SB123 : Numéro Spécial 20 Ans

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NUMÉRO ANNIVERSAIRE

2000/2020 Focus sur les références • GP500 VS MOTOGP Devenu trop facile ? LE MAG RACING #1

+ 2 AFFICHES RACING le ride pour devise

Découvrez notre nouvel univers !

L A I C É P S O R É M U N vague

e l l e v u o n a l à i s De l'ère Ros

+

DOSSIER / PART 1

PAS DE PLACE DANS LE SPORT MOTO ?

VRAIMENT ?

LES FEMMES avec Jenny Anderson LA PASSION avec Johann Zarco L'AMITIÉ avec Loris Baz et Jérémy Guarnoni COUV-SB123-OKTD.indd 1

BELUX : 7.20 – CH : 11.10 FS PORT-CONT : 7.20 - DOM/S : 7.20 NCAL/S : 870 XPF – POL/S : 920 XPF CAN : 11.50 $ CAD

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SB123 JUILLET AOUT SEPT. 2020

22/06/2020 11:01


#SHOEIFAMILY Marc Marquez

Champion du Monde MotoGP 2013 - 2014 - 2016 - 2017 - 2018 - 2019

* Le casque de course ul�me.

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Le team SB #123 

Maxime Pontreau

Mat Oxley

JOURNALISTE ESSAYEUR

JOURNALISTE VIP

Lukasz Swiderek

Stéphane Valembois

PHOTOGRAPHE

PHOTOGRAPHE

Mélanie Ambert

Thierry Capela

DIRECTRICE ARTISTIQUE

DIRECTEUR DE LA PUBLICITÉ

Nicolas Bassand

CHRONIQUEUR DE LUXE

RESPONSABLE RÉSEAUX SOCIAUX

Suivez-nous !

Jacques Hutteau

 @sportbikesmag  @sportbikesmag sportbikesmag

 Sport-Bikes  www.sport-bikes-mag.fr

MESSAGE À NOS ABONNÉS :

Tommy Marin ÉDITEUR & RÉDACTEUR EN CHEF

Joie !

ÉDITO

De vivre, de rouler, de créer, d'être utile…

C'est un fait : nous venons de vivre une période historique, souvent pénible, parfois tragique. Mais vous en avez, j'en suis sûr, déjà beaucoup entendu/vu/lu sur le sujet. Je vous épargnerai donc mes états d'âme de citoyen : parlons moto ! Car le 2-roues n'est pas qu'un moyen de locomotion hyper-judicieux aux technologies issues du monde impitoyable de la course : reprendre le guidon nous a permis de réaliser, s'il le fallait, à quel point le bien-être distillé par ces machines nous est indispensable, que ce soit en balade sur route… ou à la recherche du temps perdu sur circuit ! Rigueur, plaisir et grain de folie : c'est ce cocktail qui, en 2000, a donné naissance à Sport-Bikes. Vous tenez (enfin !) entre vos mains notre Spécial 20 Ans. Il aurait dû prendre le départ en mai – comme son illustre aîné, auquel notre couverture fait référence. Il est resté bloqué dans la pit-lane durant deux mois. Ce coronavirus et une violente tempête dans le système de distribution de la presse papier ont rendu les conditions de piste impraticables. Elles restent piégeuses, ainsi, ce SB123 sera trimestriel, tout comme son successeur, le SB124, à paraître début octobre. Pendant tout ce temps, nous ne sommes pas restés les bras croisés, les yeux hagards en direction des couvertures chauffantes débranchées : on a cogité… et créé ! Surprise : une nouvelle marque rejoint Sport-Bikes au sein de Press Start Editions : MOTTO Le ride pour devise ! "Motto", en anglais, se traduit par "devise". Inutile je pense d'aller plus loin dans l'explication. Et côté produits, rendez-vous en page 28 pour en savoir plus. Mais le but de cette marque est simple : (se) faire plaisir… et nous rendre utile, puisque la moitié des bénéfices générés par les ventes de MOTTO en juillet/août sera reversée à l'association Hôpitaux de Paris – Hôpitaux de France. En effet, les applaudissements, c'était bien, mais nous avions envie d'en faire un peu plus. Les 20 ans de SB nous semblent opportuns pour lancer ce projet, et c'est pourquoi nous vous offrons dans ce numéro deux affiches/posters MOTTO tirés de nos premiers designs. La joie de vivre, de rouler, de créer, d'être utile… est dans nos gènes, alors suivez notre actualité sur www.sport-bikes-mag.fr, www.motto-le-ride.com et nos réseaux sociaux (adresses juste à gauche pour SB, en page 29 pour MOTTO) ! J'espère que vous éprouverez de la joie en lisant ce Spécial 20 Ans, réalisé dans de drôles de circonstances. Et si c'est le cas, n'hésitez pas à vous abonner : votre fidélité nous est plus précieuse que jamais ! • A Max et Lolo, ces créatifs qui nous manquent toujours tant.

Tout abonnement souscrit pour une période d'un an courra sur 6 numéros ; tout abonnement de deux ans courra sur 12 numéros. Merci pour votre compréhension !

THIEUM

sport-bikes-mag.fr I JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2020 I SB123 I 3

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Sommaire

❱❱ N°123

Juillet-Août-Septembre 2020

30

100

54 ❱❱ PROCHAIN N° 124 I En vente à partir du 2 octobre 2020 LES RUBRIQUES

SPÉCIAL 20 ANS

06 08

46 52

14 16 18 20 22 24 26 118 120 121 122

Arrêt sur images Les news 100 % racing En piste : Jules Cluzel /// Sortie de piste : Freddy Foray NOUVEAU Parole de Pro : Olivier Bazin Lu et entendu Point de vue : François Ribeiro Un visage, un métier : Valentin Debise NOUVEAU Versus Carl Fogarty / Jonathan Rea NOUVEAU Les coulisses de la FIM Le shopping racing Jouez et gagnez avec Spidi, HJC et BS Battery NOUVEAU Sans rétro : Les champions français des 70's/80's C’est Jakuto qui le dit : Nouveau départ La boutique Sport-Bikes Abonnement Plutôt T-shirt ou lunettes solaires ?

DOUBLE POSTER NOTRE NOUVELLE MARQUE MOTTO S'AFFICHE !

80

94

RÉTROSPECTIVE MOTOGP La guerre à l'âme DOSSIER LES RÉFÉRENCES DU MOTOGP Depuis 2000 Valentino Rossi (p.54) / Honda RC-V (p.60) En 2020 Marc Marquez (p.68) / Ducati Desmosedici (p.74) DOSSIER DES GP500 AU MOTOGP Part 1 Crutchlow teste la Honda NSR500 1989 (p.80) Part 2 Les MotoGP, trop faciles à piloter ? (p.84) DOSSIER PAS DE PLACE POUR... ... les femmes ? Jenny Anderson (p.94) ... la passion ? Johann Zarco (p.100) ... l'amitié ? Loris Baz & Jérémy Guarnoni (p.108)

SUJETS MAG & SYNTHÈSES 28 30

PRÉSENTATION MOTTO Notre nouvelle marque passion ! DOSSIER LE MOTOGP FACE À LA COVID-19 Où en sommes-nous ? Le contexte avant la reprise (p.30) Rattrapé par le monde réel Une bulle jamais à l'abri (p.40) Interview Lucio Cecchinello évoque le futur des GP (p.42) 90 SYNTHÈSE MOTO2 / MOTO3 Un mirage dans le désert ? 92 SYNTHÈSE WORLDSBK / WORLDSSP Retour sur Phillip Island 114 ESSAI SORTIE DE CAISSE KTM 1290 Super Duke R

SPORT-BIKES N°123 Juillet-Août-Septembre 2020 - Trimestriel I Adresse : Press Start Éditions - 760 route d’Auvilliers - 45270 Quiers-sur-Bézonde - France E-mail : redac@sport-bikes-mag.fr I Directeur de publication & rédacteur en chef : Tommy Marin I Journalistes : Maxime Pontreau Mat Oxley I Chroniqueurs : Jacques Hutteau - Lilian Guignard I Photos : PSP Swiderek/Jagielski - Stéphane Valembois I Création graphique : Mélanie Ambert - www.commeunjeudi.fr I Publicité : Thierry Capela - 06 20 61 96 19 - thierry@kapmedia.fr Relecture : Diane de Salve I Imprimerie : BLG Toul - 2780 Route de Villey St Etienne - Pôle Industriel Toul Europe - Secteur A - 54200 TOUL - France Abonnements et service diffuseurs : Abomarque - sportbikes@abomarque.fr - Tél : 05 34 56 35 60 (10h-12h/14h-17h) - Tarif 6 numéros (1 an) = 30 € Prix au numéro = 6,20 € I Distribution : MLP I Créateurs de Sport-Bikes : Grégory Ambos et Laurent Alberola Sport-Bikes est une publication bimestrielle éditée par la société Press Start Éditions, EURL au capital de 4 000 euros I Gérant : Tommy Marin RCS : Orléans 844 648 931 I N° de commission paritaire : 0421 K 80228 I N°ISSN : 1620-3151 I Dépôt légal : à parution. Droits de reproduction réservés pour tous pays. La rédaction n’est pas responsable de la perte ou de la détérioration des textes ou photos qui lui sont adressés.

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Arrêt sur images #instant #émotion #choc 1

1. Bautista entre deux eaux 2. Où est Charlie ? 3. École à la maison 4. Canet et Oncu en mode Hidalgo powa !

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5. Mauvaise piste 6. Ciao Balda ! 7. Soirée lounge chez Tech 3 8. Oui, c'est pour ? 9. Indéboulonnables ? 10. Tu le sais qu'on va pas te lâcher…

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News Racing

#actu #compétitions #nouveautés

Les nouveaux calendriers 2020

Parole de pro

A l’heure où nous bouclons ces lignes, tous les principaux championnats de vitesse ont mis en place de nouveaux calendriers afin d’assurer le spectacle cette année. Réglementations étatiques et restrictions de déplacement obligent, les organisateurs n’ont pas eu le plaisir de faire ce qu’ils voulaient. C’est pourquoi ces championnats mondiaux restent en Europe, à l'exception des 8 Heures de Suzuka pour la finale de l’EWC. À vos agendas !

Olivier Bazin

MOTOGP 01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13 14

08 mars 19 juillet 26 juillet 09 août 16 août 23 août 13 sept. 20 sept. 27 sept. 11 octobre 18 octobre 25 octobre 08 nov. 15 nov.

QATAR ESPAGNE ANDALOUSIE RÉP. TCHÈQUE AUTRICHE STYRIE SAN MARIN ÉMILIE-ROMAGNE CATALOGNE FRANCE ARAGON TERUEL EUROPE VALENCE

Losail (Seul. Moto2 & Moto3) Jerez (Avec MotoE) Jerez (Avec MotoE) Brno Spielberg Spielberg Misano (Avec MotoE) Misano (Avec MotoE) Barcelone Le Mans (Avec MotoE) Aragon Aragon Valence Valence

À déterminer :

AMÉRIQUES (Austin) - ARGENTINE (Termas de Rio Hondo) - THAÏLANDE (Chang International) - MALAISIE (Sepang)

WorldSBK 01 02 03 04 05 06 07 08 09

28 fév.-1 mars AUSTRALIE 31 juil.-2 août ESPAGNE 7-9 août PORTUGAL 28-30 août ARAGON 04-06 sept. TERUEL 18-20 sept. CATALOGNE 02-04 oct. FRANCE 09-11 oct. ARGENTINE* 6-8 nov. ITALIE*

Phillip Island (Sauf SSP300) Jerez Portimao Aragon Aragon Barcelone Magny-Cours San Juan Villicum (Sauf SSP300) Misano

*à confirmer

À déterminer :

GRANDE-BRETAGNE (Donington Park) PAYS-BAS (Assen) - QATAR (Losail, Sauf SSP300)

À noter : Il y aura deux courses par round en Supersport et en Supersport 300

EWC 01 02 03 04 05

21-22 sept. 2019 14 déc. 2019 29-30 août 19-20 septembre 1er novembre

Bol d’Or 8H de Sepang 24H Motos Bol d’Or 8H de Suzuka

Le Castellet - FRANCE Sepang - MALAISIE Le Mans - FRANCE Le Castellet - FRANCE Suzuka - JAPON

FSBK 01 02 03 04 05

31 juillet-02 août 21-23 août 11-13 septembre 16-18 octobre 23-25 octobre

Magny-Cours Carole Ledenon Pau-Arnos Nogaro

(58) (93) (30) (64) (32)

Olivier évoque son rôle d'agence de communication, le marché "post-coronavirus" et les projets de ses clients (dont HJC, Spidi, Bihr ou Continental) côté circuit. Quel est le rôle d’une agence de communication indépendante ? Si certaines marques gèrent leur communication en interne, d'autres ont recours à une équipe externalisée. Notre rôle est de les accompagner en les conseillant sur la partie relations presse, stratégie de marque, lancement et positionnement de produits. Les marques sont hyper-sollicitées, l’offre en communication est plurielle entre le print, l'événementiel et le digital – une branche toujours plus importante – et nous devons les aider à optimiser leur stratégie, notamment dans les périodes plus délicates de crise, comme en 2008-2016. Nous devons aussi être force de proposition – par exemple sur des nouveaux formats publicitaires, des opérations spéciales, etc. – afin de se démarquer ou d’être toujours plus précis dans la communication de nos clients. Comment se porte le marché après ce confinement ? Il faut rester prudent, mais globalement, le plaisir de faire de la moto semble bien présent, et même un peu plus qu'avant. Les passionnés sont au rendezvous et ils ont besoin de matériel, d'accessoires… Il y a eu une grosse activité de nettoyage, remise en route et rénovation (on a observé une multiplication des ventes par 5 pour Belgom chez Bihr !) pendant le confinement. Tous les indicateurs sont au vert ! Tes clients ont-ils des projets particuliers côté piste ? Bihr a lancé un ambitieux plan de relance pour aider ses revendeurs, axé sur six thématiques, dont une visant à booster le retour à la pratique du circuit en loisir, ou trackday. Les nouveaux ContiRaceAttack 2 sont arrivés chez Continental et HJC, en plus de célébrer ses 10 ans de présence en MotoGP (avec Ben Spies et le RPHA-10 en 2010), propose à nouveau du carbone pour les pistards. Spidi s'apprête également à lancer la XPD XP9-R, une nouvelle génération de bottes ultra-légères dont le chausson devient la protection principale du pied (au même titre qu'une dorsale) et l'ensemble coque externe (interchangeable) une surprotection.

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#actu #compétitions #nouveautés

❱❱ Les prochaines élections de la FFM sont fixées au 9 octobre 2020. L’ensemble des dirigeants de la fédération (dont son Président Jacques Bolle qui a réalisé le nombre maximum de mandats) sera à cette occasion renouvelé pour une durée de 4 ans. Tous les licenciés pourront faire acte de candidature à partir du 8 juillet 2020. Infos : www.ffmoto.org

MotoAmerica

Beaubier démarre très fort

Fin mai, le MotoAmerica a été le premier championnat de motos à reprendre officiellement la piste. Le champion Superbike en titre, Cameron Beaubier, s’est montré intraitable durant tout le week-end. Après s’être assuré la pole position, le pilote Yamaha Monster Energy Attack Performance a dominé les deux courses de bout en bout sans être inquiété. Les places restantes sur le podium étaient plus disputées et ce sont Jake Gagne (3e et 2e), Mathew Scholtz et Josh Herrin qui en retiraient les honneurs. Principal rival du champion l’an passé, le pilote Suzuki Toni Elias n’a en revanche marqué aucun point en deux courses. En Supersport, c’est le pilote mexicain Richie Escalante qui a trusté la plus haute marche du podium des deux manches, devant Brandon Paasch et Kevin Olmedo, puis Sean Dylan Kelly et Jason Aguilar. Exception américaine, les spectateurs sont autorisés à se rendre sur les circuits depuis le 26 juin. En France, les courses du MotoAmerica sont désormais retransmises sur les chaînes Eurosport.

© Maurice Büla Collection

EN BREF

News Racing

Décès de Carlo Ubbiali L’As des petites cylindrées

La course moto vient de perdre le pilote qui a dominé la première décennie du championnat du monde de vitesse. Carlo Ubbiali a gagné pas moins de neuf titres mondiaux entre 1950 et 1960. Seuls deux pilotes ont fait mieux que lui : Giacomo Agostini et Angel Nieto. Et seulement deux autres ont égalé son nombre de couronnes : Mike Hailwood et Valentino Rossi. Ubbiali était un as des petites cylindrées. Né le 22 septembre 1929 à Bergame, il débuta la course juste après la guerre et s’imposa dans ses deux premiers meetings avant d’être disqualifié, n’ayant pas encore 18 ans. Il effectua finalement sa première course en championnat du monde 125cc en 1949, à Berne, et termina quatrième. En 1951, il remporta sa première couronne mondiale en 125cc. L’Italien se retira de la compétition à la fin des années 1960 avec six titres 125cc (1951/55/56/58/59/60) et trois titres 250cc (1956/59/60) en poche. Carlo Ubbiali s’est éteint à l’âge de 90 ans, le 2 juin dernier, après avoir contracté la Covid-19. Toutes nos pensées vont à sa famille et ses proches.

En piste avec… Pilote GMT 94 en WorldSSP Jules, tu as réalisé le nouveau record du circuit Carole en 58'946. Comment as-tu vécu cette expérience ? C’était assez stressant. Je remontais sur la moto après trois mois d’arrêt et il y avait une grosse attente du team à Carole. Je l’ai pris comme un travail pour progresser et me suis lancé le challenge, mais je ne m’attendais pas à le battre. Carole est un circuit vraiment compliqué. Il est petit, étroit, technique, piégeur, avec de grosses accélérations, de gros freinages et assez mono-trajectoire. Tout se joue au millimètre et tu ne peux pas te reposer avec les enchaînements. J’avais ma moto du Mondial – au top –

et on a commencé par travailler la première journée pour se remettre dedans. Après mon 59’, j’avais le sentiment que je pouvais descendre en 58’. Je ne pouvais pas repartir sans réussir. Je suis vraiment content. Je pense que c’est un bon chrono [rires]. Quel est le secret d’un tour si rapide ? C’est un ensemble. C’est le travail de toute l’équipe, la moto, puis on passe des paliers progressivement. On essaye d’être meilleurs. Je n’étais pas super satisfait de la première journée, donc un peu énervé sur la deuxième [rires]. J’ai immédiatement roulé dans

C’est parfait pour le physique et le moral avant de reprendre la saison WorldSSP ? Oui, on ne pouvait pas rêver mieux. Il y avait le record mais mon premier objectif était de recouvrer la confiance et le rythme pour la suite. J’ai fait énormément de tours très rapides. C’est hyper positif. Je n’ai quasiment aucune courbature et cela me confirme que mon état physique est excellent. C’était aussi bon pour le moral car le travail réalisé durant ces trois jours d’essais fut top. Du super boulot. Cela nous apporte – au team et à moi – de la confiance pour notre championnat. C’est ce que l’on voulait.

© Photo : Good-Shoot

Jules Cluzel

des tops chronos puis on a gratté des dixièmes. J’étais en petit 59’ avec les pneus course [Pirelli] en enchaînant les tours et on avait aussi des gommes plus softs [pour chasser le chrono].

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Photo: R. Schedl

#GETDUKED MODE BEAST ACTIVÉ KTM 1290 SUPER DUKE R 2020 On change les règles du jeu. La nouvelle KTM 1290 SUPER DUKE R est encore plus musclée, plus sportive et plus menaçante. Construite sur un tout nouvel ensemble châssis-suspensions, catapultée par le fameux bicylindre en V LC8 de 1301 cc et embarquant la meilleure électronique du marché, la NOUVELLE BEAST est prête pour la bataille. GET DUKED : Sois Duke Beast = bête Ready To Race = prêt pour la course Toutes les scènes montrées sont réalisées par des professionnels sur routes fermées ! Porte un casque certifié et un équipement de protection complet (gants, blouson, pantalon et bottes) et respecte le Code de la Route. Le véhicule montré peut être légèrement différent de la production de série et peut être équipé d’accessoires en option.


Sortie de piste avec…

News Racing

Freddy Foray

24H Motos du Mans Huis clos obligatoire

Freddy, tu te souviens bien de ta dernière sortie... … dans les graviers ?

[Rires] Malheureusement, je crois que c’est aux 24H Motos du Mans 2019, quand j’ai percuté les pompiers. Après, c’est en compétition. Si tu me demandes en petites motos, je ne pourrai pas dire… [rires]

… de l'hosto ?

Cela fait tellement longtemps que je ne sais pas.

… médiatique ?

J’ai participé à une journée de roulage de Bertrand Stey à Colmar début juin. Y'a pire…

… en voiture ?

J’ai un Honda CR-V Hybrid pour la famille et un Renault Trafic pour la moto. Mais là, on voit pour changer car je rêve de partir en vacances en famille avec motos et vélos.

… à moto ?

Je n’ai pas de moto et je roule très rarement sur route. Pourtant, ce serait cool d’avoir un Monkey ici, dans ma région, mais c’est difficilement gérable avec des enfants.

… sportive ?

Je suis à fond dans le vélo. J’en fais quasiment tous les jours. Je pars pour faire 12 000 km cette année.

… avec une fille ?

Euh… une sortie avec Marine [sa femme] sans nos enfants ? Attends, elle est à côté de moi, elle va savoir… Non, elle fait la même tête que moi. Cela devait être avant le confinement…

… en soirée ?

Je me rappelle une "mine" il n’y a pas si longtemps, mais quand… ? En même temps,

#actu #compétitions #nouveautés

je bois deux bières et c’est une grosse fête pour moi. C’était un bon apéro post-confinement avec des amis.

… en famille ?

On est remonté sur Paris, mijuin, pour voir toute la famille.

… au cinéma ?

Il faut savoir que j’ai des enfants… La Reine des Neiges 2… Tous les parents se reconnaîtront. [rires]

Initialement prévue en avril et reportée, la 43e édition des 24 heures Motos du Mans se déroulera les 29 et 30 août, mais sans public. Le circuit Bugatti ne pourra accueillir les hordes de fans en raison des restrictions gouvernementales s’appliquant sur les grands rassemblements hexagonaux jusqu’en septembre. Un véritable coup dur pour l’organisateur – l’ACO – et le promoteur du championnat FIM EWC – Eurosport Events – mais un moindre mal pour la discipline comme l’explique François Ribeiro, le directeur d’Eurosport Events [cf Point de Vue, p. 16]. L’Automobile Club de l’Ouest assure que des avoirs seront automatiquement envoyés à tous les possesseurs d’un billet pour cette édition (du montant du billet seul et sans démarche spécifique si l’achat s’est fait auprès de l’ACO). La troisième épreuve de la saison 2019-2020 de l’Endurance mondiale aura lieu huit mois après les 8H de Sepang et trois semaines seulement avant une autre course de 24 heures : le Bol d’Or. Le défi sportif déjà imposé par cette course mythique n’en sera que plus intense.

… incognito ?

Bah, un peu tous les jours. Je ne suis ni Rossi ni Marquez, etc. Je suis parfois quand même surpris car il y a plus de gens qui me reconnaissent. Je ne sais pas si ce sont les réseaux sociaux ou la couverture télé des courses qui ont changé ça ces dernières années.

… d'école ?

J’ai passé mon Bac Pro en 2004 ou 2005 puis mon Brevet d’État en 2006. Après, j’ai dit à ma mère : "Je reste à la maison et je veux devenir pilote pour de vrai. Steuplait laisse-moi deux ans, steuplait !" [rires]

… d'argent ?

Pour le plaisir : des vacances à l’île Maurice. Pour le travail : une mini-moto et un karting… [rires] Non, mais c’est réellement pour le travail. Je n’aurais pas mis autant d’argent juste pour m’amuser. Cela me sert.

… de tes gonds ?

Pendant le confinement… Je n’ai pas été le mari idéal. Je suis hyperactif et ne pas avoir de compétition a été un peu plus dur que prévu [rires]. J’avoue, j’ai pété des petits câbles… Pourtant, normalement, je suis calme.

Charade Heroes 2020 La compétition pour passion

La seconde édition de Charade Heroes aura bien lieu cette année et elle se déroulera les 26 et 27 septembre sur le mythique circuit d’Auvergne. Deux ans après son 60e anniversaire, Charade va revivre son âge d’or en accueillant sur sa piste motos, autos et side-cars. Côté deux-roues, plus de 100 machines seront réunies en deux plateaux : un plateau "classique" pour les motos de course des années 1959 à 1974 et un plateau "historic event FIM" avec une sélection de machines de GP, Superbike et Endurance allant de 1950 à 2006. Profitant du 65e anniversaire de Yamaha, un hommage sera rendu à la riche carrière des frères Christian et Dominique Sarron. Les fans de motos pourront aussi se régaler avec pas moins de 100 voitures de course. De multiples animations sont également au programme de ce week-end qui ranimera la légende du circuit Charade. Plus d’infos sur www.charade-heroes.com.

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Lu & entendu

"C’est d’abord Zarco qui nous a amenés à la réalité de la moto. […] Puis, avec l’arrivée de Dani Pedrosa en tant que testeur, cela s’est confirmé et a mis en évidence les défaillances de la moto. C’était un autre coup dur pour l’équipe."

Pol Espargaro Mundodeportivo, 11 mai

Pour battre Rea, je vais devoir travailler sur mon mental, pas sur la R1."

#punch #bluff #provoc

"10 millions d'euros : c’était une offre monstrueuse et pour un garçon de 27 ans, dire non, c’est avoir du courage… Ou tu es fou, ou tu es convaincu. Et ça, j’apprécie beaucoup. Casey [Stoner] a toujours été cohérent, à tort ou à raison." Livio Suppo • La Gazzetta dello Sport, 17 mai

Marc Marquez • Mundodeportivo, 23 mars

"Carmelo [Ezpeleta] est le pompier qui essaie d’éteindre ce feu et il est le seul à avoir assez d’eau pour le faire."

"Je ne voudrais pas être Puig la première fois qu’il se retrouvera dans le stand avec les frères Marquez. […] J’ai peur qu’un grand gâchis ne se produise chez Honda, car on peut toucher à tout, sauf à Marc."

Hervé Poncharal • Par téléphone, 20 avril

Carlo Pernat

Toprak Razgatlioglu • GPOne, 16 Juin

"Je pense que s'il avait quitté le sport un peu plus tôt, il aurait laissé un héritage – ce qu'il fera toujours, mais maintenant, il se montre très vulnérable. C'est décevant de le voir retourner dans une équipe privée. Je pense que Valentino a encore le potentiel pour obtenir d'excellents résultats."

"Il en coûte de plus en plus de le battre. J’ai également perdu des duels par manque d’expérience. […] [Fabio] n’a pas réussi à gagner, mais il a beaucoup montré. Tu n’as pas besoin de gagner pour prouver que tu peux te battre pour le titre."

"Petrucci n’était peut-être pas le bon gars pour attiser le feu de Dovi, ils sont très intimes. Je pense que Dovi a besoin de quelqu’un pour le frapper sous les côtes avec un bâton et lui dire : 'Allez mon pote.' Je pense que je pourrai peut-être le faire."

• GPOne, 14 juin

Honnêtement, je ne réalise pas que je cours avec [Rossi] et que l’année prochaine je vais, entre guillemets, prendre sa place. Sa moto ! C’est quelque chose…" Fabio Quartararo • Facebook, 7 mai

Jack Miller • Fox TV, 12 juin

Casey Stoner • Fox Sports Asia, 16 juin "C’était l’année où Dani Pedrosa parlait de sa retraite. Je crois que c’était vers le week-end du Mans, et mon manager a essayé de me faire monter sur la Honda Repsol. […] Ça aurait été bien. Aprilia m’a fait une offre, mais ça ne m’a pas vraiment intéressé, c’était la place de Pedrosa que je voulais."

Jonathan Rea

WorldSBK.com, 14 mai

"C’est un championnat joué par les directeurs d’équipe car, comme il n’y a pas de courses, nous, les pilotes, ne pouvons pas faire grand-chose pour changer les choses. C’est un échiquier. […] Il faut placer ses pièces, les plus précieuses. Je viendrai un peu plus tard…"

Danilo Petrucci • Sky Sport, 6 juin

"Je suis resté à la maison, je me suis reposé, j’ai passé du temps avec ma maman, ma compagne, mes animaux. Sincèrement, j’ai pris du bon temps. C’était très étrange pour moi car, depuis 1995, ma vie consiste à me rendre sur tous les circuits du monde."

Valentino Rossi • BTSport,

29 mai

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PROPOS RECUEILLIS PAR MAXIME PONTREAU

Le point de vue de

François Ribeiro Depuis cinq ans, l’Endurance mondiale mue sous la houlette de son promoteur Eurosport Events. Faisant face aux récents événements, son directeur François Ribeiro nous livre son point de vue sur plusieurs sujets. LA CRISE DU CORONAVIRUS

"Aucune école, formation ou séminaire ne peut préparer à ce que l’on vient de traverser. D’un seul coup, il n’y a plus aucun repère. Le plus dur, c’est le manque de visibilité à cause des inconnues qui subsistent dans l’équation. En gros, cette année, tout promoteur qui organise un championnat se déplaçant de pays en pays, sur plusieurs continents, avec des participants aux multiples nationalités et qui vit grâce aux recettes du public coche toutes les mauvaises cases. A cela s’ajoute une contrainte économique très forte. Cette crise est d’une violence inouïe pour le monde du sport."

LA FIN DE SAISON

"Nous ne pouvions pas imaginer une meilleure séquence que d’organiser les 24H du Mans fin août, le Bol d’Or trois semaines après, puis les 8H de Suzuka début novembre. Les 24H du Mans Auto en septembre et les conditions météorologiques au Japon nous empêchent de faire différemment. Mais au final, je n’en sais pas plus. Si les statistiques de la Covid-19 remontent après l’été et que le gouvernement resserre la vis, on ira à la pêche tout l’hiver. Nous n’avons aucune influence sur ces décisions, donc on s’adapte. On ne sait donc pas encore si le Bol d’Or se fera à huis clos et on espère que les autorités japonaises ouvriront le pays."

HUIS CLOS POUR LES 24H MOTOS DU MANS

"Les 24H Motos devaient absolument avoir lieu, donc le huis clos a été privilégié. Nous n’avions pas le choix, le gouvernement ne laisse à ce jour aucune flexibilité et, à un moment, vous devez avancer. C’est très frustrant, atroce même, de faire un événement sans public, mais si on ne le fait pas, c’est pire. Nous pourrions facilement détruire 50 % de l’écosystème de l’Endurance. Des teams disparaîtraient probablement et on aurait un vrai problème de continuité du championnat. On a donc revisité de fond en comble l’organisation des 24H du Mans avec l’ACO. L’événement n’est plus le même, tant du point de vue des recettes que des coûts. Là, il n’y a plus que le sport qui compte. L’épreuve est uniquement pensée pour les teams. Imaginez la procédure de départ sans public, c’est triste. Il va manquer quelque chose. Ce huis clos n’est pas agréable, mais c’est un moindre mal."

LES RETRAITS DE YAMAHA ET PIRELLI

"La décision de Yamaha date de l’année dernière. Nous savions qu’ils ne voulaient plus engager de moto officielle aux 8H de Suzuka, estimant avoir atteint leurs objectifs. Ils vont désormais mettre en avant la YART et cela me va très bien. Concernant Pirelli [qui quitte l’EWC en pleine saison], on savait qu’ils y pensaient mais la Covid-19 a certainement précipité leur sortie. Je pense qu’il y a aussi l’arrivée de

Michelin qui a pesé dans leur choix, car le manufacturier français va renforcer sa présence en EWC. Sinon, je ne vois pas d’autres acteurs qui risqueraient de partir. Après, vous savez, dans ce monde, contrat ou pas contrat, si quelqu’un veut partir il part. Souvenez-vous de Kawasaki en MotoGP. Je suis confiant car la grande majorité des teams ne vit pas grâce à l’argent des constructeurs."

LE SOUTIEN AUX PETITES ÉQUIPES

"Nous avons pris des mesures de réduction de coûts, notamment en essayant de réduire la durée des épreuves et en limitant les tests. On va aussi aider certaines équipes pour les frais d’engagement au Bol d’Or. On les aide à la mesure de l’économie du championnat et celle de l’EWC n’est absolument pas comparable à celle du MotoGP. Après, ces structures comprennent que nous faisons des épreuves, même sans public, pour assurer leur continuité. Ils voient que l’organisateur concède un sacrifice financier important [environ 70 % de la recette économique de l’événement disparaît sans public] pour l’écosystème de l’EWC, et pas seulement pour leur course. "

L’AVENIR

"Il est trop tôt pour répondre sur ce point. Nous aurons une meilleure vision de l’impact de cette crise en fin d’année. Notre priorité est avant tout la protection de notre écosystème tel qu’il est. Nous voulons sortir de la crise en subissant le moins possible. Ceci avant de tenter de grossir à nouveau, il faut être réaliste. En tout cas, je ne pense pas que la Covid-19 va retarder l’arrivée de Spa-Francorchamps au calendrier 2022, ce qui est notre plus gros dossier [25 millions d’euros d’investissements]."

LE RAPPROCHEMENT EWC/WORLDSBK

"Il y a eu beaucoup de confusions sur ce sujet. Il existe une réflexion entre la FIM, Dorna et nous, mais elle est d’ordre technique. Motos d’EWC et de SBK sont issues de la production et, s’il existe déjà une réglementation avec une base commune, on parle pour se rapprocher davantage. Les destins des deux championnats sont déjà liés, que cela plaise ou non. Yamaha a gagné trois fois Suzuka avec des équipages de WorldSBK, comme Kawasaki l’an dernier. Et pourquoi le HRC retourne en WorldSBK selon vous ? Ils savent que c’est la chose à faire pour remporter à nouveau les 8H de Suzuka. En revanche, il est actuellement inenvisageable de voir une manche EWC et une manche WorldSBK sur le même circuit le même week-end. Ce n’est pas à l’ordre du jour. Tout comme il n’est pas question qu’Eurosport Events rachète le Superbike mondial à la Dorna." •

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MÉTIER

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Valentin VISAGE Debise

Mon Job Je teste les pneus Michelin destinés à la compétition. Par exemple, un nouveau pneu MotoGP que les pilotes de la catégorie vont essayer, c’est un pneu que moi ou mes collègues avons déjà validé. Lors d’un test, les techniciens Michelin ont un plan de travail clair et souvent une demande particulière concernant un aspect précis du pneu sur lequel je dois me concentrer. Je fais le nombre de tours demandé et je compare les différents pneus. Le but est de donner un maximum d’informations sur ce que j’essaye. Je teste toujours les pneus à l’aveugle. Je veux me concentrer sur mon ressenti car un même pneu peut fonctionner différemment selon la température de piste, le circuit, les conditions, etc. Ils peuvent ensuite en tirer des conclusions. Il m’est déjà arrivé de faire 180 tours à Jerez en une journée, et parfois on multiplie les simulations de course, cinq ou six par jour. Je ne prends jamais la décision finale de valider ou non un pneu. Moi, je donne mon avis sans retenue, en étant le plus objectif possible, et les techniciens Michelin prennent la décision. Ils disposent de beaucoup plus d’informations que moi. En moyenne, ces essais de pneus représentent une vingtaine de journées par an.

Pourquoi ce choix En fait, j’ai rencontré des techniciens Michelin lors d’une journée de roulage avec mon ami David Muscat – qui lui testait en urgence ce jour-là des pneus pour eux – et ils m’ont proposé de faire un essai. C’est un métier qui m’a tout de suite plu. C’est super intéressant de pouvoir comparer énormément de pneus. C’est une chance rare déjà, et cela m’a fait progresser en tant que pilote de course – avec la compréhension des diverses réactions des pneus et du châssis. Cela m’a appris à dissocier les réactions de la moto selon les paramètres.

Pilote essayeur pour Michelin NATIONALITÉ Français NÉ LE 12 février 1992 à Albi (81) VIT À Albi (81) EN POSTE Depuis 2017

Ils essaient aussi des voies de développement innovantes et, du coup, ce sont de nouvelles sensations pour moi. Ma passion au final, plus que la moto, c’est en réalité le pilotage et la mécanique. Ce métier est parfait pour moi.

C’est toujours le cas... Après, on n'a qu’une jeunesse. Tant que j’ai la forme et les capacités physiques pour faire cela, je vais continuer. On verra le reste plus tard.

J'aime

J’ai commencé la compétition à 12 ans en Espagne. Une fois que j’ai eu le bon âge, je suis revenu en France puis j’ai accédé au Mondial. J’ai couru en GP 250cc puis en Moto2 avant de faire du Supersport pendant deux saisons. J’ai aussi roulé en Endurance, en FSBK et depuis quelques années je suis en MotoAmerica [en Supersport].

La chance de pouvoir essayer autant de pneus différents et parfois certaines innovations en avant-première. De manière plus générale, l’évolution de mon ressenti et de mon pilotage grâce à ce travail.

Je déteste Honnêtement, je ne vois pas de points négatifs. Je suis payé à faire de la moto, à tester des pneus. Je lime les pistes – jusqu’à 180 tours en une journée. C’est cool. Et même quand un pneu ne va pas, c’est intéressant d’essayer de comprendre le problème et de tenter de le détourner pour aller vite.

La difficulté C’est un métier très physique. Lorsque je vais sur une journée d’essai, je me charge de Coca Cola pour ne pas manquer de sucre et d’énergie. Gâteaux, bananes... un peu de tout en fait. Il faut manger si tu veux tenir.

Mon objet fétiche Le Coca Cola [rires]… et des tear-offs pour mon casque. On peut passer une journée entière à faire des simulations de course donc j’ai toujours de quoi nettoyer mes casques, entre autres détails.

La vie perso Je savais qu’elle serait inexistante dès que j’ai débuté la compétition moto.

Le passé

Le futur Je me vois bien continuer encore un moment, tant que je fais de la compétition en tout cas. C’est un bon complément car c’est un très bon entraînement.

Mon conseil à mon (ma) futur(e) remplaçant(e) Il faut qu’il soit prêt physiquement et qu’il travaille ses commentaires : comprendre la moto, son comportement et comment tes actions changent ses réactions. Il faut être précis. Pour être pilote d’essai, il est primordial de savoir expliquer ce que fait la moto, et donc ce que font les pneus.

Mon meilleur souvenir Une fois, sur le circuit de Tito [Rabat] à Almeria, on a vraiment eu de supers pneus toute la journée. A chaque sortie, on mettait encore plus de gaz. On n’arrêtait pas. Si bien qu’on a fini par rouler aussi vite que Tito. C’était vraiment super. Mais sinon, c’est tout simplement quand on a de bons pneus et que ça met du gros gaz [rires].

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Laissez-vous piquer

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Les puristes avanceront qu’il n’y a qu’un "King" en Superbike mondial : Carl Fogarty. Pourtant, depuis cinq ans, Jonathan Rea a enchaîné les titres et balayé les records de Foggy, dont ses quatre couronnes. De là à lui piquer sa place de roi du WorldSBK ? Il n’y a pas de place au doute ici.

VERSUS

JONATHAN REA #1 02/02/1987 à Ballymena I Irlande du Nord

01/07/1965 à Blackburn I Angleterre

CARL FOGARTY #1 

55 ans I 1,75 m I 66 kg

TEAM

Ducati Factory

Kawasaki Racing Team WorldSBK Kawasaki ZX-10RR

Ducati 916 (1994-1995) I Ducati 996 (1998-1999)

5 titres WorldSBK 89 victoires I 31,4 % de victoires 170 podiums I 60 % de podiums 23 pole positions 12e saison en WorldSBK

4 titres WorldSBK 59 victoires I 26,8 % de victoires 109 podiums I 49,5 % de podiums 21 pole positions

10 saisons en WorldSBK

9e (1992)

33 ans I 1,76 m I 70 kg

 PIRE

9e (2011 & 2013)

*lors d’une saison complète

CLASSEMENT WSBK*

*lors d’une saison complète

13,8 pts (moyenne WorldSBK)

POINTS PAR COURSE

15,6 pts (moyenne WorldSBK)

Patron du Superbike en 1998 et 1999, Fogarty repart à la charge en 2000 mais se blesse sévèrement à l’épaule lors d’une chute au début de la saison à Phillip Island. Cette blessure le force à prendre sa retraite. Avant de triompher en WorldSBK, Fogarty s’est illustré au Tourist Trophy. Il a gagné trois courses sur l’île de Man (1989 - Production 750 / 1990 – Senior TT et Formula One TT)… Le "King", c'est lui, car il y a plus que les chiffres. Fogarty a ainsi été couronné pour son caractère explosif et son charisme.

 SES DERNIÈRES SAISONS…

 L’INFO EN PLUS

 C’EST POSSIBLE…

Reste que Rea le domine largement en termes de titres, de victoires et de podiums... et ce n'est pas fini.

 MAIS…

Jonathan Rea s’est offert en 2019 une cinquième couronne mondiale consécutive, en ne loupant que trois podiums. Il est tout simplement au sommet de son art. … tandis que Rea n’a jamais concouru au Tourist Trophy, contrairement à son père (Johnny Rea) qui a gagné le Junior TT en 1989 (Fogarty termina 4e de cette course). Les chiffres ne laissent pas de place au doute. Personne n'a jamais maîtrisé le SBK comme Rea le fait actuellement. C'est le "King" ! Il n'a en revanche ni l'aura de Fogarty ni son magnétisme auprès des fans.

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Les coulisses de la FIM

La

PAR MAXIME PONTREAU PHOTOS DR

face à la crise

Au moment où la planète a été mise à l’arrêt – signifiant la suspension de toutes les compétitions moto – la Fédération Internationale de Motocyclisme s’est retrouvée en première ligne. Institution de référence du sport moto, elle a eu un rôle prépondérant auprès des multiples acteurs du milieu. Restructuration des calendriers, prévention, soutien médical, coups de pouce financiers, lobbying… la FIM est sur tous les fronts pour faciliter le retour au quotidien.

Calendriers Les diverses interdictions liées à la Covid-19, dont celle de voyager, ont rendu obsolètes tous les calendriers des compétitions moto, toutes disciplines confondues. Ce ne sont pas moins de 400 courses qui ont dû être reprogrammées. Unions continentales, fédérations nationales, promoteurs et organisateurs… la FIM a coordonné l’ensemble des discussions entre les acteurs pour restructurer intelligemment les championnats. L’important étant d’éviter au maximum les juxtapositions d’épreuves, à tous les niveaux. Le tout en respectant l’ensemble des contraintes gouvernementales propres à chaque pays. Si certains championnats ont été tout simplement annulés (des compétitions Juniors se déroulant en été par exemple), la plupart auront un nombre de courses proche de leur standard. Environ 31 % des épreuves n’ont pu être reportées actuellement. En revanche, la diversité des circuits est plus restreinte. Afin d’aider, la FIM a également fait un effort financier en réduisant ses droits de calendrier.

essentiels en tant que représentant du sport moto, et du motocyclisme plus largement. La campagne #RidersAtHome (pilotes à la maison) a donc été lancée fin mars afin d’encourager les motards à laisser leur moto au garage, notamment pour ne pas risquer d’encombrer les hôpitaux dans une période critique. De nombreux pilotes professionnels ont soutenu la campagne #RidersAtHome sur leurs réseaux avec parfois des vidéos humoristiques sur leur quotidien pendant le confinement.

Médical En l’absence de courses, des médecins de la commission médicale de la FIM habituellement engagés sur les courses ont aidé en première ligne dans la lutte contre la Covid-19. D’autres ont participé à adapter les réglementations actuelles en vue d'un retour à la compétition. C’est aussi le rôle de responsabilité sociale de la FIM.

règlements techniques qu’elle comptait mettre en place l’an prochain. Le risque était sinon de voir des grilles désertées en 2021. Il est important de redémarrer, mais pas à n’importe quel prix, étant donné que tout le monde a subi des pertes énormes.

Lobbying L’objectif est désormais de pouvoir redémarrer le plus vite possible les championnats. La FIM participe donc à l’action de lobbying #Sport4Recovery.

Ce collectif regroupant des acteurs de plusieurs sports (17 fédérations actuellement) a été créé pour faire du sport une priorité auprès des gouvernements. Obtenir les autorisations de ces derniers étant indispensable pour organiser à nouveau des compétitions. Se voulant une force de frappe internationale, le collectif n’a pas seulement la vocation de faire pression sur les instances dirigeantes, mais aussi celle d’aider les organisateurs à préparer leurs événements dans les meilleures conditions. Ces fédérations doivent être force de propositions pour faire bouger les choses le plus rapidement possible et ainsi éviter de possibles catastrophes économiques l’année prochaine. •

Technique Éducation La FIM se doit de montrer l’exemple et de faire de la prévention auprès de la communauté motarde. C’est l’un de ses rôles

L’un des rôles de la FIM est de concevoir des règlements et d’assurer leur application. Dans le contexte actuel, afin de contenir les coûts, et en accord avec les différents acteurs du sport moto, la FIM a décidé de repousser les évolutions des

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MOTOGP I DOSSIER COVID-19

MOTOGP

LE RÉVEIL DES GÉANTS Enfin ! Le 19 juillet 2020, la grille de départ de Jerez doit vibrer aux pulsations des échappements libres. Qu'ils nous ont manqué, ces sauvages décibels ! Le coronavirus a envoyé valser toutes les certitudes et les calendriers établis, y compris dans le microcosme du MotoGP. Mais si les circuits ont dormi trop longtemps, les coulisses ont bruissé. Voici le contexte dans lequel les géants vont réveiller leurs mécaniques. PAR Tommy Marin - PHOTOS PSP Swiderek/Jagielski, Red Bull, Monster Energy & Constructeurs

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VID19 La gestion de crise du patron de Dorna, Carmelo Ezpeleta, semble faire l'unanimité.

❱❱ DORNA

Des décisions saluées par le paddock e 1er mars, l'annulation du GP du Qatar pour la catégorie MotoGP fait l'effet d'une bombe et crée la polémique. Trop prudent, trop craintif, Carmelo Ezpeleta ? Pourtant, quand le coronavirus s'attaque au paddock de la F1, installé à Melbourne, deux semaines plus tard, le ton change. Contraint d'annuler son GP d'ouverture 2020 tandis que tout le monde est sur place, le promoteur Formula 1 est accusé d'avoir mis ses troupes en danger. Assurément, le patron de Dorna a pris la bonne décision en annulant/reportant les premiers rendez-vous de la saison. "Je pense que nous devons être très fiers de l’organisateur de notre championnat, estimera ainsi Alberto Puig, le manager de l'équipe Repsol Honda, début avril. Dorna a fait les choses intelligemment, pas à pas et toujours à l’écoute des autorités sanitaires. La F1 a tergiversé jusqu’à la suspension de l’événement en Australie. […] Dans le monde du football et du CIO, la même chose s’est produite : ils ont tardé à admettre une crise qui a maintenant explosé." Un constat largement partagé au sein de la "famille" MotoGP. Dès la mi-mars, un plan de soutien est à l'étude pour les équipes. Hervé Poncharal nous le confirme : Dorna, la FIM, la MSMA (l'association des constructeurs) et l'IRTA (l'association des teams, présidée par le Français) travaillent main dans la main pour assainir autant que possible la situation des équipes avant d'y voir plus clair. "Toutes les équipes indépendantes du paddock ont bénéficié d'une enveloppe agréée par Dorna, suffisante pour "faire tourner la boîte" en état de confinement pour avril, mai et juin, nous explique Hervé mi-avril. Les équipes Moto2 et Moto3 avaient reçu un premier versement de l'IRTA en mars. Ainsi, aucune des équipes ne sera en danger avant fin juin 2020. Nous avons beaucoup de chance d'avoir un promoteur comme Dorna. Mais il n'y a pas de poches sans fond : il est excessivement important de pouvoir recommencer à faire des courses aussi tôt que possible car les contrats avec les sponsors et les télévisions sont les seuls garants de la viabilité de notre business-model." Un futur logiquement moins évident pour les équipes indépendantes que pour les usines (même si ces dernières ont elles aussi souffert) et sur lequel Lucio Cecchinello, le patron de l'équipe LCR, nous éclaire dans une interview exclusive en page 42.

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❱❱ UN MERCATO DÉBRIDÉ amais le marché des pilotes n'aura revêtu un caractère si étrange. Pas une seule course n'a été disputée en 2020 que déjà, les contrats portant sur 2021/22 sont au centre des attentions. Au moment où nous bouclons ces lignes et depuis le début de cette crise sanitaire, quatre unions ont été officialisées : la reconduction d'Alex Rins (fin avril) et Joan Mir (début mai) chez Suzuki pour 2021/22, la promotion de Jack Miller (fin mai) au sein de l'équipe officielle Ducati pour 2021 avec une option pour 2022, et la prolongation d'Aleix Espargaro (début juin) chez Aprilia pour deux saisons. Ces quatre-là ont ainsi rejoint Marc Marquez (Repsol Honda), Fabio Quartararo et Maverick Vinales (Monster Energy Yamaha) et Tito Rabat (Avintia Ducati) au rang des pilotes assurés de disposer d'un guidon pour 2021. Mais les grandes tractations sont en cours et les avenirs d'Andrea Dovizioso, Danilo Petrucci, Pol Espargaro, Cal Crutchlow, Valentino Rossi et même Jorge Lorenzo font ainsi régulièrement les manchettes des journaux transalpins ou transpyrénéens ! Celui qui fait le plus parler, en cette fin juin, est le cadet des frères Espargaro. Le fer de lance KTM, selon diverses sources, aurait en effet conclu un accord avec Alberto Puig pour affronter Marc Marquez (avec lequel il a déjà été coéquipier dans son très jeune temps !) chez Repsol Honda. Il n'en fallait pas plus pour créer une tempête médiatique autour du clan Marquez/Alzamora, potentiellement vexé que l'on ne donne même pas une chance à Alex de s'éprouver aux commandes de la RC213V avant de l'évincer, au point de remettre en cause ce fameux contrat sur quatre ans unissant Marc à l'équipe.

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A moins tout simplement qu'une "descente" du jeune frère chez LCR, à la place d'un Crutchlow désireux d'explorer de nouveaux horizons, soit une solution acquiescée de tous. "Qui ne voudrait pas piloter une Honda ? lance Pol dans une interview vidéo consacrée à MotoGP.com le 17 juin. C’est la moto que tout le monde rêve d’avoir pour jouer le championnat du monde. Et il en va de même pour Ducati. […] J’ai 29 ans. Je veux montrer mon potentiel, car je n’ai plus dix ans de course devant moi. En même temps, je veux évaluer le projet KTM, car nous avons grandi ensemble au cours des dernières saisons." Alors, KTM, Honda ou Ducati pour le n°44 ? La firme italienne, si elle peine à le convaincre, veut officiellement – dixit

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Jorge Viegas (président de la FIM) et un plateau MotoGP en plein remue-ménage !

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Paolo Ciabatti, son directeur sportif – conserver Dovizioso auprès de Miller. Petrucci, ainsi évincé du programme MotoGP, aurait une Panigale à disposition en WorldSBK aux côtés de Scott Redding. Mais l'Italien n'est pas intéressé et veut rester en catégorie reine : il s'est rendu mi-juin chez KTM avec son manager Alberto Vergani et garde un œil sur Aprilia, suspendu à l'avenir d'Andrea Iannone… Un imbroglio dont Rossi n'a cure : l'Italien est pressenti à 99 % chez Petronas Yamaha SRT, pour un "échange" avec Quartararo. Razlan Razali, en quittant début avril son rôle de directeur général du circuit de Sepang, savait sans doute qu'il aurait fort à faire pour gérer ce transfert d'ampleur dans son équipe, où la valeur mercatique de Rossi serait plus que bienvenue pour son sponsor pétrolier, malmené par la crise – et tant pis pour le caractère "découvreur de talents" attribué à l'équipe B Yamaha. Selon nos informations, un "détail" bloque tout : celui de l'équipe technique. Une balle a priori dans le camp de Yamaha, puisque si Rossi souhaite emmener son staff avec lui, Quartararo a régulièrement déclaré vouloir en faire de même dans le sens inverse. Mais les choses simples en apparence le sont souvent moins dans le fond. Terminer sa carrière aux côtés de son élève Franco Morbidelli serait dans tous les cas une belle façon de boucler la boucle pour le Doc. A l'exact inverse de cette échelle d'expérience, on trouve Jorge Martin. Quartararo a démontré aux constructeurs qu'il fallait savoir regarder plus loin que des résultats bruts, analyser précisément un ensemble de paramètres. Et Martin semble retenir l'attention de Ducati, bien parti pour intégrer l'Espagnol à l'équipe Pramac pour 2021. Avec un autre Jorge, plus aguerri, dans l'équipe officielle si Dovi en partait ? Avec des si...

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❱❱ L'AFFAIRE IANNONE

e 31 mars, le Tribunal Disciplinaire International de la FIM rend son verdict concernant l'affaire de dopage dans laquelle est impliqué Andrea Iannone depuis le GP de Malaisie 2019 : le pilote Aprilia se voit ainsi imposé une suspension de dix-huit mois, courant du 17 décembre 2019 (la date d'entrée en vigueur de sa suspension provisoire) au 16 juin 2021. La sentence semble disproportionnée compte-tenu de la reconnaissance par le tribunal de la nature accidentelle de l'absorption de la substance dopante (contenue dans un aliment) et l'Italien, soutenu par Aprilia, fait appel devant le Tribunal Arbitral du Sport (TAS). Mais le coronavirus freine la procédure. Le 9 juin, le TAS publie un communiqué de presse dans lequel il confirme l'enregistrement du recours formé par l'Italien… mais aussi celui de l'Agence Mondiale Antidopage (AMA), qui ne réclame plus 18 mois, mais quatre ans de suspension ! Une nouvelle audience doit ainsi être fixée. L'histoire est loin d'être terminée, l'AMA souhaitant manifestement sacrifier la carrière d'Andrea pour en faire un exemple. Et même si un acquittement reste probable, Massimo Rivola, le boss du reparto corse Aprilia, doit prendre des décisions pour la reprise. Bradley Smith a ainsi été officialisé pilote titulaire provisoire pour 2020… en attendant 2021."Nous devons nous demander si nous souhaitons engager un pilote expérimenté, car notre moto est toute nouvelle, explique Rivola sur GPOne fin juin. Un vétéran pourrait donc nous être utile. Mais pour être honnête, pour le moment, nous nous concentrons sur la disponibilité d’Andrea Iannone dans un avenir proche. C’est pourquoi nous n’avons encore négocié avec personne."

Les monstres en stand-by... même si certains ont déjà repris la piste, telle la RC16 (ici avec Pedrosa).

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❱❱ LES USINES et le gel technique

près l'annulation du GP du Qatar, le souhait des constructeurs est bien entendu de récupérer aussi vite que possible leur matériel… pour travailler dessus et continuer à le développer. Mais la violence de la crise anéantit rapidement ce réflexe quasi-pavlovien. KTM, Yamaha (pour ses centres basés en Italie et en France), Ducati et Aprilia annoncent tour à tour la fermeture de leurs unités de production. Fin mars, la FIM, l’IRTA, la MSMA et Dorna sont unanimes : pour des raisons d’égalité et d’équité, l’homologation des moteurs et des carénages aérodynamiques (seuls soumis au gel technique en cours de saison, rappelons-le) doit être effectuée à distance, numériquement, dès que possible – sachant que Honda a déjà fait homologuer ses blocs et carénages avant le GP du Qatar – afin d'interdire tout travail de développement durant ce temps mort. Dont acte, sauf pour KTM et Aprilia, qui bénéficient de concessions et ont ainsi jusqu'au 29 juin pour développer leurs machines. Dans la foulée, Hervé Poncharal nous confirme une prolongation de ce gel technique jusqu'à la fin 2021. "En utilisant le même matériel en 2020 et 2021, on aide les constructeurs, qui n'auront pas à dépenser de l'argent en R&D, mais aussi les équipes, qui vont pouvoir amortir le lease fee [les frais de location] des motos aux usines sur deux saisons. En bref, on lisse le coût matériel sur deux années, c'est un ballon d'oxygène pour tout le monde." La question de la moto unique (une machine par pilote et par GP) refait surface, mais n'est pas retenue : "Que se passerait-il si Marquez détruisait sa moto au warm up ?" se contente de soulever Romano Albesiano, le directeur technique Aprilia. En revanche, chaque pilote disposera en 2020 de cinq moteurs maximum (sept pour les pilotes KTM et Aprilia, bénéficiant des concessions) pour couvrir les 13 GP au programme, et tout le monde, y compris les plus fervents défenseurs de la liberté technique, semble prêt à se montrer raisonnable. "Il faudra raisonner d’un point de vue économique, estime Gigi Dall'Igna sur GPOne. Notre secteur sera l’un des plus touchés par cette crise, car c’est au printemps que les motos sont vendues, et lorsque nous reviendrons à la normalité, l’essentiel du marché sera perdu. Par conséquent, nous devrons réduire l’impact économique sur les constructeurs et les équipes dans le championnat. Il faut s’attendre à quelques années de difficultés, mettre en place des politiques de réduction des coûts, trouver la bonne formule." Lors d'une conférence de presse donnée en visioconférence mi-mai, Davide

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Brivio, le manager de l'équipe Suzuki, nous explique que pour le constructeur japonais, les consignes sont à l'économie : "Suzuki nous a demandé d’essayer de réduire les coûts. […] Je pense que tout le monde aura moins de budget cette année, et probablement l’année prochaine également. Mais en prolongeant les contrats d'Alex Rins et Joan Mir, la direction de Suzuki a envoyé un signal positif : cette entreprise a l’intention de continuer en MotoGP." L'Italien insiste par ailleurs sur le fait que tous les partis impliqués dans la réorganisation des règles et du calendrier ont travaillé en bonne intelligence. "Personne n'a cherché à défendre ses propres intérêts, tout le monde a fait passer les intérêts du championnat avant tout, estime Brivio. Ce gel du développement est une première étape vers un championnat plus économique. Peut-être que la seconde passera par des week-ends plus courts. Nous devons accepter des compromis pour continuer."

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❱❱ LE NOUVEAU CALENDRIER et le GP de France

es annulations et reports en cascade ont finalement donné naissance à un calendrier entièrement remanié, que vous pouvez retrouver dans les news de ce magazine. Treize GP – pour l'instant – à huis clos entre le 19 juillet et le 15 novembre, dont dix en "doublette" sur cinq circuits (Jerez, Red Bull Ring, Misano, Aragon et Valence) et trois en "one shot" (Brno, Barcelone et Le Mans), avec un paddock réduit au strict nécessaire (la crème des équipes, de Dorna, la production TV et quelques photographes, soit 1300 personnes environ au total). Les GP "doublés" se dérouleront deux week-ends de suite, et non le même week-end, pour une raison simple : "Si vous faites deux courses, le promoteur ne vous en paie qu’une tandis que les équipes devraient être payées deux fois, explique Carmelo Ezpeleta. Et c'est la même chose avec la télévision." Une option existe pour quatre GP outre-mer en fin de saison (COTA, Termas, Chang et Sepang) et sera confirmée avant le 31 juillet. Le timing sera serré et ne laissera guère de place aux errements : "C'est une situation inédite et nous devrons être préparés non seulement physiquement, mais aussi mentalement, estime Andrea Dovizioso. Exécuter autant de meetings en si peu de temps ne laissera pratiquement aucune marge d’erreur et il sera donc essentiel de bien gérer." Certains crient au scandale, avec six courses en Espagne et un GP de France le 11 octobre. Nous, on dit bravo : réorganiser ainsi un championnat ne se fait pas en claquant des doigts et réclame énormément d'investissements, d'autant plus dans un tel climat d'incertitude. Claude Michy, le promoteur du GP de France, nous a régulièrement tenus informés de l'avancée de la situation. Après cette annonce du calendrier, il se veut clair : "Qu'il y ait du public ou non, ce Grand Prix sera probablement déficitaire, mais il est important de relancer la machine et d'être présent. Je vais me battre pour que le public puisse être au rendez-vous, pour faire vivre ce GP de France du mieux possible. Je veux voir les choses sous un angle positif et aller de l'avant."

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A SAVOIR : celles et ceux qui ont déjà acheté ou achèteront leur billet pour assister au GP de France 2020, auront le choix de l'utiliser le week-end du 11 octobre (si le public est accepté), au GP de France 2021 ou de se le faire rembourser. N'hésitez donc plus à réserver votre place !

Johann Zarco a repris la piste avec sa Panigale.

❱❱ LES PILOTES

Entre solidarité, entraînement… et développement e 14 mars, Maverick Vinales explique sur Twitter qu'il a chuté à l'entraînement en motocross, se blessant au dos, et qu'il vaut mieux rester à la maison que de prendre des risques. Une maxime qui va devenir à la mode ! Coincés chez eux, les pilotes n'ont guère mieux à faire que de se préparer physiquement et mentalement au retour des courses. Un programme pas si simple à tenir, comme le rappelle – toujours avec humour – Cal Crutchlow sur Speedweek fin avril : "Je mange un peu ce que je veux parce que nous courrons à nouveau dans deux mois au plus tôt. Si tu fais maintenant comme si c’était janvier, alors en août, tu seras HS ! Il est très difficile d'établir un plan d'entraînement sans aucun objectif ou date fixe. Mais laisseles faire, qu’ils s’épuisent complètement !" Outre l'entraînement physique, certains pilotes participent à divers programmes de dons ou de bienfaisance, tels Petrucci, Poncharal, Iannone, Zarco, Rossi… pour Two Wheels For Life, #RaceAgainstCOVID, #Tousenblanc, des établissements médicaux locaux... L'appel visiophonique de Rossi pour souhaiter le 102e anniversaire de sa supportrice "Nona Lina", qui a vaincu le coronavirus, restera dans les mémoires. Si Miller a eu tout le loisir d'éclater les appuis chez lui en Australie, ses adversaires doivent attendre début mai pour reprendre, peu à peu, le guidon – en supermotard, motocross ou même sur circuit. Côté Frenchies, Johann Zarco parvient à rouler à Alès puis en Catalogne avec sa Panigale V4S d'entraînement. Fabio Quartararo pilote quant à lui sa R1 GYTR au Castellet le 18 juin. Le premier constructeur MotoGP à ressortir les monstres est KTM. Les 27 et 28 mai, les RC16 fendent l'air du Red Bull Ring aux mains de Pol Espargaro et Dani Pedrosa. Aprilia et Bradley Smith leur emboîtent le pas à Misano. Les deux constructeurs, encore autorisés à développer jusqu'au 29 juin, retrouvent Ducati du 23 au 25 juin pour une séance privée à Misano.

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Coincés au box ? Plus pour longtemps ! Normalement...

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COVID MOTOGP I DOSSIER COVID-19

❱❱ LES GP VIRTUELS

armi les occupations de certains pilotes, les fameux GP virtuels vont prendre une place prépondérante. Le 29 mars, la première d'une série de cinq courses virtuelles, d'abord avec le jeu MotoGP 19, puis MotoGP 20, est organisée sur le tracé du Mugello. Le succès, dans des foyers en manque d'animation, est immédiat. Les pilotes, plus ou moins doués avec une manette, souvent coachés par les "pilotes" eSport officiels des constructeurs, apparaissent plus détendus que jamais, sans leur casque : ils attaquent, chutent et se vannent pour le plus grand plaisir des téléspectateurs les moins avertis, tandis que les amateurs de jeux vidéo (et ils sont nombreux !) trépignent à l'idée de se mesurer aux chronos de leurs idoles ! "Les courses eSports sont plus qu’un succès pour nous, explique le directeur de Dorna TV, Manel Arroyo, sur Speedweek.com. Nous avons réussi à créer quelque chose qui avait du sens pour nous, puisque nous avons de jeunes pilotes dont les hobbies sont de toute façon les jeux vidéo. D'autres séries ont essayé quelque chose de similaire, mais souvent, les principaux acteurs ne sont pas impliqués comme c'est le cas pour nous", se réjouit l'Espagnol. Au final, les plus assidus seront Pecco Bagnaia et Fabio Quartararo, qui ont participé à l'ensemble des 5 courses organisées en catégorie reine (les pilotes Moto2, Moto3 et MotoE ayant participé sporadiquement à ces week-ends de courses virtuelles). Mais Alex Marquez décroche la timbale avec le plus grand nombre de points marqués (malgré 4 participations seulement), devant Bagnaia, Maverick Vinales (4 courses), Quartararo et Marc Marquez (4 courses). Si Johann Zarco a préféré botter en touche, estimant qu'il lui aurait fallu gâcher un grand nombre de journées devant sa télé pour arriver au niveau, Jorge Lorenzo a créé la surprise en s'imposant lors de son unique participation (à Silverstone) : le Majorquin l'a gagnée, sa wild card !

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❱❱ UNE GESTION LOGISTIQUE ÉPIQUE est LE point dont nous n'aurons pas conscience en suivant les Grands Prix depuis chez nous (y compris les journalistes, interdits de GP dans un paddock en accès ultra-restreint) mais qui prendra une importance capitale dans la réussite de cette saison 2020 : la gestion logistique, outre un protocole très strict mis en place par Dorna, s'annonce épique ! Première étape : le rapatriement des motos. Suite aux tests de Losail, qui se sont déroulés du 22 au 24 février derniers, toutes les machines de la catégorie reine ont été stockées dans un hangar climatisé et sécurisé de la Qatar Airways à l’aéroport de Doha. DHL les a ensuite rapatriées en Espagne, avant de les transporter dans un hangar tenu secret en Catalogne. Certaines équipes (comme Tech 3) ont choisi de les récupérer pour une petite révision, d'autres ont préféré les laisser sur place en attendant leur expédition pour le premier GP. Si les motos sont donc en Europe, prêtes à rejoindre Jerez, quelques pilotes sont encore "coincés" très loin, tels Brad Binder (Afrique du Sud), Cal Crutchlow (Californie), Takaaki Nakagami (Japon) et Jack Miller (Australie). Et il ne leur faut pas trop traîner à entreprendre leur périple, annoncé plus complexe que jamais en fonction des différents protocoles en vigueur dans chaque pays.

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La championne du monde (ci-dessus) en attente de ses pneus : la sélection des références à apporter s'annonce complexe pour Michelin.

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ID19 Les GP vont retrouver une saveur perdue, avec des déplacements entre les circuits en voiture, motorhome, camion...

Et n'oublions pas les staffs, notamment des usines japonaises… Le pays du soleil levant est à ce jour totalement réfractaire à l'idée de laisser sortir ses citoyens, et encore plus à celle de les laisser revenir après un voyage en dehors de ses frontières, tandis que l'espace Schengen limite à 90 jours consécutifs (dans une période de 180 jours) la présence des étrangers sur son sol. Cassetête… L'idée d'un système de type "Mission control", semblable à celui en vigueur en Formule 1 et dans lequel des groupes d'ingénieurs interagissent avec leur box depuis l'usine, a été évoqué, mais ne semble pas faire l'unanimité. Autre point crucial : la production des pneumatiques sur un planning très serré et pour des circuits où les conditions météo seront parfois bien différentes des conditions usuelles lors d'une saison normale. Il faudra donc avoir "du nez" pour concevoir et apporter les bonnes références sur chaque circuit, mais chez Michelin (comme chez Dunlop pour les catégories Moto2/ Moto3), on se dit prêt à relever le défi. Enfin, une fois tout le monde réuni à Jerez pour le coup d'envoi, les GP vont probablement retrouver une saveur perdue avec des déplacements entre les circuits en voiture, motorhome, camion... et non plus en avion, pour la totalité du paddock. Comme à l'époque du Continental Circus. Toujours voir le bon côté des choses ! •

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Vérifier la pression des systèmes de rappel pneumatique de soupapes : une étape cruciale après le "déballage".

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MOTOGP I DOSSIER COVID-19

Ce n’est pas la première fois que des événements d’ampleur mondiale affectent le MotoGP. Guerre, politique et coronavirus… Les GP ne sont pas à l’abri du monde réel.

RATTRAPÉ PAR LE MONDE RÉEL ! PAR Mat Oxley TRADAPTATION Maxime Pontreau PHOTOS PSP Swiderek & Archives FIM / Maurice Büla

a compétition moto, comme d’autres sports, sont des bulles, des microcosmes permettant aux compétiteurs et aux fans de s’investir dans une chose magnifique mais, en définitive, plutôt futile. Lorsque l’on travaille dans le paddock durant un weekend de MotoGP, il n’est pas rare d’oublier le reste du monde. Une seule chose compte : qui fera mousser le Prosecco sur le podium à 15 h dimanche ! Pourtant, le reste du monde existe bel et bien. Dans les années 1960, le premier ministre britannique Harold Macmillan, à la question de savoir quel élément a le plus de chance de faire dérailler un gouvernement, répond : "Les événements, mon garçon, les événements". C’est exactement ce qui va arriver au championnat du monde MotoGP 2020. Il va se faire dépasser par les événements. Au fil des décennies, le MotoGP a remarquablement bien esquivé les frondes

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et autres problèmes du monde réel. La guerre, le terrorisme, la politique et l’économie affectent tout ce qui les entoure, mais jusqu’à présent, le championnat avait été suffisamment chanceux pour éviter les balles perdues. L’annulation de la course MotoGP lors du week-end d’ouverture de la saison 2020 au Qatar ne pouvait être que le début de l’épopée Coronavirus vs MotoGP. En réalité, ce n’est pas la première fois que le championnat du monde perd ses premiers week-ends de course. Il y a 30 ans, la manche d’ouverture de la saison 1980 au Venezuela est annulée pour des raisons politiques : des incertitudes créées par le changement du gouvernement national. Quant au deuxième GP, il sera la victime d’une très mauvaise météo. Au début du mois d’avril 1980, le paddock voyage vers le Salzburgring, en Autriche, où il trouve le circuit enfouit sous 90 cm de neige. C’est

pourquoi la saison ne débutera que le 11 mai à Misano. A l’inverse, en 1939, la saison se termine une course plus tôt pour des raisons plus sérieuses. Les championnats 250cc, 350cc et 500cc doivent se clôturer le 4 septembre à Monza mais la veille, la Grande-Bretagne déclare la guerre à l’Allemagne. La Seconde Guerre Mondiale éclate.

LE MOTOGP DÉJOUE L’HISTOIRE

Durant les décennies qui vont suivre la Seconde Guerre Mondiale, il y aura de nombreuses guerres, des affrontements politiques et de graves dangers. Mais curieusement, les Grands Prix moto continuent. Lors de l’été 1961, alors que le monde est au bord de l’apocalypse nucléaire, le paddock voyage en Allemagne de l’est pour le GP du Sachsenring, quelques semaines seulement après la construction du Mur de Berlin. En 1972,

Dimanche 28 mars 1982 à Buenos Aires : Kenny Roberts, Freddie Spencer et Barry Sheene font la course... quatre jours avant le début de la guerre des Malouines !

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les heurts en Irlande du Nord provoquent l’annulation de l’Ulster GP à Dundrod, qui a pourtant eu lieu les années précédentes malgré le chaos et les éruptions de violence à l’intérieur et aux alentours de Belfast. En 1971, des semaines après le GP, le bâtiment principal du circuit a d’ailleurs été réduit en cendres par une bombe terroriste. Le championnat du monde va frôler la débâcle en 1982. L’ouverture de la saison en Argentine se déroule juste à temps, quatre jours avant que le pays hôte n’envahisse les îles Malouines, propriété de la Couronne, et ne déclenche la guerre des Malouines. Le paddock part juste à temps de Buenos Aires, même si les personnes embarquées à bord du vol Aerolinas Argentinas pour Londres n’arriveront pas à destination. La compagnie ne vole que jusqu’à Madrid, craignant la confiscation de son avion en Grande-Bretagne. La raison la plus fréquente derrière l’annulation d'un GP reste la finance. Mais si l’impact direct est le même pour tout le

monde, une telle annulation peut avoir diverses conséquences. Ainsi, lorsque l’avant-dernière épreuve de la saison 1998, au Brésil, est annulée à la dernière minute – car les propriétaires du circuit n’ont pas pris la peine de re-surfacer la piste – Valentino Rossi perd sa chance de remporter le titre 250cc dès sa première saison dans la catégorie. Les pires événements de ces dernières années vont surtout toucher le GP du Japon. Le monde réel frappe de plein fouet le round de Motegi en 2010 et 2011. Le réveil d’un volcan islandais repousse la course de six mois en 2010, les avions restant cloués au sol en raison des fumées de l’éruption. Un an plus tard, la catastrophe de la centrale nucléaire de Fukushima repousse l’épreuve pour une période similaire. Malgré la présence des teams Moto2 et Moto3, le GP du Qatar 2020 prend des airs surréalistes, son paddock étant privé des vedettes du championnat, telle la tête d’affiche d’un concert abandonnant

la scène en plein show, laissant ses fans se contenter de la première partie. La crise du coronavirus démontre à nouveau aujourd’hui que le microcosme des GP n’est pas invulnérable. Les temps sont différents mais de toute évidence, ce qui se passe dans le monde réel affectera toujours la vie du paddock et les actions sur la piste. •

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INTERVIEW

LUCIO CECCHINELLO PERSPECTIVES

On ne présente plus LCR Honda, l'une des six équipes indépendantes (y compris Gresini) du MotoGP. Pilote en GP125 de 1993 à 2003, son patron Lucio Cecchinello, réputé pour sa vision globale du jeu, revient avec nous sur cet incroyable épisode coronavirus… et le monde d'après en GP. PAR Tommy Marin - PHOTOS LCR, PSP Swiderek/Jagielski & Monster Energy

ucio, quand as-tu compris que notre petit monde allait s'arrêter ? Le Monde vient de vivre une période dramatique et inimaginable. Quand nous sommes partis pour les tests en Malaisie, fin janvier, la situation était déjà très délicate en Asie. Elle a dégénéré pendant les tests du Qatar, fin février, et quand nous avons appris le risque d'annulation de ce GP, nous imaginions attaquer la saison en avril aux USA. Mais ça a encore empiré. Nous avons continué à reprogrammer les avions, les hôtels… C'était un gros travail logistique sans aucune certitude. En chemin vers les tests MotoE de Jerez, du 10 au 12 mars, mon équipe et moi portions des masques dans l'avion et tout le monde nous regardait comme si nous étions des imbéciles. A cet instant, l'Italie était le scandale de l'Europe. Deux semaines plus tard, la situation avait dégénéré dans toute l'Europe.

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Comment s'est déroulée cette période de confinement pour toi et ton équipe ? Notre team regroupe douze nationalités. Les restrictions étaient donc différentes dans chaque pays, selon les stades de l'épidémie. Nous sommes restés en contact grâce aux logiciels de visio. Personnellement, j'ai passé beaucoup de temps dans les ateliers LCR, situés en République de Saint Marin, afin de m'occuper de choses dont je n'ai pas le temps habituellement. LCR est un team, mais aussi une entreprise. Sa pérennité estelle mise en danger ? Comme beaucoup d'entreprises, cette crise nous affecte. Une partie de nos revenus est liée au sponsoring. Or, on ne roule pas… Il est possible que nous éprouvions des difficultés à terminer la saison. Dans ce cas, nous devrons utiliser notre réserve. J'ai toujours essayé de mettre de l'argent de côté pour les moments difficiles : un sponsor qui ne paye pas, une très grosse chute qui détruit complètement la moto… Je ne sais pas si cette réserve sera suffisante, mais je ne vois pour l'instant pas de risque de fermeture de l'activité. Évidemment, la situation sera peut-être plus critique pour d'autres structures, plus petites, notamment en Moto2 et Moto3.

le 1er juin, tout le monde est réintégré, avec des salaires revus à la baisse tant qu'il n'y a pas de travail, forcément. Mon plus gros souci concerne le personnel de l'hospitality, que nous n'aurons pas sur les GP – au moins dans un premier temps. Cela concerne une dizaine de collaborateurs. J'ai espoir que les gouvernements acceptent vite de rétablir les GP en portes ouvertes. Quel soutien as-tu reçu de Dorna ? Dorna nous donne chaque année un certain montant d'argent, en rétribution de notre participation à son championnat. Comme il n'y avait pas de courses, Dorna a initialement stoppé cette contribution. Mais Carmelo Ezpeleta a compris les difficultés pour les équipes et a donc réglé une avance sur cette contribution, recalculée en fonction du nombre de courses. C'est formidable, car il nous a aidés à soutenir les énormes frais engagés pour préparer la saison – sachant que les compagnies aériennes ne sont pas en condition de rembourser nos billets et qu'elles font des avoirs, mais s'il n'y pas de GP d'Argentine, ces billets seront perdus – et pour continuer à payer nos salariés et collaborateurs. Maintenant, nous devons remettre en route les discussions avec les sponsors, pas forcément intéressés par le marché européen où va se dérouler la grande majorité, voire la totalité de cette saison 2020. Ça va être compliqué. Des embrassades plus franchement au goût du jour...

As-tu été contraint de licencier du personnel ? Heureusement, non. Les mesures du gouvernement m'ont permis de mettre en place le chômage partiel pour mes salariés – qui représentent à peu près la moitié de mes 50 collaborateurs. Heureusement, les freelances ont d'autres revenus, je suis moins préoccupé pour eux que pour mes salariés. Depuis

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Lucio veille sur son équipe... et ses pilotes.

Tu es réputé pour être un propriétaire de team imaginatif. Astu déjà établi une nouvelle stratégie de sponsoring ? Ça ne va pas être facile, mais nous allons essayer de continuer à innover pour donner une valeur ajoutée à ces contrats. Dans les années 1970/80, un sponsor n'avait en contrepartie de son investissement que son logo sur les motos. Puis sont arrivées les activités en hospitality. Puis ce que nous appelons l'activation, ou la mise à disposition des teams pour participer à des événements. La prochaine étape que l'on imagine sera de fournir aux entreprises un contenu spécifique et prêt à l'emploi pour leurs réseaux sociaux, brandés LCR. La solution du championnat à huis clos avec, souvent, deux courses par circuit, te semble-t-elle bonne ? Absolument. Compte tenu de la situation générale, nous n'avons pas d'autre choix. Alors, oui : le fait d'avoir deux courses sur un

Une équipe, deux couleurs pour les RC-V de Cal et Taka.

même circuit va peut-être donner un petit avantage aux pilotes et motos plus favorables à son tracé, le fait d'avoir sept courses en Espagne va probablement inciter les pilotes espagnols à donner leurs 101 % chez eux… Mais je pense qu'il n'y a aucun intérêt à créer des histoires maintenant. Nous vivons une situation d'urgence, nous devons l'accepter. Faire comme on peut, pas comme on veut. On parle beaucoup "du monde d'après", qui doit pencher vers plus d'écoresponsabilité : penses-tu que le sport moto de haut niveau doit et va changer de visage ? Ça, c'est une thématique très sensible, sérieuse et large. Pour rester focalisé sur le MotoGP, quelque chose doit – et va – être fait. Dans combien de temps ? Tout dépendra de la situation économique du championnat, car un changement du règlement technique implique des coûts. Il va falloir attendre que l'économie reparte. Je rêve d'une catégorie avec des moteurs 4-temps 500cc turbo et hybrides, à condition que toute la partie turbo et toute la partie hybride soient fournies par un fabricant unique afin d'éviter des investissements colossaux pour les usines – au moins dans un premier temps. Il est déjà important que Dorna se soit ouvert aux motos électriques avec le MotoE. Un sport articulé autour de moteurs à combustion tournant en rond sur un circuit est vu comme quelque chose de grotesque par une part grandissante de la population occidentale. Penses-tu que le MotoGP doit travailler sa communication sur ce point ? Dorna fait son travail. Ce n'est pas à elle de rappeler aux médias que les 500cc 2-temps avaient besoin de 32 litres d'essence pour faire une course quand on en a aujourd'hui besoin de 21, que l'on avait auparavant accès à une quantité illimitée de pneus et qu'elle est aujourd'hui contingentée, que le nombre de moteurs était illimité et qu'il est aujourd'hui limité à 7, qu'avec les anciens 2-temps, on changeait de piston tous les 200 km quand ils durent maintenant 2500 km…

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Savoir communiquer : un élément prépondérant pour un team indépendant.

En gros, tu me dis que c'est à nous de faire notre travail… [rires] Exactement, les médias doivent valoriser cette diminution de l'impact écologique de notre sport et sa contribution à la production de machines de série plus propres. Il n'est pas question que de réduction des coûts. Il est par exemple totalement inacceptable que le MotoE soit si mal considéré par les médias : il y a une superbe vitrine, c'est le début de quelque chose d'important, et très peu de monde en parle. Le problème étant que les passionnés de moto sont plutôt réfractaires à cette catégorie électrique, et que cette catégorie doit selon moi surtout permettre de persuader les réfractaires à la moto tout court que les lignes sont en train de bouger… Je comprends le problème : les lecteurs de presse moto sont de vrais motards, qui n'ont pas envie de lire des histoires sur la moto électrique. D'un autre côté, il y a une partie de la société, surtout les jeunes, pour qui cela compte. Je vais te dire une chose : mon neveu a eu 14 ans. Je lui ai fait cadeau d'un scooter, et je lui ai donné le choix entre un thermique et un électrique. Il a choisi sans hésiter l'électrique, car il se sent ainsi plus responsable dans son choix. C'est parce qu'à l'école, il apprend ça. Les nouvelles générations sont beaucoup plus sensibilisées à l'écologie que nous ne l'avons été. Donc, nous devons préparer notre sport aux futurs consommateurs. Notre sport doit bouger. Il faut voir aussi comment va évoluer l'industrie. En automobile, les grands constructeurs passent directement à l'électrification totale, sans passer par l'hybride. Il faut donc savoir où le 2-roues va se positionner, car les constructeurs ne peuvent pas se permettre de développer des technologies qui pourraient ne jamais être demandées sur les marchés. •

Les médias doivent valoriser cette diminution de l'impact écologique de notre sport et sa contribution à la production de machines de série plus propres.

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LA GUERRE À L’ÂME DU MOTOGP La Course consiste-t-elle à développer des machines dans l’ardeur de la compétition ? Ou n’est-elle qu’un spectacle, un divertissement ? Les usines et la Dorna, propriétaire du MotoGP, se sont affrontées sur cette question pendant une décennie. Une discorde dont a résulté le plus important remaniement des règles de l’Histoire des Grands Prix. Retour sur ce bouleversement. PAR Mat Oxley - TRADAPTATION Maxime Pontreau - PHOTOS PSP Perec/Swiderek & constructeurs

Départ du dernier GP sous l'ère du tabac, le 29 octobre 2006 à Valence.

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affrontement quant à la définition de l’âme du MotoGP va naître de deux événements précis, il y a plus de dix ans. Le 29 octobre 2006 se dispute la dernière course MotoGP sous l’ère du sponsoring des marques de tabac avant leur interdiction. Du jour au lendemain, le sport moto se voit privé de sa principale source de revenus. Puis, le 15 septembre 2008, la banque américaine Lehman Brothers fait faillite. Un événement globalement considéré comme le jour où la crise financière mondiale a réellement débuté [avant de renaître de plus belle aujourd'hui…]. Ces deux journées vont s'avérer catastrophiques pour le MotoGP. L’argent du tabac a fait tourner les roues plusieurs décennies durant : Marlboro, Camel, Gauloises, Rothmans, Chesterfield, Lucky Strike, Fortuna, Gitanes, HB, West, Parisienne et tant d’autres encore. Aucune autre industrie n’était prête à dépenser autant d’argent dans le sport moto : le tabac, déjà interdit de publicité conventionnelle, y trouvait un vecteur de communication alternatif dont les autres secteurs n'avaient pas besoin. La perte de ce lucre malsain est un coup dur pour le MotoGP : certaines équipes rétrécissent, d’autres disparaissent. Puis la crise financière mondiale frappe. Partout dans le monde, les bénéfices chutent, à tel point que Kawasaki et Suzuki stoppent leurs projets MotoGP. En 2011, il n’y a que 17 pilotes sur la grille de départ [hors wild card et avant le drame de Sepang, qui allait coûter la vie à Marco Simoncelli] et parfois seulement dix à l’arrivée des courses. Le MotoGP se tient au bord de l’abîme. Logiquement, Dorna tire la sonnette d’alarme. Son PDG Carmelo Ezpeleta se lance alors dans une campagne d’austérité afin de réduire les coûts et éviter le départ d’autres équipes. Il attaque également le chantier de la réforme de son règlement technique, dans l’objectif de rendre les courses plus compétitives et plus attrayantes pour les fans et d'accroître les revenus du MotoGP. Dans cette entreprise, son principal homme de main se nomme Corrado Cecchinelli, ancien directeur technique de Ducati, embauché par Dorna en tant que directeur de la technologie du MotoGP. Le but recherché par les deux hommes est de res-

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LES MESURES POUR LA RÉDUCTION DES COÛTS

2008 La dernière évolution de la ZX-RR, avant que Kawasaki ne se retire du MotoGP à l'issue de cette année de crise.

treindre la technologie embarquée par les motos et par conséquent l’écart de performances entre les avant-postes et le fond de grille. Une très bonne idée sur le papier. Sauf pour les constructeurs. Ducati, Honda, Yamaha et leurs rivaux participent au championnat pour promouvoir leur marque et développer leur technologie. Pire, Ezpeleta n'attend pas seulement des usines qu’elles arrêtent de travailler si dur pour améliorer leurs machines, il souhaite également que l’intégralité de la grille dispose de motos aussi rapides que les précieuses versions factory. Au total, cette guerre va durer une décennie – de 2007 à 2016.

UN AIR DE RÉVOLUTION

A ses côtés, Dorna peut compter sur le soutien de l’association des teams – l’IRTA –, bien consciente également de la dure réalité. "Nous devons comprendre que le temps où les Grands Prix étaient un laboratoire d’ingénierie n’est pas révolu, mais ce rôle est moins important qu’auparavant, déclare à l’époque le pré-

CYLINDRÉE MOTEUR I 800cc (au lieu de 990cc) POIDS MINIMUM I 148 kg ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 18 / Ar. 22 ESSAIS LIBRES / QUALIFICATIONS I FP1 / FP2 / FP3 / QP (60 min chacune) TESTS HIVERNAUX I 22 jours par pilote

2008

sident de l’IRTA et patron du team Tech 3, Hervé Poncharal. Nous sommes un sport et le sport ne peut vivre que s'il y a du spectacle. C’est donc du showbusiness." Du côté des usines, on trouve des ingénieurs tel que Jeremy Burgess, chef mécanicien et expert es-prototype – des minutieuses 500cc 2T de Mick Doohan aux MotoGP 4T bardées d’électronique de Valentino Rossi – trois décennies durant. "Je suis très énervé concernant toutes les nouvelles règles, lâche alors l’Australien. Quiconque possède une once d’intelligence sait que moins il y a de règles, mieux c’est. Je suis agacé car les décideurs du règlement semblent vouloir limiter le développement et les tests, et Peau de chagrin en 2011, avec 17 pilotes au départ de chaque GP. Alors en cas de strike…

ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 18 / Ar. 12 TESTS HIVERNAUX I 12 jours par pilote

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Burgess – ici avec Doohan en 1999 – adorait la liberté technique des GP500.

semblent plutôt satisfaits de monter une pantomime ou un soap opera à 14 h un dimanche sur deux. Ce n’est pas ce que j’appelle des courses de Grand Prix, c’est davantage des courses de Superbike." Burgess ne se trompe pas concernant le déluge de nouvelles règles. Lors de l’ultime saison des 500cc, le règlement technique compte 48 pages. En 2008, il en dénombre 144. Aujourd'hui, le règlement technique s’étire sur 370 pages. Durant cette bataille, les pilotes se tiennent principalement au centre des affrontements. Ils essuient les dommages collatéraux, en proie aux échanges de tirs. Plusieurs vont exprimer leur opinion haut et fort, sans avoir le pouvoir de Dorna et des usines. Les premiers coups de feu sont tirés à Misano en septembre 2007, lors du treizième rendez-vous de la saison inaugurale des 800cc. Le problème ? Les pointus 4-cylindres, bien moins coupleux que les 990cc qu'ils remplacent, ont créé des courses horriblement processionnelles, au point que des milliers de fans éteignent leur tv en plein GP. Moins de téléspectateurs, moins de revenus pour Dorna, moins de sponsors pour les teams : Ezpeleta entre alors en action. "Le championnat doit être compétitif, nous ne pouvons pas continuer comme ça", annonce-t-il à Misano. Le quadruple champion du monde MotoGP Valentino Rossi ne peut qu’acquiescer. "Ce n’est pas le spectacle que les fans de moto méritent, ajoute l’Italien le même weekend. Notre sport ressemble de plus en plus à la Formule 1."

La première cible d’Ezpeleta : les pneus. Bridgestone a pris une longueur d’avance quand les pilotes Michelin ont du mal à suivre le rythme, ce qui ne fait qu’empirer les courses. Sa réponse ? Un championnat monomarque dans lequel tous les pilotes utilisent les mêmes gommes. En théorie, cela devrait produire des courses plus compétitives et excitantes. La bataille des manufacturiers va encore durer une année, jusqu’au GP du Japon 2008, quand Dorna annonce son nouveau plan pour 2009. Durant ces mois, les relations vont devenir glaciales entre Dorna, les pilotes, les usines et les manufacturiers. Ceux opposés à cette décision considèrent le monomarque comme une spécificité bonne pour des courses de motos de série, inadaptée au meilleur championnat moto et à ses machines prototypes, où la compétition entre les manufacturiers a tant contribué aux progrès des pneumatiques. La plupart des pilotes Bridgestone sont contre ce changement, ne souhaitant pas perdre leur avantage. A l’inverse, les pilotes Michelin y sont favorables, fatigués de se faire continuellement battre. "Je pense que les choses devraient rester comme elles sont, déclare Casey Stoner, champion en titre 2007 sur sa Ducati

POIDS MINIMUM I 150 kg ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 8 / Ar. 10 ALLOCATION MOTEUR I 6 blocs JANTES I deux largeurs à l’avant, une à l’arrière

équipée de Bridgestone. Cette catégorie concerne des prototypes. Il n’est pas question de n’importe qui roulant sur des machines de production, donc les pneus devraient également être des prototypes." Certains pilotes vont même changer de camp durant cette escarmouche. En 2007, la Yamaha YZR-M1 de Valentino Rossi est équipée de Michelin. Bridgestone est donc convaincu que l’Italien fait pression pour la règle du monomarque : "Je pense que le pouvoir de Rossi est très important sur M. Ezpeleta. Je crois qu’il en est la principale raison", fulmine Hiroshi Yamada, patron de Bridgestone en MotoGP, qui s'est fait une publicité énorme en battant Michelin et Dunlop. Cependant, après être passé chez Bridgestone en 2008, Rossi n'est pas heureux de voir l’instauration du monomarque confirmé. "Honnêtement, je ne suis pas en faveur de ce changement", lâche-t-il. Dorna remporte donc la première bataille de cette guerre. Mais il en reste un grand nombre à mener.

HARO SUR L’ÉLECTRONIQUE

Dorna va interdire l’électronique sur-mesure des usines, l’électronique contrôlée par GPS, les suspensions pilotées et le KERS (système de récupération de

Misano 2007 Le MotoGP prend l'eau… et Ezpeleta annonce sa volonté de tout révolutionner.

Interdiction de la suspension gérée électroniquement

BOÎTE DE VITESSES I limitation à 2 rapports de transmission pour chaque vitesse et 2 rapports de transmission primaire

ESSAIS LIBRES / QUALIFICATIONS I FP1 / FP2 / QP (60 min chacune) TESTS I 12 jours par pilote par saison

FP1 / FP2 / FP3 (45 min chacune) / QP (60 min)

2010

ESSAIS LIBRES / QUALIFICATIONS I

2011

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Stoner sur Bridgestone vs Rossi sur Michelin : ça, c'était avant !

l’énergie cinétique). Le promoteur va également limiter l’allocation de pneumatiques (de 40 pneus autorisés par week-end à 20 environ) et de moteurs (d’un nombre illimité à cinq blocs seulement par saison). Les essais libres seront réduits (passant de quatre à trois heures par week-end de course), tout comme le nombre de tests (la norme de 25-30 jours par an est désormais de 14 jours autorisés). Dorna va également introduire des MotoGP animées par des moteurs de grande série, hausser la limite de poids minimum de 148 à 160 kg et transformer la séance qualificative de 60 minutes en deux sorties éclair de 15 minutes conçues pour la télévision. Elle milite pour la limitation du régime moteur, la machine unique (une moto par pilote) et une interdiction des freins carbone et des accélérateurs à commande électronique [ride-by-wire], mais ces suggestions ne vont jamais intégrer le règlement technique. Dans l’ensemble, pilotes et usines n’aiment pas ces changements, qu’ils considèrent comme un nivellement par le bas des Grands Prix. Casey Stoner hait tellement les idées de Dorna qu’elles le

poussent à prendre une retraite anticipée. Après le duel concernant l’arrivée d’un manufacturier unique, les deux principaux conflits vont porter sur l’introduction des CRT, motos à coûts réduits propulsées par des moteurs de série, et d’une électronique unique pour tous. Ezpeleta évoque pour la première fois les CRT en juillet 2009 : "Le coût de location d’une MotoGP auprès d’une usine est extrêmement cher et ne nous permet pas d’avoir plus de 18 ou 19 motos sur la grille. C’est pourquoi nous avons proposé que les équipes indépendantes utilisent des moteurs 1000cc de série modifiés afin d’étoffer la grille de départ." Les machines CRT font leur apparition en 2012 et remplissent rapidement la grille, du moins ses dernières places. Ces machines sont pour la plupart fabriquées par des constructeurs de châssis comme Suter ou FTR et utilisent des moteurs Superbike Aprilia, BMW, Honda et Kawasaki. Dorna leur autorise l’utilisation de plus de carburant et d’un plus grand nombre de moteurs dans l’espoir de les rendre compétitives. C'est un échec. Les CRT sont tellement lentes que certains pilotes

Suppo et Nakamoto souriaient moins quand Bridgepoint a racheté le WorldSBK.

MotoGP les considèrent dangereuses. Reste que ces motos font leur job : empêcher le MotoGP d’imploser pendant que Dorna recherche frénétiquement des solutions à long terme. Les machines CRT donnent également à Ezpeleta un nouveau pouvoir capital : pour la première fois en plusieurs décennies, les Grands Prix n’ont pas besoin des usines. Un argument de poids lors des négociations avec la MSMA (l’association des constructeurs du championnat), car il dispose finalement de ses propres

2012 CYLINDRÉE MOTEUR I 1000cc (au lieu de 800cc) NOMBRE DE CYLINDRES AUTORISÉS I 4, ni plus ni moins ALÉSAGE MAXIMAL I 81 mm Moteurs de production autorisés pour les CRT

POIDS MINIMUM I 157 kg LIMITATION EN CARBURANT I 21l (24l pour les CRT) ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 9 / Ar. 10 ALLOCATION MOTEUR I 6 blocs (12 pour les CRT) ALLOCATION PNEUMATIQUE EN TESTS I 240 pneus par pilote par saison

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POIDS MINIMUM I 160 kg ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 9 / Ar. 11 ALLOCATION MOTEUR I 5 blocs (12 pour les CRT) ESSAIS LIBRES / QUALIFICATIONS I FP1 / FP2 / FP3 (45 min chacune) / FP4 (30 min) / QP (2 x 15 min)

2013

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En 2012 naît le CRT, sous-catégorie des débuts de Petrucci (n°9) et de la fin de carrière de De Puniet (n°14) en GP. Ici en 2013 à Laguna Seca.

2016 L'ECU unique prend place sous les nez de carénage.

moyens pour remplir la grille. Désormais, il peut attaquer. "Finalement, toutes les machines du MotoGP seront des CRT", lance-t-il, inspirant la crainte des pontes des usines, soudain conscients que leur capacité à contrôler le MotoGP – car ils possédaient tous les pions du jeu – a disparu. Certains patrons d’usine vont se déchaîner, mais cela aura peu d’impact. "Je pense que les CRT sont ridicules, lance le team manager Ducati Livio Suppo. Nous sommes une catégorie prototype ; nous avons besoin de moteurs prototypes. Parfois, j’ai l’impression que nous sommes un peu schizophrènes." De son côté, Ezpeleta sait exactement à quelle fin il souhaite utiliser son nouvel atout ; pour le plus important des combats : l’électronique. La plupart des pilotes partagent son analyse sur ce point. "Les MotoGP développent tellement de puissance que rouler sans contrôle de traction pourrait être catastrophique. Il y aurait de violents highsides, affirme Stoner. Mais je pense qu’il devrait y avoir une limitation de l’électronique. Un ECU capable de définir la puissance du contrôle de traction de chacun serait fantastique." C’était le plan : réduire la technologie de l’électronique afin de rendre le contrôle aux pilotes et assurer des courses plus spectaculaires. "Les motos sont désormais tellement

douces qu’elles ressemblent à des voitures, estime le champion du monde 2006 Nicky Hayden. Ça incite les gens qui regardent à se dire : 'Ouais, je pourrais en faire autant." Et Rossi d'abonder en ce sens : "Le problème est que les motos sont trop parfaites aujourd’hui, donc le rythme de tout le monde est très régulier durant toute la course et il est difficile de surpasser les autres pour les dépasser. J’aime piloter ces motos, mais si vous voulez de meilleures courses, nous avons besoin d’un ordinateur de bord moins puissant de 50 % ou 60 %." Les seuls opposants au nivellement de l’électronique sont les constructeurs. Après tout, l’électronique est alors le plus important domaine d’évolution technologique du motocyclisme. La dernière chose souhaitée par les usines est de voir leur R&D limité. Honda mène la plus grosse opposition. Lors du GP de République tchèque en 2012, le viceprésident du HRC Shuhei Nakamoto menace de quitter le MotoGP pour le Superbike Mondial si Dorna poursuit son plan pour l’adoption d’un ECU unique. "S’il n’y a qu’un seul ECU en MotoGP, l’intérêt de Honda se tournera vers le World Superbike ; Ciao Carmelo ! ricane Nakamoto. Nous devons continuer à développer l’électronique. C’est très important pour Honda." Mais en octobre

2014 LIMITATION EN CARBURANT I 20l (24 pour les Open) ALLOCATION MOTEUR I 6 blocs (12 pour les Open) ECU officiel obligatoire pour les MotoGP ECU + logiciel officiels obligatoires pour les Open ALLOCATION PNEUMATIQUE EN TESTS I 120 pneus par pilote par saison

2012, un coup de chance confère à Ezpeleta encore plus de poids. Bridgepoint [la société d’investissements propriétaire de Dorna] achète le championnat du monde Superbike, ne laissant à Honda et aux autres usines aucune échappatoire. C’est ainsi que les usines vont accepter d’utiliser du matériel électronique spécifique à partir de 2014, puis un logiciel unique dès 2016. Cependant, les usines n’ont pas perdu tous leurs combats contre Dorna. Durant toutes ces tractations pour une électronique unique, Dorna va abandonner la règle d’une moto par pilote, la limitation du régime moteur ainsi que d’autres propositions. En 2014, les CRT sont remplacées par les Open, des protos moins performants comme la Honda RCV1000R, loués ou vendus aux équipes privées. Ces machines sont plus rapides que les CRT, mais de peu... Lorsque le logiciel unique Magneti Marelli fait son apparition en 2016 [en même temps que les pneus Michelin remplacent les Bridgestone], les Open ont disparu et le MotoGP est redevenu une catégorie homogène. Dorna a gagné la bataille et, à partir de cet instant, s’implique surtout à recadrer les choses, en interdisant notamment les IMU [centrale inertielle] d'usine en faveur d’une IMU unique et en contrôlant la nouvelle course à l’armement

2015 POIDS MINIMUM I 158 kg ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 10 / Ar. 11 TESTS I 15 jours par pilote par saison

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RÉTROSPECTIVE I MOTOGP Après les CRT, les Open. Les Américains Hayden (n°69) et Edwards (n°5) vont eux aussi clore leur carrière en GP à leurs guidons.

aérodynamique. L’explosion en matière de recherches aéro et le développement des aides mécaniques au pilotage sont les "dégâts collatéraux" du logiciel unique et sa technologie plus limitée en matière d’anti-cabrage, launch control, antipatinage, etc. Dorna ne doit pas en être surprise : en fermant une voie de développement, vous en ouvrez généralement une autre. Ainsi, l’appui aérodynamique frontal fait le job de l’ancien logiciel anti-cabrage, les systèmes mécaniques de holeshot remplacent l’aide électronique au départ et le tout nouveau dispositif Ducati de réglage de la géométrie assiste le contrôle de traction en sortie de virage. Dorna a travaillé tellement dur pour museler le développement aéro que ce chapitre spécifique est passé de 47 lignes dans le règlement technique 2015 à 166

lignes dans celui de 2020. Le prochain grand objectif d’Ezpeleta est d’étendre le calendrier tout en réduisant le programme de tests. Son argument principal reste le même : pourquoi tester afin de développer les motos quand cela coûte de l’argent alors que l'on peut proposer plus

de spectacle qui, lui, génère des revenus ? Entre 2005 et 2018, le championnat MotoGP comptait 17 ou 18 courses. En 2019, il est passé à 19 manches. L’année 2020 devait comprendre 20 épreuves. Certes, c'est compromis. Mais la guerre, sur ce point, ne fait que commencer ! •

Le chemin fut semé d'embûches, mais le MotoGP est (re)devenu un grand spectacle. La bataille d'Assen 2018 restera culte.

2016 Retour à un seul type de machine MotoGP POIDS MINIMUM I 157 kg LIMITATION DU CARBURANT I 22l ALLOCATION PNEUMATIQUE I Av. 10 / Ar. 12 ALLOCATION MOTEUR I 7 blocs / ECU + logiciel officiels obligatoires TESTS I 14 jours par pilote par saison

2017 Une seule évolution aérodynamique autorisée par pilote en cours de saison

2019 Centrale inertielle [IMU] officielle obligatoire

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MOTOGP I DOSSIER

PODIUM AU

CARRÉ

LES RÉFÉRENCES

DEPUIS 2000

PILOTE ❱❱ Valentino Rossi, fort de 7 titres depuis l'année de naissance de votre magazine… et toujours sur la grille ! MOTO ❱❱ Honda RC-V, la plus couronnée de succès avec ses 12 titres constructeur et 10 titres pilote.

Concentrez-vous sur la catégorie ultime du sport moto. Considérez la période 2000-2020 puis l'instant T. Prenez les deux pilotes et les deux motos les plus performants selon chacun de ces rapports au temps : vous obtenez notre podium au carré, quatre références pour quatre histoires passionnantes !

Mention spéciale pour

Jorge Lorenzo (3 titres), Casey Stoner (2 titres), Nicky Hayden (1 titre) et Kenny Roberts Jr (1 titre), seuls autres pilotes à avoir atteint le graal en dehors de Rossi et Marquez durant l'existence de Sport-Bikes. Mais aussi pour Yamaha, dont la YZR-M1, avec 7 titres pilote et 5 titres constructeur, vient après la RC-V au rang des références depuis 2000 – sans oublier le sacre constructeur conquis cette année-là avec la YZR-500 !

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LES RÉFÉRENCES

EN 2020

PILOTE ❱❱ Marc Marquez, le nouveau Roi avec 6 sacres décrochés en 7 tentatives depuis 2013. MOTO ❱❱ Ducati Desmosedici, la plus rapide de ces 3 dernières années en dehors du phénoménal tandem Honda/Marquez, dont les innovations techniques ont largement inspiré les constructeurs adverses.

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MOTOGP I DOSSIER

LES RÉFÉRENCES

DEPUIS 2000

Valentino Rossi

20 ans au sommet

A l'instar de Sport-Bikes, Valentino Rossi célèbre ses 20 ans – 20 ans parmi les ténors de la catégorie reine ! Alex Briggs a travaillé pour l'Italien durant chacune de ces saisons. Le mécanicien australien, aussi habile pour raconter des histoires que pour peaufiner les réglages d'une M1, nous livre le top 10 de ses souvenirs avec l'Idole. PAR Mat Oxley – Tradaptation Maxime Pontreau – PHOTOS PSP Perec/Swiderek & Monster Energy 54 I SB123 I JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2020 I sport-bikes-mag.fr

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“ 2000 I 2001 Les années 500cc Vaincre Biaggi par la haine "Je pense que Valentino adorait les 500cc. Moi oui en tout cas, je trouvais ces machines fantastiques, je les aimais. J’adorerais voir où se situerait une 500cc 2-temps aujourd’hui ! Je n’ai jamais vraiment ressenti ce besoin de passer aux 4-temps, contrairement à d’autres personnes. La seule chose que je sais, c’est que les 4-temps dégagent beaucoup plus de chaleur que les 2-temps. Je me brûle toujours, même avec des gants. En comparaison, les 2-temps étaient froides. Je ne me suis jamais fait brûler par une 500cc. La confrontation entre Valentino et Max Biaggi était sympa. Valentino ne tire généralement pas sa motivation d'une aversion personnelle pour un autre pilote. Il aime rouler vite. La vitesse est sa source de plaisir dans la course. Pourtant, ce qui s’est passé avec Biaggi en 2001 tenait un peu du style Mick Doohan : 'Je vais le vaincre par la haine !' Je me souviens de Suzuka, lorsque Biaggi l’a poussé hors de la piste, puis Valentino l’a dépassé et lui a tendu ce fameux doigt d’honneur. C’était génial !"

2002 I 2003 MotoGP En mode cruise control avec Honda "Je me sens mal à l'aise de dire que c’était simple, mais pour moi, en tant que mécanicien, travailler sur la RC211V était facile. Il est délicat de dire exactement comment Valentino a vécu cette période, mais tout lui a probablement semblé aisé aussi. De nos jours, nous essayons toujours de tirer un peu plus de performance de la moto, donc nous cherchons autour des composants de suspension. Nous changeons les ressorts à chaque session, un clic ici, un demi-millimètre là… En fait, nous essayons juste de trouver le petit truc en plus. A l’époque, nous n’avions pas besoin de gagner en performance, donc nous ne cherchions même pas. En 2002, nous avons enchaîné plusieurs courses sans changer le moindre réglage de suspension ou de géométrie. La puissance du V5 était si douce et si agréable que le pilote pouvait gérer la course de la suspension, en mode : 'Je freinerai juste un peu plus doucement ici et la fourche n’ira pas en butée'."

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MOTOGP I DOSSIER

2003 L’histoire Honda se termine "De mémoire, nous avons appris l’accord avec Yamaha au Portugal. A Motegi, nous nous demandions [les mécanos] ce que nous allions devenir, si nous allions suivre ou non. Je voulais rester avec Valentino et JB [Jeremy Burgess, chef mécanicien de Rossi et de Doohan auparavant] car je n’avais pas terminé d’apprendre ce que je voulais auprès d’eux. Je me souviens d’une réunion clandestine dans le parking auto de Phillip Island à propos des salaires et du fonctionnement général. C’était vraiment excitant. Au final, moi, JB, Bernard [Ansiau] et Gary [Coleman] sommes partis chez Yamaha."

2004 Mettre au point la Yamaha "Nous avons rencontré de gros problèmes et avons mis le doigt sur quelques-uns rapidement lors des premiers tests, à Sepang.

Le pneu avant bloquait sans cesse, par exemple. Les pilotes bloquent parfois l’avant mais relâchent les freins quand ils s’en rendent compte. Là, Valentino bloquait à la fois l’avant et l’arrière de la Yamaha et il pouvait sentir que plus il tirait sur le levier de frein, plus le moteur le poussait. Il ajustait donc les gaz et les freins en réfléchissant, en se disant que rien ne fonctionnait et en se demandant pourquoi ! Les systèmes de frein moteur fonctionnent ainsi : lorsque la roue arrière se bloque, le moteur essaye de stopper ce blocage en ouvrant les gaz et donc en augmentant le régime moteur, afin que la moto ne glisse pas en virage. Mais avec la Yamaha, le moteur reprenait du régime lorsque la roue avant se bloquait ! C’est à ce moment-là que nous avons réalisé pourquoi tant de pilotes Yamaha chutaient en perdant l’avant. Lorsque l’avant se verrouillait, le pilote avait l’exact opposé

de ce dont il avait besoin et se retrouvait par terre. L’un des autres gros problèmes que nous avons compris, c'est quand Valentino nous a dit : ‘Je ne peux pas faire plonger la moto en virage, la faire tourner me fait vraiment mal à l’intérieur du genou.' Tout indiquait que la moto devait être rehaussée, alors nous l’avons surélevée de 15 mm – une différence énorme qui a fait paniquer tout le monde, mais qui a tout transformé. La moto tournait mieux et l’avant a cessé ses blocages intempestifs. Le centre de gravité était trop bas auparavant, donc lorsque nous avons tout relevé cela a généré davantage de transfert de charge sur les phases de freinage. Le train avant mordait dorénavant l’asphalte au lieu de simplement bloquer sous l'effet de la poussée de la moto. Nous avons apporté de grosses évolutions à la Yamaha durant la saison 2004 et Valentino a peut-être piloté mieux que jamais cette année-là."

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2008 Triompher de Stoner à Laguna "En 2007, nous avons été battus. Nous n’avons même pas terminé deuxième du championnat. Après, je déteste finir à la deuxième place car cela signifie que tu as presque eu le titre, alors que quand tu es troisième ou quatrième, tu sais que tu as été battu.

2006 La perte de la couronne "Nous avons connu des difficultés en 2006, notamment du très mauvais chattering [dribble]. Masao Furusawa [alors patron de Yamaha Racing] a présenté un bon nombre de solutions pour régler le problème, mais rien n’a fonctionné, donc nous sommes revenus au châssis 2005 au GP de France. Valentino s’est immédiatement senti mieux et il menait largement la course… quand le moteur a cassé. Lors de la course précédente, nous avons eu un problème de pneu avant. Valentino est rentré aux stands pendant la course en se plaignant de vibrations, donc nous avons changé l’arrière. Lorsqu’il a quitté la pit-lane, on a vu un immense trou dans le pneu avant. Il était caché par le garde-boue. On s’est dit : 'Fuck, no !' Quelques courses plus tard, à Laguna, une durite d’eau a lâché. Mais même sans cette casse, nous pensions que nous n’allions pas finir la course. Il faisait vraiment très, très chaud, et quand le niveau de carburant était bas, il entrait en cavitation dans la pompe à essence. Lorsque nous avons perdu le championnat [en faveur de Nicky Hayden] à Valence, je ne me souviens pas avoir été contrarié ou déprimé. Je ne pense jamais au championnat, je pense seulement au jour présent. Nous savions que nous avions été suffisamment bons pour gagner donc nous nous sommes juste dit : 'nous gagnerons la prochaine fois.'"

A Laguna Seca en 2008, Casey Stoner nous avait botté le c*l à chaque session et il ne faisait aucun doute qu’il allait remporter la course. Donc JB et Valentino se sont pointés avec un plan. JB a expliqué que la seule manière de l’arrêter était de rester devant lui. Il disait : 'Ne le laisse surtout pas faire un tour devant toi, car s’il le fait, tu ne le reverras jamais. Donc tu dois juste être devant lui, rester devant lui quoi qu'il arrive, afin qu’il ne fasse pas un tour comme il le souhaite.' Le dépassement dans le Corkscrew était juste une énième folle tentative pour empêcher Casey de gagner la course. Je suis sûr que Valentino a pensé : 'Si je le laisse mener dans ce virage, il va gagner.' Laguna s'est avéré le tournant psychologique de ce championnat. Valentino est habituellement la source de la motivation dans le garage, comme la plupart des pilotes. C’est très dur pour le team de gonfler à bloc le pilote, c’est généralement l’inverse qui se produit. Si le pilote est satisfait, ça décuple la motivation, mais s’il n’est pas en forme, nous ne pouvons en général pas inverser la tendance."

2009 Dominer Lorenzo à Barcelone "Avoir un coéquipier compétitif vous rend toujours plus rapide. A ce moment-là, nous sentions que la menace en provenance de Jorge [Lorenzo] était bien réelle et nous nous demandions si Valentino n’avait pas déjà atteint son meilleur niveau. Après avoir remporté cette course, nous avons su que nous avions encore notre mot à dire. Jorge était l’ennemi juré, il était l’équivalent de Biaggi. Valentino a réalisé une course juste somptueuse et ce mouvement dans le dernier virage était calculé. Il a pris la décision de descendre un rapport pour pouvoir le piquer à l’intérieur. Normalement, tu ne tombes pas de rapport à cet endroit, car tu te ralentis trop pour la ligne droite. Sauf que dans le dernier tour, c’était la stratégie parfaite pour passer Jorge à l’intérieur, verrouiller sa trajectoire et franchir la ligne d’arrivée le premier."

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2011 I 2012 Le cauchemar Ducati "Lors des premiers tests d’après-saison à Valence, en novembre 2010, Valentino était blessé mais il était suffisamment en forme pour évaluer la moto, donc il a fait quelques tours. Nous avons réglé le guidon et plein d’autres choses comme il le souhaitait. Puis il a refait quelques tours avant de nous livrer ses commentaires. Nous avons donc apporté à la moto les ajustements logiques en conséquence, des réglages basiques… qui n'ont eu aucun effet. Nous avons donc accru les valeurs de ces réglages au-delà de la plage qui nous semblait fonctionnelle, mais quasiment rien n’a eu l’impact escompté. Ça a été comme ça durant toute la saison et avec toutes les nouvelles pièces. Nous avons changé des tas de choses, mais la moto restait la même. Elle était comme engourdie face aux réglages, qui n’avaient aucun effet. On ne pouvait pas l’améliorer et c’était bizarre.

mais nous avons rencontré les mêmes vieux problèmes. Rien ne semblait fonctionner. Nous avions toujours le même refrain : 'Cette fois, on est sur le bon circuit !' Puis en fait : 'Non, ce n’est pas la bonne piste après tout.'

En 2012, Ducati s’est tourné vers un châssis plus conventionnel,

Il y avait beaucoup de bonnes personnes chez Ducati, mais je pense qu’ils auraient dû placer la machine à café

au milieu de l'atelier afin que les ingénieurs se parlent – ce qui ne semblait pas se produire. Ils présentaient tous les problèmes qui détruisent la plupart des équipes de course : l’ego, la fierté et la politique. Quand les choses vont vraiment bien dans un team, tu constates en général que tout cela a été mis de côté."

Ensemble, Jeremy Burgess et Valentino ont remporté 7 titres mondiaux.

2014 fut une bonne saison : nous avons remporté deux victoires et terminé deuxième du championnat. En fait, deux années ont été nécessaires pour oublier l’amertume de la Ducati, car nous avons presque remporté le titre en 2015. Je pensais que Valentino allait gagner le titre cette année-là. Je croyais que nous étions suffisamment forts.

2013 I 2015 Gagner à nouveau avec Yamaha "C’était bon de revenir chez Yamaha. Une once de doute s’était installée dans nos esprits. Quels dégâts avions-nous infligé au pilote ? Est-il toujours bon ? Car nous n’avions plus vu Valentino pendant deux ans…

Lorsque JB a été remercié fin 2013, ce fut comme perdre mon père en mécanique. Je crois que, peut-être, Valentino espérait être plus rapide plus tôt, mais je pense qu’il lui a fallu au moins une année pour oublier le goût de la Ducati.

Ce qui s’est passé à la fin de la saison a été horrible. Nous avons juste continué, il fallait persister. La fin de saison après Sepang s’est vraiment déroulée sous tension et cela s’est poursuivi la saison suivante. Toute cette tension en tête : et ci, et ça, et il déteste ceci, et il l’a fait exprès… C’était fatiguant."

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DOSSIER I MOTOGP

2016 I 2019 Lutter pour continuer à gagner "Lorsque la Yamaha a commencé à baisser en performance en 2016, on s’est demandé pourquoi. La Ducati se portait bien car le nouveau logiciel électronique unique était celui qu’elle avait toujours embarqué. Ils savaient donc parfaitement comment il fonctionnait. Puis Honda a embauché des gars de Magneti Marelli. Mais personne de notre côté ne pensait que c’était ce que nous devions faire. Les pneus sont désormais la partie la plus importante en MotoGP. Certains prétendent que nous avons des difficultés car le pneu arrière chauffe trop avec notre moto. Si vous avez un long virage rapide à droite suivi d'un autre droite, le pneu n’a pas le temps de refroidir pour le deuxième virage, donc ce dernier est un désastre. Il persiste deux écoles de pensée dans notre team concernant le niveau de charge et le degré de contraintes que l’on devrait infliger au pneu arrière. Faut-il éviter de mettre trop de poids dessus et bien le traiter ou faut-il le charger pour arrêter le patinage ? Je suis partisan de la seconde option, car selon moi, si tu es trop précautionneux avec le pneu, il patine et sa température de surface augmente, alors qu'en le chargeant davantage, tu améliores le grip et tu augmentes la température dans la carcasse.

QUI EST ALEX BRIGGS ?

Ces dernières années, c'est toujours la même chose : on bosse bien, on bosse moins bien. Et tout le monde continue de parler de l’âge du pilote. Il est encore suffisamment rapide mais il n’a plus 20 ans. C’est comme si tu faisais un tour de montagnes russes à 20 ans, c’est fun, puis tu refais le même tour 20 ans plus tard avec tes enfants et là, 'Holy f*ck !' Valentino est toujours capable de gagner des courses et je suis déçu que nous n’en ayons pas remporté depuis un moment. Il aurait dû gagner au COTA la saison dernière puis en Malaisie l’année d’avant. Il aurait gagné cette course s’il avait été davantage habitué à jouer la victoire cette année-là."

LE SCORE DE ROSSI

En GP500/ MotoGP

Depuis 2000 (soit 20 saisons et 342 départs)

Total

Réussite

Titres Victoires 2e places 3e places Podiums Points marqués Poles Meilleurs tours en course

7 89 61 48 198 5305 55 76

35 % 26 % 18 % 14 % 58 % 62 % 16 % 22 %

L'Australien, 51 ans, est avec son collègue belge Bernard Ansiau le plus ancien mécanicien de Valentino Rossi. Le duo a toujours travaillé avec le septuple champion MotoGP depuis sa graduation en catégorie reine, fin 1999. Briggs, ancien pilote de motocross, plutôt du genre cancre à l'école, débute sa carrière de mécano en travaillant sur des bus, puis des machines de tout-terrain. Tout commence réellement fin 1992, quand un inconnu du nom de Jeremy Burgess le contacte pour lui proposer de travailler en GP500 avec le pilote Honda Daryl Beattie. En 1994, il passe dans le staff de Mick Doohan et restera avec l'Aussie jusqu'à sa retraite, fin 1999. Au total, Briggs a remporté douze titres en GP500/MotoGP, cinq avec Doohan et sept avec Rossi. De quoi ramener chaque hiver quelques millions de souvenirs dans sa ferme de Mullumbimby, sur la côte est australienne ! •

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MOTOGP I DOSSIER

LES RÉFÉRENCES

DEPUIS 2000

Honda RC-V

Les secrets d'un mythe En 2000, Honda joue (déjà !) le titre GP500 avec sa NSR 2-temps et sa nouvelle recrue Valentino Rossi, tandis que la VTR1000SP remporte le sacre WorldSBK aux mains de Colin Edwards. 20 ans plus tard, trois générations de RC-V ont confirmé le savoir-faire du constructeur japonais, le plus titré de l'ère MotoGP. Les ingénieurs en charge de chacune d'elles parlent de "leur" RC-V. CONTENU Honda / MISE EN ŒUVRE Tommy Marin PHOTOS Honda, PSP Swiderek/Jagielski

Quatrième titre mondial pour Rossi dans l'ambiance mystique du GP du Brésil 2002, dès la première année du MotoGP.

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NSR500 1997 • MICK DOOHAN

RC211V 2006 • NICKY HAYDEN

RC212V 2011 • CASEY STONER

RC213V 2020 • MARC MARQUEZ

n 2002, après trois décennies de règne sur les Grands Prix, les monstrueuses 500cc 2-temps tirent leur révérence et font place à une nouvelle génération de machines, propulsées par des motorisations 4-temps plus écologiquement acceptables, mais aussi et surtout, plus efficaces et performantes. Chez Honda, la nouvelle réglementation mise en place par la Fédération Internationale de Motocyclisme suscite un enthousiasme teinté d’ironie. D’abord parce que Soichiro Honda, fondateur de

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LE SCORE DE HONDA

En MotoGP

Depuis 2002 (soit 18 saisons et 315 départs)

Total

Réussite

Titres constructeur Titres pilote Victoires Podiums Points marqués (constructeur) Poles Meilleurs tours en course

12 10 153 423 6605 146 171

67 % 56 % 49 % 45 % 84 % 46 % 54 %

la marque en 1948, était un inconditionnel du 4-temps et avait longtemps traîné des pieds pour autoriser ses ingénieurs à travailler sur le 2-temps. Ensuite, parce que la dernière tentative de Honda de s’engager en championnat du monde de vitesse avec un moteur 4-temps remontait à 1979 (avec la NR500 V4 à pistons ovales) et n’avait pas obtenu les résultats escomptés. Loin de là. 20 ans après, en 2002, le 4-temps est de retour et les ingénieurs Honda sont bien décidés à prendre leur revanche. Ainsi va naître la génération des RC-V, des prototypes qui vont marquer de leur empreinte les 18 saisons à venir, avec 22 titres – 10 pilotes et 12 constructeurs – et pas moins de 153 victoires, plus qu’aucun autre constructeur. RC pour Racing Cycle. 211 pour 21e siècle et 1ère moto de la nouvelle ère. V en référence à l’architecture du moteur… Héritières des légendaires 6-cylindres RC166 de 250cc, RC149 125cc à 5 cylindres (!) ou encore RC181 500cc des années 60, les RC-V s’inscrivent dans la longue tradition des mécaniques développées par Honda pour s'imposer en catégorie reine. Des machines dont les secrets de conception et de fabrication nous sont partiellement dévoilés aujourd’hui par les mêmes ingénieurs qui les ont imaginées et fait évoluer au fil du temps.

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MOTOGP I DOSSIER

Honda RC211V

2002-2006

ès ses premiers tours de piste en 2002, la RC211V apparaît comme une moto bien née. Son 5-cylindres en V ne se distingue pas seulement par ses performances facilement exploitables, mais aussi par sa compacité, qui a permis de concevoir une partie-cycle particulièrement rassurante. Ces caractéristiques vont permettre à de nombreux pilotes de tirer le maximum de leur machine puisque dix d’entre eux – Alex Barros, Max Biaggi, Toni Elias, Sete Gibernau, Nicky Hayden, Marco Melandri, Dani Pedrosa, Valentino Rossi, Makoto Tamada et Tohru Ukawa – vont

D

V5 990cc remporter un total de 48 courses à son guidon durant ses cinq années de présence en piste. Cette moto va également signer trois titres pilote et quatre titres constructeur sur la même période, entre 2002 et 2006. La RC211V est propulsée par un 5 cylindres en V ouvert à 75,5°, avec un banc de trois cylindres à l’avant et deux à l’arrière. Le calage de l’allumage, de type "Big Bang", est un héritage direct des technologies développées à partir de 1992 sur la NSR 500 2-temps. Ce V5 profite également largement des enseignements tirés du développement de la RVF750R/ RC45, championne du monde Superbike en 1997. Les deux motorisations partagent de nombreux points communs, en particulier des valeurs fondamentales (alésage x course) et des chambres de combustion similaires. En 2002, la RC211V affiche une puissance d’environ 220 ch. Côté châssis, la centralisation des masses se veut l'idée maîtresse : concentrer le maximum de poids autour du centre de la moto afin d’optimiser le comportement dynamique, la tenue de route et la maniabilité. L’un des aspects importants de cette approche tient dans la relocalisation du réservoir d'essence, avec

La RC211V 2003 avec laquelle Valentino Rossi remportera son 3e et dernier titre 500/ MotoGP pour Honda.

un tiers du volume de carburant déplacé sous la selle. Les pilotes apprécient tout particulièrement cet avantage en début de course, eux qui devaient jusque-là se battre avec un volume énorme de carburant placé en hauteur. Les ingénieurs du HRC estiment d’ailleurs que si la NSR500 atteignait 70 % de son potentiel de performances dans les premiers tours, ce chiffre monte à 80/90 % avec la RC-V. En plus d’une partie-cycle facile, une courbe de couple particulièrement linéaire rend la Honda très efficace sur toute la durée de la course, en pneus neufs comme usés. Cela permet au pilote de faire glisser l’arrière tout en gardant le contrôle, avec une reprise d'adhérence progressive. Après les titres de Rossi en 2002 et 2003, la RC211V trouve en Nicky Hayden, qui a remporté le championnat Superbike US 2002 au guidon d’une VTR1000SP, son nouveau pilote de pointe. La technique de pilotage de Hayden, directement issue des pistes de dirt track, consiste à profiter de la glisse du pneu arrière pour diriger sa monture. L'accord est donc excellent avec la RC-V ! Hayden remportera le titre 2006 lors de la finale de Valence – et de l'ère 990cc.

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Nicky Hayden aime tourner avec l'arrière : la RC-V le lui rend bien et l'emmène au titre 2006 !

Shogo KANAUMI

❱❱ Responsable du développement de la RC211V

“ Biaggi devant Rossi et Gibernau : joli trio Honda au GP d'Angleterre 2003 !

“U n groupe d’ingénieurs d’Asaka s’est réuni pour travailler

sur le projet RC-V sur la base du volontariat. En effet, à cette époque, la volonté de la direction de Honda était de permettre à tous ceux qui le voulaient de travailler sur cette moto. Avec la NSR500, nous avions déjà LA moto de référence. En théorie, nous aurions pu construire une nouvelle machine sur la base de la NSR. Sauf qu'en passant au 4-temps, une nouvelle approche s'avérait indispensable. Et puis, peut-être le plus important de tout : les ingénieurs voulaient vraiment créer quelque chose de nouveau. Il aurait été impossible de gagner quoi que ce soit en "jetant" simplement un bloc 4-temps dans une partie-cycle de 2-temps. Car, avec un 4-temps de 1000cc, la puissance et le couple augmentent de manière significative et, dans le même temps, la réglementation impose un poids minimal plus important : les pneus et le cadre auraient été nettement plus sollicités et se seraient usés plus vite, sans parler de la fatigue du pilote… Donc nous sommes repartis d’une page blanche. Nous avons d’abord pensé qu’un bicylindre de 135 kg [poids minimal imposé par la FIM] pouvait être la solution idéale à tous points de vue. Puis nous avons envisagé d’autres possibilités, comme des moteurs 3, 4, 5 cylindres en ligne, et même un V6. Mais au final, nous nous sommes arrêtés sur le V5. Pourquoi ? Parce qu’une moto doit être considérée dans son ensemble. Pour gagner, on doit avoir le moteur le plus compact possible placé dans le meilleur châssis possible. À ce moment du développement, l’équipe des motoristes nous a expliqué qu’un V5 était extrêmement bien équilibré et présentait beaucoup de qualités, dont un encombrement inférieur à celui d'un V4. A cylindrée égale, les cylindres sont en effet plus petits sur un V5. Et comme vous avez plus de puissance, la vitesse et les performances sont également meilleures. C’était la solution idéale pour notre moto. Enfin, la dernière raison de ce choix, probablement la plus décisive : personne ne l’avait fait auparavant…"

LA RC211V AU MUGELLO

2002

2006

Meilleure V-Max Meilleur tour en course Meilleur temps de course

324,5 km/h Ukawa 1'52.601 Ukawa 43'40.837 Rossi

334 km/h Stoner 1'50.300 Pedrosa 42'40.345 Hayden

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MOTOGP I DOSSIER

Honda RC212V

2007-2011

our 2007, la cylindrée des moteurs passe de 990 à 800cc. La RC212V va largement profiter des acquis de la RC211V, mais n’en sera pas moins une machine totalement nouvelle avec son V4. Il apparaît rapidement que les 800 sont des machines très différentes des 990 auxquelles elles succèdent. Les moteurs délivrent moins de puissance et de couple, les motos demandent à être pilotées différemment, en mettant l’accent sur la vitesse de passage en courbe plutôt que sur les accélérations en sortie de virage. Caractérisé par un angle assez fermé, et grâce à un système de rappel pneumatique permettant un meilleur contrôle des soupapes à hauts régimes, le V4 de la RC212V s’autorise 18 000 tr/min, soit 2 000 tr/min de plus que l’ancien bloc 990cc. La courbe de couple plus agressive exige aussi une meilleure gestion de l’électronique. Sur beaucoup de circuits, les 800 vont battre les chronos des 990, leur meilleure vitesse de passage en courbe compensant les pertes en accélération et vitesse de pointe. Mais la RC212V ne connaît pas le succès immédiat de celle qu'elle

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V4 800cc remplace. Cette machine va réclamer un énorme investissement de la part du HRC, qui va apprendre autant du côté de la motorisation que de la partie-cycle ou de l’électronique. Pour les motoristes, le défi consiste à obtenir une puissance exploitable en dépit du fait qu’elle soit obtenue très haut dans les tours en raison de la cylindrée inférieure. Cette équation complexe sera résolue en associant plus étroitement que jamais le développement du moteur à celui de l’électronique. Dans les dernières années du développement de la 800, deux importantes technologies sont directement empruntées à la Formule 1. En 2010, un capteur de couple est installé sur l’arbre de sortie de boîte. Ce capteur analyse les paramètres de la puissance envoyée vers la roue arrière, permettant à l’électronique d’intervenir en temps réel afin d’aider le pilote à exploiter le maximum de puissance à chaque instant. L’année suivante apparaît la boîte de vitesses seamless, qui permet des changements de rapport plus rapides et doux. Cette technologie octroie aux pilotes un petit avantage à l’accélération en ligne

La RC212V 2007, si elle porte le n°1, s'avèrera plus délicate à piloter pour Hayden avec son pointu V4 800cc…

droite, mais aussi et surtout un énorme plus en courbe, où ils peuvent désormais passer les rapports sur l’angle sans risque. Les hommes du HRC ont également travaillé dans de multiples directions sur la partie-cycle et le cadre, à la recherche du meilleur compromis entre maniabilité à faible allure et stabilité à haute vitesse. En 2010, en même temps qu’ils changent de fournisseur de suspensions (pour passer à Öhlins), les ingénieurs s'essaient au cadre composite fibre de carbone/aluminium. Néanmoins, Casey Stoner remporte le titre 2011 au guidon d’une RC212V dotée d'un châssis tout aluminium.

De Puniet fait étinceler la RC-V LCR au GP du Qatar 2008.

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A domicile, Stoner s'impose et célèbre le titre 2011 sur un podium 100 % Honda, partagé avec Simoncelli et Dovizioso.

Hiroshi UNUKI

❱❱ Responsable du développement de la RC212V “N ous avons commencé le développement de la RC212V en 2005.

Au début de l'ère 800, seul Pedrosa tire les marrons du feu pour Honda. Il devra néanmoins attendre le dernier GP de la saison, à Valence, pour s'imposer devant Stoner, le champion 2008.

À cette époque, nous pressentions que toutes les équipes et tous les constructeurs allaient se trouver confronter à un mur en termes de consommation lorsqu’ils devraient augmenter la puissance de leur moteur. La réglementation en vigueur à l’époque de la 212V imposait une différence de poids en fonction du nombre de cylindres. Entre les moteurs à 4 et 5 cylindres, cette différence était d’environ 7,5 kg. Autrement dit, un 4 cylindres (re)devenait plus intéressant. Avec moins de pistons et de bielles, vous pouvez aussi limiter les frottements internes. Et réduire les frottements aide à régler le problème des restrictions de consommation assez sévères. Nous avons rapidement compris qu’il était plus productif de travailler sur l’agilité de notre machine si nous voulions gagner. Donc nous avons travaillé en priorité sur la centralisation des masses, la compacité et la réduction du poids, y compris au niveau du moteur et du cadre. Pour cela, il nous fallait réduire autant que possible l’angle du V entre les cylindres. Nous nous sommes focalisés les premiers temps sur le contrôle de la moto, en particulier dans les séquences décélération/entrée de courbe et sortie de courbe/accélération. Globalement, il faut admettre que nous n’avons pas totalement atteint nos objectifs, puisque la puissance de notre moteur n’était pas au niveau de celle de nos concurrents. Pour gagner de la puissance, nous avons augmenté l’alésage et modifié l’angle du V entre les bancs de cylindres. Nous avons également un peu élargi le moteur pour supporter l’augmentation de puissance et y loger la distribution pneumatique. En deux ans, nous avons retrouvé un bon niveau de puissance mais, sur la piste, nous n’étions toujours pas devant… Nous avons donc décidé de réexaminer le facteur stabilité, ce qui nous a conduits à plusieurs changements majeurs. Je crois que c’est à la mi 2009 que nous avons finalement atteint les objectifs que nous nous étions fixés. C’était presque comme si nous étions enfin prêts à nous battre pour le championnat !"

LA RC212V AU MUGELLO

2007

2011

Meilleure V-Max Meilleur tour en course Meilleur temps de course

317,6 km/h Pedrosa 1'50.357 Pedrosa 42'45.459 Pedrosa

331,5 km/h Dovizioso 1'48.577 Stoner 41'51.086 Dovizioso

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MOTOGP I DOSSIER

Honda RC213V

2012-Aujourd'hui

a RC213V est dessinée en tenant compte des enseignements tirés des machines précédentes. Mais une fois encore, il s'agit d'une moto 100 % nouvelle. Ainsi, les motoristes ne se contentent pas d’augmenter la cylindrée du V4 RC212V. A l'instar des NR500 à pistons ovales de 1979, VF750, VFR750, RC30 et RC45 qui se sont succédé à partir du début des années 80, la RC213V accueille ainsi un V4 ouvert à 90°. Cette architecture n’est pas aussi compacte qu’un V fermé, mais les motoristes jugent que ses avantages – en particulier, un équilibrage parfait, rendant ces moteurs plus "ronds", plus robustes et plus faciles à optimiser – l’emportent sur ses inconvénients. Dès lors, châssis, boîte à air, échappement ou encore réservoir d’essence sont entièrement redessinés (et "compactés") pour loger ce "gros" moteur. En 2013, le MotoGP entre dans une nouvelle ère avec le début de la domination du duo RC213V/Marc Marquez. L’Espagnol devient ainsi le premier rookie champion du monde de la catégorie reine

L

V4 1000cc

depuis Kenny Roberts en 1978. Dès le début, Marquez tire plus de vitesse que n’importe qui d’autre de la RC213V. En 2014, il se montre encore plus fort, remportant 13 des 18 courses du championnat, égalant le record de Mick Doohan et de sa NSR500 en 1997. L'année suivante, le championnat échappe à Honda. Ce camouflet sera riche d’enseignements puisque, à compter de cette date, tous les titres (pilote et constructeur) reviendront à Marquez et la RC-V. L'avènement des Michelin et de l'électronique unifiée en 2016 contraignent les motoristes à limiter les performances des moteurs. Le V4 de la RC213V va ainsi connaître plusieurs évolutions importantes, en commençant par le changement de sens de rotation du vilebrequin ou le calage de l’allumage pour tenter de rendre sa puissance plus exploitable en l’absence des logiciels maison. En 2019, le multiple champion du monde 125, Moto2 et MotoGP va aligner 9 victoires sur une RC213V plus puissante que jamais. A Valence, Marquez conclut sa saison par son 56e succès en MotoGP

La première itération de la RC213V, elle aussi frappée du n°1 ! Stoner signera son ultime saison en GP à son guidon.

et le 81e pour la RC213V, en 8 ans et 145 courses. Casey Stoner, Dani Pedrosa, Cal Crutchlow et Jack Miller complètent la liste des vainqueurs au guidon de cette troisième génération de RC-V.

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Dès sa première course MotoGP, en 2013, Marquez monte sur le podium. En 2019, il remporte son 6e titre en 7 saisons avec Honda.

“ Shin SATO

❱❱ Responsable du développement de la RC213V (2012-aujourd'hui)

Lorenzo n'a pas trouvé la RC213V si facile que ça, n'en déplaise à Sato San…

“J e ne considère pas que le développement d’une MotoGP soit très différent

de celui de n’importe quelle autre moto. Ce que nous faisons de différent, c’est simplement de réfléchir sur le type de moteur et de partie-cycle à développer pour tirer 100 % des performances des pneus. L'idée de départ dans le développement de la RC213V concernait sa prévisibilité. Si je fais ça, la moto va réagir comme ça… C’est ce que nous essayons de faire : une machine qui réagit exactement comme l’on veut, qui n’éjecte pas son pilote brutalement, même si les limites ont été dépassées. C’est le genre de moto dont on peut tirer le maximum. Certains pilotes Honda, notamment Marquez (et Pedrosa à l’époque), ont des styles de pilotage assez flamboyants. Ils font glisser l’arrière, perdent souvent l’équilibre mais ne tombent généralement pas. C’est parce qu’ils peuvent prévoir ce que la moto va faire. Je ne sais pas si nos pilotes de MotoGP se font plaisir en permanence sur la RC213V, bien sûr, mais placer le ressenti du pilote au centre du développement d’une moto est quelque chose de fondamental. Comprendre ses demandes, collecter les données, les analyser et faire ce qui est nécessaire sous une forme technique tangible, voilà notre travail. Pourquoi le pilote doit-il freiner aussi fort ? Est-ce parce que la vitesse de pointe n’est pas assez élevée ? Pourquoi cette vitesse de pointe n’est-elle pas assez élevée ? Est-ce parce que la moto n’accélère pas assez ? Les accélérations ne sont-elles pas suffisamment rapides parce que la vitesse de passage en courbe est trop faible ? Et ainsi de suite… Parfois, nous abandonnons purement et simplement la solution que nous pensions être la bonne. Par exemple, jusqu’à récemment, le vilebrequin de la RC213V tournait dans le même sens que les roues, parce qu’il fallait donner aux pilotes plus de puissance par rapport à la concurrence. Pourtant, en 2016, nous avons choisi de passer à la solution du vilebrequin contrarotatif. Les moteurs contrarotatifs ne sont pas avantageux en termes de puissance car ils comportent des pièces supplémentaires ; mais ils sont meilleurs pour limiter le cabrage. En considérant les performances des pneumatiques, même des pilotes de haut niveau comme Marquez ou Pedrosa ne sont pas en capacité de gérer encore plus de puissance et d'en tirer bénéfice. Par conséquent, nous avons conclu qu’il était plus intéressant d’avoir une moto sur laquelle les pilotes se sentent bien et ont plaisir à ouvrir en grand pour repousser leurs limites." •

LA RC213V AU MUGELLO

2012

2019

Meilleure V-Max Meilleur tour en course Meilleur temps de course

342,5 km/h Pedrosa 1'47.705 Pedrosa 41'42.700 Pedrosa

354,7 km/h Crutchlow 1'47.765 Marquez 41'33.837 Marquez

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MOTOGP I DOSSIER

LES RÉFÉRENCES

EN 2020

Marc Le règne Marquez Depuis 2013 – et plus particulièrement 2016 –, Marc Marquez a fait du MotoGP son royaume. Le privilège de Sa Majesté ? Une capacité singulière à ressentir le niveau d'adhérence dont dispose sa machine.

de l'instinct

PAR Mat Oxley – Tradaptation Maxime Pontreau PHOTOS PSP Swiderek/Jagielski & Red Bull

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Marc ouvre la voie à Alex. Mais le petit frère dispose-t-il du même "gyroscope" inné chez son aîné ?

epuis l’avènement de l’ère "Triple M" (Michelin/Magneti Marelli) en MotoGP, débutée en mars 2016, Marc Marquez a remporté les quatre championnats du monde et 32 des 73 courses disputées. Ce n’est pas de la chance. L’Espagnol de 27 ans domine le MotoGP pour plusieurs raisons, et principalement parce que son talent (en partie inné, mais aussi travaillé) surpasse celui de tous ses adversaires sur la grille et lui permet de tirer le maximum – voire encore plus ! – de sa Honda RC213V. Au cœur de ce prodigieux talent se trouve une compétence spécifique, conférant à Marquez un avantage indéniable dans cette nouvelle ère. Il s’agit de sa capacité à adapter instantanément sa technique de pilotage aux changements de conditions, tel un caméléon ajustant la couleur de sa peau à son environnement. A l’époque de l'électronique sur-mesure et des pneus Bridgestone, les pilotes pouvaient compter sur les réactions immuables de leur moto, sur tous les circuits et dans toutes les conditions. Ce n’est désormais plus le cas. L’électronique unique du MotoGP est relativement simpliste et ne s'accorde pas automatiquement au niveau d’adhérence disponible : c'est au pilote de s’adapter. L’histoire est identique avec les pneus actuels. Ils disposent d’une plage

D

d’utilisation optimale étroite, qui dépend de l'enrobée, de la température et des conditions de piste. Lorsqu’ils sortent de leur fenêtre de fonctionnement, le pilote doit "construire" son propre grip. Comme me l'a récemment lancé un ingénieur – sous couvert d'anonymat : "Les pneus changent tous les week-ends, donc c’est un pari : parfois tu touches le jackpot, d’autres fois t’y laisses ta chemise." Marquez, lui, a tendance à rendre à ses ingénieurs leur chemise – certes, parfois élimée aux coudes.

du MotoGP évoluant dans la catégorie sur des Bridgestone depuis des années. C'est le pilotage à l'instinct – ou "avec les fesses", expression usitée dans le monde aéronautique – dans toute sa splendeur : ressentir ce dont votre machine et vos pneus ont besoin et s’y adapter instantanément, comme si vos réflexes courtcircuitaient l'ensemble de votre système nerveux. Marquez n’est pas le seul pilote de l’histoire à profiter de cette habileté, mais son talent s'avère plus prononcé que celui de tous ses prédécesseurs.

COURT-CIRCUIT

Le pilote Repsol Honda a démontré cette capacité d’adaptation en de nombreuses occasions. La première fois qu’elle m’a réellement marqué, ce fut au Mans en 2013 – pendant sa première saison en MotoGP et avant l’arrivée de Michelin et Magneti Marelli. Ce dimanche-là, le rookie de 20 ans dispute sa première course sur le mouillé en catégorie reine. Il n’a piloté la RCV sous la pluie que l'espace de quelques tours durant les tests de pré-saison. La température de la piste du Bugatti est moitié moins élevée que celle rencontrée à Sepang et on trouve difficilement plus différent que ces deux tracés. Pourtant, après seulement huit tours, Marc Marquez est le plus rapide en piste, plus véloce que toutes les stars

Stoner, lui aussi, avait cette capacité de piloter à l'instinct.

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MOTOGP I DOSSIER

Vinales est un excellent pilote. Mais pour l'instant, son ressenti de la M1 n'égale pas celui du maître.

"Marc est si spécial qu'il peut tout contourner. Il s'accomode des problèmes et donne l'illusion qu'il n'y en a pas." Cal Crutchlow Casey Stoner avait lui aussi cette faculté d’adaptation. Il a remporté un championnat au guidon d’une moto que personne d’autre ne pouvait maîtriser et a expliqué pourquoi. "Tu ne peux pas être fier, me confiait l'Australien en 2012. Tu ne peux pas avoir la moindre once de prétention Surtees mettait aussi "l'écoute" de sa moto au centre de tout.

concernant ce que tu penses être capable d'accomplir. Tu dois trouver le mode d’emploi de la moto et la piloter de la manière dont elle le réclame. Malheureusement, beaucoup de pilotes disent : 'La moto doit convenir à mon style, vous devez la développer pour que je puisse la piloter.' Ouais… Mais pourquoi tu ne changerais pas un peu ? Il n’est pas très difficile de modifier certaines choses dans sa façon de faire pour s’adapter. C’est juste une question de mentalité. Tu ne peux pas avoir trop confiance en toi. Tu dois te soumettre à cette moto et intégrer le fait que tu ne détiens pas la vérité. La moto est là, elle peut gagner des courses, mais tu dois trouver la bonne façon de la piloter." Ce concept n’est pas nouveau. Le grand et regretté John Surtees – qui a remporté sept titres mondiaux entre 1956 et 1960 – avait, déjà à l'époque, compris que le pilote devait écouter sa moto et faire ce qu’elle lui demandait. "La relation que tu crées avec une machine est très spéciale, expliquait Surtees. D’une certaine manière, la machine te parle, donc c’est important de comprendre ce qu’elle te dit."

UN PROBLÈME ? OÙ ÇA ?

De toute évidence, pilotes et ingénieurs travaillent obsessionnellement dans le but de développer et affiner leur machine. Mais lorsque les feux s’éteignent le dimanche après-midi, le pilote doit contourner tous les problèmes et toutes les imperfections s’il veut gagner. C’est pourquoi Marquez fait souvent la différence lorsque les conditions sont les plus délicates, généralement en début et en fin de course.

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En F1, comme en aéronautique, on parle de pilotage "avec les fesses". Pas étonnant que Marquez se soit senti à l'aise au volant de la Toro Rosso Honda.

GP de France 2013 : première course MotoGP sous la pluie... et l'Espagnol est le plus rapide en piste !

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Marquez fait souvent la différence dans les premiers et les derniers tours.

Une capacité qu'il doit à son feeling naturel, mais aussi à un entraînement exigeant !

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DOSSIER I MOTOGP

Comme le n°93, Quartararo aime quand ça secoue... Attention, talent !

Dans les premiers tours, les pilotes estiment souvent que le grip est différent par rapport aux essais. Soit la course Moto2 a rendu le tracé glissant (en déposant une bonne couche de gomme Dunlop), soit la température de piste a évolué. Tandis que les autres pilotes ont besoin de quelques tours pour s’adapter aux conditions, Marquez ajuste immédiatement ses trajectoires, sa gestion des gaz, etc. via ses récepteurs sensoriels. Il en va de même en phase finale, lorsque le pilote capable de flirter avec la limite s'avérera le plus difficile à battre. Une fois encore, Marquez ressent parfaitement le comportement de sa machine et en modifie les réglages pour exploiter les ultimes pourcents de grip encore en réserve dans ses pneus. Il les utilise tous – et un petit peu plus –, ses coudes toujours prêts à le rattraper. Peu de personnes comprennent cela mieux que son collègue chez Honda, Cal Crutchlow : "Marc est si spécial qu’il peut tout contourner, estime l'Anglais. Il s'accommode des problèmes et donne l'illusion qu'il n'y en a pas." Évidemment, la grande question est la suivante : qui d'autre est capable d'en faire autant, de piloter à l'instinct, le corps en parfaite osmose avec la machine ? Notre réponse : Fabio Quartararo. Certains

Certes, parfois, le cuir garde quelques stigmates...

Tandis que Cal essaie de comprendre, Marc savoure le goût du Prosecco !

affirment que le Français de 21 ans pilote comme Jorge Lorenzo. C’est parfois le cas, mais pas systématiquement. Quand l'adhérence est là, Quarta tranche les virages de son train avant, tel Por Fuera dans ses grands jours. Mais lorsque la "magie" du grip chimique liant les Michelin au tarmac n'opère pas, Fabio se satisfait pleinement d'un rodéo sau-

LE SCORE DE MARQUEZ

vage, sa M1 sautant d’un virage à l’autre et distribuant les coups. C'est un fait : Fabio s’adapte à sa machine, tel le Roi Marquez. Est-il pour autant en mesure de lui succéder dans le grand livre du MotoGP ? Nous n'avons qu'une hâte : que le prochain chapitre, peu importe son épilogue, en noircisse les pages – de gomme ! •

Depuis 2013

En MotoGP

(soit 7 saisons et 127 départs)

Total

Réussite

Titres Victoires 2e places 3e places Podiums Points marqués Poles Meilleurs tours en course

6 56 29 10 95 2275 62 56

86 % 44 % 23 % 8% 75 % 72 % 49 % 44 %

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MOTOGP I DOSSIER

LES RÉFÉRENCES

EN 2020

Ducati Desmosedici

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Le "low-tech" en exemple Les machines du MotoGP – dont la Ducati – incarnent le paroxysme du high-tech sur deux roues. Pourtant, leur évolution "butte" aujourd'hui sur un règlement très strict. C'est là que l'inventivité et l'astuce entrent en jeu : Gigi Dall’Igna l'a compris mieux que quiconque et, chaque année depuis 2016, les innovations "low-tech" de sa Desmosedici sont épiées, critiquées… puis copiées par la concurrence. Décryptage. PAR Mat Oxley – Tradaptation Maxime Pontreau PHOTOS PSP Swiderek/Jagielski, Ducati & Red Bull

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MOTOGP I DOSSIER

a meilleure incarnation du hightech, en 2020, prend probablement la forme du smartphone, ce petit boîtier bourré d’électronique capable de remplacer une foultitude de gadgets : appareil photo, magnétoscope, réveil, machine à écrire, boussole, magnétophone, radio, etc. Les plus avancés de ces téléphones intelligents sont d’ailleurs si performants que vous auriez besoin d’une remorque pour emmener partout avec vous toutes les machines et instruments qu'ils ont rendus obsolètes. La Ducati Desmosedici GP20 fonctionne – très intelligemment – de manière totalement opposée. Si, aujourd'hui, les Ducati, Honda, Yamaha, Suzuki, Aprilia et KTM MotoGP se tiennent dans un mouchoir de poche en termes d'ingénierie et de chrono, la Desmo embarque un grand nombre de gadgets mécaniques qui marquent sa différence… et inspirent la concurrence. Car chacun de ces artifices made in Borgo Panigale n'a qu'un seul but : remplacer un à un les programmes électroniques sur-mesure bannis du MotoGP fin 2015 par Dorna. Introduit en 2016, l’ECU unique Magneti Marelli se caractérise par des programmes d’anti-cabrage, d’assistance au départ, de frein moteur et de contrôle de traction relativement peu évolués, rendant les MotoGP beaucoup moins précises qu’auparavant. L’ingénieur Ducati Gigi Dall’Igna a alors compris que la meilleure solution pour permettre à ses pilotes de recouvrer leur vitesse de 2015 consistait à penser à reculons. Depuis 2016, son programme de développement MotoGP a ainsi impliqué beaucoup de rétro-ingénierie, visant à suppléer cette électronique moins évoluée via divers systèmes mécaniques. Une approche façon "Retour vers le Futur", pourrait-on dire. Les ailerons sont apparus en premier, conçus pour suppléer l'anti-cabrage. Ce dernier fonctionne grâce à différents capteurs : lorsque la fourche est totalement détendue et que la vitesse de rota-

Hiver 2016 : Stoner teste un carénage aéro aux ailerons pour le moins impressionnants...

L

dispositif mécanique et le talent du pilote. Les suspensions à gestion électronique étant proscrites par le règlement, le "holeshot device" est activé via une sorte d’interrupteur à papillon installé sur le té de fourche supérieur, lequel maintient l’amortisseur comprimé grâce à un système hydraulique… Une technologie de pointe digne de Heath Robinson [illustrateur britannique connu pour ses dessins de machineries loufoques].

GÉO TROUVETOU VS RÈGLEMENT TECHNIQUE Le papillon de blocage du holeshot device, situé sur le té de fourche : un peu "bricolage", mais efficace !

tion de la roue avant diminue (car elle est en l’air), le système réduit la transmission de couple à la roue arrière. Sauf que le logiciel Dorna est si basique qu’il "coupe" trop brutalement l'accélération. Les pilotes préfèrent donc utiliser leur propre ressenti à la poignée de gaz pour contrôler les wheelings. Et la charge aérodynamique appliquée sur les ailerons les aide en maintenant la roue avant en contact avec le sol. On a ensuite vu apparaître le "holeshot device" [une aide au départ], utilisé par Ducati depuis les dernières courses de la saison 2018. Ce dispositif abaisse l'arrière de la moto en comprimant l’amortisseur afin de réduire le cabrage lorsque le pilote s’extirpe – gaz ouverts en grand – de la grille. Le "holeshot device" seconde ainsi le "launch control" électronique, que l'on peut grossièrement résumer à un système anti-cabrage spécifique pour les départs. Une fois encore, une grande partie de l’assistance électronique s'est vue remplacée par la combinaison entre un

Début 2019, Ducati a introduit son fameux "swinglet" [aileron positionné sous le bras oscillant]. Cet appendice a deux objectifs. Primo, il augmente l’appui aéro sur le train arrière afin de plaquer le pneu au sol à haute vitesse, en phase d’accélération et de freinage. Deuxio, il protège le pneu arrière de la surchauffe. Ces actions absorbent en partie les flottements créés par les assistances de gestion du frein moteur et de contrôle de traction contemporaines. En phase de freinage, le contrôle du frein moteur vise à fournir à la roue arrière la force optimale de décélération, sans la bloquer. L’électronique ajuste ce dernier en ouvrant ou fermant les papillons d’admission dans le système d’injection de carburant, ainsi que diverses valves cachées dans les tubes d'échappement, afin d’augmenter ou de diminuer le régime moteur. Trop de frein moteur et le pneu arrière glisse. Trop peu de frein moteur et la moto ne s’arrête pas aussi rapidement qu’elle le pourrait. En optimisant le contact du pneu arrière avec le revêtement, le "swinglet" augmente le niveau de grip disponible, et donc la quantité de décélération et

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Miller gaz en grands avec le "shapeshifter" activé (vs Petrucci sans) : très dragster (ou custom selon l'Aussie) dans l'esprit !

d'accélération efficace admissible. Il limite le patinage, dévie l'air chaud en provenance du carénage (dans lequel le surpuissant V4 envoie les calories…) et contribue ainsi à garder la température du pneu arrière sous contrôle. Sans ce dispositif, la surface de la gomme risquerait de surchauffer et de se dégrader trop rapidement. Le dernier gadget en date introduit par la firme de Borgo Panigale se nomme le "shapeshifter". Son rôle ? Comme le "holeshot device", mais cette fois en roulant, il abaisse l'arrière de la moto en comprimant l’amortisseur pour réduire

le transfert de charge et donc le cabrage – mais pas seulement ! Il incarne également une réponse mécanique à un problème intrinsèque de la Ducati, lié à son aérodynamique anti-cabrage. À mesure que la vitesse augmente, la traînée aéro croît également et nuit à la vitesse de pointe. En baissant l’arrière de la moto, le "shapeshifter" aplanit l’angle aérodynamique de la Desmo, réduisant ainsi sa traînée pour gagner en vitesse maximale. Une astuce utilisée depuis des années en sport automobile. Si Dall’Igna et ses ingénieurs ont su

Le "shapeshifter" aplanit l'angle aérodynamique de la Desmo. Une astuce utilisée depuis des années en sport automobile.

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mettre au point tous ces gadgets, c’est parce qu'ils ont été particulièrement doués pour plonger tête la première dans les lacunes du règlement MotoGP, comme Adrian Newey et d’autres l’ont fait en Formule 1. Cette approche nécessite un autre niveau de lecture des règles : au lieu de regarder ce qui est écrit sur la page, vous cherchez ce qui ne l’est pas. Logiquement, certaines innovations de Dall’Igna n’ont pas manqué de susciter la controverse. Il y a d’abord eu un énorme désaccord concernant les ailerons, puis des protestations des concurrents contre

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Dovizioso en mode butor : le "swinglet" situé sous son bras oscillant a bien du mal à faire son job...

le "swinglet"… avant que tout le monde – ou presque – ne les adopte. Il y a quatre ans, je comptais d’ailleurs parmi les nombreuses personnes persuadées que les ailerons radicaux des Ducati devaient être interdits. C’était en 2016, après les tests de Sepang, où Ducati est arrivé avec sa GP16 à six ailes, semblables à autant de couteaux capables d’atteindre 350 km/h. Les ailerons sont restés, mais les règles concernant l’aérodynamisme en MotoGP ont été réécrites afin de proscrire les conceptions les plus excentriques, no-

tamment les protubérances qui créaient des turbulences et engendraient pour les poursuivants d’effrayants problèmes de stabilité à haute vitesse – et ce sans forcément être situé dans l’aspiration. Désormais, les éléments aérodynamiques du MotoGP sont davantage intégrés aux carénages des machines. C'était assurément la voie à suivre.

SÉCURITÉ ABSOLUE ?

Finalement, les appuis aéro ont largement contribué à rendre les motos plus sûres. Il n'y a pas d’endroit plus dangeA Brno en 2017, Lorenzo étrenne les appuis aéro "new age".

reux où chuter que la fin d’une ligne droite rapide, où les MotoGP dépassent généralement les 300 km/h. Si la roue avant n’est pas fermement "connectée" au sol quand le pilote empoigne les freins, elle se bloque – avec les conséquences que vous imaginez. L’appui généré par les appendices aérodynamiques, en plaquant le pneu avant sur la piste, minimise le risque d'accidents à grande vitesse. A vrai dire, il existe bien un endroit où tomber peut s'avérer encore plus dangereux : dans le premier virage après le départ. A cet instant, 22 machines déboulent en rang serré à une moyenne de 250 km/h. Si quelque chose part de travers, la situation peut rapidement dégénérer. La plupart des constructeurs ont désormais – ou auront bientôt – un "holeshot device" sur leur machine. La moindre défaillance de ce système pourrait avoir des conséquences désastreuses. Jack Miller s'est ainsi retrouvé dans une situation délicate dans le premier virage du GP de Grande-Bretagne 2019, lorsque le système équipant sa Desmosedici ne s’est pas désengagé – car le T1 de Silverstone ne nécessite pas un freinage appuyé. "Je ne pouvais pas remonter l’arrière de la moto, donc j’ai passé les trois premiers virages en mode chopper, relatait l'Australien. J’essayais de régler le problème pendant que les autres me filaient autour – à gauche, à droite, au centre… C’était

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DOSSIER I MOTOGP

V4 high-tech surpuissant + gadgets low-tech intelligents = modèle très inspirant !

assez effrayant. En gros, j’ai dû faire un stoppie au virage 4 pour libérer l’amortisseur. Ce n’était pas l'idéal." C’est la raison pour laquelle certains ingénieurs concurrents pensent que ces "holeshot devices" devraient être interdits. Pas tout de suite, mais bientôt. "Quel sera l’intérêt d’un tel système une fois que tout le monde en aura ?, demandait récemment un ingénieur souhaitant rester anonyme. C’est simplement une éventuelle nouvelle source d'erreurs, qui n’a pas vraiment d’utilité et qui pourrait causer de graves problèmes au premier virage. Ces dispositifs ne doivent pas être interdits maintenant, ce serait injuste envers Ducati, mais une fois que les six usines en auront un, ils devraient être définitivement bannis." Depuis plusieurs années, Ducati ouvre la voie en matière d'inventivité technique – un peu comme Marc Marquez en pilotage – pour retrouver les performances retirées par le nivellement de l'électronique et inspire les marques adverses. Il ne reste plus au constructeur italien qu'à décrocher le titre pour entériner cette longueur d'avance. Avec Jack Miller ? •

LE SCORE DE DUCATI

Depuis 2003

En MotoGP

(soit 17 saisons et 299 départs)

Total

Réussite

Titres constructeur Titres pilote Victoires Podiums Points marqués (constructeur) Poles Meilleurs tours en course

1 1 49 150 4365 43 49

6% 6% 16 % 17 % 58 % 14 % 16 %

Dovi et sa Desmo, rare duo capable de rivaliser avec Marquez et sa RC-V...

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MOTOGP I DOSSIER

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DES 500 AUX MOTOGP

PART 1

"TOUT EST ENTRE TES MAINS…" Cal Crutchlow avait un rêve : essayer une "vraie" 500cc 2-temps de Grand Prix. Qui était mieux placé que son employeur pour l'exaucer ? Le triple vainqueur MotoGP évoque ses quelques tours du circuit de Motegi au guidon de la mythique Honda NSR500 championne du monde 1989 avec des frémissements dans la voix… PAR Mat Oxley – Tradaptation Maxime Pontreau PHOTOS Honda & Monster Energy

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MOTOGP I DOSSIER

La 500 NSR, ça décoiffe, même trente ans après.

al Crutchlow n’a que quatre ans lorsque Eddie Lawson remporte le championnat du monde 500cc 1989 avec la Honda NSR500, l’une des premières versions d’une moto qui deviendra la machine la plus prolifique de la catégorie reine des GP, avec 132 victoires entre 1984 et 2001. L’Américain va en gagner quatre, lui, des Grands Prix, en 1989. Cette année-là, son coéquipier Mick Doohan débute dans la catégorie : l'Australien deviendra le porte-étendard de la NSR, en remportant à ses commandes 54 courses entre 1990 et 1998. Les 500cc 2T de la fin des années 1980 sont renommées pour leurs performances intimidantes : leur V4 "screamer" [pour "hurleur", avant les "big-bang", dont le calage irrégulier du vilebrequin allait adoucir la courbe de puissance et améliorer la motricité] distribuent plus de 160 chevaux au pneu arrière via une courbe de puissance en pic, passant de 50 à 150 chevaux en l'espace de 100 tr/min dans une sonorité d’échappement aigüe à vous donner des frissons, le tout sans

C

Même pour un pilote MotoGP, piloter une ancienne 500 de GP est un rêve rarement assouvi.

le moindre balbutiement de contrôle de traction. La NSR avec laquelle Eddie Lawson va conquérir le titre 1989 est réputée comme la plus sauvage de toutes les machines de la grille : la plus puissante (avec 165 ch à 13 000 tr/min), mais aussi la plus violente et la moins facile à mener… "C’est incroyable et un réel privilège de piloter cette NSR, exulte Crutchlow au terme de son essai sur le Twin Ring de Motegi sous un splendide soleil automnal. J’ai commencé à suivre la compétition sous l’ère Doohan. J’ai toujours aimé regarder Mick et son style de pilotage particulier, ses rétablissements, ses retours en force. J’étais un supporter de Honda ainsi qu’un fan de course. Pouvoir rouler sur une NSR500 sur un circuit aussi génial que Motegi est un incroyable moment dans ma carrière. La moto est complètement différente de ce dont j’ai l’habitude. Lorsque j’observais ces gars qui roulaient en 500cc, je n’arrêtais pas de penser que ces machines étaient incroyables. Maintenant, je l'ai vérifié ! Ce qu’ils ont accompli au guidon de ces motos est fantastique."

La Honda RC213V Castrol du team LCR que Cal Crutchlow pilote en temps normal développe [bien] plus de 250 chevaux. La puissance de la NSR de 1989 n'a donc pas de quoi le surprendre. Mais la façon donc le moteur produit cette puissance, par contre, complètement. "La 500 est vraiment difficile à contrôler… vraiment, vraiment difficile, ajoute le Britannique. En sortant du dernier virage, ou de l’épingle, la roue avant déleste rapidement, il faut donc beaucoup utiliser le frein arrière pour la garder au sol. Nos motos disposent de l’assistance électronique [pour réduire le cabrage], donc si nous voulons faire des roues arrière, nous réduisons l’action de l’électronique. Aujourd’hui, on a la sensation sur nos motos que la puissance est sous contrôle, alors qu’avec les anciennes 500cc, tu ne pouvais rien faire [mécaniquement ou électroniquement] pour la gérer. Tout est dans ton poignet droit et la commande d’embrayage. C’est une approche totalement différente ! Je sais que tout le monde parle de la courbe de puissance des 2-temps, mais tu n’as pas idée ! Pour être honnête, je

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Eddie Lawson à l'attaque devant Wayne Rainey et Kevin Schwantz au GP du Brésil 1989.

n’ose même pas ouvrir les gaz trop fort. Dans les virages 1 et 2, le double droit, je suis un peu plus en confiance, mais je n’emmène certainement pas la 500cc comme ces gars le faisaient. Ils n’avaient même pas de quick-shifter, donc à l’époque tu devais veiller à ta façon de relâcher l’embrayage, de monter et de descendre les rapports... C’est très, très spécial. Lorsque tu pilotes cette machine, tu réalises que nous tenons pour acquis

ce que nous avons à présent. Piloter la NSR de 1989, c’est un peu comme piloter une machine de cross, car tu gères tout manuellement. Tout est entre tes mains. C’est une sensation assez étrange mais formidable. La moto est fantastique, rapide et plutôt "confortable" ; mais je ne peux pas m’imaginer faire une course avec en 1989 !" Les 500cc 2-temps représentaient l’apogée de la compétition moto jusqu’à ce que les MotoGP 4-temps – aux cylindrées supérieures – ne fassent leur apparition en 2002. Cependant, le développement des moteurs, des châssis, des pneus et de l’électronique a été si soutenu que les machines Moto2 – propulsées par des

moteurs de Honda CBR600RR de série – réalisaient de meilleurs chronos que les 500cc dès leur apparition en 2010 ! Cette évolution radicale des performances et les mots de Cal nous amènent à une question qui fait souvent débat dans les discussions les plus passionnées : les machines modernes du MotoGP sont-elles devenues trop faciles à piloter par rapport à ces 500 d'un autre (2-)temps ? Réponse dans la deuxième partie de ce sujet… •

Le comparatif

Honda NSR 500 1989

VS

Honda RC213V 2019

CYLINDRÉE MOTEUR. .......................................... 499 cc................................................................................................... 1000 cc TYPE MOTEUR....................................................... 2-temps.............................................................................................. 4-temps ARCHITECTURE MOTEUR................................... V4 ouvert à 112°............................................................................ V4 ouvert à 90° ALIMENTATION...................................................... 4 carburateurs Ø36 mm. .......................................................... Injection électronique PUISSANCE............................................................ 165 ch à 13 000 tr/min............................................................... +290 ch à 17 000 tr/min (estimation SB) POIDS...................................................................... Moins de 125 kg............................................................................. 157 kg RAPPORT POIDS/PUISSANCE........................... 0,76....................................................................................................... 0,54 V-MAX..................................................................... +310 km/h......................................................................................... +350 km/h BOÎTE DE VITESSES............................................. 6 rapports sans quick-shifter............................................... 6 rapports seamless +/ASSISTANCES ÉLECTRONIQUES....................... Inexistantes !.................................................................................. Anti-patinage, anti-cabrage, launch-control, etc. sport-bikes-mag.fr I JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2020 I SB123 I 83

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MOTOGP I DOSSIER

DES 500 AUX MOTOGP

PART 2

UN JEU (DEVENU) TROP FACILE ? Certains amateurs estiment que les assistances électroniques modernes et les performances mécaniques en constante évolution ont rendu les machines du MotoGP peu exigeantes à piloter. Ils ont tort. Mat Oxley nous explique pourquoi. PAR Mat Oxley – Tradaptation Maxime Pontreau PHOTOS PSP Perec/Swiderek, constructeurs & archives

La YZR500 0WC1 de 1990 VS la YZR-M1 de 2020 : 30 ans, 2-temps et un monde électronique de différence entre ces Yamaha…

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En 1909, Will Cook s'apprête à défier les records avec sa NLG à moteur JAP de 2714cc.

O

teurs du haut de chaque cylindre avant d'y introduire un rayon de roue, afin de vérifier la position de chaque piston. Ensuite, injecter du carburant pur vers les soupapes d’admission, ouvrir les poussoirs de soupapes des deux cylindres, pousser comme un âne, baisser un poussoir lorsque le premier cylindre se lance (avec un peu de chance), abaisser l’autre quand le deuxième cylindre démarre. C’est à ce moment-là que les choses se

compliquent réellement : une fois le moteur démarré, le pilote doit constamment jongler avec le levier gérant l'avance et le retard à l'allumage, le mélange air/ essence et l’accélérateur – les seules solutions pour contrôler sa vitesse car, pour rappel, ce moteur est en prise directe avec la roue arrière. Will Cook est un homme courageux qui sait ce qu’il fait. Il va dépasser les 90 mph à Brooklands mais un détail technique lui

Gaston Rahier en action sur sa BMW R80 GS au Paris-Dakar 1984. Pas d'eau… mais du style !

© BMW AG

n appelle ça le progrès. Cette année, les MotoGP de 1000cc développent environ 280 chevaux pour une vitesse maximale de 355 km/h. Ces machines représentent l’apogée de 125 ans de développement du moteur à combustion interne, du châssis moto et de la technologie électronique. A certains égards, elles sont faciles à piloter, à d’autres, elles ne le sont pas. Il y a 110 ans, le Londonien Will Cook débarque à Brooklands – le premier circuit automobile au monde – dans le but de devenir le premier motocycliste à franchir la barrière des 90 mph (144 km/h). Son arme secrète : un impressionnant moteur JAP (produit à l’usine JA Prestwich de Tottenham, au nord de Londres) rejeté par les pilotes du Tourist Trophy car trop difficile à gérer sur les routes de l’Île de Man. Ce V-Twin ouvert à 80° affiche une cylindrée de 2714cc [rien que ça…] avec un alésage et une course de 120 mm. Ce moteur dispose d’une transmission directe vers la roue arrière, qui tourne donc à la vitesse du bloc moteur. Cette machine ne possède ni embrayage, ni boîte de vitesses, ni freins et aucune suspension non plus. "C’est un engin à l'apparence redoutable, surtout le moteur", écrit alors un journaliste du magazine Motor Cycling. Le JAP est tout sauf facile à apprivoiser et son démarrage s'apparente à un réel casse-tête… D’abord, trouver une pente bien raide. Retirer les bouchons obtura-

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Alex Criville tente d'enfumer son coéquipier Mick Doohan au GP 500cc de Catalogne 1996. Juste avant le passage au sans plomb.

refusera le record officiel. Faits intéressants, l’intégralité de cette moto est fabriquée dans trois usines différentes autour de Londres : JAP à Tottenham, North London Garages à Highbury et Chater Lea à Finsbury. Et ce moteur de 2714cc sera plus tard utilisé dans un avion… Cette NLG JAP était-elle difficile à piloter ? Oui, de manière inimaginable. Une Honda RC213V serait-elle plus simple à emmener, même pour le péquin moyen, au Mugello ? Sans l’ombre d’un doute. Mais il existe un gros malentendu concernant la facilité d’utilisation d’une moto de course. Lorsqu’un pilote rentre au garage et dit à ses ingénieurs que leur dernière modification a rendu la moto plus facilite à piloter de 5 %, cela ne veut pas dire qu’ils ont facilité son travail de 5 %, mais qu'il va pouvoir réinvestir ces 5 % ailleurs. Il va reporter cette attention économisée dans différentes manières de gérer l’accélérateur, d’utiliser les freins, de déplacer le poids de son corps, d’exploiter l’adhérence, etc. Au final, il va investir ces 5 % dans un détail qui lui permettra de gagner un dixième de seconde par tour. Cela ne lui facilitera certainement pas la vie mais pourrait le rendre un poil plus rapide.

LE MOINDRE DÉTAIL COMPTE

Retour en 1989. Je couvre le Rallye des Pharaons en Égypte – sorte d’échauffe-

Le sans plomb adoucit tellement la puissance que Mick Doohan se plaint de voir les explosives 500cc "transformées en grosses 250cc". ment au Paris-Dakar – qui démarre des pyramides, se court à travers le désert jusqu’à la vallée des Rois, puis la mer Rouge, avant de revenir aux pyramides. Soit 2000 miles en tout (3218 km). Lors d’une d’étape de nuit, je discute avec Gaston Rahier, vainqueur du Dakar à deux reprises. Le petit Belge, dur comme le roc, me dit alors que le règlement exige des pilotes qu’ils transportent au moins dix litres d’eau pour survivre s’ils se perdent (avant les systèmes de pistage). Et d'ajouter, en gloussant, que la première chose qu’il fait une fois hors de vue des officiels est de jeter la majeure partie de son eau pour gagner quelques kilos. Une anecdote qui résume parfaitement la mentalité d’un pilote : il ne veut pas d’une vie facile, il veut être rapide. Quelques décennies plus tôt, les pilotes avaient du mal à aller aussi vite qu’ils le pouvaient car ils passaient une bonne par-

tie de leur temps en piste à faire fonctionner leurs motos. Même dans les années 1960 et 1970, les pilotes embarquaient toujours des bougies de rechange et une clé à bougie. Ainsi, si le moteur "claquait" une bougie – un problème récurrent sur les 2-temps – ils pouvaient la remplacer et continuer l’épreuve. Les courses se gagnaient parfois comme cela. Alors que l’ingénierie progresse et que les motos deviennent plus performantes, les pilotes consacrent plus de temps à se demander comment gagner du temps qu’à tenter de garder leurs machines en un seul morceau. Ces trente dernières années, ils ont ainsi été en mesure de se concentrer à 100 % sur les chronos : leurs motos sont devenues plus faciles à emmener… mais pas à piloter. Lors de chaque introduction d’une technologie visant à faciliter l’utilisation des machines de course, certains fans

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DOSSIER I MOTOGP

Première année du MotoGP et deuxième titre en catégorie reine pour Rossi, en 2002. Trop easy, la RCV !

s’insurgent : "Ça devient trop facile !" En 1998, les Grands Prix passent à l’essence sans plomb. Ce nouveau carburant adoucit tellement les courbes de puissance que Mick Doohan se plaint de voir les explosives 500cc "transformées en grosses 250cc". C’est pourquoi le rookie Max Biaggi va relativement bien vivre son passage des GP250 à la catégorie reine cette même année. Pour autant, ce carburant a-t-il rendu les 500cc plus faciles à piloter à leur extrême limite ? Non. Doohan s’est simplement emparé de cette aisance pour l’utiliser ailleurs. "Avec l’ancien carburant, tu entrais dans le virage, tu claquais la moto sur l’angle, puis il fallait la redresser pour bien sortir, donc la trajectoire avait la forme d’un V, explique le quintuple champion du monde des GP500. Lorsqu’ils ont introduit la nouvelle essence, on a commencé à piloter les 500cc avec de la vitesse de passage en courbe."

LA RÉVOLUTION MOTOGP

Le passage aux moteurs 4-temps du MotoGP symbolise l’étape suivante vers

la facilité d’utilisation. "Tout est plus doux avec les 4-temps, détaille Valentino Rossi, vainqueur du dernier sacre mondial GP500 en 2001 et du premier titre MotoGP l'année suivante. La réaction est plus docile, ce qui permet de piloter plus facilement." C’est vrai, Rossi va connaître des saisons 2002 et 2003 plutôt simples car la Honda RC211V – avec son 5-cylindres – est de loin la meilleure moto du plateau. L’histoire va se corser par la suite. Son taux annuel moyen de chutes lors de ces 18 dernières années de MotoGP est ainsi plus élevé qu’il ne l’était pendant ses deux saisons en GP500. L’apparition du contrôle de traction est une nouvelle étape. Du moins en théorie. "Plus le pilote est intelligent, plus il va tirer profit de cette électronique, mais certains sont trop idiots pour y gagner la moindre chose", tranche le chef mécanicien de Rossi, Jeremy Burgess, aux prémices des assistances électroniques en MotoGP. En 2007, je laisse traîner mes oreilles dans le garage Ducati lors des tests de

Les MotoGP 4-temps, plus douces que les 500cc 2-temps ? Pour Garry McCoy (ici en 2002), peu importe l'outil, la sauvagerie est en lui.

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En 2008, le MotoGP passe au 800cc. Les 4 Fantastiques (Pedrosa n°2, Lorenzo n°48, Stoner n°1 et Rossi n°46) ont fort à faire pour tirer la moelle de ces machines pointues…

Pour Stoner, l'électronique doit se résumer au strict minimum.

pré-saison, à Jerez. La Desmosedici vient tout juste de catapulter Casey Stoner vers la lune et il n’en est pas très content. "Où était le contrôle de traction ?", demandet-il à son chef mécanicien. Stoner est l’un des pilotes les plus intelligents. Il veut que le contrôle de traction le sauve en cas extrême mais, de manière générale, il déteste la technologie car elle gâche sa connexion à la moto avec des coupures d’allumage et du contrôle de couple. Comme tous les pilotes les plus rapides de cette génération en MotoGP, l’Australien a l’habitude de déconnecter le contrôle de traction. Évidemment, cette assistance électronique autorise quelques pilotes moins fins à se rapprocher des plus grands. Les

Stoner & Co doivent chercher ailleurs pour les laisser derrière. Mais encore une fois, les nouvelles technologies ne facilitent pas leur tâche : conserver le strict minimum de contrôle de traction permet à Stoner d’accélérer si fort et si tôt qu’il décharge le pneu avant trop tôt dans le virage, avec un résultat potentiellement désastreux. Comment optimiser la charge du pneu avant et, par incidence, son adhérence ? Facile : il suffit d'utiliser le frein avant au milieu du virage ! "Cela dépend du grip et de plein d’autres choses, explique le double champion du monde MotoGP 2007 et 2011. Si la moto fonctionne vraiment bien, tu n’as peutêtre pas besoin de charger l’avant ; d'autres fois, tu dois négocier l'ensemble

du virage en gardant du frein." A d’autres occasions, Stoner préfère utiliser le limiteur de régime moteur au contrôle de traction, comme dans le virage 3 de Valence, le gauche rapide après la première épingle. "J’y rentre en glisse en sachant que je vais atteindre le limiteur d’une seconde à l’autre, ainsi le limiteur me sert de [béquille] électronique, en m’empêchant de continuer à glisser. Fondamentalement, les assistances électroniques font la même chose que le limiteur de régime, c’est juste qu’elles coupent plus tôt." Le contrôle de traction a certainement réduit le nombre de fractures osseuses résultant d'un highside, mais il y a plus de chutes que jamais en MotoGP, car il existe Les coudes comme stabilisateurs antichute : il fallait y penser, Marquez l'a fait !

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DOSSIER I MOTOGP Jamais les machines du MotoGP n'ont été aussi raffinées qu'elles ne le sont aujourd'hui, à l'image de la Suzuki GSX-RR 2020.

Le contrôle de traction a certainement réduit le nombre de fractures résultant d'un highside, mais il y a plus de chutes que jamais en MotoGP. Lorenzo à Laguna Seca en 2011, Stoner au Mans en 2012, Marquez à Sepang durant les tests hivernaux 2020 : peu importe l'évolution technologique, quand on attaque, on prend des risques…

moins de points sur lesquels les pilotes peuvent gagner du temps. Ils prennent donc plus de risques dans chaque virage. C’est pourquoi Marc Marquez a développé son propre système antichute, en utilisant ses coudes comme stabilisateurs. Ainsi, quand il perd l'avant, il pousse sur l’asphalte avec son coude dans l’espoir de soulager le pneu et de rester sur ses deux roues. Les pilotes de l’ère moderne du MotoGP disposent du meilleur matériel dans tous les domaines : moteurs, châssis, freins, suspensions, électronique et pneus. Leurs motos sont-elles plus faciles à piloter ? Oui, si vous ou moi empruntons la RC213V de Marquez, nous parviendrons à boucler quelques tours (tranquilles !) de Phillip Island sans même nous faire peur. Leurs motos sont-elles plus faciles à piloter à la limite dans la pression d'une course ? Jamais. • sport-bikes-mag.fr I JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2020 I SB123 I 89

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MOTO2 & MOTO3 I SYNTHÈSE QATAR

UN MIRAGE DANS LE DÉSERT ?

Non, l'ouverture des championnats du monde des GP 2020 a bel et bien eu lieu pour les catégories Moto2 et Moto3. Retour sur un GP du Qatar particulièrement lointain… mais intense ! PAR Tommy Marin – PHOTOS PSP Swiderek/Jagielski

MOTO2 10 ans après “S

i quelqu'un me dit 'réveilletoi', je crois que je vais me réveiller…" Tetsuta Nagashima n'en croit pas son trophée. Le pilote Red Bull KTM Ajo vient d'ouvrir sur sa Kalex (rappelons que KTM ne fournit plus de châssis dans la catégorie intermédiaire mais poursuit son effort avec Ajo dans le cadre de sa filière Moto3 > Moto2 > MotoGP) son compteur de victoires en GP. Surtout, il réalise cette prouesse pile 10 ans après que son regretté compatriote Shoya Tomizawa a remporté la toute première course de l'ère Moto2 sur ce même tracé de Losail. Un hommage extraordinaire à un pilote qui a beaucoup compté pour lui. "Shoya était comme un frère pour moi, raconte le Japonais. Je connais très bien sa famille, nous étions toujours ensemble sur les circuits. Il m'a beaucoup appris et j'ai essayé de lui voler ses capacités ! [rires] Quand j'avais 15 ou 16 ans, il était déjà au top niveau ici et je le regardais à la télé. Il était un peu mon héros. Cette victoire est donc très particulière." Ému après coup, Nagashima ne s'est pas laissé décontenancer en piste. Lointain

Tetsuta Nagashima (n°45) aura attendu sa 70e course en Moto2 pour s'imposer. Un début ?

14e sur la grille après "une petite erreur" en qualification, il démontre qu'il est prêt pour la bagarre en signant le meilleur chrono du warm-up. La pole est pour Joe Roberts, autre révélation de ce GP ; le holeshot pour Luca Marini ; le premier tour en tête pour Enea Bastianini. Ces trois-là, avec Lorenzo Baldassarri et Jorge Martin, vont animer les premières places durant la majeure partie de la course. Du deuxième au quatorzième tour, Marini imprime le rythme et semble s'échapper, avec près d'une seconde d'avance sur la meute à mi-course. Mais l'Italien, en délicatesse avec son pneu avant, doit alors rendre la main tandis que Nagashima, Jorge Navarro ou Remy Gardner essorent très fort ! Finalement, le Japonais, 6e à cinq tours de l'arrivée, enclenche le mode attaque

et prend les commandes deux circonvolutions plus tard. Dès lors, il s'enfuit dans la nuit qatarie : personne ne peut le contrer. "Honnêtement, je n'avais pas vraiment de stratégie : c'était la victoire ou la chute, admet-il ensuite. Finalement, j'ai gagné. Je n'ai jamais vérifié l'écart avec les gars derrière car j'avais peur de perdre ma concentration…" Au terme d'une bagarre digne du Moto3, les Italien Baldassarri et Bastianini complètent le top 3 à plus d'1,3 seconde, au nez de Roberts, qui rate de peu son premier podium en GP, et Gardner. Marini part au tapis dans le dernier tour après avoir dévissé au 12e rang. Il est, avec Augusto Fernandez (victime d'une collision avec Stefano Manzi en début de course), l'un des deux pilotes en vue à repartir bredouille du Qatar sur chute.

Classement MOTO2 POS.

PILOTE

1 2

Tetsuta NAGASHIMA

JAP

Kalex

25 pts

Lorenzo BALDASSARRI Enea BASTIANINI Joe ROBERTS Remy GARDNER

ITA

Kalex

ITA

Kalex

USA

Kalex

AUS

Kalex

20 pts 16 pts 13 pts 11 pts

3 4 5

NAT.

MOTO

POINTS

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MOTO3

La 100e pour KTM

a victoire va se jouer entre hommes d'expérience à Losail. Finalement, Albert Arenas arrache son premier succès 2020 à John McPhee, sur le fil ! Le poleman Tatsuki Suzuki plonge en tête dans le premier virage. Mais comme souvent dans la catégorie, les choses bougent très vite et Arenas pointe leader lorsque la longue file indienne s'étire pour la première fois dans la ligne droite des stands. Le pilote Aspar va jouer le rôle de locomotive durant la quasi-totalité de la course, une vingtaine de wagons à ses trousses, certains le doublant le temps de quelques virages… mais jamais bien longtemps. Tandis que le drapeau à damier approche, le chahut s'intensifie et dans le quinzième des dix-huit tours au programme, une touchette avec Suzuki renvoie l'Espagnol au 7e rang. Dans le même temps, McPhee passe à la phase 2 de son plan : après avoir patienté dans le peloton, l'Ecossais attaque de toutes parts et se fraie un chemin dans le sillage d'Arenas. Dans le dernier tour, les deux hommes parviennent à créer un mini-break sur le reste de la bande. Mais Arenas est solide et conserve la première place jusqu'au bout, le monocylindre KTM (manifestement "boosté" cet hiver) lui permettant même

L

de résister à la prise d'aspiration de McPhee et de sa Honda aux couleurs Petronas Sprinta Racing dans la longue ligne droite de l'arrivée. Une jolie façon pour le constructeur autrichien de célébrer sa 100e victoire en Grands Prix ! Jaume Masia, 3e sous le drapeau, se voit rétrogradé d'un rang pour avoir dépassé les limites de la piste dans le dernier tour. Le pilote Leopard cède ainsi sa place sur la "boîte" à Ai Ogura. Même sanction pour Gabriel Rodrigo, contraint d'abandonner sa 5e place à Suzuki. A noter, la très belle 7e place du coéquipier de l'Argentin chez Gresini, le rookie et champion du monde Junior Moto3 en titre Jeremy Alcoba, et la chute de Darryn Binder à l'attaque du dernier tour alors que le pilote du CIP était en lice pour la victoire. Les forces en présence seront-elles

Une nouvelle fois, le Moto3 présage un millésime endiablé.

les mêmes pour la "reprise" à Jerez ? Rien n'est moins sûr, tant le GP du Qatar se révèle chaque année une épreuve à part (par la nature de son tracé, de son adhérence ou de ses horaires). Cette année, Losail conservera une saveur encore plus particulière que d'habitude ! •

Classement MOTO3 POS. PILOTE 1 2 3 4 5

Albert ARENAS John MCPHEE Ai OGURA Jaume MASIA Tatsuki SUZUKI

NAT.

MOTO

ESP

KTM

GBR

Honda

JAP

Honda

ESP

Honda

JAP

Honda

POINTS 25 pts 20 pts 16 pts 13 pts 11 pts

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WORLDSBK & WORLDSSP I SYNTHÈSE PHILLIP ISLAND

PREMIÈRES FOIS

L’ouverture de la saison Superbike à Phillip Island ne manque jamais de panache. Mais là, l’édition 2020 fut un ton au-dessus. Razgatlioglu et Lowes ont brillé en WorldSBK. Locatelli a écrasé le Supersport. En Australie, les premières fois ont été (presque toutes) touchées par la grâce. PAR Maxime Pontreau – PHOTOS PSP Swiderek/Jagielski

WORLD SUPERBIKE cott Redding sur la Ducati officielle, Toprak Razgatlioglu chez Pata Yamaha, Alvaro Bautista associé au HRC, Alex Lowes au KRT… Il faut bien avouer que le Superbike mondial a su ménager notre excitation durant l’hiver. Un tel remaniement de l’échiquier présageait d’une nouvelle partie endiablée, néanmoins toujours placée sous le joug du quintuple champion du monde Jonathan Rea. Et quelle phase d’ouverture ! Après des essais libres impactés par les conditions météo, les choses sérieuses débutaient en Superpole quand Tom Sykes claquait un nouveau record absolu à Phillip Island en 1'29.230 et empochait sa 50e pole position dans la catégorie. Puis tout allait crescendo. Le pilote BMW sortait involontairement Jonathan Rea de la piste dans le premier tour de la saison. Bon dernier, le Roi repartait, réalisait le meilleur tour en course du week-end pour remonter, mais finissait

S

À retenir de ce round Philip Island

par chuter sous la pression de l’effort. Devant, Redding, Razgatlioglu, van der Mark et Lowes se livraient une bataille époustouflante. Le jeune Turc s’imposait finalement d’un rien – devant Alex Lowes (+ 0.007) et Scott Redding (+ 0.041) – pour sa première sur la Yamaha R1 du team officiel, affirmant son statut d’étoile montante du Superbike. Revanchard, Jonathan Rea ne laissait pas la victoire lui échapper en Superpole Race. La partie n’était toutefois pas aisée et, bien que leader durant toute la course, il contenait de peu les jeunes loups Razgatlioglu (+ 0.067) et Redding (+ 0.072). L’apogée de ce round inaugural prenait la forme d’une victoire surprise d’Alex Lowes, le nouveau coéquipier de Rea chez Kawasaki, lors de la seconde course. Pourtant, Lowes était malmené durant le sprint. Relégué en 7e position à la mi-course, il grappillait patiemment des positions jusqu’à subtiliser la première place au n°1 dans l’avant-dernier tour et s’imposer pour quatre centièmes. En remportant une course dès le premier

20°-31°

Sec

week-end, Lowes (dont le contrat a été renouvelé pour 2021) et Razgatlioglu (victime d’un problème technique en C2) ne pouvaient rêver de meilleure entrée en matière chez leur nouvel employeur. De son côté, Scott Redding réalisait de beaux débuts en WorldSBK sur la Ducati avec trois podiums. Et le champion BSB de conclure : "Je pense que je manque encore un peu d’expérience avec les Pirelli, mais j’étais devant avec les autres, c’est très positif." Loris Baz marquait lui aussi les esprits, tant par ses performances que par sa malchance. Des faits de course le repoussaient dans les hiérarchies, ceci alors qu’il se battait dans le groupe de tête en C1 et qu’il menait la C2 un temps. Loris démontrait cependant que le travail réalisé cet hiver avec son équipe Ten Kate payait. Enfin, le HRC, lui non plus, ne passait pas inaperçu à Phillip Island pour son retour en Superbike, Leon Haslam (5e, 8e, 12e) et Alvaro Bautista (6e, chute, 6e) se montrant dans le coup sans pour autant être en mesure de rivaliser réellement avec les tops.

Classement WorldSBK POS. PILOTE

NAT.

MOTO

POINTS

PODIUM 1........... 1. T. Razgatlioglu...... 2. A. Lowes.... 3. S. Redding PODIUM 2 . ........ 1. A. Lowes................ 2. J. Rea........ 3. S. Redding

1

Alex LOWES

GBR

Kawasaki

51 pts

2

Scott REDDING

GBR

Ducati

39 pts

POLE POSITION. ...........Tom Sykes – BMW– 1'29.230 (Record absolu) SUPERPOLE RACE. .....1. J. Rea.... 2. T. Razgatlioglu..... 3. S. Redding MEILLEUR TOUR (C1)............................J. Rea – Kawasaki – 1'30.501

3

Toprak RAZGATLIOGLU

TUR Yamaha

34 pts

4

Jonathan REA

GBR

32 pts

5

Michael VAN DER MARK

NED Yamaha

Kawasaki

31 pts

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WORLD SUPERSPORT P1, FP3, pole position, meilleur tour en course, victoire… Andrea Locatelli n’a pas fait dans la dentelle pour sa première course en Supersport mondial. Le transfuge du Moto2 a littéralement écrasé la concurrence, dominant son plus proche adversaire de quasiment six secondes le dimanche sur la ligne d’arrivée. "C’est un week-end incroyable. Je ne réalise pas encore, expliquait l’Italien après une course en solo. Gagner me manquait. La course n’a pas été facile à cause des conditions de piste différentes des derniers jours et l’obligation de l’arrêt aux stands. J’ai encore des choses à apprendre, mais je pense avoir bien débuté. Le package mis à ma disposition était super." En effet, pour des raisons de sécurité, la manche australienne était une course flag-to-flag dans laquelle un changement de pneus était obligatoire. Une particularité qui n’a en fin de compte pas dérangé le nouveau pilote Bardahl Evan Bros, bien aidé par l’équipe championne du monde en titre. Derrière Locatelli, la lutte était plus intense. Jules Cluzel et Raffaele De Rosa s’affrontaient pour la deuxième position mais, en difficulté dans le dernier secteur du circuit, le Français ne pouvait devancer le pilote MV Agusta. "C’est cool de commencer comme ça, commentait Jules. 16 points, c’est important ! On a vraiment eu du mal tout le week-end aux essais et ma chute à haute vitesse en FP3

F

Première victoire pour Locatelli qui exulte devant De Rosa et Cluzel.

n’a pas aidé. J’avais pas mal de craintes avant la course. Je suis resté concentré et constant, et on a très bien réussi notre flag-to-flag. J’ai pu analyser quelques problèmes – à l’accél’ dans les grands virages – et le team a pu les voir aussi. On va pouvoir progresser dès la prochaine course." Le GMT 94 réalisait d’ailleurs une belle opération en Australie avec, en complément d’un podium, la quatrième place de son deuxième pilote : Corentin Perolari. "J’ai passé un step cet hiver. Je suis désormais en mesure de me battre avec le groupe qui me devançait la saison dernière. Il faut encore travailler pour décrocher ce podium, mais petit à petit je m’en rapproche", analysait le pilote de 22 ans. C’est d’ailleurs Lucas Mahias qui en payait le prix puisque, après une seconde partie de course passée à batailler contre Corentin, il devait se résoudre à clôturer le top 5 dans un dernier tour viril. "La course n’a pas été

très bonne. Je devais accélérer très tôt et cela me faisait glisser. Cela a usé le pneu et finalement créé d’autres problèmes. J’espérais mieux aujourd’hui." Randy Krummenacher, champion SSP en titre, était encore moins à la fête que le Français. Passé chez MV Agusta durant l’hiver, il chutait dans le premier virage, ayant trop élargi sa trajectoire. Qualifié en deuxième position, le Suisse aurait sans aucun doute été un sérieux prétendant au podium. On notait sinon durant ce week-end les bons débuts en Supersport de Philipp Oettl (malgré une chute), Manuel Gonzalez (8e) et Can Öncü (11e). •

Classement WorldSSP POS. PILOTE 1 2 3 4 5

Andrea LOCATELLI Raffaele DE ROSA Jules CLUZEL Corentin PEROLARI Lucas MAHIAS

NAT.

MOTO

ITA

Yamaha

ITA

MV Agusta

FRA

Yamaha

FRA

Yamaha

FRA

Kawasaki

POINTS 25 pts 20 pts 16 pts 13 pts 11 pts

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PART 1

DOSSIER

RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… LES FEMMES ?

Dans ce dossier, nous souhaitons aller à l'encontre des idées reçues sur le sport moto. Oui, une femme peut avoir un poste clef dans le domaine technique le plus nébuleux du haut niveau. Oui, un pilote de GP peut rester un simple motard passionné. Oui, deux adversaires peuvent se révéler de vrais amis. Voilà pour nos trois premiers épisodes. La suite au prochain numéro...

PAS DE P L ACE POU R… LES FEMMES ?

JENNY ANDERSON PLONGÉE DANS LES DATAS

Monsieur Macho vous le dira : "Mais si, il y a les grid-girls !" Heureusement, le rôle des femmes dans le paddock ne se résume pas à tenir les ombrelles. Responsables communication, journalistes, team managers, pilotes – telles Maria Herrera ou Ana Carrasco – ou encore ingénieurs data y ont toute leur place. Nous avons rencontré Jenny Anderson, en charge de l'électronique de la KTM n°44 en MotoGP. PAR Mat Oxley - TRADUCTION M. Pontreau - PHOTOS KTM, Racing Line Photography & ActionSport Photography

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Jenny Anderson en plein debriefing avec "son" pilote Pol Espargaro.

enny Anderson a vécu la majeure partie de sa vie dans les chiffres et les données, plus communément appelés "datas" dans le jargon de la course moto. Alors qu’elle n’était encore qu’une enfant, elle installa son premier capteur sur son propre kart de course. Puis elle en ajouta un, puis un autre, et encore un autre. Enregistrer des données devint une obsession qui l’a suivie quand elle a obtenu son diplôme dans l’automobile puis dans la compétition moto, et même à bord de sa Suzuki SV650… A présent, elle se retrouve à faire l’un des jobs les plus cools, mais aussi l’un des plus durs, du paddock : travailler pour le team usine MotoGP Red Bull KTM en tant qu’ingénieure électronique de Pol Espargaro. Elle est ainsi en charge des diverses stratégies des assistances électroniques – contrôle de traction, anti-wheelie, réglage du frein moteur, transmission du couple, assistance au départ, etc. – qui permettent de garder la RC16 et son V4 de 270 chevaux en piste. L’histoire de Jenny témoigne du bonheur qui existe lorsque l’on se trouve une passion dans sa jeunesse, que l’on suit son cœur et s’investit personnellement dans ce que l’on aime. "De toute évidence, j’aime les datas. C’est mon travail mais aussi ma passion, se présente l’Anglaise de 33 ans. Et l’une des choses que je pré-

J

fère dans la compétition moto, c’est que vous ne savez jamais réellement ce qui va se passer d’un tour à l’autre. Dans l’automobile, vous pouvez comprendre de nombreuses choses beaucoup plus facilement car les dynamiques du véhicule sont connues. Des recherches ont été réalisées durant de nombreuses années. Les équations existent pour expliquer quasiment toutes les situations. Vous pouvez faire des simulations plus précises car il n’y a aucune variable que vous

ne contrôlez pas. Alors qu’en moto, l’élément primordial est un gars pesant de 60 à 70 kg, mais vous ne connaissez jamais sa position sur la moto quand vous regardez les datas. C’est un mystère ! Le pilote fait une énorme différence en moto. Tout dépend de lui : sa confiance, ses aptitudes, son talent. J’ai remarqué cela lorsque j’ai commencé la course moto. Sur deux jours, mes chronos pouvaient être très différents selon ma mentalité, mes sensations et ma confiance."

C'est en karting à l'âge de 9 ans que Jenny a découvert les joies des sports mécaniques.

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PAS DE PLACE POUR… LES FEMMES ? I RENCONTRES

Elle s'est ensuite familiarisée au pilotage moto avec sa Suzuki SV650... après l'avoir bardée de capteurs.

LA COURSE DANS LA PEAU

Jenny Anderson a découvert les sports mécaniques à l’âge de neuf ans, en faisant des courses de karts 60cc pour enfants. "Adolescente, j’ai commencé à m’intéresser aux datas alors que je roulais avec un super-kart de 250cc. Les capteurs devenaient de plus en plus courants et ce fut avant tout de la curiosité. Que pouvions-nous en apprendre ? Les super-karts ont un moteur et une boîte de vitesses spécifiques. Nous avions donc installé un capteur de régime moteur afin de pouvoir jouer sur les rapports. Par la suite, nous avons trouvé tout le matériel que vous pouvez acheter : capteurs d’angle de direction, capteurs de pression de freinage, sondes lambda d’alimentation et d’injection, capteurs de vitesse à la roue… Tout est parti de là." Enfant, elle n’était pourtant pas spécialement attirée par la technologie. "Mes centres d’intérêts à l’école étaient la musique, la menuiserie et l’art. A cet âge, je n’ai jamais pensé que les datas pourraient déboucher sur quelque chose ou être un métier. C’était simplement une passion. J’ai terminé mes études secondaires et suis devenue factrice, pour retrouver la forme tout en étant payée, et je faisais des courses le week-end. Je voulais simplement faire des courses : travailler, économiser de l’argent et tout

Le pilote fait une énorme différence en moto. Tout dépend de lui : sa confiance, ses aptitudes, son talent. Jenny Anderson dépenser en pneus. C’est tout ce qui m’intéressait. Puis, à un certain moment, tu réalises que tu n’es pas Lewis Hamilton et qu’il est temps de trouver un boulot convenable. J’étais un peu perdue, je n’avais pas réellement de voie, donc j’ai recherché des cours du soir à la fac du coin. Il y avait des cours sur l’ingénierie du sport automobile. Je me suis dit que cela pourrait être intéressant. Cela m’a ouvert les yeux sur ce qu’il est possible de faire." Après une formation de base, Jenny a obtenu une licence puis un mas-

ter à l’université Oxford Brookes. "J’ai fait mon mémoire sur un sidecar F1. Je ne sais pas pourquoi ! Je m’étais rendue à quelques courses de motos à Brands Hatch et y avais rencontré Matt MacLaurin et Ade Hope du team de sidecar AMR F1. Je leur ai demandé si cela les dérangeait que j’installe quelques capteurs sur leur side afin d’essayer d’apprendre des trucs. Ils étaient excellents et je leur dois beaucoup." Premier emploi dans une équipe automobile, premier salaire, Jenny commence alors à piloter des motos lors de ses rares week-ends libres. "J’ai toujours été une grande fan de moto et de MotoGP. J’ai grandi en regardant Valentino Rossi, en criant devant ma télé ! C’était un monde différent de celui des voitures. Ces gars étaient comme des gladiateurs. En 2003, j’ai acheté une Suzuki SV650 pour 4000£ et j’avais dessus une tonne de matos pour enregistrer les données, des choses que j’avais retirées de ma voiture. J’ai eu beaucoup de mal à passer de la voiture à la moto. Quand tu commences quelque chose très jeune, tu apprends inconsciemment. Tu ne réalises même pas que tu es en train d’apprendre. Moi, je n’avais pas seulement à apprendre de nouvelles trajectoires en virage – celles pour les motos – je devais oublier mes trajectoires de voiture. En plus,

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RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… LES FEMMES ?

.

tu as besoin de meilleures sensations pour trouver la limite des pneus, et de beaucoup plus de courage aussi..." L’aventure KTM a débuté en 2015, via une petite annonce dans un magazine. "KTM n’avait pas de machine en MotoGP à ce moment-là. Lorsque j’ai postulé pour ce boulot, j’ai supposé que c’était en lien avec leur projet Moto3. Mais lors de mon entretien via Skype avec Dan Goodwin, le chef de l’électronique, il m’a dit : 'Salut, je te fais passer un entretien pour un poste dans notre nouveau projet MotoGP.' J’étais là, genre, ok, c’est cool ! Au départ, ils hésitaient un peu à l’idée d’engager des personnes venant de la course automobile car une certaine mentalité veut que ce soit deux mondes à part. Finalement, l’une des raisons pour laquelle ils m’ont prise est que je travaillais alors sur des voitures GP2 et GP3 qui utilisent le hardware et le software de Magneti Marelli, également utilisés par les MotoGP depuis 2016. Dan m’a dit : 'voici l’ECU

de la moto que nous allons construire, prépare un truc pour qu’il fonctionne'". Jenny Anderson fut tout d’abord ingénieure datas pour le test team KTM MotoGP, puis l’ingénieure datas d’Espargaro, avant de finalement devenir l’ingénieure stratégie de l’ancien champion du monde Moto2. Reste que ces fameuses assistances électroniques sont un mystère pour la plupart des motards. Que fait donc concrètement Jenny Anderson ?

CHIFFRES ET MYSTÈRES

"Pendant les sessions, je suis dans le garage avec Pol, son chef mécanicien et son ingénieur datas. Ce dernier est responsable du bon fonctionnement de la moto, le chef mécanicien s’occupe de tout ce qui touche au châssis et s’il y a quoi que ce soit en matière d’électronique, Pol m’en parle. Si je vois un mouvement étrange sur la moto en observant Pol à la télé, je le note et le questionne quand il rentre au box, pour savoir ce qu’il en est et si

cela le dérange. Nous faisons un débriefing après chaque séance où Pol identifie les points clés qu’il voudrait corriger pour la séance suivante. Plus concrètement, je crée toutes les cartographies du software et les ajuste pendant les séances : couple, contrôle de traction, frein moteur, anti-wheelie, assistance au

J'ai un immense respect pour les pilotes, et surtout pour Pol. Il est tellement motivé et concentré, même si notre moto n'est pas la meilleure sur la grille. 98 I SB123 I JUILLET - AOÛT - SEPTEMBRE 2020 I sport-bikes-mag.fr

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Nouer une bonne relation avec "son" pilote est primordial pour travailler efficacement.

départ et shifter. Les cartographies les plus importantes sont celles du couple et du contrôle de traction. Il faut trouver le bon équilibre entre les deux. Lors des week-ends de course, vous devez envisager plusieurs scénarios. En qualifications, on ne se soucie pas de l’usure des pneus, donc je fais en sorte de ne pas restreindre Pol tout en m’assurant qu’il y ait suffisamment de contrôle de traction pour le rattraper si quelque chose arrive. Pour la course, tu dois penser : comment obtenir la meilleure performance sans détruire le pneu ? Entre les courses, je passe quelques jours à analyser ce que nous avons fait, ce que nous avons appris et ce que nous aurions pu mieux faire. Puis je passe quelques jours à commen-

cer à réfléchir à la prochaine course en me basant sur ce qui s’est passé les années précédentes." Même si le travail de la jeune femme concerne avant tout les datas, il s’agit également de nouer une relation avec le pilote. "J’aime vraiment travailler avec Pol et je comprends de mieux en mieux ses sensations lorsqu’il me les explique. Parfois, il ne s’exprime pas avec des mots, il les décrit avec des gestes, avec des bruits, signifiant que je dois chercher ceci ou cela. L’une des parties les plus importantes de ce boulot est de traduire ce que ressent le pilote, ce qu’il dit, dans ce que tu vois dans les datas. C’est l’une des choses les plus difficiles." La complexité et le mystère entourant la course moto peuvent être tout aussi frustrants que fascinants pour Anderson. "Ce n’est pas évident du point de vue de l’ingénieur. Vous pouvez faire un changement sur la moto, mais la comparaison des datas de deux sessions est souvent très difficile car tu n’y vois pas le changement effectué, tu vois les résultats de ce changement. Des pilotes comme Pol s’adaptent très rapidement. Si ce qu’il fait sur la moto ne fonctionne plus, il va faire différemment le tour suivant. Le problème est que – disons qu’il commence à contraindre davantage la moto avec son corps car elle ne tourne plus comme avant – tu ne vas pas forcément

le voir dans les datas. Parfois, je n’aime pas regarder la télévision – surtout les qualifications – car les risques pris par Pol pour réaliser ce qu’il fait sont incroyables. Et les gens n’apprécient pas que le gars en première position ne soit pas nécessairement le gars qui prend le plus de risques. J’ai un immense respect pour les pilotes, et surtout pour Pol. Il est tellement motivé et concentré, même si notre moto n’est pas la meilleure sur la grille. Que nous nous battions pour la 15e place ou pour le top dix, il est à 100 % à chaque session. J’adore mon travail et je ne peux m’imaginer faire autre chose !" •

❱❱ Des femmes qui comptent Le site officiel du MotoGP (MotoGP.com) a récemment inauguré une série de portraits de femmes clefs dans les paddocks des Grands Prix, dont Maria Herrera (pilote), Raffaella Gianolla (photographe) ou Milena Koerner (team manager). Des articles à retrouver avec le hashtag #WomenInMotoGP

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RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… LA PASSION ?

PAS DE P L ACE POU R... L A PASSI ON ?

JOHANN ZARCO (HYPER) MOTARD

Lorsque je vois sur son Instagram que Johann s'apprête à recevoir une Ducati Multistrada 1260 Pikes Peak, mon sang ne fait qu'un tour. Un coup de fil au pilote français, un autre à Fabien de Ducati France : c'est parti pour un road trip express Paris-Avignon-Paris… dont une journée de balade avec l'un des tous meilleurs pilotes au monde ! PAR Tommy Marin - PHOTOS Marc Robinot & PSP Swiderek

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RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… LA PASSION ?

undi 9 mars. Le coronavirus monte en puissance en Italie. Dans les bureaux de Ducati France, les visages sont tendus. Pas de bises, pas de poignées de mains : les infos en provenance de la maison-mère sont strictes et peu réjouissantes. Je l'avoue : à ce moment précis, je m'en cogne un peu, de cette virulente menace couronnée. Je m'apprête à récupérer une version exclusive du trail sportif Ducati, la Multistrada, baptisée 1260 S Grand Tour. Au programme de la semaine, 2000 km de moto, dont une partie dans la roue de Johann Zarco sur ses petites routes préférées. L'Avignonnais d'adoption n'est pas qu'un pilote d'exception, double champion du monde Moto2, capable de jouer des coudes avec Marc Marquez, Valentino Rossi et toute la clique dans la catégorie ultime des GP : c'est aussi un motard. Un simple motard, ai-je envie de préciser – en portant au mot "simple" sa dimension la plus noble.

L

ovence x de Pr Les Bau

"Super idée, m'a-t-il répondu quand je lui ai proposé cette balade. Avec l'annulation du Qatar et de la Thaïlande, j'ai le temps, et ça va me changer des sujets habituels. Et puis, tu vas voir, les Alpilles, ça vaut le coup." Vous comprendrez donc mon enthousiasme au moment de charger les valises de ma monture, parée d'un superbe gris mat relevé de touches de rouge, subtil compromis d'invitation au voyage et de sportivité. Mardi midi, départ de ma campagne. Il ne fait pas spécialement chaud, je dois même sortir la combinaison de pluie, mais peu importe : le twin de 160 chevaux,

le châssis agile et confortable (avec réglage électronique de la suspension !), le quickshifter up & down, la protection offerte par la bulle et… les poignées chauffantes (ça doit bien être la première fois que l'on parle de cet accessoire dans Sport-Bikes !) me permettent d'avaler les kilomètres le sourire aux lèvres. 650 km et 7 heures plus tard, je béquille la Multi sous l'auvent de notre B&B, situé à 20 km d'Avignon. J'y retrouve notre photographe pour ce sujet, Marc, par ailleurs mon indissociable compère de voyage sur les GP. Habituellement, nous célébrons nos retrouvailles annuelles autour d'une bière à 14 € (argh, une seule à ce prix-là…) dans un hôtel qatari. Cette fois, ce sera autour d'une bonne petite table provençale.

DU VOYAGE AUX VIRAGES

Au matin, la moto et le soleil brillent. On retrouve JZ5 directement chez lui, au milieu des oliviers. Romain, son coach physique et Pierre, un copain, doivent nous rejoindre pour nous accompagner. En les attendant, on parle vélo (j'avoue, une autre passion dévorante…), maison, calendrier – le report du GP des Amériques vient d'être annoncé – et moto, évidemment. Rompus à dompter 280 ch sur les plus beaux circuits de la planète, les as du MotoGP nous expliquent souvent préférer ne pas rouler sur route. Pas qu'ils soient blasés, mais plutôt que la vitesse de défilement à laquelle est habitué leur cerveau est difficilement compatible avec les réalités de la circulation routière. Pour Johann, ça n'est pas un problème : "Je sais faire la part des choses et trouver le plaisir où il est, explique-t-il. Sur route, il n'y a vraiment pas besoin d'aller

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En balade avec Johann Zarco. On a quand même un beau métier...

vite pour profiter de la moto. Et puis, c'est tellement plus pratique que la voiture…" Tout le monde est là. Johann fait craquer sa Multi Pikes Peak, à l'allure et à la sonorité résolument plus sportive que la "mienne". "Elle fait un joli bruit avec cet échappement, sourit-il. C'est une bonne moto ; plus souple et plus facile à emmener que mon ancienne [KTM] Adventure. Les suspensions sont vraiment pas mal, la fourche offre un vrai soutien quand tu freines fort." Euh, Johann, tu me fais peur... On a dit "balade tranquille", tu te souviens ? Romain installé derrière Johann, Marc derrière moi, Pierre au guidon de sa BMW R1250 GS, nous voilà partis. Johann connaît le coin comme sa poche et adopte un rythme enjoué/coulé, suffisamment véloce pour se faire plaisir, sans avoir à accélérer et freiner comme un damné. Inutile de surveiller le compteur : les virages s'enchaînent et réaliser un excès de vitesse relève de la gageure. Tout en essayant de ne pas trop malmener mon passager, je profite de l'instant. Rouler dans la roue de Johann Zarco, c'est quand même un privilège. J'avais certes déjà partagé la piste avec lui, mais curieusement, sur circuit, il roule beaucoup moins souple et n'attend jamais les copains…

L'ÉTINCELLE DE LA PASSION

Au détour de quelques épingles relevées, le village des Baux de Provence se révèle à nos yeux ébaubis. Le spot idéal pour quelques images. Johann, qui m'a laissé imprimer le rythme sur les derniers kilomètres, se réjouit de la gerbe d'étincelles projetée par ma béquille sur un changement d'angle un peu vif. Rien de fou – j'avais juste oublié de passer la suspension en mode "duo" – mais suffi-

Non, Johann n'explique pas à Tommy comment rentrer plus fort sur les freins.

sant pour allumer cette étincelle dans le regard. On ne se refait pas… "Alors, t'en dis quoi ?, me lance le pilote Avintia tandis que Marc met le moment en boîte. C'est plutôt sympa comme endroit, non ?" Tu m'étonnes, il faudrait être difficile… Encore quelques dizaines de kilomètres de sinuosités ininterrompues, de panoramas somptueux, puis c'est l'heure du restaurant, où notre petite troupe retrouve les parents et un ami de longue date de Johann, Jacky Robert, patron de la société Distribike. L'ambiance est détendue, le repas délicieux, et si nous n'avions pas de plans particuliers pour la suite de la journée, Jacky nous propose une visite guidée de ses entrepôts, situés à Arles. Encore un bon prétexte pour avaler quelques kilo-

mètres supplémentaires ! Distribike, c'est ici que la très grande majorité des motos neuves destinées au marché français, toutes marques confondues, sont réceptionnées, mises en route, parfois même modifiées – pour des séries limitées, telle la version Sunset de la Honda CB1000R – avant d'être dispatchées aux concessionnaires situés aux quatre coins de l'hexagone. L'immensité de l'endroit et ses racks surréalistes remplis de motos sur cinq étages ont de quoi épater… Dans le "quartier Ducati", une Panigale 1299 S en cours de préparation nous semble le point de ralliement tout indiqué pour réaliser notre interview, histoire de conclure cette belle journée autour de guidons bracelets. On est quand même dans Sport-Bikes, pas vrai ?

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RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… LA PASSION ?

Johann n'a eu que six jours pour se faire à sa GP19 : frustrant. Mais le Français se veut confiant !

ohann, c'est plutôt rare de voir un pilote MotoGP qui soit aussi un motard. Tu roules depuis longtemps ? Au départ, je suis plutôt scooter. J'ai passé mon permis en janvier 2016, après mon premier titre mondial Moto2, et c'était la période durant laquelle on discutait avec Suzuki. J'ai donc pris un Burgman 400 pour le côté pratique, avec de l'espace sous la selle, le variateur automatique… L'idée était de ne pas rester coincé dans les bouchons, d'éviter de prendre l'autoroute. Après ça, quand je suis passé chez Yamaha, j'ai pris un X-Max 300. Puis chez KTM, pas de scooter… et chez Ducati non plus ! J'ai donc découvert (sic) la moto. Au début, je ne voulais pas d'un trail, car je trouvais ces motos encombrantes. Mais quand tu es dessus, elles se révèlent très maniables et faciles à emmener. Tu peux retrouver avec elles un côté pratique, avec les valises ou le top-case. Ça fait peut-être un peu vieux papy, mais je n'ai pas d'ego là-dessus… [rires]

J

As-tu découvert dans la moto un autre plaisir que le pilotage ? Par rapport au scooter, tu peux tout de suite envisager de parcourir de grandes distances. Et maintenant que j'habite au pied des Alpilles, entre Avignon et Saint Rémy de Provence, j'ai envie de profiter un peu des routes que je connais surtout à vélo, en fait. Clairement, c'est très appréciable de faire une balade comme aujourd'hui, de s'arrêter manger un morceau quelque part… La moto, on l'a dans le sang, je crois. N'es-tu pas tenté de rouler trop vite ? Je pense que si je ne faisais que de la route, je serais très frustré. Je suis à l'aise au guidon et j'aurais presque envie de déhancher légèrement pour mieux emmener la moto, mais ce serait déjà trop ! Donc, je reste raisonnable, bien en ligne sur la selle, et je suis évidemment très chanceux d'avoir la piste pour me lâcher.

Piloter en MotoGP et conduire sur route, on est d'accord que ça n'a strictement rien à voir… C'est certain. Mais tout ce que j'apprends à 300 à l'heure sur circuit m'apporte de la sécurité. Je peux analyser le revêtement en instantané, je sens immédiatement si je dois faire plus attention. Et puis, ces motos sont déjà très performantes – sans même parler d'une Panigale. Avant, je ne comprenais pas l'utilité de disposer de tant de puissance sur route ouverte. Aujourd'hui, je ressens le confort apporté par le gabarit et le coffre moteur de ces machines. Jusqu'ici, nous t'avons connu pilote dans un monde de rigueur, de travail, d'investissement… Vois-tu aujourd'hui davantage la moto comme un art de vivre ? Je reste un pilote et je sens bien que j'ai trop le feu en moi pour en faire un art de vivre : mon approche de la moto reste celle d'un homme qui veut devenir champion du monde MotoGP ! Mais je comprends maintenant ce goût pour la pratique de la moto sur route. Je me vois bien faire des vacances en Corse à moto avec ma compagne. Surtout, je pense que la moto est une vraie solution d'avenir pour désengorger les villes. J'aimerais que les usagers de la route arrêtent de voir la moto comme un danger, mais plutôt comme une solution pour vivre mieux, tout en découvrant des sensations de liberté et de plaisir inégalables. J'aimerais assez m'impliquer pour sensibiliser le public à cette approche positive du 2-roues. Johann Zarco moniteur, c'est donc pour bientôt ? Je pense pour l'instant à ma carrière et à mon objectif de décrocher le titre MotoGP. Mais plutôt que de travailler à découvrir et accompagner le prochain champion du monde Moto3, j'estime aujourd'hui qu'il serait plus intéressant de voir plus grand en

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contribuant à faire sortir les automobilistes de leur voiture – je parle de ceux seuls dans une voiture cinq places, bloqués dans les bouchons avec leur sac posé sur le siège passager, pas du plombier qui a besoin de sa camionnette pour travailler, évidemment. Un scooter à 5000 € peut vraiment changer la vie. Et si le plaisir rejoint l'aspect pratique, pourquoi pas aller plus loin et découvrir les joies de la moto.

APRIL Moto, 14 quai Marmoutier - Tours. S.A. intermédiaire en assurances au capital de 300 000 euros immatriculée à l’ORIAS n°07 008 730 (www.orias.fr). RCS Tours n° 397 855 867. Entreprise soumise au contrôle de l’ACPR – 4 Place de Budapest – 75 436 Paris

Vous êtes impatient de retrouver le motoGPTM

Assez parlé de scooter dans Sport-Bikes : et ta Desmosedici GP19 ? J'ai pour l'instant [et toujours à ce jour] effectué 6 jours de tests avec elle… La découverte s'est avérée plus difficile que ce que j'avais imaginé. Mais après avoir appris et compris pas mal de choses, ça commençait à aller mieux au Qatar, où j'étais souvent dans le top 10. Mes aptitudes de pilote reviennent, avec de nouvelles techniques. Mon pilotage fluide est apprécié par Ducati. Selon eux, ce sera un atout pour moi quand j'aurai compris cette machine. Et l'équipe Avintia ? J'en suis satisfait aussi. Nous sommes tous gagnants, car Avintia, en tant qu'équipe privée, était considérée comme client par Ducati. Aujourd'hui, c'est une vraie équipe satellite avec plus de reconnaissance, de soutien… et de travail. C'est une bonne chose car on a envie d'avancer ensemble. Nous sommes dans une spirale positive commune qui fait du bien. Dall'Igna t'avait promis tout ça, il ne t'a donc pas menti… Clairement, non. On me demande déjà si j'ai la moto 2020, si je vais l'avoir, mais je m'en fous. Je sens que cette Ducati a une capacité de podium, elle est extra. Si je mérite de nouvelles pièces, je suis sous contrat avec Ducati – ils me le répètent souvent – et je les aurai. Je suis conscient que j'ai "suffisamment" pour aller vite, je ne rentre pas dans le jeu du "pourquoi j'ai pas ça". La moto fonctionne bien, je peux travailler sur moi et ça me redonne confiance en moi, ça me motive.

Je reste un pilote et je sens bien que j'ai trop le feu en moi pour faire de la moto un art de vivre. Mais je comprends maintenant ce goût pour la moto de route.

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Nous aussi. Nous avons hâte de vibrer sur la piste avec Johann Zarco et de le soutenir encore cette année sur chacune des courses. #DONNONSLEMEILLEUR

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RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… LA PASSION ?

Un bon resto, un bain de lumière et de décors typiquement provençaux...

Ça n'était pas possible avec KTM… Oui, je me sentais trop limité. Peut-être que je n'ai pas su passer un cap en pilotage pour m'ouvrir une nouvelle porte, comme Pol [Espargaro] a su le faire. Sur la Ducati, en gardant du "moi" et en évoluant progressivement, ça vient, sans chuter. C'est plus facile pour moi de comprendre ce que j'ai à faire dans ce contexte. Je ne suis pas un Marquez qui arrive à tomber cinq fois par week-end et à gagner le dimanche, j'ai besoin de me reconstruire une confiance sans chuter. Ton expérience sur les M1, RC16 et RC213V t'aide-t-elle aujourd'hui ? Cette expérience m'aide surtout psychologiquement. Clairement, même si tu as la meilleure machine, ce n'est pas seulement en posant ton c*l dessus que tu peux viser le top 5 en MotoGP. Il est fondamental d'avoir une bonne moto, de se sentir bien dans l'équipe et de bénéficier d'une base technique stable pour pouvoir travailler sur soi-même. Mais une fois que tu as ça, il faut te sortir les tripes : c'est le haut niveau !

Cette Ducati, tu la situes où sur l'échelle de l'exigence de toutes les machines MotoGP que tu as pilotées ? Hmmmm… Ça reste une MotoGP. Toutes sont vraiment intéressantes. De 0 à 99 % d'attaque, c'est difficile de leur trouver un caractère spécifique. C'est quand tu vas chercher le dernier pourcent que tout change. Et même quand tu fais partie des pilotes de haut niveau, tu as du mal à croire ce dont ces machines sont capables… La Desmosedici répond pour moi parfaitement à la définition d'une vraie machine de course. Et ça me redonne une vraie motivation. •

Épilogue L'interview est terminée. C'est l'heure des au revoir. Je donne rendez-vous à Johann et Marc à Jerez, sans trop y croire. Je ne le sais pas encore, mais ma traversée des Cévennes, ce soir-là, sera mon dernier grand moment de moto avant une longue période. Le brouillard et le "0°C" affiché au tableau de bord après une courte nuit de sommeil, les propos de Donald Trump à la pause-café, les dernières informations en provenance d'Italie, que me divulgue Fabien tandis que je lui rends les clefs de "ma" Multi, me ramènent peu à peu à la réalité. Ce soir-là, nous apprendrons que dès le lundi suivant, les écoles seront fermées. Durant le week-end, le "confinement" est annoncé. Drôle de mot… Plus que jamais, cette parenthèse conservera une place de choix dans mes souvenirs.

... avant une visite chez Distribike. Une belle journée avec un passionné.

Merci Johann pour ce moment de moto !

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Nous aussi, on aime la compète...

...et on sait aussi prendre notre temps. www.enduromag.fr Autopromo EM Sport Bike.indd 1

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RENCONTRES I PAS DE PLACE POUR… L'AMITIÉ ?

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PAS DE PL ACE POU R... L'AMI TI É ?

LORIS BAZ & JÉRÉMY GUARNONI FRÈRES D’ARMES

Quand un pilote bâtit sa carrière à coups de freinages, d'ego, de carénages et de déclarations assassines, les amitiés sincères, dans les paddocks, semblent difficilement tenables. Mais les exceptions existent. Et les "frangins" Loris Baz et Jérémy Guarnoni nous le prouvent. PAR Maxime Pontreau - PHOTOS Tommy Marin

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Il n'a pas été bien difficile de réunir les deux compères autour de plusieurs sports mécaniques...

0 h 30, les téléphones s’emballent. Les messages se multiplient sur notre fil de discussions WhatsApp. Quelques vannes fusent. On se marre, sans être sereins pour autant. Le rendez-vous fixé à midi avec Jérémy et Loris semble prendre la tangente. Nous nous étions pourtant donné du mal pour convenir d’une heure acceptable pour tous : deux journalistes pressés par le temps face à… deux pilotes en vacances. Honnêtement, le message reçu dans la nuit en direct d’une boîte de nuit de Valencia nous avait préparé à pire. On connaissait en plus les habitudes de sorties des deux. Côté face : l’un est champion du monde d’Endurance en titre avec le team Webike SRC Kawasaki France, l’autre est pilote en championnat du monde Superbike pour le team Ten Kate Racing Yamaha. Côté pile : ce sont deux amis de 26 ans [lors de notre rencontre] aimant profiter de la vie. Ils restent d’ailleurs détendus, eux, ce matin. Jérémy devrait raccourcir son temps de douche, habituellement long d’après nos sources. Loris assure "débouler" aussi vite que possible, photo du compteur de vitesse de son Transporter à l’appui. Ok, ils ne vont pas tarder... 12 h 27, circuit de la Ribera, la joyeuse troupe est réunie – les traits tirés – mais réunie. Même en vacances, Loris et Jé-

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ibera de la R Circuit

rémy savent faire la part des choses et restent pros. C’est d’ailleurs pourquoi nous voulions passer l’après-midi avec eux : afin d’entrevoir ces deux aspects de leur personnalité.

DES FARCEURS…

Voilà de nombreuses années que nous suivons Loris Baz et Jérémy Guarnoni et une chose n’a pas changé depuis leurs débuts : ils semblent indissociables. Chacun a pourtant évolué de son côté depuis le championnat d’Europe Superstock 600 à la fin des années 2000. Ils ont même très rarement roulé ensemble en compétition. Loris est passé par le British Superbike, le Mondial Superbike et le MotoGP, avant de revenir en WorldSBK. Jérémy a quant à lui essentiellement évolué dans les catégories Superstock – sans oublier un titre en FSBK – avant de s’imposer en Endurance. Cependant, les deux pilotes restent très liés. Ces carrières parallèles n’ont pas entamé leur amitié. A l’inverse, elles ont peutêtre même renforcé son authenticité. Ils

se considèrent aujourd’hui comme des frères. L’alchimie qui s’observe entre eux ne laisse d’ailleurs aucun doute à ce sujet. On y voit un savant mélange de complicité, d’admiration et de bienveillance, sans oublier une franchise sans équivoque. Surtout, les deux ne cessent de déconner, instinctivement, se répondant du tac au tac, multipliant les fous rires, les sous-entendus et les "private jokes". "Ce sont des farceurs, confirme leur super pote Franck Millet. T’as intérêt à avoir du second degré avec eux sinon tu galères." Cela, on l’avait bien compris alors qu’ils nous chambraient concernant notre sujet : "Les gars, c’est quoi ça ? C’est by night qu’il faut le faire ce type de sujet". Tentés, on a toutefois préféré les réunir sur ce circuit de la Ribera, au sud de Valencia, où Jérémy loue un box pour ses motos d’entraînement. Le complexe dispose d’un tracé de 2,2 km, d’une piste de karting, et se situe non loin d’un beau terrain de cross. Soit tout ce qu’il faut pour que l’on s’amuse, avant de leur laisser la parole…

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PAS DE PLACE POUR… L'AMITIÉ ? I RENCONTRES

oris, Jérémy, quel est votre plus vieux souvenir l’un de l’autre ? Loris Baz : Notre première rencontre. C’était sur une piste en Espagne durant mon premier roulage, vers 2002. J’étais avec mon père. Jérémy, lui, roulait sur une Conti. C’était sa première fois sur circuit je crois. Jérémy Guarnoni : Moi, je me souviens d’une rencontre à Valencia. On était sur une course du World Festival Metrakit, je crois, en 2004-05. J’étais avec mon père et on a vu débarquer une grosse Audi avec deux Metrakit replicas Marlboro Capirossi, comme les teams usine… Nous, on était avec notre camion tout pourri. On s’est dit : 'c’est qui ceux-là ? Ils rigolent pas.' [rires]

L

Et vous êtes rapidement devenus potes ? LB : Pas dès le début. Nos pères ont sympathisé, nous aussi, puis on s’est plus ou moins suivis un certain temps. On ne roulait pas dans les mêmes championnats en Espagne, mais on se croisait régulièrement. JG : Nos pères ayant sympathisé, on a aussi commencé à rouler ensemble. Sans être ultra potes, on passait du temps ensemble sur les courses. On avait dix ans en gros. Comment s’est créée cette amitié entre vous finalement ? JG : Chez Adrien [Morillas], quand il était notre coach. De 14 à 18 ans, on a passé énormément de temps ensemble : à l’entraînement, chez Adrien ou sur les circuits. On faisait les mêmes championnats. On a même été coéquipiers en 2010. On a vécu beaucoup de bons moments et on s’entendait bien, vu nos caractères. C’est à cette période que l’on est passé de simples amis à de vrais frères. LB : Ça a débuté à partir des années 2006-2007. On s’entraînait ensemble, mais on se voyait aussi en dehors de la moto. Maintenant, Jérémy est le frère que je n’ai pas eu. C’est vraiment compliqué d’avoir un pote dans le milieu de la moto, mais tout s’est toujours bien passé avec Jérémy, qu’on ait roulé ensemble ou pas.

ombilical avec ses parents [rires]. En gros, on passe 3-4 mois de l’année ensemble. Hé oui, notre programme c’est : on s’entraîne, puis on déconne, puis on s’entraîne, puis on déconne… Ça a toujours été comme ça, tout en sachant qu’il faut doser. Il y a un temps pour chaque chose. Vous comprenez pourquoi cela accroche entre vous ? LB : On s’entend bien sur tout avec Jérem’, puis on est complémentaires. En fait, on a grandi ensemble durant l’adolescence, à un moment où tu crées plein de choses dans ta vie. Des anecdotes, on en a des dizaines. On a fait des milliers de kilomètres dans le coffre du 4x4 avec une télé et une Playstation pendant que nos pères nous conduisaient d’un circuit à l’autre, par exemple. On jouait et on dormait dans le coffre. Ce ne serait plus possible maintenant… A force d’être autant de temps ensemble, tu te détestes ou tu t’adores. JG : C’est aussi et surtout car on rigole énormément. On est tout le temps en train de déconner. C’est instinctif entre nous. C’est pour ça qu’à une période, beaucoup de monde ne voulait pas nous voir ensemble [rires], même nos parents et Adrien. En fait, on a la même mentalité sur plein de trucs, tout en étant très différents. Tu sais, je ne me prends pas du tout au sérieux et cela ne plaît pas forcément. C’est peut-être pour cette raison que je n’ai pratiquement pas d’amis dans le milieu de la moto. En même temps, je n’en veux pas. Je n’aime pas la mentalité des autres pilotes. Loris est un peu comme ça aussi. On a du mal à s’entendre avec 90 % des pilotes car on n’est pas du tout sur la même longueur d’onde qu’eux.

Jérémy est le frère que je n'ai pas eu.

Loris Baz

Et désormais, vous vous voyez souvent en dehors des circuits ? LB : C’est les vacances quand on est ensemble. On fait surtout la fête et du shopping. Mais on va en profiter un temps, puis se faire un genre de camp d’entraînement pour recouvrer la forme ensuite. JG : Après, tu sais, plus t’avances dans l’âge plus cela devient compliqué. Chacun fait sa petite vie, surtout que l’on vit dans deux régions opposées car Loris n’a jamais trop coupé le cordon

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Loris sévit en Superbike mondial...

...alors que Jérémy s'illustre en Endurance.

Et chacun a sa discipline de prédilection...

... en dehors des compétitions.

Une telle amitié est-elle possible entre adversaires à haut niveau ? JG : Je pense que c’est possible selon les pilotes… LB : C’est presque impossible car nous sommes en guerre sur la piste. Cela n’empêche pas le respect, mais c’est compliqué d’être pote avec quelqu’un contre qui tu dois te battre. Puis il y a énormément de pilotes qui manquent d’ouverture d’esprit, beaucoup sont des mecs bornés qui ne comprennent rien. Personnellement, je ne pourrais pas être pote avec 95 % des pilotes car la plupart ne veulent qu’une chose : te laminer la gueule. Après, il faut savoir prendre un peu de recul. Certains ont plus d’esprit… Mais vous êtes des compétiteurs. Vous roulez pour surpasser les autres. Vous n’êtes pas comme ça ensemble ? LB : Si, mais il n’y a pas de compétition malsaine entre nous, comme cela peut exister avec la plupart des pilotes. Celui qui est le plus en forme le jour J sera devant l’autre et ce n’est pas grave. La motivation est d’être entre potes et non pas de ridiculiser l’autre. Naturellement, quand deux compétiteurs vont faire du sport ils essayent de se pousser. C’est le cas pour nous. JG : Il y a quand même toujours eu de la rivalité entre nous. Mine de rien, c’est peut-être la plus grosse rivalité qu’on connaîtra. Mais oui, elle est saine. Se faire battre par l’autre ne nous donne pas la rage, mais nous pousse à nous surpasser. C’est un boost pour Loris comme pour moi. C’est pour cela que nous avons une si bonne relation. On ne s’est jamais réellement embrouillés. Pourtant, je peux t’assurer que personne ne s’attend dans les côtes à vélo et que c’est toujours à qui roulera le plus vite. Cette rivalité existe dans tout ce que l’on fait, sauf si on se met d’accord avant. Votre amitié aurait perduré, selon vous, si vous vous étiez affrontés au plus haut niveau ? JG : Oui, car lui comme moi acceptons que des personnes soient plus fortes que nous, même si on a de l’égo. Notre relation est

On est tout le temps en train de déconner. C'est instinctif entre nous. Jérémy Guarnoni donc très saine, alors que plein de pilotes n’acceptent pas ça. LB : C’est compliqué à dire. Tu ne sais jamais comment les gens peuvent réagir. Rossi et Gibernau étaient super potes avant que la situation n’aille trop loin en piste. Les frères Chareyre se sont brouillés en jouant un titre mondial en Supermoto. Mais vu notre passé, je pense que oui, elle aurait continué. Vous étiez adversaires lors du dernier Bol d’Or, chacun dans un team officiel. Votre relation a facilité ou compliqué votre duel en course ? LB : Ni l’un ni l’autre. On connaît nos forces respectives. C’était marrant de se battre. JG : Cela l’a compliqué car, dans cette situation, tu donnes 200 % alors que sans lui tu serais peut-être à 180 %. Il fallait toujours que l’un de nous roule le plus vite. Cela a augmenté le niveau, fait ressortir le meilleur de l’autre. Puis tu réfléchis aussi un peu plus en piste… [rires] Loris, penses-tu avoir eu un impact sur la carrière de Jérémy ? Non. On se parle, on se conseille, mais il n’y a pas d’influence. Il a suivi son chemin, naturellement, comme moi. De toute façon, tu essayes toujours d’obtenir le meilleur compromis pour toi, entre le sportif, le financier, tes envies et ce qui est bon pour toi, etc.

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PAS DE PLACE POUR… L'AMITIÉ ? I RENCONTRES

Ajoutez Franck Millet au duo et vous obtenez un trio magique particulièrement déluré.

Et toi Jérémy ? Difficile à dire. Je pense que j’ai eu un impact quand il a arrêté les GP. Ce fut dur psychologiquement et je pense qu’on l’a bien soutenu avec Franck [Millet]. On lui a remonté le moral. On a dû lui faire comprendre qu’il ne pouvait rien se reprocher. Il avait donné son maximum. Tu le sais, on est dans un milieu où nous ne sommes pas maîtres de notre destin. Même un gars comme Fabio Quartararo, il ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui s’il n’avait pas eu Eric Mahé à un moment clé de sa vie. Et c’est dommage d’ailleurs que cela puisse arriver. Mais Loris y est retourné et a remonté la pente.

fort que l’on a vécu. JG : Lorsque l’on a gagné le Bol. C’était génial. On était en pleurs tous les deux, comme des fous. Sa première victoire en Superbike était aussi un truc de fou, mais le souvenir du Bol est au-dessus de tout. C’était énorme… •

Comment vous comparaissez-vous en tant que pilotes ? LB : Jérém’ a beaucoup de talent. C’est un métronome. Il peut reproduire des choses à la perfection. Je l’ai toujours pris en exemple. Moi, je réussis à me surpasser quand il le faut, ce qu’il a peut-être plus de mal à faire. Je suis un attaquant à mort, toujours dans la prise de risques, alors que Jérémy est très réfléchi à moto. Il ne tombe quasiment pas d’ailleurs. Adrien disait de nous : 'Loris, je dois le calmer au départ d’une course. Jérémy, je dois l’énerver pour qu’il aille au combat.' JG : Loris a énormément bossé pour arriver à son niveau actuel. Jeune, il était techniquement moins doué que moi en vitesse. Je roulais plus vite car j’avais un peu plus de talent. Lui faisait un peu n’importe quoi [rires]. Mais il a bossé dur et a atteint le niveau de gars qui, à la base, ont du talent. Niveau physique, il a connu un coup d’accélérateur depuis les GP. C’est vrai qu’il a roulé mieux que moi en Superbike et que je ne suis pas allé en GP non plus, mais au niveau technique on est franchement très proches. Tout ce que fait l’un, l’autre peut le faire. Pour finir, quel est votre souvenir le plus marquant l’un avec l’autre ? LB : Notre victoire au Bol d’Or [en 2013]. Gagner ensemble l’une des plus belles épreuves moto au monde est le moment le plus

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ESSAI I SORTIE DE CAISSE

KTM 1290 SUPER DUKE R

SUPERBIKE "NEW AGE" ? A numéro spécial, essai Sortie de caisse spécial : on délaisse les bracelets pour un grand guidon, en l'occurrence celui de la KTM 1290 Super Duke R 2020. Et on se pose une question : ce roadster (ultra-) sportif peut-il procurer autant de plaisir qu'une hypersport sur circuit ? Notre pilote maison Thierry Capela répond. PAR Tommy Marin & Thierry Capela – PHOTOS KTM

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awasaki KZ, Honda CB-F, Yamaha FZ, Suzuki GS… : dans les eighties, quelques années avant l'avènement des sportives et de leurs guidons bracelets, ces 4-cylindres méchamment préparés, capables de délivrer jusqu'à 150 ch, mettent le feu au Superbike US – et liquéfient des châssis en guimauve. Quarante ans plus tard, ces machines à grand guidon ont rejoint les "café racers" (et leurs bracelets !) dans les annales de notre sport, et jamais les ténors du mondial Superbike n'ont piloté des motos à la fois si performantes et si proches des missiles disponibles chez nos concessionnaires. Parallèlement, les sportives, très en vogue dans les années 1990, ont largement cédé la place sur nos routes aux

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roadsters, catégorie fourre-tout s'étirant sur une large échelle, de sa représentante la plus sage à la plus délurée, du moment qu'elle brandit un grand guidon et laisse contempler sa mécanique. Suzuki Bandit, Ducati Monster ou Triumph Speed Triple ont ouvert la voie des roadsters de caractère au milieu des années 90. Depuis, le marché s'est sacrément étoffé, et les châssis, talons d'Achille des initiatrices du genre, ont furieusement progressé. Quand en 2005, KTM s'invite dans le créneau, ça n'est pas pour faire de la figuration : la 990 Super Duke, en associant à la puissance de son twin une vivacité jamais vue jusque-là, remporte la quasi-totalité des comparatifs auxquels elle participe. 15 ans plus tard, la 5e génération de Super Duke se dote justement d'un nou-

vel ensemble cadre/bras oscillant voulu plus rigide que jamais pour enserrer son monumental bicylindre en V de 1301cc. Avec 180 ch et 140 Nm pour propulser 189 kg à sec, on peut sans hésiter – et avant même de la démarrer – placer le curseur au bout du bout de cette échelle du dévergondage. Tant et si bien que l'on se demande si cette moto n'a pas plus sa place sur circuit que sur route…

COUP DE (GRAND) GUIDON

Thierry, avant d'être notre directeur de publicité, est un ancien pilote. Dix ans de championnat de France Supermotard, cinq Guidon d'Or (dont une bagarre avec Eddie Lawson !), 2e de la Coupe de France Promosport 250cc 1995, des top 10 en Endurance (dont une 2e place Superstock aux 24 Heures du Mans 1999)… : s'il n'a

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ESSAI I SORTIE DE CAISSE Bardée de pièces spéciales, la version "Race" s'approche d'une vraie machine de course.

plus la fougue de ses 20 ans (encore que), notre homme possède un coup de guidon certain. Et lui, il "n'aime pas les roadsters… Les grands guidons, ça me plaît en supermot' ou en enduro, mais le circuit, c'est avec des bracelets." C'est dit. Lorsque KTM France nous convie à participer à la présentation presse de la nouvelle 1290 Super Duke R sur le superbe circuit de Portimao, je prends ainsi un malin plaisir à lui proposer de représenter le mag. Et, il faut bien le dire : il ne se fait pas prier… Mais derrière ce clin d'œil, une vraie question se pose : Thierry, habitué à piloter des sportives, va-t-il prendre du plaisir sur ce roadster, a fortiori sur un tracé façon montagnes russes où le train avant est mis à rude épreuve ? Vous l'avez lu à peu près partout : cette moto, baptisée "The Beast" ou encore "hypernaked bike" par ses concepteurs, est une référence dans son genre, une usine à sensations, une arracheuse de bras et une casseuse de dents (et non l'inverse). Le roadster, c'est avant tout un moteur, et cette Super Duke ne déroge pas à la règle : "Ce bloc est impressionnant, même sur circuit, avoue Thierry au terme d'une journée passée à s'arsouiller avec l'ancien pilote de GP Jeremy McWilliams et le vainqueur de Pikes Peak Chris Fillmore. Il a vraiment un coffre incroyable. Mais il faut impérativement penser à rouler un rapport au-dessus, car à peine tu quittes cette zone "coffreuse"

que tu tapes le limiteur, à 10 500 tr/min. Ça manque d'allonge. On en voudrait plus, mais c'est un twin de 1301cc…" Les changements de rapport, à l'aide d'un quickshifter optionnel, se font sans heurts : "La boîte claque un peu – comme sur beaucoup d'autres motos – mais la sélection est précise et les vitesses verrouillent bien. D'expérience, ce type de quickshifter s'avère plus doux à l'usage sur un 4-cylindres, mais en s'en servant à bon escient – c'est-à-dire, pas à 2000 tr/min – ça passe sans souci."

BLUFFANTE…

Évidemment, qui dit gros couple et grand guidon, dit cabrage. Et si l'on ajoute à ça les nombreuses déclivités de Portimao, tous les ingrédients semblent réunis pour évoluer en permanence sur la roue arrière. L'électronique joue-t-elle son rôle de garde-fou pour garder les choses sous contrôle ? "En réglant le traction control sur 3 – pas en dessous : j'ai essayé et tu pars direct en tête à queue… – la moto est très joueuse. Elle dérive à l'accélération sans te faire peur. En revanche, j'ai désactivé l'anti-wheeling, car j'ai trouvé qu'il coupait la puissance trop violemment. Je préférais jouer avec le frein arrière, très sensible, pour gérer le cabrage. La gestion du frein moteur est elle aussi paramétrable à volonté : personnellement, j'ai préféré en mettre peu, pour pouvoir égrener les rapports rapidement au frei-

nage sans avoir de dribble. En passant l'ABS en mode supermoto [fonctionnel à l'avant, mais pas à l'arrière] ou en le retirant purement et simplement, tu peux placer la moto comme tu veux en entrée de virage. Pour de l'électronique d'origine, sans kit racing, tu peux te "faire" une moto à ton goût, c'est bluffant." Mais pour répondre à notre question de base, il faut s'attarder sur le châssis. "C'est la partie la plus étonnante, poursuit Thierry. Déjà, l'ergonomie est bonne : tu es tout de suite à ta place. La moto en impose mais la selle est creusée et les petits ne seront pas si déroutés

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… MAIS SÉLECTIVE !

Thierry a également eu l'occasion de tester une version ultime de cette Super Duke R 2020, bardée des options disponibles au catalogue Powerparts [liste en encadré] et sobrement baptisée "Race". La facture finale devient franchement salée pour un roadster (18 199 € de moto + 9 303 € d'accessoires, soit 27 502 € au total) mais le comportement de la machine ne manque alors plus d'aucun épice… "Ainsi préparée, on a une vraie pistarde. Certes, elle ne fera pas les chronos d'une 1000 hypersport, mais le plaisir procuré, s'il est décalé, est à la hauteur : le châssis devient moins sensible sur les changements d'angle, encore plus précis au

freinage et en virage… Elle bouffe du point de corde et ne cherche plus du tout à élargir. Là, tu peux vraiment attaquer sans arrière-pensée. J'avais presque l'impression d'être sur une machine de course." Vous l'aurez compris : cette KTM a réconcilié notre pilote avec le roadster sur circuit. "C'est vrai, elle m'a fait changer d'avis. Je dois reconnaître que cette moto permet de prendre un pied énorme et de se sentir en totale confiance pour attaquer." La surprise n'en est que plus grande au moment de prendre la route pour la deuxième partie de l'essai : "Là, par contre, elle m'a semblé vraiment trop extrême, estime Thierry. Ça te saute au visage en permanence et le châssis est ultra raide. Tu as intérêt à remettre de l'électronique partout, à changer les réglages de suspensions et à envisager une selle confort et un saute-vent… Franchement, elle est limite moins confortable sur route qu'une sportive à bracelets. Il faut rouler sur un billard pour vraiment se faire plaisir." Paradoxe de cette Super Duke R : elle est donc plus à l'aise sur circuit que sur route. Sorte de comble pour un constructeur ayant décidé de ne plus construire de sportive homologuée, "parce qu'elles ne sont pas à leur place sur la route", dixit le grand patron, Stefan Pierer. Mais KTM cultive sa différence, et c'est aussi ce qui plaît à sa clientèle. Si la 890 Duke R, avec son bicylindre en ligne, est d'ores et déjà reconnue par nos confrères comme l'un des roadsters les plus amusants de sa génération sur route, la 1290 Super Duke R peut être considérée comme une Superbike à l'ancienne (dans l'esprit, car côté réalisation, on est bien dans le "new age") : de quoi affirmer sa différence et agacer quelques pistards plus conservateurs ! •

Fiche technique

que ça. Le réservoir est haut (il faut bien placer la boîte à air du gros V quelque part…) et massif, mais il ne gêne pas. Le guidon, bien que droit, paraît bas pour un roadster : tu as du coup une position assez naturelle pour du circuit, moins "contrariée" que sur d'autres roadsters. Et le compteur est très lisible, même en plein soleil, et complet. Surtout, j'ai été épaté par le comportement du train avant. J'ai tendance à garder les freins très tard sur l'angle, jusqu'à tordre le pneu puis rentrer dans le virage. Et la Super Duke offre un gros retour d'information du train avant : tu sais où tu en es et tu peux en rajouter, c'est très rare sur un roadster d'origine. Je l'ai en revanche trouvé un peu trop vif sur les changements d'angle – ça bouge un peu, mais ça reste des limites saines, tu ne te fais pas de grosse frayeur. Le freinage est aussi impressionnant pour une machine de ce type : il y a de la puissance, de l'endurance, de la précision ; le feeling du levier reste constant et la moto est super stable."

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Sans rétro

En compét', on vire les rétros. Mais ça n'empêche pas Jacques Hutteau d'y jeter un œil…

À LA FRANÇAISE Deuxième rubrique "Sans Rétro" et déjà, je fais une entorse à mon principe de base, consistant à dresser le portrait d'un pilote français des années 70/80… Pour les 20 ans de Sport-Bikes, je souhaite en effet mettre à l’honneur (très, trop brièvement) nos premiers champions tricolores. PAR Jacques Hutteau – PHOTOS Archives FIM / Maurice Büla

Patrick Pons

Michel Rougerie

Jean-Louis Tournadre

Raymond Roche

Christian Sarron

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n jeune homme de bonne famille détone dans le sport moto des années 70. Sa hargne et sa détermination, insolentes, le mettent en évidence. Repérant ce diamant brut, vainqueur de la Coupe Kawasaki et second du championnat de France 250 en 1972, JCO [Jean-Claude Olivier], le mythique importateur Yamaha, l’engage aussitôt. Bien placé dès ses débuts en Mondial, Patrick Pons confirme son talent et surtout cette rage de vaincre qui le caractérise. En 1974, il stupéfait le paddock en se classant 3e des championnats du monde 250cc et 350cc dès sa seconde année en GP !

U

Patrick Pons

Des chutes, il en connaît plus que d’autres. Mais rien ne semble pouvoir l’arrêter, jusqu’à ces vilaines blessures de 1976, qui le conduisent à trois saisons de doute agrémentées des commentaires acerbes des "amis" jaloux de ses succès. Conservant malgré tout un moral d'acier et une volonté farouche, il retrouve les podiums en 750cc dès 1978. Finalement, c’est au guidon de la surpuissante Yamaha OW31, au terme d'une saison exemplaire et après sa victoire historique aux 200 Miles de Daytona, qu’il remporte la Formule 750cc 1979. Le premier Français champion du monde de l’Histoire des sports mécaniques ! L'année suivante, et malgré une monture légèrement en retrait, Pons souhaite de toute force confirmer ses capacités en 500cc, catégorie reine des GP. Il attaque encore et toujours, glanant quelques points ici et là, jusqu’à ce GP de Silverstone. Le destin l’attend tragiquement dans cette courbe rapide tandis qu’il bagarre rudement avec Michel Rougerie, entraîné lui aussi dans la chute. Le 12 août 1980, Patrick Pons avait 27 ans. Ils seront très nombreux à suivre sa dépouille pour son dernier voyage. Michel Rougerie

Rougerie : un autre garçon incroyablement doué, au style inimitable. En 1975, il termine le championnat du monde 250cc avec le plus grand nombre de points. Le

règlement 2020 l'aurait sacré champion. Mais le titre va à son coéquipier Walter Villa en raison d'un classement alors établi sur les six meilleurs résultats de chaque pilote. Originaire de Rosny-sous-Bois, Michel se fait connaître grâce à une victoire sensationnelle au renouveau du Bol d’Or, en 1969. Mais c’est la Vitesse qui l’intéresse. Aussi bouillant sur la piste qu’en dehors, Rougerie vit à la limite du raisonnable et ses accidents sur route font la une des journaux et le malheur de ses employeurs. Rougerie s'essaiera à presque toutes les catégories, de la Honda 305 avec laquelle il débute à Montlhéry en 1969 aux Aermacchi HD 125, 250 et 350 de GP en passant par la Kawasaki H1R, la Yamaha TZ OW31 750 ou même la 125 Motobécane. Des podiums, des victoires, des records du tour, des copains chanteurs et ce côté frimeur sympa en font une star appréciée du public malgré un sacré caractère. Finalement, après un passage à vide, il renoue avec la première ligne au GP de Yougoslavie 1981. Une course dont il ne verra jamais l'arrivée. A Rijeka ce 31 mai, Rougerie rejoint Pons, Chevalier, Léon au Panthéon des as français partis bien trop tôt et brutalement. Cette même année, un jeune et discret Auvergnat accompagné de son père Maurice et de son fidèle mécano Tintin se met en évidence en terminant 7e du Mondial 250cc. Et en 1982, au terme d’une saison assidue ponctuée de nombreux podiums, Jean-Louis Tournadre démontre son vrai potentiel sur cette Yamaha d’un blanc immaculé, bien moins performante que les machines d’usine de ses adversaires. Aidé par la plupart des pilotes français, il termine 4e de la finale à Hockenheim et devient champion du monde 250cc ! Quel moment inoubliable ! La suite sera plus difficile pour Tournadre, qui reçoit des propositions exceptionnelles auxquelles il ne donne pas suite. Il va finalement se ressaisir en Endurance, notamment au guidon de la Suzuki du SERT. Disparu depuis du "milieu", Tournadre travaille au département pièces détachées de Citroën Sport avant de devenir Responsable des rappels dans le groupe PSA. Un autre Auvergnat, recommandé à JCO par Patrick Pons pour le remplacer pendant sa convalescence, fera une longue et fructueuse carrière en 250, 350, 500 et 750 : Christian Sarron. Son mentor et fidèle mécanicien, Jacky Germain, le connaît mieux que personne et sait orienter, canaliser ce jeune fougueux, habitué à casser plus de carénages que nécessaire. La consécration arrive fin 1984, après avoir déjoué les pièges tendus par ses adversaires et particulièrement ce jeune Allemand impétueux, Manfred Herweh, sur Rotax.

Christian Sarron

En GP500, Sarron fait preuve d’une maestria incroyable, accumulant les pole positions et arrachant fréquemment une place sur le podium. Pourtant, sa (trop ?) grande fidélité en Yamaha et peut-être une forme de complexe d'infériorité vis-à-vis des Américains lui font parfois concéder des positions qui lui semblent acquises. J'en suis convaincu : Christian aurait pu être titré à plusieurs reprises. Après avoir raccroché le cuir, il dirige avec son frère Dominique le circuit de karting Sarron et devient ambassadeur Yamaha sous l’égide de JCO, avant de participer activement à la détection de jeunes talents pour la FFM puis d'accompagner les journalistes d’Eurosport aux commentaires des GP.

Raymond Roche

Même s’il a obtenu son titre en Mondial Superbike, comment oublier Raymond Roche ? Mécano chez Jean Ruggia [papa de Jean-Philippe], il se voit proposer un essai en l’absence du pilote habituel… Ses chronos impressionnants suffisent à le faire titulariser et semer la frayeur dans les rangs des pilotes français. En première ligne dès son premier GP, incroyablement rapide même si ses nombreuses chutes l'empêchent souvent de confirmer, il démontre dans toutes les catégories un talent inné. Raymond obtient nombre de podiums pour finalement décrocher cette superbe 3e place au Mondial GP500 1984 sur sa Honda privée, avec Rolland et Jo, ses mécanos. C’est sur la Ducati officielle Superbike qu’il obtient enfin la consécration méritée, il y a tout juste 30 ans cette année, comme Alain Michel en side-car. Ces garçons ont ouvert la voie à nos autres champions du monde tricolores en GP : Olivier Jacque, Arnaud Vincent, Mike Di Meglio et évidemment Johann Zarco. En attendant le prochain… •

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C'est Jakuto qui le dit Ancien pilote, ex-paddock manager, commentateur intérimaire et consultant technique chez Elf, Jacques Hutteau apporte dans chaque numéro son regard décalé et plein d'humanité sur notre sport favori.

Nouveau départ ette année, mon facteur ne m'a pas proposé son calendrier habituel. Alors j’ai utilisé celui des pompiers. Si j’ai eu du mal à noter, sur ses pages glacées peu compatibles avec la pointe de mon stylo bic, tous les rendez-vous de l’année en GP, WSBK, FSBK et Endurance, j'ai vite compris que j'allais encore avoir de quoi bien m’occuper. Et puis, à force de rayer et de modifier, j’ai dû me rabattre sur le calendrier offert par l’Harmonie du village, sur lequel j'ai reconnu certains voisins derrière un instrument à cordes ou à vent. J’ai fini par le jeter, faute de m’y retrouver, pour utiliser une page sur mon Mac, que je peux enfin modifier au gré des informations de plus en plus fréquentes, donnant un peu d’espoir après cette période terriblement noire. Dans notre petit monde du sport moto aussi, on a tout entendu et tout lu durant cette trop longue phase d'incertitude. Quelques-uns se sont laissé aller à des déclarations pas toujours au goût des personnes visées, qui rétorquaient par réseaux interposés. Beaucoup de questions ont surgi sur la poursuite des compétitions, sur les financements à limiter obligatoirement, sur la survie des équipes dans toutes les catégories, sur le personnel démuni. Des aides ont heureusement été apportées par les organisateurs des championnats, offrant un peu d’oxygène aux petites structures en difficulté. Certaines sont particulièrement touchées, faute des budgets de sponsoring habituellement consentis par des entreprises qui ont d’autres chats à fouetter. On a aussi appris que certains pilotes signaient leur contrat, que d’autres perdaient leur place. On continue à suivre le feuilleton de cet immense champion que l’âge devrait obliger à s'arrêter, mais qui aime trop la course et son environnement pour oser s’en éloigner. On a vu quelques rares privilégiés rouler en motocross tandis que la majorité restait enfermée, à s'entraîner au mieux ou à s’inventer des parcours de course à pied autour de la maison pour conserver une forme physique et mentale cruciale.

C

Des courses virtuelles ont été organisées pour faire patienter les abonnés des différentes chaînes payantes et amuser dans le même temps les pilotes de notoriété, apparus sous un jour quelquefois méconnu des fans. D’aucuns s’y sont affirmés exceptionnellement doués, prouvant qu’ils étaient habitués à ces jeux vidéo. D’autres préféraient s’occuper dans leur garage ou leur jardin. Jamais les oliviers de l'un de nos plus brillants compatriotes n'avaient ainsi été aussi bien taillés ! Nous sommes passés par de nombreuses phases, du découragement à l’espoir, pour enfin entrevoir une reprise des courses. Des essais par-ci, par-là ont confirmé que rouler à moto sur circuit était à nouveau devenu possible. Il aura bien tremblé, notre petit monde. Et même si encore bien des pays sont en difficulté dans le grand Monde, cette fois, les courses vont enfin reprendre. Finalement, on ne débutera le championnat MotoGP 2020 qu’un mois après le tout premier GP 500cc de l'Histoire, au TT de l'Ile de Man, le 17 juin 1949. Il reste bien moins de courses que prévu, mais qu’importe : il y en aura toujours plus que les six organisées cette année-là. Cette saison va offrir un visage particulier, en restant sur le même circuit pour deux week-ends de courses consécutifs. Les erreurs seront interdites avec trop peu de chance de rattrapage, et pourtant plusieurs pilotes vont devoir donner leur maximum pour susciter l'intérêt des responsables d’écurie. Les beaux camions vont beaucoup moins rouler, et les mécanos auront du temps pour échanger dans des hôtels où ils seront à nouveau confinés si la situation n'évolue pas. Mais tous nos pilotes sont prêts et particulièrement excités, impatients d’enfourcher leur monture favorite pour en découdre. Seul regret : vous ne serez pas sur place pour en profiter. Tout au moins, pas dans un premier temps. Croisons fort les doigts pour que vous soyez très bientôt autorisés à remplir des tribunes qui n’attendent que vous ! Oh oui, cette saison 2020 va être étrange, mais tellement intense qu’elle nous offrira un spectacle inoubliable. J'en suis intimement persuadé. •

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