N 173
O 
OCTOBRE 2019 GRATUIT
XAVIER DOLAN VU PAR SA BANDE
« UN GRAND FILM SUR L’AMITIÉ. UNE RÉUSSITE ABSOLUE. » LES INROCKUPTIBLES SEVILLE INTERNATIONAL, MK2 et DIAPHANA présentent une production SONS OF MANUAL
MATTHIAS & MAXIME Un film de XAVIER DOLAN
avec
GABRIEL D’ALMEIDA FREITAS XAVIER DOLAN PIER-LUC FUNK SAMUEL GAUTHIER ANTOINE PILON ADIB ALKHALIDEY ANNE DORVAL MICHELINE BERNARD Marilyn castonguay et CATHERINE BRUNET
LE 16 OCTOBRE AU CINÉMA
ÉDITO Seuls
dans le cadre, confinés à gauche ou à droite du plan – l’autre côté est laissé vide – alors qu’ils s’adressent à quelqu’un se trouvant pourtant dans la même pièce qu’eux : c’est par cette figure pointant l’isolement des personnages dans J’ai tué ma mère que Xavier Dolan est entré dans le monde du cinéma, il y a dix ans. À 19 ans, planté par des sociétés de production et de distribution trop frileuses, il a cassé sa tirelire pour faire ce premier film rageur, dont il a écrit le scénario pour combler le vide laissé par l’abandon de ses études, et dans lequel il déverse ses névroses et ses angoisses : sa relation conflictuelle avec sa mère qui ne le comprend pas, sa rancœur contre elle pour l’avoir envoyé en pensionnat. La filmographie du jeune Québécois est parcourue par ce sentiment d’extrême solitude malgré la force supposée des liens, qu’ils soient filiaux (Mommy, 2014 ; Juste la fin du monde, 2016 ; Ma vie avec John F. Donovan, 2019) ou amoureux (Les Amours imaginaires, 2010 ; Laurence Anyways, 2012 ; Tom à la ferme, 2014). Alors qu’il enchaîne les projets à un rythme frénétique, Xavier Dolan semble en fait moins tenu par l’idée de « réussir » que par celle d’être oublié. À maintenant 30 ans, il livre avec Matthias et Maxime un film par et sur la bande, toujours profond mais délesté des accès de rage de ses personnages et des grands effets de mise en scène, comme les agrandissements et réductions du cadre. Interrogé parmi d’autres fidèles collaborateurs du cinéaste pour notre dossier de couverture, son chef opérateur André Turpin nous a confié qu’il s’agissait du premier tournage sur lequel le réalisateur avait accepté d’abandonner la focale longue pour tourner plus large. En se mettant ainsi en scène dans le même cadre que ses amis (réels et fictionnels), Xavier Dolan semble avoir fini par trouver une certaine forme de réconfort. • TIMÉ ZOPPÉ
POPCORN
P. 12 CHAUD BIZ : LA RÉFORME DE L’AUDIOVISUEL P. 14 RÈGLE DE TROIS : OCÉAN • P. 22 FLASH-BACK : FIGHT CLUB
BOBINES
P. 28 EN COUVERTURE : XAVIER DOLAN • P. 40 ENTRETIEN : CHIARA MASTROIANNI • P. 52 PORTFOLIO : VAMPIRES
ZOOM ZOOM P. 60 AU BOUT DU MONDE • P. 62 PAPICHA P. 66 SORRY WE MISSED YOU
COUL’ KIDS
P. 86 INTERVIEW : CLÉMENT COGITORE • P. 88 LA CRITIQUE DE LÉONORE : LA FAMEUSE INVASION DES OURS EN SICILE
OFF
P. 90 ACID ARAB • P. 96 SPECTACLES : (LA) HORDE P. 104 SÉRIES : MYTHO
ÉDITEUR : MK2 AGENCY — 55, RUE TRAVERSIÈRE, PARIS XIIE — TÉL. 01 44 67 30 00 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : ELISHA.KARMITZ@MK2.COM | RÉDACTRICE EN CHEF : JULIETTE.REITZER@MK2.COM RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE : TIME.ZOPPE@MK2.COM | RÉDACTEURS : QUENTIN.GROSSET@MK2.COM, CORENTIN.LE@MK2.COM, JOSEPHINE.LEROY@MK2.COM | GRAPHISTE : JÉRÉMIE LEROY | SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : VINCENT TARRIÈRE | STAGIAIRE : DAVID EZAN ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : LÉA ANDRÉ SARREAU, JULIEN BÉCOURT, LOUIS BLANCHOT, LILY BLOOM, CHARLES BOSSON, RENAN CROS, JULIEN DOKHAN, JULIEN DUPUY, MARIE FANTOZZI, YANN FRANÇOIS, CLAUDE GARCIA, ADRIEN GENOUDET, DAMIEN LEBLANC, GRÉGORY LEDERGUE, BELINDA MATHIEU, STÉPHANE MÉJANÈS, THOMAS MESSIAS, JÉRÔME MOMCILOVIC, WILFRIED PARIS, MICHAËL PATIN, PERRINE QUENNESSON, BERNARD QUIRINY, GAUTIER ROOS, CÉCILE ROSEVAIGUE, RAPHAËLLE SIMON, ANNE-LOU VICENTE, ETAÏNN ZWER & LÉONORE ET LOUIS | PHOTOGRAPHES : LÉNA MILL-REUILLARD, PALOMA PINEDA, PHILIPPE QUAISSE ILLUSTRATEURS : PABLO COTS, SAMUEL ECKERT, ÉMILIE GLEASON, ANNA WANDA GOGUSEY, PABLO GRAND MOURCEL PUBLICITÉ | DIRECTRICE COMMERCIALE : STEPHANIE.LAROQUE@MK2.COM | RESPONSABLE MÉDIAS : CAROLINE.DESROCHES@MK2.COM ASSISTANTE RÉGIE, CINÉMA ET MARQUES : MANON.LEFEUVRE@MK2.COM | RESPONSABLE CULTURE, MÉDIAS ET PARTENARIATS : ALISON.POUZERGUES@MK2.COM | ASSISTANTE CULTURE, MÉDIAS ET PARTENARIATS : CLAIRE.DEFRANCE@MK2.COM TROISCOULEURS EST DISTRIBUÉ DANS LE RÉSEAU LE CRIEUR CONTACT@LECRIEURPARIS.COM © 2018 TROISCOULEURS — ISSN 1633-2083 / DÉPÔT LÉGAL QUATRIÈME TRIMESTRE 2006 — TOUTE REPRODUCTION, MÊME PARTIELLE, DE TEXTES, PHOTOS ET ILLUSTRATIONS PUBLIÉS PAR MK2 AGENCY EST INTERDITE SANS L’ACCORD DE L’AUTEUR ET DE L’ÉDITEUR. — MAGAZINE GRATUIT. NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE.
INFOS GRAPHIQUES
Avant
MÉTAL ICÔNE
de faire son entrée dans l’arène politique, Arnold Schwarzenegger était un bodybuildeur, puis une machine hollywoodienne hyper bien huilée. Pour la sortie (le 23 octobre) de Terminator. Dark Fate de Tim Miller, qui marque son come-back dans le rôle de l’androïde T-800, on met le robot en pièces pour ausculter le mythe. • JOSÉPHINE LEROY — ILLUSTRATRION : JÉRÉMIE LEROY
C’est, en années, son âge quand il est devenu le plus jeune participant à remporter le titre de Mister Univers (qu’il a obtenu à cinq reprises, en éternel winner).
C’est, en centimètres, la circonférence de son imposant tour de poitrine au top de sa carrière de culturiste – contre 102 pour un français moyen (qui peut donc aller se rhabiller) selon l’INSEE.
C’est le nombre de personnages qu’il aurait dézingués sur grand écran de ses débuts en 1970 (Hercules in New York) à 2013*. On ne se frotte pas à Schwarzy impunément.
C’est le nombre de mots qu’il prononce dans Terminator 2 de James Cameron, pour lequel il a touché 15 millions de dollars. À 21 429 dollars le mot, on peut dire que sa parole vaut de l’or.
C’est le nombre d’articles scientifiques ou de livres mentionnant son nom sur Google Scholar. Sylvester Stallone, avec qui il a tourné quatre fois, obtient 10 800 résultats. Game over. — : « Terminator. Dark Fate » de Tim Miller, 20 th Century Fox (2 h 14), sortie le 23 octobre
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ÉMOPITCH JOKER (SORTIE LE 9 OCTOBRE) 6
* « Arnold Schwarzenegger Kill Count » https://www.youtube.com/watch?v=OE6jpTaOYMU
C’est, en kilogrammes, le poids de l’épée avec laquelle il a dû s’entraîner deux heures par jour pendant la préparation de Conan le Barbare de John Milius. Il faut souffrir pour être barbare.
UNITÉ DE PRODUCTION PRÉSENTE
UN PORTRAIT BOULEVERSANT, UN FILM MAGNIFIQUE L’OBS
NINA MEURISSE
©2019 / PHOTO : JEAN-BAPTISTE MOUTRILLE / AFFICHE : PYRAMIDE - LOUISE MATAS
un film de
BORIS LOJKINE
AU C IN ÉMA L E 16 OCTOBRE
FAIS TA B. A .
À chaque jour ou presque sa bonne action cinéphile. Grâce à nos conseils, enjolivez le quotidien de ces personnes qui font de votre vie un vrai film (à sketchs). POUR VOTRE PARRAIN RUSSOPHILE, QUI VOUS ENVOIE TOUS LES MOIS DES LISTES DE FILMS À VOIR Pour apprendre la langue, il a opté pour une méthode particulière : regarder des tonnes de (très bons) films venus du pays des tsars. En guise de soutien, offrez-lui le puissant Requiem pour un massacre du Russe Elem Klimov (1987), œuvre coup de poing qui raconte la Seconde Guerre mondiale du point de vue d’un enfant biélorusse confronté aux pires atrocités commises par les nazis dans son pays.
: « Requiem pour un massacre » d’Elem Klimov (Potemkine)
POUR SUZANNA, UNE DRAG-QUEEN QUE VOUS ADOREZ CROISER EN SOIRÉE
Les Corps ouverts, 1998
© D. R.
Avec sa joie de vivre contagieuse, elle a transformé vos nuits en fêtes sans fin. Parce qu’elle rêve d’aller plus souvent au ciné, organisez-lui un marathon Sébastien Lifshitz, cinéaste, scénariste et grand collectionneur français de photographies amateur qui explore les mouvements du désir et la fluidité des identités. Le Centre Pompidou lui ouvre ses portes pour une expo et une rétro qui font saliver.
: « L’Inventaire infini » et « Rétrospective Sébastien Lifshitz », jusqu’au 11 novembre au Centre Pompidou
POUR VOTRE TANTE, AMATRICE DE VOILE QUI EST DU GENRE À COMMANDER LES TROUPES Les vacances avec cette Bretonne au caractère trempé ne sont pas de tout repos. Elle se retrouvera dans la personnalité de l’acteur américain Sterling Hayden (Johnny Guitare de Nicholas Ray, Le Parrain de Francis Ford Coppola), capitaine de voiliers et auteur aux mille vies dont le sinueux parcours se dévoile dans la passionnante biographie du journaliste Philippe Garnier.
: « Sterling Hayden. L’irrégulier » de Philippe Garnier (La Rabbia, 300 p.)
POUR VOTRE FILLE, UNE ADO QUI NE JURE QUE PAR LES SALONS AUTOS Vous êtes désespéré(e) depuis qu’elle teste le tuning sur le Berlingo familial. Pour provoquer un déclic écolo, offrez-lui ce coffret qui propose une version remasterisée de Christine, chef-d’œuvre horrifique de John Carpenter (1984) qui raconte l’histoire d’un ado rejeté par les autres qui se venge grâce à une voiture maléfique flippante. Elle taguera bientôt « voiture = mal » sur les murs de sa piaule.
: « Coffret collector Christine de John Carpenter » (Carlotta Films)
POUR VOTRE COLOC, QUI ACHÈTE COMPULSIVEMENT DES OUTILS MÉNAGERS SUR LEBONCOIN.FR Votre cuisine ressemble à Bagdad. Posez sur le plan de travail ce dico du journaliste Lelo Jimmy Batista qui répertorie par mots clés les morts les plus absurdes du ciné, du « disque » qui fissure un crâne dans Carrie 2. La haine de Katt Shea au pneu tueur dans Rubber de Quentin Dupieux. Le message sera simple : s’il ne change pas, vous le massacrerez (et pas forcément à la tronçonneuse).
: « Tués par la mort. Le dictionnaire des morts incongrues au cinéma » de Lelo Jimmy Batista (Hachette Pratique, 208 p.)
• JOSÉPHINE LEROY 8
SIXTEEN FILMS
ET
WHY NOT PRODUCTIONS
PRÉSENTENT
R É A L I SAT I O N
K E N L OAC H
SORRY WE MISSED YOU SCÉNARIO
PAU L L AV E R T Y
23 OCTOBRE
HOME CINÉMA
Chaque mois, une traversée des tendances du design, de l’art de vivre et de la culture portées par le grand écran et disponibles au mk2 store du mk2 Bibliothèque. Ce mois-ci : une sélection mélancolique à l’occasion de la sortie, le 16 octobre, de Matthias & Maxime de Xavier Dolan • CORENTIN LÊ
LE VINYL DE DEEP CUTS DE THE KNIFE
LE DVD DE LAURENCE ANYWAYS Le parcours périlleux de Laurence (Melvil Poupaud), prof de lettres en couple avec Fred (Suzanne Clément), pour affirmer sa transidentité. Durant une dizaine d’années, leur relation s’étiole peu à peu et Laurence doit affronter le regard des autres. Sorti en 2012, ce drame flamboyant et rongé par la nostalgie a propulsé Xavier Dolan sur le devant de la scène internationale du cinéma d’auteur.
LE LIVRE UNE VIE COMME LES AUTRES DE HANYA YANAGIHARA Dans ce best-seller où quatre amis qui se sont rencontrés à la fac débarquent à New York dans l’espoir d’accomplir leurs rêves les plus fous, la romancière américaine Hanya Yanagihara sonde les tourments de l’amitié masculine. Comme Xavier Dolan dans Matthias & Maxime, dans lequel les désirs enfouis font vaciller les certitudes. Bromance, quand tu nous tiens...
L’AFFICHE DE JUSTE LA FIN DU MONDE Plutôt que d’exhiber en grand format le visage de Gaspard Ulliel ou d’afficher le reste du casting prestigieux (Vincent Cassel, Nathalie Baye, Marion Cotillard, Léa Seydoux… rien que ça) du film français de Xavier Dolan, faites preuve de sobriété et optez pour ce poster crépusculaire de Juste la fin du monde (2016). Deux mains d’enfants suffiront peut-être à retenir vos larmes.
— : mk2 store du mk2 Bibliothèque 128, avenue de France, Paris XIIIe
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Lors d’une soirée bondée et colorée, Francis (Xavier Dolan) et Marie (Monia Chokri) traînent leur spleen en contemplant l’éphèbe Nicolas (Niels Schneider) festoyer en toute sensualité au bon son de « Pass This On » du groupe de synthpop suédois The Knife (tiré de l’album Deep Cuts, sorti en 2003) dans une scène des Amours imaginaires (2010). Un vinyle pour les ménages à trois (et les actes manqués).
CHAUD BIZ
POPCORN
RÉFORME, ET QUOI ?
Début
soulagés : une troisième coupure pub serait désormais autorisée dans les films et téléfilms de plus d’une heure et demi. Une demande de longue date de TF1, M6 et compagnies, qui ne devraient plus attendre vingt minutes entre deux pages de pub. Les réclames pourraient même être « segmentées et géolocalisées », à raison de deux minutes par heure en moyenne. Ainsi, les téléspectateurs de Pau ne verraient plus les mêmes spots que ceux de Lille. Youpi ! Franck Riester a aussi insisté sur la mesure principale de cette réforme, qui serait d’obliger les plates-formes comme Netflix et Amazon à investir dans la création française à hauteur de 16 % de leur chiffre d’affaires réalisé en France, avec la menace de fermer l’accès à ces dernières si elles refusaient de se plier à la règle. Une bravade simple à lancer mais ardue à appliquer. Pour contrôler l’ensemble du dispositif, un nouveau super-gendarme s’apprête à voir le jour, avec la fusion de la Hadopi et du CSA, qui aura pour mission de réguler à la fois les communications audiovisuelles et numériques. Un programme chargé – mais faut-il encore qu’il soit voté par le Parlement au premier semestre 2020. • PERRINE QUENNESSON ILLUSTRATION : ÉMILIE GLEASON
septembre, le ministre de la Culture, Franck Riester, a annoncé les grandes lignes de la réforme de l’audiovisuel. On fait le point pour y voir plus clair. Il était réclamé depuis un moment, en particulier par les chaînes privées de télévision : le changement, ça pourrait être maintenant. Les 2 et 3 septembre derniers, le ministre de la Culture est revenu en détail sur la réforme de l’audiovisuel. Mais qu’est-ce que cette future loi changerait au quotidien ? Les habitués du film du dimanche soir risquent d’être déboussolés, car, désormais, le ciné, ça pourrait être tous les jours au programme. L’interdiction de diffuser des longs métrages les mercredis, vendredis et samedis (pour ne pas concurrencer les salles de cinéma) serait levée, les chaînes pourraient proposer 244 soirées ciné par an. On verrait donc à la télé des publicités pour les films qui sortent en salles, mais à condition que le cinéma d’auteur français soit autant promu que les blockbusters états-uniens. Préparez-vous : bientôt un spot Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon Dieu ? entre deux réclames pour de la lessive. D’ailleurs, si vous aviez peur d’être en manque, soyez
Bientôt un spot Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon Dieu ? entre deux réclames pour de la lessive.
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ATACAM A P RODUCT I ON S
PRÉS EN T E
après NOSTALGIE DE LA LUMIÈRE et LE BOUTON DE NACRE
« Le dernier chapitre d’une trilogie unique » Positif
ŒIL D’OR DU MEILLEUR DOCUMENTAIRE
RÈGLE DE TROIS
OCÉAN Les 3 personnages de fiction qui te ressemblent le plus ? Ripley dans Alien, parce que tuer des monstres en débardeur, sans soutif et le crâne rasé, c’est quand même le plus beau métier du monde. L’alien dans Alien, parce que, quand tu commences une transition de genre, il y a des moments où tu te sens vraiment pas frais. Rocky, parce que je me sens souvent comme un vieux boxeur italien qui mange trop de pâtes, mais qui est toujours prêt à renfiler son jogging. Je le mixerais avec Bridget Jones pour le cœur d’artichaut maladroit que je suis sous mes muscles de rital. OK, j’ai triché, ça fait quatre. Une comédie qui te fait rire au bout de 3 minutes ? Deux en un des frères Farrelly. J’adore leur filmo, et ce film-là, avec ces deux frères qui font des burgers, est parfait – je raffole des burgers, même si maintenant je m’oblige à les prendre végétariens. Les 3 personnages trans les plus réussis selon toi ? Je dirais qu’en fiction ils n’existent toujours pas, ce
qui est à la fois triste et génial, parce que le meilleur est à venir. Au festival des Merveilles [dont la première édition se tient du 17 octobre au 2 novembre, ndlr], on a sélectionné des films magnifiques sur les trans, comme Call Her Ganda de PJ Raval, Une femme iranienne de Negar Azarbayjani et Screaming Queens de Susan Stryker et Victor Silverman. 3 films qui te donnent envie de battre le pavé ? L’Affaire Josey Aimes de Niki Caro, avec Charlize Theron – que j’aime. C’est un film avec une femme qui se rebelle et dont la bataille personnelle devient collective. Frances de Graeme Clifford, absolument révoltant sur la psychiatrisation et le contrôle du corps des femmes qui revendiquent leur liberté. Fruitvale Station de Ryan Coogler, sur les violences policières aux États-Unis, qui sont malheureusement très fortes en France aussi. 3 histoires d’amour de cinéma que tu envies ? Celle de Coup de foudre à
— : « Festival des Merveilles », du 17 octobre au 2 novembre à L’Entrepôt
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© JUSTINE LEVEQUE
Engagé contre l’invisibilisation des LGBTQ+, le comédien, réalisateur et humoriste français a lancé le festival des Merveilles, pour mettre en lumière la transidentité au cinéma. Il y présente son film Océan, précieux témoignage sur sa transition de genre. Il a répondu avec une belle autodérision à notre questionnaire cinéphile. Notting Hill de Roger Mitchell – mais ça, c’est ma petite obsession pour Julia Roberts, j’en parlerai à ma psy. Celle de Carol de Todd Haynes, parce que Cate Blanchett qui quitte son mari pour toi c’est un vrai life goal, non ? Et celle de Call Me by Your Name de Luca Guadagnino, parce qu’être un beau jeune garçon gay qui rencontre un prof de fac sexy en Italie avec qui il fait l’amour partout en espadrilles, what else ? 3 leçons de vie apprises au cinéma ? Dans l’effrayant Funny Games de Michael Haneke, qu’il est souvent inutile de psychologiser la violence. Dans Jusqu’à la garde de Xavier Legrand, qu’il faut à tout prix développer les dispositifs d’accueil des femmes battues et être très vigilant(e)s dès les premiers signes de violence. Et enfin, dans Pride de Matthew Warchus, que l’union des luttes (LGBTQ+, ouvrières ou antiracistes) fait la force ! • PROPOS RECUEILLIS PAR JOSÉPHINE LEROY
LE 13 NOVEMBRE AU CINÉMA
SCÈNE CULTE
QUAND PASSENT LES CIGOGNES (1958)
POPCORN
« Écureuil… Quand, alors ? Jeudi à quelle heure ? »
De
de l’immeuble où vit Veronika. C’est alors que le temps se distord à son tour. Cet instant de rien, soumis au silence (il faut éviter de réveiller les gens), devient un lent ballet d’hésitations, de départs et de retours, de gestes suspendus et de mots chuchotés. Et lorsque Veronika sort du champ, la caméra opère un mouvement inouï (techniquement, poétiquement) pour la rattraper, renforcé par une explosion de musique : elle tournoie dans l’escalier à hauteur de Boris, qui monte les étages à toute vitesse. « Écureuil… Quand, alors ? Jeudi à quelle heure ? » La promesse du prochain rendez-vous, le simple choix de l’heure constituent un sommet de tension dramatique. L’amour fou, comme le cinéma, transforme les plus petits détails en questions de vie et de mort. • MICHAËL PATIN
Quand passent les cigognes, on retient souvent la dernière scène. Celle que Claude Lelouch considère comme la plus belle de l’histoire du cinéma, et qui a convaincu Isabelle Huppert « qu’il était possible de pleurer et de sourire dans le même plan »*. Mais pour comprendre cet apex émotionnel (et éviter de spoiler le film, sorti en France en 1958), il faut revenir à notre toute première rencontre avec Veronika (Tatiana Samoilova) et Boris (Alexeï Batalov). Comment représenter l’amour fou en quelques plans ? Comment nous faire ressentir ce lien absolu que la guerre viendra réduire à néant ? Chez Mikhaïl Kalatozov, cela passe d’abord par l’invention d’un espace enchanté, au petit matin, dans les rues désertes de Moscou. Les amants dansent main dans la main le long du fleuve, vers la ligne d’horizon, dans un premier plan qui pourrait être le dernier, un happy end inversé. Ils sont filmés en contre-plongée sous un pont, observant le vol des cigognes, puis en plongée de très haut, éclaboussés par une balayeuse mécanique. Ces angles irréels protègent leur insouciance et plient le monde à leurs désirs. Puis c’est le moment des au revoir, au pied du grand escalier
— : de Mikhaïl Kalatozov, ressortie en version restaurée le 30 octobre (Potemkine, 1 h 37)
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* dans « Chroniques et critiques » de Matthieu Gosztola (Les Éditions de Londres, 2018).
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FILM FASCINANT MAFIA ITALIENNE
FRESQUE
SOMPTUEUSE TRANSFUGE
TÉLÉRAMA
UN CHEF D’ŒUVRE L’HUMANITÉ
PASSIONNANT SAISISSANT LIBÉRATION
LA CROIX
MAGISTRAL ! POSITIF
AD VITAM PRÉSENTE
UN FILM DE
MARCO BELLOCCHIO
PIERFRANCESCO FAVINO MARIA FERNANDA CÂNDIDO FABRIZIO FERRACANE
SORTIE LE 30 OCTOBRE
- © 2019 TOUS DROITS RÉSERVÉS IBC MOVIE - KAVAC FILM - GULLANE ENTRETENIMENTO - MATCH FACTORY PRODUCTIONS - AD VITAM PRODUCTION - ARTE FRANCE CINÉMA - ZDF / ARTE
UNE
SUR LA
Adaptation : TROÏKA
UN
TROIS IMAGES
WORK, WORK, WORK Avec Sorry We Missed You, l’Anglais Ken Loach poursuit son exploration radicale de la guerre pour l’emploi. Militants communistes ou marxistes tendance Groucho, les cinéastes montrent des travailleurs au bout du rouleau.
© D. R.
we missed you », c’est le mot que Ricky et les autres chauffeurs livreurs de sa plate-forme en ligne doivent laisser sur la porte de leurs clients quand ceux-ci sont absents. C’est aussi pour eux le début de l’enfer, car cela signifie qu’ils devront revenir pour être payés. Avec son nouveau film, Ken Loach s’attaque frontalement à l’ubérisation et l’autoentreprenariat, forme ultime de l’exploitation capitaliste puisque l’individu en vient à s’exploiter lui-même pour un employeur anonyme. Devant son bureau-véhicule, le travailleur de 2019 nous regarde. « Sorry to bother you », ou la formule par laquelle les vendeurs en télémarketing commencent leur conversation, mais aussi le titre du premier film pop, marxiste et futuriste du rappeur Boots Riley sorti début 2019. Dans cet univers où l’exploitation sauvage sévit sous toutes ses formes, un patron cocaïnomane fabrique secrètement des mutants mi-hommes mi-chevaux pour en faire les ouvriers de demain. Cassius « Cash » Green se présente à son futur employeur son portrait d’employé du mois à la main, prêt à être dévoré par le Léviathan. À la suite d’un coup de foudre pour un demandeur d’emploi, une employée de l’ANPE s’efforce de lui trouver un travail, mais elle ne se doute pas qu’il s’agit d’un chômeur « professionnel » qui cherche à tout prix à vivre de ses allocations. Dans La Comédie du travail (1987), le Français Luc Moullet réinvente la comédie romantique de bureau et multiplie les vignettes burlesques et corrosives de ses otages, comme cet employé enfantin assoupi, entouré de son attaché-case, son agrafeuse, sa règle, son stick de colle et sa calculatrice. • CHARLES BOSSON
— :« Sorry We Missed You » de Ken Loach,
© D. R.
POPCORN
« Sorry
Le Pacte (1 h 40), sortie le 23 octobre
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LE RETOUR DU PRODUCTEUR UN FILM DE
, RÉALISATEUR DE
LE RETOUR DU PRODUCTEUR LE RETOUR DU PRODUCTEUR UN FILM DE DE UN FILM
, RÉALISATEUR DE DE , RÉALISATEUR
HISTOIRE DE SCENARIO DE
REALISE PAR
LE 23 OCTOBRE AU CINÉMA
LE TEST PSYNÉPHILE
C’EST QUOI TON GANG ?
Est-ce que tu aimes « frencher » ton « chum » ?
On t’a drogué(e) à ton insu, le bad trip commence…
Plutôt emballer Max en troisième.
C’est juste la fin du monde…
Je préfère regarder Belphégor (avec ma mère).
Qui va mourir en premier, toi ou moi ?!
Oui, ça me rend complètement gaga.
Tu sors ta poker face… Ta philosophie Tinder ?
POPCORN
Tu commences souvent tes phrases par : « Al Capone disait toujours… »
Les principes, ça va jusqu’à un certain point, ça te sert à rien si tu perds.
« AHAHAHAHAH ! » (Grand rire sardonique.)
Avoir 30 ans, avoir encore le temps…
« Qui est ce bellâtre particulièrement à l’aise ? »
L’ordre, à la longue, se met de lui-même autour des choses.
La dernière phrase que ta sœur t’a dite (avant de tomber dans un bain d’acide) :
Ta mère ?
« Tu réalises que tu es complètement… parfaitement… dément(e) ? »
Elle te donne envie de t’enfouir la tête dans une dune.
« Toi et tes copains, vous passez votre temps à vous faire des tresses. »
Tu aimerais lui redonner le sourire. Elle t’a oublié(e) un jour dans un placard.
« La mafia n’existe pas. »
SI TU AS UN MAXIMUM DE : TU FAIS PARTIE DU GANG DES CLOWNS SOCIOPATHES RADICAUX. Tu en as marre d’être mis(e) au ban de la société, invisible, inutile ? Alors je t’invite à prendre un taxi pour Gotham et à t’abandonner à tes penchants les plus sombres avec tes copains. Je te souhaite que ce soit avec autant de fureur et de perversité que Joaquin Phoenix dans Joker de Todd Phillips (sortie le 9 octobre), un film qui fait souffler un vent d’anarchie bienvenue sur l’univers DC. Grandiose, crade, jouissif.
TU FAIS PARTIE DU GANG DES « MOI PIS MA GANG, ON VA AU CINÉMA ». En fait ton gang, ta bande, tes potes, on a envie que ce soit les nôtres aussi. Mais pourquoi veux-tu « sacrer ton camp » en Australie, « tabarnak » !? Peut-être pour fuir un garçon interdit comme Maxime dans le dernier film de Xavier Dolan ? Matthias et Maxime (sortie le 16 octobre), c’est l’histoire d’un baiser de cinéma, d’un amour renversant, organique, impossible, magnifié par une mise en scène sensible et formellement virtuose.
TU FAIS PARTIE DE COSA NOSTRA. Enfin, tu en faisais partie, jusqu’au jour où tu as commis l’impensable : briser l’omerta. Comme Tommaso Buscetta, le repenti, tu aimes la vie plus que le pouvoir. Je t’invite cependant à sortir de ta planque un soir pour voir Le Traître de Marco Bellochio (sortie le 30 octobre). Une fresque grandiose de la décadence de Cosa Nostra. (Fais juste attention en reprenant la route après le film, le sol pourrait se dérober sous tes pieds…)
• LILY BLOOM — ILLUSTRATION : PABLO GRAND MOURCEL 20
FLASH-BACK
FIGHT CLUB
Le film culte de David Fincher, adapté du roman de Chuck Palahniuk, fête ses 20 ans. Deux cinéastes français nous confient l’influence, notamment comique, que ce mémorable pamphlet a exercée sur leur cinéma.
Quatrième
long métrage de David Fincher, Fight Club divisa drastiquement la critique à sa sortie, le 15 octobre 1999 aux États-Unis et le 10 novembre de la même année en France. Mais cette histoire d’un employé de bureau dépressif (Edward Norton) qui rencontre son double fantasmé (Brad Pitt) et crée un cercle de combats clandestins à la visée anarchiste séduisit d’emblée son lot de spectateurs. Parmi lesquels des cinéastes français. « C’était une surprise de voir un film aussi puissant, provocateur et extrême au sein d’un studio. Fight Club est conçu comme un ballet mental qui éclate les règles narratives et visuelles pour raconter le dysfonctionnement d’un personnage », se souvient Jan Kounen, auteur du western fantastique Blueberry. L’expérience secrète (2004), qui traite d’initiation au chamanisme et d’expériences hallucinogènes. « Fincher montre la violence quotidienne d’une société qui nous rend schizophrènes, il capte les rapports de pouvoir avec une radicalité punk et un vertigineux mélange des genres – on passe d’un humour très noir à des
moments touchants. » Rémi Bezançon, réalisateur du récent Le Mystère Henri Pick, fut tout autant impressionné : « Le film est drôle, car Fincher n’est pas toujours tendre avec ses protagonistes, il les maltraite. La mise en scène était hyper moderne, malgré le sujet casse-gueule. » L’influence de cet objet unique, qui traite avec virtuosité de trouble identitaire et de manque affectif, s’est fait sentir jusque dans la comédie française des années 2000. « Quand je préparais Ma vie en l’air [sorti en 2005, ndlr], qui est un film de potes, j’avais la voix off de Fight Club en tête. Elle nous parle comme à un ami et instaure une complicité naturelle. C’était pile ce que je recherchais », raconte Bezançon. Kounen (dont la comédie Mon cousin sortira en 2020) confirme : « Parce que Fight Club existe et mêle le sombre pamphlet sur la société de consommation aux effets de décalages comiques, je me suis donné ces libertés-là dans 99 francs [sorti en 2007, ndlr]. Le plus important, au cinéma, c’est de savoir qu’on peut prendre des risques et s’autoriser à secouer le public. » • DAMIEN LEBLANC — ILLUSTRATION : ANNA WANDA GOGUSEY
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rĂŠsolument moderne
Grand Palais 9 octobre 2019 27 janvier 2020
LA NOUVELLE
POPCORN
NINA MEURISSE
Dans
le lumineux Camille de Boris Lojkine (en salles le 16 octobre), elle apparaît très roots, avec son chignon décoiffé, sa marinière et ses lunettes de soleil Aviator. À la terrasse du café où elle nous a donné rendez-vous, on peine d’abord à reconnaître Nina Meurisse, qui a troqué ce look baroudeur pour un ensemble plus chic et une coupe courte. Son chaleureux sourire dissipe tout doute. La pétillante brune de 31 ans sort d’une mission délicate : incarner la photoreporter Camille Lepage, disparue en Centrafrique en 2014 (lire p. 80). Pour préparer ce rôle qui lui ressemble (on sent chez elle la même soif de défis), Nina Meurisse a photographié des manifs parisiennes, apprenant à maîtriser les angles et la lumière.
Les spots, elle les côtoie depuis ses 11 ans. Originaire de Caen, elle avait décroché un rôle dans Saint-Cyr (2000) de Patricia Mazuy. Après cet intense Camille, des seconds rôles au cinéma et au théâtre (notamment chez Agnès Jaoui), elle a maintenant la comédie dans le viseur. Délestée du sac à dos qu’elle porte dans le film, elle n’en reste pas moins parée pour l’aventure. • JOSÉPHINE LEROY PHOTOGRAPHIE : PALOMA PINEDA
— : « Camille » de Boris Lojkine, Pyramide (1 h 30), sortie le 16 octobre
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Peter Hujar, Ethyl Eichelberger as Minnie the Maid, 1981. The Morgan Library & Museum. Acquis grâce au Charina Endowment Fund, 2013 © Peter Hujar Archive, LLC, courtesy Pace/MacGill Gallery, New York et Fraenkel Gallery, San Francisco
Exposition organisée par la Morgan Library & Museum, New York, et la Fundación MAPFRE, Madrid, en collaboration avec le Jeu de Paume pour sa présentation à Paris * La vie à toute vitesse
Le Jeu de Paume est subventionné par le ministère de la Culture. Il bénéficie du soutien de la Manufacture Jaeger-LeCoultre, mécène privilégié.
Avec la complicité de
En partenariat avec
Remerciements à
LA NOUVELLE
POPCORN
ÉMILIE BIERRE
Quand
on l’interviewe mi-septembre, elle n’a pas encore fait sa rentrée scolaire. « Ce sera avec deux mois de retard », lance fièrement cette Québécoise téméraire, car elle tourne un nouveau film. Du haut de ses 15 ans, Émilie Bierre s’est forgé une belle réputation dans son pays : à 5 ans, la blonde au visage poupon pose et joue dans des pubs ; à 7 ans, elle décroche un premier rôle au cinéma, en enfant de la DDASS dans Catimini de Nathalie Saint-Pierre. Dans Une colonie, premier film à la beauté trouble de Geneviève Dulude-De Celles (lire p. 76), elle joue, avec un magnétisme qui laisse sans voix, une ado qui arpente timidement les couloirs de sa nouvelle école. « Le scénario m’a touchée. Le
harcèlement scolaire, qui sous-tend le film, je l’ai vécu moi aussi. » Porte-parole d’une fondation qui aide les jeunes victimes à s’en sortir, elle prône « l’affirmation dans sa différence » depuis ce tournage qui a changé sa vie, au point de lui donner le goût de la réalisation – même si elle compte bien continuer de jouer. Rien de moins qu’un nouveau défi à relever. • DAVID EZAN PHOTOGRAPHIE : LÉNA MILL-REUILLARD
— : « Une colonie » de Geneviève Dulude-De Celles, Wayna Pitch (1 h 42), sortie le 6 novembre
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L’INNOCENCE RETROUVÉE
Trente ans : Xavier Dolan est désormais assez âgé pour être en proie à la nostalgie d’une jeunesse qu’il a brûlée dans le cinéma. Mais avec son huitième long métrage, Matthias et Maxime, le cinéaste canadien ne semble vouloir ni s’assagir ni tomber dans l’amertume ; juste retrouver un peu de légèreté. Pour ça, il a puisé dans l’énergie et la bienveillance de sa bande d’amis, qui revient pour nous sur son parcours fulgurant. 30
© SHAYNE LAVERDIÈRE
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« Je
sais que ce qui m’émeut systématique ment – et c’est à travers ce système-là que j’essaye d’émouvoir les gens –, c’est l’idée du temps qui passe. Les gens qui vieillissent, qui changent, les erreurs qu’on fait, les gens qui nous quittent, les amis qui s’en vont, la vieillesse, les rêves échoués… » Quand Xavier Dolan nous confiait cette propension à la nostalgie, il n’avait que 25 ans et venait de réaliser Mommy, son cinquième film. Aujourd’hui qu’il revient avec Matthias et Maxime, et après une décennie de carrière (son premier film, J’ai tué ma mère, est sorti en 2009), on peut dire que le tout jeune trentenaire n’a pas dévié : tout son cinéma est traversé par l’idée de retenir le temps. Lui-même a toujours vécu à toute allure, s’est affirmé dans l’urgence. Au risque d’oublier de profiter, de traîner sans raison, juste pour la contemplation. Aujourd’hui, plutôt que de nous livrer le film de la maturité, il réunit ses proches et ses fidèles collaborateurs (l’actrice Anne Dorval, le chef opérateur André Turpin…) et s’installe dans un cocon rassurant : à Longueuil, où il a vécu son enfance, à Montréal, et à une heure et demie de là, à Mont-Tremblant, où les membres du gang ont loué un chalet pour prolonger la dynamique chaleureuse qu’ils impriment sur pellicule. « Dans la vie, on est tous très proches : Antoine Pilon est mon copain ; j’ai présenté Gabriel D’Almeida Freitas à Xavier il y a cinq ans », détaille Catherine Brunet, amie d’enfance de Dolan qui joue dans Matthias et Maxime et par l’intermédiaire de qui la plupart des membres de la petite bande se sont rencontrés. En revenant ainsi à ses amitiés fondatrices au travers de la fiction, Dolan semble vouloir rester fidèle à sa jeunesse, dans ce mélange qui lui est propre de spleen et de désinvolture.
d’apprendre que les films n’auraient pas de version québécoise. Il est entendu et finit par devenir la voix du personnage Ron Weasley. Vers ses 16-17 ans, impatient de se réaliser, il parvient à contacter Anne Dorval, dont il est fan depuis ses rôles déments dans la série Le cœur a ses raisons. Il lui confie alors une ébauche encore inaboutie de scénario, conçue à partir d’une nouvelle au titre cruel, Le Matricide, qu’il a écrite pendant un moment d’ennui en cours de français, au collège Maisonneuve de Montréal. Anne Dorval confie : « Ce que j’ai appris de lui, c’est qu’il ne faut pas attendre pour faire ce dont on a envie. Il a toujours eu cette façon très frontale d’aller frapper à la porte de personnes influentes. » L’actrice lui demande alors de retravailler le scénario de ce qui allait devenir J’ai tué ma mère avant d’accepter le rôle d’un personnage s’inspirant de la propre mère de Dolan, fonctionnaire dans l’éducation, mais aussi des voisines de son quartier d’enfance, qui se battaient pour élever seules leurs enfants. « Son amour des femmes, parfois vieillissantes, c’est quelque chose qui ne s’est pas atténué avec les années », se réjouit aujourd’hui Anne Dorval. Dans cette première fiction tourmentée, Dolan se confie intimement : son coming out, la frustration d’être envoyé en pensionnat… Lâché par ses producteurs, il persévère en finançant lui-même le film avec les économies amassées en jouant dans des pubs. Quelques mois plus tard, J’ai
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XAVIER DOLAN
« Ce que j’ai appris de lui, c’est qu’il ne faut pas attendre pour faire ce dont on a envie. »
FUREUR DE VIVRE
« Xavier a une ultraconscience du temps qui passe. Quand il était ado, il me disait : “Je vais mourir avant toi, je n’atteindrai pas les 40 ans” », se souvient son actrice phare, l’éternelle mère dans ses films, Anne Dorval. « Il calculait l’âge auquel il allait mourir, probablement jeune, et il élaborait des scénarios de fin du monde. Il était un peu emo boy », plaisante Catherine Brunet, actrice qu’il a beaucoup côtoyée dans les studios de doublage (ensemble, ils ont fait les voix québécoises du Livre de la jungle 2 ou de Hunger Games). Dès l’enfance, le futur cinéaste brûle de vivre. À 8 ans, alors acteur dans des pubs, il écrit une lettre à Leonardo DiCaprio dans l’espoir que son idole le reconnaisse comme un pair. À 11 ans, fan de Harry Potter, il appelle la Warner, mécontent
Xavier Dolan et Anne Dorval sur le tournage de Mommy
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© SHAYNE LAVERDIÈRE
ANNE DORVAL
EN COUVERTURE tué ma mère est sélectionné à Cannes à la Quinzaine des réalisateurs. Les festivaliers sont stupéfaits par l’explosion de vitalité du film, et par l’âge de son réalisateur – il a seulement 20 ans. Directeur général de mk2 (qui édite ce magazine) et futur coproducteur de Laurence Anyways, Mommy et Matthias et Maxime, Nathanaël Karmitz se remémore la fougue déconcertante de Dolan : « J’avais vu J’ai tué ma mère, ça avait été un vrai petit phénomène cannois. Alors qu’on travaillait avec la productrice canadienne Lyse Lafontaine sur un autre film, elle m’a dit qu’il y avait dans la salle de montage à côté un petit gars qui faisait des choses très prometteuses. “Tu veux bien regarder ?” Un soir, j’ai donc reçu le lien des Amours imaginaires. J’ai vu un film
à trois. Sauf qu’il le revigore à l’aune de la fluidité sexuelle d’aujourd’hui. Il touche ainsi une génération plus sensible aux enjeux de représentation queer que les précédentes, celle qui télécharge tout aussi frénétiquement l’intégrale des films de François Truffaut et la discographie complète de Céline Dion, faisant fi des frontières entre cultures d’élite et popu, samplant toutes les époques à une vitesse dingue. Le débit de création de Dolan est inarrétable (huit longs métrages en dix ans), il devient vite un phénomène générationnel : « Avec Laurence Anyways, il a commencé à recevoir des mots de gens qui disaient que le film avait changé leur vie », se souvient Nathanaël Karmitz. Dolan continue de regarder dans le rétroviseur, particulièrement
« Xavier déborde. Mais je crois qu’il a appris à canaliser ce débordement. C’est la marque des grands auteurs. » brillant mais en même temps très agaçant. Il y avait beaucoup trop d’effets de style. J’ai fait un retour, mais je le sentais qu’à moitié. Sauf que, vingt-quatre heures après, il m’a envoyé le film avec toutes les corrections prises en compte. » Mk2 acquiert alors les droits de diffusion des Amours imaginaires en France. Si J’ai tué ma mère avait déjà attisé la curiosité des spectateurs français, Les Amours imaginaires constitue le début d’une vraie relation suivie entre Dolan et le public hexagonal. Monia Chokri analyse cette rencontre retentissante : « D’autres pays comme la Corée du Sud ont très bien accueilli les films de Xavier. Mais il s’est vraiment passé quelque chose avec les jeunes Français. Il y a peut-être un hasard de contexte ; d’amour du cinéma aussi. » Avec l’ardeur de la jeunesse, Dolan revisite le motif classique du ménage
VIVRE FATIGUE
Mu par un besoin vital de reconnaissance, le jeune homme est soumis à un stress qui n’a cessé de grandir. « Lors de notre première rencontre, j’ai été impressionné par sa façon très précise de visualiser ce qu’allait devenir le film, de déjà savoir dans quel festival il irait plus tard… Mais pendant le rendez-vous, il était aussi très anxieux. Il avait du mal à
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Suzanne Clément et Xavier Dolan sur le tournage de Laurence Anyways
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Monia Chokri dans Les Amours imaginaires
attiré par les années 1990 et 2000, celles de son enfance. Que ce soit à travers Laurence Anyways (2012), dans lequel il raconte sur dix ans une histoire d’amour et une transition de genre, ou plus tard dans Ma vie avec John F. Donovan (2018), il explore cette période comme pour retrouver le goût de l’innocence, comme pour échapper un temps au statut de cinéaste star qu’il a acquis.
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MONIA CHOKRI
Xavier Dolan et André Turpin sur le tournage de Juste la fin du monde
Marion Cotillard, Xavier Dolan et Nathalie Baye sur le tournage de Juste la fin du monde
© SHAYNE LAVERDIÈRE
respirer », se rappelle André Turpin, directeur de la photo sur tous ses films depuis Tom à la ferme (2013). Quand il reçoit le Prix du jury à Cannes en 2014 pour Mommy, Dolan prononce un discours qui dit tout l’acharnement mis dans son cinéma : « Je pense que tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais. » Sa carrière s’emballe, et son cœur aussi. Deux ans après, Juste la fin du monde (2016), son premier film avec un casting entièrement français, est couronné du Grand Prix du festival. Mais il vit mal la timide réception par la presse. André Turpin évoque sa sensibilité à vif : « De film en film, les traits de caractère de Xavier s’amplifiaient : il était plus passionné, plus drôle, mais aussi beaucoup plus émotif. Il suffisait qu’on rate une scène pour qu’il soit
démoli. » Face au doute, le cinéaste pense parfois à abandonner, à renouer avec une vie plus calme, par exemple en reprenant des études d’histoire de l’art. « En général, deux semaines après s’être lamenté, il nous faisait lire un nouveau scénario », s’amuse Brunet. Pour que rien ne lui échappe, Dolan cherche à tout contrôler. Sa tendance à la précipitation se calme le moment venu du tournage où, selon Turpin, le cinéaste est très pondéré, prenant soin de chaque détail en distribuant aux membres de l’équipe un lookbook de 200-300 pages posant les bases visuelles pour les costumes, les décors ou l’éclairage. Mais parfois, vouloir tout maîtriser ne suffit pas. Dolan a pu s’en rendre compte sur Ma vie avec John F. Donovan, son premier film en langue anglaise, avec un casting prestigieux (Kit Harington, Natalie Portman…) dans lequel il suit les parcours croisés d’un acteur de série qui, pour protéger sa carrière, cache son homosexualité, et d’un jeune fan avec qui il entretient une correspondance. « Le film a peut-être été surpensé. La première fois qu’il m’en a parlé, on était en repérages pour Tom à la ferme. Il pleuvait, on était dans une voiture, et il m’a joué tous les rôles », se souvient André Turpin. Dolan a-t-il été trop pressé de réaliser un film de cette dimension ? Quand on voit le résultat ample et écorché, on ne peut qu’imaginer la souplesse avec laquelle il a dû gérer les agents, les défis techniques, le montage inextricable. Finalement, le film, très mal accueilli par la critique
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© SHAYNE LAVERDIÈRE
XAVIER DOLAN
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Matthias et Maxime
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Xavier Dolan dresse des paravents contre ce qu’il ne veut pas devenir, celui qui se range, finit par se résigner. anglo-saxonne au festival de Toronto où il a été présenté en 2018, ne sortira même pas aux États-Unis, où il a été partiellement tourné. Qu’importe, Dolan a la peau dure.
DOUCEUR DE VIVRE
Matthias et Maxime, c’est peut-être alors le film à la virtuosité calme d’un trentenaire qui a le sentiment que les dix dernières années sont passées de manière trop expéditive. Il commence ainsi : on s’épuise dans une salle de sport moite, on parle d’amis qui se rendent sans grand enthousiasme à une baby shower, on tombe sur un panneau publicitaire renvoyant l’image d’une famille engoncée dans son conformisme. C’est à la fois drôle et déprimant, tant cette ouverture résume toute l’appréhension de ceux qui pourraient préférer l’installation à l’aventure, quitter les nuits à l’arrache pour le nœud de cravate qui se resserre. On a l’impression dans ce film que Dolan dresse des paravents contre ce qu’il ne veut pas devenir, celui qui se range, finit par se résigner. « Sa vingtaine, il l’a vécue en tant que personnalité connue. Il a voulu revenir à ce truc plus authentique d’amitié. Par rapport aux complications qu’il a vécues avec Ma vie avec John F. Donovan, je l’ai senti serein », confie Gabriel D’Almeida Freitas, qui joue Matthias dans le film. Sa mise en scène respire grâce à l’agitation de cette bande évoluant dans le milieu artistique québécois. « Jusqu’à ce film, il resserrait toujours plus le cadre, parfois trop à mon goût, en filmant avec
des focales longues. Cette fois, on a tourné plus large », détaille André Turpin. « Le plateau était ultra sécurisant. Par exemple, la scène d’amour entre les deux amis, on l’a tournée sur une journée. C’était très lent, très respectueux, on a pris le temps de la vivre », développe D’Almeida Freitas. Le film étonne par sa manière de mêler cacophonie du groupe et profondeur discrète des sentiments, sublimés par une esthétique douce, pastel. « Xavier déborde. Mais je crois qu’il a appris à canaliser ce débordement. Il est plus dans l’économie et raconte beaucoup de choses avec peu. Pour moi, c’est la marque des grands auteurs », juge Chokri. Où le mènera cette plénitude-là ? Ses amis nous ont confié que Dolan risque encore de nous prendre de vitesse. Ils parlent d’une foule de projets dont une mystérieuse série, racontent qu’il compte aussi plus s’investir dans le métier d’acteur (il sera notamment à l’affiche du prochain Xavier Giannoli, Comédie humaine, aux côtés de Gérard Depardieu), qu’il pense à une comédie sur le milieu du cinéma ou même à un film sur une distorsion temporelle. On prédit qu’il saura rester ce créateur vivant à contretemps, mais dont la vision sera toujours en phase avec son époque. • QUENTIN GROSSET
— : « Matthias et Maxime » de Xavier Dolan, Diaphana (1 h 59), sortie le 16 octobre
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Conception graphique et photo : La Cinémathèque française/Mélanie Roero. Courtesy of Twentieth Century Fox
La Strada Strada, Stra da,, Federico da Federico co Fe Fel Fellini, lini, n 1954, 195 954, 54, coll 5 colll La aC Cinémathèque inémat iné némat né émath math mat ma ath at th hè èqu èq que q qu ue e fr ffrançaise ançaise a an anç nçaise nça çaise ais © Beta B ta aF Film lm mG GmbH mbH m bH H/ soutien Kodak Affiche imprimée Affiche imprim impr mprim im mé ée e grâce gr grâce au généreux gén nérrreux néreux x so souti sou outie outien out ou o utien u n de K Kod od dak k
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DÉSIRS MAGNÉTIQUES
Xavier Dolan revient apaisé pour capter les élans les plus discrets du désir entre deux amis, dans l’agitation d’un film de bande.
Après
avoir perdu un pari, Matthias (la révélation Gabriel D’Almeida Freitas, tout en retenue) et Maxime (Dolan lui-même, dans une composition sensible) doivent échanger un baiser devant la caméra d’une amie étudiante en cinéma – geste a priori anodin qui va pourtant les amener à redéfinir toute leur relation. « C’est plus profond qu’une expérience qu’on va laisser derrière soi », nous a confié Dolan. Les désirs réprimés, les corps qui s’attirent de manière impérieuse… le cinéaste canadien retrouve pour son huitième long métrage les problématiques intimistes qui lui sont chères. Il les installe dans un film de bande frénétique et remuant, s’approchant, caméra à l’épaule, d’un clan de jeunes surexcités au seuil de la trentaine. Dolan livre ainsi une vraie lettre d’amour à ses amis (on retrouve dans le film ses acteurs fétiches comme l’actrice Anne Dorval, ses collaborateurs fidèles comme le chef opérateur André Turpin, et toute une clique de jeunes comédiens québécois inconnus mais proches du cinéaste), dans des décors qu’il connaît bien, cherchant peut-être une intimité qui lui a manqué sur le tournage de son film précédent, Ma vie avec John F. Donovan, tourné en anglais avec un casting de stars. On est ainsi saisis par la douceur
et la sérénité qui émanent de Matthias et Maxime, dans lequel, malgré l’introspection tourmentée des deux héros, le groupe ne constitue jamais un obstacle à la possibilité de leur idylle. « Ce n’est pas une meute. La chaleur de ces gens contraste avec le désamour de Matthias par rapport à lui-même. » À ce soin de filmer ses proches avec bienveillance s’ajoute visiblement l’envie de renouer avec un certain dépouillement formel, Dolan semblant ici plus que jamais faire confiance à la force d’incarnation naturaliste de son cinéma. Son esthétique se fait plus discrète et suave : elle s’inspire notamment des couleurs pastel et des lumières du livre de photos Looking for Alice de Sian Davey publiée en 2015, dans lequel l’artiste regardait grandir sa fille trisomique avec un regard empli de tendresse. Avec la même simplicité, le cinéaste délaisse les effets spectaculaires pour se concentrer avant tout sur les visages. Dans le chaos ambiant, il se recentre sur l’émotion contenue dans le moindre tremblement de lèvres, dans une œillade fuyante, dans un geste fragile et hésitant. C’est peut-être dans cette légèreté d’approche que Dolan trouve l’assurance nécessaire pour sonder si finement les mouvements secrets entre le tumulte et le silence. • QUENTIN GROSSET
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INSPIRÉ D’UNE HISTOIRE VRAIE
CÉCILE DE FRANCE
UN MONDE PLUS GRAND HAUT ET COURT, 3X7 PRODUCTION ET SCOPE PICTURES PRÉSENTENT
UN FILM DE
FABIENNE BERTHAUD
LE 30 OCTOBRE
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LE VENT MUET
Comme le diable, le cinéma se loge dans les détails. Geste inattendu d’un acteur, couleur d’un décor, drapé d’une jupe sous l’effet du vent : chaque mois, de film en film, nous partons en quête de ces événements minuscules qui sont autant de brèches où s’engouffre l’émotion du spectateur. Ce mois-ci : un vent fatal dans Le Guépard de Luchino Visconti (1963).
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C’est
le vent, peut-être, qui a défiguré les statues du générique, rongé lentement la pierre blanche des joues, des cheveux, des épaules. Depuis combien de temps sont-elles là, dans le jardin de Salina, à résister au supplice de ce vent méridional qui a fait plier des générations d’oliviers, combien de temps debout devant l’éternité du ciel et des montagnes de Sicile ? Au fond de l’allée, le palais de Salina attend Visconti, qui s’approche doucement dans le vent et la lumière ocre. La caméra avance et le palais reste de face, si bien fondu dans la montagne
Le vent est le messager du temps, qui souffle sur les statues debout et les aristocrates à genoux jusqu’à les faire s’effriter complètement. qu’on dirait qu’il n’y a de lui qu’une façade, un décor de carton-pâte abandonné à la canicule ; ou que le palais est un vestige nabatéen taillé dans la roche même. Soudain la musique de Nino Rota, qui pleurait pour les statues, s’éteint : le générique se termine, on est assez près, on va entrer dans le palais, qu’on jurerait vide malgré la prière échappée des fenêtres où de grands voiles blancs dansent avec le vent. C’est à travers l’un de ces voiles, finement brodé, qu’on les voit pour la première fois. Les
femmes, d’abord, à genoux pour le rosaire et comme clouées au sol par leurs lourdes robes noires. Et puis le prince Salina, Burt Lancaster en vieux lion morose, ses genoux sur un linge blanc et devant lui, ouvert sur un fauteuil de soie, le livre de prières. Au rosaire se mêlent alors, petit à petit, des voix parasites, venues de dehors troubler et rendre un peu absurde la solennité de la cérémonie. Les voix arrivent du jardin : on y a trouvé un soldat mort. Les hommes de Garibaldi ont débarqué à Marsala, le crépuscule tombe sur l’aristocratie en pleine prière. Le vent suffit à raconter tout ça, il est le messager du temps, qui souffle sur les statues debout et les aristocrates à genoux jusqu’à les faire s’effriter complètement. Plus tard, d’ailleurs, une autre messe verra Salina et les siens réduits à des pantins de poussière, marqués par le vent de leur condition de vestiges. Le bal tout à la fin ne les ressuscitera que dans leur mort fatidique – un bal de vampires. « Tu courtises la mort », dira au prince son neveu Tancredi. Mais c’est la mort qui a flirté la première, dans ce vent venu dire dès l’entame du film l’inéluctable travail du temps. Et si ce vent est si loquace, c’est paradoxalement qu’il est muet. Tout le génie de la scène est là, dans ce vent qui ne fait aucun bruit mais qui envahit tout par l’image. Le mouvement des voiles brodés en est le premier signe, enveloppant d’un seul et même linceul le palais condamné, balayant violemment les corps massés dans la prière. Mais le plus saisissant est que ce mouvement se répercute partout : sur les vitrines encombrées de reflets, et sur les visages surtout, où il fait ondoyer des griffes d’ombre venues torturer la piété immobile. Les corps tiennent bon, les doigts se serrent sur les chapelets, mais l’agacement par ces ombres funestes signale sans attendre qu’ils sont tous perdus : leurs prières, dit le vent, chantent leur propre enterrement. • JÉRÔME MOMCILOVIC
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INTERVIEW
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TOUT S’ÉCLAIRE
Chez Christophe Honoré, on l’a vue notamment en femme trompée (Non ma fille tu n’iras pas danser, 2009) et en amoureuse éconduite (Les Bien-Aimés, 2011). Dans Chambre 212, on découvre Chiara Mastroianni en croqueuse d’hommes prise en flagrant délit d’infidélité par son sentimental de mari (campé par Benjamin Biolay, et par Vincent Lacoste en version jeune). Un revirement solaire qui lui a valu cette année à Cannes le premier Prix d’interprétation de sa carrière (dans la section Un certain regard), et qui tombe à pic dans son cheminement vers plus de lumière. 40
C’est vos grandes retrouvailles avec Christophe Honoré depuis Les Bien-Aimés, il y a huit ans. Vous étiez en manque ?
différents pour éviter de se répéter. Pour autant, je n’ai jamais eu l’impression que tout était acquis avec lui. Ni avec personne, du reste. Je me méfie de l’idée de « famille de cinéma ». Ce n’est pas parce que que j’ai fait plusieurs films avec Christophe que je serai dans tous les prochains. D’ailleurs il a eu plein d’autres projets ces huit dernières années. En revanche, je considère que je lui appartiens complètement. S’il m’appelle demain et qu’il me propose un film qui n’est pas encore écrit, j’y vais direct. Pour Les Bien-Aimés, Christophe Honoré vous a fait danser pour votre première scène alors que vous détestez ça. C’était quoi votre challenge, cette fois ? Sur le moment, j’étais super malheureuse à l’idée de faire cette danse, et il le savait. Je me disais que j’y arriverai jamais, que j’allais devoir renoncer au film. Mais après avoir tourné cette scène, j’étais super contente, j’étais même fière de moi, ce qui ne m’arrive pas souvent. Alors, je ne danse toujours pas dans les fêtes, même si j’en meurs d’envie, mais Christophe a réussi à me faire dépasser mes peurs, parce qu’il me connaît bien. Pour Chambre 212, il m’a un peu bousculée en m’emmenant vers ce personnage hyper libre, qui agit sur son désir, qui enchaîne les amants sans scrupule, qui soutient avec toute la mauvaise foi du monde à son mari que la fidélité n’a aucune importance. Ça a été très exotique et jubilatoire à jouer. Et puis il a réussi à révéler en moi une sorte de sensualité dont je n’ai pas conscience. Christophe a ce don de vous emmener sur des terrains où vous ne pensiez pas mettre les pieds.
© JEAN-LOUIS FERNANDEZ
Oui, j’avais hâte de retrouver sa langue, son inventivité, et puis de le retrouver lui, aussi. Comme je suis de nature mélancolique et qu’on se voit pas beaucoup dans la vie de tous les jours, j’ai tendance à avoir envie de pleurer dès le premier jour du tournage en pensant qu’il faudra se quitter dans six semaines. Du coup, à la fin des tournages, je me retiens de l’appeler pour le laisser tranquille. Parce que, bon, lui il passe au montage, mais nous on passe au vide ; c’est assez violent de devoir tout quitter si brusquement. Et même si je commence à avoir fait quelques films, y a rien à faire, ça me fait le coup à chaque fois. D’ailleurs, ça fait bien marrer Christophe. Il ne doit pas si bien vivre la séparation, puisqu’il confie être assez possessif avec ses acteurs fétiches. C’est rassurant de jouer avec un cinéaste qu’on connaît bien ou, au contraire, il y a la pression de devoir se réinventer ? Se réinventer, je ne m’en inquiète pas vraiment, parce que c’est lui qui me réinvente à chaque film, avec des personnages très
Avec Vincent Lacoste dans Chambre 212 de Christophe Honoré (2019)
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CHIARA MASTROIANNI
Ce personnage de don Juan est à l’opposé des héroïnes passionnées et tragiques que vous avez jouées avec Christophe Honoré, comme dans Non ma fille tu n’iras pas danser ou Les Bien-Aimés. C’est aussi un clin d’œil à votre père, Marcello Mastroianni, qui a été catalogué « latin lover » après La dolce vita, en 1960… Oh oui, il détestait ça, il trouvait ça super vulgaire. Du coup, il a voulu prendre le contrepied, et c’est une des raisons pour lesquelles il a décidé de faire Le Bel Antonio en 1961, qui était l’histoire de cet homme très beau mais impuissant qui n’arrive pas à honorer sa femme – jouée par Claudia Cardinale. Mais ça lui a collé à la peau longtemps, et jusqu’à la fin ça le mettait vraiment en rage. Même s’il n’a pas regretté une demi-seconde d’avoir fait La dolce vita, qui était le début de sa longue collaboration avec Fellini. Moi, à l’inverse, j’ai très souvent été la fille qui tombe amoureuse à sens unique, celle qui se fait larguer, tromper, qui se suicide, donc ça m’a fait du bien, un rôle super solaire de tombeuse ! Derrière sa forme enjouée, c’est un film sur le temps qui passe et l’usure des sentiments. Vous êtes plutôt ancrée dans le présent comme votre héroïne, ou tournée vers le passé ? Oui, ça parle des ravages du temps… D’ailleurs, à une avant-première du film à laquelle je n’étais pas, Christophe a dit qu’il voulait me filmer avant que je ne sois fanée. J’ai vu ça sur Internet, ça m’a fait rire, et du coup je lui ai envoyé un émoji de fleur fanée, mais il n’a pas fait le rapprochement ! J’ai malheureusement tendance à être plutôt tournée vers le passé mais, maintenant que j’ai 47 ans et que j’ai a priori plus d’années derrière que devant moi, j’arrive à être plus dans le présent et dans l’avenir. Je suis toujours un peu anxieuse, parce que c’est ma nature, mais je m’empêche moins, je suis plus sereine.
Avec Marina Foïs dans Non ma fille tu n’iras pas danser de Christophe Honoré (2009)
© LE PACTE
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INTERVIEW
Avec Catherine Deneuve dans Les Biens-Aimés de Christophe Honoré (2011)
Vous servez-vous de vos expériences personnelles pour nourrir vos rôles ? Par exemple, au moment de Non ma fille tu n’iras pas danser, vous étiez dans une situation à peu près similaire à celle de votre personnage fraîchement séparé et mère de deux enfants. Je n’intellectualise pas mes rôles et, globalement, moins j’en sais, moins je pense et mieux je me porte. C’est a posteriori que je me rends parfois compte des liens, des échos entre certains films et ma vie. Donc je n’ai jamais eu l’impression d’utiliser consciemment mon expérience personnelle pour un film, mais en revanche les films ont pu me servir pour avancer dans ma vie. D’ailleurs, sans le savoir, Christophe a souvent eu le sens du timing : il est plusieurs fois revenu vers moi à des moments pas faciles, de doute – cette fois encore. Alors je n’ai pas nourri ses films avec cette douleur-là, mais en revanche ses films m’ont souvent réconciliée avec l’envie d’être actrice. Je crois beaucoup à la vertu du travail dans les situations de souffrance. Travailler m’éloigne de moi. Vous jouez la femme infidèle du personnage incarné par Benjamin Biolay, qui a été votre mari dans la vraie vie. Pas trop troublante, cette mise en abyme ? Ça ne m’a pas fait bizarre de jouer avec lui, car on n’a jamais cessé de se fréquenter. Ça fait plus de dix ans qu’on bosse ensemble, on a fait beaucoup de concerts tous les deux. Quand Christophe m’a parlé de l’éventualité
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CHIARA MASTROIANNI de Claire Darling de Julie Bertuccelli. Jouer avec une personne intime, ça vous aide à créer un climat de confiance ? Je n’aime pas penser à l’effet miroir. Avec ma mère, plus nos rapports dans les films étaient éloignés de nous, plus j’étais à l’aise. En revanche, le fait de la connaître m’a permis de ne pas avoir à subir l’idée terrifiante de jouer face à Catherine Deneuve qui, j’en ai conscience, peut être très intimidante !
que Benjamin incarne Richard pour savoir si je n’étais pas mal à l’aise, je n’ai pas hésité une seconde. Sur le côté mise en abyme, il n’y avait pas vraiment d’identification possible parce que, même si on a été mariés, notre relation était très différente : on n’a jamais eu cette vie-là, j’ai jamais été prof d’université avec un mari qui me prépare à dîner. Et contrairement au couple du film, qui n’a pas d’enfant, nous avons une fille avec Benjamin, c’est une grande différence. Vous avez ressenti une émotion particulière à jouer avec lui ? Ce qui m’a surtout émue, c’est que Christophe lui ait donné à jouer quelque chose que je sais de lui mais qu’on ne lui avait jamais donné à jouer au cinéma – cette tendresse, cette tristesse, cette douceur. J’ai adoré le voir jouer ce personnage-là, il me bouleverse dans le film, alors que c’est rare de se laisser emporter par un film dans lequel on a joué et qu’on connaît fatalement très bien. Et puis, là où je me suis régalée, c’est que je pouvais me moquer de son costume avec son gilet, son short et ses grandes chaussettes. C’est un peu ingrat, mais ça fait partie de la tendresse de son personnage. Vous avez aussi tourné dans une douzaine de films avec une autre proche : votre mère, Catherine Deneuve. Plusieurs fois d’ailleurs dans le rôle de sa fille, comme dans Les Bien-Aimés, 3 cœurs de Benoît Jacquot en 2014, ou récemment La Dernière Folie
Après le bac, vous vous êtes inscrite à la fac d’italien, et c’est votre ami Melvil Poupaud qui vous a encouragée à vous lancer comme comédienne. Ça a été difficile de franchir le pas, avec vos deux parents acteurs ? Je m’étais inscrite en fac d’italien, parce que je pensais très naïvement que, parlant italien, je pourrais facilement devenir prof. Avec Melvil, on s’était inscrits en parallèle dans une école de ciné qui n’existe plus, mais on n’a pas tenu bien longtemps non plus. Effectivement, c’est lui qui m’a poussée. Mais oui, c’était difficile pour moi, j’étais hyper complexée, et puis ma mère s’inquiétait, elle voulait que je fasse des études, donc je sentais que ça allait mal passer. Vous vous sentez une autre actrice depuis vos débuts dans Ma saison préférée d’André Téchiné, en 1993 ? Je ne revois pas mes films, mais les sensations sont toujours là. Quand j’ai tourné Ma saison préférée, j’avais mal au ventre tout le temps, je ne prenais aucun plaisir. Le trac, je l’ai toujours, mais j’arrive à le dépasser aujourd’hui. Au début, on ne se sent pas légitime, il y a plein de choses à digérer. Et puis, au fur et à mesure, on se connaît mieux, on apprend à ne plus se tendre de pièges. Quand avez-vous commencé à prendre du plaisir à jouer ? C’est grâce à Xavier Beauvois, dans N’oublie pas que tu vas mourir [1993, ndlr]
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BOBINES
© LE PACTE
« Christophe a réussi à révéler en moi une sorte de sensualité dont je n’ai pas notion. »
© FINE LINE PICTURES
INTERVIEW
Avec Debi Mazar et Alan Boyce dans Nowhere de Gregg Araki (1997)
BOBINES
« Je suis toujours un peu anxieuse, parce que c’est ma nature, mais je m’empêche moins, je suis plus sereine. » qu’il réalisait et dans lequel il jouait. J’intervenais dans une partie du film très solaire, un moment du tournage où il était joyeux et où il improvisait beaucoup. Sa liberté, son entrain, à la fois comme réalisateur et comme acteur, m’ont beaucoup aidée. C’est à ce moment-là que ça s’est amorcé, l’aspect ludique du jeu, et peut-être plus physique aussi. Il y a eu aussi la rencontre d’Arnaud Desplechin, pour Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle) en 1996 : un rôle secondaire, mais décisif pour vous… Son approche des acteurs, l’attention qu’il donne à tous les personnages y compris les plus petits – parce que moi j’étais toute petite dans ce film-là, justement –, ça m’a vraiment passionnée. J’ai eu la chance de le retrouver après sur Un conte de Noël, qui est l’un de mes meilleurs souvenirs de travail. Dans votre filmographie, il y a un ovni : votre rôle de maîtresse SM dans Nowhere de Gregg Araki en 1997. Comment vous êtes-vous retrouvée là-dedans ? Au début, j’ai cru qu’il s’était trompé, je ne voyais pas comment il pouvait me vouloir moi, la girl next door. Il m’a expliqué qu’il avait vu ma photo dans un magazine, et que justement ça l’amusait de transfigurer ce côté girl next door. J’en revenais pas… En plus, je me disais : « c’est l’Amérique, les gros studios, le clap électronique. » J’avais jamais tourné
là-bas. Mais comme c’était un petit film indé, c’était évidemment pas du tout comme ça ! Dans le genre ovni aussi, vous avez joué dans Six-Pack d’Alain Berberian en 1999, un polar qui vire au film d’horreur et où ça tourne mal pour vous… Ce qui me faisait le plus triper dans ce rôle, c’était de me faire étrangler avec un fil de téléphone et de jouer à fond l’effroi. Ça m’a beaucoup plu comme expérience. J’adorerais faire un bon thriller style Le Silence des agneaux. La « chambre 212 » du film d’Honoré est en fait le décor mental de votre personnage qui y retrouve ses vieux fantômes. Si on était dans votre tête à vous, ce serait quel genre d’endroit ? Peut-être une forêt. Parfois il y a de la lumière, parfois non… Les arbres me fascinent, ils sont là depuis si longtemps, ils en ont vu tellement passer. Donc une forêt. Avec plein d’animaux. • PROPOS RECUEILLIS PAR RAPHAËLLE SIMON PHOTOGRAPHIE : PHILIPPE QUAISSE
— : « Chambre 212 » de Christophe Honoré, Memento Films (1 h 27), sortie le 9 octobre
—
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FRENCH QUARTER FILM TAKES FILM ET TOTEM FILMS PRÉSENTENT
Et puis nous danserons Un film de
Levan Akin
LEVAN GELBAKHIANI ET BACHI VALISHVILI LISABI FRIDELL MONTAGE LEVAN AKIN ET SIMON CARLGREN SON BESO KATCHARAVA PRODUCTEURS FRENCH QUARTER FILM ET TAKES FILM CO-PRODUCTEURS AMA PRODUCTIONS/JULIEN FÉRET RMV FILM/LUDVIG ANDERSSON INLAND FILM/LEVAN AKIN ET MATTIAS J SKOGLUND EN CO-OPÉRATION AVEC SVERIGES TELEVISION/ANNA CRONEMAN AVEC LE SUPPORT DE THE SWEDISH FILM INSTITUTE/JUAN PABLO LIBOSSART ET MADELEINE EKMAN ET LA RÉGION-ILE-DE-FRANCE PROJET PRODUCTEUR SOUTENU PAR ENTERPRISE GEORGIA EXÉCUTIF MATTIAS SANDSTRÖM RÉALISÉ PRODUCTEURS MATHILDE DEDYE ET KETIE DANELIA PAR LEVAN AKIN AVEC
©CARACTÈRES
IMAGE
6 NOVEMBRE
CRITIQUE
BOBINES
© JEAN-LOUIS FERNANDEZ
CHAMBRE D’ÉCHOS
Un an après Plaire, aimer et courir vite, le prolifique Christophe Honoré faisait son retour en mai à Cannes, cette fois hors Compétition, avec Chambre 212, une œuvre faussement mineure dont la rapidité d’exécution n’a d’égal que le charme.
Une
des lignées dans lesquelles s’inscrit Christophe Honoré est celle des « cinéastes de chambre » – Ingmar Bergman, Philippe Garrel, Jacques Doillon –, adeptes des règlements de comptes intimes, des cris et chuchotements en espace confiné. Il applique ici la formule en la tordant à l’extrême. À la suite d’une dispute avec son mari, Richard (Benjamin Biolay), Maria (Chiara Mastroianni) quitte l’appartement conjugal pour passer la nuit dans une chambre de l’hôtel situé en face. Là, elle voit débarquer des personnages qui vont l’aider – ou pas – à établir un diagnostic sur sa vie de couple : le premier amour de Richard (Camille Cottin), mais aussi Richard lui-même à l’âge de 25 ans (Vincent Lacoste), sa défunte mère ou encore un homme qui se présente comme étant… sa volonté ! La drôlerie des dialogues et des situations a parfois des accents boulevardiers, sauf que le placard ne renferme pas seulement un amant mais une bonne dizaine, et que surtout des cadavres et des fantômes en surgissent. De nouvelles références viennent à l’esprit
(Alain Resnais pour le travail sur la mémoire, Bertrand Blier pour l’absurde), et on ne les chassera pas, car Honoré a lui-même toujours salué les créateurs qui l’ont aidé à se construire, comme on a pu le vérifier dans Les Idoles, son succès théâtral de l’hiver dernier. C’est d’ailleurs un des beaux sujets du film : que faire de tout ce que l’on trimballe avec soi, les êtres que l’on a aimés, le souvenir de ce que l’on a été, les artistes qui nous ont émus ? (Ce n’est pas un hasard si l’appartement de Richard et Maria est situé au-dessus d’une salle de cinéma, jolie idée.) Enfin, si Christophe Honoré est tout sauf un réalisateur ingrat, on doit à notre tour lui être reconnaissants. Car, au-delà de son caractère ludique dans la forme et émouvant sur le fond, Chambre 212 est aussi, dix ans après Non ma fille tu n’iras pas danser, un nouveau portrait de Chiara Mastroianni – sa fantaisie et son sourire mélancolique font ici encore une fois merveille. Le cinéma français devrait accorder plus de place à cette actrice bien-aimée. • JULIEN DOKHAN
Que faire de tout ce que l’on trimballe, les êtres que l’on a aimés, le souvenir de ce que l’on a été ?
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L’INSTITUT DU MONDE ARABE PRÉSENTE
ALULA
MERVEiLLE D’ARABiE L’EXPOSITION ÉVÉNEMENT
Photographie : © Hubert Raguet | Graphisme : clementbuee.fr
DU 9 OCTOBRE 2019 AU 19 JANVIER 2020
www.imarabe.org
DÉCRYPTAGE
BOBINES
CAMÉRA AU POING
Pour Sama de Waad al-Kateab et Edward Watts, qui nous plonge dans le quotidien terrassant d’un couple de jeunes parents durant le siège d’Alep en 2016, s’inscrit dans le sillage de nombreux films, principalement des documentaires, tournés par des Syriens depuis le début de la guerre civile en 2011 pour tenter de délivrer leur peuple par l’image.
Après
un accouchement qui n’a visiblement pas pu avoir lieu à l’hôpital, la coupe du cordon ombilical d’un nouveau-né est suivie par son premier bain, filmé avec la caméra d’un téléphone portable de piètre qualité. C’est l’une des séquences ouvrant Eau argentée. Syrie autoportrait de Wiam Simav Bedirxan et Ossama Mohammed (2014), composé de dizaines de vidéos postées sur Internet depuis le début de la guerre en Syrie, en 2011. La fragilité de
cette vie nouvelle est renforcée par celle des images basse résolution qui nous renvoient au présent tourmenté d’un pays divisé entre les forces de Bachar el-Assad, les rebelles de l’Armée syrienne libre, les milices du groupe État islamique et les soldats kurdes – images permises par le développement d’appareils d’enregistrement numérique (caméras DV, appareils photo, téléphones portables) et de modes de diffusion sur Internet. De nombreux citoyens syriens sont ainsi devenus photoreporters en publiant, sur les réseaux sociaux et sur des plates-formes comme YouTube, des clichés de la guerre vue de l’intérieur dans l’espoir qu’ils passent les murs de leurs prisons et les frontières du pays. Depuis la sortie d’Eau argentée, plusieurs films se sont ainsi attelés à montrer la résistance du peuple syrien – deux d’entre eux sont sortis cette année.
© LES FILMS D’ICI
À L’INTÉRIEUR Eau argentée. Syrie autoportrait de Wiam Simav Bedirxan et Ossama Mohammed (2014)
Le premier, Still Recording de Saaed Al Batal et Ghiath Ayoub, sorti en mars dernier, prend place à Douma aux côtés 48
Pour Sama
© ITN PRODUCTIONS 2019
Pour Sama de Waad al-Kateab et Edward Watts (2019)
« Les bombes n’auront jamais raison de l’union d’un peuple entré en résistance. » Fattahi (2015), dans lequel trois femmes de générations différentes vivent recluses dans un appartement calfeutré de Damas, capitale du pays, et tentent de rester soudées.
SORTIR DU CHAMP
Si Pour Sama et Still Recording prennent directement place sur les lieux du conflit, là où Syriens et Syriennes apparaissent incarcérés dans leur propre ville, leur propre quartier, voire leur propre appartement, d’autres cinéastes ont filmé leurs concitoyens avec plus de distance, quittant le pays ou évoquant la guerre loin des zones du conflit. Le documentaire Our Terrible Country de Mohammad Ali Atassi et Ziad Homsi (2014)
Still Recording de Saaed Al Batal et Ghiath Ayoub (2019)
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BOBINES
des combattants de la rébellion et revient sur les années de siège qui ont vu ceux-ci perdre peu à peu le terrain durement gagné. Constitué de fragments de vie entrecoupés d’importantes ellipses, le film brille par la détermination de ses réalisateurs à ne jamais cesser de tourner, malgré les obstacles et les embuscades. Lors d’une ultime ronde, l’un des opérateurs est grièvement blessé, cloué au sol après avoir été touché par un tir de sniper. Sa caméra continue de filmer la scène avant qu’elle ne soit récupérée par des passants, allégorie d’un peuple qui, en se passant continuellement le relais, ne s’est jamais arrêté de filmer. Le second, Pour Sama de Waad al-Kateab et Edward Watts, en salles ce mois-ci, se déroule à Alep, deuxième ville du pays et place forte de la révolution anti-Assad. Dans la lignée du documentaire Les Derniers Hommes d’Alep de Feras Fayyad (2017), qui suit au plus près le quotidien des « casques blancs », une organisation de protection citoyenne allant au secours des habitants de la cité, Pour Sama retrace les déboires d’un couple durant le siège de la ville fin 2016. Alors que la jeune Waad, qui cosigne le film, ne se sépare plus de sa caméra dans l’espoir de diffuser un maximum d’images sur Internet, elle se marie avec un médecin, puis donne naissance à un enfant, Sama. À mi-chemin entre le reportage de guerre, ponctué par les bombardements des alliés russes d’Assad sur la ville, et le film de famille, où l’on voit le trio vivre entre quatre murs alors que l’étau se resserre autour des derniers survivants, Pour Sama fait office de manifeste : les bombes n’auront jamais raison de l’union d’un peuple entré en résistance. Le film de Waad al-Kateab et Edward Watts résonne à cet égard avec un autre documentaire familial, Coma de Sara
© FILM DE FORCE MAJEURE
© ITN PRODUCTIONS 2019
FILMER LA GUERRE EN SYRIE
© VIRGINIE SURDEJ / ALTITUDE 100 / LIAISON CINÉMATOGRAPHIQUE
DÉCRYPTAGE
BOBINES
Une famille syrienne de Philippe Van Leeuw (2017)
suit par exemple la trace de Yassin al-Haj Saleh, écrivain et dissident communiste condamné à la clandestinité, qui finit par quitter la Syrie pour rejoindre Istanbul. C’est également dans un appartement de la cité turque que prend place le moyen métrage On the Edge of Life du Syrien Yaser Kassab (2017), dans lequel le réalisateur filme son quotidien austère, au côté de sa compagne, dans un petit studio devenu leur cachot. Le documentaire sonde la culpabilité que peut ressentir chaque exilé à l’idée de ne plus participer à la libération de son pays d’origine. Mais l’une des plus puissantes évocations à distance de la guerre se trouve probablement dans Palmyre de Monika Borgmann et Lokman Slim, tourné en 2016 et sorti cet été en France. En allant à la rencontre d’anciens détenus libanais de la prison syrienne de Tadmor, le documentaire déploie un dispositif hybride joignant les gestes à la parole afin de libérer ces rescapés de leurs geôles mémorielles. Au gré de longs entretiens et d’une douloureuse reconstitution
au cours de laquelle les prisonniers rejouent des scènes qu’ils ont vécues en incarnant leur propre rôle ou celui de leurs bourreaux, la mise en scène fait office de catharsis. Plus rares, certains cinéastes choisissent de prendre du recul sur le conflit en mettant plus encore à distance le réel. À ce titre, quelques fictions isolées, parfois réalisées par des étrangers comme Une famille syrienne du Belge Philippe Van Leeuw (2017), ont également abordé le conflit. C’est aussi le cas de Mon tissu préféré, sorti en 2018 et réalisé par Gaya Jiji, cinéaste syrienne vivant en France, qui évoque indirectement la guerre civile par l’entremise d’un drame intimiste centré autour d’une jeune Syrienne tiraillée entre l’exil et l’emprisonnement conjugal d’un mariage arrangé. Parce qu’elles exigent du temps, des moyens et de la distance, les fictions syriennes traitant directement de la guerre civile en Syrie tardent à voir le jour. La première qui devrait bientôt sortir en France, presque dix ans après le début du conflit, s’intitule The Translator. Réalisé par le couple franco-syrien Anas Khalaf et Rana Kazkaz, le film montrera le retour en Syrie d’un expatrié à la recherche de son frère, qu’il a reconnu sur une vidéo dans laquelle des manifestants anti-Assad sont capturés par le régime. Peut-être, là encore, le récit d’une libération grâce à l’image. • CORENTIN LÊ
— : « Pour Sama »
Mon tissu préféré de Gaya Jiji (2018)
© GLORIA FILMS
de Waad al-Kateab et Edward Watts, KMBO (1 h 35), sortie le 9 octobre
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NINA HOSS SIMON ABKARIAN JENS ALBINUS
MEILLEURE ACTRICE FESTIVAL SAN SEBASTIAN
L’AUDITION LES FILMS DU LOSANGE présente une production LUPA FILM en coproduction avec IDÉALE AUDIENCE, PORT AU PRINCE FILM, KULTUR PRODUKTION en coproduction avec la ZDF en coopération avec ARTE en coopération avec PANOPTIMO “L’AUDITION” avec NINA HOSS, SIMON ABKARIAN, JENS ALBINUS, ILJA MONTI, SERAFIN MISHIEV, SOPHIE ROIS, THOMAS THIEME casting NINA HAUN, PATRICK DREIKAUSS, YOUNA DE PERETTI décor SUSANNE HOPF costumes PETRA KRAY sounddesign JEAN-NOËL YVEN, SAMUEL MITTELMAN conseiller aux dialogues FRANK KRUSE mixage BRUNO TARRIÈRE son direct GUILLAUME SCIAMA montage HANSJÖRG WEISSBRICH BFS directeur de la photographie JUDITH KAUFMANN BVK scénario DAPHNE CHARIZANI & INA WEISSE commissioning editors DANIEL BLUM, OLAF GRUNERT, BARBARA HÄBE coproducteurs PIERRE-OLIVIER BARDET, JAN KRÜGER, JÖRG TRENTMANN producteur FELIX VON BOEHM réalisation INA WEISSE distribution et ventes internationales LES FILMS DU LOSANGE © 2019 LUPA FILM GMBH / IDÉALE AUDIENCE / PORT AU PRINCE / ZDF/ARTE
Berlin Branderburg
LE 6 NOVEMBRE
Photo © JUDITH KAUFMANN, LUPA FILM
UN FILM DE INA WEISSE
PORTFOLIO
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PORTFOLIO
© FRIEDRICH WILHELM MURNAU STIFTUNG
Un
château plongé dans la nuit, en Transylvanie, au xixe siècle. Tandis que le jeune et beau Hutter dort à poings fermés, une silhouette bouffante aux doigts crochus se dessine sur le mur. Cette scène du sublime Nosferatu de l’Allemand F. W. Murnau (adapté du roman Dracula de Bram Stoker, paru en 1897) a quelque chose de prophétique. En 1922, année de production du film, la république de Weimar a récemment été proclamée. Comme Hutter, le pays ne se doute pas de la menace – le régime nazi – qui plane sur lui. Créature de l’ombre, le vampire a souvent permis au cinéma de parler des fantasmes et des peurs d’une société face aux changements qui la guettent. À l’occasion de l’exposition « Vampires. De Dracula à Buffy » à la Cinémathèque française, qui mêle photographies, extraits de films, reliques de décors et hommages dessinés, le commissaire de celle-ci, Matthieu Orléan, a commenté pour nous une sélection de photogrammes tirés d’œuvres qui inscrivent les vampires dans leur époque et en font aussi parfois, dans de fascinants jeux de miroirs, les alter ego de leurs contemporains humains. • JOSÉPHINE LEROY
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BOBINES
SANG CHAUD
© D. R.
BOBINES
PORTFOLIO
Le Cauchemar de Dracula de Terence Fisher (1959) « C’est un film de la Hammer Film Productions, une société de production britannique connue pour ses films d’horreur et ses films érotiques sortis dans les années 1950 et 1960 et qui a créé toute une saga autour de Dracula, avec notamment Les Maîtresses de Dracula, Dracula et les femmes et donc Le Cauchemar de Dracula. Au départ pudiques, les films de la Hammer ont peu à peu débordé d’érotisme. On sent la libération sexuelle arriver à travers l’émoi provoqué par Dracula chez les personnages féminins. C’est l’image du vampire phallocrate, un dandy à la fois terrifiant et attirant. »
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Les Lèvres rouges de Harry Kümel (1971) « Le Belge Harry Kümel transpose dans l’Ostende des années 1970 l’histoire d’Élisabeth Báthory, une comtesse hongroise du xvie siècle dont on a dit qu’elle mordait des femmes pour rester éternellement jeune. Le film vit avec son époque, parle d’amour lesbien. Delphine Seyrig y vampirise une femme séjournant avec son mari dans un hôtel. Seyrig, en tant que féministe et icône du cinéma d’auteur, est un choix intéressant. Je crois avoir lu qu’elle se demandait alors si la littérature de monstres n’était pas destinée à apeurer les petites filles pour les inciter à rester chez elles. »
© WARNER
© VIRGINIA HAGGARD-LEIRENS
PORTFOLIO
Les Prédateurs de Tony Scott (1983) « Avec ses flash-forward, ce film étonne par sa vision de l’espace-temps. Avant Abel Ferrara, il dépeint un New York faste, dangereux. Catherine Deneuve et David Bowie y jouent deux vampires mariés. Lui est frappé par un vieillissement accéléré tandis qu’elle tombe amoureuse d’une médecin – incarnée par Susan Sarandon – qui se penche sur ce cas, tout en étudiant le sang des singes. Le vampire questionne ici la pérennité du désir, notre futur comme société – et ce, juste avant que l’épidémie du sida soit officiellement reconnue –, mais aussi l’avenir du cinéma avec l’arrivée de la télé. »
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The Addiction d’Abel Ferrara (1996) « Avec ce film en noir et blanc, Ferrara se montre très en phase avec son époque. Il fait de New York une jungle urbaine avec des humains en manque de drogue et des vampires en manque de sang. On suit une étudiante en philo mordue par une goule – là aussi, la morsure renvoie à la transmission d’une maladie – qui va être confrontée à des images terribles capturées dans des camps de concentration nazis et lors des conflits en Bosnie. Cette violence picturale, elle nous met face à la violence de l’histoire, l’addiction des hommes au mal. »
BOBINES
© FILMS SANS FRONTIÈRES
PORTFOLIO
© RDA / EVERETT
Buffy contre les vampires de Joss Whedon (1998-2003) « Avec cette série télévisée, on a un renversement important : on suit une chasseuse de vampires [jouée par Sarah Michelle Gellar, ndlr] sur plusieurs saisons. À la différence des tueurs de vampires dans les films de la Hammer – qui sont âgés, sérieux, sages –, elle est jeune, sexy, intuitive. En tant qu’élue, elle est habitée par une forme de spiritualité, de force, elle a une dimension christique. On a aussi la figure d’Angel, un vampire qui tombe amoureux. Le vampire, ici, c’est aussi un miroir, l’ado qui doute de lui et qui se sent appartenir à une minorité affective, religieuse, sexuelle ou encore ethnique. »
— : « Vampires. De Dracula à Buffy », jusqu’au 20 janvier à la Cinémathèque française
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Sébastien Lifshitz : Bambi (détail), 2013 - photo : André Nisak © Centre Pompidou, direction de la communication et du numérique, conception graphique : Ch. Beneyton, 2019
RÉTROSPECTIVE ET EXPOSITION EN PRÉSENCE DU CINÉASTE 4 OCTOBRE - 11 NOVEMBRE 2019
SÉBASTIEN LIFSHITZ
Dans le cadre du
En partenariat média avec
9 OCT.
Tout est possible (The Biggest Little Farm) de John Chester, Le Pacte (1 h 32), page 80
Chambre 212 de Christophe Honoré, Memento Films (1 h 27), page 40
La Fameuse Invasion des ours en Sicile de Lorenzo Mattotti, Pathé (1 h 22), page 88
Pour Sama de Waad al-Kateab et Edward Watts, KMBO (1 h 35), page 48
Jacob et les chiens qui parlent d’Edmunds Jansons, Les Films du Préau (1 h 10), page 89
Papicha de Mounia Meddour, Jour2fête (1 h 45), page 62
La Grande Cavale de Christoph et Wolfgang Lauenstein, Septième Factory (1 h 32)
Nos défaites de Jean-Gabriel Périot, Météore Films (1 h 27), page 68
16 OCT.
La Bonne Réputation d’Alejandra Márquez Abella, UFO (1 h 33), page 80
Martin Eden de Pietro Marcello, Shellac (2 h 08), page 80
23 OCT. Sorry We Missed You de Ken Loach, Le Pacte (1 h 40), pages 18 et 66
Au bout du monde de Kiyoshi Kurosawa, Eurozoom (2 h), page 60
Sœurs d’armes de Caroline Fourest, Metropolitan FilmExport (1 h 52), page 68
Camille de Boris Lojkine, Pyramide (1 h 30), pages 24 et 80
Braquer Poitiers de Claude Schmitz, Les Bookmakers / Capricci Films (1 h 25), page 64
Joker de Todd Phillips, Warner Bros. (2 h 02), page 70
Matthias & Maxime de Xavier Dolan, Diaphana (1 h 59), page 28
Hors normes d’Olivier Nakache et Éric Toledano, Gaumont (1 h 54), page 80
Quelle folie de Diego Governatori, New Story (1 h 27), page 70
L’Angle mort de Patrick-Mario Bernard et Pierre Trividic, Rouge (1 h 44), page 72
5 est le numéro parfait d’Igort, Nour Films (1 h 46), page 82
Les Charbons ardents d’Hélène Milano, Jour2fête (1 h 29), page 82
Mon chien Stupide d’Yvan Attal, StudioCanal (1 h 46), page 82
La Belle Époque de Nicolas Bedos, Pathé / Orange Studio (1 h 55), page 74
Serendipity de Prune Nourry, Art House (1 h 14), page 114
Oleg de Juris Kursietis, Arizona (1 h 48), page 82
J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin, Rezo Films (1 h 21), page 76
Terminator Dark Fate de Tim Miller, 20 th Century Fox (2 h 14)
Le Traitre de Marco Bellocchio, Ad Vitam (2 h 31), page 84
Et puis nous danserons de Levan Akin, ARP Sélection (1 h 53), page 78
Un monde plus grand de Fabienne Berthaud, Haut et Court (1 h 40), page 84
Temporada d’André Novais Oliveira, ASC (1 h 52), page 78
Quand passent les cigognes de Mikhaïl Kalatozov, Potemkine (1 h 37), page 16
Retour à Zombieland de Ruben Fleischer, Sony Pictures (1 h 39)
Adults in the Room de Costa-Gavras, Wild Bunch (2 h 04), page 84
Xy Chelsea de Tim Travers Hawkins, Septième Factory (1 h 32), page 72
Doctor Sleep de Mike Flanagan, Warner Bros. (2 h 31)
L’Audition d’Ina Weisse, Les Films du Losange (1 h 39), page 84
30 OCT.
La Cordillère des songes de Patricio Guzmán, Pyramide (1 h 25), page 74
Debout sur la montagne de Sébastien Betbeder, Sophie Dulac (1 h 45), page 82
6 NOV. Une colonie de Geneviève Dulude-De Celles, Wayna Pitch (1 h 42), pages 26 et 76
Furie d’Olivier Abbou, New Story (1 h 38), page 84
Le Voyage dans la Lune de Rasmus A. Sivertsen, KMBO (1 h 20)
ZOOM ZOOM
LES FILMS DU MOIS À LA LOUPE
AU BOUT DU MONDE Reporter pour une émission populaire au Japon, Yoko est envoyée en Ouzbékistan avec son équipe de tournage. Dans ce pays dont elle ne connaît ni la langue ni les coutumes, elle va de rencontres ratées en déambulations hasardeuses, perd son chemin et ses certitudes. Avec Au bout du monde, Kiyoshi Kurosawa déplace sa quête de l’étrangeté dans le réel et signe l’un de ses plus beaux films.
Des
cinéastes japonais de sa génération, que l’on regroupe parfois sous le nom d’« école super 8 », Kiyoshi Kurosawa est celui qui a su le mieux s’affranchir des codes du cinéma de genre. Tandis que Hideo Nakata (Ring, Dark Water) reste assimilé à la J-Horror et Shin’ya Tsukamoto (Tetsuo, Bullet Ballet) au cyberpunk, le natif de Kobe a construit en une vingtaine d’années une œuvre libre et foisonnante, s’imposant comme un auteur qui compte sur la scène internationale. Sans doute parce que, chez lui, le fantastique, le thriller, la sciencefiction sont toujours détournés de leur fonction première (faire peur, divertir), vidés de leurs effets commerciaux (la frénésie laisse place à la contemplation), utilisés comme prétextes pour éclairer les drames humains et sociaux. Il a d’ailleurs prouvé qu’il pouvait s’en passer : ses meilleurs films sont ceux qui s’approchent le plus du cinéma traditionnel, réaliste, comme Tokyo Sonata (2009) et Au bout du monde. On retrouve dans ce dernier le thème central de ses œuvres précédentes, Avant que nous disparaissions et Invasion (2018) : le sentiment d’être étranger
FILMS
© FILM PARTNERS UZBEKKINO
3 QUESTIONS À KIYOSHI KUROSAWA
Au bout du monde est l’un de vos rares films échappant au cinéma de genre. Cela change-t-il votre approche ? Dans les films de genre, il y a toujours deux réalités qui se succèdent et se répondent : celle dans laquelle vit le personnage au quotidien, et celle de l’inconnu qui vient menacer ce quotidien. Dans Au bout du monde, au contraire, on suit l’héroïne du début à la fin, sans avoir accès à ce qui se passe à l’insu de son regard. Ce qu’elle ne sait pas, je ne le montre pas. C’est une manière différente de raconter une histoire. Dans le film, ce n’est pas la culture ouzbèke qui est menaçante, mais l’héroïne qui se sent menacée. Faut-il y lire une critique de la société japonaise ? Je n’emploierais pas forcément le mot de critique, et je ne pense pas que ça ne s’applique qu’aux Japonais. Généralement, quand on se retrouve face à un peuple dont on ne comprend pas la langue, notre première réaction est d’éprouver de la peur, voire de l’hostilité. Comment aller vers l’inconnu ? Comment dépasser cette angoisse ? C’est une question qui me taraude en tant qu’homme et cinéaste. L’autre question que formule Yoko dans le film, c’est : « Que désires-tu vraiment ? » Vous doutez toujours quand vous tournez ? Cette réplique n’était pas dans le scénario, elle m’est venue en tête juste avant de filmer la scène. On était au milieu du tournage, et je commençais à me demander ce que je faisais là, dans ce cadre si différent de celui que je connais à Tokyo. Inconsciemment, je l’ai fait dire au personnage. Sur un tournage, je ne dois surtout pas révéler mes doutes aux acteurs et aux techniciens. Mon boulot, c’est de rassurer tout le monde.
au monde, à l’autre, à soi-même. Sauf que, ici, pas d’envahisseurs venus d’une autre planète, mais une animatrice de télévision japonaise envoyée en Ouzbékistan. Face à cette culture dont elle ignore tout, Yoko se montre à la fois intrépide (elle part seule, à pied, dans des rues où elle finit par s’égarer) et craintive (elle fuit dès qu’on lui adresse la parole). C’est ce décalage que filme Kurosawa, suivant les impératifs du tournage dans le film, dans une suite de scènes tragicomiques (Yoko va pêcher, Yoko mange dans une cantine populaire, Yoko fait du manège) desquelles l’héroïne sort rarement grandie, mais dont l’accumulation dessine peu à peu un chemin initiatique. Ce qu’elle est venue chercher, et qui l’empêche de reculer, c’est une altérité totale, douloureuse, qui révèle son absence à elle-même et l’oblige à trouver sa voie. En tournant le dos au surnaturel, Kurosawa éclaircit sa vision : les aliens existent déjà, sur notre planète, ils nous ressemblent et ne nous veulent, souvent, aucun mal. À chacun de traverser les frontières, géographiques et mentales, pour aller à leur rencontre. • MICHAËL PATIN
— : de Kiyoshi Kurosawa Eurozoom (2 h), sortie le 23 octobre
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FILMS
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PAPICHA
Inspiré
des événements tragiques de la guerre civile algérienne dans les années 1990, Papicha questionne la survie et la résilience par le plus inattendu des sujets : la mode. Nedjma a 18 ans et mène sa vie de jeune fille libre dans une cité universitaire. La nuit, elle se faufile dans les boîtes de nuit d’Alger pour vendre les robes et les accessoires qu’elle crée aux « papichas », les filles coquettes de la capitale. Dans ses pas, on goûte la liberté, la fête, le désir. Mais, petit à petit, une ombre se met à planer : celle de l’intégrisme, qui fait peser le poids de regards accusateurs et moralisateurs sur ces filles. Quand l’horreur survient, Nedjma décide de ne pas plier et veut à tout prix organiser un défilé de mode comme un rempart face à ce monde noir et oppressif qui s’annonce. L’enjeu pourrait faire sourire tant il paraît vain au vu de la complexité et de la violence d’un pays déchiré par la guerre. Mais, par ce simple déplacement du regard, la réalisatrice révèle avec force l’urgence face à la mort des libertés. Quand le futile est attaqué, c’est que l’essentiel est en danger. En restant au plus près de son héroïne furieuse, pure puissance du désespoir (jusqu’à une forme d’inconscience), Mounia
Meddour prend le pouls de la jeunesse et tend évidemment un miroir à notre époque. Situé dans les années 1990, le film ne cesse d’adresser au spectateur un regard frondeur, l’interpelle sur les victoires et les défaites d’hier pour lui dire aujourd’hui de rester vigilant. Surtout, Papicha offre par la force de son casting d’actrices déchirantes, drôles, puissantes (avec en tête Lyna Khoudri, révélation des Bienheureux de Sofia Djama en 2017), par son regard sensible sur l’importance du plaisir, le sentiment conquérant d’un féminisme inaltérable. Si parfois les curseurs du mélodrame sont poussés un peu loin, ces excès ne sont que le reflet de la colère, de l’urgence d’un film qui s’inquiète de demain. Comme un écho au choc traumatique du livre de Margaret Atwood La Servante écarlate et de la série qui en est tirée, Papicha pense le féminisme comme une liberté fondamentale, une façon quotidienne de ne rien lâcher aux mains de ceux qui veulent enfermer les corps et faire taire les esprits. • RENAN CROS
Un défilé de mode comme un rempart face au monde noir qui s’annonce.
— : de Mounia Meddour, Jour2fête (1 h 45), sortie le 9 octobre
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GLORIA FILMS PRODUCTION
ET
LES FILMS DU PRINTEMPS
PRÉSENTENT
BASTIEN
IZÏA
N O L L I U O B N I L E LEBGHIL HIG WILLIAM
T U O DEBONTAGNE
SUR LA
M
UN FILM DE
R E D E B T E B N E I T S A B SÉ
D’APRÈS PHOTO : © CLAIRE NICOL
AVEC LA PARTICIPATION DE
JÉRÉMIE
ELKAÏM
GUILLAUME
LABBÉ
ESTÉBAN
LAËTITIA
SPIGARELLI
FRANÇOIS
CHATTOT
RABAH
NAIT OUFELLA
PAULINE
LORILLARD
DOMINIQUE
BAEYENS
ANDRÉ
WILMS
SCÉNARIO SÉBASTIEN BETBEDER PRODUIT PAR LAURENT LAVOLÉ ET JULIETTE HAYAT IMAGE SYLVAIN VERDET SON ROMAN DYMNY MUSIQUE ORIGINALE SOURDURE 1ER ASSISTANT RÉALISATEUR ANTHONY MOREAU MONTAGE CÉLINE CANARD DÉCORS AURORE CASALIS COSTUMES LÉA FOREST MAQUILLAGE-COIFFURE EVA GORSZCZYK CASTING LAURE COCHENER, FANNY DE DONCEEL DIRECTION DE PRODUCTION KARIM CANAMA RÉGIE ÉRIC MARTIN DIRECTION DE POST-PRODUCTION DIANE THIN UNE PRODUCTION GLORIA FILMS PRODUCTION, LES FILMS DU PRINTEMPS EN COPRODUCTION AVEC AUVERGNE-RHÔNE-ALPES CINÉMA, COLOR AVEC LA PARTICIPATION DE CANAL+, CINE+ EN ASSOCIATION AVEC CINECAP 2 AVEC LA PARTICIPATION DE LA RÉGION AUVERGNE-RHÔNE-ALPES, CENTRE NATIONAL DU CINÉMA ET DE L’IMAGE ANIMÉE VENTES INTERNATIONALES WTFILMS DISTRIBUTION FRANCE SOPHIE DULAC DISTRIBUTION © GLORIA FILMS – LES FILMS DU PRINTEMPS – AUVERGNE-RHÔNE-ALPES CINÉMA – COLOR
www.sddistribution.fr
AU CINÉMA LE 30 OCTOBRE
FILMS
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BRAQUER POITIERS
La
singularité de cette chronique belgo-poitevine ne s’arrête pas à sa redéfinition du syndrome de Stockholm. Par sa façon d’immerger la fiction dans le réel, Braquer Poitiers fascine autant qu’il amuse. Deux bandits à la petite semaine décident de séquestrer Wilfrid, un propriétaire de stations de lavage de voitures, afin de lui extorquer des fonds. Loin de résister, celui-ci les accueille chez lui à bras ouverts, sans intention de s’enfuir. Entièrement improvisé, le film du Belge Claude Schmitz ressemble moins à une comédie noire qu’à un récit de vacances : baignades, repas qui s’éternisent, visites touristiques… La vie serait presque un long fleuve tranquille s’il n’y avait la personnalité débordante de Wilfrid, adepte des monologues extatiques, et le manque de conscience professionnelle des voyous,
heureusement épaulés par deux jeunes femmes venues leur rendre visite. Le tout forme un portrait de groupe faussement décontracté, dans lequel les tensions sont légion et le flottement est roi. Schmitz, c’est Kervern et Delépine sans le vitriol, mais avec la même science du timing, le même amour des gens. Le films est en réalité un double programme : aux 59 minutes de Braquer Poitiers s’ajoute un documentaire de 26 minutes, Wilfrid, où ce ne sont plus les personnages mais leurs interprètes qui se retrouvent pour consolider les liens créés sur le tournage. Un complément idéal, différent mais aussi atypique. • THOMAS MESSIAS
— : de Claude Schmitz
Les Bookmakers / Capricci Films (1 h 25), sortie le 23 octobre
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3 QUESTIONS À CLAUDE SCHMITZ Braquer Poitiers est marqué par une volonté de jouer avec les archétypes… Ça m’intéresse beaucoup. N’ayant pas de scénario, je voulais des personnages très marqués, faciles à promener d’une situation à l’autre, mais qui puissent révéler d’autres facettes. Il y a des Belges, des filles étiquetées « cagoles », et pourtant on est loin d’une grosse comédie.
Comment fait-on converger des personnages a priori incompatibles ? La situation du braquage était proche de celle du tournage, sans la séquestration bien sûr. Nous avons cohabité chez Wilfrid pendant huit jours. Cela crée forcément du lien. La naissance de l’amitié entre les protagonistes m’a cueilli, tout comme j’espère elle cueillera le public. 64
L’existence de la deuxième partie, Wilfrid, n’était pas prévue au départ. Pourquoi cet ajout ? Pendant le montage, Wilfrid m’a téléphoné pour me décrire son sentiment d’inachevé. L’intrigue de Braquer Poitiers était bouclée, mais j’ai eu l’idée de ces retrouvailles entre acteurs et actrices, que je vois comme un travail sur les différents niveaux de fiction et d’incarnation.
THEOPHILE PREMIER EP
ACTUELLEMENT DISPONIBLE
Son 1er EP révèle à la fois son souci du sentiment juste, son aspiration à lʼenvol et lʼacidité de son regard sur la société. Avec un lyrisme contenu à la Dominique A ou Bertrand Belin, des arrangements panoramiques à la Woodkid et une production travaillée. On imagine volontiers T H E O P H I L E en Brassens avec une MPC. EN ÉCOUTE SUR
RETROUVEZ LE CLIP DE
PARS
SUR
.COM
EN CONCERT 16/10 MaMA Conventions - Magnum Club - Paris 20/11 Fédéchansons - Les trois baudets - Paris
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SORRY WE MISSED YOU
Portrait
d’une famille exposée aux risques de l’ubérisation, le film de Ken Loach dissèque habilement les mirages de la nouvelle économie et offre une tragédie moderne d’une densité inattendue. Infatigable, Ken Loach ? Le cinéaste de 83 ans, auréolé en 2016 d’une deuxième Palme d’or avec Moi. Daniel Blake, s’attaque ici aux effets dévastateurs de l’ubérisation, récente mutation économique aux faux airs de révolution. Sorry We Missed You suit les pas de Ricky, père de famille embauché comme chauffeur livreur pour une entreprise de livraison à bas coût. Le vocabulaire utilisé dans la séquence d’ouverture souligne d’emblée les paradoxes de la situation : Ricky est théoriquement travailleur à son compte, mais il loue une camionnette à la société qui l’emploie et qui le soumet vite à une cadence infernale. Voyant là une opportunité de rembourser les dettes du foyer, il travaille d’arrache-pied et adopte le même rythme que son épouse, Abby, auxiliaire de vie qui doit être disponible pour ses patients à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit… Ken Loach dépeint, à l’aide de son fidèle scénariste Paul Laverty, un équilibre familial miné par un système économique qui expose à tous les risques et les contretemps
et installe une barrière croissante entre le couple de parents et leurs deux enfants. Une des forces du film consiste ainsi à ménager, au milieu de l’engrenage mécanique, un possible horizon de respiration ; la convivialité de la ville de Newcastle est entraperçue, mais les personnages n’ont tout simplement pas le temps de la savourer. Au moyen d’une caméra qui chorégraphie habilement l’angoisse sourde et déshumanisée du dépôt de distribution par lequel transite sans cesse Ricky, le cinéaste britannique rappelle que, si les technologies sont nouvelles, l’exploitation des travailleurs demeure inchangée. Fin observateur de la progressive disparition de la solidarité, Ken Loach brocarde le stade ultime atteint par l’individualisme à travers cette course ininterrompue contre la montre. La poignante séquence finale laissera alors le public se forger un avis quant au sort des personnages, manière pour le cinéaste d’en appeler une dernière fois à la collectivité dans un monde où elle fait désormais cruellement défaut. • DAMIEN LEBLANC
Si les technologies sont nouvelles, l’exploitation des travailleurs demeure inchangée.
— : de Ken Loach,
Le Pacte (1 h 40), sortie le 23 octobre
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MICHELE RAY-GAVRAS
ET
ALEXANDRE-GAVRAS
PRÉSENTENT
CHRISTOS LOULIS
“Money can’t buy me love” THE BEATLES
UN FILM DE
COSTA-GAVRAS
ADULTS IN THE ROOM D’APRÈS LE BEST-SELLER DE
PHOTO : JESSICA FORDE © KG PRODUCTIONS
YANIS VAROUFAKIS ALEXANDROS BOURDOUMIS
ULRICH TUKUR
DAAN SCHUURMANS
CORNELIUS OBONYA
JOSIANE PINSON
DIMITRIS TARLOW
CHRISTOS STERGIOGLOU
THEMIS PANOU
THANOS TOKAKIS
ALEXANDROS LOGOTHETIS
LE 6 NOVEMBRE
AURÉLIEN RECOING
VINCENT NEMETH
GEORGE LENZ
AVEC LA PARTICIPATION DE
VALÉRIA
GOLINO
FILMS
NOS DÉFAITES
— : de Jean-Gabriel Périot, Météore Films (1 h 27), sortie le 9 octobre
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Que
reste-t-il de la jeunesse de Mai 68 ? C’est la question que s’est posée Jean-Gabriel Périot avec Nos défaites, documentaire dans lequel des élèves d’une classe de première rejouent des scènes de films issus de cette période historique. À ces quelques séquences, qui prennent la forme de pastiches ludiques dans lesquels les lycéens apprennent de concert à fabriquer des films et à travailler leur éloquence, s’ajoutent des entretiens où cette poignée de jeunes dévoile son manque de confiance vis-à-vis de la politique et de l’art de la contestation. Leur horizon se dessine alors au cours d’émouvants témoignages : ces lycéens sont aussi tolérants et ouverts que pragmatiques et désenchantés, peu emballés à l’idée de faire aujourd’hui partie d’une révolution. Si ce modeste dispositif peut paraître un brin limité, le film finit par l’emporter lorsque, justement, il se heurte au contemporain, à l’image d’une scène de reconstitution finale au cours de laquelle le groupe reproduit l’interpellation indigne des cent quarante-huit lycéens de Mantes-la-Jolie, menottés et agenouillés par les forces de l’ordre en décembre 2018. • CORENTIN LÊ
SŒURS D’ARMES
— : de Caroline Fourest, Metropolitan FilmExport (1 h 52), sortie le 9 octobre
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Dans
une région du Moyen-Orient ébranlée par la propagation de l’obscurantisme, Zara (Dilan Gwyn), une jeune rescapée yézidie, est enlevée, isolée de sa famille, puis vendue comme esclave à un djihadiste. Dans le même temps, Kenza (Camélia Jordana) et Yaël (Esther Garrel), deux jeunes Françaises, s’engagent aux côtés des combattantes kurdes et rejoignent un camp d’entraînement réservé aux femmes. Elles intègrent un groupe cosmopolite mené par une commandante kurde (Amira Casar), respectée de toutes, avant de croiser la route de Zara… Dans ce récit de guerre à grand spectacle, la résistance à l’oppression se construit en groupe, en dépit des disparités socioculturelles, mais aussi (et surtout) entre femmes, pour mieux retourner contre lui la misogynie rance d’un ennemi dopé à la haine. En se concentrant sur les trajectoires respectives de deux Françaises et d’une survivante yézidie a priori éloignées des violents combats qui essaiment ce territoire pris entre deux feux, le film souligne le fait que, même quand la liberté est définitivement menacée, il est encore possible de prendre les armes. • CLAUDE GARCIA
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22H22 ET APC PRÉSENTENT
ADAMA NIANE
STÉPHANE CAILLARD
PAUL HAMY
INSPIRÉ DE FAITS RÉELS
UN FILM DE OLIVIER
ABBOU
UNE HISTOIRE DE AURÉLIEN MOLAS SCÉNARIO DE AURÉLIEN MOLAS ET OLIVIER
ABBOU
LE 6 NOVEMBRE
.fr
FILMS
JOKER
— : de Todd Phillips, Warner Bros. (2 h 02), sortie le 9 octobre
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Consacré
à la Mostra de Venise à la surprise générale, Joker scelle avec panache la longue histoire d’amour entre le cinéma et la némésis de Batman. Jack Nicholson, Heath Ledger, Jared Leto : la liste des stars ayant campé le clown au sourire de sang ne manquait déjà pas de prestige. Mais il faudra désormais compter avec Joaquin Phoenix, qui permet à la franchise de révéler ce que tout le monde savait déjà : sous le maquillage mal barbouillé du monstre se dissimule en fait… un autre monstre. Le film de Todd Phillips s’emploie ainsi à revenir sur la transformation sans retour d’un psychotique des quartiers pauvres (le fils à maman Arthur Fleck) en prophète anarchisant du lugubre Gotham (Joker). Mais, davantage qu’un basculement moral, cette mutation est ici le fait d’une opération médiatique, observant le personnage glisser en quelques maladresses criminelles de l’anonymat vers la célébrité. Peu importe les motivations, du moment qu’on ait la gloire : c’est certainement le visage le plus sincère, et le plus séduisant, de ce Joker pastichant efficacement mais sans vergogne l’imaginaire des premiers Scorsese (Taxi Driver, La Valse des pantins). • LOUIS BLANCHOT
QUELLE FOLIE
— : de Diego Governatori, New Story (1 h 27), sortie le 9 octobre
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Dans
ce documentaire passionnant, Diego Governatori exorcise le mal-être d’un ami de longue date, atteint du syndrome d’Asperger, et en tire un portrait flamboyant. Sous une chaleur écrasante, Aurélien livre ses réflexions à voix haute. Il parle d’une douleur qui l’envahit corps et âme, anéantissant son rapport au monde. Plus tard, dans l’ivresse d’une feria de Pampelune, Diego filme son ami qui déambule vêtu de noir parmi les fêtards en blanc et rouge, jeté dans l’arène d’une société dont les codes l’oppressent et qui refuse de comprendre sa différence… Filmeur et filmé se fraieront pourtant un chemin dans la foule, aussi sinueux soit-il. La matière du film, c’est la parole d’Aurélien – une parole qui s’échappe de ses lèvres comme par magie, dans un collage mêlant introspections et métaphores d’une extraordinaire clairvoyance. La juxtaposition de ce flux discontinu aux images, terribles, du lâcher de taureaux de la San Fermín donne lieu à de grands moments de poésie. C’est que le rôle du cinéaste, ici, est bien de redonner à Aurélien une place dans ce monde, à la mesure de son humanité bouleversante. • DAVID EZAN
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UN ÉVÉNEMENT TÉLÉRAMA
MAGNIFIQUE PREMIÈRE
ANNECY 2019
GRAND PRIX
CANNES 2019
GRAND PRIX
SEMAINE DE LA CRITIQUE
LE MONDE
ANNECY 2019
PRIX DU PUBLIC
UN FILM DE
JÉRÉMY CLAPIN PRODUIT PAR
CONCEPTION DE L’AFFICHE : JÉRÉMY CLAPIN © XILAM ANIMATION – TOUS DROITS RÉSERVÉS
MARC DU PONTAVICE
LE 6 NOV.
MUSIQUE ORIGINALE
UNE PRODUCTION XILAM ANIMATION ADAPTATION ET DIALOGUES JÉRÉMY CLAPIN ET GUILLAUME LAURANT D’APRÈS L’ŒUVRE « HAPPY HAND » DE GUILLAUME LAURANT DAN LEVY AVEC LES VOIX DE HAKIM FARIS VICTOIRE DU BOIS PATRICK D’ASSUMÇAO EN COPRODUCTION AVEC AUVERGNE-RHÔNE-ALPES CINÉMA EN ASSOCIATION AVEC SOFITVCINÉ 6 ET INDÉFILMS 7 LA RÉGION ÎLE-DE-FRANCE LA RÉGION RÉUNION LA RÉGION AUVERGNE-RHÔNE-ALPES ET L’ANGOA AVEC LA PARTICIPATION DU CENTRE NATIONAL DU CINÉMA ET DE L’IMAGE ANIMÉE DISTRIBUTION FRANCE REZO FILMS VENTES INTERNATIONALES CHARADES © 2019 - XILAM ANIMATION - AUVERGNE-RHÔNE-ALPES CINÉMA
AVEC LE SOUTIEN DE
FILMS
L’ANGLE MORT
— : de Patrick-Mario Bernard et Pierre Trividic, Rouge (1 h 44), sortie le 16 octobre
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Que
faire de son don d’invisibilité ? Onze ans après L’Autre, le duo le plus discret du cinéma français, Pierre Trividic et Patrick-Mario Bernard, ressurgit avec une fable sur un héros évanescent, dont le pouvoir se détraque à l’aube de la quarantaine. À l’heure de l’hégémonie Marvel, parlons plutôt d’antihéros : Dominick (Jean-Christophe Folly) mène une vie parisienne bien ordinaire, partagée entre un job dans un magasin de guitares et des soirées « sushis-couette » avec sa copine Viveka (radieuse Isabelle Carré). Alors qu’il vit avec son casque vissé sur les oreilles, son entourage lui reproche son perpétuel isolement. Dominick n’a confessé son talent à personne, et il ne sait qu’en faire depuis le lycée et ses prohibés vestiaires féminins… Dans un Paris glacial, les deux cinéastes questionnent l’ambivalence de l’invisibilité, tantôt refuge salvateur (contre cette maudite sonnerie de smartphone, par exemple), tantôt menant à l’abandon (les marginaux et les minorités invisibilisés par la société). Maintes fois arpenté depuis L’Homme invisible de James Whale (1933), le mythe s’avère décidément inépuisable. • GAUTIER ROOS
XY CHELSEA
— : de Tim Travers Hawkins, Septième Factory (1 h 32), sortie le 30 octobre
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Après
avoir transmis à WikiLeaks des centaines de milliers de documents militaires classés secret défense sur les agissements de l’armée américaine, Chelsea Manning est arrêtée en 2010 et condamnée à trente-cinq années de détention pour trahison. Bénéficiant d’une remise de peine accordée par Barack Obama à quelques jours de la fin de sa présidence, elle sort finalement de prison en mai 2017… Lorgnant vers les documentaires réalisés par Laura Poitras (Citizenfour sur le lanceur d’alerte Edward Snowden ou Risk sur le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange), XY Chelsea prend place au moment de la libération de Manning pour suivre sa lente reconstruction. C’est que l’ex-analyste militaire, en plus d’avoir mis son pays face à ses propres exactions, a entamé une transition de genre derrière les barreaux et s’est révélée comme l’une des nouvelles porte-drapeau des droits des personnes LGBTQ. Dans le creux de cette vibrante trajectoire politique se déploie ainsi un portrait intime et existentiel qui parvient à sonder ses fêlures intérieures tout en prenant la pleine mesure des enjeux colossaux qui pèsent sur ses jeunes épaules. • CORENTIN LÊ
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“PERSONNE N’EST PLUS ARROGANT ENVERS LES FEMMES, PLUS AGRESSIF OU MÉPRISANT, QU’UN HOMME INQUIET POUR SA VIRILITÉ.” SIMONE DE BEAUVOIR
Propaganda Productions présente En coproduction avec Eklektik Productions et Les Films de l’Après-Midi
TORONTO DISCOVERY
SAN SEBASTIÁN NEW DIRECTORS
CARTHAGE JOURNÉES CINÉMATOGRAPHIQUES
HEND
SABRI
LOTFI
ABDELLI
FESTIVAL EL GOUNA EGYPTE
MONTPELLIER CINEMED
HAKIM
BOUMSAOUDI
Noura rêve
un film de
HINDE BOUJEMAA
Graphisme : la gachette © Photo : Axel Derriks
Produit par PROPAGANDA PRODUCTIONS en co-production avec EKLEKTIK PRODUCTIONS et LES FILMS DE L’APRÈS-MIDI avec l’aide du MINISTÈRE DES AFFAIRES CULTURELLES DE TUNISIE CENTRE NATIONAL DU CINÉMA ET DE L’IMAGE avec l’aide du CENTRE DU CINEMA ET DE L’AUDIOVISUEL DE LA FÉDÉRATION WALLONIE-BRUXELLES en coproduction avec SHELTER PROD avec le soutien de TAXSHELTER.BE et ING avec le soutien du TAX SHELTER DU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL DE BELGIQUE avec le soutien du CENTRE NATIONAL DU CINÉMA ET DE L’IMAGE ANIMÉE et du CENTRE NATIONAL DU CINÉMA ET DE L’IMAGE AIDE À LA COPRODUCTION FRANCO-TUNISIENNE avec le soutien de la Région ILE-DE-FRANCE FONDS IMAGE DE LA FRANCOPHONIE DOHA FILM INSTITUTE avec HEND SABRI LOTFI ABDELLI HAKIM BOUMSAOUDI image MARTIN RIT son MARIE PAULUS décoration RAUF HELIOUI montage image NICOLAS RUMPL montage son JULIEN MIZAC producteur associé OMAR BEN ALI producteur IMED MARZOUK coproducteurs MARIE BESSON SAMUEL TILMAN TATJANA KOZAR FRANÇOIS D’ARTEMARE scénario et réalisation HINDE BOUJEMAA
AU CINÉMA LE 13 NOVEMBRE
BORDEAUX FIFIB
FILMS
LA CORDILLÈRE DES SONGES
— : de Patricio Guzmán, Pyramide (1 h 25), sortie le 30 octobre
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Bien
qu’exilé en Europe depuis 1974, le Chilien Patricio Guzmán a toujours sa patrie dans la peau. Après avoir parcouru le nord du pays dans Nostalgie de la lumière (2010) puis le sud dans Le Bouton de Nacre (2015), il conclut sa dernière trilogie documentaire en beauté avec ce puissant film qui a obtenu cette année l’Œil d’or au Festival de Cannes. Dans un geste presque désespéré de lutte contre l’oubli, le cinéaste relie le passé du Chili (le coup d’État traumatisant de Pinochet en 1973) à sa géographie (l’altière cordillère des Andes, filmée dans de somptueux plans comme une métaphore d’une fierté nationale qui confine parfois au déni). Composée de témoignages d’amis artistes, sa fresque poétique prend un détour plus grave quand elle se focalise sur Pablo Salas, réalisateur resté au pays qui a filmé la résistance à travers des documentaires dont on voit de bouleversants extraits. Tout en pensant au récent Santiago, Italia de Nanni Moretti, qui raconte comment l’ambassade italienne a recueilli des Chiliens fuyant la répression, on sort de ce film rempli d’échos et de fantômes comme on sortirait d’une grotte : inondés d’une lumière qui révèle la force de ce pays décidément fascinant. • JOSÉPHINE LEROY
LA BELLE ÉPOQUE
— : de Nicolas Bedos, Pathé / Orange Studio (1 h 55), sortie le 6 novembre
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Variation
hexagonale autour de films comme The Game de David Fincher ou The Truman Show de Peter Weir, la deuxième réalisation de Nicolas Bedos imagine les aventures d’un bédéiste sexagénaire désabusé (Daniel Auteuil) à qui une entreprise spécialisée propose de revivre l’époque de son choix. L’intéressé, qui vient d’être mis dehors par son épouse (Fanny Ardant), opte pour la journée de 1974 où il rencontra le grand amour. Mais la comédienne qui interprète cette femme du passé est aussi la petite amie du colérique metteur en scène de cette reconstitution historique. Une grande confusion des sentiments va perturber le quatuor de personnages… En traitant de manipulation temporelle et de fabrication du faux, cette comédie dramatico-romantique joue malicieusement avec la nostalgie et la peur du vieillissement qui cueillent les baby-boomeurs à l’approche de l’an 2020. Si la tendance à l’autoportrait cinglant de Nicolas Bedos vampirise parfois le récit, la rencontre entre l’artifice théâtral et le souffle romanesque crée une tonalité singulière. Comme si le cinéma de Claude Sautet croisait la philosophie du simulacre de Jean Baudrillard. • DAMIEN LEBLANC
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«MAGISTRAL» LE MONDE
PREMIÈRE
ROUGE DISTRIBUTION PRÉSENTE UNE PRODUCTION EX NIHILO
JEAN-CHRISTOPHE FOLLY ISABELLE CARRÉ GOLSHIFTEH FARAHANI SAMI AMEZIANE
CRÉDITS NON CONTRACTUELS
(Le Comte de Bouderbala)
un film de
PATRICK MARIO BERNARD et PIERRE TRIVIDIC
AU CINÉMA LE 16 OCTOBRE
FILMS
UNE COLONIE
— : de Geneviève DuludeDe Celles, Wayna Pitch (1 h 42), sortie le 6 novembre
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Après
le documentaire Bienvenue à F. L. (2015) consacré aux aspirations adolescentes, la Canadienne Geneviève Dulude-De Celles prolonge l’exploration de ces thématiques dans un premier long métrage de fiction troublant. Mylia (Émilie Bierre, lire p. 26), jeune fille lunaire de la campagne québécoise, s’apprête à faire sa rentrée au secondaire (la classe de cinquième en France) dans une grande école urbaine… La mise en scène, à rebours de tout sentimentalisme, scrute la jeunesse dans ses imperfections et ses incertitudes les plus opaques. Avec une économie de dialogues et une rigueur d’anthropologue exemplaires, la cinéaste décrit l’angoisse de cette jungle où la soumission, de soi ou des autres, est le seul chemin vers l’affirmation : celui de Mylia devra, lui, passer par la découverte de son corps, puis par la mise à nu de sentiments qu’elle n’a jamais osé exprimer. En investissant l’inconscient le plus secret de son héroïne, Une colonie dégage par moments une apesanteur presque inquiétante qui évoque le spleen adolescent. De cette matière, la cinéaste tire l’anti-teen movie par excellence. • DAVID EZAN
J’AI PERDU MON CORPS
— : de Jérémy Clapin, Rezo Films (1 h 21), sortie le 6 novembre
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Grand
Prix de la dernière Semaine de la critique, J’ai perdu mon corps, premier long métrage de Jérémy Clapin, tisse deux histoires qui, progressivement, se rejoignent. D’abord, celle d’une main coupée échappée d’un laboratoire, errant tant bien que mal pour retrouver son corps. Ensuite celle du rêveur Naoufel, un livreur de pizza intrigué par Gabrielle, une bibliothécaire qui lui passe commande… La force poétique de ce premier long métrage réside en son aspect sensoriel, une gageure pour un film d’animation. Pour obtenir ce rendu, Clapin est passé par un procédé qui donne aux personnages une vraie corporéité – animés en images de synthèse, ils sont ensuite recouverts de dessins traditionnels en 2D. Mais c’est surtout grâce à la mise en scène de flash-back en point de vue subjectif liés à l’enfance de Naoufel que le cinéaste parvient à rendre palpables certaines sensations universelles (le sable tiède dans la main…). Il engage alors plus fortement le spectateur dans l’identification, le projetant autant dans les atermoiements amoureux de Naoufel et Gabrielle que dans le désarroi de la main tranchée. • QUENTIN GROSSET
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FILMS
ET PUIS NOUS DANSERONS
— : de Levan Akin, ARP Sélection (1 h 53), sortie le 6 novembre
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ZOOM
Le
jeune cinéaste suédois Levan Akin est retourné filmer dans sa Géorgie natale ce drame à fleur de peau sur l’affranchissement du corps par la danse. Dans un institut traditionnel (l’Ensemble national géorgien) où s’entraînent une vingtaine d’élèves sous la coupe d’un professeur tyrannique, Merab et Mary entretiennent une relation platonique depuis des années. Le désir bouillonnant de Merab, jusqu’alors contenu par l’exigence physique de la danse, finit par affleurer devant l’aura érotique d’Irakli, un nouvel élève. Par le prisme de chorégraphies rigidement codifiées, Levan Akin donne à voir, caméra au poing, l’émergence d’une génération qui grandit dans un pays où l’intimité n’est pas permise et où les marges sont rejetées. Parmi ces corps qui souffrent et les mots qui fusent, il intercepte ce qu’il y a de plus précieux : le feu qui surgit, sans crier gare, dans les yeux de ses protagonistes. En célébrant la danse comme affirmation de soi au-delà de toute sujétion, Et puis nous danserons conjugue de façon édifiante sa portée politique aux puissances allégoriques et évocatrices du cinéma. • DAVID EZAN
TEMPORADA
— : d’André Novais Oliveira, ASC (1 h 52), sortie le 6 novembre
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Juliana
quitte sa petite ville brésilienne, Itaúna, pour une bien plus imposante, Contagem, où elle a trouvé un job. Seule en attendant que son mari la rejoigne, la jeune femme s’adapte à son nouvel emploi, lequel consiste à faire du porte-à-porte pour prévenir la propagation de la dengue. Au rythme des quotas de visites imposés par la municipalité (ni trop ni trop peu), Juliana multiplie les contacts avec la population locale et prend le temps de rencontrer ses nouveaux collègues. Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, l’héroïne (Grace Passô, idéale) partage petites histoires et grands malheurs avec un sourire qui ne la quitte quasiment pas… Ce deuxième long d’André Novais Oliveira a quelque chose du Brooklyn Boogie de Wayne Wang et Paul Auster (1996) : on y comprend que, si certains quartiers ne perdent jamais leur âme, c’est parce que l’art de la transmission orale continue de s’y exercer. Temporada aurait tout pour être plombant, mais le réalisateur brésilien a choisi la lumière : chaque plan témoigne de son amour sincère pour celles et ceux qui, malgré tout, persistent à croire aux lendemains. • THOMAS MESSIAS
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FILMS TOUT EST POSSIBLE
Un couple décide de tout plaquer pour monter une ferme écoresponsable dans la campagne californienne… Parfait complément à l’excellente série Netflix Notre planète, ce documentaire haletant suit sur cinq ans leur aventure, faite de joies et de désillusions, pour délivrer un témoignage plein d’espoir sur la transition que l’on doit entreprendre. • J. L .
— : de John Chester (Le Pacte, 1 h 32), sortie le 9 octobre
LA BONNE RÉPUTATION
Mexique, 1982. Entre cours de tennis, salons de thé et autres fêtes mondaines, Sofia mène grand train et ne voit pas venir la crise financière qui provoque le déclassement de sa famille. Fière, elle veut sauver les apparences… Comme avec Desperate Housewives, la jouissance de voir les masques tomber laisse place à l’empathie pour une héroïne qui a rêvé trop grand. • J. L .
— : d’Alejandra Márquez Abella (UFO, 1 h 33), sortie le 16 octobre
MARTIN EDEN
Après avoir rencontré une jeune bourgeoise qui lui donne le goût des arts et de la littérature, un prolétaire napolitain devient un écrivain aussi admiré que controversé… Cette adaptation italienne du célèbre roman de Jack London révèle le jeu magnétique de Luca Marinelli, convaincant sous les traits d’un Martin Eden fougueux et envoûtant. • C. L .
— : de Pietro Marcello (Shellac, 2 h 08),
sortie le 16 octobre
CAMILLE
En mai 2014, la photoreporter française Camille Lepage a été retrouvée morte en Centrafrique, où elle couvrait la guerre civile. Le Français Boris Lojkine a tiré de ce drame une fiction profonde qui capte à la fois l’empathie totale de la photographe, incarnée par la solaire Nina Meurisse (lire p. 24), et la douleur de ce pays qu’elle découvre. • J. L .
— : de Boris Lojkine (Pyramide, 1 h 30), sortie le 16 octobre
HORS NORMES
Bruno (Vincent Cassel) et Malik (Reda Kateb) accueillent des enfants autistes et permettent à des jeunes issus de quartiers défavorisés de devenir éducateurs… Éric Toledano et Olivier Nakache (Intouchables, Le Sens de la fête) continuent de sonder les inégalités pour mieux affirmer que l’esprit d’équipe est la condition sine qua non de toute réconciliation sociale. • C. L .
— : d’Olivier Nakache et Éric Toledano (Gaumont, 1 h 54), sortie le 23 octobre
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FILMS 5 EST LE NUMÉRO PARFAIT
Dans les années 1970, Peppino Lo Cicero (Toni Servillo), un redoutable tueur à gages qui pensait en avoir fini avec la pègre napolitaine, reprend du service après l’assassinat de son fils et déclenche une guerre entre plusieurs clans mafieux… Les cadavres s’amoncellent dans ce thriller désabusé et ultraviolent qui prend place dans un Naples malfamé. • C. L .
— : d’Igort (Nour Films, 1 h 46), sortie le 23 octobre
LES CHARBONS ARDENTS
Après un docu centré sur les filles de banlieue (Les Roses noires, 2012), Hélène Milano donne la parole aux garçons des lycées professionnels. En résulte ce documentaire sur les codes masculins en regard de notre époque, et sur l’amertume qui sourd derrière l’insouciance de ces jeunes des classes populaires qui « charbonnent » sous l’œil d’une société qui les juge. • D. E .
— : d’Hélène Milano (Jour2fête, 1 h 29), sortie le 23 octobre
OLEG
Le jeune Oleg quitte la Lettonie pour travailler comme boucher à Bruxelles. Très vite, il perd son emploi et se retrouve à la merci d’une petite frappe particulièrement malveillante… Montré à la Quinzaine des réalisateurs en mai, ce film social éclaire sans fard les conditions de vie des travailleurs détachés pour dresser le portrait d’une Europe des laissés-pour-compte. • C. L .
— : de Juris Kursietis (Arizona, 1 h 48), sortie le 30 octobre
MON CHIEN STUPIDE
Un écrivain (Yvan Attal) qui a jadis connu le succès estime que sa femme (Charlotte Gainsbourg) et ses enfants sont responsables de ses échecs. Quand il adopte Stupide, un grand chien mal élevé, son foyer vole en éclats… Adapté du roman de John Fante, cette comédie à l’humour cynique s’ouvre peu à peu sur la remise en question touchante de son héros dépressif. • J. L .
— : d’Yvan Attal (StudioCanal, 1 h 46), sortie le 30 octobre
DEBOUT SUR LA MONTAGNE
Stan, Hugo et Bérénice, trois amis d’enfance éloignés par la vie, sont réunis à l’occasion d’un enterrement dans le village montagneux où ils ont grandi… Sébastien Betbeder (2 automnes, 3 hivers) trouve l’équilibre juste entre la drôlerie et la mélancolie pour faire affleurer le passé éraflé de ces trois paumés qui respirent enfin. • Q. G.
— : de Sébastien Betbeder (Sophie Dulac, 1 h 45), sortie le 30 octobre
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ArnAud dommerc e t JHr Films présentent
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13nov
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FILMS LE TRAÎTRE
Grand radiographe des tourments de l’Italie du xxe siècle, Marco Bellocchio retrace ici l’histoire de Tommaso Buscetta, repenti de la mafia sicilienne qui témoigna auprès du juge Falcone. Entre deux règlements de comptes familiaux, le film se distingue par ses séquences au tribunal dans lesquelles la parole devient l’instrument de tensions hautement mélodramatiques. • D. L .
— : de Marco Bellocchio (Ad Vitam, 2 h 31),
sortie le 30 octobre
UN MONDE PLUS GRAND
Très marquée par la mort de son mari, Corine (Cécile de France) tente de se remettre au boulot en se rendant en Mongolie pour y enregistrer des chants traditionnels. Elle y rencontre une chamane qui l’initie à ses rites… Ce drame sensible étonne par ses séquences immersives conçues comme des étapes vers la guérison d’une héroïne pleine de ressources. • J. L .
— : de Fabienne Berthaud (Haut et Court, 1 h 40), sortie le 30 octobre
ADULTS IN THE ROOM
Retraçant le parcours de l’ex-ministre grec des Finances Yánis Varoufákis à partir de son élection comme député en 2015, cette fiction politique un peu lisse infiltrant les coulisses du pouvoir vaut surtout pour ses séquences de logorrhées caustiques autour de tables rondes… Costa-Gavras prend un malin plaisir à ridiculiser des décideurs européens cupides et infantiles. • D. E .
— : de Costa-Gavras (Wild Bunch, 2 h 04), sortie le 6 novembre
FURIE
En rentrant de vacances, un couple trouve porte close : les serrures de leur maison ont été changées et ceux qui la gardaient déclarent y être chez eux… Ce thriller un peu lent au démarrage bascule dans une horreur détonante, montrant comment les barrières administratives et judiciaires peuvent faire resurgir la bestialité humaine dans ce qu’elle a de plus cruel. • D. E .
— : d’Olivier Abbou (New Story, 1 h 38), sortie le 6 novembre
L’AUDITION
Une professeure de violon prend en charge un nouvel élève qu’elle pousse à se surpasser. Dans le même temps, son fils, qui aspire lui aussi à devenir violoniste, se sent délaissé… Cette chronique amère s’engouffre dans les plaies béantes d’une famille dysfonctionnelle, sur fond de complexe œdipien et de crises de jalousie aux conséquences tragiques. • C. L .
— : d’Ina Weisse (Les Films du Losange, 1 h 30), sortie le 6 novembre
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COUL’ KIDS
CLÉMENT COGITORE Réalisateur de films de fiction, de documentaires et créateur d’installations photographiques, il a reçu, en 2018, le prestigieux prix Marcel-Duchamp, qui distingue chaque année un artiste pour l’ensemble de son œuvre. Clément Cogitore a été aussi nommé aux Césars en 2016 pour son long métrage Ni le ciel ni la terre, et cette année pour son documentaire Braguino et pour son court métrage Les Indes galantes, inspiré d’un opéra du xviiie siècle qu’il met aujourd’hui en scène à l’Opéra Bastille.
Comment êtes-vous devenu artiste ? À un moment, on n’a pas le choix, on ne sait rien faire d’autre, on n’a envie de rien d’autre. Certains savent exactement ce qu’ils veulent devenir : danseur, pianiste… Moi, ce n’était pas aussi précis que ça. Je n’ai pas eu de révélation, c’était progressif. Je suis arrivé à l’art en regardant de la peinture, c’est mon premier amour. Je pensais devenir artiste peintre, mais j’ai très vite abandonné et je suis allé vers l’image, la vidéo, le film et la mise en scène. Est-ce qu’une œuvre a particulièrement compté ? Il y en a beaucoup, je pourrais plutôt te citer des artistes. J’ai découvert l’art contemporain en regardant les œuvres de Christian Boltanski, le cinéma avec Andreï Tarkovski et David Lynch, et la danse avec Pina Bausch. Quand tu découvres ces artistes, ce sont des moments forts. Leurs œuvres m’ont tellement marqué qu’aujourd’hui elles font partie de moi. Vous aviez quel âge ? À peu près le tien. Je viens de la campagne, et à l’époque je visionnais beaucoup de choses en DVD ou cassette vidéo. Je pouvais être conseillé par des amis, des profs, ou par la famille. C’est
L’INTERVIEW DE LOUIS, 15 ANS LE DÉBRIEF
mon frère Romain, qui est devenu réalisateur, qui m’avait dit « regarde ça », en me tendant la cassette du Sacrifice de Tarkovski. Qu’est-ce qui vous relie dans vos travaux à votre enfance et votre adolescence ? Quasiment tout. Comme beaucoup d’artistes, il me semble que notre matériau premier, notre fonds de commerce, c’est notre mémoire d’enfant ou d’adolescent, ce moment où l’on essaie de comprendre le monde. En grandissant, on constate que certaines questions ont des réponses, et puis pour certaines, même adulte, on ne trouve pas les réponses, alors on revient sans cesse dessus quand on est artiste. Depuis combien de temps travaillez-vous sur Les Indes galantes ? Deux ans. C’est un peu comme au cinéma, on passe beaucoup de temps à concevoir et écrire le projet. On prépare tout très méticuleusement et ensuite tout va très vite, tout doit s’assembler
dans une sorte de chaos de dernière minute. Qu’est-ce qui vous attire dans l’opéra, et plus particulièrement dans Les Indes galantes ? Le fait que cette pièce appartienne à une tradition, l’opéra-ballet à la française, qui est très visuelle. L’opéra-ballet mélange la danse et le chant, il permet de produire des images sur scène. J’ai commencé par réaliser une vidéo avec des danseurs de krump, et ensuite le directeur de l’Opéra de Paris m’a proposé de le mettre en scène dans ce lieu. Pourquoi être allé vers le krump plutôt que vers une autre danse urbaine ? Le krump, c’était juste pour la vidéo. Sur scène, il y aura beaucoup de styles différents. Est-ce que vous dansez vous aussi ? Pas du tout ! Ou alors mal. J’adore regarder la danse, la mettre en scène, mais je vais épargner les spectateurs, je ne danserai pas. • PROPOS RECUEILLIS PAR LOUIS (AVEC CÉCILE ROSEVAIGUE) PHOTOGRAPHIE : PALOMA PINEDA
— : « Les Indes galantes » de Jean-Philippe
Rameau, mis en scène par Clément Cogitore, jusqu’au 15 octobre à l’Opéra Bastille
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TOI AUSSI TU AS ENVIE DE RÉALISER UNE INTERVIEW ? DIS-NOUS QUI TU AIMERAIS RENCONTRER EN ÉCRIVANT À BONJOUR@TROISCOULEURS.FR
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COUL' KIDS
« Nous étions installés dans le foyer de l’Opéra Bastille avec une vue panoramique sur Paris, c’était magnifique ! Malgré la fatigue de Clément Cogitore – il s’était couché la veille à 5 heures du mat’ avant de faire une nouvelle journée de répétition –, l’entretien s’est bien passé. C’était impressionnant de le rencontrer à quelques jours de la première représentation des Indes galantes ! »
LA CRITIQUE DE LÉONORE, 8 ANS
« Ce film parle d’amour, mais pas de l’amour des gens qui vont se marier : il parle de l’amour de la famille et des amis. Ça change un peu, parce que c’est pas comme toutes les histoires où ils s’embrassent à la fin. Cette fois, ils se font un petit câlin, et c’est fini ! L’histoire dit aussi que ce n’est pas parce qu’on n’est pas comme les autres qu’on doit s’entretuer, et qu’il ne faut pas se limiter aux apparences. Dans le film, même un ours peut faire des mauvaises choses ; et je suis totalement d’accord avec ça ! Donc il y des bonnes morales mais, pour ceux qui sont très sensibles à la mort des animaux, je ne conseille pas trop ce film, parce qu’il y a des personnages qui meurent. Mais ce n’est pas parce qu’on meurt que c’est une fin triste. Quand quelqu’un est mort, notre vie à nous n’est pas finie. Un jour ou l’autre, nos pères ils meurent tous. Alors, on est tristes, mais c’est normal, c’est dans la vie et il ne faut pas se laisser gâcher la vie par la mort ! Et puis, dans les films, il faut être un peu triste aussi. Si on était toujours gais, il manquerait quelque chose. » vie
COUL’ KIDS
LA FAMEUSE INVASION DES OURS EN SICILE
LE PETIT AVIS DU GRAND Si l’on savourera l’habile adaptation du roman de Dino Buzzati, avec notamment un jeu extrêmement malin sur différentes strates de narration, La Fameuse Invasion des ours en Sicile est avant tout un choc esthétique. Première réalisation de l’illustrateur Lorenzo Mattotti, le film mêle harmonieusement images numériques et animation traditionnelle, et alterne aplats de couleurs et textures fouillées, pour nous offrir un objet plastique sans aucun équivalent. • JULIEN DUPUY
LIS L’ARTICLE ET RETROUVE LE MOT ÉCRIT À L’ENVERS !
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— : « La Fameuse Invasion des ours en Sicile » de Lorenzo Mattotti, Pathé (1 h 22), sortie le 9 octobre, dès 6 ans
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DU 11 OCTOBRE 2019 AU 26 JANVIER 2020
EXPOSITION
Charlie Chaplin™ © Bubbles Inc S.A
PHILHARMONIEDEPARIS.FR Photo : Chaplin s’essayant au trombone dans ses studios, 1918 © Roy Export Co. Ltd • Conception graphique : Marina ILIC-COQUIO • Imprimeur : PND • Licences E.S. n°1-1083294, E.S. n°1-1041550, n°2-1041546, n°3-1041547.
CINÉMA
P H I L H A R M O N I E D E PA R I S
MUSÉE DE LA MUSIQUE
EXPO
R
01 44 84 44 84 PORTE DE PANTIN
SPECTACLE
CINÉMA
OFF
CECI N’EST PAS DU CINÉMA
SONS
SOUK DES CULTURES
Ces dernières années, le public occidental a montré un intérêt grandissant pour des propositions « outernationales » associant musique pop et sonorités orientales, arabes, turques, indiennes. Du revival psychédélique turc orchestré par les Hollandais d’Altın Gün au mélange de techno et de mélodies orientales d’Acid Arab, comment de lointaines traditions musicales modifient-elles la pop d’ici ? Petit état des lieux hexagonal, avec Acid Arab.
En
TECHNO MONDIALE
Album de rencontres, donnant à découvrir aux danseurs français des musiques différentes, si loin, si proches, Jdid est cependant d’abord cimenté par une production électronique (house, acid-house, techno) efficace, puissante, directement adressée au dancefloor, reflétant les origines clubbing du projet, et les influences (de Muslimgauze à Paranoid London, de Spiral Tribe à Four Tet) de ses membres. Dans leur studio, devant une affiche du groupe industriel anglais Throbbing Gristle, Pierrot Casanova défend leur approche : « On sait ce qu’on apporte et où on en est par rapport à notre culture. Mais on ne veut pas s’inventer musiciens orientaux. Parce que, tout simplement, on ne sait pas faire. Par exemple, on ne saurait pas reproduire ce que fait Ammar 808 [Musicien tunisien mariant boîte à rythmes TR-808 et chants traditionnels du Maghreb, ndlr]. Si on prend tous les éléments séparés de ses prods, on a l’impression que rien n’est calé. Mais quand tout est ensemble, il y a un groove de fou. C’est très compliqué de faire groover de cette manière-là. » Selon Hervé Carvalho, « on est toujours soucieux de ne pas utiliser ces musiques comme ornementation, décor, cliché », et, plutôt que d’imiter les musiciens orientaux, le quintet préfère donc proposer des collaborations (« au sens noble du terme », souligne Guido Minisky)
© PIERRE-EMMANUEL RASTOIN
CLUBBING DZ
« “Jdid”, en arabe, ça veut dire “neuf, nouveau”. Dans le bassin méditerranéen, c’est un mot qui revient souvent : tu as des baskets neuves, elles sont jdid, explique Hervé Carvalho, du projet électronique parisien Acid Arab. Intituler ainsi notre nouvel album, avec un mot arabe qui est entré dans l’argot français, c’est une manière de montrer la réalité du mélange social et linguistique aujourd’hui en France. » Après un premier album en 2016, dont le titre, Musique de France, pointait déjà la vision d’une identité nationale considérée par certains comme « blanche et catholique », le collectif mené par les DJs Hervé Carvalho et Guido Minisky affine ici son irrésistible mix de musiques électroniques et de sonorités arabes et moyen-orientales. Devenu un véritable groupe avec l’arrivée des producteurs Pierrot Casanova et Nicolas Borne et du claviériste algérien Kenzi Bourras, Acid Arab offre un 91
OFF
album aussi varié que cohérent. Nourri par la culture algérienne de son claviériste, de l’incantation chaoui « Staifa », habitée par la voix de Radia Menel, au raï mélancolique de « Malek Ya Zahri », chanté par Cheikha Hadjla, en passant par une balade nocturne et synthétique avec le nouveau prince du raï Sofiane Saidi, la géographie d’Acid Arab s’étend jusqu’au dabke irako-syrien, aux chants du Sahel des Filles de Illighadad, ou aux caves gothiques d’Istanbul, en compagnie du chanteur turc Cem Yıldız.
France, trente ans après la reprise ironique de « Douce France » par le groupe de Rachid Taha, Carte de séjour, les mélodies et les rythmes du Maghreb, d’Afrique et du Moyen-Orient infusent désormais profondément la musique populaire, comme le reggae et le dub jamaïcains ont transformé la pop anglaise (de The Clash au grime, en passant par le post-punk). L’afro-trap du jeune rappeur MHD marie ainsi azonto du Ghana et du Nigeria, trap d’Atlanta et hip-hop français, quand les glissandos vocaux de PNL, permis par l’Auto-Tune, évoquent les traditions musicales arabes et leurs mélismes sinueux, filtrés par la technologie et le spleen urbain. Ailleurs, ce sont les mots africains (« s’enjailler » ou « djo », venus de l’argot ivoirien) ou arabes (« belek », « attention » ; la « hess », la « mouise ») qui entrent dans le langage courant, quoique crypté, des amateurs d’Aya Nakamura ou de PNL.
© FRANK LORIOU
SONS
« Pourquoi ces mecs s’intéressent-ils à la musique du mariage de ma cousine ? »
OFF
GUIDO MINISKY pour permettre un « mélange, pas un collage » (selon Pierrot Casanova), sans appropriation ni exclusion, mais incorporant en une même transe les cultures de chacun, pour finalement offrir une sorte d’utopie de musique mondialisée. Selon Guido Minisky, « les retours que nous font les gens à l’étranger, c’est : “Merci de réconcilier la musique qu’on aime avec la musique de nos parents, de nos racines.” Tous les jeunes écoutent de la musique actuelle occidentale. Du coup, on paraît parfois presque trop traditionnalistes pour eux : “Pourquoi ces mecs s’intéressent-ils à la musique du mariage de ma cousine ?” »
NEXT GEN
En France, d’autres groupes émergent mariant pop, electro, hip-hop et recherche des racines, retour aux origines : au sein du jeune duo Mauvais Œil, la chanteuse Sarah, bercée par Cheb Hasni et Britney Spears, chante en arabe comme une langue réappropriée, sur des productions électroniques lancinantes et des accords de saz électrifiés ; au croisement
du châabi et de l’electro, un autre duo, Taxi Kebab, mêle bouzouki, dialecte marocain et instrumentaux psychédéliques ; Johan Papaconstantino pose la mélancolie du rébétiko sur des productions electro et hip-hop ; entre transes et traditions, les Parisiens Ko Shin Moon inventent des paysages sonores hybrides et bigarrés : « acid-dabke, disco gréco-turque, raï cosmique, molam-new-beat »… Cette liste de projets musicaux faisant le pont entre Orient et Occident n’est pas exhaustive, mais tous ont à cœur de trouver l’équilibre entre ces deux pôles, en en préservant les caractéristiques. Ils reflètent ainsi la diversité culturelle qui, en actes, infuse la société française via les playlists Spotify et les clips YouTube, et changent en profondeur, sans doute plus qu’aucun discours, les mentalités et les perceptions. • WILFRIED PARIS
— : « Jdid » d’Acid Arab (Crammed Discs) —
CRAMMED DISCS, TERRE D’ACCUEIL Pour sortir son album, ainsi que les artistes de son label, Acid Arab Records (Rozzma, Zenobia), Acid Arab a logiquement frappé à la porte de Crammed Discs. Logiquement ? Créé en 1980 par le musicien et producteur Marc Hollander (du groupe Aksak Maboul), le label belge s’est en effet illustré dans la production d’albums (plus de trois cent cinquante) faisant la part belle aux rencontres et fusions musicales, sans égard pour les frontières géographiques ou stylistiques. Qu’est-ce qui réunit Hector Zazou, Zap Mama, Minimal Compact, Bebel Gilberto, Tuxedomoon, Konono no 1, et plus récemment, Aquaserge, Matias Aguayo, Juana Molina ou Nova Materia ? « Un groupe Crammed, répond Marc Hollander dans une interview pour le magazine Gonzaï, (c’est) trois personnes venant de trois pays différents et qui vivent dans un quatrième pays en croyant faire la musique d’un cinquième ; et puis moralité ils font la musique d’un pays qui n’existe pas… » • W. P.
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Son nouvel album maintenant disponible
EXPOS
— : « Matériauthèque » de Guillaume Constantin, jusqu’au 10 novembre aux Instants chavirés (Montreuil)
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À
Guillaume Constantin, Fouquet Sweater, 2017
l’occasion des quinze ans de l’ancienne brasserie Bouchoule, le plasticien Guillaume Constantin en convoque la mémoire, tout en interrogeant le médium sculpture et ses contours. L’histoire de ce lieu d’exposition, il la connaît par cœur. Et pour cause, l’artiste est depuis 2002 le responsable de la programmation arts visuels des Instants chavirés, mythique salle montreuilloise, spécialisée dans les musiques expérimentales et bruitistes. Les créateurs et les commissaires qu’il a invités à y exposer réapparaissent « fantomatiquement » à cette occasion, par objets interposés, collectés et mêlés à d’autres fragments trouvés in situ (comme un « vieux » banc anciennement situé dans les loges et ici suspendu à l’entrée), agencés au sein de plusieurs dispositifs, donnant lieu à des activations ou à des mises en écho chorégraphique, vidéo, sonore et vocale. Ce protocole de collecte, qui vient nourrir une partie de l’exposition, participe à la constitution d’une vaste « matériauthèque » qui fonctionne tel un « palais de mémoire », à la fois subjectif et collectif, et qui pose aussi la question de ce qui fait (ou non) sculpture, à partir de trois éléments clés : matériaux, objets et supports. Une réflexion qui se poursuit en quelque sorte hors les murs – dans un musée imaginaire conçu en animation 3D –, élaborée avec le Virtual Dream Center. Certaines impressions 3D sont alors réinjectées dans l’aire d’exposition. Une manière de souligner ces déplacements sans cesse opérés entre espaces virtuel et réel, mental et physique, où circulent matières, couleurs, sons, gestes, voix, etc., comme autant de signes du temps qui se répondent. • ANNE-LOU VICENTE
© AURÉLIEN MOLE (COURTESY GALERIE BERTRAND GRIMONT)
MATÉRIAUTHÈQUE
Une vaste « matériauthèque » qui fonctionne tel un « palais de mémoire », à la fois subjectif et collectif.
LES HÔTES
SPEED OF LIFE
En 1884, la belle-fille de Winchester, inventeur de la carabine à répétition, fait ériger un manoir de cent soixante pièces en Californie. Les plans de la construction, échelonnée sur trente-huit ans, lui auraient été dictés par des esprits qui hantaient les lieux. À partir de cette trame mêlant architecture et spiritisme, l’artiste Jérôme Poret retrace un itinéraire sonore et visuel qui fait rimer fantôme et home (not so) sweet home. • JULIEN BÉCOURT
Photographe influent du New York des années 1970 et compagnon d’artistes mythiques tels que Paul Thek ou David Wojnarowicz, l’Américain Peter Hujar dresse le portrait en noir et blanc d’icônes de la libération homosexuelle et de la contre-culture. Les débuts du mouvement punk et la bohème des années sida côtoient animaux et gratte-ciel dans une quête éperdue de beauté et de poésie. • J. B.
à La Maréchalerie (Versailles)
au Jeu de Paume
: de Jérôme Poret, jusqu’au 15 décembre
: de Peter Hujar, jusqu’au 19 janvier
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ART COMPRIMÉ Tous les mois, notre chroniqueuse vous offre un concentré des dernières réjouissances du monde de l’art.
Il était une fois une jeune fille de 17 ans à qui un éminent artiste français offrit un tableau, recouvert d’un beau bleu profond. Quelques décennies plus tard, l’avocate parisienne de cette même femme, désormais âgée de 80 ans, lui propose de mettre à l’abri cette toile d’Yves Klein, d’une valeur estimée à quelque 20 millions d’euros. Elle accepte, mais découvre ensuite que son bien ne se trouve pas là où il est censé être. L’avocate affirme qu’elle en a la propriété et produit une lettre de son ancienne cliente qui dit lui en faire don ! La suite de cette histoire se passe aujourd’hui du côté de la justice française, qui a ouvert une enquête cet été. • Le Bouquet de tulipes de Jeff Koons est arrivé à Paris… Après trois ans de polémique, la sculpture en bronze, acier et aluminium de 33 tonnes, en hommage aux victimes des attentats du 13 novembre 2015, a finalement été installée derrière le Petit Palais, près des Champs-Élysées. Cette idée, instillée par l’ambassadrice des États-Unis en France, n’aura pas fait l’unanimité. L’artiste star américain exigeait de voir son œuvre placée entre le Palais de Tokyo et le musée d’art moderne. Elle aura coûté 3,5 millions d’euros, financés notamment par des mécènes américains. • Si vous aimez vous frotter contre des inconnus tout nus, ne loupez pas la réédition de la célèbre performance Imponderabilia de Marina Abramović à la Royal Academy of Arts de Londres à l’automne 2020. Entre deux salles, vous devrez vous glisser entre des jeunes gens dévêtus : cap ou pas cap ? • MARIE FANTOZZI ILLUSTRATION : PABLO GRAND MOURCEL
SPECTACLES
MARRY ME IN BASSIANI — : de (LA)HORDE, du 16 au 19 octobre à la Maison des arts de Créteil (1 h 30) © GAËLLE ASTIER-PERRET
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En
2017, le collectif (LA) HORDE remue les théâtres avec l’excitant To Da Bone. Des danseurs prodiges font exploser sur scène les jeux de jambes effrénés du jumpstyle. Une première pour cette danse, née dans les clubs belges et hollandais, et popularisée sur YouTube. Le trio Marine Brutti, Jonathan Debrouwer et Arthur Harel s’est alors aventuré dans les abysses du web pour explorer les danses post-Internet, ces gestuelles d’une contre-culture qui a pris son essor sur la Toile. En 2019, le collectif, tout juste nommé à la tête du Ballet national de Marseille, s’intéresse cette fois à la danse comme arme de résistance. Leur point de départ ? Les raids policiers dans la nuit du 11 au 12 mai 2018 dirigés contre les clubbeurs du Bassiani, une institution de la capitale géorgienne Tbilissi. En guise de réponse, après avoir été délogés, les fêtards ont organisé le lendemain même une rave devant le Parlement. Partant de cet événement, le trio remonte le fil de l’histoire – à forte teneur politique – de la danse de ce pays, puisque qu’elle fut l’étendard d’une identité nationale face à la globalisation soviétique. Une pièce survoltée, virtuose, dans laquelle quinze danseurs du ballet géorgien Iveroni dévoilent leurs prouesses techniques lors d’un bal étrange, entre danse traditionnelle et rave techno, questionnant ainsi la capacité de certaines danses à dépasser une fonction simplement décorative. • BELINDA MATHIEU
Un bal étrange, entre danse traditionnelle et rave techno.
MOVING IN CONCERT
DÉSORDRE DU DISCOURS
L’an passé, la chorégraphe suédoise concluait en beauté son cycle Red Pieces avec « 21 Pornographies ». Un solo drôle, électrisant, qui retournait parfois l’estomac. Avec Moving in Concert, elle écrit un nouveau chapitre de son travail : une réflexion dansée sur les interactions subtiles entre humains, matières organiques et nouvelles technologies. Une recherche poétique, aussi viscérale qu’intellectuelle. • B. M.
Le 2 décembre 1970, Michel Foucault donne une leçon inaugurale au Collège de France : « L’ordre du discours ». Presque cinquante ans plus tard, le texte reprend corps, et se métamorphose, incarné par Guillaume Bailliart dans un amphithéâtre d’université. Une mise en scène singulière, dans laquelle Fanny de Chaillé explore les liens entre discours, parole, pensée, voix et geste, à travers la prose foucaldienne. • B. M.
au Centre Pompidou (1 h 15)
à l’université Paris-Nanterre (1 h)
: de Mette Ingvartsen, du 6 au 9 novembre
: de Fanny de Chaillé, les 6 et 7 novembre
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graphisme Pierre di Sciullo © 2019 dessins Aurélie William Levaux
2020
Nasser Djemaï Angélica Liddell Peter Handke Alain Françon Yasmina Reza Norah Krief Anouk Grinberg Judith Rosmair Emma Dante Wajdi Mouawad Pascal Rambert Arthur Nauzyciel Charlotte Farcet Frédéric Fisbach Simon Falguières Krzysztof Warlikowski
ww.colline.fr 15 rue Malte-Brun, Paris 20e métro Gambetta
DAROCO ET SES FRÈRES
RESTOS
OFF
© STÉPHANE MÉJANÈS
L’Italie, encore l’Italie, toujours l’Italie. Mais quand on aime, on ne compte pas. Les ouvertures de trattoria se succèdent, la qualité se maintient. La cucina povera a de l’avenir, la preuve chez Daroco 16.
Fidèles
de cette rubrique, vous vous souviendrez que l’endroit y a déjà été chroniqué il y a un an. Ça s’appelait Zebra, et ça se rêvait néobrasserie à coups de plats traditionnels. Les promoteurs de l’affaire, Alexandre Giesbert, Julien Ross et Romain Glize, ont fait le constat que les mangeurs n’étaient pas au rendez-vous. Courageusement, ils ont revu leur copie, pour y décliner le Daroco Bourse, créé par les deux premiers et qui fait un carton. Sans insulter l’avenir, Daroco 16 est bien né. L’architecte Olivier Delannoy (Daroco Bourse) a tout repensé, dessiné un plafond miroir et diamant, misé sur de belles matières : laiton, marbre, acier Corten et granit. Supakitch, artiste tatoueur, a collaboré avec Koralie, plasticienne urbaine, sur une fresque aquavégétale rassurante comme un giron de mamma. Mais c’est de l’assiette que viendra le succès. Le trio frappe fort avec une côte de veau « oreille d’éléphant » milanaise (29 €) généreuse et parfaitement réussie, entre croustillant de la panure et moelleux de la viande. Nouveauté par rapport à Daroco Bourse : une série de risottos, dont un Vialone alla milanese au safran et à la moelle de bœuf (21 €), mais aussi de la pasta (rigatoni all’Arrabiata,13 €), et des pizze à la pâte parfaite (à partir de 11 €). Petit conseil d’ami, ne ratez pas les sardines marinées aux herbes, ricotta fumée et pistache grillée (13 €). Sans oublier la carte des vins, italiens, bien sûr, mais aussi corses, avec la sublime cuvée Faustine 2016 de Jean-Charles Abbatucci (66 €). • STÉPHANE MÉJANÈS
: 3, place Clément-Ader, Paris XVIe
GIULIA
PASTORE
Richard Liogier a créé Giulia pour l’amour de la pizza. On aime la sei (mozzarella fior di latte, trévise, gorgonzola, pancetta, 17 €) et la dieci (sauce tomate, mozarella di buffala, mortadelle, tomates datterino, roquette, 18 €). Et les glaces, que Richard décline en version minute, dans son autre établissement, 0 °C (13, rue de l’Ancienne-Comédie, Paris VIe). • S. M.
Depuis le printemps 2019, il y a un pasteur rue Bergère. Un chef sicilien et un pâtissier des Pouilles, cornaqués par Emma et Youri, le couple de propriétaires, envoient notamment des paccheri langoustines, girolles et tomates séchées (22 €) et un semifreddo à la noix, crème à la ricotta, figues, pommes caramélisées et sauce au porto. Formule déjeuner : 21 €. • S. M.
: 26, rue Édouard-Jacques, Paris XIVe
: 26, rue Bergère, Paris IXe
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SECTEUR
FILMS
Partenaires officiels
CONCERTS
CHARLOTTE ADIGÉRY — : le 23 octobre © STEPHEN DEWAELE
au Badaboum
—
OFF
Signée
sur Deewee, le label des frères Dewaele (2 Many DJ’s, Soulwax), la facétieuse Charlotte Adigéry trousse une electro-pop sans pareil. Flash-back : 2015, Gand. La Belgo-Caribéenne brille sur la B.O. du film Belgica de Felix Van Groeningen, confiée à Soulwax. Séduits, les frangins invitent le producteur Boris Zeebroek (alias Bolis Pupul) à épauler Adigéry. Une association parfaite qui se traduit par deux EP métissés, Charlotte Adigéry (2017) et Zandoli (2019), aussi barrés qu’entêtants. Impossible d’échapper à la voix – façon cool cat – d’Adigéry ni à son style minimaliste, ardent et dissonant, percuté de house, de techno, de R&B et de sons traditionnels – écouter la dinguerie « Paténipat », qui croise créole et rythme gwoka. Figure libre, citant Dean Blunt comme La Montagne sacrée d’Alejandro Jodorowsky, l’artiste chérit « les artistes honnêtes, les histoires vraies ». Motto qu’elle incarne en anglais et en français, avec un humour jouissif, « marque de fabrique antillaise », dans des vignettes effrontées : drague féministe (« Senegal Seduction »), rêves de latex (« Cursed and Cussed ») ou ode à la perruque comme rituel d’empowerment (« High Lights »). Elle s’autorise tout, et promet des concerts à l’énergie folle « qui donnent envie de gifler quelqu’un ou d’embrasser un arbre ». Le tout en menant de front le projet WWWater, avatar electro-envoûtant, hanté par le pouvoir de l’eau. « L’eau et le feu », précise celle qui serpente entre les éléments. Charlotte Adigéry est une drôle de sirène, et son charme nous laisse liquides et fiévreux sur le dancefloor. • ETAÏNN ZWER
Elle promet des concerts à l’énergie folle « qui donnent envie de gifler quelqu’un ou d’embrasser un arbre ».
THE MYSTERY LIGHTS
SCARLXRD
The Mystery Lights sont aux Kinks et aux Seeds ce que Lee Fields est à James Brown : des vénérateurs affranchis, rompus aux tournées sans fin, qui ne cessent d’élever leur niveau de jeu et d’écriture. Après la claque studio Too Much Tension!, sorti sur la division rock du prestigieux label soul Daptone, on va pouvoir les observer dans leur milieu naturel, et vérifier s’ils sont bien aujourd’hui le meilleur groupe garage du monde. • M. P.
En enfilant le masque de Scarlxrd, Marius Listhrop a trouvé une solution à l’équation réputée insoluble du rap metal. Privilégiant l’esprit à la lettre (exit les guitares qui ruinent les beats), il imagine une trap d’apocalypse, hurlante et ultrasaturée, qui engrange des dizaines de millions de vues sur YouTube. Il n’y a plus de honte à aimer autant Slipknot que XXXTentacion, ni à vouloir entendre les deux en même temps. • M. P.
: le 15 octobre à La Maroquinerie
: le 7 novembre au Trabendo
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vincent delerm panorama vincent delerm
nouvel album le 18 octobre
à la cigale
dates supplémentaires 03 - 04 - 05 - 06 - 07 décembre
photographies : vincent delerm, sauf portrait : julien mignot - design graphique : caroline sauvage
22 - 23 - 24 - 25le-t 26 octobre mp- 09 novembre 05 - 06 - 07 -co08
je ne sais pas si c’est tout le monde film
au cinéma des cinéastes* tous les dimanches à partir du 20/10
*7, av. de clichy - 75017 paris
PLANS COUL’ À GAGNER
HASSAN HAJJAJ EXPO
— : « Maison marocaine de la photographie. Carte blanche à Hassan Hajjaj », jusqu’au 17 novembre à la Maison européenne de la photographie
Djellabas
© D. R.
—
Hassan Hajjaj, Alia Ali, 2014
ces détournements d’objets du monde contemporain (des boîtes de concentré de tomate ou des pneus utilisés en frise de cadre), mais aussi du photographe malien Malick Sidibé, pour ses portraits de studio pêchus. Avec malice et légèreté, Hajjaj tend le miroir à nos fantasmes exotiques d’Occidentaux pour mieux les bousculer. Sa célébration créative du multiculturalisme a enfin sa rétrospective dans une France qu’il aime aussi titiller – voir son film Naabz, qui suit une femme voilée dans Paris, en plein débat sur l’interdiction du port du voile intégral, en 2010. • MARIE FANTOZZI
OFF
motif léopard, voiles avec imprimé Louis Vuitton, babouches Nike : les tenues des impertinents modèles de Hassan Hajjaj détonnent, étonnent et provoquent immanquablement un sourire. Le photographe anglo-marocain est connu pour ses portraits de stars (Hindi Zahra ou Keziah Jones) comme d’inconnues (des motardes de Marrakech), dans des compositions frisant le kitsch et qui lui ont valu le surnom d’Andy Wahloo. Et c’est vrai qu’il y a quelque chose de l’artiste américain Andy Warhol dans
MODERNE MAHARAJAH
EXPO
Dans les années 1930, le maharajah d’Indore érige le palais Manik Bagh, première construction moderniste de l’Inde. L’esprit fantasque et visionnaire de cette figure politique est ici éclairé par près de cinq cents pièces de sa collection pharaonique consacrée aux plus grands artisans européens de la modernité, comme Eileen Gray ou Le Corbusier. • D. E .
: « Moderne maharajah. Un mécène des années 1930 », Man Ray, Le Maharajah et sa femme, vers 1927
jusqu’au 12 janvier au musée des Arts décoratifs
ALULA. MERVEILLE D’ARABIE
EXPO
: « AlUla. Merveille d’Arabie », Champ irrigué circulaire AlUla
jusqu’au 19 janvier à l’Institut du monde arabe
TOULOUSE-LAUTREC
EXPO
Le Grand Palais expose un des plus célèbres lithographes de l’histoire de l’art. Au-delà de sa carrière d’affichiste, Toulouse-Lautrec était surtout un peintre hors pair qui immortalisa la célérité des danseuses de cabaret et le Montmartre des artistes en faisant fi des conventions. • D. E . Henri de Toulouse-Lautrec, Au cirque Fernando. L'écuyère, 1887-1888
: « Toulouse-Lautrec. Résolument moderne », jusqu’au 27 janvier au Grand Palais
©ADAGP PARIS 2019 ; YANN ARTHUS-BERTRAND - HOPE PRODUCTION ; D. R.
Errance parmi les vestiges de multiples civilisations, l’expo révèle l’éclat d’une région méconnue du nord-ouest de l’Arabie saoudite. Objets et photographies ici exhumés témoignent de la richesse de celle-ci, des sanctuaires aux chemins de fer en passant par une oasis reconstituée grâce aux technologies numériques. • D. E .
SUR TROISCOULEURS.FR/TAG/PLANS-COUL/
LE PARC DES PRINCES COMME VOUS NE L’AVEZ JAMAIS VU
STADIUM TOUR ARCADE VR
INFOS ET RÉSERVATIONS SUR
EXPERIENCE.PSG.FR
SONS
LA FÉLINE — : « Vie future » (Kwaidan)
OFF
© SWAN ARNAUD
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Pleurer
la disparition et célébrer la vie qui arrive, accueillir à la fois la fin et le renouveau : c’est le cycle de la vie, au sens cosmique du terme, que veut embrasser ce troisième album de La Féline. Après un Triomphe acclamé aussi outre-Manche, puis un passage remarqué en librairies avec Dialectique de la pop, exploration philosophique de toutes les contradictions qui parcourent la musique populaire, la Française Agnès Gayraud offre ici sa vision musicale, entre cold-wave et pop psychédélique, d’un présent menacé. Vie future chante ainsi, jusque dans son titre, le déchirement entre une vie à célébrer, l’enfantement (la musicienne était enceinte lors de la composition de l’album) et l’incertitude quant à une existence terrestre durable face à la catastrophe annoncée (réchauffement climatique, disparition de la faune et de la flore, effondrement). Traversées par cette ambiguïté, entre joie et angoisse, ses dix chansons passent de l’infiniment intime, l’intra-utérin (le cœur qui bat de son enfant, sur « Voyage à Cythère ») ou l’évocation d’un proche
SI TON ALBUM ÉTAIT UN FILM ? « Ce serait 2001 : l’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick. La scène de fin, décorée avec un mobilier du xviiie siècle, parle à la philosophe que je suis – cette représentation science-fictionnelle du siècle des Lumières avec un sol rétroéclairé, c’est génial.
en train de mourir (« Tant que tu respires »), à l’infiniment grand, le cosmos dont la maternité lui a donné des visions (« Visions de Dieu »), et que la production de Xavier Thiry, complice de toujours, développe en plages électroniques organiques pleines de réverbérations, d’échos, d’espaces. Là, une « Fusée » devient la métaphore de la vie qui grandit, et, quand des paupières se ferment pour la dernière fois, elles éclipsent le monde. La Féline habite ces analogies d’une voix oscillant entre terre et ciel, fragilité humaine et arrachement à la gravité. « Je projette une sorte de double astral dans la musique, mais un double astral qui conserverait la sensualité et la finitude de l’incarnation. Car ce sont les deux grandes choses qui m’émeuvent dans la musique, mais que j’ai besoin d’expérimenter avec une espèce de contrechant presque antithétique : la finitude avec une dimension cosmique, et la sensualité avec une sorte d’austérité. » De l’incarnation à l’immatériel (car la chanson est un air), cette Vie future parie ainsi sur la vie, quand tout le monde semble jouer contre elle. • WILFRIED PARIS
Et les impressions sonores, comme la respiration de Dave dans son casque, sont inoubliables… J’ai mis sur mon disque un sample du battement de cœur de mon fils, enregistré lors d’une échographie. J’aime cette idée d’expression sonore de la vie : le cœur, le souffle. » AGNÈS GAYRAUD
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Photo : Chaplin s’essayant au trombone dans ses studios, 1918 © Roy Export Co. Ltd • Conception graphique : Marina Ilic-Coquio • Imprimeur : IOC • Licences E.S. n°1-1083294, E.S. n°1-1041550, n°2-1041546, n°3-1041547.
JUKE-BOX
JAIMIE BRANCH
: « Fly Or Die II: Bird Dogs of Paradise » (International Anthem)
Vous avez perdu le goût du jazz ? Cliquez sur le label International Anthem et laissez entrer les nouveaux sons de Chicago. Commencez par Jaimie Branch qui, deux ans après le percutant Fly Or Die, ressort la tête du hoodie pour exprimer, à la pointe de sa trompette ou de sa voix éraillée, ses colères noires de femme blanche. Une musique viscérale, surtout pas réservée aux spécialistes. • M. P.
FABIO VISCOGLIOSI : « Rococo »
(Objet Disque)
La néo-variété française tourne à la farce ? Il est temps d’appeler l’Italie à la rescousse. Fabio Viscogliosi n’avait plus donné de nouvelles discographiques depuis 2007 ? Rococo brise le silence et offre à notre langue, sa langue (il est né à Oullins), une noblesse pop qu’on trouvait autrefois chez Lucio Battisti et Adriano Celentano, mais aussi chez Nino Ferrer et Michel Polnareff. Les tubes de l’été pleuvent en octobre. • M. P.
CLIPPING.
: « There Existed an Addiction to Blood » (Sub Pop)
Toute cette trap codéinée commence à vous fatiguer ? Un autre rap est encore possible. Sur leur troisième album, les Angelenos de clipping. (deux producteurs, un MC) font des boutures expérimentales entre l’horrorcore de Gravediggaz et la culture pimp de Too $hort, l’afropunk de Death Grips et l’afrofuturisme de Shabazz Palaces. Pas vraiment révolutionnaire, mais efficace contre les marmonnements de la monotonie. • M. P. ILLUSTRATION : SAMUEL ECKERT
Charlie Chaplin™ © Bubbles Inc S.A
MYTHO
SÉRIES
© UNITÉ DE PRODUCTION, ARTE FRANCE
— : Saison 1 sur Arte —
OFF
Quatre
ans après la fin des Revenants, Fabrice Gobert retourne à la série, sur un scénario parfait d’Anne Berest. S’il délaisse le fantastique pour la comédie dramatique, le réalisateur n’a rien perdu de son incroyable facilité à enchanter des paysages typiquement français qu’il filme comme personne. Au cœur de cette irrésistible histoire de petit mensonge devenu grand, Elvira, mère de famille campée par la brillante Marina Hands, désespère dans son pavillon à mesure que s’éloignent d’elle ses trois enfants et son mari volage (Mathieu Demy au sommet de son art en connard attachant). Quand on lui diagnostique un kyste bénin, elle lâche innocemment à son entourage qu’elle pourrait bien avoir un cancer… L’engrenage est implacable, et la mécanique comique, imparable. On rit
REVOIS DARK CRYSTAL. LE TEMPS DE LA RÉSISTANCE Personne ne réclamait vraiment une suite au film culte de Jim Henson. Contre toute attente, ce prequel en dix épisodes, porté par le réalisateur Louis Leterrier, en retrouve le charme et l’esprit si singuliers. On se surprend, petit ou grand, à se laisser, comme en 1982, happer par cette improbable épopée fantasy racontée à hauteur de marionnettes. • G. L .
: Saison 1 sur Netflix
de bon cœur devant Mytho, souvent jaune. Visuellement, Gobert nous transporte à mille lieues du cadre rassurant de la comédie familiale à la française. Comme les Alpes des Revenants, qui avaient des airs de Twin Peaks, ou le lycée de son long métrage sorti en 2010 Simon Werner a disparu…, qui avait des allures de campus américain, la banlieue filmée en travellings dans Mytho évoque plus celle de la série américaine Desperate Housewives que, mettons, Marnes-la-Coquette. Pur territoire de fiction, de fantaisie (une scène chantée casse-gueule sur « Stand by Me », dans le deuxième épisode, fonctionne miraculeusement), le décor de Mytho laisse sourdre l’angoisse que portent les personnages, tous plus complexes que les archétypes qu’ils semblent d’abord figurer. Sans mentir, une réussite. • GRÉGORY LEDERGUE
VOIS
PRÉVOIS
BRASSIC
HALSTON
Si vous ne connaissez pas encore Joe Gilgun, révélé par This Is England, ne le ratez pas dans Brassic, qu’il a cocréé avec Danny Brocklehurst. Une comédie prolo savoureuse dans la lignée de Shameless, dans laquelle il se donne le rôle d’un petit escroc du nord de l’Angleterre tombé, avec ses potes, dans le collimateur du parrain local pour avoir volé… un poney. L’acteur est, comme d’habitude, irrésistible. • G. L .
Signataire d’un deal juteux avec Netflix, Ryan Murphy (Glee) multiplie les projets. Outre un prequel de Vol au-dessus d’un nid de coucou de Miloš Forman, une comédie musicale avec Nicole Kidman et Meryl Streep et des bios d’Andy Warhol et Marlene Dietrich, il a enrôlé Ewan McGregor pour incarner Halston, grande figure de la mode new-yorkaise des années 1970. • G. L .
: Saison 1 sur Canal+
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: Saison 1 prochainement sur Netflix
IMMERSIVE ART FESTIVAL PARIS
7 SOIRÉES 18 —> 24 OCTOBRE 2019
WWW.IMMERSIVEARTFESTIVAL.COM AVEC LE SOUTIEN DU
JEUX VIDÉO
OFF
CONTROL
Avec
— : 505 Games (PS4, One, PC) —
son mix d’action pétaradante et de dédale mental, Control est l’une des sensations de la rentrée. On y suit Jesse Faden, nouvelle directrice du Federal Bureau of Control (FBC), une antenne gouvernementale dédiée à l’étude des phénomènes paranormaux. Sa première journée de travail commence très mal. Immense et désert, le FBC n’est qu’une enfilade de bureaux vidés de ses employés, comme si une présence maléfique hantait les lieux. Soudain, des soldats surgissent de failles dimensionnelles pour tirer sur Jesse. Tout aussi surprenant, le décor lui-même semble communiquer avec elle, par le biais d’hallucinations cryptiques. Son passé semble intimement lié à tout ce chaos. Il va lui falloir tirer tout cela au clair, et vaincre les hommes en armes qui patrouillent
dans cet immeuble maudit. Heureusement, notre héroïne a les moyens de se défendre : plus elle est proche de toucher au but, plus elle gagne en pouvoirs spectaculaires – un flingue capable de changer de forme, la télékinésie qui permet de faire du moindre objet un projectile létal, la capacité de s’envoler dans les airs, etc. Avec un parfait équilibre en action et narration, Control associe plaisir de jeu et vertige métaphysique. Ballet de corps et de particules de matières (le décor est entièrement destructible), les combats offrent une telle liberté de manœuvre qu’ils deviennent danse hypnotique. L’ensorcellement est permanent, à l’image de cet immeuble monstrueux, qui nous aspire et qui nous perd peu à peu dans un labyrinthe mental aux airs de trip inoubliable. • YANN FRANÇOIS
ASTRAL CHAIN
CHILDREN OF MORTA
TELLING LIES
Pur jeu de série B, Astral Chain nous met dans la peau d’un flic du futur qui peut attaquer ses ennemis avec un robot dirigé grâce à une chaîne magique… Sur le papier, c’est du grand n’importe quoi. À l’écran, c’est un excellent jeu de baston. • Y. F.
Une famille d’aventuriers descend tous les jours dans les profondeurs de la Terre pour affronter des monstres. Chaque expédition permet d’améliorer les compétences de ses combattants, mais aussi d’en apprendre plus sur leur quotidien. • Y. F.
Le créateur de Her Story revient avec un nouveau jeu d’enquête. Là encore, il faut reconstituer une histoire à partir de fragments vidéo. Un récit choral s’écrit alors brillamment, autour de quatre personnages liés par un même secret. • Y. F.
(One, PC, PS4, Switch)
(Mac, PC)
: Nintendo (Switch)
: 11bit Studios
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: Annapurna Interactive
Chaque mois, notre chroniqueur explore les mondes du jeu vidéo indépendant en donnant la parole à l’un de ses créateurs.
Derrière son nom redoutable, Le Cartel cache une bande de joyeux drilles. Fondé par Frédéric Coispeau et Alexandre Muttoni, ce studio indépendant français s’est fait connaître en 2016 avec Mother Russia Bleeds, un jeu de baston trash et sanglant dans les bas-fonds d’une U.R.S.S. imaginaire. « La chose qui nous réunit, explique le directeur artistique Alexandre Muttoni, c’est la curiosité, l’ouverture d’esprit et le refus de se cantonner à un seul genre de jeu vidéo. Après trois années passées à travailler sur un tel univers, on avait besoin de changement. » De fait, leur nouveau jeu, Heave Ho, s’inscrit totalement en rupture avec le précédent. Dans des niveaux faits de plates-formes et de pièges en tous genres, quatre culs-de-jatte cartoonesques s’efforcent d’atteindre l’autre bout de la zone à la seule force de leurs bras. Tous les moyens sont bons pour y parvenir, de la chaîne humaine au lancer aérien de complices dans l’espoir que ces derniers se raccrochent à ce qu’ils peuvent. Le résultat : un concentré d’absurde et de convivialité qui transformera n’importe quelle soirée guindée en barouf hilare. « La seule règle du “jeu canapé”, c’est d’offrir un plaisir immédiat. » Le minimalisme du jeu est trompeur. « On le voulait faussement naïf et idiot. On souhaitait que le cœur de l’expérience ne s’exprime pas tant sur l’écran que dans les interactions qu’il crée entre les gens. Faire comprendre aux joueurs : “Hey, il y a deux boutons à connaître ; maintenant, à vous de faire le spectacle.” » Pari gagné. • YANN FRANÇOIS
— : « Heave Ho »
(Le Cartel | PC, Switch)
LIVRES
L’ÎLE DES ENFANTS PERDUS Les
films mythiques qui ne sont jamais sortis en salle sont une source d’inspiration pour les écrivains. Après Julie Wolkenstein qui, dans son roman Les Vacances, était partie sur les traces du premier court métrage disparu d’Éric Rohmer, c’est aujourd’hui le documentariste Nicolas Chaudun qui se penche sur La Fleur de l’âge, le film maudit du tandem Carné-Prévert, abandonné à la suite d’un tournage catastrophe et d’insurmontables difficultés financières. Jacques Prévert y tenait pourtant beaucoup, à cette histoire d’enfants délinquants et abandonnés, librement inspirée de la mutinerie du bagne pour enfants de Belle-Île qui, en 1934, avait bouleversé l’opinion. Hélas, dès le départ, les pouvoirs publics font tout pour freiner le projet, jugé trop sombre pour ces temps de crise. Bloqué ensuite en raison de la guerre, le film redémarre en 1947, avec un casting scintillant : Arletty, Serge Reggiani, Martine Carol, ainsi qu’une débutante apparue l’année précédente dans La Maison sous la mer d’Henri Calef : Anouk Aimée. Le tournage à Belle-Île, hélas, tourne au fiasco : tempêtes imprévisibles, mort accidentelle d’un figurant, retards à répétition, mésentente sur le plateau, défiance des techniciens communistes envers Arletty à cause de son comportement sous l’Occupation… Après avoir tourné deux cents plans sur les neuf cents prévus, le réalisateur jette l’éponge. La Fleur de l’âge restera en rade, sous forme de bobines non montées qui,
bientôt, vont susciter des convoitises. Ont-elles été récupérées par le producteur ? Nul ne le sait. Une projection aurait eu lieu en 1954 au CNC, mais les boîtes ont peut-être brûlé en 1980 dans l’incendie du dépôt du Pontel. À moins qu’elles ne prennent la poussière chez Anouk Aimée, comme incline à le croire l’auteur ? Optant pour la forme du « romanquête » – un récit vrai assaisonné d’un peu de fiction –,
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Jacques Prévert y tenait pourtant beaucoup, à cette histoire d’enfants délinquants et abandonnés.
LE PAYS DES LOUPS Londres, 2050. La société est réorganisée en trois classes, le logement est strictement réglementé, les seniors sont parqués dans des « dignitoriums » avant d’être euthanasiés… Une dystopie clairvoyante et angoissante, dans la veine de Black Mirror. • B. Q.
: de Tünde Farrand
(Anne Carrière, 360 p.)
Chaudun propose des aperçus captivants sur le cinéma des années 1930-1940, sur le tandem Carné-Prévert et, incidemment, sur la question de l’enfance délinquante, depuis le bagne de Belle-Île jusqu’à l’ordonnance de 1945. À la fois livre d’histoire et roman, ce texte splendide est aussi une déclaration d’amour contrariée à Anouk Aimée, diva insaisissable qui n’aidera guère l’auteur dans sa quête. • BERNARD QUIRINY
— : de Nicolas Chaudun (Actes Sud, 188 p.)
—
LA CHAUVE-SOURIS SE COGNE UN MÈTRE AVANT LE MUR Aphorismes décalés, croquis à la Sempé, satires en miniatures : Olivier Hervy ressuscite avec talent le vieil art du bon mot et de la forme (très) brève. « Il ne faut jamais mettre les publicités dans le recyclage sinon on continuera à en recevoir. » • B. Q.
: d’Olivier Hervy
(Rhubarbe, 100 p.)
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L’AMUSANT MUSÉE Œuvres absurdes, artistes narcissiques, autocommentaires fumeux, faux rebelles à la pelle… Coudray et Merlet croquent l’art contemporain en soixante excellents gags dessinés. « Plutôt qu’un génie incompris, j’ai préféré être un génie incompréhensible. » • B. Q.
: de Jean-Luc Coudray et Isabelle Merlet (Wombat, 128 p.)
BD
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ESOTÉRIA
« Vous
— : de Wandrille Maunoury (Vide Cocagne, 109 p.) —
allez ouvrir un livre interdit. » Vous êtes prévenus, dès la première page. Puis, vous entrez dans le noir, la fête, l’alcool et les corps qui dansent. Au milieu de la pièce, deux jeunes femmes : Diane et Ellie. Silhouettes opposées, elles traversent le temps feutré d’un couple au bord de la crise de nerfs. Très vite, tout s’accélère, se tend, se distord et s’agite, jusqu’au moment où, au bord du gouffre, Diane se sépare d’Ellie et plonge, la tête la première, dans l’agitation d’un club obscur : Esotéria. Récit initiatique aux accents infernaux – il y a quelque chose du légendaire album Conte démoniaque d’Aristophane –, Esotéria de Wandrille Maunoury travaille la rupture amoureuse comme un éclatement du corps, à la fois vécu de l’intérieur et de l’extérieur. Réduits à un tremblement agité ou à un contour grelottant, les personnages d’Ellie et de Diane sont soulignés par le traitement graphique, aigre-doux, de l’auteur. Il nous laisse perché, abasourdi, après avoir refermé le livre. • ADRIEN GENOUDET 112
LES ACTUS MK2
PARCOURS DE COMBATTANTE
Dans son premier docu, Serendipity, qui sort en exclusivité chez mk2, l’artiste plasticienne Prune Nourry filme son combat contre le cancer du sein en entremêlant archives de ses projets d’inspiration anthropologique et séquences intimes de sa chimiothérapie. Elle livre une chronique à l’équilibre délicat, toujours pudique.
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Pourquoi
avoir intitulé votre documentaire Serendipity, un terme qui désigne le fait de trouver quelque chose que l’on ne cherchait pas initialement ? J’aimais l’idée que ce concept, à mi-chemin entre l’art et la science, traverse le film, lui aussi situé entre le parcours médical et mes précédents projets artistiques. Cette définition renvoie également au hasard et à l’intuition, qui caractérisent à la fois la recherche d’un artiste et celle d’un scientifique. Le film s’est construit petit à petit, de façon imprévue, en découvrant des liens étranges entre mes différents projets passés et les traitements que j’étais en train de subir dans l’instant présent, puis en les reconnectant entre eux pour former un fil rouge. D’où l’importance du montage, qui a permis de faire naturellement ces échos entre passé et présent. Par exemple, à l’époque où j’ai filmé une femme en train de faire congeler ses ovocytes parce qu’elle avait un cancer du sein [dans le documentaire In vitro, qui date de 2010, ndlr], je ne savais pas que j’aurai plus tard de la chimio, et que je devrais congeler mes œufs moi aussi. Comment avez-vous concilié votre nouvelle identité de patiente à celle de vidéaste ? Jusqu’ici, je travaillais plutôt en me cachant derrière la caméra, mes projets avaient une dimension objective, presque anthropologique. Si j’ai accepté de retourner la caméra sur moi avec Serendipity, c’est parce que cela m’a
semblé nécessaire pour être sincère. Mais je ne vois pas ce film comme un autoportrait : je voulais lui donner une dimension plus universelle, qui puisse aider des femmes qui traversent la même chose que moi. Il y a aussi eu un moment de bascule pendant le film, quand j’ai accepté l’idée qu’en tant qu’artiste on ne peut être que subjectif. Me dire « action » à moi-même en prenant la caméra en main m’a permis d’être dans une forme de proaction, d’éviter la dépendance. Non pas en contrôlant la maladie, mais en me l’appropriant. L’une des idées importantes du film, c’est aussi que la médecine a tendance à nous penser comme des morceaux de corps, alors qu’en réalité nous sommes aussi un corps lié à une âme, à une histoire. Cet ensemble, proche de la médecine holistique, orientale, me parle plus. Agnès Varda apparaît lors d’une séquence très tendre dans laquelle elle vous aide à couper votre longue natte. Est-ce que son travail, ou celui d’autres artistes plasticiens et réalisateurs, vous a inspirée pour le film ? J’avais cette natte depuis des années, et c’était devenu un symbole de la faire tous les jours. Devoir soudainement la couper était un vrai rite de passage, qu’Agnès m’a aidée à traverser. Mais nous n’avions pas prévu de filmer ce moment amical partagé ensemble ni de le mettre dans le film. Et à l’époque Agnès ne savait pas qu’elle-même avait la même chose. Parmi les gens qui ont joué un rôle, même sans
J’ai accepté de retourner la caméra sur moi, parce que cela m’a semblé nécessaire pour être sincère.
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le savoir, dans la naissance de Serendipity, il y a aussi Laurie Anderson, une artiste plasticienne américaine qui m’a inspirée avec son film Heart of a Dog [sorti en France en mars, ndlr], qui parle de la mort de son mari, Lou Reed, à travers la maladie de son chien. Et puis, à New York [où Prune Nourry vit depuis huit ans, ndlr], mon ami Darren Aronofsky m’a dit : « Tu as cette chance d’être artiste et de pouvoir transformer ce que tu vis en quelque chose de créatif ; prends la caméra et filme ce que tu traverses. » J’ai suivi son conseil, et il est devenu producteur du film. Serendipity est aussi l’histoire d’un combat : vouliez-vous transmettre un message de lutte à travers ce film ? Le film porte en tout cas l’idée d’un combat contre la maladie, mené sans agressivité, avec une part de lâcher-prise, difficile mais nécessaire. C’est aussi pour ça que je mentionne les « warriors » à la fin du film [dédié « à toutes les femmes guerrières », ndlr], qui renvoient à la symbolique des Amazones, cette tribu mythique de femmes, dont on ne sait pas si elle a existé, qui se coupaient le sein pour mieux manier leur arc.
Qu’est-ce que cette première expérience de cinéma vous a apporté par rapport à votre travail de plasticienne ? J’ai compris que, ce qui m’intéresse, c’est la façon dont on peut fixer l’éphémère d’un projet à travers l’image, grâce à la vidéo. Mon prochain projet au long cours, c’est Terracotta Daughters [une armée de cent huit petites filles à échelle humaine en terre cuite, que l’artiste a enfouie en Chine en 2015 et qui sera exhumée en 2030, ndlr]. J’ai déjà beaucoup d’images, mais j’ai vraiment envie d’immortaliser ce défi : comment archiver et protéger les images sur une période aussi longue, pour témoigner des différentes transformations d’un pays comme la Chine sur vingt ans ? • PROPOS RECUEILLIS PAR LÉA ANDRÉ SARREAU
— : « Serendipity » de Prune Nourry, Art House (1 h 14), sortie le 23 octobre
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DEUX ÉVÉNEMENTS EXCEPTIONNELS POUR DÉCOUVRIR LE FILM À l’occasion de la sortie de Serendipity, mk2 vous convie à deux événements dédiés au film. Le dimanche 20 octobre de 15 heures à 17 heures, dans les murs du mk2 Grand Palais, se tiendra une conférence interdisciplinaire pour fouiller les grandes thématiques du film (médecine narrative, sérendipité, procréation, résilience…) en compagnie de la réalisatrice, de scientifiques et de médecins. Cette série d’interventions sera ponctuée d’extraits du film qui, lui, sera présenté en avant-première au mk2 Bibliothèque le 21 octobre, à 20 heures, en présence de Prune Nourry. Cette projection sera suivie par une performance artistique : le cocktail procréatif.
: Toutes les informations sur www.mk2.com et www.troiscouleurs.fr
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OFF
LES ACTUS MK2
mk2 SUR SON 31
PARIS PHOTO
Comme
© JIM GOLDBERG - GALLERY CASEMORE KIRKEBY
chaque année depuis 1997, la première foire mondiale dédiée à la photographie investit le Grand Palais. Pour sa 23e édition, elle met en lumière une sélection d’œuvres toujours aussi éclectique et cosmopolite, répartie en cinq secteurs (« principal », « éditions », « prismes », « curiosa » et « films »). Au centre de l’événement, le secteur « principal » rassemble notamment les travaux de Jim Goldberg sur l’adolescence américaine, les expérimentations digitales du Berlinois Jim Goldberg, Dave and Cookie Jonesin’, 1989 Adrian Sauer ou les secteur « films » au mk2 Grand Palais réunit ces œuvres du Péruvien Roberto Huarcaya, chez qui deux arts au gré d’une sélection de fictions et de la nature fait jaillir moult fulgurances plastiques. documentaires concoctée par Matthieu Orléan, de Le secteur « curiosa », créé l’an dernier, accueille la Cinémathèque française, et Pascale Cassagnau, quant à lui le commissaire anglo-ghanéen Osei du Centre national des arts plastiques. • CORENTIN LÊ Bonsu, et avec lui de jeunes artistes questionnant l’instabilité du monde contemporain. Enfin, pour : du 7 au 10 novembre au Grand Palais, les cinéphiles en manque de projections, le programmation sur www.parisphoto.com
JUSQU’AU 19 NOV. CYCLE JUNIOR Pour les enfants à partir de 5 ans : Popeye et Les Mille et Une Nuits ; Pinocchio ; Dumbo.
: mk2 Quai de Loire, mk2 Bibliothèque et mk2 Gambetta à 10 h 20
JEUDI 10 OCT.
1 HEURE, 1 MYTHE EN FAMILLE « Ulysse, dans l’œil du cyclope. »
: mk2 Quai de Loire à 11 h
LA POUDRE REPLAY AVEC LAUREN BASTIDE « Amandine Gay. » Écoute collective du podcast La Poudre suivie d’un échange avec l’invitée pour aller plus loin.
: mk2 Quai de Seine à 11 h
1 HEURE, 1 ARTISTE « Jérôme Bosch. »
DIMANCHE 13 OCT.
: mk2 Beaubourg
VOTRE CERVEAU VOUS JOUE DES TOURS AVEC ALBERT MOUKHEIBER « Sommes-nous manipulés par notre cerveau ? »
à 20 h
SAMEDI 12 OCT. 1 HEURE, 1 FEMME D’INFLUENCE « Kiki de Montparnasse. »
: mk2 Odéon (côté St Michel) à 11 h
: mk2 Bibliothèque à 11 h
LUNDI 14 OCT. 1 HEURE, 1 ŒUVRE « Michel-Ange, la chapelle Sixtine (1508-1512) et Le Jugement dernier (1536-1541). »
: mk2 Parnasse à 11 h
1 HEURE, 1 MUSÉE « La National Gallery de Washington. »
: mk2 Parnasse à 12 h 30
LUNDIS PHILO DE CHARLES PÉPIN « La joie est-elle plus profonde que la tristesse ? » Avec Alexandre Lacroix, autour de son livre éponyme d’entretiens avec Clément Rosset.
: mk2 Bastille CULTISSIME ! Projection de Valmont de Miloš Forman.
(côté Beaumarchais)
: mk2 Gambetta
mk2 Odéon (côté St Germain)
dans l’après-midi
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à 12 h 30, à 18 h 30
Nos films sont suffisamment inaccessibles comme ça. -26
ans
4.90
Ă€ partir du 16 octobre, du lundi au vendredi, dans toutes nos salles.
mk2 SUR SON 31 SCIENCES SOCIALES ET CINÉMA Projection d’Un peuple et son roi de Pierre Schoeller, suivi d’une discussion avec l’historienne Sophie Wahnich.
: mk2 Bibliothèque à 19 h 45
1 HEURE, 1 CITÉ MILLÉNAIRE « Une cité historique et légendaire : Babylone (Irak). »
: mk2 Grand Palais à 20 h
MATTHIAS ET MAXIME Avant-première en présence du réalisateur Xavier Dolan.
: mk2 Bastille (côté Beaumarchais) à 20 h 30, mk2 Bibliothèque à 21 h
MARDI 15 OCT. 1 HEURE, 1 ŒUVRE « Niki de Saint Phalle, Les Nanas. »
: mk2 Bastille (côté Beaumarchais) à 11 h
1 HEURE, 1 HISTOIRE DE PARIS « Paris vaut bien une messe ! »
SAMEDI 19 OCT. CULTURE POP ET PSYCHIATRIE « La psychiatrie, quarante-quatre ans après Vol au-dessus d’un nid de coucou. »
: mk2 Beaubourg
LA POUDRE REPLAY AVEC LAUREN BASTIDE « Sophie Fontanel. » Écoute collective du podcast La Poudre suivie d’un échange avec l’invitée pour aller plus loin.
: mk2 Quai de Seine à 11 h
à 11 h
LUNDI 4 NOV. 1 HEURE, 1 ŒUVRE « Titien, La Vénus d’Urbin (1538). »
: mk2 Parnasse à 11 h
CULTISSIME ! Projection de La Reine Margot de Patrice Chéreau.
: mk2 Gambetta dans l’après-midi
MARDI 12 NOV.
1 HEURE, 1 MUSÉE « Le Rijksmuseum d’Amsterdam. »
: mk2 Parnasse à 12 h 30
1 HEURE, 1 ŒUVRE « David Hockney, A Bigger Splash. »
: mk2 Bastille (côté Beaumarchais) à 11 h
LUNDIS PHILO DE CHARLES PÉPIN « Qu’est-ce qu’un gai savoir ? »
: mk2 Bastille (côté Beaumarchais) à 12 h 30, mk2 Odéon (côté St Germain) à 18 h 30
1 HEURE, 1 HISTOIRE DE PARIS « La modernisation de Paris sous Henri IV. »
: mk2 Beaubourg à 12 h 30
MARDI 5 NOV.
: mk2 Beaubourg
1 HEURE, 1 ŒUVRE « Jeff Koons, Balloon Dog. »
à 12 h 30
: mk2 Bastille
1 HEURE, 1 CINÉASTE « Alfred Hitchcock. »
: mk2 Odéon (côté St Michel). à 20 h
(côté Beaumarchais)
1 HEURE, 1 FILM Shining de Stanley Kubrick.
à 11 h
: mk2 Odéon (côté St Michel)
1 HEURE, 1 HISTOIRE DE PARIS « Paris à l’heure de la Renaissance. »
à 20 h
: mk2 Beaubourg MATTHIAS ET MAXIME Avant-première en présence du réalisateur Xavier Dolan.
à 12 h 30
: mk2 Quai de Loire à 19 h,
1 HEURE, 1 CINÉASTE « John Ford. »
mk2 Beaubourg à 19 h 45
: mk2 Odéon (côté St Michel).
JEUDI 17 OCT. CULTISSIME ! Projection de Showgirls de Paul Verhoeven.
: mk2 Gambetta dans l’après-midi
1 HEURE, 1 ARTISTE « Le Greco. »
: mk2 Beaubourg à 20 h
à 20 h
JEUDI 7 NOV. 1 HEURE, 1 ARTISTE « Le Caravage. »
: mk2 Beaubourg à 20 h
SAMEDI 9 NOV. 1 HEURE, 1 MYTHE EN FAMILLE « Thésée et le Minotaure, dans les dédales du labyrinthe. »
: mk2 Quai de Loire à 11 h
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CRÉATION ORIGINALE ¢
© CPB FILMS/ SCARLETT PRODUCTION /¢ – Crédits Photos : Rudy Waks, David Koskas, Arthur Farache Sauvegrain.
DEUX FAMILLES SE DÉCHIRENT. UN PAYS S’ENFLAMME.
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