Trois Couleurs #65 – Octobre 2008

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CINÉMA I CULTURE I TECHNOLOGIE

E R T L'AU

NUMÉRO 65 I OCTOBRE 2008

STEVE McQUEEN





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ÉDITO

CINÉMA

MÉMOIRE VIVE

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Tendances, Ciné fils, Regards croisés, Scène culte DOSSIER : Hunger de Steve McQueen Entretien avec Steve McQueen, Focus sur son œuvre de vidéaste, Portrait de Michael Fassbender Khamsa : entretien avec Karim Dridi Enfants de Don Quichotte (acte 1) : entretien avec Augustin Legrand Critiques de La Vie moderne, Dernier Maquis, Mesrine, Vicky Cristina Barcelona, Fly Me to the Moon Lika Minamoto habillée par Paule Ka LE GUIDE des sorties en salles

CULTURE 52_ 54_ 56_ 58_ 60_

DVD : Martial Raysse, le cinéaste derrière l’artiste LIVRES : Le roman français retrouve du souffle MUSIQUE : La pop slicée de Housse de racket LES BONS PLANS DE RADIO ART : L’ouverture du Centquatre

TECHNOLOGIE 62_ 64_ 66_

RÉSEAUX : Quand les geeks dérapent… JEUX VIDÉO : Les jeux sur PC sont-ils condamnés ? SCIENCE-FICTION : Le baby-phone

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SOMMAIRE # 65

« Nous vivons dans l’oubli de nos métamorphoses », écrivait Paul Éluard. Qu’elle que soit sa portée, intime ou collective, individuelle ou sociétale, le changement avance masqué, s’inscrivant d’abord dans les marges, les contre-allées, les périphéries. La force du cinéma, c’est de rendre ces bouleversements à leur visibilité, les signaler, les accompagner, les comprendre ; bref, sortir ces métamorphoses de l’oubli qui les guette continuellement. Hunger, Khamsa, La Vie moderne, Dernier Maquis, Mesrine, Enfants de Don Quichotte (acte 1) : les films les plus forts de cet automne fonctionnent de la sorte, en piqûres de rappel tantôt empathiques, tantôt plus distanciées, arpentant les couloirs de notre démocratie, fixant ses variables d’ajustement, précaires et négligées. Gitans, ouvriers, musulmans, paysans, SDF, activistes sont, à travers ces films, rendus à une représentation plus digne et humaniste que celle que renvoient nos confrères les plus sensationnalistes. Plus digne, pourquoi? Question de durée, d’acuité, de générosité du regard. «Le cinéma, c’est vingt-quatre fois la vérité par seconde», disait Godard ; vingt-quatre métamorphoses sauvées de l’oubli. _Auréliano TONET

ÉDITEUR MK2 MULTIMÉDIA / 55 RUE TRAVERSIÈRE_75012 PARIS / 01 44 67 30 00 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION > Elisha KARMITZ I DIRECTEUR DE LA RÉDACTION > Elisha KARMITZ elisha.karmitz@mk2.com I RÉDACTEUR EN CHEF > Auréliano TONET aureliano.tonet@mk2.com / troiscouleurs@mk2.com RESPONSABLE CINÉMA > Sandrine MARQUES sandrine.marques@mk2.com I RESPONSABLE CULTURE > Auréliano TONET I RESPONSABLE TECHNOLOGIE > Étienne ROUILLON etienne.rouillon@mk2.com ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO : Isabelle DANEL, Pascale DULON, Moland FENGKOV, Clémentine GALLOT, Jacky GOLDBERG, Roland JHEAN, Rémy KOLPA KOPOUL, Titiou LECOQ, Jérôme MOMCILOVIC, Stéphane PETIRUISSO, Sophie QUETTEVILLE, Bernard QUIRINY, Léo SOESANTO, Anne-Lou VICENTE I ILLUSTRATIONS > Thomas DAPON, DUPUY-BERBERIAN, Fabrice GUENIER, Arnaud PAGÈS DIRECTRICE ARTISTIQUE > Marion DOREL marion.dorel@mk2.com I MAQUETTE > Marion DOREL, Louise KLANG IMPRESSION / PHOTOGRAVURE > FOT I PHOTOGRAPHIES > Antoine DOYEN (couverture), Sonia SIEFF, DR PUBLICITÉ > RESPONSABLE CLIENTÈLE CINÉMA > Laure-Aphiba KANGHA / 01 44 67 30 13 laure-aphiba.kangha@mk2.com I CHEF DE PUBLICITÉ > Solal MICENMACHER / 01 44 67 32 60 solal.micenmacher@mk2.com © 2008 TROIS COULEURS // issn 1633-2083 / dépôt légal quatrième trimestre 2006. Toute reproduction, même partielle, de textes, photos et illustrations publiés par MK2 est interdite sans l’accord de l’auteur et de l’éditeur. // Tirage : 200 000 exemplaires // Magazine gratuit // Ne pas jeter sur la voie publique.


Madame est serviette

Ex-nageuse pro d’origine saoudienne, Summer Bishil, 20 ans, affole Hollywood. Son premier film, Towelhead, en salles cet hiver, la montre en jeune ado affranchie, exposée à des taches de tous poils. Les serviettes lui collent à la peau. Summer Bishil pensait les avoir laissées dans un vestiaire moyen-oriental, du temps où elle enchaînait les longueurs et rêvait de gloire chlorée. Or voilà qu’elle débute au cinéma dans Towelhead, soit littéralement : « tête de serviette ». L’insulte donne son titre à ce film qui dénonce le racisme américain latent, ce Texas qui s’accommode d’étiquettes simplistes et refuse de mélanger les torchons et les turbans. Mais ce voile scénaristique s’empourpre de taches plus intimes encore : Jasira, son personnage d’adolescente pubescente, doit faire face aux assauts des premières règles, des premiers désirs aussi, douchés par un père traditionaliste mais attisés par un voisin pédophile, qui lui fait perdre sa virginité. Bref, un vrai sac de nœuds, dont Summer s’extirpe en douce, par la grâce d’un jeu tout en nuances, ni trop polie, ni trop polissonne. Dans la foulée de ce rôle complexe, Variety l’a désignée parmi les «dix comédiens à suivre en 2008 ». Née en Californie il y a 20 ans, mais élevée entre l’Arabie Saoudite et Bahreïn par un père mi-saoudien mi-indien et une mère Américaine, Bishil est rentrée aux États-Unis aux lendemains du 11 septembre. Bientôt à l’affiche de Crossing Over aux côtés de Sean Penn et d’Harrison Ford, elle pourrait enfin donner un visage à la seule minorité qui n’a peu ou pas droit de cité à Hollywood : ceux que certains appellent encore les « enturbannés ». _A.T.

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TENDANCES

CALÉ

DÉCALÉ

RECALÉ

Éco-sensibiliser

Écornifler

Économiser

007 défend nos ressources naturelles dans Quantum of Solace, Un Monde sans eau ? donne un goût précieux à celle du robinet, La Fièvre de l’or dénonce la déforestation : le cinéma carbure au vert, et nous avec.

Sur freegan.fr, les « déchétariens » prônent la récupération éthique : par exemple, glaner en douce ses repas dans les invendus jetés à la poubelle par les supermarchés. « Tu m’as donné ta boue, j’en ai fait de l’or », disait Baudelaire, visionnaire.

« T’as craqué ou quoi ? », demande le bon sens à l’économie. La finance a mal à ses bourses, les banquiers se sont grillés les ailes. Heureusement qu’une étude de J.K. Galbraith dénonce le mythe : pas de pic de suicidés en 1929.

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À tous points de vue

Dans Blindness, en salles le 8 octobre, une étrange épidémie de cécité se répand. Elle nous ouvre les yeux sur le goût du cinéma pour les personnages d’aveugles. Brouillage des repères et vue défaillante, avançons à tâtons dans cette filmographie obscure. À en croire le vieil adage populaire, l’amour est aveugle. Et ce n’est pas Charlot dans Les Lumières de la ville qui prétendrait le contraire. Le clochard se fait passer pour un homme fortuné auprès d’une fleuriste non-voyante. Après avoir recouvré la vue, elle reconnaîtra par hasard son modeste bienfaiteur. Amours vagabondes encore dans Les Amants du Pont-Neuf où un cracheur de feu organise pour la femme qu’il aime (et qui perd progressivement la vue) une visite nocturne du Musée du Louvre. Entre amour et compassion, un prêtre nourrit à l’égard de sa jeune protégée aveugle des sentiments troubles dans La Symphonie pastorale. L’issue sera tragique, contrairement à celle de Miracle en Alabama où une fillette sourde, muette et aveugle s’éveille enfin à la vie, grâce à la ténacité d’une éducatrice. S’il n’est pas malvoyant, Jack Black dans L’Amour extra-large est du moins aveuglé par ses sentiments. À la faveur d’un charme, le séducteur, qui n’a pas les yeux dans ses poches, se met à voir dans les courbes d’une fille obèse celles d’une véritable bombe. Drôle de sortilège qui frappe également Woody Allen dans Hollywood Ending : réalisateur angoissé et hypocondriaque, il perd la vue au moment de donner le premier coup de manivelle de son nouveau film. Même coup du sort pour la courageuse Selma dans Dancer in the Dark dont la vue décline et qui, pour sauver son fils d’un destin similaire, endure stoïquement son martyre. Reste le mythe de l’aveugle visionnaire. Il prend les traits d’un transsexuel brésilien dans Tiresia. Et dans un registre légendaire, le faciès taciturne d’un masseur, incarné par Takeshi Kitano ; en fait, un redoutable combattant qui n’hésite pas à sortir sa canne-épée (Zatoichi) pour en découdre avec une étonnante dextérité. Preuve s’il en est qu’au cinéma, la question du point de vue est essentielle. Ça crève les yeux.

_S.M.

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CINÉ FILS

La bande originale

FABRICE VIEL & BÉATRICE ARDISSON « J’irai dormir à Hollywood » (Atmosphériques) Originale, cette BO l’est autant que l’homme dont elle scande le périple : Antoine de Maximy, globe-squatteur solitaire, qui transbahute outreAtlantique son émission J’irai dormir chez vous en même temps qu’il l’adapte au cinéma (le film sort le 19 novembre). Pour illustrer ce drôle de road-trip en corbillard, Béatrice Ardisson a sélectionné des reprises décalées de standards américains. Quant à Fabrice Viel, déjà compositeur sur la série télé, il confirme ses talents d’arrangeur, s’appropriant avec goût un panorama _E.R. musical vaste et vallonné.

Le ciné livre ANNE MARTINETTI & FRANÇOIS RIVIÈRE « La Sauce était presque parfaite » (Cahiers du cinéma)

En 80 recettes inspirées des films de l’insatiable Alfred, ce livre goûte à la riche filmographie d’Hitchcock par le prisme de la grande bouffe. Le réalisateur salivait : « Pour moi, un film n’est pas une tranche de vie, c’est une tranche de gâteau », à l’image du cake servit lors du goûter d’anniversaire des Oiseaux. Savoureusement illustré, écrit dans une langue sapide, cet ouvrage ne donne pas la recette du génie du ventripotent Hitch. Mais avouez qu’à la manière des personnages de L’Inspecteur se met à table, vous reprendrez bien une tranche de « gigot d’agneau frappé » – saignant, ça va de soi. _E.R.



REGARDS CROISÉS

Connery vs Craig

Illustration : Fabrice GUENIER

Ils s’appellent Bond, James Bond. Interprètes peu connus et même décriés à l’époque où ils endossèrent le smoking de 007, l’Écossais Sean Connery et l’Anglais Daniel Craig ont su imposer leur style, basé sur la virilité et l’action.

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as facile de devenir le plus célèbre agent secret britannique. Lorsque Sean Connery coiffe au poteau des concurrents comme Cary Grant pour incarner le commander Bond, Ian Fleming, le créateur du personnage, émet des réserves. Pas assez raffiné. Près de quarante ans plus tard, Daniel Craig essuie les mêmes critiques mais relève le défi. Choqués par ce choix de casting, des fans menacent de boycotter Casino Royale. Pour autant, les deux acteurs s’imposent dans leurs rôles : James Bond contre docteur No remporte un franc succès et propulse Connery au rang de star internationale, tandis que le remake de Casino Royale, porté par un Craig dopé à la testostérone, révèle un James Bond plus moderne, loin de la débauche technologique et du kitsch des précédents opus. En pleine possession de ses moyens dès le premier volet, Sean Connery campe un héros charismatique, doté d’une virilité non dénuée de classe, ce qui amène beaucoup à le considérer comme le meilleur James Bond. Il sert sa Majesté dans six autres épisodes, avant de s’illustrer dans des rôles de mentors, sans jamais se départir de son célèbre accent scottish (Le Nom de la rose, Les Incorruptibles, Highlander, Indiana Jones et la dernière croisade). Quant à Daniel Craig, il s’était auparavant distingué dans des rôles combatifs : rival d’Angelina Jolie dans Lara Croft, soldat anglais dans La Tranchée, ange exterminateur dans Munich. En un film, il éclipse tous les successeurs de Sean Connery. Plus sombre, plus brut, plus affûté, il brise les repères tout en jouant avec les codes du personnage. Il bondit, défonce les murs, et affiche sa nudité dans une scène de torture désormais culte. Vulnérable, le séducteur à l’humour subtil tombe également amoureux. Reste à voir si dans les prochains épisodes, il parviendra à instiller la classe qui définit le personnage, tout en gardant son originalité. Réponse avec Quantum of Solace, en salles le 31 octobre. _Moland FENGKOV

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SCÈNE CULTE Heat

Seul à seul LA PETITE HISTOIRE : À partir du même scénario, adapté de l’histoire vraie d’un ami détective, Michael Mann a développé deux fictions : le téléfilm L.A Takedown en 1989, et le remake Heat en 1995. Le personnage de Nate, interprété par Jon Voight (le papa d’Angelina Jolie), s’inspire de l’acteur et romancier Edward Bunker, un malfrat récidiviste. La rencontre pour la première fois au cinéma des deux monstres sacrés Pacino et De Niro intervient à l’exacte moitié du film. Près de quinze ans plus tard, les deux hommes se retrouvent à l’affiche du thriller La Loi et l’ordre de Jon Avnet, en salles le 8 octobre prochain.

LE PITCH : Flic opiniâtre et rusé, Vincent Hanna (Al Pacino) se lance à la poursuite d’une bande de gangsters, qui a attaqué un fourgon blindé. À la tête de l’organisation règne Neil McCauley (Robert De Niro). Commence un jeu d’observation entre le policier et le criminel, qui développent bientôt une grande estime l’un pour l’autre. Ils se rencontrent dans un café et mesurent la solitude qui les unit.

HANNA : Sept ans à Folsom. Trois au mitard. McNeil avant. McNeil est aussi dur qu’on dit ? MCCAULEY : Tu veux devenir criminaliste ? HANNA : Tu veux replonger ? J’ai traqué des mecs qui voulaient se faire serrer. C’est ton cas ? MCCAULEY : Tu as dû traquer des merdeux. HANNA : J’ai fait tous les genres. MCCAULEY : Je braque des épiceries avec « né pour perdre » tatoué sur mon torse ? HANNA : Non. Pas du tout. MCCAULEY : Exact. Je ne replongerai jamais. HANNA : Alors ne fais pas de coups. MCCAULEY : Je fais ce que je sais faire. Des coups. Fais ce que tu sais faire : essaie de m’arrêter.

HANNA : Tu veux pas d’une vie normale ? MCCAULEY : C’est quoi ? Barbecue et baseball ? HANNA : Oui. MCCAULEY : Cette vie-là, c’est la tienne ? HANNA : Ma vie, non ma vie… est une zone sinistrée. J’ai une belle-fille totalement paumée parce que son vrai père est un gros con. J’ai une femme. On se croise dans la débâcle d’un mariage, mon troisième… Parce que je passe mon temps à traquer les types comme toi. Voilà ma vie. MCCAULEY : Un type m’a dit un jour : « N’aie rien dans ta vie que tu ne quitterais en trente secondes, si tu sens les flics au coin de la rue. » Si tu me pistes et que tu dois bouger avec moi, comment veux-tu faire tenir un mariage? HANNA : C’est intéressant. Tu es moine ? MCCAULEY : J’ai une femme. HANNA : Tu lui dis quoi ? MCCAULEY : Que je suis représentant. HANNA : Si tu me vois venir au coin de la rue, tu la plantes là ? Sans un adieu ? MCCAULEY : C’est la règle.

Heat, scénario et film de Michael Mann (1995, disponible en DVD chez Warner). La Loi et l’ordre, de Jon Avnet (2008, Metropolitan Film Export), en salles le 8 octobre.

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STEVE McQUEEN LA FAIM ET LES MOYENS Caméra d'or au festival de Cannes 2008, en salles le 26 novembre prochain, Hunger retrace à sa manière organique, brute et stylisée le combat du Nord-Irlandais Bobby Sands. Ce gréviste de la faim, membre de l’IRA, réclamait en 1981 le statut de prisonnier politique pour ses camarades détenus et pour lui-même. Nous avons voulu rencontrer le Britannique Steve McQueen, auteur de cette première œuvre choc, pour qui faire un film relève avant tout d’une démarche humaniste.

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unger est votre premier film de cinéma. Avezvous apprécié cette nouvelle expérience ? Énormément, car j’avais affaire à des experts, chacun dans leurs domaines. Tout le monde vous aide à élaborer votre film. Aucun réalisateur ne devrait se plaindre car on vous apporte du thé et avant même que votre tasse ne soit vide, on vous la remplit. C’est le paradis. D’habitude, je prépare mon thé tout seul !

Vous tourniez jusqu’à présent des vidéos projetées dans des galeries ou des musées. En quoi est-ce différent de réaliser un film pour le grand écran ? La principale différence est d’ordre formel. Quand je réalise mes installations vidéo, j’essaie d’organiser la forme et de la transmettre. Or, les films de cinéma relèvent d’une grammaire connue. Tout ce que vous pouvez faire, c’est essayer de la bouleverser. Quand vous réalisez un long métrage, vous êtes face à plus de monde. En cela, le processus créatif n’est pas le même. Auparavant, je n’avais jamais été sur un plateau de cinéma. J’étais heureux de faire ce que je voulais avec mes films, sans devoir composer avec ce cadre-là. Cependant, il n’y a pas qu’une seule façon de réaliser un film. Il m’importe surtout, à la fin de la journée, de parvenir à une sorte d’évidence avec mon travail.

Vous étiez enfant quand a éclaté la grève de la faim que vous décrivez dans Hunger. Quels souvenirs en avez-vous gardé ? 14 I TROIS COULEURS_WWW.MK2.COM_OCTOBRE 08

Je me souviens de photos de Bobby Sands et des chiffres sous son nom qui augmentaient chaque jour, coïncidant avec le nombre de détenus qui mouraient. Et dans ma tête d’enfant, je trouvais curieux que quelqu’un qui arrête de se nourrir se fasse entendre et obtienne une tribune. À la même époque, à Londres, mon équipe de football préférée s’est distinguée et tous ces éléments se sont enchevêtrés, produisant un fort impact sur moi. C’était comme l’avènement d’une ère nouvelle, un réveil. Votre film s’ouvre sur le quotidien violent d’un gardien de prison. Souhaitiez-vous rendre compte de l’humanité de l’ensemble des acteurs de ce drame, des matons aux grévistes de la faim ? Absolument. Les détenus, qui font la grève de l’hygiène et des couvertures, sont en détresse car ils réclament le statut de prisonnier politique. Les gardiens qui les surveillent font leur boulot. Mais des deux côtés, ce sont d’abord des êtres humains. Je ne voulais pas tomber dans les stéréotypes liés à la représentation des membres de l’IRA ou des gardiens. J’envisage l’écran de cinéma comme un miroir dans lequel on puisse se refléter. C’est la raison pour laquelle je veux faire des films. La structure de Hunger est atypique car Bobby Sands, le personnage principal, n’apparaît qu’au tiers du film. Est-ce que cela participait d’une volonté de ne pas le représenter comme un héros ?


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EN COUVERTURE

Effectivement, je n’héroïse pas Bobby Sands, pas plus que je ne montre des héros dans Hunger. Dans la plupart des films, dès lors qu’il y a un personnage principal, il devient un héros – bon ou mauvais. La structure du film est déterminée par la façon dont vous voulez raconter une histoire, caractériser vos personnages, ou influer sur le point de vue des spectateurs. J’ai pris des décisions en fonction de la manière dont je voulais que chemine le récit et que l’on perçoive mes personnages. Hunger est très peu dialogué. Il s’articule pourtant autour d’une conversation-pivot entre Bobby Sands et un prêtre. Comment avez-vous pensé cette séquence en rupture avec le reste du film ? Dans Hunger, je voulais m’en tenir aux faits et aux sons les plus

Pendant quatre ans et demi, ces prisonniers ont connu la violence et vécu dans des conditions ignobles. Je voulais filmer ceux qui étaient en première ligne de cette lutte. L’acteur Michael Fassbender a perdu beaucoup de poids pour le rôle. N’aviez-vous pas peur de le mettre en danger ? Non, c’est ce en quoi consiste son travail d’acteur. Le film s’appelle Hunger et il était indispensable qu’il maigrisse pour le rôle. Je ne l’avais pas vu jouer dans d’autres films avant de l’engager sur la base d’une conversation. J’ai parfois été un peu dur avec lui comme il a été exigeant vis-à-vis de luimême. Nos discussions ont permis de nouer une relation privilégiée. Il me faisait confiance. Je ne souhaitais pas qu’il joue, mais qu’il soit son personnage. Il est allé puiser dans des choses intimes et s’est mis dans un état de vulnérabilité

« J’ENVISAGE L’ÉCRAN DE CINÉMA COMME UN MIROIR DANS LEQUEL ON PUISSE SE REFLÉTER. »

Pourtant, cette conversation n’a jamais eu lieu en vrai… En effet, mais selon moi le film en avait besoin pour confronter ces deux points de vue opposés, les explorer de bout en bout jusqu’à l’épuisement. Cela justifie la longue durée de la scène. Même si Hunger s’attache à la lutte de membres de l’IRA au sein des geôles britanniques, êtes-vous d’accord pour dire que ce n’est pas un film politique ? En effet, c’est un film humaniste. Laissons aux politiciens la politique et aux artistes le soin de parler des hommes.

où il était nu, au sens émotionnel du terme. Pensez-vous que le corps est l’arme de résistance ultime ? Pour des individus comme Bobby Sands, en effet. On le voit encore aujourd’hui. Certains n’hésitent pas à mourir pour leur cause. Manifestement, ce type d’action trouve un impact. C’est plutôt effrayant. À travers Hunger, souhaitiez-vous témoigner d’une des pages les plus sombres de l’histoire britannique ? J’ai plutôt envie que Hunger témoigne de ce qui se passe actuellement, car le passé est le passé. Ce qu’il y a de bien avec le film, c’est qu’il résonne avec le présent. C’est sa beauté pour moi. Je suis plus intéressé par ce qu’il y a autour de nous que par la fascination que peuvent exercer des événements qui ont eu lieu il y a vingt-sept ans.

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_Propos recueillis par Sandrine MARQUES

Photographie : © Antoine DOYEN

essentiels. Cette séquence était cruciale par sa dynamique. Elle met en balance les raisons de vivre et les raisons de mourir. Mais que l’on envisage l’une ou l’autre alternative ne change rien au cours des choses. C’est ce qui m’intéressait dans cet échange.

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Steve McQueen - « Running Thunder », 2007 - Film16 mm, couleur, muet, en boucle, 11min. 41 sec. Courtesy Galerie Marian Goodman, Paris / New York et Thomas Dane Gallery, Londres.

HUMAN AFTER ALL Un Steve McQueen peut en cacher un autre : le jeune réalisateur de Hunger est aussi, et surtout, un vidéaste internationalement renommé. Depuis le milieu des années 1990, ses installations exploitent les possibles de l’image et explorent les limbes du genre humain. La sortie en salles de Hunger, couronné à Cannes et à Sydney, sera sans doute l’occasion pour beaucoup de découvrir l’existence de cet autre Steve McQueen, qui jouit depuis un certain nombre d’années déjà d’une renommée internationale. Il n’a que 30 ans lorsqu’il remporte, en 1999, le prestigieux Turner Prize, décerné chaque année à un artiste britannique.

ses vidéos qui instillent le trouble chez celui qui les regarde, et les ressent. Ni violence manifeste, ni provocation intentionnelle, c’est tout en rigueur minimaliste que l’image fait son œuvre. McQueen s’empare de fragments du réel, transcendé par l’expérience visuelle et sensorielle qu’il propose non seulement à travers ses films, mais encore grâce aux dispositifs mis en place en vue de leur exposition. «J’essaie d’organiser la forme et de la transmettre », explique McQueen. Modeste façon de résumer sa pratique, laquelle relève d’une approche sensible, intelligente et rare du réel et de son mode de représentation. « J’envisage l’écran comme un miroir », déclare encore l’artiste qui se plaît à explorer les limbes, les entre-deux et autres terrains (é)mouvants dont la totale maîtrise est vaine. Les particules qu’il extrait de la réalité basculent dans une autre dimension. Échappant à leur ancrage documentaire, elles apparaissent comme autant de petits miracles à la charge émotionnelle communicative. En 2002, l’artiste embarque une caméra Super 8 à bord de l’ascenseur d’une mine d’or en Afrique du Sud, à trois

« LES VIDÉOS DE STEVE MCQUEEN INSTILLENT LE TROUBLE CHEZ CELUI QUI LES REGARDE, ET LES RESSENT. » Dernièrement, il a été désigné pour représenter la GrandeBretagne lors de la prochaine Biennale d’art contemporain de Venise, en 2009. Le succès poursuit Steve McQueen depuis ses débuts. Mais tout laisse à penser que ce n’est pas ce derrière quoi court l’artiste, parti s’exiler à Amsterdam, loin de l’effervescence arty londonienne. En d’autres termes, loin de la fameuse clique des « Young British Artists », révélés en 1992 à la Galerie Saatchi lors d’une exposition éponyme, première d’une série d’expositions consacrées à la jeune scène artistique britannique, emmenée notamment par Damien Hirst, véritable star de l’art contemporain. Steve McQueen est bel et bien un artiste – et une personnalité – à part, et à part entière. L’indifférence n’est pas de mise face à

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kilomètres sous terre (Western Deep). En 2001, il réalise Girls, Tricky. La vidéo, montrée au Musée d’art moderne de la ville de Paris dans son exposition personnelle en 2003, est constituée d’un long plan-séquence dans lequel le chanteur Tricky improvise lors d’une séance d’enregistrement en studio, amenant la tension créative à son paroxysme. Dans Charlotte (2004), l’artiste touche littéralement du doigt l’œil de l’actrice Charlotte Rampling, filmé en gros plan. Cette gestuelle pourrait constituer une métaphore de l’œuvre de Steve McQueen : l’image touchant le regard, et l’esprit. _A.-L.V.

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MICHAEL FASSBENDER JOUER AU PLUS FIN Découvert dans Angel, à l’affiche de Eden Lake ce mois-ci ou du prochain Tarantino en 2009, Michael Fassbender est sidérant dans Hunger. Il y joue Bobby Sands, activiste de l’IRA mort d’une grève de la faim dans la prison de Maze. Portrait d’un acteur, et d’un corps, avec lesquels il va falloir compter.

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le corps. On aurait tort de ratatiner l’effort de Fassbender, dans ces séquences qui le voient maigrir jusqu’à l’agonie (il a jeûné pendant plusieurs mois), sous la seule bannière de la « performance d’acteur ». Parce que tout se distribue depuis ce corps en souffrance, page blanche où s’écrit le film, happant le récit dans les sillons qui le creusent. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le corps de Fassbender est au supplice. Angel l’envoyait au front et nous le rendait amputé d’une jambe. Ce mois-ci, il se fait torturer à mort par les galoupiauds ivres de violence de Eden Lake, thriller de James Watkins. Et on ne prend pas un gros risque en pariant que dans le prochain Tarantino, il risque d’en baver encore. Surtout quand on sait qu’il a lui-même dirigé et joué sur scène une version de Reservoir Dogs. Alors quand Steeve McQueen nous avoue avoir été un peu dur avec lui sur le tournage de Hunger, on se dit qu’il n’a peut-être pas complètement détesté ça. Et qu’un grand acteur masochiste est né. _Jérôme MOMCILOVIC ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ EDEN LAKE - UN FILM DE JAMES WATKINS ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ AVEC MICHAEL FASSBENDER, KELLY REILLY... ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : LA FABRIQUE DE FILMS // ÉTATS-UNIS, 2008, 1H30 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIE LE 8 OCTOBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ HUNGER - UN FILM DE STEVE MCQUEEN ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ AVEC MICHAEL FASSBENDER, LIAM CUNNINGHAM... ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : MK2 DIFFUSION // GRANDE-BRETAGNE, 2008, 1H40 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIE LE 26 NOVEMBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

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Photographie : © Antoine DOYEN

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l a fait ses débuts sur scène, en jouant Tchekhov, et confie adorer les rôles en costumes. Il y était d’ailleurs engoncé quand on l’a découvert l’an dernier, dans Angel, le mélo encostumé de François Ozon. Costumé encore, quoique l’habit fût plus rudimentaire, slip de bain bondage sous torse huilé à la palette graphique, dans le très viril 300. 2009 le verra revêtir la redingote de Heathcliff, dans une nouvelle adaptation des Hauts de Hurlevent, tandis que Tarantino lui fera retrouver, dans Inglorious Bastards, l’uniforme qu’il portait dans Band of Brothers, série produite par Spielberg et qui l’a révélé. Faut-il s’étonner, alors, de ce que Michael Fassbender trouve son rôle le plus fort dans Hunger, où le corps est mis à nu et au-delà, décharné à l’unisson du récit ? On y verra au contraire la confirmation d’une ligne ferme, dans une carrière pourtant tout juste naissante. Un goût pour l’incarnation qui confine au transformisme, où le corps entier est un terrain de jeu. Un « champ de bataille », dit Steeve McQueen, réalisateur de Hunger, à propos de celui de Bobby Sands. Pour jouer l’activiste irlandais mort pour la cause, Fassbender n’est d’abord que parole. Dans un plan-séquence de vingt minutes qui se déploie comme un ping-pong verbal, Bobby Sands affirme sa résolution au prêtre venu le visiter au parloir. La joute est bluffante. Mais déjà, c’est le corps de Fassbender qui capte l’attention, sec, tendu comme un arc (dans 300, il en imitait la forme pour donner l’assaut). Et puis le film se tait et c’est le corps qui parle, plus rien que


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KARIM DRIDI SAUVAGE INNOCENCE

Ce n’est pas la destination mais la route qui compte, dit un proverbe gitan. Et celle qui a conduit Karim Dridi à réaliser Khamsa compte parmi les plus beaux récits de voyage du cinéma français. Nous avons tenu à ce que le cinéaste nous raconte ce qui, bien plus qu’un très grand film de cinéma, fut une expérience humaine hors du commun.

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hamsa, votre septième long métrage, brasse certains de vos thèmes de prédilection, comme l’identité ou le métissage. Quel en a été le moteur ?

Je fais du cinéma pour témoigner de certaines choses et en l’occurrence, dans Khamsa, de l’injustice faîte aux enfants. Avec ce film, je pouvais parler de la ville de Marseille, de la délinquance, des minorités, du racisme, des rapports intercommunautaires entre les Gitans et les Maghrébins, de la manière dont j’ai travaillé avec des non-acteurs. J’ai eu un an pour approfondir toutes les thématiques qui touchaient au film. C’est quelque chose que je n’ai pas envie de lâcher.

Comment avez-vous découvert le camp de Gitans où se déroule l’essentiel de l’intrigue de Khamsa ? Par le biais de mon ami Sofiane Mammeri, qui jouait dans Bye Bye, l’un de mes précédents films. C’était à l’époque un petit délinquant de quinze ans ; aujourd’hui, c’est un beau trentenaire. Je suis retourné le voir en lui faisant part de mon souhait de tourner un film à Marseille. Il m’a alors parlé du camp Ruisseau Mirabeau, près de l’Estaque, où il avait casté des mômes pour un clip. Dès que je les ai rencontrés, j’ai eu un flash. J’ai essayé de m’approcher doucement de leurs parents – pour ceux qui en avaient – et de leur expliquer ma démarche. Comment êtes-vous parvenu à installer une relation de confiance avec la communauté tsigane ? Ce fut un long processus qui a duré un an et demi. Je venais une à deux fois par semaine à Marseille. Ensuite, nous avons acheté une caravane avec Sofiane pour que les habitants du camp comprennent bien qu’on voulait 20 I TROIS COULEURS_WWW.MK2.COM_OCTOBRE 08

rester parmi eux. Ils ont éclaté de rire quand ils nous ont vu débarquer. La glace a été brisée. Chaque matin, une femme gitane nous apportait le café. On ne s’impose pas dans un camp, on se fait accepter. Cette expérience m’a permis de découvrir une culture de citoyens français différente de la mienne, mais aussi une réalité sociale terrible où des gamins d’une beauté et d’une énergie incroyables vivent dans une poubelle. Cette empathie, cet amour pour eux m’a fait tenir car il y a eu des moments difficiles. Déjà, il n’est pas évident de diriger des enfants. Par ailleurs, ils appartiennent à une culture du repli. Tout ce qui vient de l’extérieur – le « gadjo » ou l’étranger – on s’en méfie, car cette communauté a beaucoup été traquée. On a très peu parlé, par exemple, de l’oppression subie par ce groupe pendant la Seconde Guerre mondiale. D’ailleurs, Tony Gatlif est en train de faire un film sur le sujet. Vous êtes-vous inspiré du vécu de vos comédiens pour écrire votre histoire ? Absolument. J’avais écrit un premier scénario sur le vif, en lien avec l’actualité, au moment des émeutes en banlieue. Mais quand je suis arrivé dans le camp, la réalité a dépassé la fiction. Je me suis demandé où j’étais. Une favela, à Rio de Janeiro ? J’ai jeté mon scénario à la poubelle et j’ai alors passé du temps avec les gamins. Par exemple, la première fois où j’ai vu Tony, le nain, il était torse nu avec un python autour du cou. Imaginez le choc visuel que ce fut ! Le lendemain, le python avait disparu et je lui ai demandé où il était. Tony l’avait brûlé car il refusait de manger des souris. Cette idée-là, aucun scénariste ne l’aurait amenée. Il y a beaucoup de choses que j’ai prises du réel.


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INTERVIEW

..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... KHAMSA ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... UN FILM DE KARIM DRIDI ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... AVEC MARCO CORTES, RAYMOND ADAM, ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... MAGALIE CONTRERAS... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... DISTRIBUTION : REZO FILMS // FRANCE, 2008, 1H48 ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... SORTIE LE 8 OCTOBRE ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... Khamsa s’inscrit loin des stéréotypes liés à la représentation des Gitans… Je n’avais pas envie de faire un film folklorique sur les Gitans ou les Roms. Il se trouve que c’est un film avec des mômes gitans mais qui aurait pu être L’Enfant sauvage, La Guerre des boutons ou Les 400 coups aujourd’hui. Il s’agit d’une vision du sous-prolétariat. Le film travaille avec ces gens-là. Mais Khamsa parle surtout d’un enfant de onze ans et demi qui n’a aucune porte de sortie dans la société. Il glisse dans la délinquance car tout autour de lui le conduit à cette extrémité. Malgré la misère, palpable dans chaque plan, vous aviez à cœur de réaliser un film solaire et sensuel. Pourquoi ?

Cette énergie propre à vos jeunes interprètes n’a-t-elle pas été difficile à canaliser ? En effet. Ils refusent qu’un adulte ait un ascendant sur eux, a fortiori un « gadjo » comme moi. Mais à partir du moment où on les considère, ils sont capables du meilleur. Nous avons travaillé en ateliers pendant des mois où ils improvisaient à partir de situations données. Ce travail a été réinvesti sur le plateau. Je les ai tenus en valorisant un potentiel d’acteur dont ils n’avaient pas conscience. Marco Cortes, le jeune acteur du film, est une véritable révélation. Aura-t-il l’opportunité, selon vous, de poursuivre une carrière cinématographique ? Marco Cortes est peut-être, pour moi, le plus grand acteur

« TOUT COMME LES ENFANTS, LA LUMIÈRE BOUGE SANS ARRÊT. SI ON LA FIGE, ON LA PERD. » Je savais que j’allais faire un film qui met en scène une réalité sociale très dure et je n’avais pas envie d’en rajouter. Il m’importait qu’on n’oublie pas que mes protagonistes sont des enfants qui, comme tous les gamins de leur âge, ont envie de jouer. Un enfant est lumineux et plein d’énergie. Il fallait garder cette lumière-là qui est aussi celle de Marseille, la plus belle ville au monde pour moi, la plus cinégénique également. Je lui rends hommage avec les moyens du cinéma, en la filmant en cinémascope. C’était un pari risqué pour mon chef opérateur que de travailler avec ce matériel mouvant. Tout comme les enfants, la lumière bouge sans arrêt. Si on la fige, on la perd.

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avec qui j’ai travaillé. C’est un diamant brut. S’il parvient à cette qualité d’interprétation, c’est parce qu’il a derrière lui tout ce que son personnage n’a pas : une structure familiale. Khamsa m’a été inspiré par l’histoire d’un jeune qui devait initialement jouer son propre rôle. Mais suite à des démêlés judiciaires, le juge pour enfants a ordonné qu’il ne fasse pas le film. Marco l’a remplacé. J’ignore s’il poursuivra sa carrière au cinéma, même s’il en a envie, car il a aussi la capacité d’être un footballeur professionnel. S’il me demande mon avis, je lui conseillerais la seconde option : ça gagne bien plus et pour les filles, c’est mieux. _Propos recueillis par Sandrine MARQUES

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AUGUSTIN LEGRAND ENFANTS TERRIBLES

Décembre 2006, canal Saint-Martin. La mobilisation des Enfants de Don Quichotte en faveur des SDF pousse les pouvoirs publics à voter la loi dite du « droit au logement opposable ». Deux ans plus tard, l’association sort un documentaire, Enfants de Don Quichotte (acte 1), qui témoigne des actions d’hier pour dénoncer la persistance de l’urgence aujourd’hui. Entretien avec leur porte-voix, Augustin Legrand.

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ourquoi la cause du mal-logement vous touchet-elle à ce point ? Ce qui est choquant aujourd’hui, à propos des SDF, c’est qu’il ne s’agit plus seulement de marginaux ou de grands exclus, ceux que l’on appelait les «clochards». Maintenant, il s’agit aussi d'handicapés, de travailleurs. 30 % des personnes qui dorment dehors ont un travail. Il y a 4 millions de mallogés en France. En dix ans, 40 000 places en hôpital psychiatrique ont été fermées, et autant de malades mentaux jetés dehors. Des gens meurent et on ne les voit pas, ou on les voit avec mêmes préjugés que nos parents : « Ce sont des pochtrons. » Les associations qui agissent pour les démunis sont liées à l’État ; si elles s’opposent aux politiques publiques, elles subissent un chantage relatif à leurs subventions. Nous avons prouvé qu’un petit groupe d’amis peut faire bouger les lignes, pousser l’État à débourser un milliard d’euros, provoquer une loi attendue depuis dix ans. Les associations ne pouvaient pas négocier. Nous l’avons fait pour elles, par nécessité. En France, pour que les dossiers bougent, il faut des syndicats, des manifs. Ce n’est pas normal.

Quand l’idée d’un film s’est-elle concrétisée, et pourquoi ? Quand j’ai eu cette idée un peu folle d’établir un camp où les bien-logés viendraient marquer leur soutien, j’étais très convaincu. Mais cela ne fonctionne pas si l’on est seul ; le collectif prévaut. La caméra, tenue par mon beau-frère, était nécessaire pour expliquer. Au cas où notre mobilisation échouait, il nous serait au moins resté un film, une trace. Ce qui est drôle, c’est que nos images du canal n’étaient plus d’actualité, une fois le camp levé. On avait 140 heures

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de rush, mais aussi des promesses très fortes de l'État. Et d’un coup, Sarkozy est élu, la majorité ne vote pas les amendements à la loi, les promesses ne sont pas mises en œuvre. C’est l’objectif du film : dire aux citoyens que ce combat leur appartient. Je ne suis pas le fils de l’abbé Pierre. Ce que j’ai fait, vous pouvez le faire. Le film est là pour revenir sur le devant de la scène, créer une caisse de résonance, travailler de manière transparente avec l’opinion publique. J’ai trouvé génial que des gens puissent me dire, peu après la mobilisation de décembre 2006 : « Qu’est-ce qu’on a pu s’engueuler à cause de toi, lors des repas de famille ! » Renan, Jean-Baptiste et vous êtes à la fois acteurs et réalisateurs du documentaire, à la manière d’un Michael Moore... J’espère que le film contribue à montrer notre éthique, qui l’on est vraiment. Mon image publique, qui a été déformée, peut se préciser à travers ce documentaire. Pour ma part, je pense que l’on fait de l’anti-Michael Moore. Sur ces sujetslà, il ne faut pas jouer l’anecdote, comme lui le fait. Moore met en scène un combat qui n’est pas politique, il n’a pas de réflexion aboutie. Contrairement à lui, nous ne nous sucrons pas sur le potentiel économique du film, nous n’hésitons pas à montrer ce qui nous portait préjudice, à présenter la fragilité de notre action. En matière de cinéma militant, mes modèles se situent davantage du côté des Britanniques, Peter Watkins ou Ken Loach. Dans le film, deux témoignages font brièvement allusion à l’abbé Pierre et à Coluche. Comment vous situez-vous par rapport à ces deux figures ?


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INTERVIEW

..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ENFANTS DE DON QUICHOTTE (ACTE 1) ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... UN FILM DE RONAN DÉNÉCÉ, AUGUSTIN LEGRAND ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ET JEAN-BAPTISTE LEGRAND ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... DOCUMENTAIRE ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... DISTRIBUTION : BODEGA FILMS // FRANCE, 2008, 1H15 ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... SORTIE LE 22 OCTOBRE ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... ..................................................................... Ma vision de Coluche et de l’abbé Pierre est celle de tout citoyen lambda ; ces mecs font l’unanimité. Le combat des Restos du cœur est freiné par certains de leurs donateurs, hostiles aux actions militantes. Quant à l’abbé, il a voulu se substituer aux manquements de l’État. Il est entré dans une démarche de charité face à un problème de misère très générale. De notre côté, nous dénonçons la contreproductivité du traitement des SDF par les pouvoirs publics, sans pour autant vouloir faire le boulot à leur place. Au sortir de la crise du canal, Jean-Louis Boorlo, malin, nous a proposé de gérer une poignée de centres d’hébergement ; nous avons refusé, pour ne pas nous voir privés de notre faculté de contestation. Nous n’avons pas vocation à gérer, mais à fédérer les différents acteurs du dossier pour le faire avancer.

Quel a été le rôle de Mathieu Kassovitz dans la production du film ? On a payé la monteuse. Il nous fallait de l’aide extérieure. Mathieu et Agnès B. ont rendu possible l’acte 1 dans sa version web, qui a été vu près de 600 000 fois sur DailyMotion. Face à ce succès, nous avons eu le projet d’un long métrage ciné, différent de la version online. L’idée est de reverser tous les bénéfices éventuels de la sortie en salles à l’association, de manière à financer l’acte 2 : mises à l’abri, baraquements, parrainages citoyens, tournée d’un bus en province, etc. La question du recours à des mécènes devient, pour nous, brûlante. Je ne connais pas grand monde, ce n’est pas mon métier les galas, la charité. Mais c’est indispensable.

« JE NE SUIS PAS LE FILS DE L’ABBÉ PIERRE. CE QUE J’AI FAIT, VOUS POUVEZ LE FAIRE. » Le film est sous-titré Acte 1. Cela sous-entend qu’il y en aura d’autres… L’acte 1 retrace non seulement le canal, mais aussi l’action auprès des parlementaires, des associations… Quant à l’acte 2, il est déjà en cours de tournage. Toi, en tant que journaliste, tu fais partie de l’acte 2 et j’espère qu’en tant que citoyen tu feras partie de l’acte 2 en en parlant chez toi à tes amis, ta famille. En d’autres termes, l’acte 1 est une rampe de lancement, de manière à ce l’acte 2 soit le plus beau, le plus spectaculaire possible.

Le film a été montré en mai dernier, à Cannes. Comment avez-vous vécu le festival ? J’ai eu le même sentiment que lorsque nous étions accueillis dans les ors de la République, puants et dégueux après voir passé la nuit aux côtés des SDF. Le boulot à Cannes est un boulot chiant mais nécessaire. Il faut s'exprimer pour que le film soit compris. Il peut y avoir des écueils par rapport à l’opinion publique, qui se dit : « Mais qu’est ce qu’il fout làbas, ce con ! » Il faut rester hyper « aware », comme dirait Van Damme, car on représente quelque chose qui peut très vite être déformé par les médias. C’est une guerre. _Propos recueillis par Auréliano TONET et Étienne ROUILLON

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LA VIE MODERNE

LONGUE VIE Complétant une trilogie entamée en 2001, La Vie moderne dresse le portrait intime d’un groupe peu représenté : les paysans de moyenne montagne. Dialogue avec son auteur, l’immense Raymond Depardon. u mitan de La Vie Moderne, une scène frappe par sa puissance émotive. Face à la caméra de Raymond Depardon, un homme se tient, immobile, silencieux. De l’aveu même du réalisateur, ses traits évoquent ceux d’un chef Sioux, sa cinégénie celle d’un Jack Palance. Vêtements simples, décor de peu de choses, l’homme regarde un reportage sur la mort de l’Abbé Pierre. À ces images télévisées, babillardes et impersonnelles, s’opposent alors, dans notre esprit, celles du documentaire de Depardon, qui n’est qu’intimité, chaleur, langues lentement déliées. «Cet homme est le vieux garçon que j’aurais pu devenir si je n’avais quitté, à 16 ans, la ferme familiale», nous dit Depardon, aussi bonhomme et hospitalier, mais bien plus bavard, que les paysans auxquels il rend visite dans La Vie moderne. Une relation au long cours, commencée il y a plus de dix ans : « Filmer ces gens, c’est une manière de réaliser le documentaire que je n’ai pu faire sur mes parents. En un sens, il m’a fallu faire le tour du monde pour ne plus avoir honte de renouer avec mes origines paysannes. » La Vie moderne complète deux longs métrages de l’ex-reporter globe-trotteur : Profils paysans : l’approche (2001) et Profils paysans : le quotidien (2005). À sa manière humble, la trilogie enregistre les divers bouleversements opérés, loin du brouhaha urbain, dans ces fermes amies : décès, départs à la retraite, transmissions entre générations, renoncements, etc. Pour autant, La Vie moderne n’est pas un film de sociologue, mais de photographe : « L’influence des photographes américains, plus frontaux que les Français, m’a été précieuse. À leur contact, j’ai appris à faire l’équilibre entre le miroir et la fenêtre, c’est-à-dire entre l’empathie et le voyeurisme. » À partir du 21 novembre, la Fondation Cartier accueillera une installation vidéo de Raymond Depardon sur le thème de la « terre natale », appréhendée selon une perspective non plus intime, mais mondiale. Creuser le même sillon, en variant les angles d’approche : ce pourrait n’être qu’un legs paysan, cela ressemble à un art poétique. _A.T.

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............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ 3 RAISONS D’ALLER VOIR LE FILM ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour son regard intime sur le monde paysan, ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ loin des clichés nostalgiques ou misérabilistes. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour ses emprunts à différents genres ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ photographiques (portrait, paysage, album de famille). ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour son usage d’une nouvelle caméra, la Pénélope, ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ permettant d’installer les plans dans leur durée. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ UN FILM DE RAYMOND DEPARDON ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DOCUMENTAIRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : AD VITAM // FRANCE, 2007, 1H30 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIE LE 29 OCTOBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................



DERNIER MAQUIS

PEINDRE LE MAQUIS Dernier Maquis prolonge avec générosité le geste d’un artiste-réalisateur. À la manière d’un peintre, Rabah Ameur-Zaïmeche compose le tableau chaleureux d’un prolétariat qui a enfin droit de représentation, comme l’islam, religion rendue à sa réalité humaniste. Rencontre.

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ao, un patron d’entreprise prosélyte, exhorte ses salariés à se convertir à l’islam. Il ouvre une mosquée et désigne d’autorité l’imam. La révolte gronde parmi les ouvriers exclus de la concertation, que complique davantage leur situation économique précaire. Ils se mettent en grève. Mao est interprété par le cinéaste, qui jouit d’une position privilégiée au sein du dispositif : « Le fait d’être le metteur en scène et le chef du plateau, au centre des rapports de production d’une petite entreprise de réparation de palettes, m’a facilité la tâche et permis d’interpréter plus facilement le rôle d’un patron si complexe. Ce qui le caractérise, c’est son humanité. Son regard devient rapidement celui du spectateur.» Ce même spectateur trouve sa position au sein du tableau sensuel que compose le réalisateur : «Dans Dernier Maquis, la caméra a été utilisée comme un pinceau usant de couleurs primitives, quand dans Bled Number One, mon précédent film, elle était un instrument de musique. » De ce jeu d’écho entre la palette du peintre et celles qui servent à transporter des marchandises, Rabah AmeurZaïmeche tire un film où le décor rudimentaire – une zone industrielle délabrée – s’enrichit d’une dimension symbolique : « Le mur de palettes est percé de trous, la lumière déborde de partout, pour signifier que par-dessus les conflits et les oppositions, il y aura toujours une possibilité pour chacun d’entre nous de se réunir, de se comprendre.» Autre enclave – peut-être le «dernier maquis» du titre : le prolétariat « exclu du processus démocratique » qu’est soucieux de représenter l’auteur. À sa manière douce, le film lutte encore contre la stigmatisation de l’islam, « une religion sécularisée par ce prolétariat français, souvent laissé de côté, méprisé, isolé, exclu.» Rabah Ameur-Zaïmeche réussit son pari audacieux par la grâce d’une dérision burlesque qui traverse avec discrétion tout son film. _S.M.

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............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ 3 RAISONS D’ALLER VOIR LE FILM ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour le formidable Christian Milia-Darmezin, ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ acteur fétiche du réalisateur que l'on retrouve ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ici dans le rôle du touchant Titi. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour la texture sensuelle des images. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour l'originalité d'un film qui ancre l'islam ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ dans le monde du travail. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ UN FILM DE RABAH AMEUR-ZAÏMECHE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ AVEC RABAH AMEUR-ZAÏMECHE, ABEL JAFRI, CHRISTIAN MILIA-DARMEZIN... ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : SOPHIE DULAC // FRANCE, 2008, 1H33 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIE LE 22 OCTOBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

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MESRINE

L’ENNEMI, INTIME Porter à l’écran l’épopée hors-la-loi de Jacques Mesrine n’était pas une mince affaire. Moins chanson de geste que biopic à hauteur d’homme, le diptyque L’Instinct de mort / L’Ennemi public n°1 comble les attentes. Il les déjoue, aussi. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ 3 RAISONS D’ALLER VOIR LE FILM ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour l’élégance mesurée de la mise en scène ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ de Jean-François Richet. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour la performance de Vincent Cassel, ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ littéralement happé par le personnage. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour le casting prestigieux, qui se coule ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ parfaitement dans le récit. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ MESRINE : L’INSTINCT DE MORT / L’ENNEMI PUBLIC N°1 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DEUX FILMS DE JEAN-FRANÇOIS RICHET ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ AVEC VINCENT CASSEL, LUDIVINE SAGNIER, CÉCILE DE FRANCE... ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : PATHÉ // FRANCE, 2007, 1H53 ET 2H10 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIES LE 22 OCTOBRE ET LE 19 NOVEMBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

V

oir pétarader la bande-annonce de L’Instinct de mort à l’entracte des récents concerts de NTM à Bercy pouvait conforter un malentendu persistant à propos du projet Mesrine. Ce malentendu, la vision des deux films aura tôt fait de le dissiper : JeanFrançois Richet n’a pas refait Scarface. Il n’est même pas dit qu’il a fait un film de gangster. Le premier volet, qui suit Mesrine du retour d’Algérie jusqu’au début des années 1970, commence par là où ça va finir : la mort de l’ennemi public, porte de Clignancourt. Le ton est donné, tragique. Juste avant ça, le générique règle la question du regard adopté par le film. Mesrine marche (vers la mort, mais il ne le sait pas), le cadre le suit puis se scinde. Splitscreen, comme on dit. Mesrine toujours, mais deux fois. Un seul Mesrine, plusieurs points de vue : ce postulat, Richet s’y tiendra jusqu’au bout, sans pourtant jamais quitter son personnage. Mesrine si loin, si proche, que l’on accompagne dans le déroulé de ses péripéties (l’apprentissage au sein du Milieu, les femmes, les coups d’éclat en solo, la parenthèse canadienne, l’évasion de la Santé), réglé comme du papier à musique, suivant une pente qui se garde toujours d’être édifiante. De l’entame de L’Instinct de mort à la fin de L’Ennemi public n°1, on boucle une boucle – de la mort de Mesrine à la mort de Mesrine –, et c’est un portrait sobre et diffracté qui se dessine, malgré la dimension spectaculaire et souvent jubilatoire du film. À la face (celle de l’ennemi public, archivée en portraitrobot ou sur les coupures de presse), Richet a préféré les facettes : avoir pris les habits du genre (le film a ses braquages et évasions spectaculaires, parfaitement maîtrisés) pour se resserrer sur une sorte d’étude de caractère a minima, voilà qui fait tout le prix du diptyque Mesrine. _J.M.

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VICKY CRISTINA BARCELONA

CRÈME CATALANE Entre visite touristique et tourments amoureux, Vicky Cristina Barcelona, le Woody Allen latino, est précédé d’un buzz « olé-olé ». Délibératif et déambulatoire, le film redessine la géographie allenienne, plus sensuelle que jamais.

S

oit deux étudiantes américaines, lippues et galbées, en villégiature estivale à Barcelone. Interprétées par Rebecca Hall, nouvelle venue, et Scarlett Johansson, baby-doll itinérante du cinéma de Woody Allen, les deux jeunes filles tombent dans les filets de Juan Antonio (Javier Bardem), peintre abstrait aux ambitions concrètes et au sang chaud. Sans plus attendre, le séducteur ibère leur propose un kidnapping consenti : une excursion culturelle dans une ville voisine, doublée d’un ménage à trois. À ce nœud amoureux muy caliente vient se greffer Maria Elena, ex-femme volcanique qui tenta jadis de poignarder son peintre de mari (elle avait, parait-il, de bonnes raisons). Penelope Cruz, drôlissime, rend ici hommage à la drama-queen espagnole hystérique et échevelée, façon Movida. En attendant de retrouver New York, Woody Allen, invité par des producteurs espagnols, célèbre ici l'Europe et ses délices, et l’abandon des corps à son hospitalité légendaire. Ce détour folklo par la Catalogne prolonge la veine vénitienne de Tout le monde dit I Love You, ses gondoliers joviaux et ses stars hollywoodiennes en crise métaphysique. De Gaudi à Mirò, le cinéaste américain compose le tableau d’une ville et de sa communauté bohème, restituant au passage l’euphorie qui succède au dépaysement géographique et sentimental. Non loin des meilleurs badinages rohmeriens, à cheval entre passion et raison, le réalisateur de Manhattan confirme son goût pour la circulation des partenaires et les amants dans les placards. Cette balade se lit comme une invitation à explorer le caractère expérimental des rapports amoureux et leurs combinaisons variées, ici sous la forme d’un triangle qui se forme et se défait successivement – pas toujours harmonieusement. Avec, à mi-chemin, ce qui restera certainement comme le baiser de l’année. _Clémentine GALLOT

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............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ 3 RAISONS D’ALLER VOIR LE FILM ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour un changement d’air régénérant après ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ la trilogie britannique du réalisateur. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour un 39ème film empreint d’une duplicité ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ toute allenienne. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ Pour l’alchimie communicative des acteurs ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ de cette fable sensuelle et enlevée. ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ UN FILM DE WOODY ALLEN ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ AVEC JAVIER BARDEM, SCARLETT JOHANSSON, REBECCA HALL, PÉNÉLOPE CRUZ... ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : WARNER BROS. FRANCE // ÉTATS-UNIS, ESPAGNE, 2007, 1H37 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIE LE 8 OCTOBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................



FLY ME TO THE MOON MOUCHE BÉE Loin des transpositions, parfois hasardeuses, de films 2D en 3D, l’odyssée lunaire Fly Me to the Moon prouve qu’un film peut être exclusivement pensé en 3D, depuis l’élaboration du scénario jusqu’à sa distribution en salle. Bon voyage ! andidats clandestins à un alunissage à bord de la mission Apollo 11, trois jeunes insectes doivent faire face aux dangers inhérents au vol spatial sans s’y brûler les ailes. Si le ressort dramatique fait davantage mouche auprès des 3-10 ans, l’aventure filmique emporte, elle, un public beaucoup plus vaste. Car c’est de l’autre côté de l’écran que la péripétie prend tout son sens épique. Fly Me to the Moon fait partie du club très fermé des films mettant la technique de la projection en relief au service de la narration (La Légende de Beowulf sorti en 2007 en est un autre exemple). C’est la fin du relief de parc d’attraction et de l’effet « tends donc ta main pour attraper la balle », insoutenable pour votre cornée au-delà de 15 minutes de projection. Le réalisateur Ben Stassen a l’intelligence de raconter avant de filmer pour l’épate : moins de spectacle, plus de cinéma. Le grand-père du héros, Nat, est un pionnier de l’aéronautique

C

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quand Stassen est un précurseur de l’immersion subjective à l’écran. À plusieurs reprises, le spectateur voit par les mirettes panoramiques des mouches, et bien qu’il soit difficile de s’identifier à des moucherons qui parlent, une émotion certaine vous saisit au moment de l’alunissage. Embarqués dans le casque de Neil Armstrong, ce sont surtout les plus grands qui frissonnent de nostalgie en voyant leur propre pied se poser sur le satellite. Historique. Le bond en avant technologique de la projection en relief « est une révolution pour le cinéma aussi importante que le passage du noir et blanc à la couleur, ou du son mono à la stéréo », affirment Julien Dupuy et Rafik Djoumi, tous deux critiques et spécialistes des techniques du cinéma. «Mais le plus important avec des films exclusivement conçus pour le relief, c’est que vous pouvez en dire beaucoup plus, grâce à la lisibilité gagnée en terme de profondeur de champ.» Cela est également vrai (dans une moindre mesure) avec


............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ UN FILM EN 3D RELIEF DE BEN STASSEN ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ AVEC LES VOIX DE TREVOR GAGNON, PHILIP DANIEL BOLDE… ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ DISTRIBUTION : MK2 DIFFUSION // BELGIQUE, ÉTATS-UNIS, 2007, 1H25 ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................ SORTIE LE 29 OCTOBRE ............................................................................................................ ............................................................................................................ ............................................................................................................

l’adaptation de titres 2D en 3D comme L’Étrange Noël de M. Jack ou Voyage au centre de la terre. La quantité d’informations lisibles par le spectateur est multipliée par la clarté des oppositions entre le premier et de multiples arrière-plans. Pendant que le protagoniste monologue sous votre nez, son acolyte en arrière plan s’envoie un gâteau en douce, alors qu’au fond de la scène le méchant est prêt à lui sauter dessus. Le tout vu en un plan fixe. Le vertige du cinéma en stéréoscopie, technique inventée en 1839, est désormais accessible à tous : plus besoin d’aller à Marne-la-Vallée ou Poitiers. Les évolutions des systèmes de projection et la plus grande qualité des lunettes poussent MK2 à s’équiper en conséquence. Pour la sortie de Fly Me to the Moon, l’exploitant, qui distribue le film, adapte six de ses salles à la projection numérique et à la projection 3D (deux au Bibliothèque, deux à l’Odéon et deux au Quai de Loire). «C’est la première fois que le spectateur expérimente,

dans une salle de cinéma, la sensation de l’image qui sort de son cadre. Cependant, la réflexion sur le développement du numérique est beaucoup plus globale, à toutes les échelles de la diffusion du film, depuis le tournage en stéréoscopie numérique à la projection en salles », admet Bertrand Roger, Directeur de l’Exploitation et de la Programmation chez MK2. Fly Me to the Moon inscrit le cinéma dans cet horizon global, et c’est une première. « De plus en plus de distributeurs éditent des copies numériques de leurs films, poursuit-il. Si le mouvement continue, il est clair qu’à terme toutes les cabines seront équipées en numérique. Mais cela nécessite l’implication de tous les métiers de la chaîne cinématographique. » Un petit pas pour l’industrie, un grand pas pour le cinéma. _Stéphane PETIRUISSO

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LIKA MINAMOTO, FEMME FATALE PHOTOGRAPHE : SONIA SIEFF // ASSISTÉE DE : VIVIAN DAVAL // OPÉRATEUR NUMÉRIQUE : RÉGIS POUR LE PETIT OISEAU VA SORTIR // STYLISTE : STÉPHANIE VAILLANT // HAIR & MAKE-UP : ISABELLE THÉVIOT // RETOUCHEUR : PHILIPPE BASIC // VETEMENTS : PAULE KA

IL Y A DEUX MOIS, ON LA DÉCOUVRAIT EN GEISHA TROUBLANTE ET MANIPULATRICE DANS INJU DE BARBET SCHROEDER. POUR TROISCOULEURS , L’ACTRICE JAPONAISE LIKA MINAMOTO A RENOUÉ, LE TEMPS D’UNE SÉANCE PHOTO SECRÈTE ET GLAMOUR PLACE DE LA CONCORDE, AVEC SON PASSÉ DE MANNEQUIN. LA NUIT LUI VA TRÈS BIEN, DE MÊME, VISIBLEMENT, QUE LES VÊTEMENTS PAULE KA QU’ELLE PORTAIT CE SOIR-LÀ…


Manteau en plastique transparent et laine beige : 950 euros Cabas Ka en cuir noir : 450 euros Sandales compensĂŠes, semelle rĂŠsine : vintage


Gants en résille chair, velours noir : 160 euros Combinaison pantalon en résille chair, velours noir : 680 euros Sandales compensées, semelle résine : vintage


Chemise en soie chair, cape : 470 euros Pantalon en drap de laine gris : 350 euros Escarpins lanières daim noir : 350 euros


Manteau en léopard et laine anthracite : 7000 euros Jupe en maille violette et laine anthracite : 480 euros Escarpins lanières cuir chair, talons cuir vernis violet : 450 euros Sac cabas Ka replié en cuir chair : 550 euros




LE GUIDE

DES SALLES

DU MERCREDI 8 OCTOBRE AU MARDI 11 NOVEMBRE

Tonnerre sous les tropiques - Un film de Ben Stiller

SOMMAIRE SORTIES DU 8 OCTOBRE 40_Un Monde sans eau ? d’Udo Maurer // Blindness de Fernando Mereilles // La Frontière de l’aube de Philippe Garrel SORTIES DU 15 OCTOBRE 40_La Fièvre de l’or d’Olivier Weber 42_Coluche, l’histoire d’un mec d’Antoine de Caunes // Tokyo ! de Michel Gondry, Leos Carax, Joo-ho Bong // Tonnerre sous les tropiques de Ben Stiller // Le Crime est notre affaire de Pascal Thomas SORTIES DU 29 OCTOBRE 44_The Visitor de Thomas McCarthy // Home d’Ursula Meier // Hellboy II, Les Légions d’or maudites de Guillermo Del Toro // W. – L’Improbable Président d’Oliver Stone 46_Riparo de Marco Simon Puccioni // Cowboy Angels de Kim Massee SORTIE DU 31 OCTOBRE 46_Quantum of Solace de Marc Forster SORTIES DU 5 NOVEMBRE 46_Quatre Nuits avec Anna de Jerzy Skolimowski 48_ Mensonges d’État de Ridley Scott // Les Bureaux de Dieu de Claire Simon // My Magic d’Eric Khoo // La Très Très Grande Entreprise de Pierre Jolivet LES ÉVÉNEMENTS MK2 _50 > 51 39 I TROIS COULEURS_WWW.MK2.COM_OCTOBRE 08


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UN MONDE SANS EAU ?

BLINDNESS

Un film d’Udo MAURER Documentaire Distribution : ASC Distribution // Autriche, Luxembourg, 2007, 1h23 // Sortie le 8/10

Un film de Fernando MEREILLES Avec Julianne Moore, Mark Ruffalo, Gael Garcia Bernal… Distribution : Pathé // Japon, Brésil, Canada, 2008, 1h58 // Sortie le 8/10

De par le monde, les hommes ne sont pas égaux devant l’eau, source de vie, mais aussi de soucis. En trois parties distinctes, l’autrichien Udo Maurer dresse un portrait terrifiant de l’état des choses. Au Bengladesh, les inondations sont perpétuelles et les barques se fraient un chemin entre les maisons englouties. Au Kazakhstan, les grands bateaux rouillés, échoués dans l’herbe brûlée, donnent aux paysages des allures surréalistes. Au Kenya, les bidons d’eau potable sont transportés d’un bout à l’autre des bidonvilles comme des trésors. Sans commentaire superflu, le réalisateur est à bonne distance, faisant confiance à la force brute de ses images.

Une étrange épidémie de cécité se répand ; seule une femme est épargnée, qui va guider les aveugles dans un monde sans repères. Tâche ardue que d’adapter le roman L’Aveuglement du prix Nobel de littérature portugais José Saramago. Néanmoins, depuis sa présentation au dernier festival de Cannes, le film a bénéficié d’un nouveau montage. En la débarrassant de sa voix-off redondante, le réalisateur de La Cité de Dieu réalise une fable humaniste et honnête. Livrés à eux-mêmes, les malades placés en quarantaine éprouvent les limites de l’autogestion. C’est dans sa réflexion sur les mécanismes violents qui conduisent à une dictature que le film gagne ainsi à être vu. _S.M.

_Isabelle DANEL

Retrouvez l’interview filmée de Fernando Mereilles sur www.mk2.com.

LA FRONTIÈRE DE L’AUBE

LA FIÈVRE DE L'OR

Un film de Philippe GARREL Avec Louis Garrel, Laura Smet, Clémentine Poidatz… Distribution : Les films du Losange // France, Italie, 2007, 1h45 // Sortie le 8/10

Un film d’Olivier WEBER Documentaire Distribution : Zootrope Films // France, 2008, 1h38 // Sortie le 15/10

Chez Philippe Garrel, l’amour a la fulgurance tragique de la passion. Venu réaliser un reportage sur une actrice, mariée à un acteur qui la néglige, un jeune photographe entame avec elle une liaison clandestine. Mais la star reproche à son amant de ne pas l’aimer avec la même intensité qu’elle. Elle sombre dans la dépression et met fin à ses jours. Un an plus tard, le photographe s’apprête, avec sa nouvelle compagne, à être père. Le surnaturel fait irruption dans un récit où les héros fiévreux ressemblent à des astres incandescents, consumés de l’intérieur par leurs sentiments. Une ode à l’amour fou où Laura Smet expose toute sa vulnérabilité.

Nouvel eldorado des chercheurs d'or, l'Amazonie devient le théâtre d'un western des plus sordides, où semblent se cumuler tous les vices de la mondialisation : trafics, déforestation, pollution, prostitution, cupidité... Le documentaire d'Olivier Weber, grand reporter télé qui passe pour la première fois au format ciné, s'attache à montrer les rouages de ce commerce scandaleux : comment, notamment, il désarticule l'ensemble d'un écosystème, non seulement naturel mais aussi humain, avec la disparition progressive des indigènes, victimes de maladies liées au mercure nécessaire à l'extraction. Le paradis d'Éden contre quelques paillettes…

_S.M.

_Jacky GOLDBERG

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COLUCHE, L’HISTOIRE D’UN MEC

TOKYO !

Un film d’Antoine DE CAUNES Avec François-Xavier Demaison, Léa Drucker, Olivier Gourmet… Distribution : Mars // France, 2008, 1h43 // Sortie le 15/10

Un film de Michel GONDRY, Leos CARAX, Joon-ho BONG Avec Ayako Fujitani, Ryo Kase, Ayumi Ito… Distribution : Haut et Court // Allemagne, Corée du Sud..., 2007, 1h45 // Sortie le 15/10

Coluche, l’histoire d’un mec refuse le biopic classique pour se concentrer sur un moment-clé de la vie de l’humoriste culte : sa candidature à la campagne présidentielle de 1981. Période où il se retrouve face à ses démons et ses responsabilités d’artiste engagé, au risque d’en perdre le sens de l’humour. Un comique en cachant un autre, c’est ici François-Xavier Demaison qui enfile la salopette bleue dans une performance mimétique bluffante, comme les acteurs américains savent le faire. Si la mise en scène reste un peu sage, le portrait de cet artiste hautement contradictoire s’avère plutôt attachant, et de meilleure facture que les précédentes réalisations d’Antoine de Caunes.

Michel Gondry, Leos Carax et Joon-ho Bong n'ont pas grand chose en commun, si ce n'est d'avoir chacun réalisé un segment du film à sketch autour de la mégalopole nippone, Tokyo. Si l'ensemble fait preuve d'une belle cohérence, pointant avec humour la difficulté à trouver sa place dans la ville japonaise, c'est sans doute Carax, absent des écrans depuis 1999, qui frappe le plus fort avec son manifeste anarchiste intitulé Merde et son acteur fétiche Denis Lavant. Gondry réalise, dans son style habituel, un joli conte surréaliste, laissant le Coréen Joon-ho Bong terminer le triptyque par l'histoire d'un « hikikomori » (ermite urbain) obligé de sortir de chez lui.

_Léo SOESANTO

_J.G.

TONNERRE SOUS LES TROPIQUES

LE CRIME EST NOTRE AFFAIRE

Un film de Ben STILLER Avec Ben Stiller, Robert Downey Jr., Jack Black, Tom Cruise… Distribution : Paramount // Etats-Unis, 2008, 1h48 // Sortie le 15/10

Un film de Pascal THOMAS Avec André Dussollier, Catherine Frot, Claude Rich… Distribution : StudioCanal // France, 2008, 1h49 // Sortie le 15/10

Au fil de sa déjà riche carrière, Ben Stiller s’est spécialisé dans un type d’humour essentiellement facial, basculant sans cesse entre l’inexpressivité la plus creuse et la conviction la plus crédule. Cette dialectique fonctionne à merveille dans Tonnerre sous les tropiques, qu’il réalise et produit. Parodie hilarante de Apocalypse Now, mais aussi des blockbusters hollywoodiens lambdas, le film dynamite toute forme de politiquement correct : gros, nains, Noirs, Vietnamiens, handicapés, enfants et autres minorités en prennent tous pour leur grade. Robert Downey Jr., qui se glisse littéralement dans la peau de son personnage de soldat noir, est tout simplement grandiose. _A.T.

Agatha Christie semble porter chance à Pascal Thomas, puisque Le Crime est notre affaire est sa troisième adaptation de la reine-mère du roman policier british. Mettant en scène le couple d’enquêteurs déjà vus dans Mon Petit Doigt m’a dit (Bélisaire et Prudence Beresford, « Hercule Poirot en deux personnes » selon le cinéaste), Thomas signe un film agréablement désuet et cosy, où le plaisir est on ne peut plus communicatif. Tout le monde s’y amuse, en premier lieu le couple André Dussollier / Catherine Frot, qui fait souffler un vent frais de burlesque dans le placard a priori naphtaliné du genre, entre château, tapisseries et kilts – portés avec aisance par Dussollier. _L.S.

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THE VISITOR

HOME

Un film de Thomas McCARTHY Avec Richard Jenkins, Hiam Abbas, Haaz Sleiman… Distribution : TFM // États-Unis, 2007, 1h45 // Sortie le 29/10

Un film d’Ursula MEIER Avec Isabelle Huppert, Olivier Gourmet, Adélaïde Leroux… Distribution : Diaphana // France, Suisse, 2008, 1h37 // Sortie le 29/10

Un professeur solitaire s’aperçoit que son appartement new-yorkais est squatté par un couple de sans-papiers. D’abord décidé à les chasser, il accepte de les héberger et découvre un monde inconnu et attrayant, ainsi que l’injustice immanente et révoltante. Après The Station Agent, première œuvre originale, qui rapprochait déjà des êtres que tout opposait, McCarthy livre un film plus convenu dans sa forme, mais très louable sur le fond : on ne répétera jamais assez la nécessité de s’ouvrir aux autres. Grand Prix du Jury au dernier festival de Deauville, The Visitor parle avec cœur de renaissance et d’engagement, d’amitié et d’amour.

Une maison au bord d’une autoroute dont la construction a été abandonnée. Un couple et leurs trois enfants vivent là, dans le calme et l’harmonie, jusqu’au jour où la radio annonce la reprise des travaux et le déferlement des voitures... Ce film inclassable est un ovni dans la production actuelle, frôlant sans cesse le fantastique, filant la métaphore de nos modes de vie urbains, du besoin viscéral qu’il y a de trouver un coin à soi, de l’impossibilité de se croire seul en ce monde. Servie par des comédiens formidables, cette fable sombre aux couleurs vives est tour à tour drôle, effrayante, singulière. Passionnante.

_I.D.

_I.D.

HELLBOY II, LES LÉGIONS D’OR MAUDITES

W. - L’IMPROBABLE PRÉSIDENT

Un film de Guillermo DEL TORO Avec Ron Perlman, Selma Blair, Doug Jones… Distribution : Universal Pictures // États-Unis, 2008, 2h // Sortie le 29/10

Un film d’Oliver STONE Avec Josh Brolin, Elizabeth Banks, James Cromwell… Distribution : Metropolitan // États-Unis, Chine, 2008 // Sortie le 29/10

Le héros tout rouge et cornu est de retour dans un nouveau volet de la saga Hellboy, plein d’humour. Face à l’inconséquence des humains, un prince décide de lever une armée du monde souterrain qu’une trêve signée dans des temps immémoriaux avait neutralisée. Face à l’imminence du chaos, Hellboy et ses compagnons du Bureau de Recherche et de Défense Paranormal réagissent. Mais, mihomme, mi-créature, Hellboy doit faire un choix. Sans compter que sa brûlante petite amie ne lui laisse guère de répit... Guillermo Del Toro réussit à mener de front spectacle et considérations intimes, par où son héros désinvolte entre dans l’âge adulte.

Cet automne, il plane aux États-Unis une ambiance fin de règne propice à la veine satirique. Au crépuscule des années Bush, Hollywood sonne le glas. Les élections présidentielles voient éclore une flopée de films politiques : An American Carol de David Zucker, Frost/Nixon de Ron Howard et W., le biopic d’Oliver Stone. Josh Brolin, le cow-boy malchanceux de No Country for Old Men, y endosse le costume présidentiel. Le cinéaste fort en gueule, rompu à l’examen efficace et minutieux des rouages politiques (JFK, Nixon, World Trade Center), fait de la trajectoire de George W. une farce. De fait, outre-Atlantique, le film est attendu comme LA comédie de la fin de l’année.

_S.M.

_C.G. NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution.

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RIPARO

COWBOY ANGELS

Un film de Marco Simon PUCCIONI Avec Maria de Medeiros, Antonia Liskova, Mounir Ouadi… Distribution : Épicentre Films // France, Italie, 2007, 1h38 // Sortie le 29/10

Un film de Kim MASSEE Avec Thierry Levaret, Diego Mestanza, Noëlie Giraud... Distribution : Artworx Films // France, 2007, 1h40 // Sortie le 29/10

Par un concours de circonstances, deux Italiennes sont amenées à héberger et aider un jeune immigré clandestin marocain. La relation forte qui naît entre le couple – Anna et Mara sont lesbiennes – et leur protégé révèle peu à peu les failles de leur équilibre précaire. Riparo parvient ainsi, avec une finesse exemplaire, à lier problématiques sexuelles et politiques, homosexualité, immigration et rapport de classe. Grâce à une mise en scène sobre à défaut d’être ample, toujours proche de ses personnages, le réalisateur Marco Simon Puccioni évite soigneusement les clichés. Riparo est son premier long métrage distribué en France.

Après avoir collaboré avec des auteurs comme Jim Jarmusch ou Wim Wenders, la réalisatrice d’origine américaine Kim Massee signe un road-movie délicat. « Un écho entre deux solitudes » : ainsi pourrait-on définir Cowboy Angels. Le film narre la rencontre entre Pablo, un gosse négligé par sa mère, et un joueur de poker à la dérive qui le prend sous son aile. Ils s’embarquent dans un voyage en Espagne, à la recherche du père biologique de Pablo, qu’interprète l’attachant Diego Mestanza, le fils de la réalisatrice. Kim Massee filme les routes de France comme l’Ouest américain. Une approche stylisée qui fait toute l’originalité de sa démarche. _S.M.

_J.G.

QUANTUM OF SOLACE

QUATRE NUITS AVEC ANNA

Un film de Marc FORSTER Avec Daniel Craig, Mathieu Amalric, Olga Kurylenko… Distribution : Sony Pictures // États-Unis, Grande-Bretagne, 2008, 1h46 // Sortie le 31/10

Un film de Jerzy SKOLIMOWSKI Avec Artur Steranko, Kinga Preis… Distribution : Les Films du Losange // Pologne, France, 2008, 1h27 // Sortie le 5/11

James Bond est de retour, plus sexy et redoutable que jamais. Dans le sillage du sombre Casino Royale (Quantum of Solace débute une heure après la fin du précédent opus), l’agent 007 cherche à venger la mort de Vesper, sa bien-aimée, morte noyée. Il se trouve confronté à un riche homme d’affaires, qui cherche à s’accaparer les ressources naturelles du globe. Ce dernier est campé par Mathieu Amalric, proche de son inquiétant personnage dans Munich, où il partageait déjà l’affiche avec Daniel Craig. Quantum of Solace s’annonce comme un film porté sur l’action brute qui ambitionne de renvoyer ses concurrents, Jason Bourne et autres xXx, aux oubliettes.

C’est le film d’un retour, celui du grand Skolimowski, qui avait délaissé le cinéma pour la peinture. Et ce qui frappe d’abord dans ce seizième film du réalisateur polonais (Deep End, Travail au noir), ce sont les cadres, serrés, et les couleurs, automnales. Une silhouette accroupie dans la pénombre près d’un lit éclairé par la peau laiteuse d’une dormeuse. Un simple d’esprit se glisse la nuit dans la chambre d’une voisine. Pour lui faire mal ? Abuser d’elle, comme il l’a vu faire par un autre ? S’il la caresse, c’est du regard... Entre sommeil et veille, fable et tragédie, Quatre nuits avec Anna conte l’impossible union de deux éclopés de la vie.

_M.F. NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution.

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_I.D.



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MENSONGES D’ÉTAT

LES BUREAUX DE DIEU

Un film de Ridley SCOTT Avec Leonardo DiCaprio, Russell Crowe, Carice Van Houten… Distribution : Warner Bros. France // États-Unis, 2008 // Sortie le 5 novembre

Un film de Claire SIMON Avec Nathalie Baye, Nicole Garcia, Béatrice Dalle, Rachida Brakni… Distribution : Shellac // France, 2007, 2h02 // Sortie le 5 novembre

Le champ de vision du cinéma américain s’étant déplacé du homeland au Moyen-Orient pour les raisons que l’on sait (toutefois sans garantie de résultat au box-office), Mensonges d’État, thriller d’espionnage de Ridley Scott, n’y fait pas exception. Cette adaptation promet un DiCaprio en agent de la CIA lancé à la poursuite d’un terroriste en Jordanie, assorti d’un Russell Crowe empâté et manipulateur tirant les ficelles depuis Washington. Le père des épiques Alien, Blade Runner et Gladiator trempe ici dans l’hommage aux films politiques façon seventies, sans trop se mouiller tout de même, car selon lui «personne n’a jamais complètement tort ou raison». On est prévenu.

Dans les bureaux d’un planning familial, des femmes écoutent d’autres femmes. Les premières sont des actrices professionnelles, les secondes des débutantes, revivant plus ou moins leur expérience personnelle. Partant d’une matière documentaire récoltée au fil du temps à Grenoble, puis Marseille, Claire Simon, réalisatrice de fictions (Sinon, oui) et de documentaires (Coûte que coûte), mélange le vrai et le faux, le vécu et le joué, au cours de plans-séquences virtuoses. Tout ce qui se dit ici, des connaissances et méconnaissances de jeunes filles ou femmes mûres en matière de sexe et de contraception, prouve qu’il y a encore fort à faire, hélas, en la matière.

_C.G.

_I.D.

NB : Nous n’avons pas pu voir ce film dans nos délais de parution.

MY MAGIC

LA TRÈS TRÈS GRANDE ENTREPRISE

Un film d’Eric KHOO Avec Francis Bosco, Jatishweran, Seet Keng Yew… Distribution : ARP Sélection // Singapour, 2008, 1h17 // Sortie le 5 novembre

Un film de Pierre JOLIVET Avec Roschdy Zem, Jean-Paul Rouve, Marie Gillain, Adrien Jolivet… Distribution : Pathé // France, 2008, 1h42 // Sortie le 5 novembre

Désespéré et alcoolique depuis que sa femme l’a laissé seul avec leur fils de onze ans, Francis n’est plus qu’une épave. Pourtant, il décide de revenir à son ancien métier : magicien, fakir, cracheur de feu. Après Be with Me, le quatrième film du Singapourien Eric Khoo est un objet humble et ténu, tourné en neuf jours avec des comédiens non professionnels – mais un magicien authentique, Francis Bosco. D’une classique histoire de rédemption, il tire une parabole envoûtante sur la force de l’amour, le pouvoir de la volonté. Qu’est-ce d’autre qu’être père, sinon marcher sur des tessons de bouteilles et se transpercer le corps pour son enfant ?

Trois vermisseaux s’attaquent à un très très gros poisson. Ils sont respectivement restaurateur, ostréiculteur et aidecomptable, ont tout perdu à cause de cette multinationale d’agro-chimie et décident de trouver eux-mêmes les preuves de son incurie polluante, pour que justice (leur) soit faite. De ce réjouissant postulat, Pierre Jolivet (Fred, Ma Petite Entreprise) et son scénariste Simon Michael tirent une sympathique comédie sociale et « sociétale ». Le film est porté par le quatuor de personnages (un jeune informaticien se joint à eux), les liens qu’ils tissent et les combines qu’ils inventent. Un film léger sur un sujet grave et dans l’air du temps.

_I.D.

_I.D.

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ÉVÉNEMENTS DES SALLES MK2

LES CYCLES EN MATINÉES LES MATINÉES DU MK2 HAUTEFEUILLE Au programme : « Dans les champs de bataille » : Sous les bombes de Philippe Aractingi « L’art du siècle : Im Kwon-taek, l’homme aux 100 films » : Souvenir d’Im Kwon-taek MK2 HAUTEFEUILLE_À partir du 24 septembre.

LES MATINÉES DU MK2 BEAUBOURG Au programme du nouveau cycle « Le renouveau du cinéma israélien » : Prendre femme de Ronit et Shlomi Elkabetz Les Sept Jours de Ronit et Shlomi Elkabetz Valse avec Bachir d’Ari Folman My Father, my Lord de David Volach Les Citronniers d’Eran Riklis Beaufort de Joseph Cedar La Visite de la fanfare d’Eran Kolirin

LES MATINÉES DES QUAIS Au programme du cycle autour de Marcel Pagnol, en partenariat avec le Théâtre du Vieux Colombier : Fanny de Marc Allégret et Topaze de Marcel Pagnol La Vie est un miracle et Chat noir, chat blanc d’Emir Kusturica Marius et Jeannette et À l’attaque de Robert Guédiguian MK2 QUAI DE LOIRE_Les samedis et dimanches matin.

Au programme de la carte blanche à Jérôme Beaujour et Benoît Jacquot, autour de Marguerite Duras, en partenariat avec le Théâtre National de la Colline : India Song de Marguerite Duras Le Navire Night de Marguerite Duras In the Mood for Love de Wong Kar-wai Wanda de Barbara Loden Ça brûle de Claire Simon Elle est des nôtres de Siegrid Alnoy La Fille seule de Benoît Jacquot À tout de suite de Benoît Jacquot MK2 QUAI DE SEINE_Du 1er octobre au 18 novembre.

POUR LES ENFANTS MK2 JUNIOR Pour la rentrée de tous les enfants, le programme MK2 Junior à concocté une grille de nouveaux films, des Nouvelles Aventures de la petite taupe au Kid de Chaplin, en passant par Plume et l’île mystérieuse. Jusqu’au 28 octobre dans sept salles MK2.

TOUS LES SAVOIRS

FOCUS FESTIVAL INTERNATIONAL DE COURTS MÉTRAGES HIP HOP Pour la 4ème année consécutive depuis l’ouverture du MK2 Quai de Loire, l’association R’Style sera accueillie sur les quais pour le « festival international de courts métrages hip hop ». Cette année, le festival traverse le canal et s’installe au MK2 Quai de Seine pour deux séances à 11h et 13h le samedi 11 octobre. Ces séances proposeront une compétition de courts métrages inédits sur le thème du hip hop. À proximité du cinéma seront présents des graffeurs, des danseurs ; tous les arts de la rue au bord du canal. MK2 QUAI DE SEINE_Samedi 11 octobre à 11h et 13h.

COURT-MÉTRAGE SOIRÉE BREF TRAVERSÉES MÉDITERRANÉENNES Du 24 octobre au 2 novembre prochains, le festival international du cinéma méditerranéen de Montpellier fêtera sa 30ème édition. À l’occasion de cet anniversaire, nous avons demandé à Michèle Driguez, chargée de la section court métrage, de composer le programme de cette soirée. Au programme : La Traversée de Maëva Poli C’est la goutte d’eau (Éramos Pocos) de Borja Cobeaga Divertissement shabbatique de Mihal Brezis et Oded Binnun Offres spéciales (Offerte Speciali) de Gianni Gatti Be Quiet de Sameh Zoabi Voyage à la ville (Calatorie La Oras) de Corneliu Porumboiu MK2 QUAI DE SEINE_Le 7 octobre à 20h30.

AVANT-PREMIÈRES LES BUREAUX DE DIEU Le MK2 Bibliothèque accueillera l’équipe du film Les Bureaux de Dieu le lundi 13 octobre pour une avant-première exceptionnelle du film, dont la sortie nationale est prévue le 5 novembre. Une exposition de photos de tournage sera organisée en parallèle au MK2 Bibliothèque (sous réserve). MK2 BIBLIOTHÈQUE_Lundi 13 octobre.

ENFANTS DE DON QUICHOTTE Une soirée spéciale sera organisée au MK2 Quai de Seine le lundi 13 octobre autour du film Enfants de Don Quichotte (acte 1).

CINÉ-PHILO SAISON 4

MK2 QUAI DE SEINE_Lundi 13 octobre.

Le thème de cette nouvelle saison : « Un ciné-philo nommé désir » Au programme : 4 octobre (11h) : Le temps du désir 18 octobre (11h) : Les objets du désir 8 novembre (11h) : Du désir à la folie

LA FIÈVRE DE L’OR

MK2 BIBLIOTHÈQUE_Tarifs : 7,5 €. Étudiants et chômeurs : 6 €. Le programme complet sur www.cine-philo.fr

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Olivier Weber, réalisateur de La Fièvre de l’Or, sera l’invité du MK2 Beaubourg le lundi 13 octobre pour l’avant-première de son film La Fièvre de l’or. MK2 BEAUBOURG_Lundi 13 octobre à 20h30.


RETROUVEZ TOUS LES ÉVÉNEMENTS SUR

LE RENDEZ-VOUS DES DOCS Le nouveau Rendez-vous des docs, en partenariat avec l’association Documentaires sur grand écran, proposera les projections des films Paradise et Highway de Dvortsevoy Serguei. La séance sera présentée et animée par Yann Lardeau, réalisateur et écrivain de cinéma. MK2 QUAI DE LOIRE_Lundi 27 octobre à 20h30. Tarifs : 7,20 €, 6 € pour les adhérents DSGE.

DANS LES LIBRAIRIES À LA LIBRAIRIE DU MK2 BIBLIOTHÈQUE Olivier Rolin sera l’invité de la librairie MK2 Livres le jeudi 16 octobre à 19h autour de son dernier livre Un Chasseur de lions paru aux éditions du Seuil. La lecture sera suivie à 20h30 de la projection du film de John Huston Quand la ville dort. La librairie MK2 Livres recevra Christian Oster le samedi 18 octobre à partir de 17h autour de son roman Trois hommes seuls paru aux Éditions de Minuit.

PARTENARIATS CINÉ-BD Un samedi matin par mois, en partenariat avec Dargaud, un auteur de bande dessinée présente un film de son choix en salle, puis dédicace ses ouvrages à la librairie. Ralph Meyer et Xavier Dorison viendront présenter le premier tome de XIII Mystery, la mangouste. Ainsi l'univers de XIII revit à travers la vie d'un personnage secondaire de la série, imaginée, chaque année, par un dessinateur et un scénariste n'ayant jamais travaillé ensemble jusqu'alors. Projection du film Spy Game de Tony Scott, choisi et présenté par les auteurs. 25 tickets de dédicace distribués au moment de l'achat de votre place de cinéma. Au cinéma puis à la librairie du MK2 QUAI DE LOIRE samedi 18 octobre à 11h30 (dédicace à la librairie vers 14h). Carte Illimité acceptée.

COURRIER INTERNATIONAL

Samedi 25 octobre à partir de 16h, une table ronde sera organisée par MK2 Livres autour de la biographie Hélène Bessette de Julien Doussinault, aux éditions Léo Scheer, en présence de l’auteur, de Robert Cantarella, de Liliane Giraudon (sous réserve), de Florence Giorgetti et d’Anne-Marie Guérin.

À LA LIBRAIRIE DU MK2 QUAI DE LOIRE La librairie du MK2 Quai de Loire et les éditions Emmanuel Proust vous invitent à une dédicace aves les auteurs de la série de bande-dessinée Sans pitié, Pascal Génot, Bruno Pradelle et Olivier Thomas, le jeudi 9 octobre à 19h. La rencontre sera suivie de la projection à 20h30 au MK2 Quai de Loire de Ghost Dog, la voie du samouraï de Jim Jarmush (billets en vente avant la séance). Le samedi 11 octobre, la librairie du MK2 Quai de Loire s'associe aux Puces du design (du 10 au 12 octobre) et invite la designer Inga Sempé à présenter son film coup de coeur : Les Parapluies de Cherbourg de Jacques Demy.

Les prochaines séances des Mardis de Courrier international auront lieu mardi 14 octobre à 20h30 et mardi 4 novembre à 20h30 au cinéma MK2 Quai de Seine.

Le jeudi 30 octobre, la librairie du MK2 Quai de Loire et les éditions Attila vous invitent à une lecture-signature sur le bateau Zéro de Conduite autour du livre L'Écorcobaliseur de Bérangère Cournut. Cette lecture sera suivie de la projection du film Nobody Knows de Kore-Eda Hirokazu (tarif normal, tarif réduit sur présentation du livre à la caisse).

Le premier rendez-vous de la rentrée proposera la présentation du documentaire Retour sur Ouvéa de Mehdi Lallaoui, suivi du Cauchemar de Goro d’Eli Peu. Après la projection, un débat en présence de Mehdi Lallaoui sera animé par un journaliste de la rédaction de Courrier international.

La librairie du MK2 Quai de Loire et les Éditions de l'École des loisirs vous invitent à une dédicace avec Stephanie Blake à l'occasion de la parution de l'album pour enfants Je veux des pâtes !, le samedi 8 novembre à partir de 16h.

La séance de novembre présentera Bonne à vendre de la réalisatrice libanaise Dima Al-Joundi. La projection sera précédée d’un court-métrage et suivie d’un débat en présence de la réalisatrice animé par un journaliste de la rédaction de Courrier international. MK2 QUAI DE SEINE_Mardi 14 octobre et mardi 4 novembre.

À l'occasion de la sortie du CD Next de François Corneloup, la librairie du MK2 Quai de Loire et les éditions musicales Nato vous invitent à un duo entre François Corneloup (saxophone) et Sylvie Fontaine (peinture) le jeudi 23 octobre à 19h30. À l'issue de cet événement, Sylvie Fontaine dédicacera ses bandes dessinées, notamment Le Poulet du dimanche et Miss Va-nu-pieds aux éditions Tanibis.

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DVD Martial Raysse, face caméra

Le grand retour Réalisé en 1971 par le peintre et sculpteur français Martial Raysse, Le Grand Départ réinvestit les salles obscures à partir du 5 novembre. Tandis que sort, parallèlement, un coffret DVD réunissant tous ses films depuis 1966, retour sur l’œuvre d’un artiste iconoclaste. e Martial Raysse, on connaît surtout les électro, machin chose (1967), Camembert Martial assemblages réalisés à partir d’objets extra doux (1969), Pig Music (1971) – qui préfigure du quotidien, les tableaux intégrant des l’unique long métrage de l’artiste, Le Grand Départ néons, objets manufacturés et images (1971), dans lequel le chat Caïn rejoint une communauté photographiques, ancrés dans l’ère du Nouveau vivant au Paradis, conduite par Monsieur Nature, réalisme et du Pop Art. Mais l’on connaît bien moins sorte de Dieu-gourou qui annonce un beau jour ses films, qui ont pourtant occupé une place de ledit « grand départ ». Sans vraiment savoir où elle choix dans son œuvre dès le milieu des années s’apprête à migrer, la communauté embarque sur 1960, et que rassemble une intégrale DVD à paraître le «radeau de l’espoir», lequel ne tarde pas à devenir le 5 novembre prochain. À cette occasion, le long- le théâtre des cauchemars nichés dans la mémoire métrage Le Grand Départ ressort en salles le et l’imagination collectives. Suivront sept nouveaux même jour, et le cinéma MK2 Beaubourg propose courts métrages, jusqu’au plus récent, Re Fatma deux programmes de 25 minutes diffusant des (2006-2008), remake de Lotel des Folles fatmas (1976). courts-métrages de l’artiste. Résolument expérimental, le cinéma de Raysse – Après des études de lettres, Martial Raysse, DÈS 1964, MARTIAL RAYSSE COMBINE né à Golfe Juan en 1936, commence à peindre. En 1960, trois ans après sa première PEINTURE ET CINÉMA EN PROJETANT exposition personnelle à Nice, il signe le UN FILM SUR SA TOILE. manifeste du Nouveau réalisme en compagnie d’une dizaine d’artistes réunis autour du critique qui passe à la vidéo dès 1967 – fait montre d’un d’art Pierre Restany, dont Yves Klein, Arman et goût prononcé pour la distorsion narrative et la Jacques Villeglé, bientôt rejoints par d’autres. Ce révolution de l’image, littéralement retournée. L’usage mouvement historique prône alors une « nouvelle récurrent du négatif couleur, quasi exclusif dans approche perceptive du réel» à travers l’appropriation Le Grand Départ, confère à l’image une picturalité des objets les plus divers, portés en triomphe par contrastée et la pare d’une certaine abstraction. la société de consommation. « Les Prisunic sont les Cette technique semble accentuer, par ailleurs, une musées de l’art moderne », affirme à l’époque Martial thématique omniprésente dans l’œuvre de l’auteur : Raysse, qui, dans ses assemblages et tableaux- le carnaval, rite populaire ancestral initialement objets associant peinture, sculpture et même fondé sur l’inversion de l’ordre logique des choses. photographie, intègre des éléments de la vie Chez ses personnages, souvent masqués, Raysse quotidienne, produits manufacturés et autres motifs cultive une ambivalence entre humanité et bestialité, publicitaires faisant écho au Pop Art, en plein boom raison et folie, à l’image des fables tragi-comiques de l’autre côté de l’Atlantique. dans lesquelles ils s’inscrivent. La dimension théâtrale Sur des agrandissements et sérigraphies de modèles et parodique des mises en scène imaginées par emblématiques des sixties, Raysse colle des objets l’artiste-conteur s’accompagne d’une conception en matière plastique aux couleurs vives. Il va même éclatée de l’image, qui apparaît régulièrement sous plus loin en ayant recours au néon. Mais il ne forme de visions hallucinatoires plus ou moins floues, s’arrête pas là : dès 1964, il combine peinture et entre rêve et réalité, mythe et actualité. cinéma en projetant un film sur sa toile. « C’était Une véritable aventure de l’image que Martial Raysse assez marrant parce que tout à coup, le tableau mène conjointement depuis près de cinquante ans à s’animait », commente l’artiste. En 1966, il réalise travers le cinéma, la peinture et la sculpture – trois Jésus Cola, son premier film, indépendamment de la disciplines qui se sont mutuellement nourries, et peinture. Un court métrage d’une dizaine de minutes, épanouies, dans un même élan de libération des premier d’une série – Homero Presto (1967), Portrait formes. _Anne-Lou VICENTE

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Le Grand Départ de Martial Raysse (1971) et deux séries rassemblant les courts métrages de Martial Raysse (25 minutes chacune), programmés au MK2 Beaubourg à partir du 5 novembre. Coffret Intégrale Martial Raysse (2 DVD, MK2 Éditions), disponible à partir du 5 novembre. L’ouvrage Sinéma, les anges sont avec toi de Michel Bulteau (éditions Viviane Hamy), consacré à Martial Raysse, sera en librairie le 22 octobre. 52 I TROIS COULEURS_WWW.MK2.COM_OCTOBRE 08


LA SÉLECTION par S.M. LE PREMIER VENU DE JACQUES DOILLON TF1 Vidéo et Pyramide Vidéo Une jeune fille, en quête d’intensité, décide d’accorder son amour au «premier venu ». Jacques Doillon nous offre un très grand film, tout en mouvement et en fragilité, dans lequel Clémentine Beaugrand – une révélation – irradie. LES 11 FIORETTI DE FRANÇOIS D’ASSISE DE ROBERTO ROSSELLINI Carlotta En onze tableaux de la vie quotidienne des moines franciscains, ce chefd’œuvre de Rossellini, qui bénéficie d’un nouveau master, impose à chaque plan sa beauté simple et saisissante. Un film co-écrit par Federico Fellini.

LES SEIGNEURS DE LA MER DE ROB STEWART MK2 Éditions Photographe sous-marin et biologiste, Rob Stewart milite contre le mythe du requin mangeur d'hommes, responsable selon lui de l'indifférence qui entoure le massacre de l’espèce. Un film qui alerte sur une menace écologique bien présente.

[REC] DE JAUME BALAGUERO ET PACO PLAZA Wildside Alors qu’elle réalise un reportage sur les pompiers qui interviennent de nuit, une jeune journaliste et son caméraman se retrouvent confrontés à l’horreur. Un œuvre haletante où filmer devient un geste de survie. INTÉGRALE JACQUES DEMY Arte Vidéo

Tandis qu’ils n’en finissent pas d’inspirer les jeunes réalisateurs français, l’ensemble des courts et longs métrages de Jacques Demy sont enfin disponibles dans des copies pour la plupart restaurées. Haut en couleurs.

© Martial RAYSSE

ACTUALITÉ ZONE 1 Polar urbain réalisé en 1972 par Richard Fleischer, The New Centurions (Les Flics ne dorment pas la nuit en VF) conte le quotidien parsemé d’embûches de quelques policiers en patrouille. Ce film choral, tragique et décalé, sera précurseur de pléthore de séries policières, de Hill Street Blues à New York Police Blues. Écrit par un ex-flic, The New Centurions offre à deux gueules cassées du cinéma américain, George C. Scott et Stacy Keach, des compositions tout en demi-teintes et démontre que Richard Fleischer, cinéaste aventureux, est plus qu’un habile faiseur. _R.J.

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LIVRES Le roman français retrouve du souffle

Les trois mousqu Depuis des années, on reproche à la littérature française son nombrilisme et son manque d’intérêt pour le réel. Et si la donne était en train de changer ? La preuve avec trois romans qui s’emparent chacun à leur manière d’un sujet disparu : l’Histoire.

S

ouvenez-vous, c’était en 2007 : emmenés pour coiffer le tout, un narrateur agent double qui fait par Michel Le Bris et Jean Rouaud, une le lien entre ces destins. Derrière les personnages, quarantaine d’écrivains francophones le lecteur reconnaîtra certaines figures réelles, publiaient un manifeste en faveur de ce comme le photographe James Andanson, ami de qu’ils appelaient la «littérature-monde». Leur constat? Bérégovoy et de Jospin, retrouvé suicidé dans sa La littérature française va mal : trop parisienne, trop voiture en 2000. Solide comme du Le Carré et efficace cérébrale, elle a plusieurs longueurs de retard sur sa comme une série télé, ce thriller ressuscite avec brio voisine anglo-saxonne, métissée et ouverte sur le le roman de genre à la française. «Il y a une sorte de monde. Si la liste des signataires, de Ben Jelloun probité à s’attaquer à son époque, jusque dans ses à Rambaud, ressemblait à une auberge espagnole, facettes les plus triviales, explique Serge Bramly. Pas ce coup d’éclat consacrait un diagnostic que de besoin de chercher ses modèles outre-Atlantique : nombreux critiques se tuaient à répéter depuis des il suffit de renouer avec notre tradition, avec Hugo, années : où sont-ils, les romans-fleuves, les points de Balzac, Flaubert, Maupassant, témoins engagés de vue sur l’Histoire, les Mailer et Le Carré hexagonaux? leur époque. » À cette question, la rentrée 2008 apporte un début Est-ce également Balzac que Tristan Garcia avait en de réponse. Du raz-de-marée de l’automne sortent tête en écrivant son premier livre, La Meilleure Part en effet quelques livres hors du commun, par leurs des hommes ? Toujours est-il que ce romancier de dimensions comme par leur sujet. Le plus ZONE EST COMPOSÉ D’UNE UNIQUE impressionnant est sans doute Zone, le roman-monstre de Mathias Enard. À 36 ans, PHRASE DE 500 PAGES, SANS POINTS NI ce jeune spécialiste des langues arabes MAJUSCULES. émigré à Barcelone (comme Jonathan Littell), s’est lancé dans une sorte d’épopée où il brasse toute 25 ans s’attaque lui aussi à l’histoire récente, en l’histoire méditerranéenne du siècle, de la Bosnie au l’occurrence celle de la communauté gay depuis les Proche-Orient, de l’Algérie au Canal de Suez. Son années 1980 et, plus largement, celle des luttes personnage est un agent secret qui a trempé dans intellectuelles qui ont donné naissance au paysage toutes les affaires obscures récentes ; il se remémore culturel d’aujourd’hui. À l’instar de son aîné, Garcia a ses missions dans le train qui l’emmène de Milan à composé ses personnages à partir de personnalités Rome, où un émissaire du Vatican lui rachètera les réelles : l’intellectuel Alain Finkielkraut, l’écrivain documents qu’il transporte... Tout est hors-normes Guillaume Dustan ou l’activiste Didier Lestrade. Mais dans cette fresque luxuriante et incroyablement au-delà de ces ressemblances, le livre vaut avant tout documentée, jusqu’à sa forme : Zone est composé pour sa passionnante évocation des mouvements d’une unique phrase de 500 pages, sans points ni d’idées qu’a cristallisés la question homosexuelle majuscules, à la manière des exploits postmodernes depuis trente ans, avec les mutations du militantisme de Joyce ou Burroughs dont il revendique l’influence. et la fin des utopies politiques. Tristan Garcia incarneMoins avant-gardiste mais tout aussi ambitieux, t-il une relève pour le roman français, comme semble Serge Bramly s’est inspiré des romans américains le penser la critique quasi-unanime ? Ce qui est pour revisiter l’histoire secrète des années 1980 et sûr, c’est qu’au milieu des marronniers d’automne 1990, celle des contrats d’armements, des forages (Laurent Gaudé, Amélie Nothomb) et des autofictions pétroliers et des affaires d’État. Avec la mort de poussives (Christine Angot, Karin Tuil), sa Meilleure Lady Di et celle de Bérégovoy en guise de fil rouge, Part des hommes détonne et épate. La littérature Le Premier Principe, le second principe (en référence française n’est peut-être pas encore la «littératureaux principes de la thermodynamique) tisse une monde» promue par Le Bris mais, avec des écrivains mosaïque d’histoires directement inspirées de la aussi différents qu’Enard, Bramly et Garcia, elle réalité : un marchand d’armes qui inonde la planète reprend clairement possession de l’Histoire. Bonne de missiles, un technocrate qui découvre les coulisses nouvelle, non ? _Bernard QUIRINY du pouvoir, un paparazzi recruté par la DGSE et,

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Serge Bramly (en haut), (à gauche), Zone (Actes


etaires

LA SÉLECTION par P.D., S.Q. et A.T. VIANDE FROIDE, OLIVIA ROSENTHAL Roman, Centquatre / Nouvelles Éditions Lignes

Sous-titré Reportages, ce livre oscille entre documentaire et fiction à travers des photographies et des voix qui fouillent le chantier, passé, présent et à venir, des anciennes Pompes funèbres du 104 rue d’Aubervilliers, avec un sens aigu de l’humain et de l’humour.

UN CHASSEUR DE LIONS, OLIVIER ROLIN Roman, Le Seuil Un tableau mineur de Manet et c’est l’occasion pour l’auteur de se lancer dans un époustouflant roman d’aventures qui fait la part belle à l’Histoire et qui n’est autre pour le narrateur qu’une quête « à la recherche du temps qui a passé ».

ARAKI ENFIN, PHILIPPE FOREST Roman, Gallimard

Aux confins de l’essai et du roman, Philippe Forest s’attelle à un subtil portrait d’Araki, en une suite de variations fragmentaires sur le désir et le deuil, thèmes obsédants de l’œuvre du grand photographe japonais.

JE VEUX DES PÂTES !, STEPHANIE BLAKE À partir de 3 ans, École des loisirs

Simon le Superlapin ne veut plus manger que des pâtes. Un véritable casse-tête pour son papa et sa maman. Et si un gros gâteau au chocolat l’incitait à manger sa soupe ?

COURIR, JEAN ECHENOZ Roman, Éditions de Minuit

Après celle de Maurice Ravel il y a deux ans, Echenoz retrace la vie d’Émile Zatopek. Ni biographie, ni roman, Courir dresse un portrait à la traverse de l’athlète tchécoslovaque, dans le style espiègle et virtuose qui caractérise son auteur.

LE SITE

Le Premier Principe, le second principe (Jean-Claude Lattès) ; Mathias Enard Sud) ; Tristan Garcia (à droite), La Meilleure Part des hommes (Gallimard).

Photographies : © Bettina RHEIMS, DR

http://biffures.org Coupée du public, la recherche universitaire ? Pas si l’on s’en réfère à Biffures, webzine animé par de jeunes chercheurs en lettres. On y trouve aussi bien des travaux ultra-pointus (le désir chez Duras, la pratique de la traduction d’Yves Bonnefoy) que des chroniques d’actualité et des entretiens. Initialement créé pour sortir la recherche des facultés, le site s’est diversifié pour devenir une véritable plateforme consacrée à la littérature contemporaine, autour d’auteurs comme François Bon ou Valère Novarina. Son slogan ? « Rendre accessible l’exigence ». Pari tenu. _B.Q.

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MUSIQUE La pop slicée de Housse de racket

Photographie : © Romain CHASSAING

Élégante comme une chemise Lacoste, dont elle illustre les dernières campagnes de pub, la pop vintage de Housse de racket monte au filet. Rencontre entre deux smashs.

L

e premier album de Housse de racket s’intitule Forty Love. Ce qui peut se traduire, selon que l’on maîtrise ou pas les règles tennistiques, par « 40 / 0 » ou « l’amour à quarante ». Optons pour la première proposition, plus fidèle au « pitch » de ce concept-album : « Winner côté court, loser côté cœur », résument Pierre et Victor, les deux raquettes de ce double tranchant. « À l’heure du MP3 et de l’écoute morcelée, on tenait à réhabiliter le format album, en essayant de tisser un fil narratif à la Ziggy Stardust ou L’Homme à la tête de chou. » Entre humour potache et romantisme adolescent, l’album conte les revers amoureux d’un tennisman entiché de Gwendoline, sylphe lointaine et fantasmée. Au-delà, le disque révèle l’extrême musicalité du duo, coaché sur un titre par Gonzales, et qui, il y a peu, s’entraînait avec Phoenix, Air ou les Teenagers, en studio ou en tournée. Multiinstrumentistes à l’aise sur toutes les surfaces, les deux Parisiens citent pour influence Daft Punk, Stevie Wonder ou André Agassi « dans sa période jean fluo ». Ce qui donne une idée de leur style de jeu, « offensif », vintage et spectaculaire : « Nous voulons racketter la house, d’où notre nom. On est là pour en découdre. » Sur le circuit des baby-rockeurs chantant en français, Housse de racket a plusieurs breaks d’avance ; autant dire match gagné. _Auréliano TONET Forty Love (Kuskus / Discograph). En concert le 29 octobre à la Boule noire.

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Allez, housse ! LYKKE LI « Youth Novels » LL / Warner Le premier album de cette Suédoise de 22 ans romance la jeunesse comme nul autre : bulles de synthés, douces danses et mélodies moirées ont, ici, voix au chapitre. Vivement le prochain tome.

BLACK KIDS « Partie Traumatic » AG / Universal « J’ai (encore) sous-estimé mon charme », dit une chanson de ces Américains à l’ironie très british. La presse, qui les porte aux nues, n’a pas surestimé le leur : tel un philtre, leur pop explosive désarme toute résistance.

LULA CÔRTES & ZÉ RAMALHO « Paêbirú » Mr Bongo Chef-d’œuvre des 1970’s brésiliennes, rencontre entre le Nordeste le plus sensuel et le krautrock le plus cérébral, ce diamant post-tropicaliste fut longtemps introuvable. Sa réédition n’en est que plus précieuse.

GÉRARD MANSET « Manitoba ne répond plus » Capitol / EMI

Manset poursuit son voyage en solitaire, loin des radars, hors des atlas. Élégiaques, abrasives, tristement tropicales, ses chansons ne connaissent qu’un seul pays, qu’une seule forêt : poésie.

TV ON THE RADIO « Dear Science » 4AD / Beggars Entre deux collaborations VIP (Scarlett, Massive Attack), TV on the radio continue de brouiller les pistes : transgenre et multi-ethnique, sa pop mutante risque de faire des jaloux dans les labos. _A.T.

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Vincent Mougel s’est choisi pour nom d’artiste KidsAreDead, soit « les enfants sont morts ». Son enfance à lui a ceci .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. de particulier que, même morte et enterrée, elle ne cesse d’infuser ses chansons. C’est une pop de revenant juvénile, .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. de zombie pétant la forme et l’allégresse que trousse ce Lorrain agrégé de musique, amateur des sucreries .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. tarabiscotées de Todd Rundgren ou Prefab Sprout. En attendant le premier album, en cours d’enregistrement avec .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. Frédéric Lo (producteur de Daniel Darc), son talent vrillé s’écoute en démo, ou sur les morceaux d’amis excellemment .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. avisés (Variety Lab, French, Alban Dereyer). _A.T. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. ..............................................................................................................................................................................................................................

LE SITE

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LES BONS PLANS Kompilés par Rémy Kolpa Kopoul

Les bons plans d’ Quatre festivals qui donnent des couleurs et une pulsation anti-morosité à Paris et ses environs. Plus deux figures intemporelles et féériques de la « touche française ». Enfin, une poignée de rendez-vous savoureux. Faites sauter la banque... ÉLECTRO +++ > FACTORY > CIGALE > DU 8 AU 11/10 La section « électro » du Festival d’Île-de-France navigue entre jazz, spoken-world, hip hop et minimal, tout cela brassé avec les variantes de l’électro : au programme, le sax antillais de New York Jacques Schwarz-Bart (guest la pétulante lady-soul Stephanie McKay), le duo Caraïbe inédit David Walters le Marseillais + Melissa Laveaux l’Haïtienne (le 8), le projet Solal d’Olivier Cohen Solal (par ailleurs Gotan Project), le black poet Anthony Joseph et en warm-up de prestige, Gilles Peterson DJ set (le 9), Poni Hoax, South Central (GB) et les Australiens de Pivot (le 10), l’électro minimal de Leïla (feat l’ex-Special Terry Hall), la magique soul-sista Martina Topley Bird et Principles of Geometry (le 11). www.festival-idf.fr/index.php

JAZZ SUR TOUS TEMPOS > JVC JAZZ FESTIVAL > DIX SALLES & CLUBS PARISIENS > DU 10 AU 18/10 Rendez-vous automnal du jazz qui se pose de salles prestigieuses en clubs, le JVC Jazz, comme on l’appelle, quadrille les tendances avec un éclectisme pétillant. En voici une sélection dodue. Le 10 : le maître du piano fusion, Herbie Hancock, en version post-bop (Pleyel), le véloce guitariste jazz manouche Angelo Debarre (Sunside) et le trompettiste italien Rosario Giuliani Quintet (Duc Des Lombards) ; le 11, le feu-follet du tango chanté, Melingo (Alhambra) ; le 12, la chanteuse bluesy glamour Robin McKelle, sur canapé big-band (Olympia) ; les 13 & 14, le caïd de la guitare Birelli Lagrene, façon jazz-rock (New Morning) ; le 15, l’explosif duo italien Musica Nuda (Alhambra) et le vétéran du blues britiche, John Mayall (Bataclan) ; le 16, les Caribéens de Sakesho invitent le chatoyant pianiste réunionnais Meddy Gerville (Divan du Monde) ; le 17, le néo-folk bluesman James Hunter au New Morning et l’accordéoniste Richard Galliano, avec rien moins que Charlie Haden et Gonzalo Rubalcaba (Salle Gaveau) ; enfin le 18, le «vegetal groove » du Hadouk Trio (Alhambra), la chanteuse US Patricia Barber qui «relit» Cole Porter (La Cigale), et le retour des Brésiliens fusion seventies d’Azymuth (New Morning). Bon appétit! www.parisjazzfestival2008.com

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CRÉOLITUDE BLUES > VIBRATIONS CARAÏBES > MAISON DES CULTURES DU MONDE > DU 16 AU 26/10 Festival qui s’affirme plus indispensable d’une année à l’autre, Vibrations Caraïbes ose brasser non seulement les modes d’expression (littérature, poésie, expo, musique...) mais aussi les courants et terres insulaires qui d’ordinaire font chambre à part. Florilège de la prog’ musicale : le duo Gerald Toto / David Walters et le princier troubadour haïtien Beethova Obas (le 16), le trompettiste jazz créole libertaire Jacques Coursil (le 17), le big-band antillais de Dominik Coco et l’électro bêlé novateur d’Xtrem Jam (le 18), enfin les Antillais Joby Bernabé / Jean-Claude Montredon, l’illustre dub-poet jamaïcain Linton Kwesi Johnson et le lion trinidadien de la scène spoken-word londonienne Anthony Joseph (le 19). Ca ka maché! www.vibrationscaraibes.com

BANLIEUES REVISITED > VILLES DES MUSIQUES DU MONDE > SALLES DU NEUF-TROIS > À PARTIR DU 17/10 Le grand raout «world » de rentrée dans la banlieue nord-est, qui se pose en bonne partie au Magic Mirrors d’Aubervilliers, est cette année sous le signe du « revisited », le grand mix des cultures en quelque sorte. Extraits : la «Compay Segundo de Trinidad », pétulante Calypso Rose (le 19/10), les fanfarons Frank London Klezmer Brass All Stars et le batteur nigérian Tony Allen (le 25/10), une soirée « à l’ombre du baobab » du mandingue au hip hop avec Mah Damba, SSK et Awadi (le 1/11), la magnétique afroespagnole Buika et son flamenco métis (le 06/11). Également le troubadour kabyle Aït Menguellet (le 17/10 à Aulnay) et une nuit autour des très rares Amazones de Guinée, big band militaire féminin! (le 31/10 à St Ouen). Suite le mois prochain. www.villesdesmusiquesdumonde.com


automne DEUX INSUBMERSIBLES DE LA «TOUCHE FRANCAISE »

ALBERT MARCOEUR > CAFÉ DE LA DANSE > DU 15 AU 19/10 Dans les années 1970, on l’appelait le «Zappa français». Albert Marcoeur poursuit son chemin bonhomme, un disque tous les «de temps en temps» (le nouveau s’appelle Travaux pratiques ), il met en scène les toutes petites choses de la vie avec des mots dérisoires et une musique fait-main comme les artisans à façon. Avec son air de s’excuser d’être là, Marcœur est précieux, unique et indispensable au paysage. www.marcoeur.com JEAN-CLAUDE VANNIER RELIT GAINSBOURG > CITÉ DE LA MUSIQUE > 22 & 23/10 En ouverture d’un méga-cycle de concerts de Gainsbourg à Gainsbarre (super-expo, conférences, concert), c’est son complice des seventies Jean-Claude Vannier qui monte pour la première fois sur scène deux de leurs collaborations d’antan. 1ère partie, L'Enfant assassin des mouches, histoire signée Gainsbourg, mise en musique et arrangée par Vannier ; 2ème partie,Histoire de Melody Nelson, arrangé par le même Jean-Claude Vannier, qui dirigera l’Orchestre Lamoureux, avec de nombreux chanteurs invités. Le psyché français dans toute sa splendeur avec l’homme de l’ombre de Gainsbourg, c’est justice. www.cite-musique.fr ET LA PREUVE PAR DIX... RENDEZ-VOUS... DE PLUS >>> Hocus Pocus, hip hop groovy nantais (Alhambra, du 7 au 9/10) >>> Tricky, électro neurasthénique, pour l’ouverture d’un nouveau lieu parisien (le 104, 11/10) >>> Air, électro-symphonique versaillais (Salle Pleyel, 11/10), Marcelinho da Lua / B-Negão / RKK, électro + hip hop do Brasil & latino (Cabaret Sauvage, 17/10) >>> Carl Craig, caïd du DJ’ing électro (Cité de la Musique, 18/10) >>> Caravan Palace, électro-jazz manouche (Café de la Danse, 20 au 24/10) >>> Sleepwalker, électro-jazz nippon (Batofar, 21/10) >>> Carte blanche à Brad Scott pour les dix ans du Cabaret Sauvage (28/10) >>> David Sanborn, groovy & sexy sax (New Morning, 31/10 & 1/11) >>> Take 6, super jazz vocal (New Morning, 6/11).


ART L’ouverture du Centquatre

Grandes pompes En gestation depuis 2005, le Centquatre ouvre enfin ses portes à partir du 11 octobre, en lieu et place des anciennes Pompes funèbres municipales, dans le 19ème arrondissement de la capitale. Soit près de 40 000 m2 entièrement dédiés à la création contemporaine...

L

e Centquatre n’est pas un de ces nouveaux indicatifs téléphoniques. C’est le nom du nouvel établissement artistique de la Ville de Paris, situé au 104 rue d’Aubervilliers, dans le 19ème arrondissement. Le lieu, qui a abrité le Service municipal des Pompes funèbres entre 1905 et 1997, est réhabilité en 2001 par le maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui le confie aux architectes Jacques Pajot et Marc Iseppi dès 2003. Après un appel à candidature lancé par la ville en 2005, Robert Cantarella et Frédéric Fisbach se voient attribuer la direction du futur Centquatre.

Respectivement nés en 1957 et en 1966, les deux co-directeurs, par ailleurs tous deux brillants metteurs en scène de théâtre, se sont lancés un véritable défi culturel : « Accueillir tous les arts et pratiques artistiques : arts visuels et plastiques, musique, danse, théâtre, mode, design, cinéma, littérature, arts numériques…» Le Centquatre entend accueillir chaque année une trentaine de projets. Pas moins de 200 artistes devraient occuper les lieux en permanence, avec à leur disposition, quelque dix-huit ateliers. Résidences d’artistes IL EST PRÉVU QUE CHAQUE RÉSIDENT internationaux, expositions et festivals vont se faire croiser OUVRE SON ATELIER AFIN DE MONTRER les disciplines artistiques, SON TRAVAIL EN COURS. les artistes et les publics. «Nous avons inventé le Centquatre pour que le public trouve le chemin de l’art d’aujourd’hui et puisse tisser une relation intime aux émotions et à l’intelligence que l’art ne cesse de créer », écrivent les deux hommes. La programmation du Centquatre sera ponctuée d’un grand nombre de rencontres – répétitions publiques, ateliers pratiques, visites, conférences, débats, cartes blanches… – permettant l’échange, indispensable au renouvellement de la création. Il est notamment prévu que chaque résident ouvre régulièrement son atelier afin de montrer son travail en cours.

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Conçu, à la fois sur la forme – l’architecture, les équipements – et sur le fond – les activités, la programmation –, comme un lieu de création et de production, mais aussi de passage et de découverte, l’établissement se veut résolument tourné vers le(s) public(s). À compter du mois de novembre, le Cinq, espace consacré aux pratiques artistiques amateurs, constituera un lieu d’accueil, d’information et de promotion des activités culturelles et artistiques du quartier. Dès février 2009, même les petits auront leur atelier : conçue par la designer Matali Crasset, la Maison des Petits invitera les enfants de 0 à 5 ans et leurs parents à venir titiller leur créativité et cultiver leur curiosité. Alors, avis aux amateurs : dès le 11 octobre, faites le 104… _Anne-Lou VICENTE

Le Centquatre, 104 rue d’Aubervilliers et 5 rue Curial, 75019 Paris. Ouvert tous les jours de 11h à 20h, à partir du 11 octobre. Nocturne le vendredi et le samedi jusqu’à 22h. www.104.fr

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EXPOSITIONS par A.-L.V. TADASHI KAWAMATA 19 SEPT. - 13 DÉC. Tadashi Kawamata conçoit des structures précaires réalisées à partir de matériaux de récupération assemblés. Pour son exposition Gandamaison, l’artiste japonais investit intérieur et extérieur du centre d’art en greffant à l’architecture une construction faite de cagettes de fruits et légumes. La Maréchalerie // 5 avenue de Sceaux, 78000 Versailles.

LA CONSISTANCE DU VISIBLE 10 OCTOBRE - 22 NOVEMBRE Sur une proposition du commissaire et critique d’art Nicolas Bourriaud, cette exposition marque la 10ème édition du Prix de la Fondation d’entreprise Ricard. Elle réunit neuf artistes issus de la jeune scène française – Raphaël Zarka, Julien Discrit, Cyprien Gaillard… – autour de la notion d’œuvre, sa genèse et son territoire. Fondation d’entreprise Ricard // 12 rue Boissy d’Anglas, 75008 Paris.

Photographie : © Experimental Jetset

JACKSON POLLOCK ET LE CHAMANISME 15 OCTOBRE - 15 FÉVRIER La Pinacothèque de Paris présente un ensemble de dessins et de tableaux du peintre américain Jackson Pollock (1912-1956) inspirés du chamanisme. L’exposition propose une lecture inédite de l’œuvre du maître de l’expressionnisme abstrait, fasciné par l’art amérindien et ses rituels. Pinacothèque de Paris // 28 Place de la Madeleine, 75008 Paris.

LA PHOTOGRAPHIE À DÜSSELDORF 4 OCTOBRE - 4 JANVIER Objectivités retrace l’histoire de la photographie à Düsseldorf depuis la fin des années 1960, en soulignant l’impact de Bernd et Hilla Becher. Axée sur une approche sérielle et impersonnelle, leur esthétique objectiviste, privilégiant le noir et blanc, a influencé la scène artistique internationale. Musée d’Art moderne de la Ville de Paris // 11 avenue du Président Wilson, 75116 Paris.

LE SITE

Photographie : © Edouard CAUPEIL

http://www.varini.org Après une visite sur ce site très complet, vous saurez tout sur Felice Varini. Depuis trente ans, l’artiste, né en Suisse en 1952, pare l’architecture de motifs selon le principe de l’anamorphose : un seul et unique point de vue permet en effet d’observer dans leur intégralité les ellipses, cercles, triangles, lignes et autres formes peintes à la fois à l’intérieur et à l’extérieur des lieux à travers le monde entier. Un art en trompe l’œil (se) jouant des perspectives, qui n’en finit pas de fasciner. _A.-L.V.

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RÉSEAUX Quand les geeks dérapent...

Libre excès

Illustration : Arnaud PAGÈS

Trolls, fanboys, chasses à l’homme : l’addiction au web n’est pas sans conséquences funestes. Sur les chemins de traverse du Net, à l’abri de la maréchaussée, certains geeks dérapent. D’autres vont directement s'encastrer dans un arbre.

C

omportements extrêmes et faits divers macabres ne sont certes pas nés avec la démocratisation de la Toile. Pourtant, il semble qu’Internet facilite ces agissements, dans la mesure où le world wide web apparaît encore comme un espace de jeu déresponsabilisé. Le terme même de «monde virtuel» induit l'idée que les actions y sont sans conséquence – pénale ou autre – et n'engage pas les individus réels qui, derrière leur ordinateur, se sentent intouchables. Passage en revue de différentes déviances, plus ou moins effrayantes.

Novembre 2007. Le premier fait divers «made in Internet» défraye la chronique américaine : le suicide de Megan Meier, 13 ans. Megan s'était brouillée avec une de ses amies, qui était allée s'en plaindre auprès de sa mère, Lori Drew. Mme Drew a alors réagi de la façon la plus rationnelle qui soit : elle POUR NOMBRE D’INTERNAUTES, LE WEB s'est créée une page MySpace sous l'identité d'un charmant garçon de 13 ans et a commencé à flirter APPARAÎT ENCORE COMME UN ESPACE DE avec Megan. Bien sûr, Megan s'est très vite entichée JEU DÉRESPONSABILISÉ. de son correspondant mais tout a dérapé le jour où il lui a écrit qu'il la trouvait grosse et moche. Désespérée, Megan s'est pendue. Avec ce stratagème, Lori Drew est devenue un « troll », c'est-à-dire un individu ayant des pratiques malveillantes sur Internet. Si un geste comme le suicide peut difficilement se réduire à une cause aussi précise, les parents de Megan ont tout de même demandé l'adoption d'une loi anti-harcèlement sur Internet.

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Autre phénomène extrême, la multiplication des «fanboys». Le fanboy a tout du fan traditionnel, à une différence près : l'objet de son obsession n'est pas un artiste, chanteur ou comédien, mais une marque de console de jeux, d'ordinateurs ou de système

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Parallèlement à ces comportements individuels, se développent des pratiques de groupe, comme les chasses à l'homme. Si la France est encore peu touchée par le phénomène, il est exponentiel dans des pays comme la Chine ou les États-Unis. La version chinoise est teintée d'un moralisme douteux. Un internaute dénonce un mari volage ou une jeune fille immorale et toute une meute de hackers lui emboîtent le pas pour pourrir l'existence du pécheur. Diffusion d'informations personnelles et harcèlement en tout genre, ces justiciers en ligne décident de punir eux-mêmes les supposés coupables. Aux États-Unis, les hackers préfèrent des cibles plus politiques comme l'Église de Scientologie. S'ils révèlent les pratiques frauduleuses de certains politiciens, ils peuvent également s'en prendre à un blogueur qui a eu la malchance de leur déplaire. Le Net comme espace de liberté est donc victime d'un paradoxe. Chacun se sent légitimé à imposer sa loi et ses règles, quitte à priver autrui de sa propre liberté. Et selon un principe darwinien, les gagnants sont ceux qui ont les plus grandes compétences informatiques. Lors d'une interview exclusive, un journaliste du New York Times a demandé à Fortuny, un des plus célèbres trolls-hackers : «Y a-t-il quelque chose qui peut être fait sur Internet qui ne doit pas l'être?» Fortuny a paru déstabilisé par la question et s'est contenté de répondre : «Il faut que j'y réfléchisse.» Et, effectivement, la question risque de se poser de façon récurrente. _Titiou LECOQ

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d'exploitation. Certains donneraient leur vie pour Johnny, le fanboy est prêt à tous les sacrifices pour prouver son allégeance à Apple ou Nintendo. Selon une pratique ancestrale, la forme sacrificielle la plus courante étant de marquer son dévouement dans sa chair, le fanboy se fait donc tatouer des personnages de jeux vidéo ou, pire, le logo de l'entreprise.

GROS CERVEAUX Magazine culturel et subjectif, Brain décrypte musique, BD, médias, tendances. Du top 5 des plus mauvaises scènes de sexe au cinéma au dictionnaire de la bonne foi musicale, tout y passe. www.brain-magazine.com

LICENCE POÉTIQUE Ce site propose des jeux qui ressemblent davantage à des œuvres d'art qu'à une énième partie de solitaire. D'un clic de souris, on participe à l'élaboration d'un univers hautement poétique. www.vectorpark.com

RETOUR VERS LE PASSÉ La Toile se déchaîne pour ou contre ce site qui permet de visualiser la tête que vous auriez dans les années 40, 50, etc. Sur les sites communautaires, c’est la déferlante des avatars vintage. www.yearbookyourself.com

LES DENTS DE L’AMER Expression courante aux États-Unis, «sauter le requin» désigne l'épisode où une bonne série passe du côté obscur du navet. Ce site recense tous ces grands moments d'essoufflement scénaristique. www.jumptheshark.com

ENCHEVÊTRÉE Enfin, un blog de fille qui exploite le Net pour ce qu'il est : un tissu de liens où s’enchevêtrent tous les sujets, des propos politiques aux réflexions sur la mode et le quotidien. http://labienveillante.hautetfort.com _T.L.

TROLL

[tr l] n.m. c

MOT @ MOT

(De l’anglais trolling, technique de pêche à la traîne. Par extension, un troll constitue un hameçon à controverses sur des plateformes de type forum ou blog. En rappel à la créature mythologique malveillante, un troll est aussi celui qui s’adonne au trolling.) 1. À la fois message et auteur de celui-ci, dont le but est de discréditer et d’humilier un tiers, une entreprise ou un produit. Le principe d’un troll est d’être stérile et inutilement agressif, afin de mobiliser l’attention des internautes. Sur trollsvelus.fr, un troll a écrit : « Nouvelle rumeur : un possesseur d’iPhone aurait découvert qu’on pouvait téléphoner avec. » 2. Manœuvre politique visant à calomnier l’adversaire. Hugo Chavez, président du Venezuela, le 11 septembre 2008 : « Allez vous faire foutre sales Yankees de merde. […] Allez vous faire foutre cent fois. » _E.R.

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JEUX VIDÉO Les jeux sur PC sont-ils condamnés ?

Désertés par les éditeurs, concurrencés par des consoles à l’offre plus familiale et diversifiée, les jeux sur PC meurent à feu doux. Leur dernier refuge : le bureau.

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ans le foyer traditionnel hexagonal, le raz-demarée des ordinateurs Mac fut jusqu’ici endigué par le refus catégorique d’ados prétextant, à raison, qu’Apple tournait le dos aux jeux vidéo (l’inverse n’est pas faux). Quoi qu’il en soit, le PC n’est aujourd’hui plus une plateforme décente pour jouer. La faute à l’inadéquation entre la gourmandise des titres vidéoludiques phares et la faible capacité financière du panel des joueurs. S’équiper pour jouer à des Crysis Warhead ou autres Assassin’s Creed relève du casse-tête quasiquotidien. Performance rime avec dépense. Malgré le récent label Games for Windows et des marges plus intéressantes sur PC par rapport aux consoles de salon, les éditeurs désertent le «Personal Computer». Le jeu MMORPG (World of Warcraft et ses 10 millions d’abonnés) constitue une dernière niche pour le PC après la fuite des FPS sur console. Depuis le 19 septembre, la X360 d’entrée de gamme baisse à 179 €. Les casual games (ludoéducatif, familial, jeux de société) ont élu domicile sur les consoles de Nintendo : Wii et DS. La fusion des plateformes de bureau et de salon semble la seule porte de sortie. En attendant une hypothétique console hybride de couloir, l’avenir du jeu PC se résume aux parties en loucedé sur son lieu de travail. Après la rédaction de cet article, nous irons ainsi jouer à l’adresse suivante : http://games.sticky.tv/cyrkam_airtos. Le concept ? Rattraper des boulettes de papier lancées par un collègue, et viser la poubelle. _Étienne ROUILLON

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Rest in PC LITTLEBIGPLANET Hey ! Une tribu de marionnettes métissées vous invite à parcourir le globe au travers de niveaux personnalisables. Une esthétique incomparable, prenant la mondialisation par le bon bout. Disponible : octobre Éditeur : Sony // Plateforme : PS3

FAR CRY 2 Hot ! Pas de fumée sans feu : pressenti comme le meilleur FPS de la savane, ce titre vous initie à l’écobuage par le lance-flamme, le doigt sur la gâchette et le crâne au soleil. Disponible : octobre Éditeur : Ubisoft // Plateforme : Xbox 360, PS3, PC

TRACKMANIA DS Tut tut ! Sonnez klaxons, résonnez pistons. Après un raz-de-marée sur PC, le plus chronophage des jeux de voiture arrive sur la console portable. Jouer ou conduire ? Les deux, mon capitaine. Disponible : octobre Éditeur : Focus Home Interactive // Plateforme : DS

FRACTURE Pouf ! Plus fort que la DATAR et Valérie Damidot réunis, les soldats du futur font pousser des montagnes et creusent des puits à la force d’armes de poing sophistiquées. Disponible : octobre Éditeur : LucasArts // Plateforme : Xbox 360, PS3

FIFA 2009 But ! Toutes les conditions sont réunies dans ce jeu de foot pour qu’enfin FIFA égale son rival, jusqu’ici indétrônable : Pro Evolution Soccer. Le match a commencé. Disponible : octobre Éditeur : Electronic Arts // Plateforme : toutes _E.R.

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Aller chercher le pain au lendemain d’une catastrophe nucléaire peut s’avérer un tantinet périlleux. Ce site vous propose .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. une foultitude de conseils sous forme de brèves vidéos : manuel d’utilisation d’un lance-pierre nucléaire, réclame pour un container .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. anti-radiations à usage personnel... Pastiches des publicités américaines des années 1950, ces récits didactiques réactualisent .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. la peur folamouresque du Boum atomique. Ces fausses pubs à l’esthétique steam-punk annoncent avec un humour désuet .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. la sortie pour début octobre du jeu Fallout 3 : « Le premier choix de l’Amérique pour la simulation post-nucléaire. » _E.R. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. .............................................................................................................................................................................................................................. ..............................................................................................................................................................................................................................

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SCIENCE-FICTION La chronique des objets de demain… Le baby-phone

Allô maman bobo On appelle ça mettre la puce à l’oreille : Roselyne Bachelot et ses gros sabots roses déconseillent officiellement le téléphone portable aux moins de 12 ans. Le téléphone Mo1, lui, est destiné aux plus de 36 mois. Adam, six ans et demi, témoigne.

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– Pourquoi tu me donnes ce téléphone? Je suis puni? – Mais Adam… c’est génial ! Regarde, un téléphone portable pour les enfants ! Wahoo ! – L’écran… il est pas tactile.

Batterie faible. Faites plaisir aux enfants, tiens. Il est révolu le temps où l’on aurait tué pour tenir un TAM-TAM ou un Bi-Bop dans nos mains prépubères, où l’on hululait Ulla en cachette. Pour les moins de dix ans, le 3615 est une mensuration de Pokémon. Les yeux humides et boudeurs de ma jeune victime trahissent une réalité version 3.0 : je suis membre honoraire de l’ère délétère du bouton sur ressort. Décontenancé, je relis la notice du constructeur : son téléphone favorise « la croissance émotionnelle saine, le développement de la socialisation ». Enfile ton manteau Adam, on va socialiser dehors avec ton mobile. C’est ça ou une mention au fichier EDVIGE pour insubordination. Recherche de réseau. D’humeur verte, le lardon parade dans le bac à sable. Ses comparses tri-bandés se figurent qu’il a mis la pogne sur une antiquité vintage : « Et tu peux appeler que ta mère ou ton père ? Ouah, c’est concept. » Une maman, modèle 1980 pré-chute de mur, sourcille à mon encontre : «– Et vous n’avez pas peur? Le wi-fi, les ondes et tout le toutim? – Bof... de toute façon, il noie ses céréales dans du lait chinois.»

Illustration : Thomas DAPON

Messagerie saturée. Une semaine plus tard, je retrouve le mouflet flétri par des centaines d’appels à la hotline « Dora l’exploratrice ». Après avoir débloqué son portable aussi facilement que l’ont fait sauter le contrôle parental d’AOL, Adam a été surexposé à des kilowatts de 3G. Diagnostiqué électrosensible, il part rejoindre 500 réfugiés environnementaux en Suède. Entre deux maux de têtes, il sourit : « Avec un peu de chance, je vais croiser le Père Noël. On est déjà potes sur Facebook. » _Étienne ROUILLON

TEXTO 60 %. Selon une étude brésilienne de 2006, publiée par l’université de Porto Alegre, le cerveau des enfants de moins de 10 ans absorbe 60 % de rayonnements électromagnétiques de plus que celui des adultes. 300 000. C’est le nombre de citoyens suédois recensés comme électrosensibles. La Suède reconnait ce handicap et l’indemnise. Interphone. Le nom d’une étude conduite dans 13 pays. Elle a pour but de statuer sur la responsabilité de l’usage de mobile sur 6600 cas de tumeurs. Résultats début 2009. www.electropollution.eu propose des produits permettant aux malades de pallier leurs migraines et démangeaisons.

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_E.R




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