Concours haïku-jardins chimiques

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CONCOURS HAÏKU-JARDINS CHIMIQUES

Richard-Emmanuel EASTES, Hélène MONFEUILLARD Groupe TRACES (ENS), Association Les Atomes Crochus (ENS)

MOTS-CLES : SCIENCE – POESIE – HAIKU – JARDINS CHIMIQUES - CONCOURS

RESUME : En octobre 2008, l’association Les Atomes Crochus a lancé un concours invitant les collégiens et lycéens à composer des haïkus (poèmes japonais) sur les photographies de l’exposition “Recréer la vie ? Jardins chimiques et cellules osmotiques”. Ce projet allait permettre de tisser des liens inédits entre la science et l’émotion, fournir des passerelles vers les sciences aux élèves de sensibilité plutôt littéraire, changer leur regard sur la science et l'intégrer dans une démarche culturelle plus large, éveiller la curiosité pour un sujet interdisciplinaire par nature...

ABSTRACT : In october 2008, the association les Atomes Crochus set up a contest inviting highschool students to write haikus (japonese poems) based on the photographs of the exhibition « Recreating Life? Chemical Gardens and Osmotic Cells ». This project was meant to design new links between science and emotion, to open ways towards science for children who usualy prefer litterature to science, to change the way they perceive science and to integrate it in a broader cultural approach, to stimulate curiosity for a highly interdisciplinary topic…

H. MONFEUILLARD et R.-E. EASTES, Actes JIES XXX, 2009


1. INTRODUCTION

En septembre 2006, la collaboration de deux chimistes, Richard-Emmanuel Eastes et Clovis Darrigan, ainsi que d’un photographe, Stéphane Querbes, donne naissance à une série d’images fascinantes. Sous l’œil du photographe, les scientifiques reproduisent les expériences historiques de la première forme de « biologie synthétique » imaginée par Stéphane Leduc au début du XXème siècle. Les photographies, publiées dans un numéro spécial du magazine La Recherche, remportent une mention spéciale lors du Festival international du scoop et du journalisme d’Angers. L’article de presse devient exposition photographique de l’association Les Atomes Crochus. Elle est présentée, accompagnée de légendes scientifiques, dans différents musées et événements de culture scientifique et technique. Le caractère majestueux et envoûtant de ces photographies inspire une seconde idée : accompagner les images de jardins chimiques de poèmes, et plus précisément de haïkus. Pour la mettre en œuvre, l’association lance alors, avec le soutien de la région Ile-de-France et en partenariat avec l’Association française de haïku, un concours de haïkus à destination des collégiens et des lycéens. Nous présentons ici notre démarche et les résultats de cette initiative.

2. Les jardins chimiques de Stéphane Leduc

2.1. La naissance des jardins…

Pour faire des jardins chimiques, il suffit de se procurer une solution concentrée de silicate de sodium et de la verser dans un récipient en plexiglas. On introduit ensuite dans le liquide de petits cristaux de sels métalliques de diverses natures (CuSO4, Ni(NO3)2, FeCl3, CoCl2, MnSO4… ). Ceux-ci coulent au fond du récipient. Après quelques secondes seulement, des filaments, des arborescences, des cellules se mettent à croître à un rythme variable et de façon plus ou moins aléatoire. Si les cristaux de sels métalliques ont été ajoutés en nombre, c’est une véritable forêt miniature qui apparaît sous les yeux de l’expérimentateur.

Lorsqu’on introduit des sels de métaux dans une solution de silicate de sodium, ils se dissolvent en libérant leur acidité puis, par interaction avec le silicate basique, forment des membranes dont la couleur dépend de la nature du sel. Ces dernières délimitent alors des « cellules osmotiques » dont la membrane est semi-perméable : seules les molécules d’eau peuvent les traverser. Elles sont alors mues, par la propriété physico-chimique des solutions nommée « osmose », vers le milieu le plus concentré en sels métalliques, à savoir l’intérieur de la cellule. H. MONFEUILLARD et R.-E. EASTES, Actes JIES XXX, 2009


Lorsqu’une certaine quantité d’eau est entrée dans la cellule, la pression interne devient trop forte et la cellule éclate. La membrane se reforme alors un peu plus loin. Ce phénomène, appelé « croissance osmotique », est à l’origine des fascinants paysages que forment les jardins chimiques. [figure 1] : Cellule osmotique de chlorure de calcium. La mise en image laisse apparaître les aiguilles de cristallisation, invisibles à l’œil nu. Stéphane Querbes ©

2.2 Recréer la vie ? Une théorie sur les cellules osmotiques…

En inventant la « biologie synthétique », Stéphane Leduc, nommé Professeur à l’Ecole de Médecine de Nantes en 1883, pensait être parvenu à recréer la vie. S’il est indéniable que l’apparence de certaines cellules osmotiques et arborescences chimiques tende à nous faire douter de leur nature inerte, ces théories, aussi élaborées soient-elles, sont désormais indubitablement fausses. Devant les images de jardins chimiques de Stéphane Querbes, le spectateur en proie à la contemplation songera néanmoins à des fonds marins reculés ou à de mystérieux êtres vivants, venus d’on ne sait où, majestueux dans une nuit étoilée de bulles. Stéphane Leduc n’est certes pas parvenu à recréer la vie, mais grâce à phénomène physico-chimique simple, il est tout de même parvenu à contribuer à la réfutation des courants vitalistes de l’époque et, sans s’en douter, à créer de toutes pièces un monde qui allait ensuite susciter chez Les Atomes Crochus l’envie de le magnifier par des poèmes. [figure 2] : Ces fonds marins n’en sont pas : il s’agit bel et bien de croissances osmotiques de chlorure de cobalt et de sulfate de nickel. Stéphane Querbes ©

3. Science et poésie : quels apports, quels rapports ?

3.1 Un mélange improbable ?

Contrairement à une idée communément admise, la science n’est pas l’apanage des scientifiques ; les poètes n’ont pas toujours pour thème de prédilection la contemplation, l’introspection, l’amour et la mort. L’histoire de la littérature compte de nombreux exemples de poèmes qui parlent de science et ce, de longue date. En effet, dans De rerum natura, Lucrèce (Ier siècle av. J.C.) chante déjà la nature et la connaissance. Michel Toyer, qui a réuni un certain nombre de poèmes sur les sciences, les classe en fonction de leur rapport au savoir scientifique. Ces poèmes peuvent ainsi être didactiques, lyriques, flagorneurs, critiques… Il précise certes, reprenant les mots de Baudelaire, que la forme didactique est considérée comme « la plus grande ennemie de la véritable poésie ». Le célèbre écrivain préfère ceux qui, dans leur pratique de la poésie, ont plutôt vocation à « s’abandonner à toutes les rêveries H. MONFEUILLARD et R.-E. EASTES, Actes JIES XXX, 2009


suggérées par le spectacle infini de la vie sur la terre et dans les cieux », car ceci « est le droit légitime du premier venu, conséquemment du poète, à qui il est accordé alors de traduire, dans un langage magnifique, autre que la prose et la musique, les conjectures éternelles de la curieuse humanité ». Mais Michel Toyer souligne que cette forme de poésie, où le poète se prend à jouer au professeur, a cours depuis des millénaires. La forme poétique constitue en effet un merveilleux moyen mnémotechnique pour la transmission des connaissances et permet d’ancrer les textes dans les esprits. Il serait donc illégitime de nier l’intérêt de la poésie didactique si tant est qu’elle soit pratiquée avec quelque véritable talent. L’auteur affirme plus loin : « Le poète doit aller jusqu’à refuser les mots qui renvoient avec trop de précision à la réalité brute. Plutôt que le mot juste qui est signifiant, il doit préférer le mot qui a une beauté évocatrice ». Dans ce cadre, le poète peut indifféremment « utiliser » ou « explorer » la science comme matière pour son art. Les théories scientifiques fascinent en effet souvent les artistes et peuvent constituer des sujets originaux pour les poètes en mal d’inspiration. La perception du monde du poète peut aussi être influencée par les instruments d’observation élaborés par les scientifiques. À l’inverse de la poésie didactique, on obtient alors ici des poèmes teintés d’une coloration scientifique.

De temps à autre, éclate bien sûr également un rapport d’amour haine entre deux mondes qui se jalousent parfois comme dans Science et poésie de Robert Gennerat (1928), où le poète se désole de voir son art relégué derrière le tout puissant savoir scientifique : « Demain n'appartient plus à nos songes exquis, Le poète le perd, le savant l'a conquis !
 Nos œuvres maintenant ne sont plus poétiques... » Se faisant « critique de science », pour reprendre l’expression célèbre de Jean-Marc Lévy-Leblond, le poète rappelle parfois même les scientifiques à l’ordre, condamnant leurs fantasmes de maîtrise toute puissante sur la nature : « Astronomes ! Quittez vos rêves insensés ; Vous embrassez le ciel avec des yeux de myopes Où finit le pouvoir de vos longs télescopes (…) Avant tous vos calculs, la physique a ses lois » (Mercier, 1740, Satire contre les astronomes).

La science et la poésie ne parlent pas le même langage, n’utilisent pas les mêmes méthodes, n’ont pas les mêmes objectifs ni exigences. Néanmoins, elles se croisent et s’entremêlent, s’affrontent, se confrontent, s’admirent. Quand les poètes chantent la science, avec leur langage et leur force de suggestion, ils nous montrent l’incroyable richesse et la complémentarité des regards que l’on pose H. MONFEUILLARD et R.-E. EASTES, Actes JIES XXX, 2009


sur le monde. Et si, comme l’affirme Jean-Pierre Siméon, « la poésie nous rend l’inconnu désirable », la science, elle, nous rend l’inconnu accessible. Mélangeons donc les genres.

3.2 Haïku et jardins chimiques

Les photographies de jardins chimiques ont suscité l’envie d’écrire, au-delà des classiques légendes didactiques et descriptives. D’écrire des poèmes.

Notre choix s’est porté vers le haïku, forme poétique d’origine japonaise déclinée en français sur trois vers et dix-sept mores, unité tonique dont la durée correspond à une brève ou à une fraction de syllabe longue. Ce poème atypique, méconnu des occidentaux, renonce à la rime, au lyrisme et aux grands sentiments. Le haïku capture l’instant, rend hommage à des petits riens trop souvent oubliés. Pied de nez à la grandiloquence, il place le dérisoire et l’ordinaire sur un piédestal. « C’est aussi le poème des choses les plus banales de la vie quotidienne, des bonheurs minuscules et des petits tracas, de la trivialité, de la grivoiserie quelquefois, mais toutes choses le plus souvent écrites avec humour », résume le haïkiste Philippe Costa. Le vocabulaire est simple, voire dépouillé. Une poésie du pauvre, car économe, pourrait-on penser. Mais qui s’y essaie se détrompe vite. La présence d’un « mot de saison », qui ancre le poème dans une période de l’année, est une contrainte mineure, parfois même oubliée des haïkistes contemporains. Une des plus grandes difficultés réside dans l’introduction d’une césure, subtil « coup de théâtre » qui se noue au troisième vers du haïku.

Abeille ! Abeille !

Ne pleurez pas bestioles

Quand on les appelle

même les étoiles qui s’aiment

elles ne viennent pas

doivent se quitter

Jean Antonini

Issa

Le haïku est proche de ce que l’on appelle « image visuelle » en littérature, ce qui légitime le désir de l’associer à la photographie. Le haïkiste Dominique Chipot a d’ailleurs déjà pratiqué ce type d’exercice dans les expositions Note au clair de lune et Un grand feu de joie. Les jardins chimiques n’ont fait qu’une intrusion éphémère dans l’histoire des sciences. En effet, les théories de Stéphane Leduc portant sur les fragiles et minuscules concrétions osmotiques sont vite tombées dans l’oubli. Pour cette autre raison, les haïkus semblent tout indiqués pour parler de ces étranges objets de sciences.

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Les dix-sept syllabes du haïku ne laissent pas la place au discours didactique, le genre poétique n’ayant, comme on l’a dit, aucunement vocation à être explicatif. Libre à celui qui écrit des haïkus sur les photographies de jardins chimiques d’écrire un poème qui parle de science, des émotions inspirées par le phénomène scientifique ou par l’histoire qui lui est liée. On pourra aussi y trouver les différentes images que chacun se fabrique mentalement en observant les photographies, un peu comme lorsqu’on regarde les nuages.

Conformément aux objectifs des Atomes Crochus, ce projet a pour but de susciter le rêve, d’éveiller la curiosité, de changer notre regard sur le monde. Dans ce cadre, la poésie s’impose d’elle même. Conduisant à reconsidérer le rapport entre art et science, elle force à un certain lâcher prise vis-à-vis des connaissances scientifiques, à jouer avec un code… En bref, à se laisser glisser vers la culture tout court. Ancrer la science dans la culture, c’est la rendre peut-être plus attractive, mais surtout fédératrice et riche de sens. Ne contestant en rien l’intérêt ou l’importance de la pédagogie et de la vulgarisation, elle permet de toucher de nouvelles sensibilités, de faire vibrer d’autres cordes…

4. Le concours Haïku-Jardins chimiques

4.1 Déroulement

En octobre 2008, l’association Les Atomes Crochus, avec le soutien deux deux organismes franciliens (la Direction Régionale pour la Recherche et la Technologie et la Région), lance un concours de poésie. Les élèves des collèges et lycées sont invités à composer des haïkus sur les photographies de l’exposition Recréer la vie ? Jardins chimiques et cellules osmotiques. Un site dédié au concours (www.atomes-crochus.org/haikus) les guide dans leur démarche, explicite les notions scientifiques ainsi que les règles de conception de ces poèmes particuliers.

Un jury interdisciplinaire, à l’image de ce projet, est constitué pour évaluer la qualité des poèmes qui envoyés. Composé de scientifiques et d’artistes des Atomes Crochus, ainsi que de trois membres de l’Association française de haïku, il se réunit pour une séance de délibération, après une première évaluation individuelle des poèmes.

L’exposition photographique accompagnée des légendes scientifiques et des haïkus des lauréats est alors envoyée aux établissements scolaires des trois premiers gagnants. Trois chimistes interviennent dans les établissements de ces lauréats, et proposent aux jeunes de « planter » leur

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propre jardin chimique. L’occasion pour chaque lauréat de présenter, lui aussi, l’exposition et le phénomène chimique à ses camarades. [figure 3] : Les jardins chimiques « poussent » sous les yeux des lauréats du concours. Collège Jean Moulin de Saint Michel sur Orge. [figure 4] : Au collège Courbet de Trappes, une enseignante d’arts plastiques a mis en image les textes écrits à partir des photographies.

4.2 Résultats

Près de 500 poèmes ont été envoyés, provenant pour la grande majorité de la région Ile-de-France où la communication avait été la plus importante. Collèges et lycées ont participé de façon équilibrée. [figure 5&6] : Répartition géographique des participants. La plupart des jeunes ont pris part au concours à l’initiative d’un de leurs professeurs et de documentalistes. Les enseignants ont dans plusieurs cas travaillé en équipe. Les professeurs de français ont collaboré avec leurs collègues de sciences physiques et parfois même d’arts plastiques et de langue. Des poètes haïkistes sont intervenus dans certaines classes. Des échanges avec les professeurs et les élèves, ainsi qu’un post-questionnaire, nous ont permis de cerner les aspects du projet qui ont été les plus appréciés. Il apparaît en particulier que nous avons su toucher aussi bien les amateurs de sciences que d’arts plastiques ou de poésie, et amener des enseignants de disciplines considérées comme antagonistes, ainsi que des élèves de section diverses, à travailler main dans la main et à apporter chacun leurs compétences et leur sensibilité. Les médiateurs ont été accueillis avec beaucoup d’enthousiasme dans les établissements des gagnants, lesquels se sont montrés captivés par les jardins chimiques qu’ils ont eu le loisir de faire de leur propre chef.

[figure 7] Stéphane Querbes © Le schtroumpf aquatique nage paisiblement dans l'eau moléculaire Premier prix, catégorie collège : Manon, Coralie et Maurine de Saint-Michel-sur-Orge (91)

[figure 8] Stéphane Querbes © Une goutte de trop Le labo se transforme en jungle tropicale H. MONFEUILLARD et R.-E. EASTES, Actes JIES XXX, 2009


Premier prix, catégorie lycée : Romain de Gennevilliers (92)

5. CONCLUSIONS

Ce projet semble avoir répondu à une envie de décloisonner les matières scolaires et donné une occasion à des enseignants qui travaillent parfois dans des conditions difficiles d’engager leurs élèves dans un projet valorisant et enrichissant à la fois.

Ce premier succès en matière de concours sur la thématique science et poésie, a suscité l’envie de poursuivre cette initiative. Le projet devient donc programme, Les Atomes Crochus envisageant désormais d’organiser un concours annuel mêlant sciences et lettres.

NOTES ET BIBLIOGRAPHIE

EASTES R.-E., DARRIGAN C. & QUERBES S. (2006). Jardins chimiques. La Recherche, n°400, pp. 90-97.

EASTES R.-E., DARRIGAN C., MONFEUILLARD H. & BATAILLE X. (2009). Des vers dans les jardins chimiques pour (re)mettre la science en culture. Alliage, N°64, pp. 73-86

MONFEUILLARD H., EASTES R.-E., DARRIGAN C. & QUERBES S. (2008). Concours HaïkusJardins chimiques. Bulletin de l’Union des Physiciens, Vol. 102, pp. 1437-1444

Les Atomes Crochus est une association créée en 2002 par trois passionnés de vulgarisation scientifique. À travers une large palette d'activités de médiation scientifique dans les domaines des sciences expérimentales et du développement durable, alliant art et pédagogie, elle s'est rapidement muée en un véritable laboratoire d'innovations de la culture scientifique. L’association propose des ateliers expérimentaux, conférence-spectacles, contes scientifiques, spectacles de clown… Informations complémentaires : www.atomes-crochus.org

Créée en septembre 2003, l’Association française de haïku (www.afhaiku.org) a pour mission de promouvoir et favoriser le développement du haïku en français par l’édition de supports d’information et l’organisation de manifestations culturelles.

TOYER M. (2007). Quand les poètes chantent la science. Ed. Presse de l’école des Mines de Paris H. MONFEUILLARD et R.-E. EASTES, Actes JIES XXX, 2009


KUNITZ S. The Science of the Night.

COSTA P. (2000). Petit Manuel pour écrire des haïkus. Ed. Picquier. Arles

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