CINÉMA I CULTURE I TECHNOLOGIE
BILAN
2007 AVEC VIRGINIE LEDOYEN
NUMÉRO 58 I DÉC. 07 // JANV. 08
PAGE 32
PAGE 54
PAGE 60
PAGE 17
PAGE 28
PAGE 30
PAGE 70
SOMMAIRE # 58 08_ 17_
32_ 34_ 36_ 38_ 41_
Tendances, Ciné fils, Regards croisés, Scène culte DOSSIER BILAN 2007 / PREVIEWS 2008 : Bilan 2007 : Entretien avec Virginie Ledoyen, L’année cinéma vue par ceux qui l’ont faite, Les classements de la rédaction… Previews 2008 : Sweeney Todd de Tim Burton, No Country For Old Men d’Ethan et Joel Coen PLEIN ÉCRAN : La Graine et le mulet d’Abdellatif Kechiche Garage de Lenny Abrahamson Un Baiser s’il vous plaît d’Emmanuel Mouret It’s A Free World de Ken Loach LE GUIDE des sorties en salles
CULTURE 54_ 60_ 62_ 64_ 66_
SHOPPING DE NOËL MUSIQUE : Rencontre avec Daniel Darc LES BONS PLANS DE ART : La BD passe par la case « musée » PAR Rip Hopkins
TECHNOLOGIE 68_ 70_ 72_ 74_
TRIBUNE LIBRE : Le CD, pas décidé à mourir RÉSEAUX : La 3D, nouvelle frontière du numérique VOD : Sleepy Hollow de Tim Burton SCIENCE-FICTION : Retour vers le futur
+ + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + ++ + + + + + + + + + +
CINÉMA
ÉDITO UN MAGAZINE DE CHOIXPAGE 06 « Informer, c’est choisir », entend-on fréquemment dans les salles de rédaction. Depuis qu’il a changé de formule en mars dernier, TROISCOULEURS s’efforce, humblement mais passionnément, de se poser en véritable média culturel, et non plus en magazine de marque. Cette mue est d’autant plus naturelle que MK2 a fait du choix éditorial le vecteur de sa politique, à travers les films, toujours triés sur le volet, qu’il produit et diffuse en salles, mais aussi en DVD ou sur Internet. Une politique qui, loin de nous contraindre, nous encourage à développer une ligne qui nous soit propre, et assumée comme telle. Choisir, donc. Cela commence par choisir ses collaborateurs : parmi les plumes qui font TROISCOULEURS, on trouve des dessinateurs talentueux, de jeunes blogueurs innovants, des photographes singuliers, des journalistes travaillant pour des médias prestigieux… Une exigence qui se reflète, souhaitons-le, sur notre contenu, comme l’illustre ce numéro bilan qui passe au peigne fin l’année écoulée. En espérant que nos choix soient aussi, au moins en partie, les vôtres. _Auréliano TONET
ÉDITEUR MK2 MULTIMÉDIA / 55 RUE TRAVERSIÈRE_75012 PARIS / 01 44 67 30 00 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION > Elisha KARMITZ I RÉDACTEUR EN CHEF > Elisha KARMITZ elisha.karmitz@mk2.com I DIRECTEUR DE LA RÉDACTION > Auréliano TONET aureliano.tonet@mk2.com / troiscouleurs@mk2.com ÉVÈNEMENTS > Caroline LESEUR caroline.leseur@mk2.com I CINÉMA / DVD > Sandrine MARQUES sandrine.marques@mk2.com I LIVRES > Pascale DULON pascale.dulon@mk2.com I MUSIQUE > Auréliano TONET I INTERNET / HIGH-TECH > Étienne ROUILLON etienne.rouillon@mk2.com I ART > Florence VALENCOURT florence.valencourt@mk2.com I ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO : Christophe ALIX, Thomas CROISY, Antonin DELIMAL, Baptiste DUROSIER, Clémentine GALLOT, Joseph GHOSN, Erwan HIGUINEN, Florian JARNAC, Rémy KOLPA KOPOUL, Raphaëlle LEYRIS, Oscar PARENGO, Antoine THIRION, Anne-Lou VICENTE, Patrick ZELNIK I ILLUSTRATIONS > Laurent BLACHIER, Thomas DAPON, DUPUY-BERBERIAN, Fabrice GUENIER, Fabrice MONTIGNIER I COUVERTURE > © Bertrand DESPREZ DIRECTRICE ARTISTIQUE ET MAQUETTE> Marion DOREL marion.dorel@mk2.com I IMPRESSION / PHOTOGRAVURE > ACTIS I PHOTOGRAPHIES > AGENCE VU’, Jérémie NASSIF, DR DIRECTEUR DE LA PUBLICITÉ > Marc LUSTIGMAN / 01 44 67 68 00 marc.lustigman@mk2.com I RESPONSABLE CLIENTÈLE CINÉMA > Laure-Aphiba KANGHA / 01 44 67 30 13 laure-aphiba.kangha@mk2.com CHEF DE PUBLICITÉ > Solal MICENMACHER / 01 44 67 32 60 solal.micenmacher@mk2.com © 2007 TROIS COULEURS// issn 1633-2083 / dépôt légal quatrième trimestre 2006. Toute reproduction, même partielle, de textes, photos et illustrations publiés par MK2 est interdite sans l’accord de l’auteur et de l’éditeur. Tirage : 200 000 exemplaires // Magazine gratuit // Ne pas jeter sur la voie publique.
Casey bien rempli
Révélé par Gus Van Sant, Casey Affleck brille ce mois-ci dans Gone Baby Gone, réalisé par son frère Ben. Portrait d’un comédien fragile, fidèle à ses familles. Il existe, paraît-il, des familles d’acteurs ; Casey Affleck, lui, est un acteur à familles. La première, la plus glamour, c’est celle qui le lie à une bande de comédiens amis, Matt Damon, Brad Pitt, ce genre de pointures. Plutôt discret dans la trilogie des Ocean’s, Casey se venge dans L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, beau succès automnal où il vole la vedette à Brad Pitt. Ce mois-ci, il habite littéralement Gone Baby Gone, le premier film de son frère Ben, où il interprète un jeune détective pris dans une sordide affaire d’enlèvement d’enfant. Ce qui nous mène à sa deuxième famille, biologique celle-là. Physiquement, Casey est plus sec, plus nerveux que son frangin. Ses origines irlandaises sont plus évidentes et s’il a les mêmes yeux un peu tombants que Ben, c’est son timbre fragile, légèrement suraigu, que l’on retient avant tout. Une singularité qui transparaît dès son premier film, Prête à tout, tourné à 20 ans en 1995, sous la direction de Gus Van Sant, son véritable père en cinéma. Suivront avec le même GVS Good Will Hunting (1998) et Gerry (2002), dont il est coscénariste et monteur. Coïncidence ? Van Sant est très proche de la famille de sa femme, la comédienne Summer Phoenix (sœur de Joaquin et de feu River), qui vient de lui donner un second bébé. Famille, quand tu nous tiens...
++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++ ++++++++++
TENDANCES
CALÉ
DÉCALÉ
RECALÉ
La 3D
Les « trois D »
Détroit
Nouvelle aire pour le numérique : du web au cinéma, la 3D s’incruste sur tous nos écrans et y dépose ses effets spatiaux. Parmi les premiers convertis : Tim Burton, dont le prochain film (Alice au pays des merveilles) devrait tâter du pixel. 8 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Chez Apple, la lettre magique est un i. En chanson, c’est désormais le d : le nouveau disque d’Etienne Daho déploie douceur et délicatesse, Daniel Darc déroule sa différence, et The Dø détonne avec sa pop délicieusement distillée.
Sale temps sur la ville du Michigan aux effroyables beffrois : les usines d’automobiles délocalisent, le chômage grimpe à 15 %, et l’enfant du pays, Francis Ford Coppola, foire son retour avec L’Homme sans âge.
L’esprit de Noël
Les cinéastes croient encore au Père Noël. Du moins, la fête de la Nativité les inspire : sa magie, ses traditions nourrissent des récits bien emballés. Mais bûches et embûches s’invitent souvent au menu du réveillon. Et là, ce n’est pas un cadeau… Pour pouvoir s’offrir un duffle coat, un jeune homme nécessiteux accepte d’endosser le costume du Père Noël et de poser avec les passants, dans Le Père Noël a les yeux bleus de Jean Eustache. Semi-clochard, Félix distribue quant à lui des tracts dans la rue pour un réveillon sexy : Le Père Noël est une ordure et il va semer la zizanie, comme Billy Bob Thornton, un alcoolique doublé d’un fornicateur dans Bad Santa. Noël prend alors des airs d’Halloween : créatures dégénérées, les Gremlins entonnent de bien effrayants chants de Noël qui terrorisent le voisinage. Chez Burton, la distribution des cadeaux est détournée de manière gore par un croquemitaine (L’Étrange Noël de Mr. Jack) ou par un pingouin, en mal de parents (Batman, le défi). Réunie autour de la traditionnelle dinde, la famille règle ses comptes (La Bûche) ou les fait, autour de l’argent de la drogue (Christmas de Ferrara). Elle se retrouve au pied du sapin chez Bergman (Fanny et Alexandre) ou chez Desplechin, qui va livrer courant 2008 son Conte de Noël. Dans Conte d’hiver, Éric Rohmer croit au hasard des retrouvailles amoureuses quand Kubrick, à l’inverse, enregistre dans Eyes Wide Shut la dislocation d’un couple : Kidman y fait l’aveu d’un adultère rêvé. Mais dans l’étrange Birth, son mari décédé lui revient sous les traits d’un enfant. Un autre doit défendre sa maison contre des cambrioleurs, en l’absence de ses parents qui l’ont oublié (Maman, j’ai raté l’avion). Seul, comme les héros de 24 Mesures qui se croisent sans se trouver. Pourtant, La Vie est belle, clame Frank Capra : un banquier désespéré renonce au suicide, comme une mère de famille dans Y aura-t-il de la neige à Noël ? Petits miracles d’un cinéma qui n’a rien de décoratif.
10 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
+++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++ ++++++++++++ +++++++++++++++++++++++++ ++++++++++++++++++++++++++ +++++++++++++
CINÉ FILS
La bande originale
L’ASSASSINAT DE JESSE JAMES PAR LE LÂCHE ROBERT FORD (Mute Records)
À l’heure des bilans annuels, louons les beautés de cette bande-son discrète, passée injustement inaperçue. D’une remarquable économie de notes, le chaman australien Nick Cave et son comparse Warren Ellis creusent une élégie sépulcrale et lancinante, accompagnant telle une ombre des cowboys voués au trépas. Certains parleront de «requiem country» pour le mariage de mélodies européennes à des paysages très western (basse, violon, piano) ; pour notre part, nous nous contenterons de rejouer en boucle, tel Casey Affleck à la fin du film, cet assassinat glaçant et exemplaire.
Le ciné livre
FEDERICO FELLINI « Le Livre de mes rêves » Flammarion
Cinéaste onirique par excellence, Federico Fellini a couché ses rêves sur papier trente ans durant, de 1960 à 1990. Tout aussi plantureux que les créatures qui habitent ses nuits, ce magnifique ouvrage est une plongée dans la psyché tourmentée de l’auteur de 8 1/2, qui fut illustrateur avant de s’engager dans le cinéma. Textes et dessins griffonnés au réveil content d’étranges orgies ferroviaires, à la pornographie toute adolescente, incursions chimériques dans l’antichambre d’un réalisateur ici libéré des contraintes du tournage, et pourtant déjà au travail.
TRAIT LIBRE Quatrième volet d'une série de six caricatures, TROISCOULEURS a demandé à l'illustrateur Laurent Blachier de croquer le réalisateur Tim Burton, dont le nouveau film Sweeney Todd sort le 23 janvier dans les salles. www.laurentblachier.com
11 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
REGARDS CROISÉS
J.P. Leaud vs Louis Garrel
U
ne affaire de famille lie deux comédiens que pourtant plusieurs générations séparent. Fils d’acteurs, Jean-Pierre Léaud est âgé de 14 ans lorsque François Truffaut le dirige dans Les 400 coups. Déjà hâbleur, l’adolescent cache une sensibilité à fleur de peau. Truffaut devient sa figure tutélaire. Leur collaboration artistique est une école de la vie. De film en film, le personnage d’Antoine Doinel grandit, aime (Baisers volés), se marie (Domicile conjugal), divorce (L’Amour en fuite). Après avoir joué à plusieurs reprises pour Godard (Masculin, Féminin), Léaud éclôt. Fragile et mélancolique chez Eustache, La Maman et la putain est le chant du cygne de toute une génération désabusée. Jeune prodige formé au Conservatoire, Louis Garrel a lui aussi grandi au sein d’une famille d’artistes. Très vite, il élit Léaud comme modèle, lui emprunte son art du contrepoint, sa démarche et son jeu décalé, souvent incompris à l’époque. Militant gauchiste, Léaud joue pour Philippe Garrel (le père de Louis), notamment dans La Naissance de l’amour. Dans son sillage, Louis Garrel fait lui aussi Mai 68… mais au cinéma, dans Les Amants réguliers et The Dreamers de Bertolucci. Après une période de relative discrétion, Léaud redevient, au tournant des années 1990, l’égérie du cinéma d’auteur international (Kaurismäki, Tsai Ming-liang, Bonello, Assayas), où s’illustre également le jeune Garrel. Christophe Honoré révèle dans les films Dans Paris et Les Chansons d’amour sa filiation très Nouvelle Vague. Teint pâle, mèches rebelles, Garrel actualise la figure romantique du héros libre et contradictoire. Le génie de Léaud ne saurait être réductible à une époque, comme il l’a prouvé en s’offrant une récente cure de jouvence cinématographique. À travers son héritier, le soleil noir de la mélancolie n’a pas fini de briller.
12 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Illustration_© Fabrice GUENIER
Louis Garrel n’a jamais caché son admiration pour Jean-Pierre Léaud, figure emblématique de la Nouvelle Vague. Nés à quarante ans d’écart, ces acteurs fiévreux sont des enfants de la balle. Rencontre entre deux funambules, tour à tour fantaisistes et mélancoliques.
SCÈNE CULTE Le Père Noël est une ordure
Habillé pour l’hiver LA PETITE HISTOIRE : Pièce de théâtre créée en 1979 par la troupe du Splendid, Le Père Noël est une ordure sort en 1982 sur les écrans français, où il rencontre un succès relatif. À l’époque, la RATP refuse de relayer les affiches, jugeant le titre trop provocateur. Le film réalisé par Jean-Marie Poiré devient véritablement culte à la télévision. Parmi sa galerie de personnages gratinés, M. Preskovic (Bruno Moynot), le voisin encombrant d’origine bulgare, a marqué les esprits avec ses desserts peu ragoûtants. Dobitchu « roulé sous les aisselles » et kloug aux marrons figurent dorénavant dans les meilleurs livres de cuisine.
LE PITCH : Le soir du réveillon, les très coincés Pierre (Thierry Lhermitte) et Thérèse (Anémone) assurent la permanence à SOS Détresse Amitié, où s’invitent toutes sortes de paumés. Félix, un clochard déguisé en Père Noël, veut récupérer Zézette qui l’a quitté. Un travesti dépressif multiplie les chantages au suicide. La soirée vire au cauchemar. Mais à cette occasion, Pierre et Thérèse se rapprochent. Et comme c’est Noël, ils s’offrent des cadeaux.
“
THÉRÈSE : Puisque vous ne pouvez pas attendre trois secondes, joyeux Noël Pierre ! PIERRE : Oh, c’est pour moi ? Merci beaucoup, Thérèse. Il ne fallait pas. [Ils s’embrassent maladroitement.] THÉRÈSE : J’espère que ça vous plaira. C’est dur avec vous, vous avez tout. PIERRE : Ecoutez Thérèse, rien que d’avoir pensé que c’était Noël, c’est déjà formidable.
THÉRÈSE : Non, Pierre, c'est un gilet. PIERRE : Ah oui ! Ah bah bien sûr, ah bah et alors bien sûr, c'est un gilet : il y a des trous plus grands pour les bras. Alors... Je suis ravi, Thérèse. Je suis... Vraiment, je suis ravi ! THÉRÈSE : Et point de vue coloris parce que... J'avais pensé à un joli camaïeu de bleu marine comme je sais que vous aimez bien, puis je me suis dit dans ces tons-là, ça changera. PIERRE : Vous avez tout à fait raison Thérèse, parce que le gris et bordeaux ça va avec tout alors, vous ne risquez pas de vous tromper. THÉRÈSE : Et puis c'est une chose qui n'est pas commune et que vous ne verrez pas chez tout le monde. PIERRE : Mais j'espère bien Thérèse, j'espère bien. Écoutez, si vous saviez ce que ça tombe bien : je me disais encore hier soir qu'il me manquait quelque chose pour descendre les poubelles.
”
THÉRÈSE : Vous n’ouvrez pas ? PIERRE : Si, mais de l’extérieur, c’est magnifique. Ooooh ! [Il ouvre le paquet.] Une serpillière ! C'est formidable Thérèse, je suis ravi, écoutez...
Le Père Noël est une ordure de Jean-Marie Poiré (1982, DVD disponible chez StudioCanal).
14 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Pages 6 à 12 réalisées par S.M., Au.To., E.R. et F.V.
BILAN
2007
DOSSIER COORDONNÉ PAR AU.TO., E.K. ET S.M. (AVEC C.G., AN.TH., A.D., F.V.)
PREVIEW
2008
17 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
VIRGINIE LEDOYEN
LES AMOURS DE VIRGINIE Dans Un Baiser s’il vous plaît d’Emmanuel Mouret, elle incarne une femme tiraillée par le désir et ses turpitudes. D’une clarté remarquable, son jeu épouse à merveille le langage de son réalisateur, tout en décalages subtilement maîtrisés. Virginie Ledoyen nous raconte ce Baiser troublant et évoque par la même occasion les coups de cœur qui ont pulsé son année cinématographique.
16 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
BILAN
2007
Qu’est-ce qui vous a amenée à jouer dans Un Baiser s’il vous plaît ? Je connaissais les précédents films d’Emmanuel, qui me plaisaient beaucoup. En tant qu’acteur, il me fait penser à Buster Keaton ou à Fernandel – pas seulement parce qu’il est Marseillais. Et en tant que réalisateur, il sait parler de choses assez graves avec un esprit et une fantaisie rares dans le cinéma français. Ce qui l’intéresse chez les gens, ce sont les maladresses, les failles. Il a beaucoup de pudeur et, en même temps, il se permet des choses d’une impudeur, d’une nudité des sentiments impressionnante : c’est dans ce décalage que se situe son humour. Enfin, mon personnage m’attirait beaucoup : sous des allures de jeune femme rangée, elle est très dérangée.
Le film est jalonné de références picturales et musicales. Emmanuel vous a-t-il demandé de lire, d’écouter, de regarder certaines œuvres ? Plus que la littérature, Emmanuel adore les essais. Alors chaque matin pendant le tournage, il me lisait une phrase de Montaigne ou de Nietzsche. Il aime beaucoup les films de Woody Allen, de Lubitsch, de Billy Wilder, de Raoul Walsh, tout un cinéma des années 1940 à 1970 qu’il m’a aidée à mieux connaître. Un mot sur l’année écoulée. Quels films vous ont marquée en 2007 ? J’ai été assez déçue par des films dont j’attendais beaucoup, comme Zodiac ou Les Promesses de l’ombre. En revanche, La Vie des autres m’a bouleversée. Les acteurs sont remarquables, et l’histoire, tout en flirtant avec une forme de populisme, évite habilement de tomber dans le mélo racoleur.
Au-delà de ses qualités comiques, le film dégage un érotisme puissant… Pour moi, l’érotisme du film vient des mots, de ce qui se dit, de la fabrication du rapport amoureux. Ce mélange de frontalité et de délicatesse, de naturel et de stylisation est la Cette année, plusieurs films ont fait du restaurant un lieu marque d’Emmanuel. Je pense notamment à cette scène central de leur intrigue : Waitress, La Graine et le mulet, incroyable, un long plan-séquence de sept minutes, Belle toujours, My Blueberry Nights, Les Promesses où son personnage demande au mien s’il peut lui de l’ombre, Le Rêve de Cassandre... Votre mère caresser le sein gauche, puis le droit, si elle tenait un restaurant. Petite, imaginiez-vous le SOUS DES peut s’allonger sur le lit comme un piquet… potentiel cinématographique de ce lieu ? C’est troublant, incongru et cocasse à la ALLURES DE JEUNE J’aurais bien aimé tourner dans le resto fois. Quand bien même ses personnages de ma mère, c’est sûr. De manière générale, FEMME RANGÉE, parlent beaucoup, Emmanuel possède un ce qui se passe autour d’une table, c’est vrai sens de la narration, de la dramaturgie, MON PERSONNAGE d’une intimité folle : ce que mangent les du suspense. C’est en cela qu’il peut EST TRÈS DÉRANGÉ. gens, comment ils le font, ce qui s’y dit, les éventuellement être qualifié de théâtral. repas de famille, d’amoureux, de copains... Le langage d’Emmanuel est moins suranné C’est une formidable source de dramaturgie, qu’il n’y paraît : dans la justesse de la pensée, de de vie, de rencontres. Il y a des règlements de compte, l’expression, des thèmes abordés, il trouve quelque chose de l’ennui, des drames humains : La Grande Bouffe, Festen... d’intemporel. Je ne connais pas plus pénible à tourner, mais quand c’est réussi, c’est magique. Le film tourne tout entier autour de cette question : existet-il des baisers sans conséquences ? Avez-vous trouvé la Vous tournez votre prochain film à Londres, une ville elle réponse ? aussi à l’honneur au cinéma cette année. Comment analysezD’une certaine manière, le film y répond, lorsque le vous cet attrait ? personnage de Julie Gayet dit : « Un baiser, tant qu’on ne l’a C’est une jolie ville, une ville immensément riche et pas donné, on ne saura jamais s’il sera petit ou grand. » compétitive, une sorte de pont entre l’Europe et les ÉtatsC’est le génie de la vie : à ses risques et périls. Unis qui, sous ses airs aseptisés, peut déclencher des comportements très agressifs. Même si les Anglais sont Cela fait quoi d’embrasser si souvent son metteur en charmants, j’y trouve quelque chose d’inhumain, que je ne scène ? saurais définir tout à fait. On s’est trop embrassé pour que j’en garde un souvenir précis. C’était la première fois que je jouais avec un acteur Que peut-on vous souhaiter pour 2008 ? qui était le metteur en scène, ce qui m’intriguait un peu. De beaux rôles, en faire et en voir, de la même manière qu’Un Pourtant, il avait beau être le comédien avec lequel je Baiser s’il vous plaît est un film qui m’a fait du bien en tant partageais toutes mes scènes, je n’ai jamais oublié qu’il que spectatrice, et pas seulement en tant qu’actrice. était le réalisateur, je n’ai jamais eu peur de son absence _Propos recueillis par Au.To. d’objectivité, de certitude. Il se dédouble, mais ce n’est Lire la critique du film page 36 et voir des extraits vidéos des interviews de Virginie Ledoyen et d’Emmanuel Mouret sur mk2.com jamais un manque à gagner.
“
© Bertrand DESPREZ
“
19 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
2007 VU PAR CEUX QUI L’ON Avant de parcourir l’année écoulée à travers les thèmes et les films qui l’ont scandée (voir pages suivantes), nous avons demandé à quelques réalisateurs et comédiens marquants de nous raconter 2007, et d’imaginer 2008. Morceaux choisis.
SIDNEY LUMET Réalisateur, auteur en 2007 de 7h58 ce samedi-là. Le bilan 2007 : « J’ai aimé tourner mon dernier film à New York, une ville qui n’a pas vraiment changé : détruire des immeubles, en reconstruire de nouveaux, cela a toujours été ça, New York, c’est d’ailleurs ce qui lui donne son énergie si particulière. Contrairement à Paris par exemple, New York est capable d’offrir un spectre inégalé d’atmosphères, d’ambiances, de décors. »
Alexander Siddig, mon acteur si raffiné, au bourbon. La promesse de Viggo Mortensen, un soir : « Je veux jouer dans ton film et j’irais bien sûr jusqu’au Moyen-Orient », droit dans les yeux, pfff… Et puis toutes ces larmes que j’ai versées à la fin De l’autre côté et de La France et de 4 mois et de Never Forever… » Les attentes 2008 : « Continuer à planer dans le cinéma et ailleurs. Que rien ne me guérisse. »
Les attentes 2008 : « Le futur du cinéma est numérique. D’ici cinq ans, il n’y aura plus de films en pellicule. Avec la pellicule, il est très difficile d’obtenir une sensation de réalité, de faire croire que ce que l’on a filmé s’est réellement passé. J’espère qu’avec le numérique, ce problème sera résolu. »
SERGE BOZON Réalisateur, auteur en 2007 de La France.
RAPHAËL NADJARI Réalisateur, auteur en 2007 de Tehilim.
DANIELLE ARBID Réalisatrice, auteur en 2007 d’Un Homme perdu. Le bilan 2007 : «Mon initiation par
20 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Les attentes 2008 : « L'année 2008, je ne sais pas quoi en attendre. J'espère un vrai renouveau des genres, une sortie de la politique, une vraie démarche de questionnement plutôt que des films-réponses un peu convenus. »
Le bilan 2007 : « C'est difficile de parler des choses alors qu'elles se déroulent. Quelque chose peut nous marquer sur le coup et puis s'en aller très vite. On peut ne pas voir l'importance d'un film et puis se rendre compte de sa force en le revoyant. La Nuit nous appartient de James Gray, un questionnement permanent sur l'idée de la loi et de ses dérives. Beaufort de Josef Sider, un film contre la guerre du Liban. Satrapi pour son audace et son sens de l'humour. »
Le bilan 2007 : « Ce que je retiens de 2007 : Steak, Black Snake Moan, Les Amours d’Astrée et de Céladon. Trois films drôles, audacieux et frontaux. Non-sens et adolescence meurtrière, édification et nymphomanie enfantine, travestissement et séduction théâtrale. » Les attentes 2008 : « Ce que j’attends en 2008 : les films d’Axelle Ropert (La Famille Wolberg), Pascale Bodet et Emmanuel Levaufre (Le Carré de la fortune), Sandrine Rinaldi (Cap Nord). Trois films drôles, audacieux et frontaux. »
BILAN
2007
T FAIT...
JULIE GAYET Comédienne, à l’affiche en 2007 d’Un Baiser s’il vous plaît. Le bilan 2007 : « On ne sait toujours pas ce qui marche et ça c’est une bonne nouvelle. Trois films m’ont marquée : Le Scaphandre et le papillon, Les Chansons d’amour et Control, trois films sans concession, sincères, poétiques, décalés, où l’image, les acteurs et la musique sont absolument remarquables. Retrouver ces qualités dans le film d’Emmanuel Mouret ne fut pas mon moindre bonheur. »
ça a été les plus grandes vacances de ma vie, après trois ans de travail ininterrompu. J’ai ressenti la sortie de mon film à la fois comme une libération et comme une dépossession. À l’automne, j’ai beaucoup pris le train avec les comédiens pour présenter le film en province, ça finit par être usant mais cela m’a plu parce que j’aime bien les rencontres, les débats, et cela m’a aussi fait découvrir de nombreuses villes de France ! En tant que spectatrice, les films de Rohmer, Tarantino, Cronenberg, Nolot, Le Besco et Grisebach m’ont beaucoup marquée. » Les attentes 2008 : « Je prépare un deuxième film, Le Père de mes enfants, que je dois tourner l’été prochain (avec les enfants, il n’y a pas le choix, il faut que ce soit les vacances). »
AÏSSA MAÏGA Le bilan 2007 : « 2007 a été une très bonne année, l’année du cinéma italien pour moi puisque j’ai passé deux mois et demi à Rome pour un tournage… En italien ! Et dans quelques jours, je serai membre du jury du festival du film de Marrakech. Bref, l’internationalisation… »
MIA HANSEN-LOVE Le bilan 2007 : «Grande joie quand j’ai su que le film allait à Cannes. Je garde du festival un souvenir diffus, j’étais un peu fébrile, c'était la première fois que je montrais le film, même aux comédiens. L’été,
Les attentes 2008 : « J’espère qu’IMovie 4 [logiciel de montage, NDLR] aura deux pistes de son supplémentaires. »
Comédienne, à l’affiche en 2007 de L’Âge d’homme.
Les attentes 2008 : «Tourner avec Sean Penn – le réalisateur, pas l’acteur. Sean, si tu lis ces lignes...»
Réalisatrice, auteur en 2007 de Tout est pardonné.
de consommation issu de vastes études de marché et destiné, par définition, à satisfaire tout le monde au nom de la distraction. C’est l’inverse de la création et tout le monde crie au génie ! »
MELVIL POUPAUD Comédien, à l’affiche en 2007 d’Un Homme perdu et de L’Heure zéro. Le bilan 2007 : «L’intérêt généralisé pour les séries télé, pur produit
Les attentes 2008 : « L’an prochain, j’ai envie d’aller plus au cinéma, mais quand tu tournes et que tu as une vie de famille, c’est mission impossible ! 2008 sera surtout l’année du tournage de mon premier film en tant que réalisatrice : Il faut quitter Bamako. »
21 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LES RÉALISATEURS ONT AIMÉ...
BILAN
2007
LA DÉCLARATION LA PLUS ÉPICÉE
Les Promesses de l’ombre
« TU ES SI DOUCE QUE TU FERAIS PASSER DU SUCRE POUR DU SEL. » (BOULEVARD DE LA MORT)
Les promesses de Londres Travellings avant Le cinéma se met à l’heure du thé. Londres, la ville-monde, attire les auteurs. Woody Allen s’y régénère depuis trois films, tandis que Cronenberg en fait une ville Janus que contaminent l’Est et sa mafia (Les Promesses de l’ombre). Loach, quant à lui, y enregistre les ravages du capitalisme sauvage dans It’s A Free World. Enfin, si le Hongrois Béla Tarr n’a pas tourné in situ L’Homme de Londres, la ville est pourtant le décor implacable et rêvé d’un film noir métaphysique.
La guerre des sexes Le sexe fort n’est pas forcément celui qu’on croit. Dans Boulevard de la mort, des amazones de la route règlent son compte à un cascadeur psychopathe. Dans Planète Terreur, une strip teaseuse prend la tête d’une armée anti-zombies. Délaissée mais pugnace, Une Vieille Maîtresse ramène vers elle son amant. Quand les femmes se solidarisent, c’est pour lutter contre la domination masculine chez Mungiu (4 mois, 3 semaines, 2 jours) ou Shelly (Waitress). De sorte que le mâle est en crise chez les Farrelly (Les Femmes de ses rêves) ou Apatow (En Cloque).
22 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
En transit, le cinéma en 2007 compte un bon lot de déracinés. Entre la Turquie et l’Allemagne, six destins se croisent et Fatih Akin passe de L’Autre Côté. Assayas, quant à lui, franchit la Boarding Gate et atterrit en Asie où les Exilés de Johnnie To s’affrontent autour d’un contrat. Dans la région des Trois Gorges, des solitaires se mettent en quête de leurs proches, portés disparus après la construction d’un barrage (Still Life). L’exil hongrois meurtrit la jeune Marjane Satrapi dans Persepolis, mais un déplacement au Moyen-Orient modifie à jamais le regard d’un photographe français cynique dans Un Homme perdu de Danielle Arbid.
dramatique dans Les Promesses de l’ombre, où une adolescente meurt en couches. Mais à travers la naissance s’orchestre le passage à l’âge adulte et s’organise la solidarité entre les individus : la naissance prend alors des allures de renaissance.
American Gangster
Ex-fan des seventies Still Life
Naître ou ne pas naître En 2007, le cinéma a accouché d’un certain nombre de récits où la maternité n’était pas toujours un sacerdoce. Grossesses non désirées dans En Cloque, Waitress et 4 mois, 3 semaines, 2 jours ; grossesse
En 2007, Hollywood remet au goût du jour ses meilleures recettes : un festin de genres, sortis tout droit des années 1970. Le palimpseste est large qui embrasse le film d'espionnage (Raisons d'État, La Vengeance dans la peau), de gangsters (American Gangster, La Nuit nous appartient), le thriller (Zodiac, 7h58), l’hommage au cinéma bis (Boulevard de la mort, Planète terreur) ou bien encore les films à thèse politique (Michael Clayton, Le Royaume, Dans la vallée d’Elah). Un revigorant revival.
LES RÉALISATEURS ONT AIMÉ...
BILAN
2007
LA RÉPLIQUE DE L’ANNÉE
L’Assassinat de Jesse James
« JE N’AI RIEN DIT. C’EST PAR RESPECT POUR TOI ET POUR LE COUSCOUS. » (LA GRAINE ET LE MULET)
Family affair « Famille, je vous honnis », « famille, je vous choisis ». Chez Cronenberg et Gray, élire la famille mafieuse ou biologique engendre un conflit. Elle est recomposée chez Mia Hansen Love, liée par le deuil chez Honoré, unie ou divisée face aux événements politiques chez Satrapi ou Luchetti. La fratrie bascule de concert dans le crime chez Lumet et Allen. Mais Faut que ça danse ! nous dit Noémie Lvovsky, qui réunit à l’écran une famille attachante de doux dingues, en plein déni.
Faut que ça danse !
mieux se retrouver deux personnages en deuil (La Forêt de Mogari), tandis que des soldats déserteurs battent la campagne (La France), unis et solidaires comme les héros au début de L’Assassinat de Jesse James.
À l’Est du nouveau Le cinéma de l’Est explose dans les festivals du monde. 4 mois, 3 semaines, 2 jours devient la première Palme d’or pour la Roumanie, où Coppola est allé tourner L’Homme sans âge. Le tropisme de l’Est se retrouve chez Cronenberg et Gray, à travers la mafia russe. À l’occasion du remake d’un film maudit, la Pologne contamine un tournage à Hollywood dans Inland Empire. Chez Loach enfin, des employeurs sans scrupule recrutent et exploitent des travailleurs immigrés de Pologne ou d’Ukraine. La conquête du « Far East » ne fait que commencer.
Mises au vert La forêt ne laisse pas de bois des réalisateurs chez qui la nature fait un retour en force en 2007. Rohmer enveloppe Les Amours d’Astrée et de Céladon de la présence sensuelle et mystérieuse de la sylve. D’anciens camarades tentent en vain de se retrouver (Old Joy), loin du chaos urbain. Dans la forêt s’égarent pour
24 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
La confusion des genres
4 mois, 3 semaines, 2 jours
La France
Travestissements et indécisions sexuelles traversent le cinéma de 2007. Dans La France, Sylvie Testud se change en militaire dans l’espoir de retrouver son mari au front. Todd Haynes fait, lui, de Cate Blanchett l’une des incarnations de Bob Dylan dans I’m Not There. Par jeu, la Vieille Maîtresse qu’est Asia Argento se déguise en homme, quand Andy Gillet se transforme en femme afin de séduire une amante inaccessible dans Les Amours d’Astrée et de Céladon. Quant aux héroïnes de Naissances des pieuvres, elles interrogent leur féminité, quitte à déflorer une copine honteuse de sa virginité.
LA RÉDACTION A AIMÉ...
BILAN
2007
LA RÉPLIQUE LA PLUS COCHONNE
La Nuit nous appartient de James Gray
« SPIDER-COCHON, SPIDERCOCHON, IL PEUT MARCHER AU PLAFOND. » (LES SIMPSON – LE FILM)
La scène la plus érotique
La chanson de l’année
LE SEIN DE VIRGINIE
DELTA CHARLIE DELTA Control, I’m Not There, Once, La France… Cette année, les films musicaux ont fait fort, même si l’on garde un faible pour les émouvantes Chansons d’amour de Christophe Honoré, dont ce Delta absurde et mortuaire.
On connaissait, via Rohmer, le genou de Claire : on se souviendra désormais du sein de Virginie Ledoyen, délicatement caressé par la main d’Emmanuel Mouret dans Un Baiser s’il vous plaît.
La révélation de l’année CONSTANCE ROUSSEAU À 17 ans à peine, sa beauté florentine illumine Tout est pardonné de Mia Hansen Love. À grâce divine, pardon éternel.
Le mafioso de l’année VIGGO MORTENSEN Les mafiosi ont mis en pièces l’année 2007. Mais s’il devait ne rester qu’un survivant du carnage, ce serait Viggo, vainqueur d’une mémorable baston à poil dans des bains turcs chez Cronenberg.
26 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Le braquage le plus lamentable de l’année 7H58 CE SAMEDI-LÀ Deux frères braquent la boutique de leurs parents. Le hold-up est violemment raté, et le film de Lumet infiniment réussi.
Le dénouement le plus «what else ?» de l’année GEORGE CLOONEY DANS MICHAEL CLAYTON George la joue smooth avec une conseillère juridique corrompue, puis dégaine un portable-enregistreur enfoui sous sa veste. Fort de café.
FILMS PRÉFÉRÉS DE LA RÉDATION La Nuit nous appartient _James GRAY Paranoid Park _Gus VAN SANT La Graine et le mulet _Abdellatif KÉCHICHE Les Promesses de l’ombre _David CRONENBERG Persepolis _Marjane SATRAPI Les Chansons d’amour _Christophe HONORÉ 4 mois, 3 semaines, 2 jours _Cristian MUNGIU Still Life _Jia ZHANG-KE Boulevard de la mort _Quentin TARANTINO La France _Serge BOZON
DEPP IMPACT Flanqué de son acteur fétiche Johnny Depp, Tim Burton revient en forme avec Sweeney Todd, comédie musicale gore et gothique sur fond de brumes londoniennes.
PREVIEW
2008
SWEENEY
TODD
P
rès de quinze ans après L’Étrange Noël de Mr. Jack, Tim Burton s’amuse à refaire chanter des morts. Dans Sweeney Todd, Johnny Depp incarne un barbier démoniaque, autant porté sur les vocalises que sur les meurtres. Le film s’inspire de la comédie musicale de Stephen Sondheim, énorme succès à Broadway dans les années 1980, elle-même basée sur une légende des basfonds du Londres victorien. Au début du XIXème siècle, Benjamin Barker, barbier victime d’une tragédie familiale, est injustement envoyé en prison. Il revient des années plus tard sous le pseudonyme de Sweeney Todd, métamorphosé en cannibale vengeur et chantant, rasant d’un peu trop près ses victimes avant de s’en débarrasser avec l’aide de sa maîtresse – une pâtissière vorace, Helena Bonham Carter. À 47 ans, Burton continue de cultiver une personnalité d’excentrique à Hollywood. L’artisan de la série des Batman, adouci ces dernières années (Big Fish, Charlie et la chocolaterie) et récompensé pour l’ensemble de son œuvre au festival de Venise en septembre, retrouve ici le goût du gore, mâtiné de sensibilité pop. Cette fresque proche de l’univers de Dickens renoue avec l’imaginaire tourmenté et gothique de l’auteur de Sleepy Hollow, ainsi qu’avec sa fascination ambiguë pour les freaks mis au ban de la société : Sweeney Todd est un énième revenant burtonien, évoquant les pantins hystériques et délirants de Beetlejuice, Pee Wee ou Mars Attacks. Côté casting, malgré la présence inattendue de Sacha Baron Cohen a.k.a. « Borat », la tendance est là encore à la continuité : le film marque la sixième collaboration du duo Burton / Depp depuis les années 1990. Le réalisateur d’Ed Wood, reconnaissable à son insolente crinière, a trouvé chez Johnny Depp un alter ego sauvage et fantasque, exécutant avec soin les frasques du maître, qui en retour canalise son énergie et son sens du secret. Sweeney Todd sera l’un des films de Noël aux États-Unis. La presse s’est gentiment moquée (« c’est Edward aux mains d’argent version chansons », écrit New York Magazine), pourtant on le murmure déjà chéri des Oscars. Sortie le 23 janvier
_Clémentine GALLOT (à New York)
29 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
DE SANG FROID Chasse à l’homme brutale dans le désert texan, réflexion puissante sur le Mal, No Country For Old Men est la première adaptation littéraire des frères Coen. Réussite.
PREVIEW
2008 NO COUNTRY FOR OLD MEN
U
ne poursuite triangulaire entre personnages opaques et stoïques, évoluant au gré de paysages désespérants : No Country For Old Men marque le retour à leur meilleur niveau de Joel et Ethan Coen, Palme d’or 1991 pour Barton Fink. Nous sommes au Texas, en 1980 : Llewelyn Moss (Josh Brolin), chasseur d’antilopes et péquenot désoeuvré, tombe par hasard sur un règlement de compte sanglant entre dealers mexicains. Au milieu des corps se trouve une mallette abandonnée, contenant un million de dollars. L’infortuné Llewelyn s’empare du butin, attirant ainsi l’attention d’un psychopathe en goguette, Anton Chigurh (Javier Bardem), qui se lance à sa poursuite. Derrière cette chasse à l’homme gravite un sheriff pensif (Tommy Lee Jones, tout fripé). Après le grinçant Ladykillers (2004), cette nouvelle mise en scène porte la patte des Coen : cynisme grimaçant et violence ordonnée. Le personnage du vilain méthodique, joué par l’Espagnol Javier Bardem, arbore d’ailleurs une coupe au bol déconcertante, preuve que les frères Coen ont toujours un faible pour la caricature. Fidèle à l’écriture froidement ironique de McCarthy, romancier «southern gothic», le film renoue avec la noirceur et l’espace dépeuplé de Fargo (1996). En choisissant pour matrice l’espace vide d’un désert éclatant, le pays des frères Coen rappelle celui de Gerry ou de Massacre à la tronçonneuse. Signe des temps, le film s’égare à la limite entre le Texas et le Mexique, manière de rappeler que la question de la frontière est redevenue centrale dans l’espace politique américain, plus que jamais hanté par le spectre de l’immigration clandestine. Ici, les Mexicains trimbalent de la coke dans leur coffre et se flinguent en pleine rue, le sheriff est mélancolique, et le cow-boy Llewellyn est coté de la plaque avec sa moustache mal taillée : ça va mal, donc, un Mal endémique, échappant à la justice des hommes et de Dieu, signant la faillite de l’Ouest américain. Mais cette austérité de façade ne doit pas faire oublier que les cinéastes de The Big Lebowski et O’Brother sont avant tout d’adroits stylistes : le tandem Coen, avec sa mécanique bien huilée, reste une machine à manufacturer du mythe américain qui tourne à plein rendement. Sortie le 23 janvier
_C.G. 31 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
PLEIN ÉCRAN La Graine et le mulet_Abdellatif KECHICHE
EN 3 GRAINES
ABDELLATIF KECHICHE Hafsia Herzi, prix Marcello Mastroianni à la Mostra de Venise 2007. Sara Forestier, César 2004 du meilleur espoir féminin pour L’Esquive. Sabrina Ouazani, révélée dans L’Esquive, toujours aussi explosive dans La Graine et le mulet.
Couscous royal La Graine et le mulet est le troisième longmétrage d’Abdellatif Kechiche ; c’est aussi l’un de ces films pour lesquels il faut remonter nos montres un peu plus loin que l’heure du tournage, aux débuts d’un cinéaste qui se révèle aujourd’hui pleinement.
Q
ue La Graine et mulet soit produit par Claude Berri et s’apprête à recevoir une pluie d’éloges n’aurait sans doute pas été possible sans le succès hautement mérité de L’Esquive, tourné en DV avec de jeunes acteurs reconduisant l’énergie de la tchatche dans le répertoire de Marivaux. Manifeste, déjà, où un certain parlé de banlieue se déprenait des commisérations sociologiques à son égard ; où le verbe et l’écriture, la vie et le théâtre s’accordaient à tenir ensemble un langage nouveau. Mais le vrai manifeste, on l’a peut-être maintenant sous les yeux : c’est La Graine et mulet, dont Kechiche projetait déjà le tournage avant son premier long, La Faute à Voltaire, mais qui passa derrière L’Esquive faute de financements. C’est au propre père du cinéaste que devait revenir le rôle principal, et à Nice que l’intrigue devait se nouer : mais les années passant, Sète devient son décor et un collègue de chantier du père, Habib Boufarès, prend le rôle de Monsieur Beiji. Trois manières de lire le titre. Licensié sans égards à l’aube de la retraite, Beiji a l’idée de monter un restaurant flottant dont la spécialité serait le couscous (la graine) au poisson (le mulet). Son idée (la graine) ne prend forme que grâce à l’aide et à la détermination de sa belle-fille Rym (un beau mulet, Hafsia Herzi). Récit d’ambition et de labeur où l’on peut évidemment lire une confidence du cinéaste sur son travail. On n’en dira pas plus. La Graine et le mulet ne cache pas son ambition de fiction sociale, et pourtant une telle énergie, une telle générosité sont rares dans le cinéma français : Kechiche ne laisse aucun personnage sur le bord de la route, sinon celui qui s’y risque délibérément et menace de faire chavirer le navire. _Antoine THIRION Un film d’Abdellatif KECHICHE Avec Habid Boufarès, Hafsia Herzi, Faridah Benkhetache… Distribution : Pathé // France, 2007, 2h31
32 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
SORTIE LE 12 DÉCEMBRE
EN 3 RÉCOMPENSES
ABDELLATIF KECHICHE La Faute à Voltaire, Lion d’or de la meilleure première œuvre à la Mostra de Venise 2000. L’Esquive, Césars 2004 du meilleur film et du meilleur réalisateur. La Graine et le mulet, prix spécial du jury et prix de la critique internationale à la Mostra de Venise 2007.
3 RAISONS D’ALLER VOIR CE FILM 01 Parce qu’Abdellatif Kechiche tient toutes les promesses de L’Esquive. 02 Pour la comédienne Hafsia Herzi, révélation de l’année. 03 Parce qu’il tire le cinéma français à un niveau rarement atteint, sans jamais le renier.
3 QUESTIONS À HAFSIA HERZI Pourquoi avoir menti, pendant le casting, sur le fait que vous pratiquiez la danse du ventre ? Je pensais à l’époque que plus on avait de choses sur son CV, plus on avait de chances d’être prise. Auparavant, je n’avais fait que de la figuration. Je ne connaissais pas encore le travail d’Abdel, je ne savais même pas qu’il y aurait une scène de danse. Le problème, c’est que lorsqu’on a voulu me revoir, on m’a demandé de danser... et j’ai fait ce que j’ai pu en expliquant que je faisais un nouveau type de danse orientale. Une fois sur le tournage, nous avons mis cinq jours pour filmer cette fameuse scène de danse : il faisait très froid, j’ai trébuché et me suis fait mal. Il a fallu danser avec une atèle. Je ne voulais pas retarder le tournage. On a fait deux jours sans atèle pour les plans larges et trois avec, pour les plans serrés. Bien sûr, les autres acteurs dans la salle commençaient à fatiguer, mais sans eux, l’énergie disparaissait. Où étiez-vous lorsque vous avez appris qu’un prix allait vous être remis à Venise ? À Marseille pour voir ma mère. On m’a demandé de revenir, qu’il y avait un prix pour le film ; je ne savais pas qu’il était pour moi. Mes correspondances ont eu du retard, une voiture est venue me chercher à Rome, on m’a donné une robe, et on m’a appelée sur scène quelques minutes après m’être assise dans la salle. J’étais bouleversée. Qu’est-ce tournez-vous en ce moment ? Le premier long-métrage d’un réalisateur irakien, un projet que j’ai depuis un an, peu après mon arrivée à Paris. Ça se passe à Bagdad dans les marais irakiens, des endroits très pauvres où les gens vivent dans des maisons sur l’eau, une histoire d’amour entre un soldat et une fille des marais, et c’est moi, une fille sauvage qui marche pied nu et dont tous les garçons tombent amoureux. _Propos recueillis entre Paris et l’Égypte par An.Th.
33 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
PLEIN ÉCRAN Garage_Lenny ABRAHAMSON PAT SHORTT EN 3 PARTENAIRES Mia Farrow_En 1997, Pat et Mia partagent l’affiche d’Angela Mooney Dies Again. PRESTIGIEUX James Caan_L’année suivante, Pat retrouve l’interprète mythique de Sonny Corleone dans This Is My Father. Michael Madsen_Plus récemment, il s’illustre aux côtés du protégé de Tarantino dans Strength And Honor.
Pas si simple Révélé en 2005 avec Adam & Paul, le cinéaste Lenny Abrahamson plonge au cœur de la campagne irlandaise pour suivre le quotidien d’un simple d’esprit. L’occasion d’une fable tragicomique sur les grandeurs et les misères de l’idiot du village global. asser sa vie dans une station-service poussiéreuse en périphérie d’une bourgade irlandaise perdue dans le sphincter universel n’est guère la panacée pour prétendre au bonheur, si ? C’est pourtant le lot de Josie (Pat Shortt), un homme naïf et débonnaire que tout le monde considère autour de lui comme un marginal inoffensif. Entre les commérages et les rejets divers qu’il vit régulièrement, Josie parvient bon an mal an – miracle – à être heureux. L’arrivée d’un jeune apprenti dans son univers clos va bouleverser la mécanique de son existence, dévoilant les limites du lien que tout Candide moderne entretient malgré lui avec le corps social. Comment être respecté par autrui quand on est généreux, optimiste et sans calcul ? Sur ce thème ironique, Garage interroge lucidement les consciences d’aujourd’hui, mâtinées d’arrivisme consumériste. Par sa capacité à osciller entre le drame sombre et la farce minimaliste, le film de Lenny Abrahamson oublie intelligemment de s’étendre sur l’absurdité bouffonne de son protagoniste – quelques scènes burlesques pour planter le décor et rideau. Du coup, Garage tend plutôt vers un récit clairobscur où la pureté de l’individu scelle définitivement son inadaptation au monde contemporain, dans ses règles et ses codes. Auréolé du rôle principal, l’acteur irlandais Pat Shortt, auteur de one-man-shows incontournables dans son pays, démontre à travers une interprétation sans faille que de la noirceur la plus crue peut jaillir la lumière.
P
_Antonin DELIMAL
Un film de Lenny ABRAHAMSON Avec Pat Shortt, Anne-Marie Duff, Conor Ryan… Distribution : MK2 // Irlande, 2007, 1h30 Prix du meilleur film au festival de Turin 2007 Sortie le 9 janvier
34 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
3 RAISONS D’ALLER VOIR CE FILM 01
Pour le jeune comédien débutant Conor Ryan, tout en retenue.
Pour la subtilité du scénario, qui a valu au film 02 d’être primé lors de la dernière Quinzaine des Réalisateurs à Cannes. Pour voir Anne-Marie Duff remettre un fâcheux 03 à sa place d’un lapidaire : « Je ne te pisserais même pas dessus si tu étais en feu. »
PLEIN ÉCRAN Un Baiser s’il vous plaît_Emmanuel MOURET EN 3 FILMS DE CHEVET
EMMANUEL MOURET L’Opérateur de Buster Keaton. Cluny Brown (La Folle Ingénue) d’Ernst Lubitsch. Édouard et Caroline de Jacques Becker.
Même adresse Avec Un Baiser s’il vous plaît, marivaudage drôle et troublant, Emmanuel Mouret s’impose comme un grand cinéaste de la parole, confirmant le talent d’auteur entrevu l’an dernier dans Changement d’adresse, son précédent film.
S
’il est commode d’apparenter Emmanuel Mouret à certains cinéastes dits «littéraires», tels Éric Rohmer ou Woody Allen, il ne faudrait pas oublier le côté presque scientifique, en tout cas fortement expérimental de son cinéma. Un souvenir de ses études de mathématiques ? Peutêtre. Alors que dans Changement d’adresse, le problème se résumait à résoudre une équation sentimentale à inconnu(e)s limitées, dans Un Baiser s’il vous plaît, la problématique s’avère plus complexe... La situation de départ est pourtant simple : Emilie (Julie Gayet) rencontre Gabriel (Michaël Cohen). Ils se plaisent. Il est sur le point de l’embrasser, même si tous deux sont engagés ailleurs, car il sait qu’ils ne se reverront sans doute jamais. Pourtant, le souvenir d’un autre baiser, lui aussi voulu sans conséquences, retient Emilie : celui qui a rapproché Nicolas (Emmanuel Mouret) de sa meilleure amie Judith (Virginie Ledoyen). On monte alors d’un cran dans la difficulté : tandis que Nicolas et Judith, lui professeur de mathématiques et elle chercheur, n’ont pas réussi à vivre pleinement leur baiser, Emilie et Gabriel pourraient-ils y parvenir ? Mais, laissons là la science ou même le suspense, car ce qui fait tout l’attrait du film d’Emmanuel Mouret n’est pas tant le propos que sa manière de le mettre en mots et en images, justement. Et le verbe, auquel la peinture et la musique servent ici de parfaites chambres d’écho, est à la fois fragile, précis, érotique et gentiment désuet. Il respire à son rythme et apporte une fraîcheur rare dans un cinéma français souvent trop bavard. S’il ne délivre pas de solution mathématique ou morale à la question posée par le film, Mouret est en revanche parvenu à élaborer une formule cinématographique imparable : la sienne. _Florence VALENCOURT Un film d’Emmanuel MOURET Avec Virginie Ledoyen, Emmanuel Mouret, Julie Gayet, Michaël Cohen… Distribution : TFM Distribution // France, 2007, 1h40 Sortie le 12 décembre
36 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
3 RAISONS D’ALLER VOIR CE FILM 01
Pour le quatuor d’acteurs, qui livre une partition galante sans fausse note.
02 Pour la main de Nicolas, faisant monter le désir à mesure qu’elle descend… 03 Pour la maladresse très… adroite que déploie le personnage incarné par Emmanuel Mouret.
PLEIN ÉCRAN It's A Free World_Ken LOACH EN 3 FILMS SUR LE TRAVAIL
KEN LOACH Les Dockers de Liverpool (1996) documente le licenciement de 500 employés, militant pour leur réintégration. Bread And Roses (2000) dénonce l’exploitation des travailleurs immigrés aux États-Unis. The Navigators (2001) dépeint les ravages de la privatisation du rail en Angleterre.
Quart monde Après Le Vent se lève, Palme d’or en 2006, Ken Loach revient à sa veine sociale, en s’emparant d’un sujet contemporain : l’exploitation de travailleurs immigrés à Londres, un « atelier du monde » à ciel ouvert. Précis et frappant.
F
iction désenchantée, It’s A Free World renoue avec le monde du travail, sujet de prédilection de Ken Loach. À l’ère de la mondialisation sauvage et de la main-d’œuvre bon marché, le cinéaste se fait l’observateur aigu de la violence qui s’exerce sur les individus. Dans ce contexte bouleversé, la survie justifie tous les moyens. Angie (Kierston Wareing) le sait. Employée dans un cabinet de recrutement de travailleurs de l’Est, son quotidien s’organise sur le mode de la lutte. Seule femme dans un environnement masculin, mère célibataire, elle se bat pour récupérer son fils, confié à ses parents. Licenciée abusivement, la débrouillarde et énergique trentenaire ne baisse pas les bras pour autant. Bien décidée à toucher sa part du gâteau, elle ouvre sa propre agence de placement avec sa colocataire. Son affaire ne tarde pas à devenir florissante. Mais sa situation personnelle délicate l’entraîne dans une vertigineuse course au profit, quitte à parfois bafouer la morale la plus élémentaire. Sur un scénario remarquable de Paul Laverty, It’s A Free World rompt avec l’approche parfois manichéenne de Loach. Le réalisateur britannique invente une héroïne des temps modernes, tour à tour séduisante et corrompue, égoïste et solidaire : l’ambivalente Angie n’est pas un personnage positif, et c’est précisément ce qui la rend passionnante. Au risque d’y perdre son âme, elle exploite le système dont elle ne saurait être plus longtemps la victime, comme la classe ouvrière incarnée par son père. Dans le « monde libre » du titre, tout est permis. Loach, dans son style réaliste et direct, en a pris acte. Son cinéma gagne en ambiguïté, à l’aune d’un constat cinglant : les temps ont changé. Farouchement. _S.M. Un film Ken LOACH Avec Kierston Wareing, Juliet Ellis, Leslaw Zurek… Distribution : Diaphana // Royaume-Uni, 2007, 1h33 Sortie le 2 janvier
38 34 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
3 RAISONS D’ALLER VOIR CE FILM 01
Pour l’actrice Kierston Wareing, mélange de glamour et de détermination au féminin.
02 Pour investir la face cachée du « miracle anglo-saxon ». 03 Pour la mise en scène épurée et efficace de Ken Loach.
LE GUIDE
DES SALLES
DU MERCREDI 12 DÉCEMBRE AU MARDI 29 JANVIER
Gone Baby Gone - Un film de Ben Affleck
SOMMAIRE SORTIES DU 12 DÉCEMBRE 42_Je suis un cyborg de Park Chan-wook SORTIES DU 19 DÉCEMBRE 42_La Visite de la fanfare d’Eran Kolirin // Ma Vie n’est pas une comédie romantique de Marc Gibaja // La Clef de Guillaume Nicloux 44_Vous êtes de la police ? de Romuald Beugnon // Les Trois Brigands d’Hayo Freitag SORTIES DU 26 DÉCEMBRE 44_Actrices de Valeria Bruni Tedeschi // Gone Baby Gone de Ben Affleck SORTIES DU 26 DÉCEMBRE 46_XXY de Lucia Puenzo // L’Année où mes parents sont partis en vacances de Cao Hambuger SORTIES DU 2 JANVIER 46_Filatures de Yau Nai Hoi // California Dreamin’ de Cristian Nemescu SORTIES DU 9 JANVIER 48_Into The Wild de Sean Penn // L’Homme qui marche d’Aurélia Georges SORTIES DU 16 JANVIER 48_A Bigger Splash de Jack Hazan 50_Lust, Caution – Amour, Luxure, Trahison d’Ang Lee // Smiley Face de Gregg Araki // Survivre avec les loups de Véra Belmont LES ÉVÈNEMENTS MK2_52>53 41 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LE GUIDE_SORTIES DU 12 ET DU 19 DÉCEMBRE
JE SUIS UN CYBORG
LA VISITE DE LA FANFARE
Un film de PARK Chan-wook Avec Lim Soo-jung, Jung Ji-hoon… Distribution : Wild Side Films // Corée du Sud, 2006, 1h35
Un film d’Eran KOLIRIN Avec Sasson Gabai, Ronit Elkabetz, Saleh Bakri… Distribution : Sophie Dulac Distribution // Israël – France, 2007, 1h30
Après sa trilogie de la vengeance, initiée avec Sympathy For Mr. Vengeance en 2002 et poursuivie avec Old Boy (2003) et Lady Vengeance (2005), le cinéaste sud-coréen Park Chanwook nous entraine au cœur d’un hôpital psychiatrique le temps d'une fable onirique et décalée. Parce qu’elle est persuadée d’être un cyborg, Young-goon, une jeune fille internée, refuse de s’alimenter. Seul être humain capable de la comprendre, Il-soon tente de la ramener à la réalité. Très vite, des sentiments naissent entre les jeunes gens… Présenté au festival du film asiatique de Deauville, Je suis un cyborg a reçu le prix Alfred Bauer au dernier festival de Berlin.
Sélectionné dans la catégorie Un certain regard à Cannes, La Visite de la fanfare y a reçu le prix de la critique internationale et le prix de la jeunesse. Invitée en Israël pour jouer lors de la cérémonie d’inauguration d’un centre culturel arabe, une petite fanfare de la police égyptienne se heurte au décalage culturel lors de son arrivée à l’aéroport de Tel-Aviv… Entre mélodrame et comédie La Visite de la fanfare témoigne de la place dévolue aujourd’hui à la culture arabe en Israël. Pour son humanité, son humour et son sens de l’absurde, le film d’Eran Kolirin a reçu le prix du meilleur film au festival de Montréal.
MA VIE N’EST PAS UNE COMÉDIE ROMANTIQUE
LA CLEF
Un film de Marc GIBAJA Avec Marie Gillain, Gilles Lellouche, Laurent Ournac… Distribution : Studio Canal // France, 2006, 1h32
Un film de Guillaume NICLOUX Avec Guillaume Canet, Marie Gillain, Vanessa Paradis, Thierry Lhermitte… Distribution : SND // France, 2006, 1h55
Auteur en 2001 du court-métrage remarqué Confessions dans un bain, Marc Gibaja présente aujourd’hui son premier long-métrage. Alors qu’il retourne vivre chez ses parents suite à une rupture sentimentale douloureuse, Thomas, 35 ans, tombe sur Florence, une ancienne camarade de classe. Une grande passion amoureuse pourrait s’amorcer mais Florence vit déjà avec Pascal, un agent immobilier volage... Par ses thématiques, Ma Vie n’est pas une comédie romantique revendique sa filiation avec de célèbres romances à succès telles que Love Actually (Richard Curtis, 2003) ou Quand Harry rencontre Sally (Rob Reiner, 1989).
Après Une Affaire privée (2002) et Cette Femme-là (2003), La Clef est le troisième film en commun du cinéaste Guillaume Nicloux et du comédien Thierry Lhermitte. Enfant d’un père qu’il n’a jamais connu, Éric Vincent n’en est pas moins un trentenaire équilibré. Alors qu’il vit l’amour parfait avec sa fiancée, Éric est un jour contacté par un mystérieux inconnu qui prétend être en possession des cendres de son géniteur… Dernier volet de la trilogie policière de Guillaume Nicloux, La Clef réunit à l’écran les acteurs Guillaume Canet et Jean Rochefort, déjà partenaires dans Barracuda (Philippe Haïm, 1997) et Ne le dis à personne (Guillaume Canet, 2006).
_F.J.
_Oscar PARENGO
_Florian JARNAC
42 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
_A.D.
LE GUIDE_SORTIES DU 19 ET DU 26 DÉCEMBRE
VOUS ÊTES DE LA POLICE ?
LES TROIS BRIGANDS
Un film de Romuald BEUGNON Avec Jean-Pierre Cassel, Philippe Nahon, Jean-Claude Brialy… Distribution : Memento Films // France, 2006, 1h30
Un film d’Hayo FREITAG Animation Distribution : Gebeka Films // Allemagne, 2007, 1h19
Dernier film au cinéma des acteurs regrettés Jean-Pierre Cassel et Jean-Claude Brialy, Vous êtes de la police ? est le premier long-métrage du cinéaste Romuald Beugnon, auteur des courts-métrages Œdipe meurtrier et Meurtre sans regret ni remords en 1999. Inspecteur de police à la retraite, Simon n’apprécie guère son séjour dans une résidence pour personnes âgées. Alors qu’il se lie d’amitié avec Alfred, un autre pensionnaire, ce dernier décède dans d’étranges circonstances… Pour sa prestation dans Vous êtes de la police ?, l’acteur Philippe Nahon a été récompensé par le prix d’interprétation au festival de Saint-Jean-de-Luz.
Trois bandits de grand chemin occupent leur temps à détrousser des voyageurs. Un beau jour, une de leurs victimes, la jeune orpheline Tiffany, leur demande de vivre avec eux. L’incursion de la petite fille dans le quotidien des hors-la-loi va bouleverser définitivement leur destin… Pour porter à l’écran le célèbre conte de l’illustrateur et globe-trotter Tomi Ungerer, les créateurs du film Les Trois Brigands se sont inscrits dans la lignée de dessins-animés exigeants comme La Prophétie des grenouilles de JacquesRémy Girerd ou Les Triplettes de Belleville de Sylvain Chomet.
_F.J.
_O.P.
NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution.
ACTRICES
GONE BABY GONE
Un film de Valeria BRUNI TEDESCHI Avec Valeria Bruni Tedeschi, Noémie Lvovsky, Mathieu Amalric... Distribution : Mars Distribution // France, 2006, 1h47
Un film de Ben AFFLECK Avec Casey Affleck, Michelle Monaghan, Morgan Freeman… Distribution : Walt Disney Studios Motion Pictures France // États-Unis, 2007, 1h55
Prix spécial du jury Un certain regard au festival de Cannes, Actrices marque le retour derrière la caméra de la comédienne et cinéaste Valeria Bruni Tedeschi, quatre ans après Il est plus facile pour un chameau… Alors qu’elle interprète au théâtre le rôle principal d’une pièce d’Ivan Tourgueniev, Marcelline peine à s’investir dans ses répétitions. Sans enfants, la jeune quarantenaire cherche à trouver un sens à son existence. Entre fiction et introspection, Actrices scelle les retrouvailles à l’écran de la comédienne et réalisatrice Noémie Lvovsky avec l’acteur Mathieu Amalric, trois ans après Rois et reines d’Arnaud Desplechin.
Pour sa première réalisation, l’acteur et cinéaste Ben Affleck a choisi de mettre en scène son frère, l’acteur Casey Affleck, partenaire de Brad Pitt dans L’Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford d’Andrew Dominik. Dans une banlieue de Boston, l’enlèvement d’une petite fille âgée de quatre ans fait l’objet d’une enquête policière infructueuse. L’oncle et la tante de l’enfant décident de faire appel à un couple de détectives privés… Inspiré d’un polar à succès de l’écrivain Dennis Lehane, Gone Baby Gone stigmatise la dérive criminelle d’un pays qui recense près de deux mille disparitions d’enfants par jour.
_A.D.
_Thomas CROISY
44 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LE GUIDE_SORTIES DU 26 DÉC. ET DU 2 JANVIER
XXY
L’ANNÉE OÙ MES PARENTS SONT PARTIS EN VACANCES
Un film de Lucía PUENZO Avec Ricardo Darín, Inés Efron, Martín Piroyansky… Distribution : Pyramide Distribution // Argentine - Espagne - France, 2007, 1h31
Un film de Cao HAMBURGER Avec Michel Joelsas, Daniela Piepszyk, Germano Haiut… Distribution : Haut et Court // Brésil, 2006, 1h45
Grand prix de la semaine de la critique au festival de Cannes, XXY représentera l’Argentine à la cérémonie des Oscars® en 2008. À 15 ans, Alex porte un lourd secret : elle est hermaphrodite. Ayant quitté Buenos Aires avec ses parents peu après sa naissance, elle vit désormais sur la côte uruguayenne. Le jour où un couple d’amis de la famille accompagné de leur fils de 16 ans vient leur rendre visite, une attirance réciproque nait entre les adolescents. Premier long-métrage écrit et réalisé par la cinéaste Lucia Puenzo, XXY a remporté le prix de la mise en scène au festival d’Edimbourg, ainsi que le prix du meilleur film à Athènes.
Sélectionné cette année au festival de Berlin, L’Année où mes parents sont partis en vacances est le deuxième film du cinéaste Cao Hamburger, après Castelo Rà-Tim-Bum (1999). Au Brésil, en 1970, la dictature militaire durcit la répression alors que la Coupe du monde de football bat son plein. Afin de fuir le régime autoritaire qui menace leurs libertés, les parents de Mauro, 12 ans, confient leur fils au patriarche de la famille avant de quitter le pays. Mais le vieil homme vient de mourir et Mauro est bientôt recueilli par la communauté juive de São Paulo… En compétition officielle au festival de Rio de Janeiro, le film a remporté le prix du public.
_T.C.
_T.C.
FILATURES
CALIFORNIA DREAMIN’
Un film de YAU Nai Hoi Avec Simon Yam, Tony Leung Ka Fai, Kate Tsui… Distribution : ARP Sélection // Hong Kong, 2006, 1h30
Un film de Cristian NEMESCU Avec Armand Assante, Razvan Vasilescu, Jamie Elman… Distribution : Bodega Films // Roumanie, 2006, 2h35
Scénariste fétiche du cinéaste hongkongais Johnnie To, pour lequel il a notamment écrit les scripts de Throw Down en 2004 et du diptyque Election, Yau Nai Hoi réalise Filatures, thriller à suspense nerveux et chorégraphié. Afin de le seconder au sein d’une unité secrète de la police de Hong Kong, le capitaine Huang, spécialiste des filatures, engage la jeune Piggy. Les nouveaux associés tentent de retrouver les commanditaires d’un hold-up survenu dans le quartier de Kowloon. Pour incarner la protagoniste, le réalisateur Yau Nai Hoi s’est offert les talents de l’actrice Kate Tsui, élue Miss Hong Kong en 2004.
Pendant la guerre du Kosovo, un train transportant des équipements militaires envoyés par l’OTAN reçoit l’accord informel des autorités roumaines pour traverser le pays et rejoindre ainsi la frontière avec la Serbie. Dans le petit village de Capalnita, le chef de gare, une figure emblématique locale, refuse de laisser le convoi poursuivre sa route sans une autorisation officielle. À contrecœur, les soldats américains du convoi se rendent bientôt à une fête municipale organisée en leur honneur… Prix Un certain regard à Cannes, California Dreamin’ est le premier film du jeune réalisateur roumain Cristian Nemescu, disparu accidentellement cette année.
_A.D.
_A.D.
46 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LE GUIDE_SORTIES DU 9 ET DU 16 JANVIER
INTO THE WILD Un film de Sean PENN Avec Emile Hirsch, Vince Vaughn, William Hurt… Distribution : Pathé Distribution // États-Unis, 2006, 2h27
Pour son nouveau film en tant que réalisateur, après Indian Runner (1991), Crossing Guard (1995) et The Pledge (2001), l’acteur et cinéaste américain Sean Penn adapte le best-seller Voyage au bout de la solitude de l’écrivain Jon Krakauer paru en 1998. À 22 ans, alors qu’il vient d’obtenir son diplôme universitaire, Christopher décide de rompre avec son quotidien middle class pour prendre la route et vivre en communion avec la nature. Des champs de blé du Dakota aux flots turbulents du Colorado, en passant par les communautés hippies de Californie, le jeune homme découvre un nouveau rapport au monde et aux autres. Afin de donner tout son sens à sa quête initiatique, Christopher nourrit un projet final : rejoindre les étendues sauvages de l’Alaska… Plongée au cœur de la nature la plus profonde de huit États du continent américain, Into The Wild évoque l’authentique épopée de l’aventurier Christopher McCandless, disparu en 1992. Pour l’incarner à l’écran, Sean Penn a sollicité le jeune comédien Emile Hirsch, partenaire de Sharon Stone et de Bruce Willis dans Alpha Dog de Nick Cassavetes. _A.D.
A BIGGER SPLASH
L’HOMME QUI MARCHE
Un film de Jack HAZAN Avec David Hockney, Peter Schlesinger… Distribution : La Compagnie des Phares et Balises // Royaume-Uni, 1974, 1h40
Un film d’Aurélia GEORGES Avec César Sarachu, John Arnold, Mireille Perrier, Judith Henry… Distribution : Shellac // France, 2007, 1h22
Présenté à la semaine de la critique au festival de Cannes en 1974, A Bigger Splash nous immerge dans l’intimité du peintre anglais David Hockney. Londres, mai 1971. Hockney traverse une crise suite au départ de son amant Peter Schlesinger. Il travaille sur son œuvre Portrait Of An Artist, qu’il doit prochainement exposer à New York. Entre les séances de travail, l’artiste, en proie au doute, se livre à des errances dans le « swinging London » des années 1970... Entre fiction et documentaire, le film de Jack Hazan révèle la complexité du lien que la vie affective entretient avec la création.
Premier long-métrage de la réalisatrice Aurélia Georges, formée à la FEMIS, L’Homme qui marche était en sélection officielle aux Rencontres internationales du Forum des Images. Paris, dans les années 1970. Viktor Atemian est un homme ténébreux et solitaire. Écrivain improvisé, il rencontre rapidement le succès littéraire. Mais les années passent et avec elles l’engouement que suscite son talent…Très librement inspiré de la vie de Vladimir Slepian, auteur d’origine russe disparu en 1998, L’Homme qui marche met en scène le comédien espagnol César Sarachu, acteur fétiche des frères Quay depuis Institut _A.D. Benjamenta sorti en 2000.
_A.D.
48 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LE GUIDE_SORTIES DU 16 JANVIER
LUST, CAUTION – AMOUR, LUXURE, TRAHISON Un film d’Ang LEE Avec Tony Leung Chiu-Wai, Tang Wei, Joan Chen… Distribution : UGC Ph // Chine - États-Unis - Taïwan, 2007, 2h38
Libre adaptation d’un récit de la romancière chinoise Eileen Chang disparue en 1995, Lust, Caution est le nouveau film du cinéaste taïwanais Ang Lee, deux ans après le succès du Secret de Brokeback Mountain, qui lui a valu l’Oscar® du meilleur réalisateur. Dans les années 1940, alors que sévit la Seconde Guerre Mondiale et que le Japon occupe une partie de la Chine, un groupe d’étudiants chinois décide d’organiser l’assassinat de Mr. Yee, chef des services secrets nippons à Shanghai. Afin de neutraliser ce redoutable espion, la jeune Wong est chargée d’user de ses charmes pour l’approcher et le séduire. Mais la relation que Wong développe avec Mr. Yee devient bien plus complexe qu’elle ne pouvait l’imaginer… Lion d’Or à la 64ème Mostra de Venise, Lust, Caution livre une reconstitution minutieuse de la ville de Shanghai sous le joug japonais. Icône du cinéma asiatique depuis une vingtaine d’années, notamment grâce à ses collaborations avec les cinéastes Wong Kar-wai, Johnnie To ou John Woo, l’acteur Tony Leung Chiu-Wai s’illustre pour la première fois devant la caméra du réalisateur de Tigre et dragon. _A.D.
SMILEY FACE
SURVIVRE AVEC LES LOUPS
Un film de Gregg ARAKI Avec Anna Faris, Danny Masterson, Adam Brody, Rick Hoffman… Distribution : Memento Films Distribution // États-Unis, 2006, 1h24
Un film de Véra BELMONT Avec Mathilde Goffart, Yael Abecassis, Guy Bedos… Distribution : Bac Films // France - Belgique - Allemagne, 2007, 1h58
Prix du meilleur réalisateur au festival de Seattle pour Mysterious Skin (2004), le cinéaste Gregg Araki signe Smiley Face, une comédie hallucinogène, en sélection officielle au festival du film américain de Deauville. Quelques heures avant un casting, une jeune actrice sans succès consomme par mégarde le cannabis de son colocataire, concassé à l’intérieur d’appétissantes pâtisseries... La voilà lancée dans un périple surréaliste au cœur de Los Angeles, à la recherche de financements pour réparer son forfait. Pour le rôle principal de son film, Gregg Araki a engagé l’actrice Anna Faris, révélée en 2000 grâce au succès mondial de Scary Movie. _A.D.
1940. Alors que ses parents viennent d’être arrêtés par les soldats allemands, Misha, une petite fille juive bruxelloise de huit ans, parcourt l’Europe nazie pour tenter de retrouver leur trace. À l’aide d’une petite boussole, elle quitte à pied la Belgique en direction de l’Ukraine. Sur sa route, afin de survivre aux hivers rigoureux de l’Est, elle se fait adopter par une meute de loups… Adaptation d’un récit autobiographique de l’écrivain Misha Defonseca, Survivre avec les loups offre un premier rôle à la très jeune actrice Mathilde Goffart.
50 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
_O.P.
ÉVÉNEMENTS DES SALLES MK2
POUR LES ENFANTS MK2 JUNIOR
FOCUS
« Petit à petit », la nouvelle édition du festival MK2 junior a débuté et est en salles jusqu’au 29 janvier. Venez enchanter vos bouts de choux avec Nocturna, la nuit magique ; Le Petit Monde de Bahador ; Fabuleuses Fabulettes et le nouveau Petit à petit, un programme tout doux rien que pour eux. Regardez-les rire devant Les Rois de la glisse et Ratatouille ; et enfin, faites-leur découvrir une planète qu’ils n’ont pas encore eu le temps de parcourir avec Un Jour sur Terre.
COURRIER INTERNATIONAL La prochaine séance des «mardis de Courrier international» aura lieu le mardi 8 janvier 2008 à 20h30 au cinéma MK2 Quai de Seine, avec la présentation de Los Perdedores (« les perdants »), du cinéaste espagnol Driss Deiback. Franco n’aurait jamais pu gagner la guerre civile sans l’aide de cent mille soldats marocains enrôlés de force. Le documentaire retrace pour la première fois l’histoire de ces hommes et fait le lien avec le conflit toujours présent des cultures occidentale et islamique. Débat en présence du réalisateur et animé par Anthony Bellanger, chef des informations à Courrier international. MK2 QUAI DE SEINE_Mardi 8 janvier à 20h30_6,90 € ou 5,60 € sur présentation du dernier numéro de Courrier international.
Jusqu’au 29 janvier dans sept salles MK2.
COURT-MÉTRAGE SOIRÉE BREF Amours et petits canards. Ce titre donne l’impression d’accommoder des contraires. D’une certaine façon, ce n’est pas faux puisqu’il mêle un certain naturalisme à des régimes de comédies tour à tour caustiques et tendres. Sinon, bien évidemment, l’amour a sa part dans chacun des films, l’amour et la recherche de l’âme sœur. À chacun ensuite de trouver dans ces films où sont les palmidés, ces petits canards que nous avons tous été un jour et que nous sommes encore parfois. Ces films mettent en scène des personnages dont les maladresses les rendent quelque peu inadaptés au monde qui les entoure. Quand on sait que l’inadéquation entre le corps et le monde est un des ressorts du comique, on ne s’étonnera pas qu’il constitue le principal ingrédient de ce programme. _Jacques KERMABON
• La Vie d’Anaïs d’Arnaud Gauthier • Mon Cousin Jacques de Xavier Diskeuve • Boulevard l’océan de Céline Novel • Révolution de Xavier Diskeuve MK2 QUAI DE SEINE_Mardi 18 décembre 2007 à 20h30. Tarif : 6,90 €_Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées.
TOUS LES SAVOIRS CINÉ PHILO : SAISON 3 Après deux entrées en matière copieuses, le plat de résistance. Pour la troisième saison consécutive, Ciné-Philo propose une promenade ludique et philosophique alternant extraits de films et textes de grands auteurs, suivant une double exigence : le plaisir et la pertinence. En cette époque à la fois post- et préélectorale, c’est l’occasion d’éclairer, à la lumière des grands textes, les thèmes présents dans le débat public : contrat social, travail et mérite, sécurité et liberté, manipulation de l’opinion, armes du citoyen, écologie, santé et créativité... Autant de sujets à explorer avec exigence, émotion, sérieux et humour, en compagnie de Nietzsche, Spinoza, Alain, Simone Weil, Hegel ou Deleuze, avec la complicité des films les plus divers : Les Affranchis, le Parrain, Spiderman, le Jour d’après, Mondovino, Little Miss Sunshine, THX 1138 ou Les Hommes du président... I. TOUS ESCLAVES ? 3. Fraternité : Le sens de la famille (15/12/07) II. QUI EST L’ENNEMI ? 4. À qui faut-il faire la guerre ? (19/01/08) 5. La fabrication des consentements – Manipulation et démocratie (02/02/08) 6. Le virus de l’opinion (16/02/08) III. IMAGINER LE FUTUR 7. Écologie d’une catastrophe annoncée (15/03/08) 8. Vie et mort de la santé (29/03/08) 9. Le temps de la création (12/03/08) MK2 BIBLIOTHÈQUE_Tarifs : 5,50 € tarif réduit et 6,50 € plein tarif.
52 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
RETROUVEZ TOUS LES ÉVÉNEMENTS SUR
PARTENARIATS THÉÂTRE DE L’ODÉON Autour de la pièce Krum d’Hanokh Levin, mis en scène par Krzystof Warlikowski au Théâtre de l’Odéon du 8 au 16 décembre, le MK2 Hautefeuille propose une programmation (Dans l’ombre des solitudes) de 4 films, diffusés en matinée à partir du 5 décembre :
• Les Méduses d’Etgar Keret et Shira Geffen • Love Will Tear Us Apart de Yu Li Kwai • Terre promise (Promised Land) d’Amos Gitaï • I Don’t Want To Sleep Alone de Tsai Ming Liang Tarif : 5,60 €_Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées.
LE RENDEZ-VOUS DES DOCS Le premier rendez-vous des docs de l’année proposera le film Un Monastère en Toscane d’Otar Iosseliani dont la projection sera précédée d’un film surprise. L’invitée de cette séance sera Marie-Pierre Duhamel-Müller, directrice artistique du festival Cinéma du réel. Une petite communauté de moines augustins installée dans un village toscan, au milieu d’une région viticole en pleine expansion : Castelnuovo del Abate. Des paysages, des personnages, une atmosphère, sous le regard sensible du cinéaste géorgien. MK2 QUAI DE LOIRE_Lundi 28 janvier à 20h30_6,90 € et 5,60 € pour les adhérents de l'Association Documentaire sur Grand Ecran. Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées.
CINÉ BD Un samedi matin par mois, en partenariat avec Dargaud, un auteur de bande dessinée présente un film de son choix en salle, puis dédicace ses ouvrages à la librairie. • Juanjo Guarnido viendra présenter Sorcelleries, tome 1, le ballet des mémés, premier volume déjanté de sa toute nouvelle série (à partir de 9 ans), tout en rimes et délires. • Projection du film L'Étrange Noël de Mr. Jack d’Henry Selick et Tim Burton, choisi et présenté par Guarnido. • Dédicace uniquement de la BD Sorcelleries : 25 tickets distribués au moment de l'achat de votre place de cinéma. Au cinéma puis à la librairie du MK2 QUAI DE LOIRE_Samedi 12 janvier à 11h30_5,90 €_Cartes ILLIMITé et Le Pass acceptées.
RENCONTRES - LIBRAIRIES SUZANNE LIANDRAT-GUIGUES ET JEAN-LOUIS LEUTRAT
MK2 Livres, les éditions Rouge Profond et les éditions Klincksieck vous invitent à rencontrer Suzanne LiandratGuigues et Jean-Louis Leutrat à l’occasion de la parution de leurs nouveaux livres Splendeur du Western et Western(s) le jeudi 13 décembre à 20h30. Cette rencontre sera suivie de la projection de Dead Man de Jim Jarmusch (billets en vente avant la séance). À la librairie du MK2 BIBLIOTHÈQUE_Jeudi 13 décembre à 20h30.
SÉANCES SPÉCIALES LES SÉANCES INTERDITES Chaque vendredi et samedi soir, le MK2 Parnasse vous propose une séance d'un film qui a marqué le cinéma fantastique. Au programme en décembre : La Nuit des mortsvivants (George Romero), Carrie (Brian de Palma) et Battle Royale (Kinji Fukasaku). Au MK2 PARNASSE, chaque vendredi et samedi soir, à la dernière séance.
53 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LE NOËL DES
FAMILLES Avec son bonnet discount et sa barbe antique, le Père Noël semble avoir perdu de son pétillant, telle la canette de soda oubliée la veille. Pour le remettre à la page, la rédaction lui a lancé un défi : satisfaire notre belle mais exigeante famille culturo-technophile, et la couvrir de cadeaux idoines. Résultat des courses. PHOTOGRAPHIES : © JÉRÉMIE NASSIF TEXTES : AU.TO., R.L., E.H., S.M., E.R.)
54 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
COUP E L S N A D IS A GUÉS M IN T IS D , S T N E NDS-PAR A R G S E L R U O P cadente e 9" ste et dé
s ster dan s pour re to o h -p ’albums besoin d i ? Plus d n ra l g nt bien ée du be lus nfants o , 99 € r la port -e sp ie c ts le ti ré s e p e p ? Les ps, 166 s poèm vrait ap écraser umérique. Philli amie de entre se rs, 50 € it » M fa s // t e s c n ’e rs lic n ponda de Sellie // Médo e d’un c « corres s Diane tés am e l’imag grémen ymboli iers : montrer les lustrations. Édition s PhotoFr on ne change qu re tu orner, a C ll in il e e e h S 7 p 8 T e i 1 d ic ar la ne d vers ulée, Aroun le vent, ions Dia strées p ue, à tra de Shop 20). Et, dans la fo mal illu audelaire les édit nte de son époq u lisateur 9 d a (1 ré rs n u y u d e le B muets Les Fle que rendent à oliste et décad nna Bo 9€ ns, 59, 9 les films atoire A e mb t réunit t le jubil papi. MK2 Éditio n n e hommag t la peinture sy e m m e m n de t évé r nota se ille lubie n coffre écouvri célèbre itsch // U buts à Berlin. À d de Lubitsch, et vie b u L t s rn e dé Coffret E entaire sur ses Pola Negri, égéri um de ffer d’un doc r aux charmes se de gre be p, et refu r à ne plus succom e e J la val à l’aide re le che , devrait elle préfè phone portable is a M . au soir un télé Cri, ué dans du matin ien : Le embarq globale , r S re P è h G tombe b p r a u -s lisés pa Ç a te . ie a n ré m e ig a s li v l’ éma ita cret na lms rare otte sur is in fi d c tr s e e e ta d d C a . T n à belle est fa € 110 // l’étalon it la part cco, tata Nokia 6 ns la crinière de Sahel. Environ 200 6 avec Ro collection qui fa a rt u d o d s S rt e P t en 198 e ll un G d’une is qu’e s le dés ission fu u re n p m d a e BD a d D re c e // n iè re € le u , 19, 99 it tiré aliens , dans la prem se perd il en ava aîtres It ort enfin en DVD Scola...). M6 Vidéo an, dont r, n M u ie s a e rc y L e i, on i, s c Lem is, 59 € , mort il Collecti ction d’Antonion inéma italien (Ris ns Dupu t Frédéri Lefèvre fi en 25 CD uibert e e coffret. Éditio uc it Didier re d G ta r l iè e ’é ’o m u c d , n re e » couvrait 0. a p c g i e m s â u h l’ n q m p a , e E ra d a d c v g res unis hoto n. Ave dio No 56-198 les maît liment ré e // « Le p hanista nées 19 r par Ra tograph e de MSF en Afg ins et d’écrits, jo n dernie usiques des an 0 € a o l’ h é P it e d L une » é lectisme les m e 65 et 7 Coffret gner une équip photos, de dess c coffret ja D), entr pa de rès le « compile avec é che bée. (25 C p A d’accom mes, mélange … u to cadea ret noir », qui laisser tata bû le beau en trois ff ux là là, jumeau, le « co lle, qui devrait o H // II fo a n v té o li o s i a N ic tu t Coffre e 1981-2006, vo urtant d’une ac d o o p ri t é e , p e la g ent vinta Un prés
POUR LA TA
ENTURE V A T E E D A M TA NO
USE
55 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
lle. st pour e e livre e n couturier C ? e c a unny F préface de so ion de F rediffus la star et d’une e n u té VD mais ra ie fouillée de 39, 95 € coffret D ditions, ph ère n’a ja Votre m es d’une biogra ire plaisir. YB É dans un igeants. // is n u ie v ré ne agné lus ex ndial, vrait fa ages d’u accomp 2006, y, ça de éma mo iles les p burn, Im y Hepburn sont n diamant Tiffan rs du cin tera les cinéph uteur. De 1912 à ynch p u e je a H m y n s L e ’a r te te d a s n p a a o t é c Audr photos d’Audre y. À défaut d’u m n in e é a h our 44 c e édition limité u et aimé le cin à Ozu, en pass eauté qui p s lm fi Ces 170 bert de Givenc // 50 , cett rnau st la b éfend u : de Mu ret, « c’e ique livre 50 films ujours d et ami H nde en rme d’un magnif Karmitz, qui a to istoire du cinémaneur dans le coff o m u d r Marin autour , à l’hon s, une h ous la fo Voyage gie. Présentée s oix du producteuplus belles sailliee le disait Chaplin ts h lo s c m o e ec le jeu s sionnan s m th d’an flète le ter, à travers ndue av tourner de pas le. Et co € e re b V n ti . o is in ti s b c n ré e m s de La séle permet d’arp du ba e est ir 2 Éditions, 299 et, en plu Station ua Vita. t u voyag K c la Play de la PS3 perm m interactif Aq le coffre n, l’invitation a ». Dont acte. M e v a n a u o a s r mam caméra t, tel l'aquari ou Bres plus au ciném concilie reate, la en le devrait ré montage Eye C r téléchargem i u importe q t je a b p e o d s n l le U ie ib // ic n mini-log ux dispo tion Eye t PlayStaOf Judgment ou lener à quelques jee Eye Of Judgmen n h o e T y d c e 'a v s a e The E € d , 0 famille c Eye Create, 8 films de ve
INÉPH C N A M A M A POUR L
ny, PS3, So
40 € a
56 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
ILE
umour ns de l’h able », e s in a rt d’un ce ire », « immontr aises ET doté o n esthète e, « hors-mém estampes japo 85 € r u e it n é iv , g it x n, o u n m ri u ri ta a p n ir m e o ur. Flam s occid la scène il faut av mment, livre interroge sins ou peinture sionné de l’aute e id v É es e // pas eau ffret qui sexuell l Quignard. Ce b 193 illustrations, d ement érudit et de ce co r Team it t u u N fa é a u a d L q c ux sti as rd, unique de multijoueu sance. A elle de P urs fanta Quigna o st bien l' Pascal ffrir La Nuit sexuboutit à notre naise répond le disco . Car c’e e Portal et le m hiques. x o B e o a g i g p n ra m ra v a ra g u O -g o s l' l’ pour lu lle du coït qui e le rouess lonnent utant de ial puzz ce age reb isode 2, le gén blouir tant de p écrit-il, chinoises qui ja ll a b m e s r à l’ nt é t Ep . Film et encre ode 1 e s’arrête devraie ’un prestige // Ne pas 2 ses suites Episant de papa, que édition ers la nature d x e o n u B s e n e g v fi a if n a é d te a -L tr s m r rt lf e à t o a O g e s e H rve The tral menad nus autour du kourov r l’œil to u magis 70 € o ière pro ndre So adjoint a . De quoi rince nic Arts, de 50 à d’Alexa relate la dern plété par des b re v 2 o u s tr ’œ ls d m fi o t fc e e t h Fortres 360 et Wii, Elec n c re Le , Mè leme ox ourov // riedrich est idéa PS3, Xb dre Sok Caspar David F t lyrique, le film n a x le ture de uvant e t fils d’A Mère e inspiré de la peinère malade. Émo , m u a a s le tab t de omme e jeune h
A ESTH P A P E L R U O P
ÈTE
57 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
me art, u septiè adeur d trer la s s a b m rêve a ité d’enregis f, pas inot se K2. Bre il ché le m acité, la possib s en HD par M n ra b id tre un k : 20 Go de cap haplin restauré , pour ê e récré d’inspiration) s de Charlie C s u a me. p ix film (prise en volu oy à la Game B qui contient… le, et surtout d trations somptueuses s la lu it il x x E u a s iagon mitée 605 // livres a milieu de se Archos rchos en série li le de 11 cm de d Chaplin, 299, 99 € u p », ces « pop u ivent trouver a ie ti A rl c t u a e d ta h c C n té i ia s if ra v o te c d W n é t. o ts n o c n u rl , in n ha aître les enfa télévisio du travail de c est un m es que t . Carter 0 pastilles noir A id vraimen v a 0 ires // D bleu, ce sont 6 € 2 tilles no 17 600 pas n Point rouge et llimard Jeunesse, Après U s de papier. Ga re Star sculptu nfance, sions d’e és, LucasArts s a p x u es de s affin ame design mis de s phisme g rs pas re u vidéo aux gra un modèle de u jo u to t t je n s e ’e re c s u r e e u ier. S usin n es dem aux s concil esquell Votre co parlent plète // guérir, de quoi les déjà parues. L m o c les fans , posters a u g e o n a d e e s ri l’ lt b € a u e y s 0 L : sh à7 ut d vre c urine r Wars n, de 60 x trilogie i, à défa ars, le li ecter fig dits, Lego Stales Legos ? Voic inédits, ses deu360 et Wii, Activisio // Star W sionnel, à coll et deux CD iné r u m il x s t x s W fe in r ro s p te s e e Wars e ec des niveau fiant. PS3, Xbo is d et P ersonnel pu des v ti photos, nsweet p réunit, a nt et jamais bê en J. Sas années, à titre ui, à travers des , 89 € h la p il e te u S c an ac tq re de ars. Nath te derniè ce coffre re culte s, Le liv nt passé les trenns. Ils en ont tiré ire qu’est Star W r a W r o Sta tio rs néta e collec s auteu urel pla fans. Le utres pièces d énomène cult h a p t e e rares e de c l’histoir retrace
P
RE EN È R F T I T E P E OUR L
POUR LE COU
S
ÉVEIL
STAR E D N A F , T N E IN ADULESC
58 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
WARS
ante et le exige musica do revisite 60 e h c ro ne app en 6 CD, l’heb en déterrer ndent u r : cks défe iteur classieux la country, pou ro In s e L e d , d é 6 u n 8 o 9 u 1 tion en teur se cache tro, du hip-hop ur créa e), epuis le re le média fure rock, de l’elec tibles, 34, 99 € D // s é arantain s cach ntre que derriè s sous-bois du CD), Les Inrockup e (la qu nnées 1990), r g o â s e é m tr mo 100 . (6 ns le s du mê (le début des a i ample que Coffret nnée. Ce coffret ires, fouillant da s prometteuses s peu prè e o amis, à n même temps nfluences aus la nouvelle is ro T déclois usiques popula rare et pouss . ’i ù c e d o e s u s a re s rè e u p re m e Mio au rés à peu , à l’he ns live, ans de ssentielles, flo hristophOuest), apparus e décomplexée, e rétrospectiven biais : captatio t la part C e , s e e in in r te d rac fe ais nan illeri (le Gran ippe Ka e best o s. nts, don ante art on franç e A, Phil s du même coinose : une chansune impressionnbien sûr, sortes dé de livres élégaujours singulière u iq in m h rè t rt to s c p n a e Do e u e u is u e q a m q in p ê a e m is à g , c la m es es d ves i dé ant originair ant à peu près s, les voilà qu . On trouvera d reste cepend lles ou collecti x m d x e et défen ntre deux albu jure que par eu plus savoureu iques personn h .E Le sincère k française ne gistrements... s (auto)biograp c e re v ro n ti e e ta n ré n è , c s , te tés dessins de rare coffret photos et aux x u a 9, 90 € 0€ belle arion, 1 enoël, 2
POUR
MÉLOM R U Œ S E D N A LA GR
ANE
D mm émoire, ine, Fla e, 16 € votre m uaranta oublez ec, En q ditions Charrett 90 € D Livres : s , s e n io ri M e É ate h , 29, K p s l, e é to e p tr s s tu ip ri lu ex Phil r et Ch Textes il ts cardinaux, T Brunne ique A : in in o p m Vincent o s e D :L divers, inique A Artistes rd, Dom d Richa n ra rt e B on 17 € S, envir on 14 € çà), PIA ), Cinq 7, envir r u 0€ o p à ç e t iv u nviron 3 (l o e s , (T CD : e 7 f o q ic es motr CD), Cin c, Brest e rc 4 s t fo s € re s 7 io ff o 1 M rn (co Barclay, ue A, Su rdinaux / DVD), Dominiq A, Les Sons ca Live (CD e io u d iq tu S in Dom er live + e, Bord Katerin
59 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
MUSIQUE Daniel Darc, rockeur hors catégorie
Darc vaut de l’or Daniel Darc remonte sur le ring avec Amours Suprêmes, nouvel album percutant, co-écrit avec Frédéric Lo. Au milieu d’invités prestigieux (Bashung, Wyatt...), son art de l’uppercut verbal y fait mouche comme jamais. Entretien sans fioritures.
L
es débuts, avec Taxi Girl puis en solo : « Ce qui différenciait Taxi Girl, lorsque l’on a commencé en 1978 ? On avait un clavier, à une époque où les groupes n’en avaient plus, ou pas encore. Nos influences n’étaient pas anglaises mais américaines, les Doors, les Stooges, ce genre de choses. J’écrivais des textes qui avaient une sorte de prétention littéraire et déjà le chanté-parlé à la Lou Reed m’obsédait. Il me semblait important aussi de revendiquer une forme d’ambiguïté sexuelle, même si je n’ai sucé que deux mecs dans ma vie. La vraie liberté du rock, c’est de pouvoir se prétendre nègre ou pédé, comme a pu le faire Elvis dans sa façon de chanter, de bouger. Après Taxi Girl, la suite de mon trajet est plus obscure, c’est vrai. Ça a moins marché, voilà. Mais je reste très fier de mes premiers enregistrements solos, produits par Jacno ou Daho. »
Crèvecœur, l’album du renouveau en 2004 : « Cela faisait plusieurs années que je n’avais rien enregistré. Sur ce disque, mon écriture est devenue adulte, j’ai lâché un certain nombre de clichés rock. À un moment donné, il faut assumer son âge ; montrer ma bite sur scène, je l’avais suffisamment fait. Je fais partie de la première génération qui a vu ses héros rock vieillir avec dignité, Keith Richards, Iggy Pop, Bob Dylan. Autour de moi aujourd’hui, il y a plus de morts à cause du cancer que de l’overdose : c’est un grand pas vers l’âge adulte, non ? Je déconne, mais c’est sérieux. »
“
SI L’ON N’A PAS BESOIN D’ÉCRIRE, ON N’A PAS LE DROIT D’ÉCRIRE.
“
L’ombre de John Coltrane sur Amours Suprêmes, son nouvel album : « C’est une influence disons spirituelle. Ce n’est pas parce qu’on écrit de bonnes chansons qu’on est un musicien important : il y a autre chose, un truc impalpable, comme l’âme. Iggy Pop disait qu’il voulait être « un saxophone hurlant comme John Coltrane». J’aime bien cette idée. Coltrane était junkie, puis du jour au lendemain, il a arrêté. Dès lors, la seule chose qui l’intéressait, c’était l’amour – A Love Supreme. Alors il jouait tout le temps, comme moi j’écris tout le temps, parce qu’il n’y a rien d’autre à faire. En art, il faut qu’il y ait la notion de danger, qu’on puisse y laisser sa peau. Personne ne sortira d’ici vivant. Les poseurs, ça ne marche pas. Je continue à penser que si l’on n’a pas besoin d’écrire, on n’a pas le droit d’écrire. »
60 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Des textes courts et directs : « Il faut faire très attention avec la langue française, qui a tendance à être bavarde. Le seul moyen de rejoindre une espèce d’écriture rock, c’est de contenir le truc. Proust et Aragon m’emmerdent. Faut aller vite, éviter la métaphore, rester près du caniveau. Le second degré, je n’aime pas. Enfin, ça peut marcher au second degré si ça marche déjà au premier. Je ne suis pas un plaisantin. » La croix tatouée sur le torse : « C’est ce qu’on appelle un cœur sacré. Rien à voir avec ma conversion au protestantisme. Quand j’étais petit voyou, les voyous un peu plus grands que moi avaient tous ça – c’était moins artistique, c’était fait en prison. Je ne glorifie pas la souffrance du Christ, je glorifie son amour. On va tous crever, et avant de crever, il faut essayer d’aimer. Une vie bien remplie, c’est ça. Tu aimes, tu crèves. » Sa signature sur le prochain album d’Alizée : « Il y a pas mal de gens qui me demandent d’écrire pour eux. Les
2007 EN 5 MUSICIENS AMY WINEHOUSE Ne pas s’attarder sur son patronyme («l’amie de la maison du vin»), ni sur sa réputation de « saoule sister » intenable : le seul débit qui compte ici, c’est celui de son timbre fluide et fragile, qu’embouteille une production nusoul du meilleur cru.
ROBERT WYATT Des collaborations éparses (Darc, Burgalat…) et un superbe nouvel album (Comicopera) confirment l’évidence : à 62 ans, la voix inouïe de Wyatt porte, emporte, transporte loin, très loin, là où les musiques s’accordent et s’harmonisent, en paix.
WILCO Du crossover glam de Mika au néopsyché d’Of Montreal, l’arc-en-ciel pop a balayé large en 2007. Notre préférence va aux Américains de Wilco, dont le classicisme trompeur s’égare en soli solaires, lignes courbes, plaintes cendrées.
JUSTICE 2007 marque le retour au grand trot de l’électro : sacre du fléau fluo via la tecktonik, résurrection des vétérans de la French Touch, et triomphe sans appel du duo parisien Justice, qui élève la récupération et le grésillement au rang de grands arts.
ANIMAL COLLECTIVE
sarkozystes, je les refuse. Alizée n’est pas sarkozyste, c’est une fille respectable. Et ce n’est pas moi qui chante ses mots, mais elle qui chante les miens. Enfin, elle a cette capacité de pouvoir charmer les gens, que je n’ai pas. » La corrida, les arts martiaux : « Les combats de rue, je connais bien, c’est dégueulasse, ça n’a aucun intérêt. La corrida, les arts martiaux, c’est le contraire : une sorte de destruction tout à fait réglée. Sans règles, pas d’art. Dans la corrida, il y a une unité de temps, de lieu, d’action : c’est la vie en une après-midi. Tout est là, l’amour, la mort, la déception, la trahison, tout est répugnant et pourtant, peut-être se passera-t-il quelque chose de sublime, un moment de grâce qui annulera le reste. Mon combat à moi, c’est chaque jour écrire des millions de merdes, pour arriver, peut-être, à faire une phrase qui tient debout. » _Propos recueillis par Au.To.
Que ce soit en solo (magnifique album du leader, Panda Bear) ou en tribu, ces animaux voraces déchiquètent le format pop, le griffent de sonorités pointues, puis rugissent leur victoire autour d’un feu, tandis que rôtissent les derniers lambeaux.
ET AUSSI DÉBUT 2008… « En 2008, les couleurs seront incroyables, il n’y aura pas d’autres dieux», imaginait le jeune Philippe Katerine en 1978. Le début d’année musical rejoint en partie sa prédiction. On notera d’abord les teintes argentées de Ludéal, chanson française idéale, dont la palette évoque Souchon ou Bashung. Dans les mêmes tons pop, brilleront aussi les monochromes crépusculaires de Syd Matters (Ghost Days), les coloriages diaprés des Franco-Finlandais de The Dø (A Mouthful), ou les reprises panachées de Cat Power (Jukebox). Les chamarrures les plus éclatantes seront l’œuvre du jeune Lightspeed Champion, dont le premier album achève les brouillons tracés, il y a dix ans, par Blur ou Pavement.
61 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
LES BONS PLANS Kompilés par Rémy Kolpa Kopoul
Guirlandes Paris Le Père Noël trimbale son traîneau de cité en cité. Dans le neuf-trois, il porte les paquets cadeaux aux couleurs d'Éthiopiques. Il va swinguer avec TSF et groover avec Nova. Il glisse sur les dancefloors, tire sur les cordes. Le voilà complètement soul ! Il remet les gaz dès janvier. Fouette les rennes, mon petit Père! AFRICOLOR : LE NEUF-TROIS AU CHAUD Le tour de la Seine-St-Denis pour un tour des Tropiques, avec un gros focus «Éthiopiques». RENATA ROSA – DOBET GNAHORÉ > 13/12 > CIN’HOCHE – BAGNOLET La pétulante Brésilienne du Nordeste et la tonique Ivoirienne d’Abidjan : une affiche fumante. JUAN CARLOS CACERES > 14/12 > SALLE DES FÊTES – SEVRAN Le pourfendeur des clichés du tango, dans sa quête effrénée des origines noires de la musique de salon : Tango Negro. ÉTHIOPIQUES 1 > 19/12 > DYNAMO DE BANLIEUES BLEUES – PANTIN Les chants azmaris des troubadours Etenesh Wassie et Abbebe Feqade, l’Ethio-Jazz des… Bretons de Badume’s Band, la danse de Melaku Belay. ÉTHIOPIQUES 2 > 20/12 > THEATRE GERARD PHILIPE – ST-DENIS Le Tigre des Platanes, des Toulousains cuivrés toqués d’Ethiopie, puis Getatchew Mekuria, caïd du sax, avec The Ex, des punks hollandais déjantés. ÉTHIOPIQUES 3 > 21/12 > LE FORUM – LE BLANC MESNIL Etenesh, chanteuse bluesy éraillée d’Addis avec Le Tigre des Platanes (Toulouse), et le «king» Mahmoud Ahmed épaulé par les Bretons de Badume. DÉDÉ ST-PRIX – MIMI BARTHELEMY > 22/12 > T. G. P. – ST-DENIS Autour du vaudou et des Caraïbes francophones avec Dédé St-Prix et son rythme chouval bwa, Mimi Barthélémy et ses contes, Jean Rémy Guédon et son théâtre.
DJ SESSIONS : DE L’ÉLECTRO AU HIP HOP. Une semaine avec des live londoniens et new-yorkais inédits, plus une brassée de DJs culte de Berlin, Detroit et Londres. MOODYMANN – ZERO dB > 15/12 > BATOFAR Soirée «Is It House ?» avec le caïd de la scène house de Detroit, rarissime en mix, et le duo britiche qui agite le brokenbeat. BELLERUCHE – ROB LUIS – SANDRA NKAKE > 20/12 > BATOFAR Le très aérien trio londonien Belleruche, pour la 1ère fois en France, plus Rob Luis (boss du label nusoul anglais Tru Thoughts), «notre» Sandra Nkake en set acoustique et Outlines en DJ set : une soirée «Crème Anglaise» dodue ! NU JEWISH HIP HOP : YONI – Y-LOVE > 20/12 > POINT ÉPHÉMÈRE Deux des MC’s de pointe sur la scène rap new-yorkaise, à la pointe du hip hop version Nu Jewish. JAZZANOVA – PAUL MURPHY > 21/12 > DIVAN DU MONDE «Jazz Freaks», nouvelle soirée DJ avec l’Anglais Paul Murphy (Afro Arts), résident des soirées culte Ballroom et les Berlinois de Sonar Kollektiv.
CORDES : AILLEURS Trois Palestiniens et leur ‘oud magique, un Brésilien et sa guitare éclectique : un monde de cordes. TRIO JOUBRAN > 14/12 > THÉÂTRE ANTOINE VITEZ – IVRY (94) Ils sont trois frères palestiniens, fils d’un luthier, qui croisent les cordes de leur ‘oud, le luth arabe. Entrelacs magiques qui laissent… sans voix ! ARMANDINHO + JOTA & C° > 14/12 > SATELLIT’ CAFÉ Avec sa mini guitare, il est le virtuose absolu du carnaval de Bahia et beaucoup plus ! Le frevo, le choro et le forrò de Jota & C° proposent un tout autre Brésil.
62 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
SOUL & GROOVE : PULSIONS PRÉ-NATALES Des fanfarons, une Berlinoise, deux compagnons d’armes de James Brown et le pape du soul jazz : le groove dans tous ses états. CEUX QUI MARCHENT DEBOUT > 14 + 15/12 > NEW MORNING La groovy fanfare made in France, pimenté caraïbes (salsa, ska…) est un vrai combo d’ambianceurs : une autre Fooonky Family. JOY DELANANE > 14/12 > LE PLAN – RIS ORANGIS (91) D’origine allemande et sud-africaine, mi-lionne mi-liane, elle est LA star nusoul de la scène allemande. Avec, au moins, une dimension européenne. PEE WEE ELLIS & MARTHA HIGH > 19/12 > NEW MORNING Mr. Ellis fut longtemps avec Maceo Parker et Fred Wesley souffleur d’élite chez James Brown, Miss High fut 25 ans sa choriste. Destin lié… on the groove ! ROY AYERS > 20/12 > NEW MORNING Vibraphoniste et chanteur, cet enternainer né est le pape du jazz épicé soul et funk. Adulé du public hip hop et électro, il est une mine de sample pour les DJs.
RADIO : JAZZ ET ZÈBRE EN DIRECT La radio jazz a son grand raout annuel. La radio du Grand mix a son rendez-vous mensuel. YOU & THE NIGHT & THE MUSIC BY TSF > 17/12 > OLYMPIA La big teuf annuelle de la radio jazz s’installe à l’Olympia : Seb Vidal et Laure Albernhe présentent 60 musiciens, dont Kontomanou, Lourau, Belmondo, Solal, Portal, Le Lann, et des pointures internationales, David Linx, Avishaï Cohen, Tigran Hamasyan. Beau bouquet. NUIT ZEBRÉE BY NOVA > 21/12 > LA BELLEVILLOISE Radio Nova offre son Grand Mix en direct, rendez-vous mensuel parisien avec Don Nino, Benny Sings, la fanfare funky berlinoise Mardi Gras Brass Band et Sandrinho, le DJ brésilien des bals funk. Invitations à Nova dès le 17/12 .
NU JAZZ : BALADES PARISIENNES Deux piliers de l’électro jazz en visite, l’un en groupe et de lieu en lieu, le second en solo. Plus un trio jazz… végétal. ERIK TRUFFAZ & GUESTS > 10 AU 15/12 > 5 SALLES PARISIENNES Le trompettiste d’élite de l’électro-jazz revisite sa carrière avec plein d’invités, 6 soirs et 5 lieux (New Morning, Européen, Sunset, Point Éphémère, Maroquinerie). BUGGE WESSELTOFT SOLO > 18 + 19/12 > SUNSIDE Le leader de la Norway touch dans le jazz (voir son label Jazzland) est à la fois un fin pianiste et un trafiquant avéré de sons électro. Les deux mains dans le futur. HADOUK TRIO > 19/12 > CAFÉ DE LA DANSE Pour la sortie de leur CD + DVD live Baldamore , Didier Malherbe, Loy Ehlich et Steve Shehan tissent un univers végétal riche en images. Balade au-delà du jazz.
Banlieue... JANVIER 08 : C‘EST REPARTI ! Après les fêtes, quelques rendez-vous implacables pour attaquer l’an neuf. JOSÉ JAMES > 8/01 > NEW MORNING Le crooner-groover new-yorkais de Brownswood, le label de Gilles Peterson, est une miraculeuse découverte de cet automne. Un aisance contagieuse.
FANGA + TRIBEQA > 24/01 > LA MAROQUINERIE Fanga, groupe de Montpellier, dépasse le strict héritage de Fela, avec son afrobeat énergique teinté de hip-hop. Tribeqa, de Nantes, excelle dans un jazz teinté d’afro.
DJ ANDY SMITH (EX-PORTISHEAD) > 10/01 > DIVAN DU MONDE Le platineur du groupe de Bristol mixe avec bonheur latino, hip hop, reggae, électro. Plus un groovy All Stars avec musiciens de Beat Assailant, Wise, Electro DeLuxe. Warm up : DJ Sunny G.
PHAROAH SANDERS > 25 + 26/01 > NEW MORNING Un géant du sax pour attaquer l’année : Pharoah Sanders est un des rares à avoir rivalisé avec Coltrane de son vivant. 40 ans plus tard, le souffle reste flamboyant.
BUIKA > 15 + 16/01 > L’EUROPÉEN La chanteuse africaine grandie à Mallorque est la bombe 2007 de la nébuleuse flamenco-jazz. Une voix et un tempérament craquants. Unique.
SYD MATTERS + LA MAISON TELLIER > 25/01 > EMB – SANNOIS (95) Jonathan Morali aka Syd Matters est une tête de pont de la scène pop folk française et La Maison Tellier, un groupe OVNI aux fascinantes chansons sombres.
JACQUES SCHWARZ BART + MARIO CANONGE > 18/01 > NEW MORNING Le sax martiniquais est le chouchou de la scène nusoul new-yorkaise, le pote de D’Angelo. Retour à un jazz caraïbe acidulé avec son complice Mario Canonge.
BEAT ASSAILANT > 26/01 > GYMNASE M. BAQUET – BAGNOLET (93) La tribu hip hop & funk hexagonale avec freestyler d’Atlanta, habituée des festivités de Nova, rôde son second album pour une soirée groovy.
ART La BD passe par la case « musée »
Exposer des bull Toy Comix aux Arts Décoratifs, De Superman au Chat du Rabbin au Musée d’art et d’histoire du judaïsme : cet hiver, deux expositions ambitieuses célèbrent le neuvième art, dans le sillage de plusieurs galeries pointues. Visite guidée.
L
a bande dessinée entre au musée : cette fin d’année, deux expositions consacrent la BD comme objet ayant autant sa place dans les musées que n’importe quel autre art graphique. La première est celle du Musée d’art et d’histoire du judaïsme. Intitulée De Superman au Chat du Rabbin, elle propose une lecture de l’histoire de la BD américaine et européenne à travers des figures importantes d’auteurs juifs. Pour Anne-Hélène Hoog, la commissaire de l’exposition, «il y avait vraiment un phénomène à expliquer » : celui de la construction d’une mémoire visuelle par des auteurs de bande dessinée. L’expo dissèque bien le rapport entre neuvième art et judaïsme, mais ne se contente pas de cela. Elle montre que la BD est un medium connecté avec le monde qui l’entoure, propice à l’émergence de visions d’auteur. Comme celles de Will Eisner, inventeur d’une grammaire graphique dans les années 1940 puis du roman graphique dans les années 1970, ou de Joann Sfar, auteur de la série Le Chat du Rabbin. Pour Sfar, cette exposition est aussi une manière de « montrer comment une pensée iconoclaste comme le judaïsme, interdisant la représentation de Dieu, a pu trouver une échappatoire dans la BD ».
“
L’EXPOSITION TOY COMIX TENTE UN ALLIAGE INÉDIT ENTRE DESSINS ORIGINAUX ET JOUETS VINTAGE.
“
Moins axée sur le patrimoine historique, l’exposition Toy Comix, qui se tient aux Arts Décoratifs, joue la carte de la création et tente un alliage inédit entre auteurs de bande dessinée et jouets vintage. Sous l’impulsion de l’éditeur l’Association, le musée a fait appel à une vingtaine de dessinateurs qui ont chacun choisi un jouet parmi sa vaste collection – plus de 12 000 pièces. Chaque auteur a ensuite conçu une histoire en trois planches, mettant en scène l’objet de son choix. On y trouve le jeune duo Ruppert et Mulot, à la démarche conceptuelle et novatrice, ou encore Blutch, qui a profité de l’occasion pour dessiner des Indiens et des cowboys en souvenir d’un album de Lucky Luke, Le Cavalier blanc. Blutch : « L’éventail des auteurs invités me stimulait : ce sont tous des gens remuants ! Et les jouets étaient très beaux : ce que l’on fait, ça a tout de même un rapport fort avec l’enfance et revoir des jouets fait revivre les histoires que l’on s’inventait, enfant, autour de tous ces bouts de peluches et de plastique. » Les musées ne sont pas les premiers à exposer la bande dessinée ou, plus généralement, les dessinateurs. Plusieurs
64 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
The Spirit de Will Eisner
galeries le font depuis quelques années déjà, à l’occasion d’expos monographiques ou collectives. Les premières aident souvent à comprendre différemment le travail d’un dessinateur. Un récent accrochage d’Enki Bilal dans la galerie d’Agnès b. permettait ainsi de saisir la composition même de son travail : Bilal y exposait de grands dessins qui sont en fait les cases de ses planches. Son exposition déconstruisait ses livres en pointant le fait qu’il travaille case après case et monte ses planches dans un deuxième temps, sur ordinateur. Quant aux expositions collectives, elles sont l’occasion pour des dessinateurs de se regrouper et pour un galeriste de montrer la cohérence de certains travaux. Ainsi, la galerie itinérante Arts Factory réunit des dessinateurs pour des expositions thématiques saisonnières. La dernière en date s’intitule Winter Show. On y trouve beaucoup de jeunes talents comme Nine ou Mijn Schatje, ainsi que des vétérans de l’underground comme Blexbolex ou Kerozen. Plutôt pointu, ce genre d’expo permet de
es
2007 EN 5 ARTISTES ANNETTE MESSAGER Cette année, le Centre Pompidou a consacré une grande rétrospective à cette artiste française incontournable. Depuis les années 1970, elle a su tisser un univers ludique et mystique qui déguise la condition humaine pour mieux la révéler.
JR Aux quatre coins du globe, JR colle ses photos en grand format à même les murs de la ville. Entre reportage, street art et activisme sociopolitique, la démarche de ce jeune artiste français vaut le coup d’œil, et de chapeau.
CYPRIEN GAILLARD Révélé lors de son exposition à la Cosmic Galerie, le jeune Français a étonné par ses détournements d’images radicaux. Notamment inspiré du land-art, son travail donne à voir et à penser le chaos de notre monde.
ANSELM KIEFER Avec Chute d’étoiles, l’artiste allemand a brillamment inauguré le cycle Monumenta au Grand Palais. Si elle ne fait pas l’unanimité, son œuvre violente et poétique, monumentale à tous égards, ne saurait laisser indifférent.
© Will Eisner, Max Anderson
TATIANA TROUVÉ
Felix le chat de Max Anderson (en bas)
défricher le paysage, de découvrir les petits derniers, pas encore assez connus pour s’afficher dans les musées. « Quand je sors un livre comme Frédéric Magazine, il est obligatoire de faire des expos pour le défendre, de la même manière qu’un groupe de musique part en tournée promouvoir son nouvel album », explique Kerozen, qui fait partie du collectif de dessinateurs qui publient Frédéric Magazine (fredericmagazine.free.fr). En ce sens, exposer la bande dessinée, c’est fournir une porte d’entrée supplémentaire dans un univers qui ne se réduit plus aux seuls livres, mais se décline plutôt bien sur les murs des galeries et de mieux en mieux sur les cimaises des musées.
_Joseph GHOSN
Toy Comix, jusqu’au 9 mars aux Arts Décoratifs 107, rue de Rivoli, 75001 Paris. De Superman au Chat du Rabin, jusqu’au 27 janvier Musée d’art et d’histoire du judaïsme, 71, rue du Temple, 75003 Paris.
De la Biennale de Venise au Palais de Tokyo, l’artiste italienne, lauréate du dernier Prix Marcel Duchamp, a exposé ses dessins et installations peuplés de rocs cadenassés, de portes lilliputiennes et de câbles articulés…
ET AUSSI DÉBUT 2008... Jusqu’au 2 février, le centre d’art La Galerie, à Noisy-LeSec, présente une dizaine de toiles du peintre polonais Adam Adach, interrogeant la part d’abstraction dans la figuration. Quant à la galerie Marian Goodman, elle expose jusqu’au 19 janvier une nouvelle série de la photographe néerlandaise Rineke Dijkstra intitulée Park Portraits, qui met en scène des adolescents, son sujet de prédilection. Enfin, preuve supplémentaire des liens croissants entre art et B.D. (voir ci-contre), l’illustrateur David B., auteur de L’Ascension du HautMal, sera à l’honneur chez Anne Barrault, du 12 janvier au 23 février, où il montrera un ensemble de dessins empreints d’une mythologie intime et onirique.
65 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
PAR RIP HOPKINS // ALCHIMISTES AUX FOURNEAUX
«Ce travail est le fruit de ma rencontre avec le chef Pierre Gagnaire et le chimiste Hervé This autour des écrits de Nicolas de Bonnefons, le valet de Louis XIV. Avec Hervé This, nous avons étudié les phénomènes et les procédés qui créent le goût. Ensuite, Pierre Gagnaire s'est inspiré de chaque procédé pour créer un plat, que j’ai photographié sur des tissus Zuber de l’époque de Nicolas de Bonnefons. Nous avons joué avec la nature, la science et l’histoire, dans un éloge de l’art culinaire. »
GALERIE FRAICH’ATTITUDE - 60 rue du Faubourg Poissonnière, 75010 Paris. Du 28 novembre 2007 au 29 février 2008 // Ouvert du mardi au samedi, de 13 heures à 19 heures.
Alchimistes aux fourneaux - Éditions Flammarion // Format : 240 x 310 mm - 208 pages - 70 photographies // Prix de vente : 40 ₏
TRIBUNE LIBRE Face à la crise du disque, quel avenir pour la diffusion de l
Le CD, pas décidé La crise du disque tourne de nouveau en boucle sur les platines de l’actualité : les ventes continuent de baisser, les labels ferment un à un (dernier en date : V2), Radiohead diffuse son nouvel album exclusivement sur le web… Quant au rapport Olivennes, qui vient d’être remis à la ministre de la culture, il prévoit la résiliation de l’abonnement Internet aux pirates récidivistes. Nous avons demandé à Patrick Zelnik, PDG et fondateur du label indépendant Naïve, de réagir face à ces perspectives moroses, quitte à en tracer de plus optimistes.
L
a crise qui affecte le CD est bien évidemment liée au phénomène de piratage sur Internet – mais la piraterie n’est pas la cause unique de la crise, loin s’en faut. Elle trouve également sa source dans la banalisation du disque compact qui a perdu, dans les dernières années, une grande partie de son pouvoir de séduction. Pourquoi le disque compact ne fait-il plus rêver ? Les réponses sont nombreuses. L’industrie du disque – industrie culturelle au même titre que le livre ou le cinéma – est devenue en vingt ans plus industrielle que culturelle, phénomène aggravé par la concentration et son corollaire : le tout marketing. Plus spécifiquement, la disparition de points de vente de disque est alarmante. Cette situation n’est pas inéluctable. Le ministère de la culture prépare actuellement un plan d’aide aux libraires dits traditionnels (3 000 libraires en France, et... 60 disquaires, plutôt mal en point). Peut-être peut-on l’adapter et le transposer. Il faut aussi, à l’instar de certains labels indépendants, encourager les libraires à vendre des CD et aider les survivants. Mais il faut surtout cesser d’opposer la distribution traditionnelle et Internet, le disque compact et les nouveaux modes de consommation de la musique : MP3, iTunes, téléphones portables, etc. Le CD, premier support numérique, est bien plus performant et fiable que le MP3, qui compresse et aplatit les sons. Il a ouvert la voie à une génération impressionnante de supports et fait partie des supports multimédias dans la mesure où il est lisible par les lecteurs de DVD. De plus, l’écoute d’un CD est axée sur un artiste, son album. Les nouveaux médias de consommation sont plus globaux : compilations ou heures de musique. On revient à une notion de musique au kilomètre – musique d’ambiance, lounge, pop, qui a toujours existé mais baigne maintenant notre quotidien. Il n’y aura ni opposition ni substitution, mais L’INDUSTRIE DU DISQUE A VÉCU INTERNET COMME complémentarité et croissance du marché sur tous les supports. UNE MENACE PLUTÔT QU’UNE OPPORTUNITÉ. Ikea n’a pas éliminé les antiquaires, le train reste compétitif face à l’avion, la télévision disait-on dans les années 1960 allait tuer la presse et la radio – il n’en fut rien. L’industrie du disque au contraire a vécu Internet comme une menace plutôt qu’une opportunité. Les majors ont par exemple échoué face au site d’échanges de fichiers créé par Napster. Shawn Fanning, fondateur de Napster, était prêt à passer un accord avec elles pour légaliser son site. Elles ont préféré le poursuivre en justice, puis le racheter. Les majors ont ainsi perdu beaucoup de temps, réprimant l’innovation et laissant échapper l’opportunité d’en recueillir les fruits. Quelques années plus tard, Apple en lançant iTunes s’empare de 80 % du marché du téléchargement payant, en fixant unilatéralement le prix de la musique. On entrait alors dans le bras de fer entre les producteurs de contenus et les tuyaux : fournisseurs d’accès sur Internet, géants de l’électronique, de l’informatique et de la téléphonie. En ce moment même se joue l’avenir des industries de contenu, qu’il s’agisse du disque, du DVD, de l’image et de l’écrit. Il y a toujours deux manières de sortir des crises. Par le bas : les producteurs deviennent de simples sous-traitants des grands opérateurs. Ces derniers imposent les prix et les formats, asservissent les créateurs et la création. Big Brother n’est pas loin. Par le haut : les producteurs (majors et indépendants) parviennent avec l’appui des pouvoirs publics à obtenir des opérateurs une juste rémunération à même de financer la création et la production. Cette approche nécessite l’existence de syndicats ou sociétés de gestion collective qui permettent aux producteurs indépendants de défendre leurs intérêts. Les producteurs indépendants du disque viennent ainsi de créer, à Londres, une agence (baptisée « Merlin ») qui négociera des accords collectifs avec les utilisateurs de contenus musicaux. Au-delà de l’aspect financier, c’est la diversité culturelle et la liberté de choix des consommateurs qui est en jeu. Mieux encore, les nouvelles technologies et Internet relanceront le marché physique. Internet est à la fois un media, un outil de promotion et de marketing, et un magasin virtuel. On constate déjà que les succès en téléchargements payants deviennent rapidement des succès dans les « vrais » magasins. En aucun cas, Internet ne se substituera au monde physique. Bien au contraire, ils s’enrichiront mutuellement.
“
“
_Patrick ZELNIK
68 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
la musique ?
Illustration_© Fabrice MONTIGNIER
à mourir
69 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
RÉSEAUX La 3D, nouvelle frontière du numérique
Révolution en pro Le numérique change de dimension : la 3D s’attaque à tous nos écrans, des plus petits aux plus grands. Une « réalité augmentée », comme disent les chercheurs, qui s’accompagne d’enjeux artistiques et industriels de plus en plus lourds. Revue de détails.
Extrait du jeu vidéo Assassin’s Creed (Ubisoft)
C
’est un changement d’envergure. Du tout petit mobile au très grand écran de la salle de cinéma, du GPS dans la voiture au téléviseur, en passant par l'ordinateur individuel, les imprimantes ou la visioconférence, tous les supports de diffusion de l'image s'activent pour reproduire dans les meilleures conditions cette représentation simulée et enrichie de l'espace qu’est la 3D. L'avant-garde de la révolution numérique en a déjà fait une réalité presque banale dans le monde du jeu vidéo et des univers virtuels, où les interfaces 3D s'affichent désormais en temps réel. Alors que 80% des internautes auront LA 3D EST LA MEILLEURE CHOSE QUI SOIT un avatar d'ici 2010, prévoit l'institut d'études Gartner, les mondes parallèles de Second ARRIVÉE AU CINÉMA DEPUIS TRENTE ANS. Life, There.com, Habbo Hotel ou Webkinz UN PRODUCTEUR DU STUDIO DREAMWORKS sont en train de faire de la navigation 3D une nouvelle manière de surfer sur la Toile. Un Internet en pleine gestation dans lequel certains, comme l'éditeur Tim O’Reilly, déjà inventeur du concept de web 2.0, n'hésitent pas à voir un troisième âge du réseau. « Cette troisième dimension est à la confluence des jeux online, des univers virtuels et de la fabrication d'objets avec son ordinateur », expliquait-il récemment sur un blog, en prédisant l'avènement prochain des technologies tridimensionnelles, sous toutes leurs formes. En effet, le champ des possibles est large : 3D micropixellisée sur la plupart des écrans numériques, stéréoscopique à travers les futurs modèles de portables, matérielle via les imprimantes 3D… En attendant, la 3D est déjà une réalité bien immergée dans la cartographie avec les globes virtuels comme Google Earth ou le géoportail de l'IGN,
“
52 I TROIS COULEURS_DÉC. 70 COULEURS_MARS0707// JANV. 08
“
les annuaires en ligne et une nouvelle génération de GPS capables d'afficher la Tour Eiffel ou le Taj Mahal en trois dimensions. Énième gadget pour touristes désorientés ? S'il existe un domaine où la 3D pourrait constituer une véritable rupture avec un avant et un après, le septième art est celui-là. Car l'image en relief change radicalement la donne en termes de perspective et de cadre, dont les bords semblent tout d'un coup se mettre à flotter, comme en suspension. « C'est la meilleure chose qui soit arrivée au cinéma depuis trente ans, la plus grande innovation depuis la couleur », s'enflamme carrément le producteur de films d'animation Jeffrey Katzenberg, du studio Dreamworks, dans le Los Angeles Times. Après Bienvenue chez les Robinson ou Beowulf, sorti sur les écrans le mois dernier, il faut s'attendre à un véritable déferlement de 3D à partir de 2008-2009. Dans l'animation bien sûr, mais également les films d'action ou de science-fiction comme Avatar, le thriller futuriste à 190 millions de dollars de budget que James Cameron prépare actuellement. Avantage non négligeable, le visionnage en relief, qui constitue un débouché naturel pour les films à grand spectacle, ne demande aucun équipement supplémentaire aux salles déjà équipées de projecteurs numériques. Il y en a déjà 4000 aux États-Unis, 250 en Grande-Bretagne, pays le plus avancé sur le vieux continent, et seulement une trentaine en France. Adieu lunettes anaglyphes rouges et vertes : les nouvelles lunettes polarisantes actives chaussées par les spectateurs interagissent avec le projecteur et changent de polarisation à son signal infrarouge. De quoi tout à la fois redonner au cinéma en salle une seconde jeunesse, y attirer les nouvelles générations séduites par le jeu vidéo et lutter contre le piratage, vu qu'en l'état actuel l'image en relief ne peut être correctement restituée sur un PC. La nouvelle frontière hollywoodienne en somme, avant de passer au stade – ultime ? – de l'intervention sur le corps humain à la mode Matrix ou Minority Report. Ça promet... _Christophe ALIX
MOT @ MOT
+++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++
fondeur 2007 EN 5 SITES 1. FACEBOOK Depuis le 24 mai, le site n'est plus limité aux étudiants américains. Mélange de MySpace, Meetic, Copains d'avant et LinkedIn, Facebook est le réseau social par excellence. Un vrai phénomène de société.
2. RUE89 Lancé par des anciens de Libération, Rue89 est le gros lancement de la presse en ligne en 2007. Le site dépasse l'utopie du journalisme citoyen en mêlant experts et internautes à la rédaction d’infos fouillées, vérifiées et souvent inédites.
3. DEEZER Deezer est le premier site français d'écoute de musique en ligne à avoir signé un accord de partage des revenus publicitaires avec la SACEM. Semi-légal et très pratique, il est le symbole de la musique 2.0.
4. GOOGLE Non, Google n'est pas mort. 2007 aura encore renforcé sa boulimie économique (rachat de DoubleClick), mais aussi éditoriale avec le lancement de plateformes dans deux nouveaux domaines : les téléphones portables (Android) et les réseaux sociaux (OpenSocial).
5. NS TV Sarkozy avait compris que la bataille du web en 2007 se jouerait en vidéo. NS TV, véritable télévision de propagande, aura dépassé les 10 millions de vidéos vues pour devenir un YouTube de la Sarkozie : culte, dans tous les sens du terme.
LOW-TECH
[low’tÂk] adj. (par opposition à l’anglais high-tech, qui désigne tout ce qui touche à l’informatique et plus largement aux technologies les plus modernes) 1. Qualifie tout commerce, activité artisanale, occupation n’ayant en aucune façon recours aux ordinateurs et à toute forme d’électronique embarquée ou mobile.Tu joues pas au tennis sur la wii mais sur un vrai court low-tech ? Pfff… t’es trop XXème siècle comme geek ! 2. n.m. Groupe de réflexion parisiano-conscient rassemblant une intelligentsia trentenaire prônant la défense au quotidien des techniques abandonnées par le passé. Les low-tech roulent au charbon sur des solex aux roues carrées.
71 I TROIS53 COULEURS_DÉC. I TROIS COULEURS_MARS 07 // JANV. 08 07
VIDÉO À LA DEMANDE www.mk2vod.com
SLEEPY HOLLOW DE TIM BURTON L’Amérique des origines vue par Burton, à son acmé gothique et burlesque.
E
crit en 1820 par Washington Irving, La Légende de Sleepy Hollow est un classique de l’« Americana » – cette part du folklore américain en prise directe avec ses fondations : la conquête de l’Ouest, l’immigration, la colonisation démographique et culturelle. Lorsqu’il en entame l’adaptation en 1995, Tim Burton n’a pas que la nouvelle d’Irving à l’esprit. Il pense à la poursuite d’Ichabod Crane par le « cavalier sans tête » dans le dessin animé burlesque de Walt Disney, avec voix-off de Bing Crosby en 1949 ; il pense encore au Masque du Démon de Mario Bava et aux éclairages efficaces et hasardeux des productions londoniennes de la Hammer. Un temps dans les mains de Coppola, le scénario revient à Burton qui y imprime sa marque petit à petit, même si on a reproché à l’auteur d’Ed Wood de plaquer son style (somptueux) sur un scénario qui lui ressemblait peu. Il est vrai qu’à sa sortie en 1999, cette histoire d’un cavalier décapitant les colons d’un village hollandais pouvait attirer les afficionados des slashers, Scream entre autres. À le revoir aujourd’hui, le film n’a cependant rien perdu de son efficacité gothique : c’est le dernier de la grande période de Burton, avant ravalement de façade avec La Planète des Singes et Big Fish. _Antoine THIRION ++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++++
LE CHOC DES CULTURES N'AURA PAS LIEU Ce mois-ci sur MK2vod, visions d’un monde métissé, porté sur l'échange libre de cultures et de populations. Des yeux du petit Algérien Michou d'Auber, nous découvrons la France profonde, tandis que nous parcourons le Japon de ceux de Jean Reno, qui a bien du mal à supporter le Wasabi. Enfin, Black Mic-Mac nous entraîne au cœur de la communauté africaine de Paris pour un portrait épicé qui, sous couvert d'humour, exhorte à la tolérance.
LA MUSIQUE DE L’ÂME Des chanteurs légendaires bousculent nos oreilles et notre âme dans Motown, la véritable histoire. Leur musique inimitable, qui prit le juste nom de soul, partage avec le blues une même ambiguïté entre le sacré et le profane, comme l'éclaire la caméra de Wim Wenders dans Soul Of A Man. Quant à l’adaptation de La Flûte enchantée par Kenneth Branagh, portée par un orchestre d'exception, elle ne serait sans doute pas reniée des cieux par Mozart lui-même.
72 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
SCIENCE-FICTION La chronique des objets de demain... Le LHC.
Pépins (en bref) À l’heure des bilans, l’Iphone s’impose sans surprise comme notre objet high-tech de l’année. Téméraire, notre rédacteur a voulu identifier les origines fruitées du succès d’Apple. À l’aide d’un accélérateur à particules franco-suisse, il s’est paumé dans le temps…
_Étienne ROUILLON
EN GUISE DE DIGESTIF… LHC se traduit en français par Grand Collisionneur Hadronique. C’est le fruit de 18 ans de recherche franco-suisse. Dans ce tunnel de 27 km de circonférence, opérationnel fin 2008, des protons seront accélérés pour produire des collisions. Ces dernières permettront d’étudier le Big Bang, d’unir les lois de l’infiniment grand et de l’infiniment petit, et de vérifier la « théorie des cordes ». ALAN TURING Grand mathématicien homosexuel, éperdument épris de Blanche Neige. Persécuté pour ses orientations sexuelles, il met fin à ses jours en croquant dans une pomme pleine de cyanure. 23 ans plus tard, Apple crée son logo : une pomme croquée aux couleurs de l’arc-en-ciel.
74 I TROIS COULEURS_DÉC. 07 // JANV. 08
Illustration_© Thomas DAPON
2008
Quelque part sur la frontière franco-suisse. Après 18 ans de gestation, une armée d’ingénieurs helvètes surexcités (un poncif poussif de moins) met en branle le LHC (Large Hadron Collider). Je caméléonne jusqu’au poste de commande de cet accélérateur à particules, remontant jusqu’au bigbandesque charivari originel. Mot-clef de ma recherche : « pomme ». Initialisation du saut temporel : vortex comme dans Code Quantum, vomi comme à la cantine. 2001 Un mois de septembre où les tours jumelles de New York se ramassent à la pelle, Big Apple sent le cramé. Cette pomme-là est bien trop acide. 1995 Mangez des pommes ! Bonne poire, l’électeur aux papilles émoustillées dit oui au candidat corrézien. C’est vrai qu’il est trognon, mais le pépin c’est qu’au fond du cidre, il y a toujours un résidu. Pendant douze ans, la chenille ronge le verger UMP, mue en papillon et l’opposition devient compote aigr(i)e. La pomme ne donne pas la pêche, Apple aurait-il fait une erreur de casting ? 1665 Réception temporelle mal assurée dans un pommier sous lequel Newton a pris ses quartiers. Je chute sur les épaules du physicien, qui s’emporte rouge pomme d’api. «– Tar’ ta gueule toi ! – Tarte aux pommes, rectifie-je, fais grave attention, j’suis dur à cuire. – Pommes ? Gravitation ? Tiens, y’a de l’idée.» 1300 av.n.è. Pomme des reinettes pour déesses pas nettes. Pâris, pauvre pâtre grec, ne sait à quelle reine il doit passer la pommade. Pomme d’amour ou pomme de discorde, le fruit des passions provoque d’homériques crumble de chignons. 5 000000 av.n.è Une i-faune déambule dans le jardin d’Eden. L’estomac en compote, Adam craque et croque dans un fruit qui lui reste en travers de la gorge : « Votre descendance sera divisée à jamais entre PC et Mac ! Une harmonie informatique impossible, tel sera votre châtiment ! », tonne le démiurge. Le teint verdâtre, Adam se tourne vers Eve : « Grosse pomme ! »