« 15 heures. Tout vient de basculer près de l’implantation de Netzarim, dans la bande de Gaza. Les Palestiniens ont tiré à balles réelles, les Israéliens ripostent. Ambulanciers, journalistes, simples passants sont pris entre deux feux. Ici, Jamal et son fils Mohamed sont la cible de tirs venus de la position israélienne. Mohammed a douze ans, son père tente de le protéger. Il fait des signes […] mais une nouvelle rafale. Mohamed est mort et son père gravement blessé. Un policier palestinien et son ambulancier ont également perdu la vie au cours de cette bataille. » Tel était le commentaire qui accompagnait la diffusion du « meurtre » en direct du petit Mohamed Al Dura. Ce « témoignage » faisait le tour de la planète et jetait d’une façon durable l’opprobre sur Tsahal, l’armée de défense d’Israël.
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Charles Enderlin et le monde obtenaient pour la première fois depuis la création de l’Etat d’Israël LA raison de stigmatiser Israël, dont la soldatesque n’hésitait pas à tirer sur un enfant sans défense dans les bras de son père. La diffusion de ce reportage allait avoir des conséquences redoutables. Le journaliste Daniel Pearl était décapité par des islamistes devant une image représentant le meurtre de Mohamed Al Dura. Deux réservistes qui s’étaient égarés en territoires palestiniens étaient littéralement étripés et leurs cadavres jetés par la fenêtre du commis�sariat où ils pensaient avoir trouvé refuge. Une grande place à Bamako, ainsi que de nombreuses rues en territoires arabes recevaient le nom du martyr Mohamed Al Dura, en hommage à la jeune victime des « crimes sionistes ».
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La Tunisie, l’Egypte, la Jordanie etc. émettaient une édition de timbres à l’effigie du shahid. Peu d’amis d’Israël osèrent prendre sa défense. Et même Tsahal, l’armée d’Israël ne réagissait que tardivement et de façon très modérée. Charles Enderlin avait gagné son bâton de maréchal. Comme pour l’affaire Dreyfus, dont c’était presque le centenaire, après des condamnations unanimes, certains éléments du reportage apparurent surprenants. Comme pour l’affaire Dreyfus, des détails du reportage éveillèrent la suspicion de certains journalistes et d’écrivains. Comme pour l’affaire Dreyfus, celui qui avait osé mettre en doute le meurtre de Mohammed Al Dura et le sérieux du reportage de
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Charles Enderlin fut attaqué en justice et, dans un premier temps, condamné. Comme pour l’affaire Dreyfus, la Justice et, en la circonstance, la Cour d’appel de Paris infirmait ce jugement et, comme pour l’affaire Dreyfus, l’affaire se retrouvait en cassation. Le Zola de l’affaire Al Dura sera Philippe Karsenty, qui osera affirmer que l’affaire Al Dura était une falsification et qui, comme son illustre prédécesseur, sera accusé de diffamation. La pertinence de l’argumentation de Philippe Karsenty et le caractère douteux du reportage de Charles Enderlin n’empêchèrent cependant pas nombre d’intellectuels de lui manifester leur soutien, sans pour autant argumenter leur prise de position. **********************
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