Bibliographie : « Une histoire de l‘esclavage, de l’antiquité à nos jours », C. Delacampagne, éditions Le Livre de Poche références, collection Histoire, 2002, Paris « Les esclaves en Grèce antique », Y. Garlan, édition Maspero, collection « texte à l’appui », 1982, Paris
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Textes antiques témoignant des esclaves : Aristophane, Ménandre, Plaute, Térence ; Textes antiques justifiant l’esclavage : Aristote Pensée abolitionniste : l’argument massue utilisé par les premiers abolitionniste n’est nullement humanitaire, mais bien « pragmatique » et utilitaire : c’est l’argument économique, celui de l’instauration du capitalisme qui exige celle du salariat. Ainsi pour Benjamin franklin, David Hume, Adam Smith, le travail servile est moins moral certes, mais surtout moins rentable, plus coûteux que le « travail libre ». Marx est le premier à théoriser « l’esclavagisme » comme mode de production précédent le féodalisme et le capitalisme (cf Grundrisse et 1° tome du Capital, où il prend en exemple essentiellement la Grèce antique) –133 et –129, conduite par l’esclave Aristonicos, racontée par Strabon. Celle de –73 est la plus célèbre ; elle commence à Capoue près de Naples ; son leader est un esclave-gladiateur thrace, Spartacus. Echappé d’une école de gladiateurs, il parvient avec une trentaine de compagnons à former une armée forte de 20 à 90 000 esclaves. Les affrontements avec la légion romaine est d’une extrême violence, la loi du talion est appliqué de part et d’autre avec cruauté. Mais Spartacus a en tête une vraie stratégie, et ne se contente pas de piller les « braves citoyens » patriciens pour nourrir cette troupe d’insoumis. Cette troupe est essentiellement composée de celtes et de germains, déportés en Italie après les victoires de Marius contre Cimbres et Teutons (-102-101). Pour qu’ils reprennent leur liberté, Spartacus s’efforce de les faire sortir de la péninsule, où ils n’ont aucun avenir, et où il est peu probable que l’empire puisse être abattu. Mais arrivé en Gaule Cisalpine, pour une raison inconnue, il redescend vers la partie méridionale de la péninsule, au lieu soit de marcher sur Rome pour mettre fin à l’impérialisme, soit de quitter le cœur de l’empire. 10 légions sont envoyées contre l’armée des insoumis, qui essayent de se réfugier en Sicile mais échouent du fait de l’abse,nce de navire, vers –71. Spartacus est tué au combat, ses compagnons sont froidement assassinés, 6000 esclaves sont crucifiés « pour l’exemple » le long de la Via Appia » par Crassus, alors que Pompée traque les derniers fugitifs jusqu’en Etrurie. Mais cette révolte des esclaves est d’autant plus frappante et a d’autant plus fait frémir les richards romains qu’elle a donné lieu à une solidarité jusqu’alors méconnue entre esclaves et prolétaires romains libres, affranchis ou « ingénus » (libre de naissance). Le terme latin de prolétaire désigne un homme qui ne possède rien si ce n’est ses fonction reproductrices (organes sexuels : « proles ») et les attributs matériels de sa condition d’exploité (biens nécessaires à l’entretien et la mise en œuvre immédiate de la force de travail qu’il représente : paillasse pour dormir, écuelle et de quoi la remplir chaque soir, 4 murs et un foyer contre le froid en hiver, etc.). entre l’esclave et le prolétaire, il y a une différence juridique mais dans la pratique aucune réelle différence socioéconomique. Il n’y aura plus après la répression de –71 de grande récolte commune esclaves-prolétaires. En revanche, de –50 à 0, des insurrections politiques tournent à la guerre civile à Rome, qui entre dans une ère sécuritaire qui fait écho à notre époque...les partisans d’Octavien, futur empereur Auguste, de même que ceux de son concurrent Sextus Pompée, n’hésitent pas à recruter des esclaves fugitifs, détournant ceux-ci de la lutte de classe et de la conscience de classe en les transformant en mercenaires et en miliciens, au service des puissants, dont les intérêts sont servis par les plus fins intriguants d’entre eux. A partir de l’empire et de 0, on fait en sorte d’adoucir le sort des esclaves, on cesse l’expansion coloniale, et on multiplie les affranchissements. Les liens entre maître et esclaves se désagrègent suite aux révoltes serviles ; en +9, un arrêté est pris qui puni de mort les esclaves qui ne défendraient par leur maître en cas d’agression physique, utilisé pour faire exécuter 400 esclaves par l’armée sous Néron entre +54 et +68. Sous Trajan de +98 à +117, il n’est pas rare que l’esclave d’un maître assassiné soit torturé pour le faire parler (sans même qu’il soit soupçonné). Peu à peu l’Etat impérial va restreindre les droits discrétionnaires que l’aristocratie s’arroge sur le sort de l’esclave. A partir d’Hadrien (+117), le droit de vie et de mort du maître sur l’esclave est restreint : il est interdit de vendre un esclave à un proxénète, à un entrepreneur de combat de gladiateurs, de le soumettre à la castration, de le condamner à mort sans en référer d’abord à un magistrat. Une compilation juridique réalisée sous Justinien vers +600 témoigne de plus de 60 textes de lois concernant la « protection » de l’esclave par rapport au maître à partir de +100. la condition des affranchis aussi s’améliore un peu : à partir d’Auguste, ils ont droit au mariage légal, et accèdent de plein pied à la citoyenneté. Le sort de l’esclave rural se rapproche du paysan libre pauvre. Mais des esclaves sont toujours captures aux marches de l’empire (notamment des goths) et les esclaves continuent de travailler avec des prisonniers de droit commun dans les mines, sont poursuivi comme du bétail lorsqu’ils s’enfuient, emprisonné dans de sombres cachots, torturés, crucifiés, utilisés comme gladiateurs. En revanche, une nouvelle tendance émerge, des esclaves assez riches pour posséder à leur tour des esclaves appelés « assistants ». Avec le stoïcisme qui devient doctrine officielle des Antonins à partir de +100 environ, les choses continuent d’évoluer. Le stoïcisme est apparu en Grèce vers –300, et c’est une philosophie d’époque troublée. Le stoïcisme a des aspects gnostiques profondément anti-matérialistes, de rejet de l’existence ici-bas et d’indifférence au monde, rappelant le bouddhisme, mais aussi une tendance au cosmopolitisme contre les appartenance ethniques etc. Cicéron puis Sénèque reprennent à Rome cette idéologie ; ce dernier remet en question le caractère soit-disant « naturel » de l’esclavage » et de l’asservissement, réfutant la théorie aristotélicienne de l’esclavage, sans rejoindre les cynique pour mépriser les richesses. Pour Sénèque, bien traiter les esclaves et cesser les cruautés gratuites est un moyen de se les attacher et de les rendre plus dociles. C’est là un exemple caractéristique d’un certain « humanisme » conservateur, profondément anti-abolitionniste. Ces réflexions nourriront celles de l’esclave Epictète et de l’empereur Marc Aurèle. Epictète reprend les stoïciens pour minimiser la différence entre le statut social de l’esclave et celui du maître, au prétexte pour le moins oiseux que la liberté socio-économique ne serait qu’une illusion et donc sans valeur profonde, la « vraie liberté » consistant à se libérer des passions ! ! Idéologie on le voit fort éloignée de l’emprise de la nécessité, de la souffrance quotidienne, propre à occuper l’esprit et à divertir de riches patriciens oisifs. Le chef de guerre Marc Aurèle dégouline de bons sentiments conservateurs. La tendance à l’affranchissement des esclaves, à l’acquisition de la citoyenneté par les affranchi ainsi qu’à la citoyenneté romaine accordée partout sur le sol de l’empire (+212) mettant fin au statut de population « libre » colonisée à pour origine le déclin économique de l’empire, des réformes juridiques et des facteurs culturels, notamment l’idéologie stoïcienne des classes dominantes. Contrairement à ce que voudraient certains compilateurs et révisionnistes chrétiens, le christianisme n’a absolument en rien contribué à la disparition de l’esclavage. Ainsi l’Eglise primitive tout en se déclarant en principe favorable à l’affranchissement se garde bien de le faire l’accorder à ses propres esclaves. Au nom de la séparation du spirituel et du temporel, de ce qui est à Dieu ou à césar, les premiers disciples expliquerons à leurs ouailles que si tous sont égaux devant dieu sur terre les esclaves doivent obéir au maître, d’autant plus s’ils sont injustes, le « martyr » et la souffrance terrestre étant une voie privilégiée d’élection divine. Et d e toute façon « il n’y a point d’autorité qui ne vienne de Dieu », donc l’empereur est un intermédiaire terrestre de dieu le père, comme se plait à le répéter très saint Pau-paul aux différentes communautés dans ses épîtreries. Les conciles ne cessent d’appeler l’esclave à l’obéissance au maître, de prêcher la soumission et d’adresser une condamnation morale à tout désir de révolte. Le très chrétien empereur Constantin interdit de poursuivre en justice le maître qui a assassiné son esclave après des sévices sadiques. Cette servilité chrétienne à l’égard
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de l’ordre établi est le corollaire d’une stratégie de conquête du pouvoir, de séduction des dominants, de peur de la répression, et de théologie gnostique. Vers +200 et +300, des affranchis commencent à former une « classe moyenne » accédant parfois même à des fonctions ministérielles ou à la haute fonction publique, alors qu’ils sont en outre très présents dans les activités commerciales et financières. Empereurs et patriciens s’efforcent par conservatisme d’endiguer ce mouvement, par la voie juridique sur l’affranchissement. Les affranchis de 3° génération restent méprisés par la « bonne société », et un racisme classiste s’instaure à travers ce mépris des étrangers non-citoyens, non-intégrés, non-intégrable. Chine : du début de la « civilisation » chinoise à l’époque moderne, des enfants volés sont mutilés pour devenir mendiants professionnels ; Occident médiéval : jusqu’en 1960, les historiens soutenaient volontiers la thèse négationniste de la disparition de l’esclavage à l’époque médiévale après son déclin durant le Bas-Empire, et tant qu’à faire le tout grâce au christianisme bienfaiteur de l’humanité ! ! après +500 donc plus d’esclaves en Occident ? Archi-faux. On doit à Marc Bloch les premières études sérieuses sur la question (sur la formation de la classe servile médiévale et les Colliberti), ainsi qu’à l’historien belge Verlinden (sur l’esclavage médiéval en france, Italie, Espagne et empire byzantin). Même sans jouer le rôle économique prépondérant, « l’esclavage » reste de mise en Europe comme statut juridique distinct jusqu’au 16° siècle, jusqu’à l’époque actuel évidemment du point de vue social. C’est d’ailleurs de ce maintien que provient sa résurgence dans les colonies du Nouveau Monde. Monde chrétien aussi bien que musulman sont esclavagistes et en étroite interaction ; le « servage » se distingue de « l’esclavage » sur le plan juridique et économique, mais il peut largement y être comparé sur le plan social, de même que plus tard une grande partie du salariat. Après Trajan et les dernières conquêtes coloniales romaines, la source de main d’œuvre exploitée se tarit. Pour combler le manque d’esclaves, l’empire envoie dans ses provinces les colons pour cultiver les terres soumises à l’imperium, mais la situation est économiquement si difficile que ceux-ci ne tardent pas à se rapprocher de la condition matérielle des esclaves. A partir de +476, l’empire d’Occident s’effondre après s’être scindé en +395. Les invasions se poursuivent jusqu’en 1000 environ, et se prolongent à partir de +622 par l’expansion de l’Islam (« soumission ») jusqu’en Espagne (+711). Ces invasions ne débouchent pas nécessairement sur l’abolition de l’esclavage, que les germains pratiquent eux-mêmes couramment. Les wisigoths convertis à l’arianisme chrétien soumettent, lors de la conquête de la péninsule ibérique, les juifs qui y vivent à une forme rigoureuse d’esclavage, dont l’Islam les délivrera. Ces invasions et les formes socio-économiques qui les suivent entraînent par ailleurs la ruralisation de la société. Les villes sont détruites, la monnaie se raréfie et l’économie de réseau est désorganisée. Les richards se replient sur leurs vastes domaines fonciers ; les pauvres de leur côté poussés par la famine n’ont d’autre possibilité que d’aller travailler sur ces latifundias, aux conditions dictées par les spoliateurs. Mais dans le même temps, les spoliateurs s’efforcent à la fois d’exploiter au maximum cette main-d’œuvre et de l’attacher à se propriété, pour assurer la continuité des revenus qu’ils en tirent. Pour cela, les dominants utilisent la coercition juridique, à laquelle l’Eglise, précieuse auxiliaire des grands spoliateurs terriens, ajoute l’enseignement de la soumission aux masses. Les premiers serfs sont ainsi des manants (du latin manere : rester, demeurer au même endroit). Vers +700, l’essor du monde arabe entraîne une reprise des exportation d’occident en orient et une reprise économique consécutive. Notamment les exportations d’esclaves, avec pour place principale du marché européen la cité de Verdun à l’époque de Charlemagne. Vers +1000, de nouvelles techniques et le développement des chantiers (notamment au bénéfice de l’Eglise) visant à fonder l’ordre moral et féodal (châteaux) favorise la poursuite de cette prospérité des puissants. Entre 1000 et 1300, explosion démographique et doublement de la population européenne. Les villes renaissent, le commerce avec. La main-d’œuvre libre est plus abondante et donc plus exploitable, concurrençant directement dans un cercle vicieux la main d’œuvre esclave, qui renchérit et est moins facile à acquérir. A côté de ces classes de prolétaires urbains et d’esclaves se développe celle des paysans ruraux manants, de plus en plus nettement enchaînés aux domaines des puissants et de leurs milices. Entre 1000 et 1200, sur fond d’oligarchie instable, le système féodal est instauré, avec l’introduction de règles sociales de domination ritualisée : fief, suzerain, vassal, « hommage », et « serfs ». Ce dernier terme vient bien de la même racine que celui d’esclave, servus. Mais ce sont des paysans libres attachés de force à la terre qu’ils cultivent, et qu’il leur est interdit de quitter, pour le plus grand profit d’un noble, leur « seigneur ». Un système hiérarchique d’une verticalité jamais atteinte se met en place. Le système féodal est à partir de 1200 contesté à la fois par le souverain, dont les grands seigneurs restent eux-mêmes les « vassaux » et par les paysans qui réclament et obtiennent une vague amélioration de leur sort ; le système féodal « à l’état pur » disparaît après 1400, mais se maintient à travers la monarchie, jusqu’à l’époque de l’aristocratie bourgeoise et capitaliste. De 1300 à 1400 environ, une agitation trop rare secoue la société, en même temps que la récession économique et la peste font leurs ravages. Pour en sortir, guerre et expansion coloniale sont préconisés, aboutissant notamment à la découverte des Amériques. Entre 600 et 800, le servage se substitue économiquement à l’esclavage en europe occidentale. A partir de 800, les trafiquants d’esclaves européens doivent faire face à un accroissement de la demande dans le monde arabe, qu’ils ne parviennent pas à satisfaire, mais qui ont pour effet certain de jeter les pauvres d’europe en recherche de protection face aux razzias et aux rapts dans les bras des notables féodaux et de leurs milices. L’exploitation salariale reste extrêmement rare, se limitant aux espaces de circulation de la monnaie. Face à la cherté des esclaves et à l’insuffisance monétaire, c’est le système du servage qui va être utilisé par les dominants pour se maintenir. Après la chute de l’empire romain, les grands spoliateurs terriens avaient conservés des esclaves de père en fils, formant une classe de paysans-esclaves. Les grands domaines agricoles se désagrègent et sont vendus ou conquis, morcelés : les paysans-esclaves suivent et sont intégrés sur place à des exploitation de taille restreinte, les « casements », qui apparaissent en gaule dès 700. Le maître doit laisser à l’esclave-paysan une partie de son temps libre : quoique juridiquement « taillable [impôt] et corvéable [travail obligatoire] à merci », le paysan-esclave ne travaille en pratique « que » la moitié de la semaine sur les terres de son maître. Il obtient le droit à une vie familiale, ainsi qu’une très relative indépendance économique, qui n’est jamais qu’une systématisation du « pécule » qui n’était jusqu’alors qu’un privilège laissé au bon vouloir du maître. Le terme de « serf » vient peu à peu désigner cette condition, sans changement juridique notable. Le maître avait tout à y gagner : au serf de se nourrir luimême, ce qui évite de « l’entretenir » durant la morte-saison. Le droit à une vie familiale favorise la reproduction et la multiplication des serfs, ce qui évite la charge financière liée à l’achat de jeunes esclaves. Le serf est socialement exclu du peuple, les institutions publiques lui sont fermées, il n’a pas accès à la carrière militaire, ne peut entrer dans l’église que par les portes dérobées, ne peut prêter serment, est soumis au droit de cuissage et de vie et de mort du maître, ne peut aller en justice, et ne peut être admis parmi le peuple « libre » que par une cérémonie d’affranchissement. Le serf n’a pas le droit de quitter la terre à laquelle il est attaché ; il est la propriété d’un maître qui peut l’acheter, le vendre, le léguer ; cette dépendance est héréditaire et se transmet par la mère. L’épargne que parviendrait éventuellement à se constituer le serf appartient au maître, qui prélève au titre de premier héritier en droit la « mainmorte » à la mort du serf. S’il veut avoir des enfants avec un serf d’un autre esclavagiste, il doit payer une taxe à son maître en dédommagement de cette déperdition de la semence servile : le formariage. C’est la jurisprudence chrétienne ecclésiastique qui fixe l’étendue du non-droit du serf, de même que la coutume, ensemble de règles nonécrites très immédiatement corrélées au rapport de force. Entre 1000 et 1100, le phénomène des colliberti, colliberts ou « culverts », classes sociale au statut légèrement plus favorable que celui des serfs, mais non-libre, se développe dans le centre et le sud de la france, en Italie, en Espagne et en Angleterre, en rapport étroit avec l’institution officielle du système féodal. Ilm en est en quelques sortes l’outil de propagande. A travers cet entonnoir, les anciens serfs (paysans-esclaves) et la plupart des paysans libres pauvres sont intégrés au système féodal en érection, les paysans libres pauvres se voyant proposer une amélioration minime de leur sort matériel contre l’abandon de leur liberté juridique. Ces maigres avantages disparaîtront bien sûr une fois le
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système du servage ayant englobé toutes les populations susceptibles d’être piégées ainsi. Une ordure officielle comme Duby parle du servage comme « facteur de croissance »... ; il existe des serfs fugitifs durant la période féodale : qu’en ils s’évadent, ils s’en vont le plus loin possible des terres de leur ancien maître, pour échapper aux accords d’entrecours, par lesquels ces messieurs s’engagent à se restituer mutuellement les fugitifs attrapés. Le paiement de la « franchise » permet aux plus « riches » des serfs de s’affranchir, individuellement ou par villages entiers, ce qui est chose faite sous Louis 9 en région parisienne, entre 1226 et 1270. A partir de 1200, le servage en tant que tel ne touche plus que les paysans « les plus démunis », expression hypocrite qui cache mal qu’ils sont encore les plus nombreux. En 1300 et 1400, des « troubles sociaux » permettent à de nombreux serfs de s’affranchir et de s’insoumettre en Europe. La Révolution abolit ce qui reste de ce régime juridique, sans remettre en cause la situation matérielle du peuple. Au contraire, la fin du Moyen Age se traduit par un renforcement de la féodalité en Hongrie, Allemagne, Roumanie, pays slaves (dont Russie), ce qui donnera lieu à de nombreuses révoltes, jusqu’à l’abolition juridique du servage en 1861 en Russie. Les esclaves ne disparaissent pas pour autant en tant que tels. De 700 à 900, plusieurs textes font référence à des objets humains, traités comme des instruments. Leur valeur à la vente est celle d’un cheval. Comme toutes les sectes qui ont réussi et sont devenues des religions, l’Eglise évite de contester cet ordre établi, et lui propose ses sévices moraux. Les théologiens comme Augustin et le gras Thomas d’Aquin remettent au goût du jour l’idée que l’esclavage est naturel. Le pape Grégoire 1° (590-604) interdit le mariage entre esclaves, y compris chrétiens, et chrétiens ou chrétiennes libres et leur interdit la prêtrise ; de même l’Eglise évite d’affranchir ses propres esclaves : pendant tout le Moyen Age, des milliers d’esclaves travaillent dans les domaines agricoles du pape, autour de Rome ou dans les grands monastères de la chréSociété mésopotamienne : l’esclavage, contrairement à une affirmation gratuite de Fustel de Coulanges, n’est pas aussi vieux que l’homme ; mais en revanche il est contemporain de l’apparition de la « civilisation », i.e. l’apparition de systèmes sociaux hiérarchiques, avec des moyens bureaucratiques et militaires. C’est aussi le moment où apparaît la possibilité de « surplus » agricoles qui permettent à une partie de la population de se reposer sur le travail d’autrui et de s’élever en caste dominatrice : soldats, scribes et despotes, dans un processus de hiérarchisation et de fonctionnalisation de la société ; la plus ancienne représentation de l’esclavage date de –3200, où l’on voit des hommes « enchaînés » traînés devant un despote, en Mésopotamie et immédiatement ensuite en haute Egypte (-3100). Sargon, un sémite venu de Kish (ville du nord) procède à la première unification des cités états vers –2340, fondant la capitale Agadé (Akkad). Les sémites sont alors nomades alors que les sumériens sont sédentaires. Vers –2112, apparaît la 3) dynastie d’Ur, avec le despote Ur-Nammu qui fait rédiger le plus ancien « code » connu, censé faite disparaître « la méchanceté, la malveillance et les plaintes » ; sa dynastie s’effondre vers –2004, sous les coups d’envahisseurs sémites nomades, les amorites. Le roi amorite Lipit-Ishtar est à l’origine d’un code vers –1930. Suit une dynastie amorite fondée par Hammourabi (-1792 à –1750) avec Babylone pour capitale, et pour langue d’Etat l’akkadien, langue sémitique. Dans la société sumérienne, 4 « castes » : nobles, roturiers, clients (ou « mesquins ») et esclaves. Les nobles s’arrogent de vastes domaines fonciers et contrôlent ceux des temples, les roturier sont de petits-bourgeois aux parcelles plus modestes, les clients « hommes « libres » regroupant employés des temples et serviteurs « libres » des nobles, peuvent également s’approprier des terres, seuls les esclaves n’y ont pas droit. Il y a alors des esclaves publics et privés ; ce sont eux qui cultivent les terres et produisent à peu près tout pour le compte des autres classes qui bénéficient de l’usufruit de leur travail. La plupart semblent être des prisonniers de guerre, mais aussi des hommes libres condamnés par la justice à cette condition, des enfants vendus ou abandonnés par leurs parents, ou encore la mise en esclavage de parents pour dette, ou encore le kidnapping. L’esclave peut être acheté ou vendu pour le prix d’un âne. Ils peuvent commercer, emprunter de l’argent, ester en justice, acheter leur liberté, l’affranchissement étant un acte public et définitif. Qui peut entre autres se faire par le mariage avec un conjoint libre. Vers –700 en Assyrie, les familles nobles babyloniennes possèdent en moyenne 3 à 5 esclaves. Il faut y ajouter les esclaves publics, attachés aux temples. Les esclaves en Mésopotamie forment une classe asservie cependant minoritaire. Egypte : en Égypte, le despote est divinisé ; la hiérarchisation est encore plus infâme qu’en Mésopotamie, avec à la clef un statut encore plus violent pour ceux qui en sont la base. Depuis la III° dynastie de l’ancien empire et pendant 3000 ans, c’est l’exploitation systématique d’une main-d’œuvre « gratuite » (hors le simple « coût d’entretient »). Ce sont des « hommes libres », réquisitionnés pendant les 4 mois d’été (hors période agricole) qui édifient pyramides et temples. La première grève de l’histoire se produit sous Ramsès III, parmi les artisans (peintres, graveurs, sculpteurs, etc.) du village de Deir-El-Médineh, mais il s’agit là d’une aristocratie ouvrière. En Egypte, l’iconographie fourmille de représentations d’esclaves subissant le sort le plus brutal (palette de Narmer, -3000, musée du Caire ; relief commémoratif de Snéfrou de la 4° dynastie ; décorations intérieures de la métropole thébaine). L’esclave travaille dans les champs, aux mines, dans les carrières et sur les grands chantiers pharaoniques. Ce sont des prisonniers de guerre (notamment du Soudan et de la Somalie actuelle), des membres de peuples étrangers vendus aux pharaons. Les hébreux gardent la mémoire de leur esclavage de 400 ans (-17° à –13° siècles), qui est au départ un « exil » volontaire en Egypte. Croissant fertile : esclavage pratiqué par les phéniciens, les hébreux, les Hourrites, les hittites, les lydiens, les mèdes et les perses ; chez les hourrites à l’époque de l’empire du Mitanni (vaste confédération de peuples sémites « encadrés » par une aristocratie indo-européenne), il y a un statut d’esclave et un statut de serviteur qui ont de nettes proximités, avec la possibilité de passer du statut « libre » au statut d’esclave via « l’adoption ». Les hébreux possèdent des esclaves tout au long de leur histoire ; le temple de Jérusalem est construit par des esclaves de Salomon vers –950 ; l’esclavage est codifié dans le pentateuque de la Torah et dans les 5 premiers livres de l’ancien testament. Les hébreux ne peuvent prendre parmi eux d’esclaves que pour 7 ans, suite à quoi il doit être affranchi gratuitement, à moins de vouloir volontairement rester esclave jusqu’à sa mort, ce qui visiblement arrive ! Dans le Lévitique, Moïse ordonne : « les serviteurs et servantes que tu auras viendront des nations qui vous entourent […] » ; de même les immigrés en « Israël » peuvent laisser leurs enfants en héritage perpétuel aux hébreux. Mais il y a aussi des textes qui visent à limiter l’esclavage, comme dans l’Exode (21, 26-27) et le Deutéronome (21, 14 ; 23, 16-17) où il est recommander de considérer l’esclave fugitif comme un homme libre. Le kidnapping ou vol d’enfant est interdit Vallée de l’Indus : dès –3000, pratique de l’esclavage attestée ; à partir de l’arrivée des indo-européens vers –1500 (cf. Rig-Veda) ; les « aryens » mettent en place une hiérarchisation apparemment « ethnique » en tout cas raciste de la société, en fonction de la couleur de la peau. Système de castes : 1°) les brahma ou « prêtres-poètes », 2°) les chefs-guerriers, 3°) les « gens du commun », 4°) les serviteurs et domestiques « libres » mais « impurs », ou shudra 5°) les esclaves, soit les « chandala ». aujourd’hui il existe des milliers de castes et sous-castes. On peut devenir esclave par la naissance, la guerre, la « justice » ou par « l’auto-asservissement » (par la vente de soi-même). Les shudra sont voués à la dépendance de génération en génération, alors que les chandala ne peuvent avoir de contact avec les castes supérieures et doivent manger à l’écart des villages dans des écuelles brisées. Chine : il existe des esclaves des cultes, d’Etat, et domestiques, au moins de –2000 à +17, puis de nouveau après une tentative d’abolition de l’esclavage par « l’usurpateur » Wang Mang. Cette société est fortement hiérarchisée, les esclaves exploités sans vergogne et les prisonniers de guerre exécutés systématiquement. Mais les esclaves proprement dits ne semblent pas occuper une place prépondérante dans la production agricole. Les esclaves sont issus de razzias aux marges de l’empire ou parmi les « minorités ethniques » de celui-ci, , et travaillent sur des chantiers publics (grande muraille vers –225 et vers +200). Vers +200 sous la dynastie des Han, les eunuques, anciens esclaves, jouent un rôle de plus en plus primordial dans la hiérarchie
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bureaucratique. L’esclavage domestique se répand dans la Chine classique. Tentatives d’abolition au 14° siècle, en 1909, avant son « abolition officielle » en 1949 lors de la Révolution. Société Khmer : esclavage joue un rôle primordial dans la société du Siam (Thaïlande) et du Cambodge de l’époque khmer. Corée : esclavage existant jusque vers 1900. Japon : esclavage officiellement aboli vers +1000, ce qui n’empêche pas l’esclavage domestique de subsister sous diverses formes, notamment les belle-filles condamnées jusqu’à l’époque moderne à servir leur belle-mère dans un esprit de soumission absolue. Grèce mycénienne : de -1500 à –1300 ; société indo-européenne monarchique avec armée et bureaucratie comme chiens de garde, très hiérarchisée, où les esclaves jouent un rôle économique prépondérant. Esclaves domestiques ou « sacré » (statut supérieur au précédent) attachés au service de l’Etat, d’un temple ou d’un dieu. Adultes et enfants, souvent ramenés de l’étranger après des expédition guerrières ou de piraterie. Pratique de la vente et de l’achat d’esclaves attestée, mais de manière occasionnelle apparemment. Les unions entre esclaves et non-esclaves sont encore fréquentes ; le « droit de propriété » leur est reconnu : chèvres, brebis, et petits lots de terre. De même pour certains le droit d’exercer de façon indépendante la profession de forgeron. Dans cette société, personne n’est vraiment libre à part le despote. Grèce archaïque : de –1000 à –700 ; petits royaumes aristocratiques ; lors des guerres, les combattants vaincus sont tués sur le champ ; les esclaves semblent être essentiellement des femmes, et les prisonnières de guerre sont soit réduites en esclavage (dont sexuel) soit échangées contre rançon. Elles broient le grain, tissent, alors que des hommes esclaves sont occupés aux travaux des champs et prairies. Ceux-là sont des esclaves marchandises, achetés par exemple à des marchands phéniciens. A côté des ces esclaves existent les paysans et serviteurs « pauvres mais libres ». Mais c’est une liberté toute relative bien sûr, dans cette société féodale ultra-hiérarchique ; Grèce classique : de –600 à –300 ; à cette période la distinction entre homme libre et esclave devient une valeur centrale. C’est l’âge d’or de l’esclave marchandise ; ce sont quelques familles nobles qui dominent alors la société, se sont approprié l’essentiel ces terres cultivables, les petits paysans pauvres de la période précédente étant réduit à la condition de métayers misérables, qui deviennent parfois esclaves pour dette. En –592, Solon fait abolir la servitude pour dette en attribuant aux paysans pauvres métayers les terres qu’ils cultivent, s’efforçant en outre d’augmenter le nombre de propriétaires de terres, en stimulant le partage de celle-ci monopolisées par les nobles. Le développement de la culture de la vigne et de l’olivier, ainsi que de la céramique engendre un vaste commerce international. Emergence ou encouragement donc par ces réforme de classes de petits paysa,ns, artisans et commerçants, tous « libres », travailleurs pour la plupart indépendants, mais salariés pour la partie la plus pauvre d’entre eux, contraints de louer leur force de travail. Les plus roches d’entre eux essayent de se dégager de la condition de travailleurs pour se consacrer à celle d’usufruitier, de « citoyen ». Avec les petits paysa,ns, artisans et commerçants de condition intermédiaire, ils vont recourir largement à l’esclavage « immigré » pour s’ériger en classe dominante immédiatement sous celle des nobles ; de Clisthène à la conquête macédonienne, l’avancée de la « démocratie » (-550 à –338), l’esclavage prospère. dans les zones centrales de la métropole, c’est l’esclave marchandise qui est omniprésent, alors qu’aux marges coloniales de cet « empire démocratique », les hilotes sont des peuples soumis et réduit à la condition de travailleurs forcés, esclaves colonisés. L’esclavage devient le « premier outil de production » de cette société, dans des proportion jusqu’alors jamais égalées. Il faut distinguer l’esclave domestique appartenant à un clan ou un groupe familial dont tous les membres sont soumis, à divers degrés, à une sorte de pater familias ou « maître » ; l’esclave est perçu à la fois comme enfant, bétail, bête humaine, dépourvu de raison, étranger. Tout homme livre peut en posséder, y compris les « métèques » riches et libres, i.e. ne travaillant pas de leur propres mains. Il habite chez son maître et est marqué au fer rouge en cas de tentative d’évasion ; il doit travailler pour ce maître tant que celui-ci le souhaite (jusqu’à la mort à priori), avec pour seule contrepartie son entretien physique, le maître se réservant la possibilité d’une « prime », s’ajoutant à cet entretien minimal. Il peut être vendu ou offert contre son souhait sur décision de justice ou de son propriétaire, il est privé de tout droit de propriété, et ne peut amasser de « pécule » (« argent de poche ») sans l’autorisation de son maître. Il n’est pas autorisé à fonder une famille, et s’il a des enfants et un conjoint, il peut à tout moment en être séparé par décision du maître de vendre ou céder ceux-ci. pour éviter la colère des dieux, les maîtres évitent en général mais pas toujours de s’arroger le droit de castrer, torturer ou frapper leur esclave, du moins « gratuitement », ce qui n’empêche pas le sadisme punitif. S’il est d’origine grecque, l’esclave peut se faire initier aux mystères et peut avoir une certaine responsabilité économique de gestionnaire des biens de son maître. Il ne peut ester en justice, sauf pour dénoncer une corruption, un traître à la cité, avec pour conséquence du jugement son affranchissement ou sa mise à mort ; convoqué devant les tribunaux par son maître ou des « citoyens », son témoignage n’a de valeur qu’après torture. Il peut être blessé ou tué par son maître qui dispose de toute latitude en la matière, droit de vie et de mort. Il ne peut se défendre physiquement lorsqu’il est frappé ou agressé par un homme libre, sous peine de mort. Les esclaves domestiques sont les mieux connus via Aristophane et Ménandre. Il entretient la maison, fait les courses, prépare les repas, tisse et nettoie les vêtements, accompagne son maître dans ses déplacements, travaille dans le champs de son maître ; la plupart des hommes libres (citoyens ou riches métèques) possèdent en moyenne 2 ou 3 esclaves « polyvalents » de ce genre. Encore faut-il distinguer les hommes libres très riches (Aristote par testament affranchi 13 esclaves domestiques...) et les « indigents » (hommes libres très pauvres ne disposant pas d’esclaves, peu nombreux). Les propriété terriennes les plus grandes peuvent atteindre 30 ha ; là les esclaves ouvriers agricoles sont placés sous la tutelle d’un intendant ou régisseur, esclave de condition « supérieure », élevé par son maître au rang de contremaître. Les activités agricoles sont largement le fait des esclaves, les citoyens libres ou salariés paysans restent relativement rares. Dans l’artisanat, ce sont encore les citoyens riches qui possèdent des ateliers entièrement composés d’esclaves artisans (fabrique de couteaux, de lits). Dans les mines de Laurion, 10 à 20 000 esclaves assurent l’extraction du plomb argentifère utilisé pour battre la monnaie : ils sont nombreux à profiter de la guerre du Péloponnèse pour déserter et fuir en masse. Les activités portuaires, maritimes ou encore bancaires sont aussi assurées par des esclaves. Certains esclaves à statut spécifique sont les l’ambassadeur commerciaux de leur maître à l’étranger, alors que d’autres sont autorisés à vivre à part de la maison de leur maître et à travailler de manière plus ou moins indépendante sous une franchise (ils doivent payer une rente, taxe sur leur activité économique, fixée par le maître). Certains esclaves sont loués par leurs maîtres, à l’image des travailleurs des sociétés intérimaires actuelles : ouvriers du BTP, musiciens, danseurs, prostituées (à distinguer de la domestique sexuelle, esclave sexuelle réservé au maître et ces convives éventuellement). Ensuite viennent les esclaves publics, « esclaves bureaucrates » appartenant à la collectivité entière : en échange d’une indemnité de nourriture calculée au strict minimum, ils sont employés de bureau, huissiers, gardiens de prison, vérificateurs de monnaies sur les marchés, etc.. On trouve également des esclaves soldats, comme le corps armé des archers scythes : au nombre de 300 au début à Athènes, ils sont chargés des activités policière lors des réunions politiques des citoyens. Aucun autre esclave ne peut porter d’arme ni ne peut servir dans l’armée, à part les hilotes de certaines colonies enrôlés de force dans l’armée. Vers –317, on aurait à Athènes près de 400 000 esclaves, 21 000 citoyens et 10 000 métèques, auxquels il faut ajouter femmes et enfants des citoyens. Mais on pense plutôt à 100 000 esclaves et 30 000 individus « libres », plus 70 000 femmes et enfants « libres ». c’est la même proportion, un libre pour 3n esclaves, qui est observée dans les états du sud des Etats Unis en 1860. Les enfants des esclaves entrent dans le patrimoine de leur maître. La provenance de ces esclaves est discutée, mais on minimise à l’heure actuelle la provenance en tant que prisonniers de guerre. En –427, Athènes écrase la révolte des hilotes lacédémoniens de Mytilène, ou de l’île de Mélos (colonie dont les habitants veulent rester neutre dans le conflit). Ils peuvent
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être des enfants abandonnés à leur naissance, des victimes de razzias de piraterie, mais proviennent vraisemblablement surtout du commerce d’esclaves dans tout le bassin méditerannéen à cette époque. Ce sont sans doute des marchands d’esclaves « barbares » qui vendaient aux grecs à moindre coût des esclaves eux-mêmes « barbares ». l’esclavage est en outre largement corrélé avec un racisme « traditionnel », les esclaves nés en Grèce et parlant grecque étant toujours malgré tout perçu comme « barbare », non-grecs par les braves citoyens. Ce racisme est plus un darwinisme social qu’un racisme en fonction de la couleur de la peau. Il existe des hommes libres noirs à Athènes. Vers –400/-300, l’affranchissement se multiplie ; Aristote et Xénophon y voient un bon « stimulant » économique, poussant l’esclave à un redoublement de servilité dans l’espoir de voir cet effort récompensé par son affranchissement. Il est possible que cet affranchissement « privé », concédé par le maître, ne soit pas totalement étranger à l’affranchissement accordé par la collectivité aux esclaves délateurs de la corruption d’un citoyen ou d’un autre esclave. Quoique le nombre d’affranchissements accordés par la justice pour de telles raisons semble avoir été faible, la délation de la corruption, répandue (trahison, sacrilège lors de la remise en cause du système mythologique par les philosophes par exemple, accaparement de biens publics), pèse comme une menace sur les maîtres véreux, et est donc un moyen de pression pour l’esclave, qui peut exiger de son maître son affranchissement dès lors qu’il est au fait de sa culpabilité, en échange de son silence. L’affranchissement est néanmoins payant, même lorsqu’il est déclaré gratuit, ce qui signifie alors le versement par l’esclave de sa valeur marchande ; cette somme peut-être concédée par le maître, versée par une association de particuliers ou prélevée sur le « pécule » de l’esclave quand il a été autorisé à en amasser ; mais cet affranchissement est souvent partiel, avec obligation de verser à vie une rente au maître, de continuer à lui rendre des services que le maître fixe, etc. Ainsi le statut de l’affranchi, partiel ou non, reste fragile et peut être contesté, ce qui limite sa liberté d’action et de parole, et exerce sur lui une pression sociale continue, avec pour risque la prise au corps et le retour à la condition d’esclave. A Athènes, la citoyenneté n’est reconnue ni aux esclaves ni aux métèques, pas plus que le droit de posséder des terres. Il y a une hiérarchie des peines en justice en fonction de ce qu’accusé et victime soient esclaves, métèques ou citoyen. Empire romain : c’est la deuxième société esclavagiste de l’antiquité. Elle a été esclavagiste de façon continue de –753 à +476, de la « république » à « l’empire » (-27 aec) ; le nombre d’esclaves ne cesse de croître tout au long de la République, au fil des conquêtes agressives. Les populations entières des territoires conquis sont parfois réduites en esclavage. Les questeurs (magistrats chargés des affaires financières qui suivent l’armée) se chargent de revendre les prisonniers de guerre aux trafiquants qui les acheminent vers Rome. Lors de la chute du royaume de macédoine en –167, 150 000 habitants sont raflés et réduits en esclavage, lors de la destruction de Carthage en –146, 200 000 prisonniers esclaves sont ramenés à Rome, alors qu’en –51 César fait déporter vers l’Italie 1.000.000 d’esclaves gaulois. Ici les esclaves sont étrangers par définition. La guerre est la principale source d’approvisionnement mais il en existe d’autres : piraterie maritime, le marché aux esclaves de Rome (aux enchères et soumis à l’impôt : l’Etat romain taxe l’esclavage, comme pour la prostitution aujourd’hui), l’esclavage pour dette (abolie dans l’empire vers –326), l’exposition et la déchéance. L’exposition est la conséquence du refus d’un parent de reconnaître un enfant, de son abandon devant un bâtiment public, suite à quoi le « trouveur » de cet enfant en fait son esclave. Adultes ou adolescents, ces orphelins-esclaves sont le plus souvent soumis à la prostitution, d’autres sont castrés pour satisfaire les délires sexuels des riches usuriers ; d’autres sont mutilés volontairement pour devenir des mendiants professionnels. Le droit d’exposition n’est abrogé qu’en +374, mais la pratique demeure dans toute l’Europe jusqu’à la fin du Moyen Age. La prostitution infantile n’est interdite qu’en +529. La déchéance, signifiant littéralement « amoindrissement de la personnalité » est une peine de justice romaine, allant du droit privé, à la liberté personnelle en passant part le droit de cité, jusqu’à la réduction intégrale à l’esclavage, partiellement ou totalement révocable selon le choix des « justiciers ». L’esclave romain n’a pas de nom mais un seul prénom, pas de biens propres, pas de droit de mariage ou d’éduquer des enfants, pas de droit d’aller en justice sauf pour témoigner sur demande de celle-ci, son témoignage n’étant considéré valable que s’il est obtenu sous la torture. Le maître a sur son esclave un pouvoir absolu, et n’a de compte à rendre à personne sur le traitement qui lui est réservé. Le seul jour de la fête des saturnales à la midécembre donne lieu à un chari-vari carnavalesque qui abolit temporairement les hiérarchies sociales : les rôles sont inversés pendant 2 jours. Dans les années 1930, des latinistes français et italiens favorables au régime fasciste de Mussolini ont prétendus qu’en réalité ce régime impérial romain esclavagiste n’était pas si infâme, et que les esclaves vivaient presque aussi bien que leur maître. Petit rappel historique nécessaire donc !!! Certes les esclaves ayant un maître lui même pauvre n’étaient sans doute pas les plus mal traités, devenant en quelque sorte leur compagnon de misère. Les romains les moins aisés possèdent en moyenne 2 à 3 esclaves, beaucoup plus pour les plus riches, qui peuvent en posséder des centaines voire des milliers. La plupart des esclaves romains sont utilisés à la campagne, dans une villa sous la direction d’un esclave intendant, ou dans des grands domaines (latifundia) lesquels se développent lentement au détriment des petites propriété et de la propriété collective. Employés dans les champs, ils portent des fers aux pieds. Caton l’ancien et « le grand » recommandent de diminuer la maigre ration alimentaire des esclaves agricoles malades, de vendre sans pitié ceux qui deviennent trop âgés p^r le travail de la terre, tandis que d’autres théoriciens esclavagistes reprennent le conseil de Platon de mélanger des esclaves de langues différentes pour mieux les soumettre et les empêcher de comploter. Dans une maison, les esclaves peuvent être musicien, médecin, portier, masseur, coiffeur, cuisinier, cocher, porteur de litière ou de lanterne. Ils peuvent aussi être employés dans les ateliers du maître. Ils peuvent parfois être autorisés comme en Grèce à « habiter à part » (i.e. à travailler de façon indépendante, moyennant une redevance, taxe de leur maître sur le produit de leur travail, notamment comme artisan ou boutiquier). Dans les très grandes maisons il existe des esclaves lettrés, comptables, pédagogues-précepteur, secrétaires. Les enfants d’esclaves quand ils reçoivent une éducation apprennent à servir un maître et à devenir de la plus extrême docilité, dans des écoles domestiques. Mais l’enfant de l’esclave doit être entretenu pendant plusieurs années avant de pouvoir être exploité par le maître, ce qui pousse ceux-ci à faire en sorte d’empêcher leurs esclaves d’avoir des relations sexuelles. De toute façon la plupart des esclaves sont de sexe masculin. Les esclaves peuvent aussi, de même que les prisonniers de droit commun et des volontaires libres, être utilisés comme gladiateurs pour divertir les braves gens de Rome. Cela à partir de –264. Les combats de gladiateurs étaient organisés à l’origine lors de la mort d’un notable en guise de funérailles. Ils ne disparaîtrions que vers +500. Ce sont ainsi des dizaines de milliers de personnes qui sont mortes de mort violente et gratuite, victime de ce sévice sadique. A côté de ces esclaves privés existent aussi des esclaves publics, utilisés pour les travaux de voiries, d’entretien des routes, dans les carrières, les mines, sur les chantiers de BTP, comme équipage des navires de commerce exposés à l’épuisement physique, au naufrage et à la piraterie, ou utilisés dans l’administration pour des fonctions subalternes (agent de service des eaux, agent des archives, comptable, gardien de prison, etc.). Ceux-là reçoivent un petit pécule un salaire en plus de la ration alimentaire et de la couche. Bien plus qu’en Mésopotamie et même qu’en Grèce, ils aspirent à l’affranchissement, alors que l’esclavage romain est héréditaire. L’affranchissement n’est possible sans achat de la liberté par l’esclave. L‘affranchissement par la baguette est un simulacre de procès, au cours duquel impose une baguette sur la tête de l’esclave et le « fait libre ». L’affranchissement par le cens consiste à faire inscrire l’esclave sur un registre de recensement des citoyens et de leur fortune. Enfin l’affranchissement par testament se pratique à la mort du maître. « Affranchi » se dit en latin « libertinus » (dans le sens de « libre ») ou « libertus » (dans le sens de libéré, renvoyant nettement l’esclave à son ancien statut et donc à la reconnaissance qu’il doit témoigner à son « bienfaiteur »...). c’est le terme de libertinus qui donnera en français « libertin », qui sert d’abord au 17° siècle à désigner un libre-penseur affranchi des dogmes religieux, mais aussi à partir du 18° siècle un débauché, i.e. affranchi des conventions morales. Lors de la cérémonie d’affranchissement, l’esclave revêt un bonnet phrygien en peau de mouton teint en rouge, remis à l’honneur par les sans-culottes.
Mais l’affranchi, s’il peut alors exercer une activité professionnelle « de son choix » est loin d’être un citoyen libre comme les autres : il a le droit au concubinage mais pas au mariage, ne peut être élu, est inscrit d’office par le censeur dans une des 4 tribus urbaines (les plus peuplées et les moins prestigieuses), et sous le système électoral de la « république » romaine n’a que rarement le droit de voter, comme toute la classe pauvre. Jusqu’à –107, il ne peut servir dans la légion. Son ancien maître devient son « patron », dans le sens de « parrain » ou de « père », « tuteur », lequel lui doit aide et protection et notamment devant les tribunaux, contre respect de l’ancien esclave (obsequium, qui donne obséquieux) alors que ces droits en justice face à son patron sont limités. De plus il doit à son patrons plusieurs jours de travail par an, et une partie de ses biens revient encore à celui-ci si le patron le souhaite. Le fils de l’affranchi est libre s’il naît après l’affranchissement de son père, mais il reste esclave si c’est sa mère qui a été affranchie. Te sa vie, l’affranchi est couvert de mépris par la bonne société. Les affranchis instruits ont des fonctions sociales néanmoins importantes : architectes, médecins, musiciens, grammairiens, précepteur. Enfin les affranchis contrairement aux esclaves peuvent servir dans l’armée (il y eut néanmoins 8000 esclaves utilisés dans l’armée romaine vers -216 lors des guerres puniques, les rares survivants étant affranchis). Même sur les navires militaires, les esclaves ne peuvent être des rameurs, ce sont des citoyens qui occupent cette fonction. Rome évite de mettre les esclaves au contact des armes et de leur en apprendre le maniement. Et pour cause : contrairement à ce qui se produit en Grèce, les esclaves romains sont à l’origine d’une agitation sociale permanente contre le sort qui leur est fait, au péril de leur vie. Vers –460, Tite Live (Histoire de Rome, II, 53-65) évoque la « Peur des esclaves », première tentative de soulèvement des « misérables » qui nous soit connue dans l’empire romain. Mais ce sont surtout les « guerres serviles » de la fin de la République qui nous sont connues. A ce moment de l’empire romain, la conquête coloniale est en croissance exponentielle et le nombre d’esclaves croit à un rythme effréné. Emerge là une forme de conscience de classe, stimulée par la diffusion d’idées subversives sous forme religieuse en provenance de Grèce et de l’Orient hellénique. Les 3 révoltes ainsi nommées surviennent en –134, -103 et –73 environ, en Italie méridionale et en Sicile, zones à la fois marquées par la culture grecque et le système des latifundias concentrant une main-d’œuvre nombreuse. Celles de –134/132 et de –103/102 éclatent en Sicile, sont réprimés impitoyablement, ce qui explique le fantastique déclin agricole de la Sicile pendant une longue période. Il existe aussi une révolte du même type dans le royaume de Pergame entretienté européenne, comme le monastère de St germain des Prés qui exploite vers 700 plus de 8000 esclaves. Sous le règne de Charlemagne, les prêtres catholiques sont autorisés à posséder 2 esclaves, un homme et une femme. En revanche la papauté fait interdire à un juif la possession d’esclaves chrétiens. Cette interdiction avait déjà été portée par Constantin II (399), mais malgré cette interdiction, tout comme chez les chrétiens, les croyants ont des esclaves et en font éventuellement le trafic. En 1348, le roi de Castille puni de mort le juif qui se rend coupable de ce crime, alors que le crime en sens inverse reste autorisé, instaurant ainsi un esclavagisme nettement raciste. Or au Moyen Age, la conversion au judaïsme n’est pas rare, et la loi mosaïque oblige à affranchir un esclave juif au bout de 7 ans, ce qui favoriserait les conversion, et ce que l’Eglise, qui n’est pas prête à favoriser l’affranchissement, est ainsi nettement concurrencée par la Synagogue. Constantinople, après Byzance, capitale de l’empire byzantin et du christianisme orthodoxe, est aussi une des principale places européennes du marché aux esclaves. La codification de l’esclavage mise en place par Justinien vers 600 reste en place après le schisme vers 1054 et ce jusqu’en 1453, à l’arrivée des turcs. Petite entorse : en 1095 un empereur byzantin autorise le mariage religieux aux esclaves. Le rôle important des eunuques, caractéristiques de l’esclavage byzantin, est lié à la proximité du monde musulman où ce phénomène est courant. En Europe de l’ouest, alors que le servage s’installe, l’esclavage reste de rigueur au niveau domestique, « serviteur » venant également de « servus », mais on rencontre aussi des esclaves commerçant, artisans ou employés au service de maîtres-artisans, notamment dans les ateliers de production de verre, de céramique, d’étoffes et d’objets métalliques. En Angleterre, les esclaves représentent encore 10% de la population au moment de la conquête normande en 1066, à partir de laquelle il décroît pour laisser la place à d’autres formes d’exploitation. Ce qui n’empêche que l’un des personnages de Tristan et Iseult, écrit vers 1200, soit un esclave. Les familles anglaises pauvres continuent de vendre leurs enfants comme esclaves en Irlande jusque vers 1300 au moins. En france, les esclaves domestiques disparaissent peu à peu, affranchis par testament, et sont remplacés ou deviennent à partir de 1300 une classe de serviteurs salariés faiblement rémunérés. Mais cette transformation est plus lente dans le midi que dans le nord : il y a des esclaves à Montpellier jusqu’en 1600 et en Roussillon le dernier acte notarié d’affranchissement date de 1612. Marseille, port des galères royales, est aussi un des principaux centres européens de commerce d’esclave jusque vers 1700. l’idée de la France comme pays de liberté a diverses origines : d’abord l’association de l’idée de liberté et du peuple franc, qui donnera notamment les terme de franchise et d’affranchissement. Mais également une autre : en 1402, 4 esclaves s’enfuient de Perpignan et se réfugient à Toulouse ; leur maître, venu les réclamer, se voit répondre par le syndic de la cité qu’en vertu d’une charte locale datant de 1226, tout esclave se réfugiant dans cette ville devient automatiquement libre. En Allemagne, avec la proximité du vaste marché aux esclaves slaves, l’esclavage domestique est plus lent à disparaître qu’en France, mais disparaît quasiment en 1400. Les pays scandinaves connaissent l’esclavage jusqu’à la fin du Moyen Age. Les trafiquants scandinaves et de Frise orientale (rive allemande) contrôlent d’ailleurs pendant une bonne partie du Moyen Age l’essentiel du commerce des esclaves. En Russie, à côté du servage, l’esclavage se prolonge jusqu’au 18° siècle. En Italie et en Espagne, l’esclavage joue au Moyen Age un rôle socioéconomique de premier ordre. En Italie, qui constitue à l’époque le plus dense réseau urbain, l’esclavage rural reste « limité » aux monastères, où la production est organisée par les moines de manière quasi-industrielle ; en ville en revanche, au Moyen Age et à la Renaissance, des serviteurs dont le statut ne diffère guère de celui des esclaves romains, si ce n’est par l‘interdiction de les tuer, peuplent les « grandes maisons » italiennes. Toute famille aisée en possède au moins 1 en Toscane au 14° siècle. ¼ à 1/3 sont achetés avant 15 ans, les femmes esclaves étant des esclaves sexuels à titre tant domestique que de prostitution. Leurs enfants peuvent être affranchis ou soumis à leur tour à l’esclavage, selon le bon vouloir du maître. Le maître peut épouser une esclave auquel cas celle-ci et sa progéniture sont automatiquement affranchis. Possibilité d’être affranchi par testament ou par achat de la liberté. Après que la peste est atteint l’Italie en 13488, une brusque demande d’esclaves fait s’envoler le marché dans toute la péninsule, en provenance d’orient, jusqu’en 1500, date de l’arrivée des turcs qui rend ce commerce beaucoup plus difficile. De rares très riches florentins, vénitiens et siciliens s’offrent ce luxe exotique jusque vers 1800, jusqu’à l’arrivée de Bonaparte en Toscane. La péninsule ibérique est de 711 à 1492 (chute du royaume musulman de Grenade) le seul espace de contact direct entre monde musulman et chrétien, or on pratique de part et d’autre l’esclavage. Chaque bataille que se livrent les deux parties est l’occasion de razzias. Des esclaves chrétiens sont condamnés au travail forcé dans les plantations andalouses ou à ramer dans les galères musulmanes, alors que des esclaves musulmans sont enchaînés au 11° siècle pour construire le mur d’enceinte d’Avila. En Italie comme dans la Péninsule Ibérique, l’esclavage est beaucoup plus répandu à la fin du 14° siècle et au début du 15° qu’au 13° siècle. L’antagonisme entre libres et non-libres est à son paroxysme. En 1410, la République de Venise autorise la torture pour « interroger » les esclaves soupçonnés d’avoir empoisonné leur maître. Guerre, razzias et piraterie ne semblent pas être la source principale de cet esclavage, que l’on a un peu plus de scrupules à imposer tel quel aux coreligionnaires qu’aux païens et autres « infidèles ». Plusieurs conciles au 5° siècles interdisent le commerce d’esclaves chrétiens, ce qui n’empêche pas même après 1100 de voir des maîtres catholiques posséder des esclaves orthodoxes, mais aussi bien catholiques. Mais la plupart des esclaves sont alors des « maires » musulmans, ou en Italie, des « slaves », terme qui vient lui aussi du latin sclavus. Autre source d’approvisionnement : les abandons d’enfants, phénomène d’une ampleur largement sous-estimée jusqu’au 20° siècle ; cela ne se tarira qu’avec l’apparition des premiers hospices vers 1500. Ce sont des enfants non désirés, handicapés, mais aussi des enfants nés dans des familles trop pauvres pour les assumer économiquement. Autre source d’approvisionnement : le
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commerce ; dès le Haut Moyen Age, le trafic des captifs slaves s’organise autour de plusieurs routes commerciales : l’une allant de la Russie à la Perse via l’Arménie ; une autre de la Russie à Venise en passant par les cols alpestres ; et une troisième partant de la Russie jusqu’à Marseille en passant par Verdun et la vallée du Rhône. Verdun est en outre un carrefour important où est pratiquée la castration pour le marché des eunuques en direction de Byzance et du monde arabe. Venise, Marseille, Gênes et Barcelone sont alors les principaux ports d’exportation d’esclaves d’origines slave vers l’Italie, la Sicile, Chypre et les pays musulmans, de même que Candie, capitale de la Crête, colonie vénitienne du 13° au 17° siècle. Ce commerce est à l’origine d’immenses fortunes. Le commerce des esclaves musulmans razziés en Espagne et en Afrique du nord importés en Europe passe par ces mêmes ports. Au 9) siècle, Venise prospère sur le commerce du bois, du fer mais aussi des esclaves d’origine russe. A partir de 1100, les marchands vénitiens sont menacés par la conversion au christianisme du peuple russe. Ce sont alors les peuples « païens » des Balkans qui vont faire les frais du trafic et seront victimes de razzias massives aboutissant au « quai des esclavons » (« slovaque en ancien français, proximité étymologique avec esclave). Les croisades perturbent elles-aussi le trafic. Mais après le 13° siècle, ce trafic reprend de plus belle : en Italie et en Espagne, le marché aux esclaves exploite au 14 et au 15° siècle de la « marchandise » russe, circassienne, tatare, bulgare, slovène, bosniaque, albanaise, grecque, crétoise, sarde, corse, guanche des Canaries, musulmane d’Espagne ou d’Afrique du nord. A cette marchandise « blanche », une marchandise « noire » commence à se mêler au 13° siècle, achetée au sud du Sahara par des trafiquants berbères ou arabes, revendus à des marchands européens, puis directement razziés par les hommes de main de ces derniers sur les côtes africaines à partir du 15°. En 1363, Florence décide de mettre en œuvre l’abolitionnisme raciste du vatican, en faisant cesser dans cette ville le commerce des esclaves chrétiens, ce qui montre que cette pratique est encore monnaie courante. De 1350 à 1400, des marchands d’esclaves de Gênes s’installent à Caffa et Tana en Crimée, au plus près de la matière de leur trafic, et commencent à y trier de manière raciste par couleur de peau leur marchandise. Ce n’est pas la concupiscence ecclésiale qui met fin à ce trafic, mais la conquête turque, qui coupe la route de la mer noire à la méditerranée. De plus, la reconquista met fin au trafic de musulmans d’Espagne. Le fin progressive de l’esclavage domestique en Europe de l’ouest en est la conséquence. Ce qui ne signifie pas la fin du trafic, qui va se reporter désormais sur une marchandise africaine, « accessible » à partir des côtes atlantiques de l’Afrique. Monde médiéval musulman : de 600 à 1500, la « civilisation » musulmane connaît un « âge d’or » culturel et politique, entretenant par ailleurs des rapports étroits avec la « civilisation » chrétienne. Ces rapports son parfois conflictuels mais mettent aussi en œuvre de larges réseaux de connivence. Notamment autour de l’esclavage. Le monde musulman considère lui aussi l’esclavage comme « normal » : c’est une pratique courante dans le monde arabe pré-islamique. Suivant le mécanisme de l’alternance des moussons, des trafiquants arabes navigateur vont razzier les côtes orientales de l’Afrique ; la société réduite des navires arabes limitera en tant que tel ce trafic jusqu’au 19° siècle, sans commune mesure avec le trafic des cités européennes méridionales. Vers l’an 1000, il y a néanmoins un trafic régulier entre Malindi (Kenya) et Canton en Chine. Au 13° siècle, l’écoulement d’esclaves noirs le long de la route de la soie est attesté. Dans le sud de la Mésopotamie, la présence d’esclaves noirs dans les plantations de canne à sucre est attestée dès la période antérieure à l’Islam. Pas plus que la Torah ou la Bible le Coran ne condamne en tant que tel l’esclavage. Aussi y a-t-il des trafiquants musulmans tout comme il y a des trafiquants chrétien et juifs. Dans la société musulmane, les esclaves jouent un rôle important sans non plus être au cœur du processus de production. Ils travaillent dans les champs, les mines, mais sont le plus souvent des esclaves domestiques (11000 esclaves pour un calife de Bagdad au 10° siècle) ou artisans. Mais aussi des esclaves fonctionnaires et soldats. Les femmes esclaves sont sexuellement exploitées. Si un esclave donne un enfant à son maître et que celui-ci le reconnaît, ni femme ni enfant ne peuvent être vendus. A la mort du maître, ils sont alors affranchis ; les mariages entre hommes musulmans et femme esclave sont fréquent, il suffit à la femme d’adopter la religion et au maître de l’affranchir. La charia interdit de réduire en esclavage un homme musulman ( sauf en cas de conversion postcaptivité). Juifs et chrétiens ne doivent pas non plus, théoriquement, être réduits en esclavages, en tant que « gens du livre ». cette règle est transgressée, notamment dans les zones conflictuelles entre ces différentes « civilisations ». Le prophète recommande la libération d’esclave et la charité envers pauvres et orphelins comme voie de salut. L’affranchissement y a donc une valeur culturelle particulière qui n’existe pas dans d’autres sociétés à esclaves, et qui en fait une pratique courante et régulière. Certains esclaves soldats sont parvenus à s’emparer du pouvoir dans le monde musulman. Certains esclaves comme les eunuques chargés de garder les harems gagnent la confiance de leur maître et se voient confier d’importantes tâches administratives : un esclave slave devenu gouverneur de Valence, un esclave éthiopien devenu vizir du sultan de Delhi puis gouverneur de province, des eunuques noirs occupant des postes administratifs clefs, comme la responsabilité administrative de cilles saintes comme La Mecque et Médine. Les esclaves soldats sont aussi connus sous le nom de mamlouks. Au 9° siècle, le calife abbasside de Bagdad décide de se doter d’une garde personnelle d’esclaves blancs (grecs, slaves, Tcherkesses du Caucase, berbères, turcs des steppes d’Ukraine. Ils se montrent en effet, coupés de leur univers, des soldats plus loyaux que les soldats autochtones, lesquels sont davantage sensibles aux intrigues de palais et aux lutes politiques et notamment claniques. L’émir Ibn Touloun, qui fonde au Caire en 870 la dynastie toulounide est un mamlouk. De 1206 à 1256, 3 mamlouks sont sultans des Delhi. Vers 1250, des mamlouks ayant d’abord participé à la lutte contre les croisés prennent le pouvoir au Caire et le conservent pendant 250 ans, longue période d’essor culturel, politique, social, architectural, artistique, commercial. Ils sont connus sous le nom de dynastie bahride (règne de Baybars, esclave turc acheté sur un marché syrien, 1260 à 1277) et dynastie circassienne, jusqu’à la conquête ottomane de l’Egypte en 1517. Les esclaves tcherkesses et circassiens sont des enfants vendus aux marchands d’esclaves par leurs parents. Sous le règne de Soliman le Magnifique et jusqu’à la conquête de Bonaparte, les mamlouks gardent une forte influence. Mais surtout, le monde musulman a connu une des plus grandes révoltes d’esclave historique connue : les Zanj, esclaves noirs employés à de durs travaux agricoles dans le sud de la Mésopotamie se révoltent vers 870 sous l’instigation d’un agitateur musulman originaire de Perse, Ali Ben Mohammed. Ils prennent la ville de Bassora sans difficulté mais sont stoppés avant Bagdad par l’armée du calife. Leur révolte finit écrasée dans le sang en 883. Le nom de leur chef reste un symbole de liberté qui résonne aussi puissamment que celui de Spartacus dans l’histoire. Une autre révolte massive se produira en 1486 dans le sultanat du Bengale. La demande d’esclave dans le monde musulman va pousser les trafiquants jusque sur les côtes occidentales de l’Afrique. Le tout est surmonté d’un racisme religieux, mêlant racisme de l’arabe à l’encontre du noir et mépris du croyant pour l’infidèle. Pourtant l’homme choisi comme premier muezzin de l’histoire de l’Islam, Bilal est un esclave noir d’Abyssinie, où il avait été razzié par Abou Bakr, riche trafiquant d’esclaves de la Mecque et premier successeur du prophète. Les premiers esclaves noirs d’Afrique sub-saharienne apparaissent dans le monde arabe à partir de 600. Vers l‘an 1000, cette voie de trafic d’esclaves est nettement établie, reliant Tombouctou (au Mali, région appelée alors « Sudan » par les trafiquants), Goa (Mali), ou Kano (Nigeria), aux villes du sud-marocain, sud-algérien, à celles de la Tripolitaine et du fezzan. Pendant plusieurs siècles, chaque année, des caravanes descendent dans ces régions à l’automne et remontent dans le monde arabe au printemps suivant. Les trafiquants sont des marchands arabes ou berbères qui utilisent les tribus du désert islamisées comme guides (ces tribus du désert en elles-mêmes ne sont pas les trafiquants). Esclaves, or, ivoire, ébène, plumes d’autruches sont échangés contre « monnaies », sucre, sel, dattes, figues, chevaux. Les esclaves sont exploités ensuite dans des plantations de canne à sucre du Maghreb, en Sicile et en Espagne, ou dans les palais et harems du Moyen Orient. Puis vers 1300, les esclaves d’Afrique sub-saharienne commencent à être revendus aux marchands chrétiens espagnols, italiens et français à destination de l’Europe. Il est difficile de chiffrer ce trafic. Mais on approcherait au bas mot 7.500.000 esclaves sur 1200 ans, avec des pointes de 900 à 1100 et au 19° avant la conquête coloniale européenne. A ces déportations d’Afrique occidentale sub-saharienne, il faut ajouter celles provenant
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des côtes orientales d’Afrique (qui prend la plus grande ampleur au 19°), mises en œuvre par des marchands arabes et/ou musulmans, et les déportation en provenance de Somalie et du Soudan en direction du nord de la vallée du Nil (du Nouvel empire égyptien au 20° siècle...), soit 3.500.000 esclaves supplémentaires. Cet esclavagisme musulman rejoint la traite européenne transatlantique, 11.000.000 de déportés au bas mot. Portugal et Nouveau Monde : cette période court de 1434 à 1532. du 16° au 20° siècle l’Afrique va être démographiquement saignée par les négriers européens, sans parler des multiples autres exactions que ce continent a et continue de subir. En 1434 débute l’exploration des côtes africaines par les navigateurs européens. Au 12° siècle déjà, des négociants italiens et espagnols achètent dans les ports de l’Afrique du nord des marchandises provenant des régions africaines sub-sahariennes. Des navigateurs génois attirés par le gain parviennent au port atlantique marocain de Salé (près de Rabat) en 1162, puis à Safi plus au sud en 1253. Vers 1100 apparaît la monarchie portugaise qui s’installe en Algarve à mesure de la reconquista, ce qui lui ouvre les routes du sud. La monarchie portugaise, et les marchands du pays veulent briser le monopole musulman sur la marché africain, tant des esclaves que de l’or ou d’autres denrées. Dès 1317, le navigateur génois Manuel Pesagno commande une flotte portugaise et obtient une licence de la monarchie portugaise pour ses activités de mercenaire, de piraterie le long des côtes marocaines, en échange de la promesse de livrer 1/5° des hommes capturés par ce biais au roi du Portugal... ; les portugais atteignent les Canaries pour la première fois vers 1350 ; cet archipel est habité par les guanches (sans doute d’origine berbère) ; en 1402, le normand Jean de Béthencourt, qui travaille pour le compte du royaume de Castille, y revient ; en 1477, ce royaume met officiellement la main sur ces îles. En 1415, le port de Ceuta est annexé par un raid décidé par le roi portugais Jean 1°. En 1418, c’est l’occupation de l’archipel de Madère. En 1432, les Açores. En 1434, une nouvelle expédition portugaise dépasse le cap Bojador (Sahara occidental). Le progrès des techniques de navigation et l’installation de comptoirs et de relais côtiers le long des côtes africaines va faciliter la mise en place de cette route maritime. Une industrie est depuis longtemps associée à l’esclavage : celle du sucre. Il est introduit en Europe via l’Espagne et la Sicile autour de l’an 1000. Les européens instaurent des plantations de canne à sucre en Syrie et en Palestine lors des croisades, puis après la défaite des croisés, en Sicile, dans le sud de l’Italie , en Espagne, au Portugal, à Chypre, puis au 15° siècle à Madère, aux Canaries et aux Açores. Là, on importe des esclaves exploités dans les plantations. On retrouve le problème du salariat : la main-d’œuvre volontaire por ce type de travail dont les propriétaires terriens entendent tirer un maximum de profit manque ; on recours donc au travail forcé. En 1420, Madère voit arriver des esclaves subsahariens achetés en méditerranée et acheminées là via le Portugal. Cette pratique avait déjà court en Sicile, avec des esclaves d’origine diverse. En 1441, les navigateurs portugais dépassent le cap blanc et commencent à razzier en Mauritanie les rares habitants rencontrés le long des côtes. Les expéditions portugaises de Antao Gonçalves et de Nuño Tristao ramènent la même années quelques dizaines d’esclaves de cette région. En 1453, on a trace de l’arrivée d’une cargaison de berbères islamisés et de noirs africains au Portugal, décrit comme en proie à une immense douleur. Dès le début, ces trafics sont supervisés par le prince Henri le Navigateur, un des fils de jean 1°. Il fait construire un arsenal à Sagres au sud du Portugal. Toute expédition le long des côtes africaines est soumise à son autorisation et taxée d’1/5° des marchandises, quelles qu’elles soient. Les profits sont énormes, même si à partir de 1455 les raids et razzias laissent place à l’achat à des mercenaires-marchands autochtones. L’Eglise accorde à Henri le Navigateur sa bénédiction pour la mis en place de ce trafic : une bulle de 1455 reconnaît les conquêtes africaines du Portugal et autorise les trafiquants portugais à réduire en esclavage les « peuples païens ». en 1450, un fort portugais est érigé sur une île en face de Nouakchott. De 1450 à 1460, 800 esclaves sont acheminés de ce fort vers le Portugal annuellement. Sur terre, les azenegues, habitants berbère de cette île (Arguin), achètent des chevaux au Maroc, vont les vendre au sud du Sahara et ramène des esclaves noirs qu’ils revendent aux Portugais contre étoffes, selles, objets métalliques, sel et safran. Entre 1448 et 1460, les trafiquants portugais, aussi appelé « navigateurs » et pourquoi pas « ambassadeurs », atteignent le cap vert (Dakar) et les îles du même nom, où ils s’installent durablement en 1461, ils abordent les côtes du Sierra Leone ; en 1469, le mercenaire Fernao Gomez reçoit du roi portugais « Alphonse 5 l’africain » une licence pour explorer pendant 5 ans cette côte bientôt baptisée « golfe de Guinée ». là les portugais trouvent l’occasion pour la première fois d’acheter de l’or dans la région des Trois Pointes, entre Abidjan et Accra. Là ils font construire le fort d’Elmina, qui va servir de centre de regroupeme,nt avant déportation de milliers d’esclaves. Tout va alors très vite : pénétration dans le delta du Niger et dans le royaume du bénin, accueil très favorable de la cour du royaume à bénin City, installation dans les îles de Fernando Po (guinée équatoriale), Sao Tome et Principe (1471), traité d’Alcaçovas entre Espagne et Portugal en 1479, délimitant les sphères de colonisation respectives, installation d’une colonie à Fernando Po (1492), installation de plantations de canne à sucre à Sao Tome et sur les îles du Cap Vert, cultivées par des esclaves, découverte de l’embouchure du fleuve Congo en 1483, puis des côtes de l’Angola, conversion du roi congolais au catholicisme et alliance de celui-ci avec le Portugal, passage du cap de bonne espérance par B. Dias en 1487, périple de Vasco de Gama en 1497, qui ouvre au Portugal la route des Indes en découvrant la voie maritime du cap de Bonne Espérance à l’état de Kerala. En 1500, les côtes du Brésil sont découvertes par un autre portugais. De 1490 à 1500, les trafiquants portugais achètent au moins 3000 esclaves par an en Afrique ; en 1550, il y a 10 000 esclaves noirs pour 100 000 habitants à Lisbonne. C ; Colomb, navigateur génois, tente de vendre en 1483 au roi du Portugal l’idée d’aller chercher les Indes à l’Ouest ; Colomb est un homme de la reconquista, aux convictions catholiques très affirmées. Son but ultime affirme-t-il, c’est de reprendre par la guerre ou par l’or, la terre sainte aux musulmans. Mais le roi du Portugal pas plus que ceux de france et d’Angleterre ne se laissent convaincre. Espagne et Nouveau Monde : les mercenaires espagnols ne tardent pas à concurrencer les découvertes maritimes de leur collègues portugais. Les espagnols s’intéresse assez immédiatement à la traite négrière. De même anglais et hollandais s’y mettent vers 1550, puis les français vers 1600. mais jusqu’en 1850, l’exploration de l’intérieur des terres africaines est abandonnée au profit des lucratives activités commerciales littorales, achetant les esclaves à des intermédiaires arabes ou noirs. Colomb parvient à convaincre en Espagne le duc de Medina Celi et le confesseur de la reine, et obtient le soutien d’Isabelle de Castille. Afrique et esclavage africain : En fait, les trafiquants arabes attestent par leurs écrits que l’esclavage est une pratique courante dans les royaume féodaux du Ghana, du Mali et du Songhaï avant qu’ils y parviennent, et dans toute la durée de ces régimes, soit du 9° au 16° siècle. De même chez les haoussas et les yoroubas (Nigeria, à partir du 10° siècle), dans le royaume du Dahomey (Bénin, à partir du 17° siècle), des ashantis (Ghana, 18° siècle), de même que dans la région du fleuve Congo. Cet esclavage « coutumier » est cependant restreint et ne joue pas un rôle central dans l’économie africaine. Il a pour origine principale la guerre inter-étatique et ses prisonniers. Certains deviennent esclaves domestiques ou travaillent dans des champs, ce qui est extrêmement pénible en Afrique du fait de l’aridité du sol ; il peuvent aussi être vendus aux marchands. Les marchands d’esclaves africains se multiplient en revanche avec l’arrivée et la demande des trafiquants portugais. Pour ces trafiquants subsaharien, c’est là un commerce très lucratif. Les cours de certains roitelets voient d’un bon œil cet échange de bons procédés avec les européens qui leur permet de se procurer des armes à feu (ainsi que diverses pacotilles), donc de faire plus de prisonniers et de razzias dans les régions qu’ils veulent contrôler, donc de dépeupler plus rapidement ces régions, et en revendant les prisonniers aux trafiquants européens, se procurer plus d’armes, etc. En fait en Afrique même, le sort de « l’esclave coutumier », ayant pour maître un africain plus puissant que lui, est peu différent de celui du paysan africain pauvre mais « libre ». L’esclave coutumier a le droit de se marier, d’élever des enfants, est propriétaire de sa maison et de ses biens, ne subit d’actes de sadisme que motivés, ce qui n’en réduit pas l’atrocité mais l’occurrence ; les enfants-esclaves grandissent avec les enfants du maître et sont traités à peu près de la même manière. L’affranchissement est aussi voire plus courant que dans la société musulmane, et les affranchis ne sont pas
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socialement méprisés du fait de leur origine servile. Rien à voir avec les exploitations organisées de manière industrielle et capitaliste par les européens en Atlantique et Amérique. Ce qui permet à certains théoriciens de conclure à une responsabilité moindre des trafiquants africains par rapport aux trafiquants et négriers arabophone et européens ; pourtant, le traitement infligé aux esclaves africains ne peut totalement échapper aux trafiquants africains, qui on matière à observation dans les ports et comptoirs de la côte africaine. Impérialisme hispano-portugais et nouveau-monde : Colomb découvre ainsi en 1492 les Bahamas, les grandes Antilles, Cuba, Haïti. Puis viennent d’autres conquistadores, notamment catalans, basques, aragonais ; le capital nécessaire est fourni par les richards financiers de Séville. Les troupes sont des paysans pauvres et des nobles déshérités ou pauvres, et autres mercenaires aguerris. En 1499, Vespucci longe les côtes du Brésil. En 1499, De Hojeda, Alonso Niño, De La Cosa explorent les côtes du Venezuela. En 1501 Bastidas et De la Cosa longent la côte atlantique de la Colombie. Ils y fondent la colonie de Santa Maria la Antigua de Darien, qui sert de point de départ en 1513 à l’expédition de Balboa, lequel à son tour met en place une colonie suer la côte pacifique du Panama en 1519, année au cours de laquelle Magellan atteint le Rio de la Plata, découvre son détroit, traverse le pacifique et atteint les Philippines en 1521. Les caraïbes sont peu à peu systématiquement occupées : Puerto Rico en 1508 par Ponce de Léon, la Jamaïque en 1509 par De Esquival, Cuba en 1511 par Velázquez, lequel lance depuis Cuba 3 expéditions vers le Mexique, dont celle de Cortes en 1519. Cortés se sert des populations soumises à l’impôt par l’empire aztèque pour détruire celui-ci. Les aztèques tombent en 1521. Velázquez autorise aussi Narvaez à fonder une colonie en caroline du Sud, mais celui-ci fait naufrage au large de la Floride, ce qui n’empêche pas l’un des survivants, Cabeza de Vaca d’explorer le sud des États-Unis et de découvrir la Californie en 1536. En 1526, partis de la côte pacifique du Panama, Pizarro et De Almagro atteignent le Pérou, où ils découvrent l’empire Inca, qui est vaincu par traîtrise en 1532 ; les indiens résisterons avec leur leader Tupac Amaru, assassiné en 1572. Le pape Alexandre 6 accorde sa bénédiction à l’impérialisme espagnol, qualifié de « guerre juste » dans la bulle de 1493, en même temps qu’il partage entre puissance impérialistes portugaises et espagnoles les zones de conquête chrétienne. En avril 1500, le portugais Cabral débarque au Brésil et en prend possession au nom de l’autocrate auquel il obéit. Ce n’est qu’à partir de 1530 que le Portugal commence vraiment à s’y intéresser et des investisseurs portugais privés à y faire leurs affaires, notamment dans le bois. Pour les habitants de ces contrées, c’est un massacre : d(‘abord un ethnocide, notamment par l’évangélisation, mais aussi un génocide : en quelques dizaines d’années, des millions d’indiens disparaissent sont assassinés. Ce massacre est d’abord cautionné par l’Eglise, qui n’entend pas prendre la défense de sauvage qui parlent des langues incompréhensibles et vivent nus, et dont la conversion semble improbable. Ce n’est qu’en 1537 que le pape Paul 3 reconnaît l’humanité des indiens d’Amérique, ne faisant que mettre un léger frein à un massacre désormais bien avancé. Alors que les indiens accueillent d’abord les conquistadores les bras ouverts, les prenant même pour des dieux, c’est à la fois la volonté de les convertir de force et de les soumettre au travail forcé qui va générer révoltes, résistance et fuite, ainsi que le prolongement imbécile de l’œuvre civilisatrice chrétienne, la destruction de tout ce qui résiste à la conversion et à l’asservissement économique qui lui est corrélative depuis plus d’un millénaire. C’est dans ce contexte de justification de génocide in situ que surviennent les récits « ethnographiques » faisant état de cannibalisme. Le 30 janvier 1494, Colomb à Torres : « gens féroces mais gaillards bien faits et d e très bon entendement, […] ils feront une fois arrachés à leur inhumanité […] les meilleurs esclaves qui soient » (sick !). en 1495, Colomb envoie quelques centaine de « sauvages » Arawaks comme esclaves en Espagne, où ils meurent rapidement victimes de maladies contre lesquels ils ne sont pas immunisés. Isabelle de Castille ordonne alors que les indiens d’Amérique et des caraïbes soient mis en esclavage sur place... : les caribéens dans les champs de canne à sucre qui commencent à être créés, les amérindiens dans les mines d’or et d’argent. Au Mexique et au Pérou, les esclaves amérindiens sont utilisés dans des systèmes d’exploitations où ils travaillent alternativement dans l’agriculture, les mines, la production des tissus, la construction de maisons, les bâtiments publics, les églises, bien sûr, et les routes. Le système fonctionne assez mal, et dans certaines exploitations ou haciendas, les spoliateurs terriens préfèrent remplacer le statut juridique d’esclave par celui, plus rentable et efficace, de salarié. Le roi d’Espagne donne aux conquistadores le statut de seigneurs féodaux, ce qui se traduit immédiatement par des violences et des actes de sadisme sur les population qui vivent sur les terres que ces mercenaires spolient. Colomb, qui n’est pas en reste de ce point de vue, proteste néanmoins contre les actes les plus barbares. En 1510, une vaste plaisanterie, appelée « requerimiento » du juriste Rubios, propose une caricature de légitimisme impérialiste : il s’agira de lire aux populations découvertes sur de nouveaux territoires, un texte (lu en espagnol), les appelant à se soumettre, sous peine d’être immédiatement réduits en esclavage. Evidemment, la réduction à l’esclavage est systématique...deux cathos s’opposent à cette infamie, De Vitoria, théologien à Salamanque, et De Las Casas, fils d’un compagnon de Colomb, dominicain et évêque du Chiapas, auteur du premier texte anticolonialiste, « très brève relation de la destruction des Indes » (1548). Las Casas réfute l’esclavagiste aristotélicien Sepulveda en août 1550 à Valladolid, Charles Quint interdit d’asservir les seuls amérindiens (1530), mais il est déjà trop tard pour ces peuples : la majeur partie d’entre eux sont déjà décimés et quasiment disparus. En un siècle, de 1492 a 1600, le nombre d’amérindiens est passé de plus de 50.000.000 à 10.000.000. On a beaucoup parlé d’un massacre « microbien » pour expliquer globalement ce génocide, ce qui relève des thèse habituelle des négationnistes. Certes, la rougeole, la grippe et la variole ont fait leur lot de victimes. Mais le travail forcé et les massacres des insoumis ont fait l’essentiel, favorisant en outre l’affaiblissement des organismes, la putréfaction des chaires et la pénétration microbienne. Incas et aztèques pratiquaient euxmêmes l’esclavage, dans la même mesure que les africains, auxquels il faut ajouter néanmoins les esclaves religieux victimes de sacrifices humains. Mais au-delà, c’et une économie de subsistance où l’on ne produit que le nécessaire, auquel on ajoute parfois la production de l’agréable quand on le plaisir escompté vaut la peine nécessitée. Et surtout on bénéficie intégralement de l’usufruit de ce que l’on produit. Le génocide indien va en outre être la conséquence de la volonté de se débarrasser de la présence culpabilisante et résistante de ces indigènes, ne se laissant par ailleurs exploiter qu’à reculons, dans une résistance constante à l’oppresseur. Dès 1500-1510, les espagnols et les portugais ont résolu de remplacer les indiens par des esclaves africains. Colomb est partisan de cette idée, lui qui connaît bien Madère et ses champs...Ferdinand le catholique autorise la traite négrière vers les Amérique dès 1501. Las Casas qui croit y voir un recours contre l’asservissement des indiens approuve, montrant par là les limites de son « humanisme ». les premiers noirs sur le continent américains sont des marins africains, dès les premières expédition de Colomb et dans la plupart de celles qui suivent. Puis après autorisation royale de déportation d’esclaves africains, quelques dizaines en Haïti. En 1526, une roi congolais baptisé dans la religion catholique proteste auprès du roi du Portugal contre les raids effectués dans son royaume par les mercenaires africains auxquels les portugais achètent leurs esclaves. « Jean 3 le Pieux », instigateur de l’inquisition et du monopole éducatif des jésuites au Portugal, autorise en 1533 les négriers à gagner du temps en faisant directement le trajet Afrique-Amérique sans passer par Lisbonne, pour accélérer le rythme de la déportation et donc la production industrielle de main-d’œuvre esclave. Sur les côtes orientales de l’Afrique, les trafiquants d’esclaves sont arabophones (viennent du golfe)mais aussi indiens, malais, chinois. Commerce triangulaire, émergence et mondialisation du capitalisme : le capitalisme naît de l’esclavagisme. La Révolution industrielle de l’Europe est en effet le fruit des profits accumulés grâce à l’exploitation des esclaves africains dans les champs de canne à sucre des caraïbes et les mines d’Amérique. Après la découverte des Amériques, les couronnes européennes voient d’un mauvais œil la concession qu’elles ont faite aux conquistadores, et envisagent un processus de colonisation. Un conseil des Indes est ainsi institué en Espagne en 1524 ; des vice-rois, représentants directs de la couronne espagnole dans les nouvelles colonies,
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sont institués. S’ensuit un quadrillage territorial pyramidal : les vices-royauté sont divisées en « audiencias », celles-ci en « gouvernorats ». Le Portugal qui s’intéressait peu au Brésil jusqu’alors y envoie une expédition militaire quand des mercenaires français au service de la monarchie française s’en approchent, en 1530, et en 1555 (expédition de Durand de Villegagnon). Le territoire brésilien est divisé en « capitaineries » dont l’exploitation est abandonnée à des « donataires », i.e. des entrepreneurs privés, proto-capitalistes. C’est le système existant déjà à Madère et aux Açores, mais la couronne portugaise va vite faire encadrer ces « donataires » par un gouverneur général en 1548. le climat côtier est très favorable à la culture de la canne à sucre : le souci principal consiste à se procurer de la main-d’œuvre, de la « ressource humaine ». Les amérindiens des côtes brésiliennes fuient à l’intérieur des terres pour échapper aux escadrons de la mort de l’époques, les trafiquants et mercenaires connus sous le nom de « bandeirantes ». Les importations d’esclaves africains commencent en 1538 et à partir de là à un rythme effréné. Impérialisme franco-anglais et nouveau monde : en 1497, Jean Cabot (Giovanni Caboto) navigateur au service de l’Angleterre, découvre Terre-Neuve, explore les côtes du Groenland, du Labrador et de la Nouvelle-Angleterre. Puis l’armateur dieppois jean Ango commandite plusieurs expéditions, dont celle de l’italien Da Verrazano, qui atteint la côte du Maine pour le compte de la france et repère l’embouchure de l’Hudson en 1525 ; c’est l’anglais H. Hudson qui en remonte le premier le cours en 1609, et y fonde un comptoir pour le compte de la france. En 1534, Jacques Cartier s’arroge le Canada au nom de la france. En 1608, la ville de Québec est fondée par François De Champlain. En 1585, une tentative de colonisation de la Virginie par l’anglais W. Raleigh échoue. En 1614, des hollandais s’installent au sud de Manhattan et transforme « Nouvelle-Angoulême » en « NouvelleAmsterdam », avant d’atteindre le Guyana en 1616. Vers 1650, ce sont des colons anglais qui sont les plus nombreux sur la côte est de l’Amérique du nord. Ce sont ainsi des colons anglais protestants puritains embarqués sur le Mayflower qui fondent la colonie du Massachusetts en 1620. S’y ajoutent 12 colonies anglaises : Virginie, NY, Delaware, New jersey, New Hampshire, Maryland, Carolines du nord et du sud, Pennsylvanie, Géorgie, Connecticut, Rhode Island, noyau dur des Etats Unis lors de la déclaration d’indépendance de 1776. Commerce triangulaires et impérialisme européen : c’est entre 1530 et 1570 que le commerce d’esclaves africains transatlantique dépasse le commerce d’esclaves africains trans-saharien. La traite transsaharienne draine pas moins de 5000 esclave par an pour la période considérée, sans oublier que jusqu’au 19°, des pirates musulmans se livrent à des razzias sur des navires chrétiens, dont ils récupèrent la marchandise humaine, à laquelle ils ajoutent les équipages, de même qu’ils font des razzias en méditerranée, à madère et en islande. 850 000 chrétiens auraient de cette manière été réduits en esclavage entre 1580 et 1680. La libération peut être obtenue contre rançon pour les plus riches d’entre eux. La plupart de ces esclaves sont condamnés aux galères. La traite transatlantique commence à un rythme de 2000 déportations annuelles jusqu’en 1530, date à laquelle le chiffre dépasse 5000. Jusqu’en 1550, la traite transatlantique ne l’est pas vraiment : les destinations sont Açores, Europe et Sao Tome, les colonies espagnoles d’Amérique venant en 3° position, devant le Brésil ; cette proportion s’inverse après 1550. entre 1500 et 1550, ce sont surtout les mercenaires esclavagistes portugais qui les achètent ou les razzient à l’embouchure des fleuves Sénégal et Congo entre autres. Ces trafiquants s’installent de manière permanentes à certains endroits, comme à Luanda (300 mercenaires colons en 1590). Ils les amènent de là vers les « entrepôts » de Sao Tome, des îles du Cap Vert, d’où ils les acheminent vers Espagne, Portugal, marché européen et américain. A partir de 1550, les trafiquants espagnols ont, pour les colonies espagnoles d’Amérique, une demande de plus en plus importante d’esclaves, qu’ils achètent aux trafiquants portugais dans l’archipel du Cap-Vert, ne pouvant accéder au continent africain du fait de l’arbitrage papal (« qui a dit que ces gens là n’ont pas de morale...? » !!!). Les trafiquants d’esclaves espagnols sont pour la plupart originaires de Séville, les portugais de Lisbonne. Parmi eux, des « très chrétiens », mais aussi des « conversos » : lors de la Reconquista catholique de la péninsule ibérique (1492 en Espagne, 1497 au Portugal), les juifs sont massacrés, torturés, arrêtés, subissent l’inquisition, sont expulsés. Certains pour échapper à ces exactions se convertissent. Ce sont les conversos, méprisés par les bouseux endogames avec ou sans couronne. Certains révisionnistes WASP américains, ainsi que des leaders d’organisations musulmanes américaines ont ainsi cherché à faire porter la responsabilité de la traite transatlantique aux juifs, de manière à attiser les tensions entre communautés judéo et afroaméricaine...c’est absurde : d’abord parce que la proportion de juifs dans la population ibérique pré-reconquista, avec la tolérance religieuse relative qui y existait, amène les chercheurs à estimer que la majeure partie de la population ibérique a des ancêtres juifs ; en outre, comment supporter cette vision de l’histoire à posteriori qui gomme la conversion forcée des juifs au christianisme ? C’est en tant que chrétiens que des descendant immédiats de juifs ont éventuellement participé à la traite transatlantique. En 1550, les esclaves africains constituent 10% de la population de Lisbonne ; là ils sont esclaves domestiques, jardiniers, ouvriers agricoles, ouvriers des chantiers navals (construisant des coques de noix). Maria de Vilhena, originaire d’Evora, affranchit à sa mort 10 esclaves : 1 chinois, 3 amérindiens, 2 arabophones, 1 slave, 1 africain noir, 2 métis (probablement à cette époque né d’un viol). En Espagne, en 1550, toute famille aisée d’Andalousie possède au moins un esclave : ils sont 6000 sur 85000 habitants à Séville en 1565 (majoritairement africains noirs). Dans cette ville et en Espagne, les femmes esclaves noires auprès d’une maîtresse sont souvent des confidentes, les esclaves ont accès à l’église, ont leur confrérie religieuse, leurs enfants sont baptisés (politique des jésuites). Les relations sexuelles entre noirs et blancs, i.e. souvent entre maître et esclave, ne sont ni rares ni interdites, mais relèvent néanmoins du viol dans de telle conditions, et non d’une union librement consentie, du moins par l’esclave. Les noirs affranchis et les métis (« nègres »et « mulâtres ») peuvent jouer « un certain rôle économique » (?) dans la ville. Mais la plupart d’entre eux sont esclaves dans les mines andalouses. On trouve aussi des esclaves noirs dans le sud de la france (contrairement au discours monarchique officiel) et en Italie au 16° siècle. Il faut néanmoins noter qu’en 1571, un trafiquant français essaie de vendre sur le port de Bordeaux une cargaison d’esclaves : le parlement de Guyenne s’y oppose le fait arrêter et déclare les esclaves libres du fait qu’ils ont touché « le sol du pays qui se veut la mère de la liberté ». Au 16° et au début du 17°, il est facile d’en acheter a Florence, Naples, Venise. Néanmoins, la possibilité d’exploiter une population autochtone accrue permet aux dominants européens de se passer peu à peu d’esclaves exotiques après 1600. Cependant des approprios coloniaux sur le retour, en fin de carrière, reviennent en Europe avec leurs esclaves. En Amérique en revanche, le sort des esclaves, pilier absolu de toute économie, est extrêmement violent : travail dans les plantations, les mines, les ports, les chantiers de construction, les ateliers de confection, femmes domestiques et prostituées, interdiction de toute vie familiale, ce qui n’empêche pas le métissage, essentiellement par le viol ; sur 11.000.000 d’esclave afro-américains, 4.000.000 sont déportés au Brésil. Ils y sont encore à peine 4000 en 1570, 15000 en 1600 (presque tous dans les plantations de canne à sucre). C’est du Brésil que les plus grosses marges de profits sur le marché du sucre sont tirés : l’espérance de vie d’un esclave à partir de son exploitation y est de 10 ans. Il est moins coûteux pour les planteurs de déporter de nouveaux esclaves que de se servir de la reproduction sexuelle pour l’élevage industriel des enfants-esclave, jugé « trop coûteux » (i.e. « pas assez profitable »). De 1580 à 1640, la couronne espagnole s’empare de l’empire portugais, et s’efforce de chasser des océans les mercenaires anglais, français et hollandais. Et c’est en vain que le pape Urbain 8 menace d’excommunication les catholiques engagés dans le trafic d’esclave : les catholiques continuent. A partir de 1530, des navires de mercenaires anglais intrus pénètrent dans la zone d’influence ibérique africaine. Protestation portugaise à la cour anglaise en 1555, sans succès. Puis autorisation accordée à ces trafiquants anglais d’acheter de l’or sur les côtes guinéennes en 1572, les portugais se réservant le monopole sur les esclave. Mais en 1609, les anglais prennent possession des Bermudes, de La Barbade en 1627, de St Kitts et Nevis en 1628, de Montserrat et Antigua en 1632. là, ils mettent en place des plantations de tabac, dans lesquelles ils emploient d’abord des « volontaires » (paysans pauvres d’Angleterre travaillant gratuitement pendant plusieurs années contre la promesse de pouvoir acquérir ensuite des terres sur place) ; mais ce
système s’avère trop peu profitable au goût des ambitieux dominants anglais. En 1619, 20 esclaves noirs sont débarqués d’un navire hollandais dans la colonie anglaise de Virginie où est également cultivé le tabac. Ce sont les premiers esclaves afroétasuniens connus. Les hollandais font donc du commerce d’esclaves avec les anglais, mais aussi avec les colons du Brésil depuis 1570, et à partir de 1590, abordent les côtes africaines ; les trafiquants hollandais investissent dans les plantations brésiliennes, et une Compagnie néerlandaise des indes Occidentales est créée en 1621 (monopole privé du commerce transatlantique en Hollande). Ils créent en Amérique les comptoirs de Bahia et Recife au Brésil, Curaçao, St Thomas et St Eustache (Caraïbes). Et Manhattan. En Afrique, ils prennent Elmina et Luanda aux portugais en 1641, ce qui met fin au monopole portugais de 150 ans sur l’exploitation de l’Afrique. Les trafiquants portugais s’installent donc au Mozambique d’où ils déportent désormais les esclaves vers les plantations brésiliennes. Dès 1530, les mercenaires français, loin d’être en reste, commencent à trafiquer à l’embouchure des fleuves Sénégal et Gambie. Certains sont des marins originaires de Dieppe, et participent à des expéditions commanditées par Jean Ango, ou à de la piraterie plus « autonome », sans armateur. Les guerres de religions passant en métropole, le trafic reprend en Afrique et en Amérique : déjà présents au Canada, les mercenaires aux ordres des autocrates français décident de s’installer dans les caraïbes, et Richelieu envoie quelques centaines de colons normands en 1627 sur l’île de St Christophe au nord de la Guadeloupe, colonisée peu après en même temps que la Martinique, à partir de 1635. des contrebandiers français commencent à faire halte en Guyane française (Cayenne en 1637) et fondent « Port Margot » à Haïti en 1641. Richelieu fait créer la Compagnie des Iles d’Amérique en 1635. Vers 1630, les trafiquants hollandais parviennent à convaincre les approprios anglais planteurs de tabac de la Barbade de se reconvertir dans le sucre : plus de main-d’œuvre, mais plus de profit aussi. Les anglais abandonnent à cette occasion le système des « engagés » ou « volontaires » pauvres européens. Français et anglais, approprios de la Barbade, de Guadeloupe, Jamaïque et Martinique commencent à importer des esclaves africains à partir de 1660 : si l’esclave est un investissement plus coûteux au départ, alors que le coût d’entretien d’un européen pauvre laissé à lui-même est moindre, les scrupules pour une exploitation plus violente sont dans son cas purement inexistants, sans compter la descendance virtuelle du « cheptel ». Ce qui n’empêche que 12000 prisonniers politiques Irlandais sont réduits en esclavage par les anglais à la Barbade entre 1645 et 1655. A partir de 1675, les trafiquants français envoient officiellement des vaisseaux négriers s’approvisionner à l’embouchure du Sénégal pour les revendre aux approprios des plantations antillaises, auquel est acheté le sucre envoyé en Europe, une partie des profit étant réinvesti en pacotille à destination des trafiquants africains pourvoyeurs d’esclaves. A partir de 1650, le marché international des esclaves voit dominer les multinationales esclavagistes du Portugal, de l’Angleterre et de l’Espagne, suivis des français, des hollandais, ainsi que des suédois (1640), des danois (1671), des allemands de Brandebourg (1687). La demande de sucre en Europe ne cesse de croître, donc les plantations, donc la traite des esclaves africains. Des armes à feux sont vendues de plus en plus souvent aux mercenaires africains pour accélérer les razzias. Chaque métropole s’efforce en outre de mettre en place un certain protectionnisme dans la fourniture des denrées nécessaires aux colonies caribéennes et américaines, ce en quoi la france surpasse les autres puissances impérialistes, avec le colbertisme. Mais chaque puissance ne pratique le protectionnisme que pour soit et cherche à imposer le libre-échange à l’autre, via pirates, contrebandiers et mercenaires : l’isolationnisme. En 1640, on compte 300.000 esclaves africains dans les colonies espagnoles d’Amérique, dont 150.000 au Pérou et 80.000 au Mexique. En 1651, Philippe 6 trouve le chiffre insuffisant et autorise des trafiquants espagnols à mettre en place un trafic d’esclave pour le compte des colonies espagnoles. C’est ainsi qu’entre 1651 et 1675, 60.000 esclaves viennent s’ajouter aux précédents dans les colonies espagnoles. La plupart sont achetés à des intermédiaires hollandais installés dans les Antilles. Les grandes voix de l’Eglise espagnoles se plaignent à la cour de ce que se soient des hérétiques protestants qui aient le monopole sur l’approvisionnement en Afrique. C’est la Société française « Compagnie de Guinée » qui obtient de 1702 à 1712 le monopole papal officiel sur l’importation d’esclave en Amérique espagnole. Les négriers portugais de Lisbonne et de porto se chargent d’approvisionner le Brésil en « bois d’ébène » : 150.000 de 1600 à 1650, 350.000 de 1650 à 1700, 150.000 de 1700 à 1710... ; les négriers portugais se fournissent alors au Congo (où certains chefs locaux se sont laissés convaincre de devenir cathos et de commercer avec les trafiquants européens), en Angola (où ce sont les approprios portugais brésiliens qui arment et affrètent directement les vaisseaux négriers). L’essentiel du trafic anglais est organisé depuis la Barbade ; en 1655, ils prennent la Jamaïque aux espagnols. En 1651 est fondée la « Compagnie britannique de Guinée », avec pour objectif la fourniture d’esclaves africains aux colonies britanniques des caraïbes, elle opère sur la côte africaine, de la Sierra Leone au Ghana. Elle est remplacée en 1663 suite à des difficultés financière par la « Compagnie des aventuriers britanniques en Afrique » ; parmi ces actionnaires, John Locke, le Duc d’York (frère de Charles II l’autocrate, il préside la compagnie), et de nombreuses autres personnalités britanniques de cette époque. Cette Compagnie est installée à Cape Coast au Ghana, à NY en 1664. en 1672, elle est remplacée par la « Compagnie Royale Africaine » ou RAC, qui se voit attribuer un « monopole de 1000 ans » sur les esclaves d’Afrique...on y retrouve à nouveau Locke et autres « prestigieux » actionnaires, entre 1672 et 1689, la RAC déporte 80.000 esclaves, achetés sur la côte, du Sénégal à l’Angola en passant par le Bénin et le Nigeria. 25.000 d’entre eux sont déportés à la Barbade, 23.000 en Jamaïque, 7.000 dans les autres îles britanniques, 25.000 sont vendus aux trafiquants ou esclavagistes espagnols ou nord-américains. En effet, les anglo-américains du Massachusetts construisent des navires négriers qu’ils commencent à envoyer dès 1637 dans les caraïbes pour se fournir en esclaves, qui sont déportés des caraïbes vers le Connecticut. A partir de 16455, les navires partent du port de Salem (près de Boston) pour aller chercher des esclaves directement en Afrique, et les déporter en Nouvelle-Angleterre ou les revendre contre du sucre dans les Antilles. Les esclaves sont exploités dans les plantations de tabac qui sont créées en Virginie : entre 1672 et 1725, les colonies anglo-américaines acquièrent 75.000 esclaves à travers la seule RAC. En 1669, la Caroline se dote d’une constitution rédigée par Locke, rendant l’esclavage « institution nécessaire » : ils peuvent avoir la religion de leur choix, mais les maîtres gardent sur eux un « pouvoir absolu ». Malgré ses efforts, la RAC n’aura jamais le contrôle total du trafic d’esclave britannique. Ainsi des trafiquants new-yorkais parviennent à racheter à des pirates basés à Madagascar des esclaves razziés par ceux-ci sur les côtes orientales de l’Afrique. Planteurs et trafiquants d’esclaves ne cessent de faire pression sur le gouvernement anglais pour une totale liberté de commerce en la matière...ce qui aboutit à l’abolition du monopole de la RAC en 1698. Entre 1698 et 1707, les anciens trafiquants illicites britanniques d’esclaves déportent très officiellement 75.000 esclaves, 18.000 pour la RAC sur la même période. Le port de Bristol puis celui de Liverpool doivent son essor à la traite négrière. En ce qui concerne la france, le trafic d’esclave est régulé par Colbert de manière à tirer un maximum de profits pour l’Etat. Comme Richelieu, Colbert créé ainsi successivement plusieurs compagnies pourvues du monopole de la traite esclavagiste : Compagnie des Indes Occidentales (1664), Compagnie du Sénégal (1674), Compagnie de Guinée (1683). Ce trafic esclavagiste d’Etat passe par l’île de Gorée à l’embouchure du Sénégal à partir de 1677. Mais ces compagnies font banqueroute les unes après les autres...ce qui n’empêche pas les colonies des Antilles françaises de prospérer, bien au contraire, avec 25.000 esclaves vers 1680, pour 20 à 25.000 immigrants de france. La menace que représente cette exploitation criminelle en terme de révolte potentielle aboutit à la rédaction du Code Noir à l’instigation de Colbert en 1685. Ce code est appliqué à l’île Bourbon » (Réunion), en Louisiane, aux Antilles françaises. Ce Code noir qui entend légitimer un statut social de non-droit, a pour cadre idéologique la Contre-réforme catholique, véritable reconquista catholique française : révocation de l’Edit de Nantes (1685), expulsion des juifs des colonies française (code noir, art.1, 1685), évangélisation forcée catho des esclaves (code noir, art.2, 1685), interdiction d’exercer publiquement tout autre culte que catholique (code noir, art.3, 1685), interdiction aux esclavagistes protestants d’entraver le culte catholique obligatoire pour leurs esclaves (code noir, art.5, 1685). Ce code stipule entre autre : Interdiction de se marier entre eux sans autorisation du
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maître, leurs enfants appartiennent au maître de l’esclave-mère, interdiction aux esclaves de porter des armes, de se réunir avec des esclaves d’un autre esclavagiste, de vendre de la cane à sucre pour leur compte, de posséder personnellement quoi que ce soit, de se porter devant les tribunaux, le témoignage de l’esclave devant les tribunaux n’ayant pas valeur de preuve, de porter la main sur le maître ou sa famille (peine de mort immédiate), de prendre au tas nourriture ou tout autre bien (peine de mort immédiate, et au minimum marquage au fer rouge ou coups de fouet). Le marron, esclave insoumis fugitif, a les oreilles coupées s’il est capturé lors d’une chasse à l’homme organisé par l’esclavagiste et sa cour, puis le jarret la deuxième fois, et la mise à mort la 3° fois. Bien meuble, les esclaves font partie de l’héritage de l’esclavagiste à sa mort, et restent attachés aux terres qu’ils cultivent. Les enfants des esclaves non-catholiques peuvent être séparés de leurs parents. A partir de 1724, les mariages entre blancs et noirs sont interdits, et la pratique de l’affranchissement, déjà extrêmement limitée, sévèrement contrôlée. Le code noir sera repris par l’autocratie espagnole et ne sera abolit en france que lors de la Révolution de 1848. Le « Codigo Negro » espagnol est demandé par le « despote éclairé » (les « lumières » !) Charles III en 1783, à des juristes de l’île de St Domingue. Il est promulgué en 1789. Esclavagisme et « Lumières » : (Lire « Dialectique des Lumières, 1947, Adorno et Horkheimer) ; la france ne se met à la traite des esclaves africains qu’à partir de 1640. c’est Louis XIV qui est à l’origine de cette politique esclavagiste. Au 18° siècle, la france se place en 4° position sur le marché des esclaves. La véritable cause de la guerre de succession d’Espagne de 1701 à 1713 est la maîtrise de la colonisation des Amériques et du trafic des esclaves. C’est la Grande-Bretagne qui en sort victorieuse en 1713 et devient alors grande maîtresse des mers : elle acquiert Gibraltar, Minorque, l’Acadie (Nouveau Brunswick et Nouvelle-Écosse), Terre-Neuve et récupère le monopole du trafic des esclaves en Afrique pour les colonies espagnoles. Ce monopole est revendu par l’autocrate britannique à une nouvelle compagnie, la « Compagnie des Mers Du Sud » ; parmi ses actionnaires, tout l’establishment de l’époque : membres de la famille royale, parlementaires, « intellectuels » (Daniel Defoe, Isaac Newton, Jonathan Swift, John Gay, Alexander Pope) et même le Canton suisse de Berne... La Compagnie s’engage à fournir 4800 esclaves / an pendant 30 ans, et de payer au roi d’Espagne une taxe de 33 pesos pour chaque esclave vendu. Ce qui n’empêche une traite « illégale » de se maintenir, menée par des trafiquants français, des hollandais et des portugais. Puis la GrandeBretagne récupère la Nouvelle-France au Canada, occupe momentanément Guadeloupe et Martinique, récupère Haïti et créé ainsi St Domingue où sont installées des plantations de sucre, de café, de coton, et d’indigo. Vers 1750, on compte dans les seules Antilles françaises plus de 300.000 esclaves. Y sont créées en 1759 les premières « Chambres de Commerce et d’industrie ». En Louisiane, le monopole du commerce revient à Antoine Crozat (1712), puis à John Law pour le compte de Philippe d’Orléans (1717), les français y développant la culture de la canne à sucre ; après 1713, les acadiens s’y réfugient massivement. En 1803, la Louisiane est revendue aux Etats Unis. En 1719, John Law met en place à Paris une nouvelle Compagnie des Indes, titulaire du monopole du commerce extérieur de la france (y compris émission de monnaie) ; elle survit à la crise financière de 1720 lors de laquelle Law fuit à Bruxelles. Les monopoles esclavagistes légaux de chaque puissance impériale sont mis à mal par le trafic illégal d’esclave ; la période de 1730 à 1780 est l’apogée de la traite négrière : 170.000 esclaves déportés dans des navires anglais, 100.000 dans des navires français, entre 1730 et 1740. C’est aussi durant cette période que les colonies d’Amérique du nord se mettent à importer massivement des esclave pour le développement de plantations de coton, tabac, riz et indigo. En 1732, il y a 32.000 esclaves noirs pour 14.000 colons blancs en Caroline Du Sud. Les esclaves déportés vers ces destinations (continent nord-américain) sont déportés des caraïbes et d’Afrique par des navires provenant du Rhode Island (Newport, Providence), affrétés par des armateurs de Nouvelle-Angleterre. Ainsi l’université Brown à Providence porte le nom de cette grande famille de « philanthropes » accessoirement trafiquants esclavagistes. C’est aussi durant cette période que les ports européens de Nantes, Bordeaux, La Rochelle, Saint-Malo, Londres, Bristol, Liverpool, Copenhague, entre autres, tirent le maximum de profit de ce trafic. Manchester récupère ainsi le coton importé des colonie et développe une industrie de cotonnades très appréciées des rois africains collabos et des esclavagistes des colonies. C’est de là qu’est partie la première Révolution Industrielle, à partir du secteur du textile... ; les trafiquants français font aussi d’énormes profits : ainsi de la famille nantaise des Montaudoin (357 navires négriers envoyés entre 1694 et 1791 en Afrique, aux Antilles (notamment St-Domingue). C’est à cette époque que se construisent les hôtels particuliers, palais de justice et théâtres luxueux des villes de Bordeaux et Nantes. En Afrique, la vente a lieu sur les plages ; les esclaves sont amenés là après avoir été razziés parfois à plus de 100 kilomètres à l’intérieur des terres. Au 18° siècle, les trafiquants français opèrent de la Mauritanie au Sierra Leone, les Hollandais en Côte-d’Ivoire, puis les Hollandais, les anglais et les danois au Ghana, et au Bénin, alors que français et anglais se disputent le Nigeria, le Cameroun et le Congo, les portugais s’approvisionnant essentiellement au Congo et en Angola, ainsi qu’au Mozambique. L’horreur concentrationnaires des « coques de noix » a été souvent décrite ; souvent, des révoltes y éclatent : tant que les côtes de l’Afrique restent en vue, les détenus sont tentés de se jeter à la mer pour essayer de regagner la rive. Mais en pleine mer aussi, de véritables mutineries se produisent, et des sous-fifres des mercenaires, parmi l ‘équipage, sont parfois tués ; mais le plus souvent cela se termine dans un bain de sang, les « meneurs » sont torturés et tués devant les autres détenus. Au 17° siècle, un capitaine seulement a été tué au cours de l’une de ces mutineries ; au 18° siècle en revanche, plusieurs capitaines mercenaires recevront des esclaves insurgés la monnaie de leur pièce ; ainsi, en 1753, les captifs du négrier britannique Marlborough parviennent à se débarrasser de tout l’équipage, ne laissant la vie sauve qu’à 2 marins, qui les ramènent en Afrique. Mais dans d’autres cas, des mutins parviennent à passer leurs tortionnaires par dessus bord, sans pouvoir regagner l’Afrique. C’est le cas du Tamango dont l’histoire est racontée par Mérimée. Les mutions de l’Amistad, dont l’histoire a été adaptée à l’écran par Spielberg, parviennent à s’échouer en 1839 à Long Island (NY) au bout de 2 mois, après s’être débarrassés de l’équipage de mercenaires au large de Cuba, sous l’impulsion de Joseph Singbé (ou Cinqué). Là ils sont emprisonnés par les colons européens à New Haven (Connecticut) avant d’être acquittés ; mais leur victoire ne tient qu’à ce que la traite est déjà interdite, officiellement...On estime que sur l’ensemble du commerce triangulaire négrier, 1.000.000 d’être humains au minimum sont morts par suicide, carences, torture ou assassinat lors de ces traversées. Arrivés dans les colonies, le prix de vente des esclaves est de 4 à 5 fois le prix d’achat ! Les esclaves sont marqué pour la deuxième fois au fer rouge par l’acheteur. Ils sont ensuite envoyés par les esclavagiste dans les plantations de coton, de café, de sucre ou d’indigo (le café est d’abord cultivé au Yémen, puis les hollandais « volent » l’arbuste ; les français le cultivent en Guadeloupe, Martinique et Guyane en 1720, puis viendront Brésil et Kenya). Les moins malchanceux deviennent domestiques, assurant l’entretien des propriétés des esclavagistes, qui n’hésitent pas à s’accorder selon leurs désirs quelques viols des femmes esclaves. Aux Antilles, les travaux agricoles se divisent entre « jardin » et « moulin », le jardin sont les champs, où les esclaves travaillent tout le jour, divisés en 3 groupes : hommes bien portants, femmes, enfants et convalescents. A midi, une courte pause doit permettre à chaque esclave de se nourrir à partir des légumes qu’il tire de la culture d’un petit lopin de terre après le coucher du soleil. Le moulin, ce sont les chaudières, ou les esclaves, étouffés par la chaleur et les vapeurs, ahuris de fatigue, se brûlent très fréquemment. Les esclaves sont placés sous une surveillance constante. La plantation est un camp de détention en même temps que d’extermination par le travail. Les plantations les plus vastes atteignent 100 ha : là, 200 esclaves travaillant côte à côte, les esclavagiste fusil en main vivent la terreur permanente de la mutinerie. Et effectivement, les révoltes d’esclaves sont aussi fréquentes que violentes : en 1521 sur Hispaniola ; en 1527 à Puerto Rico et au Mexique, en 1548 en Colombie, en 1550 au Pérou, de 1665 à 1740 en Jamaïque tout au long de l’occupation anglaise, guerre servile de plus de 75 ans ! Au Brésil en 1835, par les esclaves d’origine haoussa. Et bien d’autres. mais elles se terminent souvent par d’immenses massacres au cours des répressions menée par esclavagistes et de leurs mercenaires. Dans les Antilles françaises, le grand marronnage, qui débouche
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sur la constitution de petites communautés libres cachées dans la forêt, ne semble possible que dans l’île de St-Domingue, suffisament grande. Au Brésil, la Communauté des marrons de Palmares parvient à vivre en autarcie de 1615 à 1697 environ, avant d’être massacrée par les esclavagistes Portugais. Mais c’est au Surinam que cet élan libertaire débouche sur une véritable communauté qui perdure du 17° siècle à nos jours : celle des saramaka (cf. ethnologue John Price ; cf. aussi Bastide). Mais la plupart des fugitifs sont repris, avec les conséquences que ns connaissons : la torture (dont l’émasculation). Pour les moindres écarts de conduite, l’enchaînement dans les postures les plus douloureuses témoigne de l’imagination sadique des propriétaires. Quant aux prétendues règles de retenue imposées par les autocrates, elles sont bafouées sans le moindre scrupule : l’esclave n’a pas le droit de porter plainte ! Une fois le dos et les fesses déchirées par le fouet, on verse du jus de citron sur ses plaies, pour éviter la gangrène, dit-on... ; le marquis de Sade peut aller se rhabiller. Il faut toujours garder à l’esprit qu’à chaque époque, l’esclavage a été invisible à la grande majorité des contemporains libres... Histoire de racisme – rappel : esclavage et racisme sont tout au long des temps historiques étroitement liés, le travail de Hannah Arendt sur le totalitarisme est intéressant mais largement en-deça de la réalité, favorisant le préjugé qui consiste à refuser toute origine antérieure aux nationalismes du racisme ; les études les plus récentes sont celles menées par Poliakov en france. C’est dans les théories pseudo-biologique du 18° siècle que les doctrines racistes puisent leurs racines ; ces théories sont à leur tour liées à un vieux fond d’anciennes croyances « naturalistes » du Moyen Age, avec pour sources la haine du chrétien pour le « païen », « l’infidèle » ou « l’hérétique » ; la « xénophobie » (haine des « barbares ») commune aux élites greco-romaines ; le mépris du noir lié à la bible, car Cham a commis le crime odieux de se moquer de la virile nudité paternelle de Noé. Noé maudit alors Canaan, le fils de Cham et déclare que sa descendance sera esclave jusqu’à la fin des temps de celles de Sem et Japhet... (Genèse, 9, 20-27). Dès le début du christianisme, et sans doute dès la Torah, l’habitude se prend de considérer la « race » noire comme descendant de Cham, du fait sans doute que la genèse évoque parmi les descendants de Cham les royaumes de Kouch et de Pount, Soudan et Somalie actuels. Ce préjugé sera commun aux juifs, aux chrétiens et aux musulmans. Au Moyen Age, dans l’iconographie, les démons sont noirs ; on la retrouve à la veille de la colonisation dans la littérature missionnaire catholique. Quelques esprits anti-raciste et abolitionnistes : le capitaine portugais Fernao de Oliveira, précurseur de la doctrine abolitionniste, déclarant en 1554 que l’achat et la vente d’être humains est odieux ; le dominicain espagnol Domingo de Soto en 1557 régresse un peu en s’opposant à des « formes injustes de réduction en esclavage » ; plus radical, le dominicain espagnol martin de Ledesma exhorte en 1560 tous ceux qui possèdent un esclave acquis par l’intermédiaire de mercenaires portugais à les libérer sous peine de damnation éternelle ; idem pour Tomas de Mercado en 1569, autre dominicain ; en 1573, le juriste Bartolomé Frias de Albornoz publie un livre, aussitôt condamné par l’inquisition jésuitique, réfutant la légitimité de la réduction en esclavage de prisonniers de guerre. Au contraire, Thomas More maintien sur « Utopia » en 1513, l’esclavage pour les prisonniers de guerre et les condamnés ; Grotius le théologien juriste maintient en 1625 le droit du vainqueur de réduire le vaincu en esclavage, mais le rejette entre chrétiens ; Bossuet menace les protestants de condamnation divine s’ils s’avisent de s’opposer à l’esclavage, ce qui serait un blasphème à l’égard du St Esprit « qui ordonne aux esclaves par la bouche de St Paul de demeurer dans leur état ». Par un anticléricalisme primaire, Voltaire embrasse la « thèse polygéniste » pour le plaisir de contredire le plaisir biblique sans s’appuyer pour cela le moins du monde sur la raison, dont il fait grand cas : blancs et noirs sont trop différents pour avoir des ancêtres communs. Pour Buffon, le noir est une « dégénération » du blanc ; Montesquieu fait l’éloge de l’esclavage chez les romains, et s’oppose dans l’esprit des lois à l’affranchissement massif des esclaves, expliquant que celui-ci est naturel pour les populations de certains pays. Voltaire, spéculateur habile, touche des dividendes de la traite, et fait œuvre de révisionnisme en faisant dire à l’esclave noir de Candide qu’il a été vendu par ses parents. L’altermondialiste Helvétius se propose de cesser de consommer du sucre pour ne pas être entaché du sang des esclaves dont la denrée est entachée. Dans l’encyclopédie de Diderot et d’Alembert, l’article « Nègre » est ouvertement raciste, tout en s’opposant à la traite « contraire au droit naturel ». Rousseau réfute radicalement toute légitimité à l’esclavage, qu’il oppose à la notion même de droit : mais il s’agit de la servitude des blancs européens à l’égard de l’autocrate. Par contre le discours sur l’inégalité est édifiant par le racisme qui le sous-tend. Abolitionnistes : L’esclavage, comme forme juridique, n’est à ce jour pas encore aboli sur l’ensemble de la planète ; encore moins en tant qu’exploitation du travail de l’homme par l’homme. C’est en Grande-Bretagne que l’abolitionnisme va commencer à germer plus franchement dans les esprits : dans l’œuvre de F. Hutcheson (1755), celle du juriste G. Wallace (1760), celle de John Miller (1771). En france, il faut attendre 1770 avec un ouvrage collectif de Diderot et l’abbé Guillaume Thomas François Raynal (membre de l’aile gauche des Encyclopédiste du côté d’Helvétius ; cet ouvrage se vendra à 25.000 exemplaires, chiffre alors phénoménal, en france, en Grande-Bretagne et aux Amériques), un autre de Louis Sébastien Mercier (« L’An 2440 », qui ajoute la voix du cœur à celle de la raison), un autre de Bernardin de St Pierre (dénonçant avec un grand courage politique le silence de ses contemporain sur la question). En France, le parlement de Paris s’employant à émanciper les africains qui parviennent à en faire la demande par voie judiciaire sur le sol du royaume, les planteurs depuis les colonies se plaignent au roi, qui fait instaurer en 1777 une « Déclaration pour la police des noirs », qui surveille les ports pour en interdire l’accès aux esclaves africains. En 1759, une communauté quaker de Philadelphia en Pennsylvanie prononce la première condamnation collective de l’esclavage. C’est à l’état de Vermont que revient l’honneur d’avoir le premier, dans l’histoire de l’humanité, interdit la pratique de l’esclavage sur l’espace correspondant, en 1777. mais il ne faut pas se tromper sur les causes de l’abolition de l’esclavage. Là où il a été abandonné, ce n’est pas en raison de la pression des abolitionnistes par principe révolutionnaire, largement minoritaires : mais c’est parce que le système des plantations a atteint son apogée vers 1775, avant qu’il devienne évident au cours des décennies suivante qu’il n’était pas le système d’exploitation et de profit capitaliste le plus efficace, car socialement intenable et avec un prix de cette « ressource humaine » en constante augmentation. Simultanément, en 1776, le travail salarié se développait et apparaissait notamment à Smith, Hume, Franklin, Quesnay et Mirabeau (physiocrates) comme plus profitable et plus facile à mettre en place. C’est dans les 13 colonies américaines de la Grande-Bretagne que débute le mouvement abolitionniste. Pour le compte de la secte des Quakers, ou « société des amis », mouvement protestant d’inspiration libérale fondé par le cordonnier anglais G. Fox, W. Penn fonde une colonie en Pennsylvanie ? Vient s’y greffer un groupe de Quakers suisses, hollandais et allemands, installés dans le quartier de Germantown à Philadelphia, qui diffuse en 1688 un tract déclarant que « on a pas plus le droit de réduire en esclavage les noirs que les blancs ». En 1759, les quakers de Philadelphie refusent collectivement la présence parmi eux de tout individu impliqué à un titre ou un autre dans la traite. En 1767, A. Bénezet, quaker français émigré à Londres puis à Philadelphia, publie un essai dans lequel il décrit la condition des esclaves noirs, et qui sera d’une influence décisive en Grande-Bretagne. Après le Vermont, ce sont le Massachusetts et le New Hampshire en 1783 qui abolissent l’esclavage. Des mesures plus lentes sont prises par les Etats de Pennsylvanie, Rhode Island, Connecticut, Virginie, New Jersey, puis dans le n-o (Ohio, Indiana, Illinois, Michigan, Wisconsin). Mais même dans ces états, les esclavagistes s’opposent farouchement au mouvement et parviennent à maintenir l’esclavage. La Caroline du Nord créé le délit d’assistance à esclave en fuite (1787), lequel devient en 1793 un crime au niveau fédéral ! la Virginie interdit l’accès à son sol aux esclaves récemment affranchis en 1793, l’Ohio réduit le droit des affranchis et notamment leur liberté de circulation en 1804. En 1800, soutenu par les abolitionniste locaux, un groupe d’affranchis de Philadelphia envoie au Congrès une pétition demandant l’abolition totale et immédiate de l’esclavage et de la traite : rejeté à 85 voix contre 1...En Europe, le Danemark abolit le premier officiellement à la traite en 1803. Le mouvement abolitionniste se développe en Grande-Bretagne à partir de la secte méthodiste vers 1750 : le méthodiste est une secte protestante fondée en 1738 par J. Wesley, pasteur anglais ayant voyagé en Amérique et vomissant l’esclavage. En 1765, G. Sharp, fonctionnaire gagné aux
idées méthodiste, soigne un esclave infirme croisé dans les rues de Londres, avant que celui-ci soit kidnappé par son propriétaire qui fait en sorte de l’envoyer à la Barbade. Sharp s’y oppose, est traîné en justice par le propriétaire, qui retire finalement sa plainte, mais fournit à Sharp l’occasion de forger un argumentaire abolitionniste en faveur de la libération des 15.000 esclaves alors captifs en Grande-Bretagne. Sharp réitère son « coup » en 1772 pour faire libérer l’esclave James Somersett ; le juge Mansfield considérant qu’il n’existe aucune loi légitimant l’esclavage ordonne la libération de Somersett, suivie par celle de tous les esclaves détenus en Grande-Bretagne. Mais le même Mansfield donne raison au capitaine du Zong en 1783, après que celui-ci ait jeté par dessus-bord 132 esclaves « pour économiser l’eau potable », mais en fait dans le seul but de toucher l’assurance...ce verdict inique est néanmoins cassé en appel. Une « Société pour l’Abolition de la Traite » est fondée par Sharp, soutenu par le potier Josiah Wedgwood, le conférencier quaker T. Clarkson, et le député aristocrate du Yorkshire, W. Wilberforce, ami personnel de W. Pitt « le jeune », lui-même adepte des théories de Smith... A partir de 1787, c’est sur des arguments économique que Wilberforce appuie son argumentaire pour séduire l’establishment. Commence alors le mouvement dit « back to Africa » : la Société achète à un roi africain quelques milliers d’ha au sud de la Guinée : là est créée la colonie britannique de Sierra Leone, où d’anciens esclaves africains de Grande-Bretagne et d’Amérique sont expédiés par petits groupes. Il y a aussi de nombreux esclaves ou anciens esclaves noirs à participer au mouvement abolitionniste : Quobna Otobah Cugoano (né en 1757 sur la côte du Ghana, kidnappé à 13 ans, déporté dans les caraïbes puis amené par son maître en Grande-Bretagne, auteur du premier livre contre la traite écrit par un africain) ; Olaudah Equiano (né en 1745 au Nigeria, déporté aux caraïbes puis en Europe, affranchi en 1766, auteur d’une autobiographie en 1789). En 1791, le parlement anglais rejette par 163 voix contre 88 l’abolition de la traite (malgré l’appui de Pitt). La Révolution française refroidit le mouvement abolitionniste à cause des idées égalitaristes que brandit le lobby des planteurs anglais à Londres. Néanmoins des milliers de ménagères anglaises renoncent à mettre du sucre s leur café ou thé pour faire avancer la cause. En 1807, le prix des esclaves sur le marché continuant son ascension d’une part, les libéraux anglais étant séduit par la doctrine de Smith d’autre part, le parlement adopte l’abolition de la traite dans l’Empire à compter du 1° janvier 1808. Les Etats Unis en font autant la même année. Les anglo-saxons vont alors s’efforcer e faire abolir la traite dans les colonies des autres empires. Attentif au mouvement abolitionniste, Diderot, Raynal et Condorcet prennent la suite des abolitionnistes britanniques quelques années avant la Révolution. Condorcet prend part à cette « lutte » au même titre que ces homologues aristocrates anglais : sur la base d’arguments économiques, et dans des termes clairement racistes. En 1788 apparaît à Paris la « Société des amis des Noirs » sur le modèle britannique : quelques aristocrates libéraux (Olympe de Gouges, féministe amie de Mercier). Elle se contente de donner des droits civiques aux seuls affranchis et aux métis. L’abbé Grégoire, s’il réclame l’égalité pour les juifs et les métis, la refuse aux esclaves noirs. Soupçonnée de favoriser les révoltes d’esclaves, ce qui est lui faire trop d’honneur, la Société parisienne est dissoute en 1792. La DDHC de 1789 est muette sur le sort des esclaves, du fait du racisme ordinaire ambiant. Elle mentionne par contre le droit de propriété, qui inclut la propriété d’esclaves : cela n’est pas étranger à la présence à Paris du lobby des esclavagiste et approprios. En 1789, près de 500.000 esclaves travaillent à St Domingue, 700.000 en Martinique et en Guadeloupe. Dès 1789, les planteurs font sécession ; en août 1791, de vastes soulèvements d’esclaves éclatent à St Domingue, lesquels commencent à s’organiser de manière autonome. ToussaintLouverture, surnommé ainsi en raison des brèches qu’il taille dans les rangs adverses, affranchi doté d’une intelligence stratégique remarquable, prend la tête de l’insurrection. En août 1793, il impose pratiquement aux planteurs et à la métropole l’abolition de l’esclavage sur l’île. Les « révolutionnaires » français soucieux de ne pas encourager une extension des révoltes dans les autres îles, alors partiellement occupées par le britanniques, admettent le fait accompli à contre-cœur pour la partie bourgeoise et aristocratique de la « Révolution ». c’est seulement en février 1794, sur proposition de Danton, l’esclavage est aboli dans toutes les Antilles françaises, les anciens esclaves sont transformés en citoyens français de plein droit. Mais la loi stipule que ceci ne sera fait qu’à partir de publication de décrets d’application qui n’arriveront jamais [instrument politique utilisable immédiatement, servant de moyen de pression contre certains « révolutionnaires » ?]. Pas plus l’Egypte, que les Antilles et la Réunion ne bénéficieront de cette loi une fois Bonaparte, dont le racisme est notoire, parvenu au pouvoir, St Domingue en revanche passe à partir de 1796 sous la direction de fait de Toussaint-Louverture. Napoléon y fait envoyer des troupes en 1802, donnant lieu à des massacres, l’utilisation de la torture, des exécutions sommaires par fusillade et noyade si caractéristique des guerres coloniales de la France par la suite...les troupes coloniales sont notamment dotées de 1500 chiens dressés à tuer les « marrons », achetés à Cuba. Arrêté, Toussaint-Louverture est déporté en france où ses geôliers le laissent délibérément mourir de faim et de froid en 1803...mais les esclaves sont devenus autonomes, et savent mener une résistance opiniâtre aux colons et aux mercenaires racistes, même en l’absence de leur remarquable leader, qui oblige les troupes colonialistes à quitter l’île en 1803. Le 1° janvier 1804, l’indépendance de l’île est proclamée. Les esclaves africains insoumis rendent alors hommage au indiens caribéens disparus par génocide, en redonnant à l’île son nom pré-colonial : Haïti. Par malheur, un ancien lieutenant de ToussaintLouverture, Jean-Jacques Dessalines, se fait couronner empereur « Jacques 1° ». La partie orientale de l’île fait alors sécession, obtenant son indépendance en 1844, au titre de République Dominicaine. Dans les autres îles, l’esclavage est rétabli dès 1802, et de manière encore plus féroce qu’avant la Révolution, les pseudo-révolutionnaires apportant aux esclavagistes tout leur soutien pour empêcher les esclaves d’imiter Haïti. De 1822 à 1827, 600 condamnations à mort sont prononcées contre des esclaves martiniquais, soupçonnés d’avoir voulu empoisonner leur maître. La métropole interdit le séjour en france des militaires, noirs, puis des noirs, puis les mariages mixtes. Les élèves noirs de Polytechniques sont priés de retourner auprès de leur famille...la Monarchie de juillet après la réaction napoléonienne maintiendra cet état de fait. Seul avancée, l’abolition de la traite le 29 mars 1815, décrétée par Napoléon qui joue alors son va-tout durant les « 100 jours », sous la pression de benjamin Constant et des libéraux partisan de l’exploitation salariale et pas du tout philanthropes. En 1814, le Congrès de Vienne redessine la carte de l’Europe après la chute de naboléon, mais pour le plus grand intérêts des grandes familles de dominants européens. Mais sur l’initiative de la Grande-Bretagne, traite et piraterie sont officiellement condamnées ; première déclaration internationale en la matière. La condamnation officielle de la traite s’ensuit alors en Suède et Hollande (1818), Espagne (1835), Portugal et Vatican (1839 ; le Vatican est alors dirigé par le très conservateur Grégoire n°16 : par une nécessité de faire évoluer sa stratégie face aux changements contre lesquels elle finit par admettre son impuissance croissante ! ce n’est sans doute pas un hasard qu’elle attende la décision portugaise), Brésil (1850). Mais ce ne sont là que des déclarations officielles de bonnes intentions d’Etats qui par ailleurs n’hésitent pas à couvrir la poursuite du trafic à grande échelle par des esclavagistes français, espagnols, portugais étasuniens et anglais. 2.000.000 d’esclaves au minimum sont déportés entre 1811 et 1870 d’Afrique vers le Brésil (60%), Cuba et Puerto Rico (32%), Antilles françaises (5%) et Etats Unis (3%, vers les plantations de coton...). même si la Grande-Bretagne, à laquelle est confié le contrôle militaire des côtes ouest-africaines, a sans doute taxé son silence contre la perpétuation de la traite, c’est à son action que l’on doit l’abolition progressive de ce canal de l’esclavagisme. Pour échapper aux contrôles de sa majesté, les trafiquants utilisent des bricks, bateaux effilés dans lesquels les esclaves subissent une condition plus épouvantable encore. Aux navires de patrouille britanniques viennent s’ajouter 20 navires français à partir de 1827 ; de 1830 à 1870, 1287 navires négriers sont interceptés, les esclaves étant renvoyés en Sierra Leone et au Liberia. Si les capitaines trafiquants sont anglais, ils sont passibles de la peine de mort à partir de 1824. Mais durant toute cette période, il suffit aux trafiquants d’arborer le pavillon de complaisance de la « freedom » étasunienne, lesquels ne peuvent être inspectés, pour déjouer tout contrôle... ; la dernière déportation transatlantique d’esclaves aurait officiellement eu lieu en 1867 en direction de Cuba...
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Esclavagisme et empire ottoman : si la traite transatlantique décroît peu à peu, en revanche la traite musulmane se maintient, du moins jusqu’à ce que la Russie annexe le Caucase en 1801, principale source d’approvisionnement de l’empire ottoman en esclaves. Si bien que la traite transsaharienne atteint son apogée entre 1800 et 1880 (1.165.000 esclaves déportés). C’est la colonisation européenne du continent africain qui va y mettre fin, en instituant en contrepartie le travail forcé au bénéfice des puissances impérialistes occidentales...la traite menée par les trafiquants arabophone en Afrique orientale connaît égaleme,nt son apogée au 19° siècle : plus de 1.000.000 de déportés, dont la moitié vendue à Zanzibar, capitale du sultanat d’Oman, entre 1870 et 1873. une partie de ces esclaves sont exploité sur cette île dans les plantations de clous de girofle, une autre partie est déportée vers le Moyen Orient, et une autre partie enfin vers Madagascar et la Réunion (où les esclavagistes français ont développé des plantations de sucre et de café). En 1873, un traité britanico-zanzibar y met officiellement fin. Abolition de l’esclavage et lobbies esclavagistes : Par ailleurs, l’abolition officielle par les puissances impériales ne vaut pas assentiment des planteurs, contre lesquels aucune mesure sérieuse n’est prise ; par ailleurs, l’essor de l’économie anglaise dépend de l’afflux du coton étasunien. En 1823 est créée à Londres une Société pour « l’Abolition de l’Esclavage » et non plus seulement de la déportation. Wilberforce est malade, la direction de l’opération est confiée à T. F. Buxton, un autre méthodiste ; elle permet des réformes à petits pas : interdiction du fouet et des marchés aux esclaves ; affranchissement obligatoire des filles nées après 1823, admission des esclaves comme témoins devant les tribunaux, limitation de la durée journalière de travail à 9 heures...a chaque réforme, le lobby esclavagiste se dit « scandalisé » ; les esclaves finissent par penser que le gouvernement britannique veut peut-être leur bien...de nouveaux soulèvement interviennent à la Barbade (1816), et au Guyana (1823), où 13.000 esclaves insurgés enferment leurs propriétaires (malheureusement sans les exterminer) et tuent 2 contremaîtres. L’armée britannique arrête l’insurrection et fait pendre 50 insurgés. Le pasteur J. Smith, soupçonné d’avoir encouragé l’insurrection, est condamné à mort, et meurt, gracié trop tard, ce qui fait de lui le « premier » martyr (blanc !) de la cause abolitionniste. Cette erreur des tenants de l’esclavagisme va profiter à la cause des insurgés réprimés ; les réformes se poursuivent malgré le lobby esclavagiste : droits civiques britanniques aux affranchis en 1828. En 1832, des milliers d’esclaves entrent en insurrection en Jamaïque ; les esclavagistes s’estimant insuffisamment protégés par la Grande-Bretagne menacent de faire sécession et rejoindre le « pays de la liberté » (Etats Unis) ; en 1832 toujours, une réforme du code électoral permet l’arrivée au parlement de quelques ouvriers et d’une petite-bourgeoisie « progressiste ». Ce sont ces nouveaux élus, et non l’establishment britannique trop directement compromis avec le lobby esclavagiste, qui vont voter l’abolition de l’esclavage dans les colonies britanniques le 26 juillet 1833, étendue à l’Inde seulement en 1838. 20.000.000 £ sont versées aux esclavagistes pour indemniser ces ordures que l’on aurait dû massacrer depuis longtemps. Les anciens esclaves sont alors convertis en « apprentis » : concrètement, ils sont contraints de continuer à travailler les ¾ de la journée pour leur ancien approprio pendant 7 ans. En ce qui concerne les colonies françaises, le mouvement d’émancipation étouffé sous le nabot (Léon) se réveille sous la Restauration, avec le soutien de Hugo, madame de Duras, et sous le règne de Louis-Philippe. La « société française pour l’abolition de l’esclavage » est fondée en 1833, avec pour président Schœlcher, qui manie une indignation humanitaire dont la sincérité est salie par l’utilisation de l’argumentaire salarial. Cela dit, pour la première fois, un mouvement français abolitionniste est en même temps nettement antiraciste. L’influence protestante sur ce mouvement est plus marquée qu’un demis-siècle plus tôt, même si Schœlcher est franc-maçon, rationaliste et agnostique ; Lamartine soutien le mouvement du bout des lèvres, comme tous les pseudo-démocrates avides de gloriole de son espèce. Là aussi on parle « indemnisation ders colons » ! C’est lors de la Révolution de 1848, qu’une commission est mise en place sous l’impulsion du physicien François Arago, présidée par Schœlcher. Elu député de Guadeloupe et Martinique, Schœlcher fait voter le 27 mars 1848 l’abolition immédiate de l’esclavage dans les colonies françaises contre indemnisation des esclavagistes, afin que l’expression « le sol de la france affranchit l’esclave qui la touche » y ait valeur de loi. Aux Antilles, les hideuses protestations des esclavagistes sont couverte par la clameur des esclaves. L’esclavage comme statut juridique disparaît au Brésil en 1888, dans les colonies hollandaises en 1862, dans les colonies espagnoles (dont Cuba) en 1886 et aux Etats Unis en 1865. aux Etats Unis, alors que la culture du coton reste le fer de lance économique, il y a 3.000.000 d’esclaves dans les Etats du sud des Etats Unis. Le protestant de Boston W.L. Garrison, également engagé dans le combat féministe, fonde en 1831 un journal abolitionniste et en 1833 la première société américaine contre l’esclavage, appuyée par un financier new-yorkais, Arthur Tappan ; en 1843, elle compte 200.000 membres. Mais elle se heurte à une société foncièrement raciste, y compris dans les états du Nord, comme la Nouvelle-Angleterre, où la bourgeoisie est plus raciste même que dans les états du sud, refusant de laisser noirs et métis accéder aux « écoles blanches ». en 1837, le militant abolitionniste Elijah P. Lovejoy est lynché par les habitants d’Alton dans l’Illinois, après que sa maison ait été brûlée. En 1840, l’ancien esclavagiste « repenti » J.G. Birney fonde le « freedom party » et est élu président. En 1819, il y a 11 états esclavagistes et 11 états abolitionnistes. Le Missouri entre dans l’Union en tant qu’état esclavagiste. Sans parler du Texas, du Nouveau-Mexique et de la Californie qui entrent en 1848. L’ancienne esclave fugitive Harriet Tubman, retourne dans les états du Sud plus de 20 fois pour y libérer plusieurs centaines d’esclaves. Dans le même temps, le journaliste propagandiste sudiste, G. Fitzhugh, originaire de Virginie, s’emploie à démontrer que la vie des esclaves dans le sud des Etats Unis est de loin préférable à celle des ouvriers dans les usines britanniques. En 1860, Abraham Lincoln, antiesclavagiste notoire, est élu président des Etats Unis. la Caroline du Sud fait alors sécession. Suivent le Mississipi, la Floride, l’Alabama, la Géorgie, la Louisiane, le Texas, la Virginie, l’Arkansas, la caroline du Nord, le Tennessee. 9.000.000 d’habitants contre 22.000.000 au nord. La guerre est ouverte. 600.000 morts, dont 38.000 afro-américains. Entre autres massacres, celui de 300 soldats noirs avec leurs femmes et enfant à Fort Pillow, Tennessee, le 12 avril 1864. l’esclavage est ensuite immédiatement abolit dans les états du sud. La mesure bénéficie aussi aux amérindiens : en effet les espagnols avaient pris l’habitude de razzier les indiens dès leur installation au Nouveau-Mexique vers 1600 pour les réduire en esclavage (quoique cela soit interdit depuis 1530 !), cette pratique étant reprise par les approprios esclavagistes mexicains à partir de 1821, et par les approprios américain à partir de 1848 ; ces enlèvement fournissent des profits d’autant plus juteux, que les doux moutons chrétiens qui ont toujours vomi la Révolution s’emploient à payer chèrement la libération de ceux-ci. Quelques mois plus tard, Lincoln est assassiné par un sudiste. Esclavagisme et colonialisme : c’est au fil de 4 siècles de traite que les pays européens, à commencer par l’Espagne chrétienne de la reconquista, colonisent l’Afrique, d’abord par ses côtes. Au 19° siècle, on ne se contente plus d’installer quelques comptoirs : on veut s’approprier le continent africain dans son ensemble. A partir de 1750, la connaissance de l’intérieur de l’Afrique commence à progresser. Les expéditio,ns se multiplient, encouragées par les sociétés savantes. Les premiers aventuriers explorateurs, trouvent bientôt des missionnaires collés à leurs basques. Parmi ceux-ci, les missionnaires protestants se distinguent par leur volonté d’enseigner aux africain à se prémunir contre les razzias dont ils font l’objet de la part des trafiquants, que ceux-ci soient au service du trafic transsaharien, transatlantique ou de la péninsule arabique. D’autres explorateurs-missionnaires devenus célèbres sont profondément anti-esclavagistes, mais vont servir des intérêts qui ont d’autres visée : c’est le cas du missionnaire Livingstone, rejoint près du lac Tanganyika par le journaliste new-yorkais Stanley, qui à travers ses récits d’exploration, va attiser la curiosité des puissances impérialistes et leur chuchoter la mythologie « civilisatrice », par le relais de la « British & Foreign AntiSlavery Society » fondée à Londres en 1839. Peu à peu les explorateurs, comme les conquistadores pour l’Amérique, sont investis de mission coloniale. Ils découvrent là des « conflits inter-ethniques », dont on peu légitimement s’interroger sur l’origine, qui ne peut être totalement étrangère aux traites occidentales et orientales et à l’instrumentalisation des populations pour l’approvisionnement en esclaves. C’est le cas au Sénégal en 1852, même si la traite y a été abolie en 1831. Bien souvent, la
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tactique consiste à placer tel ou tel petite autocratie locale sous « protectorat ». C’est notamment le cas de la tactique coloniale française. Peu à peu, à chaque nouvelle annexion, l’abolition de l’esclavage est officiellement proclamée. La Grande-Bretagne annexe Lagos, où pullulent les trafiquants d’esclaves, en 1861. Les guerres « inter-ethniques » qui suivent immédiatement le placement sous tutelle coloniale de tel ou tel royaume sont directement liées à la volonté de créer des entités territoriales aussi arbitraires que celles des autocraties antérieures, comme c’est le cas au Ghana dont la population est utilisée pour soumettre le royaume Ashanti, après 20 ans de guerre.... Léopold II lui aussi se sent soudainement une vocation philanthropique et fait créer en 1876 l’Association Internationale Africaine, avec pour but très officiel l’abolition des traites négrières. Ses agents confient au journaliste Stanley la direction d’opérations de reconnaissance visant à occuper la rive gauche du Congo, avec pour prétexte de mettre fin aux exaction du trafiquant d’esclave arabophone Tippo Tip. C’est ainsi que Léopold II devient souverain de « l’Etat indépendant du Congo ». En 1885, le ballet des hypocrite ayant atteint son objectif, ne reste plus qu’à le faire valider au plan international : conférence de Berlin, qui consacre l’accaparement de tout un continent par 5 puissances impérialistes, et trouve assez de culot pour parler de « mission d’amélioration de la vie des indigènes et de lutte contre les survivances de l’esclavage »...en 1889, l’esclavage est tout de même aboli, officiellement, dans l’empire Ottoman...partenaire officielle de cette colonisation pour le bien de la très chrétienne humanité, la papauté et la hiérarchie catholique, notamment par le biais du cardinal Lavigerie, sont soudain les champions de l’abolitionnisme. Après avoir été partenaire officiel de la colonisation des Amériques, du partage de l’atlantique et de la traite transatlantique, cette noble institution qu’est l’Eglise a beau jeu d’aller donner des leçons d’humanisme sur le continent en cours de colonisation aux trafiquants d’esclaves transsahariens...en 1900, l’un d’eux, Rabah, est vaincu par des colonnes françaises au Tchad, tandis que la france comme les autres puissances coloniales, s’efforce de pénétrer le plus profondément et le plus rapidement possible dans les terres pour en accaparer le maximum. La france est largement dominante. Mais l’abolition de l’esclavage reste une tarte à la crème, bien entendu : ainsi en 1915, un paysans sénégalais tente d’éviter d’être déporté en Europe lors de la guerre en faisant recruter à sa place l’un ed ses esclaves par un administrateur local, qui lui sans doute, n’en avait pas... ; quant à Madagascar, l’esclavage n’y est aboli qu’en 1896, après plus de 1000 ans de traite endémique...les britanniques signent un traité « avec les potentats locaux » visant à l’abolition « à terme » de l’esclavage officiellement en Egypte et au Soudan en 1895 et 1899. au Kenya, elle fait abolir l’esclavage en 1907. L’homme d’affaire Cecil Rhodes, incarnation de l’impérialisme, permet à la Grande-Bretagne de s’installer en 1890 en Rhodésie, colonie britannique officielle en 1923. Les italiens colonisent suite à la guerre italo-ottomane le territoire correspondant à la Libye en 1912. avec le contrôle de cette zone, c’est le dernier débouché de la traite transsaharienne qui est bloqué, et la dernière caravane connue d’esclave traverse la zone en 1929. avec le traite dé Versailles suite à la première guerre mondiale, les colonies allemandes reviennent en grande partie à l’impérialisme français. L’empereur d’Ethiopie (le Ras Tafari Makkonen), devenu régent en 1917 et empereur en 1930 sous le nom de Hailé Sélassié, aboli l’esclavage dans son empire en 1926. mais l’Ethiopie est envahie en 1935 par les troupes fascistes mussoliniennes. Ce n’est qu’en 1945 que Hailé Sélassié revient en Ethiopie, devenant l’objet d’un culte de la part des rastafaris jamaïcains. Les guerres inter-ethniques st on parle tant sont en fait clairement le fruit de la traite, car elles servent en fait à certains chefs africains instrume,ntalisés par les trafiquants occidentaux et arabophones de razzier d’autres groupes. Après la colonisation, des formes « invisibles » de traite subsistent en Afrique : l’une d’elle est la poursuite de la déportation sous couvert de pèlerinage à la Mecque. Pour cette traite, les trafiquants bénéficient parfois de la complicité des familles, mais surtout font miroiter des conditions de voyage pour ce pèlerinage sacré. Cela dure au moins jusqu’en 1950, et sans doute au-delà. Les caravanes disparaissent alors mystérieusement dans le désert...les africains ainsi razziés se retrouvent dans les soutes de cargos battant pavillon de complaisance, à destination de ports moyen-orientaux ou autres, ou sont privés de leurs papiers d’identité et revendus comme esclaves domestiques. Cette situation est dénoncée en 1953 par l’ambassadeur de france en Arabie saoudite, et en 1955 lors d’une assemblée de l’Union française ; c’est ce qu’évoque Hergé dans « Coke en Stock ». ce sont les recensements opérés par les administrations coloniales qui vont permettre de cartographier à intervalles réguliers un certain nombre de disparitions de populations. Une autre traite subsiste dans une région peu fréquentée ; ainsi, des esclaves africains razziés au sud du Soudan, fréquemment chrétiens, sont acheminés le long de la Haute vallée du Nil, en direction de l’Egypte et prétendument essentiellement en direction du Moyen-Orient, mais sans doute aussi vers d’autres destinations. Au Caire où les britanniques sont installés, il n’est pas rare de voir dans les familles aisées musulmanes et coptes des esclaves domestiques, au moins jusqu’en 1952 (« Révolution » nassérienne). Certains auteurs prétendent que le recours au travail forcé serait assez rare en Afrique et dans les colonies occidentales en général. Il faut dénoncer ce révisionnisme. On sait par exemple que la construction de routes, de voies ferrées et de ponts pour la liaison Congo-Océan a été faite avec recours au travail forcé, esclavage sur place. C’est aussi le cas pour le transport pédestre de marchandises et le BTP (cf. André Gide, « voyage au Congo », 1927). La Convention Internationale Relative à l’esclavage est signée en septembre 1926 à Genève. Mais elle n’est ratifiée que par 41 pays...et par ailleurs, son contenu est décevant par les définitions restrictives de ce crime. Elle ne sera pas suivie d’effet jusqu’en 1945. la contribution des peuples colonisés à la lutte antifasciste et à la chute des nazis et des fascistes italiens reste peu connue en Europe, et l’on interdit notamment aux colonisés participant à la libération de l’Italie, de la Sicile et de la France d’entrer dans les villes libérées. « Décolonisation », néo-colonialisme, ségrégation et esclavage : l’Afrique du sud est occupée à partir du 17° siècle par des colons hollandais, les Boers, auxquels viennent se joindre des protestants français fuyant les pogroms catholiques. Ces colons exploitent en Afrique du sud des africains hottentots razziés sur place par eux, ainsi que des esclaves dépotés d’Angola. En 1795, lors de l’occupation de la Hollande par la france, la Grande-Bretagne occupe l’Afrique du sud pour empêcher l’autocratie française de le faire. Elle la rachète aux hollandais en 1814. comme,nce alors dans cette partie du monde une vague de colonisation britannique. En 1833, les anglais décident d’abolir l’esclavage en Afrique du sud : les Boers qui s’y refusent s’installent alors dans le Transvaal, ce qui déclenche un conflit durant tout le 19° siècle ; en 1877, les britannique annexent le Transvaal, commence alors la guerre anglo-boer. L’homme d’affaire Cecil Rhodes, premier ministre de la colonie anglaise, mène une guerre qui aboutira à la capitulation des Boers en 1902, les Boers devenant alors citoyens britanniques. Mais après l’abolition de l’esclavage, les colons blancs pratiquent une politique ségrégationniste depuis cette date : cette politique vise )à s’approprier les meilleures terres, et à repousser à partir de 1840 les africains dans des réserves, à les priver de tout droit politique, y compris celui d’acheter des terres en dehors des réserves après 1913. vers 1900, les colons blancs représentent 20% de la population. Les africains tentent de s’organiser contre leur racisme à partir de 1912 en formant l‘ANC. En réaction aux injonctions de la métropole britannique, les colons blancs, Boers ou non, font sécession en 1925 et forment en 1931 la République (coloniale) sud-africaine. Le gouvernement Malan élu en 19488 met en place la politique d’apartheid systématique : interdiction de relations sexuelles entre personne ayant une couleur de l’épiderme différente, ségrégation spatiale selon le même critère, restriction des droits politiques des africains. Cette politique est directement inspirée de la doctrine nazie. En 1976 et 1977, des émeutes sanglantes ont lieu à Soweto. Ce n’est qu’en 1985 que la politique d’apartheid est du moins officiellement abandonnée. En 1990, Mandela est libéré. Les premières élections libres au suffrage universel ont lieu en 1994. idem au Malawi, que des colons britannique et Boers accaparent, prenant les meilleures terres ; c’est en 1963 que le Malawi prend ce nom et son « indépendance », même chose pour la Zambie en 1964. En 1965, le Zimbabwe déclare son indépendance ; il est occupé par une importante minorité de colons européens ; le régime blanc et raciste finit par céder la place à la majorité africaine, avec Mugabe en 1980. Sur 250.000 colons blancs, 125.000 partent à ce moment. Ceux qui restent s’accrochent aux terres spoliées par leurs ancêtres. Aux Etats Unis, lors de la guerre de sécession,
le parti démocrate est pro-esclavagiste et le parti républicain anti-esclavagiste. En 1866, la misère des 4.000.000 d’afro-américains est telle que la CSA (Confédération des Syndicats Américains) les exhorte à se syndiquer pour ne pas servir de briseurs de grève, ce à quoi les patrons blancs s’efforcent de les réduire. Dès 1870, une politique ségrégationniste est mise en place dans les transports en commun ; dans le Mississipi, les anciens esclavagiste font en sorte d’imposer un test d’alphabétisation et une taxe aux noirs qui veulent voter, pour en réduire le poids politique, en 1890. Les tests d’alphabétisation ne sont bien sûr pas imposés aux analphabètes blancs, nombreux jusqu’à l’heure actuelle dans ces contrées d’imbécillité violente... ; le Ku Klux Klan empêche le vote des noirs par la violence. Le KKK, fondé à Pulaski dans le Tennessee dès le lendemain de la guerre civile, est une organisation raciste et terroriste, qui n’est autre dans les états du sud que la branche militaire du parti démocrate. En 1877, les violences racistes du KKK entraînent son interdiction. Le nombre de lynchages de noirs dans les états du sud ne cesse néanmoins de s’accroître, passant de 48 en 1882 à 160 en 1892, pour redescendre ensuite lentement jusqu’à 130 en 1901... ; en 1915, le KKK réapparaît ouvertement à Atlanta (Géorgie) sous l’impulsion d’un pasteur méthodiste, qui lui donne à la fois une coloration puritaine, xénophobe et ultranationaliste. Noirs, juifs et immigrants sont désormais visés par la secte. Ce KKK exercera une influence déterminante jusque dans les années 1920. il est à nouveau interdit en 1928, ce qui n’entrave en rien ses activités. En 1883, la Cour Suprême met fin à la mixité dans les auberges, les transports publics, théâtres et lieux de distraction. En 1892, Homer Plessy qui a « 1/8° de sang noir et 7/8° de sang blanc », s’installe dans un wagon « réservé aux blancs », d’où il est chassé, mais refuse d’obtempérer et désobéit à son expulsion du wagon, il est alors traîné en justice, condamné et jeté en prison. En 18896, les juges de la Cour Suprême justifient et légalisent le système d’apartheid que les états du sud entendent mettre en place, jusque dans les chiottes. Ce système persistera jusque dans les années 1950. De 1885 à 1917 inclus, on dénombre 3740 lynchages, dont 997 blancs et 2734 noirs. Ces lynchage affectent essentiellement les états du Texas, de la Géorgie et du Mississipi. En 1918, 63 noirs y sont lynchés : 2 noirs brûlés vifs, 3 torturés à mort, 4 cadavres brûlés après leur assassinat ; tout le monde connaît les auteurs des crimes. La police est parfaitement complice. Cette violence raciste n’a pas totalement disparu aujourd’hui. Les afro-américains cherchent alors à s’installer dans les états du nord ou le racisme est moins meurtrier, quoique tout aussi présent. Ils y parviennent avec le développement des métropoles industrielles de Chicago, Detroit, Saint Louis, NY et Philadelphia. La concurrence économique que les patrons instrumentalisent entre blancs et noirs provoquent là des émeutes racistes, notamment à Chicago en juillet 1919, lors de laquelle des blancs avec le soutien actif de la police attaquent le ghetto noir, faisant 38 morts et 137 blessés. En 1925, le KKK est à son apogée, contrôle notamment l’état de l’Indiana, et regroupe pas moins de 5.000.000 d‘adhérents à travers les Etats Unis. lors de la crise de 1929, les noirs sont les premiers licenciés, et les plus massivement. Mais sensibles à la politique sociale du démocrate Roosevelt, les noirs se mettent à voter pour la première fois en 1936 démocrate, mettant fin ainsi au traditionnel vote noir en faveur des républicains. Du coup les démocrates commencent à changer d’attitude, assez tardivement : en juin 1941Roosevelt instaure un « comité pour l’équité dans l’emploi », sous la pression de la NAACP et du leader syndical noir A. P. Randolph. Durant la 2° guerre mondiale, plus de 150.000 afro-américains servent dans l’armée américaine, où ils subissent une forte ségrégation, obéissant à des officiers exclusivement blancs. En 1930, la NAACP commence à attaquer avec le soutien de la Cour Suprême quelque peu purgée de ses éléments racistes, la ségrégation scolaire. La NAACP est l’œuvre de l’intellectuel militant afro-américain WEB Du Bois, fondateur en 1905 du « Mouvement Niagara », d’où est issue en 1909 la NAACP. Le mouvement des droits civiques va naître notamment du mouvement syndicaliste américain, où militent de nombreux afro-américains (entre autre CIO, quasi seul syndicat autorisé aux Etats Unis...)des anthropologues blancs comme Franz Boas soutiennent alors le mouvement, ainsi que nombre d’autres intellectuels blancs. A la mort d e Roosevelt, le démocrate Truman originaire du Missouri, qui a payé sa cotisation au KKK durant sa jeunesse, devient président des Etats Unis. Pourtant, sans doute sous la pression électoraliste du parti démocrate, il dialogue avec la NACP, propose un loi contre les lynchages, le droit de vote sans restrictions dans les états du sud, l’abandon de la ségrégation dans les transports inter-états. C’est ainsi que Truman est réélu en 1948 grâce au vote afro-américain. C’est à ce moment seulement que le parti démocrate est qualifié de « plus à gauche » que le parti démocrate. Lors de son deuxième mandat, sous la pression des leaders syndicalistes noirs, Truman met fin à la ségrégation dans l’armée. En 1952, Eisenhower, républicain et conservateur, est élu président avec le soutien des états du sud. Earl Warren, ancien gouverneur de Californie et un des principaux soutien électoraux de Eisenhower, est nommé par celui-ci, qui ne connaît pas ses positions antiracistes, à la tête de la Cour Suprême. C’est ainsi qu’après une série de procès, la politique ségrégationniste est qualifiée d’inégalitaire par définition et officiellement abolie en 1954. La ségrégation scolaire totale ou partielle est alors présente respectivement dans 17 et 4 états. Eisenhower fait tout pour freiner la mise en œuvre de cette réforme. Il ne fait rien pour contrecarrer les émeutes racistes fomentées par des nazillons blancs au Texas et dans le Tennessee. Le FBI accuse la NACP d’être infiltrée par les communistes. Eisenhower est réélu avec le soutien des racistes blancs en 1956. mais Eisenhower est bien obligé de faire respecter la décision de la Cour Suprême lorsque le gouverneur démocrate de l’Arkansas O. Faubus entend s’opposer à la rentrée scolaire dans une école blanche de Little Rock à une famille noire en 1957. pourtant, en 1964, seuls 2,3% des enfants noirs peuvent fréquenter des écoles mixtes... ! puis vient le mouvement non-violent contre la ségrégation dans les autobus, lancé en Alabama en 1956, et présidé par le pasteur protestant baptiste ML King. Emprisonné en 1956, ML King connaît alors une renommée nationale et bientôt internationale. La lutte anti-raciste nonviolente est entamée en 1942 par le groupe CORE (Congress for Racial Equality), qui fait des sit-in dans les fast-food de Chicago, occupant des sièges réservés aux blancs, organise des virées de noirs et de blancs anti-racistes dans des bus en direction des états du sud. En 1960, suite à un sit-in à Atlanta au cours duquel ML King est arrêté, Kennedy intervient immédiatement pour obtenir sa libération. Ce catholique obtient alors en 1960 la majorité à la présidentiel avec un vote afro-américain massif et enthousiaste. En 1961, les bus Greyhound dans lesquels se sont embarqués des militants antiracistes en direction des états du sud sont violemment attaqués par des militants néo-nazis. Le pouvoir ne fait rien, la police ne reçoit pas ordre d’intervenir. Le démocrate G. Wallace s’oppose quant çà lui à l’intégration d’un étudiant noir en 1963 à l’université d’Alabama. La majorité de la population de l’état s’en prend au gouvernement fédéral quand celui-ci passe en force pour faire admettre les étudiants afroaméricains. En 1962, 9 églises noires sont incendiées en Géorgie. Les violences néo-nazies incluant l’assassinat de militants afroaméricains se poursuivent dans les années 1970. En 1963, une marche sur Washington réunit autour de ML King 250.000 militants antiracistes, face au Lincoln Memorial. Sous Johnson, la Poll Tax qui permet à 5 états du sud d’empêcher les afroaméricains pauvres de voter est interdite. Mais les agents de certains états refusent d’inscrire les noirs sur les listes électorales, ce qui donne lieu en 1965 à une marche avec ML King entre Selma et Montgomery en Alabama, au cours de laquelle les militants antiraciste sont violemment attaqués et subissent de la part de la police locale une féroce répression. Ce n’est qu’en 1965 qu’un évêque noir est désigné dans l’Eglise catholique américaine. En 1967, le premier juge afro-américain est nommé par Johnson à la Cour Suprême. En 1966, le militant noir antiraciste Stokely Carmichael, appartenant au « comité de coordination des étudiants non-violents » (SNCC, créé en 1960), face à la persistance de la ségrégation universitaire, décide de lance le slogan « black Power ». Parallèlement, 2 autres militants antiracistes afro-américains, HP Newton et Bobby Seale, fondent en 1966 le Black Panther Party. Ils se revendiquent du mouvement « back to Africa » lancé en 1916 par le militant panafricain Marcus Garvey (plus tard déporté dans son pays d’origine, la Jamaïque). Les violences racistes atteignent cependant leur apogée en 1967, alors qu’à la bêtise raciste blanche vient s’ajouter son équivalent afro-américaine. En 1968, de nombreuses émeutes urbaines éclatent. Le 4 avril 1968, à l’issue d’une marche de soutien à des grévistes afro-américains, ML King est assassiné par un néo-nazi. Les afroaméricains représentent aujourd’hui 10% de la population américaine, et par rapport à cette proportions, subissent une
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incontestable domination socio-professionnelle. 60%des familles afro-américaines sont monoparentales, ce que certains théoriciens attribuent à un héritage de l’esclavage, mais il faut rester méfiant à l’égard de cette théorie fumeuse émanent d’officines conservatrices et du lobby familialiste. Attribuer ce mode de vie à une survivance de l’esclavage, c’est un moyen tellement efficace de remettre en place un système familial tel que prôné par les conservateurs et les intégristes religieux ! en Californie et dans les Etats du sud, la politique de « discrimination positive » reste très contestée, ainsi que parmi les universitaires blancs. En 2000, la « communauté » hispan,ique a dépassé la communauté afro-américaine en nombre d’individus. Certains mouvements comme le « Nation Of Islam » de E. Muhammad et maintenant L. Farrakhan, tiennent des discours racistes inquiétants, assimilant notamment le juif au capitaliste blanc exploiteur des noirs... l’esclavage contemporain : parmi les formes d’esclavage actuelles il y a à la fois des survivances des précédentes, des transformations et des nouveautés. En ce qui concerne les survivances, la région dans laquelle l’esclavage n’est pas aboli après la 2° guerre mondiale est le « monde musulman » : l’abolition est prononcée au Maroc en 1922, Afghanistan en 1923, Irak en 1924, Transjordanie et Iran en 1929, Bahreïn en 1937, 1949 au Koweït, 1952 au Qatar. On a connaissance d’une vente d’esclaves à Djibouti en 1956 : les victimes avaient été capturées au Tchad par des trafiquants arabophones, mais encadrés par un mercenaire français. L’abolition officielle est encore plus tardive au Yémen (1962 : lors de la Révolution antimonarchique ; lors de la sécession de la République démocratique du Yémen du Sud en 1967, d’inspiration marxiste, cette abolition est réitéré, alors que la vallée de l’Hadramaout a longtemps été une voie de transit pour les caravanes d’esclaves), en Arabie Saoudite (1962, par le prince Fayçal craignant sans doute le succès des anti-autocrates yéménites ; mais en réalité sur les 100 à 200.000 esclaves africains et femmes esclaves africaines et asiatiques, seuls quelques milliers ont été affranchis ; ce pays n’a pas signé la convention internationale de 1926 ; des ventes publiques d’esclaves y ont lieu jusqu’en 1930 ; cf. article Le Monde 24 juin 1966 ; la traite se poursuit à l’heure actuelle : des femmes en provenance du sud-est asiatique se voient promettre un emploi et sont livrées dès leur arrivée à une double exploitation économique et sexuelle) et au Sultanat d’Oman (1970, quand le Sultan Qabous prend la place de son père ; Qabous « découvre » à cette occasion plusieurs centaines d’esclaves dans le palais de son père, dont certains auxquels il était interdit de parler sont devenus muets, et d’autres obligés de baisser la tête en permanence ont une paralysie des cervicales). La Mauritanie et le Soudan sont toujours esclavagiste, quoique non officiellement. Dans la République Islamique de Mauritanie, les maures (blancs d’origine arabe ou berbère) dominent 100.000 esclaves noirs et 1/3 de haratines, descendants d’esclaves affranchis mais maintenus après plusieurs générations en positions dominée. Le colon français n’a soit-disant « pas réussi » à y faire disparaître l’esclavage. L’esclavage y est pourtant officiellement aboli au moment de « l’indépendance ». Les propriétaires d’esclaves refusent de s’en séparer sans indemnité...les enfants esclaves sont fréquemment échangés lors de mariages entre maures. Soutenant les partis d’oppositions, les mouvements abolitionnistes sont réprimés, témoignant de la complicité du pouvoir en place avec les esclavagistes. Depuis 1983, les noirs ont été systématiquement dépouillés de leurs terres par le gouvernement, et plusieurs centaines d’entre eux ont été exécutés sommairement en 1990 à la suite d’incidents frontaliers entre « pasteurs maures » et paysans sénégalais. Au Soudan, le nord dominé par des musulmans arabophones réduit en esclavage les habitants africains noirs chrétinisés du sud. Peu avant « l’indépendance », la guerre civile éclate entre ces deux composantes en 1956. cette guerre connaît une trêve entre 1972 et 1983 avant de reprendre de plus belle suite à l’arrivée du dictateur islamiste Général Nimayri. Le mouvement armé SPLA naît dans le sud soudan, pour lutter contre la politique esclavagiste et génocidaire de ce dictateur et ses successeurs. C’est l’ethnie Dinka, de la région de Bahr El-Ghazal qui en constitue la base populaire. La dictature encourage alors l’ethnie de pasteurs musulmans les Baggara à attaquer les Dinka, détruire leurs villages, enlever leurs femmes, leurs enfants et jeunes hommes pour les déporter dans les provinces du nord où ils sont réduits en esclavage comme domestique et gardiens de troupeaux, et parfois obligés de participer aux razzias contre leur propre ethnie. En 1862, Khartoum est déjà un vaste marché aux esclaves, et l’esclavage y est la première activité économique depuis des siècles. Le colon britannique ne fait pas grand chose contre cela. On estime en 2001 entre 10 et 15.000 le nombre de Dinka réduits en esclavage au Soudan. Des ONG occidentales s’efforcent de racheter des esclaves, un à un, pour soutenir les familles Dinkas rançonnées par les esclavagistes. La guerre explique aussi le regain de l’esclavage dans l’Afghanistan islamique, d’après le NY Times du 8 mars 2002, des enfants de certaines régions très pauvres étant vendus comme esclaves par leurs parents en échange de nourriture. Par ailleurs, si l’on sort des pays islamiques, on trouve l’esclavage domestique en Chine jusqu’en 1949 (Révolution capitaliste étatiste de Mao Zedong) ; en Haïti, les « restavecs », enfants vendus par leur famille à des familles plus riches, dans lesquelles, maltraités et surexploités, ils doivent rester jusqu’à l’âge adultes. Cette situation a été dénoncée par des réfugiés haïtiens aux Etats Unis. l’esclavage réapparaît aussi dans les pays occidentaux, par le biais de diplomates étrangers, protégés par l’immunité que leur confère la convention de Genève, ou par le biais de riches familles arabophones du Moyen Orient, mais aussi des familles française et plus largement européennes aisées et sans scrupules, qui exploitent de jeunes filles pauvres, immigrées, en provenance du Kosovo, du Mali, de Côte d’Ivoire, d’Ethiopie, de Somalie, de Madagascar, du Sri Lanka, de Thaïlande, des Philippines, etc. Les jeunes filles doivent commencer par payer très cher par rapport à leur moyens un billet d’avion pour certaines villes du Moyen Orient, d’où elles sont déportés vers l’Europe, ; placées auprès de familles qui vont profiter d’elles de toutes les manières possibles et leur soustraire leurs papiers d’identité ; des tâches épuisan,tes leurs sont imposées sans salaire, sans limitation de temps et sans jnée de repos, avec sévices et viols fréquents. Elles sont ensuite abandonnées dans la rue au bout de quelques années, après que l’esclavagiste ait organisé son déménagement. 300 cas de ce genre en france dans les années 1990. Mais le nombre réel est bien supérieur. Des formes d’esclavages relevant de la dépendance économique existent aussi en Asie et en Amérique latine. L’esclavage est « aboli » officiellement au Cambodge depuis 1884, en Corée depuis 1895, en Siam depuis 1905, en Chine depuis1909, au Népal et en Birmanie depuis 1926. il est encore très répandu en Inde, au Népal, en Birmanie, au Mexique, au Brésil, etc. il s’agit de « travail non rémunéré » ou « bonded labour », variante actuelle du servage et de l’esclavage pour dette. Mais les typologues officiels de l’esclavages rejettent de leur définition cette situation...cette forme d’exploitation et d’esclavage consiste à contraindre un travailleur sous prétexte de dette (fictive, réelle ou abusive) à travailler jusqu’à sa mort pour « rembourser » un approprio, en échange du portion quotidienne de nourriture minimale, dans un contexte environnant de pauvreté ; la dette est ensuite à la charge des enfants de l’esclave, de génération en génération. Cet esclave là a certes le droit de « fonder une famille », de se marier, et en théorie ne peut subir arbitrairement de traitement cruel ou son assassinat, mais la réalité est toute autre dans certains pays, où les exécutions sommaires d’esclaves insoumis ne sont pas rares. En 1999, cette forme d’esclavage était estimée à 20.000.000 d’individus au minimum sur la planète par un groupe de l’ONU chargé de l’étudier. Cette estimation serait très en-deça de la réalité. Autre réalité, le travail forcé, dont une forme particulière, le travail forcé pénitentiaire, a connu un véritable « boom » au 20° siècle. Les monarchies européennes du 17° et du 18° siècle ont eu leurs galériens, suivi des bagnes de la 3° République, et les camps de concentration, d’extermination par le travail et autres goulags du 20° siècle. Camps et bagnes sont des lieux de non-droit, où la force de travail du condamné est employé sans limite que sa mort, sa sortie, son évasion. Le bagne a peu à peu disparu au 20° siècle, sous l’influence de la médiatisation de celui-ci par l’affaire Dreyfus. Institué en 1852 sous le 2° Empire, le bagne de Cayenne a été fermé seulement en 1945. Mais il existe toujours au Kenya, où des prisonniers lourdement enchaînés construisent et entretiennent les routes. Par ailleurs, les camps de concentration et d’extermination par le travail ont concerné des condamnés politiques et de droit commun des pays annexés par les nazis. Le système du goulag a été la forme la plus massive de travail forcé pénitentiaire. Apparu en 1918, il prend son essor vers 1941 avec 2.000.000 de détenus, avant de redescendre pour reprendre de l’ampleur en 1950 avec 2.500.000 détenus. Il est démantelé à la
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mort de Staline, en 1953, mais a perduré jusqu’en 1956 et a été ranimé en 1960 contre quelques dissidents. la construction du Canal Baltique Mer Blanche entre 1931 et 1933 a coûté la vie entre 30 à 60.000 détenus ; or sa rentabilité économique, mise à mal par le sabotage et la corruption, est restée plus basse que celle du travail salarié. Le système analogue du laogaï a été mis en œuvre dans le système capitaliste d’état chinois, dans les années 1950, et il y existe encore, de même qu’à Cuba depuis 1959 (Fidel Castro), et dans les pays bolcheviks et national-bolcheviks du sud-est asiatique et de l’Afrique. Mais c’est au Cambodge à l’époque des khmers bolcheviks, de 1976 à 1979, que l’horreur de ce type d’esclavage a atteint son comble : l’esclavage pour dette y constituait sur fond de « rivalités ethniques » à racines coloniales, une tradition ancrée de plus de 10 siècles. Durant la dictature de 3 ans de Pol Pot, des dizaines de milliers de prisonniers des camps de travail sont morts de faim, d’épuisement de maladies, de sévices. En ce qui concerne les transformations de l’esclavage, elles interviennent notamment dans les secteurs de la production et de la prostitution ; la course à la rentabilité qui caractérise le système capitaliste tend au dumping social, et génère des formes d’exploitation proche de l’esclavage, notamment en Afrique et en Asie, où elles prospèrent largement. Ainsi l’exploitation du travail des enfants (phénomène ancien et quasi universel) bien que régulièrement dénoncée, n’en continue pas moins de sévir, notamment en Chine, en Inde et au Pakistan, où des milliers d’enfants, par ailleurs victimes de malnutrition, de maladies et de sévices, travaillent jusqu’à l’épuisement dans les secteurs de la fabrication de briques, de verre, de jouet (!), de tapis, d’allumettes, etc. mais aussi comme mineurs en Colombie, comme ouvriers des plantations de caoutchouc en Malaisie, , comme pêcheurs de perles en Malaisie et en Birmanie. Un rapport du BIT de 1996 estime à 200.000.000 le nombre d’enfants de 5 à 14 ans ainsi exploités, dont 100.000.000 à plain temps, et dont 61% en Asie (5.000.000 en Indonésie notamment), 32% en Afrique, 7% en Amérique latine. En 2001, ils étaient estimés à 250.000.000 par l’Unicef. Il faut aussi évoquer le phénomène japonais de « karoshi », signifiant « mort par excès de travail », qui sans mettre en œuvre les méthodes habituelles d’oppression esclavagiste, parvient au même résultat par le biais d’une oppression et d’un conditionnement mentale. Les adultes aussi sont concernés par la surexploitation capitaliste : en Birmanie, 1.000.000 d’individus sont contraint pour manger de travailler sans limite à la construction de routes, de bâtiments privés, d’installation militaires. Dans le sud et le sud-est asiatique, le phénomène de sweatshops, (ateliers de production textile et vestimentaire) recoure à une main d’œuvre privée de protection sociale qui travaille pour un salaire dérisoire jusqu’à épuisement. Cette exploitation est parfaitement légale...la rémunération couvre à peine le besoin en logement, habillement et nourriture nécessaire à la perpétuation de la survie de cette « ressource humaine »...c’est le cas notamment à Hong Kong, en Thaïlande et en Indonésie. Le même phénomène se développe mais de manière cette fois illégale quoiqu’en réalité largement tolérée par les gouvernements, dans les pays industrialisés : c’est notamment la main-d’œuvre immigrée que des législations hypocrites permettent de rendre illégale, donc clandestine et par conséquent sans-droit, qui en sont les victimes ; des filières clandestines permettent ainsi à des marocains, turcs, kurdes irakiens, sri lankais, chinois etc., de parvenir en Espagne, Allemagne, France et Grande-Bretagne, et à des mexicains de se rendre aux Etats Unis, pour y effectuer des tâches saisonnières qui depuis près d’un siècle sont confiées à des immigrés temporaires ou clandestins, qui n’ont d’autre solution que de travailler « au noir ». Ce phénomène s’est généralisé dans les plantations de cacao et de coton en côte d’Ivoire, au Nigeria et au Gabon, avec nombre de travailleurs mineurs. Face à la misère qui touche le continent africain, pillé sans interruption depuis plus de 5 siècles, des adolescents, parfois vendus par leur famille sont déportés ou s’expatrient dans un pays voisin pour y travailler. En avril 2001, un cargo chargé de tels esclaves clandestins avait mis en évidence le rôle central joué dans ce trafic humain par le port de Cotonou au Bénin. Dans le domaine de la prostitution, les réseaux d’esclavagistes foisonnent également. Au début des années 1930 et jusqu’en 1945, 200.000 coréennes, chinoises, philippines et indonésiennes sont déportées au Japon, où elles subissent le viol et les sévice perpétrés par les soldats japonais. Dans les années 1990, de nouveaux réseaux se développent en Europe de l’ouest notamment. Les femmes esclaves sexuelles viennent essentiellement des pays de l’est. Cette exploitation se fait avec la complicité des autorités policières. En ce qui concerne les nouveautés, on trouve un développement inquiétant de la prostitution infantile, dans le cadre de bars et de maisons closes essentiellement, mais aussi dans des cas plus récents, dans des « salons de massage », « clubs de vacance », dans le cadre du tourisme sexuel, dans les Caraïbes, en Thaïlande, aux Philippines, fréquentés par des hommes européens, étasuniens, japonais, moyen-orientaux. Ces jeunes filles sont aux mains de réseaux qui récupèrent les gains et maintiennent sous dépendance économique et physique leurs esclaves. L’Unicef estimait en 1992 à 300.000 enfants le nombre d’enfants (- de 16 ans) exploités en Thaïlande. Sur 5.000.000 d’esclaves sexuels dans le monde, 2.000.000 seraient des enfants. Sans compter les enfants utilisés pour des films pornographiques. Par ailleurs, il faut y ajouter les enfants esclaves-soldats, au Sierra Leone (RUF), Liberia, Guinée, avec pour enjeu sous-jacent et acteurs invisibles les bénéficiaires africains mais aussi et surtout occidentaux (commanditaires) des trafics de diamants. Mais aussi en RDC, Rwanda, Ouganda, Angola, et Zimbabwe, mais aussi dans les territoires palestiniens, en Somalie, en Afghanistan : près de 300.000 enfants. Ils sont souvent drogués. La « convention supplémentaire relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage » de 1956 a été signée par 120 pays, mais n’a pas été ratifiée par l’Angola, le Bénin, le Gabon, le Kenya, le Yémen, les Emirats Arabes Unis, le Qatar, Oman, le Liban, la Birmanie, la Thaïlande, entre autres... « la convention de 1957 sur l’abolition du travail forcé » n’a pas été ratifiée par la Malaisie, Singapour ; la « convention de 1949 sur l’exploitation de la prostitution d’autrui » n’a pas été ratifiée par les Etats Unis, la Chine, la Thaïlande, ni par la France concernant les Antilles françaises et autres colonies prétendument à statut égal avec la métropole... ; mais de toutes façons tous ces textes ne prévoient aucune mesure coercitive concrète pour abolir ces formes d’exploitation, y compris contre les Etats qui les ont signés mais ne les respectent pas de fait comme le Soudan et la Mauritanie. Capitalisme et esclavage (bis) : ouvriers de l‘industrie chinoise du jouet, industrie du cacao et de la confection en Afrique, ouvriers des industries cambodgiennes et indonésiennes (notamment Nike). Côté lutte : Anti-Slavery International : le 17 avril 1839 est créée à Londres la British & Foreign Anti-Slavery Society » ; fondée par des militants protestants (quakers, méthodistes et baptistes), elle devient en 1890 « Anti-Slavery & Aborigenes’ Protection Society » ; en 1990, elle devient « Anti-Slavery International », et fait essentiellement du lobbying auprès des gouvernements. Elle décerne des prix aux groupes qui luttent contre l’esclavage : en 1991, elle a récompensé le BLLF (Bonded Labour Liberation Front), et en 1998 le Pr Saad Bouh Kamara, fondateur de « l’Association mauritanienne des Droits de l’homme ». BLLF : créé au Pakistan en 1967 pour lutter contre le Bonded Labour par « l’aide juridique », notamment dans le secteur de la fabrication de briques (adolescents pauvres placés en « apprentissage » dans des ateliers qui pour « rembourser » leur apprentissage, devront ensuite travailler gratuitement pendant un nombre d’année fixé selon la fantaisie de l’exploiteur). La Cour suprême pakistanaise a déclaré cette pratique illégale dans le secteur de la brique mais il subsiste dans les autres secteurs (cf. plus haut), avec le soutien actif des milieux d’affaire pakistanais et de nombreux responsables politiques et religieux. En avril 1995, un des militants du BLLF est assassiné. Le BLLF fit alors l’objet d’une répression gouvernementale ; accusé de tentative de sédition, ce qui est puni par la mort, son président Ehsan Ullah Khan a choisi de s’exiler en Suède, d’où il s’efforce de poursuivre ses activités. Les comptes en banque du BLLF ont été (provisoirement) gelés. Des associations et Ong chrétiennes continuent d’après leur habituelle connerie charitable à ne faire que financer le rachat des esclaves, ont découvert que sur 12.000 esclaves (quand même !) ainsi libérés, 77% ont été converti de force à l’Islam et 80% des filles de plus de 10 ans violées par l’esclavagiste. CCEM : en france, le CCEM a été fondé en 1994 à l’instigation de la réalisatrice Dominique Torrès. Kalayaan : travail équivalent au CCEM en Grande-Bretagne : plus de 2000 personnes prises en charge dans les années 1990. Syndicats Sans Frontières : effectue en Suisse le même travail que le CCEM ou Kalayaan ; 30 000 familles de diplomates vivent à Genève...en mars 2002, des plaintes ont été déposées aux Etats Unis
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contre le FBFG (Fleet Boston Financial Group), groupe bancaire dérivant d’une entreprise fondée à la fin du 18° siècle par un sénateur américain, J Carter Brown, dont la fortune est en grande partie liée à la traite esclavagiste transatlantique. Si cette plainte abouti, elle doit contraindre les descendants héritiers de cet esclavagiste à dédommager les 35.000.000 d’afro-américains descendants d’esclaves. Esclavage en Grèce antique : Le terme de « latris » connote à la fois le travail salarié et l’esclavage dans l’antiquité. Il était fréquent en Grèce antique comme en Orient (Mésopotamie, croissant fertile), que des chefs de famille envoient femmes et enfants en esclavage temporaire en remboursement de dettes. Durant l’antiquité, on trouve aussi parmi les esclaves des femmes et enfants réfugiés de guerre. Durant l’époque mycénienne, les mariages entre hommes esclaves et femmes libres semblent fréquents. Le Tyran de Corinthe Périandre qui régna de –627 à –587 « empêcha les citoyens d’acquérir des esclaves et de vivre dans l’oisiveté, et leur trouva toujours quelque travail à faire. Si l’un d’eux se reposait sur la place publique, il le condamnait de crainte qu’il ne complota contre lui ». Il est intéressant de noter ici que l’esclavage est utilisé comme un moyen d’échapper au service de la collectivité. A Athènes, l’esclavage fait son apparition, ou en tout cas croît sous Solon. La cité de Chios serait la première à avoir utilisé des esclaves-marchandise (« barbares achetés à prix d’argent »), sans doute après les invasion dorienne, vers –1000. A Chios comme à Athènes, la « démocratie » antique, élargissement du gouvernement à une partie du peuple, de type aristocratique, s’accompagne de l’accroissement du recours à l’esclavage. Vers –600, la distinction entre esclave et métèque est encore peu claire. L’autorisation de procréer pour les esclaves tient, dans toutes les sociétés qui en ont fait usage, à la difficulté momentanée ou prolongée, de s’en procurer d’une autre manière. Le prix des esclaves varie, notamment en fonction de l’âge, du sexe, des aptitudes professionnelles, mais aussi en fonction « de l’offre et de la demande » ; en moyenne le prix d’une mule ou la moitié d’un cheval de guerre. Economiquement, sa valeur est peu éloignée de celle d’un travailleur « libre » pauvre. Corinthe a réduit en esclavage jusqu’à 460.000 individus simultanément ; Aristote compte 470.000 esclaves à Egine vers –500. les eunuques sont déjà présents en Grèce antique et y sont même parfois influents ; dans les mines, les esclaves côtoient une petite minorité de travailleurs libres. De nombreux esclaves de ces mines sont le reste du temps des artisans et appartiennent parfois à de riches athéniens qui les louent aux concessionnaires des mines. Les esclaves des mines seraient plus de 20.000. Dans les activités bancaires, métèques et esclaves occupent une place essentielle. Le banquier pouvait ainsi en cas de procès contrôler plus ou moins les dépositions des esclaves devant les tribunaux ; de plus les citoyens étaient peu attirés par les positions subalterne de ce secteur qui alors n’avait pas le « prestige » qu’il a pris ensuite. Vers –400 et –300, on connaît ainsi de véritables dynasties serviles de banquiers. A Délos au contraire, la profession est l’apanage des hommes libres, parfois étrangers et souvent de familles aristocratiques. Les esclaves publics touchaient une indemnité de 3 oboles : à peine de quoi subvenir aux besoins nutritionnels et renouveler leur force de travail. Lors de la location d’esclaves par leur maître à des chantiers de travaux publics, leurs maîtres reçoivent des concessionnaires des chantiers une somme de un drachme par jour, ce qui équivaut à ce que reçoivent quotidiennement les hommes libres qui y travaillent aussi sous statut salarial. Ce qui signifie que l’esclave est dans un statut légèrement inférieur à celui des travailleurs libres pauvres, puisqu’une partie de l’argent gagné sur le travail de l’esclave est reversé sous forme de logement, alimentation et vêtement à l’esclave. Les besoins que le salarié peut combler avec le salaire qui lui est versé ne doit pas en être très éloigné de la condition faite à l’esclave, sans quoi il pourrait ce passer d’une telle activité. Le taux de profit sur les esclaves loués est d e 33% à 15% selon les secteurs concernés. On trouve aussi d’autres formes d’esclavage en Grèce antique : 1°) « servitude intracommunautaire » : vers –600, Solon interdit de prendre des personnes pour gage car alors la servitude pour gage est un véritable fléau social. Ainsi Aristote : « les pauvres, leurs enfants et leurs femmes étaient asservis par les riches […] c’est à ce taux de loyer [1/6° des récoltes] qu’ils travaillaient dans les champs des riches, la terre étant dans un petit nombre de mains ; et s’ils ne versaient par leur loyers, on pouvait les emmener en servitude eux et leurs enfant, car les prêts étaient pour tous garantis par les personnes jusqu’à Solon ». En fait il faut comprendre vraisemblablement que le servage (location de champs contre la taxe d’1/6° des récoltes) côtoyait l’esclavage pour dette. L’affranchissement des travailleurs athéniens est accompagnée par l’importation massive d’esclaves étrangers. L’Egypte ptolémaïque et la Crète connaissent aussi largement cet esclavage pour dette. Mais dans l’Egypte ptolémaïque, on va de formes identiques à l’esclavage pour dette à des formes de service pour endettement présentant les caractéristique du travail salarié mais ayant vocation à rembourser une dette...a Athènes, les hommes libres n’acceptent un travail salarié qu’en désespoir de cause et faute de revenus, répugnant en particulier à se mettre au disposition d’autrui sur le long terme, estimant que se serait « supporter un esclavage », alors que c’est ce qui correspond dans nos sociétés à la « sécurité de l’emploi » ! Tout est comme si on craignait que les engagements contractuels ne se transforment avec le temps en obligation coutumière de prestation totale. Or de telles formes de dérives du travail salarié vers des statuts intermédiaires entre salariat et esclavage sont présents en Egypte. 2°) servitudes intercommunautaires : elles résultent de l’asservissement de communautés étrangères : pillage occasionnel du territoire ennemi, extermination ou dispersion des habitants, prélèvement régulier d’un tribut, i.e. l’imposition d’un rapport d’exploitation tributaire. C’est l’esclavage hilotique, considéré comme intermédiaire entre liberté et esclavage. Les hilotes se caractérisent d’abord par leur caractère autochtones : ceux qui les asservissent sont des colons. 3°) les asservis tributaires des terres coloniales : de –800 à –500, la colonisation grecque est suivie d’un système d’asservissement des populations locales ; des colons s’y approprient les terres, et y utilisent les populations locales comme esclaves agricoles. C’est le cas à Syracuse. Mais en Grèce aussi, on pense que les populations rurales sont également réduites en esclavage. De même dans les colonies du Pont du nord de l’Anatolie, les autochtones sont réduits en « esclavage contractuel » agricole par les colons, les autochtones demandant à ne pas être vendus hors de la colonie, et demandant aux colons de subvenir à leurs besoins, contre tribut. Cette situation est générale dans les colonies grecques. Ceuxlà se révoltent parfois contre les colons, comme les « dèmotai » ou « gens du peuple » opposés aux citoyens qui se révoltèrent à Milet à l’époque archaïque (?) contre les riches. Ces gens du peuple étaient probablement des paysans autochtones. 4°) les laoïs des royaumes hellénistiques d’Orient : lors de l’empire hellénistique d’Alexandre, les populations locales, les grecs trouvent des populations rurales déjà soumises à un esclavage partiel : le surplus produit par le peuple des travailleur groupés en communautés « théoriquement » libres sur des terres dont la propriété ne leur est pas déniée est prélevé sous la forme d’impôt par l’intermédiaire d’un appareil d’Etat, au profit d’un despote censé incarner une « communauté supérieure » et de « l’élite » sociale fainéante. Ce système de domination est hérité de l’empire perse et se poursuit dans le monde hellénistique. Mais il existe aussi des paysans esclaves qui sont considérés vraiment comme tels à partir du moment où ils ont perdu la protection de la communauté villageoise en « s’expatriant ». / / / les Egaux de Sparte se livraient gratuitement, pour rappeler et graver dans l’esprit des hilotes leur statut de dominés, chaque année à des expéditions « punitive », des milices de jeunes spartiates se rendant dans les campagnes pour y assassiner arbitrairement plusieurs villageois autochtones. En Grèce, le pouvoir de l’oligarchie citoyenne fut souvent menacée par l’action subversive conjointe des esclaves et des femmes : ainsi Argos fut vidée de ses citoyens suite à une victoire des spartiates vers –500 ; devant la désertion des « citoyens », les femmes et les esclaves qu’elles avaient épousé, assurèrent la survie de la cité ; de même en Locride, alors que les « citoyens » sont occupé à la guerre en Messénie, leurs femmes se mettent en concubinage avec les esclaves et participent avec eux à la fondation de la colonie italienne de Locres, où ils adoptent un système politique très aristocratique par réaction ; enfin, Tarente fut fondée apparemment par des « déclassés » lacédémoniens, fils « bâtards » nés de l’union pendant la première guerre de Messénie entre les femmes des spartiates et les esclaves hilotes. Mais il s’agit là en fait d’une tradition visant à compenser les pertes humaines lors des guerres. D’autres cas existent : en –505, dans la cité coloniale de Cumes, le tyran Aristodemos permit aux esclaves qui venaient de massacrer leurs
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anciens maîtres au cours d’une révolte d’en épouser les femmes. La présence d’esclave est une menace qui permet au pouvoir du tyran de menacer l’aristocratie, d’en bannir les membres de la cité et de les faire remplacer au niveau conjugal et civique par des esclaves qui sont dès lors affranchis et créé citoyens. Les guerres inter-urbaines de la Grèce s’expliquent aussi par le fait que chaque partie pouvait compter sur les esclaves (notamment paysans) de la partie adverse, en leur promettant la liberté, pour gagner la guerre. L’antagonisme entre esclaves et propriétaires terriens dans chaque ville était de ce point de vue une arme stratégique constante. Les révoltes d’esclaves en Grèce antique : la guerre servile connue sous le nom de « 3° guerre de Messénie » éclata vers –464, à la faveur d’un tremblement de terre, mais aussi suite au massacre d’hoplite réclamant asile au cap Ténare dans le temple de Poséidon ; les insurgés, originaires de Messénie et/ou de Laconie, réussirent à se rallier quelques villes périèques et même à menacer Sparte, avant de devoir se replier sur le mont Ithome. Pour les vaincre, les spartiates durent même faire appel à leurs « ennemis » athéniens ; mais Athènes renonça, craignant que les 4000 hoplites athéniens envoyés sur place contre les insurgés ne s’alliassent avec eux. Cette insurrection ne put être mâtée même au bout de 10 ans, malgré une guerre constante qui lui fut livrée ! Finalement, ce sont les athéniens qui offrirent leur médiation et installèrent les insurgés et Locride à Naupacte vers -454. les cités ennemis passent même des accords lorsqu’elles se font la guerre pour s’unir contre une insurrection coalisée de leurs esclaves militaires ou ruraux respectifs ! En Grèce, une guerre des classe constante larvée sous-tend les guerres inter-nationales ou cités, les esclaves étant constamment aux aguets et attendant selon les dires d’Aristote, la moindre occasion pour les renverser ; ainsi, tremblement de terre ou guerres sont à chaque fois pour les aristocrates source de suées. En ce qui concerne les esclaves-marchandises, leurs révoltes sont rares, mais on en connaît, comme celle de Sicile où les athéniens font une expédition en -415/-413 : à Syracuse « une forte bande servile » s’est en effet insurgée, avec pour porte-parole Sosistratos. Mais Sosistratos et l’état-major de la guérilla servile (20 personnes) fut piégée par une diplomatie hypocrite qui les captura. L’insurrection fut matée mais 300 esclaves trouvèrent refuge auprès des athéniens. Une autre insurrection d’esclaves eut lieu dans l’île de Chios vers – 265 : les esclaves des oligarques citoyens de Chios s’enfuient massivement de la ville de manière concertée et se réfugient dans les montagnes, où ils se rassemblent en une bande nombreuse. Là ils détruisent ou pillent les maisons de campagne des esclavagistes. Des expéditions sont lancées contre les esclaves insurgés par les chiotes, sans succès. Mais finalement, les esclave n’allèrent pas au bout de leur démarche et se transformèrent après accord avec les chiotes en milice rurale contre les nouveaux esclaves fugitifs de Chios. Il en sera de même en Jamaïque et au Surinam, ou des groupes de « negmarrons » faisaient allégeance au régime colonial, promettait de pourchasser les nouveaux fugitifs et de servir au régime de milice contre la tranquillité. Deux révoltes purement serviles sont connues ; la première éclate notamment en Attique et à Délos lors des guerres serviles romaines en Sicile en -135 et des succès des esclaves dans cette région romaine. 1000 esclaves insurgés étaient tout prêt de soulever l’ensemble des esclaves de la région, mais la répression rapide et extrêmement violente mit fin au soulèvement. Or nombre d’esclaves siciliens sont alors d’origine grecque, ce qui explique sans doute la rapidité de la diffusion de l’insurrection. La seconde insurrection des esclaves en Grèce antique survient vers –104, au moment de la seconde révolte servile romaine : « une myriade » d’esclaves des mines de l’Attique se révoltèrent, tuèrent les gardiens des mines, s’emparèrent de l’acropole de Sounion et « ravagèrent pendant longtemps l’Attique ». Cette insurrection et ses nombreuses répliques provoquèrent la mort de milliers d’esclaves. On trouve en outre des insurrection d’esclaves, mais dans un cadre plus largement anti-impérialiste, lors de la colonisation romaine de la Grèce. Ainsi vers –149, sous le règne d’Andriskos dans le royaume de Macédoine, finalement écrasée par les légions romaines. Mais le statut d’Andriskos est trouble : entre esclave, affranchi et mercenaire... il massacra tout de même de nombreux richards, c’est toujours ça de pris. Une autre insurrection « nationale-servile » eut lieu en –133 dans le royaume de Pergame. A la mort de l’autocrate de Pergame, sous « protectorat » romain, Tiberius Gracchus qui venait de faire voter sa loi agraire proposa de démanteler la fortune royale et de partager les terres à la plèbe (romaine ?), avant d’être assassiné. Entre temps, un « usurpateur » du nom d’Aristonicos prit le pouvoir sous le nom d’Eumène III. Mais seul une minorité de cité le soutint, alors que la majorité soutint Rome, dont la capitale Pergame. Aristonicos finit par être vaincu et emprisonné à Rome en –126. or Aristonicos semble avoir été à la tête d’une armée d’esclaves urbains et ruraux, et de prolétaires. Mais à l’origine, il semble en faut que les premiers cercles de partisans de Aristonicos soient issus de l’aristocratie pergamienne. Aristonicos appela les esclaves et pauvres rassemblés autour de lui les « héliopolitains », ou habitants de la « cité du soleil », ce qui correspond dans la société sans esclaves imaginée par Iamboulos au début de l’époque hellénistique au nom de la cité idéale et sans esclaves, le symbole solaire étant profondément lié notamment en Orient à la notion de justice et de liberté. Le stoïcien Blossius de Cumes, qui fut exilé de Rome après y avoir inspiré les réformes agraires de Tiberius Gracchus, se réfugia alors auprès d’Aristonicos. A cette même période règne en Sicile le « roi esclave » Eunous, mais il préféra pour des raisons inconnues Aristonicos. Il faut aussi évoquer la révolte de Saumacos : vers –108, le roi du Bosphore cimmérien remit son pouvoir dans les mains du roi du Pont Eupator, face aux attaques des tribus scythes. « les scythes du parti de Saumacos » avaient fait une Révolution et tué le roi du Bosphore (tuteur de Saumacos). Les insurgés furent violemment réprimés, et c’est un général du Bosphore qui fit appel au roi du Pont pour lui succéder. Les colons grecs et hellénisés du royaume du Bosphore, aristocratie « citoyenne », avait pris parti pour l’abdication du roi du Bosphore au profit du roi du Pont. La population scythe exploitée par cette bourgeoisie coloniale en aurait profité pour se soulever. Saumacos aurait pour sa part été un esclave de palais. La révolte fut, étant donné les termes utilisés pour la définir par les auteurs grecs, une véritable insurrection révolutionnaire. Des pièces d’or montre le visage d’un éphémère roi Saum(acos), qui fut donc brièvement « roi » du Bosphore, la tête irradiée par des rayons solaires. Il aurait alors appliqué au royaume un programme de justice sociale. Prostitution au Maghreb durant la période coloniale : sur France Culture, Abdelwahab Medeb fait l’éloge de la colonisation qui en encourageant la prostitution à favorisé l’émancipation familiale des prostitués...1830 à 1962, Tunisie, Maroc et Algérie. Courtisanerie traditionnelle de femmes érudites et savantes très respectées, institution pré-coloniale. Ces femmes sont des « fulgurances » pour les hommes : il ne s’agit pas seulement de relation sexuel, mais aussi de relations d’humour, d’esprit, de danse. Istanbul serait la plaque tournante de l’esclavage maghrébin à cette époque de l’empire Ottoman. Il y a aussi des filières d’achat et de vente à Alger, Tunis, Constantine. Les princes d’Alger étaient aussi très friands de femmes éthiopiennes, filière estafricaine. Mais aussi ouest africaine. L’administration coloniale est la seule source de cette époque qui ne donne aucune indication sur ces esclaves.... il y a des esclaves à Marrakech et au Maroc jusqu’à l’indépendance, notamment dans le milieu des « glaouis ». Il s’agirait là de femmes et esclaves domestiques qui sont aussi des esclaves sexuelles, très opprimées, parfois vendues par leurs famille, très éloignées des « esclaves sexuelles traditionnelles de cour ». Les esclaves femmes ont ainsi souvent un rôle d’initiation sexuelle pour les fils de leur maître. Les colons français sont à l’origine de tout un esclavage sexuel plus féroce encore que dans la sociétés maghrébines pré-coloniales. Les femmes de cour du Maghreb sont des femmes européennes ou caucasiennes.
Les travailleurs dits « sans-papiers » sont en situation de non-droit absolu, c'est-à-dire d’esclavage. La Révolution française a consacré le caractère libertaire de l’espace géographique que l’on appelle aujourd’hui « France », en édictant la formule « Le sol de la france affranchit l’esclave qui la touche ». Il existe encore des esclavagistes en france. Sur cet héritage révolutionnaire sont venues se greffer des lois iniques, racistes et d’ancien régime, par lesquels ce n’est pas l’esclavagiste mais sa victime qui est condamnée ! Cela doit cesser : par de telles lois, l’Etat et les gouvernements se rendent directement complices de ces négriers, dont certains, condamnés mollement, émergeaient au Front National ! Et ce n’est sans doute pas un hasard si l’on a pu voir des partisans véreux de ce parti néo-
nazi à la direction de foyers Sonacotra ! Renvoyer un esclave vers une de ces dictatures africaines soutenues depuis 50 ans par la France, via son armée, ses services secrets et ses mercenaires d’extrême-droite, c’est l’exact contraire de l’affranchissement, et c’est même parfois une condamnation à de graves sévices ou à la mort, tant il est vrai que la france refuse le droit d’asile aux ressortissants d’Etats soi-disant « amis et démocratiques », dont les régimes sont notoirement mafieux et assassins. Victimes de l’esclavage sur un sol dont les habitants haïssent les despotes, les victimes du capitalisme brun doivent y recevoir en réparation un accueil digne de ce nom. Quand à ceux qui ont exploité leur misère, leur détresse et leur naïveté, puissants ou non, ils doivent être mis hors d’état de nuire, et connaître une justice au moins aussi zélée que celle qui s’acharne aujourd’hui sur les petits « délinquants » des « quartiers sensibles » ! Critique : la distinction entre esclave et autres statuts servils ou salariaux est assez artificielle et ne repose sur aucun critère objectif ; la partition est en fait assez arbitraire, et de ce point de vue on peut notamment critiquer le fait que sont pris en compte non pas une approche véritablement sociologique de l’esclave dans la typologie mais des systèmes juridiques particuliers, ce qui explique que l’on distingue d’ailleurs de nombreuses formes de chacun de ces statuts officiels. C’est sur la réalité sociale sous-jacente à ces système juridiques que doit se fonder cette typologie.