité intellectuelle
toujours
qui est
fait
cC Athènes,
parce que l'humanisme a été
son
chef-d'œuvre
table mysticisme de la Renaissance.
et
le véri-
Rembrandt
en son pays, à peindre d'après
est seul,
l'élite.
avec VEcole
Raphaël a
la Bible
dans un sentiment catholique. Près de nous,
les
Eliphas
Lacuria,
ViUiers,
d'Aurevilly,
comme
le
le petit
nombre.
Quoique littérature
grands penseurs, Ballanche,
Lévy,
grands
les
Hello,
le
poète Verlaine,
musicien P'ranck, ne représentent que
je
répugne, l'ayant blâmé, à mêler la
à la critique d'art, l'immense suite de
poèmes chrétiens qui commence avec dours pour s'épanouir dans
forme un fleuve d'hérésie
malgré
la foi
c'est-à dire
forme
si
écrivains
et
la
l'élite
trouba-
d'anticléricalisme,
du temps. C'est encore
subhme à
les
Divine Comédie
des croyants, qui
la
minorité,
donne une
l'aspiration générale.
47
l'esthétique idéaliste
Comparez Sforza à
à
les
grands artistes aux grands princes,
Raphaël
Léonard,
Léon X. Voyez, de
admirable moralité
quelle
pénétrés de la dignité de
le
;
d'usage
Quelques sculpteurs
ciseau. Soit, mais M. Falguière,
contradicteurs d'une
ses
plus que
façon
dira-t-on pour cela que le pugilat était
parmi
Beaux-Arts
?
les
professeurs
que
Dira-t-on
de les
XIX® siècle étaient ridicules, parce fit
la
couteau en main, en
jugement des concours, empoignait
le
collègues brutale
résulte de
elle
;
l'art.
de second ordre avaient
dans
et
II
Ce sont des créateurs,
supériorité des fonctions.
même temps que le
Jules
à
Signorelli à Fra Bartolomeo,
TEcole des
du
peintres
que Meissonnier
répandre des sacs de farine dans son jardin
pour peindre
la
neige de la retraite de Russie
Rien n'est plus contradictoire aux tiques que ces anecdotes
:
faits
?
caractéris-
autant vaudrait consti-
tuer les anomalies en clés de séries.
Pour comprendre une œuvre
o;i
un artiste,
pénétrer son caractère individuel, ce qui le sépare,
de
l'esprit et des
le
il
faut
marque,
mœurs du temps.
U Embarquement de Cythère, celte féerie sentimentale délicieusement théâtrale, ne polissonnerie
d'alors.
mimique éperdue,
les
Quel
reflète
contraste
pas la
entre
la
mains ouvertes du Poussin
l'art idéaliste et mystique
48 et
geste mesuré
le
de Versailles
!
Quel
autre
contraste entre ces compositions antiques, d'une ligne générale
de
si
sonore, et les déplorables groupes
Van der Meulen
Le miracle de
!
Epine,
comme
dans
période Louis Quatorzième.
la
Le grand l'esprit
les
Pensées de Pascal,
un
artiste est
public,
la Sainte
s'isolent
dissident, en face de
soit qu'il le
devance
comme
pré-
curseur^ soit qu'il le repousse, en qualité détenant
du passé. Aux périodes de formation, toujours il
le rôle
d'avant garde
se rejette en arrière,
pour
et
dans
la
il
joue
décadence
ressaisir le
fil
de
le
tradition.
Ceux qui suivent le courant sont des natures moyennes et partant d'une signification seulement historique et documentaire. Or le document, qui prend sa valeur d'une date
et
d'un
lieu, est
la
négation absolue du Beau.
Qu'on y et
fasse attention
:
le
caractère historique
documentaire, depuis quarante années, appar-
tient à la photographie, avec
une supériorité indé-
moment même
niable. Cette
industrie a paru au
où l'informe
et l'incolore généralisés
impossible
la peinture,
Le chef-d'œuvre-plante, que appliquée à
l'art,
rendaient
d'après les contemporains. c'est-à-dire la botani-
aurait passé inaperçue
ou
49
l'esthétique idéaliste
aurait été dédaignée, dans
sous un
nom
En
sans éclat.
une revue de jeunes et France, le lieu où Ton
parle constitue le principe d'autorité
aux
officiellement,
dit
:
ce qui est
du contribuable,
frais
se
revêt d'un prestige administratif écrasant. Si à la
patente de la chaire, on ajoute rateur l'opinion paresseuse
et
,
Une
le
grade du profé-
bourgeoise s'incline.
doctrine ainsi promulguée est
mesure d'ordre, gistre
pour
l'on veut
Dans celui
qu'il
une
y
comme une
sentiment civique l'enre-
et le
une doctrine, au sens
ait
oii
police.
langage des dîners d'augures, dans
le
curieusement noté par
mousse en paradoxe, où
les
Goncourtoii
l'idée s'écrase
monument
que, on peut dire que le
le
vin
en grotes-
du
naît
sol
;
il
y plonge ses fondements comme des racines sa matière dépend des carrières les plus voisines, et ;
les
grands architectes,
même
leur édifice au site dont
En
personnage. collectif
outre,
un génie
;
pierre ne peut être L'édifice
il
les petits,
l'architecture
fait le
fait
est
l'art
plan, mais l'âme de la
que l'âme d'une
immuable
adaptent
sera l'unique et colossal
foule.
corps avec
le
sol
:
la
statue et le tableau passent de l'atelier aux lieux les
plus
divers
déplacement.
;
et
nos musées sont nés de ce
50
l'art idéaliste et mystique
Dès
lors,
l'œuvre d'art devrait perdre à cette
transplantation, d'une cimaise à l'autre et d'une
une autre embrumée.
salle ensoleillée à
rien
au
:
comme
Muséum comme
British
Il
n'en est
Athènes,
à
à la Glyptotèque de Munich, les marbres
grecs conservent leur signification. Si l'on réfléchit à la brève et fausse notion de l'antiquité, qui est celle
delà plupart, à l'ignorance générale, où sont
même ceux
les lettrés,
même
du quattrocento; à
que
la
la routine de
dévotion prépare à sentir les
fresques d'Assise, on conclut à restreindre telle-
ment
public des
le
chef-d'œuvre
qu'il
ne reste
plus que les conservateurs pour les comprendre, et
encore selon leur département.
En
vérité, l'art crée
sur
milieu,
champ
incessamment son propre
d'or
ou d'azur, sur fond de
paysage ou d'architecture, ou
sombre ou neutre
;
il
même
sur
fond
occupe un plan déterminé
un plan surélevé au-dessus de hi réalité humaine et de l'exactitude historique. Le personnage d'art diflère du vivant, comme l'acteur en scène diffère do l'homme privé. Le par
le style,
cadre ou
le socle
sépare ce monde, de
la fiction,
comme une rampe. « Il
est
d'imiter
bien clair qu'une statue a pour objet
de tout près
un homme vraiment
51
l'esthétique idéaliste
vivant
Taine. Gela n'est pas
», dit
une autre
épithète. Prendra-t-on
Lutteurs de
Tribune ou
la
Taureau Farnèse d'héroïser
?
Une
pour
;
il
vie
faut
type les
Laocooîi ou
le
a pour
statue
l'homme vivant,
La
si clair.
n'est pas la caractéristique de la statuaire
le
objet
c'est-à-dire de le faire
passer du réel dans l'abstrait, par synthèse, pathétique ou subtilité.
Ce
qui
constitue
exactement
beauté d'une statue est
la
l'œuvre
l'écart entre
cet
écart consiste d'abord entre
ou
sériel
l'individu
et
sériel et le
et le
l'idée
et
Supposons qu'il
;
et
l'homme général liiomme
ensuite entre
;
personnage représenté
personnage
modèle
majeure
;
enfin, entre le
symbolise.
qu'il
s'agisse d'une statue de
Promélhée,
sa forme sera belle, animalement; de plus, elle
un peu
sera
un
un démon,
être intermédiaire entre l'éphémère et l'olym-
pien qui
colossale, puisque c'est
;
enfin,
ravit
le
il
faudra qu'elle réponde à l'audace
feu,
à la charité qui le donna, et
surtout à la volonté que ne put épuiser
le
supplice
du Caucase. Supposons encore Œdipe allantau sphinx il est jeune, fort et fils de roi mais son irascibilité le :
;
rend sanguin ou
ne
lui
bilieux, et le plastique d'Achille
conviendrait pas
;
enfin, sa prouesse étant
52
l'art idéaliste et mystique
d'un ordre moral
par
et intellectuel,
il
serait
mal rendu
musculature d'un Thésée aux travaux de
la
lutteur ou d'Hercule.
L'imitation de tout près ne nous donnerait dans
premier cas qu'un Titan
le
dans
le
et
non
le
Titan,
et
second qu'un citoyen de Thèbes au lieu
de son sauveur
et légitime roi.
Ce que Taine appelle
« imitation des rapports dépendances mutuelles des parties » est ce travail du retour au type ou beau sériel, qui ne
et
constitue que le premier acte de l'artiste.
Du beau enfin
un
corps,
il
comme
tel,
doit faire le corps d'un tel et
symbole.
Prométhée sera d'abord homme, puis démon, enfin porteur de états, fils
de
roi,
feu.
Œdipe passera par
trois
héros et devin. Ainsi les maîtres
ont procédé, ainsi les élèves devraient procéder.
La cet
théorie du personnage
dominant présente
inconvénient d'unifier à outrance l'aspiration
d'une époque qu'il
faut
Ainsi ont
et
d'évoquer une image fausse, parce
choisir fait
entre plusieurs équivalentes.
des frontispices et
non de
synthèse.
Un jeune homme nu pour
moine
un chevalier pour
et
le
la
la vraie
Grèce, un
Moyen Age, me
satisfont peu.
Le personnage d'une
civilisation, ce n'est jamais
53
l'esthétique idéaliste
que son Dieu ou ses dieux. Autour de se
groupent toutes
Le
cette idée
les excellences.
Olympien passait pour
Jupiter
chef-
le
d'œuvre de Phidias, avec sa Pallas Athéné. La Madone ne paraît-elle pas le personnage dominant du Moyen-Age au lieu du moine el du chevalier, ses servants?
Il
serait assez difficile de
histoire de l'art avec des
que
tandis
morale,
la
moines ou des chevaliers, donnerait
Vierge
la
succession
Les
Sasso Ferrato.
Giotto jusqu'à
de
former une
vierges du Vinci, de Raphaël et de Michel-Ange
sont aussi significatives que celles des primitifs. Ici,
la si
l'état
général de la croyance se manifeste et
Vierge à VHo^le
du
et celle
froidement vierges et
Vœu de Louis XTII,
lointainement belles,
si
expriment l'époque des chiens dormants
et
l'indifférence en matière de religion. Hébert a
chercher
sa
Flandrin. Le l'esprit
la
vision
cœur ne
conçoit,
comme une
dans
l'archaïsme,
comme
bat plus pour Notre-Dame,
à
travers
figure de l'Inde
les
ou de
la
documents, Kaldée.
Vraiment, pour quel contemporain, Faust le
personnage dominant?
disent les professeurs, et vrai,
qui,
il
Il
est-il
n'y a plus de mystère,
cela
n'y a plus de mystère
comme
de
dû
est
horriblement
pour une génération
Klingsor, a tari la souffrance par la
54
l'art idéaliste et mystique
négation de la vie spirituelle et qui
du trouble métaphysique, à
la
s'est
débarrassé
façon d'Origène.En
d'immortels accents, Musset a exprimé cette for-
midable
loi
de notre nature, que
la
Grèce symbo-
adossant la douleur deDéméter àl'ivresse
lisait, en
de Dionysos. Ce que Taine prend pour une crise
morale qui pendant
humain,
l'esprit
le
Moyen-Age
c'est la faculté
communier avec
a-urait
douleur humaine
la
dé b-aqué
presque divine de et
de
la
consoler, en l'immortalisant.
A
qui fera t-on croire
«
que l'homme, animal
supérieur, produit des philosophies et des poésies
comme La
vers à soie des cocons et les abeilles
les
miel?
le
»
création
d'espèce
?
d'art
donc
serait
Je ne dirais pas,
comme
une
faculté
platonicien,
y a entre le génie et le commun la distance de Dieu à l'homme; mais je sens du Vinci à moi qu'il
un abime
On
et
m'estime de pouvoir
le
mesurer.
une climatologie des œuvres, La loi esthétique se trouve dans l'homme même et non dans sa ville ou sa zone: on
intéresse avec
n'instruit pas.
car Tart sort de
Pour où
la
Thomme,
c'est
son Verbe.
les matérialistes, la spiritualité s'arrête là
beauté typique parait; et
semblera à Taine
a
la
Vierge à la chaise
une sultane sans pensée avec
55
l'esthétique idéaliste
un geste d'animal sauvage Vinci seront surtout
Le Voyage en
Italie
«
et
»,
les
apôtres du
des italiens vigoureux.
»
abonde en notations sem-
blables qui portent l'empreinte d'un systématisme
aveugle et professoral.
Le savant voudrait fermer à tous
qui, jadis, imposait son
monde
le
en cette prétention,
;
il
intellectuel
succède au prêtre
jugement, au
nom
d'une
grâce d'état. Nous ne croyons plus qu'à l'autorité individuelle,
prouvée par des œuvres
nous
silé positiviste
fait rire,
quand
et l'império-
elle se
déguise
en corporation intransigeante. «Powrgt^eZ'/îomme
puisse goûter et produire la gi^ande peinture, il
faut qu'il soit cuUivè.
»
Autant dire que, pour
éprouverl'amour,ilfautdelaIecture.Lephénomène esthétique appartient à la série des attractions.
Nous sommes charmés par une
comme nous l'image,
le
serions par
au lieu d'agir sur
une le
belle
belle réalité;
la
mais
plan concupiscible,
actionne seulement notre conceptualisme
contemplons
image
beauté, parce
qu'elle
;
et
nous
n'est pas
tangible autrement.
La Beauté Admirer,
non
le
se
révèle toujours par la volupté.
c'est jouir, j'entends
admirer l'image
et
procédé, car, alors, ce serait juger, opéra-
tion cérébrale différente.
56
l'art idéaliste et mystique
Il
une grande application pour voir comme
faut
pour entendre premier son
et
;
symphonie. Mais d'art
nul au
premier aspect
ne jouit d'une fresque la culture qui
se détache radicalement
et
au
ou d'une
prépare un plaisir
de l'enseignement
universitaire, et Taine nous le prouve avec éclat.
L'émotivité ne résulte pas de l'érudition. Mettez
Antonio del
Paradis d'Angelico, V Adoration de Vierge au Rosier de Lochner et un Rincon, et amenez devant ces œuvres,
d'origine
diverse, quelqu'un qui ait seulement
ensemble
le
V Agneau,
le
si
la
sentiment religieux,
il
rien de
Van Eyck, de
l'Italie,
ni de l'Espagne.
comprendra, sans savoir l'Ecole
Rapprochez des Vénus de
Botticelli, celles
Raphaël, de Corrège, de Titien, et
de Rubens
:
de Cologne, de
même
de
de Cranach
qui ne verra l'effort pour rendre la
beauté féminine
?
Les bons commentaires sont
ceux qui naissent de
la
contemplation et qu'on
n'écrira jamais.
La compréhension dn sujet est-elle utile ? Non plus que la connaissance du thème pour rimpression musicale. Nous tous, écrivains de métier, nous ne concevons rien sans formules et
des phrases nous viennent à
toute impression
des larmes et du vertige vaudraient mieux.
:
87
L^ESTHÉTIQUE IDÉALISTE
Comprendre,
afin d'expliquer, afin de créer,
côté d'un texte, à propos d'un panneau,
commun
cela n'a vraiment rien de
à
une page;
avec l'obscur,
mais profond émoi de l'enthousiasme. L'essence de l'œuvre d'art n'est ni dans ni
dans
la perfection
technique
;
le sujet,
car les décadents
ont traité les grands sujets et Gérard
Dow
est
peut-être meilleur peintre que Léonard au point
de vue du métier
;
l'essence de l'œuvre d'art est
dans l'impression qu'elle produit. La casserole de Kalf,
citron de David de
le
de velours, de dentelles au s'adressent au criticisme.
gageure
:
le
peintre
et
Il
le
Heem,
les imitations
Campo Santo
de Gênes
s'agit d'un pari, d'une
sculpteur ont
fait
un
tour de métier.
L'essence de l'œuvre d'art est dans
de volupté
spirituelle
qu'elle
le
sentiment
produit. Je relie
hardiment l'esthétique à l'amour, dans son caractère
myrionime
qui descend
du divin jusqu'au
sexuel.
Prier avec les primitifs, jouir de la belle nudité
ou de la pompe avec Titien, rêver, s'émouvoir, méditer, tout se résume
en un
phénomène de
conscience.
Le chef d'œuvre nous a
dit
révèle
nous-même Taine !
que chaque situation nouvelle produit un
L ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
S8
nouvel état d'esprit
par
et,
un groupe
suite,
d'œuvres nouvelles, c'est-à-dire que l'œuvre nait de
faudrait-il
sur
s'entendre
Peut être
manifeste.
qu'elle
d'esprit
l'état
nouveauté d'une
la
situation. L'Imprimerie, la Réforme, la Révolution
ont créé une situation, mais reste le
même, de Durer
L'œuvre
problème plastique
à Ingres, l'expression
l'âme ne connaît pas d'autre
permanent
le
d'art est produite par et
de
en 1911 qu'en 1300.
loi
un
état d'esprit
universel qui défie les modalités de
race et de zone.
La
petite
Kaldéenne du Louvre en
ancienne
la plus
Isis,
comme
plissé soleil,
la lorette
de Gavrani
expriment un sentiment sexuel.
La mosaïque de
la
Bataille d'Arbelles
et la
Bataille de Constantin n'impressionnent pas plus le
savant que
Tignorant.
Quels que soient
les
costumes, des cavaliers de Léonard ou des soldats surpris au bain de Michel-Ange disent à tous la
même
circonstance.
Quel
est
donc
cet
état
d'esprit
universel et
permanent? L'état esthétique.
La Beauté estuniqueenses caractères essentiels. La mèuie rechei'che amène au même résultat. Les chefs-d'œuvre ont
entre eux
un
air
famille et cet air constitue la quintessence de
dô
l'ari;.
:
80
L^ESTHÉTIQUE IDÉALISTE
Avec la gamme, Palestrina a tout exprimé, comme Wagner. Avec la forme humaine, depuis le Sphinx placé au seuil du désert jusqu'au Saint-Jean, depuis la déesse de Thèbes jusqu'à tout a été
Madone,
la
dit.
Le Ghristus Judex de Michel-Ange avec de
comme
Zeus foudroyant,
serait
Dispute
la
la
barbe
personnages
les
du Saint-Sacrement i^ourraieni
devenir grecs et ceux de V Ecole d'Athènes chré-
Le Saint Jean à mi-corps
tiens.
n'est-il
pas un
sphinx, avec des bras? Il
faut classer les œuvres,
selon leur rayonnement. titre l'art,
qu'un individu.
n'est pas
Il
de nous intéresser
réalité
comme les personnes, oeuvre vaut au même
Une
à une
au pouvoir de
image
la
nous ennuierait. Les Syndics de Rembrandt
nous assomment en peinture, parce
assommeraient en ils
dont
représentent des
n'admet
pas
réalité.
Ils
intérêts
ces gens-là,
:
au domaine des
nous
sont des syndics,
matériels.
dans
Tel banquier de la Renaissance a
Apollon
qu'ils
son le
formes
Le beau domaine.
visage d'un
il
est
donc
non banquier. Le portrait de Durer à Munich passerait pour un beau Christ. Ce n'est donc pas un portrait, malgré la ressemblance,
Apollon
et
Les intentions
même
pures
ou
sublimes,
ne
LART
60
IDÉALISTE ET MYSTIQUE
comptent pas. Beaucoup voient des merveilles mais ne peuvent
esprit, d'art,
une
étant
Sphinx
Madone
la
et
eri
l'œuvre
doit être jugée en fait.
réalité,
M. Luc-Olivier Merson
endormit
les réaliser. Or,
eut une
idée géniale,
il
du grand
entre les pattes
son tableau cependant n'est pas un
chef-d'œuvre. Je
ne suis pas convaincu que
matériel ou
physique
soit
pathétique
le
canonique
et
qu'on
puisse représenter les miséreux, les vieillards et les
malades,
ce n'est dans le mariage de Saint-
si
François, les prophéties elles scènes miraculeuses
où
cet accent
douloureux
sert à
un thème essen-
tiellement symbolique. Peindre un pouilleux pour le
peindre est un acte de peintre
abime entre un
;
et
il
y a un
art et l'art, entre la peinture et la
beauté.
Trop longtemps, on a à
insulter
la
laissé
l'homme de métier
métaphysique, par une virtuosité
insolente.
Celui qui ferait flotter du pollen autour d'un
bouquet
serait certes
un habile
;
mais
la maîtrise
appliquée au trompe-l'œil ou à toute imitation
correspond, chez l'exécutant, ciateur,
comme
chez l'appré-
à un véritable abrutissement. Nul,
n'est peintre
s'il
ou sculpteur, ne doit accorder son
\
61
l'esthétique idéaliste
à
attention
peinture et à
la
réservera toute pour la
la
beauté
sculpture
;
la
il
exprimée,
par
n'importe quel procédé. Qu'est-ce que Vénus? La plus belle femme. Et
Apollon? Le plus bel homme. élèves des Beaux-Arts
Apollon
dites-leur
»,
et le plus bel
de dire aux
une Vénus
et
un
femme
Faites la plus belle
«
homme.
Faites
«
:
:
Au lieu
»
La plus belle âme de femme. Qu'est-ce que Jésus ? L'âme divine dans un corps humain. Qu'est-ce que la Vierge
Il
est bien clair
Aphrodite,
Freia,
que
la
?
plus belle femme, Istar,
susceptible
de modification,
virginale pour Artémis, cérébrale pour Athénée,
matronale pour Héra
;
que
le
sera pas identique, sous les
plus bel traits
homme
de Dionysos
ou de Platon, d'Asclépios ou de Thésée Vierge-Mère
peut
être
ne
;
que
la
vue ou juvénile dans
l'Annonciation ou douloureuse dans la Pieta et
que
Jésus des Noces de
le
chasse
qui
celui
les
Cana
est
un autre que
vendeurs ou celui-là qui
porte sa croix.
Mais
moins que bien
il
le
est certain aussi
quePythagore pourrait,
bonnet, prendre les traits de Léonard, et
l'Aristote et le Platon de
tout
nom
Raphaël porteraient
de penseur, Cette
considération
LARt IDÉALTSTB ET MYSTÏQÛE
62
susceptible d'un développement indéfini aboutit à cette
formule
:
y a des modes dans V art qui correspondent
Il
à des catégories mentales
du prisme
expressif.
Ici, la
prendre un nombre sacré, ple,
et
mais
il
;
le
ce sont les couleurs tentation est vive de
septénaire par exem-
de donner l'analyse du spectre mimique
;
convient de renoncer aux énonciations,que
l'époque déteste, quand on peut avoir raison sans attenter aux susceptibilités contemporaines.
On accordera où
la
dans
bien qu'il y a
commande
théodicée
la
Ronde de
l'irréalité
qui
VAnge de
fait
un mode et
;
nuit, qui est
de
Tobie,
la
Pièce
sacré, celui
on reconnaîtra
une ronde de jour,
aux cent
florins^ de
des Pèlerins d'Emmails, des
œuvres vraiment religieuses
;
et
on
accordera
également que ces œuvres sont plus hautes que les
Syndics
et
que
Leçon d'Anatomie, parce un idéal suréminent.
la
qu'elles matérialisent
L'esthétique étant, d'après son étymologie, une entreprise de sensibilité, recherche ce qu'une œuvre fait sentir,
sans souci du
sujet (ancienne
moyen
(technicité) ni
du
catégorie). Ainsi l'art s'adresse à
tous et surtout aux
illettrés, awi3?pwr5
sachant par
compassion^ littéralement. Cette doctrine de'range tellement les intérêts les
63
L ESTHÉTIQUE IDÉALISTE
plus
nombreux
et les plus vifs, elle
attaque tant de
situations frauduleusement acquises et ruine tant
de commerçants, qu'elle rencontrera une résistance
dénature économique,
Pour
écrire
n'avoir pas
remplace la
que
d'un caractère désespéré. imite la nature,
faut
il
que, dans l'œuvre, l'idéalité
réfléchi
vie. L'exclamation
loue que le peintre les Juifs
et
l'art
;
:
«
Vhinocent
de Rembrandt,
les
C'est vivant
X de
»
!
ne
Vélasquez,
personnages d'Holbein
sont vivants. De quelle vie? Historique ou seule-
ment matérielle? Donnons à ces toiles
vite le prix d'exécution
destinées à une Académie^ et allons
voir le reflet de notre conscience dans des d'art
œuvres
qui nous parlent d'autre chose que de la
couperose d'un pape
ou de
la
bonhomie d'un
bourgeois. L'art nous doit le
mot
offusque,
un spasme transcendantal et, si un baiser de mystère qui épa-
nouisse notre sensibilité, accélère
notre vie céré-
brale et nous suscite de l'émotion et des idées.
Pour
le
uns, l'immoralité dans
les
à la nudité
;
déshabillé,
Saint-Pierre de jésuites,
anges.
le
l'art se
borne
les bras, les cuisses nues, c'est-à-dire
ne gênent point nos clercs,
Rome, comme dans
retroussé
fleurit
et,
les églises
à
des
aux draperies des
l'art idéaliste et mystique
64
A sées
l'œuvre qui fomente la concupis-
vrai dire,
cence est basse !
mais combien rare dans
;
Les amateurs de photographies d'actrices ne
du Gorrège
s'arrêtent pas devant VAntio2:)e
donc a éprouvé un
Pour
en face de
désir,
belge Wiertz
ment
le
la
dans
les autres, la moralité
d'une volonté moralisatrice
prend
mu-
les
comme
qui
Milo?
l'art
celle
:
s'entend
du peintre
l'œuvre alors, thèse pathétique,
;
caractère d'un sermon et tend positive-
à inculquer
au spectateur une vérité pratique
et à modifier sa sensibilité
dans un sens de charité.
Des sensibleries de Greuze aux Cassews de Pierres et
au Retour de la Conférence par Courbet
aux mineurs de Constantin Meunier, on dessein, Est-il
besoin de protester contre l'œuvre qui
fins dernières,
a
un
vaguement prêcheur ou polémique.
sermonne ou Tœ
Ange
suit
et
un
la fragilité
d'Orcagna, de Signorelli, de Michelsens exhortatif,
de
Le rappel aux
ivre qui plaide?
Ihomme
et
mais
s'inspire
du mystère qui
de
suit la
mort, au lieu d'avoir ses textes dans les programmes politiques. Montrer le paradis et l'enfer, la justice
divine saisissant juste,
c'est
le
coupable
rester dans
l'idéal
et
couronnant
typique
;
car
le
un
Egyptien, un Hindou, un Persan retrouverait sa
propre mentalité dans ces conceptions, malgré leur
65
l'esthétique idéaliste extériorité
La
latine.
pire
mésaventure
qu'on
puisse évoquer serait celle d'une école moralisa-
s'appliquant aux anecdotes des recueils de
trice
bons exemples.
La Beauté opère par augmente en nous
vie de
la
magnifique qui éclaire
Un
volupté.
et dilate
la
chef-d'œuvre grâce,
miroir
notre personnalité.
D'abord, la Beauté nous dissuade de toute vulgarité,
nous inculque
elle
yeux
;
elle est
le
vrai
le
mystère pour
sensible,
elle est le
les
bien
de Dieu.
visible, elle est le visage
Nous vivons
de perfection et
l'idée
d'harmonie. La Beauté est
intellectuellement
de
mystère
comme
Faust, nous vivons animiquement d'aspi-
rations
au bonheur ou à
la justice
comme Promé-
thée; etrart,créé par la religion, devientla nouvelle
religion
pour
les
sans cesser d'être les prêtres
de
hommes qui hommes et de
l'art se
cessent de croire sentir.
Seulement
recrutent autrement que les
autres, et leur ordination
n'appartient pas à
un
simple évêque.
Tout tère
est
découvre une sorte de blasphème
et je
expliquer
mystère chez ces proférateurs du mys-
humainement
turel, qui ont inventé les
étendirent
notre
à
ces êtres au verbe surna-
formes de nos songes
et
horizon intellectuel, de toute 4*
66
l'art idéaliste et mystique
Celui qui supporte le
leur force d'illumination.
pittoresque,
c'est-à-dire
même, ignore
la
pour
peinture
la
elle-
augmenta-
dignité de l'art et les
de personnalité qu'il peut en recevoir
tions
;
ressemble à celui qui s'arrêterait à contempler
il
la
structure d'un épi au lieu d'en tirer sa nutrition.
Le conseil de Gœthe que Taine a répété avec une vénération inconsciente, a produit dans
même
l'œuvre
de
Gœthe
le
Général-Citoi/en,
le
Grand Cophte, Clavijo, des choses mort-nées le nom qui les soutient.
sans
Se figure t-on Balzac peintre ou sculpteur? Le
roman, qui
est à
proprement parler
l'histoire
d'une
passion et dont l'intérêt tout psychologique dépend d'analyses successives, cité,
il
n'a pas besoin de plasti-
ne s'adresse pas aux yeux. La comédie en
peinture,
qu'il
s'agisse
du
de Steen ou de
rire
Téniers, des singes de Decamps, des augures de
Gérôme, produit un pas volontiers, que et
de prestige,
lustrer
du
poil,
la
effet
On n'admet
de malaise.
couleur, cet élément de gloire
soit ravalé
à frotter du cuivre, à
ou à augmenter
le ridicule
d'une
grimace. N'éprouve-t-on pas un déplaisir à voir laideur, la vieillesse, très ornées
de Miranda au cou de tueuse
de Prospéro sur
?
Quoi
!
Sicorax, la robe
Calibàn
!
la
les colliers
majes-
Et encore
le
67
l'esthétique idéaliste
monstre, dragon, gargouille, Quasimodo,
comme
figure de bas plan peut se justifier, par l'antithèse et l'intensité
de cette antittièse
où l'ouvrier
et l'élégant
où
le
manuel
travailleur
où l'uniformité règne, où
;
mais à une époque
portent
le
s'habille
le
même veston, comme l'oisif,
chef de l'Etat ne diffère
de son maitre d^hôtel que par un sautoir rouge,
problème
de
représentation
la
devient insoluble, et
le
contemporaine
Bertin d'Ingres ne suffit pas
le
pour déterminer un genre. Les personnages de Velasquez, laids, inhumains et
n'incarnant que
tique, offrent
le
despotisme à base théocra-
au moins un caractère de concentra-
tion, d'exception
morale. Visiblement, ce sont des
individus redoutables dessein que d'habit.
A
et sinistres, la
aussi noirs de
rencontre, on les fuirait.
Cette disgrâce, qui résulte d'un aspect médiocre
sans style ni chaleur, domine n'avait pas sa vraie tête, toire à
l'art entier.
mais
la plus
Socrate
contradic-
son génie, tandis que M. Thiers, ce sinistre
Niebelung de
même.
Il
la
bourgeoise, ressemble bien à lui-
est aussi redoutable
qu'aucun podestat
de la Renaissance et cependant le crayon ridiculise
toujours ce terrible Alberich.
fut
le
Moreau
César Franck
grand musicien de son temps le
plus idéaliste des peintres
;
;
Gustave
tous deux
LART IDEALISTE ET MYSTIQUE
bo
ressemblaient
à
des
un peu de
portent pas
de
notaires
l'exercice du pouvoir absolu
et le
province.
génie ne com-
dans
style,
en trouvera-t-on parmi ceux que passionnent
intérêts
l'extériorito,
médiocres
les
ou bien ira-t-on,
;
Si
comme
font les stupides élèves de la villa Médicis, peindre
des paysans, c'est-à-dire des êtres rudimentaires?
Comparez
comme
Raphaël,
élevé,
les
et
autrement,
et
que ses autres
question
personnages de
les
voyez
si
Courbet ne
avec un sens plus
ligures.
du modèle,
personnages des peintres
portraits
par eux-mêmes
se traite pas
la
et
les portraits et les
Comparez
d'Ingres. réalistes
portraits
les
Il
semble que
ou
non, est
dire la
pompeuse
suffisant
tranchée.
A
aucune époque, on n'a pu
phrase de Gœthe: «Emplissez votre esprit
cœur des sentiments et
et
l'œuvre viendra
».
L'œuvre
venue qu'aux
n'est
temps
artistes emplissaient leur esprit et leur
sentiments permanents
Aujourd'hui
le
et d'idées
où
les
cœur des
sempiternelles.
sentiment du siècle est une aspi-
ration au confort ou
au luxe
à changer de toilette et
femme.
et votre
des idées de votre siècle,
;
la
l'homme
femme
aspire
à changer de
69
l'esthétique idéaliste
Ah
thème
beau
le
!
Nous avons secoué rons-nous
ment Il
le
que
ceux-là pour
la
le haut-relief.
fresque et
l'autorité spirituelle
celle des fonctionnaires et
:
subi-
de l'enseigne-
?
y
a plus d'audace à critiquer Taine, alors
positivisme est d'Etat,
qu'il
que
n'y en eut à se
gausser de la Bible, au temps de Voltaire.
Quand on pense qu'un homme a pu affirmer publiquement et
:
un moule
{(De nouvelles foo'mes appat^altront
se
rencontrera
»,
pour
cette raison
drolatique que tout changement de mœurs amène un changement d'art. aLeprogrès del'expérietice est infini
:
indéfinies sociétés
applications des découvertes sont
les ;
la
machine politique
protègent
propositions
ne
les
talents...
tiennent
pas
s
améliore, les
y>
Ces folâtres
un moment à
la
réflexion.
Après Raphaël, après Durer, après Rembrandt, après
Rubens, après Vélasquez, aucune forme
n'est apparue,
de l'Arno au Rhin, ni de l'Amstel à
l'Escaut et au Manzanarès.
Léonard, malgré le
maître dont
le
progrès de l'expérience, est
les peintures
ont
le
plus perdu.
seulement nous ne savons plus teinter
Non
les vitraux,
mais nous ignorons comment un Gérard Dovf
l'art idéaliste et mystique
70
fabriquait ses couleurs. Michel-Ange attaquait le
bloc
et
nous
livrons au praticien.
le
Les applications des découvertes de M. Ghevreul
nous donnent quatorze cents teintes, mais des teintes les gens de la cinquantième avenue.
bonnes pour
pour
Illusion
illusion
!
Celles d^antan valaient
mieux. Voyez ce qui sort des écoles municipales c'est
inexposable
que
le
sa portée optique. Expéri-
de demain saura autant
savant d'aujourd'hui. il
n'y a pas de succession. Après
le génie vient la médiocrité
point d'écoles,
il
divins et d'autres fils d;i
digieux le
et,
à vrai dire,
et aussi
n'y a
notaire et delà paysanne, Léonard, plus
comme
I®',
bon
comme un
saint,
mystérieux que
le
la
Cène
mystère, par lui-même,
une plante florentine ou lombarde, ni
un homme
pro-
Faust, aussi fort que Michel-Ange
Carton, aussi suave que Raphaël par
n'est ni
il
y a des hommes plus ou moins hommes appliqués qui les suivent.
racé qu'un Charles
par
sa
comme
Esthétiquement,
Le
comme
est limitée,
J'écolier
force physique,
mentalement,
!
humaine
L'application
!
même
puisqu'il possède l'attribut divin qui
est de créer.
Bien au-dessous de
adorables, Gorrège, Luini et
son rayonnement.
le
lui,
mais encore
Sodoma prolongeât
L^ESTHÉTIQUE IDÉALISTE
71
L'histoire de l'art est celle de quelques indivi-
dus.
Entre eux, on met cinquante noms qui ne valent
que
comme
diminutifs de leurs
ces cinquante, de degrés pour
noms
!
mesurer
Ils
servent,
les géants,
dont, sans eux, nous ne connaîtrions pas la véritable stature.
Natura non
facit aaltus.
Avant
et
après le génie, on ne se prosterne pas, mais on
admire encore.
Le nouvel
inquisiteur, le matérialiste qui pose
ses étiquettes d'apothicaire sur les chefs-d'œuvre,
ne vaut pas mieux que son prédécesseur dans fruits
la
avec
même
cosmologie. Jugeons les doctrines à leurs celle
:
qui,
pour pierre de touche, intervenait
la Bible
de Taine a permis au réalisme et à
l'impressionnisme de se produire, d'occuper
gens raisonnables fastes
dans
et
les
de marquer une date dans les
du goût. Avec
lui,
l'anarchie a pris place
la cathédrale esthétique.
Quel spectacle lamentable que celui d'un salon annuel
En
!
il
ne donne pas la mesure de
la
décadence.
interrogeant les élèves des Beaux-Arts, on s'a-
perçoit que le
mot
«
école
»
ne correspond plus
à une réalité et que l'enseignement échappe à la critique, car
il
n'existe littéralement pas.
nier qui eut des principes,
Gérômt,
les
Le der-
démentaii
tË
l'art idéaliste et mystique
par
Les
production.
sa
jeunes
eu
artistes,
France, livrés à eux-mêmes, sans conseil, sans
méthode, se perdent dans
la bizarrerie
ou
le
mer-
cantilisme. Ils méritent cependant qu'on s'intéresse à leur désarroi. Celui qui leur parlera
le
de l'amour, qui, au lieu de leur raconter
on
comment
des chausses mi-parties en 1499,
portait
Milan,
langage
tiendra des discours de
d'enthousiasme,
celui-là
foi,
à
c'est-à-dire
sera entendu,
celui-là
sera suivi. L'art de la beauté,
France se meurt parce que nul n'aime
comme
saint François
aima
la pauvreté,
éperdument.
Un homme
de
la
valeur de Taine ne peut pas
passer vingt ans sur une matière sans rencontrer
quelque vérité
quand
s'est
il
de VArt,
II
devenir son propre réfutateur
et
trompé.
259)
:
i<.
Il
On
peut
lire
{Philosophie
a pour chaque objet une
forme idéale, hors de laquelle tout est déviation et erreur et on peut découvrir un principe de\ subordination qui assigne des rangs aux diverses:
œuvres
d'art. »
L'art a
pour but de manifester l'essence des
choses. Précisons
forme idéale l'informe.
ce langage d'universitaire.
est la seule
forme
;
toute autre
La esti
?3
L ESTHÉTIQUE IDÉALISTE
La hiérarchie des œuvres
le
degré
âme ou
esprit
s'établit
par
d'idéalité réalisée.
L'esssence des choses s'appelle
dans
les êtres.
Par conséquent, l'esthétique
méthode qui,
est la
appliquée aux arts du dessin, enseigne aux artistes la création et
aux autres
la
contemplation de la
forme idéale, expressive de l'essence des choses et de l'âme des êtres.
Louis
XIV
fut
vraiment un grand esthète, en
face des Téniers, et
un jour l'opinion dira aussi
aux conservateurs des musées
;
Otez-moi de
«
là
ces magots.
Une esthétique est toujours, même à Tinsu de son auteur,
le
politique.
entre
le
fragment d'une philosophie, voire d'une
Des connexités, maintes
Beau,
méthode où
le
la
Vrai
et le
croyance
au véritable objet de
la
Bien, déterminent une
devait tenter
morale se substituent
et la
recherche.
Taine positiviste, imbu d tifique,
fois signalées
une
!
déterminisme scien-
critique rationaliste de
l'art.
Les écrivains
même
faute.
traditionalistes
Prenant au
littéral
Vasari, dans la vie de Bufîalmaco, les trecentisti n'avaient d'autre
commettent
la
une phrase de ils
but
«
assurent que
que de
glori=
l'art idéaliste Et MYSTIQUE
li
fier les saints et
de rendre les
hommes
meilleurs
».
Dessin implicite peut-être, mais qui convient mieux à des missionnaires qu'à des artistes. L'intention
ne
est pavé,
dans
rien
signifie
les
œuvres.
Si
l'enfer
en
musées en sont tapissés. Le génie glorifie le modèle ou le sujet,
les
du peintre seul et
si
en
effet le
l'homme
maîtrise que «
spectacle de la perfection rend
meilleur,
plutôt
c'est
une question dg
de charité.
Cette statue (le Moïse) est au moins décente,
tandis que celles de la chapelle des Médicis sont
d'une révoltante nudité.
M. cisme
Cartier
donne
officiel.
tragique de
la
»
ainsi la mentalité
Même
interprété
catholi-
avec l'austérité
chapelle Médicis,
manière d^époiivantail, sur juge pas,
du
le
nu
agit en
l'esprit clérical
;
il
ne
exorcise,
puéril
et
obéissant à une notion
niaise,
mais imposante,
et redite
il
superstitieux,
par des voix très autorisées, de siècle en
siècle.
L'Arétin aussi fut scandalisé par Michel-Ange et
demanda au Pape
dernier. On nés. Mais
fit
la destruction
du Jugement
braguetter tous ces élus et ces dam-
aucun dissertateur
ecclésiastique ne s'est
avisé des cuisses d'angesdela chapelleClémentine,
des amours jouant avec les attributs de la Foi sur
78
l'isthetiquk idéaliste les pilastres
de Saint-Pierre, ni de
la
Véronique
colossale dansant la danse
du châle, non plus de
l'Extase de sainte Thérèse
du Bernin, ce monu-
ment
d'érotisme, d'une lascivité
Pareille disposition de la
si
vive.
sensibilité obscurcit
l'entendement. Celui qui n'est pas assez avancé
dans
l'initiation plastique,
des bienséances
pour s'élever au-dessus
communes
devrait rester tout à
fait
et
de l'effluve sexuel,
un honnête homme
et se
sur «ne matière où la morale s'appelle
taire
le
style.
Une
peinture ne mérite pas l'épithète de sacrée
parce qu'elle représente' une scène ou un person-
nage de
la foi.
Le caractère ne vient pas du façon dont
il
Ceux qui
nom
sujet,
mais de
la
est traité.
font à Michel-Ange des procès
au
de l'honnêteté, en instruisent aussi contre
Raphaël, qu'ils jugent moins chrétien d'inspiration
que
le
délicieux,
mais monotone
et
douceâtre
Pérugin.
La Dispute du Saint Sacrement, VEcole cfAihènes se font face dans
la
même chambre du Vati-
can. Essayez de convaincre, je ne dis pas
du commun, mais un cardinal, que très inférieure à la seconde,
un prêtre
la
première est
comme
composition
76
l'art IDEALISTE ET MYSTIQUE
sacrée, et vous passerez facétieux.
Il
pour un esprit paradoxal
et
n'y a desacré que certains personnages
et certains sujets, et
exclusivement
pour un
littéraire,
homme
de culture
des philosophes seront
toujours profanes.
par
Placez,
la
pensée,
Léonard sur un autel
;
Sainte
la
Anne
de
vous produirez un malaise
indéfinissable au dévot, alors qu'il se plairait
au
dernier des Carlo Dolci. Il y a deux raisons à cette méconnaissance. On ne veut pas admettre d'autre vérité que celle de son
habitude
;
et le Jupiter d'Ostricoli et la
Giustiniani n'appartiennent pas^ pour l'art religieux.
Minerve
un dévot, à
Cependant, ces figures rayonnantes
d'immortalité l'emportent sur beaucoup de Pères Eternels et de Madones,
La même répugnance
manifestée aux dogmes étrangers, on l'éprouve
aux expressions nouvelles. Une paresse originelle s'arrête devant le
renouvellement des thèmes
chrétien retrouve plus aisément sa piété
;
le
mouton-
nière dans la fadeur sucrée d'images nulles que
réprouve, au conlraire,ungoûtpurementartistique.
Une
certaine niaiserie
caractère
conçoivent
religieux, :
et
tel
fait partie
que
les
intégrante du
pratiquants
les libres-penseurs,
déclarent profane tout ce qui est
viril et
le
en retour, canonique,
77
l'esthétique idéaliste
Prétendre, avec Taine, que la Gène du Vinci n'est
qu'un groupement «d'Italiens vigoureux» ou avec M. Cartier cherchant à caractériser
que
«
société
dont
la
Renaissance
ennemi voulut rentrer dans
l'ancien il
avait été
chassé
»
cette
sont de ces
formules pitoyables qui désolent les bons esprits.
Réduire l'intention de Léonard faire intervenir le diable,
répugnantes',
filles
si
bassement ou
voilà deux
absurdités
toutes deux du fanatisme et de
l'ignorance.
^ y a quelque impertinence à répéter ce mot propos de Taine, mais il le mérite autant que Il
r
M. Cartier. Ni l'un ni Renaissance.
l'âme de
En
l'autre ne connaissaient la
face des nus, l'un n'apercevait pas
ces nus
son matérialisme,
et les
calomniait an
l'autre les exécrait,
et
nom de comme
fidèle obtus.
Aujourd'hui,
la
doctrine
cléricale
n'a
plus
besoin de réfutation; elle n'exerce aucune influence et ce serait
un gaspillage d'encre que de nier
le
rôle de Satan dans l'éclosion de l'humanisme.
Les erreurs sacerdotales n'offrent plus aucun danger.
Au
impérieuses,
contraire,
celles
des universitaires,
menaçantes, presque triomphantes,
appellent la réfutation.
78
l'art idéaliste et mystique
Jamais en Champagne on ne pensera comme en Auvergne, parce qu'en Champagne il y a de la craie, et en Auvergne du granit, parce que l'un de ces sols est plat et l'autre
montueux de
particulières, des
;
mœurs
là
dérivent des cultures
spéciales, et les
d'abord les idées, quelles que soient
Gela est vrai
d'un troubadour champenois
vous ne à
retrouverez
cette opposition
si
et
mœurs
font
croyances.
comparez
toutefois
:
les
les poésies
d'un auvergnat et
plus rien qui corresponde
imagée de
la
craie et
du
granit.
Quinet a écrit
:
Par le midi, la France touche à l'Italie et les Pyrénées ne la rattachent-elle pas, comme un système de à la rentrée d'où sont sortis les Calderon,
vertèbres, les
Camoens,
Bretagne ne
les
Michel Cervantes? Par
tient-elle pas
Enfin, par la vallée
ne
Ce sont partielle
;
la
les côtes
de
la race gaëllique?
Lorraine et l'Alsace
comme
aux langues
?
des aperçus ingénieux d'une vérité
là il
du Rhin, par
pas aux traditions
s'unit-elle
germaniques
au corps de
convient de les subordonner à une
loi
autrement prouvée.
L'homme de
génie incarne tantôt l'âme générale,
tantôt celle d'une minorité l'aspiration
d'une
;
époque.
il
épouse ou répudie Amplificateur
ou
contempteur des mœurs environnantes, il se définit
r
79
l'esthétique idéaliste
surtout par dissemblance
même n'est-il pas déjà la
génie par lui-
et le
:
plus grande dissemblance
d'un homme, en face de l'espèce humaine? L'antiquité pénétra la mentalité chrétienne bien
avant la Renaissance. Aristote a de l'Eglise
monde
;
sert
douzième
un passage du à prouver
livre
le
traité
la trinité
rang d'un père
Du
ciel et
on
et
tire
du du
de la Métaphysique les preuves
de l'immortalité de l'âme
et
du dieu personnel.
Voyez au IV de Yinferno « le maître de ceux qui savent siéger parmi sa famille spirituelle. » :
A
Venise, selon
moquait de Moïse étaient
de
le
et
on se
dire de Pétrarque,
de la<jenèse
;
les averroïstes
nombreux. A Padoue, Pierre d'Apone
la résurrection
de Lazare. Si on
relit la
se rit
Divine
Comédie, on y trouvera les éléments de la Renaissance étroitement combinés avec le christianisme.
Au
concile deFlorence(1438)se trouvait
un
homme
dont Tiniluence fut immense Gémistos Plethon; ce :
maître du futur cardinal Bessarion, ne fut pas
pendu comme Gecco dire dans son
d'Ascoli, et cependant
Livre des
embrasseront tous une ni celle
du Ghrist,
lois
:
«
Bientôtles
même religion,
ni celle de
il
osa
hommes
qui ne sera
Mahomet, mais une
troisième dérivée du Polythéisme. » Sous la protection de
Cosme
l'ancien,
Gémistos élabora un
l'aKT lUliiALISTE ET MYSTIQUE
80
culte, des rites,
des
prières
;
et
de
lui, sortira,
intellectuellement, Marsile Ficin, l'apôtre
du néo-
platonisme.
Le clergé
trop intéressé à discréditer les
était
humanistes pour ne pas
les étiqueter
de païens, ce
qui veut dire sensuels, épicuriens, jouisseurs, dans l'esprit
A
de la foule.
qui attribuerait-on ce passage volupté au-dessus des sens
l'âme
!
!
:
joie au-dessus de
allégresse au-dessus de l'intelligence..! C'est
qu'il m^accueille
avec
toi,
ô
mon âme
;
c'est qu'il est
en moi, lunité des unités, Dieu Réjouissez-vous avec moi, vous tous dont Dieu est la force. Le Dieu de l'univers ra'a embrassé, le Dieu des Dieux me pénètre. Déjà, déjà Dieu te nourrit tout entière, ô mon âme, et celui qui m'engendra me régénère, il engendra mon âme illa transforme en ange, il la convertit enDieu... Quelles grâces te rendre, ô Grâces des Grâces !
;
!
Nous sommes que
loin de ce matérialisme prétendu
l'on s'obstine à attribuer
La Renaissance
aux humanistes.
a une doctrine faite de Platon et
de Plotin. Marsile remplit, auprès de Gosme
Laurent, un véritable
office
et
de
de chapelain, sous
les
ombrages de Careggi, aux accents du chanteur Squarcialupi. Politien^ Pic delaMirandole, Benivieni, Laurent
]
l'esthétique idéaliste
81
de Médicis lui-même, tous les poètes néo-platoniciens sont des mystiques ardents.
Le prodige de dix-huit ans qui parle vingt-deux langues, le prétendu pédant des neuf cents thèses,
de omni re
sciblll, est peint à
Saint-Ambroise de
Florence par Gosimo Roselli. Gest un adolescent à la taille
souple et élancée, à l'œil bleu marin, au
teint clair, à la
chevelure blonde
On admire dans
et touffue.
toute sa personne
un mélange
de douceur angélique, de pudique modestie, de
charme
bienveillance attrayante qui
Il
le
regard
et
cœurs.
attire les
en est des divers aspects de la Renaissance
comme du
prétendu pédant
;
on
les a caricaturés
par paresse, pour formuler vite une classification scolaire.
Ghaque
siècle a
c'est-à-dire
que
son tour d'esprit, dit Fontenelle, les
portent visiblement un millésime
d'œuvre ont un tour particulier
pour
l'école apparaît faux
Michel-Ange appartient
Léonard
secondaires
manifestations
pour
;
:
mais
les maîtres. Certes,
à Técole Florentine,
aussi. Ils se sont connus,
ils
mais
ont concouru
ensemble, parfois leurs protecteurs
mêmes. Qui donc
les chefs-
et ce qui est vrai
furent
les
attribuerait à l'un le plus petit
ouvrage de l'autre ? Le Tilantisme du Buonarotti
82
l'art idéaliste kt mystique
non plus que la subtibilité du Vinci ne présentent aucun rapport avec l'art contemporain. Une école est sortie d'eux;
eux-mêmes ne sortent pas de leur
milieu.
Ni Poussin, ni Philippe de tent l'empreinte
Champagne ne por-
du goût public: ce
sont, jansé-
niste et archaïsant, des génies dissidents.
Raphaël lui-même, l'art
le
véritable réalisateur de
humaniste, celui qui illustre littéralement la
mentalité d'un Léon X, ne ressemble à personne
dans ses cartons
et ses fresques.
L'individualisme de tester contre le milieu
l'artiste
que
peut aussi bien pro-
le traduire.
Habile sera la critique qui différenciera le style de Léonard, suivartt qu'il travaille à Florence, ^ Milan,
à
Rome ou
à Amboise, et qui précisera
VA doration des Mages, Madone de Sanf Onofrio à Rome
l'influence de la ville dans la
Cène,
et le
la
Saint Jean peint à Glos-Lucé, aux bords de
la Loire.
Plus vrai que
le
déterminisme du climat
et
de
la race, s'accuse le caractère professionnel.
Taine
découvre
dans Walter Scott,
«
sous
l'amateur du moyen-âge, l'écossais avisé dont la sagacité s'est aiguisée, par le
procédure.»
maniement de
la
l'esthétique idéaliste
L'auteur de
«
83
Thomas Graindorge
d fut
de la
promotion About, Sarcey, Weiss, à l'Ecole normale. et
Il
professa à Nevers, à Poitiers, à Besançon,
même
à
Oxford, et toujours
il
obéit à la ten-
dance pédagogique qui catégorise à tout prix
et
légifère aveuglement.
Jamais fare
les spiritualistes ont-ils
sonné une fan-
de jactance aussi comique que ce passage
{Littérature anglaise, IV, 421):
La science a dépassé
le
monde
visible et palpable
des astres, des pierres, des plantes ou dédaigneuse-
ment on la confinait c'est à l'âme qu'elle se prend, munie des instruments exacts et perçants, dont trois ;
cents
ans d'expériences ont prouvé la justesse
et
mesuré la portée. La pensée et son développement, son rang, sa structure et ses attaches, ses profondes racines corporelles, sa végétation infinie à travers l'histoire, sa haute florai-
sommet
des choses voilà maintenant son objet, que depuis soixante ans elle entrevoit en Allemagne et qui, sondé lentement, sûrement, par les mêmes méthodes que le monde physique, se transformera à nos yeux, comme le monde physique s'est transformé. Dans cet emploi de la science et dans cette conception des choses, il y a un art, une morale, une politique, une religion nouvelles et notre afîaire est aujourd'hui de les chercher.
son au
l'objet
Relisons cette fougueuse et lyrique affirmation
l'art idéauste et mystique
84
où l'impropriété des termes abonde. Quels sont ces instruments propres à l'étude de l'âme ? Les
rayons
X
?
Le rang de
la
autant que sa structure,
pensée étonne au moins et les racines corporelles
d'une floraison invisible, intangible? Entln que faut-il
entendre par
Le monde de yeux
!
la
le
Quelle assertion
Réduisons
le
sommet
des choses
?
pensée va se transformer à nos !
morceau au bon sens
:
La science a dépassé le monde du phénomène phyelle approche de cette zone frontière où le
sique,
matériel confine à l'immatériel. Et par l'analogie elle
peut pousser plus avant
et
plus sûrement les ouvrages
avancés de l'hypothèse.
La pensée, mieux connue dans manifestations,
l'universalité de ses
tend à l'unification
doctrinale
réduira de jour en jour les formules de et
lieu,
qui
de race
de temps, vers un point, pour ainsi dire œcuménique.
Les sciences naturelles, que Taine connaissait
beaucoup moins que Ruskin, s'occupent de l'espèco et
non de
l'individu.
On ne peut
En
art l'individu seul existe-
pas dire qu'on connaît une famille
Léonardine ou Raphaeline, ou Michelangelesque. Trois personnes sont apparues que tous ignoraient
quand
elles se manifestèrent, et
pour toujours.
qui disparurent
85
l'esthétique idéaliste
La graine d'un amandier mise en terre dans des conditions favorables reproduit en peu de temps
un amandier. Peut-on concevoir
la
semence du génie qui ne
manifeste que par l'œuvre
se
?
Un
jeune
homme
mis dans une école des Beaux-Arts reproduit-il en
un temps déterminé un artiste ? Il n'y a pas de phanérogames en art, c'est-à dire d'hommes ayant des organes esthétiques bien distincts. les
Chercherons-nous
l'identification
cryptogames? L'absurde nous
La
avec
arrêterait.
science offre véritablement une suite addi-
tionnelle qui
met
dernier venu en possession de
le
tout l'acquêt des devanciers
Berthelot
et,
:
le
plus mince natu-
découvertes de Lavoisier
raliste s'assimile les
et
de
sauf dans les méthodes, la science
ne semble pas pouvoir rétrograder. L'Art, au contraire, s'incarne, vit et meurt dans
chaque génie. Giotto si
parfait qu'il soit,
est
un
art entier et
ne possède pas
Raphaël,
les qualités
du
trecentiste. Plus près de nous, Ingres et Delacroix
nous ont montré impuissants l'autre.
à
Le premier
generis,
le
le
spectacle
s'assimiler n'a
second
a
les
de deux rivaux, qualités
pu trouver une vainement
pureté de la ligne. Tout à
fait
l'un
de
palette sut
poursuivi
la
de nos jours, Puvis
86
l'art idéaliste et mystique
Gustave Moreaii prirent des voies contradictoi-
et
res,
même
sans songer
à échanger des leçons.
Enfin, ne voyons-nous pas des ouvrages de sau-
vage dans
Salons, des tatouages sur toile, de
les
véritables griffonnages antédiluviens
Faune
caractérise la
du
?
et la Flore, c'est la
Or, ce qui
constance
type.
Jamais n'aurait
un
naturaliste,
un physiologiste
ni
conçu une idée aussi saugrenue que
de voir un
herbier dans
étranger
universitaire,
un musée
;
au laboratoire,
celle
un
seul
pouvait
ainsi s'égarer.
Ah
!
je
comprends qu'on
dégager un
art,
religion. Mais
il
de définir
suffit
la politique et la religion,
ne sont point
se grise
une morale, une
filles
à l'idée
politique,
l'art, la
de
une
morale,
pour connaître qu'elles
de la science.
La recherche de la perfection dans l'œuvre, les mœurs, les lois et les rites ne jailliront jamais d'un manuel expérimental ce sont des matières pas:
sionnelles où l'enthousiasme, l'honneur, la justice et la piété
dominent,
comme muses
Quelle curieuse idée que de
comme
science; et
cela
tirer
montre
et rectrices.
une religion de
le
la
despotisme inné
de l'esprit humain, qui tend sans cesse à usurper sur autrui
!
Longtemps
la théologie s'arrogea
une
l'isthétique idéaliste
87
véritable dictature sur Texpérience; elle posta son
inquisiteur à la porte
du laboratoire
et
mit
le
bras
séculier au service d'unlivre juif dont personne ne
qui fourmille d'allégories
lisait le texte original et
égyptiennes et kaldéennes. Aujourd'hui nous ne
comprenons pas
l'autorité de
matière expérimentale le
rectorat d'un
;
et
Moïse mal traduit, en
on veut nous
faire subir
Auguste Comte, philosophe seule-
ment. y a un demi-siècle, un médicastre, Moreau de Tours, publia un volume très insolent que Taine Il
La Psychologie morbide est de 18S9 Taine commença son cours en 1864. Pour ce
n'ignora pas. et
carabin,
folie et
génie sont congénères.
travail trouva de l'écho,
il
oftrait
Un
pareil
aux médiocres,
hommes, un On aurait augmenté sa vente apologie pour les hommes
c'est-à-dire à la presque totalité des
réconfort inespéré.
avec ce sous-titre
:
accusés de médiocrité. cette niaiserie
En aucun
On y
lit
des phrases de
:
cas
le
fonctionnement intellectuel ne
saurait être plus parfait que lorsque le sujet est à la fois rachitique,
scrofuleux et neuropathique
tres termes, lorsque, par sa constitution, la fois
Les
il
;
en d'autouclie à
à l'idiotie et à la folie. trois
plus grands
hommes du
dessin; Sébas-
l'art idéaliste et mystique
88
Bach comme Palestrina
tien
Alberti
plus
Bramante comme Dante comme Shakespeare donnent le
;
;
formel démenti à cette ridicule assertion.
Goethe, Victor Hugo, Balzac ont été des modèles
de méthode
de persévérance.
et
Le génie n'est pas plus une névrose que la bêtise une diathèse normale. Léonard fut le plus beau cavalier de son temps et Pic de la Mirandole n'est
ressemblait au plus
joli
page.
En
dressant la
liste
des génies d'après leur diathèse, on verrait que les
plus grands furent sains. C'est un travail de
patience, à la portée de chacun.
Au lieu
de poursuivre l'impossible identification
de la botanique éta^Dlir les
La
mieux valu la philo-
les autres.
pour
l'art
ne supporte pas
elle isole l'artiste et le
diminue jusqu'à
doctrine de :
eût
il
concordances de cette partie de
sophie avec
l'examen
et l'esthétique,
l'art
un rôle (ïartlfex. L'autre formule, qui subordonne l'œuvre aux intentions sectaires, religieuses ou libres-penseuses, ne vaut guère mieux. Ces points
extrêmes n'ont été en
somme que
des points de
belligérance. En face d'un idéalisme qui méconnaît la
splendeur du nu, on revendique hautement
droits de l'art
;
comme on
défend
le rôle
les
purifica-
teur de la beauté contre ceux qui veulent borner
89
l'esthétique idéaliste
son action
plus
imitations
à des
moins
ou
parfaites.
Sur ceterrain d'une apparence sereine,
les partis
se manifestent aussi intransigeants, aussi aveugles
que dans Il
la politique.
faut s'entendre sur la morale. Les ouvrages
qui flattent
ou excitent
la
concupiscence sont
moindres que ceux qui s'adressent à tualité; et,
concep-
la
théoriquement, un regard rempli d'âme
l'emporte sur
le
même
galbe d'un sein
même
Toutefois, ce
admirable.
sein l'emportera sur
un autre
regard, moins chargé d'expression.
Le diagnostic du médecin n'apporte aucune Michel-Ange
clarté à la critique. la belle
découverte
nez, qu'est-ce
!
Torregiani
était fort bilieux,
lui avait
écrasé le
que cela fournit pour expliquer
plafond de la Sixtine
le
?
Le génie œuvre, malgré la maladie et non à cause Bazzi a-t-il mérité son surnom ? Qu'im-
d'elle.
porte à l'^OJ^asg de Sainte Catherine et «aux noces
de Roxane »
?
Ceux qui ont vécu dans
l'intimité des
hommes
de génie connaissent leurs manies, leurs
tics et
aussi que ce sont là des accidents, sans rapport
avec leurs ouvrages.
La
taculté créatrice, dès qu'elle existe,
domine
90
l'art idéaliste et mystique
l'être entier
;
ceux qui en sont doués en
elle tient
état de perpétuelle gestation.
Le génie que
meur
et
un homme enceint et on s'étonne amène quelque modification de l'hu-
est
cet état
;
des humeurs,
que
alors
grossesse
la
physiologique donne lieu à un phénoménisme radical et souvent
étrange
si
!
Platon a magnifiquement expliqué
de l'homme fait
un démon, un
mortel
et
à forme scientifique,
sur les
et
bave
seuls
soient l'honneur de l'espèce et
On
il
en
entre le
Le médicastre tourangeau
plaque des injures de clinicien
l'humanité
feu,
être intermédiaire
l'immortel.
que l'Académicien
diathèse
la
du ravisseur de
créateur,
si
les
élève
un
la
calomnie,
mortels qui tel
honneur,
bien au-dessus de
!
ne s'entend pas sur
le
but de
l'art.
Les uns
veulent l'employer à un dessein moral ou religieux, et
ils
n'ont point tort
beauté
comme un
;
seul
les
autres tiennent pour la
objectif,
et ils
ont à peu
près raison. Mais les premiers se trompent, en ne
voyant
le
déterminés à
caractère religieux que dans des sujets ;
et les
seconds en réduisant la beauté
une version prestigieuse du modèle. Quant aux amateurs qui
se délectent de la seule
exécution, ce sont des maniaques ou des profes-
91
l'esthétique idéaliste sionnels.
Le but de
l'art est
de produire chez
le
spectateur une espèce de bonheur ou de volupté assez complexe, puisqu'il se
forme à
de
l'idée
perfection véritable, pour le raisonnement, et de l'idée d'absolu, celle-là
La
perfection des
visage du mystère
;
purement musicale.
formes est littéralement et
lui-même,
le
le
mystère, se
définirait peut-être par trois termes, le lointain
correspondant au passé, Yau-delà analogue au futur et la réalité constitutive du présent.
En réunissant
ces trois termes,
on
définit à
peu
près l'impression des chefs-d'œuvre, et aussi on
découvre l'inanité du réalisme. L'effet
de
la
Sixtine, de la Cène et de Y Ecole
d'Athènes se décompose en ce triple rayonnement. Les sujets sont très loin de ceux que nos yeux rencontrent
les
;
formes employées sont bien au
delà de notre forme personnelle
nous donne que
;
et
l'illusion
d'une scène vraie. Supposons
la Sixtine soit traitée à la Phidias,
plastique admirablement modérée et
cependant une
ou plutôt un caractère d'immortalité
vie intense
qu'elle
ne s'emploie qu'à
des
dans cette
des métopes
mouvements
vulgaires d'œuvre servile, à quelque représentation
des métiers
;
supposons que
moderne, des
juifs
la
sordides
Cène réunisse, à ou
la
de farouches
92
l'art idéausts et mystique
bédouins, avec leur tête d'oiseau de proie guenilles déplorables
d'Athènes lettres
soit
;
groupement de
le
sur un escalier
et leurs
supposons enfin que l'Ecole
:
il
la faculté des
n'y aurait plus de
mys-
de chefs-d'œuvre.
tère, et partant plus
oii
on aura
admis une séparation précise entre l'Art
évocatif,
L'esthétique n'existera qu'au jour
qui est aussi grand, dans une estampe
Melancholia ou
la
dans une fresque,
comme
la
Résurrection de Lazare que et
celui des arts
employés à
l'évocation. «
Les Buveurs
Rembrandt,
les
»
de Velasquez,
banquets de
chefs-d'œuvre picturaux ils
Syndics
»
de
cela est incontestable
;
manifestent ce caractère de réalité qui rend les
choses présentes, mais et
:
« les
Harlem sont des
l'au-delà.
il
leur
manque
le lointain
Des ivrognes, des marchands
et
des
bourgeois ne signifient rien dans notre imagination
;
devant eux on ne songe qu'au peintre, à
son excellent métier.
Transposons ces Buveurs en Corybantes, ces Syndics en Amphyctions, ces banquets en banquet de Platon,
et
aussitôt, par
l'éloignement et par
l'au-delà, ces compositions s'élèverontau plus haut
degré de Tart. Car sentants
du grand
le rite
dionysiaque, les repré-
conseil hellénique et les philo-
I?
§3
LBSTHÉTIQUE IDÉALISTE
Sophes athéniens évoquent une profession d'idées
La dévotion
transcendantales.
et
l'intelligence,
appliquées, à l'évolution d'une race ou à la formule
des
humaine. Chaque
fois
sommet
au
atteignent
idées
de
l'activité
qu'un art cherche sa desti-
nation dans son procédé,
il
se corrompt.
Les chefs-d'œuvre ont une marque, toujours oublier
que devant
les
l'artifex.
ils
font
On ne pense au métier
choses de métier.
Le connaisseur
n'est pas le public
et
la
pire
disposition de l'œuvrant sera toujours de travailler
en vue d'un suffrage corporatif
et
prétendument
compétent.
Un mauvais pousse
les
lèvres
d'une
servir à la
A
sentiment d'orgueil
coupe qui, par son essence, doit
communion
universelle.
qui sont destinés les temples? Les peintures
ornent auraient-elles une
et les sculptures qui les
autre destination
Car l'architecture l'art
despotique
professeurs à vouloir écarter toutes les
?
Gela est,
est
peu vraisemblable.
en dignité et en difficulté
transcendantal, auprès duquel les autres ne
paraissent que
relatifs
et
minimes. Le peuple
comprend-il l'architectonique
?
Il
la
sent.
Son
inconscient vaut bien la conscience faussée du
94
l'art idéaliste et mystique
Le privilège de l'homme
est
pensée jusqu'aux essences que
de toutes
seul, et jusqu'à la source infini
ou
le
lui
les essences, l'Etre les
formes de
et qui le reflètent, tel est l'objet
son but magnifique.
Lamennais
nom
la
interne découvre
Beau absolu. Le manifester dans
émanées de l'art,
de pénétrer par
l'œil
L'œuvre
dit bien.
tend à trouver
la
d'art digne de ce
substance ou forme expres-
sive de l'essence. L'art opère par incarnation.
Lorsque le vénérable Ingres nous montre Jeanne d'Arc armée exactement selon la
17
juillet
1429,
il
ne
fait
mode d'armes du
rien de bon ni de mauvais.
L'essence de son sujet est autre. Quelle est
la
forme
essentielle d'une pucelle inspirée et qui après avoir
mené du
à la victoire son pays, au
ciel,
nom
sera brûlée à dix-neuf ans
de Jésus roi
?
Etendard, épée, armures, accessoires sans intérêt.
Jeanne d'Arc
une idée
est
:
quel est le corps
de cette idée, la face de cette idée et fait acte
d'homme
;
est-elle
?
Non. Est-ce seulement une pucelle Sera-ce saint-Georges
!
Elle est
fille
du sexe de son acte? ?
Pas davantage.
Non plus. Un ange?
Point,
Je ne peux énumérer la succession d'images par lesquelles l'artiste parviendra à concevoir la
Lorraine mais ;
j'affirme qu'il s'agit
bonne
de dessiner
un
95
l'esthétique idéaliste
un
visage, puis
que
le
corps, de trouver enfin
problème
est
purement
un
geste et
expressif et plasti-
que.
Le Moïse de Mie liel-Ange déroute nos notions préconçues. Personne ne rendra un compte satisfaisant de cet ouvrage, et
si
bizarre d'accoutrement,
pourtant personne n'hésitera à reconnaître
le
personnage.
Les orthodoxes n'aiment pas le Moïse,
et
trouvent
révoltants les nus de la chapelle Médicis et les
nomment
a
chaos
le
volupté que
et la matléi'e,
Vorgueil
et la
Renaissance semble avoir voulu
la
glorifier ». J'ai
indiqué combien la sacristie calomnie
dent spiritualisme de
la
Renaissance.
Les quatre strophes funèbres
même
manifestent au le
Saint-Jean
titre
l'art sacré,
Michel-Ange
et
l'ar-
que
la
du Ruonarotti Sainte-Anne et
mais indépendant.
Léonard croyaient, mais non pas
au clergé. Ce sont eux qui ont arraché, aux mains trop intéressées quoique consacrées, ce voile de
Véronique où
le
génie humain, par d'innombrables
miracles, a rendu témoignage à Dieu.
Un pouvoir et
n'a d'autre légitimité
Michel-Ange accomplit dans
dessin le
même
formidable
effort
que sonutilité; le
domaine du
de conscience
06
L^ART IDEALISTE ET MYSTIQUE
qui met la Divine
notre
De
ère.
Comédie au-dessus de toute
l'inconscience des pasteurs naît
comme
l'émancipation du troupeau,
comme
que
thème de
le
fait.
droit autant
Ecoutez Charles Blanc reprendre
l'Arétin.
Pourquoi donc tant d'anatomie et si peu de pensée? Pourquoi tant de matière et si peu d'esprit ? Quoi c'est ici la fin du monde et je ne vois ni terre ni cieux, mais partout des bras et des jambes, des têtes renversées, des pieds en l'air, un étalage effrayant de chair humaine et de tours de force, une exhibition d'Hercules il est bien temps que l'humanité fasse parade de ses muscles, quand le souffle de Dieu va l'ensevelir dans l'éternité ?. La pensée est donc absente et c'est la pure fantaisie de l'artiste qui a tout usurpé. La raison, le dogme, l'histoire, tout a été sacrifié à la puissante et brutale volonté de MichelAnge. !
!
.
.
Cette page avertit les critiques d'art
où
du danger
l'on se risque à écrire superficiellement.
Invoquer la raison
et l'histoire,
pour un jugement
dernier et prendre la défense du dogme, quand est Charles Blanc, quelle plaisante posture
Je n'ai pas en
mur
d'effroi,
mais
mémoire je
l'avis
suppose
triomphe du corps humain, l'art
pour
l'art.
!
de Taine sir ce
qu'il n'y a
le
on
vu que
le
grand morceau dç
9*?
l'esthétique idéaliste
Sauf la figure du Christ, qui devrait
être
drapée
pour ne pas ressembler à toutes les autres, Michel-
Ange
a
conçu l'ouvrage avec une grande logique,
en titanisant l'aspect humain, en produisant cet effet
unique d'innumérabilité.
rage l'attention;
et
on ne voit
Un
tel effort
même
décou-
plus les cent
chefs-d'œuvre de détail qui forment cet ensemble indicible.
On m'accordera
bien que Buonarotti
comprenait Alighieri, puisqu'il faire
à
offrit
Léon
X
de
au divin poète un tombeau convenable (1519)
l'année où Léonard mourait à Clos-Lucé.
Or, comprendre
le
Dante n'est pas
plasticien exclusif, ni d'un orthodoxe.
de Jules
II, les
médiocrement
chasses de Léon
X
d'un
le fait
Les guerres
devaient plaire
à l'austère gibelin et
il
se
dégage de
son Jugement une doctrine singulièrement
diffé-
rente de celle des Papes.
Habitués par nos contemporains à voir tes aussi étrangers à la
savaient pas tres à ils
lire,
les artis-
métaphysique que
nous réduisons
les
un œil au bout d'un pinceau
:
s'ils
ne
anciens maî-
grave erreur,
priaient et pensaient à la fois, fidèles à la vérité
révélée, libres de la tutelle décevante des clercs.
Je ne
veux pour preuve de Tésotérisme
Jugement Dernier que
les
du
quatre distributions
de caleçons, par Daniel de Yolterre^ ensuite par
9B
l'art idéaliste et mystique
Girolamo da Fano
sous
ensuite sous
V,
Pie
Grégoire XIII. Ce dernier voulait effacer l'ou-
vrage
enfin sous Clément XIII, par les soins de
;
Stefano Pozzi. L'infiltration
protestante
ne
pas
suffirait
à
expliquer cet acharnement.
Que
le
spiritualisme soit vrai ou
que
faux,
l'âme soit immortelle ou non, que la religion soit l'expression de la vérité ou seulement l'art
vit
de spiritualité
:
un songe,
et les aspirations d'éter-
nité seront toujours les seules muses.
Voilà ce que Taine n'a pas compris la science
ni la physique, ni la physiologie,
exclusivement il
de
:
ébloui par
expérimentale qu'il ignorait, ne sachant
littéraire et
avec une culture
une tare
universitaire,
a voulu appliquer à l'essor de la pensée les lois la
pesanteur
et
inaugurer une météorologie du
Beau. Cette entreprise absurde a porté des fruits détestables
:
la paresse,
la
vulgarité,
tous les bas et
lâches instincts de la décadence ont ramassé au
bas de sa chaire, des prétextes faire
ou
laissent
faire
des
mal.
officiels
pour ne rien
MM. Bouguereau
et
cherchez pas d'autre responsabilité que d'esthétique
Henner
dix millions à leurs héritiers
du Collège de
France,
la
;
ne
chaire
ce^theUra
99
l'esthétique idéaliste
pendant un quart de
pestilentise, qui,
officiellement servi à la
ville
et
siècle, a
au monde
les
vaticinations de lincompétence.
Taine fut un sectaire, non de ceux qui se partagent les deniers d'une église, mais de ces autres, tout aussi redoutables, qui se taillent une originalité Il
aux dépens de n'y
pas
a
si
la vérité
:
dans
la
ne fournit pas des
variés que chaque
s'affirmer autrement
de l'expérience.
possible
d'originalité
recherche sincère aspects
la vérité et
survenant puisse
que par des coordinations
et des éclaircissements.
Toute théorie personnelle
est
une erreur; toute
nouveauté une ignorance ou une grimace perverse: et la pire
trahison se voit aux efforts d'innovation
doctrinale.
Voulez-vous créer les
?
Soyez
formes. Enseignez-vous
artistes et
renouvelez
? Attentifs
au legs du
passé, commentez-le, sans ce misérable souci de
paraître neuf aux matières cent fois séculaires.
L^esthétique mérite de conquérir son existence propre, d'être affranchie à la lois du prêtre et du libre-penseur.
Trop longtemps on a demandé à de confession
;
il
ne faut pas qu'on
certificat d'athéisme.
l'art
lui
son billet
impose un
l'art idéaliste et mystique
100
M. Curie n'a nul besoin de théologie pour
phénomène de radiance
constater le doctrine
qui justifie la
en prouvant l'unité de
spiritualiste, et
matière, apporte une surprenante confirmation à
En
l'unité de Dieu.
face de ses appareils
il
peut
sans que cela gêne ses décou-
être matérialiste,
vertes.
au contraire,se condamne à
L'artiste,
en
appliquant à
Ce
laboratoire.
éléments que
sa recherche
qu'il constate
lui fournit la
ne
la stérilité
une formule de signifie rien
pour
et l'alambic ici est
son propre cerveau.
se crislalUser
modèle, analogue au carbone,
en diamant t-il
?
en beauté;
Comment
va-t-ii se
sublimer
A quelles températures d'âme faudra-
soumettre
l'état
les
nature doivent traverser
des états successifs
le
:
le
lumineux
sombre minerai pour l'amener à et radiant ?
Secret vraiment im-
pénétrable, secret quasi divin que cette transfor-
mation de
la
forme actuelle en forme immortelle
!
Cette considération, qui juge l'œuvre de l'art
d'après les précédents et les subséquents, qui lui
donne son rang dans l'évolution historique, cette considération critique qui compare et établit un palmarès
chronologique,
la
véritable
L'ouvrage d'art doit nous apparaître
comme un
abolit
esthétique.
101
l'esthétique idéaliste
individu; et comme
tel, il
de ses aïeux ou de ses
faut l'envisager sans souci
sinon les spécialistes
fils,
seuls pourraient en approcher. L'Italien illettré ne
comprend pas Dante
mais
:
Giotto s'offre à lui autrement lisible puisque
le
grand trecentiste s'exprime par pantomime. Raphaël
comme Orcagna corps
le
humain
emploie une langue universelle, :
et tout
homme
étant passionné
de sa nature, reconnaîtra l'expression des passions, sans lecture ni
On
objectera
l'esprit lui
commentaire. que
peut être
les
sont étrangères et qu'il se
passions de fait
une idée
défectueuse du philosophe et du saint. Regardons
en nous-mêmes attentivement
et
nous découvri-
rons que les choses concrètes agissent bien moins sur notre imagination que les visions transcendantales. Les anges plaisent plus que les gamins, les
vierges
ouvriers, et
que
les
filles,
même aux
héros
les
gamins, aux
que
les
et
aux
filles
ouvriers.
Cette littérature du peuple, que nous ignorons,
nous autres écrivains, cette à
littérature de livraison
un sou qui remue plus d'or
tous les
stylistes
singulier
:
ensemble,
l'idéalisme et la
a
plus d'âme que un caractère bien
et
moralité.
Il
s'agit
toujours d'un thème de pitié pour quelque inno6»
l'art idéaliste et mystique
102
cence que
le
dénouement
fait
triompher
et
quelque
scélératesse à la fin confondue.
Nous sommes
idéalistes d'instinct
capital de l'esthétique
:
voilà le point
seule une corruption delà
;
culture nous rend infidèles à cette innéité. Les chro-
mos Il
des réclames sont
jolis, et la clientèle l'exige.
n'est pas question
de créer
Le réalisme a
véritable
épidémie spirituelle
été
le
goût, mais de le
une dépravation, une
satisfaire.
et aussitôt l'instan-
tané a démontré l'inanité d'une pareille doctrine.
Ouvrez un journal
illustré des sports
de très
réduit à
se
laides
:
le
penthalte
images évoquant
le
manuel médical cependant les hommes sont nus et anatomiquement remarquables. Le prestige des souverains et des fonctionnaires tombe devant :
l'objectif
;
femmes elles-mêmes ne
les
résistent
pas à cette notation brutale.
Cependant
ment la
le
choix des formes, leur unification»
une dominante expressive, constitue seule-
selon
le
premier acte de
l'artiste.
découverte d'une stase
Le second exige Qu'on
significative.
essaye de reproduire devant une glace
apparence
que
le
si
simple d'un antique.
corps ne
la
On
la
pose en
s'apercevra
donne pas aisément
et
du
que son naturel provient d'essais
premier coup,
et
préliminaires,
nombreux
et appliqués.
103
l'esthétique idéaliste
Ces deux opérations, d'où
valeur de l'œuvre
la
dépend, se trouvent supprimées par un sujet méhollandaise ou
diocre à la
Encore
faut-il
Gérard Dow, probe
et
vulgaire à la Zola.
remarquer, à
décharge
la
d'un
que l'exécution précieuse, infiniment
un certain
détaillée, crée
La
intérêt.
même appliDans une toile comme le
perfection donne toujours du plaisir,
quée à un terme bas.
Bon Bock,
l'ennui du sujet s'augmente de l'igno-
rance de métier
:
il
n'y a ni art, ni peinture,
il
n'y a rien. L'idée de perfection est
rent
abondamment
la
une de
celles qui éclai-
question artistique,
si
on
l'entend autrement que dans le sens du métier.
Vélasquez pourrait être proposé pour
en peinture, en la
au plan des ouvriers de
couleur ou à celui des amateurs. Esthétique-
ment, le
se plaçant
royauté
la
il
n'obtiendrait pas
moindre giottesque,
l'emportent sur Celte
cédé
et
même le
centième place;
la
plus
pâle
lombard
lui.
différenciation entre l'excellence
du pro-
l'excellence évocatrice se
comme
une base nécessaire de Est-ce à dire qu'il
place,
la critique.
faut priser révocation au
mépris du métier, proclamer Ghenavard
grand des maîtres,
et
considérer
le
le
plus
belge Wiertz
104
l'art idéaliste et mystique
au-dessus de Delacroix, pour ses intentions morales
A
?
tions. Je
Dieu ne plaise de tomber à ces aberral'ai dit,
les qualités
de
l'intention,
l'artiste
n'ont aucun
seule importe, mais
réalisation
bonne volonté,
la
il
intérêt
:
sa
est étourdi
de
demander au giottesque la vraisemblance plastique du cinquecento. Les fautes de dessin d'un Titien nous choquent parce qu'elles sont des discordances dans un art entièrement évolué
et
rayonnant de
force sereine.
On
ne
les aperçoit
incriminera
pas chez
les Primitifs.
Qui
puérilité de l'enfant, l'étourderie
la
de l'adolescent?
Un
artiste a toujours l'âge de
son
époque. L'architecture atteignit sa perfection, avant les
autres arts de dessin.
A la fusée
de l'ogive s'adaptent
des statues absurdes de verticalité; essayez de les
remplacer par des ouvrages corrects
et
logiques
L'enfance et l'adolescence d'un art ne doivent
pas être critiquées
comme
des étapes, mais consi-
dérées en elles-mêmes.
Le caractère hiératique résulte d'une expressioni de style obtenue avec un procédé restreint; l'immatérialité provient de la pauvreté relative d'exé-
cution. Les maîtres d'apogée auront une beauté, jamais
celle des primitifs.
autre
ÎOS
l'esthétique idéaliste
Chaque artiste renferme un art complet, chaque œuvre n'a de valeur que la sienne propre. Pourquoi s'embarrasser de dates, fatras
d'une madone ou de Il
y
a
un
volupté d'une courtisane
la
calcul intéressé à élever
à faire payer
et
d'éphémérides, du
des commentaires, pour jouir de la pureté
un
?
une barrière
tribut au pauvre
monde
?
L'esthétique officielle s'applique à hérisser l'appro-
che des chefs-d'œuvre, de s'efforce d'installer
une
difficultés
sacristie
dans
:
l'institut
les
musées,
de s'ériger en clergé du beau, quoique ce
et
vœu
cadre mal avec l'évolution contemporaine.
En
Sainte-Anne ou de la « Madone l'homme officiel vous demandera si vous connaissez le milieu, le lieu, les contemporains, le climat, la race, les mœurs. Cela est face de la
de la Victoire
inutile
pour entendre
cette progression de l'animal
de l'enfant s'élevant de la jeune
et
femme mûre, plation delà
femme
à la
sur un thème sacré. Qu'est-ce que
biographie des donataires ajoute à
la
%
»,
Madone de
la
la
contem-
Victoire?
Les Beaux-Arts dédiés à tous s'adressent spécialement aux les et
illettrés
:
l'homme qui ne peut
lire
philosophes, les verra dans \ Ecole d'Athènes^ tel
qui
ignore l'alphabet
effort les merveilles
contemplera sans
de l'extase mystique, hénosis
.
106
l'art idéaliste et mystique j
de Plotin, spasme de sainte Thérèse ou de sainte
A
Catherine de Sienne.
on ouvre
les livres,
l'ignare qui n'ouvre pas
le ciel,
son cortège d'anges
on
montre Dieu
lui
et
et enfin la théologie se pré-
;
aux plus humbles, tangible, séduisante,
sente
féconde, radieuse, je dirais évidente, car, offerte à la seule sensibilité, elle se
lisnie
un
débarrasse de
de son argumentation,
prestige, au
elle
l'aristoté-
comme comme un
apparaît
lieu de se développer
raisonnement.
Suivant l'aspect contemplé, une idée se
en expressions aussi variées que l'esprit
le
reflète
prisme de
humain.
Les définitions se succèdent aisément équivalentes en soi, et préférées, selon les idiosyncrasies.
Cependant
il
faut,
sous peine de se perdre dans la
multiplicité des rapports, adopter
réduire à renonciation
le
simple, parce que
l'on
accumule, plus on multi-
enfermera
de vérité, sous
en disant ((
avec des mots
plans perspectifs.
Je crois que
somme
les
et
la plus courte, la plus
la vérité se voile
nombreux. Plus on plie les
un principe
la
la
formule
plus grande la
plus brève,
:
L'art est la spiritualité des formes. »
THÉORIE DE LA BEAUTÉ
I.
Il
— Il n'y a
ny
pas d'autre Réalité que Dieu. pas d'autre a Vérité que Dieu. Il n'y a
pas d'autre Beauté que Dieu. Dieu seul existe pas est un bruit
parole qui ne l'exprime
et toute
et toute voie qui
;
ne
le
cherche
pas aboutit au néant.
La Il
seule fin de
l'homme
c'est la
queste de Dieu.
faut le percevoir^ le concevoir, l'entendre, ou
périr.
II.
i°
La
—
Les trois grands noms divins sont
Réalité^
la suhsla?ice
Beauté, la vie ou
le
Fils
;
3°
ou
La
le
Père
:
la,
Vérité ou l'uni-
^cation de la Réalité et de la Beauté^qui Saint-Esprit,
;
2"
est le
l'art idéaliste et mystique
108 Ces
trois
noms
régissent trois voies
mêmement modes
aboutissantes, trois questes de Dieu, trois religieux.
Entendez
religion,
dans
le
sens
de relier la
créature au Créateur.
— La Science ou recherche de Dieu par
III.
la Réalité. L'Art oic recherche de
La
Beauté.
par
Dieu par la
Théodicée ou recherche de Dieu
la Pensée.
—
IV.
Qu
la ?^echerche
est-ce
donc que
la
Beauté
?
sinon
de Dieu par la Vie et la Forme.
Ainsi que les trois personnes divines sont toutes
présentes en chacune d'elles,
Beauté se
ainsi la
particularise en trois rayonnements,
formant
le
triangle d'idéalité.
—
La Beauté du Père s'appelle Intensité. du Fils s'appelle Subtilité .^ La Beauté Beauté La du Saint-Esprit s'appelle Harmoni?. V.
1
Aux
traités
de
V Amphithéâtre
subtilité s'attribue toujours
des sciences
au Saint-Esprit
mortes,
la
et l'iiarmonie
au
Fils.
Dans
le
Cenacolo
Dans
monde animique l'harmonie suprême
et
lo
se réalise
au
au Calvaire.
monde
iutelli}ctuel, la subtilité
air la simultanéité de eièoxe perso&Qe<
qui pourrait se
défi*
tous les rapports, appartient à la troU
109
THÉORIE DE LA BEAUTÉ
Lorsqu'on
dit
une chose
lui attribue
l'harmonie conceptibles
l'intensité, la subtilité et et l'art
on
idéale,
considéré dans son essence se définira
— Le point esthétique d'une forme
VI.
point d'apothéose, c
;
:
est le
est à-dire la rèalisatio7i
qui
rapproche de l'absolu conceptible. VII.
— V Intensité réalisée
Le sublime
s'
appelle
tions et opère sur l'esthète par le
en ses deux VIII.
tel,
:
s
d'Athènes
et
et celle
tous les
Michel-Ange
appelle
le
Beau;
la
rapports,
l'œuvre
telles,
:
de Raphaël.
— VHarmonieréalisée
s'obtient par
telle
tels,
s'obtient par la pondération et l'équilibre
des rapports les plus immédiats
IX.
:
et la sur-
arts.
—La Subtilité réalisée
Beau
sublime.
Tétonnement
surbaissement des temples d'Orient
élévation des églises ogivales
le
le
s'obtient par l'excès d'une des propor-
s'
appelle Perfection
pondération
même
les
et l'équilibre
plus
de
asymptotes
:
l'œuvre de Léonard de Vinci.
Les Rose Croix classent toutes de l'entendement
comme
d'une unique iscience
!
les
catégories
autant de subdivisions la
théodicée
;
et 7
VArt
iiô
L ART IDEALISTE ET MYSTIQUE
idèatiste et mystique^ malgré son titre afférent
aux seuls Beaux-Arts, prétend à
annexe,
valoir, en
Sommes et des Manrèze. Au cours de ces pages, l'Art est présenté comme une religion ou. si Ton veut, comme cette part des
médiane de
la
physique
religion, entre la
et la
métaphysique. Or, ce qui distingue
une religion d'une
sophie, c'est le dogmatique
:
philo-
subordination de
la
l'individualisme à l'harmonie collective.
Quel dessin définir
X.
dogme
est le
?
applicable à tous les arts
Quelle est l'essence de l'Art? Et
du
comment
FArt lui-même.
— L'Art
moyens
réali-
V essence de
toute
est V ensemble des
sateurs de la Beauté. XI.
—
La Beauté
expression par
que
les
Si la
les
est
formes. Les technies ne sont
modes aboutissant. Beauté est
sera la règle
Ouvrez un
!
le
but,
l'art, le
moyen, quelle
mot
Idéal
L'idéal. Littré à ce
réunit toutes les
:
«
perfections que
;
ce qui
l'esprit
peut
concevoir. »
L'art idéaliste est dowg celui qui aÉ>
-<
'NS
>
THÉORIE DE LA BEAUTÉ
111
UNE ŒUVRE TOUTES LES PERFECTIONS QUE l'eSPRIT PEUT CONCEVOIR SUR UN THÈME DONNÉ.
On comprend bas pour qu'ils tion
peinture d'histoire
la
:
y a des thèmes trop suscitent aucune idée de perfecdéjà, qu'il
;
la militaire
toute
;
représentation de la vie contemporaine privée ou
publique
portrait
le
;
paysanneries
;
les
marines
talisme pittoresque sport
;
des ;
quelconques
l'humorisme
;
les
;
Torien-
l'animal domestique ou de
;
les fleurs, les fruits et les accessoires.
Quelles illustrer
perfections
un manuel
se
peuvent concevoir
à essculer
;
à
un factionnaire
à faire défiler des mineurs ou des clubmans
;
;
au
Bonhomet aux peinards de la terre comme de la mer aux anecdotes, à l'Algérie,
visage de
;
;
cet Orient marseillais
aux chrysanthèmes Quelles perfections
choses
et
;
aux vaches
et
aux chiens,
aux melons, aux aiguières?
se
peuvent concevoir à ces
?
Pascal
lumineuse veut nous
se l'est ;
«
demandé^ en une exclamation
Quelle vanité que
la
peinture qui
forcer d'admirer la représentation des
choses dont nous dédaignons la réalité Si
nous rapprochons de l'auteur
ciales l'auteur de Pa?'sifal,
toute la matière
!
»
des Provin-
nous aurons élucidé
L^ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
lia
Wagner ((
dans un de ses
dit
L'Art commence, là Car,
la
même
même
femme,
écrits théoriques
:
oii finit la vie.»
que
concupiscence
la
salue d'un désir, ne solliciterait pas l'admiration,
par son image reproduite. Voilà pourquoi, à la
première épithète
une autre
et
:
:
idéaliste, j'ai
dû en ajouter
mystique.
Or, mystique veut dire qui tient du mystère Il il
ne
suffit
faut encore qu'elle détermine
d'au-delà
;
;
pas qu'une œuvre satisfasse l'idée
il
faut qu'elle soit
;
une impression
un tremplin d'en-
thousiasme, un déterminant de pensées. Généralement,
le
Titien est idéal, jamais mystique
;
le
contraire apparaît chez les Trecentisti, toujours
mystiques, rarement idéals. XII.
—
La Beauté d'une œuvre
est faite
de
réalité sublimée. XIII.
— La
mysticité d'une œicvre est faite
d'irréalité plastiquemenl produite.
XIV.
— L'œuvre réelle de forme,
d^ expression est pa^"faite
:
et irréelle
Léonard.
Ces principes, aujourd'hui oubliés, dédaignés, présidaient au génie ancjen,
THÉORIE DE LA BEAUTÉ
Se figure-t-on un Paul-Emile Paris,
comme
il
fit
113
demandant
à
à Athènes, un précepteur, pour
ses enfants, qui fût peintre et philosophe.
Évidemment, vers les peintres
l'an 163
avant Jésus-Christ,
d'Athènes savaient quelque chose de
plus que ceux de maintenant.
Platon seul a osé considérer la Beauté
un
être spirituel, existant
conceptions
:
et
cemme
indépendamment de nos
un penseur injustement oublié,
Maxime de Tyr, montre qu'au IP siècle (il vint Rome, sous Commode) la tradition vivait encore Le beau ineffable dans ses sphères. Là, ((
— il
dit-il
— existe dans
à ;
le ciel et
demeure sans mélange. Mais,
en se terrestrisant, il s'obscurcit par degrés... « ... Celui qui conserve en son esprit la notion essentielle de la Beauté, la reconnaît, dès qu'il la ren-
contre
du
:
comme
Ulysse apercevait
la
toit ancestral, l'esthète tressaille,
fumée qui s'élève joyeux et trans-
porté. « Un fleuve majestueux, une belle fleur, un cheval fougueux offrent bien quelques parcelles du Beau, mais très brutes. « Si le Beau est descendu quelque part dans la substance, où le verra-t-on sinon dans l'homme, dont l'âme a le même principe que le Beau. « ... Aimer toute autre chose que le Beau, c'est ne plus aimer que la volupté. « Le Beau est quelque chose de plus vif, il ne donne
114 pas
l'art idéaliste et mystique
le
temps de
la terre,
jouir,
il
extasie.
Notre
âme
exilée sur
enveloppée d'un limon épais, est condamnée
â une vie obscure, sans ordre, pleine de troubles et
d'égarement
;
elle
ne saurait contempler
Beau
le
ineffable avec énergie et plénitude. Mais notre
àme
a
une tendance perpétuelle vers l'ordre, vers la beauté. L'ordre moral ou spirituel, de même que l'ordre physique ou naturel, constitue ce beau avec lequel elle a une éternelle sympathie. » Voici
donc un philosophe qui légitime
appellations de l'art
:
les
mystique.
« idéaliste et
«
— V idéal, Vapogée d'une forme. XVI. — La mysticité d'une forme, son XV.
c'est
c'est
nimbe, sa contenance d'au-delà,
La forme tible
belle en
Maxime de Tyr,en «
soi-même, idéale,
d'une augmentation d'intérêt
:
est
suscep-
comme
le dit
sa vingt-cinquième dissertation:
La Beauté du corps ne peut
être
la
beauté par
excellence, elle n'est, en quelque façon, que le prélude
d'une beauté plus accomplie.
Dans chacune des il
y a encore
trois
formules de la Beauté,
trois degrés,
éléments dans l'homme.
»
comme
il
y a
trois
|
115
THÉORIE DE LA BEAUTÉ L'intensité, la subtilité
et
l'harmonie donnent
lieu à trois résultats esthétiques.
Le sublime peut
être physique,
comme
torse que palpait Michel-Ange aveugle
comme
dans
Laocoon
le
spirituel,
;
dans
le
animique,
;
comme dans
le
Génie du repos éternel (Louvre).
La nèse
physique s'appellera l'Arès Far-
subtilité ;
la subtilité
intellectuelle, la
morale,
Mosé
la subtilité
;
Niké de Samothrace.
L'harmonie physique se l'harmonie morale, dans intellectuelle
le
dans
le
les
voit
dans
la
Milo
;
chambres, VhdiTmome
Cenacolo de Léonard.
Le raccordement de l'esthétique à
la théologie
semblera peut-être gratuit à des chrétiens indignes d'être païens
;
toutefois,
pour
les
convaincre, on
choisit ses preuves suivant les esprits visés, et le 26''
verset du chapitre
synonymement 26.
1
de
la
Genèse va déposer
à la version d'Eleusis
— Les êtres
:
délègues de VÈtre {Elohim)
concevant leur œuvre créatrice décrétèrent que
Vadamité [humanité) serait réalisée [dèlinéée)
d après
leur
ombre portée.
Les Elohim étaient des
esprits, des
émanations
individualisées de l'essence, des Anges.
116
l'art idéaliste et mystique
L'ombre étant une décroissance par rapport à la lumière,
comme
l'ombre de l'essence sera
l'ombre de
la
la
substance,
substance ne peut être que
la matière.
Les simples
et
ceux qui font paître
ayant pour devoir de matérialiser afin de le sentir et
les simples,
mystère,
le
ne pouvant se hausser, amoin-
drissent les notions jusqu'à eux, déclarant, aussi
bien dans
saint
Jérôme que dans
protestantes, la création de
versions
les
l'homme à l'image de
Dieu. La moindre connaissance du génie hébraïque les aurait
empêchés de voir
Dieu dans un Il
nom
la
personnalité de
à désinence de pluralité.
résulte de saint Denis
que
créateurs
les esprits
appartenaient à l'une des dernières hiérarchies, et cela se conçoit, étant
donnée
de la fonction; car
Cosmos
le
raissent peu de chose en tuelle,
l'Adamité appa-
face de la série spiri-
Le prototype de l'homme,
séries
et
pour n'en nommer qu'une.
c'est l'ange.
La
la relative bassesse
loi
roi
du monde
sensible,
*
d'évolution, qui nous montre toutes les
créées
devenant
créatrices
à
leur tour
d'autres séries, enseigne le devoir de l'expansion,
(1)
De l'Androgyne
(théorie plastique, 1 vol. 12. 1910 (Sansot.
I
THÉORIE DE LÀ BEAUTÉ
SOUS peine de néant.
dogme
Il
417
découle du texte sacré un
qui gouverne à la fois
la peinture et la
humaine pour dogme sous une forme assimi-
sculpture et toute représentation avoir proféré ce lable
aux cerveaux anémiés de ce temps,
comme
étrangement accusé,
Léonard peut
;
et
Wagner.
XVII.
—
elle
furent
mes maîtres
triste
à une
écho
d'autre
faire
calomnie, c^est
le
notre
Si
j'ai été :
époque ne qu'une
vérité
qui se déshonore.
On pourrait
définir la beauté, la
recherche des formes ayigèliques. Or, cette forme spirituelle, dont nous
sommes
l'ombre substantielle, nul ne la concevra, sans un de jeunesse,
caractère
en
l'élevant
également
au-dessus des deux sexualités.
— Vandrogyne, d est-à-dire la jeunesse
XYIII.
également distante du mâle appa7^aU
On arts
le
et
de la femelle,
dogm,e plastique.
connaît
la
du dessin.
légende grecque sur l'origine des
A
la
veillée d'adieu,
la fille
de
Dibutade, potier de Sicyone, pour garder l'image
du cher
être qui allait partir, délinéa son
avec du charbon sur
la
blancheur du mur. ?•
ombre
L*A1T IDÉALISTE ET MYSTIQUE
118
âme
Ainsi, pour que reste en notre
fervent de notre angélique origine,
uns par l'œuvre,
les
et les autres
souvenir
le
nous
il
par
faut,
compré-
la
hension de l'œuvre, entretenir notre entendement nos sens même, du désir de retourner un jour
et
auprès de ceux qui nous donneront
amour, vie.
comme
ils
nous donnèrent
le parfait
la réalité et la
Et maintenant, de cette sphère des harmonies
spirituelles,
abaisserons-nous nos regards sur les
de Chardin, les dindons
chopes d'un Manet,
la raie
d'Hondekoeter,
casseroles de Kalf, les figu-
les
rants de Meissonnier
Un
esprit cultivé,
?
une
fois
amené sur
les
hau-
teurs de l'art véritable, ne tarde pas à découvrir l'ignominie de l'art sans beauté, ce
de
la
On
pendant
parole sans pensée. croit
communément que
branche de
pour ces
la littérature
esprits inférieurs
jusqu'à la
foi,
qui
une
même
ne s'élèvent pas
l'esthétique doit leur paraître la
philosophie de sentir
appelons
l'esthétique est
ou de l'érudition:
plaisir
;
et,
emprunte
comme sa
ce que nous
catégorie
à
un
inverse que nous appelons souffrir, ainsi le Beau
ne saurait cale, le
être perçu, que par son antithèse radi-
Laid.
Revenons aux
définitions antérieures et relevons
119
THÉORIE DE LA BEAUTÉ les trois caractères attribués à la
Beauté: l'ombre
n'étant que l'absence de la lumière, la Laideur a
manques manque d'intenmanque d'harmonie. m'objectait le bestiaire du Moyen Age,
trois informes, trois
manque de
sité,
Si l'on les
gargouilles,
:
subtilité,
les
dragons,
les
chimères,
répondrais qu'elles rentrent dans qu'elles ont le double caractère de la
en ses parties,
et irréelle
je
l'intensité, et
forme
réelle
en son ensemble.
Je crois avoir établi que la Beauté est une des trois
façons humaines de concevoir
et j'appelle les sept arts
les sept
modes
la Divinité,
nommés beaux
expressifs de la Beauté.
entre tous,
LIVRE
II
LE TRIVIUM ou
LES ARTS DE LA PERSONNALITÉ 00
INTRINSÈQUES
LES ARTS DE LA PERSONNALITE
La
collectivité
mondaine ou
est
irresponsable, qu'elle soit
politique
:
le
nombre
n'a point
de
mérite ou de démérite propre. Seuls les egrégores
rendront compte à Dieu, egrégore suprême, des
agissements d'ici-bas.
L'âme humaine subit des appétences aux les
instincts
penchants
du corps, et
les
vie,
il
n'est
ils
n'est
d'abstraction,
il
Lorsqu'une
pas gouvernée par des se produit
mauvais
sont conditionnels de
qui est la volonté de Dieu.
civilisation
pas vrai que
attractions soient
en eux-mêmes, puisqu la
et
parallèles
hommes
un débordement
indi-
vidualiste des appétences qui n'ont pas été canalisées et
endiguées. Qui, parmi les esthètes, n'a
gémi devant l'amateur devenu peintre devant l'invasion des Amazones dans
ridicule,
les
beaux-
l'art idéalisth et mystique
124
A
arts?
même
partir d'un certain chiffre de
sans aucune
l'un ou
tout animal latin de
rente,
l'autre sexe est appelé à cultiver ce
bourgeoisie, en veine de blasphèmes,
jour
rentes, et
Où
arts d'agréments.
les
que
la
nomma un
est la donzelle qui
ne sabote sa sonate, qui ne piaule sa romance, qui ne salisse
vertueux
remplacé
son aquarelle?
et réfléchi qui, la
pêche à
Où
ayant des
la
est cet
homme pas
loisirs, n'a
ligne par la peinture de
paysages, ou qui ne se sert de ses pinceaux barbouilleurs pour pousser les affaires de sa concu-
piscence?
Où
est surtout cet être
mâle ou femelle
qui,
en
présence d'une statue ou d'un tableau, saura se taire parce qu'il ignore ?
Les
beaux-arts
que l'homme,
vague besoin
pour Prudhomme,
devenus,
Homais, Bonhomet,
les arts
même d'idéal.
d'agréments,
grossier,
faut
il
porte en lui
fauconnières
du mariage, dans leur soin
dresser leurs
filles
à lever
jamais musique, peinture ture.
Déjà Balzac
l'expression
mariable.
et,
même
d'un besoin
de
un époux, n'omettent quelquefois, sculp-
l'avait noté, et
se pratique encore de
un
Les mères françaises, ces
;
il
l'entraînement
nous faut voir
esthétique chez
la
ici
gent
125
LES ARTS DE LA PERSONNALITÉ
Les superstitions sont
les
de réalités expérimentales
;
formes ânonnantes
de même,
usur-
les
pations sont l'effort discordant d'un besoin légitime,
Dès que l'homme cesse de craindre
insatisfait.
pour sa conservation, dès
qu'il est
momentané-
ment relevé du souci matériel, il songe presque inconsciemment à s'accomplir et se crée un souci qu'on pourrait appeler ornemental. Quel est donc le
légitime penchant qui pousse l'indigne tout-le-
monde
à usurper les sacerdotales fonctions véritable, en
l'artiste
pour
soi,
aux
conséquences
une singerie sans
de
plaisir
sans profit pour autrui? Ce penchant si
déplorables,
un des plus
nobles, est le penchant vers la beauté.
On
a dit
l'homme un animal religieux je le dirai volonun animal esthétique. Sans décider si le sauvage apparaît, être rudiment aire ou bien dégé:
tiers,
néré des antiques civilisations, l'homme constaté à l'état de nature, errant, anthropophage,
même,
présente l'intuition de ce que j'appellerai les arts intrinsèques de l'homme. Prenons le Peau-Rouge,
infortuné débris de ce
monde
grand
que
le
et
plus puissant
Gomanche,
le
américains
finit
voyons en
lui
le
Atlante, nôtre,
qui fut
prenons
Sioux, que la cupidité des épiciers à cette les
heure d'exterminer,
et
caractères des trois sortes de
l'art idéaliste et mystique
126
beautés dont l'homme est susceptible. Nos yeux sont d'ordinaire les premiers affectés par l'être vivant, et ce que nous voyons d'abord c'est l'allure,
démarche,
la
—
l'impression,
analogue à
silhouette,
la
celle
et tout cela
de
pose,
la
geste,
le
un effet La seconde
rentre dans
la statue colorée.
impression que nous pouvons recevoir d'un être vivant est celle de
Le timbre,
parle.
qu'elle
lations sont
si
chante, soit
l'intonation, les
susceptibles de beauté,
attitudes et les
Enfin,
la voix, soit qu'elle
les
mouvements.
nous suivons
le
Peau-Rouge au conseil
nous pourrons recevoir de
des Sachems,
modu-
comme
lui
une
troisième impression, celle de l'éloquence, c'està-dire
de
satisfaire
qui
bien
!
pour
besoin d'une certaine beauté,
l'obscur
même aux âmes moyennes,
montre
se
Eh
pensée exprimée.
la
et préserver les vases sacrés
du grand Art contre
les attributions profanatrices,
a jadis suffi de
il
révéler les arts laïques, les arts mondains, afin de
préserver
garde
les
arts sacerdotaux.
encore,
morte,
engloba
il
de
est vrai,
l'autre
Seule, la
nos jours, à
l'état
femme
de lettre
une tradition qui longtemps
sexe.
Son
intérêt
seulement,
qui se base sur la concupiscence de l'homme,
préservée d'une obscuration complète. Elle a
l'a
telle-
LES ARTS DE LA PERSONNALITÉ
ment besoin de
plaire,
que
même
n'en ayant pas
le goût, elle serait forcée
aux mêmes
où son
ayant
muse,
infériorité éclate elle
ne s'élève
grâce est
sa
le
les larves de ce
servile
et,
soins. Voici
la nécessité
pour
pas jusqu'à comprendre que
miroir où se reflètent également
monde
rayons de l'au-delà,
et les
devant ceux qu'elle éblouit,
leur présente que
du
:
127
le reflet
elle
ne
de leur néant, augmenté
sien.
La parole peut-elle attaquer avec succès les mœurs d'une décadence? Je sais que la vérité doit être périodiquement révélée, c'est-à-dire pré-
sentée sous des formes nouvelles et que décide le caractère
Après
du
lieu et
du moment.
la publication
de ce
on ne fermera
livre,
pas un piano, ni une boite de couleurs moites.
Considérant ments, corps, vulgarisation sont
:
la
l'être
humain dans
âme,
esprit,
les trois arts
je vais
de
la
ces trois élé-
rendre à la
personnalité qui
kaloprosopie, la diction et l'éloquence.
LA KALOPROSOPIE
Si
j'envisageais
esthétiser par
l'aspect
j'appellerais cet art
retrouver
:
perdu
de moyen.
que
je m'efforce de fait l'infériorité
c'est
pensée d'autrui
son rôle et
non
outre, la théâtrique comporte
ou déclamation
diction,
et
du chanteur,
réalise la
Il
En
l'être
Ce qui
la théâtrique.
relative de l'acteur et
la sienne.
humain peut du corps en mouvement,
que
ce
des
anciens,
et,
la
par
conséquent, ce terme engloberait deux manifestations que
On
mon
analyse présentement sépare.
peut concevoir un art prodigieux qui jamais
ne fut tenté fournit
la
et
dont
êtres doués,
à la fois,
faculté expressive,
Comedia delV Arte nous
la
caricature
s'il
:
s'il
se
rencontrait
des
de faculté créatrice et de
y avait des écrivains capa-
42Ô
LA IvALOPROSOPIE
blés de réaliser scéniquement leurs conceptions,
ou des acteurs susceptibles de créer leurs
mêmes, comme
le
musicien fugue instantanément
—
un thème donnée
rôles
on verrait alors un spectacle
d'un intérêt sans analogue
;
mais
la
pensée qui
crée
demeure asymptote du moyen qui manifeste,
du
véhicule qui
gens du monde, plus prétendre
épand
s'ils se
à
;
et
ments plastiques de l'œuvre
les
commande-
loisir
d'art, sur
eux-mêmes.
devrait se considérer
l'acteur de sa propre personnalité
que
soit
;
et, si
comme
minime
personne, un mondain trouve à sa
la
portée
une
sorte de collaboration
tique.
Si
on
séances de aussitôt,
les
célébrer les rites sacerdotaux,
mais s'étudieraient à reproduire
L'homme de
pourquoi
voilà
connaissaient, n'oseraient
la
au
ôtait,
par
la
cour de Louis
lieu
au plan esthébien-
pensée, les
XIV, on aurait
de ces sentiments
si
discrets,
en
leur expression, que nous a conservés Racine, les
accents brutaux des
Toutefois
qu'on
se
Mémoires de Saint-Simon. relâche du cérémonial de
sa caste et de son état, on
causable aux autres. La toilette
augmente l'ennui
même
de mauvais
goût est une sorte de très basse idéalité
;
et les
femmes subissent des chiiîonnages disconvenants à leur beauté, parce
qu'en
elles, à
l'état
confus^
l'art idéaliste et mystique
130
réside cependant
un
souci de l'extériorité esthé-
grave
tellement
souci
tique,
qu'elles n'osent
suivre leur intérêt et leur goût, et se soumettent
au
commun
avis,
peur de s'égarer, A-t-on
de
remarqué que l'ancienne magistrature, deux
siècles,
n'avait jamais
subi ces
y a
d'il
invectives
grossières, ces lourds souliers volant à la tête
du
Président, qui émaillent aujourd'hui les séances
de justice
?
Qu'on interroge
que,
plus
décoratif
mœurs
les dévots, ils
avoue-
entre deux évoques d'égale vertu,
ront
le
Dans
les
égalitaires les différenciations n'étant
que
momentanées,
les
davantage.
édifie
les fonctions
devenues analogues à
des séries de représentations, tout Français, qu'il soit
chef de l'Etat, de l'armée, ou de l'Université
redevient bourgeois, au sortir des cérémonies de
son département.
faut
Il
Champs-Elysées, sous
les
avoir vu à pied, aux
regards indifférents,
le
chef de l'Etat promenant sa digestion d'un air qui s'excuse auprès du passant. Or, c'est précisément
l'homme privé qui peut
être aujourd'hui
l'homme
distingué.
On
s'étonnera peut-être que, dans ce traité, le
discours s'arrête à des
maintien» Quiconque
a,
questions de mise
comme on
^monde, connaît deg gens qui
m
dit,
et
de
un peu de
sont point d@9
131
LA KALOPROSOPIE bêtes, qui valent fois,
dont
les
comme
naissance et culture à la
revenus dépassent
le
million et qui,
puérilement appliqués dès l'aube devant des jeux de chaussettes, au bout de longues conférences
avec leurs tailleurs, aboutissent à être un peu plus
mal mis qu'un cocher tout le
monde,
anglais.
La matière intéresse
vaut d'être
elle
puisque, malgré l'application,
si
didactisée,
et,
peu y entendent,
pourquoi ne pas enseigner sur ce terrain
?
Je sais l'ennui de l'individu qui atïecte une pose,
mais
tesse
une rude
les autres, qui affectent
tournent bien vite au goujat s'appelle
:
la
forme de
et,
;
repas
;
il
Tàme
ni
ni
convient de faire aux circonstances
usuelles le bien qu'on peut.
toujours, c'est de s'obliger trictions
la poli-
la charité applicable
aux gens dont on ne peut améliorer les
simplicité,
comme
d'humeur, à
Le bien qu'on peut soi-même à ces res-
celte résorption
du caractère,
sans lesquelles la rencontre d'Alceste devient plus
fâcheuse que celle de l'homme au sonnet. Je ne connais pas le tisation de
On ne
mot qui exprime
l'homme plastique
saurait assimiler à la
nance d'un patricien
;
et
l'esthé-
extériorisée.
me
mimique
la
conte-
voilà forcé de créer
un nouveau vocable pour une chose
très ancienne*
iSâ
l'art idéaliste et mystique
— Le premier des arts de la personnalité
XIX.
Kaloprosopie {de
est la
xaXoç,
beau, et
-rtfodomov,
personne), c'est-à-dire V embellissement de V as-
humain ou^ mieux, le relief, du caractère moi^al, par les mouvements usuels.
pect
—
XX. Il y a quatre sortes d'iiommes l'homme de Dieu, l'homme d'Idée, l'homme d'Etat, l'homme du Monde. L'homme de Dieu doit paraître absent, abstrait, quand
il
:
passe ou se
enthousiasme, dès pas
qu'il
qu'il parle.
Un
en
public, ni
en
;
prêtre ne doit
ni plaisanter d'aucune sorte, ni lire
rire,
journal
tout en onction
tait,
un
témoigner par son attitude
appartient à la société civile, enfin se tenir
en ambassadeur d'éternité.
L'homme plaisanter
condition
d'Idée, il
:
peut sourire, mais non pas
regarde la
vie
autour de
de la regarder de haut
donner l'impression, fait, et qu'il
qu'il
et
lui,
à
de toujours
vise par-delà ce qu'il
n'est qu'à moitié
au présent, hommes
et choses.
L'homme sourira
pas,
d'Etat sera grave, le
pouvoir, qu'il
silencieux, et ne fait
peser sur les
libertés et les vies, doit le remplir d'une tristesse,
et,
médecin
du
auguste
collectif social,
il
n©
l33
LÀ KALOPROSOPIE
aucun sentiment personnel sans
saurait manifester
s'avouer indigne de son rôle abstrait de justice et d'utilité.
Saint Ignace a promulgué cette doctrine occulte «
Faites les actes de la
dirai sans crainte
XXI.
— Celui
foi,
et la foi viendra.
»
:
Je
:
qui réalise Vextèrioritè d'une
idée en réalisera Vintériorité, à moins qu'il se
démente
;
même,
de
V intériorité peut
amener
l'adéquate extériorité. L'Artiste a pour collaborateur son temps.
Aucun des
artiste, si
grand
ambiantes
formules
collectif qui se retrouve
Dans
l'Art
subtil et
qu'il soit, ;
elles
ne
sont
se le
dégage
modèle
en toutes ces œuvres.
morne de Burne Jones, de
Gustave Moreau, on sent que ces maîtres, n^ayant
pu puiser autour d'eux des éléments kaloprosopiques, ont dû voir avec l'esprit et dessiner leurs inventions, sans appui de réalité
;
au lieu que
les
primitifs italiens ne concevaient pas plus noble et
gracieuse prestance que celle des
hommes de
leur
temps.
A
Haarlem,
ôtez par la pensée pourpoints et
eurcots, traises et feutres, de ces tableaux corpo-
134
l'art idéaliste et mystique
où Hais étale sa couleur sans idée
ratifs
fracquez,
;
vestonnez, redingotez ces bourgeois pansus, repus, et
vous aurez
sitôt
quelque chose de semblable au
Tribunal de commerce de Paris. Esthétisés, ces Hollandais sont supportables
comparez
:
les céré-
monies louis-philipiennes d'un Larivière.
La
de Kaloprosopie est
loi
telle
:
— Réaliser en extériorité
XXn.
le
caractère
qu'on s'attribue.
La robe du
juge, le bicorne
du gendarme sont
des restes de cette doctrine.
On tère
va m'objecter
que ceux-ci ne sauraient extérioriser que
et
leur vide
de
la
qu'il est des êtres sans carac-
?
Et nous voici à
démonstration
;
la partie difficultueuse
nous voici venu à l'homme
du monde.
XXHL d'art,
il
—
Parmi
en
est
les
impressions de V œuvre
que la personne humaine peut
donner. Je ne parlerai pas de la beauté l'art
n'a jamais
compose de
pu
traduire,
rêve, de désir
de l'œil que
car cette beauté se
ou de vision.
135
LA KALOPROSOPIE
XXIV.
— La personne vivante a un avantage
esthétique sur
statue^
la
la
c'est
succession
indéfinie des mouvements.
L'Art est immobile,
un
mouvement
seul
Tannhaûser d'après je choisirai entre le
du
Pape, et
celui
il
cristallise
:
si
je
pour
dois
la
l'admirable récit de
moment où où
il
durée
représenter
Rome,
aux pieds
arrive
tombe foudroyé
il
par
l'anathème.
Au
contraire, je puis
développer en Kalopro-
sopie toute la gradation d'un sentiment.
Qui
n'a vu, certaines fois,
une femme élégante
donner, pendant un long moment, une série inin-
terrompue
de poses,
de
charmantes, se déroulant geante d'un
même
voisins de nos
moire chan-
!
a-t-il pas
une grâce
Le cordonnier poète Hans Sachs
mélancolique
?
des Maîtres
Chanteurs remplit
et
la
ruban Dans les rôles, assez mœurs, des Perdican et autres
personnages de Musset, n'y
Walter
d'expressions
gestes,
comme
Eva, et cependant
il
la pièce, efface
est réel.
Le Cuirassier de Géricault ressemble à un héros, et le général Boulanger ressemblait à un acteur !
Talma donnait des leçons de maintien impérial à Bonaparte, que les nouveaux N'oublions pas que
l'art idéaliste et mystique
136 évêques,
XXV. cher
peu esthètes, s'exercent cependant à
si
mom
au
bénir,
—
et la
Il
ent de leur sace.
faut vouloir son allure^ la cher-
maintenir.
Pour rendre ces
affirmations
dans un
faudrait entrer
pratiques,
il
détail extrême, préciser
quelle modification Tâge apporte dans une
même
kaloprosopie, car la plus grande erreur de l'allure est les
de témoigner contre l'évidence, c'est-à-dire
marques du temps sur
Toutefois,
rêvent
l'individu.
comme
le
ducd'J. quoi
les jeunes filles, professe la lutte contre la
vieillesse. nalité,
Baudelaire,
que
Un j'ai
des beaux spectacles de la person-
vu pendant des années
avec un intérêt passionné,
et
toujours
c'était l'efîortde
Barbey
d'Aurevilly, cet Antée de la Beauté féminine, qui,
en l'approchant, retrouvait ses forces. Arrivé,
morne, roide, ankylosé,
l'œil
atone,
la
voix
éteinte,
dans un salon, rencontrait-il une épaule
dont
grain de peau lui plaisait, une nuque où
il
le
pût enrouler
le
serpent de sa concupiscence, on
voyait une métamorphose
s'opérer, et le rajeunis-
sement se prononcer par degré, jusqu'à des flamboiements d'âme à
incendier vingt cœurs, qui
LA KALOPROSOPIK
137
n'eussent pas été les viscères corsetés de poupées élégantes.
Avec quelle grâce,
il
«
Laissez votre
l'œil
d'un vieil aigle
disait
regard de jouvence rallumer
:
qui cherche encore le soleil, de sa paupière alourdie,
mais entêtée.
C'est
pour
»
un devoir de
En
ce
monde
quand on ne laideur.
mieux qu'on
semblances,
de
est,
Vraiment,
les
si
prix de la
femmes manifestaient
leur absence de générosité d'âme,
leur mauvais cœur,
plus mal
faut mentir
il
saurait être vrai, qu'au
leur niaiserie,
irait
paraître
la plupart des êtres.
;
on
si les
les fuirait
;
et
le
monde
magistrats trahissaient leur
conscience par leur contenance,
les
plus grands
désordres, les moins répressibles pulluleraient.
Le grand argument du contemporain pour
sa
défense réside dans la nécessité de ne remuer que la fête et les evant-bras,sous peine le
de faire éclater
grotesque latent du costume actuel,
XXVL
—
Toute
la
sur deux conditions
beauté plastique :
les
est
proportions
basée et
périphérie du mouvement, laquelle Tiécessite
nu ou
la dra.perie.
la le
l'art idéaliste et mystique
138
Les statues de Baudin font
Mgr
de
Affre,
qu'une
rire, tandis
pourrait valoir, par la seule diilé-
rence de vêture.
Au schématisme
linéaire,
il
demander
faut
les
principales règles de la kaloprosopie. Les dictons
ou
populaires
populaciers
donnent raison au
résultat de l'étude.
L'épithète d'horisontale signifie, en
verticales
les
correspondent
comme
devoir, de sévérité,
raide
comme
La proportion humaine le
en témoigne le dicton
étant cinq fois
l'effet
d'idéal,
il
augmenter l'impression
pour toutes
:
moins
faudrait
parti-pris d'élévation prédominât, et,
contraire,
Mais
aux idées de
la justice.
large que haute, pour
que
une
de paresse, de luxure, tandis
idée de mollesse, qjie
effet,
les idées
de
au
largeur
de contingence et de plaisir.
la ligne droite étant
une pure abstraction,
il
n'y a, au point de vue esthétique, que les angles
obtus et que les courbes plus ou moins visibles
encore ne
dont
les
faut-il
a priori d'imagination peuvent changer
le caractère,
puisque
la
concupiscence
face des formes acides d'impubères,
terreur naît
ou
;
pas trop presser ces généralités
devant
l'obésité d'Henri
le
s'éveille
en
que
la
et
masque arrondi de Néron
VIIL
LA KALOPROSOPIE
139
où
L'esprit des formes, dans le sens
les
anciens
hermétistes disaient l'esprit des métaux et des simples, est tout à
fait différent
de leur schéma-
tisme scientifique. ce peintre de laideur qui a écrit sur
Hogartli,
proportions,
les
beauté
dit
la
courbe la ligne
or la Résurrection de
;
MelanchoUa de Durer
brandt, la
et
considère
l'obésité
l'activité
spirituelle,
Le mandarin
comme
saint
le
François d'Alonzo Cano ne présentent courbes caractérisées.
de la
Lazare de Rempas de
chinois, lui,
conséquence
la
aux dépens de
de
la physique.
La courbe s'appelle la ligne du mouvement, car un membre ne saurait se mouvoir sans décrire un segment de cercle. On n'a pas assez envisagé et là réside l'esthétique, la
des
lignes.
donnés
propriété sentimentale
Pour reprendre
exemples déjà
les
ce qui peut faire de la courbe l'idée de la
:
concave
et
convexe. De cette opposition seule résulte
la
beauté, c'est l'opposition nette entre le
beauté féminine, et nous
ne
la
le
retrouverons ni
chez Néron, ni chez Henri VIII, dont
les
courbes
sont schémaliquement toutes convexes. L'horizontale
la
est
direction
femme
ligne de
l'instinct
;
elle
marque
du mouvement chez l'animal
initiée,
s'il
en pouvait
être,
;
et
la la
qui attend
l'art idéaliste et mystique
140
l'amant devrait esthétiquement
être
posture où cette ligne prédominerait
pour
elle se lève,
retarde
aller
l'expression
presque toutes
les
un
n'ait affaire à
animale
et
l'homme.
de
entreprises,
A*
elle rappelle à
goujat, pourvu qu'elle se tienne si elle
s'appuie,
sa faiblesse.
de l'honnêteté
une robe entièrement unie, sans mar-
doit porter
la taille
familiarité
l'homme
veut donner Tidée
qui
moins qu'elle
à
debout, sans s'appuyer à rien, car,
quer
au contraire,
;
au-devant de l'attendu,
une femme qui ne veut pas céder arrêtera
l'inverse,
Celle
dans une
;
ce qui divise le corps engendre la
;
le
costume religieux en
preuve
est la
visible.
Je prends
mes exemples de
d'entendement de l'époque
la sexualité
fait
que
:
le
peu
le désir seul
est lucide.
Une forme du vêtement qui a, sans doute, été prise comme terme moyen entre la robe honnête et
la
robe déshonnête, c'est
la
forme oblique,
la
forme cloche qui met, au moins, une sorte de dignité jusqu'à la taille.
Le chapeau de
polichi-
nelle, qui coifla longtemps Henri IV, elle chapeau
haut de forme, d'hui,
(jui coille
ne (jcuveut pas
tout
le
monde aujour-
être dépassés
en laideur
;
mais cette laideur semble consciente d'elle-même
LA KALOPROSOPIE et discrète, tandis que,
depuis
le
141
hennin jusqu'aux
cornes, la femme, consciente de son absence de
cerveau, n'a jaraBis mis sur sa tête que des choses absurdes...
La remarque
serait sans intérêt, si
on n'ajoutait
pas que ces choses absurdes sont les seules qui convienent, parce que, participant de l'oiseau
lui
par
les
mouvements,
qu'elle produit avec
A-ton remarqué
elle
peut modifier TefTet
une variété inépuisable. cette habitude
mondaine de
n'arborer les couleurs vives qu'aux mois de chaleur, et
dans
le
décor de la nature, où
elles
une criante désharmonie. Là encore,
il
produisent faut cher-
cher une explication dans un a priori moral.
couleur a une rachitiques la
de
telle
importance, que
noble
ont été
race
les
La
enfants
rendus à
santé par la teinte violette aux vitres d'une
La concomité de
serre.
la villégiature et des vêle-
ments de couleur procède d'une idée de relâche dans
que
la le
formule mondaine. On remarquera aussi
jaune, en Occident du moins, est en grand
discrédit
auprès des femmes
et
Cependant, avec des parements noirs,
il
devrait composer
des et
imbéciles.
des effilochés
symboliquement
les
Fédora,
des Listomères, et corres-
pondre aux destinées
de violence ou d'égoïsme.
toilettes des
l'art idéaliste et mystique
142
C'est à tort que le rouge se trouve à la fois sur
sur
le cardinal,
le
bourreau
vraie couleur hiératique est
hommes,
et
et sur le soldat
pour
violet
le
l'orangé pour les femmes.
Le
la
:
les
vert,
étant à l'état dominant dans le règne inférieur de la
Nature, ne parait pas une couleur propre à la
vêture.
est
Il
monde
bien certain que les
sont des sots, puisque leurs seuls visages
pouvant avoir forme humaine,
l'éteignent par
Anglais, Semper, divise l'impression plas-
tique de
l'homme en trois éléments le le mouvement instinctif
piètement
ment
ils
blancheur du plastron.
l'éclatante
Un
hommes du
:
;
;
affectif.
Mais
la
ou le mouve-
stase le
principale règle de Taspect
pour l'homme vivant, comme pour la sera la périphérie du mouvement. Le salut
esthétique, statue,
qui ne prolonge pas son action dans tout
ne produit aucune impression de grâce
femme
et
:
la
qui serre la main avec aisance a déjà perdu
beaucoup de son prestige qu'elle
corps
le
s'estime
et n'étant
paraît, tout contact,
si
signification de faveur,
car, ne valant
;
que ce
estimée que ce qu'elle
minime
qu'il soit,
ou bien
prend
la banalise.
la
Puis-
qu'un retour est impossible aux formes décoratives,
sans un retour encore plus impossible aux
institutions
harmoniques,
et
qu'on ne saurait plus
143
ÏA KA'LOPROSOPIE être beau,
Dans
n'y a plus qu'à être distingué.
il
on rencontrera parfois
cette voie, suivant la raison,
cette beauté qui résulte de la parfaite adaptation
d'une forme à un emploi donné. La botte vaut esthétiquement mieux que
que
la
canne,
dentelle que
que
le feutre
le
linge.
le soulier, la
cravache
chapeau dur,
le
Pour ceux
et la
qui, point trop
superficiels, s'efforceront d'appliquer ces avis. une
indication les guidera
musées, dans
:
se filient le plus, et puis qu'ils
ils
leur
cherchent dans les
d'estampe, l'époque et la
les recueils
race auxquels
décident
qu'ils
:
goût seul dictera,
que leur
ce
audace peut emprunter aux anciennes parures,
pour une accommodation Il
n'y
a,
en
actuelle.
somme que
trois
contenances
:
dominatrice, équivalente à celle de l'interlocuteur, et déférente.
Plus un
homme
est qualifié
d'un autre, moins sa voix être durs et nets il
:
dans
les
et
le traiter
son geste doivent
rapports entre égaux,
faudrait laïciser l'onction
on doit
au-dessus
;
quant à l'inférieur
en bonté distante, puisque,
férieur étant celui qui
ne comprend pas,
l'in-
le
ton
condescendant changerait sa notion.
En le
est
thèse générale, la civilisation est basée sur
plus grand
nombre de
capable, et l'art du
réticences dont
dandysme
l'homme
se pourrait
144
l'art idéaliste et mystique
définir
par
la
:
différenciation
procédés
les
les
individuelle
obtenue
plus généraux.
ne faut décourager
ni les vers luisants,
ni les
chacun dans leur
office,
Maintenant, pour ceux qui, sans être une
entité,
Il
gens du
monde
:
ils
sont,
de petits ornements.
ont une demi-perception de
chercher à manifester, par
l'idéal,
ils
peuvent
l'allure, un caractère.
La femme a trois poses, dans le sens noble du mot le devoir, l'Egérisme, etl'érotisme. Pour l'homme, il y a trois effets à produire :
:
l'estime, la déférence, et la
sympathie.
Enfin, finissant ce chapitre, où je ne puis qu'in-
diquer une voie perdue,
possible à rouvrir, que
l'homme désireux de ne pas augmenter la laideur de ce monde, se reporte en sa recherche, vers les chefs-d'œuvre; et lorsque, malgré la livrée actuelle, il
aura conscience
d'un
rythme
tableau, sopie.
il
aura
de
dune
posture de bas-relief,
statue,
fait
à ce
d'une
moment
expression
de
la
de
kalopro-
Le commandement semble ironique, mais
une des conditions de
la
Beauté, a
dit
Baudelaire,
consiste dans la rareté, et celui qui n'est pas rare,
en quelque point,
existe-t-il ?
^
il
LA DICTION
Quoique
regard humain soit
le
spectacle de ce
de l'âme,
la
monde
le
plus beail
et l'expression la
plus vive
parole qu'on a voulu donner en prin-
l'homme apparaît, plus exacte-
cipal attribut de
ment encore que
tout
autre
truchement par lequel l'âme
manifestation, s'extériorise.
le
Les
choses que l'on dit ne valent pas seulement en elles-mêmes,
parler
empruntent de
une puissance,
intérêt, tère.
elles
Il
et parfois tout leur
un
carac-
y a de vilaines, et de belles voix pour
comme
thiques ou plaisir à
la diction
pour chanter
de répulsives,
;
il
et
en est de sympa-
quiconque a pris
une causerie de femme,
intonation»
et
non
à
d'obtuses
b'est
plu à des
pensées.
Le
dialogue d'amour 8e base entièrement sur l'inten* 9
L^ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
146
tion vocale.
Je te hais, je vous déteste
«
éclatamment
signifier
Texclamation
:
«
»
!
peuvent
de ces mots,
le contraire
Je l'aime, oui
»,
servir à
un
et cri
de haine. Plus l'émotion s'avive, moins
le
sens des mots
demeure.
Aux
conversations des raffinés, la sténographie
donnerait de perpétuelles antiphrases, puisque des paroles deviennent affirmatrices par la modulation vocale,
tandis que le: « oui
accentué d'une
»,
certaine sorte, signifie le: «non)). A-t-on assez
remarqué combien chanson
»,
le
proverbe
dans
se vérifie
le
«
:
Le ton
fait la
tous-les-jours de la
parole.
Le cer
trait d'esprit
et,
si
dépend de
la chaire
la façon
de pronon-
chrétienne de nos jours ne
réunit que les fidèles et jamais n'attire ceux qu'elle devrait surtout convertir, c'est que la parole de
Dieu
se trouve, depuis la
plus mal
mort de Lacordaire,
la
dite de toutes.
Oij est l'obligation d'apporter les soins profanes
aux matières divines laïque,
l'acteur
illustre partition.
se
?
Au
montre
théâtre,
temple
ce
l'exécutant
Les prédicateurs de
d'une
l'avenir,
dressés en une sorte de conservatoire homélélique, réciteront
avec des intonations,
scéniquement
LA DICTION apprises, les
l4t
Carêmes de Massillon,
les
Avents de
Bossuet, les sermons de Fénelon, les Panégyri-
ques de Fléchier.
Tout à l'heure, nous parlerons de l'éloquence
proprement
des énonciations de
dite,
envisageons d'abord Démosthène,
le
pensées
;
plus grand
il
n'improvisa jamais.
Le discours pour Ctésiphon,
aussi bien que les
orateur de la race oratrice
:
Phiiippiques etlesOlynthiennes, furent composés
par un écrivain, mais
A
déclamateur.
part
ils
le
furent prononcés par
banqueroute, qui a une valeur
la
un
discours de Mirabeau sur littéraire, toute
l'éloquence politique se résout, depuis
un
siècle,
en déclajnation, non pas étudiée, apprise, mais Gambetta, sans suite
Ceux qui ont entendu sont rendu compte du caractère
informe.
ânonnante,
se et
sans portée de ces improvisations
souvent victorieuses d'une résistance parlementaire.
Ayant dans
parfois suivi le Chevalier Adrien Peladan
les cercles
quoique peuple,
très
—
légitimistes
jeune,
me
du Midi,
j'ai
rendre compte
incapable de comprendre l'idée
pu,
que la
le
plus
contingente, hors quelques mots qui sont, suivant les
clans,
le Roi,
l'Honneur, la Patrie,
blique, l'Ouvrier, le Progrès, la
Réforme
la
—
Répun'en-
148
l'art idéaliste et mystique
tendait que la voix et ses modulations.
En somme,
l'orateur républicain ressemble au musicien arabe
tympanisant une chambrée,
et,
du
reste, les clubs
n'ont jamais vu que des succès d'attitude (Robespierre) et de voix (Danton).
La conversation féminine que les
exclamations, les hi
les
eh
Il
!
les
oh
!
les
ah
!
et
!
y a donc, dans
décide
le
maniement de
la voix,
un
instrumental et improvisateur qui
art à la fois
Au
n'a rien de significatif
plus souvent du résultat sur l'auditeur.
le
toujours l'expression du visage se soli-
reste,
darise avec l'intonation, et
apprenant à prononcer
scène de M. Jourdain
la
les
voyelles pourrait se
compliquer instructivement.
maniement de
la
Il
qualité
et
le
voix sont capables d'ajouter ou
de diminuer sensiblement d'un acte.
La
existe
l'eifet
d'une parole ou
une façon de parler à qui
y a une voix de charité, comme il y a une voix d'amour, comme il y a une voix de commandement, une autre de prière. Cette infériorité où était Jeansouffre,
Jacques
soulageante, caressante
Rousseau,
dans
silence
qui
il
ses rapports
noblesse, se retrouve chez tout
de
;
homme
avec
la
d'étude et
n'a pas cultivé la souplesse de
rintonation. Les récitatiis de Gluck et certains de
149
LA DICTION
Wagner peuvent presque
du chant
cesser d'être
et
devenir une déclamation rytlimée.
La musique
«
voix
que
dire
comme
musique.
la
A
comprend
art
la
eût été plus juste de
Il
mouvement
voix est un
la
ment de
qu'un mouvement de
n'est
Lamennais.
dit
», a
vrai
et
un instru-
dire, la
surtout
musique
l'harmonie
la
;
mélodie, malgré des règles semblables, une idenmériterait
technie,
tique
écrivain qui
l'appelle
le
du
l'épithète
même
perfectionnement de
la
parole.
Je conseille aux auteurs tragiques, livrer leur
œuvre
un
dans
L'actrice,
la
malgré
inepties,
s'est
ensuite
la
plus
parce
les
parfaites
intonations
ma mémoire aux mots eux-mêmes.
associées dans
soit,
j'éprouvai
déformaient
qu'elles
de
Ayant eu un admirable acteur
à quelques corrections,
rôle,
difficulté
avant
à la représentation
l'avoir parachevée.
grande
de ne pas
plus connue
et la plus fêtée qui
qu'elle joue, le plus souvent, des
vue attribuer une voix
d'or,
par
l'admiration publique.
Aujourd'hui que
du
leit
motiv
et
Wagner
de
la
loi
mélodie indéfinie, l'auteur
tragique peut concevoir
voix
a révélé la double
un emploi
que Racine a ignoré. Les
littéraire
de la
procédés du
150
l'art idéaliste et mystique
récitatif se
peuvent appliquer à
comme
formule psalmodique au
même. Une
la
la
déclamation, récitatif lui-
objection, qui s'étend à tout
superficielle
l'énoncé précédent, va surgir dans l'attention du lecteur
;
revendiquera
il
la
beauté du naturel,
l'horreur de l'afFéterie et s'écriera que j 'ouvre ^une école de grimace et de comédie.
Rien de ce qui mérite
nom
le
ne supporte
d'art
l'épithète de naturel.
par l'application
faut aider,
Il
dons
les
plus
vifs, les facultés les
Raphaël, certes,
doué
était
mis ces dons en activité
;
et
les
l'effort,
plus gratuites,
par quel travail,
a
il
poussés jusqu'à
et les a
l'excellence.
Ces belles voix
qui ont valu à tel
maçon
la
destinée d'un ténor illustre n'ont pas dispensé de
beaucoup de vocalises
et d'exercices
condamne un gymnaste
plus sylphide se
la
effroyables pour
du
violoniste,
du
pianiste
;
la
à des ;
sur
danseuse exercices
l'entraînement
un morceau de
concert épouvanterait d'autres que des paresseux. Si l'on est si
les il
peu doué,
on a de vives
il
faut
que l'étude supplée
:
que l'effort accomplisse. On apprend à marcher, à parler
y a
facultés,
il
faut encore
;
une gymnique de
la
beauté
comme une
de
151
LA DICTION
l'hygiène
après s'être
;
des muscles, on doit
fait
encore se faire des attitudes de parler
est l'art
;
et, si la
grammaire
correctement,
d'écrire
et
la
diction est l'art de parler bellement.
La modulation parlée
influe
sur les circons-
tances les plus variées.
La
Jeanne,
reine
entrant
dans
prison où
la
gémissait depuis dix-huit mois le prince François des Baux,
dès qu'il eut parlé, séduite
le délivra,
non par des rayons
d'équité,
mais par
les sonorités
de sa voix.
En
puissance, tout ce qu'on raconte des effets
du chant s'applique à oui, voilà
mes
burettes
!
Maury,
diction. L'abbé
la
en montrant ses pistolets
et s'écriant
»
:
«
Calotin,
dut son salut à
l'into-
nation et au geste.
Quiconque les fois
a
souvent parlé d'amour
que
sait
où on s'applique, modulant les expressions
tendres, on
donne un grand émoi. Quelle femme,
à l'Opéra, n'a souhaité entendre des lèvres de son
mari
les
mêmes
exquises inflexions d'amour
?
Or
paix du mariage, l'avenir de la famille et celui
la
même
dépendent de
de
la
les
époux parlent d'amour.
société
la
façon dont
L'incantation antique, qui balbutie encore dans les collèges initiatiques
du Maroc,
n'était
pas autre
l'art idéaliste et mystique
152
chose qu'un
distant également
art de dire,
du
parler vulgaire et du chant. L'intentionnalité de la diction fixe la volonté et l'affirme
:
ici
l'esthétique.
l'homme, de la
il
l'intérêt
le
Sur chacune de ces y aurait lieu à
ou
beauté optique
humaines la diction
;
traité
s'ajoute
à
trois faces
de
plus étroit
un
traité spécial, traité
l'art
des
apparences
de la Beauté sensible ou
mélodique
;
et enfin
l'art
de
matière noble par
excellence, traité d'élocution esthétique.
III
L ELOQUENCE ET LES SEPT MODES
A
oratortire on
l'a
je ne crois ait lieu
pas, hors
a
substitué le parlage,
du
prêtre,
qu'aucun
artiste
de monter à une tribune, c'est-à-dire à un
tremplin d'intérêts aux couleurs nationales,
ne vise
et,
ici
que l'expression de
la
— je
personnalité par
la parole.
La faculté de penser n'engendre pas fatalement celle
d'exprimer
penser
vite, à
« Si je
—à
:
pour bien parler,
propos
conserve,
—
et
il
faut pouvoir
devant témoins.
dit
Harmonide dans Lucien,
chaque harmonie son caractère spécifique,
l'enthousiasme au
au lydien,
mode phrygien,
la gravité
le
bacl.ique
majestueuse au dorien,
les
grâces à l'ionien, c'est à vos leçons, Timothée, que j'en suis redevable. » 9*
l'art idéaliste et mystique
154
Or ces modes sont applicables
au
discours.
L'impétuosité phrygienne n'a point sa place en
mœurs
nos
tout
;
s'y
costume
oppose, notre
d'abord. Aristote qualifie ce genre de terrible et
menaçant, Platon n'admettait que
nomme mode
divin
il
;
le
dorien,
« vers dorés » rentrent
le
régit la métaphysique, et
l'accent majestueux
l'idéologie,
Lucien
dans
penseur
et
les
;
cette catégorie et toute
pédagogie supérieure.
Le lydien employé pour noces de
Niobé,
attribué
constructeur de
semble être
le
Troie,
fois
aux
particulièrement
au
la
première
Amphion
et
rythme passionnel
pathétique tendre,
le
il
:
c'est le
vous plaira,
dire
Orphée,
et affectif, le
ton sentimental.
L'ionien correspond à la grâce, tuelle
à
même spiriGomme
de Marivaux ou de
la tirade
sur la
reine
Mab,
et
aussi le concetto.
Le lesbien exprime
la
magnificence
;
en ce mode
sont la cour, le règne, la personne de Louis XIV, et l'école
vénitienne entière.
Je ne pousserai pas l'archéologie jusqu'à recher-
cher
les
parallèles vivantes de Fhypo-Iydien,
myxo-lydien, car j'entends tuel.
les
modes
du
à l'intellec-
Je soulignerai seulement par des exemples
l'éloquence et les sept modes
pentagramme de
ces cinq catégories, ce
morales, Michel-Ange, Dante, plus souvent en
155 tonalités
Eschyle sont
mode phrygien. Au-dessous
au plan matériel, viendraient les Puget_, vage, les Ribera,
Tous
les
d'eux,
Gara-
Tintoret parfois.
le
philosophes
de pensée,
artistes
les
le
et
les
théologiens,
les
Vinci, le Poussin, appar-
le
tiennent au doricn.
Lamartine,
Racine,
Euripide,
Médicis relèvent du lydien
;
Vénus de
la
Watteau, Prudhon,
Corrège, Mozart, sont des ioniens.
Haëndel, Milton, Phidias, Titien des lesbiens. :
En
écartant le phrygien pour sa violence, et le
pour sa hauteur,
dorien usuels
le
:
moduler
et,
les
phrase
»,
;
le
modes
trois ;
le lan-
langage lesbien ou
Or, l'homme civilisé est celui qui peut
officiel.
même
reste
langage passionnel ou lydien
gage mondain ou ionien
aime
il
à une
trois intonations et
différentes
qui dira parfaitement
femme
fonctionnaire
:
«
;
«
je
vous aime
Je vous aime
»,
:
»,
d'une
«
Je vous
à
un ami;
à ses subor-
donnés.
Un
ministre en ses voyages ne songe pas qu'il
devrait être lesbien sur
dans
toasts
les
liqueurs
;
et
cependant
le
quai des gares, lydien,
concerts, ionien pendant les la faculté d'être vif,
aimable
l'art idéaliste et mystique
156
ou pompeux semble obligatoire au prestige de l'économie de toute existence.
la personnalité et à
La
profession d'avocat,
sur
le
mépris de la
loi et
immoralité basée
cette
des juges, puisque les cau-
ses les plus perdues trouvent des défenseurs, n'aurait
pas sa raison d'être, pour une certaine caste,
si
Une réforme possible serait de mémoire au plaidoyer déclamé les
elle savait parler.
substituer le
;
magistrats jugeraient sur des documents écrits.
Au
Cour d'assises ressemble à un théâtre de gros drame ou plutôt à une arène où le
lieu de cela, la
caleçon rouge,
noir, l'avocat
;
le le
procureur, lutte avec
le
caleçon
jury prononce, l'enjeu est une
tête, 11
a fallu
un bien grand mépris des magistrats
pour qu'on tempérât leur verdict par l'obtuse sensibilité des jurés qui, susceptibles de s'affoler
comme si
de s'émouvoir, atténueraient un parricide,
Mounet-Sully,
plaidoyer
tait
Vraiment, l'effort
:
il
là
faut
comédien pour
A la
un jour,
venait
déclamer
comme un
à l'église,
il
faut dédoubler
écrivain pour
le texte et
un
la récitation.
Chambre, au premier aspect de
dique, les
le
par un écrivain.
couteaux à papier
et les
style pério-
couvercles de
pupitre s'opposeraient, de tout leur bruit.
1S7
l'éloquence et les sept modes
La
parole est l'expression
Volonté
;
agit
elle
mieux imaginée
d'autant
et la
de l'idée et de la plus que
l'idée est
volonté chaleureuse.
Démos-
thène mettait son art dans l'action, c'est-à-dire s'adressait à l'âme et
convainct, magnétise il
pénètre
son
;
non à
l'esprit.
Celui
qui
par une électrisation subtile,
auditeur jusqu'à
le
déterminer
contre ses tendances. L'infériorité de l'éloquence la destine
aux
foules, et les foules sont bêtes, irré-
non pas considérées dans leur
médiablement,
composition, mais par leur caractère de foule. Si elles elles
ne sont pas malheureuses
et
deviennent odieuses aussitôt,
touchantes,
par l'excès
animal qu'elles portent à tous leurs mouvements.
Shakespeare
l'a
exprimé dans Jules César
et
Coriolan. L'orateur, idéaliste et mystique, serait celui qui
prendrait toutes
ses raisons de l'ordre abstrait et
providentiel, apportant des preuves d'infini en son
discours, et dédaigneux des individus et des faits,
Normes,
dans
sa
Est-ce possible, hors de la chaire catholique
? Il
développerait
les
en
action
matière.
s'agit
moins de savoir ce qui convient aux mœurs
d'un temps et d'un chose, ce qui
lieu,
que de rechercher en toute
équivaut à l'éternité
et à l'infinité*
l'art idéaliste et mystique
158
La mesure d'un mental dans
;
mais
si
qu'il
un accent de
donne de devient
Ridicule
l'expression.
subtile,
être est celle de son horizon
mesure
la
la
lui tient
pensée
terroir la déforme, si
un
défaut de la langue la bredouille. Paraître ce qu'on est, d'extériorisation
demande une grande force
paraître ce qu'on voudrait être
;
confine déjà à l'œuvre d'art.
humain,
L'être
se
considérant
comme une
matière pour l'œuvre d'art, arriverait à d'étonnantes réalisations.
Les arts ont leur date
et leur
climatérisme que
l'entêtement individuel ne dément pas. L'architecture
est
morte
et l'éloquence aussi.
Elle pourrait renaître dans la chaire, cela dépend
des directeurs de séminaires
dans
les
;
elle
ne paraîtra plus
assemblées politiques.
Mais il y aura toujours des êtres de foi qui voudront convaincre, et ceux-ci doivent savoir quelques règles.
La première condition de manquait
Quintilien, celle qui
àMirabeau, c'étaientles mœursoratoircs.
Une chose vaut
suivant celui qui
l'a dit.
L'art de
forcer l'attention consiste à contrarier son habitude
qu'on a donnée de soi précédemment l'homme grave qui soudain s'enflamme, celui plein
et l'idée
;
l'éloqitence et les sept modes
159
de vivacité qui tout à coup se solennise, frappent fortement l'imagination.
On
ne saurait évaluer la force d'une affirmation,
on ne
la produit dans la forme convenant au Le Bonaparte, en des congrès à diplomates compassés, avisait une précieuse potiche et la brisait à la moindre contradiction l'effet
si
milieu.
:
nerveux était obtenu sur les jugeant
le
assistants; ils cédaient,
corse indomptable. L'affirmation
daine présente une bien autre difficulté
siasme ou l'exécration produire aujourd'hui,
:
peuvent
ne
qu'au prix
mon-
l'enthou-
guère
d'un
se
prestige
personnel.
A
moins de fournir une carrière d'audace
prosélytisme,
il
ne faut pas dépenser
d'individualisme qu'on nous
fait,
le
et
de
crédit
ou bien on risque
de se perdre.
La qualité du personnage discours que son art de dire qu'il dit, vient
en tout dernier
Inconsciemment,
le
agit ;
plus dans
le
l'excellence de ce
lieu.
parleur s'étudie plus à frap-
per son auditoire qu'à se contenter lui-même ou plutôt,
une
d'autre
moyen de
par
fois,
la vérité,
en face du public
n'a-t-il
pas
se satisfaire que d'émouvoir
non
mais n'importe comment.
Notre éducation gréco-latine nous a leurrés sur
160
l'art idéaliste et mystique
l'éloquence
Bridaine, vains,
ils
on l'envisage esthétiquement,
si
;
Mirabeau étaient de pauvres
les
ne nous ont
laissé
les
écri-
que des cadavres de
discours.
A
considérer
l'art
pratiques, c'est
oratoire pour ses résultats
un magnétisme. Convaincre,
c'est
envoûter.
Un en
initié
bataille
parties
;
ne croira pas que ce soient
les
mots
qui luttent aux lèvres des adverses
pas plus que, dans un tournoi, ce n'étaient
les lances qui
se menaçaient,
mais
les destinées
qui s'affrontaient.
XXVIII.
ment
est
— V éloquence conùdèrèe pratiquel'art
toire et de lui
de fausser
imposer
la volonté
d\in audi-
la sienne, ce qui s'opère
selon les lois magnétiques^
par
des projections
nerveuses de la personnalité^ sous forme de parole.
Hors des premiers moments, on pourrait avec
une voix suppliante
et
des modulations assorties
plaider la culpabilité d'un assassin, et Si si
Démosthène connaissait
l'éloquence
l'action,
est
l'action,
cessons de
la
les lois
encore
considérer
le
sauver.
de son
et
art,
toujours
comme une
i
l'éloquence et les sept modes 'partie
161
des belles-lettres et mettons-la parmi les
musique
arts, puisqu'elle participe de la
et
de la
sculpture et qu'elle couronne la kaloprosopie et la diction.
A on la
une époque aussi pédagogique que est surpris,
au collège de France,
celle-ci,
comme
Sorbonne, du piètre intérêt des professeurs
manquent-ils d'instruction
?
non
:
manquent
ils
;
à
de personnalité.
Les grandes aventures ont été l'effigie
les
médailles à
d'un, qui était puissant devant le Seigneur,
comme Nimrod,
dont
le terrible profil s'enlève
vigueur sur la nuit des temps. de Bonaparte orateur, de parler,
le
lui
On
en
ne parle pas
qui n'avait pas besoin
fascinateur d'un peuple,
le
sorcier
aux cent milles grenadiers, ce vieux de la Montagne qui voulait, unis, et qui,
comme un
de son vouloir
tous les tigres de la jungle
instant, contraria par le seul poids les
Normes de
ce
monde. Arme
empoisonnée, levier de ténèbres, source d'aveuglements,
la parole
publique
et
profane n'a laissé
derrière elle que des ruines; et les Latins
sous
le
meurent
poids des paroles empestées qui vibrèrent
comme un
souffle
de mort, aux lèvres de Luther,
de Voltaire, de Jean-Jacques et des avocats de la
Convention,
162
l'art idéaliste et mystique
Quel silence majestueux sur
le
passé oriental
!
Ceux qui gouvernaient, recueillis et pensifs, ne nous ont laissé que des dates: leurs idées sont demeurées secrètes l'honnêteté sera
Pnyx, de
;
et
la
dernière
forme
désormais de ne jamais
de
aller
au
fuir l'Agora.
Que viendrais-tu dire au désert de la multitude demande l'égalité, ô thérapeute impuissant
qui
désormais, et qui ne peux plus que penser pour
ceux qui déraisonnent,
comme
ceux qui se perdent dans siècle.
la
le
moine
prie
pour
boue mouvante du
LIVRE
III
LE QUADRIVIUM ou
LES ARTS RÉALISATEURS DE LA REAUTÉ ou
EXTRINSÈQUES
i
LES ARTS EXTRINSEQUES
L'ECRITURE DES FORMES OU DESSIN
D'après
par
le
Bèreschit, l'Art aurait
le
dessin
;
les
Œlohim
commencé
apparaissent, projetant
leur ombre, pour élaborer la forme humaine.
L'Art
commence par
la ligne, cet
abstrait
!
J'arrive tout de suite au plus secret de la question.
Apelles,
Prologènes
venant exprès de Rhodes pour voir et
ne
le
trouvant pas, traça une ligne
sur un panneau blanc. vit-il ce
et
il
contour
traça
A peine
qu'il s'écria
:
Protogènes revenu «
un contour encore
Apelles est venu plus
»;
Mais
pur.
Apelles revint et redessina d'une façon incomparable et définitive. Pline
panneau fameux, Césars, sur le
ajoute qu'il a
très effacé,
mont
Palatin.
dans
vu
le palais
ce
des
166
l'art idéaliste et mystique
Or
ceci,
démontre
incompris de tous les peintres vivants, qu'il
y avait une initiation des Beaux-
comme une
Arts
restituer avec
On
des sciences
;
on pourrait
et
un peu de temps. effet, un mystère dans
en
sent,
qui ne peut résider ni dans
le dessin,
modelé, ni dans
le
la
la
perspective. Philostrate, dit
:
«
biographe d'Apollonius de Tyane,
Les premiers peintres de l'antiquité ont
peint avec une seule couleur et rien n'empêche
qu'on ne distingue dans de pareilles peintures formes,
caractères,
les
les
passions
Avec
les
un
crayon blanc, vous pourrez pourtraire un nègre la
de son cou,
le
Le dessin de
:
forme de son nez, de ses cheveux, de ses joues,
l'art
les
;
noircira à vos yeux.
est la seule partie
»
longtemps vivante
peintures du Pœcile par Polygnote
durèrent neuf cents ans
;
mais
si le
coloris parait
un élément qui ne peut rester stable, la ligne, demeure la partie immortelle du dessin.
— La ligne
XXIX. elle
est la
elle,
philosophie de VArt,
ne doit pas dépendre du tempérament de
Vartiste
;
la ligne est
dogmatique
micable théologie de la forme.
:
c'est
Vim-
467
L*ÉCRITURE DES FORMES OU DESSIN
Le
sensibles,
iont
graphisme des formes extérieures
dessin,
la
:
igné est
s'opère par ligne,
le
trois
modelé
et
procédés partiels qui
La
et le clair-obscur.
plan en largeur et hauteur d'une
le
'orme, quant à son profil.
Le modelé ;n saillie
est la
et
des parties d'une figure.
Le clair-obscur umière
mensuration en profondeur
sur
est la proportion
une figure
graduée d'une
un
ou
ensemble
de
îgures.
La
ligne en soi, aussi abstraite que l'alphabet,
l'existé pas
dans la nature
an idéogramme,
le
littéralement, c'est
hiéroglyphe qui pour
gence humaine traduit
lonc
;
le
monde
la partie la plus élevée, la seule
le la technie et
où
e reste appartient
le
au
l'intelli-
sensible
c'est
;
indépendante
génie se peut montrer
;
tout
formes n'étaient
talent. Si les
]ue des surfaces plus ou moins planes, la ligne suffirait
à les exprimer
;
mais
toute substance, occupent
les
formes,
un espace sous
comme les trois
iimensions. Voilà pourquoi cette définition seule i^aut
:
le
[ormes vivantes traitées par ie la ligne, Il
est
moyen
dessin est l'art d'écrire, au le
procédé abstrait
augmenté du modelé.
donc illogique de considérer
somme une
des
partie de la
peinture,
le
dessin
puisqu'il
la
l'art idéaliste et MYSTIQÛi
168
génère. Esthétiquement, le modelé
suffit
à expri-
mer les courbes et les rondeurs des formes. Le corps humain est la principale et devrait être la seule matière
où
le
L'homme ou microcosme ou macrocosme,
l'univers
sensible
;
que toute
il
incarne la synthèse de
il
semble, d'après
la création
dessin s'appliquât.
est l'apogée le texte
de
du monde la
Genèse,
animale n'ait été qu'une échelle
ascendante pour aboutir à l'homme.
ARCHITECTURE
L'Architecture duire la
la
arts,
ment
l'art
beauté par une sjccession
géométriques de
techniquement,
est,
réalisés, suivant les trois
matière. la loi
l'unité
produite par
;
et
plans
de
dimensions
Plus encore que dans
de l'unité domine
de pro-
les
autres
non pas seule-
convergence
la
des
parties vers l'expression dominante, mais encore
dans
la
conception
cet art était
mort
même. On et
a cherché pourquoi
on n'a pas remarqué
qu'il
agonisa du jour où l'individualisme devint la forme
de l'inspiration. Le l'étalon
monument
des mesures
qui apparaît sous
du patési Goudéa,
avant Jésus-Christ, date
la
4000
plus ancienne de la
construction esthétique, est venu mourir et cher-
cher une sépulture dans la
Loire.
Quoique
les
les palais
châteaux
à
des bords de
briques
de
l'art idéaliste et mystique
lIO
Louis XIII,
colonnade de Perrault au Louvre,
la
hôtels
certains
mention, Tart
du
le
finit
où ce ne
jour
nommé
personnage abstrait
méritent une
siècle,
xviii®
roi qui se
fut plus le
commanda
demeures, mais l'homme passionnel sous
des
la
couronne, qui voulait des relâchements à sa fonc-
Anet a
tion.
pourquoi
le
été élevé
pour une femme,
grand Art touchait à sa
nerveux ne mérite pas de temple, que
les
hommes
autres
et les rois plus
grandes expressions ne conviennent point
les
aux
petites matières, et qu'il
marbre
et la pierre
ne sied pas de déranger
pour abriter des caresses.
Victor Hugo, qui tout offrit
et voilà
Le frisson
doivent n'oublier jamais
que
le
fin.
long de son œuvre
le
des effets en place d'idées et colora la méta-
physique par des jeux d'aqua-fortiste, a cru formuler
une
clarté en disant
monument,
d
Non,
fanatiques pour
le
:
«
Ceci, le livre, tuera cela, le
le livre,
au contraire, crée des
monument
qui, lui, garde sa
signification propre, à travers toutes les mutations civilisées. la
Mais
le
monument ne
peut refléter que
dominante d'une époque, une communion.
Le monument incarne d'un
lieic,
et
il
la
moyenne
est bien certain
rindustrie incarnait l'âme
que
le
moyenne de
des
âmes
Palais de Paris. J'ai
déjà dit que l'individualisme ne pouvait rien en
171
ARCHITECTURE
rarchitectonique. Les Gustave Moreau, les Burne Jones, les Watts, ont puisé, en eux-mêmes, un art
étranger à leur siècle, Ingres, à une époque de pantalons, a su retrouver parfois
Tandis que
les autres arts
rayonnement par
nu antique.
le
du dessin continuent
la personnalité,
le
l'architecture,
produit de l'âme générale, ne relève, depuis cent ans,
que de
si
la gare,
pu engendrer sa forme n'est pas un hangar, on y cintre romain et le pilastre
particulier, n'ait
expressive
:
lorsque ce
voit, ô insanité, le plein
grec.
que
N'est-il pas extraordinaire
truction.
ce lieu
ou de l'entreprise de cons-
la bâtisse
D'où vient que
les activités
de la pensée se
sont conservées, sauf une seule? Avec des intermittences, la civilisation a toujours pu continuer les
modes
expressifs, sauf
un
;
enfin,
malgré
les
prodigieux éléments de comparaison et d'étude
que l'archéologie nous a
royal, l'hôtel
munale Paris,
livrés, nul
un monument. J'abandonne
surgir
;
de
ville,
ne peut
expression de la vie
com-
en présence du nombre des paroisses de
du nombre des paroissiens qui
tent, et
faire
le palais, lieu
de la place que
le
les
fréquen-
catholicisme tient encore
dans nos mœurs, je ne peux pas dire
qu'il n'y a
plus d'églises esthétiques parce qu'il n'y a plus
de
foi, et la
seule explication la voici
:
l'art idéaliste et mystique
172
—
XXXI, La loi absolue du monument est Vunité, mais dans cet art Vunitè n'est pas produite par l'individu comme dans les autres, il faut qiCelle résulte de la "tnoyenne animique.
Le métaphysicien, ne s'occupant jamais de inférieur, parce qu'il ne lui présente
tômes
amoindris,
coutume
a
d'après
l'individualisme
temps à
d'une
époque
de
même
la
inintéressant, la
dévote,
qui,
la
formule moyenne
l'état
colossalisé,
sont
la
bourgeois
les
caricature
des
époque. L'individualisme
génies à
l'état
mais dynamique, se retrouve chez
chez
notaire,
le
même
chez
l'officier
en dehors de son service, s'exprime librement.
Les dévots ne sont plus qu'ils étaient, car le jour
ne sentent plus
ceux
concevoir
de
l'individu d'exception.
Mais l'exception n'étant que d'un
l'être
que des symp-
d'en
le
magnifique troupeau
où ceux qui commandent
douleur inquiète du pouvoir,
la
bas perdent aussitôt la
notion
des
douceurs de l'obéissance. Autre cause de l'ignominie des églises actuelles, presque exclusivement
la
femme
et les abaisse à
les
peuple
son image.
Voyez les pauvretés esthétiques qu'édifia Louis II, de sainte mémoire
sommes
;
voyez même,
puisque nous
en Bavière, le touchant effort de Louis
P""
173
ARCHITECTUBE
désespérant de trouver des architectes,
qui,
Rome
copier les palais de
même
et
de Florence
Makart
projets insensés d'un
les
;
fit
voyez
et
d^un
Tracksel.
Une plus,
dissertation sur
un
contemporain n'a
inutile. L'architecte
est
ne créera
art lini et qui
encore qu'une raison d'être: celle de prolonger, par tous les moyens, la durée du legs antique
;
quanta
ses propres élucubrations, qu'il les rentre
incohérences
des
Eût-il
indignes de voir la lumière.
du géuie,
d'un temps seule pourrait
Qu'il soit
théâtre et
du metteur en scène, éléments avec
dernière remarque
de
Montereau,
venus vers nous
:
qu'il
la fatale
et ;
combine
utilité
les
Une
!
l'architectonique est l'art qui
moins de noms
le
le
un émule du décorateur de
féconder.
nous a légué
une
restera impuissant, en
il
matière où l'âme
classiques
comme
;
Ictinos, Pierre
quelques autres
en revanche,
la
seuls
sont
moindre bâtisse
de nos rues est signée, mais plutôt, je l'espère
pour
la
confrérie,
en une adresse commerciale
qu'en prétention esthétique.
Goudéa
est art
qui les détournait
même
plaît d'attribuer
une conscience particulière de leur
aux grands architectes, dont l'ancêtre,
Il
titre
que
le
de
le patési
produire leurs
noms au
sculpteur ou le peintre.
Ils
l'art idéaliste et mystique
174
savaient sans doute que leur
œuvre
véritable auteur telle date de telle
Un monument, maison d'une
le
avait,
en
tel
pour lieu.
pentacle d'un cycle, la
c'est le
idée,
foi,
temple d'une aspiration.
Or, les périodes harmonieuses sont finies, l'évolution intermittente et morcelée ne produit plus
que des incidences manifestatives puissance
et
;
il
n'y
a en
en acte, que des idées fausses sur
tout l'Occident, et les aspirations n'ont plus assez
de hauteur pour devenir monumentales. L'art, c'est
la
queste de Dieu
l'espérance de s'est
le
;
trouver; et
dissociée des
le monument naît de comme l'âme moderne
grands courants qui vont
viennent du divin au mortel,
le
et
peuple qui n'a
plus de religion d'Etat, n'aura plus d'architecture.
Il
LA SCULPTURE
La sculpture
est l'art
formes vivantes les
et,
de réaliser en relief les
plus spécialement, de réaliser
formes humaines, sous
dimensions de
les trois
la matière.
Cet si
art, difficile à sentir,
malgré
précises de sa manifestation, a
autres.
Si
nous demandons
à
les conditions
dû précéder
les
l'ethnologie le
résultat de son enquête, elle
nous montrera chez
sauvage, la calebasse,
récipient du liquide
le
comme
la plus
primitives.
La
le
permanente des manifestations trace initiale d'industrie
humaine
apparaît sous forme de débris céramiques.
Esthétiquement,
les
découpages au couteau des
Océaniens, pas plus que leurs tatouages ne concer-
nent
l'histoire
de
l'art.
La sculpture naquit de
la
176
l'art idéaliste et mystique
religio\i
dire
représenter le Dieu), c'est-à-
a fallu
fil
du temple,
et le plus
ancien spécimen est ce
bas-relief de Sirpoula au Louvre,
où une harpiste
accroupie frôle des doigts les cordes de son instru-
ment, On peut hardiment attribuer, à quinze cents ans avant Goudéa, cette figure. Il
serait
difficile
de préciser,
si le
bas-relief
précéda la ronde-bosse ou vice-versa, mais aurait
de
lieu
des
arts
rent
de
montrer
véritable
assyriens,
égyptiens, tant
la
précédè-
qui
de siècles les statues grecques.
Soit dans la conception hiératique de soit
dans
le
naturalisme assyrien,
art inimitable, en
Nimroud
a
certaines
y
il
artistique,
gloire
il
les
un
race de
grands
sublimes taureaux
Pour rendre à ces
qu'elle vénérait.
l'Egypte, a déjà
La
parties.
prodigieusement exprimé
félins qu'elle pourchassait, les
leur
il y grandeur
faudrait
civilisations
entrer
dans
l'archéologie proprement dite, et au point de vue
de l'enseignement,
précéda
et
art statuaire
Quel
Grèce l'emporte sur ce qui
que nous développerons en exemple.
était ce
a parlé, qu'on l'architecte
la
sur ce qui suivit, c'est l'histoire de sa
Dédale de Knosse dont Pausanias fêtait
à Platée et à Olympie? et
du labyrinthe crétois
de ces mythes que
les
n'est-il
pas un
Grecs se plaisaient à placer
177
LA SCULPTURE
ians
nuit
la
primitive ?
lonner des modèles le Tart,
il
Comme
de
s'agit
il
non de décrire l'évolution
et
faut d'abord préciser en quoi la sculp-
ure grecque a mérité sa place canonique. Elle a
m
borner, dans ses chefs-d'œuvre, au corps
se
lumain
;
elle a
mis dans
sion périphérique
de jeunesse
vision
les trois
La
;
le
n'a jamais
elle
et
humain
corps
de force
;
de
l'expres-
failli
là,
à,
une
découlent
arcanes primordiaux.
statuaire est l'art d'exprimer
mouvement du
corps. Ce
bar
le
être
répandu dans toutes
enfin, la figure doit être
d'apothéose,
un
état
d'âme
mouvement
les parties
de
doit
la figure
;
conçue dans une formule
c'est-à-dire de jeunesse et de force.
Ce qui rappelle l'enfance ou
fait
songer à
la vieil-
lesse se trouve antiplastique.
La Renaissance, pour compenser son
infériorité
dans l'expression périphérique, essaya de reporter,
comme effort
la
peinture, sur le visage, le plus grand
de signification;
et
il
n'est pas
douteux que
œuvres de Donatello en débris ne nous donneraient pas cette impression qui rayonne du les
moindre fragment de
la belle
époque ionienne.
III
PEINTURE
La peinture
est cet art, amplificateur
qui ajoute, à la ligne
analogues le
coloris
à
et
la réalité.
n'est
au modelé, Donc,
du dessin,
les
couleurs
esthétiquement,
qu'un surcroît, admirable sans
doute, d'expression,
mais qui ne
constituer la Beauté
d'une œuvre. Ingres disait
que
le
suffit
jamais à
dessin est la probité de l'artiste, parole
relative,
comme
si
présence réelle est
on le
affirmait
que
la foi
à la
moyen d'une bonne com-
munion.
Le premier point de
la
peinture, c'est-à-dire de
la couleur, c'est le clair obscur.
Le clair-obscur est
la
proportion graduée d'une
lumière sur une figure ou un ensemble de figures. Etant donnée une figure,
c'est-à-dire l'espace
179
i>EINïURE
occupe en hauteur
qu'elle
ciser ses
creux
et largeur,
et ses saillies,
il
pour pré-
faut déterminer
comment elle se comporte, par rapport à la lumière. La Joconde qui fut, au dire de Vasari, éclatante des couleurs de la vie, se voit aujourd'hui incolore et
ne produit plus que des
mais on
est
de clair-obscur,
nom
convenu de donner ce
violent de
parti-pris
effets
l'éclairage
Rembrandt, et déjà constitué dans
à
« le
un
chez
fréquent
Précurseur»
de Léonard.
La lumière de
la
ment
c'est-à-dire indépendante
diffuse,
scène qu'elle éclaire, appartient exclusiveà la peinture murale.
Elle s'emploie lorsque, les figures d'une sition étant
compo-
d'une importance équivalente,
il
n'est
pas permis d'en sacrifier aucune pour en souligner d'autres, exemples
:
l'école
du Saint-Sacrement. Rembrandt, qui est
d'Athènes
et la dispute
loin de présenter à la criti-
que des œuvres orthodoxes, a du moins manifesté
une
loi
La
de
la peint. ire.
figure la plus
qualitative se trouve la plus
éclairée,
ou mieux
encore
devient
elle-même
l'élément
la
figure
principale
lumineux
de
la
tout
à
composition, Ainsi,
sauf cette restriction indiquée
l'art idéaliste et mystique
180
qu'on ne doit pas abandonner à l'ombre
l'heure,
quelques-unes
comme
des
par exemple
entre
égales
figures
elles,
apôtres d'un Cenacolo
les
— dans une apparition divine,
c'est
Dieu qui doi
éclairer.
Depuis latin
d'employer
a cessé
lumière,
comme moyen ayant
peintre,
influence de Manet, Fartistt
fatale
la
arbres, a vu
déshabillé
un modèle sous
les
comprenant pas que du
ombres portées du
le
des
feuil-
nu esthétique s'indépenqu'il
tableau tout ce qui contredit la
La perspective
fan
beauté
est l'art d'exprimer la distanc(
respective entre plusieurs objets. Elle n'a pas
mêmes
1<
a reproduit avec soin cette laideur, nt
il
danlise de l'action atmosphérique et rejeter
de h
distribution
une peau grenue de chair de pouh
marbrée de noir par lage, et
la
expressif. Niaisement,
lois
au pictural
Picturalement,
elle
et
au
est
les
linéaire.
basée sur
ce
qu'oi
appelle le point de fuite de la couleur, c'est-à-dir^ le
point où un ton décroît en sa nuance mineure
c'est-à-dire
diminue
Le coloris
d'intensité.
est cette
partie de la peinture
donne à chaque objet sa l'harmonise
suivant
une
teinte
qu
vraisemblable e
dominante
qui
doi"
produire une impression d'optique sentimentale,
Î8i
PEINTURE
môme à la distance où les lignes ne paraîtraient On a pris Thabitude d'appeler coloristes ceux
pas.
qui n'avaient pas de dessin, et dessinateurs ceux qui paraissaient
que
le
manquer de
coloris.
La
vérité est
Titien ne peut être loué pour son dessin
d'une extrême négligence, que Rubens incarne la vulgarité :
pour
et,
les
monter à
ce plan où
coudoient indûment les grands Florentins, fallu s'entraîner sur des mérites
rieur.
N'oublions jamais que
expressifs, ont la beauté ture,
comme
son sentiment, selon
non suivant sauf dans
le
il
les règles
même
modes
qu'en pein-
et
s'agit
d'exprimer
sans doute, mais
goût de quelques-uns. Poussin,
Déluge, s'accuse un piètre coloriste
le
bleus de Le Sueur font souiïrir
les
a
d'un ordre infé-
les arts, ces
pour but,
en littérature,
ils
il
dans
la
;
la rétine, et
Bibliothèque des Députés,
il
y a
chez Delacroix des taches dissonnantes. L'éclat, qui ne convient pas à
un Jugement Der-
nier devient une faute égale dans les crucifixions
de Rubens où traînent toujours de rutilants plats de cuivre
des chiffons vermillonnés.
et
La touche de
la
et les
a des lois, n'en déplaise
aux capitans
brosse et aux badauds qu'ils rassr!nbîe'.nt
manières
les accents
« strepitosa » elles
;
coups de pouce,
de vigueur etlapastosita Devaient pas il
l8â
l'art idéaliste et mystique
plus que
gascon ou marseillais
l'accent
répugne aux clowneries
tout
cas,
:
;
l'art
il
veut
non pas étonner.
plaire et pénétrer,
En
aux gamineries
et
si le
sabrage du pinceau se sup-
porte dans les draperies et les formes secondaires, dès qu'il s'applique au corps
devient imbécile
il
et à la figure
La ne
humaine.
trace de la touche su7^ le visage
doit
Rembrandt demanderai têtes,
humain
pas être perceptible à Vœil.
:
Halz vont protester, mais je leur
et
à
l'un,
sans son
que deviendraient
ce
de
parti-pris
supporte l'empâtement;
et,
clair-obscur
à l'autre,
s'il
ses
qui
a jamais
peint autre chose que des visages d echevins, des têtes de
marchands.
Cette part de l'humanité qui offusque les
du Musée de Haarlem,
rencontrer, ni vivre avec retenir ce principe
la
Or, qu'on daigne
elle.
:
Ce qu'on dédaigne dans de
murs
on ne souhaite pas
la vie,il le faut rejeter
l'art.
Et
c'est
le
moins
ces cauchemars
;
:
bourgeois
prétexte, on l'appelle )îOîî
à peindre
i
pourquoi
le
et
fixer ces ennuis,
truands.
Il
y a un
pittoresque, qui signifie
pouilleux de MurillOj idiots de
183
î>ËmtûtiÈ
voyous de
Velasquez,
Manet,
bohèmes
Courbet,
de
et ce qui a suivi.
Si les artistes
contemporains aimaient
l'homme de Medan
pas osé
n'eut
Gomment un
doctrine.
ignorant
la beauté,
risquer
de
sa
cet acabit
pu, sur sa parole fantaisiste, déchaîner un
a-t-il
courant de vulgarité, qu'il a fallu Wagner, un
tel
archange, pour déblayer
On
peut
dans
lire,
L'homme
;
X*,
de l'Artiste^ un
l'ineptie
contemporaine.
de Medan, critique d'art
des joyeusetés
Arts
fumier de cet onagre.
Une nouvelle manière de peindre,
article intitulé:
pour mesurer
le
la collection
;
et
l'homme
Sylvestre, inspecteur des Beaux-
directeur
!
Celui-là,
il
ne faut pas
le
nommer
par son nom, car
donné
la
peine d'entrer dans les bureaux, et gou-
verne
l'art
il
n'a rien fait
:
il
s'est
français sans étude, sans compétence,
sans l'ombre d'une garantie.
Une
telle
administration
absurdité que par la
abandonnant sage ces
l'art
n'est
en
dépassée
production de ce temps
officiel
et
choses sans nom,
;
récompensé, j'envisans
dessin,
sans
demi-teintes, sans modelé, sans perspective, sans
forme, qu'on exhibe impunément. Cela s'appelle
impressionnisme ou symbolisme, dans naux, et démence pour
les jour-
les êtres raisonnables,
l'art idéaliste et mystique
184 Il
y en a
mateurs,
même
qu'eussiez-vous la
qui osent s'intituler les défornobles Grecs,
et d'autres les tachistes.
proportion
dit,
sainte
en voyant ces fous bafouer et
de leurs
s'enorgueillir
ignorances, bien mieux les ériger en théories
!
Et
vous, Génies de la Renaissance, vous ne supposiez
pas que
le
clair
cette constante
^
fresques, deviendrait
lumière de vos
synonyme de
la
rue
et
des
pires truandailles.
L'un découvre le chiffonnier
l'autre,
le
le
égale
beau caractériste par lequel plastiquement Lohengrin
;
ton local, qui réduit la peinture à des
juxtapositions d'affiches neuves.
Les anarchistes opèrent depuis longtemps dans le
domaine esthétique
rialiste
;
mais une époque maté-
ne s'aperçoit du danger qu'après son
éclat.
l'homme d'en bas n'était pas Qu'on y pense entré dans le roman et dans le tableau, il n'eût :
si
pas osé lancer ses bombes.
93 a
commencé par
des idées fausses.
IV
DE LA COMPOSITION
XXXIII.
— U ordonnance ou
la réalisation
d'une idée, par
composition est
formes
les
et le
clair-obscur.
Le dessin phonétique,
est Fécriture plastique, elle sert
La peinture par des
comme
la
au lyrisme aussi bien qu'à
l'anecdote, au sublime
principes de 89.
et
comme
d'histoire
trivial.
est fille des
La prodigieuse
ambitions
au
d'avocats
immortels
idiotie, commencée
et
finie
par des
concupiscences d'assassins, communiquées à tout
un
peuple, frappa, l'entendement toujours un peu
féminin des
artistes,
de stupeur
rencontres épouvantables ne
;
et,
comme
comportaient
ces
pas
d'explications en leur énormité, l'événemenij le
l'art idéaliste et mystique
186
invasion dans
fait fit
l'art.
On
vit
dans
l'histoire
Au
des gestes isolés de l'âme qu^ils exprimaient.
Panthéon,
nous
extrêmes de
la question.
d'abord
trouverons
deux
les
Jugement du F eu àçiM..(ldihdinQ\ quelquefois le privilège des membres de
Voici d'abord le (c'est
de garder après la mort cette désinence
l'Institut
qui les rend, malgré leur effort, àce tout-le-monde
dont
ont
ils
au
peintre,
réverbéré l'âme
lieu de voir l'être
formes d'une époque,
mêmes de a
il
fait
cette
Le
humain sous
les
que
formes
les
époque dans leur insignifiance
l'image,
cadre précis
n'a noté
inexistante.)
les
au
lieu
;
en un
de restituer
sentiments constitutif de
l'être
humain. Sur ces mêmes murs, Puvis de Chavannes a peint la vocation de sainte Geneviève.
Il s'est
peu
occupé de savoir l'exacte broderie convenant à saint
Germain d'Auxerre,
ni
de rechercher quelle
espèce de bure les bergères de la banlieue de a
vu
vu
la
consacrée dans
le
Paris employaient pour leurs vêtements.
un
saint bénissant
même
perfection
une sainte future chrétienne
;
vieillard, balbutiant encore chez l'entant
calement,
il
a orchestré ses autres figures
un accompagnement ému aux deux
Il
a
il
;
musi-
comme
significatives;
187
DE LA COMPOSITION
sous
enfin,
formes sans date,
des
a réalisé
il
d'admirables expressions d'humanité.
Chaque
fois
que, ce qu'on intitule
tableau
«
:
une simple occasion plas-
n'est pas
d'histoire »
tique de traduire l'âme
humaine en son
qu'une chose relevant de
principe,
il
ne reste
et
en aucun cas de l'esthétique. Le plus éclatant
de tous
tableaux français,
les
la librairie
plus vénitien,
le
assurément, l'Entrée des Croisés à Constanllreprésente moralement l'apitoiement
no'ple,
brillant
vainqueur en
vaincu.
Ces chevaliers, beaux
de
face
la
du
du
détresse
comme
des héros
féeriques, sont près de se dire, en voyant quelles
nobles infortumes embarrassent coursiers, qu^ils auraient
armes
destin des coliser sentir
en eux
si
Delacroix^
féodales, lassées de leur
darde,
il
rêve,
trahis par le
et cette réflexion suffit à
l'ivresse
du triomphe
même burg
et
mélan-
et à faire
Au
cuirasse.
la
par une archéo-
logie soigneuse, n'avait représenté
un pays de
pas de leurs
le
être
cœur chrétien sous
leur
contraire,
;
pu
que
les brutes
accourues, dans
pour opérer leur aventure sou-
n'aurait
pas
fait
oeuvre
lyrique
:
il
aurait été peintre d'histoire.
Des modes de est la plus
l'imbécilité,
la
forme historique
insupportable, autant par
le
cauche-
188
l'art idéaliste et mystique
mar
impérial qui la détermina, que par le côté
mnémonique,
puéril et scolaire, de ces représen-
tations.
D'après cette idée, juste en rituel
pour condenser l'âme d'un avec
dèrent,
que
moines,
laïcisation
la
déesse et qu'il la
vant rien qui
les
de
humain,
fallait
la
ils
pourchas des
le
fini
qu'il
à leur image;
réverbérât
Tégoïsme national,
On
collectif, ils déci-
et
dieux avaient
les
l'entendement
sur
un
soi, qu'il faut
leur règne
une
fallait
ne trou-
et,
eux-mêmes autant que
inventèrent la Nation.
a reproché d'avoir écrit, dans l'ostracisme
peinture militaire, « sauf la chouannerie
Certes,
les
Chouans avec
».
leurs sabots, leurs grè-
gues, ne s'accordent pas avec l'idéal plastique
mais
comme
défenseurs de
ils
ils ils
la
;
furent, par la date, les derniers
Vérité et de la Raison,
comme
furent les derniers fanatiques du Catholicisme,
appartiennent
à
la
peinture
annexe des Acta Marlyr-um, pour Dieu
:
ce
sont non
religieuse,
ils
sont
en
morts
des soldats, mais des
confesseurs.
La
loi
opti(}ue
optique du théâtre est la
même
que
la loi
du tableau, non pas au physique, mais
au métaphysique. L'illusion, sur laquelle se base le
plaisir
esthétique, exige ou
l'abstraction
du
DE LA COMPOSITION
costume,
le
La
veut
règle
peut
forme noble avec
recul
;
d'aspect
que
or, je défie
odieux que celui de
ne
qui
pas
soit
que l'on fasse un
Le costume de
des fracs.
ne
vitrail
le
de vêture.
et
forme
toute
par
traduire
se
ou l'imprévu des formes,
draperie,
la
c'est-à-dire
489
chasse,
vitrail
moins
ville, et certaines toilettes
femme peuvent donner
de
lieu à des tableaux,
jamais
à des statues. Le pantalon, la redingote et
le frac
ne peuvent sous aucun prétexte entrer dans statuaire,
puisque,
la
statue
l'art
ne signifiant que
XIV lui-même fut raisonnablement traité à l'antique. En vertu de cette affirmation de Wagner que « l'art commence comme
où
Louis
apothéose,
finit la vie »,
en vertu des progrès de l'instan-
tané, rien de ce que
donne
TArt. Or l'objectif donnera
l'Embarras de voitures,
En
ne relève de
l'objectif, :
le
Carreau des Halles,
etc.
outre, l'Art étant basé sur la signification
banni toute forme
des formes, l'époque qui a significative
s'est
volontairement exilée de
représentation esthétique. Les êtres
et les
la
choses
contemporaines, ne seraient-ils pas vulgaires en
eux-mêmes, de
ils le
deviendraient par
leur transposition
Qu'on se reporte à
sur
le
le
seul lait
plan émotionnel.
la dissertation
sur la kalo11'
l'art idéaliste et mystique
190 prosopie
;
j'y
ai
démontré que
le geste
animîque
devenait impossible avec nos modes; enfin,
veut une preuve plus absolue,
comparé va réciter
la
d'Oreste
si
l'on
critique d'art
L'homme en
fournir.
fureurs
les
la
frac peut-il
discours
les
et
d'Auguste? La femme en corset peut- elle égrener la plainte
harmonieuse d'Iphigénie ou
Eh
plaidoyer d'Esther? Non.
le
touchant
toute forme
bien!
incompatible avec la tragédie s'avoue incompatible
Je
avec
grand Art, qui doit rester tragique.
le
n'entends
continuant
le
pas
même
oublier
siRosalinde,si Desdémone, si
en chignon,
d'être
neutre,
d'être
;
grâce
Il
est
c'est-à-dire
mais
Titania, je
si
en crinoline,
waterproof, en yachting.
l'expression
la
mais,
;
demande
sont possibles en corset, en
Yseult, Sieglinde
pouf,
ici
procédé d'examen, je demande
il
contradictoire,
est
en capote, en
permis au vêtement
de
ne pas
aider
à
défendu au vêtement
c'est-à-dire
de démentir
l'expression.
Les
dessinateurs
d'éphémérides
ont
tiré
meilleur parti de l'élément contemporain
;
le
les
femmes de Gavarni, son Thomas Vireloque, sans aboutir
au typique
représente,
passagères.
valent Il
et
à
comme
l'abstrait
analyse
de ce des
qu'il
formes
faut ajouter que son chef-d'œuvre.
EE LA COMPOSITION
le
Débardeur, ou plutôt
la
que Félégance du chahut
191
Débardeuse, n'incarne et
;
Th. Vireloque,
gâtisme de Vautrin. Je défie que l'on
cite
le
une
œuvre de forme contemporaine qui
résiste
au voisinage, sur un mur de Musée. La
même
seule
aberration qui
fait le
public complaisant au veston
delà pièce moderne pousse l'être incultivé à rechercher dans
l'art
l'image de sa propre bassesse. La
moyenne présente
classe
cette
maladie du goût.
Seul, le peuple désire des mousquetaires, sinon
des héros
;
il
va à l'Ambigu,
Palais-Royal; et en cela
de l'esthétique que grossière
du mélo
le
le
et le
bourgeois au
peuple s'éloigne moins
bourgeois. Cette morale
se rattache encore à
l'idéal,
tandis que les mots à double sens et les vives
le
augmentent
de genre
des théâtres
scatologies
fumier moral du spectateur.
Le
portrait est la forme limitrophe entre l'art
du dessin
et
l'idéal,
susceptible d'être élevé jus-
qu'au grandiose, capable aussi de ne témoigner
que du métier.
Comme
la
fortune tombe de nos
jours aux mains les plus basses et n'y reste pas assez longtemps
trouve
la
pour
les
laver,
le traitant
seule gent portraicturale.
Or
il
se
serait
bien fâcheux que les musées de l'avenir eussent à
conserver
et
à étaler des trognes, par respect pour
192 le
l'art idéaliste et mystique
beau procédé employé. Vivre
condition d'œuvrer
chicaner
sont eux qui
;
sur
l'artiste
première
choix de ses modèles
le
ce
:
ce n'est pas lui qui
choisissent,
le
est la
donc absurde de
serait
il
les élit.
Sur Rops,
la
foi
de quelques Millet et de quelques
on admet
le
genre rustique. Si
est peint avec vivacité,
n'éveille
lement
que
instincts
le
paysan
bien paysan,
ou avortés, ou dégénérés. Quand
la terre n'est pas
têtus,
il
un ramassis de bas
ne présente que
confus de l'humanité;
et
comprendra pourquoi
les caractères
qui a vu de vrais bergers,
les
bergers d'Arcadie sont
admirables, pourquoi Théocrite et Virgile
rendu
la
nature,
façon
plus
réelle
Copier les
Il
la
MM.
que
Poussin,
ont
d'une
Breton, Langée.
sueur sur
le corps,
rapiècetages de fonds de culottes
de Bastien-Lepage, Raffaëli,
que
ainsi
déteintes de la
comme Millet, les M.
il
cette sorte de pitié qu'inspirent éga-
les êtres
l'homme de
et s'il est
les
crasses
de
banlieue de
témoigne d'une véritable aberration.
n'y a qu'un art dans tous les arts, l'allégorie,
représentation
d'une série de
la
faits,
plus
synthétique
d'idées
;
possible
on a vu depuis dix
ans la sculpture saisir la pelle,
la
pioche,
la
charrue Ce qui nous a valu, au lieu d'Hercule,
193
DE LA COMPOSITION
des voyous
;
au lieu de Miion, des décharnés; au
lieu de belles
anatomies, des sabots qui escamo-
tent les pieds, et des bourgerons plus
à modeler que des torses
sous
le
l'ignorance se dissimule
costume.
Lorsque
comme la
;
commodes
la peinture
d'histoire fut
intronisée,
des dimensions contraires à
elle exigeait
vente d'une époque aux petits appartements,
on
la réduisit à des
ce
qu'on appelle
l'homme
qui
proportions de tableautin
genre
le
reçut
Meissonnier,
fut.
l'épithète
et
d'incontestable,
arriva à persuader les niais, que la distance où se
trouve placé un militaire n'influe pas sur bilité
du numéro de
lettes, ainsi
que
les
lois perspectives.
artistes vivants.
mère Gigogne, raffinés,
ses boutons, et
que
la visi-
les aiguil-
brandebourgs, échappent aux
Sa cote dépassa celle de tous
les
De Meissonnier, comme d'une sortirent des séries de reîtres, de
de marquis, ce qui correspond, en plus
propret, aux figurants de théâtre. Là, l'intérêt, ne
une certaine minutie de touche aucun sentiment ne saurait être exprimé par ces
réside que dans
:
modèles en travestissements de mardi-gras. Impuissant à retrouver
que
et
de l'allégorie,
ennui des vignettes à
la
formule du nu héroï-
le peintre
la
Duruy
du
xix'' siècle,
par
et par méfiance de
l'art idéaliste et mystique
194 la
fausse grandeur à la Millet, se mit à représen-
qu'on voit par
ter ce
d'un wagon. Quand
la portière
on songe que M. Harpignies, pour n'en
citer
qu'un,
a passé sa vie à peindre des feuilles d'arbres,
on
peut douter de son entendement. Le paysagiste, c'est
l'homme qui ne dessine
pas, ne conçoit pas,
mais ne voit pas davantage.
Je ne méconnais
pas les nuages
ni les saulaies
Turner,
ni
la
couchers de
mélancolie de Ghintreuil, ni
soleil
Cabat, mais je
comme
de Constable,
de Rousseau, ni
trouve
de les
mares de
les
même
que mettre Corot,
vision du réel, au-dessus de Claude, est
une grave erreur. L'esthétique spéciale du paysage, se
résume en un seul point
:
parti-pris
le
significatif
du clair-obscur.
Comme
les
végétatives
ne représentent
qu'une
beauté
masses
et qu'il n'y a
autre, qu'en
un
l'individu n'existe pas dans la
que tout
du tableau. Chaque
partie site
fois
en lumière dilluse,
que
l'on
du paysage dans
signal de sa fin l'esthétique
l'école
(lunettes
ne considère
;
Italienne
du Carrache). le
peindra
on fera une chose
inesthétique. Chenavard Ta remarqué tion
de
pas d'arbre plus arbre qu'un
y parait collectif; il faut à l'intention poétique la plus grande
végétation, sacrifier
somme
formes
l'apparia été le
Comme
végétal qu'au
sens
DE LA COMPOSITION littéral
de décor,
le
moyen de
seul
salut sera de
l'homme ou de
pressentir la venue de
faire
195
faire
penser à son récent départ. L'accent de véracité ne constitue pas l'œuvre d'art
:
faut
il
une transposition animique, une
prismatisation sentimentale. L'artiste est celui qui sent et reproduit son sentiment, et
non pas
celui
qui voit et reproduit seulement ce que d'autres verraient.
Le paysage musicale
doit susciter
effet
effet
effet
de
de langueur estivale.
Au
de cela, ils inscrivent
favet;
ormeaux
et
:
chênes
ajoutent le département;
distance du l'indication
site
une légende presque
de tristesse vespérale,
méridienne,
joie lieu
:
Platanes, près de
de il
tel
n'y
village;
Monet
manque que
au chet-lieu d'arrondissement
que l'on
peut vérifier, entre
ils
la et
telles
bornes kilométriques. Ces agronomes etgéographes seraient plaisants,
s'ils
étaient
moins nombreux.
Le dessin commence au corps humain, n'est
le reste
qu'un fond, un cadre de couleur dans l'autre
cadre, et rien de plus
:
d'autant que l'appareil voit
plus juste et qu'un peu d'aquarelle sur la photo-
graphie satisferait plus complètement
le
bourgeois.
La mer résiste étonamment, je ne dis pas seulement à la ligne, mais au modelé le morceau ;
19Ô
l'art idéaliste et mystique
qu'on transporte sur caractère
la
ne traduit pas son
toile
mouvement.
en
d'immensité
Aussi
rAnadyomène,Démosthènes'exerçant,lesNéréides, les
Argonautes
faut
Il
sont-ils nécessaires à cet élément.
l'homme dans une marine, sinon
sion pathétique ne sera pas produite
;
l'impres-
mais
il
ne
faut pas le marin actuel, car sa vêture se rapproche
de
la
guenille paysanne ou de l'uniforme militaire,
deux détestables éléments, irréductibles au point de vue plastique. Jésus marchant sur les eaux, la
pêche miraculeuse, l'apôtre qui s'embarque pour aller porter la vérité,
Colomb ou Vasco
intéresse-
ront toujours davantage que la marine d'Etat et les évolutions
de cuirassé. La caravelle, la trirème
sont pittoresques
le torpilleur est
;
L'œil du marin garde sa
avec
fréquentation
l'élève au-dessus
un
la
hideux.
reflet
d'indéfini et
majestueuse Thalassa
du paysan
et
du soldat
:
encore
marin d'une idée, et non pas marin pécheur ou national il faut qu'il incarne
faut-il ici, qu'il soit le le
;
une espérance autre qu'une invasion à formule coloniale.
Quant
à l'humour, à ces ignominieuses farces
dites gauloises
où
les
cardinaux se grisent
capucins paillardent; quant aux pendants riage de
convenance
et
et «
mariage de raison
des
ma»,
il
197
DE LA COMPOSITION
n'en faut pas parler
l'œuvre d'art
:
vibration plus réelle que la réalité qu'elle néglige la multiplicité des
pour rechercher
Quant
les
il
puis-
ne peut être sujet d'oeuvre,
mais seulement l'accessoire il
même;
symptomatiques
dominantes.
à l'animal,
l'expression,
exige une
:
complémentaire de
ne signifie jamais assez pour l'isoler
de l'homme.
Les grands nes pour
dans
seuls sont assez des person-
félins
être peints et encore cadrent-ils
chasses de Rubens
les
et
mieux
de Snydners.
L'animal n'apparaîtra avec raison qu'en figurant: âne de
fuite
la
en Egypte, ânesse de Balaam ou
de Jésus, bœuf de
Crèche, cygne de Lohengrin,
la
aigle de Proraéthée,
paon de Junon, chouette de
Minerve, bouc des Satyres, ours de Siegfried, aspic
de Cléopatre, cheval de Mazeppa, chien de saint
Roch, oies du Capitole. grues d'Ibicus, agneau allégorie
Mais
du Sauveur
et
vaches de Potier, mais
Dreux ne
lion de
la tète
et
à
ses
chevaux d'Alfred de
de Méduse, fils,
Némée: mais
moutons
les
supportent pas. Tordez les serpents
se
autour de
Laocoon
colombe du Saint-Esprit.
basses-cours de Hondekoeter, mais les
les
n'est pas
le
un
et les
enroulez à
montrez Hercule tuant
le
peintre d'un troupeau de artiste,
et le
lévrier qui
198
l'art idéaliste et mystique
main d'un gentilhomme ne peut
soutient la fine
pour lui-même
être peint isolément,
rentre dans
le
pathologique
goût
femmes pour les animaux. La nature végétale n'est pas lisation
;
sinon, cela
;
des
vieilles
susceptible d'idéa-
entre une belle rose et une rose ordinaire
reproduite,
ne réside jamais dans
la différence
la
forme, mais dans quelques nuances qui tiennent
au et
coloris.
Au
femmes
reste, voilà le terrain des
de ces impuissants qui s'efforcent à trouver un
faux semblant d'art, dans
photographique de
la
trouve la forme
fleurs
dessine une rose au
domaine de
l'art
subordonné à
décoratif,
c'est-à-dire
Dans
!
de
et le
l'art
on peut égayer un pan-
un couvercle de
d'art équivaut
d'espèce
sans modelé
ches d'éventail, avec des fleurs
œuvres
Qu'un peintre de
héraldique
trait,
l'industrie,
neau, un piano,
reproduction chromo-
la nature.
;
les
boite, les bran-
exposer
comme
mélomanes pianistique La
à convier des
pour entendre un exercice de
trait
!
peinture de fleurs ne doit jamais sortir de l'industrie et
mot
de l'intimité
;
et,
d'art décoratif, je
entière se
j'ai
prononcé ce
tiens à dire
que l'époque
puisque
trompe, en amalgamant
peinture monumentale avec queterie, la dinanderie.
la fresque,
la papeterie, la
ou
mar-
199
DE LA COMPOSITION
Le collectionneur du xix®
de
stupéfait
siècle,
trouver dans une vieille clef un caractère d'art
que n'ont pas
les bijoux
de sa femme,
et l'archéo-
logue, ébloui de contempler dans les Tanagras
peu de
la
un
grâce de Praxitèle, ont désiré l'esthéti-
sation des objets usuels. Mais l'amateur guère plus
métaphysicien que
l'archéologue sou-
l'artiste, et
vent peu philosophe, n'ont pas vu saire
pour engendrer
les objets
le
moins.
le
plus, néces-
aucune époque
usuels n'ont donné autre chose que le
pâle reflet esthétique du grand terres cuites de Ja
musées
A
les
art.
Grèce soient
montrent
;
il
faut
Pour que
telles
que
que nos
les Phidias, les
Lysippe aient créé leurs sublimes statues^ mobilier et usuel
amoindrie de
l'art
les
et l'art
ne rendra que la proportion sacerdotal d'un
même
temps.
Une autre considération s'impose cette tendance humaine à rapprocher de soi l'objet de son plaisir :
ou de son
désir,
comme
elle
a matérialisé la
religion, tend à vulgariser l'art, à le familiariser. L'artiste, forcé d'accepter les conditions
d'où dépend sa vie, consent,
d'œuvrer
comme Watteau,
historier des éventails et des boites à fard la ligne, la
modes
forme
et la
mais
couleur sont d'augustes
d'élévation d'âme,
industriels; et le
;
à
non pas des procédés
dandy qui détourne un sculpteur
l'art idéaliste et mystique
200
de l'œuvre de musée pour
pommeau
lui
commander un
de cravache, se trompe. Non,
l'art
ne
doit pas descendre jusqu'aux conditions mesqui-
nes de l'usage mondain, ou bien, pour être logique, faudrait-il enrouler
des phrases de Platon sur
roseau des mirlitons
et
le
mêler des passages d'Apo-
calypse aux dernières nouvelles des journaux. Car, est souhaitable, pour le civilisé, de multiplier à
s'il
des rappels de beauté dans
l'infini
jours de sa vie,
garde
la
il
est
encore plus impérieux qu'il
notion respectueuse de
que jamais
il
religiosité
bibelot,
l'art
et,
partant,
n'ose se familiariser avec lui.
Les collectionneurs que
de
tous-les-
le
esthétique
distraits
devant
j'ai
connus manquaient
passionnels devant
:
le
le
chef-d'œuvre. Ceux
qui ont fondé l'Ecole des Arts décoratifs doivent être
considérés
comme une bande
s'efforçant à détourner
d'ouvriers
une matière de son principe.
Quant au garde-manger, au couvert mis, à desserte, aux crevettes et aux melons, ce sont des ronds
et
la là
des barres, de simples exercices de
couleur, des arpèges.
Lorsque M. Desgoffes fourbit une épée ou les fascettes silier
phes
;
le
le
d'un
cristal,
il
fait l'office
taille
d'un usten-
plus maladroit des amateurs photogra-
surpasse.
201
DE LA COMPOSITION
Par
grand
journalistes
que
reste-t-il
dans
on voit ce qui reste au
les éliminations,
on ne
art et, dès l'abord,
de bonne
donc aux peintres
les règles suivantes
XXXV.
Vévènement représenté
est
mer
dans
humaine
;
»
il
;
et «
:
des
Mais
reste tout,
:
— L'histoire relève
l'âme
pas vu
sont écrié
se
foi
l'a
de Vart, lorsque
Voccasion d'expri^ sa passionnalité
typique.
Le
on met en scène des
militaire est possible, si
guerriers au lieu de soldats.
on
raine est possible,
si
certaines fois a
Rop's.
fait
La
vie contempo-
la transfigure
Le portrait féminin drapé,
le portrait
comme
d'homme
en robe ou simarre peuvent aboutir à l'œuvre d'art.
La
rusticité vue à travers l'antique,
nue ou
drapée.
Le paysage, animé de figures décoratives. La marine, animée de figures mythiques ou aventurières.
Le sourire de
«
Comme
L'orientalisme dea pouillerie d'Alger.
il
vous plaira
Khalitatg,
au
».
lieu
de
la
l'art idéaliste et mystique
202
L'animal, en son complémentarisme expressif
d'une scène ou d'un individu.
La
aux mains, aux
fleur, le fruit, l'accessoire,
lèvres des personnages. Et, maintenant,
vous touâ,
gens de bon sens,
les
rassemblez vos jugeottes, décidez Si le
massacre de Chio
et
dites-moi
:
moins un tableau
est
d'histoire, parce qu'il est lyrique.
Si
peinture
la
militaire
n'est
plus valable,
parce qu'elle représente des Grecs et des Troyens
au
lieu de mobiles français.
Si la représentation des états
d'âme propres à
l'époque ne peut se passer de vêtements négatifs
de tout caractère. Si le portrait est le
modèle Si les
sabots
Si les
nautes de
marins, Si rire
comme
et la
intéressant, parce
que
crasse constituent le berger.
VArgo ne
sont pas aussi des
l'équipage de la Belle-Poule.
Puck ne vaut pas mieux en son
gentil sou-
qu'une grimace de buveur.
Si le paysage
encadre Si
moins
remarquable.
est plus
la
est
moins
le
paysage, quand
forme humaine.
rOrient n'est pas plus l'Orient dans
passé de splendeur que dans VOS amis
il
touristes*
les
son
instantanés de
â03
DE LA COMPOSITION Si
le
faucon ne se place pas mieux au poing
du seigneur qu'au perchoir. Si le clievai est Si,
tenant,
et
un
si
main qui abîme
fruit est gâté
la fleur
en
la
parce que d'enfan-
y mordent.
tines dents
XXXVIII. la
diminué par son cavalier.
enfin, c'est la
—
L'unité
esthétique résulte
de
connexion des parties. Le
fût,
le
chapiteau et la base sont
de cette unité,
Le
la
pétase,
le
colonne.
caducée
partie d'une statue
Pope n'est ni
une
beauté,
mais
et
les
talonnières font
d'Hermès.
dans son Essai antique
dit,
le
les parties
lèvre, la
ni
un
et l'effet
an
moment
Ce
d'écrire
:
de toutes
»
Le vénérable Malebranche aurait pu fruit,
«
œil que nous appelons
forme réunie
les parties prises collectivement.
avec
:
« Il
se
taire
n'y a que les
sens qui jugent bien de la beauté et de la laideur sensibles. »
Omnisporro pulchritudinis forma imitas est, affirme le plus platonicien des Pères de TEglise,
AU SALON CARRE
Rien
ne
Carré qui,
mieux,
démontrera
pédagogique de ce
livre,
l'importance
qu'une étude du Salon
au dire des guides, renferme
beaux tableaux des diverses écoles, réalité
ne contient pas
les
les
plus
et qui,
en
plus remarquables du
Louvre. Nul n^ignore que l'Ecole Bolonaise, tout
en étant supérieure aux Académies Julian
et
aux
professeurs de l'Ecole des Beaux-Arts, s'appelle
l'abomination de la peinture italienne.
une
telle indifférence
unit
le
Eh
bien!
Directeur des Beaux-
Arts au Directeur des Musées et aux Directeurs des différents départements, qu'en l'an de grâce le
Guerchin
s'étale
1894,
en plusieurs exemplaires, Fille
de Loth^ Protecteur de Modène, Résurrection de
Lazare; le Guide, autre décadent,a un Enlèvement
AU SALON CARRé
2Ô5
d*Europe piteux l'obscur Napolitain Lionello Spada y montre un Concert. Véronèse, dont les Noces de Cana occupent presque tout un mur, a encore un autre panneau pour sa médiocre Chute des Titans. H y a même un Bassan, ce dégoût de TEcole de Venise. Quant au Murillo payé ;
615.300 francs,
tableau
de
dixième
ordre,
'\\
digne et démesuré pendant du tableautin
fait le
du Spagna payé 200.000 francs, je crois, par les soins fantastiques de M. le vicomte Delaborde.
Non
loin se trouve
une
tête attribuée à Durer, qui
déshonorerait une élève de
première année. Le
Poussin a un de ses moindres ouvrages,
gène
;
le
Dio-
Jouvenet,une médiocre Descente de Croix
;
Valentin étonne encore par sa présence qui est double,
si
ne
je
me
trompe. Enfin, s'étalent à
côté de la divine Joconde, ces artistes de néant, ces Meissonnier d'autrefois,
sont que de la peinture et les
Metsu,
un cours
les
Dow
;
ce qui
d'esthétique dans
choses qui
ces
non de
l'Art, les
n'empêche pas de le
ne
Terbug, faire
même immeuble. A
quelles personnes? alors que sont absents du Salon
Tondo de
Carré
le
saint
Thomas
Boticelli,
le
Triomphe de
de Gozzoli, la Gloire du Paradis
de Fra Angelico, la
Madone de
Parnasse de Mantegnaj
la
la Victoire et le
Vierge glorieuse de
2Ô6
l'art idéaliste et mystique
Lippi, le
Jugement de Jean Cousin,
Quentin Matsys, la
le
Christ de
Vierge de Jean Bellin, la
Descente de C^vix de van der Weyden,
le
Saint-
Etienne de Carpaccio, V Adoration des Mages
Madone
de Signorelli, la
on voulait
de Bianchi. Enfin,
du patriotisme, au
faire
Chute des Titans de Véronèse, des Noces
en regard
de
si
de cette
lieu
faudrait mettre,
il
Cana,
l'Entrée
des
Croisés de Delacroix.
Pour combler Vierge
aux
entier, le
mesure, la Ferronnière, la
la
rochers^
et ce
chef-d'œuvre de
l'art
Précurseur, ne sont pas au au Salon
Carré.
En
revanche, on
peintres peints par
a commencé une salle des eux-mêmes où les barbouil-
leuses, les bas-bleus de la peinture s'étalent.
Vainement la salle
les
le
goût public a marché, vainement
des Primitifs n'est plus un simple passage,
conservateurs
en
leur
immuable
mollesse
semblent tous endosser cette stupidité de Stendhal «
Que
pas
n'eût
fait
Raphaël,
s'il
eût connu
:
le
Guide. » Il
y a deux sortes d'erreurs dans ce classement,
Terreur sur
Guerchin,
le
peintre, et l'erreur sur le tableau.
Guide,
Valentin,
Lionello
Spada
Carrache, Murillo, Jouvenet, Rigault, Jordaens,
\
AU SALON CARRÉ
Le Sueur, Bassan, n'ont pas
207
le droit d'être
repré-
sentés dans une sélection, par le peu d'importance
de toute leur œuvre. D'autre part,
y a
il
mauvais choix dans
les
Poussin, le Saint-Michel de Raphaël, le portrait
au chapeau de Rembrandt,
le
paysage de Lorrain,
Tintoret.
le
Une troisième
faute,
grave, c'est d'avoir admis la
Quel
Femme
hydropique.
idéal peut ressortir de cette scène
examinant des urines
cin
beaucoup plus
celle-là
conquête de Metzu, et le
?
Et
un méde-
:
sous-ofT en
le
de Terburg,
et l'autre sous-off
maître d'école d'Ostade, en quoi ces œuvres
expriment-elles la recherche de Dieu qui est la fm
de l'art? Quelle beauté concrétisent-elles?
En
1903,
le
Salon Carré prétendait au caractère
de sélection. Aujourd'hui les
il
a conservé les Guide,
Garrache, les Jouvenet, un Poussin pour
remplissage décoratif
permet guère de
et
à
une hauteur qui ne
les voir.
Léonard n"a que la Joconde Raphaël nière,
la
le
,
la belleJ ai'di-
Castiylione, le Saint Michel
Mariage mystique
l'Antrope
et
Mise au
tombeau,
François
Sainte- Anne;
et la
Madone de François I'^
1^%
le
le
le
Christ à
VHomme au gant,
la
;
la
;
Gorrège
Titien,
la
colonne,
Maîtresse du
208 Titien.
l'art idéaliste et mystique
De Giorgion le Concert. Un Tintoret un ex-Francia. A part le Poussin hors
ordinaire,
de vue,
le
Diogène quasi invisible tellement
il
a
noirci...
Ce choix inexplicable désoriente voudrait trouver là
le visiteur
qui
une seconde Tribune,
le
Saint des Saints de la peinture.
VI
LA MUSIQUE OU GYNÉTIQUE DE LA BEAUTÉ
En
catégorisation de perceptibilité,
arts
s'adressent en leur essence
c'est
par
les
à
si
tous les
l'entendement,
yeux que nous éprouvons leur action.
Michel-Ange presque aveugle promenait ses mains sur
le torse
du Vatican,
percevait ainsi la beauté
et
de ce marbre, en vertu d'une
La
sensibilité à
l'état
hyperphysique.
loi
normal
se localise
dans
certains organes qui deviennent récepteurs d'une série
phénoménale
particulière
somnambulique qui
est
le
;
mais, dans l'état
modèle des unifica-
tions nerveuses, la sensation retrouve son caractère essentiel de faculté périphérique.
De même que formes
l'on fait voir, avec des mots, les
les plus subtiles,
sible peut être
de
même
le
monde
sen-
perçu par l'imagination. Toutefois 12»
l'art idéaliste et mystique
210
dessin et ses succédanés, architecture, sculp-
le
ture
et
peinture, ressortissent de la perception
mu-
optique. Seule, parmi les arts de Beauté, la
sique agit sur nous à
l'état
avec
seul qui soit basé sur le
la théâtrique,
le
périphérique
:
c'est,
mouvement les autres sont immobiles. La musique est le moyen de faire naître, selon une volonté ;
expressive et des règles, une succession d'ondes
Dans
sonores.
demeure
fixe,
peinture, la vibration colorée
la
l'harmonie est un procédé latent qui
ne se manifeste pas, hors de circonstances matériellement évocatrices s'isole
voilà pourquoi ce chapitre
;
des autres arts, qui tous sont basés sur
maintien d^une expression une
La Joconde
fois
répète depuis deux siècles la pensée
de Léonard à ceux qui s'en approchent l'alchimie
du temps sur
jours les
mêmes
hension
semblable
en
mineur,
chimifications ressentir
le
trouvée.
et,
à part
ses couleurs, elle dit tou-
choses aux êtres d'une compré-
son des
;
sa
tonalité
a
rythme continue vernis.
l'impression
quatre instrumentistes
des
Au
pu baisser malgré les
contraire,
derniers
préparent une
pour
quatuors, sorte
résurrection d'âme musicale. L'harmonie
de
est la
Belle qui dort en sa beauté et qu'il faut éveiller
par
le
baiser d'une interprétation analogue à son
211
MUSIQUE OU CYNÉTIQUE DE LA BEAUTÉ
Non seulement une
essence.
un bon instrument
exige
encore
sonate de Beethoven
et
qualité d'âme de
la
traduit en
un virtuose
mais se
formule nerveuse, influera sur l'im-
pression de l'auditeur. C^est donc les
;
qui
Texécutant,
qui exige
l'art
conditions matérielles les plus spéciales
revanche
il
:
en
permet à l'exécutant de collaborer en
quelque sorte à l'audition.
Un jour, on demandait
à Léonard de Vinci qu'elle était la hiérarchie des
beaux-arts, et c'est
le
il
degré
répondit
de
«
:
Ce qui
classe,
les
matérialité expressive.
»
Il
donnait ainsi la première place au dessin, cette écriture par
les
formes
;
il
peinture
plaçait la
immédiatement après, parce que dans
la
sculpture
l'impression agit sensiblement plus matérielle sur la rétine
par la ronde-bosse,
polychrome.
même si
matérielle par ses masses,
quantité disparait,
si
bien
que
représente cependant
l'on envisage
;
que
en la
elle, la
formule
au lieu de concrétiser un prin-
architectonique,
comme
réalise
l'aspiration
cycle.
Certainement
qui
qui,
plus grand effort de l'idéalisation
cipe individuel,
pas
ne pensait certainement pas, en
Il
son classement, à l'architecture
le
elle n'est
improvisait
la statue et le tableau, elle
d'un peuple, d'une race, d'un il
songeait à
la
musique,
lui
sur les instruments qu'il avait
212
l'art idéaliste et mystique
fabriqués, et le
mode
le
il
concluait,
L'opinion générale
chant
comme
qui
et superficielle attribue,
que l'opinion
au
états
se
forme d'impres-
Comme la musique
non de raisonnements.
produit des
mènes
nous, qu'elle est
à l'harmonie, le plus haut caractère
d'au-delà, parce
sions et
comme
plus matériel delà réalisation deBeauté.
nerveux analogues aux phéno-
passionnels, c'est la vivacité de la sensation
a
décidé de
la
formule. Pour
physicien, cette intensité montre
le
que
métades
l'art
sons, attaquant la faculté périphérique et produi-
sant chez l'auditeur des diathèses de pathologie
morale,
se révèle
comme
non
substantiel,
l'art
seulement en ses moyens, mais en son action.
XXXIV. que
— Aie point de vue
occalte, la musi-
ent le cijiictisine esthétique,
anlmique
et peut-être la
V électtHsation
for me artistique de la
volupté. 11 y a trois catégories musicales, la musique proprement dite, c'est à-dire cette partie des
œuvres de chambre de Mozart, de Haydn Mendelssohn
qui
caressent
l'ébranler. Ensuite vient la telle
la
sensibilité
et
de
sans
musique émotionnelle,
que Chopin, Schumann
et
même
partie des
213
MUSIQUE OU CYNÉTIQUE DE LA BEAUTÉ
sonates
de Bœthoven
Enfln,
y a la musique dramatique où
il
s'est astreint
siteur
à
quatuors.
et les derniers
soumettre
compo-
le
son
art
aux
conditions expressives d'un poème. Or, plusieurs, idéalistes
appliquer
les
repousseront
un grand «
ce
aux théories
souscriront
qui
quant aux arts du dessin, cesseront de à
l'harmonie.
la théorie
Ceux
même
qui
par laquelle Rubens serait
artiste, alors qu'il
ne vaut qu'en peintre,
qui est bien différent et bien au-dessous
d'un grand
artiste,
»
supporteront
de
piètres
Hummeleries; ceux mêmes, méprisant lesdessertes de Chardin
et les
bodegomes de Weenix, salue-
ront inconsciemment des variations faites pour
mettre en valeur un instrument.
Ils
de Vieutemps
patients, les concertos
écouteront, et
autres
vanités.
XXXV. ble^
que
si
—
Une
les
théorie esthétique n'est vala-
règles abstraites s'appliquent à
tous les arts, car la beauté étant la loi absolue
de tous
les
modes qui
la réalisent, il faut
que sa
définition et ses catégories se retrouvent exac-
tement parallèles en tous
L'homme de Médan, lité
;
je
le
cite
devant
les arts.
synthétise la basse animala catégorie
qu'on ne peut
214
l'art idéaliste et mystique
soupçonner d'imagination,
la
seule dont le bon
sens soit garanti par l'acceptation
demande
de tous, je
ce que donnerait, en symphonie, la trans-
cription musicale du «Ventre de Paris», et comment
Largo de
le
fromagerie se comporterait? Le
la
sculpteur qui aurait pris au sérieux
Médan,
qu'aurait-il fait?
thème de
des ivrognes, dans ce domaine de
des battoirs, l'éternelle
le
Des hautes casquettes,
dans cet art d'apothéose
jeunesse,
Celui qui, sûr
d'être
écouté, lance
?
une formule
sans avoir prévu, en sa conscience, son
effet
sur
autrui est un malfaiteur d'un ordre imprévu par la loi
des
hommes, mais qui
sollicite
au lendemain
de la mort l'épée fulgurante des Anges.
un
livre qui
prêche
le
Si,
dans
plus beau style, je puis
me
permettre une image un peu vive et familière, je ne puis voir l'arrivée de Renan dans l'au-delà sans
me
figurer
un mouvement des Anges où
leurs
pieds cnémidés d'or s'agitent et ne piétinent pas. Je prie que
l'on
une formule de
juge
la
les
systèmes à ce critère
;
Beauté doit s'appliquera toutes
ses manifestations.
Quelles que soient les rencontres heureuses et l'art
de la contexture,
la
musique pour
la
musi-
que, est-elle une inférieure formule ? Liszt abonde
de mesures pianistiques sans signification
;
et
de
215
kUSIQUE OU CYNÉTIQUE DE LA BEAUTÉ
même
qu'une œuvre d'art s'élève selon
exprimer des thèmes précis les
rigueur
musicale gagne à
de sa composition, l'œuvre
époque, sur
la
Notre
d'affectivité.
autres terrains, continue d'une
sorte imparfaite les splendeurs précédentes; elle
aura vu l'apogée de l'harmonie. Sansmcconnaitre ce
ni
sommet de
vocal, Paleslrina, ni les
l'art
fresques de Haëndel, ni Sébastien Bach,
qui a produit bilité
de sa
le plaisir esthétique,
science,
la
suprême du choral de
la
le
par
musique
logicien
l'infailli-
jette
Neuvième au
son
cri
finale
de
Parsifal.
Malgré Balzac, malgré Fabre
d'Olivet, Lacuria,
Delacroix, Berlioz, Gœthe, Byron, Cha-
Eliphas,
teaubriand, Lamartine, Musset, César Franck, et tant d'autres immortels, le xix" siècle s'appellera le siècle
homme
de Wagner, car cet à la
réalisant
fois
et
prodigieux,
dramatique
l'art
et
l'art
musical, doublement créateur, a trouvé et prouvé
par ses chefs-d'œuvre, qu'il existe un tiel
de tous
Cette
fin
profondes
;
les arts, le
de siècle
drame lui
art
confluen-
lyrique.
devra des gratitudes
son clair génie, traditionnel en
temps qu'audacieux, a séché
accumulée par
et
chassé
le réalisme; et, si les
rent maintenant
un
même
la
boue
jeunes respi-
souffle noble et pur, c'est
â^
216
l'art idéaliste et mystique
Titan de Bayreuth
rendre grâces.
faut
qu'il
sous l'accumu-
l'intellectualilé qui gisait, enlisée
lation niaise de Fart
l'ouvrier réaliste,
pour
Wagner
A
et
l'art
apporta
les
le
jurons de
feu purifica-
teur de l'idéal éternellement vivant. Mais, sembla-
Michel-Ange qui épuisa
ble à
le statuaire
rendre des accents surhumains,
faisant
en
lui
Wagner
a limité, par la colossalité de son génie, l'horizon
musical pour un siècle au moins.
XXXVI.
—
Lorsque paraît un des grands
génies humains^
il
se
dégage de son œuvre une
formule dominatrice, qui subjugue les
individualités moind^^es qui
cette
le
et stérilise
suivent, et
formule^ émanation conquérante de
dividualité, s'appelle
Cependant, après
Romain montra
à
sa Gigantomachie,
la
l'in-
un poncif. mort de Raphaël, Jules
JVlantoue, qu'il
au palais du T, en
y a un salut pour
minores d'un mouvement
d'art
;
il
consiste
les
à
développer exclusivement une des trois grandes inspirations. tensité celle
et
Jules
Romain
sut se jeter dans l'in-
y atteignit une puissance différente de
de Raphaël dont
le
génie résulte du très
grand nombre de qualités égales entre
elles,
217
MUSIQUE OU CYNÉIIQUE DE LA BEAUTÉ
Sauf les timbres instrumentaux, dont quelques-
uns sont nerveusement associés avec des catégories imaginatives,
tels
cymbales,
hautbois,
les
imitative.
Comparez
orages
de
que
Berlioz
le
:
naturel Elle
M.
est
la
le
n'est
pas
la Pastorale
aux
exprime
tourmente
;
l'état
l'autre
phénomène.
le
—
XXXVIII.
de
premier
d'âme des paysans pendant veut exprimer
musique
la
l'orage
cor anglais,
le
Toute
d'un bruit
imitation
une erreur en ^nusique.
ne doit pas décrire,
Saint-Saëns
qui
comme
suppose
le
comprenant rien
ne
aux
poèmes de Wagner, s'avoue incapable de penser autrement que par
l'oreille.
musical se définirait ainsi
XXXVIII.
Esthétiquement,
:
— L'évocation musicale
criptio7i esthétique d'un état
ou individuel, par Cet
humaine d'un lieu, ni
musique
ce est
lieu,
fait.
est la
d'âme
d'un
fait,
que et
l'impression
jamais, ni ce
Malheureusement,
une volupté, en
critique apparaît la
trans-
collectif
les sons.
peut exprimer
art ne
l'art
cette
com'uc
la
matière
h.
plus malaisée. Tel qui sent II
l'art idéaliste et mystique
218
en toute autre
juste
question,
ici
entend rarement dire qu'une musique sauf par des techniciens
ne perçoit que
le
le
soit laide,
public parisien qui
chatouillis de l'art,
que Sigurd alterne avec la
;
la
On
s'égare.
Waikyrie,
supporte préfère
et
Cavalleria Rusticana à la Flûte Encha?itée.
une
Veut-on
preuve
ordinairement
de
l'inconscience
conscients?
Qui
a
d'êtres
entendu un
confesseur interdire Tinstan et Yseult, ou quelle pénitente s'accuser de l'avoir joué? A-t-on appli-
qué
l'épithète
que
celle
où
immorale
les
à
une autre partition
paroles parlaient d'amour
!
Et
le
couvent des Oiseaux n'admettrait-il pas n'importe quelle musique, tion,
piano seul
que, a
issi
l'état
nerveux,
pourvu que ce !
Cependant un devrait
les
autres.
l'obscénité de l'entr'acte
monde, non plus que laisserait polluer les
récit
En
de
art aussi physi-
Rossini,
du Graal,
supporter
de
Paris
échos de Notre-Dame par tandisqu'il
comme une œuvre
que sur
mêmes
de Lohengrin,
l'archevêque
considérera
les arts
du dessin.
le le
profane.
cette matière, l'esthétique est
flottante
les
Le public n'a pas vu symphonique d'Esclar-
la mysticité
je ne doute pas que
Stabat
une réduc-
substantiel d'action, aussi influent sur
épithètes que
et
soit
encore plus
OU CYNÉTIQUE DE LA BEAUTÉ
îittJSIQUE
Avant
les
chanteurs
de
Saint-Gervais, qui
connaissait Vittoria et maintenant qu'il est
où Texécute-t-on, où est-on en Paris n'a pas le vocale.
chœur d'une
219
connu
état de l'exécuter.
véritable polyphonie
LIVRE
III
L'ART MYSTIQUE
Le thème de
l'art idéaliste
exposé,
il
reste
à
préciser le second terme de la formule.
La mystique, au sens
désigne une
ordinaire,
littérature spéciale, exclusivement consacrée à la
contemplation de Dieu. L^artiste
Angelico,
mystique aurait pour archétype Fra et
en outre
sujets religieux seuls
les
seraient susceptibles de mysticité.
Il
importe de
repousser cette erreur,
aussi déplorable que la
démarcation
entre
arbitraire
le
génie
sacré et
profane, entre les gentils elles juifs.
Chaque
fois
que l'œuvre d'art donne une im-
pression plus complexe réalité,
il
que l'œuvre mystère.
et
plus profonde que la
y a expression mystique, d'art
tient,
c'est-à-dire
par quelque point, au
l'art idéaliste et mystique
222
Nous disons qu'une
forêt au crépuscnle a
mystère, parce qu'elle veille encore
du
et qu'elle est
déjà dans l'ombre.
Le mystère de les murmures de Mais le
le
la
nature c'est la vie invisible
la forêt,
:
dans Siegfried.
mystère des choses ne sert qu'à orchestrer
mystère de l'âme
:
et
c'est ici
que
le
portrait
qui tient tant de place dans les collections pren-
dra sa justification. Il
y a du mystère dans
Messine, au Louvre,
la tête
comme dans
d'Antonello de
certaines figures
de Greuze. Je choisis ces exemples pour contredire
fortement
plus
l'épithète
la
routine, qui
mystique qu'à des
têtes
ne donne
extasiées
et
d'expression religieuse.
Le condottiere a une tête de mystère. Comment un homme a-t-il jamais enfermé cette implacabilité de tigre? Que ce petit tableau soit le mieux peint de tout notre musée, ce n'est pas douteux qu'il
soit
demande de
le
plus
mystérieux
peut-être,
;
cela
Nous avons beaucoup de visages de paradis, d'hommes tournant à l'ange quelle autre figure mêle l'instinct du félin à la pensée humaine et juxtapose ainsi, en un même la réflexion.
:
être,
l'esprit
lisation?
de la jungle et
l'esprit
de la civi-
l'art mystique
Pour Greuze mystère de
a su rendre
il
223
adorablement
le
la nubilité.
Le mystère
est
en tout,
et celui
qui
le
perce est
un myste. Quoi. Greuze, un myste
Les Terburg,
Metzu,
les
magots sans aucune
!
Véritablement. les
bien loin des murs où l'œil voir
:
Dow
et les
signification, sont
humain
doit s'émou-
ce sont des miroirs qui, au lieu de réver-
bérer l'au-delà, reflètent la bassesse
La
Ostade,
à reléguer
terrestre.
religion a réagi contre les joies de l'instinct,
gourmandise, paillardise
;
mais
pas pré-
elle n'a
conisé les joies pures de l'esprit.
Celui
qui
goût du
moins
transpose en clef intellectuelle son
plaisir,
s'il
ne devient
pas saint, du
un chemin
reste noble, élevé et prêt pour
de Damas.
Quel les
homme
peut
vivrait sans passions ? mais
choisir et diff'éremment satisfaire.
il
Un
grand fornicateur revient de Bayreuth continent,
pour plusieurs mois. L'idéalité véritable ne la nature
ment pas sur
le
fond de
humaine. D'assez piètres appétences
débattent en nous
:
les
donne naissance à d'autres désordres, nous sauve.
se
satisfaire avilit, les nier les
subhmer
l'art idéaliste et mystique
224
ne
L'Art,
forme pure de
dentiel,
la
pour
musique,
la
sexualité
dans
serait-il pas,
volupté
la
?
assertion se
cette
Evidente vérifie
en
contemplation des têtes de Léonard
la
;
dessein provi-
le
détourne de regarder celle des passantes. voir dans
cru
J'ai
l'émotion
esthétique
un
équivalent lumineux et haussé des émois passionnels
à une certaine altitude
et,
:
l'art
détourne du péché.
perceptivité harmonique,
aisément sous les
du
l'émotion
vers
soi la
ne supporte plus
la
formes passionnelles,
avidement livre,
on
désordre, que
le
d'impression,
on crée en
Si
vie
nous apporte où
et
pure
et
se rejette
calme du
dessin, de la statue, de la sonate.
Les théories de
la perfectibilité,
élaborées par
au plus haut point de
des natures
religiosité^
devaient, excessives en leurs rayonnantes sphères,
commander
le
plus haut idéal et surtout le plus
général. Mais les besoins étant des guides sûrs du devoir,
cède à la
qu'il faille les refouler,
soit
les satisfaire,
propension
Eh fier,
même
bien! Fart correspond
et
ici
:
si
nous
aune
la détestons.
sophistication
esthétiser c'est encore puri-
le salut s'opère,
l'être s'accomplit.
qu'on
nous enseignent à ne pas nier
sérielle,
noble de l'instinct
soit
en
même
temps que
225
l'art mystique
Un
redoutable écueil se dresse où butent beau-
coup qui prirent plaisir,
voie artistique
la
s'arrêtèrent,
il
et
ici
le
au premier
;
premier plaisir
s'appelle l'œuvre inférieure.
Ah
croit-on sentir la noble volupté en regar-
!
dant la Tour la
Sacré-Cœur de Montmartre,
Eiffel, le
Madeleine, ou bien les panoramas, les crêpons?
La première
de cette ascèse veut que nous
loi
nous forcions au
plaisir de
Bach, de Raphaël, de
Racine. Ce sont des œuvres de touche, des eaux
probatiques
:
même
en
commence
art tout plaisir
par un devoir, c'est-à-dire toute approche de
la
Beauté nécessite un acte de volonté.
La plupart vont d'un ton
fou
de
à l'attirance chiffon
:
les
oriental
uns, éblouis autres,
les
;
amusés de déformation correspondante
à
leur
difformité morale.
Joconde
Si la
et
Précurseur,
le
ces
figures
pentaculaires de la théorie que je propose, pou-
vaient s'expliquer
eux-mêmes
et
montrer
qu'ils réalisent, elles parleraient ainsi «
Je sais tout
sereine réside
sans
et
à
fomente
»,
dirait
et
développe
voie
:
Lisa
:
«je suis
ma mission mon énigme tous ceux qui me regardent
désir
distribuer
Monna
la
:
du
cependant
désir,
je suis le gracieux pentacle
car
:
du Vinci,
je manifeste 13*
226
l'art idéaliste kt mystique
son âme, qui ne se
fixa jamais, parce qu'elle voyait
trop haut et trop profond. Je suis celle qui n'aime pas,
parce que je
temme de
l'intelligence
miroir
donner à
recevront de moi
que
qui
me
je
;
dans
quelques-uns à
et j'aiderai
et
;
ceux-là qui
baiser de l'esprit pourront
le
aime, selon
la
volonté du Vinci,
créa pour montrer qu'il y a une concu-
piscence de
me
les
le
mais,
comme dans un
prendre conscience d'eux-mêmes
dire
pas
se mirera
elle
expression,
multicolore,
passion
la
seule
;
belle, n'attire
m'approche,
mon
prisme de
le
qui pense
celle
quoique
n'ai rien à
baiser, je si
suis
l'art qui,
aimer,
fait
car c'est
l'esprit,
elle
mon
expression qui
qui nie aimer, sinon
de
la
pensée.»
Le Verbe
du Précurseur,
mystérieux
plus
encore, s'exprimerait ainsi partiellement geste incite et
Ne et
mon
t'étonne pas
mon
:
pour
le
petit
androgyne de formes, positif
passif et
doux pour
Mon
nécessité
impérieux,
et
salut
;
!
;
j'agis
nombre
je
;
pour
comme
suis double de
exotériquement
;
les élus.
doigt élevé montre
du
Mon
geste dit la vérité à tous,
sourire la dit à quelques-uns
pensée,
((
«
sourire défie, et je suis Jean
mon
la masse, je souris
je suis
:
le
le ciel
;
j'annonce la
plissement de
ma bouche
227
l'art mystique
révèle que le salut n'est pas toujours la douleur.
que tu vois dans mes yeux,
Ce des
esprits
comme
;
que
sais
je
que
la douleur, et
mal
le
le bien,
c'est la
volupté
transitoire
est
comme
la joie,
ma
seuls sont éternels. Les
imbéciles traduiront
moue
scepticisme, cette igno-
singulière par
rance, et je sais
le
je suis le plus savant des saints
:
ma main ordonne
de croire
et
mes
;
lèvres incitent
à comprendre. Celui qui se laissera séduire par
ma
grâce possédera un jour ce sourire des Khérubs
éternellement ravis de
Les hommes
la
connaissance divine.
ont besoin de craindre
;
mais, moi,
plus près de Dieu, je souris de cette crainte, parce
que j'aime, que j'aime indéfectiblement,
amour m'unit
cet
à lui
;
beauté,
la
que
tel
le
que
le ciel sourit, le ciel est
gai, le ciel est la volupté sainte
par
et
:
je révèle le salut
conçut Léonard de
Viïici,
archange, maître des formes, au séjour éternel. Je suis l'Annonciateur de la Mystique de beauté,
de
la
Mystique
Oui,
d'art. »
c'est bien
constante,
que
Mais
faut
il
la
le
une mystique, que l'admiration rite
enthousiaste de l'esthète
d'abord
présenter
d'une
!
sorte
atténuée et perceptible.
Ceux qui reconnaissent l'art
doivent détester
la
sainte
le sacrilège et la
mission de profanation
228
l'art idéaliste et mystique
comme un
fidèle chrétien
;
au
et,
de cela,
lieu
les
prétendus esthètes se livrent à d'ingrates impiétés et s'enorgueillissent
Que
de leurs profanations.
dire de celui qui, croyant à l'Eucharistie,
oseraitconsacrer,quoiquesimplelaïc etcependant, ;
ces amateurs, qui osent dessiner, sculpter etpeindre, ne sont esthétiquement
que des profanateurs.
La Beauté serait donc cette religion dérisoire où le moindre fidèle officierait sans vocation, sans initiation, sans étude, où tous prêtres,
de chacun
de droit;
et le
les
dévots seraient
dogme,
la fantaisie
?
Je voudrais détourner les velléités artistiques des mondains sur eux-mêmes, les rendre à leur rôle d'élégants et en débarrasser le
A
côté de l'artiste,
il
y a place
comme à côté du prêtre pour le Ah qu'ils m'étonnent ceux !
les joies
tous un
s'établir entre le
entre
le
!
La
dévot.
qui abandonnent
même
rage qui met
1
Est-ce que l'égalité
collectionneur
croûtonnier de paysage
Et ce que est-ce
art.
l'Ariste,
bulletin de vote à la main, y adjoint
un pinceau ou un ébauchoir va
pour
de l'admiration pour s'essayer aux avor-
tements inéluctables à
grand
le xvii« siècle ap])ela
donc disparu ?
et
l'artiste,
et le vrai peintre ?
l'honnête
homme,
229
l'art mystique
Jadis les vers seuls subissaient la
manie des
seigneurs, on rimait et c'était tout; on gâche de
de
la toile et
child, je
aujourd'hui, et une Roths-
la glaise
ne sais plus laquelle
(il
en est une qui a
démoli la maison de Balzac), expose un torchon orné d'un citron ou d'un couteau.
Sarah Bernhardt sculpte, peint, grave, c'est-àdire
montre sous
Jusqu'ici chic
le
le
trois espèces
métier menaçait
survient
et
son mépris de
le
l'art.
Beau, maintenant
achève de perdre l'heure
esthétique.
Etrange
fin
de siècle où tout
qui n'a rien à dire
;
où
où chacun propre à tel,
le
le
monde
pédagogue ne
tout,
du moins
sait
parle
pas
;
se croyant
apporte son personnel fumier sur les terrains
sacrés
;
moment
d'une
inconscience vraiment
fantastique où, toute hiérarchie détruite, quiconque
a du loisir se rue aux arts d'agrément, devenus
des entreprises de vanité.
Ceux d'un cercle
par
mauvais estomac
l'atelier, et ils
remplacent
peignent avec
le
le
même
d'âme qu'ils appliqueraient au baccarat. La noble fonction de diacre, de servant aux côtés du génie, nul ne la comprend, car la faculté
état
admirative disparaît d'une civilisation où tout
monde prétend
à être admiré.
le
230
l'art idéaliste et mystique
pas curieux de voir à la boutonnière
N'est-ce
même
de l'éditeur la
prétendue distinction qui
rougeoie à l'habit des auteurs?
Que
donc
sii^^nifie
comme
Figaro
dit
Hélas
:
«
la
Qui trompe-t-on
personne.
!
des
entre
consenti
impérieux
et qui se
mascarade française,
Mensonge
réciproque
et
amours-propres également
saluent autant qu'ils se mépri-
La comédie du mérite
sent.
et
ici ? »
intellectuel se jouera
avec un sérieux croissant jusqu'à
la
consommation
politique de la race, qui ne tardera pas. Il
les
faut
donc préparer aux Barbares, un
éduque
art qui
et les élève, car ces fils d'Attila,
deve-
gardent encore dans leurs nerfs
nus ingénieurs,
redoutables, la féroce puissance de la horde originelle
;
et
proconsul
le
main plus lourde
et brutale
cinquante ans d'intervalle, le
en France
aura
la
que son successeur à le
mandarin chinois,
jaune des antiques déluges humains. Si tous
les
les esthètes
lettrés
s'entêtent
musiquer, que deviendra sport,
et
à écrire et tous
à peindre, et tous les
l'artiste
mais occupant
la
mélomanes à au rang de
l'Art, rabaissé
entouré de confrères ridicules,
place à laquelle
il
a droit.
Les femmes n'entendront pas raison
:
abandon-
nées par une race de moins en moins amoureuse,
231
l'art mystiquk
esseulées, inoccupées, elles comblent le vide de
Ah
leur cœur, par de récriture ou de l'aquarelle. qu'il
mieux
vaudrait
qu'elles péchassent
!
elles
:
n'offenseraient pas ainsi le Saint-Esprit, sous la
forme sacro-sainte du Verbe de
Beauté.
la
Cette effroyable décadence provient de l'incons-
cience de
Au
écrivent. mets,,
ceux qui enseignent lieu
et
de ceux qui
de maintenir l'Art, sur les som-
portée des mains désœuvrées,
hors de
ils
ont applaudi aux audaces du mondain usurpant sur
l'artiste.
Rétablissons l'antique barrière qui, jusqu'à ce jour,
sépara Toisif qui s'amuse, de
qui
l'artiste
œuvre. Revenir à c'est
le
la
conception sacerdotale de
sauver.
qui auraient l'opinion,
le
Y
reviendra-t-on
plus vif intérêt à ce
n'y aideront
pas,
?
Ceux
l'art,
même
mouvement de
parce
qu'une
conception oblige à valoir autrement
telle
qu'ils ne
valent, à œuvrer contradictoirement à leur habitude.
Toutefois,
une
civilisation qui a
un
tel
passé
ne saurait pourrir tout à fait et sans exception
;
le
désistement de l'aristocratie nécessite la formation
d'une caste nouvelle sur l'intellectualité la
libre pensée,
et
;
et
sur quoi la baser, sinon
sur l'œuvre
réalisme
et
?
La
vulgarité,
matérialisme sont
232
l'art idéaliste et mystique
démodés que l'économie
aussi
politique.
Ur
génération se forme qui ne sera pas croyant hélas
!
mais qui sera esthète
après les importa
:
tions russes et suédoises, sans profit, sans
lumièn
vint l'œuvre d'épuration par le Titan de Bayreutl,
En
mieux
ont et
ce renouveau d'idéalité, à
faire
du bodégome à
la
que
le lettré et l'esthè
de
Vollon
:
marqueter:
la
doivent
ils
aid(
de leur influence les artistes véritables, épous( ces sublimes intérêts de la Beauté qui devraiei
passionner tout être cultivé
;
enfin, s'ils vei
et,
absolument s'occuper d'eux-mêmes,
lent
arts
trois
oii
leur
amour-propre trouvera de
palmes sans cesse renouvelées, la Diction,
voii
la
Kaloprosopi(
l'Eloquence. Qu'ils soient très nobh
d'aspect, très musiciens de diction,
quents pour leurs idées
:
et,
et
très
él(
alors seulement,
seront en leur genre de vrais artistes, des
i
artist''
de personnalité.
On
appelle polyèdre une figure dont tous
côtés ne sont pas visibles à la
La mysticité de çoit
l'art à
1^
fois.
ce caractère
:
on ne
la pe
que sous des aspects successifs. C'est pourqut
cette partie
du discours
divisée en méditations.
se présentera au lectei
XXII.
MEDITATIONS SUR
L'ART MYSTIQUE
DE L UNIFICATION
Le mystère
n'a pas d'autre
nom que
l'homme, d'autre emploi de sa recherche du mystère,
la
Sur
le
plan physique,
philosophale et panacée
on est
la
nomme amour
médian entre
nomme pluriel
;
triple
c'est-à-dire
;
sur
l'esprit
le
le
que
de l'Un.
s'appelle
l'unité
sur
l'unité, et
force
pierre
plan animique,
plan esthétique qui
et
la
matière,
on
la
Le Bèreschlt donne un nom aux premières phases de la création pour beauté.
exprimer que, dans une cosmogonie,
l'être
absolu
s'appelle le non-être par rapport à l'être créé et évolutif, tandis
que
les collectifs
humains du
x=
chapitre, traitant des exodes primitives, attribuent
un
singulier à
Ainsi
chacune des tribus humaines.
l'œuvre d'art est
le
retour
à
Tunité
236
l'art idéaliste et mystique
expressive d'une conception donnée, et ce retour s'opère par l'accumulation des relativités.
Chaque formule,
qu'un entendement épuise, en une,
fois
les
rapports contingents d'un thème,
réalise le relatif absolu.
Or
chef-d'œuvre est celle de
la seule définition
relatif absolu.
conçue à
fut créé à l'exemple des
à-dire
qu'il
doit
l'instar
comme
Œlohim,
conçu sur
être
trois
du
L'œuvre:
de nous-mêmes,
doit être
l'homme
il
c'est-
plans
plastique, animique, intellectif. L'artiste doit
l'occupe
;
puis,
il
formes
Mais,
l'abstraction de
plan abstrait
le
concevra l'âme
quentielle de ce plan les
!
commencer par
son sujet, c'est-à-dire fixer
abstrait
;
il
du
choisirs
de cette
âme
des arts du dessin oppose
perpétuellement à la liberté du concept sité
qu
la plus consé-
enfin,
les plus caractéristiques
comme une fatalité
;
la néces-
réel extérieur, l'œuvre est susceptible d'un*
disgraphie, fréquente chez les Primitifs. L'Ecole df
Cologne, comme celle d'Ulm et d'Augsbourg,comm« celle
de Bruges, ainsi que
nique, présentent ce
même
la
défaut d'une forme qu
n'est pas unifiée avec l'âme.
que
Qui n'a déjà compris
l'unification entre le concept,
de l'œuvre, et
sculpture synchrO'
que
la
Tâme
ne se produira que par
Beauté est l'unité de l'œuvre
et la
la
formt
Beauté
d'art.
237
bË L UNIFICATION
La recommandation tance que
pénibles sacrifices
;
d'impor-
a d'autant plus
ne s'obtient pas sans de
l'unification elle
oblige à renoncer ce qui
rendrait l'œuvre perceptible au plus grand nombre, c'est-à-dire à cet excès de réalité qui
rapproche
l'art
du personnage. Il y a, dans la salle des Primitifs du Louvre, un bonhomme, caressant un petit enfant, qui exprime à
de
spectateur
la vie et le
un
très
haut point
la
Bonté, mais
nez de ce
le
personnage ressemble à quelque chancre monstrueux. Ghirlandajo a eu tort ce jour-là,
son colossal élève a eu tort toute sa
que
soit
mettre
le
Buonarotti
le front
dans
et
quoique
la poussière
je vois, au-dessus de lui, l'idéal
propre des génies de faire
que
les
qualités,
grand
je sois prêt à
s'il
apparaissait,
même;
saillir
comme
vie. Si
et c'est le
autant
le
défaut
lorsqu'ils oublient l'unification
esthétique.
Michel-Ange qui le
trinôme de
l'Art,
est
a
avec Raphaël
Jugement une forme inconvenante chrétienne.
Il
trompant sur
et
Léonard,
donné au Christ de son à la conception
a réalisé la colère de Zeus
le
;
se
geste qu'il emprunta à Orcagna
(Campo-Santo), geste où Jésus assis montre d'une
main
la plaie
clou, en
du
côté, et de l'autre le stigmate
un muet reproche. Buonarotti
du
a gesticulé
238
l'art idéaliste et mystique
un lancement de
foudre.
On
se
souvient que
le
prisme esthétique se divise en intensité, harmonie et perfection.
sacrifié
Eh
bien
Michel-Ange a souvent
!
de l'intensité,
l'absolu
à
les
relativités
nécessaires de l'harmonie et de la perfection.
;
j
'
On peut ajouter, en compensation, que Vlncendie du Bouj^g de Raphaël ne présente pas rémotion qu'impliquait
le sujet.
La composition, comme
la figure, se subdivise ,
en
trois
éléments
:
unification
corps de la composition
;
des
masses
unification des
ou
âmes
ou convergence expressive unification du concept, ;
c'est-à-dire centralisation de l'intérêt.
Les deux chefs-d'œuvre absolus de l'ordon-
nance sont les
:
le
Cenacolo,
VÈcole d'Athèiies
et
Pendentifs de la Sixtine. Là sont réalisées
l'unification des masses, l'unification des
l'unification
du concept.
âmes
et
II
DE L IMITATION
Tout actuelle
mouvement de l'unité,
représente
puisque
le
une
cessation
mouvement ne
peut être qu'une extériorisation de
la
substance.
La philosophie divise les phénomènes de la vie, en phénomènes proprements dits et en noumènes. Or l'être le
la
combinaison de ces deux éléments,
intérieur en présence de l'extériorité
premier événement à résoudre pour
Forcé à chercher hors de sifs
lui les
—
est
l'artiste.
éléments expres-
de sa pensée, une compétition a lieu entre sa
vision intérieure et sa vue du réel.
même homologuer l'extériorité le
—
démon
On
pourrait
la vision intérieure à l'ange, et
au diable, en ayant soin de concevoir d'une
façon ésotérique, c'est-à-dire
d'une façon pieuse et admirative.
240
l'art idéaliste et mystique
La nature n'est ni une ennemie, c'est un ensemble de lois vivantes festations logiques
:
et,
une amie,
et
de mani-
précisément parce qu'elle
évolue d'une sorte invariable,
un
force effective, elle dégage
contre lesquels
ni
possède une
elle
particulier vertige,
Mais, de
l'artiste doit réagir.
même
femme, qui représente toute la nature sous petit volume, a pour norme de dissoudre les un que
la
éléments mâles imparfaits, ainsi
Tartiste. Celui
nature repré-
la
un élément probatique de
sente
la virtualité
de
que sa palette éblouit et qui s'aveu-
gle de ses couleurs, au lieu de continuer de voir
à travers elles sa conception; celui qui s'enivre de
proportion humaine, et ne voit plus, à travers
la
les
membres humains, l'âme
— ceux-là sont des
tinée,
en
art
que
Nahash
les faibles ?
énigme
deviner
qu'il faut
trucidateur ne garde les
Temple de Beauté. Les relevées
même
la
péril,
même double
aucun sphinx avenues qui mènent au !
Hélas
!
bêtes chimériques ont été
de leur faction
auguste
l'homme, épris
de sa propre
mieux renoncer
à son
s'est
surtout
doivent mourir.
Kundry! double nom de
double allégorie du
torce,
qu'il leur avait des-
faibles, et c'est
;
et
dès
lors
bassesse, aimant
rêve qu'à sa vaine gloircj
mis, passif et inconscient, sous le rayonne-»
ment des
241
l'imitation
i)E
extériorités
a produit des choses qui
il
;
ne ressemblent qu'aux choses
qu'un ange ne
pas regarder. Nos conceptions
daignerait certaines,
et
permanentes
;
sont
peuvent concorder
elles
aux formules testamentaires des génies, tandis que nos perceptions, subordonnées à notre double diathèse du corps
de l'âme, ne sont
et
souvent que des symptômes de maladivité,
de
pathologiques fantasmes. L'artiste a dèle,
et
donc à
voici
comment
s'agisse de n'importe
d'une idée,
il
mo-
lutter, surtout contre le
doit procéder,
il
quel
art.
en cherchera
la
Une
qu'il
enceint
fois
composition,
mouvement et l'expression par le informe. Quand il aura composé
le
dessin, fût-il
entièrement,
arrêté la plastique et l'expression, alors seulement il
fera venir devant
rôle de
rage.
lui le
métronome, pour
Une
la
sujet destiné
un
à
proportion et Téclai-
règle absolue c'est que la tête doit être
toujours composée en vivant devant soi
,
de
dehors de tout
même,
élément
les pieds et les
seront dessinés intentionnellement, avant
mains d'être
vérifiés.
Je n'ai jamais vu lignes de
style, et
un
seul
comme
modèle qui donnât les c'est
aux modèles pro^
fessionnels que l'artiste forcément s'adresse,
il
m
242
l'art idéaliste et mystique
doit pas les voir, avant fixées. Ainsi
que ses lignes ne soient
armé de son schéma
pas modifier autre chose que portion
et les
les
écarts de pro-
logiques de modèle, l'artiste s'appro-
impunément de
chera
résolu à n'en
et
désormais
nature,
la
servante de celui qui a su vouloir, hors de ses
On
suggestions.
raconte que les peintres anciens
composaient leur Vénus en interrogeant toutes les
beautés des
femmes d'une
enfantin calomnie l'artiste grec grave,
on son
mages
les
art,
et,
ces
Ce
conte
ce qui est plus
temps glorieux,
les lois traditionnelles
de
par conséquent, on lui enseignait à
créer ses formes et
Rien dans
En
grecs.
au méritant
livrait
ville. et,
la
non à
les copier.
nature n'apparait à
l'état
esthé-
tique, car la sensation qui résulte d'un site, d'une
peau de rousse, l'état
est
d'âme du spectateur
Imaginative, dans
La
basée dans
le
il
faut
premier cas sur
son idiosyncrasie
et
second sur
la
concupiscence.
ne donnerait pas leur
copie de ces réalités,
sensation,
le
donc que
l'artiste
ajoute son
imagination à l'un, à l'autre son désir. L'art
est
susceptible
impressions de
de
la réalité,
recevoir
mais jamais
toutes les
les
formes
de l'exacte réalité.
Toute l'esthétique
oscille entre
deux points de
243
DE l'imitation
rendu
l'individu et le type, c'est-à-dire, ce qui se
:
rapproche
plus du collectif sériel et ce qui s'en
le
éloigne davantage. Le type régit tout le domaine inférieur,
les
êtres rudimentaires
ne commençant qu'à
l'individu
de métier
et la
pensée
;
ne
s'applique qu'à des concepts d'au-delà.
Mais je craindrais d'ouvrir une échappatoire aux réalistes, et je dois leur préciser les lois typiques.
Le type
est
la
figure synthétique de tout
un
I
collectif sériel
;
et,
pour
signifier
dégager
la
localise
par conséquent,
sera
;
figure
la condition
même
pour
le
de
ce
série,
la
date
nu ou
la
il
et
faut la
draperie
même pour l'ouvrier, même pour le soldat.
typique
marin,
qui le
une
III
DE LA NATURE
L'œuvre soumettant
d'art se la
compose de
nature,
tour à l'influx divin.
l'artiste
lui-même
mais se soumettant à son
Une œuvre, exprimant un
pathétisme d'âme, à travers une forme convenante,
ne réalise que sous deux espèces ternaire de l'œuvre d'art, vie
)),
disent les uns
mieux
disent
les
;
« il
autres
«
Il
«
il
L'œuvre
».
pas des pensées
afférentes
Q
faut
qu'on
à l'au-delà
n'a pas
chose créée, rendre
liconque n'aurait pas
encore souscrit à la conception religieuse de tarde n'a
y>,
sente
d'art qui ne suscite
atteint son but, celui de toute la lumière.
grand destin
faut qu'on sente l'âme ;
Dieu, disons-nous
témoignage à
le
faut qu'on sente la
l'art
trop à rejeter cet enseignement, puisqu'il
pu
le
comprendre. Vraiment,
serait-ce la
245
DE LA NATURE
que
peine
distraire
tant
un moment
qu'il
de quelques humains
l'œil
ces quelques humains,
et
s'accomplissent pour
d'efforts
sage de fermer les yeux, quand
est
pas
trouvent
une lueur,
:
sont initiés, savent
s'ils
à
travers ce
ils
ne
qu'ils
regardent.
Le
péril
de
nature
la
une
opprimante
conjuré, la victoire reste encore incertaine
:
fois
après
l'extériorité naturelle, l'extériorité sociale, destinée elle aussi
à dissoudre les faibles, se presse devant
l'artiste
avec
«
Fais
mon
des
intimidantes
impériosités
:
portrait, » dit l'époque, « incarne ton
temps, rivalise avec la plaque photographique
renonce à ces héros
anges que Courbet
et à ces
déclarait ne pouvoir
et
peindre, parce qu'il ne les
avait pas vus. »
Michel-Ange va nous répondre «
que
Amour, dis-moi, je vois est
au fond de
je
:
prie,
t'en
si la
beauté
devant mes yeux, ou seulement
mon cœur
;
de quelque façon que je
la regarde, son aspect est toujours beau. Toi qui
me
ravis toute paix, réponds
:
de
ma Dame mon
même un soupir. comme tu la vois mais
ardeur ne demande pas «
Elle est belle
beauté s'accroit lorsque^ elle
;
passant par
les
a été jusqu'à l'âme. 14»
cette
yeux,
246 «
L'ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
Gage assuré de ma vocation,
cet
amour du Beau
me
guide
élève
mon
j'œuvre.
qui, dans
et m'éclaire.
vils
véritable
la
regards ne montent pas
divin.
Mes yeux sont amoureux de et
ramener aux
ravit au ciel
les infimes
;
du mortel au beau,
arts, à la fois
regard, à cette hauteur de pensée où
sens cette beauté qui
«
deux
Sachez-le, la Beauté seule
Laissons les ignares
intelligence
j'eus en naissant
mon âme
tout ce qui est
aspire au salut
mon
voilà
;
double but. Des suprêmes constellations descend
une splendeur qui et
la
attire
seule espérance,
cœur ne
un noble
bat,
à elle toute espérance
le
duire c'est que
l'y
le xix"
tique de IMiistoire,
que par
convie.
commandement est le
qu'il
et
;
un noble
:
esprit n'agit,
magie d'un beau visage qui Ce qui rend
l'amour
c'est
la
»
difficile
à pro-
seul siècle inesthéfaut
faire
pour
lui II
une exception de défaveur.
A
regarder profondément,
le
visage
humain ne
si les
têtes belles
cessa jamais sa signification, et
au repos se nent.
raréfient, les têtes expressives foison-
Quant à
la
femme,
elle
posera encore pour
qui saura voir, de nouveaux Botticelli. rejetez le décor et
drapez.
J'ai
le
costume
;
De l'époque
n'habillez
vu à Bruges des dévots,
les
pas,
bras
247
DE LA NATURE
merveilleux modèles, en changeant la
étendus,
tête et l'habit.
persuadera
Depuis un demi-siècle, on tente de de se restreindre à reproduire
l'artiste
l'ambiance. Les journalistes, ces éphémères de
l'éphéméride, par un instinct semblable à celui
que l'on attribue aux damnés, ont Beaux-Arts
des
couleur
«
:
Fais
pochades
des
croquis,
de la bosse
et
;
»
crié à
l'homme
comme
nous,
sois
reporter de la
et
le
des
fais
beaucoup ont cédé à
la folle invite. Il
faut vivre et penser
l'abstrait,
et
hors du temps,
dans
pratiquer l'indifférence à l'égard du
milieu.
Par quel mépris de
l'artiste
a-t-on voulu
le
ravaler jusqu'au rôle d'historiographe des formes;
on
lui a dit
que ses œuvres seraient plus tard des
documents. Ah!
ment Phidias s'abaisser
modes
à
et
le
beau laurier que voilà
Vrai-
!
Léonard de Vinci n'ont pas pensé
reproduire les visages grecs
florentines
;
ils
et
les
ont créé selon l'éternelle Divin. Par
beauté des formes, qui expriment
le
quelle aberration, le
contemporain
dessinateur
dépourvu de tout orgueil, sans souci de de son
art, se résout-il à
doubler
la dignité
le triste
emploi
dujournaliste par celui de photographe en couleur. L'objectif,
au
reste, défie la
concurrence
et,
si
248
l'art idéaliste et mystique
quelque riche
était spirituel,
un costumier
et
un grand
avec des figurants,
appareil, on ferait les
tableaux d'un salon annuel, mieux
La doit
!
mysticité, c'est-à-dire le goût de l'inconnu,
rayonner dans l'œuvre
contemporanéité.
d'art,
et
non
la
IV
DE L ASPECT ACTUEL
Quelle erreur de prétendre vivre d'une sorte
œuvrer de bocks
de
l'autre opposée, et
s'entourer de
et
filles,
peindre des saintes et des fées; à
peine sorti de Tatmosphère du café, croire qu'on
va se retrouver apte aux grandes visions
Comment une époque éprouve
la nécessité
rompu pour dit-elle
aussi les
pas,
les
plus matériels résultats,
analogiquement, que
comme
les
hygiène de l'âme. Le indispensable
gymnique
et
qui
d'un entraînement ininter-
se cultive, qu^il
neris
aussi
!
à ceux
laut
éduquer
qui
regardent les tableaux de
et
propulser
y a une Ghamberland semble
muscles filtre
ne se
la sensibilité
qu'il
et
lisent
mœurs
les
journaux,
et assistent
aux
250
l'art idéaliste et mystique
pièces du boulevard. Cependant la microbie sen-
timentale existe au moins, n'y a
comme
potentialité:
pas d'actes sans conséquence,
il
il
n'y a pas
d'ingestion cérébrale sans harmoniques similaires
à l'élément ingéré.
contemporain les
mœurs
pompes
impériales,
dogales
étalaient le faste patricien et
du costume sur place, à poser
En
ces
l'art
l'absence de beauté parmi
contemporaines. Jadis, la vie publique
déroulait les
mœurs
L'absence d'idéal dans
reflète
;
les
une réaction
l'allure obligeait le palais et la
noblement devant
l'œil
de
l'artiste.
temps heureux, l'homme des beaux-arts
porté par
le
courant, aspirait l'esthétisme de l'am-
biance et recevait d'une réalité déjà embellie la
monde extérieur fournit à l'œuvre. Les jeunes hommes qu'on voit au bas des fresques
part que le
de Signorelli ne dépareraientpaslaplus noble composition;
ont été
ils
faits
cependant d'après nature.
Lignes, couleurs, décors se trouvaient réunis, et l'artiste
la
pouvait agenouiller son donataire devant
madone, sans
Sforza dans la
l'allégoriser.
Madone de
vous verrez ce que dans signifie
M™6 le
l'extériorité
Lise,
grand
Remplacez
la Victoire par la
moderne.
le
duc
M. X.
langue des formes
La Joconde
était
une mondaine du temps de Léonard artiste n'en a
;
pas plus changé la vêture
il
DE l'aspect actuel
que Palma Vecchio pour Titien dans la
Femme
L'artiste fermera les se
Trois Sœurs, ou
les
à sa
251
toilette.
y eux, en refusant de jamais
plaire à l'extériorité contemporaine.
valent aujourd'hui ont compris cette
Puvis de Ghavanes
sime par
la draperie
réfugié dans le et 1
instinct de
;
comme
nu
Rops
;
G. Moreau
est allé
génie,
ils
ont fui
le
ParsifaI, avec l'instinct
vocation, fuit l'embrassement
s'est
au Sabbat
élevé dans le rêve.
s'est
leur
nécessité.
sauvé de l'afïreux millé-
et le
mythe
Burne Jones
moderne,
s'est
Ceux qui
;
Avec
monde de sa
de Kundry. Quant
aux autres, aux impuissants, aux eunuques, aux Klingsors, quant aux Béraud et aux autres blas-
phémateurs, espérons que d'intelligents barbares
un jour, le feu des bivouacs, avec et non peintes.
allumeront, toiles salies
Certes,
angoissée
et
apparaît
terrible,
ces
cette
situation de l'homme des formes qui ne doit pas
regarder autour de
lui.
L'époque ajoute son carac-
tère ingrat à toutes les autres difficultés qui envi-
ronnent le
la
production esthétique. La tour d'ivoire, sont
plus seulement
d'une personnalité
intémérable. à
burg individualiste
l'expression
ne
force de race et d'idéal intangible
s'imposent
comme
le
sine
;
désormais,
qna non du grand
ils
art.
252
l'art idéaliste et mystique
Donc, sans s'appuyer à
la réalité vivante, pui-
soi-même tout ce que
sant en
fournissait
abondamment,
traitement, en ses rêves. Mais,
un concordat des
concevra abstraditions et de
dans nos songes, l'incohérent,
Tinharmonique foisonnent
bizarre,
métronome marque incessamment goût
:
chef d'œuvre
le
Tépoque
jadis
l'artiste
;
non pas
;
le
un seul
et
le
rythme du
celui
où quelques
qualités s'élèvent sur l'oubli des autres, mais le
canonique qui enseigne, autant
qu'il éblouit.
Pour l'énumératior» des génies de tout ordre et la hiérarchie de leurs œuvres l'étendue nécessaire ;
ne permet pas de l'insérer
ici,
mais voici quelques-
uns des canons esthétiques.
Pour
la
Cenacolo
composition:
V Ecole d'Athènes,
;
Pour l'expression de
la tête
curseur à mi-corps du Louvre
Pour seules
Pour seul
:
En
la
la la
signification
:
le
Pré-
;
Melancholia de Diirer
par
les lignes
;
animique par l'éclairage
Résurrection de Lazare de Rembrandt;
sculpture, la
sente le lyrisme iiu
humaine
la signification intellectuelle
:
le
:
Nihè de Samothrace
V Apollon (Belvédère),
repos (Louvre), l'harmonie;
le
repré-
Génie
253
DE l'aspkct actuel
Le Thésée
et
VYlyssus,
Parques (Londres),
les
la perfection. Il
rhétorique
des
formes,
chez
composition chez Raphaël
Rembrandt quez
Léonard
faut apprendre le dessin chez
;
la
féminine,
;
la
grâce
;
Michel-Ange
le clair-obscur,
peinture technique,
masculine, chez
chez Rotticelli
et
;
la la
;
chez
chez Velas-
Mantégna
;
la
Melozzo da Forli
;
l'androgyne, chez Signorelli. Il
n'y a aucune leçon à recevoir, hors de
sinon au plus matériel pour et
au plus immatériel pour la
la palette à
pitié à
l'Italie,
Madrid,
Bruges.
1&
DE LA VOLONTÉ ESTHÉTIQUE
En même temps que sait
dans l'opinion,
la
notion artistique s'abais-
s'amoindrissait parallèle-
elle
ment chez l'artiste. Au lieu d'œuvrer dans le silence, un Horace Vernet s'entourait du plus grand bruit possible ce n'était, du reste, qu'un :
peintre
;
mais d'autres, prétendant ceux-là, être
des artistes, n'ont pas craint d'arriver à l'extrême
de
oubli
travaille le
leur dignité.
Où
qui
ressemble étonnamment à son confrère
peintre d'enseignes, dont
bagout
parisien
L'artiste
et la
il
a souvent l'âme, le
chanson vulgaire aux
sont-ils
ceux qui,
comme
lèvres.
Watts, croient à
la
mission providentielle de leur œuvre, qui officient ieur art;
comme Burne
Jones,
ou
le
dérobent
255
bË LA VOLONITÊ ESTHÉTIQUE
jalousement à
de
l'œil
comme Gustave
tous,
Moreau. Ouvrier à l'ouvrage, mondain ou bohème
du temps,
reste
au
lui-même
renonce de
l'artiste
dont
presque religieux
prestige
le
il
pourrait
s'entourer.
On
prétendu
a
le
que Wagner
fions
momentanément de la de son œuvre, catholique dans Tannhaû-
religion
Tétralogie.
rarement
Il
fixée
était
païen et Scandinave dans
ser et Parsifal,
importe peu de démêler de l'homme des formes
quelle conviction
vit
il
croyance à son art d'un
Pérugin sceptique. Certi-
Beau sur
pensée
de savoir
pour son œuvre
d'un haussement jusqu'au
prêcheur, enfin
sance du
la
ce qui importe c'est la
;
et l'ambition
effet d'iconostase,
rôle de
et
la
les
conscience de la puis-
la
âmes. Ce ne sont pas
les
simples qui s'extasient aux vitraux, aux sculptures, le
aux fresques
journal
Foi,
la
et
le
;
les
café
simples d'aujourd'hui ont
concert,
haute culture reste,
et,
survivant à la
la seule
qui veille encore devant les œuvres. se placer
au point de vue
le
garde noble Il
faut
donc
plus intellectuel, pour
la subtibilité à obtenir, et aussi
pour que
d'œuvre accomplisse son
de Bonne Parole,
Saint- Victor a dit
effet
qu'une vertu
le
chef-
se retir©
du
256
l'art idéaliste et mystique
monde, chaque
qu'un chef-d'œuvre disparait
fois
;
on peut ajouter qu'une vertu nouvelle rayonne sur
le
monde, quand un chef-d'œuvre
N'est-il
s'y produit.
pas singulier que les laïcisateurs, en
proscrivant les formes catholiques de l'au-delà, aient voulu proscrire l'au-delà lui-même, refusant
à
l'homme
latin
légitime
satisfaction
la
besoin animique. Lorsque
Robespierre
d'un
sur
les
débris de la religion, instaura la fête de l'Etre
suprême, ce sous-crétin montrait encore une sorte de jugement que
onagres,
les
successeurs,
ses
ont perdu. Le président répondant annuellement
aux vœux du Nonce
évitait de
prononcer
devenu séditieux du Créateur. Eh bien formule
talmudiquc
comme une
se
suspend
sera effacé de ce qui est écrit, sauf
l'Etre
nom
d'elle-même,
épée de Damoclès, sur tous ceux qui
se refusent à cette évidence sans pareille,
Ainsi les
le
la vieille
!
hommes
et les
Absolu sont
les
nom
le
ce
Tout
Divin. »
choses qui ont méconnu
promis du néant: rien ne
saurait survivre ni dans l'au-delà
ni
devant la
pensée humaine, qui disconvienne, à cepoint,aux nécessités de la raison. Il
veut
faut vouloir le Beau, le
Bien
;
il
faut
comme
appliquer
à
le
mystique
son art
les
exercices fervents que les fondateurs d'Ordre ont
2S7
DE LA VOLONTÉ ESTHÉTIQUE
nécessaire, pour amener la personnalité humaine au point d'abstraction en Dieu et je ne
jugé
;
sais pas
d'argument plus
l'artiste
des
que de
lui
décisif
pour convaincre
conditions de son particulier salut
comme j'ai
présenter,
fait,
une sorte
de nimbe rapprochant, sur l'outre-mer de nité,
génie et
le
dérait en
assimilait (et
il
—
donne une âme arrachés par effets
si
les
vraiment
peut
son
de enfin
qu'il
il
consacrées
effort
s'il
au miracle
aux formes parfaites, des
préférât
suffrages
touche ou
les
?
la milice
attaques
les
se consi-
croyait que Dieu
de l'Eglise
Templiers dispersant
les
il
devenir) et
le
goujateries de
de trompe-l'œil
Actuellement ouest sont
il
éternelle
apparence
quelle
(et
réussite
la
doit),
le
Si
le saint.
thaumaturge
l'éter-
contre
de
Quels
?
épées
leurs
Rome
?
Quelle
apologétique répond aux blasphèmes? Ce ne sont pas les oints du Seigneur privés de talent chaleur, qui soutiennent devant tige croulant
de
la civilisation
chrétienne
intellectuelle ce sont les
l'élite
fresque, de la voix,
de
?
sans
et
le siècle le
pres-
En
face
génies de la
Giotto à Michel-Ange, les génies de
Palestrina et Vittoria, les génies de l'ar-
chitecture
et
toute l'armée
de la sculpture ogivales qui sont
du Pape
éternel. Ainsi la gloire de
2oS l'Eglise
l'art idéaliste et mystique
ne
brille plus
que d'un prestige
d'art
qui lui conquiert encore des ànies, car
le
ancien
miracle
de Parsifal. à Bayreuth. dépasse ceux que produisent Lourdes et Paray. l'Eglise
esthétique,
et.
Wagner par
oraisons, c'est-à-dire de ses
Saint-Esprit
!
la
est
un Père de
vertu
de
ses
œuvres, on a vu
le
VI
DE L EROTIQUE
La les
seule forme poétique compréhensible à tous
hommes
l'amour
c'est
;
et
dans l'amour
sentent surtout la concupiscence.
l'œuvre d'art
de
la réalité
ils :
nudité
la
il
se
comporteront
En
face
comme
ils
de
vis-à-vis
n'y a donc pas à ciabauder contre
puisqu'elle
ment, qui permet
au
constitue
commun
le
truche-
de soupçonner
la beauté.
Quand Alexandre donna Campaspe ce
n'était pas
mais
à Apelles,
une munificence de royal
l'acte réfléchi
beauté plus que la
d'un
libertin,
prince qui aimait
la
réalité.
Quand M. de Bullow abandonna sa femme à Wagner, il imita Alexandre, il préféra la retrou-
l'art idéaliste et mystique
260 ver
dans
partitions
les
du
L'Art
mérite,
singulière
centiœ
;
le
mariage,
comme
le
style et la beauté, pas plus
demande
lettré
ne
cale,
l'Art transfigure
h maines
les
et
plifie la vie,
il
la poésie.
D'une sorte radi-
comme
moins de s'élever jusqu'à
jusqu'à l'androgyne,
:
il
sim-
milieu entre
le
être mi-parti qui
premier, mais qui prie
A
le
en l'élevant au-dessus des
contingences. L'artiste tient :
que
plusieurs des appétences
dissuade de se réaliser
l'unifie,
laïc et le religieux le
l'épithète
remedium concupisdemande plus à la femme la
l'esthète ne
lui
la
tellement moindre.
profonde de
et
proportion,
maître que de
et
conserver matériellement
la
pèche
le
comme
l'autre.
forme angélique,
comment produire
la
beauté
des corps, sans toucher sexuellement aux formes féminines.
Les femmes, d'elles-mêmes, ne comprennent pas les Beaux-Arts bien l'extériorité
;
l'artiste
œuvrant ne sent pas
masculine.
Comment mécon-
naître cette unanimité de l'Art, symbolisant les
plus viriles conceptions par la forme
Une
allégorie sera toujours
féminine.
une femme, Victoire
de Samothrace, Heui'es du Guide, Géométrie de
Mantegna.
Dans
la
voie
que
les
plus
grands
génies ont suivie, voyons toujours la plus forte
261
DE l'Erotique
présomption de vérité allégorique
figure
et, s'ils
;
ont attribué à
de
plastique
la
la
la
femme,
trouvons-en une meilleure raison que leur propre désir.
La dominante psychologique de la femme consiste dans un indéBni musical, susceptible de devenir n'importe quoi tandis que l'homme présente un caractère défini et sculptural, au figuré. ;
Donc,
plastique féminine se prête
la
volonté expressive de
femme ne
;
elle
la
elle a
Ici la réalité
nous
et éclaire l'adaptation esthétique.
Quant au rayonnement charnel qui de
la
une
devient plus ou moins
identique à celui qu'elle aime.
guide
la vie,
quand
reste pas ce qu'elle était,
rencontré un amant
mieux à
Dans
l'artiste.
femme
reproduite, doit on
l'épeurement moraliste
chacun
s'est
:
penchant
la
se
dégage
voir à travers
religieux
et
enivré de son
Juan méconnaît FAmour,
le
là
encore
et, si
Don
Casuistique mécon-
naît aussi la volupté.
En présence d'une
force constitutive de l'être
humain,
la
utilise et
ne maudit pas.
sagesse canalise, endigue, approprie,
Toutefois, le tableau ou la statue qui arracherait
au charretier ce si fière et
cri
animal, dont M™'" Récamier fut
chatouillée, serait
une mauvaise œuvre.
l'art idéaliste et mystique
262
figure, comme une compose virtuellement d'un corps
Souvenons-nous qu'une personne,
se
àme
sans doute, mais d'une
et d'idée; et
que l'idée
doit timbrer l'âme et déborder sa haute significa-
cation sur celle toute instinctive
L'œuvre
sens instinctif, c'est le cas
du
corps. le désir,
au
mais solliciter l'imagination,
et
d'art
ne doit pas éveiller
de toutes les anciennes représentations.
Joseph de Maistre a discuté longuement sur ce fait
qu'une moinesse, en son froc à
réalise autant d'art
que
la
Vénus au
plis droits,
bain, et nous
n'en disconviendrons pas. Mais plusieurs qui sentent la
faut pas
Vénus, ne sentent point
excommunier
ment, on doit
les
les
la
nonne;
et
il
ne
gens sur leur tempéra-
juger sur
le
résultat de leur
vouloir.
Quels sont ceux qui ont été corrompus par les statues et les tableaux
?
VIII
DE LARISTIE
Dans Comment o?i devient Artiste} une image
qui, reproduite
la triplicité
ici,
dH
employé
fera bien entendre
des éléments esthétiques et les condi-
tions de leur unité dans le chef-d'œuvre.
«
On peut
se figurer l'être
humain comme un
double coffret enfermant un diamant, La première enveloppe seconde
est
opaque,
les heurts,
lumière, la
les
le
corps
transmet à
la
non pas
la
si
la
buée
»
Le problème du chef-d'œuvre Beauté
il
seconde est translucide,
organique ud'obstrue pas.
la
;
secousses,
consiste à ce que
spirituelle transparaisse à travers l'ex-
pression ou corporelles.
âme
et
s'extériorise sur les
formes
264
l'art idéaliste et mystique
Or, plus la forme est subordonnée à l'expression, plus la beauté s'intensifie et devient subtile
jusqu'à laisser paraître la pensée esprit
même. Le diamant
rayonne dans sa double monture animique
animale.
et
Chez
plupart des artistes l'œil et la main
la
mouvement
seuls sont en
Chez
qu'un repoussé de
même
!
l'artiste véritable, la
la
beauté formelle n'est
beauté sentimentale,
elle-
substantification de la beauté intellective.
Si j'écrivais
dirais que,
une métaphysique de
même
obtenue sous
la beauté, je
les trois rapports
plastique, expressif et conceptif, elle ne se réalise
totalement que par l'unification, que j'appelerai
au-delà pour divin pour Si la
de
l'art,
le
profanes
beauté paraît à
que
elle n'est
supérieure, taire
les
Verbe
le
approximatif du
;
la fois le le
et,
de la triple qualité,
il
but
et l'essence
moyen d'une
essence
après l'obtention unifaut poursuivre encore
point de divinité.
Tel l'aboutissement
chef-d'œuvre réjouissent,
conçoit, et
et
les initiés.
me
il
;
en
parabolique du véritable
même temps
que
yeux
les
se
que l'àme s'émeut, que l'entendement
ya
un phénomène englobant
à produire,
servant d'une expression musicale
:
la réso-
DE
265
l'aristie
lution de cet accord à trois incidentes doit être
sur un relatif d'au-delà.
La Beauté, aux yeux de forme du mystère
;
par son sujet de
faire
et
l'initié,
s'appelle la
œuvre insusceptible
toute
ressentir l'inquiétante et
salutaire impression de l'inconnu d'en haut, n'est
qu'une œuvre de luxueux métier. La science dédie ses
palmes à ceux qui démontrent une
phénoménisme celui
qui
;
l'art
réalise
ses
n'offre
un des
du
loi
palmes qu'à possibles de
aspects
l'Essence incréée. Je propose ce critère précis
aucune forme ne doit
à la manifestation d'un ange
passage du Bereschit où tuelle
inventer
hardiment à
série
la
l'instar
pason d'œuvre,
:
être réalisée qui disconvient
l'on
;
et,
revenant à ce
voit la série spiri-
humaine,
de Baudelaire
qu'il faut
je
donnerai
comme
dia-
concevoir des figures
Dont les formes et les couleurs Gagnent le suffrage des Anges. Le plus grand préjudice, que et
la théorie idéaliste
mystique puisse subir,réside dans
doxies d'exécution.
seux
copier
des
On
a
pu voir d'habiles pares-
Epinaleries
prétexte de spiritualité.
les inortho-
Au
religieuses
contraire, plus
œ.uvre prétend à rendre l'au-delà, plus
elle
sous
une doit
266 être
l'art idéaliste et mystique
accomplie dans ses conditions techniques; de
même
que
renonciation
des
vérités
A-t-on
plus réfléchie.
parole limpide,
la
remarqué que,
littérairement,
exige
la
assez
l'expression
des
idées supporte mal les couleurs de l'image, exi-
geant l'emploi des formules de ne pas
afin
sur un thème Il
les
plus consenties,
mettre une obscurité de lexique
difficile
à percevoir par son essence.
faut distinguer cette impression grossière d'au-
delà qu'on produit avec des éléments hallucinaet
toires,
véritable version
la
de l'invisible qui
doit toujours se concrétiser en des formes sereines, telles
que
les
Grecs
le
conçurent.
La
Joconde,
le
Précurseur ont un calme physique, transportable aux
bas-reliefs,
si
l'on fermait leurs yeux,
éteignait la signification des bouches.
du timbre-poste
ler l'usage
idéal
si
Ton
Sans conseilcette
et
poncive du corps humain qui infériorise
la
vue
plupart
des belles œuvres de Gustave Moreau, on doit
prendre la tête
sance. sériel
le
type corporel à la Grèce, mais étudier
exclusivement chez
les génies
Ainsi la figure réalisera à
de la Renais-
la fois le
par l'eurythmie des membres
dualisme par
la subtilité
de la
type
et l'indivi-
tète.
Je voudrais surtout être pratique et j'insisterai
sur
un des secrets de
la
matière
:
c'est l'expression
DE l'arisïie
267
le mouvement d'une mouvement de la figure
des yeux qui déterminera figure
et,
littéralement, le
doit être la dispersion périphérique de l'expression
du
regard.
Léonard
est
Par l'excellence de cette Léonard.
qualité,
VIII
DE L ORIGINALITE
Jusqu'ici nous avons
Normes
aux
et
demandé
de suivre
rectrices de la Beauté:
les
venons
à
à l'artiste d'obéir
antiques
règles
lui-même,
et
aux
clauses d'un concordat entre sa personnalité et les canons. L'artiste
ressemble à un prisme cons-
cient chez qui le double courant de la vie et de la
réflexion se résout en lignes, en formes, en notes.
Ce prisme
s'appele, selon les vocabulaires,
rament, caractère d'âme vocation.
d'esprit,
et
Quoique l'harmonie
gogique à imposer,
et
tempémieux,
soit le point
péda-
y aurait de lillogisme à empêcher l'individu de se développer dans le sens de sa propension. de sentir, sent
;
On
il
peut
mais seulement
lui
imposer une façon
s ir
un
terrain
on convaincra un charnel de
où
il
l'idéalité di|
269
DE l'originalité
nu
;
mais,
on
si
on
insexuelles,
condamne
le
lui ôte ce
à des expressions
moteur, qui génère sa
vibration. Donc, que l'homme des beaux-arts s'interroge et, après s'être essayé à la montée abstraite vers la beauté, expression du mystère qu'il choisisse, parmi les notions esthétiques, une ;
fiancée,
Tépouse,
qu'il
qu'il la
garde dans sa passionnalité
généraux de son
art,
Suivant l'analogie, l'inconnu par riel,
le
le
cette
connu,
le
connaisse
satisfaite, les
canons
chef-d'œuvre
naîtra.
mélhode qui
éclaire
matériel par l'immaté-
persuade du parallélisme synchronique entre
les réalités et les entités,
sens, —
entre la substance et les
l'œuvre d'art est
le fruit
où
bisexué, s'est fécondé lui-même, sous la vie
l'artiste,
un
ce
influx de
ou de l'au-delà.
L'important sera de ne céder ni trop à tion, ni trop à la vie les
et, s'il
;
;
ou plutôt de
faire
la tradi-
concomiter
impressions du réel avec les conceptions.
On
pourrait, d'après le planétarisme, indiquer la voie
que souvent fixer.
Ici,
Gary de
la
il
faut
Grozc
fication des les
l'artiste
;
cherche longtemps, sans se
emprunter une idée à le
l'esthète
type solaire représente l'uni-
six potentialités
catégories astrales,
il
schématiques
signifie le parfait
;
dans
;
sans
égard aux planètes individuelles de Léonard, type
270
l'art idéaliste et mystique
solaire,
mais aussi mercurien,
solaire,
mais vénusien, leurs œuvres absolument
parfaites
bien
signifient
la
et
Raphaël, type
Solarlté,
parmi
la
caractéristique des chefs-d'œuvre.
Tous ceux qui
mineurs de
bleutés, les tons
lunariens,
emploient
comme
les
tons
cendrés,
la palette, sont
Proud'hon, tandis que
Rubens
décèle le marsien chez
le
des
rouge
et la goujaterie
de
sa suite. Lorsque la couleur ne concourt pas à l'expression,
chez ceux
qui
voient
presque en
camaïeu, ce sont des saturniens,
comme
Ange, Philippe de Champaigne
et,
Michel-
à un degré
moindre, Nicolas Poussin. Mercure régit ces autres
dont
le
ton se localise d'habitude, avec une domi-
nante argentée, vénitienne
du
xvii"^
Toute
l'école
réalise l'influence jupitérienne. L'art
On
en France, relève de Vénus.
siècle,
peut, en
Véronèse.
tel
laissant
le
type solaire
comme
l'idéal
proposé à tous, synonyme d'œuvre aboutissante, dire qu'il y a six voix de la propension artistique la lunaire effets
qui comporte la rêverie, la légende, les
d'angoisse inexpliquée et tout
d'animisme non marsienne
Romain, les
:
réalisé,
comprend
le pittoresque
analogues
les
le
domaine
désirs et souvenirs
violences
à
la
;
la
Jules
exagéré de Salvator Rosa,
du Miracle de Saint-Marc de
271
DE l'originalité Tintoret,
Delacroix;
et les
c'est ici
peintre passionnel, du dramaliste. est
lieu
le
du
La saturnienne
une voie qui conduit aux compositions sur-
chargées, mais puissantes et pensées, à la fresque, particulièrement,
mercurienne,
et
jamais au portrait. La voie
moins caractérisée en
la
la
soi et
plus souple, opère des transitions aisées entre des points par
eux-mêmes
réfractaires
de
;
là,
relèvent
tous les éléments d'illusions physiques, parfois
expression d'un intérêt
de l'expression,
l'acuité
contingent.
La voie jupitérienne
est
celle
des
pompes, des fêtes, tant sacrées que profanes, dans les
grandes dimensions. Lebrun en
est le type,
comme
Haëndel. La voie vénusienne conduit à
grâce,
à l'attendrissement
;
c'est la
la
matière fémi-
nine par excellence, qui rayonne aux Madones de
Raphaël, lesquelles sont conçues dans une donnée plus restreinte et terrienne que ses fresques.
Ainsi
l'artiste
chant qui
s'interrogera
lui paraîtra
et,
suivant
prédominer,
il
le
pen-
saura quelle
qualité développer, prometteuse de fruits.
Au reste, une
ascèse n'est jamais qu'une accom-
modation entre une personnalité
comme une œuvre d'une
vision
avec
n'est le
et
des règles,
aussi que
l'harmonie
procédé
qui
l'exprime.
Contrarier ces penchants serait réduire l'artiste à
272
l'art idéaliste et jiystique
une formule monacale,
et le
une renonciation de toute êtres qui y entrent
:
la
couvent repose sur
valeur expansive des
tandis que l'Art n'existe que
par l'individu, sauf TArchitecture
à ce point que
;
toute collaboration est impossible,
un
pas d'exemple de deux auteurs pour
une
d'œuvre. L'équilibre
tempérament de de
s'agit
le
fois
l'artiste et la
préserver
comment? sinon en
des
Norme
se créant
il
une esthétique, en et les
abandonne, en un mot en trouvant les
de l'Art,
le
heurts évolutifs. Et
en précisant d'avance ce qu'on réserve
Que nul ne
chef-
obtenu entre
élaborant un compromis entre soi
où s'harmoniser avec
a
et qu'il n'y
règles
et ce
le
;
qu'on
point par
convenances tradition-
entre les chefs
il y a un air de famille d'œuvre, car tous ont été conçus à
un moment où
leurs auteurs se trouvaient, malgré
nelles.
la
différence des
l'oublie,
temps
et
des lieux, en des états
de surnaturalité analogue.
Par conséquent, à la et
l'artiste
ne peut que s'anneler
chaîne d'or qui remonte
le
cours des âges,
fuguer sur des thèmes de pérennité humaine.
IX
DE L ASCESE
Agir d'après un motif consciemment élaboré, voilà
une moitié de
que
le
motif s'accorde au consensus des 'peïiseurs
pris
dans l'universalité,
la sagesse définie
et
;
ajoutons
nous avons une formule
d'éthique.
Or, l'éthique ne se différencie pas de l'esthétique
:
la façon
de vivre est dictée par la façon de
sentir, et telle façon
sement
telle
façon de vivre.
Toutefois, le point soit
goût
la théorie
le
commun
mode
quelque et
de sentir implique rigoureu-
tuelle ni farouche,
de
oii ils
à tous les créateurs,
s'expriment, c'est le
la solitude,
non pas perpé-
mais subordonnée à son propre
vouloir.
Evitant
la
comparaison de
l'abeille qui
rapporte
274
l'art idéaliste et mystique
à sa ruche
manger et
de
suc des fleurs, du tigre qui vient
le
sa proie assez loin
du
où
lieu
il l'a
saisie,
emportant vers son aire ce que ses
l'aigle
serres puissantes ont étreint
;
dans son
l'artiste,
mouvement nécessaire de convergence à lui-même, doit sortir de la retraite, dès qu'il manque de matière à ^œuvrer
y rentrer aussitôt qu'il a
et
emmagasiné des impressions nouvelles. La soirée stérile qu'on passe à mal rêver appartient au bal. Quand on est veule et absent de soi-même,
il
faut se souvenir de l'autrui
mondain.
qu'une
enrichisse
Je ne prétends pas
beaucoup l'imagination de l'aérer,
le
à tout le
soirée
l'artiste,
mais
elle
peut
forcer à des remarques profitables
moins,
et la nécessité
du
lui
démontrer
le
et,
néant du réel
salut par le rêve.
L'exagération qui éclate dans la vie des saints serait
f
meste au simple
fidèle
;
l'exagération coutu-
mière aux maîtres compromettrait plus
difficile
désobéi
et
modération dans L'art
raison
demande
même
se maintient,
le
à ses
i'artiste
Quel la
phénomène d'enthousiasme. adeptes de ne pas cesser la
en leur extase. Aucune violence ne et
on
mouvement, d'après d©
l'élève.
commandement que
calculera l'extinction d'un
sa vivacité
;
or, le
entraine tout l'avenir, et
il
grand œuvre doit
marcher
278
L*ASCÈSE
t>Ë
pas de continuité, un pas possible à l'habitude. Le dernier des êtres contient la force d'un élan faut une grande vocation, pour une simple il tin
;
habitude idéale.
La Régularité dans peu étonnante
à
l'intermittence, formule
première vue, par
un
développe-
le
ment, se plausibilisera. Il
faut que les oppositions se succèdent chez
l'artiste
:
à
une période de
travail
une de relative
dissipation succède, et proportionnelle
maintenant,
la
précision
applicable à l'un ou l'autre,
Se créer des habitudes les
rompre
de
l'idéalité
le et
tableaux
me semble
illusoire.
moins possible, devenir coutumier régulier de l'eftort
l'artiste
sculpteur ou peintre, des
se peut;
de jours
de pensée, de travail,
qui accomplit une vocation ou
Sauf pour
s'il
du nombre
de
même
:
la détermine.
monumental,
l'homme des
chevalet
médailles et les exhibitions
peut
tel le levier
architecte,
statuettes et
dédaigner
officielles.
les
X
DU SORT
La comédie humaine ne présente pas toujours un dénouement moral et le génie, comme la ;
vertu,
de prétendre à une récompense, doi-
loin
vent se
féliciter,
lient,
ne soient pas écrasés
monde
qu'ils
humi-
en l'éblouissant.
Par bonheur, l'histoire, flatte
ils
de tout un
par l'indignation
anormaux,
quétraiigers,
et
ennemis,
7'èfractalres,
moment, qu'on leur
à chaque
permette d'exister,
les
et
les
riches ne
comprennent pas
pauvres Fignorent;
incessamment que
sont vaines et que
les
la foule se
menaces
de
Tart
chef-d'œuvre annoncé ne
le
paraîtra pas.
Quand se lève,
il
et
parait, le
ah
!
tout l'armoriai de France
Jockey club
siffle
Tannhaûser,
277
bt SORT
Heureux encore qui arrive jusqu'à combattre, pour tomber en héros de l'esprit sous la bêtise d'une capitale
du
d'autres finiront dans l'hypogée
;
étouffés par leur pensée inexprimée,
silence,
assourdis par leur voix sans écho: et Lacuria
aura faim,
et
n'étouffe pas
pied disant as
un Wagner.
titanesque :
sifflé
va
César Franck mourra âgé
Le génie n'implique pas
nu.
faire
la
et
incon-
combativité; on
Celui-ci
a
posé son
nuque des mondains,
Admire, élégant fantoche, ce que tu
« ;
sur
la
l
»
et,
tous les soirs,
le
fantoche élégant
amende honorable au génie vainqueur.
D'autres, à défaut du génie wagnérien, ont reçu
du démon leur ancêtre, un entêtement tellement radieux qu'il défie à et
;
mais que
d'efforts profitables
l'œuvre se perdent à lutter contre les intrigues la niaiserie
La chance son milieu
des employés
de ce pays.
résulte d'un accord entre le talent et
or cet accord, actuellement, ne peut
;
se conclure sans prostitution, car l'artiste, loin de
prendre
le
diapason du public, doit imposer
le
sien.
En
1864,
l'homme
(1) Les Harmonies de Platon chrétien.
de
qui
avait
déjà produit
l'Etre, 2 vol. in-S',
dignes de Platon,
l'art idéaliste et mystique
278
Riensi, Tamihauser,
Lohengrin
Dis, viens à
«
A
aide
:
jusqu'à présent
poche,
et
un monde superbe
«
me
princier
Lohengrin
ce que tu peux pour moi, cher ;
;
le
mon me commande mon
que quelqu'un m'achète
que quelqu'un
Slegf7'ied, je
ferai à
bon marché. Je ne puis
pourtant pas faire mettre dans je n'ai ((
et rien
chaufîer.
Réfléchis à
homme
pu
se déroulera
devant moi où je n'aurai rien à manger
pour
j'ai
de ce|mois,le dernier florin sera sorti
la fin
ma
de
mon
et
:
aux avances d'un ami.
vivre, grâce «
Vaisseau Fantôme
le
écrivait à Liszt
les
journaux que
pas de quoi vivre.
Que ceux
qui m'aiment
me donnent
quelque
chose. <$.
de honte,
d
Voilà par où passa
son
ma misère dans les ma femme: elle en mourrait
Je ne pourrai avouer
journaux, à cause de
secret,
en
le
triomphateur de Bayreuth
même
temps que
son
:
génie,
s'appelle, la persévérance.
Aucune de bêtise
résistance d'opinion, aucune épaisseur
ne
résiste à celui qui persévère.
verare diabolicum
et
angelicum
Perse*
est, dit la thé9=»
279
DU SORT logie
;
en
eiïet, la
force des esprits réside dans la
continuité de leur vouloir.
L'homme
qui œuvrerait sans cesse, accumulant
productions surproduction, forcerait magiquement gloire
la
même
La
esthétique
création
une
à venir s'offrir. Seulement,
épouvantable complication se dresse
:
la santé.
épuise les forces
Tadmiration ne vient pas
et,
si
les renouveler, l'inspi-
ration tarit.
Aussi ne
faut-il pas,
de gaieté de cœur, se hisser
en Stylite sur sa colonne
;
concessionner, l'homme a plier parfois,
l'œuvre ne doit rien
le droit
dans l'abord,
courtois
enfin
si
les
et
aux imbéciles, pour sauver
de
être l'inté-
de sa pensée.
grité
On
ne remarque pas assez que l'intransigeance
de l'œuvre passe assez aisément,
même
transige
monocle que
de vivre
manières,
et
;
et
si l'artiste
un pantalon retroussé en
les sculpter
ou
lui-
mieux vaut encore porter un les peindre.
plein soleil
XI
DE
L EFFORT
Si l'on étudie quels soins
du
les fatigues
somme
comportent
riche, les nécessités
nécessaire
d'efforts
à la
l'oisiveté,
du monde
et la
plus aisée des
existences, on verra que les souff'rances de l'artiste,
sont compensées par des joies singulières. Et, d'abord,
rent
avec
le
que veulent ces
niais,
cocher, le cuisinier,
le
qui contètapissier,
tous les corps d'état, et arrivent, au soir de gala, harassés, pour la plus grande joie de quatre cents malveillants, qui
les
toujours?
dénigreront
veulent faire envie. Telle la bassesse
nul ne sait jouir, sans que
ne
souligne
son
plaisir
;
Ils
humaine que
la souffrance d'autrui
bien
plutôt,
elle
le
constitue.
Quel ennui de savoir que Michel-Ange
allait,
281
DE l'effort
œuvres des concurrents de
dessiner les
la nuit,
Raphaël
!
Comme on voudrait que ces
beaux génies
fussent fiers et purs, tels que leur œuvre.
Nous sommes convenus, en poser les passions, au lieu de
occulte, de trans-
les nier.
Que
l'envie
s'applique aux génies morts, dans une émulation
ardente
!
Que chacun
choisisse son patron d'art
rageusement poursuive
et
ment noble
et
le
intense. L'envie de valoir l'espoir
idéal
!
Un peu
Senti-
œuvre
un écueil
présente
;
de cette crainte, que
le
donne pour commencement à
la
d'égaler.
rituel religieux
sagesse, devrait enseigner les
même
fructueux, et d'où sortira une
aux jeunes
artistes, pour
grands maîtres, une vénération fanatique.
Ce qui accuse Beaux-Arts,
les
c'est le
vrais génies.
On
professeurs de l'Ecole des
silence qu'ils gardent sur les
ne cherchera pas bien loin la
raison de cette conduite
:
Harpocrate
« la crainte pour son prestige
».
ici
s'appelle
Aucun enseignant
de nos jours ne donne l'impression salutaire du respect des maîtres,
dans
le
ton où
il
doit être
présenté. Malheur en art à celui qui n'admire pas
jusqu'à balbutier, à pleurer devant une œuvre
Malheur à
comme plus
l'artiste
en matière ordinaire.
fameux de ce
!
qui tranquillement apprécie,
saint
Un
des exemples les
amour, Verrochio, 16»
le
282
l'art idéaliste et mystique
statuaire élève,
du Golieone,
Christ, se révéla
panneau
Florence
—
:
son
jeune
à
l'Académie
tel
le
— on peut voir
des Beaux-Arts
de
que maître Andréa renonça à peindre
consacra entier à
et se
montré
Léonard, chargé de peindre un ange dans
Baptême du le
l'a
la sculpture.
Quel contem-
porain suivrait ce modèle? L'artiste la
critique
de et
mal
la
Renaissance,
supportait
la
dague
infailliblement
aurait
répondu aux tons des journaux actuels
;
cette
exaspération allant jusqu'au meurtre venait, sans doute, de la mauvaise elle naîtrait
foi
des rivaux
m'étonne que Delacroix
Je
:
aujourd'hui
de leur ignorance. parfois
ait
tant
soulTertd'unarticle,commeje reste stupéfait d'avoir
vu Gustave Moreau à
l'Institut.
L'artiste
doit
puiser en lui-même la résistance opposable aux contradictions règles et le
et,
allié
il
dédaignera, certain que
de toute vérité, en sa voie
mais sûre, fera triompher son
lente,
secret des grandes
pour
le siècle
l'avis
contemporain.
Car, lieu
s'appuye fermement aux
s'il
aux maîtres,
temps, cet
Le
;
idée.
œuvres réside à œuvrer
à venir, sans jamais s'enquérir de
invinciblement,
l'homme médiocre, au
de chercher Dieu dans l'œuvre, s'y cherche
283
DE l'effort
lui-même mais
le
:
monde
applaudit,
et
s'y trouve,
peut être convaincu du néant
l'artiste alors
de ce qu'il a produit. faut
Il
que l'œuvre
ment moral chez
le
d'art nécessite
spectateur.
plain-pied dans sa pensée,
si
Si
un hausseon entre de
les relatifs
de réalité
sautent aux yeux tout de suite, l'impression esthétique n'a pas lieu.
L'œuvre ne peut avoir
venu où
elle doit
;
elle
ment Il
recueillement
engendrée, pour en faire un tremplin de
une excitation, sinon à penser, à rêver.
faut
impérieux,
mieux
niveau du premier
même
fut produite et cette volonté qui longue-
l'a
l'âme,
le
dégager ce
que l'œuvre pentaculise un sentiment et
elle le
plus elle est faite loin du
subjuguera.
monde,
XII
DE LA TEMPERANCE
désappointements
naissent
tous
d'une
mauvaise équation entre nos désirs
et les
renon-
Les
ciations nécessaires à leur satisfaction. les
insuccès de l'artiste proviennent
de
vent
rapports
n'avoir
pas
su
Mêmement
le
plus sou-
abandonner certains
secondaires, pour
montrer en entière
valeur la qualité significative.
Dans un
portrait, celui qui
s'amuse aux damas-
quinures de la cuirasse, à la dentelle du cou, ou
du cavalier Bernin, chifdraperie du marbre, en coup do vent, et
cet autre qui, à l'instar
fonne
la
s'applique à rendre des différences d'étoffe
ceux
là
qui, à la suite de Ruskin,
les feuilles
;
enfin
voulurent que
d'arbres fussent étudiées aussi minu-
DE LA TEMPÉRANCE
285
tieusement que les figures, en quelle erreur sont tombés
Simplifier formule
:
il
ils
!
pour
faut
intensifier,
du génie
ielle
l'exacte
du goût dans
et
le
génie pour connaître sur quoi la simplification
portera
Puvis de Ghayannes simplifie
;
partie méplate et les modelés
animées par
scènes
ouverte
:
dans
les cinq doigts
la
la
Femme
:
le
trop
la
Poussin gâte ses
projection de
la
main
adultère, par exemple,
en éventail tournent au grotesque
par leur répétition
;
en outre,
le
nez de statue,
le
nez de masque tragique qu'il impose à tous ses visages les éloigne trop de la vie, sans les rappro-
cher du
style.
Les mains ne doivent être en vue que dans un tableau à peu de figures
et,
exprimer l'étonnement ou
l'efîroi, la
jamais,
môme
pour
main ne
doit
être ouverte entièrement.
Ce qui décèle ou
sculpteur,
le
c'est
le
soin qu'il
visible joie
le le
plus souvent, chez le peintre
peu d'envergure cérébrale,
donne à
d'ouvrier,
fier
l'accessoire, avec
une
de montrer un figno-
lage technique. Le goût public pousse à des rendus puérils,
bons
pour Netscher
;
et
combien peu
d'amateurs se défendent d'un plaisir animal à voir, parfaitement distingués par la touche, les luisants
286
l'art idéaliste et mystique
les brillants de la soie, les matités du La robe de la Joconde en quoi est-elle ?Nul ne se le demande. De quoi s'ag-it-il en art ? De
de peluche,
drap.
produire de
la
beauté plastique,
beauté morale, on le doit
qu'on
tuelle,
seule réalité
s'y
efforce
comme
de
;
la
il
le
Franz Hais,
;
de la
beauté intellec-
Ceux qui
!
faut
réalisent
comme
la
Velasquez
ont droit à l'admiration des élèves qui apprennent à parler la celui
même
langue des couleurs,
comme
qui s'énonce avec aisance dans les circons-
tances de la vie excite une approbation unanime.
Hercule ne réside pas dans ses biceps, mais dans l'emploi qu'il en fait
admirable pour la arpèges
où
il
;
même
de
vélocité
et ses traits,
Liszt n'était pas
de
ses mains,
appliquait: ainsi celui qui, par un sûr
les
procédé, étreint l'extériorité des choses et porte dans
que
le
de son
L'artiste
ses
mais dans l'emploi esthétique
marbre ou sur aptitude,
réaliste,
qu'il
et
la toile,
ne témoigne
non de son
s'appelle
la trans-
altitude.
Jordaëns
ou
Chardin, est semblable au Paganini qui jouerait des transcriptions de musique militaire, ou au
chanteur qui consacrerait une admirable voix aux
d'Auber et de Adam. Quand se produit un tempérament semblable à celui d'Haïs, de
inepties
Rubens, on
est
en présence de ce qui s'appelle en
287
DE LA TEMPÉRANCE
La nature
tnusique une belle voix. ses
dons ne signifient devant
adhésion à l'éternelle beauté.
moral
quel
a
donné, mais
l'art,
qne par leur
Au
monstre dangereux
point de vue serait
l'esprit
laïque et négateur apportant l'analogue de l'onction
à la propagande athéiste les
? Tels,
cepenrlant, sont
exécutants d'art sans pensée et sans reflet de
de se figurer avec mauvaise
la
divinité. Inutile
foi
notre enseignement
proprement
dite
:
d'un sens divin, et
le
restreint à
paganisme
même
Cythère de Watteau ne
Que
beauté.
aboutisse au ce sera force,
celui, joli,
peu
disconvient
couleurs diluées,
;
impuissant à réaliser
le
beaucoup
le
amoindries,
l'homme des
Arts.
le
à
la
Beau,
victoire,
sens latin de
Beau, en ses
recevront sous des
mais suffisantes à
cette action sociale qui associa jadis à
des Dieux,
pas
— ce sera encore une
d'êtres perçoivent le
formes suprêmes
susceptible
V Emharquemenl poii?^
encore une vertu dans
car
mysticité
la
est
l'homme
XIII
DE LA VOCATION
Avant de
se consacrer à l'Art,
on devrait
s'in-
lerroger et ne pas décider tout de suite, car le seul vie
;
fait
et
de choisir
le
destin d'artiste,
change de
qu'on parvienne au talent ou seulement au
ruban rouge, les conditions d'existence deviennent spéciales.
Celui qui n'a pas de talent et celui qui
n'a pas de succès sont
malgré
mais,
malheureux également;
l'habit vert, les
commandes
et les
décorations étrangères, le sans talent, par exemple, souffre profondément.
En
outre,
j'écris
terrible
la
et
ici
les
spirituels Français
langue s'esclafferont à
loisir,
il
dont
y a un
compte à rendre, outre monde, pour tous
ceux qui osèrent toucher à
l'arc
Ithacien
:
ils
péfirout sous la flèche des Causes Secondes, en
289
DE LA VOCATION vertu de ce principe
:
la témérité s'appelle
un
droit
ou un crime. Sophocle magistralement symbolisa cet arcane redoutable
;
mais nul n'entend plus la
voix traditionnelle des vieux mythes
goujats sont sur droits,
le
trône,
criminels,
ces
les
et,
comme
les
téméraires sans
consomment
toutes
les
usurpations.
Lois sans justice, gouvernement sans autorité,
mœurs
sans noblesse, littérature sans idée, et
peinture sans dessin se complètent
et se nécessitent
entre eux.
Vaines
les
lamentations, inutiles
les
anathèmes!
Quelle alchimie sur de pareils éléments produira
une parcelle d'or? l'individualisme.
Ce que
j'ai
ailleurs,
dit
spécieusement à
l'artiste
à l'artiste, s'applique
condamné désormais à
un rôle de burgrave. La magie pratique consiste à tirer
plus lumineux parti de soi, des autres
le
et des circonstances
lois
de ce
toujours
:
et telles
sont les mystérieuses
monde qu'une compensation surgit à un désastre même. Une
parallèle
époque sans théorie, sans école,
un développement tout à
laisse à l'esthète
fait libre.
Puvis,
Burne
Jones, Watts, Gustave Moreau, Rops ne se ressemblent qu'en
un
point, leur indifférence des idées
qui font leur gloire* i?
290
l'art idéaliste et mystique
La décadence ipsisshnus
;
permet
à
d'être
l'artiste
permet aussi de
lui
elle
lui
s'abstraire,
c'est-à-dire de concevoir, en dehors des conditions
de milieu.
Le métaphysicien a charge l'artiste
et
ne s'en
il
légitime,
à
il
a droit
aux égards qu'on ne refuse pas
une femme enceinte
que
la niaiserie des
du Gharap-de-Mars qu'on veut,
Là,
et
mais
ne geste
faut-il qu'il
indépendance de
l'opinion,
indépendants.
;
!
entière
sanctionne
Champs-Elysées ;
elle a
on
l'artiste,
a produit plus
et la
vulgarité
produit l'exposition des
expose
littéralement
l'époque,
ce
à une exposition
cela ressemble
Libre envers
que
d'horreurs
clinique plutôt qu'à une exhibition des Arts.
l'artiste
Beaux-
se
trouve
d'autant plus obligé envers la tradition.
Au
reste, je
cherche quelle œuvre violatrice des
règles a triomphé par le pouvoir
ne
la
découvre pas. Delacroix,
classiques, tandis
du temps,
Wagner
et je
sont des
que Manet, par exemple, retom-
bera au néant, après que les boursicotiers auront fini
;
pas faute. Son égoïsme apparaît
fait
pas un monstre Cette
d'esprits et d'âmes,
créateur ne peut songer qu'à lui-même
de soutenir sa mémoire pour placer
similaire des sous-Maneti
le
stock
1
29
DE LA VOCATION
Ce
même
public,
ces
mômes amateurs
qui
encouragent aux audaces, n'estiment que l'observation au moins apparente des règles et
le
vieux
Charles Blanc parle, dans ses salons, de l'impeccable Bouguereau, sensa errore^
comme André
del Sarté. Jamais l'individu vraiment
doué ne
dans de meilleures conditions pour
se ressaisir
fut
sur l'emprise ambiante, qu'en cet affreux millésime,
du moment qu
il
adhère à un parti-pris d élévation
et de noblesse. Il
est
plus
une période
valoir dans
de
aisé
déchéante que de se détacher en vigueur sur un
ensemble lumineux
;
je
m'étonne que l'homme
des Beaux-Arts ne saisisse pas plus habilement l'occasion offerte de s'élever sur la ruine latine.
Nous sommes de sentiments les
qui,
dans
un confluent d'idées, de formes, courant charrie
le
;
plus divers
étaient tels,
à
;
et les
habiles,
si,
prendraient la voie du
les
fins
les
éléments
vraiment,
ils
style, la seule
de civilisation, puisse s'appro-
prier, sans se corrompre, les parties encore saines et flottantes, sur les
cence qui approche.
premières eaux de l'intumes-
XIV
DE LA TRADITION
Le
médiocre, puisque
dilettante, outre qu'il est
âme
son
chaleur ne
sans
s'enflamme jamais,
incarne la sénilité d'un temps
;
c'est
l'égoïsme
dans un domaine où rien n'existe que colossaux du passé disant: c'est
le
«
Moi
;
c'est
la
aussi, je suis
fourmi,
les le
Moi
ciron,
un microcosme:
»
bourgeois transporté dans la sphère de
Tidéal et savourant les chefs-d'œuvre avec gour-
mandise, au lieu de prie
;
les
contempler
Prudhomme et BonhomRevue des Deux Mondes le
le dilettante, c'est
met passés par vieil utilitaire
la
;
qui trouve que les petites
des tableaux dérangent moins petites (jui
comme on
femmes vivantes
;
femmes
la
digestion que les
c'est le
calme malfaiteur
achète les premiers crépons, collectionne lec
293
DE LA TRADITION affiches et
commandite
lisme
dilettante,
le
;
épateur;
paye
tachisme
et le pointil-
bourgeois devenu
c'est le
malin rentier qui, prenant sa revanche
le
sur les charges se
le
les
Daumier, avec un peu d'or
de
dernières consciences, et ruine, par sa
protection intentionnelle, l'art véritable.
En
face de ce sinistre
artiste
termite,
une
complémentaire, se développe
tante pratiquant,
auquel
:
espèce, le
dilet-
d'insane ne reste
rien
étranger, qui copie les crépons, les affiches, enfin
expose
mauvais papier peint ou
le
le bas-relief
océanien.
Les Garraches, ces génies à côté des gens du présent,
ces
ennuis
il
côté des autres Italiens,
à
Sur
étaient éclectiques.
les
murs de leur
atelier,
y avait une célèbre formule rassemblant, en
une
litanie
formule « Il
Ange,
de qualité,
disait à
les
grands mérites,
peu près ceci
et la
:
faut au véritable artiste la force de Michel-
perfection de
la
Gorrège,
le
Raphaël,
mouvement du
d'André del Sarté.
du
grâce
la
Tintoret,
le
dessin
»
Cela était touchantjbien intentionné
et naïf ces :
qualités émanaient de l'âme de ces génies, et seul le
procédé s'apprend.
On peut
dire
:
«
Enlever
les
clairs sur clairs
294
l'art idéaliste et mystique
comme
Corrège,
bleutez les fonds derrière une
comme
figure unique et sans action, et,
quand
la tête et le geste
la
Joconde
même la constituent seule, noyez le d'ombre, comme dans le Précurseur. On sion et
attribuer la forme de la
décoratives,
et' dire
flamme
que
les
agitée
coudes
torse
peut
aux figures
et les
genoux
On
doivent être écrasés un peu, pour l'élégance.
apprend une technie
âme
;
;
suffisent à l'expres-
on ne décalque pas une
d'après une âme.
Toutefois, l'artiste doit se forcer à sentir cano-
niquement, c'esl-à-dire à penser beau idéal, et
dans
les
conditions
et à
mêmes où
les
œuvrer génies
pensèrent et œuvrèrent.
Le plus répété des thèmes,
Madone permet
la
d'exprimer des sentiments vivants
vrais.
et
Les
Italiens primitifs l'ont faite grave et consciente
du
mystère quil'a honorée; lesautreslavirentsereine, avec des traits d'immobile joie.
peut hardiment évoquer devant le
Calvaire et réaliser ainsi
mais
la
un
yeux de Marie,
efl'roi
indicible,
Vierge restera belle. Le point d'art d'une
expression est celui Est-ce que tout l'œil
Un contemporain les
des
le
oîi elle n'enlaidit
monde
femmes des
yeux de Madeleine?
effets
pas
la
forme.
flotter
dans
transposables
aux
n'a pas
vu
295
DE LA TRADITION
Avec ses
on
l'œil des fait
lasses des les
mères
et le visages des religieu-
une madone
mondaines on
vieux prêtres on
avec
;
les
expressions
une repentie. Avec
fait
de nobles saints. Ai -je
fait
dit, en
cetteaccumulationdedétails,que,la jeunesse
étant
une condition de
une condition de où
la
la figure,
Beauté
et le patriciat
n'y a que
il
deux cas
l'on puisse reproduire la vieillesse et la basse
humanité: quand l'une exprime
la fin
d'une vie
mystique, quand l'autre accomplit un acte de piété. C'est la divine faculté de la religion d'embellir
tout ce qu'elle englobe giosité qui
;
ou, mieux, c'est la reli-
comme
apparaît
l'état
d'âme
le
plus
noble où l'homme se puisse trouver mieux vaut manant à genoux que noble arrogant à cheval. La filiation du présent aux traditions s'opère sur le plan des pérennités de l'âme humaine à :
;
travers
les
formes
modifiées,
constitutifs de l'être se retrouvent,
les
sentiments
semblables en
puissance, différentiés seulement d'expression.
Les
mêmes
mêmes
désirs,
les
mêmes
noblesses,
agitèrent l'âme de
les
la
Renais-
sance se disputent encore l'âme actuelle;
l'artiste
fièvres qui
doit voir avec l'œil de l'esprit, et transporter
dans
comme
ditHamlet,
le style cette réalité
de l'âme
qui est la matière seconde de toute œuvre.
XV
DE LA MORALE
Les rapports de
l'idée
morale
de
et
l'idée
esthétique, en perpétuel conflit, ne furent jamais réglés.
Deux fanatismes opposés
s'augmentent chacun,
au
lieu
en vérité unificatrice. Mysticité
à
l'un
de et
l'autre
résoudre
se
perversité
se
regardent, inséparahles autant qu'opposées, comme
Modestie Il
et
Vanité de Léonard.
faudrait
trouver une
oeuvre
perversité pour résoudre le problème.
typique Il
y a des
Rops qui sont des crimes, surtout parce blasphèment atrocement dans
le
xvni*
siècle,
perverse et je ne Si
la
;
il
de
qu'ils
y a des lascivités
mais je cherche l'œuvre
trouve pas.
on déclare pervers, le sourire de
la perversité serait alors
la
Joconde,
seulement la complexité
297
DE LA MORALE
OU encore
ment
de sa Norme, à rebrousser
Or
Etymologiqne-
l'hésitation expressive.
la perversité consiste à
détourner une chose le
sens harmonique.
ne s'applique pas au Précurseur. Si
ceci
la
perversité réside dans la forme, elle devient relative
aux notions du spectateur. Des incultivés consi-
comme une
déreront l'Androgyne
du sexe
différentiation
Funité
est
;
déviation à la
ce qui équivaut à dire que
une déformation
du
binaire.
En
général, nos jugements sont faits de nos impulsions, et
ceux qui voient Sodome à propos de cette
suprême pureté, l'Androgyne, sont simplement des gens à sodomie latente. Car
il
faudrait accuser
tous les maîtres, les plus grands, et leur biographie étant connue
créance à de
ne nous permet pas de donner telles
Le Phèdre
et
calomnies.
/e
Banquet de Platon
révèlent,
sans doute, l'abominable erreur des Ioniens. Mais le
Christianisme a sanctifié TAndrogyne en faisant
l'Ange
;
et l'Ange, c'est le
dogme
plastique. Ainsi
des formes réelles et harmoniques ne sauraient être perverses
éléments
l'expression pourrait receler des
;
blâmables
;
comment
incriminer un
caractère aussi impressif que celui d'un sourire
ou d'un regard qui
regarde.
?
Là encore
Oninla
tout
dépend de
munda mundis 17»
;
celui
ormila
298
l'art ioéaliste et mystique
immunda immundis. Jacopona Thérèse
sainte
accumulé
ont
comme
da Todi
expressions
les
rendre leur amour de Dieu.
passionnelles pour
L'audace des mystiques dépasse celle des poètes; s'étonne que
et l'on
mer que par
les
qui ne peut s'expri-
l'artiste,
formes
ne ren-
et les couleurs,
contre pas des effets de concupiscence, chaque
de la beauté.
qu'il réalise
que notre désir
s'éveille
Il
fois
est fatal et légitime
aux belles formes
:
il
est
nécessaire qu'il se subordonne aux beaux senti-
ments
:
il
est
suprême des
mieux encore
belles idées. Mais, esthétiquement,
pour manifester une liser
charme
qu'il subisse le
par l'expression
idée, ;
il
faut la sentimenta-
la
et
beauté des
idées
mystiques s'exprime parla beauté des formes. ce sont les yeux
ou plutôt
Ici,
regardeurs qui sont coupables,
est-ce cetfe infériorité
de ne pouvoir rien
sentir,
où nous sommes
que sur
portées
trois
simultanées, dont une seule est pure
?
Toutefois, pour descendre à l'acception courante
du mot,
la perversité consisterait à s'adresser à
l'instinctivité, à
ce sens,
le
émouvoir animalement; mais, en
tableau patriotique est
semblable au tableau la partie brutale
La morale de
lascif
;
une opération
tous les deux visent
du public. l'artiste s'appelle le style
;
et, s'il
299
DE LA MORALE
ne met en son œuvre rien qui ne disconvienne à
un
vitrail
ou à une fresque, qu'il
seuls juges
chargent
soit
en paix
!
Les
sont les anges et ce sont eux qui se
du péché d'androgynisme, qui
façon de les prier.
est
la
XVI
DE LA LUCIDITE
L'art chez les anciens se greffe sur les institutions politiques et fait corps avec elles.
La grande
peinture fut publique, monumentale et exclusive-
ment
décorative. Les Grecs étaient trop excellents
sculpteurs pour n'être pas parfaits dessinateurs leur trait vaut le nôtre
Siudli
le
montre.
Ils
sous sa forme, non
Hercule
n'est
;
une
visite
ont traité la figure humaine, individuelle, mais typique.
pas un
individu,
abstrait qui réunit les traits
Ce qu'on Anciens
est
;
au musée degli
un
c'est
généraux de
pourrait appeler
perdu pour nous
le
être
la force.
grand art des
et les restitutions
archéologiques ne nous montrent que les chefs-
d'œuvre déclarés et
tels
par
la
plume des rhéteurs
qu'on ne peut juger sur les éloges
pompeux
i
301
DE LA LUCIDITÉ
que
les
poètes en
c'est l'art
ont
fait.
Ce qui nous reste, et Pompéi
Herculanum
domestique.
sont là qui nous donnent sinon
célèbres et l'expression c'est
la
du goût général. Toutefois,
plume même de
sa conception
plus haut point
le
du moins des copies des œuvres
de perfection,
nous dira
l'antiquité qui
du beau.
Le concept grec est parallèle à la nature, comme sa ligne monumentale parallèle à la terre. Dans un pays où Iharmonie était la religion d'Etat, l'art
ne pouvait être qu'unitaire,
l'artiste
et
ne
devait avoir pour but «jue produire l'impression
de sérénité. Parcourez l'Anthologie
que ce qu'on loue nous appelons l'imitation de
un peu
le
la
et
vous verrez
plus, c'est rillusion, ce
le
rendu,
ce
qu'on a
que
nommé
nature. Pline, dans ses phrases
indécises, et, Cicéron, dans ses Verrines,
ne sont élogieux que pour l'excellence de cution qui leur paraît supérieure
à
l'exé-
l'invention.
Lorsque Quintilien parle des peintres comparés aux orateurs,
Dans
le
c'est
dialogue
Socrate demande le
dans
le
même
rapporté
sens.
par
Xénophon,
à Parrhasius de faire
du visage
miroir de l'âme. Aristote trouve que l'expression
morale manque à Zeuxis. Mais Socrate
et Aristote
sont des esprits supérieurs de beaucoup à leurs
302
l'art idéaliste et mystique
contemporains
dont
et
les
dépassaient le
idées
siècle. L'artiste grec,
ayant à exprimer un senti-
ment
C'est
élude.
violent,
marbres d'Egine, que
l'on
Munich, devant
à
comprend
la
les
méthode
grecque, dans la représentation des passions. Toutes les
têtes
de lignes, tandis que
calmes
sont
mouvement du corps donne l'expression
le
appelle
d'ensemble. Et cela n'est pas vrai
seulement de Fart primitif
:
la,
Niobê, par exemple,
par sa pose, mais décollez
est pathétique et
qu'on
ce
vous n'y verrez certes pas
le
la tête
désespoir d'une
mère.
Ce
n'est qu'à
un Laocoon
dans
les afîres
douleur. Ce spectacle eût été insupportable
la
pour
l'on verra
se crisper et hurler
se contracter,
de
Rome que
les Grecs.
Mais, à côté de la bêtise
humaine
l'art
sacerdotal, la sculpture
:
agissait sur la peinture qu'ache-
taient les particuliers.
Le grand ouvrage de M. Helbig sur la peinture campanienne démontre l'admiration des Anciens pour
le
trompe
l'œil, et
M. Desgoffe leur eût semblé
un maître incomparable.
Ce
que
Philostrate
décrit avec le plus de plaisir et de soin, c'est Tin-
carnat
d'une
pomme,
le
caillé
du fromage,
la
goutte de rosée perlant sur un fruit, une araignée
303
DE LA LUCIDITÉ
d'une minutieuse exécution
;
et, lorsqu'il s'extasie
Andromède contemplant dans
devant Persée
et
l'eau la tète de
Méduse,
qu'ils
ne sauraient regar-
der en face sans danger, c'est bien moins l'ingé-
que
niosité de la composition qu'il admire,
le reflet
habilement produit. Les bodegones, ou tableaux de salle à manger, remplissent plusieurs salles au
Musée de Naples, et nul doute que, aux yeux des romains, La Berge, Huysum, Weenix n'eussent paru de grands
artistes.
Quant aux œuvres
véritables, elles
nous ont
été
racontées par les sophistes, et nous ne pouvons rien en inférer, légitimement.
gnage de Pline, une œuvre
D'après
le
témoi-
pouvait être
d'art
inférieure à la description qu'elle avait inspirée.
De
là,
une émulation qui pousse
mettre dans
le
indépendamment de réalisé.
«
le
rhétheur à
tableau tout ce qu'il a dans la tête, ce que
le
Tout ce que peuvent
peintre a les
Hermogène,
discours le peut,
dit
sert
comme
amours d'Hysminè
dans
les
le
non seule-
ment Vecphrasis
et
déjà
peintres,
d'ornement aux contes, et
dHys-
minas ; mais elle est un genre littéraire, un exercice qu'Hermogène distingue avec précision des autres. La subtilité que l'on a reprochée se trouve à chaque instant dans Vecphrasis. La
304
l'art idéaliste et mystique
Diane de Chios
paraissait triste
entraient dans le Temple,
Une femme troyenne
sortaient.
sant la base,
c'est, dit
ceux
qui
a
en
un pied dépas-
Libanius, qu'une captive,
une femme n'ayant plus de la terre de ses
à
gaie à ceux qui
deux pieds
patrie,
ne touche pas
enfin,
et,
;
Alexandre
d'Aphrodisias donne pour raison de la nudité des
dieux que
c'est là le
symbole de l'innocence.
Montalembert prétend que,
si
dans
la
»
chaire du
Baptistère de Pise, Nicolas Pisano a représenté le
po
Christ les bras horizontalement étendus, c'est r
embrasser l'humanité tout entière dans
Rédemption
et
;
il
ajoute
«
:
Le
la
critique est alors
doublé d'un voyant qui cherche dans l'œuvre d'art
le
voyant,
symbole de sa
foi.
» Cette épithète de
la science positiviste la jette à tout écri-
vain catholique. J'ai entendu professer, à l'Ecole
que
des Chartes, était
le
symbolisme du moyen-àge
une création des archéologues, et que les
sculptures de
nos cathédrales n'avaient aucun
système suivi
et constant.
tation facile la
!
Grave erreur,
et réfu-
Les dix-huit cent quatorze statues
de'
cathédrale de Chartres ne sont que la reproduc-
tion figurée
du Spéculum Unlversale de Vincent
Beauvais. La cathédrale de Laon
le
abrégé, celle de Reiras montre
miroir
le
contient eni histo-a
30S
DE LA LUCIDITÉ
rique
développé extrêmement aux dépens
miroir naturel Il
et surtout
du miroir doctrinal.
n'y a qu'à lire V Encijchypèdie
saint Louis
pour
chons dans
la
boles de notre
du
du précepteur de
se convaincre que, si
nous cher-
sculpture du moyen-âge les foi, c'est qu'ils
sym-
y sont et que nous
ne sommes point des voyants^ mais simplement des clairvoyants. 11
et
y a donc eu, à toute époque, un art sacerdotal art commercial.
un
Tout rapprochement impossible entre de Zeuxi-i
et les
les Raisins
Noces Aldohrandines
;
entre les
pastiches de l'Espagnolet par Ribot et la sirène de
Burne Jones. Séparer afin
du pur froment,
l'ivraie
que nul n'ignore qui sont
marchands du temple
les prêtres et
qui
vœu. Donc, que l'artiste se juge lui-même est-il prêtre ? qu'il nous montre ses Dieux. Est il
sont
les
:
voilà le
:
industriel ? qu'il cesse de voler et
qu'il
un
prestige sacré
continue à tenir les articles portraits,
paysage, patrie,
Beaux- Arts.
et
autres
numéros du magasin des
XVII
DE LA GLOIRE
Les Sermonnaires de tout temps fulminèrent avec aisance sur la vaine
mieux
fait
de
gloire
eussent
ils
;
nier la gloire dans la vanité et de
montrer qu'elle doit
être l'anticipation
Cherchez ce que sont devenus Sylvestre du dessin
;
ils
dorment dans
boutiques, pour Toeil du
du
vieillard
le
salut.
Armand
les
fond des
lubrique, et
c'est tout.
La fut
postérité fait justice des indignes, et ce qui
composé pour
flatter
une passion basse a péri
avec son occasion. La gloire ne nimbe d'un or indestructible
que
les
pour désigner coup
succès.
et
il
faudrait
La renommée,
un mot
c'est
beau-
et notoriété, insuffisant; réputation est
;
grave
le
purs génies,
;
engouement conviendrait à
ce
bien
phénomène
307
DE LA GLOIRE
par lequel
homme,
public,
le
met au pavois un
séduit,
sans valeur véritable.
Prétendre que
jugement des
le
siècles soit équi-
table, ce serait oublier qu'il s'agit d'un
humain,
que
et
la
jugement
mémoire universelle
retient
peu de noms.
Combien
sont-ils
qui connaissent Melozzo da
Forli,
ce radieux génie, et Signorelli, ce Michel-
Ange
antérieur à
siècle
Qui
"?
l'autre
se doute,
la critique d'art,
gieux artiste
?
parmi
les
dun Bénozzo
En
sont-ils
consiste-t-elle à
gloire
presque d'un
rédacteurs de
Gozzoli, ce prodi-
moins grands,
être
demi-
connu de
et
tous,
la
ou
adoré de quelques-uns?
La pratique répond nettement qu'il n'y a aucun plaisir à être connu du nombre, et que seuls les pairs nous réconfortent, en nous louant. je
me
Du
reste,
risque à rabaisser la notion de gloire, en
notion d'hygiène de la production.
La
gloire nécessaire est cette approbation qui
confirme un créateur dans sa voie.
comme
la
compris
et
Il
a besoin,
femme, d'un milieu fomentateur où, aimé,
il
trouve l'appui mental d'une
communion. Un ami vaut mieux que cent articles, et dix
amis que dix mille
articles, et j'entends, ici^
amis de l'œuvre plus que de l'homme, car
il
faut
l'art idéaliste et mystique
368 séparer
les
malgré
ici,
l'avis
wagnérien. L'œuvre
d'art, à pe-î près toujours, dépasse celui qui la
au lieu que
duit,
complètement
les
lettres
pro-
n'expriment jamais
à cause de la surabon-
l'écrivain,
dance d'idées conscientes
qu'il lui
tandis
faut,
que l'homme du dessin œuvre en un demi-som-
nambulisme.
Veut on savoir
renommée
nelle
?
la plus
solide base d'une éter-
qu'on cherche ce qui survit aux
races et aux cités
leur
:
religion, cette partie
religion
;
et,
dans
la
semblable en tout temps, en
tout lieu, l'ésotérisme, patrimoine
commun,
diver-
par les symboles, mais permanent à travers
sifié
la variabilité des formes.
La et
gloire consentie
vraiment
les
mais, parce que être
petit
nombre
ce sont des génies,
le ils
est sûre
;
monde
;
n'ont pu
compris de beaucoup.
La élite
du
génies ont étonné tout
difficulté se ;
on ne saurait
ni de littérateurs,
prétendent
voit à la spécification de cette la ni
composer de professionnels, de philosophes et ceux
à l'esthétique
qi
sont bien divers et diver-
gents d'opinion. «
a dit
Le beau
est ce qui plaît à la vertu éclairée, »
quelqu'un, définition superficielle et qui ne
guide pas.
DE LA GLOIRE
309
Plus sûres que les avis des vivants, les œuvres des grands morts
sont là pour avertir de ce qui
rapproche ou détourne une œuvre de sa perfection.
où
Les chefs d'œuvre sont
l'artiste
de touche
les pierres
éprouvera par comparaison
de ce qu'il produit; et qu'il
soit
la
valeur
persuadé que
continuer la version de beauté d un maître, c'est
conquérir aussi quelque chose de son immortalité.
La
gloire obtenue
par une chevalerie d'idéal,
la
gloire où l'on parvient dans l'armure complète de
son idée, faits
la gloire
méritée par des prouesses, des
d'œuvre aux tournois du
auguste
et
courtisan
réel, est
d'un salutaire exemple. de son époque,
une chose
Mais celui,
complaisant
de
son
mauvais goût, valet de ses manies, qui conquiert de honteuses palmes, au prix du sacrilège
et
de la
profanation, celui-là sera balayé par les réactions
du goût. Il
faut choisir entre son
temps
et
le
temps,
entre son siècle et les siècles, entre sa patrie et l'univers, entre
maintenant
et toujours; et,
comme
je
pressais tout à l'heure l'artiste de se décider
et
franchement de s'avouer, ou aspirant à
trise
ou emporocralique
l'immédiatité du «ïiire la
vogue
;
la prê-
je le presse d'o})ter entre
succès et la glorieuse
et le vrai laurier*
surviej
XVIII
DU PATHETIQUE
TAr^ roma7%tique, exprimait le désir d'une sorte de musée secret, non pas aussi assommant que celui de Naples, Baudelaire, en son volume,
mais réunissant
les
œuvres expressives de
la
passion. Est-ce par une idéalité inconsciente que l'artiste
d'aucun temps n'a rendu l'amour, ou bien est-ce impuissance à saisir
la
forme d'un phénomène
aussi vif?
Je
ne connais dans tout
peinture passionnelle a dix-huit ans, à
:
l'art
du Giorgon
italien ;
on
la voyait,
une exposition rétrospective,
y au profit des Alsaciens-Lorrains dans
il
qu'une
la
salle
des Etats,
En
ce temps, j'avais l'honneur
de promener
i
bV PATHÉTIQUE
311
J.-B. d'Aurevilly à travers l'Art contemporain, et
me
je
souviens de son impression extraordinaire
devant ce tableau qui appartient à un particulier.
Un homme mûr, tête
mouvement
mais encore
possessif
il
très vivant, ù la
un débris ancien
assis sur
est
fière,
pose
les bras
;
d'un
sur l'épaule
d'ane jeune femme, tandis que, debout, un per-
sonnage au costume de pèlerin sorte
On
de bulle.
Rome
obligeant
bine.
Quoi
tant
Le de
en
soit
de
à chasser sa concula
date et du
signification dramatique
historique, la rable.
un podestat
qu'il
lui présente une une sommation de
croirait à
geste de
l'homme sur
sa jeunesse
enthousiasmait
le
et
est
fait
admi-
le retour, protes-
de sa volonté d'aimer,
Connétable,
qui
déjà
luttait
contre la vieillesse et la terrassait, dès que son
regard trouvait de beaux yeux, une belle chair oii
appuyer son
Le
baiser,
désir.
cette
caresse intense et cependant
plastique, attend encore sa forme chef-d'œuvrale.
Souvent, s'adresse
l'artiste
ques Corrège, Tassaert,
songe à donner du désir
et
au concupiscible. Jamais, malgré quelquelques Jules Romain, quelques
quelques
représentation
Rops,
il
franchement
ne s'attaque à passionnelle
cependant; quel thème plus appuyé sur la
;
la et,
réalité.
312
l'art IDÉAliSTE ET MYSTIQUE
quel
phénomène plus
plus
commode que l'amour
fréquent, quelle constatation
une volonté d'au-delà d'un
élément
sexuel ? Peut-être
ici
s'oppose-t-elle à l'intrusion
dans
inférieur
le
domaine
comme on le
représentations idéales,
de Tascèse magique qui, malgré efforts vulgarisateurs, résiste et
les
des
sent au cours
bévues elles
garde ses secrets.
Cependant l'élément concupiscentiel apparaît
visi-
blement inférieur à l'élément passionnel. Pourquoi transcription plastique et
alors ne pas tenter la
picturale des
embrassements nobles?
jamais soulever une énigme sans car on ne sait pas ce que
Il
ne faut
résoudre,
la
moindre élément
le
interrogatif engendre de désordres dans certains esprits.
Ici,
poserai
cette
est
me
forcé de
citer
moi-même,
je pro-
simple considération que l'amour
un succédané de
l'âme humaine
et ce
l'art,
que
l'écho de la poésie dans
l'être
général peut maté-
rialiser de rêve. La nature a donné l'instinct et
spasme, l'alchimie de l'Art en a la volupté, qui sont
du Nahash
deux
Ce
originel.
l'amour représente
le
arts,
fait la
deux sublimations
serait
donc parce que
cynétisme esthétique,
à-dire l'efiortsubstantiel d'unification et qu'il
Car,
y aurait double empoi avec si
la
musique
le
passion et
c'est-
momentanée laj
musique.
est la volupté esthétique,
bu Pathétique
âlâ
l'amour pourrait bien être une musique substantielle
dès lors, seraient ruinés les vieux
et,
;
songes, au
nom
men-
desquels tant d'existences furent
gâchées.
La connexité de
musique
la
et
de l'amour
résulte, d'abord, de la singulière identité entre le
processus nerveux de la
de l'harmonie
musique que
j'ai
la
;
formules
et les
on n'observe pas dans
ensuite,
la
même lacune d'expression passionnelle
relevée
pour
chercherait vainement
du dessin. On
arts
les
un groupe dans
qui illustra virtuellement et
femme
l'art entier
second acte de Tristan
le
Yseult, le réveil de Brunenhild,
l'hymne
à
Vénus de Tannhaûser. J'insiste sur ce terrain non foulé de l'expression passionnelle par dessin
;
mais
j'y insiste
avec
de beauté, de noblesse, de de
la
les
style, q :e je
peinture mythique. Ce qui,
se concrétise
en beauté dans un
se transposer dans tous les autres j'invite
l'artiste inquiet
le
mêmes obligations
art^ ;
réclame
comme
sujet,
doit pouvoir
par conséquent,
de suivre des voies trop
tracées où les chefs-d'œuvre précédents écrasent, je
l'invite
à faire passer
dans
les
yeux de
figures ce qui se trouve dans Chopin, dans ïîiann,
dans
les
ses
Schu-
derniers quatuors de Beethoven»
L6 thème qui devrait séduire entre tous, c'est t9
l'art idéaliste et mystique
314 la
tête
d'expression
et,
depuis
le
cahier
de
M. Lebrun, peintre du Roi, nul n'a traduit que des états d'âme d'un individualisme insuffisant.
XIX
DU SUJET
En
toutes matières, l'enseignement détermine
puissamment
l'avenir
de
l'élève,
et
les
fautes
d'une génération incombent toujours à ses éducateurs.
N'envisageons pour un
de l'Ecole décisif de
moment que
au concours.
spéciale dicte les sujets et les
folie
au
des Beaux-Arts, arrivons
l'entraînement:
cours
les
point
Quelle
emprunte à
des domaines incompréhensibles, sans une haute
un jeune homme, qui ignore la mythique, de dessiner un Orphée, un Prométhée, ou bien d'illustrer un verset, incompréhensible culture.
Demander
à
souvent, de la Bible,
vue ne
intellectuel et signifie
Au
serait
probant au point de
archéologique à la
fois,
mais
rien par rapport aux Arts du dessin.
contraire,
si
je dis à
un
élève
:
par une ou plusieurs figures, la joie,
exprimez, la terreur,
316 la
l'art idéaliste et mystique
supplication,
piété, la
à montrer
courage, je
le
le
dedans de lui-même
il
faut
le force
et à
donner sa
les
sentiments
mesure.
En
art,
commencer par
précis, schématiques,
pour aboutir plus tard aux
formules complexes, ambiguës faut
composer,
commençant,
en
linéaire et n'arriver
même
de
;
qu'il
d'une façon
que tard à l'emploi du
clair-
obscur.
Ce qui devrait dra
le
dans
être la règle des
concours devien-
salut de plusieurs, empêchés de produire le
sens harmonique
ou
—
subtil.
Cette
expression des états typiques de l'àme, obtenue
en formule drapée ou nue, apparaît plus sûr où
l'artiste
se souvienne,
surtout en statuaire, que le
vement sentimentalisé périphérique.
En
doit
outre,
mou-
d'une façon
signifier
mouvement de
le
la
principale détermine déjà, dans une large
figure
mesure, celui des figures corollaires
au point de vue de tableau taire
le terrain le
puisse marcher, pourvu qu'il
de
;
de
même,
la couleur, tous les tons
d'un
doivent être la dégradation complémenla
figure
principale
:
telle
la
semblable
orchestration de l'ordonnance des masses et des teintes.
On
le
voit,
la
s'applique à cette matière
plus
extrême
du goût,
logique
qui, à en croire
317
DU SUJET serait réfractaire à toute
les imbéciles,
Du
sation.
reste,
passif écho
vérifier, d'après les
de n'être pas
afin
l'artiste,
d'une voix
même
dogmatile
autorisée n'a qu'à
œuvres canoniques de son
art,
ce que valent ces préceptes.
me
Je veux être profitable et
d'étonner
une des conséquences de
:
d'une doctrine,
ment
soucie assez peu
l'engrenage
c'est
la
vérité
fatal, l'annelle-
obligatoire, entre les points à
démontrer qui
forcent à des répétitions trop fréquentes.
Considérant, selon tale,
cette
méthode expérimen-
formule rationnelle du moment,
d'œuvre
comme
phénomènes, comme des
des
expériences, je leur applique résulte Il
certain qa'à exécution
;
marbre
extérieures
que l'âme et ;
sur la
enfin
que
der à la figuration de
de raison à reproduire
les
même
inégale,
est plus difficile à fixer
à figer
modes d'une
toile
le
la vie
les
saison,
les
dans
formes
commande comman-
êtres, doit ;
qu'il n'y a pas plus
mœurs que plus
éléments transitoires, plus
l'avenir lintérêl et le
que
la beauté, qui
au classement extérieur des
les
déterminisme qui
religieux élève le pinceau et le ciseau qui
l'abordent le
le
pour tout esprit sensé de leur étude.
est
thème
les chefs-
il
d'un temps que l'artiste
élague
prolonge dans
rayonnement de son œuvre 18»
;
l'art idéaliste et mystique
318
que
enfin,
met
la
même
la théologie
hiérarchie des matières, qui
en tête de
la
culture intellectuelle,
instaure aussi l'expression religieuse, par-dessus toutes
mais qu'on ne se trompe pas
autres,
les
sur cette proclamation de l'excellence mystique.
Une
divinité sort des formes, et,
si
beauté
la
pouvait n'être que belle, elle serait encore l'absolu matériel;
mentale,
un
encore
serait
que
Elle est plus
attribue
beauté pouvait n'être que senti-
la
si
elle
rôle
cela,
l'absolu
du cœur.
puisque sa destination
lui
médian entre nos aspirations
et
la réalité.
Celui qui sera assez lucide pour se souvenir de cette
formule
substance
:
Beauté
« la
celui-là
»,
œuvre valable pour
fera les
est la théologie de la
indubitablement une à venir, car les
siècles
théologales vertus s'appliquent à tous les actes
de l'homme
;
et
quel acte égale l'œuvre
!
Il
faut
donc croire au Verbe de cette Eglise des Génies qui promulgue ses Bulles perpétuelles aux Pinaco-
thèques la
et
aux Glyptothèques
promesse
qui les faut,
tacite qu'ils
;
il
faut espérer dans
ont donnée à tous ceux
suivraient en leur effort de lumière
enfin,
aimer
l'idéal,
afin
que
le
génie se produise par l'enthousiasme, autres miracles se produisent par
;
il
miracle du
comme
la prière.
les
XX
DU DIVIN
On
entend, en ésotérisme catholique, par œuvre
des trois personnes, la succession substantielle, individuelle et abstraite, des manifestations d'une idée,
selon l'économie de la création où Dieu le
Père donna et
Dieu
le
la Réalité
Dieu
le Fils, la
Charité
;
Saint-Esprit, l'Esprit ou Perfection.
On entend
aussi, sous cette
trois âges évolutifs de
Le
;
dénomination,
les
Thumanité.
réel aurait eu son
apogée entre
le
déluge
et
la venue du Christ. L'animisme et l'individualisme
chrétien seront couronnés par une perfection de
l'entendement, effluve de FEsprit-Saint, recteur à son tour d'une période effets
pectives,
pour que
accomplissant
et
déjà produits. J'ouvre l'on sente
ici ;
les
ces célestes pers-
que
les
chose» ne
320
L ART IDÉALISTE ET MYSTIQUE
peuvent pas rester ce qu'elles sont,
nement va
stupéfiant les courtes habiletés
monde
intellectuel d'une
pourquoi,
suivant
coinrne au soir,
de tempête,
les
pour
esquifs,
vents et des
la
s'il
à
qu'un évé-
secouant
et
façon
terrible.
comparaison
le
Voilà
d'Eschyle,
y a de la houle et une menace
naates amarrent solidement leur-
les
sauver de
la
double fureur des
flots, l'esthète initié, doit
ses notions, les appuyer, résister
et
se produire démentant la prudence,
les
rassembler
affermir,
de
afin
tourmente qui se forme, marche
la
et
va crouler. C'est l'art
pour
soit
cette fatalité
sauvé de
la
que
je
prêche
:
afin
que
grande intumescence des
peuples.
Première condition de ce salut techniciens reconnaissent
la
:
faut que les
il
règle esthétiq
:e
;
il
faut que les idéalistes soient d'infaillibles techni-
ciens
sinon,
;
mission
ils
dcNouah
ne rempliront pas leur grande et
de sauveurs de
ceux qui savent sculpter saient à
la
Beauté,
s'ils
la
lumière. Si
et peindre, se convertis-
venaient à
l'idéal, avi^c
leur excellent procédé, quelle floraison magnifique
précéderait la nuit de l'an deux mil.
Le nabi, de
la
serait-il plus
éloquent que tous ceux
Judée, ne réveillerait pas ces chiens dor-
DU DIVIN
mants d'Eschaya, ces
tièdes
321 neutres de
ces
et
du Dante qui clieminent leur
l'enfer
vie et leur
œuvre, d'un pas de promenade.
Combien ont reçu
le
don dn Pèie
qui est la
sans en user dignement, êtres singuliers
Réalité,
qui savent une langue, el ignorent ce qu'elle doit dire,
et
arrangeurs de mots n'ayant pas d'idées, œils
mains sans pensée.
Comme un un peu de
peu
de cervelle s'unit rarement à
dessin, quel
divorce
triste
entre la
faculté de s'exprimer et la plénitude de pensée
Réconcilier l'idée et la forme, la technie, l'art et l'idéal
:
tel le
le
sentiment
!
et
devoir où quicon-
que a reçu d'En Haut l'amour de
la
beauté doit
travailler de ses forces entières.
Trop longtemps a duré ce divorce scandaleux entre la pensée esthétique et son expression, entre le
rêve et la réalisation, entre l'idéologie
et
la
plastique. Il
tion,
faut que surgisse une cohorte de réconcilia-
unephalange unificatrice de ces deux éléments
stériles,
la plus
Le
séparément
et qui, unis,
aboutiraient à
Père, auteur du réel, incarne l'autorité. Or
l'autorité
morts
;
rayonnante lumière. en matière esthétique, appartient aux
et à leurs
œuvres
;
elle
ne se présente pas,
322
l'art idéaliste et mystique
impérieuse
et vivante,
sous la forme d'une indivi-
dualité peut-être antipathique. L'autorité, c'est la
voix de la tradition, l'expérience, l'acquêt inesti-
mable de tout
l'effort
humain. Quel fou
se prive-
de cette lumière où s'insurgerait contre ce
rait
salutaire rectorat
?
L'orgueil ne persuade-t-il pas de suivre la voie
de lumière, où
au
effort,
meilleur des races a
le
lieu de se dater de
Ah! misère de
l'être
son pauvre soi-même.
qui n'est que
borne, en sa piètre impression
lampe
;
lui,
l'homme
parfois précieuse et prismatique
le divin
qui s'y est
une
mais,
;
si
ne l'alimente, cette lampe, objet sans clarté
sans
et
marqué son
ne
chaleur,
mérite
qu'on
plus
s'y
arrête. Il
y a dix-neuf siècles que
de la Sainte Trinité,
Dieu
la
seconde personne
le Fils, est
venu sur
la
terre.
A
ce
moment,
les
Esséniens possédaient un
corps de doctrine théologique supérieur au séminrire actuel de
La tion,
Rome.
vérité abstraite n'agissant le
monde
que sur l'excep-
pourrissait, malgré
un groupe de
penseurs aussi illuminés que ceux de
la
Révéla-
tion primitive.
Parmi eux,
les
uns reconnurent
la
nécessité
bù wviN d'évoluer sur
le
32â
plan animique
;
sant à Tinfatuation cérébrale, l'Eglise
les autres, obéis-
séparèrent de
se
commençante.
Loin de moi la pensée d'instruire le procès d'Ammonius Saccas. La primitive Rome a refusé aux intellectuels leur stalle dans le chœur; et les intellectuels n'ont
pas su pardonner cette étroitesse excusable par
son but:
le salut
du plus grand nombre.
L'hérésie n'est jamais qu'un orgueil
cachant sous
les traits
d'une idée
;
il
humain
se
n'y a pas de
raison contre la hiérarchie.
Ce qui a trompé les
les
gnostiques, ç^a été
ancien où
le
Esséniens le
des esprits et celui
des âmes, où ladirection esthétique tion morale, appartenaient le
plus tard,
spectacle du sacerdoce
commandement
Aujourd'hui,
et,
comme la direc-
aux mêmes hommes.
myste va à
la
messe, tient pour
un honneur de la servir et se confesse très humblement à un prêtre dont il ne supporterait pas la conversation
deux minutes.
Ce déplorable divorce entre la pensée théocra» tique et l'action que
Hugues des Païens voulut
conjurer; cet autre divorce entre la perfection intellective et la perfection
Hosencreuz
:
animique, où s'épuisa
voilà la matière de l'effort»
â24
l'art idéaliste et mystique
cependant que
faut
Il
encore une livre, à
fois,
ceux
faut que la latinité finissante
il
épée.
trésors légués,
par
il
;
manifesté'
soit
qui doivent lui succéder,
un temple, une modernes
l'idéal
Il
le
livre,
faut faire l'inventaire des
passé
des conquêtes
et
surtout réaliser dans
faut
un
un mode
susceptible de civiliser les Barbares qui vont venir. Or, l'Art seul peut agir sur le collectif animique, è
défaut de mysticité
nous connaissons tous, des
:
croyants à Phidias, à Léonard, qui n'ont cure de la vérité catholique.
dans
Insufflez
dans
et,
surtout,
la culture esthétique, l'essence théocratique.
Ruinez cution
:
la
la
comme
notion qui s'attache à la bonne exé-
éteindre
subordonner dans
contemporain
l'art
les
le
tradition qui est de le
du
dilettantisme
procédé,
arts à l'Art, c'est-à-dire rentrer
but unique de
considérer
l'effort
l'idéal
architectonique
ou pictural ou plastique. Si l'art est le miroir il
est
doit supporter les
Caritas.
»
du Divin au monde formel,
appellations divines
L'art est
un amour du
rend indulgent aux défauts d'autrui l'artiste
ne
sépare la
^ême
sait quelle distance
créature
h
;
«
Ars
nul plus que
incommensurable
son apogée,
lointaine de son Créateur
:
parfait qui
;
de l'ombre
nulj par conné"'
Dû DIVIN
328
quent, n'est plus averti des devoirs qui incombent à
tout être de valeur et à la spéciale mission de
l'homme de beauté. J'appelle ainsi, celui dont vocation implique une expansion prosélytiste. L'humanité
la
se divise en prêtres et fidèles: prêtre
des expériences, prêtre des hypothèses, prêtre des idées, prêtre des formes, et
c'est-à-dire la série
bien
et
La donc il
chacun
à laquelle
il
a ses ouailles,
peut
laideur le rôle
est
une désharmonie.
de thérapeute
;
L'artiste
par ce qu'il
nous console de ce que nous sommes
un rapprochement de
l'invisible,
nos sens avec des réalités irréalité
et
opère
en satisfaisant
une
de pensée.
de son
les miracles
d'opérer
a
réalise,
d'art, sertissant
Pourquoi n'a-t-on pas dévoilé à les lois
du
faire
procurer de l'élévation d'âme.
effort, le rôle
l'artiste,
avec
bienfaisant qu'il joue,
de bonification qu'il est susceptible
?
Lelaïcisiinea-t-il
vu un danger dans
la religion
du Beau? A-t-il pressenti d'irréductibles adversaires ou mieux le courant de l'erreur a-t-il débordé sur
le
plan esthétique?
Las, l'orgueil n'a rien dit aux artistes
!
Ils
igno-
reront donc toujours leur dignité, leur puissance et
leurs devoirs aussi sublimes que leurs droits. 19
l'art idéaliste et mystique
326
Concevoir
l'idéal
et
le
réaliser reste
la
plus
haute des vocations.
Pour l'éprouver: va aux maîtres, va au chefd'œuvre.
Cède au rabatteur de parlé te parlera, qu'elle pilier,
;
la voix qui
m'a
d'un tableau.
Quand nera
l'idéal
sorte d'une statue, d'un
de
tu l'auras entendue, ton esprit se détour;la
terre
et
tu
prononceras
le
vœu
d'idéalité.
I
i
XXI
EXHORTATION
Artiste, tu es prêtre et,
:
l'Art est le
grand mystère
lorsque ton effort aboutit au chef-d'œuvre,
rayon du divin descend
comme
sur
un
un
autel.
présence réelle de la divinité resplendissante, sous ces
noms suprêmes:
Ange, Beethoven
et
Artiste, tu es roi
Vinci, Raphaël,
Michel-
Wagner. :
l'Art est l'empire véritable
;
main écrit une ligne parfaite, les chérubins eux-mêmes descendent s'y complaire, comme dans un miroir. lorsque ta
Spirituel dessin, ligne d'âme,
forme d'entende-
ment, tu incarnes nos rêves, Samothrace et saint Jean, Sixtine et Cenacolo, saint Ouen, Parsital,
Neuvième Symphonie, Notre-Dame Artiste, tu es il
mage
:
l'Art est le
prouve seul notre immortalité.
!
grand miracle,
328
l'art idéaliste kt mystique
Qui doute encore? Le Giolto a touché
les
stigmates, la Vierge est apparue à Fra Angelico
;
Rembrandt a prouvé la résurrection de Lazare! Réplique aux arguties pédantes, on doute de Moïse, mai^s voici Michel-Ange on méconnaît Jésus, mais voilà Léonard on laïcise tout, l'Art immuable et sacré continue sa prière. et
;
;
Sublimité indicible et sereine, saint Graal toujours rayonnant, ostensoir et relique, oriflamme invaincu, Art tout-puissant, Art-Dieu, je t'adore à
genoux,
dernier reflet d'En-Haut sur
notre
putrescence.
Les rois hébétés
et sordides,
achèvent de mourir sur
devenus citoyens,
pavé des
le
villes
où leur
race a régné.
Les nobles heaument leur blason du bonnet de septembre,
ils
courtisent
stupides, se complaisent
le
aux choses
Les prêtres ont revêtu
ou bien,
peuple,
la livrée
d'écurie.
homicide
;
où
sont donc les insermentés?
Tout
est
pourri,
tout
est
fini,
la
lézarde et fait trembler l'édifice latin
esseulée n'a plus
même,
:
décadence et la croix
à sa garde, l'épée
des
Guise, le fusil d'un chouan. Pleure, Grégoire
VII, ô pape gigantesque, toi
qui eus tout sauvé, pleure, du haut du
ciel,
sur
329
EXHORTATION ton Eglise enténébrée, et
ta colère
vieux Dante, lève-toi
Homère
trône de gloire,
de ton
mêle
toi,
catholique,
et
au désespoir du Buonarotti.
Une lueur pourtant de
lumière, une
la sainte
pâle
couleur a paru, se fonçant... Voici que
gibet
du
le
saint supplice s'étoile d'une fleur.
Miracle
miracle
!
!
une rose
s'élève et s'ouvre
grandissante, s'efforçant d'enserrer, en ses feuilles pieuses,
la
croix
divine du salut
consolée resplendit
monde, Jésus Les
Mages,
Maître; les
;
;
et
la
croix
maudit ce
pas
Jésus n'a
reçoit l'adoration de l'Art.
premiers,
les
Mages,
les
vinrent
au divin
derniers, resteront
ses
enfants.
L'enthousiasme auguste de
l'artiste survit
à la
piété éteinte d'autrefois.
Pitoyables modernes, le néant vous aspire tombez donc sous le poids de votre indignité vos blasphèmes jamais n'effaceront la foi des œuvres, ;
:
ô stériles
!
Vous fermerez Louvre Oui,
officiera, si le
l'archange
couvert le
l'Eglise,
mais
Notre-Dame
le
musée
est profanée.
Strauss a nié, mais Parsifal affirme
de Franck, de
sa
Le
?
;
sublime voix,
et
a
commérage impie du Renan.
L'humanité, ô citoyens, ira toujours à
la
messe,
l'art idéaliste et mystique
33ô
quand
prêtre sera Beethoven, Palestrina
le
ne peut pas athéiser l'organe sublime
:
on
!
Misérables Alberichs, vous ne vaincrez jamais; car
le saint
Georges, ô monstre, l'éternel justicier,
c'est le génie, et le
beau toujours sera Dieu.
Frères de tous les arts, formez une sainte milice
pour
le salut
de
l'idéalité.
Nous sommes peu, mais les anges sont nôtres. Nous n'avons point de chefs mais les vieux maîtres, du haut du paradis, nous guideront vers ;
Montsalvat.
Notre mission a commencé du jour où
phème
honorer
et servir l'Idéal
soyons au moins formes
;
blas-
imparfaits et pécheurs,
preux
des
des couleurs
et
que
;
s'érige
la rose des
en tabernacle,
rédemptrice s'y complaira.
et la croix
Cette Eglise
si
chère, la seule chose auguste de
monde, bannit
ce
le
devint roi; qu une chevalerie paraisse pour
la
Rose
et
croit son
parfum
dangereux.
Auprès
d'elle,
dressons
le
temple de Beauté;
nous œuvrerons aux échos des
non rivaux, l'artiste est
est
un mystère,
miracle
!-
prêtre,
non pas divergents, un roi, un mage, car
le seul
empire véritable,
différents,
un
prières, émules,]
le
car" l'art
grandi
XXII
L APPEL DU GRAAL
Dans^ rèther pur, où ne vibre aucune aile, au-delà des neuf chœurs et du troisième il est une splendeur si radieuse et si cieh sublime que nul esprit ne la peut contempler. Ce feu subtil, cette clarté divine sépare V Absolu du créé. D'innombrables rayons de ce foyer s' épandent et vont extasier Vâme des bienheureux, ou se
—
—
prolongent vers la terre, illuminant d'Abst^^ait les
génies créateurs.
Quand
du Verbe, les Augustes Idées descendent des hauteurs pour s'incarner ici, alors un hosanna indicible s'élève, et le monde ces filles
céleste entier est prosterné.
(1)
Ecrit après une représentation de Lohengrin.
332
l'art idéaliste et mystique
C'est Vidéal, soleil d'Éternité qui échauffe et
féconde de joie et de beauté
les
saints et les
artistes.
Celui qui a reçu
le
baiser de Vidée repousse
la joie vaine des
humains
V au-delà vermeil.^
il
est le
;
il est
le
fiancé de
chevalier d'une pure
pensée. S'il fait servir sa
magique puissance à
satiS"
faire de personnels desseins, son front sitôt terni perdra la trace lumineuse
du baiser séphirien. Mais si, pieux amant des belles Normes^ il sacrifie sans cesse à rori/lamme sa propre gloire et les joies actuelles que
au le
le siècle
décerne
félon, alors de Vidéal la force sans seconde
cuirasse et
plus
le
un mortel,
heaume d'invincibilité ; et les anges eux-mêmes
il
n'est
Vassis-
tent de leur bras.
De Vidéal le merveilleux mystère fut révélé par Mon Seigneur Jésus, lorsqu'il nous enseigna le sacrifice volontai^'e, le don de soi pour le
rachat de
tous.
Artiste qui n'as pas appelé sur ton œuvre le rayon du divin, écoute je révèle ici la récompense promise aux preux de Vidéal. Sais-tu :
que Vart descend du coule
du
soleil
?
ciel,
comme
la vie
nous
Qu'il n'est pas de chef-d'œuvre
L^APPEL
qui ne soit
333
DU GRAAL
d'une idée éternelle
le reflet
?
Que
noïnme Abstrait, peintre ou poète, le c'est un peu de Dieu même, dedans une œuvre. ce qu'o7i
sais-tu
?
Apprends que, si tu crées une forme parfaite, une âme viendra r habiter, et qu'elle âme ! une parcelle de l'Archée.
N'as-tu pas vu briller au regard du saint Jean
même
la subtilité
pas parlé,
la
Samothrace Nikê surhumaine ? ?
fa-t-elle
la
Apprends encore ceci au croulement du monde^ Dieu sauvera fâme des œuvres, comme :
Vâme
des justes.
aura son Louvre et le cœur des chejsadorera pendant ï éternité son Créateur, V artiste comme nous-mêmes. Dieu. Le
ciel
d' œuvre
Ah !
jamais un autre devenir que compagnons, dans que les fils de ton art.
tu n'auras
celui de ton rêve, et d'auti^es le siècle infini,
Prends garde: nul repentir ne vaut contre la félonie ; si tu aimas le laid, tu n'as droit qu'à Venfer. Il en est encore
temps,
préfère
suaves invites des anges conseilleurs les
chanter
le
rappel au divin,
trompette idéale
:
et
:
les
écoute-
sonner
la
334 «
l'art idéaliste et mystique
Rose d'Amour^
encadrez de sourire
la
redoutable croix.
Croix du
salut, purifiez de
larmes la Rose
trop terrestre.
Rose du corps., épanouis ta grâce sur le symbole du supplice accepté. Croix du renoncement, sublimise la vie, apaise ses vertiges et consacre la Rose.
Emmêlez, symbole
très parfait, la charité
au
beau, la pensée à la forme et que la Rose enguir-
lande la croix, de la Rose.
et
que la croix vive au cœur
»
J
TABLE
TABLE
LIVRE
I
LES DEUX ESTHÉTIQUES I.
L'esthétique positiviste
II.
L'esthétique idéaliste
9 38
Théorie de la beauté
107
LIVRE
II
TRIVIUM LES ARTS DE LA PERSONNALITÉ OU INTRINSÈQUES II.
La kaloprosopie La DICTION
145
III.
L'éloquence bt les sept modes
15_
I.
128
LIVRE
o
III
QUADRIVIUM LES ARTS RÉALISATEURS DE LA BEAUTÉ OU EXTRINSÈQUES l'écriture des formes 1.
Architecture
.
,
,
.
165
169
338
TABLE
Sculpture Peinture
178
De Au
la Composition
185
5.
SALON CARRÉ
204
6.
Musique
2. 3.
4.
175
209
LIVRE
III
L'Art mystique
221
XXII I.
II
.
III
IV
.
.
V.
VI
.
VII VIII .
IX
.
.
X. XI.
XII
.
XIII.
XIV.
XV. XVI. XVII. XVIII.
XIX. XX. XXI. XXII.
MÉDITATIONS
De l'unification De l'imitation De la nature De l'aspect actuel De LA VOLONTÉ ESTHÉTIQUE De lérotique De l' aristie De l'originalité De l'ascèse Du SORT De l'effort De la tempérance De LA VOCATION De LA TRADITION De LA morale De la LUCIDITÉ De LA GLOIRE Du PATHÉTIQUE Du SU.IKT
235 239 244 249 '
259
263 268 273
276 280
286 288 292 296
300 306 310 315
Duo EXHO L'API
254
319
A/îO -îf^iOin yj^JOOM^Ol 1
327 331
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