Diasporas

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THE PARIS GLOBALIST

A STUDENT INTERNATIONAL AFFAIRS MAGAZINE

VOL III. Issue 1. - JAN. 2009 www.global21online.org/paris

DIASPORAS

DOSSIER > Diasporas :

les difficultés d’une définition

> INTERVIEW : Riva Kastoryano

“Une diaspora est avant tout une identité-refuge”

> Diasporas as legal actors :

challenges & opportunities for international law

EN PARTENARIAT AVEC L’

> Outsourcing extremism :

Diaspora Funding & Hindu Nationalism

> La diaspora, un levier de pouvoir

pour la Chine contemporaine ?

> Mizos juifs :

une diaspora autoproclamée ?

ASSOCIATION FRANÇAISE POUR LES NATIONS UNIES


> THE PARIS GLOBALIST is a member of

SOMMAIRE

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SOMMAIRE SOMMAIRE

ÉDITORIAL

DOSSIER THÉMATIQUE :

DIASPORAS pp. 6 à 33 06

DIASPORAS : LES DIFFICULTÉS D’UNE DÉFINITION

20

Jean Doursounian

10

Laura Waisbich

INTERVIEW : Riva Kastoryano,“Une diaspora est avant tout une identité-refuge” Naïké Desquesnes

12

LE PARADOXE DE LA DIASPORA JUIVE

DIASPORAS AS LEGAL ACTORS : challenges & opportunities for international law

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MIZOS JUIFS : une diaspora auto-proclamée ? Julien Levesque

24

LA DIASPORA LIBANAISE, une chance pour le Liban ? Clara Tardy

Priscilla Rouyer

14

REGULATING DIASPORA TRANSACTIONS : an international security challenge

26

Steven Koch

16

2

Janhavi Naidu

OUTSOURCING EXTREMISM : Diaspora Funding and Hindu Nationalism

28

Vikramaditya Singh

18

BRIDGING THE GULF : Diasporas and Democracy Diaspora, identité et culture : LE CAS BERBÈRE Farida Belkacem

La diaspora, un levier de pouvoir pour la Chine contemporaine ? Alain-James Palisse et Magali Robert

30

PHOTOSPREAD : À PARIS, LES TAMOULS ONT TROUVÉ LEUR CHAPELLE Philippe Calia

34

Le franquisme en procès Inès Levy

35

La guerre du froid n’aura pas lieu Nathan Grison

36

Pour en finir avec la repentance coloniale, Daniel Lefeuvre, par Clémence Léobal

41

Le Mur de fer : Israël et le monde arabe, Avi Shlaim, par Mari-Ann Larsen-Volay

42

The Brief and Wondrous Life of Oscar Wao, Junot Diaz, by Joanna Margueritte

China, Colonialism and the Congo Marissa Dooris

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40

The Future of UN Peacekeeping Yovan Jankee

37

BOOK REVIEWS :

The Far Right in Slovakia Michal Onderco

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La peur du (trou) noir Tom Morisse

Photo 1è et 4è de couverture Creative Commons licence photo credit : sayheypatrick

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ÉDITORIAL > ÉDITORIAL

DIRECTRICE DE LA RÉDACTION Chine Labbé

RÉDACTEUR EN CHEF Julien Levesque

RESPONSABLE PARTENAIRES Priscilla Rouyer

ASSISTANTE PARTENARIAT Inès Lévy

ÉDITEURS ANGLOPHONES Andrew Kessinger Vikramaditya Singh Julian Weideman

ÉDITEUR FRANCOPHONE Côme Déchery

PHOTOGRAPHE ICONOGRAPHE Philippe Calia

GRAPHISME Camille Bui

L’L’

Chers lecteurs,

importance économique, politique voire légale des diasporas est de plus en plus reconnue et étudiée. Pourtant, la recherche peine à arrêter une définition unique et englobante du phénomène diasporique. Extrêmement ancien, le terme « diaspora » est forgé dès l’Antiquité pour désigner l’étendue du monde grec. Mais dans son usage contemporain, l’expression est pendant longtemps réservé serv e servé à l’expérience juive. Elle se réfè f re alors à des fè communautés dispersées unies par des liens fondés sur une perte tragique de la terre ancestrale, assortie d’un fort désir de retour. Mais le « modèle archétypal typal Juif » suffit-il aujourd’hui à recouvrir la diversité des expériences diasporiques ? Peut-on seulement établir qu’une diaspora existe selon des critères objectifs et clairement identifiables ? Souvent vidée de son sens, l’expression est utilisée à tort et à travers dans les médias qui évoquent é l’existence de diasporas scientifiques ou encore artistiques, et tendent à utiliser le terme, visiblement très en vogue, pour désigner de manière assez floue tous les groupes de nationaux installés hors de leur pays d’origine. Parler de diaspora française au même titre que de diaspora arménienne nienne n n’a pourtant que peu de sens. S’accorder sur les critères diff renciatifs des diasporas est donc essentiel afin diffé d’éviter ’éviter que le phénomène diasporique ne se mêle, ’é dans le langage courant, à toutes les formes de migration et d’expatriation. Car les diasporas recouvrent une réalité bien spécifique, une réalité qui se négocie actuellement une place prépondérante sur la scène internationale. Économiquement, les diasporas jouent un rôle qui force à les envisager comme des interlocuteurs cruciaux, tant pour leurs pays d’origine que pour leurs pays d’accueil. Via des transferts de fonds croissants, elles constituent en effet un acteur central du processus de développement ééveloppement des États quittés. Politiquement, certaines diasporas servent explicitement la politique étrangère de leur terre de

< (c) Philippe Calia

provenance au travers d’activités de lobbying très structurées. D’autres se rév évè év vèlent un habile outil de soft power : c’est le cas de la diaspora chinoise, qui multiplie les « Chinatowns » aux quatre coins du globe. Certaines diasporas contribuent par ailleurs à l’évolution ’évolution du droit dans leur patrie d’origine où ’é elles jouent un rôle essentiel dans le processus de transition démocratique. En témoigne la diaspora cambodgienne de France et de Belgique qui, par sa mobilisation, s’est faite le catalyseur de la justice transitionnelle au Cambodge. Acteurs à part entière des relations internationales, les diasporas ont acquis un tel poids que certains États nomment au sein de leur gouvernement des ministres en charge des nationaux de l’extérieur. C’est le cas de l’Arménie qui, en juin dernier, a confié à Hranush Hakobian le tout nouveau poste de ministre responsable de la diaspora. Difficiles à cerner, les diasporas semblent ne rentrer dans aucune case. Et alors qu’elles s’immiscent de plus en plus clairement dans le paysage international, tant économiquement que politiquement, elles ne jouissent toujours d’aucun statut légal. C’est la raison pour laquelle l’équipe du Paris Globalist a souhaité s’y ’’y intéresser. À la découverte d’un objet politique non identifié, bienvenue dans notre première édition de 2009. Outre un dossier consacré aux diasporas, ce numéro vous emmènera en Arctique, une région qui est aujourd’hui l’objet de convoitises et de tensions internationales, puis vous invitera, entre autres, à réfléchir à l’avenir des forces de maintien de la paix des Nations Unies. Le magazine vous guidera enfin à travers les mots et les pages, dans le meilleur et le plus polémique des essais politiques. En vous souhaitant une riche et agréable lecture,

> Chine Labbé, étudiante en 5è année, École de journalisme de Sciences Po

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6 DOSSIER : DIASPORAS

« Où que vous alliez, vous serez une polis ». Cette phrase célèbre fut plusieurs fois présentée par Hannah Arendt comme le « mot de passe » de la colonisation grecque, colonisation qui allait constituer les prémisses d’une diaspora. Le mot diaspora (qui signifie littéralement « graines dispersées ») est d’ailleurs forgé dès l’Antiquité pour désigner l’étendue du monde de culture grec à travers les colonies helléniques qui essaimaient tous les rivages de la Méditerranée, et prouve de par lui-même que le phénomène n’est pas récent. Ancien, ce phénomène s’est pour autant accentué avec la globalisation qui permet plus que jamais d’être « at home abroad », ce qui est la situation par excellence d’une diaspora.1 Désormais, les diasporas réalisent leur idéal commun, à savoir pouvoir être en contact avec la « mère patrie » sans quitter leur terre actuelle, terre considérée presque toujours, malgré parfois des siècles d’implantation, comme le « pays d’accueil accueil ».2

l’humanité qui est potentiellement concerné par le phénomène diasporique.

La mondialisation aurait pu nuire aux diasporas. Alors que les moyens de communications s’améliorent, que les distances se réduisent, on pourrait croire que ces visions idéalisées du pays d’origine, terre ancestrale sur laquelle sont projetés tous les fantasmes de puissance, sont amenées à se fracasser sur les « réalités du terrain ». Bien au contraire, insérées dans le « village global », les diasporas profitent de la mondialisation sans se sentir menacées. Dans son rapport de 2005, la Commission globale sur les migrations internationales établissait qu’environ 600 millions d’individus vivaient en situation de migrants.3 C’est donc quasiment 10% de

Diaspora et émigration

De fait, les diasporas sont de plus en plus visibles, et chaque nationalité semble en voie de posséder sa propre diaspora : on parle ainsi communément des diasporas irlandaise, grecque, arménienne, juive, libanaise, chinoise, indienne, portugaise, espagnole, italienne, mais aussi philippine, vietnamienne, turque, kurde, mexicaine, cubaine, coréenne, etc. Le terme englobe parfois un continent entier (la « diaspora africaine »), et se retrouve dès lors utilisé sans grande rigueur.4 Les manifestations du phénomène diasporique soulèvent èèvent de nombreuses questions sans réponse : Qu’est-ce qu’une diaspora ? Comment se constitue t-elle ? En quoi diff diffère t-elle d’une communauté d’expatriés ?

D’emblée, il faut s’accorder sur les termes utilisés : quelle diff différence établit-on entre une communauté d’expatriés ou de réfugiés et une diaspora ? La presse parle très souvent, dans le cas de la France, des diasporas juive et arménienne, alors que parallèlement le terme n’est jamais usité à propos des Tunisiens, Algériens ou Portugais. Sur ce point, on peut déceler deux premiers signes distinctifs : tout d’abord que la diaspora est un phénomène qui s’inscrit dans la durée, dans l’enracinement d’une population à l’extérieur de sa

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terre d’origine ; ensuite que cet enracinement ne peut laisser place intégration civique et économique réussie mais dépourvue de à une assimilation totale, sans quoi les émigrés se fondent dans la toute assimilation culturelle est régulièrement formulé à l’encontre des communautés chinoises. masse nationale. C’est pourquoi il semble difficile de parler de diaspora marocaine ou algérienne en France, car les communautés constituées par les mouvements d’émigration en France provenant de ses anciennes colonies sont encore trop récentes. Il s’agit de communautés en gestation, d’autant plus que les vagues d’immigration sont désormais continues : l’immigration se poursuit, rendant difficile les tentatives d’organisation de ses membres. C’est aussi pourquoi on ne peut parler, toujours dans le cas de la France, de « diaspora italienne » ou de « diaspora espagnole » : malgré les forts mouvements d’émigration, suivis d’un enracinement dans le territoire durant plusieurs décennies, cennies, il n n’’’yy pas de diaspora car l’assimilation a été parfaitement réalisée.

La diaspora, une communauté unifiée ? Ainsi, une diaspora est constituée d’une population issue d’une émigration, qui parvient à s’intégrer durablement dans son pays d’accueil sans pour autant s’assimiler parfaitement. Pourtant, cette définition reste bien large : aucune diff différence n’existerait alors entre la « diaspora chinoise » et la « diaspora juive ». Or on peut constater qu’ilil existe des diff différences fondamentales entre les diasporas, chacune ayant été créée dans un contexte historique particulier, et ayant ses propres points de ralliements communautaires. Il faut aussi souligner qu’une diaspora se distingue toujours par une très forte hétérogénéité culturelle en son sein : diff différente des autres diasporas, une diaspora est aussi un lieu de cohabitation entre des diff différences très marquées. es. Par exemple, le Juif ashk ashkénaze de Pologne ou d’Ukraine Ukraine na n’ que peu de choses en commun avec un Juif tunisien. Mis à part les prières rituelles, on serait bien en mal de trouver un quelconque point commun entre un Juif de France, un Falasha ( Juif d’Ethiopie) Ethiopie) et un Juif yyéménite.7

On touche ici à la distinction développ é évelopp ée par la sociologue Dominique Schnapper entre inté intégration égration et assimilation : une diaspora est un ensemble d’individus qui serait parvenu à s’intégrer parfaitement, mais qui refuserait en partie l’assimilation.5 La diaspora juive a, par exemple, longtemps été critiquée aux ÉtatsUnis pour pratiquer une « integration without assimilation », qui se traduisait par le fait que les Juifs ne fréquentaient des non-Juifs que dans le cadre professionnel, mais restaient entre eux dans Néanmoins, certaines communautés parviennent à transcender les leur vie priv privée.6 A l’heure actuelle, en France, ce reproche d’une divergences culturelles qui les traversent et réussissent à constituer

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7 DOSSIER : DIASPORAS

Phénomène ancien, la diaspora demeure difficile à définir. Étant « at home abroad » et profitant de la mondialisation, les diasporas se caractérisent pourtant par une relation complexe avec le passé. Intégrée mais jamais assimilée, moderne mais ayant toujours un compte à régler avec l’histoire, une diaspora apparaît comme un OVNI dans le monde des relations internationales.

Creative Commons licence photo credit : Johnny Grim

DDIASPORAS IASPORAS : les diffiD cultés d’une définition


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la communauté à rester attachés à celle-ci, mais aussi à la terre que l’on a quittée, que les parents ont quitté. Un passé douloureux, un passé qui ne passe pas et sur lequel on voudrait revenir est à la base même des motivations qui président aux efforts des diasporas. On peut aisément dresser une brève èève liste d’exemples : effondrement de Judée et destruction du second Temple de Jérusalem pour les Juifs ; famine meurtrière en Irlande sous domination anglaise pour les Irlandais ; génocide sous l’Empire ottoman pour les Arméniens ; guerre et destruction de la présence multimillénaire hellénique sur les côtes est de la mer Egée pour les Grecs ; guerre et occupation pour les Palestiniens ; guerre civile pour les Libanais ; joug communiste pour les Cubains, etc.

DOSSIER : DIASPORAS

La clef du problème peut résider dans le but de ces instances, à savoir agir sur la communauté mais aussi vis-à-vis du pays d’origine. Ce qui distingue la communauté de la diaspora, c’est que la communauté ne se soucie que de sa propre conservation, alors que la diaspora ne se soucie de sa préservation que dans le but de garder un lien – réel ou imaginaire – avec la terre d’origine, sur laquelle elle souhaite agir – parfois fantasme d’agir - via des aides économiques, des revendications politiques et des moyens Dans chacun des cas, les diasporas concernées ont fini, au fil des décennies et parfois des siècles, à se réapproprier la catastrophe, de pression. à en faire l’év ’évé ’év vénement fondateur de l’histoire de la communauté, celui avec lequel il y a un « avant » (mythe de l’âge ’âge d’or) et un ’â « après » (situation actuelle, nécessairement injuste et qu’il convient Limportance démographique L’ de réparer).11 Par conséquent, quent, la diaspora diff diffère de la communauté Le géopoliticien français Yves Lacoste a formulé une distinction au sens où elle a un compte à régler avec l’histoire. histoire. Lattachement L’ fondamentale sur cette question : une diaspora n n’existerait que si à la terre originelle est d’autant plus fort que le départ part n n’a pas été elle représente une force démographique conséquente vis-à-vis du volontaire ni réfléchi, mais s’est fait sous la contrainte : c’est en pays d’origine ou de la terre natale, voire si elle en est l’unique force cela que le cas des Italiens à l’étranger tranger diff diffère beaucoup des autres (ce qui fut le cas de la diaspora juive durant des siècles).9 Certes très pays, car l’émigration migration italienne n n’a presque été qu’économique. On discutable, cette distinction introduit une dimension quantitative constate d’ailleurs que, si l’on se réfè f re exclusivement aux critères fè aisément applicable : ainsi que « pèsent sent » les 60 millions de exposés précédemment, le nombre de diasporas et relativement Chinois, issus des communautés d’expatriées, face à une Chine réduit : la diaspora juive, la diaspora grecque, la diaspora irlandaise, d’1,3 milliard d’habitants ? 10 En revanche, dans cette logique, les la diaspora arménienne, la diaspora libanaise, la diaspora démographies des diasporas arménienne et juive leurs permettent palestinienne et la diaspora cubaine. On pourrait aussi spéculer de « compter » face aux « homelands » respectifs. Ce point de vue sur l’actuelle gestation d’une future diaspora irakienne, laquelle fait cependant débat, dans la mesure où il part de l’hypothèse que concernerait déj é à plus de 3 millions d’individus. éj la diaspora nexiste n’ que vis-à-vis de son pays d’origine.

La diaspora appara apparaît donc comme une reconstruction durable d’une communauté politique, se rattachant imaginairement à une terre d’origine tout en s’intégrant dans une multitude d’États. A l’heure où la mondialisation semble parfois bouleverser les notions de nations, d’identités et de frontières, la diaspora prouve par son existence que l’appartenance à une communauté, l’attachement à la terre d’origine, la multiplicité des identités et la force de la mémoire restent plus que jamais d’actualité. Phénomène ancien, la diaspora n’a jamais été autant en adéquation avec son environnement que dans notre monde globalisé

> Jean Doursounian, Diplômé de Sciences Po en 2007, actuellement en master à l’ESCP

1 Sheffer, Gabriel, Diaspora Politics : At Home abroad, Cambridge, Cambridge University Press, 2003. 2 Schnapper, Dominique – Bordes-Benayoun, Chantal, Diasporas et Nations, Paris, Editions Odile Jacob, 2006.

Par conséquent, une diaspora serait une communauté qui parvient, du fait de sa puissance démographique relative, à compter vis-àvis de sa mère patrie. Mais l’explication demeure insuffisante : pourquoi les Italiens et personnes d’origine italienne hors d’Italie, dont le nombre s’élèvent è èvent à plus de 60 millions d’individus, n’agissent pas en tant que diaspora face à une Italie peuplée de 59 millions d’habitants ? Il appara apparaît clairement qu’une diaspora ne se résume pas à une communauté construite et organisée d’émigrés qui entretiennent des rapports avec une terre d’origine tout en comptant démographiquement vis-à-vis d’elle. Ce qui caractérise la diaspora, c’est son rapport inconscient à la terre d’origine, rapport qui lui fournit une identité par procuration dans un environnement considéré comme étranger (le pays d’accueil). Reconstruite et fantasmée, cette identité est basée sur des mythes, des légendes historiques qui renforcent le sentiment d’appartenance à la diaspora en nourrissant un inconscient collectif. Or parmi ces mythes se trouvent bien éévidemment l’origine de la diaspora, la cause de l’émigration. Chaque diaspora se distingue par une naissance douloureuse, souvent forcée, qui pousse les membres de

Liens ambigus avec la terre d’origine Au final, la seule interrogation qui demeure est celle des rapports de la diaspora avec l’État concerné, si cet État existe : liaison forcément ambiguë, entre une communauté motivé motiv e par des intérêts passionnels et affectifs et une entité politique aux intérêts rationnels.12 Dans certains cas, le concept de nation a même précédé la construction de l’État moderne national (cas juif, arménien, grec et irlandais), et c’est parfois la diaspora qui a créé l’État (cas d’Israël, même si pour la diaspora juive, il s’agit non pas de créer un État mais de le « re-créer er »).13 Cependant, pour la très grande majorité des pays concernés, l’État utilise sa diaspora pour servir ses intérêts, souvent économiques mais aussi politiques.14 C’est dans cette perspective qu’il faut relever les créations de multiples « ministères res de la diaspora » dans plusieurs pays.15 Pour autant, dès que l’utilisation concerne le domaine politique et diplomatique, les diasporas font preuve de bien plus d’autonomie que ne le souhaiteraient les États concernés : les Irlandais des États-Unis ont durant longtemps soutenu l’action de l’IRA malgré l’hostilité de Dublin, et le rapprochement actuel entre Erevan et Ankara ne pla plaît que très modérément à la diaspora arménienne.

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11 C’est par exemple le cas des Arméniens qui commémorent le génocide le 24 avril de chaque année, par référence au 24 avril 1915, date du début des massacres. De même, chez les Juifs, la chute de la Massada en 73 et le suicide collectif qui s’en est suivi ont été intégrés dans la mémoire communautaire juive, pour transformer un élément de défaite en un élément d’identité (très significativement, le serment d’honneur que prêtent les soldats de l’armée israélienne est « Massada ne tombera pas une nouvelle fois »). 12

Dieckhoff, Alain, La nation dans tous ses États – Les identités nationales en mouvement, Editions Flammarion, Paris, 2000.

9

3

Prévélakis, Georges (dir), Les réseaux des Diasporas, Paris, L’HarmattanKYREM, 1996. 4

Diaspora, mythe et traumatisme

d’individus face à un pays d’1,1 milliard de personnes. Vertovec, Steven, The Hindu Diaspora. Comparative Patterns, Londres, Routledge, 2000; Lal Brij, V. – Reeves, Peter Dennis – Rai, Rajesh, L’encyclopédie de la diaspora indienne, Paris, Editions du Pacifique, 2008.

Chaliand, Gérard - Rageau, Jean-Pierre, Atlas des Diasporas, Paris, Editions Odile Jacob, 1991.

5

Schnapper, Dominique, Qu’est-ce que l’intégration ?, Paris, Editions Gallimard, Collection Folio Actuel, 2007.

6

Whitfield, Stephen J., In Search of American Jewish Culture, Cambridge, Brandeis University Press, 1999; Goren, Arthur, The Politics and Public Culture of American Jews, Indianapolis, Indiana University Press, 1999; Diner, Hasia, The Jews of the United States, 1654 to 2000, Berkeley, University of California Press, 2004.

7

De même, à l’exception de l’usage en commun d’un même alphabet, un arménien de Russie sera bien en mal de s’entendre avec un arménien du Liban (ne parlant même pas la même langue). Ritter, Laurence, La longue marche des Arméniens – Histoire et devenir d’une diaspora, Editions Robert Laffont, Paris, 2007. 8

Guerassimoff, Carine, L’État chinois et les communautés chinoises d’outremer, Paris, L’Harmattan, 1997 ; Leveau, Arnaud, Le destin des fils du dragon : l’influence de la communauté chinoise au Vietnam et en Thaïlande, Paris, L’Harmattan – IRASEC, 2003.. 9

Lacoste, Yves, Géopolitique des diasporas, Revue Hérodote, N°53, avriljuin 1989. 10

Cette réflexion vaut aussi pour la “diaspora indienne”: environ 20 millions

13 On peut noter la permanence quasi-obsessionnelle, très significative sur le plan psychologique, dans les vocabulaires des diasporas, des termes comme « recréer », « rétablir », « restaurer » ou encore « seconde naissance ». L’État grec est ainsi restauré après 1966 ans d’absence (absence limitée à « juste » 377 ans si on considère, comme les Grecs l’ont fait a posteriori, que l’Empire byzantin était un Empire grec). L’État Juif a disparu pendant 1878 ans jusqu’à sa re-création en 1948. Entre la disparition du dernier royaume d’Arménie en 1375 et la création de la première République d’Arménie en 1918, c’est 543 ans qui séparent ces deux entités, géographiquement distantes de plus 500 kilomètres si on considère leurs frontières les plus proches. 14

Economiquement, les diasporas, comme les communautés d’expatriés, peuvent être d’une importance colossale au niveau des transferts de fonds. Selon la Banque Mondiale (étude de 2005), les transferts de fonds des individus d’origine libanaise au Liban représentent 25,8% de la part du PIB du Liban. 15

L’Arménie a ainsi récemment créé, en juin 2008, un Ministère de la Diaspora. En Italie, un Ministère des Italiens de l’Etranger avait été créé par Silvio Berlusconi en 2001, puis remplacé en 2006 par un secrétariat d’État sous Romano Prodi. Désormais, cette tâche incombe à une direction du ministère italien des Affaires étrangères. De même, Ehoud Barak avait établi en Israël, en 1999, un Minister of Social and Diaspora Affairs, supprimé par Ariel Sharon en 2001 avant d’être recréé en 2003 : il sera aboli en 2006 pour être rétabli en 2007 sous le nom assez vague de Diaspora, Society and the Fight Against Antisemitism Minister. Globalement, ces ministères semblent poser des problèmes au niveau de leurs attributions et relèvent plus de la communication.

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DOSSIER : DIASPORAS

des instances de solidarité ethnique et communautaire sur une échelle globale (comme l’Agence juive pour la diaspora juive). Or de telles instances communautaires, au sens d’entités qui possèdent de réelles capacités de mobilisation, de transmission et d’éducation, demeurent extrêmement rares : on n’en trouve encore aucune, à un niveau global, pour les communautés indiennes et chinoises.8


10

Professeur à Science Po depuis 1988, Riva Kastoryano enseigne la sociologie politique. Elle a contribué dernièrement à l’ouvrage Identities, Affiliations and Allegeances édité par Seyla Behabib et Ian Shapiro, et publié en 2007 par les presses de Cambridge. Le cours qu’elle propose aux étudiants de Master Recherche, intitulé «le transnationalisme», l’amène naturellement à s’intéresser aux diasporas, à leur rapport au territoire et à la nation.

De nombreux chercheurs ont tenté d’apporter une définition au terme de diaspora, et ils sont loin d’être tous d’accord. Si vous deviez définir ce qu’est une diaspora, que diriez-vous ? Le terme de diaspora est à dissocier d’un autre terme, le transnationalisme. La diaspora, c’est avant tout une identitérefuge, qui mobilise diff différentes allégeances, qui joue sur l’hybridité. Un Juif chinois et un Juif américain vont ainsi pouvoir se réclamer de la même diaspora. La diaspora, c’est la réfé f rence identitaire de leur dispersion. fé Lorsqu’on parle de diaspora, on parle de la dispersion d’une population expulsée du lieu où elle vivait. Ce lieu devient alors la terre de réfé f rence à reconquérir. Derrière fé la diaspora, il y a à la fois un drame – une expulsion, un massacre, un crime, un génocide – et un mythe du retour. Il en est ainsi des Juifs avec Jérusalem. En revanche, lorsque l’on parle de diaspora, on ne parle pas encore de territoire. C’est la notion de terre qui intervient ici : nous sommes dans un espace-temps où il n n’’’yy a pas d’Étatnation, pas d’entité politique.

DOSSIER : DIASPORAS

Pourquoi alors, dans notre contexte actuel où les États-nations sont la norme politique, les diasporas n’ontelles pas disparues ? Les choses sont bien plus compliquées car il y aura toujours des gens qui rêvent êêvent de la terre promise. Lorsque les Arméniens cherchent la reconnaissance du génocide, c’est pour moi le symbole de cette quête de la reconnaissance perdue, un autre genre de terre promise. D’autres recherchent encore le « bout de terre » sur lequel s’installer. C’est le cas des Tamouls qui se constituent en diaspora en attendant de retrouver une terre à eux, découpée sur le territoire du Sri Lanka. Mais lorsqu’il s’agit d’un phénomène ancien, lorsque l’ « expulsion » à déjà des centaines d’années, comment maintient-on le mythe ? La force de l’expulsion maintient une mémoire vive, collective, qui se doit d’être transmise. En ceci réside la force de la diaspora. Cette mémoire douloureuse du peuple est transmise à plusieurs niveaux : d’abord, ce sont les parents, les grand-parents, qui racontent l’histoire,

qui éévoquent sans cesse, au quotidien, le souvenir. Ensuite, c’est la communauté qui prend le relais en organisant des activités, des ffêtes, des rassemblements. Certaines institutions, comme la religion, et je pense par exemple aux prières juives qui évoquent é Jérusalem, contribuent également à maintenir le mythe. Et surtout, c’est le regard de l’autre qui encourage à se retrouver en communauté d’expérience. Plus l’Arménien est compris comme diff différent, plus il cherche l’Histoire Histoire qui le rend diff différent. La violence perdure lorsque certains États, par exemple, refusent d’accepter l’Histoire. Il en est ainsi pour l’État turc. Plus il renie l’histoire des Arméniens et plus l’identité diasporique se renforce. D’ailleurs, ce renforcement de l’identité diasporique fait appara apparaître un nouveau phénomène : aujourd’hui, ce qui était culturel et identitaire devient politique, surtout chez certains jeunes Turcs ou Arméniens. Dans ce cas, peut-on dire que cette communauté qui se retrouve autour d’une histoire commune est une « diaspora mobilisée », notion que vous évoquez dans votre article « Vers un nationalisme transnational 1» ? Ce concept a été beaucoup utilisé par le sociologue John A. Armstrong qui définit une diaspora mobilisée comme « un groupe ethnique qui n n’a ni statut ni avantages ». À mon avis, une diaspora mobilisée, c’est une diaspora qui a un certain pouvoir économique : c’est cette ressource financière qui lui permet ensuite de mobiliser sa population. Les Juifs, les Arméniens, les Sikhs sont des diasporas mobilisées : elles entretiennent le lien en envoyant des sommes énormes d’argent dans leur pays d’appartenance, en participant à des festivals culturels, en écoutant la radio dans leur langue d’origine et en lisant un journal édité dans le pays quitté. Cette mobilisation entra ne ensuite une politisation, afin de entraî reconquérir la terre d’où l’on a été chassé. Cette mobilisation est pourtant à l’œuvre chez d’autres communautés où le mythe du retour n’est pas mis en avant : on ne cherche alors pas à quitter le pays d’origine. Vous appelez cela le transnationalisme. Quelle est la différence avec la diaspora ?

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Riva Kastoryano Une diaspora est avant tout une identité-refuge” Lexpérience de l’histoire apporte de L’ nouvelles dynamiques qui brouillent la frontière entre diaspora et communauté transnationale. Le nationalisme de diaspora est ancré dans un temps précis, alors que le nationalisme transnational est un processus plus récent. C’est une mobilisation plus actuelle et plus fluctuante qui a une caractéristique très importante : il n n’y a pas de volonté de retour à la terre d’origine. Ainsi, les Turcs d’Europe ne sont pas une diaspora. Ils vont bien sûr retrouver la communauté, à l’occasion d’un mariage ou d’un match de foot, mais ils s’installent réellement sur le territoire d’accueil. Nous sommes donc dans un processus de dé-territorialisation. Le nationalisme transnational se développe é éveloppe chez la population issue de l’immigration postcoloniale. Chez eux, on maintient le lien avec le pays d’origine, mais en même temps on vote, on s’investit… et on investit dans le pays d’accueil. Que ce soit dans le cas de la diaspora ou dans celui du transnationalisme, c’est une élite qui organise le réseau. Elle conna t à la fois les codes communautaires connaî et les codes de l’État. L’État d’origine joue un rôle majeur dans le cas du transnationalisme : puisque les migrants décident de rester, il faut trouver le moyen de maintenir le lien. Les États d’origine ont donc intérêt à être acteurs en prenant part dans un processus de reconnaissance des nouvelles dynamiques identitaires. Un de leurs leviers importants réside par exemple dans la double nationalité. Cela permet à l’État d’origine de maintenir l’allégeance. Lorsque ce processus de normalisation n’est pas enclenché et que les tensions identitaires perdurent, les diasporas et les groupes transnationaux peuvent-ils devenir dangereux ? À partir du moment où il y a création d’un nationalisme de minorité, il y a remise en cause de l’identification à l’Étatnation. À ce moment, cela peut être jugé

comme dangereux car le pays d’accueil comprend que cette dynamique nest n’ pas celle de l’intégration. On entre alors dans les problématiques de repli sur soi, de communautarisme. Et lorsque l’on va chercher dans l’extrême, le terrorisme, qui peut na naître d’organisations organisations diasporiques, est un défi aux États. Lorsque le terrorisme est la seule arme de mobilisation pour un mouvement qui cherche à se faire reconna tre sur la scène internationale, alors reconnaî la mobilisation devient lutte. Aujourd’hui, considérez-vous la mobilisation des communautés face à la guerre de Gaza comme dangereuse ? La cristallisation des identités autour de la communauté palestinienne accentue bien sûr les tensions, et le phénomène va bien au delà de la mobilisation de la diaspora palestinienne ! Ainsi, les Pakistanais et les Turcs se mobilisent aujourd’hui pour le peuple palestinien. Du coup, c’est l’Islam qui est utilisée comme identité de réfé f rence. fé L’ « oumma » devient une nation, et l’Islam L se dé-territorialise par rapport aux identités nationales qui, elles, sont territorialisées. La religion comme seule identité peut s’avé av rer dangereuse car cela cristallise les avé antagonismes, notamment avec les Juifs qui manifestent dans certains pays leur soutien à Israël,l, surtout pour ne pas laisser le terrain aux Musulmans. Face à cela, l’É État d’accueil a un grand rôle à jouer ! Lallégeance L’ à l’État doit être plus forte que celle à la diaspora ou à l’identité nationale afin de maintenir l’unité de la Nation.

> Propos recueillis par Naïké Desquesnes, étudiante en 5è année, Master Recherche Politique Comparée Mention Asie

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(c) Naïké Desquesnes

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> INTERVIEW

1 « Vers un nationalisme transnational. Redéfinir la nation, le nationalisme et le territoire », Revue française de science politique. vol. 56, n° 4, août 2006, p. 533553.


Diasporas as legal actors : challenges & opportunities for international law

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As an increasingly potent political and legal force, Diasporas

DOSSIER : DIASPORAS

present a challenge to standard paradigms of international law. But this challenge has yet to be fully addressed. While lawmakers have tended to avoid the legal implications of Diasporas by confining themselves to traditional constructs such as “immigrant” and “minority” minority , scholars in the humanities have tended to treat minority” Diasporas as historical and cultural processes with little legal or political relevance. Diasporas, in short, have received a mixture of insufficient and biased attention. They demand new consideration in international law. Recent cases have revealed both the great legal potential of Diasporas and the limits of the laws that should be recognizing them. Consider, for instance, the efforts of the Cambodian Diaspora in France and Belgium to prosecute the Khmer Rouge officials responsible for crimes committed in Cambodia between 1975 and 1979. At the time of the opening of court hearings in the early 2000s, the Cambodian Diaspora in France and Belgium created victims’ associations (such as the Khmer Rouge Victims’ Committee and the Khmer Rouge Genocide Victims) and used legal action to fight impunity by bringing lawsuits before national and international courts. Operating abroad, the Diaspora was an important source of outreach and awareness building and a partial substitute for a justice system in Cambodia that proved unable or unwilling to prosecute. But lacking formal recognition as a distinct, legal community, the Diaspora was unable to properly pursue its legal initiatives through the key channels of international law. Indeed, if some in the Cambodian Diaspora testified before institutions like the International Criminal Court, the European Parliament, and the United Nations, they did so as individual witnesses to genocide rather than as members of any legallyrecognized group.

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Diasporas have emerged as powerful legal actors in a wide range of other socio-political contexts. In criminal proceedings, the Chilean and Argentinean Diasporas have appealed to universal jurisdiction laws in attempts to have criminals arrested and tried while traveling through Europe. And in truth-seeking activities, the Haitian Diaspora has actively participated in the creation and operation of a truth commission, while the Liberian Diaspora is deeply involved in a truth-seeking process designed to take depositions from exiled Liberians living in the United States, as well as from those in refugee camps in Ghana.

in law and education. Claims of recognition thus raise a powerful tension between integration and assimilation on one hand, and preservation of ties to the home country on the other.

Chander also argues that Diasporas may themselves desire representation in international lawmaking. As a transnational community, their lives will be especially vulnerable to international sanctions and restrictions. Diasporas are distinct from nongovernmental organizations, which have become accepted participants in international lawmaking, and they may not be able to depend on their adopted or homeland governments to These cases demonstrate that the role of Diasporas in the fight champion their interests internationally. against impunity – especially through legal mechanisms such as universal jurisdiction – is crucial. Ignored in the past, the Thinking about Diasporas in legal terms exposes important legal potential of Diasporas has begun to receive some scholarly shortcomings in the international legal system. It also distinguishes attention. In one recent study, Anupam Chander, Professor of Law Diasporas, as an analytical concept, from close alternatives such at the University of California, researched the rise of Diasporas as a as “ethnic groups,” “immigrants,” and “minorities,” all of whose challenge to the dominant model of international law and created legal claims may overlap with those of Diasporas while not coinciding perfectly. Lawmakers must identify a larger, more a typology of legal claims Diasporas may make in the future. complex category of legal claims in order to treat these challenging Any legal research on Diasporas is a positive sign, and Chander’s theoretical distinctions with appropriate nuance rather than with is particularly significant. His study makes a crucial distinction ad hoc solutions. The recognition of Diasporas – as forceful legal between Diasporas and a group that is often conflated with them – actors in international law and politics – depends on it. immigrants – by arguing that Diasporas maintain uniquely strong bonds with their homeland. According to Chander, these bonds explain why the majority of legal claims that Diasporas are likely to make are first linked to recognition – by both their adopted countries and by their homelands. While this recognition can take different forms – from claiming dual nationality and allowing individuals in a Diaspora to maintain official connections to a > Priscilla Rouyer, foreign state, to seeking a minimum of self-governance, to seeking 5th year student, direct governance by homeland government – implicit in all of them is the issue of the adopted country’s’’s assimilationist strategies Master’s degree in Public Affairs

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13 DOSSIER : DIASPORAS

International law has no categories for transnational actors. How can Diasporas’ scattered individuals unite to form a powerful force? How should international law adapt to such challenges?


an international security challenge 14

How does a Pakistani construction worker living in New York The 9/11 attacks on the United States were financed mostly

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send money to his brother in Karachi? The answer may surprise through traditional banks, and not hawala, but as the United you. States and other countries tighten the security of their financial institutions with measures such as the USA PATRIOT Act and Instead of going to a bank and paying for a wire transfer, he goes the monitoring of SWIFT transactions, there is a growing concern to a local hawala operator, or hawaladar hawaladar. This hawaladar accepts that terrorists will move more and more underground into hawala. the construction worker’s’’s US dollars, plus a modest fee, then calls As Arnaud de Borchgrave pointed out in the Washington Times, a fellow operator in Karachi with instructions to deliver Pakistani “For al Qaeda, hawala is fast, reliable and secure.” The ParisRupees to the construction worker’s’’s brother. The New York based Financial Action Task Force, the global authority on antihawaldar can repay the debt to his Karachi counterpart with future money laundering, stated in its February 2008 report on terrorist hawala transfers to recipients in New York, or even a shipment financing that “alternative remittance systems have been used to of commercial goods, like cell phones, to offset the Karachi disguise terrorist movement of funds,” often to transfer money to hawaladar’s expenses. No formal banking relationship is needed “operational cells”. and no currency ever crosses an international border. The International Monetary Fund has suggested a two-track plan This system of international transactions, or hawala, can best be for mitigating the threats related to hawala. First, governments described as a “money transfer without money movement.” Of should launch a program to register all hawalas operating on their the billions of dollars of remittances among Diasporas and their soil. In the United States, hawalas are generally illegal because native countries, which provide vital support to numerous families they provide certain financial services without having registered and whole economies, the money that flows through this informal as official “money services businesses.” Yet they often operate banking system is at present almost impossible to monitor. This relatively openly, advertising their services in local, especially unregulated financial instrument presents unique and difficult ethnic, newspapers. The 2007 US Anti-Money Laundering challenges to governments attempting to prevent criminals and Strategy estimated that “fewer than 20%” of all money service terrorists from funding their global operations. The informal businesses have registered with the Treasury Department. Once financial system known as hawala operates parallel to legal registered, the IMF proposal would require hawalas to improve banking systems and is therefore extremely vulnerable to abuse. the transparency of their records. Such a program would require International efforts are needed to regulate and bring transparency that governments commit resources and manpower, especially to hawala, in order to facilitate legitimate remittances and increase multilingual investigators, to enforce the hawala regulations. global security. The second part of the IMF strategy would involve assisting Hawala is older than mainstream Western banking, and even countries with weak or undeveloped banking systems to improve today can be more convenient and efficient, making it attractive to the quality of their formal banking sectors. By decreasing both legitimate and criminal actors. Hawaladars often offer better bureaucracy and improving reliability of the formal banking sector, currency exchange rates than banks, which are obligated to adhere the trust needed between customers and banks would grow, edging to official exchange rates. In addition, most banks require their out unregulated hawalas. customers to provide personal information and documentation, which can be a problem for immigrants, like the construction Hawalas, however, will not go away anytime soon. The services worker, who may have over-stayed his visa, may have language they provide to countless people are an important part of the difficulties, or may otherwise be unable or unwilling to provide global economy. Yet the fact that no one can reliably estimate the requested documents. Hawaladars are generally content to do how many people are using them, or how much money is being business asking few, if any, questions of their customers. transferred through them, illustrates just how unregulated the system is. Governments should work to create an environment This is where hawala becomes vulnerable to abuse. The qualities in which hawalas operate more openly, while leaving enough that make it so desirable and convenient for honest customers, room for honest people to use their services to send money home. like the construction worker, also make it attractive to money Financial systems are often overlooked as an important front in launderers and terrorists. A hawala transaction leaves almost no the wars on terrorism and organized crime, and improving the paper-trail since hawaladars generally note only their obligations security of hawalas would be an important step toward ensuring to and from other hawaladars, and not those related to individual global prosperity and security. customers. Our construction worker’s hawala transaction may have been bundled with a dozen others, making it nearly impossible for investigators to determine whose money is going where. With no formal record of transactions, and few questions asked, hawala is an attractive option for criminals and terrorists. Indeed, hawala has been widely used in money laundering operations. The US government has identified the use of hawala in everything from drug trafficking operations, to welfare fraud, insider trading and terrorism. The 1993 Bombay attacks that killed and wounded hundreds were financed through hawala transactions in the United Kingdom, Dubai and India.

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> Steven Koch, exchange student from the University of Pennsylvania

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15 DOSSIER : DIASPORAS

RRegulating diaspora transactions:

Hawala, an informal money transfer system, is used by Diaspora populations to transfer remittances around the world, yet the system is vulnerable to abuse by criminals and terrorists due to its lack of regulation.


Outsourcing Extremism Diaspora Funding and Hindu Nationalism

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Within the course of three bloody days in February 2002, an an attack motivated by Gandhi’s secular preaching and demand of

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upwards of two thousand Muslims were systematically slain in the Indian state of Gujarat. The press euphemised the mass slaughter as “rioting” – a spontaneous, chaotic eruption of aggression, apparently in response to an earlier incident of Muslim violence. The truth is somewhat different. The assault was organized and orchestrated with the support of the state government, run by the Hindu-nationalist right-wing party, the Bharatiya Janata Party (BJP) and other affiliated religious organisations. More recently, another gruesome attack was conducted by the same organisations in the eastern state of Orissa, only the victims this time were Christians. Such communal tensions and incidents of inter-faith conflict have often undermined India’s vibrant democracy, founded, amongst other things, on principles of secularism. Gujarat however is in many ways the most chilling example of the potential destructiveness and danger posed to India’s secularity by Hindutva, the core ideology of such prominent Hindu fundamentalist groups as the Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS), the Vishwa Hindu Parishad (VHP) and the aforementioned political entity, the BJP.

concessions for Muslims. In what is surely a painful irony, Hindu extremism remains on full display in Gujarat, the very state of Gandhi’s birth. But apart from Gandhi and its history of recent religious turmoil, Gujarat is noteworthy for two other reasons : its industrial progress and its considerable and powerful Diaspora. The two are interlinked; the Gujaratis are a phenomenal trading community and have spread out across the world, forming perhaps the most prominent of India’s regional Diasporas. Of the roughly 2 million members of the Indian Diaspora in America, almost 40 percent are affluent Gujaratis. Hindu nationalists, long aware of the economic and political potential of these large populations, set up wings such as the Global Hindu Council (VHP), Hindu Swayamsevak Sangh (HSS) and charities such as Sewa International and India Development and Relief Fund (IDRF) to deal exclusively with the Diaspora. The VHP acts as an umbrella organisation that taps the wealthy Diaspora for contributions to “charity” charity” and then funnels these charity” funds to be used by its operatives, primarily for training and propaganda purposes in India. For example, it was revealed that in the year 2000, almost 80% of the funds collected by the IDRF were channelled to organisations affiliated with the Sangh Parivar, a broad term for the coalition of Hindutva-endorsing groups.

Hindutva envisions India as a strictly Hindu nation with no place for Muslims or Christians, considering them aliens even though they have lived there for centuries.The ideology has little grounding in traditional, mainstream Hinduism, but rather emerged in the early 1920’s with the founding of the RSS, an organisation explicitly modelled on Fascist ideals. The RSS gained particular The VHP uses a number of means to secure funding from the notoriety after one of its members assassinated Mahatma Gandhi; Diaspora. It regularly organises seminars and “value-instilling”

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workshops in temples across America and the UK. It also sets up terror, oppression and religious fascism. student groups who canvass for support and funding on university campuses. Furthermore, it taps companies with a significant The Hindutva-fueled riots of Gujarat have been followed by a “retaliatory” retaliatory” spate of Islamist terror attacks, a potentially endless and retaliatory” number of Indian employees for corporate donations. tragic cycle of violence. There is grave fear that the unprecedented However after numerous complaints revealed a significant scope of the recent Mumbai attacks may spark a similarly amount of the funds raised by Sewa and IDRF for relief work in unprecedented level of co-ordinated communal violence. The the aftermath of the 2001 earthquake were instead put to use for Indian Diaspora needs to recognize its potential and complicity promoting Hindu extremist ideology, certain companies, including in promoting or averting such crises. Before donating their dollars software giants Cisco and Sun Microsystems, permanently barred and pounds, Indians abroad must realize that the “empowering of the organizations from their charities list. The Hindu charities Hindus”” is merely a euphemism for the desecularization of India. responsible for collecting the funds testified that they were not Standing on the cusp of greatness, the world’s largest democracy aware or had not ‘intended’ to support extremism, tenuous claims cannot divorce from its secular roots. made all the more untenable thanks to incriminating reports published by watchdogs such as the Human Rights Watch and the South Asia Watch (AWAAZ). The VHP’s most worrisome achievement however, and one that is crucially linked to its success in generating support, has been its transformation of the Indian Diaspora’s identity from one that is grounded in nationalism (“Indian” Indian ) to one grounded in religion Indian” (“Hindu”). The VHP has also successfully diluted the perceptual difference between Hinduism and the brand of Hindu fascism that it espouses. The Hindu Diaspora, eager to reconnect to its homeland through community organisations in its adopted countries, has contributed heavily to these organisations, ostensibly in the name of promoting Hindu solidarity and empowerment. The majority of the Diaspora believes they are supporting mild religious activism. What they are actually doing is supporting

> Vikramaditya Singh, exchange student from St Stephen’s College, Delhi University, India

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17 DOSSIER : DIASPORAS

The rise of India has been mirrored by the growing wealth and prominence of its Diaspora. However, links between the Diaspora and Hindu nationalists involved in incidents of communal violence have highlighted the religious tensions threatening to undermine the world’s largest democracy.


La diaspora, un levier de pouvoir pour la Chine Chine contemporaine ?

L’empire au 19e siècle intègre le concert des nations, mais sans s’intéresser davantage à sa diaspora, qui se diversifie et dont les

Dès l’avè av nement de la Chine communiste, le lien entre diaspora avè et politique étrangère s’inverse. La diaspora chinoise passe d’un rôle actif à un rôle passif et devient l’instrument de la politique de Pékin. Les Chinois d’outre-mer doivent pouvoir influencer politiquement leurs États d’accueil en faveur d’une réunification avec Ta Taïïïwan wan ainsi que dans la propagation de l’idéologie maoïste. De plus, ils deviennent un outil économique pour le développement é éveloppement du continent en étant les premiers investisseurs « étrangers » en Chine, ainsi qu’à travers leurs envois de remises aux familles restées au pays et qui représentent une importante source de devises pour la RPC.

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19 DOSSIER : DIASPORAS

DOSSIER : DIASPORAS

Dans la Chine classique, la diaspora est avant tout composée

de marchands partis à l’étranger trouver des opportunités commerciales qui n’existaient pas dans une Chine imp impériale fermée, où l’É État exerçait de nombreux monopoles. La notion même de « relations étrangères » n’existe pas : selon le système tributaire confucéen, socle scolastique de la doctrine culturaliste chinoise, la Chine est sans équivalent et ne saurait traiter avec des États étrangers d’égal à égal. Par ailleurs, le mépris que les confucianistes éprouvent à l’égard gard des marchands n n’incite pas à l’entretien de liens politiques entre la métropole et sa diaspora.

Alors que Pékin s’affirme comme un acteur majeur sur la scène mondiale et s’engage dans un processus éévident d’adaptation aux normes internationales, il appara apparaît pertinent de s’interroger sur les éévolutions de la position chinoise à l’égard de sa diaspora : comment les nouvelles générations du PCC vont-elles gérer la question des émigrés clandestins qui continuent d’arriver dans les pays occidentaux ou qui restent après la fin de leurs contrats temporaires dans des pays sans tradition d’immigration ancienne comme c’est le cas en Israël ? Quelle attitude la RPC va-t-elle adopter face aux effets du déferlement d’étudiants chinois sur les bancs des universités américaines ? Ainsi, au-delà des défis économiques et politiques actuels, la Chine a devant elle un défi humain de grande ampleur, la gestion de ses flux migratoires Les migrations chinoises contemporaines viennent confirmer mondiaux. l’utilisation économique de la diaspora par Pékin. Depuis la fin des années 1990, on assiste en Afrique et au Moyen-Orient à un afflux de migrants chinois dont l’arrivé arriv e est clairement liée arrivé à la politique étrangère re de la Chine. Motiv Motivée par la recherche constante de nouveaux marchés, la RPC envoie de nombreux ouvriers dans ces pays, nourrissant ainsi la formation autonome de nouvelles communautés chinoises. Certains auteurs, comme > Alain-James Palisse et Magali Robert, Antoine Kernen, ont clairement montré le lien entre la politique étudiants en 5è année, Master Recherche, africaine de la Chine et ces migrations. Cependant, cette présence chinoise supposée servir la « diplomatie du sourire » de Pékin ne Politique comparée, mention Asie Après la mort de Mao en 1976, l’utilisation de la diaspora par le pouvoir central s’inscrit dans la ligne d’une politique étrangère défendant les intérêts nationaux. Les Chinois d’outre-mer se retrouvent alors plongés dans la rivalité Chine-Taï Chine-Taïwan ïwan : en 1979, Deng Xiaoping les présente comme des représentants « politiques » qui « jouent un rôle de plus en plus important et actif dans la réunification de la patrie » (Carine Pina-Guerassimoff ). Parallèlement, l’implication économique (largement encouragée par Pékin) des Chinois d’outre-mer à Taï Taïïwan, wan, Hongkong et dans les zones côtières du Sud de la Chine a conduit à une intégration économique poussée dans la région.

effectifs augmentent continuellement. C’est pourtant au sein des communautéss d’outre-mer que se joue d déj é à l’avenir de la Chine éj post-impériale. riale. À côté de la migration de travail, on trouve également les premiers étudiants qui partent faire l’apprentissage de l’Occident et de ses savoirs. Des intellectuels, des réformistes et des révolutionnaires éévolutionnaires en exil les y rejoignent, et ensemble ils cherchent à constituer l’élite politique de la Chine de demain. C’est au Canada en 1899 que Kang Youwei, Liang Qichao et les monarchistes constitutionnalistes, vivant proscrits suite à l’échec la réforme des 100 jours, fondent la « Société de protection de l’Empereur » (保皇会–baohuanghui). baohuanghui). C’est au sein de la diaspora baohuanghui chinoise en Asie, en Amérique et en Europe que Sun Yat-Sen recrute pour sa « Société de R Régénération de la Chine » (兴中会– xingzhonghui), puis à partir de 1905 pour la « Ligue Jurée » (同盟 xingzhonghui 会–tongmenghui), tongmenghui), noyau fondateur du futur Parti Nationaliste (国 tongmenghui 民党–guomindang –guomindang –guomindang guomindang). ). C’est d’ailleurs en partie grâce à l’argent de la diaspora que Sun finance ses activités révolutionnaires. é évolutionnaires. Après la première Guerre Mondiale, dans le même esprit, nombre de futurs cadres du Parti Communiste Chinois parmi lesquels Zhou Enlai, Zhu De ou encore Deng Xiaoping feront leurs classes en travaillant ou en étudiant à l’étranger, particulièrement en France, en Allemagne et en Union Soviétique. Jusqu’en 1949, le renouveau politique chinois est donc fortement influencé par la diaspora, dont l’argent et les protégés jouent un rôle majeur dans les affaires intérieures et extérieures d’une métropole qui se redéfinit politiquement.

se fait pas sans heurts. R Récemment, les troubles en Angola dus à la concurrence chinoise sur le marché économique local ne sont qu’une des premières manifestations des effets pervers que peuvent entrainer l’afflux de ressortissants chinois dans ces nouveaux pays d’immigration.

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La diaspora chinoise représente aujourd’hui plusieurs dizaines de millions d’individus répartis aux quatre coins du globe. Une telle communauté joue-t-elle un rôle dans la politique étrangère de sa puissante patrie d’origine? Au fil des années, les Chinois d’outre-mer sont passés d’un rôle d’acteur à celui d’instrument de la diplomatie chinoise.

À partir de 1966, alors que la R Rééévolution volution culturelle en Chine est à l’œuvre, les Chinois d’outre-mer outre-mer en tant que patriotes et membres des partis communistes des diff différents États d’Asie du Sud-Est, jouent un rôle militant. Pékin est alors un soutien essentiel pour les partis communistes et les mouvements de guérillas révolutionnaires é évolutionnaires locaux (en Birmanie, en Indonésie, au Cambodge par exemple).

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exodarap eL eviuj aropsaid al ed Le paradoxe L de la diaspora juive

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DOSSIER : DIASPORAS

La permanence de la diaspora juive, historiquement fondée sur le mythe du retour, garde-t-elle un sens après la création d’Israël, ou constitue-t-elle un paradoxe? Singulière en son existence et parcours, la diaspora juive regroupe

Soulageant une frustration politique séculaire, la création du foyer juif entend terminer l’exil, mettre fin à l’existence de la diaspora, qui n’existerait que par défaut, en l’absence d’un État. La déclaration d’indépendance du 14 mai 1948 confirme cette intention: « Nous lançons un appel au peuple juif de par le monde à se rallier à nous dans la tâche d’immigration [...] et à nous assister dans le grand combat que nous livrons pour réaliser le rêve êêve poursuivi de génération en génération : la rédemption d’Israëll ». Suite aux appels gouvernementaux, les vagues migratoires successives arrivent en Israël.

d’Israël, et a un poids politique non négligeable dans les affaires politiques des deux pays. Si la diaspora juive est aujourd aujourd’hui une réalité fondamentalement diff rente de celle de l’É diffé ’État d’Israël, elle joue néanmoins un rôle géopolitique considérable, notamment concernant le conflit israélopalestinien. Les Juifs non-israéliens se voient parfois forcés de prendre position. Leur implication devient presque automatique : soit par leur alignement aux problématiques contemporaines soit par leur silence politique. Le conflit est lui-même source de fracture entre les communautés dispersées, façonnant l’identité contemporaine juive diff différemment de l’appartenance israélienne. Ainsi, faire partie de la diaspora juive ne signifie guère une volonté migratoire. La construction étatique en 1948 est venue s’ajouter à l’existence des Juifs éparpillés dans le monde et possédant déj é à une éj autre nationalité. Fils de générations de migrants, nomades par tradition, ces Juifs, sédentarisés dans d’autres parties du monde, ne demandent pas forcément plus de l’État israélien que le partage symbolique d’une culture millénaire.

Limaginaire du « Juif errant » symbolise l’attachement profond L’ du peuple à l’expérience d’exil. Les Juifs, éloignés de leur terre ancestrale, ont fait de la diaspora leur identité.

Israël et diaspora juive sont aujourd’hui deux réalités distinctes mais non distantes. Malgré la naissance de l’État d’Israël, les communautés juives se sont solidifiées. La dissociation de l’identité diasporique et de l’identité israélienne relève èève plus d’une La première aliyah (« ascension » en hébreu) est celle des coexistence que d’un paradoxe, faisant du mythe du retour un immigrants d’Europe Europe de l’Est, suivis des ressortissants de ll’URSS choix personnel. puis d’une vague d’É ’Éthiopiens. Depuis 1948, Israël a ouvert ses portes à plus de quatre millions de Juifs, et plus de 600 000 nonJuifs, surtout des Philippins et des Soudanais dans la dernière décennie. Tandis que la citoyenneté israélienne lienne n n’est aujourd’hui plus uniquement liée au fait d’être juif, la naissance de l’État tat n n’a pas entra né la fin de la diaspora. Paradoxalement, celle-ci conserve entraî l’imaginaire de l’Exil, contraint, alors que l’É ’État permet (par la loi du retour) à n’importe quel Juif dans le monde de demander la nationalité israélienne.

La destruction du second Temple, en 70 après J.-C., pendant la domination romaine, marque le début de la diaspora juive. La dispersion des communautéss juives entra entraîne leur diversification. C’est cette fragmentation des pratiques religieuses, problématique pour les communautés rabbiniques, et la marginalisation des groupes juifs (non reconnus ou mal intégrés) qui génèrent le concept d’Exil et le rêve êêve du retour dans l’imaginaire collectif juif.

De fait, il existe aujourd’hui deux appartenances indépendantes pendantes : être juif et être israélien. La diaspora reste à la marge de l’É ’État tout en dialoguant constamment avec lui, participant d’un échange constant de flux transnationaux : personnes, ressources, informations. Lexemple L’ de la communauté juive aux États-Unis est en cela significatif. Comptant 5,2 millions de personnes en 2000, elle constitue la plus importante communauté juive hors

les individus de tradition et de religion juive rattachés par leur mémoire collective à la terre d’Israël. Première en son genre, elle incarne peut-être le devenir de ce phénomène social. Mais le projet sioniste du 19e siècle, puis son aboutissement en 1948, semble vider de son sens la diaspora juive, qui trouvait dans l’espoir du retour sa raison d’être à travers les siècles. cles. Doit-on voir un paradoxe dans sa permanence après la création de l’É État d’Israël ?

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> Laura Waisbich, étudiante en 4è année, Master Recherche, Relations Internationales

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21 DOSSIER : DIASPORAS

Lavè L’ av nement du sionisme moderne au 19e siècle avè cle fait du juda judaïsme un projet national. Son père, Théodore Herzl, l’associe aux mouvements nationalistes européens de l’époque, fondés sur le principe des nationalités. Il ressuscite ainsi l’idée de diaspora comme exil temporaire. Idée que l’on retrouve dans le slogan politique des réfugiés juifs en Palestine à partir de 1919: « Une terre sans peuple, pour un peuple sans terre ». Néanmoins, le succès des nationalismes en Europe noffre n’ aux Juifs ni l’espoir d’un État ni la perspective de retour. Ce n’est que scandalisés par les barbaries de la Shoah que les dirigeants du monde entier embrassent, par culpabilité ou croyance, la cause sioniste. Celle-ci, une fois dotée du soutien international, se matérialise par la résolution 181 de l’Assemblée Générale de l’ONU, le 29 novembre 1947.


Mizos juifs : une diaspora auto-proclamée ?

Quel intérêt à se proclamer branche perdue d’une diaspora

DOSSIER : DIASPORAS

puissante ? C’est la question qu’on ne peut s’empêcher de se poser lorsque l’on se penche sur la conversion au Juda Judaïsme de milliers de Mizos. Au Mizoram, un État du nord-est de l’Inde coincé entre le Bangladesh à l’Ouest et la Birmanie à l’Est et comptant moins d’un million d’habitants, un nombre croissant de personnes se met à pratiquer les rites Juifs à partir des années 1950. Puis, dans les années 1980, ce groupe, aujourd’hui large de huit à neuf mille fidèles, se revendique comme la descendance de la tribu de Manassé, une des dix tribus perdues d’Israël dispersées suite à la destruction du royaume d’Israël par les Assyriens en 722 avant J.-C. Ceci est la version de l’histoire mise en avant tant par les Bnei Menashe, ou enfants de Manassé, que par Shavei Israel, une organisation qui s’est donnée la mission d’identifier les tribus perdues afin de les ramener en Israël. Mais comment ne pas rester perplexe face à cette population aux traits mongoloïdes, aux langues tibéto-birmanes, évang é élisée au début du 20e siècle par des missionnaires britanniques et américains, qui affirme soudainement faire partie du peuple élu? Deux théories principales sont avancées pour justifier cette revendication. La théorie de l’origine retrace la migration de la tribu de Manassé depuis son expulsion d’Israël: après avoir traversé le Moyen-Orient et l’Asie centrale, elle se serait retrouv retrouvée au Tibet, puis dans le sud de la Chine, d’où, chassée et persécutée, elle aurait trouv refuge dans des grottes, avant de finir dans le nord de la trouvé Birmanie puis sur l’actuelle frontière indo-birmane. La théorie des coutumes met quant à elle en lumière un certain nombre de parallèles entre les coutumes mizos pré-chrétiennes et les traditions juives, tant au niveau des croyances (monothéisme) que des rituels (mariage, sacrifices animaux, trois festivals religieux rythmant l’année). De plus, les prières et chants mizos font constamment réfé f rence à Manasia ou Manase, un ancêtre idéalisé fé dont le nom est interprété comme un dérivé riv de Manassé. rivé Néanmoins, l’absence d’information fiable empêche de confirmer scientifiquement ces hypothèses. L’émigration jusqu’en Chine des tribus perdues au cours de leur errance n’a par exemple rien d’évident, éévident, puisqu’il semblerait que les communautés juives de Chine (Kaifeng) soient une branche issue des peuples juifs d’Iran.

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(c) Julien Levesque

De nombreuses incohérences peuvent de plus être tre relev relevées concernant les rites et coutumes : ainsi, du porc est consommé à quasiment tous les repas au Mizoram. Par ailleurs, la comparaison entre les coutumes mizos et les traditions juives est faite sur la base des rites juifs tels que décrits dans la Bible, et dont de nombreux pans ont été abandonnés.

d’abord de pratiques tribales au Christianisme, puis au Juda Judaïsme. En conséquence, il semblerait que la plupart des notions bibliques des Mizos aient été acquises lors de la première conversion, et non transmises à travers les générations. rations. La conversion au Juda Judaïsme se serait donc faite dans le but « de couper court au Christianisme et en quête d’une importance ethnique d’une nouvelle forme. » La seconde conversion a permis aux Mizos de restaurer la dignité de Dans l’espoir de prouver de façon indéniable leur origine israélite, leurs ancêtres, alors que les missionnaires chrétiens les qualifiaient les institutions juives du Mizoram, soutenues par des organisations de sauvages. israéliennes telles que Amishav ou Shavei Israel ont eu recours au test ADN, afin de déceler dans les populations mizos des gènes La juda judaïït ïté de ces Mizos est de toute éévidence un « produit censés être communs à tous les Juifs. L’aliyah aliyah d’environ 1500 Mizos du Christianisme », fruit de leur première conversion par des à partir du milieu des années 1990 s’est certes faite sur la base de missionnaires occidentaux. Tenter de prouver un lien avec une leur pratique du Juda Judaïsme et non sur la base de génotypes, mais tribu perdue a donc peu de sens. Néanmoins, que leurs origines l’absurdité d’une telle démarche soulève èève une question polémique: se mêlent ou non à la diaspora, c’est bien par leur pratique du l’activité d’Amishav ou de Shavei Israel, œuvrant pour le retour des Judaï Juda sme que ceux qui se nomment les Bnei Menashe se distinguent tribus perdues en Israël, n’est-elle pas une forme de prosélytisme ? comme Juifs, une pratique qui, bien qu’elle leur ait été enseignée En d’autres termes, ces Mizos auraient-ils embrassé le Juda Judaïsme par des rabbins d’Israël et de Bombay, répond à une réelle volonté de cette façon sans l’intervention extérieure de ces organisations ? de conversion. En outre, comment ne pas accuser les Mizos juifs d’opportunisme, utilisant la loi du retour israélienne pour échapper à une marginalisation politique et économique ? On observe par exemple que l’émergence mergence du Juda Judaïsme au Mizoram se fait parallèlement à l’affirmation de mouvements nationalistes de lutte armée contre l’État central indien (1966-1986), favorisant le mouvement de conversion. L’anthropologue Shalva Weil souligne le fait que les Mizos n’ont pas procédé à une conversion, mais à une double conversion : tout

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> Julien Levesque, étudiant en 4è année, double diplôme Sciences Po-SIPA en Affaires Internationales

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Dans une région du nord-est de l’Inde, plusieurs milliers de personnes pratiquent le Judaïsme depuis les années 1950 et se disent les descendants de la tribu de Manassé, une des dix tribus perdues d’Israël. Prouver l’authenticité de leurs revendications a peu de sens, mais induit une question polémique: la conversion des Mizos est-elle le résultat d’un prosélytisme juif ?


Seul pays au monde à compter plus de ressortissants en dehors de ses frontières qu’à l’intérieur, le Liban ne peut se comprendre qu’à travers sa diaspora.

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La scène a pour théâtre la frontière ivoiro-ghanéenne. « Papiers ! »

mâchonne le douanier. «Nationalité ? » « Libanaise », réplique le voyageur au teint clair. « J’ai dit nationalité ! », beugle le gabelou. « Libanais », insiste l’autre, interloqué. La réplique cingle : « Mais enfin, ce n n’est pas une nationalité, c’est une profession ! »

DOSSIER : DIASPORAS

Cette anecdote rapportée par l’Express ’Express du 24 octobre 2002 en dit ’Express long sur un certain nombre d’idées reçues concernant l’identité libanaise telle qu’elle est perçue par les étrangers. Mais à quelle « profession » notre homme faisait-il allusion ? Celle de marchand, à l’évidence, ’é ’évidence, étiquette si souvent collée au peuple libanais. Au demeurant, cette réputation de commerçant ant inv invétéré n’est pas usurpée s’il l’on songe que depuis des temps immémoriaux, les Libanais se sont distingués par leur aptitude à commercer de par le monde. Cinq mille ans après l’établissement des premiers comptoirs phéniciens en Méditerranée, les Libanais excellent toujours dans les domaines de la banque ou de l’import-export. D’où leur propension à dépasser les étroites frontières du Liban pour s’en aller courir la fortune sous d’autres cieux. Les exemples récents de Carlos Ghosn, PDG de Renault, Nicolas Hayek, président de Swatch Group, ou encore Elie Saab, couturier à renommée internationale le prouvent mieux que jamais. Aussi pourrait-on penser que le motif principal du phénomène diasporique libanais est économique, conomique, si ce n n’était son aptitude à exporter ses idées, sa culture, ses traditions. En témoigne les vagues successives de journalistes, intellectuels, écrivains, tel un Khalil Gibran, qui, parfois contraints, ont choisit l’exil vers les États-Unis ou l’Europe pour exprimer leur talents. Culture, commerce, échange, partage… Et si la diaspora à la libanaise trouvait ses ressorts ailleurs ? Et si l’attrait pour l’Occident

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était tait motiv motivé par d’autres raisons que la seule tradition commerciale et le seul désir de partager des idées ? Si le douanier ivoirien s’était interrogé sur les raisons profondes de l’association libanais-commerçant qu’il avait spontanément établie, sans doute aurait-il conclu qu’ilil ny n’’’y a pas une diaspora mais des diasporas. Cette propension à l’exil ne serait-elle pas liée à la structure même de l’identité libanaise ? Ne serait-elle pas le reflet du sentiment de « minorité partagée» que ressentent nombre de Libanais ? Car, pas plus au Liban qu’ailleurs, « nul n n’est prophète en son pays ». Et le musulman chiite, le chrétien maronite ou le druze ont tous une excellente raison de se sentir, d’une façon ou d’une autre, minoritaire dans leur propre pays. Chacun dans son village, sa ville, son statut social et son appartenance religieuse peut se sentir l’objet, sinon la victime d’une discrimination latente.

inhérents à la société libanaise. Mieux encore, cette émancipation les autorise à entretenir des relations sociales et amicales avec des Libanais issus de milieux diamétralement opposés, chose que le regard du voisin interdit parfois au Liban. Une chance pour les Libanais, donc. Reste à savoir si le phénomène constitue une chance pour le Liban. La réponse à cette question est plus nuancée. Certes le Liban est susceptible de tirer profit de sa diaspora sur le court et le long terme. En témoignent la capacité de la diaspora à faire pression depuis l’étranger (lobbys), ou encore les 6 milliards de dollars que repr représentent les transferts de fond vers la patrie en rythme annuel. À plus long terme, le Liban est en droit d’espérer un retour sur investissement.

Reste que ce pari sur l’avenir est risqué. Car le phénomène diasporique a lui aussi son revers de médaille. Parfaitement « Beit min ? » Question incontournable, quasi-rituelle que intégrés dans leurs sociétés d’accueil (trop bien ?) et acteurs de la vie s’adressent mutuellement deux Libanais qui font connaissance. politique et économique de leurs pays d’adoption, adoption, il n n’est pas rare Au premier degré, l’interrogation, bien innocente, porte sur le que les Libanais renoncent à leurs projets de retour et envisagent patronyme de l’interlocuteur, son nom de famille. Mais au-delà une installation définitive qui s’accompagne bien souvent d’une du caractère anodin de la question, le but recherché est de parvenir demande de naturalisation. C’est la rançon de l’intégration, ou à jauger l’autre, à le situer dans le spectre politique, religieux, plutôt de l’assimilation, étape ultime de ce processus, point de économique et social du pays : exercice complexe et subtil qui va non-retour d’un cheminement non seulement spatial mais aussi établir un rapport de force latent qui va lui-même conditionner la identitaire. Linvestissement, L’ loin d’être rentabilisé, n’est plus que nature des relations qui vont s’en suivre. pure perte ; l’exil prometteur, fuite de cerveaux. Or, une fois à l’étranger, ces données n’ont plus cours : le patronyme, la gloire des ancêtres, la filiation politique, l’appartenance religieuse ou le statut social ne sont plus perçus comme des critères discriminants. En ce sens, la diaspora est une chance pour les Libanais : au-delà des aspects matériels, elle leur offre une opportunité de s’émanciper sur un plan psychologique et humain. V ritable échappatoire à la pesanteur des traditions, elle leur permet Vé d’exister en tant qu’individus hors des contraintes et des carcans

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> Clara Tardy, étudiante en 2è année

25 DOSSIER : DIASPORAS

une chance pour le Liban ?

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LLa diaspora libanaise,


Bridging the Gulf : Diasporas and Democracy

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The lack of societal integration found in Diaspora communities living in the Gulf The Gulf region has never been known as a beacon of democratic liberty. In particular, Diaspora communities living there are marked region is a matter worth considerable by a lack of integration into mainstream society, remaining a visible attention. It is only through advancing stain on this region’s human rights record. The governmental policies of these host countries are largely to blame. But in order their equal treatment that Gulf leaders for the region to continue flourishing economically, they must can sustain their much-needed foreign change. workforce and continue prospering We cannot underestimate the role that trade and the liberal of the world have played to encourage Diasporas in the economically. markets Gulf region (Saudi Arabia, Qatar, Bahrain, Oman, Kuwait, and

the United Arab Emirates). The Islamic kingdoms there began opening their borders in the mid-1980s thanks to the discovery of enormous oil reserves and the consequent need for manpower. This labor vacuum was initially met by such neighboring countries as Yemen, Pakistan and Oman; by Egypt, India, Nepal, Philippine, Bangladesh, Indonesia, Jordan, and Syria in a second wave; and

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Yet, is it enough for host countries to generously compensate these Diaspora communities while ignoring their larger problems of integration? The long-term answer is no. Despite an increasingly skilled workforce thanks to decades of foreign apprenticeship, As a result, Diaspora communities now make up around 13 million native Gulf populations remain very small in number; for the of the 39 million people that live in the Gulf States and constitute realization of all their ambitions, natives must continue to rely on not only a large part of the unskilled labor force, but skilled as well, a foreign influx of human resources. Indeed statistics show that most of whom come from Asia. However, in contrast to other by 2015, the number of foreign workers in the Gulf will be close parts of the world, Diaspora populations in the Gulf have not to 50 million. Keeping this in mind, there are several measures of profoundly affected the domestic and foreign policies of their host ensuring a higher degree of integration. countries - an irony when one considers their sheer numbers. One would be to abolish employment discrimination based on Their lack of influence stems from the little unity between race and class within the different Diasporas, and between the Diaspora groups and to an even greater extent, their lack of local population. This would mean enacting legislation promoting integration with the locals. For example, with no efficient formal equal opportunities for employment and education. With no education system, the region has allowed for different school difference in pay scales, class divisions on lines of nationality would systems based on nationality to exist simultaneously, thus creating decline. Another effort would be to extend citizenship to foreign an ethnic divide. Furthermore, the extremely expensive British and workers after a certain number of years of residence. This process American schools remain inaccessible for most Asians, reinforcing has already begun in Saudi Arabia, and should be carried out in such divides. the rest of the Gulf. In the absence of the possibility of citizenship, Further complicating matters, American and British workers long-term and permanent integration is significantly hindered. receive better benefits for the same job, including higher pay scales and exemption from long and tiresome administrative procedures. In addition, different professions are treated differently; laborers, regardless of their cultural or religious affinities, are given little interaction with other classes. Thus Diaspora communities are twice divided: not only along lines of nationality and origin (to an extent, racially), but also along lines of class.

The courts are needed to enforce such measures. In general, justice systems in the Gulf are known for their arbitrary and disproportionate penalties, especially against women, and must do more to ensure equality. In particular, the court’s role should be seen within a broader scope toward progressive democratization, and must be matched with political backing from the ruling authorities.

Another challenge to Diaspora populations stems from their It is only through advancing such measures that Gulf leaders can cultural differences with their host country. Communities coming sustain their foreign workforce, and in doing so, continue basking from Islamic states might not find it very challenging to adjust to in the glory of their wealth. Gulf society, but others find the rules restrictive, especially since they cannot identify with the religious culture. With the exception of Dubai, life in the kingdoms comes with a long list of societal standards; failure to live within these codified rules could mean deportation, imprisonment and in certain cases even execution. With such severely curtailed liberties, many communities find it difficult to maintain their cultural identities, let alone connect to mainstream society. In light of the challenges described, one wonders why people migrate by the millions to the Gulf and subject themselves to a societal double standard. The answer is evident - high salaries. In 2007, remittances from the Gulf totaled 24.7 billion US dollars, accounting for 17% of the global figure. These large amounts of money being sent back “home” speak volumes of the golden employment opportunities available in the Gulf.

> Janhavi Naidu, 4th year student Master’s degree in International Affairs

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most recently, by the United States and Britain. The reputation of certain Gulf countries as tax havens further encouraged economic exodus.


Diaspora, identité et culture : le cas berbère

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f rent afficher fè nouvel an, « Yennayer ». Selon leur calendrier agraire utilisé depuis berbère dans son essence : les gouvernements préfè une unité « arabo-musulmane » plutôtt que reconna reconnaître l’existence l’Antiquité, nous sommes en l’an 2959. d’une culture berbère autochtone, qui s’est pourtant distinguée Les Berbères, communément définis comme les habitants dans la lutte contre le colonisateur. autochtones des pays d’Afrique du Nord, ont émigré par vagues successives en Europe à partir de l’après-guerre. Fait certainement Comment une « diaspora berbère » émerge-t-elle alors, malgré la méconnu puisqu’on les confond avec leurs compatriotes arabes, ils pluralité des peuples berbères et la négation de leur berbérité ? représentent une part importante de l’immigration « maghrébine ». Rien d’étonnant à cela : avec l’arabisation du Maghreb aux 7e et À partir des années 1950, pour des motifs d’abord économiques, 8e siècles, les Berbères, ou Imazighen, ont été assimilés à une des hommes puis des familles entières d’origine berbère quittent culture arabo-musulmane, ce qui fait que l’on a longtemps ignoré les montagnes du Maghreb par milliers. Ils se dispersent en Europe (certains avancent le chiffre de trois millions de citoyens la spécificité de leur identité et de leur histoire. européens d’origine berbère), mais également aux États-Unis et C’est tout l’intérêt de définir aujourd’hui la « diaspora berbère » au Canada. Leur préoccupation première est d’assurer le quotidien comme tente de le faire Tassadit Yacine, spécialiste de la question des leurs, ce qui laisse peu de place à des questionnements relatifs à berbère et enseignante à l’EHESS. S’il y a diaspora lorsqu’un la transmission des savoirs et de valeurs ainsi qu’à la revendication peuple « homogène » se disperse et se reforme à l’étranger en de l’identité berbère. communautés, comment parler de « diaspora berbère » quand on sait que ce « peuple », dans son identité comme dans ses Pourtant, la dispersion des Imazighen s’accompagne d’un resserrement de leur communauté à l’étranger. Les familles issues revendications, reste contesté et méconnu d’abord chez lui ? du même village se retrouvent très souvent dans la même ville ou Cette réalité, fruit de l’histoire, impose de s’interroger sur l’existence le même quartier (aux alentours de l’entreprise qui les a recrutés même d’un « peuple » berbère. Organisés sur un mode clanique et par exemple). Elles cultivent entre elles leurs coutumes et leurs tribal, les Berbères ne forment pas, à l’origine, un peuple homogène. traditions. Les conquêtes successives puis la décolonisation cristallisent cette disparité des peuplades. Les groupes berbères, isolés les uns des C’est finalement par le biais des artistes, des associations culturelles autres, éévoluent dans leurs pays respectifs de manière divergente et des générations les plus jeunes qu’émerge l’idée d’une « diaspora et le tamazight (langue berbère) se divise en plusieurs variantes berbère », une identité berbère qui se reformerait à l’étranger. (rifain, kabyle, chleuh notamment). Les artistes, écrivains, peintres, chanteurs forment un des fils

Les nouveaux occupants exploitent ces disparités pour mieux conducteurs de cette diaspora. Idir en est un exemple assez connu. affaiblir la culture berbère. Les Berbères sont marginalisés dans Nombreux sont ceux qui ont découvert la cause berbère par ses les montagnes et les campagnes, à l’écart de la ville et des Arabes, chansons en kabyle. eux-mêmes peu désireux de mixité.

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Les associations, comme l’Amazigh-Büro à Frankfort, l’Amazigh Association à Londres, ou encore l’Association de la Culture Berbère en France se multiplient en Europe. Elles militent en faveur de l’enseignement facultatif du berbère ou de l’inclusion du fait berbère dans les manuels scolaires. Elles proposent également des cours de langue et soutiennent la création artistique et culturelle berbère. Les nouvelles générations, pourtant nées et scolarisées dans les pays d’accueil de leurs parents, s’av s’avèrent particulièrement réceptives à ce phénomène. Leur quête identitaire trouve une des ses expressions sur Internet. Relais des revendications berbères, des sites comme berberes.net, amazighworld.org, ou mondeberbere.com, promeuvent aussi nouveautés musicales et artistiques berbères à travers le monde. Valorisant ce renouveau, des festivals sont dédiés à la culture berbère, tel que celui des Découvertes Berbères qui se tient chaque année dans l’agglomération lyonnaise et qui conjugue théâtre, expositions, et concerts. L’expression « diaspora berbère » est donc à prendre avec des pincettes. La diversité des peuples berbères et la méconnaissance

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dont ils sont l’objet pourraient laisser croire que leur dispersion n’implique pas l’existence d’une « diaspora ». Pourtant, ces dernières années, les év évé vénements culturels berbères se sont multipliés en Europe et les nouvelles générations sont de plus en plus désireuses de conna connaître et de défendre leurs racines. L’idée d’une « diaspora berbère » commence donc peut-être à prendre tout son sens. La spécificité de cette diaspora résiderait alors peut-être dans le fait qu’elle existe contre toute attente.

> Farida Belkacem, étudiante en 4è année, Master Recherche, Relations Internationales

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DOSSIER : DIASPORAS

Le 12 janvier, dans toute l’Europe, les Berbères célébraient leur La décolonisation vient enfin entériner la négation du peuple

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Méconnus ou méprisés chez eux, les Berbères sont rarement considérés comme un peuple à part entière. Cependant, à l’étranger, ils semblent trouver enfin les ressorts leur permettant de revendiquer leur identité.


Contrairement aux apparences, le quartier de La Chapelle n’est pas tout à fait la « petite Inde » de Paris. En réalité, ces barbiers, épiciers, bijoutiers, vendeurs de saris et de DVD qui animent la rue du faubourg Saint-Denis sont en grande partie des Tamouls d’origine srilankaise. Minoritaires dans leur propre pays, les membres de cette communauté se sont exilés en grand nombre, pour fuir la guerre civile les opposant aux cingalais depuis maintenant plus de 25 ans. Aujourd’hui, ils sont près de 70 000 en France et constituent 90% de la communauté tamoule, les autres étant originaires d’Inde, de La Réunion ou de l’île Maurice. La plupart de ces tamouls vivent en banlieue mais La Chapelle reste le véritable lieu de rassemblement pour la communauté. C’est dans ces environs que l’on trouve la plupart de leurs associations, qu’elles soient sportives, culturelles ou religieuses.

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À Paris, les Tamouls ont trouvé leur chapelle.

En ce début d’année, les tamouls sont en deuil. Au Sri-Lanka, l’armée gouvernementale vient de remporter une bataille décisive contre la rébellion armée des « Tigres tamouls », organisation qualifiée de terroriste par l’Union Européenne depuis 2006. Si la perspective d’un État tamoul indépendant s’affaiblit, c’est surtout le sort réservé aux civils qui inquiète et mobilise la communauté. Car c’est la vie de leur famille restée au pays qui est en jeu : « Contre la barbarie d’état SRI-LANKAIS » peut-on ainsi lire sur les vitrines ces jours-ci, au coté de photos d’enfants blessés, gisants sur leur lit d’hôpital.

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(1) Le signe sacré de l’hindouisme (« aum »), religion majoritaire chez les tamouls. (2) Ces jeunes tamouls sont tous les quatre originaires de Pondichéry (Tamil Nadu, Inde).

Dans les manifestations, les nouvelles générations sont à l’avant-poste. Près de l’Assemblée Nationale, John tente de sensibiliser les passants en distribuant quelques tracts. « On doit faire ce que nos parents n’ont pas su réaliser, à savoir informer les Français sur la guerre que nous subissons au Sri-Lanka » affirme ce Français de 26 ans, d’origine tamoule, qui s’engage depuis plusieurs années pour défendre la cause de son peuple. Cependant, parmi ces jeunes militants, qui comme John ont vécu la plupart de leur existence en France, peu envisagent un retour définitif au Sri-Lanka. Craignant de se sentir étrangers dans leur propre pays, attachés à celui dans lequel ils ont été éduqués, ces jeunes tamouls veulent libérer leur terre, mais pas pour y vivre.

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(3) A l’intérieur du temple de Ganesh (Sri Manika Vinaikar Alayam), le plus ancien lieu de culte hindou de la capitale, fondé en 1983. (4) Dans la rue du Faubourg Saint-Denis, la plupart des commerces sont tenus par des Tamouls (5) comme chez ce coiffeur (6) ou dans ce magasin de DVD.

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« Le retour au pays,

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on y croit de moins en moins

»

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8 (à g.) - 9 (à dr.)

(7) Cours élémentaire dans une école privée tamoule. L’enfant, ici au centre, est d’origine cingalaise. (8) Le professeur S. Sachchithanantham, originaire du Sri-Lanka, a créé cette école en 1983. 12

(9) Thiru, dans les locaux de l’association CCTF, pose en dessous des portraits de Nicolas Sarkozy et de Velupillai Prabhakaran, chef des Tigres tamouls. (10) Scène de prière à l’intérieur de l’autre temple hindou du quartier de La Chapelle (Muthumariamman).

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(11) Le 7 janvier 2009, manifestation place de la République de la communauté tamoule contre la politique de l’État sri-lankais (12) Ce même 7 janvier, devant le refus des militants de se disperser, les policiers autoriseront finalement le déroulement de la manifestation. (13) À la sortie du temple de Muthumariamman, Malar fait la quête. Selon elle, les fonds récoltés sont destinés aux tamouls victimes de la guerre. (14) Le 17 janvier 2009, manifestation silencieuse place de la Chapelle.

> Philippe Calia

> Texte & photos : Philippe Calia étudiant en 5è année, Master Recherche, Politique Comparée, Mention Asie http://indiary.blogspot.com/ THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.


> > Le franquisme en procès

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Trente-trois ans après la mort du dictateur, l’héritage du franquisme est encore polémique en Espagne. L’initiative du juge Baltasar Garzon de lancer une procédure contre le régime franquiste en octobre dernier a lancé un débat qui remonte aux fondements mêmes de la jeune démocratie espagnole.

La Transition démocratique espagnole, à la contre l’humanité, et ordonner la réouverture de démocratique originale. Pourtant aujourd’hui

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majuscule significative de l’étape historique qu’elle représente, sente, a trouv trouvé son ma maître mot dans le consensus. Les deux Espagne qui s’étaient affrontées dans une guerre fratricide ont décidé de se pardonner mutuellement pour rétablir une démocratie moderne, tout en « passant l’éponge » sur les torts passés des uns et des autres. C’est ce qu’on a appelé depuis le pacte de l’oubli, dont la loi d’amnistie de 1977 est l’expression la plus tangible. Elle protège aussi bien les fonctionnaires et les dirigeants franquistes en amnistiant les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions (même « les délits à l’encontre des droits des personnes ») que les militaires putschistes et les activistes politiques opposés au régime. Mais cette loi, dont la validité est d’ailleurs contestée par l’ONU, qui a soutenu l’initiative de Garzon (déclaration du comité des droits de l’homme de l’ONU le 31 octobre 2008), laisse en l’état une situation dans laquelle les vainqueurs et les vaincus le restent, et les victimes n n’ont été ni reconnues ni dédommagées : des milliers de personnes gisent encore dans des fosses communes. Le débat a été relancé depuis la proposition en 2006 et le vote en octobre 2007 de la loi dite de Mémoire Historique (qui reconna reconnaît et élargit les droits des victimes de répressions, promet des réparations, établit la non-validité des jugements sommaires, se propose de retrouver les fosses communes, rend la nationalité espagnole aux enfants de réfugiés en exil, etc.). Mais c’est le 16 octobre 2008 que le juge Garzon s’est emparé des plaintes déposées par des associations regroupant les familles de victimes de la répression franquiste, pour accuser Franco et d’autres dirigeants franquistes de « délits contre de Hauts Organismes de la Nation et la forme du gouvernement » dans le cadre de crimes

19 fosses communes.

La polémique ne s’est pas faite attendre. D’abord, de la part de toute une partie de la classe politique qui refuse, notamment à droite de l’échiquier politique, de remettre en cause le pacte de l’oubli. C’est ainsi que le gouvernement de M. Zapatero s’est vu accuser de diviser les Espagnols en faisant ressurgir de vieilles rancœurs, trahissant du même coup le pacte de la Transition. La volonté de Garzon de déclarer le soulèvement èèvement du 18 juillet 1936 illégal est d’autant moins bien reçue que le PP (Parti Populaire) a en quelque sorte assumé l’héritage du franquisme en intégrant une partie de ses élites reconverties à la démocratie : son fondateur et président d’honneur, M. Fraga, qui est aussi un des pères de la Constitution de 1978, fut ministre sous Franco entre 1962 et 1969 et reste encore actif dans la vie politique. Il a déclaré que « d’un point de vue politique, ressusciter les problèmes de la Guerre civile, qui fut une tragédie pour les deux camps, est une grave erreur ». Une partie du clergé s’est aussi vivement opposé aux développements ééveloppements de la loi de Mémoire moire historique. Larchevê L’archevê archev que de Madrid le cardinal Rouco Varela déclarait dans El Pais le 25 novembre : « Il est parfois nécessaire de savoir oublier. Pas par ignorance ou par lâcheté, mais en vertu d’une volonté de réconciliation et de pardon vvéritablement forte et responsable ». Il est pourtant un soutien enthousiaste de la béatification massive des prêtres victimes des violences anticléricales entre 1934 et 1938.

ce refus de la part d’une partie des Espagnols de revenir sur le statu quo, cette obstination à préfé f rer à la vvérité un oubli partiel et partial des fé faits historiques dénote peut-être un sentiment de fragilité de cette jeune démocratie. Mais cette question divise aussi profondément la société espagnole. Peut-être la forme employ e par Garzon n employé n’était-elle pas la bonne. Le procureur général, M. Zaragoza, a opposé à cette procédure un recours, considérant que le juge avait ouvert ainsi « une sorte d’inquisition générale rale incompatible avec les principes qui inspirent le procès pénal nal dans un État de droit comme celui qu’établit la Constitution espagnole », ce qui a finalement poussé Garzon à s’en dessaisir (le 18 novembre) avant qu’elle ne soit invalidée par l’Audience Nationale le 28 novembre. Il semble éévident en tout cas qu’un procès publique, social ou politique, est nécessaire en Espagne afin de poser dans la mémoire collective les bases de la démocratie et du respect de la légalité constitutionnelle, mises entre parenthèses pendant 40 ans.

Le modèle espagnol de démocratisation après 40 ans de dictature et par une société agitée de profonds clivages fut un exemple de volontarisme politique, de dialogue, de compromis, et son résultat, la constitution de 1978, une synthèse

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> Inès Levy, étudiante en 1è année

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L’Arctique, dont les ressources naturelles deviennent exploitables grâce au réchauffement climatique, est un territoire âprement disputé. La question arctique, liée à la mondialisation, est à la fois économique, environnementale et politique. Un arbitrage international est indispensable.

Le 2 août 2007, pour la première fois dans

l’histoire, l’expédition Arktika 2007 atteignait le fond de l’Océan Arctique, sous le pôle Nord. Un drapeau russe y fut planté, tandis que furent récoltés des sédiments destinés à prouver la légitimité des revendications du Kremlin sur une large part de l’Arctique et de ses gigantesques ressources naturelles. Depuis qu’il a été découvert que l’Arctique pourrait abriter, selon les chiffres les plus optimistes, près de 25% des ressources mondiales en hydrocarbures, la région est l’objet de convoitises internationales. Avec la fonte de la banquise, leur extraction et leur transport pourraient devenir possibles d’ici 2030-2040. Laccélération L’ de la fonte des glaces polaires devrait permettre de réduire le volume d’investissement nécessaire à l’exploitation des champs pétroliers et gaziers. Pour autant, les sommes nécessaires sont telles que ce sont sans nul doute les cours mondiaux du pétrole qui indiqueront le pas à suivre en Arctique. Ainsi, en contraignant les pays polaires à revoir leurs ambitions à la baisse, la chute du prix du baril au quatrième semestre 2008, fortement liée au contexte de crise économique, pourrait ralentir provisoirement les projets d’exploitation. Par ailleurs, les changements climatiques récents permettent d’envisager l’utilisation du Passage du Nord-Est, au nord de la Russie, et du Passage du Nord-Ouest, au nord du Canada, comme routes maritimes pour acheminer les hydrocarbures depuis l’Arctique vers l’Europe et l’Asie. Des voies dont la possession est encore contestée, étant considérées, selon les intérêts de chaque pays, comme des eaux intérieures ou comme des routes maritimes internationales. La fonte de la banquise devrait également permettre un accès à de nouvelles zones de p pêche, autre futur sujet de tensions entre États. Lexpédition polaire russe a mis en évidence L’ é l’imprécision du statut légal de l’Arctique. Arctique. La Russie, le Canada, la Norv Norvège, les ÉtatsUnis (avec l’Alaska) et le Danemark (avec le Groenland, qui a toutefois voté, en novembre 2008, pour une autonomie renforcée vis-à-vis du Danemark avec le droit, dès juin 2009, de contrôler ses propres ressources naturelles) ne cessent d’affirmer leur souveraineté sur cette région du monde longtemps éloignée des grands

> La guerre du froid n’aura pas lieu enjeux internationaux. D’après la Convention des Nations Unies sur la Loi de la Mer (CNUDM) de 1982, les États ne peuvent étendre leur souveraineté que sur une Zone Économique Exclusive de 200 miles nautiques au-del au-delà de leurs côtes. Cependant, si un État parvient à prouver que son plateau continental sous-marin s’étend au-delà de cette zone, il peut se voir accorder par l’ONU le droit d’exploiter les fonds marins revendiqués. C’est pourquoi le Kremlin affirme que les fonds arctiques prolongent le plateau continental sibérien et qu’ils doivent, à ce titre, être placés sous sa tutelle. Face à Moscou, Washington, Ottawa et Copenhague réaffirment leurs revendications en Arctique et repensent leurs stratégies dans la région. Washington, tout comme Copenhague, a d’ailleurs lancé, peu après l’annonce de l’initiative russe, une mission censée la concurrencer. Cependant, c’est au Canada que la question provoque les réactions les plus passionnées. Le premier ministre Harper a ainsi affirmé qu’il recourrait à la force si les intérêts canadiens dans la région étaient menacés. Limage d’une expédition plantant un drapeau L’ national sur un territoire presque vierge d’empreinte empreinte humaine nest n’ pas sans rappeler les conquêtes du 19e siècle. Pourtant, les tensions géopolitiques qui entourent le statut de l’Arctique ne sont pas des résurgences conjoncturelles de ces luttes passées : elles correspondent à de nouvelles formes d’expression expression de la mondialisation. Si ce sont les États qui revendiquent à la fois les territoires et leurs richesses dans cette course aux ressources naturelles, ils dépendent en réalité largement des entreprises possédant l’expertise technologique et l’expérience nécessaires à l’extraction du gaz et du pétrole en zone polaire. Ainsi, un pays comme le Royaume-Uni, qui n’est pas concerné par la partition de l’Arctique,

pourrait voir ses compagnies spécialisées profiter de cette ruée vers l’or noir du grand Nord. British Petroleum (BP) et la firme britanniconéerlandaise Shell comptent en effet parmi les leaders de ce marché. Les perspectives de l’exploitation arctique pourraient aussi conduire des pays avides d’énergie comme la Chine à investir sur le marché. La question arctique, à la fois économique, environnementale et politique, est source de tensions interétatiques à considérer avec prudence et neutralité. Les choix opérés quant à l’avenir de l’Arctique et de ses richesses auront des conséquences durables à l’échelle mondiale. Contrairement à l’Antarctique, l’Arctique Arctique n n’est pas prot protégé par un traité international. Si les États proches du pôle Nord ont signé, le 28 mai 2008, la déclaration d’Ilulissat, un texte appelant à un règlement pacifique et concerté de la question arctique, nul doute que les tensions subsistent. C’est pourquoi les grandes institutions internationales, dont l’Union européenne, cherchent un équilibre entre la préservation de l’environnement et l’exploitation durable des ressources naturelles. Le Parlement européen s’est prononcé, en octobre 2008, pour l’adoption d’un traité qui permettrait d’assurer que la guerre du froid n n’aura pas lieu.

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> Nathan Robinson Grison, étudiant en 3è année, en échange à Harvard University

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The recent outbreak of violence in the Democratic Republic of Congo has highlighted worrying discrepancies in UN Peacekeeping. Faced with an evolving frame of intervention, governed by new laws and with new players, Blue Helmets seek new ways of maintaining peace. The concept of peacekeeping underwent a Acknowledging this, the Department of the ground. But the DPKO remains wary

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massive change since it was first crafted in 1948 by then Secretary General Dag Hammerskjold, and Lester B Pearson, Canadas Canada’’’s Minister of Foreign Affairs. Peacekeeping was designed to be a temporary buffer force to pacify warring States, so as to allow for a solution to be found through diplomatic means. Blue Helmets were not to engage in battle unless their own lives were at stake. They remained neutral keepers of the peace. However, towards the end of the Cold War, their missions started to broaden to meet excessively new situations. For instance, they engaged in humanitarian service, helping the civilian population recover in the aftermaths of war. After medical aid, they started providing education and helped repair public infrastructure as did the UNIFIL mission in Lebanon. It reached a paramount with the UNMIK in Kosovo where the Force engaged in nationbuilding, effectively taking on the role of the State.

This evolution from traditional to complex Peacekeeping was brought about by a change in the nature of the conflicts that Blue Helmets faced. Troops were originally sent in to counter State-to-State conflict, only after the warring parties had consented to their presence under the aforementioned conditions of neutrality and non-use of force. Nowadays, Blue Helmets are often dispatched in conflicts where the belligerents are mostly non-state actors. Warlords such as Laurent N’Kunda form rebel factions that challenge the authority of the ruling government, leading to gruesome civil wars. Not recognized in any official way, their consent to the presence of UN peacekeepers is not sought. They often perceive Blue Helmets protecting civilians as allies of the government and target them in ambush attacks. This has created a challenge-filled environment in which peacekeepers must learn to evolve.

Peacekeeping Operations (DPKO) has spent the last year adapting UN Peacekeeping to constraints posed by the new type of conflicts where peacekeepers are required, in particular through the application of the 2001 Brahimi recommendations. While the Brahimi Report analyzed external issues concerning the new challenges faced, the more recent Capstone Doctrine, a comprehensive guide to the best practices on mission, shed light on the internal problems – most notably the question of abuse by peacekeeping staff. The scope and depth of these multi-faceted problems vary greatly from one mission to another, as well as from one contingent to another within the same mission. That is due to the fact that Blue Helmets battalions hail, on a voluntary basis, from member-state armies, making for impressive differences in training and gear between the contingents. Furthermore, individual peacekeeper’s loyalty to the UN mandate is sometimes challenged because of their home country’s’’s foreign policy, such as between Indians and Pakistanis, the two main providers of Blue Helmets. In order to minimize such cultural biases, future missions should tap into the forces and expertise provided by regional organizations or even Non-Governmental Organizations. For instance, the African Union is currently involved in UNAMID, the mission in Darfur. AU troops have cultural affinities with the inhabitants allowing the Force to better integrate and carry out its missions. While these structures can rapidly become a liability in tense situations due to their lack of peacekeeping know-how, with some standard training by the DPKO there is undoubtedly much to gain from this type of cooperation.Some specialists have also considered resorting to Private Military Companies, whose expertise in combat situations could help future missions strike a balance between protection of the mandate and security of the troops on

of such initiatives over concerns of perceived illegitimacy. In conflicts where UN Forces are not acknowledged by rebel groups, sending in private forces would be even less welcomed and viewed as private militias. Given the challenges, the most promising way to employ future mandates may be through Mission Integration. Under UN leadership, integrated missions coordinate civilian, police and military action toward peace. They rely on NGOs and other structures like the EU to improve the end result. By taking part, peacekeepers can adapt not only to the rules that govern war today, but also to the presence of new actors in the field. Notwithstanding, political cleavages and daunting bureaucratic procedures threaten integrated missions from reaching their full potency, a potential pitfall that should always be kept in mind. The last two decades have been marked by repeated scandals related to UN Peacekeeping, even as the number of operations doubled, emphasizing the United Nations Organizations Organization’ key security role. It remains certain, given the nature of conflicts nowadays, that operations will extend over longer periods and involve at least some form of nation-building. Either way, complex peacekeeping is not yet fully adapted to meet the challenges entailed by these situations. Three paths are laid out: evolve into a more holistic system through the Capstone doctrine, resort to allies or take the best of both through Mission Integration.

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> Yovan Jankee, 2nd year student Ronald Hatto, Professor at Sciences Po, contributed to this article.

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> The Future of UN Peacekeeping UN

> China, Colonialism & the Congo

China’s recent miningfor-infrastructure deal with the Democratic Republic of Congo seems dubious at best. China’ hinas’’s escapades in Africa are a big deal – about US$55 billion big in fact. And the buck wont won’’t’ stop there. Seen by some as a positive investment in Africas Africa’’’s future and by others as a neo-colonial scramble for resources, the numbers paint a clear picture, showing Chinas China’ emergence as the continent’s’’s second-largest trading partner after the United States, with the trade revenue expected to reach US$100 billion by 2010. Finalized in May last year, Chinas China’’’s US$9 billion mining-for-infrastructure deal with the Democratic Republic of Congo represents the zenith of this giant’s’’s insatiable appetite for resources. Even after several months of negotiation, the minutiae of the Congo contract remains shrouded in secrecy. For now, the only common knowledge is that in exchange for 10 million tones of copper and 400 000 tonnes of Cobalt to China, Congo will get $6 billion worth of desperately needed infrastructure. For a country roughly the size of Western Europe but with only 2160 miles of road, the promise of an addition 2420 miles of road, 2000 miles of railway, 32 hospitals, 145 health centers and two universities, all to be built in 36 months to boot, is attractive, but likely, too good to be true. While many Congolese, deeply patriotic, have welcomed the deal as a sign of their country’s’’s ability to successfully negotiate with another state, one gets the feeling that after years of crushing war and oppression, people’s trust – or rather desperate hope for change – is misplaced. The DRC has had its share of exploitative foreign powers making deals in the so-called best

interests of the population. The ghost of King Leopold II – the Belgian King who personally orchestrated Congo’s’’s past colonization and exploitation of its seemingly endless supply of natural resources – never quite left. More of a curse than a blessing, most Congolese blame the country’s’’s abundant riches as the cause of their perpetual misfortune and conflict. It’s’’s hard to believe that the Chinese deal, no matter how well negotiated, will not suffer from the same maladies of the past. History has an uncanny way of repeating itself. Like most African nations, the DRC has a history of crooked leadership and apart from President Kabilas Kabila’’’s flowery promises, what is the guarantee that this deal will prove any less dishonest? For a country consistently ranked in the bottom ten for corruption by Transparency International, one can be forgiven for thinking that gains from this multi-billion dollar contract will disappear into the black hole of the Congolese state machinery. Apart from roads with no cars, schools with no teachers and hospitals with no doctors, the average Congolese stands to benefit little tangible good. If the government’s’’s management of the current minimal infrastructure is any indication of how things will run in the future, institutions will remain seized by strikes and filled with underpaid, disillusioned public servants who turn to bribery or violence to feed their families. Furthermore, the deal reeks in favor of China with some estimating that it will stand to benefit $42 billion even after its investment in infrastructure. That’s hardly “win-win” win-win . win-win”

And what of human rights ? According to a report released in December 2008 by the United Nations Group of Experts, there is credible evidence that China violated an arms embargo on eastern DRC; one that, as a permanent member of the Security Council, it voted to impose. While China is certainly not the only offender, it should be held accountable for further destabilizing the region. Instead, its signing of a lucrative contract with an already unstable and corrupt country is a subversive slap in the face to ideals of African security. Human rights and international law deserve more than lip service. There are undoubtedly benefits for the DRC stemming from this deal, but as with all things economic in Africa, the perennial question is one of distribution. In the end, who really stands to profit ? King Leopold still lurks in Congo – only this time he speaks Chinese.

> Marissa Dooris, exchange student from the University of Queensland, Australia

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> The Far Right in Slovakia

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Slovakia has been one of the hardest hit by a wave of far right movements in Central Europe. Jan Slota’s nationalist party, now part of the governing coalition, threatens Slovakia’s development.

Over the last ten years, Central Europe has seen the foremost figure in this fold. He has become continually criticized. Indeed, since his party’s rising unemployment, increasing controversy over immigration, and the resurgence of a new far right that offers extreme solutions to both of those issues by combining economic populism with violent nationalism.

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Slovakia has been one of the hardest hit. After years of far right mobilization on the fringes of mainstream politics, a far right party has actually entered Slovakias Slovakia’’’s governing coalition.The party in question is the Slovak National Party (SNS), led by the infamously outspoken Jan Slota. The SNS is the most visible icon of extreme Slovak nationalism, fueled by strong anti-Hungarian sentiment. The growing antipathy between the two nations has been stirred by incidents like the football match in Dunajska Streda last November, which saw the Slovak police attack visiting sections of Hungarian fans. The brutal attack, which Slovaks claim was provoked, is only the latest in a series of events that have led to the worsening of relations between the two countries, who share a troublesome historical past. The end of the First World War and the collapse of the Austro-Hungarian Empire saw the signing of the Treaty of Trianon, which, after centuries of oppression, forcible “Hungari-zation” Hungari-zation and Hungari-zation” suppression of national sentiment, finally accorded Slovaks freedom. Mutual feelings of hostility between the two countries nevertheless continued. After the Second World War, when both countries formed part of the Communist Bloc, all anti-Hungarian feelings were suppressed along with other movements associated with the far right. But as soon as the Iron Curtain went down and Slovakia became independent, a class of politicians who made their living from spreading fear of Hungary appeared. Slota, a charismatic 55-year old with a criminal past, is

known for his strong sentiments on issues such as immigration and (denial of ) minority rights, which combined with his passion for alcohol have led to a number of statements that would normally end a politicians politician’’’s career. Among his dubious masterpieces are claims that the tenpercent Hungarian minority in Slovakia “are a cancer in the body of the Slovak nation nation” and vowing to “sit in a tank and flatten Budapest.”

The Slota-led Slovak National Party, often described by observers as the Slovak equivalent of the French National Front, has made it to the parliament in all elections except that of 2002. The SNS’s’’s major support base remains those in the country favorable with war-time regimes and, in particular, the clerical part of the Slovak establishment of that period. But the SNS represents only the mainstream political element of the far right in Slovakia. Other, more extreme factions have also been making headlines for the wrong reasons. Prominent among these groups was the Marian Kotleba-led Slovenska Pospolitost (Slovak Togetherness). Members of this movement were notorious for parading through the streets in uniforms closely resembling the ones used by WWII-era paramilitary troops. Their increased presence on the national scene even prompted political ambitions, although their extremist agenda prevented them from rallying wider support and getting elected in any capacity. However, the Togetherness was seen as a sufficient enough security threat for the Slovak Supreme Court to forcibly dissolve it in 2006.

inclusion in the governing coalition, Slota has been viewed by political observers in the region as highly damaging for numerous reasons. Some claim that his very presence in the government has given a sense of legitimacy and impunity to more radicalized elements of the far right. This has been highlighted by incidents such as the brazen attack on a Hungarian student in August 2006, simply because she was overheard speaking in Hungarian. Another often-made claim is that Slota and his party are damaging the image of Slovakia abroad and especially its relations with its neighbors, in particular Hungary, where politicians have reacted unfavorably to many of Slotas Slota’’’s comments. There is no denying the destabilizing effect Slotas Slota’ presence has had, and the reactionary radicalism that it has prompted in Hungary, where the far right has been strengthened by the presence of a visible opposition figure in Slovakia.

Rössler, qui a déposé le 28 août un paroxysme : le suicide d’une personne. Ce « La fin du monde est pour ce soir. » Tel pourrait allemand Otto R être le titre des déchaî cha nements de passions qui chaî ont précédé la mise en route du LHC. Le LHC (Large Large Hadron Collider Collider), le plus grand accélérateur de particules au monde – 27km de circonf circonférence – a en effet été activé activ le 10 septembre dernier au Cern – un grand laboratoire international de physique fondamentale à Genève è – avec pour ève principal but l’étude des particules élémentaires constitutives de la matière. Mais les semaines précédant sa mise en service ont vu s’accumuler les peurs concernant le risque d’apparition d’un immense trou noir qui engloutirait la Terre. Ces peurs se sont matérialisées par le biais de divers supports, allant de vidéos montrant cette fin du monde sur YouTube à des lettres de menace de mort envoy envoyées à Frank Wilczek, un chercheur du Cern, en passant par le suicide d’une jeune Indienne de 16 ans, effray effrayée par l’idée que son village tout entier puisse dispara disparaître. Cette vague de peurs n’est donc pas un phénomène isolé dans un pays particulier, mais bien le reflet d’une préoccupation scientifique globale.

Cette peur n’est en fait que l’aboutissement d’une cha ne d’év chaî évè év vènements survenus en amont. Les médias, tout d’abord, ont largement diffusé ces théories de fin du monde, certains n’hésitant pas à tirer sur une fibre sensationnaliste vendeuse. Le Sun a ainsi fait sa Une sur le titre « End of the World Due in 9 Days ». Les médias ont donné trop de place aux paroles d’experts pour le moins douteux, que l’on qualifiera au pire de charlatans, au mieux d’opportunistes. Tel le théoricien

2008 une plainte devant la Cour européenne des droits de l’homme – finalement déboutée – en considérant que le risque de trou noir était contraire à la Convention européenne des droits de l’homme qui établit un « droit à la vie ». Quand bien même un rapport de sécurité du Cern publié deux mois avant – qui réactualisait un précédent rapport de 2003 – avait écarté tout risque de destruction planétaire, arguant qu’au « cours des derniers milliards d’années, la Nature a déj é à produit sur Terre autant de collisions qu’en éj généreraient un million d’expériences LHC, et la planète est toujours là. » C’est donc bien plus la crédulité des médias et des individus qui a engendré la peur, plutôt que la prise de conscience d’un danger réel.

Ce genre de peur à caractère technicophobe n’est pas nouveau : chacun se souvient du fameux – et non moins imaginaire – bogue de l’an 2000, qui était sensé anéantir nombre de technologies basées sur l’informatique, provoquant en conséquence des catastrophes aériennes, par exemple. Ces peurs récurrentes illustrent bien toute l’ambivalence des rapports qu’entretiennent les hommes avec les sciences et techniques. D’un côté, chacun utilise ou est conscient de l’apport de ces dernières à notre quotidien : qui serait prêt à renoncer à son ordinateur ? Mais de l’autre, le moindre petit danger pouvant résulter d’une utilisation mal contrôlée de ces sciences et techniques provoque une montée soudaine de peurs irrationnelles, qui avec le LHC ont atteint

As the fastest-growing economy in the European Union, Slovakia now stands at a crucial juncture. It can ill-afford to have its image sullied, its progress sabotaged, and its historic tensions reignited by an extremist politician who refuses reconciliation.

The far right has predictably generated its fair share of detractors, prominent among whom former Justice Minister and politically moderate Daniel Lipsic, whose vocal presence has been

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> La peur du (trou) noir

La mise en route du Large Hadron Collider, plus grand accélérateur de particules au monde, a suscité une vague de peur internationale. Que penser d’une telle réaction ? Comment la science doit-elle faire face à ce genre de phobies ?

rapport ambigu est d’ailleurs parfaitement vvérifié par le succès que rencontrent les films-catastrophe comme Le jour d’apr d’aprèès ès ou Armageddon : on aime se faire peur, sans pour autant se rendre compte que ces fictions influent sur notre perception de la réalité et notre appréciation des risques de fin du monde. Le problème est que, s’il est probable que la majorité des hommes aimerait comprendre les concepts scientifiques, il sera toujours plus simple d’assimiler la possibilité d’une fin du monde pure et simple que la théorie de la relativité et le modèle standard de physique. En clair, le mythe du savant fou popularisé par Metropolis ou Frankenstein a encore de beaux jours devant lui, du fait de notre incompréhension de recherches scientifiques à la complexité croissante. Or cette attitude n’est pas sans risques : nous regardons les dangers potentiels de destruction de l’humanité que fait courir la science avec parfois beaucoup plus d’attention qu’ils ne méritent, sans pour autant voir les risques concrets, et cette fois-ci bien réels, que fait peser l’usage des technologies les plus récentes – en particulier celles de l’information et de la communication, et les biotechnologies – sur nos libertés les plus fondamentales.

Toutefois, la médiatisation des peurs scientifiques telle celle du LHC a au moins un mérite : celui de pousser les scientifiques à vulgariser des thèmes jusqu’alors peu connus du grand public. On a ainsi vu des physiciens du monde entier fréquenter – sans doute pour la première fois – des plateaux de télévision, éévision, explicitant le fonctionnement du LHC ou encore les concepts de la physique fondamentale, comme cela avait rarement été fait auparavant. On peut donc espérer que cet épisode du LHC incitera à l’avenir les scientifiques à mettre davantage en avant l’importance des projets internationaux qu’ils poursuivent, et ce en s’assurant de la bonne information des citoyens. Car sans compréhension des enjeux, pas d’adhésion. L’avenir de la science est à ce prix.

> Michal Onderco, exchange student from Jacobs University, Bremen

> Tom Morisse, Creative Commons licence photo : credit : ImageEditor

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étudiant en 1è année

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Daniel Lefeuvre

Dans ce court essai, l’historien Daniel Lefeuvre combat les idées reçues sur la colonisation et l’usage qui en est fait. Il s’insurge avec une certaine violence contre les excès de la mémoire post- et anticoloniale, qui selon lui piétine la vérité historique dans un souci de reconnaissance sociale actuelle. Si le propos de l’auteur a le mérite d’aller au-delà du

« politiquement correct » sur la colonisation, le ton de l’essai est très polémique, quasi pamphlétaire ; cela s’explique par le contexte de publication. Le débat public et politique sur le poids du passé colonial, loin de se circonscrire au petit monde des historiens, a en effet pris de l’ampleur ces dernières années, notamment autour de la loi de 2005 sur la colonisation. En témoignent la multiplication des initiatives associatives, la profusion d’ouvrages universitaires et d’articles, ou encore le succès du film Indigè Indig nes en 2006. Il s’inscrit aussi dans le débat autour des lois mémorielles, relancé récemment par l’appel de Pierre Nora et Françoise Chandernagor Liberté Libert pour l’Histoire ’ ’Histoire . Par ailleurs, la « repentance » a été fortement critiquée lors de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2007, qui a depuis mené une politique mémorielle en rupture avec celle de son prédécesseur.

40 BOOK REVIEWS

Au cœur de la diatribe de l’auteur se trouvent les « Repentants ». On peut regretter que l’auteur ne précise à aucun moment qui il désigne exactement sous ce terme assez fort, presque insultant. C’est au hasard des notes de bas de page que l’on découvre que les foudres de l’auteur s’adressent tant à certains historiens, comme Pascal Blanchard ou Catherine Coquery-Vidrovitch, qu’à des acteurs de la société civile comme Tarik Ramadan, ou encore le Mouvement Indigènes nes de la R République, créé en 2005. Il est contestable que les discours de toutes ces personnes constituent un ensemble homogène. Que reproche l’auteur à ce bloc de « Repentants » ? Il les accuse de défendre une vision noircie de la colonisation, dans l’objectif inavoué de « saper les fondements » de la R République elle-même. me. Lauteur L’ montre que de nombreuses accusations portées sur la période coloniale de l’histoire française sont de faux procès. Il s’appuie appuie principalement sur des sources françaises : les archives de l’É État français, et des témoignages de colons. Tout d’abord, il remet en cause l’assimilation entre la conquête coloniale et l’Holocauste, qui repose sur un amalgame douteux assez malhonnête intellectuellement, et peu respectueux des réalités historiques. Si la preuve par les chiffres qu’entreprend l’auteur fait parfois figure de décompte macabre assez malsain, il relativise les violences de la conquête coloniale par comparaison avec d’autres conflits. Il s’applique ensuite méticuleusement à démontrer que la colonisation n n’était pas rentable pour la métropole ; que relativement peu de matières premières étaient importées des colonies, y compris pendant la Première Guerre mondiale ; ou encore que les immigréss coloniaux n n’ont pas joué un rôle prépondérant pour la reconstruction de la France d’après 1945. Tous ces arguments, paréss du sceau de la vvérité des archives, et en soi incontestables, aboutissent à un récit historique qui semble, lui aussi, tiré par un objectif bien

présent : prouver qu’ilil n n’existe pas de créance de la France à l’égard des colonisés ou de leurs descendants. Plus encore, l’auteur récuse sans nuance l’idée d’un continuum entre la période coloniale et la nôtre. Pour lui, les difficultéss des migrants africains nont n’ rien de spécifique comparées à celles des migrants européens. Le racisme, l’islamophobie, ou encore le fort contrôle le policier n n’ont pas leurs racines dans des représentations issues de la colonisation, mais sont pour lui des constructions récentes. Cette idée est l’exact rejet des études postcoloniales. Cet ouvrage reflète la méfiance assez courante vis-à-vis de ce champ, qui s’est récemment développ é évelopp é en France sous l’impulsion, non des universitaires, mais des acteurs sociaux. Ce débat rejoint au fond des conceptions divergentes de l’identité républicaine française : Daniel Lefeuvre rejette ce qu’il perçoit comme une forme de communautarisme de la part de personnes issues de l’immigration des anciennes colonies. Un communautarisme qui menace selon lui l’unité de la R République et risque de conduire à une « France de l’Apartheid Apartheid ». Quant aux historiens français « repentants », l’auteur les voit comme de graves cas de haine de soi franchement masochiste. Épingler les porteurs de cette mémoire post-coloniale de manière unilatérale, sans parler des nostalgiques de la colonisation, peut prêter à confusion, et donner une impression de partialité. De plus, cette vision unitaire de la R République s’oppose à des conceptions de la nation plus enclines au multiculturalisme. On peut par exemple se demander avec Marie-Claude Smouts si ce phénomène de « repentance » n’est pas une façon de vouloir s’intégrer dans la société française : surfant sur la vague des revendications mémorielles de divers groupes de victimes, à commencer par celles de l’Holocauste, les porteurs de ces mémoires post-coloniales ne feraient qu’adopter le langage des revendications mémorielles les ayant précédé.

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> Pour en finir avec la repentance coloniale, Daniel Lefeuvre, Flammarion, Paris, 2006

> Clémence Léobal, étudiante en 5 année, Master Recherche, è

Histoire et Théorie du Politique

Le Mur de fer : Israël et le monde arabe Avi Shlaim Allant à l’encontre de l’histoire officielle d’Israël, Avi Shlaim montre comment l’Etat hébreu a interprété la « doctrine du mur de fer » de Ze’ev Jabotinsky comme une doctrine du « conflit permanent ». Avi Shlaim, l’un des plus fervents représentants du

mouvement des nouveaux historiens israéliens, liens, questionne dans son ouvrage Le Mur de fer l’histoire officielle de l’État juif. S’appuyant sur des documents déclassifiés israéliens, américains, britanniques ainsi que sur de nombreuses interviews avec des personnalitéss politiques, il retrace dans ce livre l’opposition, depuis la création de l’É ’État hébreu, entre Israël et le peuple palestinien. Juif d’origine irakienne, Avi Shlaim fait partie des rares universitaires israéliens ayant pris du recul sur les pratiques politiques d’Israël. Dénonçant l’intransigeance, la rigidité idéologique et les aspirations à l’expansion territoriale de la grande majorité des dirigeants israéliens, il veut montrer comment la politique israélienne contribue à empêcher l’établissement d’un consensus de paix au Proche-Orient. Comment Avi Shlaim s’y prend-il pour critiquer de façon convaincante la politique israélienne, qui invoque le droit à la légitime défense ? Le fil directeur de l’ouvrage est la « théorie orie du mur de fer » développ é évelopp ée par Ze’ev Jabotinsky dans les années 1920, au tout début des spéculations sur l’établissement d’un État israélien en terre palestinienne. Selon cette théorie, Israël devrait ériger un mur de protection contre l’hostilité de ses ennemis arabes. L’emploi d’une stratégie sécuritaire infaillible avec le soutien américain lui assurerait dans un premier temps la supériorité militaire. Israël, ainsi en position de force, pourrait dans un second temps envisager des négociations en sa faveur avec le peuple palestinien et ses homologues arabes. Insistant sur une bipolarisation des relations politiques entre le camp des activistes et celui des modérés, Avi Shlaim illustre par quel moyen les dirigeants israéliens ont mis en pratique la « théorie orie du mur de fer ». Lauteur L’ énumère toutes les occasions de paix manquées par Israël. Ces échecs seraient dus, sous l’ère Ben Gourion, à la prévalence éévalence au sein de la classe politique israélienne du camp traditionaliste aux stratégies expansionnistes, puis par le simple refus de faire des concessions « terre contre paix » sous Golda Meir, Menachem Begin, Yitzhak Rabin, Shamir et Benjamin Netanyahu. Avi Shlaim considère donc que la ligne dure de la politique israélienne prêche la « théorie orie du mur de fer ». En revanche, les quelques rares modérés, tels Moshe Sharett et Levi Eshkol, respectivement deuxième et troisième premier ministre, étaient eux pour un règlement diplomatique de la situation. Lauteur L’ regrette plus ou moins ouvertement que ces acteurs, qu’il qualifie de plus « réfléchis », n’aient pas pu avoir une influence plus décisive sur le cours des négociations

de paix, maintes fois avortées, entre l’État d’Israël et ses voisins arabes. En entrant dans le détail des relations israélo-arabes, l’ouvrage met en lumière la manière avec laquelle les dirigeants israéliens finirent par interpréter la « doctrine du mur de fer » comme une « doctrine du conflit permanent », en omettant totalement la seconde partie de la théorie de Jabotinksy qui suggère un règlement dans le long terme avec le peuple palestinien. La relation entre l’Israël de Ben Gourion et l’Egypte de Nasser illustre bien cela : tandis que la version officielle affirme qu’ « Israël rechercha toujours le contact direct et se heurta systématiquement à un refus arabe » (p.154), Nasser aurait en réalité fait des offres de discussion qu’Israël repoussa. Selon Avi Shlaim, les dirigeants politiques modérés qui purent exceptionnellement accéder au pouvoir en Israël firent tout de même avancer la cause de la paix mais restèrent limités dans leur action en raison des fortes pressions exercées par le Likoud et la ligne dure israélienne. Avi Shlaim dénonce ainsi l’intransigeance diplomatique d’Israël.Il affirme qu’alors même que la Ligue arabe soutient la nécessité d’une négociation conjointe entre Israël et les pays arabes, l’État juif exploite les divisions internes de la Ligue en nouant des relations bilatérales avec certains de ses membres stratégiques comme l’Égypte et la Jordanie. Il souligne aussi la cruauté militaire d’Israël, notamment à propos des représailles militaires aux frontières, par une citation du général de guerre et homme politique Moshe Dayan: « Harceler les villages, femmes, enfants et personnes â ées compris, est la seul méthode qui ait fait la preuve, non âg pas de sa légitimé ni de sa moralité, mais de son efficacité, quand les Arabes posent des mines de notre côté. » (p.133) Retracer les rapports conflictuels israélo-arabes permet de montrer comment les dirigeants israéliens liens nont n’ pas su interpréter la « stratégie gie du mur de fer » de Ze’ev Jabotinsky. De façon générale, rale, la plupart des dirigeants n n’ont pas su dépasser la première étape de la doctrine, adoptant ainsi une doctrine de conflit permanent, ce que semblent confirmer les év évé vénements récents dans la bande de Gaza. La seconde étape, un règlement avec les Arabes palestiniens et nonpalestiniens, na n’ toujours pas été abordée, faisant sans aucun doute de la question palestinienne un des problèmes majeurs de ce début de 21e siècle. > Le Mur de fer fer, Avi Shlaim, Buchet-Chastel, Paris, 2008

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

> Mari-Ann Larsen-Volay, étudiante de McGill University, en échange à Sciences Po

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Pour en finir avec la repentance coloniale


The Brief Wondrous Life of Oscar Wao Junot Díaz

An American archetype ? America has rewarded Dominican-born writer Junot Díaz the 2007 Pulitzer Prize for his novel about a family wandering back and forth between their home of Santo Domingo and their adopted city of Paterson, New Jersey. Díaz’s fun, sometimes hilarious page-turner is also a vast fresco on home, dislocation, and plural identity.

The Brief Wondrous Life of Oscar Wao is a free-flowing,

eclectic chronicle of the highs and lows of three generations in one family belonging to the Dominican Diaspora. As it leads readers through the history of La Inca, her daughter Belicia, and her children Lola and Oscar, the novel does to the reader what emigration does to any member of any Diaspora in the world. It leaves him confused, vulnerable, and dislocated. Like an immigrant who knows twice the number of homes, twice the lifestyles, two languages at least, this book turns its readers into metaphorical immigrants.

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The overall tone is casual at best, and readers may feel dislocated in the structure (some chapters contain three lines, others twenty pages) and the language: over and beyond the constant mix of English and Spanish, you can never get used to the tone, which keeps evolving from casual – “What you doing? Ana asked. Like nothing. Like let’s’’s go to a movie, then then” – to geekishly obscure to downright obscene, nor to the style, with its iconoclastic use of outlandishly long brackets, its use of all caps to indicate high emotional charges – “F***ING SANTO DOMINGO” – and its other liberties, like the “No” repeated over four full lines on page 102. Critics have taken special note of the story of Oscar and his family first and foremost because of its bold legitimation of Spanglish, the combination of English and Spanish used daily by the 45 million Hispanics living in the US, as a literary language. It should be noted that as surprising as the seamless, effortless intertwinement of Spanish into the English language may appear in Díaz’s’’s work, this bizarre new language is its own, thanks to the malleability of its substrate, English. Indeed, readers will doubtless be surprised by exchanges such as this one: “She was very guapa, I said casually. Abuela snorted. Guapa soy yo. Your mother was a diosa. But so cabreza dura”. Language is one of the means by which Díaz makes his reader an immigrant of sorts. Oscar de Leon is described as a “parigü “parig parigüyao üyao”, a person standing on the sidelines and watching as others make things happen in his life. According to one of the narrator’s’’s many footnotes, the term is derived from the English ““party watcher”, which was used to describe the US Marines who stood around at Dominican parties without getting any of the “action” action . This word has voyaged back and action” forth like Oscar himself: the English has been transformed into Spanish, and you must understand them both to grasp the meaning of the whole.

Díaz’s’’s first passion is describing the “gaps in stories,” putting special weight on those insignificant lapses of time that most writers ignore. His main character, Oscar, is a gap in the stories of all those who surround him. His is a “nameless life.” He lacks adventurousness, spiritual wit, willpower. Díaz seems intent on defying readers’ natural curiosity as he persists in not letting anything notable happen in Oscar’s’’s life. What Oscar lacks in imagination and attractiveness, though, the author more than compensates for in descriptions of Oscar’s fate, specifically in the opulent footnotes, written in an even more street-wise language than the narrative itself, providing sometimes informative, sometimes unnecessary details of historical facts or unfounded prejudices. Interestingly, the spiciest footnotes are those inspired by the main character’s utter hopelessness. “You really want to know what being an X-Man feels like? Just be a smart bookish boy of color in a contemporary US ghetto. Mamma mia! Like having bat wings or a pair of tentacles growing out of your chest.”

Creative Commons licence photo credit : mrskyce

The adopted home, New Jersey, remains anonymous, bloodless, compared to Santo Domingo and its haunting streets, dangerous thugs, mysterious neighbors and dictatorial past. There are passages focusing intently on the trepidations of the dislocated, like when Oscar refuses to “succumb to that whisper that all long-term immigrants carry inside themselves, the whisper that says You do not belong”, or when Beli, his mother, flies to the US for the first time without yet apprehending “the loneliness of Diaspora . Diaspora” Yet these are not the novel’s’’s strongest. Its originality and freshness stand out when it affirms itself, through the audacious, sometimes authoritative use of Spanglish, through the off-handed character portrayals, through the ruthlessness and sympathy combined in the narrator’s’’s voice. Even though America as a character, even as a texture, is the great absente, a faceless place - the novel is one of the most bewildering pieces of current American fiction.

THE PARIS GLOBALIST - VOL. III Issue 1.

L’équipe du Paris Globalist remercie pour leur soutien > The Brief and Wondrous Life of Oscar Wao Junot Diaz, Riverhead, New-York, 2007

l’Association Française pour les Nations Unies

> Joanna Margueritte, 4th year student, Research Master’s in International Relations

& Sciences Po.


www.global21online.org/paris

The Paris Globalist - Association loi 1901 - 47, rue des baconnets, 92160 Antony Responsables : Chine Labbé, Julien Levesque, Priscilla Rouyer

Licences Photos : Flickr : http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/ Wikimedia : http://commons.wikimedia.org/wiki/GNU_Free_Documentation_License

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Directrice de la Rédaction : Chine Labbé Rédacteur en chef : Julien Levesque Impression : Impression Design, 17, rue de la Ferme, 92100 Boulogne-Billancourt Date de parution : janvier 2009 - Dépôt légal : à parution PUBLICATION GRATUITE - 2500 exemplaires

Contact : theparisglobalist@sciences-po.org


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