Trois Couleurs #111 - mai 2013

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le monde à l’écran

le joli mai du 8 mai au 11 juin 2013

À la redécouverte du plus grand documentaire sur Paris.

horreur en espagne nouvelle formule Mais pourquoi leur cinéma est-il si méchant ?

Cannes, Taxi Driver, Ken Loach et Margaret Thatcher…

J.J. Abrams

De Lost à Star Wars, de quelle galaxie débarque le réalisateur de Star Trek Into Darkness ?

no111 - gratuit


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l’e ntreti e n du mois

Vampire Weekend Sur quel pied danser au dernier bal des Vampire ? Troisième album pour les quatre gueules d’ange de Vampire Weekend, et toujours ce sens de la mélodie qui tue, presque agaçant de facilité. Sur Modern Vampires of the City, ils laissent de côté les tubes aux coupes afro tapageuses pour se focaliser sur le songwriting et l’émotion. Moins festif, plus mélancolique, le patchwork pop des anciens de la fac de Columbia a gagné en finesse et en maturité. Premiers en tout, les jeunes New-Yorkais seraient-ils déjà des vieux sages ? Réponse avec leur leader, Ezra Koenig.

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propos recueillis par éric vernay

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le titre de votre album, modern vampires of the city, vient d’une chanson de junior reid. pourquoi cette référence reggae ? J’ai toujours aimé ce morceau et sa phrase « Modern vampire of the city / They’re hunting blood ». Plus largement, l’imagerie du reggae et de la musique rasta, basée sur l’Ancien Testament, m’intrigue. On y trouve des connexions intéressantes… et beaucoup de vampires également : Vampire de Peter Tosh, « Babylon system is a vampire » de Bob Marley (paroles tirées de la chanson Babylon System – ndlr). Des vampires plus métaphoriques que ceux de Twilight (saga pour laquelle ils ont écrit le morceau Jonathan Low en 2010 – ndlr). à quoi ressemble le vampire moderne ? C’est l’avidité qui nous habite tous, ennemie de la paix et de l’unité. Notre nom étant Vampire Weekend, ce titre permettait de décontextualiser le sens premier du terme, en l’accolant à l’image de New York avec une vue de Manhattan en noir et blanc sur la pochette. Avec nos deux précédents albums, nous avions établi un style visuel à tel point reconnaissable que des fans avaient déjà imaginé la couverture de notre troisième disque : une photo Instagram, du texte par-dessus et le tour était joué ! On voulait surprendre un peu. Ce n’est pas un plan de rue, avec le côté sale, petit, humain, mais un plan large, mystérieux et romantique. Ça correspond à l’atmosphère du disque. cet album clôt une trilogie entamée en 2008. y a-t-il un concept derrière ce troisième volet ? La chanson prime sur le concept. Les meilleures thématiques sont celles qui viennent involontairement. En l’occurence, sur ce disque, le fait de grandir, de vieillir, de mourir. On parle aussi, d’un point de vue plus général, du changement d’identité des villes et des gouvernements. à 28 ans, vous vous sentez déjà vieux ? Je ne me sens ni jeune ni vieux. J’ai déjà posé la question à des gens de l’âge de mes parents. Mon

père m’a par exemple répondu qu’il se sentait toujours dans un état d’esprit post fac ; un état qu’on peut garder toute sa vie, suivant la manière dont on appréhende le monde. Bien sûr des choses changent, il faut travailler, on se fatigue, etc. Mais il n’y pas de grands secrets. Peu de gens vivent un moment de révélation qui les change à jamais. Aucun d’entre nous n’a d’enfant, j’imagine que ça, ça doit te changer. On est encore dans cette zone intermédiaire. avec ses vieux clavecins et ses chœurs en latin, le disque ressemble à un voyage dans le temps. on pense parfois au mordant mélancolique des kinks. Nos précédents albums étaient tournés vers des sons plus électroniques. Le choix logique aurait été de continuer dans cette direction. J’adore les synthés, mais on avait besoin d’air frais. Le vieux son était parfait pour ça. Something Else by the Kinks et The Kinks Are the Village Green Preservation Society (deux albums des Kinks – ndlr) ont toujours compté pour moi. Quand j’étais ado, j’ai eu une connexion immédiate avec leur musique, ce mélange d’humour et d’émotion. L’album a un côté doux-amer et mélancolique, mais nous ne sommes pas nostalgiques d’une époque, les années 1960, que nous n’avons pas vécue. Je suis ravi de vivre aujourd’hui. Quoique passer une journée au Moyen Âge pourrait être marrant… Enfin, pas plus d’une journée ! vous consacrez une chanson à l’explorateur anglais henry hudson. qu’est-ce qui vous fascine chez ce personnage ? Sa mort (en 1611 – ndlr) m’a toujours intrigué. De nombreux lieux portent son nom, à New York et partout où il est allé : l’Hudson River, la Hudson Valley, la Hudson Bay (au Canada – ndlr). C’est là que son équipage s’est mutiné et l’a laissé mourant. Ce site porte son nom à la fois parce qu’il l’a découvert et qu’il y est mort. Cette histoire a un côté terrifiant. Ce qu’on croit permanent est en fait instable. Savoir, par exemple, que New York a changé plusieurs fois de nom,

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« d’une certaine manière, vampire weekend est notre projet hip-hop ! »

ça fait réfléchir à la relation qu’on entretient avec de tels lieux. Depuis une dizaine d’années, les gens, aux États-Unis, se demandent quelles leçons ont été tirées de l’histoire de systèmes qui comme l’Empire romain ont dominé le monde avant de péricliter. Sans forcément penser que les sociétés industrialisées vont s’effondrer la semaine prochaine ou que le dollar n’aura plus de valeur à la fin de l’année, ce genre d’idées de déclin vous affecte forcément. Votre disque est plus sombre et introspectif que les précédents. En avez-vous marre de faire la fête ? Eh bien. Oui. (rires) Il y a trop de musique pour faire la fête aujourd’hui. La musique festive a certes donné des choses géniales, comme LMFAO, mais la pop contemporaine est trop orientée club. Pour un auteur, il y a quelque chose de plus noble à explorer l’avant et l’après-fête. vos influences africaines sont moins évidentes que par le passé. Sur le premier album, on revendiquait nos inf luences africaines de manière tapageuse. On voulait annoncer au public notre esthétique, à savoir une combinaison entre look preppy (étudiant BCBG en classe de prépa – ndlr) et jeu de guitare africain qu’on trouve clairement énoncée dans la chanson Cape Cod Kwassa Kwassa. Maintenant qu’on est plus âgés – et sans doute plus confiants dans notre approche musicale –, on peut se calmer là-dessus. Mais ça fait partie de nous, certains accords de notre nouveau disque en témoignent. De manière plus discrète. Désor mais, les émotions prennent le dessus sur les influences. votre chanson « step » est inspirée par un sample du groupe de rap souls of mischief.

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avant vampire weekend, vous aviez un projet hip-hop appelé l’homme run. pourriez-vous revenir au rap un jour ? D’une certaine manière, Vampire Weekend EST notre projet hip-hop ! De plus en plus, les artistes – du moins ceux que j’admire – tendent à ne plus penser la musique en terme de genres musicaux. Kanye West n’existerait pas s’il n’était pas si ouvert d’esprit. Pareil pour Bon Iver. Il ne faut pas se mettre de barrières. Sur l’album il y a des choses qui sonnent hip-hop par exemple. Est-ce que sampler des batteries dénature notre son ? Non. J’ai toujours écouté du rap, les premières chansons que j’ai écrites, c’était du rap. Mais Vampire Weekend me permet d’explorer au mieux mes idées de textes. après cette trilogie, allez-vous faire une prélogie à la star wars ? Notre album est mélancolique, mais la dernière chanson, Young Lion, est pleine d’espoir. Ce serait parfait si notre quatrième album était comme « un nouvel espoir » (titre de l’épisode IV de La Guerre des étoiles – ndlr). Nous sommes dans une situation géniale où l’on peut faire ce que l’on veut sur le prochain disque. On a appris que notre groupe pouvait évoluer, mais aussi ce qui reste inchangé et nous définit. Si tu t’ennuies, tes fans s’ennuient ; si tu changes trop, tu fais figure de charlatan ou d’opportuniste : le challenge, c’est de trouver le juste milieu. Les groupes que j’admire, de Radiohead à The Clash en passant par les Beatles, maîtrisent parfaitement cet équilibre. Je suis à la fois fier de notre cohérence sur la trilogie et très excité par le champ de possibilités pour notre prochain album. Modern Vampires of the City de Vampire Weekend (XL Recordings /Beggars) Sortie le 14 mai

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LE MONDE À L’ÉCRAN par juliette reitzer et étienne rouillon illustration de charlie poppins

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Sommaire ÉDITEUR MK2 Agency 55 rue Traversière, 75012 Paris Tél. : 01 44 67 30 00

Du 8 mai au 11 juin 2013

L’entretien du mois Vampire Weekend Édito  Le monde à l’écran Preview Before Midnight de Richard Linklater Les actualités Spécial Festival de Cannes À suivre Jules Sagot dans Tu seras un homme Exclusif Guillermo del Toro raconte Pacific Rim L’agenda Les sorties de films du 8 mai au 5 juin 2013

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Elisha Karmitz (elisha.karmitz@mk2.com) RÉDACTEUR EN CHEF Étienne Rouillon (etienne.rouillon@mk2.com) RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE Juliette Reitzer (juliette.reitzer@mk2.com) RÉDACTEURS Quentin Grosset (quentin.grosset@mk2.com) Laura Tuillier (laura.tuillier@mk2.com) DIRECTRICES ARTISTIQUES Marion Dorel (marion.dorel@mk2.com) Sarah Kahn NOUVELLE FORMULE Direction graphique : Sarah Kahn (hello@sarahkahn.fr) Maquette : Marion Dorel

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histoires du cinéma

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CHEF DE PROJET COMMUNICATION Estelle Savariaux (estelle.savariaux@mk2.com)

Star Trek Into Darkness 25 Rencontre avec J.J. Abrams, réalisateur de Lost et de Star Wars Very Bad Trip 3 30 Reportage sur le tournage à Las Vegas Fast & Furious 6 32 DennisMcCarthy, « picture car coordinator », raconte Le Joli Mai 34 Rencontre avec le chef opérateur Pierre Lhomme L’Esprit de 45 40 De Churchill à Thatcher, interview de Ken Loach Albert Serra 44 Portrait d’un cinéaste moins taiseux que ses films Scène culte 46 Les Demoiselles de Rochefort de Jacques Demy Cinéma d’horreur espagnol 50 Mais pourquoi est-il si méchant ? La Fille du 14 juillet 54 L’interview jeux de société du réalisateur Antonin Peretjatko Nouveau genre 56 Le drame de la femme de second choix Olive Thomas 58 Portrait de l’actrice du muet morte à 25 ans Gender studies 60 La violence féminine dans Foxfire… de Laurent Cantet Porfirio 62 L’homme qui a détourné un avion en fauteuil roulant Hollywood stories 64 Epcot, la cité utopique de Walt Disney, épisode 1 Portfolio 68 Taxi Driver, Steve Schapiro commente ses photos de tournage

CHEF DE PROJET Clémence Van Raay (clemence.vanraay@mk2.com)

les films

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SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Vincent Tarrière ICONOGRAPHE Juliette Reitzer STAGIAIRE Maureen Lepers ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO Stéphane Beaujean, Ève Beauvallet, Chris Bourn, Tania Brimson, Léa Chauvel-Lévy, Emmanuel Chirache, Jérémy Davis, Bruno Dubois, Oscar Duboÿ, Julien Dupuy, Yann François, Clémentine Gallot, Claude Garcia, Camille Griffoulières, Nicolas Hecht, Donald James, Yves Le Corre, Gaétan Mathieu, Jérôme Momcilovic, Wilfried Paris, Michaël Patin, Elsa Pereira, Alexandre Prouvèze, Bernard Quiriny, Guillaume Regourd, Éric Vernay, Amélie Weill, Etaïnn Zwer ILLUSTRATEURS Marion Dorel, Stéphane Manel, Charlie Poppins PHOTOGRAPHES Fabien Breuil, Jean-Romain Pac DIRECTRICE COMMERCIALE Emmanuelle Fortunato (emmanuelle.fortunato@mk2.com) RESPONSABLE CLIENTÈLE CINÉMA Stéphanie Laroque (stephanie.laroque@mk2.com)

ASSISTANTE CHEF DE PROJET Anaïs Benguigui (anais.benguigui@mk2.com)

Le meilleur des sorties en salles Les DVD De l’influence des rayons gamma... de Paul Newman

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cultures

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L’actualité de toutes les cultures et le city guide de Paris Illustration de couverture Cruschiform pour Trois Couleurs

© 2013 TROIS COULEURS issn 1633-2083 / dépôt légal quatrième trimestre 2006. Toute reproduction, même partielle, de textes, photos et illustrations publiés par MK2 Agency est interdite sans l’accord de l’auteur et de l’éditeur. Magazine gratuit. Ne pas jeter sur la voie publique.

Le plus grand drive-in du monde sous la nef du Grand Palais

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Le démon de minuit Après Before Sunrise (1995) et Before Sunset (2004), voici la suite des vertiges amoureux de Céline et Jesse. Dans ce nouveau volet de la trilogie de Richard Linklater, la militante écologiste française (Julie Delpy) et l’écrivain américain (Ethan Hawke) profitent de leurs vacances en Grèce pour s’interroger sur la durabilité de leur couple. Bavard au premier regard, le film se déploie en quatre longues scènes de la vie conjugale : un voyage en voiture, un déjeuner, une promenade, une nuit d’hôtel. Une façon d’étirer un dialogue très écrit mais rendu spontané pour réellement fouiller la psychologie des personnages. quentin grosset

©diaphana

Before Midnight de Richard Linklater Avec Julie Delpy, Ethan Hawke… Distribution : Diaphana Durée : 1h48 Sortie le 26 juin


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Les actualités Vous n’avez que cinq minutes ? Ce qu’il faut retenir du 66 e festival de Cannes.

> L’INFO GRAPHIQUE

34h02

Cannes : La sélection officielle en chiffres

C’est la durée totale des films en compétition officielle mis bout-à bout, soit sept trajets Paris-Cannes en train.

RESTE DU MONDE

20 RÉALS

FRANCE

1 DUO DE RÉALISATEURS > 8 sélections (Les frères Coen)

D’OÙ VIENNENT LES FILMS EN COMPÉTITION OFFICIELLE ?

U.S.A.

LE NOMBRE DE SÉLECTIONS À CANNES POUR LES RÉALISATEURS EN COMPÉTITIONS

6 FILMS

6 FILMS

8 FILMS

2 RÉALISATEURS > 5 sélections 1 RÉALISATEUR > 4 sélections (James Gray) 6 RÉALISATEURS > 3 sélections 4 RÉALISATEURS > 2 sélections 6 RÉALISATEURS > 1e sélection

Les temps forts de la compétition ©bronx (paris). photo : paul newman et joanne woodward ©1963 by paramount pictures corporation and llenroc productions

Quelques jours après l’annonce officielle, le très attendu film de vampires de Jim Jarmusch, Only Lovers Left Alive, est venu grossir les rangs de la compétition, portant à vingt le nombre de métrages en lice pour la Palme d’or. Autres promesses excitantes : James Gray plongeant Joaquin Phoenix et Marion Cotillard dans l’Amérique des années 1920 (The Immigrant) ; A Touch of Sin, le nouveau film du Chinois Jia Zhangke ; les retrouvailles de Roman Polanski et Emmanuelle Seigner dans La Vénus à la fourrure ; la rencontre de Benicio del Toro et Mathieu Amalric orchestrée par Arnaud Desplechin (Jimmy P.)… Mais aussi : des prouesses capillaires (les cheveux bleu de Léa Seydoux chez Kechiche, le brushing stressant de Matt Damon chez Soderbergh), du sang et de la sueur (Only God Forgives de Nicolas Winding Refn, Shield of Straw de Takashi Miike, Michael Kohlhaas d’Arnaud des Pallières), de l’amour (Un château en Italie de Valeria Bruni Tedeschi), un biopic folk (Inside Llewyn Davis des frères Coen). Verdict le 26 mai. juliette reitzer

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> LE CHIFFRE DU MOIS FILM réalisé par une femme (Un château en Italie de Valeria Bruni Tedeschi) sur les 20 que compte la compétition officielle – 0 l’an dernier. C’est donc dans la sélection Un certain regard qu’on verra les films de Sofia Coppola, Claire Denis ou Rebecca Zlotowski.

Calé

Décalé

Recalé

CANNES

CANNE

KANE

Paul Newman sur l’affiche, Steven Spielberg à la présidence et Leonardo DiCaprio montant les marches pour Gatsby le magnifique, cette année le Festival de Cannes est paré des couleurs américaines les plus chatoyantes. 2013, yes we Cannes.

Artiste multifacette dingue de musique de La NouvelleOrléans, Hugh Laurie tombe la canne du célèbre Dr House et s’offre cet été un passage dans l’hexagone pour présenter son nouvel album, Didn’t It Rain. À cette occasion, l’artiste sera le 9 juillet au Grand Rex.

Détrôné par Sueurs froides d’Alfred Hitchcock dans le classement des cinquante meilleurs films établi chaque décennie par le British Film Institute, l’immense Citizen Kane d’Orson Welles a neuf ans pour reconquérir le cœur des critiques. m.l.

> LA PHRASE

Gilles Jacob

©fdc

©gabriel olsen / filmmagic

(président du Festival de Cannes, à propos de la réalisatrice Jane Campion, à qui sera décerné un Carrosse d’or)

> LA NOMINATION

Spielberg président La première sélection cannoise de Steven Spielberg remonte à 1974. Il ne monta pas les marches pour rien puisque Sugarland Express remporta le Prix du scénario. Le président du jury du Festival de Cannes 2013 fut ensuite un grand habitué du hors compétition : E.T. l’extra-terrestre, La Couleur pourpre, Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal lui permirent de revenir sur la Croisette. Et l’an dernier, c’est dans le cadre de la sélection Cannes Classics que fut projetée une version restaurée des Dents de la mer sur la plage du Palais. Welcome back. laura tuillier

« LADY JANE, COMME JE L’APPELLE DEPUIS QU’ON SE CONNAÎT, C’EST UNE FORCE, UNE UNITÉ, UN LYRISME SEC, UNE VIOLENCE. ELLE SAIT DE QUOI ELLE PARLE. »

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©musee du quai branly - claude germain

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> EXPOSITION

Le Ghana affiche ses angoisses L’installation « Le Rire, l’Horreur et la Mort » rassemble des affiches de vidéoclubs ghanéens, désuètes et naïves, dont les thématiques de mort et de violence évoquent une époque trouble de mutations. Les affiches aujourd’hui exposées dormaient dans les fonds du musée du quai Branly depuis 2003. Germain Viatte, commissaire de l’exposition, confesse : « Il y a le risque du kitsch, certes, mais il s’agit d’un moment historique au Ghana. Dans les années 1980, le cinéma en salles est

remplacé par des productions pour vidéoclubs. Ce qui se dégage de ces peintures, ce sont les influences du fantastique anglais et d’Hollywood, mêlées à l’irréalité d’un pays qui passe d’une culture de brousse à une vie citadine où l’argent est roi… » Du sang, de l’humour, des créatures maléfiques s‘opposant à des images pieuses, tel est le cocktail étrange et angoissé qui s’affiche ici, peint à la main sur des sacs de toile usagés. yves le corre Jusqu’au 19 mai au musée du quai Branly

LU SUR LE WEB

« ET EN FAIT À LA FIN, ARTHUR ET LES CHEVALIERS DE LA TABLE RONDE SE FONT ARRÊTER PAR LES FLICS. » (Monty Python, sacré Graal vu par le site etenfaitalafin.fr qui se fait une spécialité de vous gâcher les films que vous n’avez pas encore vus)

> 3 ACTUALITÉS CINÉ

©jason laveris / filmmagic

©rda/bca

© dominique charriau/wireimage

par q.g.

DÉCÈS

INSÉPARABLES

DÉMISSION

Star des beach movies, ces films de plage (Beach Party, 1963) dont les ados américains des années 1960 étaient si friands, Annette Funiccello est décédée à 70 ans. Elle a fait partie de la première version du Mickey Mouse Club, vivier de talents comme Ryan Gosling.

On la verra bientôt en star du X dans Lovelace de Rob Epstein et Jeffrey Friedman. Amanda Seyfried ne quitte plus les deux réalisateurs : elle les rejoindra pour The Girl Who Conned the Ivy League, film sur une cancre qui entre à l’université en se faisant passer pour une autre.

Après les défections en cascade de Jude Law puis de Michael Fassbender (remplacé pour finir par Bradley Cooper), la réalisatrice Lynne Ramsay a quitté à son tour le tournage du western Jane Got a Gun. Gavin O’Connor (Warrior) a pris sa suite. Next ?

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©boston globe via getty images

DERNIÈRE MINUTE

> MORCEAUX CHOISIS

Ed Wood

« Vous jouez une dactylo ? Apprenez à taper à la machine ! Une blanchisseuse ? Faites la lessive ! […] Jouez au baseball, comme Doris Day. Jouez au football, comme Linda Darnell, paix à son âme. Battez-vous, oui, battez-vous comme Shelley Winters et Marie Windsor. Skiez, comme Claudette Colbert. Apprenez à monter à cheval. Bette Davis l’a fait, en tant que précurseur des centaines de westerns tournés chaque année pour le cinéma et la télévision. Nagez ! Comme Esther Williams, ou Marilyn Monroe, autre reine du glamour à avoir rejoint l’au-delà. Dansez, tous les styles : du menuet au twist, de la valse au tango et du charleston au swing. »

©20th century fox

Extrait du livre Comment réussir (ou presque) à Hollywood. Les conseils du plus mauvais cinéaste de l’histoire d’Ed Wood (Capricci)

L’Odyssée de Pi d’Ang Lee

> COULISSES

La crise des effets spéciaux En février, les oscars ont soulevé un paradoxe, récompensant pour L’Odyssée de Pi d’Ang Lee un studio d’effets visuels qui venait de se déclarer en faillite et de licencier deux cents employés. Si Rhythm & Hues a finalement trouvé un repreneur, l’incident a attiré l’attention sur la crise du secteur des effets spéciaux, matérialisée par des

licenciements, notamment chez DreamWorks Animation, et par la faillite l’an dernier de Digital Domain, un studio fondé par James Cameron. Une manifestation en marge des oscars a révélé que les studios de VFX (pour « visual effects »), maillon clef du succès des blockbusters hollywoodiens, peinaient à survivre. Selon un employé du studio MPC (Prometheus), « la globalisation du travail et la compétitivité tarifaire sont en cause, car c’est un travail qui coûte très cher. » Dernière victime, Disney a annoncé la fermeture de la division jeux vidéo LucasArts début avril. clémentine gallot

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Amy Adams et Christian Bale sur le tournage d’American Hustle

En tournage

Apichatpong Weerasethakul (Oncle Boonmee…) a annoncé le début imminent du tournage de son prochain film, Cemetery of Kings. Le réalisateur cherche encore quelques financements pour cette histoire de soldats victimes d’une mystérieuse maladie du sommeil. Aux États-Unis, David O. Russell (Fighter) tourne American Hustle, l’histoire d’une opération du FBI dans les années 1970, avec Christian Bale, Amy Adams et Bradley Cooper. Côté français, on vient d’apprendre que Mia Wasikowska serait à l’affiche de Sils Maria, le prochain film d’Olivier Assayas, avec Juliette Binoche. Elles y incarneront un même personnage, Sigrid, une actrice, à deux moments décisifs de sa carrière. l.t.

DISPARITION

R.I.P. la pellicule Le 2 avril dernier, la sentence est tombée : après Kodak, c’est au tour de Fujifilm d’officialiser l’arrêt de la quasi totalité de sa production de pellicules. Une nouvelle qui reflète sans mal l’évolution bien concrète du cinéma vers le tout numérique. m.l.


à su ivre

Jules Sagot Le jeune comédien débute sur les écrans dans Tu seras un homme, dont il cosigne le scénario. par laura tuillier - photographie de jean-romain pac

J

ules Sagot arrive sac à l’épaule : il habite Bordeaux, où il finit son école de théâtre. Cet ancien élève du conservatoire du Ve arrondissement a été le baby-sitter du fils de Benoît Cohen, avant de devenir le héros de son film : « Benoît m’a demandé d’écrire une histoire inspirée de la relation que j’avais avec son fils, Aurelio. J’ai écrit un premier jet, assez sombre, qu’il a rendu plus léger. » Dans Tu seras un homme, il incarne un jeune homme proche de lui dans la vraie vie et égratigne gentiment les théâtreux : « On est tous un peu comme ça au début, un peu snobs. » Pour garder la tête froide, Jules multiplie les casquettes : il met en scène, joue, écrit beaucoup. « J’adore les longs dialogues, comme dans La Maman et la Putain. » En ce moment, il termine une pièce « sur la manière dont l’humanité s’applique à tuer le mystère ». On a hâte de le percer avec lui. Tu seras un homme De Benoît Cohen Avec Aurelio Cohen, Jules Sagot… Distribution : Zelig Films Durée : 1h27 Sortie le 15 mai

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© 2013 warner bros. entertainment inc. and legendary pictures funding llc

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Pacific Rim Guillermo del Toro nous parle de son nouveau film, en salles cet été. propos recueillis par bruno dubois, à los angeles

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etit, j’étais obsédé par les kaij eiga, les films de monstres japonais, surtout par le travail de Eiji Tsuburaya en tant que superviseur des effets spéciaux sur des films comme Godzilla ou Ultraman. Quand j’avais de la fièvre, je voyais Tetsujin 28-gõ voler dans le ciel. Un jour, avec mon frère, on a construit une tête d’Ultraman avec une grosse boîte de conserve et des ampoules électriques pour les yeux. Ces influences, je les revendique. On les voit déjà dans Hellboy. Pour Pacific Rim, c’est surtout Patlabor qui m’a marqué. Mamoru Oshii est un modèle pour sa façon d’ancrer les robots dans notre monde. Je voulais m’appuyer sur les codes du genre, les confronter à mon esthétique afin de faire le plus gros film de méchants jamais réalisé ; restaurer une vision de l’aventure et de la démesure pour l’ado de 12 ans qui est en moi, que Pacific Rim soit pour les enfants d’aujourd’hui ce que Godzilla a été pour moi. Au final, c’est le film d’un geek qui espère créer une nouvelle génération de geeks. » Pacific Rim de Guillermo del Toro (Warner Bros.) Sortie le 17 juillet

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Sorties du 8 mai au 5 juin

> l’esprit de 45 De Ken Loach Documentaire Durée : 1h34

8 mai > the hit girls

De Jason Moore Avec Anna Kendrick, Skylar Astin Durée : 1h53

P. 79

> trance

P. 40

> rock the casbah

De Yariv Horowitz Avec Yon Tumarkin, Roy Nik Durée : 1h28 P. 78

De Danny Boyle Avec James McAvoy, Vincent Cassel Durée : 1h35

P. 80

> sous surveillance

> porfirio

P. 64

De Robert Redford Avec Robert Redford, Shia LaBeouf Durée : 2h01

P. 82

> l’hypnotiseur De Lasse Hallström Avec Tobias Zilliacus, Mikael Persbrandt Durée : 2h02

P. 80

> liv & ingmar

De Dheeraj Akolkar Documentaire Durée : 1h23 P. 79

15 mai

> enfance clandestine

De Benjamín Ávila Avec Teo Gutierrez Moreno, Ernesto Alterio Durée : 1h50

P. 80

> mama

P. 50

P. 79

P. 18

> une vie simple

P. 82

> post tenebras lux De Carlos Reygadas Avec Adolfo Jimenez Castro, Nathalia Acevedo Durée : 1h53

P. 79

De Benoît Cohen Avec Aurelio Cohen, Jules Sagot Durée : 1h27

> gatsby le magnifique

De Ann Hui Avec Andy Lau, Deannie Yip Durée : 1h59 P. 80

De Andrés Muschietti Avec Jessica Chastain, Nikolaj Coster-Waldau Durée : 1h40

> tu seras un homme

> hôtel normandy De Charles Nemes Avec Éric Elmosnino, Héléna Noguerra Durée : 1h37

De Alejandro Landes Avec Porfirio Ramirez, Jarlinsson Ramirez Durée : 1h46

De Baz Luhrmann Avec Leonardo DiCaprio, Tobey Maguire Durée : 2h22

> one piece z

P. 98

De Tatsuya Nagamine Avec Mayumi Tanaka, Kazuya Nakai Durée : 1h47

retrouvez tous les films sur www.troiscouleurs.fr

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ag e n da

> le passé

P. 83

De Asghar Farhadi Avec Bérénice Bejo, Tahar Rahim Durée : 2h10 Sortie le 17 mai

> l’attentat

P. 88

De Ziad Doueiri Avec Ali Suliman, Reymond Amsalem Durée : 1h45

> the call

22 mai > epic : la bataille du royaume secret P. 86

P. 88

De Chris Wedge Animation Durée : 1h44

> fast & furious 6

> vanishing waves

P. 88

De Justin Lin Avec Vin Diesel, Paul Walker Durée : non communiquée

P. 86

De Nicolas Winding Refn Avec Ryan Gosling, Kristin Scott Thomas Durée : non communiquée

> de l’usage du sextoy en temps de crise P. 86

De Paolo Sorrentino Avec Luis Tosar, Sabrina Ferilli Durée : non communiquée

P. 89

P. 92

P. 92

De Sally Potter Avec Elle Fanning, Alice Englert Durée : 1h30

De Fatih Akın Documentaire Durée : 1h38

P. 90

P. 54

De Antonin Peretjatko Avec Vimala Pons, Vincent Macaigne Durée : 1h28

> oh boy

De Chris Marker Documentaire Durée : 2h16 P. 34

De Nouri Bouzid Avec Souhir Ben Amara, Nour Mziou Durée : 1h45

> la fille du 14 juillet

> le joli mai

De Todd Phillips Avec Bradley Cooper, Ed Helms Durée : non communiquée

De Kiyoshi Kurosawa Avec Sakura Ando, Chizuru Ikewaki Durée : 2h28

> millefeuille

> la dernière fois que j’ai vu macao

> very bad trip 3

De Daniele Vicari Avec Claudio Santamaria, Elio Germano Durée : 2h03

> shokuzai – celles qui voulaient oublier

> polluting paradise

29 mai

De Martin Le Gall Avec Julien Doré, Grégory Gadebois Durée : 1h34

> diaz – un crime d’état

De Kiyoshi Kurosawa Avec Yû Aoi, Eiko Koike Durée : 1h59

De João Pedro Rodrigues, João Rui Guerra da Mata Avec la voix de João Rui Guerra da Mata Durée : 1h25

De Ariel Vromen Avec Michael Shannon, James Franco Durée : 1h43

> pop redemption

P. 89

P. 89

De M. Night Shyamalan Avec Will Smith, Jaden Smith Durée : non communiquée

> the iceman

P. 90

P. 88

P. 30

P. 92

> shokuzai – celles qui voulaient se souvenir

De Éric Pittard Avec Éric Pittard, Marie Raynial Durée : 1h35

> la grande belleza

P. 86

P. 89

> after earth

De Kristina Buozyte Avec Jurga Jutaite, Brice Fournier Durée : 1h45

> ginger & rosa

P. 32

> only god forgives

De Brad Anderson Avec Halle Berry, Abigail Breslin Durée : 1h35

5 juin

P. 92

De Jan Ole Gerster Avec Tom Schilling, Friederike Kempter Durée : 1h28

retrouvez tous les films sur www.troiscouleurs.fr

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CINÉMA

histoires du

le joli mai p.34

© 2012 paramount pictures

Rencontre avec Pierre Lhomme, l’un des plus grands chefs opérateurs du cinéma français

l’esprit de 45 p.41

De Churchill à Thatcher, interview de Ken Loach pour son premier documentaire

taxi driver p.66

Le photographe Steve Schapiro commente ses clichés du tournage.

« On s’approche de l’œil du cyclone. »

J.J.Abrams

Créateur de Lost, l’une des séries télévisées les plus cultes de ces vingt dernières années, le réalisateur de 46 ans, adoubé par Steven Spielberg et George Lucas, se retrouve cette année aux manettes de deux célèbres sagas spatiales : Star Trek et Star Wars. Un grand écart entamé avec maîtrise grâce à Star Trek Into Darkness, une généreuse odyssée en forme de chasse à l’homme cosmique. Rencontre avec celui qui a fait de la maxime du générique de la série un projet cinématographique : « Espace, frontière de l’infini. » par étienne rouillon

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h istoi re s du ci n é ma

Ç

a commence par une sonnerie de téléphone, en 1982. Il a 15 ans. Une gazette de Los Angeles vient de mentionner un de ses films Super 8 sélectionné dans un festival. C’est comme ça que Kathleen a eu l’idée de l’appeler, lui, Jeffrey Jacobs, fils de parents producteurs, fou dingue de Star Wars et de Steven Spielberg. À l’autre bout du fil, Kathleen Kennedy se présente comme l’assistante du réalisateur des Dents de la mer. Elle cherche quelqu’un qui voudrait bien retaper les pellicules de Firelight, le premier film de Spielberg, qu’il a tourné en Super 8 quand il avait son âge. Jeffrey Jacobs croit d’abord à une bonne blague, jusqu’au moment où les bobines arrivent entre ses mains… Trente ans plus tard, le combiné sonne de nouveau. C’est Kathleen : elle veut savoir s’il veut réaliser le prochain Star Wars.

Tu tournes toutes ces séquences, quitte à les supprimer. Après tu te dis : “J’aurais pu économiser une journée de tournage.” Mais c’est impossible d’anticiper ce dont tu as besoin pour une scène. Parfois un plan, une réplique suffisent. Il n’y a pas longtemps, je montrais une scène géniale des Aventuriers de l’arche perdue à quelqu’un, quand le bar de Marion est en feu et qu’elle parle à Indiana Jones. J’avais le souvenir d’un long dialogue. En fait, ça ne tient qu’en une réplique. Une seule réplique. J’étais scié. » J.J. Abrams ferme les yeux derrière ses grosses lunettes aux montants du même noir que ses cheveux. La chambre d’hôtel, la table basse, sa tasse de café, le dictaphone, tout s’efface et le projecteur s’allume sous ses paupières, rejouant les scènes de son dernier film, Star Trek Into Darkness. Il en parle comme s’il en était seulement le spectateur ; le commente avec un enthousiasme raffiné, trahit par le recours régulier aux « fuck » pour appuyer ses idées. « Tout l’enjeu de l’adaptation de Star Trek,

« Je le jure devant Dieu, je tourne toujours comme quand j’avais 13 ou 14 ans, avec ce même instinct primaire. » STAR SYSTÈME Entre ces deux coups de fil, J.J. Abrams ne s’est pas contenté de sauver des films. Il a sauvé la planète, à l’écran. À de nombreuses reprises. La première fois, c’était en 1998, lorsqu’il a signé le scénario d’Armageddon. Par la suite, il a sauvé le monde des séries télés en créant des programmes cultes : Alias, en 2001, et Lost, en 2004. Puis il est passé à la réalisation de longs métrages, en 2005, avec Mission Impossible 3 ; a relancé la saga Star Trek, en 2009 ; a brillé avec Super 8, en 2011, un film avec un extraterrestre échappé d’un train militaire poursuivi par la caméra d’une bande de gamins fans de cinéma. « La scène des wagons qui explosent tout autour d’eux ? Ça dure fucking trop longtemps, c’en est presque ridicule. Mais c’est parce que, je le jure devant Dieu, je tourne toujours comme quand j’avais 13 ou 14 ans, avec ce même instinct primaire.

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c’est le ton, ou plutôt la multiplicité des tons présents dans le film. » L’idée d’Abrams n’est pas de contenter tout le monde, en se limitant à un dénominateur commun, mais que chacun puisse trouver dans son film une porte d’embarquement pour cette aventure aux confins de l’espace. Une épopée au gigantisme débridé par une belle réalisation, mais qui se joue aussi dans l’intimité, tour à tour comique ou tragique, d’un cockpit. Cet habile équilibre sous-tend la cohérence d’un récit qui passe de l’intrigue politique sur Terre aux batailles spatiales où le fameux vaisseau Entreprise se retrouve sens dessus-dessous. TIRER LES FICELLES « On a filmé ces scènes – dans lesquelles le vaisseau se retourne – sans avoir recours à des vérins hydrauliques pour faire pivoter l’ensemble. On faisait tourner les caméras pour suivre le mouvement

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e n couve rtu re

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J .J. Abrams et l’acteur Chris Pine sur le tournage de Star Trek Into Darkness

L’acteur Benedict Cumberbatch dans le rôle de John Harrison

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Pourquoi limiter les fonds vert et les images de synthèse ? « Mais parce que ça rend horriblement mal à l’écran ! »

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J.J. Abrams

L’acteur Zachary Quinto dans le rôle de Spock

Course poursuite sur la planète Nibiru

des acteurs qui étaient tirés par des câbles. Rien de plus. Tout le monde me disait : “Mouais… t’es sûr que ça va marcher ?” Contrairement aux vérins, cela donne des mouvements erratiques chez les acteurs, c’est plus réaliste. Et c’était très marrant à faire, et bien moins cher. Les acteurs étaient simplement allongés dans le couloir avec la caméra tournée, faisant semblant d’être suspendus dans le vide. Une cascadeuse était tirée d’un bout à l’autre du champ de la caméra. Je me souviens, je regardais dans le moniteur de contrôle et je me marrais. Parce qu’on avait l’impression qu’ils tombaient alors qu’il ne se passait rien ! » Des contraintes qu’il pourrait dépasser plus facilement avec des fonds verts et des images de synthèse. Pourquoi résister ? « Mais parce que ça rend horriblement mal à l’écran ! Je ne suis pas en train de dire que l’on ne peut pas faire des choses superbes avec un écran vert. Mais à chaque fois que j’ai vu des acteurs jouer dans un environnement entièrement virtuel, même si ça parait crédible d’un point de vue optique, on sent que le jeu ne colle pas. Par exemple, pour les scènes de la course-poursuite à San Francisco, nous avons tourné dans de vraies rues, que l’on a ensuite modifiées numériquement. On a ajouté des immeubles, on en a agrandi d’autres, on a modifié plein de détails à l’ordinateur. Mais ça n’a pas été tourné au milieu de nulle part. De la vraie lumière, de la vraie fumée, un vrai décor, cela donne du bazar qui rend légitimes les ajouts numériques. Les mouvements de

caméras aussi doivent être réalistes. C’est pour cela qu’on utilise des caméras aériennes guidées par des câbles ou des hélicoptères. » Maintenir les trucages et astuces sur le plateau, alors qu’aujourd’hui, le genre de l’épopée spatiale recommande l’omniprésence des images de synthèse, c’est s’inscrire dans la veine de George Lucas et ses maquettes démentes sur les premiers Star Wars. Depuis le rachat de la franchise par Walt Disney en 2012, et l’annonce de J.J. Abrams comme réalisateur du septième épisode, prévu pour l’été 2015, la pression est galactique. Surtout lorsque l’on se retrouve à la fois aux commandes de Star Trek et de Star Wars. Un peu comme si l’on avait demandé à Mick Jagger de continuer avec les Stones, tout en remplaçant John Lennon chez les Beatles. « Star Wars…Bon. Comment vous répondre. On en est vraiment aux premiers jours. Tout ce que je peux dire, c’est que l’on s’approche de l’œil du cyclone, et que c’est vraiment très excitant. C’est un rêve un peu spécial qui prend forme, travailler avec une telle équipe. Kathleen Kennedy comme productrice… Et Lawrence Kasdan, celui-là même qui a écrit cette réplique géniale de Marion dans Les Aventuriers de l’arche perdue. » Et J.J. Abrams de refermer les yeux.

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Star Trek Into Darkness de J.J. Abrams Avec Chris Pine, Zachary Quinto… Distribution : Paramount Pictures Durée : 2h09 Sortie le 12 juin

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REPORTAGE

Sur le tournage de Very Bad Trip 3 par gaétan mathieu, à las vegas

LA TECHNIQUE

©2013 warner bros. entertainment inc. and legendary pictures

> société écrans

De gauche à droite : Ed Helms, Bradley Cooper et Zack Galifianakis

« Tu sais parler français avec l’accent de Philadelphie ? » Entre deux prises, Bradley Cooper et Zach Galifianakis plaisantent, car ce trente-huitième jour du tournage de Very Bad Trip 3 à Las Vegas s’étire en longueur. Les deux compères, accompagnés d’Ed Helms, doivent garer une limousine et monter dans une voiture cabossée, après un court dialogue. Suite à une énième prise, le réalisateur Todd Phillips, casquette à l’envers et jeans troué, explique : « Tout est une question de rythme. Alors on refait la scène, pour qu’il y ait zéro temps mort. » Loin de toute agitation, la séquence est filmée dans une rue déserte de la banlieue de Vegas. Mais, magie du cinéma, les héros ont l’air de se trouver dans une avenue animée : d’un côté un sex-shop, et de l’autre une boutique de prêteur sur gages. Ces décors fabriqués de toutes pièces trompent quelques badauds qui tentent d’ouvrir la porte du sex-shop, au grand amu-

sement de l’équipe. Sous le regard vigilant de son attachée de presse, le réalisateur distille au comptegouttes quelques informations sur ce nouveau bad trip : « Il sera plus noir que les précédents opus. Des gens vont mourir. La gueule de bois du lendemain de soirée, c’est fini », affirme-t-il. La journée terminée, les acteurs retournent à leur hôtel, le prestigieux Caesars Palace, au coeur palpitant de Vegas. Une heure plus tard, c’est un Zach Galifianakis avec lunettes de soleil et visière sur la tête que je croise au casino. À une table de blackjack, parmi les joueurs, l’acteur passe inaperçu : « Ici, tout le monde est concentré sur le jeu et la fête. Les gens s’en foutent de me voir. Vegas est peut-être bien la meilleure ville pour un tournage. » Very Bad Trip 3 de Todd Phillips Avec Bradley Cooper, Ed Helms… Distribution : Warner Bros. Durée : non communiquée Sortie le 29 mai

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Sur un film comme The Call, le travail de Playback Technologies est aussi discret qu’indispensable. La société, fondée à la fin des années 1980 par Steve Irwin, a conçu toutes les images diffusées sur les innombrables moniteurs et ordinateurs qui ornent le centre d’appel dans lequel travaille le personnage d’Halle Berry : chaque vidéo bénéficiait d’une interface créée de toutes pièces, en accord avec la direction artistique du film, et pouvait être diffusée en boucle sans qu’il ne soit possible de noter la moindre interruption. julien dupuy The Call de Brad Anderson (UGC distribution), le 29 mai

COURT MÉTRAGE

> shave it

Quelque part dans une grande forêt tropicale, un singe trouve un rasoir électrique, se tond et rejoint la ville dans la peau d’un humain prêt à faire carrière. Funky et coloré, Shave It dresse un portrait finalement corrosif de l’impérialisme et de l’individualisme contemporains. À mi-chemin entre les visuels de Gorillaz et l’imagerie comico-gore des Super Nanas, les Argentins Jorge Tereso et Fenando Maldonado signent une fable acidulée. Tout sauf rasoir. m.l. De Jorge Tereso et Fernando Maldonado, à voir sur Vimeo



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DENNIS MCCARTHY, « PICTURE CAR COORDINATOR »

Moteurs, action ! Sur Fast & Furious 6, Dennis McCarthy a choisi, déniché, réparé et bichonné toutes les voitures qui apparaissent (et se fracassent) à l’écran. Dans ce blockbuster pétaradant, la vraie star, c’est lui.

©universal pictures

par julien dupuy

D

ennis McCarthy n’est pas spécialement cinéphile. Par contre, il adore les voitures. Alors qu’il goûte à un repos bien mérité sous le soleil californien avant d’embrayer sur la nouvelle adaptation des Tortues Ninja produite par Michael Bay, ce fringant quarantenaire concède même : « Ah ! mais moi, je ne viens pas du tout du monde du cinéma ! Je concevais des bolides pour des courses automobiles. Et un beau jour, des producteurs sont venus me chercher pour que je leur bricole un véhicule pour un film. Ça s’est bien passé, mon nom a commencé à circuler et, projet après projet, ma collaboration avec Hollywood est devenue ma principale activité. » Aujourd’hui, McCarthy est un « picture car coordinator » très courtisé, un intitulé de poste sibyllin sur lequel il a bien voulu nous éclairer : « On pourrait dire que je suis le directeur de casting des voitures. Je m’assure que nous ayons les véhicules qui correspondent au scénario, que nous en posséderons suffisamment pour assurer le tournage et qu’elles répondront aux besoins des cascadeurs. »

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Dans les faits, sur un projet tel que Fast & Furious 6, cela implique un an de travail pour McCarthy et la soixantaine de membres de son équipe lancés sur les chapeaux de roues dès les prémices du film : « Je suis impliqué très tôt, au minimum six mois avant le début du tournage. Du coup, je débute mon travail parallèlement à l’écriture du scénario. » Logique, étant donné que dans la franchise Fast & Furious, les voitures sont presque des personnages à part entière : « Il faut que je trouve le véhicule qui corresponde à chaque personnage. Par exemple,

« Si vous êtes loueurs de voitures, vous n’avez pas trop envie de nous confier votre précieux véhicule. » dans Fast & Furious 6, le personnage de Michelle Rodriguez est devenu amnésique et s’est réfugié au Royaume-Uni. Or, lors de sa dernière apparition dans la saga, on la voyait conduire une grosse Dodge, une Plymouth Road Runner Superbird. Et

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pôle e m ploi

> cv 3 février 1965

Naissance de Dennis McCarthy à Los Angeles.

2002

McCarthy décroche son premier emploi pour le cinéma en concevant un bus destiné à sombrer dans un gouffre pour le film Apparitions avec Kevin Costner. Il enchaîne aussitôt avec la comédie Bruce tout-puissant.

2006

©jaimie trueblood

Fast & Furious: Tokyo Drift marque la première incursion de McCarthy dans la saga F&F. À cette occasion, il rencontre le producteur Neal H. Moritz qui le fera travailler sur la plupart de ses films, de The Green Hornet à Total Recall – mémoires programmées. Dennis et ses bolides

comme on la voyait souvent réparer des Dodge, je me suis dit que son personnage devait adorer cette marque et ce genre de véhicules. Il fallait donc garder une continuité, tout en montrant une rupture. Et c’est ainsi que j’ai choisi de lui donner une Jensen Interceptor : c’est le même type de voiture que les Dodge, mais construit au Royaume-Uni. Et en même temps, le moteur de cette marque emploie des éléments des Dodge. C’est donc comme si elle était inconsciemment revenue à ses sources. » S’ensuit un travail de recherche harassant durant lequel l’équipe de McCarthy sillonne les casses, fouine sur Internet et fait le tour des collectionneurs pour réunir les voitures requises par la production, en l’occurrence plus de trois cents pour Fast & Furious 6. « Et nous devons tout acheter. Parce que, si vous êtes loueurs de voitures, vous n’avez pas trop envie de confier votre précieux véhicule à l’équipe d’un film… » C’est là que le facteur économique rentre en compte : « Depuis les deux derniers films, Universal a un super partenariat avec Dodge. Ça leur permet d’économiser des fortunes. Les gens de Dodge sont très généreux et réactifs : en un coup de fil, j’obtiens la livraison du jour au lendemain d’une vingtaine de voitures flambant neuves. » L’écurie assemblée, le travail de McCarthy ne fait que commencer : « Il faut que nous transformions tous les véhicules pour qu’ils soient au niveau de voitures de course : les moteurs doivent être en mesure d’encaisser des conduites extrêmes prises après prises. Nous nous chargeons aussi de la peinture : j’ai en permanence quatre peintres dans mon atelier. Mais l’ampleur d’un film comme Fast & Furious 6 est telle que je dois externaliser une bonne

partie de ce travail. En période de préproduction, nous avions six ateliers de peinture qui travaillaient pour nous simultanément. » Après avoir acheminé toutes les voitures sur les lieux de tournage, du Royaume-Uni aux îles Canaries, McCarthy continue d’entretenir ses bolides pendant les prises de vues : « Comme plusieurs équipes tournent simultanément, nous devons réparer les véhicules 24 heures sur 24. En plus, nous ne filmons pas dans la continuité, ce qui est un vrai cassetête quand le tournage d’une séquence de poursuite s’étale sur plusieurs semaines. Si bien qu’entre les réparations, les dégradations et les changements de script de dernière minute, on n’arrête jamais. Comme vous l’avez compris, on ne parvient à trouver le temps de dormir que lorsque le film est terminé. » Heureusement, McCarthy est un passionné. Un peu trop même. S’il a beaucoup d’estime pour la saga Fast & Furious (« Au moins, dans cette franchise, quand vous voyez une cascade automobile, il n’y a pas de trucage : quelqu’un l’a vraiment faite »), il ne peut réprimer sa tristesse devant le jeu de massacre mécanique du dernier opus : « Environ deux cents voitures ont été détruites durant le tournage. Il faut dire aussi que, si vous envoyez à tout berzingue un tank sur une autoroute, comme c’est le cas dans une séquence du film, ça fait des dégâts ! Or, je dois bien avouer que souvent, ça me brise le cœur de voir une belle voiture être réduite en miettes. Heureusement, au fil des ans et des projets, j’ai appris à m’endurcir. » Fast & Furious 6 de Justin Lin (Universal pictures) Sortie le 22 mai

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En haut et en bas : extraits du Joli Mai. Au centre : Pierre Lhomme

Le Joli Mai, sélectionné à Cannes Classics, ressort bien à propos à la fin du mois. Réalisé par Chris Marker et Pierre Lhomme au printemps 1962, ce documentaire offre un passionnant regard, politique et poétique, sur Paris et ses habitants. Rembobinage en compagnie de Pierre Lhomme, l’un des chefs opérateurs les plus importants de son époque.

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i nte rvi ew

PIERRE LHOMME LE JOLI MAI

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ierre Lhomme nous reçoit au dernier étage d’un immeuble haussmannien du quartier de l’Opéra : un point de vue idéal sur Paris pour celui qui a été le preneur d’images complice de Chris Marker pour Le Joli Mai. Dans son salon trône d’ailleurs, entre deux appareils photo, un dessin du célèbre chat souriant (l’avatar de Marker), manière de laisser planer la présence du disparu. En 1962, Pierre Lhomme signe non seulement l’image du Joli Mai, mais également celle du Combat dans l’île, le premier film d’Alain Cavalier, et cadre Le Signe du lion d’Éric Rohmer. Le chef opérateur traverse ensuite un demi-siècle de cinéma et travaille avec les plus grands : Jean-Pierre Melville pour L’Armée des ombres, Jean Eustache pour La Maman et la Putain, Robert Bresson pour Quatre nuits d’un rêveur, pour ne citer qu’eux. propos recueillis par laura tuillier

Le Joli Mai est l’un de vos premiers films en tant que chef de poste. Comment avez-vous rencontré Chris Marker ? Je ne lui ai jamais demandé pourquoi il m’avait téléphoné. Il me connaissait parce que j’avais été l’assistant de Ghislain Cloquet, un chef opérateur

qui avait travaillé sur ses courts métrages et ceux d’Alain Resnais. Je pense qu’il cherchait un opérateur aimant bien travailler caméra à l’épaule et qui pourrait opérer discrètement. Comment pense-t-on la photographie d’un documentaire ? Est-ce très différent de la fiction ? Complètement différent. Lorsqu’on tourne un documentaire, on doit être ouvert à l’improvisation. On a des intentions, on rêve de certaines rencontres, mais il faut rester disponible à tout ce qui va arriver. Il faut également replacer Le Joli Mai dans son époque : c’était les débuts d’un cinéma d’enquête, un peu sociologique, qui se fait en son synchrone. Or j’avais connu l’époque durant laquelle le reportage se faisait sans le son ; on faisait de l’image, puis du commentaire. D’un seul coup, on a pu filmer et enregistrer. Ma grande découverte sur ce film, ça a été le son, qui m’a rapidement semblé aussi important sinon plus que l’image. J’avais besoin de tourner en étant plongé dans les mots, j’ai donc demandé à l’ingénieur du son, Antoine Bonfanti, de me donner un casque. On était entourés de fils ! Aviez-vous discuté d’une méthode avant de partir à la rencontre des Parisiens ?

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Extrait du Joli Mai

Le souci premier de Chris était la qualité de la relation entre la caméra et les gens qu’on filmait. Il fallait être le plus simple, le plus modeste possible, ne pas les traumatiser avec nos outils, s’attacher à garder une attitude morale cohérente. Il fallait leur laisser le temps de s’exprimer – pris par surprise, ils ne vont pas bien s’exprimer. Je ne me rendais pas compte qu’on allait faire des plans si longs, alors que Chris en était conscient. La première interview du film – celle du tailleur – est l’une des premières que nous avons mise en boîte. J’ai filmé en continu, pendant plus de vingt minutes. Nous avions également la volonté de ne pas construire de faux dialogues, donc de ne pas couper dans les séquences. Prenons l’exemple de ce jeune couple que nous filmons sur les bords de Seine : si on ne garde qu’un montage de trois minutes, ils ont l’air nunuche ; alors que si on leur donne le temps de s’exprimer, leur personnalité fait surface. Comment les aviez-vous rencontrés ? Nous nous dirigions vers la Défense et en passant sur le pont de Neuilly, nous avons aperçu ce couple. Très spontanément, nous avons décidé d’aller leur parler. Les choses se faisaient simplement. Les gens comprenaient notre projet, au fur et à mesure qu’ils répondaient à nos questions. Il y a également des

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gens que nous avons interviewés parce qu’on nous avait parlé d’eux. Le peintre amateur, par exemple, était le réparateur du Solex d’Alain Resnais. C’est ce dernier qui nous avait conseillé de le rencontrer. Quel était votre sentiment après avoir interrogé toutes ces personnes ? Ça a été une expérience très salutaire. Toutes mes idées préconçues sont tombées pendant le tournage, le contact avec ces gens a tout chamboulé. J’ai vécu ça comme un véritable bouleversement intellectuel. On n’est pas préparé à parler avec les gens dans la vie : on est cloisonné, on gigote à l’intérieur d’un tout petit espace ; un espace qui peut s’agrandir avec l’écran de télévision, mais malheureusement, le plus souvent, celui-ci est mystificateur. Il me semble que le service militaire avait cette fonction de brassage social : dans une chambrée, on pouvait trouver un fils de mineur, un fils de notable, un garçon de province, un autre de Paris… Je dirais que tourner Le Joli Mai a été une expérience un peu similaire. Le ton du film peut être facétieux. Aviez-vous le sentiment, avec Chris Marker, de faire un film de copains ? Complètement. On s’entendait comme larrons en

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Extrait du Joli Mai

foire. Et puis, nous étions en pleine découverte des gens, tout le temps surpris par eux. En fin de journée, nous parlions de ceux qu’on avait rencontrés, nous étions fascinés. Comme ce jeune militant du FLN qui apparaît à la fin du film : il faut voir comment il parle de la vie, des femmes, de la guerre… Avec ce film, j’ai appris à écouter, alors que dans mon métier, on a davantage l’habitude de regarder – on est presque sourd quand on filme. À partir du Joli Mai, nous avons formé une équipe inséparable avec Chris et Antoine. Y avait-il beaucoup d’heures de rushs ? Avezvous participé au montage ? C’est toujours délicat de faire face à une telle richesse de matériau. Il y avait quarante-cinq heures de rushes, le premier montage faisait sept heures. Des courts métrages ont été réalisés avec les chutes. On se promettait d’en utiliser pour monter d’autres films, mais malheureusement beaucoup de choses ont été perdues. Je n’ai pas participé directement au montage – à ce moment-là, j’étais en sanatorium. J’en parlais avec Chris au téléphone. Chris n’a gardé au montage que les gens qui étaient intelligibles, pittoresques mais pas trop. Car c’est le danger lorsqu’on filme des gens dans la rue : se laisser happer par le pittoresque. On peut rapidement

« Avec ce film, j’ai appris à écouter, alors que dans mon métier, on a l’habitude de regarder. » tomber dans la mystification. Ce qui me frappe également, c’est la façon dont les gens s’expriment, très bien, avec du vocabulaire, et sans chercher à se donner en spectacle. Dans le film, la voix off dit que dans dix ans, les gens ne reconnaîtront plus ces lieux. Aviez-vous l’impression d’immortaliser un Paris appelé à disparaître ? Je connais bien Paris, j’aime beaucoup cette ville. J’ai filmé le Paris que je connaissais et il a beaucoup changé depuis. Une ville, c’est comme un visage : lorsqu’on le regarde tous les jours, on ne le voit pas changer. Mais en vingt ans, les transformations sont énormes. Je pense au quartier des quais de Seine : les habitants ont changé, le paysage a changé. La prison de femmes de la Roquette n’existe plus non plus, c’était l’une des dernières prisons de Paris.

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« Mon sous-lieutenant s’appelait Jean-Claude Brialy, il était très amical, très fantasque. »

Extrait du Joli Mai

La voix off rend le film assez mélancolique. À quel moment avez-vous découvert ce texte ? Chris Marker a écrit ce très beau texte une fois le film terminé. Il avait déjà des idées lors du tournage, par exemple celle de dire lui-même les mots de Jean Giraudoux. Avez-vous vu Chronique d’un été d’Edgar Morin et Jean Rouch ? C’est délicat pour moi de parler de ce film. Je l’ai revu la semaine dernière. Ce que je peux dire brièvement, c’est que c’est le jour et la nuit. Le point commun, c’est la découverte d’une caméra légère ; d’ailleurs, nous utilisions le même modèle, c’était un prototype en deux exemplaires. Comment l’envie de devenir chef opérateur vous est-elle venue ? Lorsque je suis arrivé à l’école Louis Lumière, je savais simplement que je voulais faire du cinéma et j’avais compris qu’il fallait savoir se servir de son outil pour bien faire son métier. J’imagine que c’est pour ça que je me suis intéressé à la caméra et à la prise de vue. À l’époque, on disait tous qu’on était « cinéaste ». Après ces études, vous avez fait votre service militaire au cinéma des armées en Allemagne. Quels souvenirs gardez-vous de cette époque ? J’ai été appelé à 21 ans, je n’étais pas content du tout de partir. Mais en fait, je suis arrivé dans une

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véritable caverne d’Ali Baba dans laquelle il y avait de la pellicule, des caméras, des salles de montage, du matériel de projection. Nous réalisions des petits films d’actualité pour l’armée française. Mon sous-lieutenant s’appelait Jean-Claude Brialy, il était très amical, très fantasque. Le capitaine nous avait à la bonne, je me souviens qu’il nous avait autorisés à partir en permission pour assister à la représentation de Jules César mise en scène par Jean Renoir aux arènes d’Arles. C’est également à l’armée que j’ai fait la connaissance d’Alain Cavalier. Nous avons fait nos premières armes en réalisant un film sur un canon antiaérien. Lorsqu’il a tourné son premier court métrage, Un Américain, il m’a appelé, ça a été mon premier film également. Le Combat dans l’île, son premier long métrage, nous l’avons aussi fait ensemble. Je suis très attaché aux relations d’adolescence. Quel est votre sentiment concernant la disparition de la pellicule ? Le numérique a amené une apparente facilité. Mais c’est toujours aussi difficile de réussir un bon film. La facilité est une véritable illusion. En tant que spectateur, je me souviens être allé voir un film turc au Max Linder et avoir eu un sentiment curieux en face de l’image. Elle était immobile, alors qu’une image argentique bouge tout le temps, parce qu’elle est soumise au mouvement mécanique de la pellicule qui défile. L’image numérique, elle, ne palpite pas, mais on s’y fait.

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critiqu e

LE JOLI MAI

Paroles capitales En mai 1962, quelques mois après la signature des accords d’Évian, Chris Marker et Pierre Lhomme arpentent Paris. L’objectif : rencontrer les Parisiens. La méthode : converser, débattre, enregistrer. par l.t.

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aris, au crépuscule. Sur un de ces ponts qui continuent de faire le charme de la capitale, deux jeunes amoureux se confient, face caméra. Enlacés, ils murmurent des mots qui semblent davantage s’adresser à euxmêmes qu’au monde. Pourtant, leur parole est soigneusement recueillie : Chris Marker pose les questions, Pierre Lhomme capte le trouble sur les visages. Qu’est-ce que l’amour en 1962 ? Peut-on vivre à Paris sans se soucier de l’Algérie ? Le Joli Mai réussit le grand écart entre questionnement universel sur une place toujours compliquée à trouver dans le monde et radiographie d’une époque trouble précisément ancrée dans le Paris de l’aprèsguerre. Là où Chronique d’un été d’Edgar Morin et Jean Rouch, film jumeau du Joli Mai, tourné deux ans plus tôt, n’hésitait pas à remettre en scène les jeunes interviewés pour créer de véritables personnages, ici le dispositif semble plus simple. Un mois durant, Marker et Lhomme ont rencontré des Parisiens de tous les milieux, de la mère d’une famille mal-logée au jeune militant du FLN, en passant par le commerçant en crise de la cinquantaine. Mais le ton n’est jamais sentencieux, Chris Marker défendant un souci d’« objectivité passionnée » ; autrement dit, trouver la bonne distance entre l’empathie et l’étude sociologique froide. Les Parisiens semblent mener en partie le récit, par leurs affirmations, leurs croyances. La parole

« Peut-on vivre à Paris sans se soucier de l’Algérie ? » devient alors une précieuse alliée, lors de longs plans séquences qui leur donnent le temps de livrer aux spectateurs leurs désirs complexes et souvent contrariés. La parole, c’est également celle que donne à entendre la voix off. Yves Montand prête son timbre chaud à un texte plein de mélancolie, écrit par Chris Marker une fois la totalité des images capturées. À travers cette voix, c’est une ville perçue comme un corps épais et tremblant qui se dévoile. En 1962, Paris est hantée par de nombreux fantômes. Ceux de la guerre d’Algérie, bien sûr, mais également ceux des écrivains, peintres et musiciens qui ont écrit sa légende, et d’autres encore, plus tristes et invisibles, comme les détenues de la prison pour femmes de la Roquette à qui Marker et Lhomme offrent la coda de leur film. « Tant que la misère existe, vous n’êtes pas riches ; tant que la détresse existe vous n’êtes pas heureux », voilà l’adresse finale de Chris Marker aux Parisiens, en qui il place sa confiance pour préserver ce mélange bien particulier de joyeuse désinvolture et de profonde inquiétude. Le Joli Mai de Chris Marker et Pierre Lhomme Documentaire Distribution : Potemkine Durée : 2h16 Sortie le 29 mai

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L’ESPRIT DE 45

©bbc

KEN LOACH

Un bidonville anglais en 1930

POLITIQUE DE SANTÉ PUBLIQUE Le réalisateur des fictions les plus critiques à l’égard du système social britannique s’essaie pour la première fois au long métrage documentaire, avec succès. L’Esprit de 45 sonde les origines de la solidarité nationale dans l’immédiate après-guerre et son délitement durant les années Thatcher. Une douloureuse piqure de rappel au chevet d’un héritage moribond du Welfare State. Bâti autour d’images d’archives et d’interviews contemporaines, ce portrait pédagogique et militant frappe par sa capacité à confronter dans un même mouvement logique la promesse euphorique d’une victoire commune contre la misère en 1945 et l’émergence d’un désengagement individualiste à partir des années 1980. Entretien par téléphone, au moment même où la télévision anglaise retransmettait le direct des obsèques de la Dame de fer. propos recueillis par étienne rouillon

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Clement Attlee (au centre), le chef du Parti travailliste britannique, fête son élection au poste de Premier ministre en 1945

ans votre documentaire revient sans cesse cette idée que l’Esprit d’unité post 1945 a disparu, qu’il a été effacé des mémoires. Qu’est-ce qui a motivé cet oubli ? Ce documentaire s’attache à décrire une prise de conscience. Une conscience qui a pris un tour très différent aujourd’hui. Un courant de pensée qui a profondément changé en soixante-dix ans. De nos jours, l’individualisme est une idée dominante. L’important, désormais, c’est de faire attention à sa petite personne. Cet individualisme prend forme dans des figures comme celle de l’entrepreneur, volontiers donnée en exemple. Les gens travaillent pour des motivations uniquement personnelles. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les visées étaient exactement inverses. Les gens avaient la conviction qu’il fallait avancer de concert, participer à l’effort commun. L’idée n’était pas de se faire de l’argent sur le dos des autres. Le but était de bâtir pour le bien de tous. Et je pense que c’est le constat de cette disparition qui a motivé le documentaire. Il fallait confronter ces deux perceptions de la façon dont on articule nos vies en société : soit avancer dans un mouvement collectif et solidaire, soit établir des cadres qui permettent d’entrer en compétition les uns avec les autres. C’est le conflit entre ces deux positionnements – et la victoire du second

« C’est étrange de faire cette interview le jour même de l’enterrement de Margaret Thatcher. » aujourd’hui – qui m’ont poussé à faire ce documentaire. Tout de même… c’est étrange de faire cette interview le jour même de l’enterrement de Margaret Thatcher. L’Angleterre se divise autour du sens à donner à son legs. Dans le documentaire, vous montrez comment « l’Esprit de 45 » a accouché d’un État-providence, ensuite balayé en 1979 par la politique libérale de Margaret Thatcher. Pourquoi ce changement de conscience sociale ne peut-il être retenu comme un « mal nécessaire » pour rester dans la course du concert économique des nations ? C’est exactement ce que la droite veut nous faire croire. Ils veulent que l’on retienne l’idée suivante : Thatcher était peut-être un peu dure, mais elle était une cruelle nécessité. C’est cette image qu’il faut contester. Ce n’était pas nécessaire : c’était un projet politique de la droite, projet qui devait aller dans le sens du monde des gros profits. Margaret Thatcher était l’architecte, le fer de lance de ce courant de

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« Les changements des années 1980 ont été portés à bout de matraques. »

pensée individualiste, de cette nouvelle conscience. Enfin non, pas « nouvelle ». Elle existait depuis le xixe siècle. Mais Margaret Thatcher l’a réactualisée. Ce glissement d’une conscience à l’autre est brusque. Ce qui est frappant, c’est qu’aujourd’hui, ce code de l’individualisme a embrassé tout l’échiquier politique. La gauche est désormais favorable à la flexibilité du travail. Nous vivons en ce moment dans une économie basée sur l’insécurité, alors qu’après 1945, il s’agissait de viser une économie de la sécurité, du plein emploi, déployée autours de grands projets pour le bien commun, pas celui des multinationales. Le documentaire montre que ce glissement n’a jamais été mis au vote, qu’il n’a jamais été formulé dans aucune campagne électorale. La fiction ne vous a jamais empêché d’embrasser frontalement des thématiques sociales semblables. Pourquoi avoir choisi pour la première fois le genre documentaire ? Il est désormais nécessaire de fixer, d’enregistrer ces réalités passées. Permettre un accès direct aux souvenirs de ceux qui ont vécu les grands mouvements de l’après-guerre et des années 1980. Avec le documentaire, vous donnez la voix à des gens qui se livrent clairement. C’est la force du témoignage. La fiction pose le problème de l’interprétation, alors que le documentaire, lui, délivre une parole directe. D’autant que les faits historiques, tout comme les images d’archives, attestent de la véracité de ces propos. L’autre avantage du documentaire, c’est qu’il compile des ressources qui seront réutilisables par tout un chacun. Vous décrivez cet « Esprit de 45 » en une idée : les Anglais avaient gagné la guerre, ils se savaient capables de gagner la paix, c’est-à-dire de vaincre la misère dans un projet collectif. Vos souvenirs de cette époque ont-ils été utiles pour rechercher des archives pertinentes ? Non. Pas franchement. J’avais 9 ans quand la guerre a pris fin, donc je ne me souviens pas du discours politique de l’époque. Mais je me rappelle, par contre, de l’atmosphère de cette période. J’ai en tête le sentiment général : comment étaient les gens, l’in-

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térieur des maisons. De ce point de vue, les images d’époque m’étaient familières. On plonge toujours dans l’inconnu quand on visionne ce type d’archives, mais j’y ai trouvé ce que j’attendais. C’est intéressant de voir ses sentiments appuyés par des documents… comme par exemple les mineurs soulevant des drapeaux au dessus des puits, ou les docteurs qu’il fallait payer de sa poche pour être soigné. Ces images d’archives, tout comme les interviews contemporaines, sont en noir et blanc, ce qui donne une unité formelle confortable pour le spectateur. Cela n’empêche pas les ruptures de ton brutales, avec l’irruption des images de la misère dans les années 1930, ou celles des violentes manifestations des années 1980. Cette violence n’est pas quelque chose dont la droite veut que l’on se souvienne. C’est que les changements des années 1980 ont été portés à bout de matraques. La violence de la police à l’égard des mineurs est éprouvante. La vérité était du côté de la police, parce que le gouvernement de l’époque soutenait que la violence venait des mineurs. Il y a cet exemple de la BBC filmant un affrontement entre policiers et mineurs. Ils ont inversé les séquences filmées dans le montage du reportage : on y voyait des mineurs commencer à jeter des pierres sur la police, avant que celle-ci ne soit contrainte de charger. En réalité, la police avait pris l’initiative de charger les manifestants, qui avaient saisi ensuite des pierres pour contre-attaquer. Comment le film a-t-il été reçu en Angleterre ? Comme vous pouvez l’imaginer. Il y a eu de bonnes critiques, et des critiques hostiles de la part de la presse de droite. Le film a vraiment divisé la critique en deux. La classe politique n’a pas commenté le documentaire. Il a été montré au Parlement, mais seule la gauche l’a regardé. La droite l’a simplement ignoré. L’Esprit de 45 de Ken Loach Documentaire Distribution : Why Not Productions Durée : 1h34 Sortie le 8 mai

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RÉTROSPECTIVE

Albert Serra

Le cinéaste catalan, découvert en France avec Honor de Cavallería et Le Chant des oiseaux, se voit offrir une carte blanche par le centre Pompidou qui diffusera son œuvre radicalement contemplative. Rencontre avec un réalisateur dandy, moins taiseux que ses films. par quentin grosset - photographie de fabien breuil

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« À côté de nous, il y avait Wim Wenders. Il fallait fuir, c’est comme le diable. »

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abord, il nous prend à témoin. Une dame vient de lui glisser une enveloppe. À l’intérieur, une liasse de gros billets. « On va vérifier ensemble si le compte est bon », dit-il. Avec ses grosses bagouses en or glissées sur presque tous les doigts de sa main, il calcule minutieusement. « Correct », lâche-t-il sans un regard pour celle qui lui amène son dû. Il la remercie vaguement, elle part et referme la porte. Pendant tout l’entretien, le cinéaste gardera ce flegme un peu désinvolte, ponctuant toutes ses phrases de « pff… bon… » On ne l’imaginait pas comme ça, les yeux tombants, le visage bouffi orné d’une moustache qui ressemble à de la paille. Une apparence pataude contrebalancée par son style vestimentaire, extrêmement élaboré, d’une élégance rare, avec un accent catalan solaire et très prononcé. Albert Serra s’est fait connaître en France en 2006 avec Honor de Cavallería, une variation minimaliste sur le Don Quichotte de Cervantes. Minimaliste parce que Serra évacue tout l’aspect épique du roman et se concentre sur la relation entre Don Quichotte et son écuyer Sancho Panza. Le premier divague, le second se tait, et Serra contemple la nature autour de lui. Cervantes s’y voit totalement démystifié. Mais pour le cinéaste, l’aventure est autre part : « La dimension héroïque, c’est le concept du film. Je voulais raconter cette écrasante histoire avec de toutes petites caméras. Le numérique est utile pour raconter cette intimité, mais, en même temps, c’est l’intimité d’un grand roman. Parfois, il y a des plans d’ensemble sur des paysages où l’on sent cette ambition. » Justement, il y a une grande attention à la nature dans les films d’Albert Serra. On lui demande alors ce qu’il cherche à capter quand sa caméra la fixe pendant de très longues minutes, abandonnant presque les personnages et le fil du récit : « C’est un peu gratuit. Dans Le Chant des oiseaux, par exemple, il n’y a aucune dimension mélancolique dans le paysage, mais tout le monde me demande d’interpréter, de m’expliquer, bla-bla-bla. Alors que j’ai repéré les lieux sur Google Earth. » Le film dont parle Serra, le second à avoir été distribué en France, est une splendeur graphique, avec un noir et blanc aux contrastes tranchés.

L’intrigue est une interprétation épurée d’un récit biblique, celui des Rois mages qui viennent offrir leurs présents à Jésus. C’est parfois aride, souvent burlesque – il y est question de pipi christique et de saints se baignant dans une mare de boue. QUE SERA, SERRA En deux films, Serra s’est ainsi déjà investi dans deux grands mythes : « Ce sont des idées, des blagues avec des amis. J’ai présenté Honor de Cavallería en Roumanie et quelqu’un m’a dit : “Tu as fait Don Quichotte, il faut que tu fasses Dracula.” Mais moi, je n’aime pas les légendes fantastiques. Du coup, j’ai préféré essayer avec Casanova pour mon prochain film. » Au moins, le réalisateur n’a pas peur du caractère monumental de ses sujets. Il considère d’ailleurs sa pratique du cinéma comme une partie de corrida : « C’est pour cette idée de jouer sa vie, sa réputation, que j’emploie cette métaphore. Moi, je ne travaille qu’avec des acteurs non professionnels, et je ne fais jamais de répétition. J’ai envie que tout soit imprévisible. C’est le danger de la fêlure. » Ainsi, en risque-tout, Serra s’est employé en 2012 à concevoir Les Trois Petits Cochons, une installation titanesque de cent une heures pour la Documenta de Kassel, rendez-vous allemand de l’art contemporain. Centré sur Goethe, Hitler et Fassbinder, le projet a bien failli capoter au dernier moment : « Trois semaines avant que ça commence, dans un bar, je devais encore rencontrer un acteur pour travailler avec lui. Moi, je méprise les acteurs. Je me suis rendu compte qu’à la table à côté de nous, il y avait Wim Wenders. Il fallait fuir, c’est comme le diable. Finalement, l’acteur a eu un cancer, je crois que c’était un signe qui nous permettait d’éviter cette erreur colossale. » Cette œuvre sera présentée au centre Pompidou dans le cadre de la carte blanche donnée au cinéaste qui, pour finir, garde cette tempérance je-m’en-foutiste lorsqu’il en parle : « Entre un film et une installation dans un musée, c’est un peu différent, car là il n’y a pas ce besoin de cohérence dans l’œuvre. Dans une installation, pff… tu peux dire n’importe quoi, ils acceptent tout. Le monde de l’art, c’est du langage, tandis que le cinéma d’auteur, c’est de la littérature. C’est la dimension transitive du langage. » Carte blanche et rétrospective Albert Serra Jusqu’au 12 mai au centre Pompidou

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LA RÉPLIQUE :

« Mademoiselle, votre combinaison dépasse. »

Les Demoiselles de Rochefort Solange est musicienne et rêve de trouver l’amour. Elle vient de se rendre chez monsieur Dame, le marchand d’instruments, et lui a joué le concerto qu’elle a composé. La mélodie de Michel Legrand flotte encore dans l’air.

©hélène jeanbrau © 1996 ciné-tamaris

par laura tuillier

Photographie extraite de l’exposition « Le monde enchanté de Jacques Demy » à la Cinémathèque jusqu’au 4 août

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a scène qui va se jouer résume l’esprit des Demoiselles : un mélange de légèreté (dont les forains blagueurs sont les garants) et d’émotion délicate (dont les jumelles font grand usage dans leur recherche de l’amour). À la sortie de l’école, Solange bouscule les forains pour s’élancer vers son petit frère Boubou ; celui-ci, qui le matin a fait la connaissance des joyeux drilles, préfèrerait partir avec eux. Solange les congédie froidement. Boubou s’énerve et jette son cartable. Gros plan sur les affaires renversées, tandis que l’air du concerto de Solange s’élève. Mouvement de caméra : Solange relève la tête une première fois et croise le regard du célèbre musicien Andy Miller (Gene Kelly). Troublée, elle continue de ramasser les

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cahiers. La main d’Andy rejoint la sienne, Solange lève une deuxième fois la tête et lui sourit timidement, tandis que le thème du concerto éclate. Il lui sourit en retour. Puis Solange, rougissante, s’éloigne. Pour la rattraper, Andy lui fait remarquer, et c’est la troisième fois en quelques secondes, que sa combinaison dépasse. Solange répond que ça ne fait rien. Mais sa timidité n’a disparu qu’un instant, car lorsqu’Andy lui demande s’il la reverra, elle balbutie : « Je ne sais pas, je ne crois pas. » Les Demoiselles de Rochefort De Jacques Demy Avec Françoise Dorléac, Catherine Deneuve… Durée : 2h Disponible en DVD (Arte Vidéo)

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FESTIVAL DE BRIVE

Gros moyens

Le festival du moyen métrage de Brive fêtait ses dix ans en avril. L’occasion de vérifier que ce format hybride, souvent le lot des jeunes cinéastes, se porte comme un charme. Portrait de famille. Comme le note Virgil Vernier, réalisateur d’Orleans, présenté en compétition, « le long métrage est un format qui s’est imposé seulement dans les années 1950. Chaplin tournait beaucoup de moyens métrages ». À Brive, les films font entre trente minutes et une heure. Une durée resserrée qui offre de très belles surprises, inventives formellement et narrativement, à l’image d’Artémis, cœur d’artichaut d’Hubert Viel, comédie rohmérienne ludique et fantastique (et grande gagnante de cette édition). Autour d’Artémis gravitaient Pour la France de Shanti Masud, également en noir et blanc, qui imposait sa belle filiation eustachienne, ou L’Âge adulte (mention du jury) d’Ève Duchemin qui lorgnait lui du côté d’Orleans, par son approche documentaire et son thème (le chemin

©niz distribution

par laura tuillier

Noémie Rosset et Frédérique Barré (de dos) dans Artémis, cœur d’artichaut d’Hubert Viel

de croix d’une stripteaseuse de province). En province toujours, on retiendra le film d’Émilie Aussel, Do You Believe in Rapture?, portrait de quatre ados marseillais filmés comme des personnages de fiction. Anniversaire oblige, le festival projetait également les films des anciens de la bande, Antonin Peretjatko ou

Yann Gonzalez, deux réalisateurs qui viennent de passer au long. Et pour vérifier les dires de Virgil Vernier, la découverte des moyens métrages muets d’Ernst Lubitsch (La Poupée, Les Filles de Kohlhiesel) s’imposait. Tour à tour expressionnistes et bouffons, leur élégante mise en scène annonce les chefs-d’œuvre à venir.

LE FILM RÊVÉ DE…

Benoît Forgeard ©florent martin

propos recueillis par l.t.

Benoit Forgeard

Le désopilant Benoît Forgeard (Réussir sa vie) officiait au festival de Brive comme président du jury. Alors qu’il attend impatiemment de l’argent pour tourner son premier long métrage, Gaz de France, nous

lui avons demandé quel film il réaliserait si tout lui était permis. Bien sûr, il avait son idée : « Ce qui est hyper intéressant, c’est qu’avoir un maximum d’argent est désemparant. Avec des moyens illimités, je pense que je réaliserais un film qui inclurait la population mondiale dans son ensemble. Chacun aurait un rôle. Mais attention, il faudrait que ce soit bien joué. Ça veut dire beaucoup de répétitions, donc tout le monde quitte son boulot. L’organisation de la planète est à revoir, bien entendu, puisque chacun se consacre au film. Je dirais… six ans de

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répète… et six ans de tournage. Le film irait de la scène de discussion de café à des séquences à l’échelle d’un continent. Ça pourrait être une sorte d’histoire de l’humanité ; et après, on jette le DVD dans le cosmos, en espérant que les mecs qui le trouvent aient un lecteur. Ça pose tout de même des problèmes : à la fin du tournage, on fait une projection pour l’équipe. Mais du coup, y a plus de public, vu que tout le monde a déjà vu le film… Ce projet me semble intéressant, mais ça demande un budget pharaonique, surtout qu’on aura ruiné l’économie. »



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CINÉMA D’HORREUR ESPAGNOL

MAIS POURQUOI EST-IL SI MÉCHANT ? En 1993, quand la horde monstrueuse d’Action Mutante d’Álex de la Iglesia déboula sur nos écrans, découvrir un film de science-fiction en provenance d’Espagne était indéniablement exotique. Vingt ans plus tard, le fantastique ibérique, et plus largement hispanophone, est devenu monnaie courante dans les salles. Comment expliquer ce phénomène, à l’heure où le reste de l’Europe échoue à s’imposer sur la scène fantastique ? par julien dupuy

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ama, qui sort ce mois-ci sur nos écrans, a beau être distribué par une major américaine, sa filiation avec le cinéma espagnol n’en reste pas moins patente : réalisé par l’Argentin Andrés Muschietti, un cinéaste installé à Barcelone depuis plusieurs années, le film a été conçu par une équipe majoritairement ibérique. « Nous avions même pensé tourner en Espagne, révèle le cinéaste. Juan Carlos Fresnadillo (réalisateur d’Intacto et de 28 semaines plus tard – ndlr) devait produire le film, avant que Guillermo del Toro ne s’implique. » Universal ne s’y est pas trompé : le succès surprise de Mama aux États-Unis a offert une nouvelle manifestation de la vitalité du fantastique hispanophone. Pour bien comprendre ce phénomène, il convient de rappeler que ce courant n’est pas une génération spontanée : « Il existe une vraie tradition d’artistes surréalistes en Espagne, analyse Muschietti. Dalí, Miró ou Gaudí ont tous reflété l’amour du

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pays pour le bizarre. » Cette tradition a perduré sur grand écran dès le cinéma des origines, avec le pionnier Segundo de Chomón, un rival de notre Georges Méliès national. Suivirent Paul Naschy (un ancien catcheur starifié pour son rôle fétiche de loup-garou, apparu pour la première fois en 1968 dans Les Vampires du docteur Dracula) ou encore le chantre des films d’exploitation mêlant sadisme et érotisme, Jesús Franco, cinéaste culte disparu le 2 avril dernier. Autant d’exutoires pour un peuple placé sous le joug de la dictature franquiste qui, très paradoxalement, tolérait l’existence de ces œuvres à l’unique condition que leur intrigue ne se déroule pas en Espagne. Si cet héritage fantastique est indéniable, il est loin de tout expliquer. L’une des figures de proue du genre, Jaume Balagueró, coréalisateur de l’un des plus grands succès de cette vague horrifique, [Rec], sorti en 2007, précise sur un bonus du DVD de son film : « Je ne crois pas qu’une division culturelle existe avec nos confrères d’autres pays. J’estime que nous sommes les descendants du même cinéma que

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e nqu ête

Mama de Andrés Muschietti (2013)

vos compatriotes Alexandre Aja ou Xavier Gens. » Comme les deux cinéastes français, cette génération s’est découvert un amour pour les films d’horreur dans les années 1980, notamment avec l’explosion du marché de la vidéo. Leurs influences viennent donc autant d’Espagne que d’Italie, d’Angleterre ou, bien entendu, des États-Unis. Il est d’ailleurs rare que les cinéastes espagnols se réfèrent à leurs racines nationales, même si une partie d’entre eux (Balagueró, mais aussi Iglesia, Paco Plaza ou Mateo Gil) ont rendu hommage à la série télévisée d’horreur conçue par Narciso Ibáñez Serrador, Historias Para Nos Dormir, avec l’anthologie Peliculas Para No Dormir, diffusée à partir de 2007. L’expansion du fantastique ibérique est donc autant affaire de culture que de système. C’est ce qui a poussé Muschietti à quitter l’Argentine pour s’installer dans la capitale catalane : « L’Espagne a bénéficié d’un contexte économique et social idéal pour que de jeunes artistes puissent s’exprimer en toute liberté, sans devoir forcément œuvrer dans le cinéma dit “d’auteur”. » Dès les années 1990,

l’industrie cinématographique espagnole a encouragé l’existence du genre. Ce n’est d’ailleurs pas le fait du hasard si l’Espagne est la contrée du Festival de Sitges, meilleure manifestation dédiée au cinéma fantastique en Europe sinon dans le monde entier. Mais surtout, le genre n’est jamais ostracisé par l’industrie cinématographique ibérique. Ainsi, Iglesia fut récompensé d’un Goya du meilleur réalisateur dès son second film, le démoniaque Le Jour de la bête (1995). Et malgré une œuvre majoritairement affiliée au genre, le cinéaste fut élu trois années de suite président de l’Académie des arts et des sciences cinématographiques d’Espagne, tandis que son confrère Alejandro Amenábar asseyait la légitimité du fantastique espagnol avec les triomphes de Tesis, Ouvre les yeux et surtout Les Autres, production américaine tournée avec une star hollywoodienne dans la péninsule ibérique. « Ces deux cinéastes ont été une source de motivation pour les jeunes en prouvant qu’on pouvait faire des films fantastiques ambitieux et de qualité », explique Muschietti.

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1. L’Horrible docteur Orlof de Jesús Franco (1962) 2. Vampyros Lesbos de Jesus Franco (1970) 3. Action mutante de Álex de la Iglesia (1993) 4. L’Orphelinat de Juan Antonio Bayona (2007) 5. [Rec] de Paco Plaza et Jaume Balagueró (2007)

Parallèlement, l’honorable Pedro Almodóvar fit beaucoup pour l’expansion du genre en produisant, avec son frère Agustín, le premier film espagnol du Mexicain Guillermo del Toro, L’Échine du diable (2001). Continuellement récompensé par l’institution, le cinéma fantastique est également prisé des plus importants investisseurs nationaux, comme la chaîne Telecinco, équivalent de notre TF1 national, qui fut, selon Toro, « le partenaire financier idéal du Labyrinthe de Pan et, plus tard, de L’Orphelinat (de Juan Antonio Bayona – ndlr) ». Un tel soutien doit évidemment beaucoup au public de la péninsule, qui n’a aucun mal à accorder sa confiance à ses compatriotes quand il s’agit de frissonner. Ce contexte favorable aboutit en 2001 à une initiative culottée : la création de Fantastic Factory, compagnie de production affiliée au géant de l’industrie Filmax, qui, comme aux heures glorieuses de la Hammer, n’était destinée qu’à produire des films fantastiques. Cette belle aventure aura pourtant marqué les limites de l’expansion du genre : six ans plus tard, Fantastic Factory fermait ses portes, avec un bilan économique et artistique peu convaincant. Cette fermeture annonçait des heures sombres pour le cinéma espagnol. Frappé de plein fouet par la crise économique, le secteur montre aujourd’hui des signes

de faiblesse inquiétants. Certes, le fantastique continue à être représenté, comme en témoigne The End, film apocalyptique qui sort ce mois-ci directement en vidéo en France. Mais il semble que pour survivre, le fantastique espagnol doive impérativement sortir de ses frontières. Ainsi, en novembre dernier, Amenábar nous confiait que l’expatriation était la seule issue possible. Force est de constater qu’aujourd’hui, c’est à l’étranger que ces cinéastes trouvent asile : le Madrilène Gonzalo López-Gallego avec Apollo 18, le Barcelonais Jaume Collet-Cera avec Esther ou encore Juan Carlos Fresnadillo avec 28 semaines plus tard sont quelques exemples de cette récente dispersion. Une fuite de talents qui devrait être encouragée par le triomphe aux États-Unis de Mama, dont plus de la moitié des entrées au box-office américain ont été assurées par un public hispanophone. Délaissé par les institutions mais plus que jamais soutenu par son public, le cinéma fantastique a donc encore de beaux jours devant lui de l’autre côté des Pyrénées. Mama de Andrés Muschietti Avec Jessica Chastain, Nikolaj Coster-Waldau… Distribution : Universal Pictures - Durée : 2h14 Sortie le 15 mars The End de Jorge Torregrossa, en DVD (Seven Sept) le 13 mai

> le visage du monstre

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« Quand j’ai vu la créature à la fin de [Rec], se souvient le réalisateur de Mama, j’ai cru qu’il s’agissait d’une image de synthèse tellement ses proportions me semblaient inhumaines. » Et pourtant, l’interprète de ce freak, Javier Botet, existe bel et bien. Atteint du syndrome de Marfan, une maladie génétique engendrant une croissance anormale du squelette, Botet est devenu le monsieur monstre espagnol. Ce qui tombe bien, puisqu’il est un fanatique du cinéma d’horreur. Botet est ainsi apparu dans un grand nombre de productions fantastiques ibériques, de La Malédiction des profondeurs de Brian Yuzna au prochain film d’Álex de la Iglesia, Les Sorcières de Zugarramurdi, en passant par Mama, dans lequel il livre sa plus belle interprétation en composant un monstre d’amour tour à tour effrayant, pitoyable et émouvant. J.D.

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LA FILLE DU 14 JUILLET

Antonin Peretjatko

Dans La Fille du 14 juillet, son premier long métrage, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs, le Français Antonin Peretjatko imagine le parcours ludique et aléatoire de pieds nickelés en vacances, ignorant la crise qui tente de les rattraper. Libre et désopilant. propos recueillis par quentin grosset et laura tuillier illustration de stéphane manel

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« Je n’aime pas l’improvisation parce que le rythme, c’est moi qui le donne. »

os films sont toujours très ludiques, d’où l’idée de cette interview jouée. Lancez le dé pour découvrir des questions inspirées de quelques fameux jeux de société. Ça me fait penser à Bergman, qui était très superstitieux. Tous les matins, il tirait un dé ; plus le nombre obtenu était élevé, meilleure serait la journée… Je n’ai jamais osé le faire, j’ai bien trop peur de tomber sur le un. La question « Trivial Poursuit » : Vous injectez une dimension historique dans La Fille du 14 juillet. La révolution est partout sousjacente, il y a même une tête coupée… Mes personnages sont en décalage total avec la société. C’est un ressort comique, comme chez Tati et chez Chaplin. Le générique de début comporte des images de Sarkozy et de Hollande parce qu’on a tourné à l’été 2011 et 2012. Je n’avais pas du tout pensé que Sarkozy pouvait ne pas être réélu ! Finalement, les gens changent, mais le protocole reste. « Monopoly » : Vous filmez la crise dans tous vos films. La crise, c’est drôle ? C’est de la mise en scène : rendre drôles ou inquiétantes des choses qui ne le sont pas. Comme dans Phénomènes de M. Night Shyamalan dans lequel le mouvement des branches d’arbres est proprement effrayant… C’est la crise pour moi aussi, on a dû tourner sur deux étés parce qu’on n’avait pas assez d’argent. Vincent Macaigne a une calvitie, j’avais peur de le retrouver complètement chauve l’été suivant ! « Scrabble » : Il y a un plaisir évident, dans ce film comme dans vos courts métrages, à jouer avec le débit de la parole. Oui, ça me vient du Super 8. Il y a longtemps, j’avais une caméra qui ne pouvait pas faire du 24 images/ secondes, donc j’ai tourné en 18 images/secondes. Je trouvais l’accéléré drôle pour les voix suraiguës. « Qui est-ce ? » : Vous êtes fidèle à vos comédiens (Marie Lorna, Thomas Schmitt), mais travaillez ici pour la première fois avec Vincent Macaigne. Comment l’avez-vous découvert ? À partir du moment où le comédien est bon, je n’ai pas envie de changer. Mais il ne faut pas non plus qu’ils pensent qu’avec moi, c’est le CDI

assuré ! J’ai découvert Vincent dans Moonlight Lover. Il s’est vraiment penché sur le scénario, il m’a prodigué de bons conseils, par exemple créer plus d’interactions entre lui et le personnage du docteur Placenta. L’acteur qui joue Placenta ressemble à Lionel Jospin et à Jean-Louis Borloo. Il vient du vaudeville, je l’ai découvert en MidiPyrénées, où nous avons tourné. « Loto » : Vos personnages se laissent souvent porter par le hasard. Est-ce aussi votre cas en tant que réalisateur ? Sur le tournage, je ne laisse pas de place au hasard. Le scénario et les répétitions sont les moments durant lesquels on pense le film, après c’est trop tard. Je n’aime pas l’improvisation parce que le rythme, c’est moi qui le donne. Mais le hasard est quand même là : un jour, il s’est mis à pleuvoir. On a fait le tour du village avec Vincent pour chercher des parapluies de couleurs et, coup de chance, on a trouvé. C’est beaucoup plus beau que s’il avait fait beau. « Jeu du pendu » : Il y a une dimension dépressive dans vos films. Ici, Vincent Macaigne offre une touche de mélancolie. Comme la plupart des séquences sont très gaguesques, ça donne un côté douche écossaise. C’est pour ça que j’aime beaucoup le montage. J’ai fait attention à aménager des séquences où ça se repose un peu, pas comme dans mes courts métrages. « Risk » : La violence policière est très présente dans le film… Les policiers, c’est toujours drôle. Ça me fait penser à Cops de Buster Keaton. Au début, il est poursuivi par un policier, et à la fin, il y a près de deux cent flics à ses trousses. On a commencé à tourner le film sous Sarkozy, il y avait ça dans l’air du temps, des Taser, des gros flingues. « Mille bornes » : La Fille du 14 juillet est un road movie. Vous aviez envie de prendre l’air ? Je voulais faire les choses en grand, que mes héros partent sur les routes. Filmer dans une voiture, c’est pratique pour un petit budget. Et les routes, les champs, la plage sont des décors gratuits. La Fille du 14 juillet d’Antonin Peretjatko Avec Vimala Pons, Vincent Macaigne… Distribution : Shellac Durée : 1h28 Sortie le 5 juin

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NOUVEAU GENRE

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La femme de second choix

Film noir, mélodrame, road movie, etc. mais encore ? Derrière les dénominations officielles retenues par les encyclopédies, nous partons chaque mois à la recherche d’un genre inconnu de l’histoire du cinéma. Ce mois-ci : le drame de la femme de second choix. par jérôme momcilovic

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h istoi re s du ci n é ma

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« I’ll make you love me », promet-elle les yeux brillants, indifférente à la douleur d’être une consolation plutôt qu’un grand amour.

C’

Grace Kelly, Clark Gable et Ava Gardner dans Mogambo de John Ford (1953)

est la fin du film, le garçon s’assied face à la fille, qui est brune et le couve du regard. L’écrin qu’il lui tend révèle une bague, la fille chancèle d’émotion, mais s’étonne qu’une larme roule sur la joue du futur fiancé. « Je suis simplement heureux », répond celui-ci, mais dans ses larmes il y a, en fait, un douloureux secret partagé avec le spectateur : la bague était destinée à une autre, une blonde, qu’il aimait follement, mais qui l’a éconduit. Si la fin de Two Lovers (James Gray, 2008) bouleverse tant, c’est qu’au désenchantement du garçon se mêle un amour sincère pour la brune, et parce que résiste avec elle, sous le poids du renoncement, l’hypothèse du bonheur. C’est un double drame qui clôt le film, en un happy end tragique. Celui du garçon, condamné à un bonheur confortable sur quoi planera pour toujours le spectre d’un autre bonheur, envolé. Mais aussi celui de la fille, qui est sublime, infiniment aimable, et bel et bien aimée, mais qui ignore le drame de sa situation : elle est un second choix. Dans le drame de la femme de second choix, la femme n’ignore pas toujours sa condition. Quand, dans La Fille du désert (Raoul Walsh, 1949), Virginia Mayo se voit finalement proposer le

mariage par Joel McCrea, elle sait bien que la bague n’était pas pour elle, et que si une trahison n’avait forcé le destin, son beau bandit lui aurait préféré sa rivale. Qu’importe : « I’ll make you love me », promet-elle les yeux brillants, indifférente à la douleur d’être une consolation plutôt qu’un grand amour. Ces rôles d’amoureuses, éperdues et endurantes, que leur trop modeste condition prive du premier rôle, une actrice les a incarnés mieux que toutes les autres. Dans Mogambo (John Ford, 1953), Ava Gardner parvient sans mal à charmer le rustre Clark Gable, mais, fille de petite vertu masquant sous son exubérance un cœur blessé, elle est condamnée à s’effacer quand rayonne à ses côtés la puritaine blondeur de Grace Kelly. Dans Le Dernier Rivage (Stanley Kramer, 1959), sa rivale est une morte, trop présente à l’esprit de Gregory Peck. Le baiser qu’il lui donne finalement est encore offert par le destin : c’est l’imminence de la fin du monde qui ouvre les bras du veuf. Baiser déchirant où se mêle un frisson de joie et un abandon plein de mépris de soi, comme est bouleversante la manière qu’a Gardner de céder à la fin de Mogambo où, se jetant littéralement à l’eau, elle laisse sa fierté derrière elle pour aller quérir la maigre pitance amoureuse que lui consent Clark Gable. Une énigme alors reste irrésolue : comment était-il possible de préférer Grace Kelly à Ava Gardner ?

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h istoi re s du ci n é ma

OLIVE THOMAS

Fin de party Hollywood Babylone, le livre culte de Kenneth Anger, enfin réédité, sonde les dessous sordides de l’industrie cinématographique. On y croise la jeune Olive Thomas, dont l’ascension fulgurante prit fin brutalement sur le carrelage de la salle de bain d’un palace parisien. Portrait.

©george grantham bain collection (library of congress)

par juliette reitzer

E

Olive Thomas à l’orée de sa carrière hollywoodienne, en avril 1916

n 1920, la jeune colonie du cinéma fête son avènement et ses succès. Sous le soleil de Los Angeles, les studios poussent comme des champignons, les lettres d’admirateurs affluent, l’argent coule à flots. Mais en coulisses, le joyeux cortège bruisse déjà de ses premiers scandales : héroïnes sous cocaïne, acteurs débauchés, jeunes filles sacrifiées… Dans Hollywood Babylone, ouvrage initialement paru en 1959, le pape de l’underground Kenneth Anger, metteur en scène génial et turbulent, dissèque un monde du cinéma écartelé entre pudibonderie et sauvagerie et fait valser les cadavres sur un mode décadent. Parmi eux, la jeune, belle et prometteuse Olive Thomas, une brunette aux yeux bleu-violet que le magazine Motion Picture Classic décrivait ainsi : « Aussi simple et charmante que si elle n’avait jamais connu le succès. » Le 10 septembre 1920, « l’Américaine idéale » décède à l’hôpital américain de Neuillysur-Seine, après cinq jours d’une effroyable agonie due à l’absorption d’un flacon de bichlorure de

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mercure. Avec son mari Jack Pickford, lui-même acteur et frère de la riche et célèbre Mary Pickford, ils avaient passé la soirée au Rat Mort, place Pigalle, avant de rejoindre leur suite du Ritz. Que s’est-il passé cette nuit-là ? La presse à sensation s’en donne à cœur à joie, les gros titres spéculent sur d’éventuelles orgies de cocaïne et de champagne, rappelant les fréquentes disputes du jeune couple aux relations passionnelles. Jack et Olive vivaient la plupart du temps séparés par les tournages, et comblaient la dis-

À l’avant-garde, Olive Thomas ouvre la voie à Clara Bow et Louise Brooks tance en s’étourdissant de cadeaux, parure en perles noires, roadster jaune poussin, robe de chambre en soie précieuse… Dans le Los Angeles Examiner du 13 septembre, Jack l’assure pourtant : ils étaient « le couple le plus heureux qu’on puisse imaginer ».

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©kenneth anger collection

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©george grantham bain collection (library of congress)

DR

portr ait

hollywood babylone

de Kenneth Anger (Tristram), disponible Qui mieux que le sulfureux cinéaste indépendant Kenneth Anger pour exhumer les secrets honteux d’Hollywood ? Barbara La Marr, héroïnomane et suicidée ; Wally Reid, alcoolique ; Frances Farmer, internée ; Fatty Arbuckle, violeur et meurtrier… À lire surtout pour le talent de conteur d’Anger qui reconstitue les zones d’ombre de ces affaires troubles avec un mélange de fascination, de répulsion et d’ironie. Publié en 1959, le livre, devenu introuvable, est réédité dans une version augmentée, richement illustrée. j.r.

3.

1. « Les autorités parisiennes enquêtent sur la mort d’Olive Thomas », article paru dans l’édition du New York Times daté du 11 septembre 1920 2. Portrait dessiné d’Olive Thomas en couverture du numéro de février 1920 de Photoplay 3. Le temps de l’insouciance 4. Avec l’acteur Nigel Barrie dans Beatrice Fairfax Episode 10: Play Ball, première apparition d’Ollie à l’écran

Le parcours d’Olivia Elaine Duffy, née le 20 octobre 1894 dans une petite ville industrielle de Pennsylvanie, ressemble à celui de milliers de jeunes filles attirées par les lumières d’Hollywood. Elle quitte l’école publique à 15 ans pour s’installer derrière le comptoir d’un grand magasin où elle vend de la toile de Vichy, et épouse vite Bernard, ouvrier dans une aciérie, qu’elle plante tout aussi vite pour rejoindre New York. À 16 ans, elle gagne le concours de « la plus belle fille de la ville ». Elle pose ensuite pour l’artiste Howard Chandler Christy et pour beaucoup d’autres, tantôt pin-up délurée, tantôt beauté victorienne à froufrous, dans des illustrations d’Esquire ou du Saturday Evening Post. « La paie était merveilleuse pour moi, cinquante cents de l’heure ! », se souviendra-t-elle plus tard. En 1915, la jeune audacieuse est embauchée dans les Ziegfeld’s Follies, revues inspirées des Folies Bergère dans lesquelles les girls sont vêtues de ballons que les hommes éclatent avec leur cigare. Sa beauté irlandaise fait des ravages, on raconte même que l’ambassadeur allemand lui aurait offert une rangée de perles à dix mille dollars. MAJOR DE PROJO Rapidement, cette notoriété lui permet de décrocher un premier rôle à l’écran : en 1916, elle joue dans un épisode du feuilleton Beatrix Fairfax, puis apparait dans A Girl Like That, son premier film, aujourd’hui disparu. En secret, elle épouse Jack Pickford : « Je ne voulais pas qu’on pense que je travaillais grâce à ça », explique-t-elle un an plus tard. Aucun risque : elle n’a pas eu besoin d’un mari pour séduire Broadway, elle séduira de même Hollywood. Son enthousiasme, sa frai-

cheur et sa curiosité sont partout vantés, y compris dans les papiers à l’eau de rose de la chroniqueuse mondaine Louella Parsons. Écolière fantasque (Madcap Madge, son premier grand rôle), ado travestie (Toton de Frank Borzage), jeune vamp menant la grande vie (Upstairs and Down)… en quatre ans, Olive fut la vedette de pas moins de vingt films. Parmi eux, The Flapper (1920), écrit par Frances Marion, met en scène le mode de vie des jeunes femmes modernes des années folles, les « flappers » – cheveux courts, alcool, vie sexuelle assumée. À l’avant-garde, Olive Thomas ouvre ainsi la voie à celles qui bientôt lui succèderont, Clara Bow et Louise Brooks. Jeanine Basinger, historienne du cinéma et auteure de Silent Stars (2000), explique au Pittsburgh Post Gazette : « Olive Thomas est un formidable marqueur de son temps, une époque où l’on brise les règles, où la morale et la place des femmes changent. Mais elle a été oubliée à cause de sa mort sensationnelle. C’est un exemple du moment où le scandale détruit tout, sauf lui-même. » Cette nuit-là, Olive avait mal à la tête. Dans le noir, elle aurait pris le flacon de bichlorure de mercure (généralement prescrit à l’époque contre la syphilis) pour de l’aspirine. L’autopsie confirmera l’empoisonnement accidentel, et l’enquête sera vite classée. Mais le raz de marée médiatique qui suivit marque une étape importante dans la construction du mythe hollywoodien : la mort d’Olive Thomas, intrépide pionnière, devient « la première nouvelle qui révéla Hollywood sous la lumière du scandale », écrit Anger. Avec effroi, le petit monde du septième art découvre que l’insouciance de l’âge d’or ne durera pas.

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©haut et court

h istoi re s du ci n é ma - g e n de r stu di e s

La bande de Foxfire, confessions d’un gang de filles opère un renversement de l’invisibilité féminine par une appropriation de l’espace public.

SAISON 1 : LA VIOLENCE DES FEMMES

1. Foxfire

Chaque mois, une étude des enjeux de représentation du genre à l’écran. En mai, Foxfire, confessions d’un gang de filles, l’utopie féministe d’un groupe d’adolescentes dans l’Amérique des années 1950. par clémentine gallot

Trait « naturellement » masculin, la violence, quand elle est féminine, est souvent objet de non-récit. Le film de Laurent Cantet redonne à ce phénomène une narration, décrivant la mise en œuvre d’un répertoire d’actions de plus en plus radicales qui débute par la constitution d’une société secrète suivant le principe de l’empowerement, ou développement du pouvoir d’agir. La bande entre d’abord en résistance à la violence de genre incarnée par le viol et les agressions sexuelles, avant d’opérer un renversement de l’invisibilité féminine par une appropriation de l’espace public. Au lieu de considérer la violence féminine comme

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hystérique en l’essentialisant, le film repolitise la lutte. L’emploi de la violence finira par être performatif : détourner le système de domination par les outils même de l’oppression, soit aguicher les violeurs pour mieux les détrousser. En guise de conclusion, Cantet interroge les limites de l’action violente, au sein du groupe (racisme) et visà-vis de la loi (vol, kidnapping). Le mois prochain : Piégée de Steven Soderbergh Foxfire, confessions d’un gang de filles de Laurent Cantet, disponible en DVD (France Télévisions) À lire : Penser la violence des femmes de Caroline Cardi et Geneviève Pruvost (La Découverte)

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h istoi re s du ci n é ma

PORFIRIO RAMIREZ

©atopic

Le grand détournement

Il mesure 1m55 et est paralysé des membres inférieurs. Autant dire qu’il n’a pas vraiment le profil type du pirate de l’air. Et pourtant, Porfirio Ramirez a détourné avec son fils un avion en 2005 pour réclamer une pension promise par l’État colombien. Itinéraire de l’homme qui a inspiré le personnage central du film Porfirio d’Alejandro Landes. par quentin grosset

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portr ait

« L’État, les FARC et les paramilitaires tentent tous de prendre le contrôle de ce trafic. »

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i le cuir de son fauteuil roulant est un peu moite, c’est qu’il a deux grenades bien cachées sous son pantalon. Il a pourtant l’air plutôt tranquille, ce bonhomme chauve à l’épaisse moustache et à la quarantaine bien tassée. Un pirate de l’air paralysé des jambes, ce n’est pas si absurde que ça : le fauteuil est trop large pour franchir les détecteurs de métaux, et il suffit d’un peu d’adresse pour contrarier les fouilles trop rapprochées. Ce 12 septembre 2005, les vingt passagers du vol Florencia-Bogota n’osent pas y croire, mais Porfirio Ramirez et son fils assurent qu’ils peuvent tout faire sauter. Le commandant de bord, pas très serein, n’a d’autre choix que d’appeler la tour de contrôle de Bogota. Les deux hommes ont des exigences. Ils veulent parler au président Álvaro Uribe. Depuis une dizaine d’années, la Colombie promet de reverser des indemnités à Porfirio. Oh ! pas grand chose, l’équivalent de vingt euros par mois, parce qu’il est une victime de la guérilla colombienne. Il n’en a jamais vu la couleur. Seule solution pour lui, un coup d’éclat. Le voilà donc sur le tarmac en train de négocier pendant des heures avec des pontes du gouvernement. Après avoir laissé les femmes et deux bébés descendre de l’avion, on lui promet un chèque de quarante trois mille dollars. Puis on le débarque, on l’emmène avec un grand sourire dans une salle confinée de l’aéroport et on lui passe les menottes. Il est même question d’une extradition vers les ÉtatsUnis, deux passagers étant de nationalité américaine. Si on lui promet vaguement qu’il touchera son dû, il est finalement condamné à rester chez lui pendant huit ans et à n’en plus sortir. Alors comment en est-il arrivé là, ce bon vieux Porfirio ? On aurait voulu l’interviewer, mais puisqu’il est assigné à résidence, l’affaire s’est avérée compliquée. L’un des producteurs du film, Antoine Ségovia (qui a suggéré au réalisateur de faire jouer aux pirates de l’air leur propre rôle) nous raconte : « En 1991, Porfirio survivait de maigres revenus et s’adonnait comme beaucoup à la culture de la coca. Dans un contexte de conflit armé qui dure depuis le milieu des années 1960, l’État, les FARC et les paramilitaires tentent tous de prendre le contrôle de ce trafic, pas vraiment légal mais, disons, largement accepté et répandu. » Un beau jour, Porfirio, qui

travaille dans son champ, au sud du département de Caquetá, voit la police débouler, persuadée que son frère dissimule des explosifs dans un recoin de la propriété familiale. « M’apercevant qu’ils frappaient mon frère, j’ai sauté sur l’un des policiers, je lui ai pris le pistolet, et là, les tirs ont commencé », a raconté Porfirio au quotidien Panamá América, « et j’ai reçu une balle dans le dos qui m’a laissé handicapé à vie ». TÉLÉPHONE IMMOBILE Le film d’Alejandro Landes se concentre sur ce qui s’est passé juste avant le détournement d’avion, le moment étiré durant lequel Porfirio se bat contre l’administration de son pays. Retour à Caquetá. Le champ de coca, c’est fini. Il est considéré comme un blessé de guerre, il doit donc recevoir une pension mensuelle. Les mois passent, l’indemnité ne vient pas, et Porfirio doit trouver du boulot à sa mesure. Il vend des minutes de téléphone, profitant de l’absence de cabines publiques en Colombie. Le système est simple : il achète un portable qu’il accroche à une chaîne de deux ou trois mètres passée autour de son cou (suffisamment longue pour que les clients aient un peu d’intimité) et les gens s’arrêtent pour appeler. Sous le porche de sa maison, Porfirio attend. Il prend un avocat pour défendre son dossier, qui n’avance pas. Ramirez y passe toutes ses économies. Et puis il craque. Tout le reste est hors-champ. Avec une caméra près du sol et des cadres fixes, le réalisateur retranscrit graphiquement l’inertie à laquelle se confronte Ramirez, prisonnier des quatre bords de l’écran. L’épopée solitaire d’un type qui se bat contre un État délabré et des politiques fantoches était a priori cinégénique. Mais la présence au générique de Porfirio Ramirez lui-même redouble l’intensité du film. Dans la tradition du cinéma colombien, le film a une morale en forme de chanson écrite et chantée par Porfirio. Dans les derniers vers, il conclut : « Tout ce qui reste à dire, c’est que je suis en vie, et que parce que j’ai bon cœur, je porte un toast aux Yankees. » Porfirio d’Alejandro Landes Avec Porfirio Ramirez, Jarlinsson Ramirez… Distribution : Atopic Durée : 1h46 Sortie le 8 mai

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h istoi re s du ci n é ma - holly wood stori e s

LA CITÉ RÊVÉE DE WALT DISNEY

Epcot (1/3) PREMIER ÉPISODE, « L’APPRENTI SORCIER » : le

créateur de Mickey est déçu. Disneyland, son parc d’attraction californien, est bien trop petit pour accueillir son nouveau projet. Walt Disney veut construire une ville sous cloche, une cité utopique sans violence ni misère. Elle s’appellera Epcot.

©the walt disney company ©the walt disney company

Maquette et vue d’artiste d’Epcot

©the walt disney company

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eux mois plus tard, le cancer l’emportera. Sur le plateau de tournage, en ce mois d’octobre 1966, Walt Disney porte encore beau ses 65 ans : costume bien ajusté, voix secouée d’une excitation enfantine, moustache comme toujours impeccable et sourire éclatant. Il enregistre une présentation à destination des partenaires et institutions qu’il espère embarquer dans son nouveau grand projet : Epcot, pour « Experimental Prototype Community of Tomorrow », un programme urbanistique et social complet qui doit prendre la forme d’une ville futuriste sans pareil. Derrière lui de larges croquis, plans et maquettes qu’il pointe avec une baguette. Ils ont été établis par les imagineers, les « ingénieurs de l’imaginaire » de la W.E.D., société créée en 1952 par le réalisateur pour plancher sur ses parcs d’attractions et donner vie à ses inventions. Leurs premières visions d’Epcot ont été présen-

par étienne rouillon

Walt Disney pointe une vue aérienne de sa ville utopique Epcot, dans le film de présentation du projet Disney World de 1966

tées à l’exposition universelle de New York en 1964 sous la forme d’un gigantesque diorama : une cité idéale, capitale d’un nouveau continent, Disney World. Prévue pour accueillir vingt mille personnes, Epcot est un modèle d’urbanisme planifié, un étalon de société du plein emploi et du bien vivre ensemble. Un projet qui rappelle de loin l’utopie lancée entre 1825 et 1827 par l’industriel socialiste Robert Owen à New Harmony, Indiana. Anticommuniste en ces temps de guerre froide, Disney ne partage avec Owen que l’idée d’une ville miniature dont l’autosuffisance n’est qu’un simulacre. « Epcot stimulera l’industrie américaine dans le développement de solutions apportées aux besoins exprimés par les membres de cette communauté expérimentale », résume Walt dans son film. Plu-

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tôt qu’une cité, c’est une vitrine idéale, un test grandeur nature de produits par ceux qui les fabriquent. Le gouvernement est affaire trop sérieuse pour la laisser aux citoyens, les industriels se chargeront de tout. Reste qu’Epcot est fascinante. Recouverte par un dôme régulateur de climat, desservie par des métros futuristes, elle est constituée de ceintures concentriques entièrement piétonnes : centre d’affaires, zone verte puis zone résidentielle. Tout est prêt, ne reste plus qu’à trouver une terre pour ce Disney World, et à s’assurer que l’État américain ne pourra pas y gouverner.

le mois prochain : « L’île au trésor » – Comment Walt Disney a acheté un bout de Floride en cachette.





h istoi re s du ci n ĂŠ ma

TAXI DRIVER vu par

Steve Schapiro par juliette reitzer photographies de steve schapiro

Šsteve schapiro

Martin Scorsese et Robert De Niro

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portfolio

A

ucune information sur lui dans le livre qui rassemble ses photographies du tournage de Taxi Driver, mais Steve Schapiro tempère : « Je préfère rester discret, comme quand je travaille. » À 79 ans, ce petit homme aimable et réservé aurait pourtant de quoi parader. Influencés par le photojournalisme humaniste d’Henri Cartier-Bresson et de W. Eugene Smith, ses clichés ont orné les plus prestigieux magazines américains, de Life à Look en passant par Time. Il a suivi Robert Kennedy en campagne, immortalisé Martin Luther

King et a travaillé sur plus de deux cents films, parmi lesquels Macadam Cowboy, Le Parrain ou Chinatown : « J’ai commencé sur Le Cardinal d’Otto Preminger. J’avais de bonnes relations avec les magazines, je pouvais facilement être publié, ça faisait une bonne pub aux films sans coûter trop cher. » Pour nous, il a accepté de ravaler sa modestie le temps de parler de son travail sur Taxi Driver : « Quand le film a été sur le point de sortir, le studio a décidé que le sang était trop réaliste, alors ils l’ont assombri. On ne peut voir sa vraie couleur que sur mes photos ! » Morceaux choisis.


©steve schapiro

h istoi re s du ci n é ma

Robert De Niro

- rire très fort « J’ai peu travaillé avec Martin Scorsese, mais j’ai fait six ou sept films avec Robert De Niro, dont Le Parrain 2. C’est vraiment pour lui que j’ai fait Taxi Driver. Les dernières scènes du film étaient extrêmement intenses, avec tous les coups de feu. Je me rappelle d’un moment durant lequel les acteurs se sont mis à rire très fort, comme pour évacuer toute cette tension. »


©steve schapiro

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Harvey Keitel

- en bas de l’échelle « Les tournages, surtout à l’époque, étaient incroyablement ennuyeux, parce que l’éclairage prenait un temps fou. Le photographe est tout en bas de l’échelle : il n’aide pas, il ne peut que causer des problèmes, en faisant du bruit par exemple. Mais bien sûr, une fois le film terminé, il devient précieux en termes de marketing. »


©steve schapiro

h istoi re s du ci n é ma

Jodie Foster

- des images emblématiques « Photographier le monde réel et le monde du cinéma, ce n’est pas si différent. Vous cherchez toujours la même chose, et en ce qui me concerne, ce qui m’intéresse c’est l’âme de la personne ou de l’événement, où que je sois. C’est un challenge permanent d’essayer de faire de bonnes photos, en espérant qu’elles deviennent emblématiques. »


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Le scénariste Paul Schrader, Martin Scorsese et Robert De Niro

- indépendance « Lorsque la presse magazine a commencé à décliner, j’ai davantage travaillé pour le cinéma. Sur le tournage de Taxi Driver, j’étais payé par la production, mais je ne faisais pas vraiment partie de l’équipe du film. À l’époque, il y avait une certaine indépendance, je distribuais moi-même mes images, alors qu’aujourd’hui, les studios contrôlent tout. »


Šsteve schapiro

h istoi re s du ci n ĂŠ ma

Martin Scorsese et Robert De Niro


portfolio

taxi driver

Photographs by Steve Schapiro de Paul Duncan (Taschen), disponible



LES FILMS DU 8 MAI AU 5 JUIN 2013 SORTIE LE

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Only God Forgives

Rock the Casbah de Yariv Horowitz 78 The Hit Girls de Jason Moore 79 Hôtel Normandy de Charles Nemes 79 Liv & Ingmar de Dheeraj Akolkar 79 Post Tenebras Lux de Carlos Reygadas 79 Enfance clandestine de Benjamín Ávila 80 Trance de Danny Boyle 80 L’Hypnotiseur de Lasse Hallström 80 Une vie simple de Ann Hui 80 Sous surveillance de Robert Redford 82

Liv & Ingmar

SORTIE LE

29 • 05 La dernière fois que j’ai vu Macao de João Pedro Rodrigues et João Rui Guerra da Mata 87 Vanishing Waves de Kristina Buozyte 87 The Call de Brad Anderson 87 L’Attentat de Ziad Doueiri 87 Shokuzai – Celles qui voulaient se souvenir de Kiyoshi Kurosawa 88 Polluting Paradise de Fatih Akin 88 Ginger & Rosa de Sally Potter 88

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SORTIE LE

15 • 05

Ginger & Rosa

Tu seras un homme de Benoît Cohen 82 Gatsby le magnifique de Baz Luhrmann 82 Le Passé de Asghar Farhadi (Sortie le 17 mai) 83

Gatsby le magnifique

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88

SORTIE LE

05 • 06 Shokuzai – Celles qui voulaient oublier de Kiyoshi Kurosawa 88 Diaz – Un crime d’État de Daniele Vicari 90 Millefeuille de Nouri Bouzid 90 Oh Boy de Jan Ole Gerster 92 Pop Redemption de Martin Le Gall 92 After Earth de M. Night Shyamalan 92 The Iceman de Ariel Vromen 92

82

SORTIE LE

22 • 05 De l’usage du sex toy en temps de crise de Éric Pittard 86 Epic : la bataille du royaume secret de Chris Wedge 86 La Grande Bellezza de Paolo Sorrentino 86 Only God Forgives de Nicolas Winding Refn 86

Oh Boy

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le s fi lm s

SORTIE LE

08 • 05

Rock the Casbah

Le premier film de Yariv Horowitz nous replonge en 1999, lors de la première Intifada, et scrute l’enlisement de jeunes soldats confrontés à l’absurdité du conflit israélo-palestinien. par laura tuillier

Ça commence fort. Dans la bande de Gaza, après un cours sommaire sur le maniement des armes, de jeunes soldats israéliens font face à des jets de pierres. Course-poursuite, coups de feu, l’un d’eux meurt en recevant sur le crâne une machine à laver. Le premier film de Yariv Horowitz débute clairement du point de vue des soldats israéliens, choqués par la mort violente de leur camarade. Si ce point de vue ne change guère au cours du film, qui colle au parcours de quatre d’entre eux, Tomer, Aki, Iliya et Isaac, Rock the Casbah parvient à complexifier la donne. D’abord parce que le film de guerre se mue rapidement en huis clos à ciel ouvert : les quatre garçons se trouvent postés sur le toit depuis lequel a été jetée la machine à laver, chargés de monter la garde. Un quotidien ennuyeux et frustrant s’installe rapidement, fait de tensions au sein du groupe et avec la

famille arabe qui habite la maison. Si chaque soldat représente un archétype – le dur à cuire, le doux rêveur fumeur de joints –, une figure se détache bientôt du groupe, celle de Tomer. Le soldat perd pied, notamment lors d’une très belle séquence nocturne durant laquelle il est chargé de livrer un Palestinien aux services de sécurité israéliens. Là, dans un bunker labyrinthique, il semble que ce soit Tomer et non son prisonnier qui ait les yeux bandés. Lorsqu’il frappe à la porte de la psychiatre du camp, personne ne répond. Le doute fera de lui un tueur, comme s’il finissait par porter sur ses épaules toute l’aberration du face-à-face. De Yariv Horowitz Avec Yon Turmakin, Roy Nik… Distribution : Shellac Durée : 1h28

3 QUESTIONS À YARIV HOROWITZ Comment avez-vous choisi vos acteurs ?

L’essentiel pour moi était que les acteurs aient l’air d’avoir l’âge des jeunes soldats, 18 ans en moyenne. Je tenais à ce qu’ils incarnent la confusion, l’innocence de cet âge. J’ai également travaillé avec la population arabe. C’était fou de créer quelque chose ensemble, en se basant sur le dialogue et non la destruction.

Avez-vous rencontré des difficultés lors du tournage ?

Au début, la population était méfiante. Mais l’idée de tourner un film leur a rapidement plu, surtout quand ils ont compris que pour moi, l’humanité se trouve des deux côtés. Il y a quand même eu des tensions, par exemple quand ils ont appris que dans le scénario, le petit chien est surnommé Arafat par les soldats.

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La fin du film est sombre. Avez-vous le sentiment que la communication est impossible entre Palestiniens et Israéliens ?

Pour ma génération, c’est trop tard, le mal est fait. Mais en ce qui concerne les années à venir – et après avoir rencontré des jeunes des deux côtés –, je suis assez optimiste : ce conflit n’est pas condamné à perdurer, l’espoir est là.


le s fi lm s

The Hit Girls par c.g.

En 2011, Mes Meilleures Amies renouvelait la comédie féminine américaine, ouvrage qui porte ses fruits cette année avec la sortie de The Hit Girls. Ce buddy movie sur un campus chronique l’arrivée d’une nouvelle étudiante (Anna Kendrick) au sein d’un groupe de chant a cappella. Ce film choral période Glee a surtout le mérite de laisser toute latitude au répertoire délirant de l’actrice australienne Rebel Wilson ; et d’instaurer un nouveau label : toutes ces filles qui vomissent, ça fait une belle « vom-com ». De Jason Moore Avec Anna Kendrick, Skylar Astin… Distribution : Universal Pictures Durée : 1h53 Sortie le 8 mai

Post Tenebras Lux

charme de son casting prendre le pas sur des punchlines un peu téléphonées. Éric Elmosnino, Héléna Noguerra et Ary Abittan font toute la drôlerie et le raffinement désuet du film, également généreux en seconds rôles. Joli. De Charles Nemes Avec Éric Elmosnino, Héléna Noguerra Distribution : StudioCanal Durée : 1h37 Sortie le 8 mai

Liv & Ingmar

par j.r.

The Hit Girls

Hôtel Normandy par éric vernay

Charles Nemes s’essaie à un genre dans lequel le cinéma français échoue habituellement : la comédie romantique. Armé d’un scénario tr uffé de situations cocasses et de quiproquos, le réalisateur de La Tour Montparnasse infernale la joue modeste, sans effet de manche, laissant le

De Persona (1966) à Saraband (2003), Liv Ullmann a joué dans dix films du cinéaste suédois Ingmar Bergman. Il fut aussi son compagnon, et le père de sa fille Linn. Pour explorer cette collaboration au long cours, le documentariste a eu accès à des éléments précieux (lettres, photos) et surtout au témoignage de l’actrice norvégienne, qui se dévoile ici en toute sincérité. Si l’on n’apprend hélas pas grand-chose du cinéma de Bergman, on saura tout de la relation tumultueuse qu’il entretint avec Liv. De Dheeraj Akolkar Documentaire Distribution : KMBO Durée : 1h23 Sortie le 8 mai

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Post Tenebras Lux par l.t.

Le film de Reygadas avait fait sensation à Cannes l’an dernier, où il avait remporté le Prix de la mise en scène. D’emblée, la tentation formaliste de l’auteur s’affiche : format carré, bords du cadre floutés en permanence, couleurs saturées. Tandis qu’une nature grondante s’anime, une famille de riches Mexicains se déchire. Déroutant, le film réserve néanmoins une belle surprise : la venue d’un diable flamboyant réalisé en images d’animation, apparition qui illumine la scène d’un inquiétant mystère. De Carlos Reygadas Avec Adolfo Jimenez, Nathalia Acevedo… Distribution : Le Pacte Durée : 1h53 Sortie le 8 mai

Liv & Ingmar


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SORTIE LE

08 • 05

ET AUSSI…

> trance

De Danny Boyle (1h35)

Enfance clandestine

Sortie le 8 mai Le réalisateur de Trainspotting et de Slumdog Millionaire livre un thriller psychologique, à mi-chemin entre le polar et le voyage spirituel. Vol de tableau et séances d’hypnose sont au menu de ce film pour amateurs d’intrigues multifacette. é.r.

En Argentine, en pleine dictature militaire, Juan est un préadolescent qui se cherche, entre lutte contre le pouvoir en place et découverte de l’amour. Nostalgique et inventif. par laura tuillier

> l’hypnotiseur Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes l’an dernier, le premier film de Benjamín Ávila est en grande partie autobiographique : Enfance clandestine, situé en 1979, est un récit d’apprentissage en temps de combat. Fraîchement rentré d’un exil à Cuba, Juan s’installe à Buenos Aires avec sa famille, engagée dans la lutte clandestine contre la junte militaire au pouvoir. Pour les autres enfants, Juan s’appelle Ernesto et grandit dans un environnement sans histoire. C’est cette double vie – finalement le lot de tout préado –, à négocier entre le cocon familial et le groupe social, que le réalisateur met admirablement bien en scène. Tandis que la maison est le lieu de l’agitation et de l’aventure, l’école ménage un temps insouciant et lumineux. Dans la première partie du film, Juan tombe amoureux et cet amour est réciproque. Son

oncle, romantique et exubérant, est le confident qui fait le pont entre les deux mondes. Le temps de l’enfance semble couler paisiblement. Plus violente, la seconde partie du film s’impose comme un brutal passage à l’âge d’homme : le combat contre la dictature, avec son lot de morts (l’oncle, puis le père), surprend le héros dans son insouciance. La violence est mise en images sous forme de séquences animées dont la noirceur graphique souligne la prise de conscience de Juan. Enfance clandestine, dans un beau mouvement, raconte la bataille de chaque enfant pour trouver sa place au sein d’une histoire familiale. Ici, elle résonne avec l’histoire trouble de tout un pays. De Benjamín Ávila Avec Teo Gutierrez Moreno, Ernesto Alterio… Distribution : Pyramide Durée : 1h50

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mai 2013

De Lasse Hallström (2h02)

Sortie le 8 mai Adapté du best-seller du même nom de Lars Kepler, ce polar nordique très sanglant met en scène un homme qui a recours à l’hypnose afin d’aider la police à trouver le meurtrier de toute une famille. Mais rapidement, le fils de l’hypnotiseur est kidnappé. l.t.

> une vie simple De Ann Hui (1h59)

Sortie le 8 mai Ah Tao vit seule avec l’héritier d’une famille qu’elle a servie toute son existence. Quand elle tombe malade, celui-ci s’occupe de cette jolie dame qui l’a élevé, et qu’il considère comme une parente. Un portrait tendre et attachant d’une femme en fin de vie. q.g.



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08 • 05

ET AUSSI…

> tu seras un homme De Benoît Cohen (1h27)

Sous surveillance Après La Conspiration, Robert Redford s’inspire de l’histoire d’une organisation politique d’extrême gauche pour mettre en scène un conflit de regards et de générations. par maureen lepers

Un professeur d’histoire et un homme en cavale arpentent un campus. Ils n’ont plus rien à partager, sinon leur passé terroriste et ce constat, désabusé : écrasée par les traumatismes qui l’ont précédée, la jeune génération n’appréhende plus l’histoire nationale que comme une fiction. Dans cette séquence, furtive, tient tout le projet de Sous surveillance. Écartelé entre deux époques, 1969 et 2012, le film s’inspire de l’histoire du Weather Underground, une organisation politique d’extrême gauche qui, dans la première moitié des années 1970, mena une campagne d’attentats à la bombe, pour faire se confronter deux regards sur la mémoire. La surveillance du titre, c’est d’abord celle d’une traque policière. Mais c’est aussi la surveillance réciproque de deux camps qui se toisent : ceux qui ont fait l’histoire, et

ceux qui doivent désormais l’écrire. Robert Redford incarne le premier : un avocat en cavale, ancien membre du Weather Undergound, qui est aujourd’hui recherché. Shia LaBeouf représente le second : un jeune journaliste qui remonte la piste du groupe pour mettre la main sur l’avocat. Un film d’espionnage bâti autour d’un duo générationnel donc, et l’on pense au Spy Game de Tony Scott (Robert Redford et Brad Pitt), sauf que l’enjeu de Sous surveillance n’est pas dans un passage de flambeau nostalgique. Il réside dans le gouffre mémoriel qui enfle entre ceux qui ont vécu et ceux à qui l’on rapporte les faits par le truchement de l’histoire, considérée comme une irréductible fiction. De Robert Redford Avec Robert Redford, Shia LaBeouf... Distribution : SND Durée : 2h01

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Sortie le 15 mai Théo (Jules Sagot, lire page 18) est embauché comme babysitter pour garder Léo, un petit garçon trop sérieux pour son âge. Entre le jeune homme un peu paumé et le petit garçon, anormalement couvé par une mère dépressive et un père inquiet se tisse une histoire d’amitié pleine de fraîcheur qui trouvera son acmé lors d’une virée à l’océan sur un coup de tête. La direction d’acteurs très fine de Benoît Cohen (Nos enfants chéris) fait du film une gracieuse variation sur le thème du passage à l’âge adulte. l.t.

> gatsby le magnifique De Baz Luhrmann (2h22)

Sortie le 15 mai Après Australia, le clinquant Baz Luhrmann ouvre le Festival de Cannes avec cette adaptation de F. Scott Fitzgerald. Jeune écrivain, Nick Carraway s’installe à New York en 1922 et rencontre le mystérieux millionnaire Jay Gatsby qu’il suit dans ses folles nuits, ses passions et ses excès. Fidèle à l’imagerie baroque et rétro qui a fait le succès de Moulin Rouge, le cinéaste retrouve Leonardo DiCaprio (Roméo + Juliette) et réinvestit les thèmes phares de son cinéma : la fête, l’artifice, l’amour impossible. m.l.


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17 • 05

Le Passé L’Iranien Asghar Farhadi (Une séparation) réunit à Paris Bérénice Bejo et Tahar Rahim dans un vertigineux drame familial, en compétition au Festival de Cannes. Rencontre. propos recueillis par juliette reitzer

Alors même que le langage joue un rôle majeur dans le film, vous avez choisi de tourner en français, une langue que vous ne parlez pas. Pourquoi ? L’histoire devait se passer nécessairement hors d’Iran, et quand vous voulez faire un film dont le titre, mais aussi le thème principal, est le passé, une ville comme Paris est idéale. Ensuite, une de mes grandes motivations a été le fait que tout le monde essaie de m’en empêcher. J’ai voulu affronter ce qu’on me présentait comme un obstacle, plutôt que d’essayer de l’éviter en faisant, par exemple, un film moins bavard. Dès la première scène, Marie (Bérénice Bejo) et Ahmad (l’Iranien Ali Mosaffa) se parlent sans s’entendre, à travers une vitre. Cette difficulté de communiquer irrigue tout le film… Plus les êtres essaient de dire explicitement ce qu’ils ressentent, moins ils arrivent à se faire comprendre. D’ailleurs, les cloisons restent présentes tout le long du film. La première fois qu’on voit Samir, le personnage joué par Tahar Rahim, c’est à travers une bâche en plastique. Et dans le dernier plan, c’est à travers une vitre. Marie est littéralement prise entre son passé et son avenir, entre son ex et son futur mari… Dans Une séparation, Nader était déchiré entre une figure de son passé – son père – et une autre qui représentait son avenir – sa fille – et il ne savait laquelle

choisir ; alors qu’ici, Marie choisit l’avenir et tourne le dos au passé. Je ne sais pas dans quelle mesure elle réussira à appliquer ce désir d’avenir. C’est quelque chose que j’observe moi-même avec intérêt : dans mes films, les hommes sont plutôt tournés vers le passé, et les femmes vers le futur. La cellule familiale est pour vous un idéal lieu d’observation. Quel rôle les enfants y jouent-ils ? Les relations familiales sont les plus anciennes dans l’histoire de l’humanité, et pourtant leurs problématiques sont sans cesse renouvelées. Les enfants ont surgi dans ma filmographie, et j’ai l’impression que je ne pourrai plus faire de films sans eux. Quand les adultes parlent entre eux, ils expliquent leurs tourments dans leur complexité. Mais face à un enfant, ils sont obligés de choisir des mots simples, et ce qui est juste, c’est cette simplicité. De plus, les enfants sont impuissants sur le déroulement des événements, mais ils sont en première ligne quand il s’agit d’en payer les conséquences. Dans le film, il y a un enfant qu’on ne voit pas, c’est celui qui n’est pas encore né. Et l’on sait que le poids, sombre, de ce qui se passe, va peser sur sa destinée. De Asghar Farhadi Avec Bérénice Bejo, Tahar Rahim... Distribution : Memento Films Durée : 2h10

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22 • 05

La Grande Bellezza par m.l.

Auréolé en 2011 du Prix du jury œcuménique pour This Must Be The Place, l’Italien Paolo Sorrentino est de retour à Cannes. Écrivain d’un seul livre, séducteur forcené, le sexagénaire Jap Gambardella est devenu un grand journaliste qui assiste, cynique, à la déliquescence du monde. Fort d’une lumière gracieuse et d’un caméo de la très glamour Angelina Jolie, La Grande Bellezza dresse le portrait d’une société désenchantée, quand son pitch rappelle celui de La Dolce Vita fellinienne.

La Grande Bellezza

De l’usage du sextoy en temps de crise par l.t.

Éric Pittard, réalisateur et protagoniste de ce film, apprend qu’il est atteint d’une leucémie. Fini les reportages autour du monde, à lui les perfusions, la chimio, l’interdiction de sortir. Dans ce premier film tourné vers l’intime, Éric Pittard chronique son quotidien de malade avec sa naïveté et son humour de bougon. Si les scènes de la vie conjugale rejouées sont parfois maladroites, Pittard sait donner à l’ensemble un ton attachant, assez singulier pour intéresser le spectateur au récit d’une vie qui se dénue.

occidentale en s’adressant plus aux jeunes adolescents qu’aux toutpetits. L’histoire, pourtant tirée d’un roman du talentueux William Joyce, ne brille pas par son originalité (une humaine rapetissée rejoint la guerre que se livrent deux peuplades lilliputiennes), mais cet effort louable d’extirper l’animation du ghetto du divertissement pour les chérubins mérite tout notre soutien. De Chris Wedge Animation Distribution : 20th Century Fox Durée : 1h44 Sortie le 22 mai

Only God Forgives

Only God Forgives par j.r.

Deux ans après le succès de Drive, Prix de la mise en scène à Cannes en 2011, Winding Refn revient sur la Croisette avec les mêmes ingrédients : Ryan Gosling (à l’écran), Cliff Martinez (à la musique) et une mise en scène ultrastylisée enserrant un héros contrarié. Julian dirige une salle de boxe à Bangkok. Quand son frère se fait assassiner après avoir tué une prostituée, sa mère (Kristin Scott Thomas, peroxydée), patronne d’une vaste organisation criminelle, débarque en Thaïlande, assoiffée de vengeance.

De Éric Pittard Avec Éric Pittard, Marie Raynal… Distribution : Sophie Dulac Durée : 1h35 Sortie le 22 mai

Epic : la bataille du royaume secret par j.d.

Projet cher au cœur de Chris Wedge (le fondateur des studios Blue Sky), Epic propose une alternative aux canons de l’animation

De Paolo Sorrentino Avec Toni Servillo, Sabrina Ferilli… Distribution : Pathé Durée : 2h30 Sortie le 22 mai

Epic : la bataille du royaume secret

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De Nicolas Winding Refn Avec Ryan Gosling, Kristin Scott Thomas… Distribution : Wild Side / Le Pacte Durée : 1h30 Sortie le 22 mai



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29 • 05

La Dernière Fois que j’ai vu Macao João Pedro Rodrigues et João Rui Guerra da Mata font le portrait minimaliste d’une ville en mêlant habilement documentaire et film noir le temps d’une virée interlope. par quentin grosset

Quelques chiens errants, des rongeurs sans vie et des chants d’oiseaux inquiétants dans Macao dépeuplée. Sur ces images et ces sons d’un paysage urbain désertique vient se greffer le commentaire las et hypnotique de João Rui Guerra da Mata. Parallèlement au récit de son enfance dans la péninsule, ancienne colonie portugaise, la voix off emprunte des chemins plus sombres. Comme dans certaines œuvres de Chris Marker, la manipulation du réel renvoie au parcours labyrinthique de la mémoire, le personnage comme les cinéastes se perdant entre leurs souvenirs et leurs fantasmes. Le film est ainsi en perpétuelle hésitation entre documentaire autobiographique et film noir. Si le narrateur est de retour après avoir quitté la ville il y a trente ans, c’est parce qu’il a reçu un mail de sa vieille amie Candy, une transsexuelle femme fatale (la per-

formeuse Cindy Scrash, déjà vue dans le très queer Mourir comme un homme de João Pedro Rodrigues) qui lui dit être en grand danger. Le héros vient donc enquêter sur sa mystérieuse disparition, et c’est dès lors à un imaginaire hanté par Le Paradis des mauvais garçons (1952) de Joseph von Sternberg que l’on a affaire. Avec le folklore brumeux du film en tête, les deux réalisateurs semblent prompts à revisiter l’Orient tout en réexaminant les tropes du cinéma hollywoodien des années 1950. Que ce soit au niveau de leur style ou des thématiques qu’ils abordent, les cinéastes font alors preuve d’une grande maîtrise du transgenre. De João Pedro Rodrigues et João Rui Guerra da Mata Avec la voix de João Rui Guerra da Mata Distribution : Épicentre Films Durée : 1h25

ET AUSSI…

> vanishing waves

> the call

> l’attentat

Sortie le 29 mai Lukas accepte de participer à une expérience scientifique qui lui permet de voyager dans l’esprit d’une patiente dans le coma. Rapidement, il y vit des expériences inédites avec la jeune femme, dont il tombe amoureux. Un film de science-fiction romantique. l.t.

Sortie le 29 mai En ligne directe avec une ado menacée par un tueur en série, l’opératrice d’un poste de police (Halle Berry) mène l’enquête. Sous ses airs de thriller convenu, The Call prend de la hauteur, sous la houlette du réalisateur Brad Anderson (The Machinist). m.l.

Sortie le 29 mai Entre Israël et Palestine, un homme enquête sur la mort de sa femme, responsable de l’explosion d’une bombe à Tel Aviv. Grand Prix au dernier festival de Marrakech, L’Attentat promet un beau suspense, que Ziad Douieri distille en forme de néonoir. m.l.

De Kristina Buozyte (1h45)

De Brad Anderson (1h35)

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De Ziad Douieri (1h45)


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Polluting Paradise par c.g.

Fatih Akın, représentant depuis Head-On (2004) d’un nouveau cinéma germano-turc versé dans la peinture sociale, présentait en séance spéciale à Cannes l’an dernier Polluting Paradise, dont le titre d’origine se traduit par « des poubelles dans le jardin d’Eden ». Ce documentaire suit la construction d’une vaste décharge en pleine zone peuplée, au nord de la Turquie. Si cette dénonciation du désastre écologique menaçant une région verdoyante peine à insuffler une vraie résonance au film, elle se déroule sans accrocs. De Fatih Akın Documentaire Distribution : Pyramide Durée : 1h38 Sortie le 29 mai

Ginger & Rosa

mise grâce à la fraîcheur d’Elle Fanning en fille chagrine et poète qui se réfugie dans un combat acharné contre la bombe atomique pour oublier les trahisons de son entourage. De Sally Potter Avec Elle Fanning, Alice Englert… Distribution : Eurozoom Durée : 1h30 Sortie le 29 mai

Shokuzai -

Celles qui voulaient se souvenir par donald james

Polluting Paradise

Ginger & Rosa par l.t.

Londres, années 1960. Ginger et Rosa sont inséparables. La première (Elle Fanning) est timide et naïve, tandis que son amie, plus affirmée, collectionne les flirts. Tout s’embrouille lorsque Rosa s’amourache du père de Ginger, qui le lui rend bien. Le film de Sally Potter (Orlando), récit d’apprentissage vintage, emporte la

Plongée dans les méandres de la psychologie nippone, Shokuzai, série télévisée en cinq épisodes, au pitch dense et sophistiqué, signée Kiyoshi Kurosawa, sort sur nos écrans dans une version écourtée en deux volets. Le premier installe le décor : fille d’un couple d’industriels, Emili, 9 ans, est assassinée dans son école par un homme mystérieux que seules ses amies ont aperçu – mais toutes affirment n’avoir rien vu. C’est à ces témoins que le diptyque s’intéresse, en nous transportant quinze ans après le drame. De Kiyoshi Kurosawa Avec Yû Aoi, Eiko Koike… Distribution : Version Originale / Condor Durée : 1h59 Sortie le 29 mai

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Shokuzai -

Celles qui voulaient oublier par d.j.

Il faut avoir vu le premier volet (en salles le 29 mai) du diptyque Shokuzai pour apprécier ce second opus. On découvre ici Akiko, jeune femme traumatisée qui refuse de grandir, et Yuka, personnage léger et cynique, ainsi que l’identité du meurtrier de la petite Emili. Mais dans ce thriller fleuve, cette révélation importe moins que l’écheveau de secrets de chacun. Présentée à la dernière Mostra de Venise, cette œuvre a été saluée comme un retour virtuose de l’auteur de Tokyo Sonata. De Kiyoshi Kurosawa Avec Sakura Ando, Chizuru Ikewaki… Distribution : Version Originale / Condor Durée : 2h28 Sortie le 5 juin

Shokuzai – Celles qui voulaient oublier


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Diaz – Un crime d’État par étienne rouillon

Le 22 juillet 2001, en marge du G8 de Gènes, la police italienne lance un assaut sur l’école Diaz, dans laquelle dorment des manifestants suspectés à tort d’appartenir à un Black Bloc, un regroupement informel de manifestants privilégiant l’action violente. L’intervention fera soixante-deux blessés, dont trois graves, et abou-

tira à la condamnation de policiers pour coups et blessures et falsification de preuves. Profitant des ressources documentaires du premier rassemblement anti-G8 filmé sous toutes les coutures (militants, journalistes, amateurs), Daniele Vicari reconstitue un portrait convaincant des militants avant de présenter leur calvaire. Une heure du film

Millefeuille

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est entièrement consacrée aux violences policières. C’est insoutenable. La pluie de matraques est continue et filmée crûment. Du jamais vu. Cette violence à l’écran n’est pas gratuite ni fantasmée, même si la mise en scène de certains coups portés semble incompatible avec un bilan sans morts. Vicari fait ce choix de tout montrer dans le détail, délicat d’un point de vue cinématographique, parce qu’il y voit une forme d’efficacité nécessaire à son projet : interroger, avec le réalisme pour porte-voix, les responsabilités d’un État qui a refusé d’assumer cette nuit d’atteinte aux droits démocratiques. Très rude mais très utile. De Daniele Vicari Avec Elio Germano, Jennifer Ulrich… Distribution : Le Pacte Durée : 2h03

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05 • 06

par quentin grosset

Le cinéaste tunisien Nouri Bouzid s’emploie une nouvelle fois à évoquer la condition des femmes en Tunisie, sujet qu’il avait déjà traité en 1997 avec Tunisiennes. Le hijab (voile islamique) est un thème sensible au cinéma, et la plupart des œuvres qui tentent d’en parler nous disent en substance : il est forcément une prison synonyme d’oppression masculine, le symbole du patriarcat. Une position souvent surplombante, parfois presque islamophobe. Le réalisateur est ici plus subtil, puisqu’il met face à face deux situations : celles de deux cousines, Aïcha, 27 ans, et Zaineb, 21 ans. La première porte le voile, l’autre pas. Mais toutes deux sont autant engagées dans la révolution tunisienne de 20102011, qui précipitera le départ

du président de la République, Zine el-Abidine Ben Ali. Surtout, chacune d’elles est féministe à sa façon. La mère et le fiancé de Zaineb veulent que celle-ci mette le hijab : elle résiste. Le patron d’Aïcha, qui travaille dans une pâtisserie, la somme d’enlever le sien, pour faire plaisir aux clients : elle tient tête. L’enjeu du film, ce

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mai 2013

n’est pas le voile en soi, mais bien plutôt l’injonction sociale, familiale et religieuse à se soustraire à une autorité violente et archaïque, ici montrée dans tout ce qu’elle a de protéiforme. De Nouri Bouzid Avec Souhir Ben Amara, Nour Mziou… Distribution : Paradis Films Durée : 1h45



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05•06

ET AUSSI…

> pop redemption

De Martin Le Gall (1h34)

Sortie le 5 juin Les Dead Makabés rêvent de partir au Hellfest. Mais quand le groupe se retrouve mêlé à un meurtre, ses membres doivent se faire passer pour des chanteurs de pop sucrée. Si les blagues tombent à plat, le film est exhaustif sur les différents courants de la musique metal. q.g.

Oh Boy Premier long métrage, récompensé au festival d’Angers, de l’Allemand Jan Ole Gerster, Oh Boy fait le portrait d’une génération insolente et désenchantée. par maureen lepers

> after earth Noir et blanc léché et caméra à l’épaule, Jan Ole Gerster nous embarque pour vingt-quatre heures chrono dans les rues de Berlin sur les pas de Niko (incarné par Tom Schilling), un jeune idéaliste défait qui enchaîne les coups durs. Chronique sociale autant que portrait individuel, Oh Boy met en scène la rencontre brutale des illusions et du réel pour mieux incarner le gouffre qu’elle soustend et que figure le running gag du film : l’espoir toujours déçu du héros d’arriver à boire tranquillement une tasse de café. Loin d’être paralysante, cette brèche est propice à l’émergence d’une voix. Saturée des échos de la ville, elle s’élève et la surplombe pour s’incarner dans un humour caustique, cruel et cru qui rappelle sans mal le ton donné par Hannah, l’héroïne grande gueule de la série

Girls, dont le film est presque le contrepoint européen. Intellectuel frustré en crise, Niko est une sorte d’Antoine Doinel allemand à la poésie diffuse. Mais le réalisateur a ici troqué le romantisme pour une langue virulente qui fait peser plus lourd la chape d’un quotidien trop tangible, appuyé par le recours au noir et blanc. La puissance d’Oh Boy tient moins à son sujet qu’à sa justesse de ton. Vibrant, le film crie, s’insurge, fait résonner le grave et le trivial, la peur et le bonheur, comme autant d’ombres qui se défient et se répondent. Dans le clair-obscur, cette génération peut enfin transcender sa force d’inertie pour s’extirper du gouffre. De Jan Ole Gerster Avec Tom Schilling, Friederike Kempter... Distribution : Diaphana Durée : 1h28

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De M. Night Shyamalan

Sortie le 5 juin En partance de Nova Prime, Cypher (Will Smith) et son fils (Jaden Smith) s’écrasent sur la Terre, où les hommes n’ont plus leur place. L’Américain M. Night Shyamalan (Sixième Sens) s’engouffre dans la brèche ouverte par Oblivion avec ce film d’action écolo. m.l.

> the iceman

d’Ariel Vromen (1h43)

Sortie le 5 juin Le charisme inquiétant de Michael Shannon (Take Shelter) porte sur grand écran l’histoire vraie et sidérante de Richard Kuklinski, l’assassin attitré de la famille Gambino, qui a reconnu plus de cent meurtres après son arrestation en 1986. Glaçant. é.r.



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De l’influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites

Troisième réalisation de Paul Newman, De l’influence des rayons gamma… sacre Joanne Woodward, son épouse, mère de famille névrosée et tyrannique.

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par laura tuillier

L’affiche du 66e Festival de Cannes dévoile la photographie d’un couple d’amoureux, incarnation de l’optimisme des sixties, Paul Newman et Joanne Woodward, sur le tournage de La Fille à la casquette de Melville Shavelson (1963). Si ces deux-là afficheront une harmonie sans faille jusqu’au décès de l’acteur, en 2008, le film qu’ils signent ensemble en 1972, lui derrière la caméra, elle devant, est nettement moins serein. Dans l’une des premières séquences, alors que le générique défile, Beatrice Hunsdorfer (Betty) essaye des perruques dans un magasin. Face au miroir, le regard délavé, Joanne Woodward change de tête, passe du blond platine au brun frisé. Elle sera pendant tout le film cette femme qui hésite violemment sur son identité. Mère de deux adolescentes, Betty a été abandonnée par son mari. Dépressive, elle passe son temps à fantasmer en lisant les petites annonces du journal local : comment gagner de l’argent, changer de vie, retrouver un homme. Comme elle le hurle à un moment, elle vit « une demivie » dans laquelle chaque jour est une épreuve dont elle doit se relever. En contrepoint, et c’est ce qui

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donne son titre énigmatique au film, Matilda oppose à sa mère surexcitée une voix douce et des activités paisibles : regarder pousser des marguerites exposées à des radiations radioactives. Le contraire de sa grande sœur qui vit dans l’angoisse de ressembler à Betty. Paul Newman filme Matilda comme une fleur en train de s’épanouir, malgré son exposition à la violence du monde environnant. Fascinée par son prof de bio et ses explications poétiques sur l’atome, Matilda, blonde comme les marguerites, observe le comportement paranoïaque de sa mère sans jamais y opposer autre chose qu’une mélancolie délicate. De l’influence des rayons gamma… fait de Paul Newman un filmeur hors pair de la femme incapable de s’enraciner au sein de la famille. Deux ans après, Cassavetes lui emboîtera le pas en mettant en scène sa compagne Gena Rowlands dans Une femme sous influence. De Paul Newman (1972) Avec Joanne Woodward, Nell Potts… Édition : Potemkine Durée : 1h40

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dvd

LES SORTIES DVD

les invisibles / bambi

quinze jours ailleurs

l’homme de rio

C’est en collectionnant des photographies trouvées dans les brocantes que Sébastien Lifshitz s’est intéressé, avec Les Invisibles, à l’histoire d’anonymes ayant vécu leur homosexualité lorsque celle-ci était confinée au placard, dans les années 1950. Le cinéaste a ainsi décidé de se replonger dans les archives de ces témoins d’une période difficile pour les gays et les lesbiennes. Une très émouvante galerie de personnages, garante d’une mémoire LGBT que le cinéaste s’emploie également à documenter dans Bambi, portrait bouleversant d’une transsexuelle de 77 ans devenue enseignante après des années de music-hall. q.g.

Si ce film tardif de Minnelli, sorti en 1962, évoque formellement le cinéma hollywoodien des années 1950 (à commencer par son Technicolor éclatant), il conte en substance le contraire : les déboires financiers et humains d’un tournage américain expatrié à Rome. Un acteur dépressif tout juste sorti de clinique psychiatrique (Kirk Douglas, renfrogné), un réalisateur démodé et une brochette de visages fardés et grimaçants (starlettes hystériques, producteurs décérébrés) y donnent l’image d’un cinéma vieillissant qui semble courir à sa perte. Une ambiance fin de règne magistralement mise en scène par Minnelli. j.r.

Avec ce grand classique du cinéma français porté par Jean-Paul Belmondo, Philippe de Broca rompt en 1964 avec les codes de la Nouvelle vague pour rendre hommage au récit d’aventure tel qu’a pu l’envisager Hergé avec Tintin. L’influence déterminante de L’Homme de Rio (Spielberg s’en inspira pour Indiana Jones) est toujours d’actualité (on la décèle dans la série des OSS 117 de Michel Hazanavicius). Et TF1 Vidéo lui fait aujourd’hui l’honneur d’une édition particulièrement fournie, augmentée d’un beau making off, ainsi que de reportages sur l’écriture du scénario et la composition de la bande originale. m.l.

De Sébastien Lifshitz (Ad Vitam)

les mouvements du bassin / il n’y a pas de rapport sexuel

De HPG et Raphaël Siboni (Capricci) Le film de Raphaël Siboni, réalisé avant celui d’HPG, offre un premier portrait en creux du hardeur-réalisateur en proposant un montage des rushes recueillis par celui-ci lors de ses tournages. Siboni dévoile le quotidien d’un homme au travail qui filme avec professionnalisme levrettes et doubles pénétrations. Dans Les Mouvements du bassin, film « classique », HPG complète son autoportrait : il est Hervé, veilleur de nuit dépressif et solitaire, impuissant devant la violence qui a tendance à monter en lui. Le film réserve, malgré sa maladresse, de belles visions d’un corps indomptable. l.t.

De Vincente Minnelli (Wild Side)

De Philippe de Broca (TFI Vidéo)

tabou

take this waltz

Scindé brutalement en son milieu, Tabou conte l’histoire d’Aurora, d’abord vieille dame mourante dans un Lisbonne triste, puis jeune femme adultère au temps des colonies africaines. Advient alors un film muet, une histoire d’amour romantique en diable, des interprètes sublimes, une nature magnifique. Les acteurs n’ont plus la parole, ils l’ont perdue quelque part sur le chemin de la mémoire. Miguel Gomes réussit un film qui réconcilie les vivants et les morts, comme lorsque Pilar et Aurora laissent couler leurs larmes à des années d’écart, au son de la même chanson d’amour : Be my Baby. l.t.

Margot (Michelle Williams) est heureuse avec son mari, Lou (Seth Rogen) : ils passent leur temps à se bécoter, à rigoler et à manger du poulet – Lou écrit un livre de cuisine. Mais Margot rencontre un beau gosse prénommé Daniel (Luke Kirby) dans un avion, et ses certitudes s’envolent. Sortie directement en DVD, cette comédie romantique estivale et urbaine de la Canadienne Sarah Polley (Loin d’elle, Stories We Tell) s’appuie sur un casting brillant pour faire oublier ses longueurs et un scénario un peu convenu, et dessine avec lucidité un éloge fiévreux mais désenchanté de la constance amoureuse. j.r.

De Miguel Gomes (Shellac Sud)

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De Sarah Polley (TF1 Vidéo)



cultures KIDS

MUSIQUE

LIVRES-BD

SÉRIES

EXPOS

SPECTACLES

JEUX VIDÉOS

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le cirque invisible

we are modeselektor

la Machine du Moulin Rouge

116

110

« la valise mexicaine »

marcel brauer

cité de l’Architecture et du Patrimoine

one piece z p.98

Nathan, 13 ans, s’est vaillamment embarqué pour l’univers tumultueux du manga pirate.

qui veut la peau de roger rabbit ? p.99

Entre cartoon et film noir vintage, l’œuvre de Robert Zemeckis fête ses 25 ans. « capitaine futur et les super pouvoirs » p.99

Une balade pour les petits dans le monde du numérique à la Gaîté Lyrique.

VOIR « la valise mexicaine » p.110 Après plusieurs escales, l’exposition arrive enfin à Paris, au musée d’art et d’histoire du Judaïsme.

le cirque invisible p.112

Le best-seller de Victoria Chaplin et Jean-Baptiste Thierrée revient au théâtre du Rond-Point.

top of the lake p.108

La réalisatrice Jane Campion signe un polar âpre et envoûtant aux confins de la Nouvelle-Zélande.

RESTOS

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théâtre du Rond-Point

KIDS

DESIGN

musée d’art et d’histoire du Judaïsme

ÉCOUTER savages p.100

Les quatre Londoniennes livrent un premier brûlot entre tradition postpunk et parfaite modernité.

junip p.102

Le trio suédois revient faire une petite démonstration de songwriting pop-folk sur son deuxième album.

we are modeselektor p.102

Les Berlinois foutraques Romi Agel & Holger Wick servent un cocktail tech-pop-house euphorisant.

JOUER luigi’s mansion 2 p.114

Le frère de Mario trace sa route, techniquement prodigieuse et bourrée d’inventivité, sur 3DS.

ridiculous fishing p.114

Plus un jeu est débile, plus il a de chances de devenir indispensable. Nouveau cas d’école.

shootmania storm p.115

D’intenses jeux Olympiques du FPS au cours duquel amateurs et élites ont tous droit de cité.

www.troiscouleurs.fr 97

LIRE david carkeet p.104

Avec Le linguiste était presque parfait, l’Américain mélange polar et campus novel.

joyce maynard p.105

Quarante ans après sa publication, Une adolescence américaine est enfin traduit en français.

ted benoit p.106

Camera obscura, une anthologie surprenante consacrée au créateur de Ray Banana.

VISITER londres p.120

Les bons plans de la capitale de la culture excentrique compilés par Time Out Paris.

marcel breuer p.116

Le design mobilier du célèbre architecte est célébré à la cité de l’Architecture & du Patrimoine.

milford sound p.118

Sur les traces du Seigneur des anneaux de Peter Jackson, en Nouvelle-Zélande.

VOYAGES


cultures KIDS Le petit papier papier de de Nathan, 13 ans Le petit

One Piece Z

©eurozoom

CINÉMA

Nathan, 13 ans, s’est vaillamment embarqué pour l’univers tumultueux de One Piece Z sous l’étendard de Trois Couleurs. Le moussaillon nous livre ses impressions. propos recueillis par julien dupuy

l’avis du grand En quinze ans d’existence, la saga One Piece s’est considérablement étoffée avec un manga en soixante-dix volumes et une série télé de 590 épisodes. C’est dire si ce One Piece Z, onzième long métrage de la franchise, largue les néophytes dès son ouverture : nous voilà bazardés sans autre forme de procès au milieu d’une tortueuse affaire géopolitique qui a généré une nouvelle menace pour nos héros. À réserver aux connaisseurs donc, même si les amateurs d’humour absurde nippon et les fans de combats à mains nues pourront également y trouver leur compte. j.d.

« Je connaissais pas trop One Piece (les mangas ou la série). Et en découvrant le film, j’ai bien aimé l’environnement et le scénario. Je trouve que toute l’histoire des fruits, c’est très bien pensé : en fonction du fruit qu’ils ont mangé, les gentils pirates ont des pouvoirs. Ça, c’est sympa, ça fait un côté un petit peu super-héros, et les personnages sont bien définis, ils ont tous un style de combat différent. Le capitaine, qui a les bras élastiques, il est super bien fait, parce qu’il a un caractère bien à lui. C’est ce qui fait de lui le capitaine. Le grand méchant, qui est Z, faisait partie de la marine, et après de lourds événements, il a créé un clan et a réuni des membres de l’ancienne marine pour tuer les pirates et ceux de la marine. Le grand méchant est important, son nom est dans

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mai 2013

le titre et il est bien fait : son poing en granit, qui peut repousser les pirates qui ont mangé des fruits, ça rend plus de suspense parce qu’il est plus dangereux. Mais il a vécu de lourds moments, et on comprend après pourquoi il veut se venger. Du coup, à la fin, on ne sait plus trop qui sont les bons et les méchants, mais on est quand même du côté des gentils pirates. J’ai bien aimé que les personnages soient bien complets. On comprend pourquoi ils se font la guerre. Par contre, c’est vrai qu’il y a un peu trop d’action à mon goût. J’aime bien l’action, mais là, c’est un peu abusé. Ce film, ça donne envie de voir la série, si on aime l’action et les délires. Moi, je suis bien tenté ! » One Piece Z de Tatsuya Nagamine Animation / Distribution : Eurozoom Durée : 1h47 / Sortie le 15 mai


3 objets par m.l.

livre Les grands hommes ne meurent jamais. C’est ce que prouve, depuis 2011, la série animée Chaplin and co, diffusée sur France 3 et Ludo, dont on retrouve aujourd’hui les personnages dans un livre d’activités ludiques édité par Gallimard Jeunesse. L’ensemble des jeux dessinent une ville claire et colorée qui modernise en douceur l’œuvre du cinéaste. En tête de wagon, l’irrésistible Kid, intemporel bambin dont les aventures loufoques raviront les petits comme les vieux cinéphiles. Mon grand livre d’activités – Chaplin and co (Gallimard Jeunesse)

dvd

livre

Entre cartoon et film noir vintage, Qui veut la peau de Roger Rabbit ? souffle cette année ses 25 bougies et s’offre pour l’occasion une réédition Blu-ray enrichie de trois courts métrages centrés sur les aventures du célèbre lapin. Cynique, le film fait aussi état de la grande tendresse du réalisateur pour l’univers qu’il met en scène. La magie y côtoie l’absurde, et Robert Zemeckis signe un brillant polar hydride, rempli des délires de son âme d’enfant. Qui veut la peau de Roger Rabbit ? de Robert Zemeckis (Touchstone Home Videos)

Un homme à tête de loup emménage dans son nouvel appartement quand il remarque un trou dans le mur. Ce trou se déplace de page en page et s’incarne en différents objets à mesure qu’évolue le récit d’Øyvind Torseter. Lignes aériennes, dessin épuré, l’artiste norvégien nous offre ici un conte urbain d’une surprenante poésie dans lequel l’économie des dialogues et des mots tisse un silence gracieux où viennent s’engouffrer le bizarre et la magie. Le Trou d’Øyvind Torseter, traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud (La Joie de lire)

3 sorties © emily gobeille theodore watson

dr

© william beaucardet

par m.l.

Weather World de Theo Watson et Emily Gobeille

cirque Quel enfant n’a jamais rêvé de faire partie d’un cirque, d’en investir les couleurs et les lumières, d’en faire vivre les numéros ? Avec Oh ! Hisse ! Chapiteau !, c’est une plongée dans les coulisses de cet art magique que propose le parc de la Villette. Ensemble, chacun accompagné d’un adulte, les enfants mettront leurs forces en commun pour construire leur propre chapiteau, avant d’être récompensés par un spectacle d’ombres et de lumières. Oh ! Hisse ! Chapiteau ! De 6 à 10 ans, du 12 mai au 7 juillet au parc de la Villette

spectacle Dessinateur et cinéaste, inspirateur de Jacques Tati et de Federico Fellini, Pierre Étaix est aussi poète. C’est aujourd’hui au travers d’un texte sur les couleurs que les enfants peuvent découvrir cet auteur, dans un spectacle mis en musique par Yves Rousseau. Les nuances se mêlent aux notes diverses et variées pour donner naissance à une symphonie bariolée, tandis qu’un peintre, invisible du public, donne vie sous nos yeux à une étrange fresque. Les Couleurs Du 15 au 17 mai au théâtre 71

www.troiscouleurs.fr 99

exposition Dans le cadre du festival Capitaine Futur, la Gaîté Lyrique propose aux plus jeunes de retrouver l’univers délirant du fameux capitaine dans une exposition d’art contemporain interactif. Au travers d’installations d’artistes numériques et d’un grand nombre d’ateliers, les enfants pourront partir à la découverte d’une nouvelle planète. Une excursion des petits dans le monde des pixels qui se prolongera au même endroit les 1er et 2 juin, pendant le festival Pariszone@dream. « Capitaine Futur et les super pouvoirs », dès 5 ans, jusqu’au 26 mai à la Gaîté Lyrique


cultures MUSIQUE

©david shama

SILENCE YOURSELF de Savages (Matador/Beggars) Sortie le 7 mai

Prose combat POSTPUNK

Les quatre Londoniennes de Savages livrent un premier brûlot, Silence Yourself, entre tradition postpunk et parfaite modernité, qui réduit au silence la concurrence. par wilfried paris

Bloc d’intensité et d’énergie électrique maîtrisées, le quatuor féminin Savages fait corps, retranché derrière ses chansons mantras comme derrière une armure, distillant depuis un an des concerts incandescents, comme autant de pluies d’obus dans les ténèbres d’une guerre de tranchées. La chanteuse et parolière Jehnny Beth explique avoir été inspirée par « les poèmes écrits par Robert Graves ou Siegfried Sassoon durant la Première Guerre mondiale, des textes remplis d’une énergie vitale très forte. Je m’interrogeais sur le sens des mots dans un contexte de guerre. Et je voulais voir comment cette urgence pouvait se traduire en quelques lignes dans des chansons. Je lisais aussi Henri Michaux, et j’aimais cette idée que les mots, par leur répétition, pouvaient faire office de remède, comme des mantras, dans le but de se convaincre soi-même ». Considérant la production comme un processus de réduction, Gemma Thompson (guitares sciantes), Fay Milton (fûts martelés), Ayse Hassan (basse façon Peter Hook) et Jehnny Beth (échappée du

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combo français exilé à Londres, John & Jehn) ont apuré leurs influences (Siouxsie & the Banshees, Joy Division, Birthday Party, Bauhaus) pour offrir une pop noire (nom de leur label, qui a repéré Lescop avant sa signature chez Universal), moins postmoderne qu’ancrée dans la violence sourde de l’époque. Les déjà tubesques She Will et Husbands, litanies étendard d’une sexualité libérée, affirment avec une inédite intensité l’espérance d’une nouvelle concentration, la réunion de ce qui a été dispersé : « Le monde est trop bruyant. C’est le sens du titre de l’album, Silence Yourself, parce qu’il y a trop de distractions, et qu’on n’est jamais disponible pour soi-même. Ces distractions ne nous apprennent rien sur nous-mêmes. L’idée derrière Savages, c’est de se recentrer, de se concentrer, de concentrer nos forces. Si on est concentré, on est plus difficile à choper. » Guerrières de la scène, ces amazones confirment la hype anglaise avec ce premier album qui prend à la gorge, ramassé et tendu comme un arc. Électrique bien sûr.

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sélection par michaël patin

les belles structures

De Arne Vinzon (Dokidoki/Modulor)

Buzzé depuis que Cyril Hanouna lui a fait jouer son anti-tube Lente dépression dans Touche pas à mon poste, le duo Arne Vinzon livre un deuxième album en forme de seppuku commercial. Entre une musique qui pousse le minimalisme synthétique à un degré d’austérité proche de l’abstraction et les mots et la voix étranges d’Arno Vincent, quelque part entre Jacno et Houellebecq, romantisme postmoderne et ironie très dandy, on tient là le disque de chanson française le plus épineux de 2013.

hokey fright

De The Uncluded

(Rhymesayers/Differ-ant)

Sur le papier, l’association d’Aesop Rock et de Kimya Dawson (The Moldy Peaches) peut laisser songeur. Quelle entente possible entre le prince coléreux du rap indépendant et l’ogresse fantasque de l’anti-folk ? Les réponses données par The Uncluded tombent sous le sens : rejet du confort formel menant vers l’ascèse et goût ludique pour la narration à la première personne. À la fois monotone et piqué de révélations, Hokey Fright s’écoute comme la thérapie à ciel ouvert de deux éternels outsiders.

vous n’allez pas repartir les mains vides ? De Sexy Sushi

(Believe Recordings)

Esthètes au bec fin, passez votre chemin. Votre pire cauchemar, Sexy Sushi, est de retour avec une double ration d’electroclash de kermesse et de provoc’ à deux balles. Sauf que derrière les déguisements de Schtroumpfs UMP et l’artwork qui pique les yeux, ce quatrième album est empli d’une profonde et communicative tristesse. Celle d’inadaptés lucides, prisonniers d’un monde dans lequel la musique bête et l’humour méchant ne sortiront jamais vainqueurs. Et ce ne sera pas faute d’avoir essayé.

some say i so i say light De Ghostpoet (PIAS)

Deux ans après Peanut Butter Blues… et sa nomination au Mercury Prize, Ghostpoet ouvre sa palette sonore (l’analogique prend le pas sur le numérique) pour repousser les frontières de son art. « Postelectronica », « post-trip-hop », « postgrime »… aucune terminologie barbare ne suffit pour résumer Some Say I So I Say Light. Flow hyperconscient + nappes capiteuses + beats de rouille et d’or + vertiges acoustiques (indie pop ou afrobeat ?) = le son urbain dont vous avez besoin maintenant.


cultures MUSIQUE JUNIP de Junip (City Slang/Universal) Sortie le 22 avril

agenda par w.p. et é.z.

©klara andreasson

le 15 mai pvt

En trois albums, les australiens PVT (ex-Pivot) se sont affranchis de l’indie rock à guitares pour donner de la voix et faire tourner les machines. Après un petit tour chez Warp, ils publient chez Modulor l’ambitieux quoique minimaliste Homosapien, pas très loin des laborantins Liars ou Atoms For Peace. À la Flèche d’or

POP-FOLK

Un groupe normal par éric vernay

Sans se la raconter, le trio suédois revient faire une petite démonstration de songwriting pop-folk sur son deuxième album. À l’attitude rock’n’roll et aux phrases chocs en interview, les Suédois de Junip préfèrent les réponses modestes, voire plates et déceptives, comme lorsqu’on les interroge sur le titre éponyme de leur deuxième LP : « On cherchait quelque chose de similaire à Fields (l’album précédent – ndlr), simple et d’une certaine manière, neutre ou vague, avance timidement le chanteur José González. On avait une ou deux idées, dont celle de l’intituler simplement Junip. » Les influences musicales sur cet album ? « Comme pour l’album précédent, rien de spécial, des choses des années 1960, 1970, 1980, 1990… Et des années 2000 ! Il n’y a pas de concept particulier, juste des chansons qui tiennent debout et qui vont ensemble. » Concernant le temps de gestation plutôt lent du groupe de Göteborg, Tobias Winterkorn avance d’abord la nécessité « contractuelle » de sortir des disques, pour satisfaire le label, avant de nous rassurer un peu : « Mais aussi pour le plaisir ! » Et le claviériste de conclure : « On est un groupe normal. » Pour la légende, on repassera. Aimable et feutrée, à l’instar de ses interprètes, la musique de Junip colle aux oreilles sans brusquer l’auditeur. Son charme pourtant tenace opère par couches successives de synthés, de guitares et de voix, tirant doucement l’auditeur d’un spleen initial vers l’aube d’une mélodie libératoire, « comme une spirale harmonieuse qui l’emmènerait à un endroit sans même qu’il s’en rende compte », explique José González, trouvant enfin les mots idoines pour décrire sa pop ouvragée aux accents psychés. Entrez dans la transe.

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du 17 au 19 mai weather festival

Pour fêter la sortie du documentaire We Are Modeselektor dont ils sont les héros, les Berlinois foutraques Romi Agel & Holger Wick convient leurs copains Mouse On Mars et la Sound Pellegrino Thermal Team (Orgasmic + Teki Latex) pour un cocktail techpop-house euphorisant. We love Modeselektor. À la Machine du Moulin Rouge

le 27 mai beach fossils

Galop d’essai généreux pour ce festival technoïde au line-up colossal : les Berlinois Marcel Dettmann et Len Faki (DJs résidents du Berghain), l’affolante Nina Kraviz, le maître de la techno-house de Détroit Theo Parrish ou la sensation française Polar Inertia… Beau fixe garanti pour trois jours. www.weatherfestival.fr

Sorti de la torpeur dream pop d’un joli premier album, le projet de Dustin Payseur a gagné en nervosité sur la route, le récent Clash The Truth produit par Ben Greenberg de The Men, plus indie rock, reflétant une envie d’en découdre avec les légendes du rock à guitares, de Fugazi à My Bloody Valentine. À la Maroquinerie

du 23 au 26 mai villette sonique

le 31 mai jeff mills: time tunnel

The Melvins, The Flaming Lips, Swans, Zombie Zombie, Crâne Angel, Mykki Blanco, The Intelligence, Jackson, TNGHT, J.C. Satàn, Gary Wilson, Daphni, Neurosis, Chris Cohen… Entre rock et clubbing, concerts payants et gratuits en plein air, Villette Sonique est le festival le plus éclectique et exigeant de l’année. Au parc de la Villette

mai 2013

le 24 mai we are modeselektor

Le pionnier de la techno poursuit son odyssée expérimentale. Inspiré de la S-F seventies, son dernier trip visuel et sonore explore l’histoire de la dance music, des cérémonies tribales d’un autre âge au New York futuriste des années 5000. Aller simple pour le cosmos : electronautes, jump on board. À la Machine du Moulin Rouge



cultures LIVRES / BD

dr

LE LINGUISTE ÉTAIT PRESQUE PARFAIT de David Carkeet Traduit de l’américain par Nicolas Richard (Monsieur Toussaint Louverture) Disponible

Langue bien pendue POLAR

Avec Le linguiste était presque parfait, l’Américain David Carkeet mélange polar et campus novel. Un bijou d’humour anglo-saxon en forme de Cluedo intello, enfin traduit en français. par bernard quiriny

À peu près inconnu chez nous, David Carkeet ne devrait pas le rester longtemps grâce à ce récit, à la fois comique et intello, qui l’a fait connaître aux États-Unis où il a été retenu pour l’Edgar Award du meilleur premier roman policier. Et pourtant, ce n’est pas un polar : plutôt un campus novel rempli de chercheurs loufoques, d’universitaires fumistes et d’expérimentations farfelues dans le domaine du langage. L’intrigue se déroule à l’institut Wabash, dans l’Indiana, lieu qui présente la particularité d’être à la fois un centre de recherches de haut vol et… une garderie ! Immergés parmi les bambins, six linguistes travaillent sur le babillage des bébés, explorant les mécanismes d’acquisition du langage. Cette ambiance un peu spéciale provoque toujours l’étonnement des visiteurs, à l’image du journaliste Philpot qui débarque pour un reportage et que Jeremy Cook a pour mission de balader dans les couloirs. Hélas, Philpot arrive au mauvais moment : un crime a lieu à l’étage des linguistes. Et quelques jours plus tard, c’est lui-même qu’on trouve au fond d’une rivière, le corps lesté par une machine

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à écrire volée à l’institut… Carkeet mélange avec brio comédie en milieu universitaire (rivalités entre collègues, recherches qui n’avancent pas, malentendus sexuels, etc.) et roman policier (indices, fausses pistes, grande scène finale), se plaçant à l’intersection, disons, de David Lodge et de Donald Westlake. L’humour est très fin, les dialogues percutants et les personnages croustillants. Mais surtout, l’originalité du Linguiste tient à la spécialité de ses héros, d’où l’insistance sur les éléments non verbaux, la structure des phrases et tout ce que cache le langage en général. Jusqu’à la scène, qu’on vous laisse découvrir, durant laquelle le coupable est confondu. Autant de partis pris guère surprenants de la part d’un auteur qui a lui-même enseigné la linguistique pendant trente ans à Saint-Louis et qui s’est tellement pris d’affection pour Jeremy Cook qu’il l’a fait réapparaître dans deux autres ouvrages, The Full Catastrophe (1990) et The Error of Our Ways (1997). L’éditeur nous promet la traduction du second volet de cette trilogie pour 2014. Tous ceux qui liront ce savoureux Linguiste seront au rendez-vous.

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sélection par c.g. et b.q.

une adolescence américaine

paradis (avant liquidation)

(Philippe Rey)

(Au Diable Vauvert)

Quarante ans après sa publication, le premier essai de l’auteure américaine est enfin traduit en français. Regard introspectif plutôt que manifeste culturel, ces mémoires d’une « vieille » ado de 19 ans, déjà lasse, rédigés pendant son idylle orageuse avec l’écrivain ermite J. D. Salinger, annoncent déjà la désillusion du flower power. Cette sortie tardive s’accompagne également d’une nouvelle édition de son roman de 1981, Baby Love.

De loin, c’est un archipel paradisiaque à l’autre bout du monde. De près, c’est un lagon infect et très pauvre, première victime potentielle du réchauffement climatique : avec la montée des eaux, les îles Kiribati, en Océanie, risquent de disparaître… L’écrivain Julien BlancGras marche dans les pas de Stevenson (Dans les mers du Sud) et explore cet avant-poste de la catastrophe écologique dans un récit pittoresque, drôle et mélancolique.

à la demande générale

à moi seul bien des personnages

(Le Dilettante)

(Seuil)

Nouveaux carnets d’André Blanchard, toujours sur le même mode goguenard et malicieux : de 2009 à 2011, depuis sa thébaïde de HauteSaône, il mêle notes de lecture, commentaires sur l’actualité, tableaux de la vie féline (cet émule de Léautaud est fou de chats) et piques contre la critique superficielle, les pédagogues ronflants et les humoristes moralisateurs. Il agace parfois, mais qui aujourd’hui parle aussi bien de Barrès, Montherlant, Proust ou Calaferte ?

Vermont, années 1950. Le jeune Bill se pose des questions sur son identité sexuelle, attiré à la fois par les femmes mûres et par ses camarades masculins. Il s’initiera aux choses de l’amour dans les draps de miss Frost, la bibliothécaire transsexuelle du lycée. John Irving ne s’encombre guère de vraisemblance dans ce gros roman sur le sexe, l’amour et la comédie, qui vaut le coup d’œil malgré sa crudité un peu forcée et ses dialogues souvent interminables.

De Joyce Maynard

D’André Blanchard

De Julien Blanc-Gras

De John Irving


cultures LIVRES / BD CAMERA OBSCURA – VERS LA LIGNE CLAIRE ET RETOUR de Ted Benoit (Champaka) Disponible

BANDE DESSINÉE

Ligne discontinue

sélection par s.b.

par stéphane beaujean

heartbreak valley

de Simon Roussin (Éditions 2024)

©ted benoit

Simon Roussin se montre décidément intelligent et plus encore décidé à lutter contre lui-même. Ses intrigues, un pied dans le second degré, l’autre dans l’onirisme de l’enfance, servent de prétexte à des jeux esthétiques d’une beauté convaincante. Ici, l’enquête d’un détective, chaussé de lunettes de soleil et qui ne supporte pas la lumière, permet à l’auteur, d’ordinaire si versé dans la couleur, d’exprimer son trait dans un joli noir et blanc.

La carrière du dessinateur et scénariste français Ted Benoit ne s’écrit pas en ligne droite. Ses contours courbés se dessinent dans un livre, Camera obscura, anthologie surprenante consacrée au créateur de Ray Banana. Ted Benoit est le premier nom qui vient lorsque l’on cherche les héritiers encore vivants de la « ligne claire », cette esthétique incarnée par Hergé (Tintin) et Edgar P. Jacobs (Blake et Mortimer). Elle repose sur deux principes : le contour systématique de chaque figuré de la case à l’aide d’un trait de même épaisseur et la coloration des éléments par aplats. Ted Benoit est certes l’un des maîtres du genre, mais l’on découvre dans Camera obscura qu’il ne s’est pas inscrit immédiatement dans ce courant. Les œuvres de jeunesse (avant 1979) fleuraient plutôt l’ère du temps et les modes chères à l’underground américain. C’est plus tard qu’il se détourne de ses premières amours et entame la recherche d’une ligne claire transgressive, ou disons… postmoderne. L’élégance première du trait se trouve alors employée à cerner des formes moins nobles que de coutume. Un jeu auquel Benoit s’adonne avec une pointe d’humour pince-sans-rire, autant dans ses illustrations que dans son chef d’œuvre, le détective Ray Banana et son Amérique de plastique. Benoit a terminé sa recherche en rentrant dans le rang, puisqu’il a repris Blake et Mortimer avec toute la charge patrimoniale et le respect du moule esthétique originel que cela suppose. L’ouvrage Camera obscura recompose ce parcours sinueux en compilant nombre de récits épuisés ou inédits. La promenade est perpétuellement balisée par la voix de l’auteur qui se révèle être aussi fin conteur d’anecdotes qu’analyste de son propre travail. De telles monographies, si joliment fabriquées, si cohérentes dans leur conception et leur réalisation, sont extrêmement rares.

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fritz the cat

mai 2013

la coiffe de naissance

d’Alan Moore et Eddie Campbell (Ça et là) Alan Moore, le plus illustre des scénaristes anglais, a composé pour ses 40 ans un spectacle poétique et baroque autours de son enfance. Un jour, son vieil acolyte Eddie Campbell entend l’enregistrement et décide de l’adapter en bande dessinée. Le résultat : un chefd’œuvre, tant littéraire que graphique. La prose mystique de Moore offre à Campbell l’occasion de libérer son trait comme il ne l’avait jamais fait auparavant.

séquences

de Robert Crumb

de Robert Varlez

(Cornelius)

(The Hoochie Coochie)

Le plus célèbre travail de Crumb ressort enfin, après des années d’absence, dans une édition complètement restaurée. Pilier de la contre-culture américaine, Fritz, le chat paillard, venait renverser les canons de la BD animalière en pervertissant les codes de la littérature jeunesse avec des thèmes adultes. Si la transgression n’est plus aussi palpable aujourd’hui, reste le plaisir du dessin et un humour intact. Crumb à son sommet.

Vestiges des seventies naissantes, Séquences témoigne d’une époque durant laquelle certains courants de la BD fricotaient avec l’art contemporain. Un bien curieux objet, habité par des enchaînements d’images à la poésie surréaliste et plus encore par des mutations fantasmatiques. L’ensemble rappelle souvent le fonctionnement de la lanterne magique. Encore un travail de restauration qui confirme le talent de la jeune garde de The Hoochie Coochie.



cultures SÉRIES TOP OF THE LAKE de Jane Campion et Gerard Lee Prochainement sur Arte

Au top POLAR

Avec Top of The Lake, la réalisatrice Jane Campion signe un polar âpre et envoûtant aux confins de la Nouvelle-Zélande. Cette minisérie à la distribution classieuse a eu les honneurs des festivals de Sundance et de Berlin. par guillaume regourd

le caméo david tennant

dr

©bbc

dans Doctor Who

Le cheveu gris et la mise sévère, dieu que l’actrice Holly Hunter ressemble à Jane Campion. Il y a quelque chose d’émouvant à voir leurs silhouettes se confondre à l’écran dans Top of The Lake, leur premier projet commun depuis La Leçon de piano. Et quelque chose de symbolique à ce que ces retrouvailles aient lieu à la télévision où se fabrique aussi, désormais, la meilleure fiction. Campion tire une nouvelle fois admirablement parti de la vertigineuse cinégénie de sa Nouvelle-Zélande natale pour mieux la figurer en paradis perdu, souillé par la seule faute des hommes. Les femmes en sont les premières victimes, qu’il s’agisse d’une fillette de 12 ans enceinte d’on ne sait qui

et disparue en pleine campagne, de la flic chargée de la retrouver en butte à l’hostilité machiste des habitants, ou bien encore d’une communauté new age d’abîmées de la vie réfugiées dans une prairie reculée. Dans cet anti-thriller en sept épisodes, tout n’est que non-dits, ellipses, flottements… Comme autant d’interstices propices aux nuances semées par la cinéaste à l’intention des comédiens. Elisabeth Moss (Mad Men) est prodigieuse en inspectrice habitée. Un rôle qui devait revenir à Anna Paquin. Dommage pour elle, c’est son ancienne partenaire Holly Hunter, en gourou laconique, qui trouve ici une partition à sa mesure. De celles qu’Hollywood lui a peu offertes en vingt ans.

La liste, pléthorique, des invités figurant au générique de l’épisode qui marquera à l’automne les 50 ans de la série culte Doctor Who compte déjà quelques grands noms. Mais le plus attendu d’entre eux est David Tennant, avant-dernier interprète du docteur à ce jour, qui aura pour cavalière sa partenaire de l’époque, Billie Piper. D’autres figures de la franchise devraient suivre. En attendant, on sait déjà que cet épisode événement sera écrit par Steven Moffat, l’actuel chef d’orchestre de la série. G.R.

hatufim

Avant Homeland, il y eut Hatufim. Ce programme israélien possédait déjà tout ce qui allait faire la force de son remake américain avec Claire Danes : impossible retour à la normale des prisonniers de guerre, paranoïa des services de renseignement… Prises dans un contexte proche-oriental, les thématiques développées par Gideon Raff résonnent plus fortement encore. Un choc. Du 9 mai au 6 juin sur Arte

suburgatory

Pour George et sa fille Tessa, quitter Manhattan pour la banlieue chic de New York devait marquer un nouveau départ. Horreur ! Peuplés de femmes au foyer siliconées et de leur progéniture décérébrée, les suburbs ressemblent surtout à un purgatoire intégralement repeint en rose bonbon. Une comédie tordante qui taille un réjouissant minishort à une certaine idée du rêve américain. À partir du 3 mai sur Canal Plus Family

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©warner bros

©arte france

©2011 piece of pie productions, warner bros. television

sélection

true blood, saison 5

Il paraît loin le temps où True Blood apportait quelque chose de vraiment neuf et sexy au mythe du vampirisme. Engluée dans des intrigues secondaires plus paresseuses les unes que les autres, la série semble condamnée à verser toujours plus dans le grotesque. Sa saison 5, marquée par le retour du roi Russell, maître du Grand-Guignol, enfonce le clou. Pour les mordus uniquement. En DVD le 22 mai (Warner)



cultures ARTS « LA VALISE MEXICAINE – CAPA, TARO, CHIM » jusqu’au 30 juin au musée d’art et d’histoire du Judaïsme

Malle au trésor PHOTOGRAPHIE

Après plusieurs escales, dont l’une très remarquée aux Rencontres d’Arles en 2011, l’exposition « La Valise mexicaine » est enfin arrivée à Paris, au musée d’art et d’histoire du Judaïsme.

©international center of photography / magnum photos

par léa chauvel-lévy

Gerda Taro, Spectateurs de la procession funéraire du Général Lukacs, Valence, 16 juin 1937

Madrid, New York, Arles et aujourd’hui Paris, dans une scénographie allégée. Plus pure, plus fluide, beaucoup moins touffue et sombre, l’exposition, débarrassée de ses scories, est sous cette nouvelle forme une parfaite occasion de retracer la destinée de la plus célèbre valise, sinon de l’histoire de la photographie, au moins du photojournalisme. Perdue dans la précipitation d’un mois de juin 1940 à Bordeaux, alors que les nazis s’apprêtaient à envahir la ville, cette émouvante boîte noire en cuir racorni et craquelé, compartimentée pour conserver des bobines et rouleaux, fut retrouvée en 2007 à Mexico. En jaillirent 4 500 négatifs datant de la guerre d’Espagne, tous inédits. Remettre la main dessus, c’était renouer avec des milliers d’images signées de trois géants du photojournalisme, Robert Capa, sa compagne Gerda Taro, et Chim, qui cofondera l’agence Magnum en 1947. Trois juifs qui avaient fui la menace nazie pour rejoindre Paris et qui choisirent prudemment et rapidement de délaisser leur patronyme typé. Friedmann, le Hongrois, se réfugia derrière la nouvelle identité de « Robert Capa »,

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Pohorylle, l’Allemande, opta pour « Gerda Taro » et Seymour, le Polonais, se fera rebaptiser « Chim ». De Paris, ces exilés de la Mitteleuropa décidèrent de partir aux côtés de ceux qui combattaient par les armes avec les républicains et couvrirent entre 1936 et 1939 la guerre civile espagnole pour des revues communistes telles que Regards ou Ce Soir, le journal d’Aragon. Gerda Taro y laissera sa vie, sur le front, à 26 ans, écrasée par un tank. Les deux autres s’y construiront une réputation de grand reporter de guerre. Leurs reportages, en noir et blanc, évoquent aussi bien les tranchées que la banalité du quotidien en marge des combats – pêcheurs basques, vendeuse de sardines, messes en plein air adoucissent ainsi la crudité de certaines scènes prises sur le front de Ségovie ou de la bataille du Sègre. Dans un parcours limpide, en dépit d’une documentation fourmillante, le musée d’art et d’histoire du Judaïsme exhume ainsi plusieurs climats et saisit, dans le frémissement moderne du reportage, la guerre civile espagnole et la montée du nazisme. Émotion contagieuse.

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agenda par l.c.-l.

offre ainsi un discours croisé entre la création d’artistes contemporains comme Singh, Lavier ou encore Boltanski, et celle de primitifs africains et océaniens. De ces jeux de miroirs naissent de brillants reflets. À la Rosenblum Collection & Friends

Jeppe Hein, Rotating Labyrinth, 2007

« dynamo, un siècle de lumière et de mouvement dans l’art »

jusqu’au 30 • 06 marie laurencin

Le pinceau de celle que Matisse surnommait « la Fauvette » est mis à l’honneur à travers une dense sélection d’une centaine de ses œuvres. Le musée Marmottan Monet sort de l’ombre cette grande figure du XXE siècle et dresse en creux un portrait délicat d’une artiste à mi-chemin entre fauvisme et cubisme. Au musée Marmottan Monet

À travers les œuvres de Calder, Le Parc, Vasarely ou Flavin, le parcours illustre l’art cinétique de 1913 à 2013, ce courant esthétique fondé sur le mouvement. L’exposition, magistrale, occupe pour la première fois les 4 000 m2 du Grand Palais. Mais attention, qui dit illusions dit aussi joyeuses nausées. Au Grand Palais

jusqu’au 24 • 06 « de l’allemagne, 1800-1939. de friedrich à beckmann »

Plongée érudite et vivante dans le contexte historique et intellectuel de création de la peinture allemande de 1800 à 1939, depuis les tableaux romantiques de Friedrich (Le voyageur contemplant une mer de nuages, c’est lui), jusqu’à l’expressionnisme torturé d’un Beckmann, avec ses personnages émaciés. Au musée du Louvre

jusqu’au 18 • 07 « crossing mirrors »

Cette exposition jette des ponts entre les arts et les époques. La Rosenblum Collection

jusqu’au 29 • 09

©ron mueck

©adagp, paris 2013

jusqu’au 22 • 07

Ron Mueck dans son atelier

ron mueck

En 2005, son passage dans ces mêmes murs avait fait sensation. Le sculpteur contemporain australien Ron Mueck revient avec neuf nouvelles créations, plus vraies que nature, au gigantisme toujours aussi édifiant. En témoigne, le couple du troisième âge, d’une hauteur de quatre mètres, qui ouvre l’exposition. À la fondation Cartier pour l’art contemporain


cultures SPECTACLES LE CIRQUE INVISIBLE de Victoria Chaplin et Jean-Baptiste Thierrée Du 16 mai au 15 juin au théâtre du Rond-Point

agenda par è.b.

©matteo maffesanti

©mario sabatini

14 mai > 13 juin

CABARET SURRÉALISTE

Sens famille

rencontres chorégraphiques internationales de seinesaint-denis

par ève beauvallet

Avis aux fans d’Hugo Cabret et des effets spéciaux d’antan, Le Cirque invisible, best-seller de Victoria Chaplin et Jean-Baptiste Thierrée, revient au théâtre du Rond-Point. Des enfants Chaplin, on connait bien Geraldine, un peu moins Victoria. La fille cadette de Charlie a pris, dès les années 1970, les chemins de traverse du théâtre forain, embarquant dans des spectacles abracadabrants son compagnon, Jean-Baptiste Thierrée, et ses deux enfants, James et Aurélia. Costumes, lumières, masques de monstres, numé ros de foire, machineries magiques… Tout se fait en famille, guidé par une utopie néosaltimbanque qui pourrait faire sourire si elle n’avait conduit à des merveilles unanimement saluées. Les Thierrée-Chaplin sont aujourd’hui considérés comme les bonnes fées du cabaret surréaliste, les ambassadeurs de toutes les formes spectaculaires rétro qui séduisent l’entertainment – music-hall, illusionnisme, etc. En tournée mondiale depuis sa création, en 2002, leur Cirque invisible est devenu le clou du spectacle artisanal, un véritable carton. Des séquences d’animation lowtech façon Loïe Füller (danseuse des Folies Bergère qui fascinait la scène artistique des années 1920), une revue de créatures merveilleuses, un cabinet de curiosités constitué de cafetières animées et de services à thé vivants… Alors certes, on sent parfois chez eux une poésie « baba » un peu désuète dont leur fils James s’est passé dans ses propres pièces, plus profondes et inquiétantes que les symphonies parentales. Mais qui aujourd’hui est fan de Gondry, s’enchante pour Méliès et vénère Lewis Caroll ne pourra rester de glace devant le charme désarmant de ce cirque relooké en grande histoire d’amour.

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mai 2013

C’est là-bas que l’on déniche les créations les plus pointues et les plus insolites du moment. Dans le cru 2013, FOLK-S…, mené par Alessandro Sciarroni, promet une déconstruction méthodique et endiablée, à grand renfort de bermudas, d’une danse folklorique bavaroise, le schuhplattler. www.rencontres choregraphiques.com

13 mai > 1er juin mon amour

Mon amour, ça parle de « ce merdier infernal que représente le désir », ça ressemble à « une version hallucinée du Dom Juan de Molière dont il ne subsiste qu’une logorrhée infernale et saccagée ». Aux manettes, le jeune metteur en scène Thomas Ferrand. Alors on y va. Au théâtre de la Cité internationale

2 mai > 3 juin sidi larbi cherkaoui / damien jalet / marina abramovic Que vient donc faire la grande prêtresse de l’art corporel, Marina

Abramović, elle qui congelait son corps sur des blocs de glace ou s’asphyxiait sous un rideau de flammes, dans l’univers mignon de Sidi Larbi Cherkaoui ? Réponse sur la scène de l’opéra de Paris, dans un remix du Boléro de Ravel. Au palais Garnier

7 > 17 mai humour en capitales

C’est le moment de faire un point sur les nouveaux visages du stand-up avec la 7e édition du festival Humour en capitales. À découvrir, la pétulante Nora Hamzawi. À redécouvrir, La Comédie musiculte des Airnadette, dont l’histoire est écrite à partir de répliques de films. www.humourencapitales.com

16 mai > 1er juin

gustavia

Entre l’art des grands burlesques, Keaton, Chaplin ou Tati, les agressions plastiques de Bruce Nauman et le manifeste féminin, le clownesque Gustavia réunit deux grandes artistes, Mathilde Monnier et La Ribot, pour se jouer de toutes les formes codifiées de représentations théâtrales ou sociales. Au théâtre de la Cité internationale



cultures JEUX VIDÉOS LUIGI’S MANSION 2 (Nintendo) Genre : aventure / action Développeur : Next Level Games Plateforme : 3DS

Beau frère AVENTURE

Il a grandi dans l’ombre d’un frère moustachu qui s’appelle Mario, jusqu’à se découvrir chasseur de fantôme en 2002. Depuis, Luigi trace sa route, techniquement prodigieuse, et bourrée d’inventivité. par yann françois

l’ovni du mois ridiculous fishing – a tale of redemption

© next level games

(Vlambeer/iPhone, iPod)

En tant que pionnier de la GameCube, Luigi’s Mansion se faisait aussi le VRP des capacités technologiques de sa console mère. Dix ans plus tard, le frère trouillard de Mario déboule dans une nouvelle chasse aux fantômes. À lui de dévoiler le potentiel immense, mais timidement exploité jusque-là, de la 3DS. Avant d’être un excellent jeu d’aventure, Luigi’s Mansion 2 est donc un manifeste esthétique dédié à l’art du relief et des perspectives illusoires. Grâce à lui, même la lumière semble avoir une matière, comme le prouvent ses effets de torche, littéralement éblouissants. Cousin d’un Resident Evil dans l’âme, le jeu fonctionne en

explorations cloisonnées et fractionnées en niveaux réduits. Malgré les incessants allers-retours entre les salles, ce jeu a le don d’alimenter la curiosité purement infantile et à interagir avec le décor pour y dénicher d’invisibles secrets. À l’heure où le jeu vidéo cherche à démultiplier ses espaces à l’infini, Luigi’s Mansion 2 revient à la modestie trompeuse d’un coffre à jouets à la densité insoupçonnée, servie par une jouabilité aussi intuitive que maligne où tout n’est qu’ectoplasmes et bonus à révéler au moyen d’un spectre lumineux. Un g rand jeu miniat ure qui prouve, une fois de plus, que chez Nintendo, l’inventivité fait loi.

La formule est connue : plus un jeu est débile, plus il a de chance de devenir indispensable. Nouveau cas d’école ici : un redneck dans sa barque, une ligne à plonger au plus profond de l’eau. À lui de la rembobiner avec un maximum de poissons accrochés à son hameçon, avant de les éjecter en l’air et de les achever d’un coup de fusil bien senti. Avec son pitch surréaliste et sa rejouabilité immédiate, Ridiculous Fishing remplit le rôle parfait du jeu mobile : s’offrir comme la perte de temps la plus fructueuse du moment. y.f.

en téléchargement battleblock theater

bit.trip presents : runner 2

terraria

(The Behemoth/XBLA)

(Aksys Game/XBLA, PS3, Wii U, Vita, PC, Mac)

(Re-Logic/XBLA)

Il pourrait se contenter du prix de la voix off la plus drôle de l’année, mais Battleblock Theater est bien plus. Avec son charme de cartoon déjanté, ce jeu de plateforme s’impose comme le digne successeur de Super Meat Boy. Chez lui, nos réflexes sont aussi vitaux que notre capacité à raisonner dans l’espace. Une expérience jouissive, à préférer en coopératif, pour la transformer en festival de barres de rire et de pouces ankylosés. y.f.

À mi-chemin entre running game et jeu musical, Runner 2 se présente bêtement comme l’histoire d’un mec qui court. Tout le temps. Au joueur de lui faire esquiver, en rythme et en musique, les obstacles qui se dressent sur sa route – à chaque évitement correspond une note ou un changement de mélodie. Aussi limpide qu’exigeant, Runner 2 transforme chaque niveau en partition electro aux faux airs de parcours d’élite. y.f.

Bien connu des joueurs sur PC, Terraria débarque enfin sur consoles. On aurait tort de réduire ce grand jeu d’aventure à un clone de Minecraft. S’il reprend le concept d’univers entièrement constitués de matériaux exploitables, Terraria est un RPG à part entière, avec ses quêtes à accomplir et ses donjons à écumer. À la différence, majeure, que le héros se fait autant forgeron de sa gloire que de son propre équipement. y.f.

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sélection par y.f.

fire emblem: awakening

shootmania storm

(Nintendo/3DS)

(Ubisoft/PC)

Phénomène majeur au Japon, la saga Fire Emblem est à découvrir d’urgence avec cet épisode portable. Ascétique dans son scénario, mais totalement enchanteur par sa mise en scène (c’est décidément le mois de la 3DS), le jeu s’avère être un RPG tactique d’une telle richesse qu’il enterre toute concurrence. Adressé à un public patient et stratège, Awakening est la preuve ultime que le jeu d’échec peut encore revêtir les formes les plus sophistiquées.

Dans le monde saturé des FPS en ligne, le français ShootMania se pose comme une alternative salutaire. Soit le défi de concilier accessibilité totale (un bouton pour tirer, un pour sauter, et guère plus), création libre (éditeur de niveau d’une simplicité enfantine) et compétition sans perdre de vue le sens du spectacle. Autant dire que le résultat se vit comme d’intenses jeux Olympiques du FPS au cours desquels amateurs et élites ont tous droit de cité.

starcraft ii: heart of the swarm

injustice : les dieux sont parmi nous

(Blizzard Entertainment/PC, Mac)

(Warner/X360, PS3, Wii U)

L’étiquette « objets pour fans » ne doit pas forcément rebuter les plus néophytes. Preuve à l’appui avec cette excellente extension de StarCraft II qui sait perpétuer son expérience initiale, tout en perfectionnant discrètement ses mécaniques de jeu. Dévolu à la cause Zerg, ce Heart of the Swarm bénéficie non seulement d’une excellente campagne solo, mais prouve surtout que le roi de la stratégie en multi n’a pas bougé de son trône.

À l’heure où les crossings improbables se multiplient sur la plupart des jeux de combat, Injustice et son catalogue DC Comics se hisse avec classe au-dessus de la mêlée. Après avoir redonné souffle à Mortal Kombat, les studios NetherRealm réussissent un nouveau coup d’éclat. En plus d’être un exutoire parfaitement équilibré entre spectaculaire et technicité, Injustice rend un hommage vibrant à ses icônes grâce à un mode histoire des plus singuliers.


cultures DESIGN PIERRE GUARICHE Chez Maisons du monde

© chicago historical society / hedrich blessing (hb-30955-z)

exposition

Bibliothèque universitaire, Abbaye de Saint John et complexe universitaire, Minnesota, 1964-1966

« marcel breuer (1902-1981). design & architecture »

Serial vintage RÉÉDITION

C’est la bonne idée de la saison : Maisons du monde réédite Pierre Guariche. Ou comment avoir un meuble d’anthologie chez soi pour un prix raisonnable, avec en prime une petite histoire à raconter dans chaque pièce.

Très grand architecte, Marcel Breuer a aussi dessiné un sacré catalogue de mobilier, dont la célèbre Wassily Chair en tubulaire qui trône dans les plus élégantes salles d’attente. Pour une fois, son design est exposé et mis en relation avec ses plus importants projets architecturaux, tels que l’Unesco à Paris ou le Whitney Museum à New York – autant de monuments-phares d’un style moderniste tout en béton. o.d. Jusqu’au 17 juillet à la cité de l’Architecture & du Patrimoine

livre

par oscar duboÿ

Pierre Guariche, cofondateur avec Michel Mortier et Joseph-André Motte de l’ARP (l’atelier de Recherches plastiques), est l’une des grandes individualités qui ont fait la renommée du design français dans les années 19501960. L’après-guerre laissa un gros chantier à reconstruire et des milliers de maisons à meubler, que Guariche sut décorer et aménager en proposant un mobilier moderne et accessible à tous les portefeuilles. Une ligne de conduite aujourd’hui adoptée par Maisons du monde, qui réédite toute une collection de ces pièces iconiques, produites autrefois par Steiner, Airborne ou Meurop. Il y a, par exemple, la première chaise française en contreplaqué, produite en série en 1954 sous le nom d’Amsterdam et communément appelée « Tonneau ».

Ou la Coquillage, en plastique moulé, déclinée en huit coloris qui sentent bon la pop des années 1960, dont le cahier des charges d’époque n’a pas pris une ride : matériau léger et durable, dessin unique, production de masse. Le fauteuil G1 de 1953 sera, quant à lui, recommercialisé par Prisunic en 1972, au moment où la chaîne était à l’avantgarde du design à petits prix, signé par de grands noms et vendu par correspondance. Au catalogue, on retrouve aussi les fauteuils Mars et Jupiter, les accoudoirs colorés en forme de quartier du Mandarine ou le bureau Président, en bois, plus classique, au nom évocateur de la nouvelle prospérité française des Trente Glorieuses. Ne reste qu’à choisir entre les treize modèles proposés, entre 129 et 1199 euros.

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home

Aux prises avec le cassetête de l’aménagement d’un appartement, c’est un vrai petit luxe que d’être secondé par India Mahdavi, talentueuse décoratrice basée à Paris mais internationalement reconnue. Du café Germain de Paris à l’hôtel Townhouse de Miami, elle mélange couleurs et motifs avec savoirfaire et fantaisie : mille petites idées et conseils malins, distillés dans son livre avec une bonne dose d’humour. o.d. D’India Mahdavi et Soline Delos (Flammarion)



cultures VOYAGES SUR LES LIEUX DU TOURNAGE DE… LE SEIGNEUR DES ANNEAUX de Peter Jackson

sur les traces des Hobbits ©boris leval-duché

jour 1

NOUVELLE-ZÉLANDE

Milford Sound

La route du Milford Sound commence à Te Anau. Le meilleur moyen de se déplacer et de se loger dans l’île du Sud (de la Nouvelle-Zélande), ce sont les camping-cars peinturlurés de pied en cap de l’agence de location Escape Rentals. Parfaits pour deux personnes, on peut y dormir à trois mais il faut être très bons potes. www.escaperentals.co.nz

par étienne rouillon (à milford sound lodge)

Hier, il a fait une fête à tout péter pour saluer le saut en parachute de son frère, qui s’est jeté des hauteurs du fjord le plus célèbre du cinéma : le Milford Sound. La tête bien chiffonnée par la gueule de bois, le moniteur de kayak pagaye en dressant la liste des films tournés autour de cette eau salée et noire : les deux premiers Seigneur des anneaux, Willow. « Tu vois la cascade ? C’est de là que se jette Logan dans X-Men Origins: Wolverine. Donne un coup de rame, y a des phoques et un pingouin là-bas. » Et parfois c’est une baleine qui souffle au loin. Pas aujourd’hui. Dans le matin froid du fjord, les omniprésents moustiques battent enfin en retraite, et les quatre kayaks peuvent s’enfoncer tranquille dans la fine brume, à l’ombre des 1692 mètres d’altitude du Mitre Peak. Partout en Nouvelle-Zélande, on vous rappelle que Peter Jackson a posé sa caméra ici ou là, pour filmer l’épopée des Hobbits de J.R.R. Tolkien. Mais c’est dans le Milford Sound que l’on se sent plonger au plus près de l’aventure de la communauté de l’anneau. On pousse les embarcations entre les flancs verts d’une forêt primaire, tel le héros Frodon naviguant entre les piliers majestueux de l’Argonath. L’endroit est exemplaire des atouts que les deux îles de la Nouvelle-Zélande offrent à un réalisateur en termes de décors : une géographie aussi diverse que concise. D’un même coup d’œil, on peut aviser un glacier, une cascade, une plage, des landes, une dune de sable, des falaises. Au bout de cinq heures, les quinze kilomètres sages du fjord s’ouvrent sur la houleuse mer de Tasmanie et ses quarantièmes rugissants. Le Milford Sound n’aura pas fait mentir l’écrivain Rudyard Kipling, qui en faisait la huitième merveille du monde.

jour 2

On se réveille après avoir passé la nuit dans l’un des sites du D.O.C. (Department of Conservation), le long de la Milford Road. Ils comptent parmi les plus beaux campings du monde : sauvages, quasi gratuits et idéalement placés, c’est là que sont souvent prises les photos des guides touristiques. www.doc.govt.nz

jour 3 Après avoir traversé un impressionnant tunnel, on approche du Milford Sound par une route étroite. On pourra y croiser des kéas, des

Excursion « Morning Glory », www.roscosmilfordkayaks.com

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perroquets carnivores taquins qui aiment s’attaquer au caoutchouc des voitures. On gare son van au Milford Lodge. Réservation obligatoire la veille. www.milfordlodge.com

jour 4

Réveil au petit matin pour la traversée du fjord en kayak. Départ depuis le Milford Lodge. L’antimoustique et les barres de céréales sont indispensables. Les jours de chance, les dauphins sont de la partie. On recommande l’excursion Morning Glory qui dure six heures et qui pousse jusqu’à la mer. www.roscosmilfordkayaks.com

jour 5

Direction Queenstown, en deux jours, avec un arrêt à Te Anau. Queenstown est la capitale mondiale du saut à l’élastique, et plus largement du sport extrême. Jane Campion y a tourné sa série Top of the Lake l’année dernière. Le meilleur endroit pour faire son baptême d’à peu près tout, du parachute à la plongée. www.queenstownnz.co.nz



cultures

LES BONS PLANS DE TIME OUT PARIS À :

Londres compilés par chris bourn rédacteur en chef de time out international

Venez à Londres au mois de mai pour assister au réveil de la ville, qui émerge telle une ourse après une hibernation amère. Pétillants d’une énergie contenue tout l’hiver, bouillonnants comme des lions en cage, les Londoniens déchirent leurs cardigans et se ruent dehors dès qu’ils reniflent les premiers rayons de soleil. Les pubs dégueulent sur le pavé des hordes de viande saoule, les parcs royaux sont engorgés d’un millier de microfestivals – il y en a tant que même nous à Time Out on peine à suivre – et l’état général passe d’un coup de grognon à béat d’hédonisme, avec un soupçon de loufoque. Voici notre sélection du must de l’agenda culturel londonien pendant ce mois d’abandon sous les auspices de la bonne vieille excentricité anglaise.

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théâtre the audience de peter morgan

bar booking office

théâtre the book of mormon de trey parker et matt stone

restaurant st. john

Voici l’occasion de voir Helen Mirren sur scène (qui jouait Elizabeth II dans The Queen de Stephen Frears), dans une pièce qui révèle ce que les Anglais pensent vraiment de leur reine… Irrévérencieux mais tendre, un portrait loin de la vérité, mais reflet de la reine rêvée par ses sujets. Gielgud Theatre, Shaftesbury Ave, London W1D 6AR

Les créateurs de South Park déboulent avec fracas à Londres avec une comédie musicale venue des ÉtatsUnis. Bien sûr on y entend des « fuck », des « cunt » et il y a des blagues à propos de viols de bébés, mais l’histoire et la bande-son rendent surtout hommage à l’esprit de Broadway. Prince of Wales Theatre, Coventry St, London W1D 6AS

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L’un des bars les plus spectaculaires de Londres, à seulement deux pas de la gare de Saint-Pancras et de son Eurostar. Les superlatifs ne manquent pas pour décrire l’ambiance du Booking Office, aussi travaillée que les cocktails de la carte : épiques, planants, théâtraux et exquis. St. Pancras Renaissance London Hotel, Kings Cross and St. Pancras, London NW1 2AR

Dans une ville où la gastronomie emprunte au monde entier, ce restaurant est quasiment le seul à défendre une cuisine purement britannique – non, attendez, ne vous en allez pas ! Des plats parfaits, sans préciosité déplacée, parmi lesquels le prometteur Queen of Puddings. 26 St. John St, London EC1M 4AY


toutes les infos à retrouver sur www.timeout.com/london

pub hops & glory

Le « pub parfait », si l’on se réfère aux critères établis par l’écrivain George Orwell dans son essai The Moon Under Water. L’endroit est plein de ces détails qui font d’un troquet un véritable pub : un grand miroir derrière le bar, des bougies, et les indispensables canapés en cuir. 382 Essex Rd, Islington, London N1 3PF

exposition « lichtenstein: a retrospective »

Personne n’a véritablement inventé le pop art, tous les ingrédients étaient là : les publicités aux couleurs vives, le design des produits de consommation, les pulp… Mais Roy Lichtenstein a établi un lien unique avec cette non-invention, devenue une démarche artistique singulière. Tate Modern, Bankside, London SE1 9TG

concert the melvins

Les héros du grunge originel de Seattle ont eu un jour pour roadie un certain Kurt Cobain, qui vit dans leur metal synthétique une des sources de Nirvana. Leur monstrueux vacarme (riffs féroces, rythmes béton) donnera toute sa mesure dans l’ancien The Fridge, rebaptisé Electric Brixton. Electric Brixton, 1 Town Hall Parade, London SW2 1RJ

concert alt-j

Ce quatuor de Leeds, au nom en forme de raccourci informatique, a été propulsé héros d’un indie rock à la fois pointu et populaire, avec un son ficelé de réverbérations étouffées et d’échos à la Yeasayer ou Jeff Buckley. On retrouvera le meilleur de leur An Awesome Wave. O2 Academy Brixton, 211 Stockwell Rd, London SW9 9SL

concert lana del rey

C’est avec ses lèvrestraversins, sa rétrophilie appuyée, son style années 1950 et sa voix hypnotisante que la chanteuse donnera suite à son omniprésence londonienne (tous les arrêts de bus et stations de métro pour une pub de prêt-à-porter). Cette fois avec de la vraie musique. Hammersmith Apollo, 45 Queen Caroline St, London W6 9QH

exposition « david bowie is »

Impossible d’échapper à Bowie si l’on s’est trouvé à Londres depuis janvier dernier et la sortie de son album très attendu, The Next Day. Tout au long de 2013, la Bowiemania va aller crescendo avec notamment cette exposition du Victoria & Albert Museum consacrée au caméléon. V&A, Cromwell Rd, London SW7 2RL

concert london symphony orchestra

L’année dernière, le succès du concert de l’orchestre symphonique de Londres sur la place de Trafalgar Square (dix mille spectateurs) a donné des envies de bis. Cette fois, ce sont des œuvres de Berlioz qui sont à l’honneur, parmi lesquelles la Symphonie fantastique. Trafalgar Square, London WC2N 5DN

clubbing pop club time machine

exposition « ice age art »

musée national history museum

Sous-titrée « naissance d’une pensée moderne », cette exposition présente quelques-uns des plus vieux dessins, portraits ou sculptures de l’humanité. Créées à travers l’Europe il y a quarante mille ans, ces œuvres sont mises en regard de travaux de Henry Moore, Mondrian ou Matisse. British Museum, 44 Great Russell St, London WC1B 3DG

Le sublime édifice du musée d’Histoire naturelle ouvre ses portes jusqu’à une heure tardive pour des visites nocturnes tout au long du mois de mai. Des animations et des conférences vont nourrir ces soirées qui donnent un accès unique aux expositions permanentes et temporaires. Natural History Museum, Cromwell Rd, London SW7 5BD

festival rhs chelsea flower show

concert nigel kennedy

kids covent garden may fare

festival field day

clubbing simian mobile disco

L’une des soirées les plus fendardes et les plus excentriques de la ville. Démarrant dans les années 1890, la programmation musicale saute une décennie toutes les heures, jusqu’à atteindre les années 2010. Avec ses accents lynchiens et Belle Époque, l’endroit vaut le détour. House of Wolf, 181 Upper St, Islington, London N1 1RQ

Mai à Londres est synonyme de Royal Horticultural Society Flower Show, un événement offert à tous les horticulteurs en herbe, et à tous ceux qui ne sont pas allergiques au pollen. Cette année, la manifestation fête son centenaire sans faner en une explosion de couleurs et de fleurs. Royal Hospital Chelsea, Royal Hospital Rd, London SW3 4SR

Un festival né en 2007 qui en peu de temps est devenu l’un des plus prisés de Londres. Une journée de rock d’avant-garde, de musique engagée et d’electronica installée dans le magnifique et branché Victoria Park. Cette année, on savourera les têtes d’affiches Animal Collective et Bat for Lashes. Victoria Park, Victoria Park Rd, London E3 5SN

Le violoniste haut en couleurs, prodige de la musique classique, nous embarque pour un « Bach meets Fats Waller », rencontre au sommet entre les compositions du maître de la musique baroque de la première moitié du xviiie siècle et le maestro du piano stride américain. Barbican Centre, Silk St, London EC2Y 8DS

Parier sur le duo champion de l’electro lorsque l’on est en quête d’une soirée fracassante, c’est prendre peu de risques. Simian Mobile Disco se produit au XOYO, endroit qui, ces deux dernières années, s’est imposé comme le point de ralliement nocturne des hipsters londoniens. XOYO, 32-37 Cowper St, London EC2A 4AP

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Le théâtre de marionnettes en Angleterre n’a pas pour héros Guignol mais Punch et Judy. Ce festival est aussi l’occasion d’assister à des moments de folklore typiquement britannique : procession de fanfares, messes satyriques, concerts folk, spectacles de clowns et arbres de mai. St. Paul’s Church, Covent Garden, Bedford St, London WC2E 9ED

cabaret alternative eurovision

Time Out propose, pour la quatrième année consécutive, sa relecture irrévérencieuse et déjantée du concours de l’Eurovision, cette sorte de pan-european na-na-na-thon. Ici, c’est la crème du cabaret sous toutes ses formes et couleurs qui se réunit pour une compétition qui promet de grands moments. London Wonderground, Southbank Centre, Belvedere Rd, London SE1 8XX


cultures

LE FILM DU MOIS PAR TIME OUT PARIS

Post Tenebras Lux

Prix de la mise en scène controversé l’an dernier à Cannes, Post Tenebras Lux est un film poétique, sensuel et déroutant qui synthétise les ambitions formelles de l’œuvre du réalisateur mexicain Carlos Reygadas. par alexandre prouvèze – timeout.fr/cinema

Post Tenebras Lux avance masqué. Il semble suivre Natalia (Nathalia Acevedo) et Juan (Adolfo Jiménez Castro), un couple de Mexicains ayant quitté la ville avec leurs deux enfants pour une maison en forêt. Mais bien vite, le parcours se fait plus tortueux. Passé, présent, futur, fantasmes et métaphores s’interpénètrent sans chronologie, convoquant une gamine perdue au milieu d’animaux au crépuscule, un démon armé d’une trousse à outils, une virée en sauna échangiste, un type qui s’arrache la tête avec les mains, un match de rugby ou un dîner où l’on débat de Tolstoï. Caricatural, pénible, prétentieux, confus, gratuit, exaspérant, grotesque, escroc, attardé… Les critiques ont su rivaliser d’agacement pour juger les enjeux du dernier film de Carlos Reygadas, réalisateur de Batalla en el Cielo et Lumière silencieuse. Certes le projet est ambitieux, et le caractère volontiers foutraque de Post Tenebras Lux souligne une radicalisation forte de sa proposition cinématographique : étirement de la temporalité ; refus du primat du

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scénario au profit quasi exclusif de la photographie et du son (superbes l’un comme l’autre) ; imbrication de lambeaux de récits en suspens. Tout concourt à pousser un théorème formel dans ses ultimes retranchements (superbes) dans une démarche souvent cousine de celle du réalisateur de Stalker ou Le Miroir, le Russe Andreï Tarkovski. Surtout, à travers son maelström psycho-sensoriel, le Mexicain s’affirme ici comme l’un des grands cinéastes contemporains, capables de tordre nos capacités de perception pour interroger le pouvoir de perturbation du cinéma sur notre rapport au réel. Il s’agit donc de s’abandonner délibérément au flou du cadre, d’accepter de se perdre parmi ces séquences d’un réalisme hallucinatoire où seul l’inconscient tient la barre. De Carlos Reygadas Avec Adolfo Jiménez Castro, Nathalia Acevedo… Distribution : Le Pacte Durée : 1h53 Sortie le 8 mai

mai 2013


LE BAR DU MOIS PAR TIME OUT PARIS

top 5 du mois

Lou Pascalou

par time out paris

1. documentaires musicaux

Les mélomanes se réjouiront de retrouver le cycle « Musiquepointdoc » à la Gaîté Lyrique, avec sa programmation éclectique et pointue de documentaires. Après Metallica et Pulp, ce sera au punk hongrois de pointer sa crête en mai. Cycle « Musiquepointdoc » à la Gaîté lyrique, jusqu’au 19 juin

Au cœur du « village » Ménilmontant, ce café culturel est une institution. Depuis sa terrasse déployée au calme d’une placette, l’on profite des projections de courts métrages et de concerts.

3. concert

En sept ans, Villette Sonique est devenu un événement electro rock incontournable. Cette année, on retrouve The Melvins, The Flaming Lips, Neurosis ou Swans. Côté electro, l’excellent label sud-américain Cómeme sera mis à l’honneur. Ne pas manquer David Fenech ou Mykki Blanco. Villette Sonique, du 23 au 26 mai à la Grande Halle de la Villette

Lou Pascalou, 14 rue des Panoyaux, Paris XXe – timeout.fr/bar

le resto

Anciennement connue sous le nom de Kolam, la boutique d’Aurélien, Paul et Marie fait peau neuve et réinvente son concept. Voici maintenant 9km, soit la longueur de fil de coton nécessaire pour tisser un t-shirt en entier. Un espace multimarques où s’habiller de la tête aux pieds pour 100 euros. 9km, 2 rue des Plantes, Paris XIVe

5. expo

Au musée d’art et d’histoire du Judaïsme, Robert Capa, Gerda Taro et Chim offrent trois regards complémentaires sur la guerre d’Espagne. Portés disparus pendant soixante-dix ans, les clichés retrouvés dans la « valise mexicaine » témoignent d’une approche révolutionnaire du photojournalisme. « La Valise mexicaine », jusqu’au 30 juin au musée d’art et d’histoire du Judaïsme

dr

4. shopping

le quartier

dr

Un courant d’air, un sac plastique et voilà que la poésie opère et que l’histoire se raconte. Jongleuse hors pair et scénographe de génie, Phia Ménard a bien compris que le corps n’est pas forcément affaire de chair et d’os, mais qu’il se joue ailleurs, dans les mystères de l’imagination. L’Après-Midi d’un foehn et Vortex de Phia Ménard, du 21 mai au 8 juin au théâtre Montfort

dr

2. théâtre

À l’intérieur, un joli zinc 1900 fait face à une salle de bistrot parisien typique, avec un sol en mosaïque et de bonnes vieilles tables en formica. Rien de branché ici, plutôt une ambiance gentiment bobo, une clientèle jeune, un patron sympa qui organise de nombreuses animations culturelles et des prix raisonnables. La Jupiler est à deux euros cinquante, mais les puristes jetteront leur dévolu sur une poignée de bières à la pression ou en bouteilles, des vodkas, rhums, whiskies de qualité et même un mezcal mexicain. Au programme de ce café agité : projection de courts métrages les premiers mercredis du mois, matchs d’improvisation théâtrale les troisième mercredis, concerts les dimanches – swing, jazz manouche, salsa ou rock –, expos temporaires, DJ sets, jeux de société à disposition des clients… Vous l’aurez compris, ici on ne s’ennuie jamais. Le week-end, le bar est bondé : n’arrivez pas trop tard si vous voulez une place assise. c.gr.

urfa dürüm

Cette minuscule échoppe nichée au cœur du quartier de Strasbourg-Saint-Denis propose de délicieux sandwichs kurdes. À l’entrée, le maître des lieux prépare la pâte de ses galettes, farine et rouleau à la main. Il faut alors choisir : lahmacun (deux euros) ou dürüm (environ six euros). La première est préparée comme une pizza avec de la viande hachée que l’on vous sert roulée avec de la salade, des oignons et un peu de citron ; la seconde est garnie de la viande de votre choix. Simple, croquant et délicieux. Urfa Dürüm, 58 rue du Faubourg-Saint-Denis, Paris Xe timeout.fr/restaurant

www.timeout.fr 123

oberkampf

À la fois brocante, salon de thé, disquaire et magasin de BD, le Thé Troc, sis 52 rue Jean-Pierre-Timbaud, est l’endroit idéal pour flâner en fin d’après-midi. Au numéro 29, la friperie Omaya Vintage offre quant à elle l’occasion de choper la tenue idoine pour aller faire un tour à L’Orange Mécanique (au 72 bis de la même rue), bar rock aux prix imbattables : deux euros cinquante la pinte. On s’orientera alors vers la rue de Crussol pour manger à la bonne franquette à La Prune Folle (au numéro 33), avant de finir en hochant la tête devant un concert à L’International, au numéro 5 de la rue Moret. Mo Oberkampf, Parmentier, Ménilmontant


cultures TROIS COULEURS PRÉSENTE

CYCLE

La Chair, la Mort et le Diable À l’occasion de l’exposition « L’Ange du bizarre », le musée d’Orsay montre les films de trois grandes figures scandinaves du cinéma muet, Victor Sjöström, Mauritz Stiller et Benjamin Christensen. par claude garcia

livre

© the swedish film institute

tout baigne

Le monastère de Sendomir de Victor Sjöström, 1920

Le fantastique et les fantômes occupent une place de choix dans le cinéma scandinave. C’est particulièrement vrai dans l’œuvre de Victor Sjöström (1879-1960), Mauritz Stiller (1883-1928) et Benjamin Christensen (1879-1959). Les deux premiers sont les pionniers de ce que l’on a appelé « l’école suédoise », qui rencontra un grand succès hors des frontières du pays. Sjöström jouera dans quatre films de Stiller, et en retour, celui-ci lui prêta main forte pour ses scénarios. Sous la houlette du producteur Charles Magnusson, les deux hommes donneront naissance à moult chefs-d’œuvre, parmi lesquels Le Jardinier (Sjöström, 1912) ou Le Trésor d’Arne (Stiller, 1919). Une grande attention aux paysages, aux grands espaces et aux éléments naturels

caractérise leur production, ainsi qu’un goût jamais démenti pour le bizarre. Le Danois Christensen (La Sorcellerie à travers les âges, 1922) partage avec eux une sérieuse fascination pour les superstitions, à laquelle s’ajoute une certaine touche d’humour. Cette belle rétrospective cinématographique apparaît comme un complément appréciable à l’exposition « L’Ange du bizarre », qui présente des peintures macabres de Goya ou Max Ernst, pour mieux explorer le versant noir du romantisme. Festival La Chair, la Mort et le Diable, jusqu’au 19 mai à l’auditorium du musée d’Orsay Exposition « L’Ange du bizarre. Le Romantisme noir de Goya à Max Stern », jusqu’au 9 juin au musée d’Orsay

Aujourd’hui réfugié politique en France, l’Iranien Mana Neyestani a été emprisonné en 2006 pour l’un de ses dessins de presse. Cet architecte de formation publie un recueil de ses illustrations à l’humour féroce qui rappelle Les Idées noires d’André Franquin. Des scènes allégoriques qui figurent la lutte permanente de la liberté face à la répression – L’Oreiller de Bachar, Petite musique de guerre, Lapidation d’une femme adultère, etc. Des dessins qui font tour à tour froid dans le dos et chaud au cœur. c.ga. Tout va bien ! Dessins de presse de Mana Neyestani (Arte éditions)

sélection philosophie 2

Chaque semaine depuis 2008, sur Arte, Raphaël Enthoven se promène dans des lieux variés en compagnie de jeunes philosophes qui improvisent et proposent un commentaire sur leur domaine de prédilection, commentaire mis en valeur par un dispositif du plan-séquence laissant tout l’espace nécessaire à la réflexion. c.ga. Coffret Philosophie 2 (Arte)

ainsi se tut zarathoustra

Après l’Afghanistan, Nicolas Wild suit une amie dans le désert iranien. Il en revient avec une sidérante histoire d’assassinat dont on ne sait à première vue s’il s’agit d’une affaire de mœurs ou d’une action politique. Une découverte de la culture zoroastrienne, l’une des premières religions monothéistes. c.ga. De Nicolas Wild (La boîte à bulles)

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mai 2013

la marche qui soigne

« Ce n’est pas parce que l’on marche que l’on se porte », dit en introduction JacquesAlain Lachant, ostéopathe et responsable de la consultation sur la marche à la clinique de Montlouis à Paris. Un ouvrage de réflexion sur le bien marcher, la « marche portante », qui propose une approche pratique et pédagogique. c.ga. De Jacques-Alain Lachant (Payot)



mai 2013

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LES SALLES BEAUBOURG

BIBLIOTHÈQUE

GAMBETTA

GRAND PALAIS HAUTEFEUILLE

NATION

ODÉON

PARNASSE

QUAI DE LOIRE QUAI DE SEINE

©cruschiform - sarah kahn studio

BASTILLE

GRAND PALAIS

Cinema Paradiso En voiture. Du 10 au 21 juin, MK2 fait rouler le cinéma en plein Paris. Moteurs de cette virée, les 12 000 mètres carrés monumentaux de la nef du Grand Palais.

Pendant douze jours, le Grand Palais va vrombir au rythme du Cinéma Paradiso. Près de mille spectateurs prennent le virage d’une expérience cinématographique unique, lovés dans des sièges de voitures, des transats ou des fauteuils. Le drive-in, icône américaine du cinéma de plein air, est transposé dans l’un des édifices les plus célèbres de Paris. Avec l’un des plus grands écrans éphémères du monde pour pare-brise, et les voûtes

majestueuses du monument pour carrosserie, le Cinéma Paradiso avale les kilomètres des pellicules les plus cultes au rythme de deux projections par jour : Pulp Fiction, The Big Lebowski, Grease, Taxi Driver, Drive ou Retour vers le futur… On compte aussi un espace jeux, mode et design, un diner américain et une piste de roller. Un événement qui embarque les grands et les petits sur une route de grands espaces, en plein Paris. c.ga.

www.troiscouleurs.fr 127


g r an d palais

Un parterre de voitures de la famille Fiat 500

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de Joel et Ethan Coen

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L’un des plus grands écrans éphémères du monde avec une largeur de 25 mètres

THE BIG LEBOWSKI

2. FOOD

UNE EXPÉRIENCE CINÉMATOGRAPHIQUE UNIQUE GRÂCE À UNE INSTALLATION HORS NORME :

UNE PROGRAMMATION CULTE DE FILMS EN VERSION ORIGINALE SOUS-TITRÉE, AVEC ENTRE AUTRES :

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1. DRIVE-IN

AMERICAN GRAFFITI

de George Lucas

CINEMA PARADISO

de Giuseppe Tornatore GREASE

de Randal Kleiser

DE NOMBREUX ESPACES DE RESTAURATION SERONT OUVERTS, POUR BOIRE UN VERRE OU MANGER.

TAXI DRIVER

Une esplanade équipée de transats et de fauteuils

de Martin Scorsese DRIVE

de Nicolas Winding Refn DIRTY DANCING

NOUVEAU PALAIS

d’Emile Ardolino

LA FIÈVRE DU SAMEDI SOIR

de John Badham Près de 1 000 spectateurs par séance

LES DENTS DE LA MER

de Steven Spielberg

SÉANCES PAR JOUR

PULP FICTION

de Quentin Tarantino LA BOUM

de Claude Pinoteau RETOUR VERS LE FUTUR

de Robert Zemeckis

ILLUSTRATION DE MARION DOREL

Au cœur des 12 000 mètres carrés de la nef du Grand Palais se trouve un diner dans la pure tradition américaine réalisé en collaboration avec Omnivore. Venue de Montréal, la chef Gita Seaton cuisinera sous la verrière du restaurant baptisé Nouveau Palais. Sa cuisine nord-américaine fera la part belle aux bacons & eggs, fried chickens, cheeseburgers et autres chocolate puddings.


g r an d palais

3. PLAY

4.SHOPPING

6.INFOS

En partenariat avec Colette, le concept store MK2 alignera des produits exclusifs, chinés ou édités pour l’occasion avec par exemple le must de l’épicerie à l’américaine, des ouvrages sur l’histoire du cinéma, etc.

PASS JOURNÉE 1 PERSONNE Avec accès à toutes les activités de la journée

tarif moins de 12 ans : 5 € tarif adulte : 10 €

PASS JOURNÉE CINÉMA 1 PERSONNE Avec accès à toutes les activités de la journée et une place de cinéma

tarif : 19 € 5. CLUBBING PASS DRIVE-IN DÉGUSTATION MOËT & CHANDON Avec accès à toutes les activités de la journée

2 places de cinéma dans une Fiat 500

Un espace entièrement dédié au jeu sous toutes ses formes. Les gamers, novices ou confirmés, pourront rivaliser sur plus de 100 jeux accessibles. Avec des bornes de jeux d’arcade vintage et les grands classiques des années 1980 : Pac-Man, Star Wars… Des flippers et des baby foots.

L’EXPOSITION « L’ÂGE D’OR DU JEU VIDÉO » reviendra sur les plus belles gloires et histoires du pixel et des manettes.

Autre icône de la culture adolescente américaine des années 1970, la piste circulaire de roller disco. Sur cet anneau on pourra patiner tout son saoul, petits comme grands, entraînés par les beats disco des DJs programmés par la Clique.

+ 2 coupes de champagne Moët & Chandon

tarif : 78 €

En partenariat avec Fiat et 1 Million de Paco Rabanne

À la tombée de la nuit, la voute céleste du Grand Palais passe du bleu au noir, et la piste de roller se mue en salle de danse pour accueillir les pieds avides de musique jusque très tard dans la nuit. Chaque soir, une fête portée par une programmation éclectique.

Avenue Winston-Churchill, 75008 Paris Ouverture des portes à partir de 11h00, dernier accès à 21h30.

Billetterie ouverte sur www.fnacspectacles.com Plus d’informations sur : Facebook.com/CinemaParadisoGrandPalais


le s salle s

agenda jusqu’à mi-mai

Fade Away de Vitalic TOUTES LES SALLES

En avant-séance de certains films, ce court métrage de Romain Chassaing met en images le deuxième single de l’album Rave Age de Vitalic.

les lundis à 18h

Séminaire philosophique de Charles Pépin MK2 HAUTEFEUILLE

Plus d’informations sur mk2.com

à partir du 8 mai

Rétrospective Park Chan-wook MK2 HAUTEFEUILLE

À l’occasion de la sortie de Stoker.

à partir du 10 mai

Rétrospective Guy Debord ©new york times co/getty images

MK2 BIBILOTHÈQUE

À l’occasion de l’exposition « Guy Debord. Un art de la guerre » à la BNF, projections chaque matin du mois de mai.

Le 15 mai à 19h

8e soirée de la petite édition MK2 QUAI DE LOIRE

Focus sur la maison d’édition Le Vampire actif GRAND PALAIS

Le drive-in par claude garcia

Pièce maîtresse du Cinema Paradiso : son drive-in, niché au cœur du Grand Palais. Il remet au goût du jour le dispositif de projection le plus surprenant de l’histoire du cinéma. Derrière la caricature du mode de vie ricain voué au culte du tout automobile se cache une réalité de confort au parfum sulfureux. Le premier grand écran posé face à un parking de voitures est l’œuvre de Richard Hollingshead le 6 juin 1933 à Camden dans le New Jersey. Le film projeté ce soir-là était titré Wives Beware – il s’agissait en fait de Two White Arms, une comédie de Fred Niblo qui venait de connaître un bide retentissant en salles. Les années 1930 sont celles de l’expérimentation technique. On cherche comment sonoriser chaque voiture, comment disposer les véhicules pour que chacun puisse voir par-dessus le capot du voisin. L’engouement pour le drive-in va exploser au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec le baby-boom. Des

nuées de parents ne peuvent plus aller dans les salles obscures sans faire appel aux services de baby-sitters. Mais, ô miracle, la voiture permet de recréer l’autonomie du cercle familial et d’isoler les braillards des voisins. Dès lors, les parkings improvisés se transforment en véritables centres de loisir, avec restaurants et manèges. À la fin des années 1950, l’autonomie intime de la voiture va glisser du noyau familial vers les flirts aventureux de jeunes adultes en quête d’un endroit au calme pour faire connaissance. Le drive-in – où en plus l’on commence à projeter des films X – est présenté par certains médias comme l’écrin du stupre et des basses passions. Après une apogée au début des sixties, avec entre quatre et cinq mille drive-in actifs aux États-Unis, l’intérêt pour ce mode de cinéma en plein air s’émousse puis disparaît. Aujourd’hui encore, des centaines de drive-in à l’abandon maudissent la télévision.

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mai 2013

Le 23 mai à 19h15 et 20h15 Lecture en bateau MK2 QUAI DE LOIRE

À bord du Zéro de conduite, autour des Soldats de la Mer de Yves et Ada Rémy (Dystopia)

Le 24 mai à 19h

Rencontre-dédicace MK2 QUAI DE LOIRE

Grégoire Carlé pour la BD La Nuit du capricorne (L’Association)

Le 25 mai à 19h30

Dédicace et concert MK2 QUAI DE LOIRE

Half Bob pour la BD Gimme More Indie Rock ! (Vide Cocagne) ; concert de Wonderflu

Le 27 mai à 20h30

Rendez-vous des docs MK2 QUAI DE LOIRE

Sub de Julien Loustau et Un homme qui dort de Bernard Queysanne et Georges Perec

Le 28 mai à 20h

Avant-première de Shokuzai 1 MK2 QUAI DE SEINE

MK2 BEAUBOURG

Le 1 er juin à 22h

Avant-première de Shokuzai 2 MK2 QUAI DE SEINE

MK2 BEAUBOURG

Le 11 juin à 20h Ciné BD Dargaud MK2 QUAI DE LOIRE

À l’occasion de la sortie des Épines, tome IX de Murena, rencontre et dédicace avec les auteurs, Jean Dufaux et Philippe Delaby, puis projection d’Agora d’Alejandro Amenábar.




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