Trois Couleurs #82 – Juin 2010

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JUIN 2010

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CINÉMA CULTURE TECHNO

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REPORTAGES : VISITE DES STUDIOS PIXAR À SAN FRANCISCO - EN DIRECT DU FESTIVAL D’ANNECY





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ÉDITEUR MK2 MULTIMÉDIA 55 RUE TRAVERSIĂˆRE_75012 PARIS 01 44 67 30 00

SOMMAIRE # 82

RĂŠdacteur en chef AurĂŠliano Tonet (aureliano.tonet@mk2.com)

7 ÉDITO 8 SCĂˆNE CULTE > Toy Story 10 L’ŒIL DE‌ > Bartabas 12 PREVIEW > Submarino

Chef de rubrique  technologies  Étienne Rouillon (etienne.rouillon@mk2.com)

15 LES NEWS

Directeur de la publication & directeur de la rĂŠdaction Elisha Karmitz (elisha.karmitz@mk2.com)

RĂŠdactrice Juliette Reitzer (juliette.reitzer@mk2.com) Direction artistique Marion Dorel (marion.dorel@mk2.com) Sarah Kahn (sarah.kahn@mk2.com) Design Sarah Kahn SecrĂŠtaire de rĂŠdaction Laureen Guhur Stagiaires AmĂŠlie Leenhardt, Cassandre Dessarts Ont collaborĂŠ Ă ce numĂŠro Ăˆve Beauvallet, François BĂŠgaudeau, Isabelle Danel, Julien Dupuy, ClĂŠmentine Gallot, Joseph Ghosn, Donald James, Olivier Joyard, Laura Mattei, Wilfried Paris, Bernard Quiriny, Pablo RenĂŠ-Worms, LĂŠo Soesanto, Violaine SchĂźtz, RaphaĂŤlle Simon, Bruno Verjus, Éric Vernay, Anne-Lou Vicente Illustrations Dupuy & Berberian, Sarah Kahn, Étienne Rouillon PublicitĂŠ Responsable clientèle cinĂŠma Laure-Aphiba Kangha 01 44 67 30 13 (laure-aphiba.kangha@mk2.com) Directrice de clientèle hors captifs Laurie Pezeron 01 44 67 68 01 (laurie.pezeron@mk2.com)

Š 2009 TROIS COULEURS issn 1633-2083 / dĂŠpĂ´t lĂŠgal quatrième trimestre 2006. Toute reproduction, mĂŞme partielle, de textes, photos et illustrations publiĂŠs par MK2 est interdite sans l’accord de l’auteur et de l’Êditeur. Magazine gratuit // Ne pas jeter sur la voie publique

15 16 18 20 22 24 26 28 30 32

CLOSE-UP > Adam Butcher LE K > Dirty Diaries KLAP ! > Ivory Tower TÉLÉCOMMANDO > Glee EVENT > La maison Cocteau CARTE BLANCHE > Push Up UNDERGROUND > 1973 BUZZ’ART > Sinna Mann LE NET EN MOINS FLOU > Facebook perd la face AVATAR > UFC : Ultimate 2010 Undisputed

35 LE GUIDE 36 SORTIES CINÉ 48 SORTIES EN VILLE 58 LA CHRONIQUE DE DUPUY & BERBERIAN

60 DOSSIERS 62 REPORTAGE CHEZ PIXAR > TOY STORY 3 68 EN DIRECT DU FESTIVAL D’ANNECY > SHREK 4, L’ILLUSIONNISTE‌ 72 ENTRETIEN AVEC OLIVIER ASSAYAS > CARLOS

77 LE BOUDOIR 78 80 82 84 86 89 90

DVD-THĂˆQUE > Albert Serra CD-THĂˆQUE > Sean Lennon & Harper Simon BIBLIOTHĂˆQUE > Ollivier Pourriol BD-THĂˆQUE > Suehiro Maruo LUDOTHĂˆQUE > Machinarium HOLLYWOOD STORIES > Michael Cimino SEX TAPE > Air Doll

VOUS SOUHAITEZ COMMUNIQUER DANS APPELEZ-NOUS ! 01 44 67 68 01

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ÉDITO - DESTINS ANIMÉS

Il est minuit passé. Très en retard, nous bataillons sur nos derniers textes. En proie au découragement, je propose à mon journaliste le plus polyvalent, Étienne, d’écrire l’édito. Lequel, pour le plaisir et en hommage à ce numéro special anim’, accepte, mais à une condition : l’édito sera dessiné, ou ne sera pas. Quelques heures plus tard, ses bulles sont dans la boîte… Pas encore du niveau de Pixar, certes, mais, comme le dit la licorne de Toy Story 3 : « On fait beaucoup d’impro, ici ». _A.T.


Š Disney / Pixar

8 SCèNE CULTE /// TOY STORY

LOvE STORY LE PITCH Sitôt que leurs propriÊtaires ont le dos tournÊ, les jouets prennent vie. Une existence pas forcÊment aisÊe tant la peur d’être perdus, cassÊs ou remplacÊs est prÊgnante chez ces petits objets. Alors, comme pour se rassurer, ils se rÊunissent et discutent du meilleur moyen de faire face à un futur incertain.

“

REX : Aujourd’hui ? C’est la semaine prochaine ! BAYONNE : Sa mère a la tirelire fĂŞlĂŠe ? WOODY : Elle a voulu fĂŞter ça avant le dĂŠmĂŠnagement. Ça ne m’inquiète pas ! M. PATATE : Tu parles ! Woody est le chouchou d’Andy depuis la maternelle.

WOODY : Tout le monde m’entend ? vous m’entendez, là -haut ? Premier point à l’ordre du jour. Tout le monde a un compagnon de route ?

ZIGZAG : ArrĂŞte, Patate ! Si Woody dit que ça va, ça me va. Il n’a jamais fait fausse route.

BAYONNE : Un compagnon de route ? Tu plaisantes ?

WOODY : À chaque NoÍl, à chaque anniversaire, vous recommencez !

REX : On doit dĂŠjĂ en avoir un ? M. PATATE : Faut se donner la main ? [Il arrache la sienne de son corps et la brandit] WOODY : vous trouvez ça drĂ´le ? On dĂŠmĂŠnage dans une semaine. Personne ne doit manquer Ă l’appel. Un compagnon de route ! Trouvez-en un ! Bon, ensuite‌ La rĂŠunion de mardi sur la corrosion du plastique fut, Ă mon avis, un grand succès. M. Alphabet a mis les points sur les i. Il reste un point de dĂŠtail. [Il chuchote] C’est aujourd’hui l’anniversaire d’Andy. [Panique dans l’assemblĂŠe]

REX : S’ils lui offrent un nouveau dinosaure ? Un mĂŠchant ? Je ne supporterais pas l’exil ! WOODY : Personne ne sera remplacĂŠ. vous connaissez Andy ! Peu importe qui est son jouet prĂŠfĂŠrĂŠ. L’important, c’est d’être Ă sa disposition. On est faits pour ça, non ? BAYONNE : DĂŠsolĂŠ de t’interrompre, mais ils sont lĂ ! InvitĂŠs Ă 3 heures ! WOODY : Restez calme ! [Les jouets se prĂŠcipitent vers la fenĂŞtre] La sĂŠance est levĂŠe.

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Un film de John Lasseter // ScÊnario de John Lasseter, Andrew Stanton, Peter Docter et Joe Ranft // États-Unis, 1995, 1h22 DVD disponible aux Éditions Disney DVD

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10 L’œIL DE‌ BARTABAS

CA M É R A ÉQUINE BARTABAS, c’est ĂŠvidemment l’Êcuyer du mythique cirque Zingaro. C’est aussi un rĂŠalisateur passionnĂŠ qui, dans le film Galop arrière, livre sa relecture d’une aventure de vingt-cinq ans. Un autoportrait pudique dissimulĂŠ sous des images d’archives et des poèmes. Rencontre. _Propos recueillis pas Ăˆve Beauvallet

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u’est-ce qui a motivĂŠ le projet Galop arrière ? Il y a quelque temps, j’ai visionnĂŠ un de mes anciens films, et je me suis surpris Ă pouvoir le regarder comme n’importe quel spectateur l’aurait fait. Le pari ĂŠtait de rĂŠaliser un objet poĂŠtique Ă part entière, aussi surprenant qu’un spectacle de Zingaro. Surtout pas un documentaire. L’histoire de ce film, c’est la façon dont je regarde, Ă distance, ces images filmĂŠes tout au long du parcours de Zingaro. C’est comme un spectacle idĂŠal, un voyage intĂŠrieur oĂš l’on observe l’Êvolution d’une relation entre homme et cheval.

Galop arrière Un film de Bartabas France, 2010, 1h27 Projection (et concert de Le RÊtif) au ThÊâtre Êquestre Zingaro, du 29 juillet au 7 aoÝt, dans le cadre du festival Paris Quartier d'EtÊ. RÊservations : www.quartierdete.com et www.zingaro.fr

Que diriez-vous de l’Êvolution de votre travail de metteur en scène ? Ă€ 20 ans, on est souvent plus dĂŠmonstratif. Je vais davantage vers l’Êpure aujourd’hui. Ce n’est pas gratuit que le public disparaisse progressivement de Galop arrière. C’est somme toute cohĂŠrent avec l’Êvolution de la façon dont j’ai filmĂŠ mes propres spectacles. J’ai fini par virer les spectateurs des films et rĂŠĂŠcrire le spectacle pour la camĂŠra. Eclipse (1997) en est l’exemple. Pourquoi avoir tenu Ă filmer vous-mĂŞme vos spectacles ? Le fait d’être auteur et du spectacle et du film permet, je crois, de trouver la meilleure traduction d’une idĂŠe. C’est devenu fondamental pour moi d’être l’auteur de ces films. Et ça, c’est le producteur Marin Karmitz qui m’en a convaincu. Travailler le spectacle vivant, pour moi, c’Êtait travailler dans l’instant et pas pour la postĂŠritÊ‌ Marin voulait qu’il y ait des traces. Je m’y suis finalement attelĂŠ, car le destin ĂŠphĂŠmère de tout spectacle vaut encore plus pour Zingaro, dans la mesure oĂš nous n’avons pas de rĂŠpertoire. Faut-il connaĂŽtre les chevaux pour savoir les filmer ? C’est en tout cas ce que j’ai compris sur Mazeppa (1993). Comment adapter la grammaire cinĂŠmatographique aux chevaux ? Que signifie le plan rapprochĂŠ avec un cheval ? Pour un humain, tu choisis la zone la plus expressive, tu cadres le visage. Le cheval, lui, s’exprime avec les yeux et les oreilles‌

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Š C. Weiner

L’œIL DE‌ BARTABAS 11

Une ĂŠcuyère de l’AcadĂŠmie du spectacle ĂŠquestre de Bartabas

De quelle façon votre expĂŠrience de rĂŠalisateur a-t-elle nourri vos spectacles ? Mon long mĂŠtrage Chamane (1996) a ĂŠnormĂŠment influencĂŠ mon spectacle Eclipse, par exemple. Chamane ĂŠtait une aventure incroyable. Je ne connaissais que peu de choses techniques en cinĂŠma. Marin m’a accompagnĂŠ en me disant:ÂŤTant que tu sais ce que tu veux dire‌ Rien ne se passait comme prĂŠvu, et on ĂŠtait dans la toundra, avec des milliers de kilomètres de vide. Les meilleures scènes du film

aussi Ă un plan magnifique oĂš un cheval se roule sous la pluie dans AndreĂŻ Roublev de Tarkovski, un rĂŠalisateur très important pour moi. Dans un autre genre, il y a cette scène cĂŠlèbre de Lawrence d’Arabie qui, dans sa version intĂŠgrale, doit durer plus de deux minutes, oĂš un cheval arrive au galop de très loin dans le plan. Et puis il y a Kurosawa, ce cheval blanc qui reprĂŠsente la mort et dĂŠbarque au milieu des samouraĂŻs‌ J’avais envie de faire un film tissĂŠ par toutes les sĂŠquences de l’histoire du cinĂŠma qui

ÂŤ LE PARI ÉTAIT DE FAIRE UN OBJET POÉTIQUE AUSSI SURPRENANT QU’UN SPECTACLE DE ZINgARO. Âť viennent des contraintes ĂŠnormes que l’on a rencontrĂŠes, comme ce dĂŠcor, trouvĂŠ seulement deux jours avant : un paquebot, pris dans les glaces, qui n’avait jamais ĂŠtĂŠ terminÊ‌ Dans l’histoire du cinĂŠma, quels plans sur les chevaux ont pu irriguer votre travail ? J’aime les westerns, et Budd Boetticher est un de ceux qui a su incorporer les chevaux au rĂŠcit‌ Parce que, sinon, ça fait toujours rigoler quand tu connais un peu les chevaux et que tu vois le mec qui monte sur son cheval, qui crie ÂŤ Ya ! Âť et qui part au grand galop ! C’est comme si t’Êtais dans une voiture et que tu dĂŠmarrais tout de suite en cinquième‌ D’ailleurs, c’est drĂ´le, quelqu’un qui est allĂŠ chez Boetticher m’a dit qu’il avait une affiche de Cabaret ĂŠquestre (1984) accrochĂŠe au mur. Je pense

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ont pu me marquer. Au niveau des droits, malheureusement, c’Êtait trop compliquĂŠ. Et, de manière plus gĂŠnĂŠrale, quels films soustendent votre travail ? Le cinĂŠma est une très grande source d’inspiration. J’ai pris conscience de ramifications qui ĂŠtaient jusqu’alors restĂŠes inconscientes. J’ai vu MĂŠdĂŠe de Pasolini Ă 17 ans, et, lorsque je l’ai revu il y a peu, j’ai rĂŠalisĂŠ Ă quel point l’utilisation extraordinaire qu’il fait des musiques m’avait construit, par exemple. Ce sont ces types de redĂŠcouvertes que racontent aussi Galop arrière.

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12 PREVIEW


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SUBMARINO Douze ans après Festen, Thomas vinterberg s’attaque de nouveau Ă un drame familial, mais dĂŠlaisse la bourgeoisie et l’implicite. Deux frères abandonnĂŠs par une mère alcoolique tombent Ă leur tour dans l’alcool et la drogue. Les bas-fonds, le dĂŠterminisme social, une filiation pesante : on se croirait dans un roman de Zola, transposĂŠ dans le Danemark d’aujourd’hui. Mais, chez vinterberg, l’hĂŠrĂŠditĂŠ excuse en mĂŞme temps qu’elle explique, dĂŠvoilant les faiblesses de personnages profondĂŠment humains : les hommes violents sont des hommes souffrants et aimants. Et leur amour se concentre autour du personnage de l’enfant, ĂŞtre pur et fragile, bouĂŠe d’espoir de ce beau film Ă la tristesse abyssale. _A.L. Un film de Thomas Vinterberg // Avec Jakob Cedergren, Peter Plaugborg‌ // Distribution : MK2 Diffusion // Danemark-Suède, 2010, 1h45 // Sortie le 1er septembre



LES

NEWS

SECOUEZ, AGITEZ, SAVOUREZ : L’ACTU CINÉ, CULTURE, TECHNO FRAÎCHEMENT PRESSÉE

CLOSE-UP Impressionnant en ado enragĂŠ dans Dog Pound de Kim Chapiron, le Canadien ADAM BUTCHER fait ses classes au rang des mauvais garçons. Mis sur les rails par une tante agent de comĂŠdiens, Adam se fait remarquer en 2004 pour sa prestation de gamin chĂŠtif dans la comĂŠdie dramatique Ralph : il a tout juste 14 ans et dĂŠjĂ ce drĂ´le de visage creusĂŠ, menton belliqueux et regard cernĂŠ. Kim Chapiron, rĂŠalisateur de Dog Pound, confie d’ailleurs avoir choisi son acteur principal pour ÂŤ cette folie dans ses yeux Âť. Dans le film, le corps du jeune acteur de 21 ans abrite tous les dĂŠmons de l’AmĂŠrique white trash : poings serrĂŠs, yeux injectĂŠs de sang, Butch est une tĂŞte brĂťlĂŠe consumĂŠe par des accès de rage, un sale gosse enfermĂŠ dans un sinistre centre de dĂŠtention pour mineurs‌ Une bombe Ă retardement. Dans la vraie vie, quand Adam pète les plombs, cela donne un tournage suspendu Ă deux reprises pour cause de sĂŠjour en prison. Remarquable talent pour se glisser dans la peau de son personnage ou vrai caractère de chien ? Peu importe, la morsure de son talent est bien rĂŠelle. _J.R.


16 NEWS /// POLÉMIQUE

K

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IL Y A CEUX QU’IL ÉNERVE ET CEUX QUI LE VÉNèRENT

ChAIR&CANON BalisÊ, presque normalisÊ, le cinÊma pornographique se voit dÊfiÊ sur son propre terrain par la collection des douze courts mÊtrages suÊdois de Dirty Diaries. Ces derniers parviennent-ils à faire de l’art ET du cochon ? _Par LÊo Soesanto

LA QUESTION

LA RÉPONSE

ÂŤRepenser la pornographieÂť, tel est l’ambitieux slogan de Dirty Diaries. Avec cette collection, une dizaine de cinĂŠastes suĂŠdoises s’imposent la tâche draconienne de changer notre regard sur le X Ă une ĂŠpoque oĂš il s’est pratiquement normalisĂŠ – nonobstant la traditionnelle interdiction aux moins de 18 ans. Porno chic ou chirurgical, l’imagerie s’est propagĂŠe dans la publicitĂŠ, la mode (les mannequins de Dolce & gabbana, la starlette X Charlotte Stokely posant pour American Apparel) et les films d’auteur (Larry Clark, vincent gallo, l’actrice X Sasha grey, hĂŠroĂŻne du Girlfriend Experience de Steven Soderbergh). Depuis quelques annĂŠes, le X se heurte d’ailleurs aux mĂŞmes problèmes que le cinĂŠma dit traditionnel : la gratuitĂŠ des contenus sur Internet, la haute dĂŠfinition ou mĂŞme la 3D, annoncĂŠe en grande pompe par Marc Dorcel Ă Cannes. Dans ce cadre, y a-t-il encore une place alors pour un porno alternatif ?

Oui. Les douze sketches de Dirty Diaries (en partie financĂŠs par le très sĂŠrieux Institut du film suĂŠdois !) amènent dans les salles cet ÂŤ alt porn Âť revendiquĂŠ par l’underground. FĂŠministe ou queer, il modifie et subvertit les canons en vigueur. Le sexe ÂŤ habillĂŠ Âť de Skin ou les gros plans de Red Like Cherry confinent Ă l’abstraction visuelle. L’animĂŠ Dildoman et le narquois Body Contact jouent avec les peurs masculines. Mais on est avant tout marquĂŠ par la libertĂŠ qui se dĂŠploie au long de ces films, rĂŠsumĂŠe par l’audacieux Flasher Girl on Tour, qui suit une exhibitionniste en expĂŠdition Ă Paris. FilmĂŠs avec un tĂŠlĂŠphone portable, ces Dirty Diaries font du porno lo-fi Ă l’instar de la musique de certains rockers : certes crue, avec des aspĂŠritĂŠs mais surtout de l’Ênergie. Ils montrent que la pornographie est affaire de regard. DĂŠcalĂŠ comme ici, il voit vĂŠritablement les corps jouir sans entraves.

Un film collectif de Mia Engberg, Elin Magnusson, Sara Kaaman‌ // Distribution : KMBO // Suède, 2009, 1h38 // Sortie le 30 juin

LA RÉPLIQUE

 TOUT EST SUSPECT SAUF TON CORPS, TON ÉLÉGANCE ET TON STYLE.  (TOURNÉE, EN SALLES LE 30 JUIN)

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18 NEWS /// KLAP ! /// ZOOM SUR UN TOURNAGE

Des tournĂŠes aux tournages, du piano aux ĂŠchecs, il ne manquait que quelques cases sur le parcours de GONZALES pour ajouter l’atout ÂŤ acteur Âť Ă son parfait jeu de scène. Preview. _Par Wilfried Paris

vec Ivory Tower, le compositeur (sept albums), producteur (pour Katerine, Feist, Jane Birkin‌) et recordman du plus long concert jamais donnĂŠ (plus de vingt-sept heures) devient scĂŠnariste et acteur. CoĂŠcrite avec CĂŠline Sciamma, rĂŠalisatrice du remarquĂŠ Naissance des pieuvres, et mise en scène par Adam Traynor (Puppetmastaz), cette ÂŤ comĂŠdie existentialiste Ă propos du succès et des ĂŠchecs Âť file la mĂŠtaphore ludique et compĂŠtitive d’une partie du dit jeu. Les joueurs ? L’esthète hershall (gonzales), inventeur du ÂŤ jazz chess Âť – littĂŠ-

A

ralement, ÂŤ jazz d’Êchecs Âť, qui mĂŞle improvisation et beautĂŠ du geste –, contre son frère l’arrogant Thaddeus, champion du Canada, jouĂŠ par le DJ et producteur Tiga. L’enjeu est ĂŠvidemment une reine, Marsha (la chanteuse performeuse Peaches). ÂŤ Je joue le rĂ´le de mon pire ennemi d’aujourd’hui, un artiste dans sa tour d’ivoire, naĂŻf, puriste, dont le film dĂŠtruit les arguments. C’est un film sur les ĂŠchecs qui parle aussi de la musique, de l’entertainment contre l’art, du respect pour la maĂŽtrise des techniques et pour le public. Finalement, c’est toujours le public qui est le roi Âť, rĂŠsume gonzales. Ces ĂŠchecs filmĂŠs comme un sport de combat (scènes d’entraĂŽnements Ă la Rocky) dans une saga familiale bergmanienne (ou allenienne, faites vos jeux) seront bien sĂťr mis en musique par‌ gonzales. Bien jouĂŠ. Sortie du film prĂŠvue Ă l’automne, B.O. disponible fin aoĂťt.

Š D.R.

AIR DE JEU _Par P.R.-W.

INDISCRETS DE TOURNAGE 1.Tahar Rahim retrouvera Émilie Dequenne et GĂŠrard Depardieu dans le nouveau projet de Joachim Lafosse. Il contera l’histoire de Geneviève Lhermitte, qui avait tuĂŠ ses cinq enfants avant de tenter de se donner la mort en fĂŠvrier 2007. Tournage prĂŠvu en janvier 2011. 2. Après s’être intĂŠressĂŠ Ă Idi Amin Dada en 1974, Barbet Schroeder continue son tour d’horizon des dictateurs africains. Ici, il se concentrera sur le dictateur centrafricain Jean Edel Bokassa. Le long mĂŠtrage sera aussi diffusĂŠ en tant que sĂŠrie sur Canal +. 3. Guillaume Canet va s’associer Ă James Gray pour ĂŠcrire Rivals, adaptation du polar Les Liens du sang, dans lequel l’acteur français jouait dĂŠjĂ en 2008 sous la direction de Jacques Maillot. Il narrera la rivalitĂŠ entre deux frères, l’un policier, l’autre gangster.

LA TECHNIQUE

Š Gaumont

LE REGARD DU MONSTRE En film de monstres qui se respecte, Splice doit beaucoup Ă ses effets spĂŠciaux. Merci le numĂŠrique. Cette technologie a notamment permis d’obtenir un effet des plus subtils, quoique très efficace : afin de prĂŠserver l’intĂŠgritĂŠ du personnage de Dren (crĂŠature jouĂŠe adulte par Delphine ChanĂŠac et enfant par Abigail Chu), le cinĂŠaste a remplacĂŠ la moitiĂŠ supĂŠrieure du crâne de cette dernière par une image de synthèse, dont l’animation ĂŠtait assurĂŠe par l’actrice française via la technique de la capture de mouvements. grâce Ă ce savant jeu de collage, le jeu de Dren est totalement raccord, que le personnage soit incarnĂŠ par une fillette ou une jeune femme. _Julien Dupuy // Splice de Vincenzo Natali, sortie le 30 juin

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Š Orange CinÊma SÊries

20 NEWS /// TÉLÉCOMMANDO

CONTRE-VOIX Glee, le phĂŠnomène tĂŠlĂŠ de l’annĂŠe, dĂŠbarque en France. Pour les adorateurs de Madonna et de comĂŠdie sociale grinçante‌ _Par Olivier Joyard

omment la sĂŠrie la plus folle du moment, ode aux losers et minoritĂŠs en tout genre, est-elle devenue l’une des plus populaires aux États-Unis ? Le miracle Glee n’en finit pas de faire tourner les tĂŞtes depuis son apparition en septembre 2009 sur Fox, diffuseur d’American Idol, la Nouvelle Star locale. La prĂŠcision n’est pas innocente car la sĂŠrie conte les aventures d’une chorale de lycĂŠe en passe de faire la nique aux pom-pom girls et autres sportifs bodybuildĂŠs, contre la logique sociale dominante. L’aboutissement d’un long parcours dans la fiction U.S. La Revanche des nerds ĂŠtait le titre d’un film ado des annĂŠes 1980. Durant les annĂŠes 2000, les comĂŠdies dĂŠlicates de Judd Apatow Ă la gloire des inadaptĂŠs ont forcĂŠ la voie. CrĂŠĂŠe par Ryan Murphy (Nip/Tuck), Glee rĂŠcolte la mise. La sĂŠrie mĂŠlange un esprit de comĂŠdie satirique fĂŠroce avec des numĂŠros musicaux rĂŠconciliateurs. La majoritĂŠ des tubes des trente dernières annĂŠes y passe, ce qui rend l’ensemble immĂŠdiatement addictif pour les ex-fans du Top 50 – on conseille notamment l’Êpisode 15, The Power of Madonna. Et, pour ceux que le karaokĂŠ gĂŠant n’intĂŠresse pas, il reste une excellente raison de regarder Glee : l’actrice Jane Lynch y trouve un rĂ´le Ă la hauteur de son immense talent comique, en prof de gym langue de vipère. Aperçue dans L Word ou 40 ans toujours puceau, elle ĂŠtait le secret le mieux gardĂŠ d’hollywood.

C

BUZZ TV

_Par P.R.-W.

1. ÂŤI’ll be back.Âť Non, ce n’est pas Arnold Schwarzenegger, mais sa cible favorite Sarah Connor (Linda Hamilton dans le monde rĂŠel) qui donnera la rĂŠplique Ă Nancy Botwin dans la sixième saison de Weeds, qui dĂŠbutera le 16 aoĂťt aux États-Unis sur Showtime. 2. Oprah Winfrey, la reine du talk-show U.S., se met Ă la production de sĂŠries. La prĂŠsentatrice a lancĂŠ un projet de biopic en sept ĂŠpisodes sur HBO. Il tournera autour de la vie et du combat pour l’abolition de la sĂŠgrĂŠgation du rĂŠvĂŠrend Martin Luther King. 3. Il ĂŠtait temps‌ Heroes, la crĂŠation de Tim Kring, n’a pas ĂŠtĂŠ renouvelĂŠe par NBC. Le showrunner espère malgrĂŠ tout que la chaĂŽne lui offrira l’opportunitĂŠ de boucler la boucle, puisqu’il souhaiterait prĂŠparer un tĂŠlĂŠfilm ou une mini-sĂŠrie pour clore le show.

Glee, diffusĂŠ Ă partir de juin sur Orange CinĂŠma SĂŠries.

LE CAMÉO

Š Orange CinÊma SÊries

ART GARFUNKEL DANS FLIGHT OF THE CONCHORDS Quand, Ă l’Êpisode 7 de la saison 2, les hĂŠros de Flight of the Conchords (sĂŠrie musicale et potache du duo nĂŠo-zĂŠlandais Jemaine Clement et Bret McKenzie, dans leurs propres rĂ´les) acceptent d’apparaĂŽtre en tant que sosies de Simon & garfunkel dans un bar, une jeune femme s’Êprend de Jemaine. BientĂ´t, elle l’oblige Ă garder sa perruque Art garfunkel pour faire l’amour. Mais, un matin,le vrai Art garfunkel dĂŠbarque chez elle et la reprend au nez et Ă la crinière frisĂŠe de Jemaine : ils ĂŠtaient amants. Dans un monde squattĂŠ par les imitations, l’apparition imprĂŠvue d’un original ĂŠmeut automatiquement. _O.J. Flight of the Conchords saison 2, diffusĂŠ en juin sur Orange CinĂŠma SĂŠries.

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Š Keystone France / Keystone/ Eyedea / France

22 NEWS /// EVENT

ORPhÉE HOME La demeure de JEAN COCTEAU Ă Milly-la-ForĂŞt s’ouvre au public le 24 juin et rĂŠvèle, par murs interposĂŠs, un cinĂŠaste qui a fait de sa vie un chef-d’œuvre. _Par ClĂŠmentine Gallot

es maisons d’artistes ont cela de commun avec leurs habitants qu’elles en absorbent certaines qualitĂŠs et en retiennent, parfois, l’esprit. Le pèlerinage fĂŠtichiste sur ces lieux donne Ă voir ce qui, par imprĂŠgnation, subsiste de l’âme avec le passage du temps. Acquise en 1947 avec son amant fidèle, Jean Marais, la maison de Jean Cocteau est de ces espaces habitĂŠs : Ă l’Êcart de Paris, elle se tient dans une petite ville de l’Essonne, entourĂŠe de jardins, Ă l’orĂŠe d’un château et de ses douves. Cocteau y vivra jusqu’à sa mort en 1963 avec le jeune Edouard ÂŤ Doudou Âť Dermit, qui conservera la demeure avant sa restauration par la fondation Pierre BergĂŠ. ObsĂŠdĂŠ par le rapport entre rĂŠel et imaginaire, Cocteau avait fait poser du papier peint en imprimĂŠ lĂŠopard et disposĂŠ son lit rose Ă baldaquin en diagonale : ÂŤ La maison est un collage, elle est organisĂŠe comme une Ĺ“uvre d’art Âť, explique le musĂŠographe Dominique PaĂŻni. Se croisent entre ces murs Proust, Picasso, Duchamp ou encore Warhol. Des chambres restaurĂŠes, une galerie d’exposition et une salle de projection rĂŠvèlent l’association virtuose des disciplines pratiquĂŠes par Cocteau, ĂŠcrivain, critique, dessinateur, cinĂŠaste. Un miracle de conservation quand on sait que l’auteur d’OrphĂŠe jetait sans scrupules tous ses dessins‌

L

Maison Jean Cocteau, 15 rue du Lau, 91490 Milly-la-ForĂŞt. Du mercredi au dimanche, 10h-19h. www.jeancocteau.net

RENDEZ-VOUS

_Par J.R.

1. Documentaires, voyages oniriques ou expĂŠrimentations techniques, zoom sur un mode d’expression libĂŠrĂŠ des contraintes et de la censure : ce festival rassemble plus de soixante vidĂŠos entièrement rĂŠalisĂŠes sur tĂŠlĂŠphone mobile. Festival Pocket Films, du 18 au 20 juin au Forum des images

2. Un festival convivial et cinÊphile, sans compÊtition ni tapis rouge mais avec, pêle-mêle, des rÊtrospectives Greta Garbo, Elia Kazan et Éric Rohmer, un focus sur le nouveau cinÊma indien, des rencontres et des hommages‌ Festival international du film de La Rochelle, du 2 au 11 juillet à La Rochelle

3. Contemporain du nÊorÊalisme italien, le cinÊma de Riccardo Freda rÊunit lÊgendes mythologiques, dÊcors grandioses et envolÊes lyriques, du pÊplum (Spartacus) au film fantastique (Les Vampires)... Rare et savoureux. RÊtrospective Riccardo Freda, du 30 juin au 1er aoÝt à la CinÊmathèque française

L’EXPO CINÉ FIL

Š D.R.

Marlene Dietrich, Lana Turner, Kim Novak‌ Les plus grandes vedettes des annĂŠes 1940 et 1950 sont passĂŠes entre les doigts agiles de la couturière italienne Fernanda gattinoni. Le temps d’une exposition, entre photographies et extraits de films, on admire les robes portĂŠes par Audrey hepburn dans Guerre et paix ou par Ingrid Bergman dans Europe 51 – en tout, vingt costumes sont exposĂŠs. Ou comment tisser de gracieuses correspondances entre mode et cinĂŠma‌ _J.R. Mode et ĂŠtoiles au temps d’Hollywood sur le Tibre, du 15 juin au 30 juillet Ă l’Institut culturel italien de Paris

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24 NEWS /// CARTE BLANCHE

BIGBAND Cocktail explosif de soul, de funk et de rock, le premier album de PUSH UP, The Grand Day of Quincy Brown, fait rimer ambiances urbaines et rÊfÊrences cinÊphiles. En juillet, les huit membres du groupe investissent le MK2 Quai de Seine pour une carte blanche autour des films de la blaxploitation‌ Rencontre avec trois d’entre eux : le flÝtiste JÎ DrÝ, la chanteuse Sandra NkakÊ et le vocaliste Karl the Voice. _Propos recueillis par Juliette Reitzer

C Carte blanche au MK2 Quai de Seine les lundis 19 et 26 juillet en soirĂŠe et les 17, 18, 23 et 24 juillet en matinĂŠe. Toute la programmation sur www.mk2.com

omment le groupe Push Up est-il nĂŠ ? JĂŽ DrĂť : On se connaĂŽt tous depuis longtemps, chacun travaille sur les projets des autres‌ L’impulsion de faire de la musique ensemble a toujours ĂŠtĂŠ lĂ . Push Up nous a permis de concrĂŠtiser toutes ces petites histoires d’amitiĂŠ. On a commencĂŠ par travailler en studio puis, très vite, on a eu envie de l’Ênergie de la scène.

Qui est Quincy Brown, le hĂŠros de votre premier album ? Sandra NkakĂŠ : C’est un voisin, on habite le mĂŞme quartier. Il cristallise bien les problĂŠmatiques quotidiennes des gens de notre âge, entre 30 et 40 ans. On raconte une journĂŠe de Quincy, un moment clĂŠ de sa vie oĂš il se pose plein de questions : comment ĂŠlever ses enfants, le choix de son travail, de ses amis‌ C’est un peu l’histoire de chacun des membres du groupe. JĂŽ DrĂť : C’est quelqu’un de simple, qui ĂŠvolue en vase clos, dans son quartier, et qui croise un certain nombre de personnages hauts en couleur. Un type de ceux qu’on croise dans la rue, en bas d’un immeuble, qui connaissent tout le monde et peuvent vous aiguiller sur les bons et les mauvais plans du quartier‌ La dimension narrative est au cĹ“ur de l’album‌ Sandra NkakĂŠ : On s’est tous intĂŠressĂŠs Ă cet aspect narratif dans nos carrières solo. Ce qui nous plaĂŽt dans le cheminement artistique, c’est vraiment de raconter quelque chose. JĂŽ DrĂť : PlutĂ´t que de coller des chansons les unes Ă cĂ´tĂŠ des autres, on a choisi de bâtir un ensemble cohĂŠrent qui raconterait une histoire, en plusieurs parties, avec un dĂŠbut et une fin. Dans la construction mĂŞme du disque et du spectacle, on est très proches du cinĂŠma dans le sens oĂš on a repris certains dispositifs qui lui sont propres : un narrateur, une voix off, des sons de rue‌ L’album pourrait ĂŞtre la B.O. d’un film, particulièrement d’un film musical puisque l’on opère des ĂŠchappĂŠes vers le rock, le hip-hop...

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Š Gil

CARTE BLANCHE /// NEWS 25

Comment exprimez-vous cet univers en concert ? JĂŽ DrĂť : Sur scène, on essaie d’incarner les personnages de manière expressive, mais on n’est pas du tout dans quelque chose qui ressemblerait Ă une comĂŠdie musicale. Notre cĂ´tĂŠ cinĂŠmatographique tire davantage vers le film noir ou le cinĂŠma social, ancrĂŠ dans la rĂŠalitĂŠ. Sandra NkakĂŠ : Il y a des moments oĂš l’on incarne chacun Quincy Brown, d’autres oĂš l’on pose un regard sur lui. Comme au dĂŠbut d’un film, le dĂŠbut

consacrĂŠ Ă la blaxploitation. Qu’est-ce que votre musique a en commun avec l’univers de ces films ? Karl The Voice : Sandra et moi avons travaillĂŠ sur un spectacle avec le pape de la blaxploitation, Melvin van Peebles. On mĂŠlangeait des ĂŠlĂŠments de son cinĂŠma, de son film Sweet Sweetback’s Baadasssss Song, avec des atmosphères plus parisiennes, comme par exemple la chanson Nini peau d’chien d’Aristide Bruant‌ Notre univers est le plus diversifiĂŠ et ouvert possible.

ÂŤ DANS LA CONSTRUCTION DU DISQUE ET DU SPECTACLE, ON A REPRIS CERTAINS DISPOSITIFS PROPRES AU CINÉMA : vOIX OFF, SONS DE RUE‌ Âť du spectacle nous permet d’installer l’ambiance, le dĂŠcor, la situation. Il n’y a pas d’artifice scĂŠnographique. La scène, c’est notre vie : on le fait très sĂŠrieusement, mais sans se prendre au sĂŠrieux. Votre musique est très mĂŠtissĂŠe et mĂŞle tous types de couleurs, de sonoritĂŠs‌ Quelles sont les influences de chacun d’entre vous? JĂŽ DrĂť : The Specials, John Coltrane, Nina Simone... Sandra NkakĂŠ : Parliament, Funkadelic, Bob Dylan... Karl The Voice : Sex Pistols, BĂŠla BartĂłk‌

JĂŽ DrĂť : Ces films sont très ancrĂŠs dans le paysage urbain et c’est vraiment le cas de The Grand Day of Quincy Brown. Notre message est proche de celui de la blaxploitation : un message d’espoir, de paix et de foi dans le collectif. Le cycle ira de Shaft, les nuits rouges de Harlem de gordon Parks Ă Do the Right Thing de Spike Lee‌ Il y aura six films au total, et les projections du lundi soir se termineront par un petit concert et ĂŠventuellement un dĂŠbat sur le film. On est tous passionnĂŠs de cinĂŠma‌ La diffĂŠrence, c’est que moi j’aime les bons films, eux les mauvais !

Le MK2 Quai de Seine vous offre une carte blanche. Vous avez choisi de programmer un cycle

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Š Damien Cuillery

26 NEWS /// UNDERGROUND

LARgUÉS Voix doucereuses, claviers vintage, banjos millÊsimÊs: sur son excellent premier album, Bye Bye Cellphone, le trio parisien 1973 fait l’Êloge des anachronismes, et capte l’air du temps comme personne. _Par AurÊliano Tonet

1973

est un trio, mais, ce jour-lĂ , seuls Nicolas (chant, paroles) et Thibaut (guitares, etc.) sont prĂŠsents. Le troisième larron, JĂŠrĂ´me (claviers, etc.), est on ne sait oĂš, et cette absence, mine de rien, dit beaucoup du groupe parisien : jamais tout Ă fait lĂ , un peu ailleurs, Ă cĂ´tĂŠ. ÂŤ Au lycĂŠe, on ĂŠtait très geeks. On a formĂŠ un groupe pour devenir “inâ€?, mais ça nous a encore plus ĂŠloignĂŠs des autres ados, en fait. Âť De mĂŞme, le nom du trio se lit moins comme un hommage aux seventies que comme une dĂŠclaration de perte (et profits) : ÂŤ On ĂŠtait très attachĂŠs Ă 1973, une chanson que l’on n’arrivait pas Ă finir. Pour se consoler de la jeter aux orties, on a gardĂŠ son titre comme nom de groupe. Âť Après un EP remarquĂŠ, et quelques saisons de gamberge, 1973 sort enfin son premier album, Bye Bye Cellphone : ÂŤ Un jour, j’ai perdu mon portable, et tout ce qu’il contenait, se souvient Nicolas. Cet acte rĂŠsume bien le propos de l’album : un au revoir Ă des filles, des musiques et des moments qui ont comptĂŠ pour nous. Âť Faussement passĂŠistes (ils citent Mingus, Prince, Joni Mitchell), rĂŠsolument pop et anglophones (ils sont proches de Syd Matters, Camille, Phoenix ou Nouvelle vague), les 1973 troussent la bande-son parfaite de l’Êpoque : larguĂŠe, comme eux. Bye Bye Cellphone de 1973 (Blonde Music / Sony Music)

COPIER COLLER

_Par P.R.-W.

>> Avec The ArchAndroid, Janelle MonaĂŠ, protĂŠgĂŠe de P.Diddy et nouvelle figure de proue de la scène R’n’B, signe un excellent concept album, aussi funky que cĂŠrĂŠbral.

>> Autre forte tête rÊtrofuturiste, Erykah Badu publie New Amerykah Part Two. Ici, c’est l’arbre de la crÊation qui s’extraie tout droit du cerveau de l’ÊgÊrie nu-soul.

LE MYSPACE CHARTS DE LA RÉDACTION _Par A.T. BERTRAND BELIN – Hypernuit www.myspace.com/bertrandbelin Hypernuit, dit le premier extrait du très attendu nouvel album du mĂŠnestrel parisien : ses infrasons (chant rentrĂŠ, assonances discrètes) sont hyper classes. FOLKS – 1,2,3 www.myspace.com/folksrock 1,2,3, soleil noir : c’est bien l’astre d’une douce mĂŠlancolie qui ĂŠclaire les folksongs dudit Folks, cousin français le plus crĂŠdible d’Elliott Smith. Singulier. JOHN GRANT – Marz www.myspace.com/johnwilliamgrant Ex-leader des regrettĂŠs Czars, aujourd’hui accompagnĂŠ des tout aussi dĂŠlicats Midlake, ce beau crooner blessĂŠ ajoute des “zâ€? Ă tous les mots. Merzi Ă lui.

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Š Trollfilm.A.S.

28 NEWS /// BUZZ’ART

TEL PĂˆRE Sur le manège ronronnant des courts mĂŠtrages du Festival d’Annecy, Sinna Mann nous a dĂŠsarçonnĂŠs. Une remuante mise en image de la violence domestique dans ce qu’elle a de plus indicible. Des impairs du père‌

ARTY TECH

_Par Étienne .Rouillon

ans la litanie annĂŠcienne des ÂŤ Il ĂŠtait une fois Âť, leitmotiv tenu de Shrek 4 Ă KĂŠrity, la maison des contes, la rĂŠalisatrice norvĂŠgienne Anita Killi hurle un ÂŤ Il est de trop nombreuses fois Âť pour dĂŠchirer le silence des enfants battus. C’est l’histoire d’un père fouettard, mais pour de vrai, de ceux qui cognent. L’artiste, rĂŠcompensĂŠe du prix spĂŠcial du jury, prix du public et prix de l’Unicef, a deux marottes : C’est l’histoire d’un père raconter des histoires fouettard, mais pour de vrai. pour enfants et profiter des propriĂŠtĂŠs ĂŠvocatrices de l’animation pour faire passer des messages. Reçu cinq sur cinq par des yeux mouillĂŠs et rĂŠpĂŠtĂŠ par des gorges nouĂŠes Ă la sortie de la projection. Les techniques du collage et de la camĂŠra multi-plans sont magistralement employĂŠes pour figurer les angoisses hallucinĂŠes Ă hauteur de Boj, gamin aux yeux noirs de peur, dĂŠpassĂŠ par une figure paternelle Ă la fois rĂŠvĂŠrĂŠe et redoutĂŠe. Perspectives cassĂŠes, membres dĂŠsarticulĂŠs, la rĂŠalisation dĂŠfend un propos dont on pourrait dire qu’il frise parfois la naĂŻvetĂŠ. Ce serait oublier l’indĂŠniable vertu pĂŠdagogique de Sinna Mann. www.trollfilm.no

Š D.R.

D

>> FAIRE LA PLANCHE DĂŠtour vers le futur pour l’artiste français Nils Guadagnin avec sa rĂŠplique du mythique Hoverboard, la planche Ă roulettes sans roulettes qui faisait lĂŠviter Marty McFly dans Retour vers le futur 2. L’installation, rĂŠalisĂŠe pour une exposition hommage au film, gravite l’air de rien grâce Ă deux ĂŠlectro-aimants stabilisĂŠs par guidage laser. ÂŤ Nom de Zeus ! Âť, souffle Doc d’admiration. _E.R. http://nilsguadagnin.blogspot.com

VIDÉOS _Par P.R.-W.

Konstantin Bronzit – Lavatory Lovestory www.youtube.com/watch?v=ajLrFugsdMw Un bouquet de fleurs, dÊposÊ par un mystÊrieux inconnu, et le cœur d’une dame pipi est chamboulÊ‌ Superbement dessinÊ, ce court mÊtrage a ÊtÊ nommÊ l’an dernier aux Oscars. Ou quand hergÊ rencontre Pixar dans des toilettes russes.

SÊbastien Tellier – Look www.youtube.com/watch?v=0r0eqCzg6UU On connaissait le Ms. Fat Booty de Mos Def et les big butts chers à Snoop Dogg. SÊbastien Tellier est fier de vous prÊsenter le clip de Look, rÊalisÊ par le duo de dessinateurs Mrzyk & Moriceau, oÚ l’on se perd dans la cambrure d’une jeune femme. CulottÊ.

Breakbot – Baby I’m Yours www.dailymotion.com/video/xdm2lv_br eakbot-baby-i-m-yours-feat-irfane_music Plus de 2 000 aquarelles chatoyantes et bigarrÊes, exposÊes chez Colette à partir du 3 juillet, ont ÊtÊ utilisÊes pour illustrer Baby I’m Yours, l’entêtant tube funk-pop de Breakbot, dernier poulain de l’Êcurie Ed Banger. Break through.



30 NEWS /// LE NET EN MOINS FLOU

LIvRE OUVERT Une nouvelle polÊmique agite Facebook. En cause, les clauses de confidentialitÊ, visant à simplifier les conditions d’utilisation du site, jusqu’alors plus illisibles, disait-on, que la Constitution amÊricaine‌ _Par Pablo RenÊ-Worms

e 31 mai dernier, le groupe Quit Facebook Day invitait les quelque 540 millions d’utilisateurs du rĂŠseau social Ă le quitter. Si l’initiative a relativement peu rassemblĂŠ – 35 000 personnes, soit 0,0086 % des utilisateurs –, elle est symptomatique du vent de fronde contre Facebook. RĂŠseau fermĂŠ Ă sa naissance, le site s’est peu Ă peu transformĂŠ en pieuvre, recueillant quantitĂŠ d’informations sur ses utilisateurs. Dès lors, la question la plus brĂťlante fut celle du partage de ces dernières. Jusqu’à prĂŠsent, il fallait explorer les Depuis fin mai, une nouvelle entrailles de la bĂŞte pour page a fait son apparition. les rendre accessibles Ă ses seuls ÂŤ amis Âť, mais, depuis fin mai, une nouvelle page a fait son apparition. Sur celle-ci, trois gros boutons : ÂŤ Tout le monde Âť, ÂŤ Les amis de vos amis Âť, ÂŤ Vos amis Âť. Un seul clic suffit pour configurer presque tous les paramètres de confidentialitĂŠ de votre compte et limiter l’accès Ă vos donnĂŠes personnelles. Cette simplicitĂŠ de restriction d’accès pourrait transformer Facebook en simple boĂŽte mail, loin des vertus (ou vices, c’est selon) omniscientes et voyeuristes du dernier LĂŠviathan 2.0.

L

DUCKFACE

STATUTS QUOTES SÉLECTION DES MEILLEURS STATUTS DU MOIS

Gwendoline : Il faut vraiment arrêter de prendre les cons pour des gens. Nassim : On nous dit que Johnny est alcoolique. En même temps, allumer le feu sans carburant, c’est super relou. Max : Vuvuzela + gueule de bois = pas bon. Christophe : Pire que les vuvuzelas : les commentaires de Lebœuf ! Gregory a soufflÊ dans la vulvazahia. Thomas a tentÊ le coiffeur en Afrique du Sud et a essuyÊ l’humiliation de toute une vie :  Je vous coupe le mulet ou vous voulez le garder ? 

[dœkfes] n.f. MOT @ MOT _Par E.R.

[LittĂŠralement,ÂŤface de canardÂť;dĂŠsigne une moue boudeuse rĂŠsultant d’une contraction musculaire labiale rappelant le bec aplati de certains palmipèdes] 1.Grimace vieille comme les profils de rĂŠseaux sociaux, prisĂŠe des jeunes filles voulant souligner une certaine idĂŠe de la sensualitĂŠ par cette proĂŠminence crispĂŠe des lèvres. ÂŤLe site antiduckface.com vole dans les plumes des poules qui arborent des duckfaces.Âť 2.Overdose de collagène. ÂŤQuand Daisy rencontre Sally : Ă force de passages sur le billard, Meg Ryan a figĂŠ son rictus en duckface.Âť

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32 NEWS /// AVATARS

CASSE-TĂŠTE Au ballon rond, prĂŠfĂŠrons la tĂŞte au carrĂŠ, dĂŠmoulĂŠe par les chauds battoirs des gladiateurs du catch sans chiquĂŠ. Dans l’arène reine d’UFC 2010 Undisputed, des pains (dans le pif) et du jeu. _Par Étienne Rouillon

FC, pour Ultimate Fighting Championship, sport de combat sanctionnÊ par des K.O. sans coups interdits, oÚ les appelÊs oublient que, dans le mot  contact , il y a... tact. Du mot à maux, il n’y a qu’un ring oÚ l’on dialogue d’un poing c’est tout, vibrant sous les assauts de phalanges marteaux-piqueurs et de talons d’agiles.

U

Que tu sois un crack de la soumission au sol ou une diva de l’uppercut, c’est bleu schtroumpf que tu sors des cordes, l’arcade rouge d’une fuite sanguine Ă faire honte aux ingĂŠnieurs de BP. Si bien animĂŠ et modĂŠlisĂŠ qu’on a des scrupules Ă tumĂŠfier les tempes de l’avatar du joueur voisin sur le canapĂŠ. Pardon, vieux : lève-toi et crache tes dents.

APPLIS MOBILES

_Par C.D.

COUPE DU MONDE 2010 Pour les accros du ballon rond qui auraient peur de ne pouvoir suivre la Coupe du monde au boulot, pas de panique ! RÊsultats en direct et tableaux rÊcapitulatifs sont proposÊs par cette appli très complète. Plate-forme : iPhone et Windows Mobile // Prix : gratuit

RESIDENT EVIL 4 Le survival horror dĂŠbarque sur le nouveau joujou d’Apple. graphisme haute rĂŠsolution, cinq niveaux de difficultĂŠ et deux modes de jeu sont disponibles dans cette version tactile très intuitive. Plate-forme : iPad // Prix : 7,99 â‚Ź

Choisir la baston en sueur bio contre les OgM, Opus gavĂŠs de Manga. Le nez en patate mais creux, les dĂŠveloppeurs de ThQ ont atteint le summum de la castagne sans les chichis d’Êcolière au buste lactĂŠ ĂŠructant des boules de feu. Face Ă l’invasion des voltigeurs du Soleil levant, l’adepte d’UFC devient l’homme qui a dit gnons.

FAT BOOTH Cette drĂ´le d’appli pas très utile vous propose de retoucher votre portrait ou ceux de vos amis et d’y ajouter un peu (voire beaucoup) de gras. Attention, c’est du lourd !

UFC 2010 Undisputed (THQ, sur PS3, X360, PSP )

Plate-forme : iPhone // Prix : 0,79 â‚Ź

NEXT LEVEL

_Par C.D.

BLAZBLUE : CALAMITY TRIGGER Le fameux jeu de combat sorti sur les consoles françaises en avril 2010 s’introduira sur votre PC Ă partir du 30 juin. Retrouvez NoĂŤl, Jin, Ragna et les autres dans un style jeu d’arcade qui revient en force.

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TOY STORY 3 Adaptation rĂŠussie pour cette petite merveille de ÂŤ jouet vidĂŠo Âť d’aventure, qui ravira les jeunes et les moins jeunes avec son scĂŠnario bien ficelĂŠ. Et pas si simple que ça ! Sur vos consoles le 1er juillet.

DANCING STAGE HOTTEST PARTY 3 Konami relance la machine Dance Dance Revolution en Europe avec cette version grand public sur Wii du cÊlèbre jeu japonais. Dès le 30 juin, sautez, dansez et validez les flèches sur le rythme entraÎnant des morceaux du moment.

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GUIDE CALENDRIER MALIN POUR AVENTURIER URBAIN

DU MERCREDI 16 JUIN AU MARDI 20 JUILLET

 J’AVAIS ENVIE DE RÉALISME : DE LA SUEUR, DE LA SALIVE ET DES POILS.  P. 36 MIChAEL ROWE

SORTIES EN SALLES SORTIE LE 16 JUIN 36 AnnĂŠe bissextile de Michael Rowe SORTIES LE 23 JUIN 38 Les Petits Ruisseaux de Pascal RabatĂŠ 39 La Bocca del lupo de Pietro Marcello SORTIE LE 30 JUIN 40 TournĂŠe de Mathieu Amalric SORTIE LE 14 JUILLET 41 Tamara Drewe de Stephen Frears LES AUTRES SORTIES 42 Baaria ; BĂŠbĂŠs ; Eyes of War ; L’Agence tous risques ; Dog Pound ; Kiss & Kill ; Puzzle ; Ă€ 5 heures de Paris ; Splice ; Un Ange Ă la mer ; La Disparition d’Alice Creed ; MillĂŠnium 2 ; Copacabana ; Twilight 3 ; Question de cĹ“ur ; Petits Meurtres Ă l’anglaise ; L’Autre Monde ; Contes de l’âge d’or (partie 2) ; Predators ; Taking Off

P.36

46 LES ÉVÉNEMENTS MK2 Festival Paris CinÊma

SORTIES EN VILLE 48 CONCERTS Le Festival Days Off L’oreille de‌ Jamie Lidell

50 CLUBBING La terrasse de Petit Bain et le Projet 1051 Les nuits de‌ Yuksek

52 EXPOS Paris & CrÊation aux Galeries Lafayette Le cabinet de curiositÊs : Chemin faisant‌ A Walk Around the Block

54 SPECTACLES Jours ĂŠtranges et So Schnell de D. Bagouet Le spectacle vivant non identifiĂŠ : Evelyne House of Shame

P.50 JUIN 2010

Š A. Varlet

56 RESTOS Christophe Vasseur à Du Pain et des IdÊes Le palais de‌ Arnaud Fleurent-Didier

58 LA CHRONIQUE DE DUPUY & BERBERIAN

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36 CINÉMA

SORTIE LE

16/06

AnnĂŠe bissextile 3 RAISONS D’AlleR vOIR le fIlm 1‌ Pour monica del Carmen, dĂŠsarmante de sensualitĂŠ et de tristesse. 2‌ Pour la mise en scène, qui sait trouver la bonne distance sans jamais ĂŞtre racoleuse. 3‌ Pour la vitalitĂŠ d’un cinĂŠma mexicain entretenu par un rĂŠalisateur‌ d’origine australienne.

LES SENS DE LA SOLITUDE Un film de Michael Rowe // Avec Monica del Carmen, Gustavo Sanchez Parra‌ Distribution : Pyramide // Mexique, 2010, 1h34

Nouveau venu dans le cinÊma mexicain, MICHAEL ROWE dÊcroche pour son premier film la CamÊra d’or, qui aurait pu être aussi un Hot d’or, catÊgorie huis clos charnel et cÊrÊbral. _Par LÊo Soesanto

AnnĂŠe bissextile s’ouvre parmi les rayonnages d’un supermarchĂŠ oĂš Laura, pigiste pour un journal ĂŠconomique, fait ses courses. La courbe prise par le film prolonge cette scène inaugurale : celle de l’Êtalage, de la dĂŠshumanisation et de la marchandisation des corps. En particulier celui de Laura, qui s’abandonne chez elle Ă des relations sans lendemain et de plus en plus masochistes. Australien installĂŠ au Mexique depuis seize ans, Michael Rowe signe pour son premier long mĂŠtrage un portrait Ă la fois cru et tendre d’une cĂŠlibattante perdue dans son propre studio. Les scènes de sexe y sont frontales, mais Rowe casse la routine du coĂŻt filmĂŠ par son attachement aux petits dĂŠtails (que fait-on, que dit-on après l’amour ?) et le physique très naturel de son interprète Monica del Carmen. Surtout, AnnĂŠe bissextile n’est jamais gratuit dans ses ĂŠbats et gratte sans moralisme lĂ oĂš il faut : la solitude de Laura, qu’une sociĂŠtĂŠ mexicaine obsĂŠdĂŠe par les apparences lui renvoie au sextuple au visage.

JUIN 2010

MICHAEL ROWE Comment avez-vous castĂŠ Monica del Carmen ? Je voulais une actrice qui casse les clichĂŠs de beautĂŠ mexicains actuels – paradoxalement, une femme ÂŤ Ă la russe Âť, grande, blonde, pâle. Monica est principalement une actrice de thÊâtre ; elle apparaĂŽt aussi dans Babel d’Iùårritu. Surtout, elle m’a fait pleurer lors de son audition. Comment avez-vous abordĂŠ les scènes de sexe ? J’avais envie de rĂŠalisme, de choses qu’on ne voit pas souvent au cinĂŠma : de la sueur, de la salive et des poils. Dans le film, le sexe n’est pas une fin en soi ; c’est une forme de pouvoir et un moyen pour les personnages d’Êviter la solitude. Comment expliquez-vous la bonne santĂŠ Ă l’Êtranger du cinĂŠma mexicain, avec des cinĂŠastes aussi divers qu’Iùårritu, Eimbcke ou Reygadas ? Ces cinĂŠastes – et moi-mĂŞme, je crois – ont en commun de faire des films en rĂŠaction aux clichĂŠs consumĂŠristes que les mĂŠdias mexicains vĂŠhiculent. Nous montrons qu’il y a une autre manière de vivre. Le public Ă l’Êtranger doit s’y reconnaĂŽtre. WWW.MK2.COM



38 CINÉMA

SORTIE LE

23/06

Les Petits Ruisseaux 3 RAISONS D’AlleR vOIR le fIlm 1‌ C’est un film qui requinque (et qui remet). 2‌ Vous n’avez jamais vu Daniel PrĂŠvost aussi bien. 3‌ Ça se voit avant ou après avoir lu la BD, comme on veut.

MÛR D’AMOUR Un film de Pascal RabatÊ // Avec Daniel PrÊvost, Bulle Ogier‌ Distribution : Ad Vitam // France, 2010, 1h34

Deux retraitÊs sont dans un bateau;l’un casse sa pipe, que fait celui qui reste ? La rÊponse se trouve dans Les Petits Ruisseaux, premier film de PASCAL RABATÉ, adaptÊ de sa propre bande dessinÊe. _Par Isabelle Danel

Il y a le ciel, le soleil et la rivière. Et puis il y a l’Émile et l’Edmond qui pĂŞchent rĂŠgulièrement l’ablette et le gardon en bord de Loire. Mais voilĂ que le second se rĂŠvèle hĂŠdoniste et peintre (de femmes nues) Ă ses heures. Et qu’il casse sa pipe, non sans laisser au premier, en guise de viatique, une dernière pensĂŠe Ă mĂŠditer : ÂŤ C’est pas parce qu’on a passĂŠ l’âge de la gaudriole ĂŠpicĂŠe qu’il faut faire maigre jusqu’au trou. Âť Loin du jeunisme ambiant, Pascal RabatĂŠ avait fait d’Émile, retraitĂŠ soudain frappĂŠ par des ÂŤ retours d’envie Âť, le hĂŠros de sa BD Les Petits Ruisseaux, en 2006. Il lui donne aujourd’hui les traits de Daniel PrĂŠvost. Des cases aux cadres, RabatĂŠ s’en sort mieux que bien et multiplie les plans-sĂŠquences lĂ oĂš on aurait pu craindre un montage hachĂŠ, calquĂŠ sur celui du neuvième art. Il joue aussi de la couleur, du son, du off. Bref, il s’Êclate Ă l’Êcran, tout en restant fidèle Ă l’histoire d’origine. Qu’un premier film nous rappelle avec finesse qu’il faut bien que vieillesse se passe est revigorant.

JUIN 2010

PASCAL RABATÉ Pourquoi adapter votre propre BD ? Avant, je gagnais ma vie en faisant de la BD et je la dĂŠpensais en tournant des documentaires et des courts mĂŠtrages ! Quand les producteurs m’ont approchĂŠ, j’ai sautĂŠ dans le train sans savoir oĂš il allait. J’ai vu l’occasion de rĂŠinventer, Ă l’image, une fragilitĂŠ que j’avais essayĂŠ de raconter en dessins. Et le rĂŠsultat ? Au risque de passer pour un vantard, ce n’est pas le film dont j’ai rĂŞvĂŠ, c’est mieux ! Dans le sens oĂš il y a, dans la rĂŠalitĂŠ et dans les acteurs, bien plus d’imagination, d’incongruitĂŠs et de poĂŠsie que je ne peux en inventer tout seul. Comment avez-vous dirigĂŠ vos acteurs ? DirigĂŠs, je ne sais pas. Nous ĂŠtions d’accord sur tout avec Daniel PrĂŠvost, Bulle Ogier et HĂŠlène Vincent. Sur l’Êmotion contenue, le non-dit, le fait que ce devait ĂŞtre un film plus murmurĂŠ que parlÊ‌ En mĂŞme temps, il fallait que ce soit une fĂŞte : n’oublions pas que les gens qui ont 70 ans aujourd’hui on fait la rĂŠvolution sexuelle dans les annĂŠes 1960.

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39 CINÉMA

SORTIE LE

23/06

La Bocca del lupo 3 RAISONS D’AlleR vOIR le fIlm 1‌ Poignante, l’histoire d’Enzo et Mary tire sans cesse ce documentaire très stylisĂŠ vers la fiction. 2‌ Jamais voyeur ou misĂŠrabiliste, le film dĂŠgage une grande cohĂŠrence, tout en gardant sa capacitĂŠ Ă surprendre. 3‌ Le cinĂŠma italien, via le documentaire, montre des signes de renouveau, et Pietro Marcello est un cinĂŠaste Ă suivre.

BOUCHE À BOUCHE Un film de Pietro Marcello // Avec Mary Monaco, Vincenzo Motta‌ Distribution : Bellissima Films // Italie, 2009, 1h15

Documentaire ÊlÊgiaque sur Gênes, La Bocca del lupo de PIETRO MARCELLO conte l’histoire d’amour entre un ex-taulard et une transsexuelle. Splendide. _Par Laura Mattei

Des grottes qui bordent le port de GĂŞnes s’Êlève une voix rocailleuse racontant, en quelques traits impressionnistes, le quotidien des clochards qui s’y logent. Puis, une seconde voix, tout aussi rauque mais plus fragile, insituable, prend le relai. ÂŤ Je t’attends, mon amour Âť, dit-elle en substance, par-dessus les images d’un homme au corps fatiguĂŠ, au visage burinĂŠ – c’est comme si toute la ville et ses habitants ĂŠtaient taillĂŠs dans le roc. Deux fils narratifs s’entremĂŞlent en permanence dans La Bocca del lupo : l’histoire, majuscule, de gĂŞnes, jadis ÂŤ l’orgueilleuse Âť, aujourd'hui ÂŤ la belle endormie Âť (ainsi que l’Êcrivent avec euphĂŠmisme les brochures touristiques) ; et l’histoire d’amour, improbable, entre Enzo et Mary, lui, l’ex-mafioso qui a passĂŠ la moitiĂŠ de sa vie en prison, elle, la transsexuelle qui lui envoie des lettres d’amour enregistrĂŠes sur cassette audio. Avec un impressionnant sens du cadre et du montage, Pietro Marcello, jeune rĂŠalisateur italien, compose ainsi, en une heure quinze Ă peine, une somptueuse ĂŠlĂŠgie, aux confins du documentaire et de la fiction. Les prolĂŠtaires aussi ont droit au sublime. JUIN 2010

PIETRO MARCELLO Comment avez-vous rencontrĂŠ Enzo, le personnage principal de votre film ? Je suis originaire de Naples mais une fondation jĂŠsuite m’a commandĂŠ un film sur les quartiers pauvres de GĂŞnes. C’est lĂ , dans une boulangerie, près de l’appartement qu’on m'avait prĂŞtĂŠ, que j’ai rencontrĂŠ Enzo. J’ai ĂŠtĂŠ frappĂŠ par son visage, un visage qui ĂŠvoque d’emblĂŠe le cinĂŠma, qui raconte une histoire. De Mary, on n’entend d’abord que la voix, avant de la voir apparaĂŽtre tardivement dans le film. Pourquoi ce choix ? Mary a attendu onze ans qu’Enzo sorte de prison, en lui envoyant rĂŠgulièrement des cassettes (celles qu’on entend). Mon montage se devait d’être fidèle Ă ce rythme, Ă cette attente, pour ĂŠviter tout voyeurisme. Pourquoi ce titre ? La Bocca del lupo est tout d’abord le titre d’un roman naturaliste du XIXe siècle, de Remigio Zena, qui dĂŠcrit la vie des prolĂŠtaires de GĂŞnes. C’est aussi la forme du port, qui ressemble Ă la gueule d’un loup. C’est enfin le surnom donnĂŠ aux barreaux de prison, derrière lesquels Enzo a passĂŠ la moitiĂŠ de sa vie.

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40 CINÉMA

SORTIE LE

30/06

TournĂŠe 3 RAISONS D’AlleR vOIR le fIlm 1‌ Pour suivre mathieu Amalric cinĂŠaste après La Chose publique et Le Stade de Wimbledon. 2‌ Pour dĂŠcouvrir la mouvance du burlesque amĂŠricain, de l’effeuillage sur fond de satire sociale. 3‌ Pour la mise en scène entre documentaire et fiction, rĂŠcompensĂŠe d’un prix Ă Cannes.

CORPS DE TROUPE Un film de Mathieu Amalric // Avec Mathieu Amalric, Miranda Colclasure‌ Distribution : Le Pacte // France, 2010, 1h51

Reconverti en cinĂŠaste fĂŠministe, MATHIEU AMALRIC entraĂŽne le spectateur dans une TournĂŠe des salles de province, pour un show festif et humaniste. _Par ClĂŠmentine Gallot

On connaissait Dita Von Teese, poupĂŠe tout en jambes, mais difficile d’imaginer Mathieu Amalric en avocat du mouvement burlesque amĂŠricain. Et pourtant, sĂŠduit lors d’une reprĂŠsentation Ă Nantes il y a quelques annĂŠes, il a rĂŠuni pour les besoins du film sa propre troupe d’artistes et sillonnĂŠ la France. Le cinĂŠaste, grimĂŠ en manager moustachu Ă l’Êcran, s’est entourĂŠ de performeuses aux noms ĂŠvocateurs, Dirty Martini ou Roky Roulette. Soir après soir, le film dĂŠroule un show d’avant-garde vintage qui allie le storytelling Ă l’Êrotisme: ÂŤ Ce sont des spectacles par des femmes, pour les femmes Âť, prĂŠcise l’une d’elles. Ces portraits de matrones exubĂŠrantes, Ă l’humour provocateur et outrancier, affleurent sur scène pendant leurs numĂŠros et en coulisses, Ă travers le regard enveloppant du cinĂŠaste. Derrière l’entertainment parfaitement chorĂŠgraphiĂŠ et les visages fardĂŠs, Amalric filme des corps, ĂŠpanouis et vieillissants. Le choc culturel de TournĂŠe est inattendu, et l’objet, hybride, habite autant le paysage du cinĂŠma français que celui du road-movie Ă l’amĂŠricaine.

JUIN 2010

MATHIEU AMALRIC Le burlesque est bien plus que du striptease, mais c’est une tradition inconnue en France‌ Il y a quelque chose de la folie amĂŠricaine dans cette utilisation du corps pour faire de la politique : les filles y expriment une colère contre les corps formatĂŠs, mais de manière gĂŠnĂŠreuse et contagieuse. C’est un drĂ´le de rapport Ă l’Êrotisme, qui mĂŞle le sexe et le rire. La mise en scène a-t-elle demandĂŠ une logistique complexe ? Le tournage a ĂŠtĂŠ gracieux et joyeux. On a dĂŠcidĂŠ de mettre en place une vraie tournĂŠe pour conserver l’Ênergie des filles et le sens du danger. C’est un dispositif qui semble proche du documentaire, mais en fait rien n’a ĂŠtĂŠ improvisĂŠ. Ce film a des identitĂŠs multiples : est-ce un film français, amĂŠricain ? Je trouvais cela intĂŠressant de faire un film sur un Français qui fantasme l’AmĂŠrique et qui utilise le fantasme de ces filles sur la France pour y retourner. Cet ĂŠchange de fantasmes est ironique, d’autant que, quand on part en tournĂŠe, on ne voit rien du pays.

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14/07

41 CINÉMA

SORTIE LE

Tamara Drewe 3 RAISONS D’AlleR vOIR le fIlm 1‌ Pour dÊcouvrir la plus dÊlicieuse comÊdie de l’ÊtÊ. 2‌ Pour Gemma Arterton dans ses hot pants moulants et Dominic Cooper, star du rock ultra-glam. 3‌ Pour dÊcouvrir à l’Êcran l’excellent roman graphique de Posy Simmonds.

BOMBE ANACOMIQUE Un film de Stephen Frears // Avec Gemma Arterton, Tamsin Greig‌ // Distribution : Diaphana // Grande-Bretagne, 2010, 1h49

De retour dans sa campagne anglaise natale, la belle hÊroïne de Tamara Drewe sème le trouble chez ses habitants. Et rÊcolte les suffrages du public. Un vaudeville pastoral signÊ STEPHEN FREARS. _Par Donald James

PrĂŠsentĂŠ hors compĂŠtition au Festival de Cannes, Tamara Drewe a dĂŠclenchĂŠ fous rires et ovations, dĂŠcrochant la palme de ÂŤ la Âť petite comĂŠdie d’un festival rattrapĂŠ par le rĂŠel et ses fantĂ´mes. Oui, tout au long de l’annĂŠe, les ĂŠcrans sont inondĂŠs par ce genre de crises conjugales avec pour dĂŠnominateur explosif commun la jeune fille sexy convoitĂŠe comme potion d’Êternelle jeunesse. On ne croyait pas se faire encore avoir. Mais force est de constater l’Ênorme diffĂŠrence entre les habituelles comĂŠdies compassĂŠes et ce nouveau marivaudage so british. Un vĂŠritable prĂŠcis d’infidĂŠlitĂŠ qui met en branle tous les rouages de la rhĂŠtorique amoureuse. DĂŠfilent alors les figures du genre, du mâle Ă l’affĂťt Ă la femme aux fourneaux ; mĂŞme les animaux sont de la partie, tĂŠmoins sans doute hilares de ces combats de coqs. Difficile de relever la patte de Stephen Frears tant il

JUIN 2010

s’efface derrière son sujet et adapte avec une fidĂŠlitĂŠ minutieuse le roman graphique de Posy Simmonds. Tout ici – dĂŠcors, acteurs, rĂŠcit – dĂŠcalque au millimètre l’œuvre ficelĂŠe comme un story-board de la dessinatrice et son architecture Ă points de vue multiples, qui, renvoyĂŠs dos Ă dos, suscitent un comique grinçant. Après une opĂŠration de chirurgie esthĂŠtique et une longue absence, Tamara revient dans son village afin de faire retaper sa maison de famille. Stonefield : un pub, une rĂŠsidence d’Êcrivains, un mari infidèle, le jardinier sĂŠduisant et deux adolescentes dĂŠbridĂŠes. Tamara est devenue une bombe sexuelle prĂŞte Ă faire exploser ce calme et minuscule village anglais. Mais elle est loin d’être la fille bĂŞte et stupide attendue au tournant. Ă€ travers cette comĂŠdie bluffante, Frears propose un jeu sur les apparences dominĂŠ par un cynisme ravageur, traversĂŠ par une ĂŠtonnante cruautĂŠ.

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42 CINÉMA

AGENDA SORTIES CINÉ 16/06 _ Par C.D., I.D., D.J, J.R. et P.R.-W.

SORTIES DU

BAARĂŒA de Giuseppe Tornatore Avec Francesco Scianna, Margareth Madè‌ Quinta, Italie, 2h30

Dans cette saga italienne, on suit l’itinĂŠraire d’une famille sicilienne sur trois gĂŠnĂŠrations. En toile de fond, le fascisme, la Seconde guerre mondiale et la mafia sont ĂŠvoquĂŠs dans ce film très personnel du rĂŠalisateur de Cinema Paradiso.

BÉBÉS de Thomas Balmès StudioCanal, France, 1h18

Quatre univers totalement diffĂŠrents, pour quatre bouts de chou qui dĂŠcouvrent les joies, mais aussi la violence de la vie. Un documentaire animalier oĂš les stars ne sont pas des suricates mais des bĂŠbĂŠs.

L’AGENCE TOUS RISQUES de Joe Carnahan Avec Liam Neeson, Bradley Cooper‌ 20th Century Fox, États-Unis, 1h54

On retrouve hannibal et sa bande de mercenaires lancÊs dans des aventures survitaminÊes afin de laver leur honneur bafouÊ. Explosions, courses-poursuites et chute libre à bord d’un tank sont au programme de ce film d’action potache.

EYES OF WAR de Danis Tanovic Avec Colin Farrell, Paz Vega‌ Bac, Irlande-Espagne, 1h35

Deux photographes de guerre se sÊparent au Kurdistan. Mais, lorsque Mark rentre au pays, son ami, David, qui devrait l’avoir prÊcÊdÊ, n’est pas là . Que s’est-il passÊ? Une rÊflexion sur la morale du regard et l’impossible neutralitÊ face à l’horreur.

ET AUSSI CETTE SEMAINE : ANNÉE BISSEXTILE de Michael Rowe (lire la critique p. 36) AIR DOLL de Kore-Eda hirokazu (lire la critique p. 90) L’ILLUSIONNISTE de Sylvain Chomet (lire le dossier p. 68)

JUIN 2010

SORTIES DU

23/06 DOG POUND de Kim Chapiron Avec Adam Butcher, Shane Kippel‌ Mars, États-Unis, 1h31

Chapiron dĂŠlaisse l’ambiance dĂŠjantĂŠe de Sheitan, son prĂŠcĂŠdent long mĂŠtrage, pour l’hyperrĂŠalisme violent d’une prison pour mineurs du Midwest amĂŠricain. virage rĂŠussi grâce Ă un casting sans bavure et une mise en scène classique très maĂŽtrisĂŠe.

KISS AND KILL de Robert Luketic Avec Katherine Heigl, Ashton Kutcher‌ Metropolitan, États-Unis, 1h40

La CĂ´te d’Azur. Jen, fraĂŽchement cĂŠlibataire, rencontre l’homme parfait. Ils se sĂŠduisent, se marient et mènent une paisible vie de couple. Jusqu’au jour oĂš elle dĂŠcouvre que son mari est en rĂŠalitĂŠ un agent secret, et que sa tĂŞte est mise Ă prix.

PUZZLE de Natalia Smirnoff Avec Maria Onetto, Gabriel Goity ‌ Sophie Dulac, Argentine, 1h28

Épouse, mère et femme au foyer, Maria del Carmen reçoit le jour de ses 50 ans un puzzle, cadeau banal qui change pourtant sa vie. Ce premier film peint un beau portrait de femme, portĂŠ par Maria Onetto (repĂŠrĂŠe chez Lucrecia Martel), aussi subtile qu’intense.

À 5 HEURES DE PARIS de Leonid Prudovsky Avec Vladimir Friedman, Dror Keren‌ Memento, IsraÍl, 1h 30

Un chauffeur de taxi phobique de l’avion rencontre une professeure de musique qui doit justement en prendre un pour rejoindre son mari au Canada. Un joli conte dÊsenchantÊ, avec, en guise de B.O., des chansons de Joe Dassin et Adamo!

ET AUSSI CETTE SEMAINE : LES PETITS RUISSEAUX de Pascal RabatĂŠ (lire la critique p. 38) LA BOCCA DEL LUPO de Pietro Marcello (lire la critique p. 39)

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SORTIES DU

30/06 SPLICE

de Vincenzo Natali Avec Sarah Polley, Adrien Brody‌ Gaumont, Canada, 1h47

Deux savants donnent naissance à un organisme mutant, intelligent, sÊduisant et‌ gênant. Une sÊrie B luxueuse oÚ vincenzo Natali (Cube) remixe les classiques du genre en mode SF. Le rÊsultat est bizarroïde, rÊgressif et un brin scatologique.

UN ANGE À LA MER de FrÊdÊric Dumont Avec Olivier Gourmet, Anne Consigny‌ Colifilms, Belgique-Canada-France, 1h26

Louis a 11 ans. Il aime les vagues et la mer qui bordent son petit village de Sidi Ifni, au Maroc. Le jour oÚ son père maniaco-dÊpressif lui confie un terrible secret, il perd son innocence et se donne une mission : devenir son ange gardien.

LA DISPARITION D’ALICE CREED de J. Blakeson Avec Gemma Arterton, Martin Compston‌ Haut et Court, Royaume-Uni, 1h37

La fille d’un millionnaire est kidnappĂŠe par deux malfrats, puis retenue en otage dans 10 mètres carrĂŠs‌ TournĂŠ avec un tout petit budget, ce huis clos sert d’Êcrin aux comĂŠdiens, et surtout Ă la belle gemma Arterton, qui devrait ravir tous les suffrages.

MILLÉNIUM 2 de Daniel Alfredson Avec Michael Nyqvist, Noomi Rapace‌ UGC, Suède, 2h09

Lisbeth Salander, l’hĂŠroĂŻne geek et rebelle de la trilogie imaginĂŠe par Stieg Larsson, se voit accusĂŠe d’un triple meurtre et confrontĂŠe aux fantĂ´mes de son passĂŠ. Daniel Alfredson filme avec sobriĂŠtĂŠ les injustices et la violence sèche du pouvoir suĂŠdois. ET AUSSI CETTE SEMAINE : DIRTY DIARIES de Mia Engberg‌ (lire la critique p. 16) TOURNÉE de Mathieu Amalric (lire la critique p. 40) SHREK 4 de Mike Mitchell (lire le dossier p. 68)

JUIN 2010


44 CINÉMA

AGENDA SORTIES CINÉ 07/07 _ Par C.D., I.D., D.J, J.R. et P.R.-W.

SORTIES DU

COPACABANA de Marc Fitoussi Avec Isabelle Huppert, Lolita Chammah‌ Mars, France, 2010, 1h47

Mère indigne mais marrante, sommĂŠe de ne pas assister au mariage de sa propre fille, Babou trouve un travail et s’assagit‌ Ă sa façon. huppert et fille (Lolita Chammah) nous mènent tambour battant entre Lille et Ostende dans cette comĂŠdie malpolie.

TWILIGHT 3 de David Slade Avec Kristen Stewart, Robert Pattinson‌ SND, États-Unis, 2h04

Bella a retrouvÊ son petit ami de vampire. Mais, entre son amour pour Edward et son amitiÊ pour Jacob le loup-garou, la belle balance. HÊsitation, sous-titre prÊmonitoire, sauvera de la plage les âmes romantiques et les allergiques au soleil.

QUESTION DE CŒUR de Francesca Archibugi Avec Kim Rossi Stuart, Antonio Albanese‌ Bellissima, Italie, 1h44

Deux infarctus rÊunissent en salle de rÊanimation Alberto le scÊnariste et Angelo le carrossier. Tout les sÊpare; ils se lient d’amitiÊ. De petites peines en grands bonheurs, ils partageront plus qu’une histoire de cœur.

PETITS MEURTRES À L’ANGLAISE de Jonathan Lynn Avec Bill Nighy, Rupert Grint‌ Rezo, Royaume-Uni-France, 1h38

Qu’obtient-on lorsque l’on rÊunit un tueur à gages so british, une kleptomane qui a eu les yeux plus gros que le ventre et un jeune loser fumeur de spliffs ? Un thriller burlesque qui nous enseigne avec classe les arcanes du meurtre.

ET AUSSI CETTE SEMAINE : CARLOS d’Olivier Assayas (lire l’interview p. 72)

JUIN 2010

14/07

SORTIES DU

L’AUTRE MONDE de Gilles Marchand Avec GrÊgoire Leprince-Ringuet, Louise Bourgoin‌ Haut et Court, France-Belgique, 1h44

gaspard passe les vacances d’ÊtÊ avec ses potes et sa petite amie. Tout va pour le mieux jusqu’à ce qu’il rencontre Audrey, une jeune femme fascinÊe par la mort qui l’entraÎne dans le monde des jeux en rÊseau. Par le scÊnariste d’Harry, un ami qui vous veut du bien.

PREDATORS de Nimrod Antal Avec Adrien Brody, Topher Grace‌ Fox, Etats-Unis, 1h40

Un groupe de guerriers composĂŠ des meilleurs tueurs de la planète se trouve catapultĂŠ dans le terrain de jeu grandeur nature d’une nouvelle race de prĂŠdateurs extraterrestres. MenĂŠe par le mercenaire Royce (Adrien Brody), la chasse peut enfin commencer.

TAKING OFF de Milos Forman Avec Lynn Carlin, Buck Henry‌ Carlotta, États-Unis, 1h33

Jeannie, 15 ans, vit à New York avec un hippie. Ses parents tentent de la comprendre‌ Le Milos Forman d’avant Hair et Vol au-dessus d’un nid de coucou dÊcouvrait lui aussi cette AmÊrique contestataire des annÊes 1970, à peine dÊbarquÊ du printemps de Prague.

CONTES DE L’ÂGE D’OR de Cristian Mungiu, Ioana Irucaru‌ Avec Alexandru Potocean, Teo Corban‌ Le Pacte, Roumanie, 1h28

Seconde partie de ce film collectif initiĂŠ par le palmĂŠ Cristian Mungiu. Les trois lĂŠgendes urbaines racontĂŠes cette fois sont des histoires d’amour. La fine fleur des rĂŠalisateurs roumains s’est rĂŠunie pour donner sa version de l’ âge d’or Âť de Ceausescu.

ET AUSSI CETTE SEMAINE : TAMARA DREWE de Stephen Frears (lire la critique p. 41) TOY STORY 3 de Lee Unkrich (lire le dossier p. 60)

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46 CINÉMA

LES ÉVÉNEMENTS BASTILLE

BIBLIOTHĂˆQUE

HAUTEFEUILLE

ODÉON

QUAI DE LOIRE

BEAUBOURG

GAMBETTA

NATION

PARNASSE

QUAI DE SEINE

CINÉMA

PASSERELLES

FLASH-BACKS & PREVIEWS

LE DIALOGUE DES DISCIPLINES

JEUDI 24 JUIN – 20h / AVANT-PREMIĂˆRE / La Disparition d’Alice Creed de J Blakeson Un thriller anglais haletant sur fond de kidnapping, avec la divine gemma Arterton.

JUSQU’AU 22 JUIN / EXPO PHOTOS / StÊphane Fedorowsky

SAMEDI 26 JUIN - 10h30 / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT / Baisers volÊs SAMEDI 26 JUIN - 10h30 / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT / L’Amour en fuite DIMANCHE 27 JUIN – 10h30 / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT / L’Homme qui aimait les femmes DIMANCHE 27 JUIN – 10h30 / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT / Les Deux Anglaises et le Continent SAMEDI 3 JUILLET / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT Tirez sur le pianiste SAMEDI 3 JUILLET / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT Domicile conjugal DIMANCHE 4 JUILLET – 10h30 / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT / Baisers volÊs DIMANCHE 4 JUILLET – 10h30 / CYCLE FRANÇOIS TRUFFAUT / Les Deux Anglaises et le Continent LUNDI 5 JUILLET - 20h30 / RDV DES DOCS / Journal de campagne d’Amos Gitaï En 1982, Amos gitaï sillonne la Cisjordanie et la bande de gaza. Il filme de jeunes soldats qui occupent les territoires et recueille les tÊmoignages de Palestiniens opprimÊs, faisant Êtat de la situation tendue de son pays. En prÊsence d’Ariel Schweitzer, historien et critique, spÊcialiste du cinÊma israÊlien. DU 10 JUILLET AU 1er AOÛT – SPÉCIAL ANIMATION Reprise des films animÊs qui ont ÊgayÊ l’annÊe scolaire ÊcoulÊe : Max et les maximonstres de Spike Jonze, Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson (Cristal du long mÊtrage et prix du public au dernier Festival d’Annecy), KÊrity, la maison des contes de Dominique Monfery (mention spÊciale à Annecy) et La Princesse et la Grenouille de John Musker‌ Toute la programmation sur www.mk2.com

JUIN 2010

SAMEDI 19 JUIN – 11h / CINÉ BD / Les raisins de la colère de John Ford. Avec les ĂŠditions Dargaud, Marvano viendra prĂŠsenter le film qu’il a choisi puis dĂŠdicacera le premier opus de son ouvrage Grand Prix. Renaissance. JEUDI 24 JUIN – 19h30 / SOIRÉE ZÉRO DE CONDUITE / ÂŤ Piscine Âť. Avec les ĂŠditions Attila, autour de Chlore de Johannes gelich, Le Roi et la Reine de Ramon Sender, et La Piscine de Yoko Ogawa. Inscription au 01 44 52 50 70. SAMEDI 26 ET DIMANCHE 27 JUIN – Ă€ PARTIR DE 14h / FESTIVAL BD. Avec Ivan gomez-Montero, Boris guilloteau, AurĂŠlien Morinière, Miceal O'griafa, Nicolas OtĂŠro, Julien Parra, Renaud Pennelle et Alain Robet. VENDREDI 2 JUILLET – 19h30 / RENCONTRE / Jac Barron. Avec Transit ĂŠditeur, autour de la parution du thriller Les Cicatrices. DU 9 AU 11 JUILLET - DE 12h Ă€ 20h / Librairie ĂŠphĂŠmère. Une librairie ĂŠphĂŠmère sur les quais, organisĂŠe par les ĂŠditions L’Œil d’or et Passage piĂŠtons, rĂŠunissant des ĂŠditeurs indĂŠpendants, alternatifs, dĂŠcalĂŠs ou fracassants. LUNDI 19 JUILLET – 20h / CARTE BLANCHE / Push Up et la blaxploitation Projection et miniconcert du collectif Push Up. LUNDI 26 JUILLET – 20h / CARTE BLANCHE / Push Up et la blaxploitation Projection et miniconcert du collectif Push Up.

PETITES LECTURES MERCREDI 7 JUILLET 10h30 / LECTURE POUR LES 3-5 ANS. En juillet, nous partons en VOYAGE, vers des mondes fantastiques, colorÊs et imaginaires‌ Tous les premiers mercredis matins du mois. Inscription au 01 44 52 50 70.

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47

UVREZ DÉCO ÉMA IN C LE DANS N E M T AUTRE K2 ! M LLES LES SA

FOCUS

_Par P.R.-W.

PARIS CINÉMA

LES CYCLES SOCIÉTÉS IMAGINAIRES ET IMAGINÉES Jusqu’à mi-juillet, programmation en matinĂŠe de films qui questionnent mondes parallèles, univers oniriques et dĂŠlires psychotiques avec Fight Club de David Fincher, Les Temps modernes de Charles Chaplin, Bienvenue Ă Gattaca d’Andrew Niccol, Pink Floyd, The Wall d’Alan Parker, Brazil de Terry gilliam ou Eternal Sunshine of the Spotless Mind de Michel gondry.

Cette annĂŠe, au programme du festival Paris CinĂŠma, que de l’affriolant : outre les huit longs mĂŠtrages en compĂŠtition et les avant-premières, hommage sera rendu au cinĂŠma japonais Ă travers une centaine de films ainsi qu’au pape de la sexploitation, Joe Sarno. Chaud devant. Les ÂŤnippophilesÂť se rĂŠjouiront : la cinĂŠmatographie Ă l’honneur cette annĂŠe nous vient du Soleil levant. On pourra ainsi assister Ă une rĂŠtrospective du maĂŽtre Akira Kurosawa Ă la CinĂŠmathèque française, Ă l’occasion du centième anniversaire de sa naissance. Films ĂŠrotiques (hommage Ă Koji Waka-matsu, maĂŽtre du ÂŤ pinku eiga Âť), actrices phares (Rinko Kikuchi, Shinobu Terajima), rĂŠalisateurs mĂŠconnus (Sadao Yamanaka, le Jean vigo nippon) seront aussi de la partie. Dans le mĂŞme temps, un large panorama du cinĂŠma japonais contemporain sera proposĂŠ, avec plus d’une quarantaine de documentaires, de courts et de longs mĂŠtrages. Autre temps fort : le MK2 Bibliothèque projettera, le 4 juillet, le culte Klute d’Alan Pakula, avec Jane Fonda, invitĂŠe d’honneur du festival, que l’on pourra rencontrer le 3 juillet Ă la Filmothèque du Quartier latin. Le mĂŞme soir, une nuit Joe Sarno aura lieu au Forum des images. Caresses interdites, Swedish Wildcats, All the Sins of Sodom : des films aux titres ĂŠvocateurs, fleurons du cinĂŠma ĂŠrotico-fĂŠministe des sixties, qui dressent des portraits de femmes esseulĂŠes dans leurs pavillons trouvant l’Êmancipation dans les plaisirs de la chair. La nuit promet d’être hot en couleurs, Ă l’image de la programmation de cette huitième ĂŠdition de Paris CinĂŠma.

FRANÇOIS TRUFFAUT Jusqu’au 13 juillet, programmation en matinÊe d’un cycle dÊdiÊ au cinÊaste, avec les reprises de L'Amour en fuite, Baisers volÊs, Domicile conjugal, L'Homme qui aimait les femmes, Les Deux Anglaises et le Continent et Tirez sur le pianiste.

LITTÉRATURE ET CINÉMA Jusqu’au 11 juillet, les samedis et dimanches matins, le cinÊma et la librairie du MK2 Quai de Loire donnent carte blanche à Anne Wiazemsky, actrice de Robert Bresson, Pier Paolo Pasolini ou AndrÊ TÊchinÊ. Projections de L’ArmÊe des ombres de Jean-Pierre Melville, Le Fleuve de Jean Renoir, Le MÊpris de Jean-Luc godard et Les Yeux sans visage de georges Franju.

Du 3 au 13 juillet. Plus d’infos sur www.pariscinema.org.

Toute la programmation sur mk2.com

JUIN 2010

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Š D.R.

CONCERTS

48 SORTIES EN VILLE

Émilie Simon

LESS IS MORE Festival Days Off Pas de vacances ni de vacance cet ÊtÊ pour la CitÊ de la musique et la salle Pleyel, qui poursuivent leur collaboration en un festival d’ÊvÊnements plutôt qu’en un ÊvÊnement estival. C’est le moment de faire une pause. _Par Wilfried Paris

Si Paris est un festival musical Ă l’annĂŠe, les ĂŠvĂŠnements marquants sont finalement assez rares, et la profusion de propositions entraĂŽne parfois une certaine lassitude du public en mĂŞme temps qu’une nouvelle exigence de sa part. Pour sa première ĂŠdition, le festival Days Off prend acte et choisit un crĂŠneau original, tentant de rĂŠveiller la curiositĂŠ du public et la capacitĂŠ des artistes Ă crĂŠer des moments privilĂŠgiĂŠs. Selon vincent Anglade, conseiller Ă la programmation, ÂŤl’idĂŠe du festival ĂŠtait de crĂŠer une succession de temps forts, en se positionnant sur de vraies crĂŠations, qui prolongent ce que l’on fait Ă l’annĂŠe et qui n’empiètent pas sur les autres manifestations estivales en rĂŠgion parisienne, comme Rock en Seine ou Solidays. Cela permet aux groupes de prendre le temps, de s’arrĂŞter un peu, de jouer plus Âť. Du 2 au 10 juillet, Days Off offre donc chaque soir une scène Ă un artiste, qui prĂŠsente un projet inĂŠdit, circonstanciĂŠ aux lieux et Ă la saison. Ainsi Neil hannon

JUIN 2010

(The Divine Comedy) prÊsentera en solo son nouvel album, Bang Goes the Knighthood, dans l’Êcrin de la salle Pleyel, tandis que Pete Doherty, Emilie Simon ou Alela Diane inviteront leurs proches pour des soirÊes oÚ le singulier se conjuguera au collectif. Days Off multiplie les rencontres : l’ex-Pogues David Coulter commÊmorera le Let It Be des Beatles avec Yael Naim, Mathias Malzieu (Dionysos) ou Cocoon, tandis que les mêmes Cocoon rÊuniront Chris garneau, Ibrahim Maalouf, MÊlanie Pain et hugh Coltman pour une soirÊe en hommage à Nick Drake. The Fitzcarraldo Sessions inviteront notamment sur leur pont Dominique A, Rosemary Moriarty ou Craig Walker. Cerise sur le bateau, les concerts spÊciaux d’Arnaud Fleurent-Didier, de Julian Casablancas ou de St. vincent. Cet ÊtÊ, prenez donc quelques jours Off. Du 2 au 10 juillet à la CitÊ de la musique et à la salle Pleyel, www.citedelamusique.fr

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Š Lindsey Rome

L’OREILLE DE‌ JAMIE LIDELL

GRIZZLY BEAR Ă€ L’OLYMPIA ÂŤ Pendant l’enregistrement de mon nouvel album, Compass, j’ai ĂŠnormĂŠment ĂŠcoutĂŠ Veckatimest de grizzly Bear. Il s’en dĂŠgage quelque chose de fort, de colorĂŠ, de très riche et d’effrayant. C’est comme un petit monde vers oĂš s’Êvader. Chris Taylor m’a vraiment aidĂŠ pour la production de mon disque. J’avais comme un immense puzzle que je n’arrivais pas Ă assembler, et c’est lui qui m’a permis de tout mettre en ordre, en me calmant et me recadrant en permanence. Son groupe est absolument fascinant sur scène, ce qui ne gâche rien. Âť _Propos recueillis par A.T.

Grizzly Bear Ă l’Olympia le 29 juin, dès 20h, 35 â‚Ź Compass de Jamie Lidell (Warp / Discograph, dĂŠjĂ disponible)

AGENDA CONCERTS

_Par W.P.

1 CAETANO VELOSO voix de velours du tropicalisme brÊsilien, veloso poursuit son work in progress depuis 1967 (hybridation, multiculturalisme, engagement) et fait escale pour un concert gracieux à la DÊfense. Obra em progresso. le 27 juin à la DÊfense, dès 18h, gratuit.

2 GRIZZLY BEAR & DIRTY PROJECTORS Les deux groupes new-yorkais les plus influents de 2010 (grizzly Bear rĂŠnovant le psychĂŠdĂŠlisme pop, les Dirty Projectors inventant une sorte de R’n’B cĂŠleste et virtuose) se retrouvent pour une affiche Olympienne. le 29 juin Ă l’Olympia, dès 20h, 35 â‚Ź

3 OS MUTANTES Autre collision tropicaliste (1966) entre bossa-nova, pop psychĂŠdĂŠlique et rock’n’roll, les Os Mutantes ont fait muter la musique brĂŠsilienne en profondeur, infusant leur inventivitĂŠ par-delĂ les frontières (Beck et Byrne sont fans). le 30 juin au Cabaret sauvage, dès 20h30, 24 â‚Ź

4 DOMINIQUE A La crème musicale passera l’ÊtĂŠ sur la nouvelle Plage du glaz’art (cinq tonnes de sable fin, piquenique et pĂŠtanque), avec notamment Dominique A, toujours bel horizon de la chanson française. Sur les pavĂŠs, La Musique, donc. le 10 juillet Ă la Plage du Glaz’art, dès 19h, 29 â‚Ź

JUIN 2010


Š A.Varlet

CLUBBING

50 SORTIES EN VILLE

La terrasse de Petit Bain

NOUVELLES VAGUES Un duo qui terrasse‌ Si les rives du quai François-Mauriac semblaient se noyer dans la masse clubbing ces derniers temps, deux projets aventureux lui font sortir la tĂŞte de l’eau. La terrasse de PETIT BAIN et le PROJET 1051 devraient ĂŠmoustiller les Parisiens amarrĂŠs Ă leurs habitudes. _Par Violaine SchĂźtz

Mettez dans un bateau des vidĂŠastes berlinois – Transforma – et un crew culte de hip-hop français – La Caution – pendant une semaine : secouez, vous obtiendrez le Projet 1051. InitiĂŠe par le Batofar, cette collaboration europĂŠenne donnera lieu Ă une crĂŠation audiovidĂŠo qui sera prĂŠsentĂŠe sous sa forme dĂŠfinitive en octobre. ÂŤ Notre dĂŠmarche est de soutenir la crĂŠation contemporaine. Ici, il s’agit d’une rencontre artistique entre deux cultures et deux disciplines autour de la ville et de l’identitĂŠ. On a voulu confronter aux arts visuels un genre rarement convoquĂŠ, le hip-hop, qui tĂŠmoigne pourtant d’une qualitĂŠ d’Êcriture et d’une histoire liĂŠe Ă la citĂŠ qui en font un courant musical au fort potentiel narratifÂť, prĂŠcise Camille Duthuit, chargĂŠe du projet. Pour un aperçu du work in progress en avant-première, rendez-vous le 9 juillet‌ Urbain encore, les pieds carrĂŠment dans l’eau cette fois, Petit Bain (dont la barge flottante ne sera prĂŞte

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qu’en 2011) se prĂŠsente comme une terrasse ĂŠphĂŠmère, ÂŤ une ĂŽle dans la ville Âť, adjacente Ă la piscine JosĂŠphine-Baker. Petit Bain se veut ÂŤ un vrai lieu de vie, et non une simple terrasse d’apĂŠro Âť, explique-t-on du cĂ´tĂŠ de l’organisation. Ateliers de danse, de gastronomie, dĂŠbats, activitĂŠs ÂŤ vertes Âť constituent autant de variations autour d’un espace qui garde nĂŠanmoins sa vocation de restaurant, avec concerts et sets de DJ en bande-son. ÂŤNous n’avons pas un programme mais un mode d’emploi. Nous sommes entre le restaurant et le jardin familial, la salle de concert et le bar de quartier Âť, reprend un membre de l’Êquipe. Petit Bain, oui, mais grand ÂŤ Oh ! Âť Projet 1051, le 9 juillet au Batofar, de 19h Ă minuit. Avec les DJ de la Fine Equipe, entrĂŠe libre. Petit Bain, devant la piscine JosĂŠphine-Baker, Ă partir du 5 juin, du lundi au jeudi de 12h Ă minuit, les vendredis et samedis de 12h Ă 1h, entrĂŠe libre.

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LES NUITS DE‌ YUKSEK

LES BAINS NUMÉRIQUES ÂŤ Mon rĂŞve clubbing, ce serait d’Êcouter Larry Levan dans un club de Brooklyn ; malheureusement, il est mort depuis dix-huit ans, alors je me contente de concerts ou de festivals. Le 19 juin, c’est la première fois que je jouerai au milieu d’un lac : merci les Bains numĂŠriques ! J’inter-prĂŠterai live les morceaux de mon album prĂŠcĂŠdent et quelques nouveaux titres du second, que je produis en ce moment mĂŞme. Je suis toujours seul sur scène, avec un micro dans lequel je crie et chante, plein de synthĂŠs, des pĂŠdales d’effets, un vocoder, un ordinateur et gĂŠnĂŠralement une chemise. Âť _Propos recueillis par V.S.

les Bains numÊriques à enghien, clôture du festival le 19 juin avec Yuksek et Moderat, dès 21h, entrÊe libre.

AGENDA CLUBBING

_Par V.S.

1 LES SOIREES DU CAFÉ CACHÉ Quelque part au 104 (facile !) se trouve le CafĂŠ cachĂŠ, ÂŤ entre cafĂŠ du coin et rendez-vous des artistes Âť. Dans un dĂŠcor fifties officient des DJ pointus (guido, l’Êquipe du blog La dame Noir) : une adresse cachĂŠe, peut-ĂŞtre, mais un trĂŠsor tout trouvĂŠ. Tous les vendredis de juin et juillet au 104, dès 19h, entrĂŠe libre.

2 NOCTURNES DES ARTS ET MÉTIERS Ce musĂŠe, adulĂŠ des touristes, est relativement mĂŠconnu des Parisiens. Petite session de rattrapage avec ces Nocturnes, visites + DJ sets ĂŠclairĂŠs (Château Marmont, Mondkopf). histoire de briller par sa culture, surtout si c’est une vraie party de plaisir. Tous les jeudis de juin et juillet aux Arts et mĂŠtiers, dès 18h30, entrĂŠe libre.

3 LA GUINGUETTE DES TUILERIES Un parc chic, un cabaret choc et un hĂ´te ad hoc : le journaliste et fĂŞtard Edouard Rostand nous invite dans sa guinguette ĂŠphĂŠmère en nous promettant ÂŤrosĂŠ, mojitos, tapas et musique joyeuseÂť. Ouh la la! Que de belles gigues en perspective‌ Du jeudi au samedi aux Tuileries, dès 21h, entrĂŠe libre.

4 MR OIZO ÂŤ Vous ĂŞtes des animaux ! Âť rugissait un de ses rĂŠcents tubes. Pour son unique date Ă Paris, le drĂ´le d’Oizo ĂŠlectro aura vu juste : oiseaux de nuits, party animals et guests bĂŞtes de scène (Breakbot) devraient affluer en meute. Rrrrr ! le 9 juillet Ă la villette, dès 23h, 25 â‚Ź

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Š D.R.

EXPOS

52 SORTIES EN VILLE

Extrait de l’affiche de Paris & CrÊation

EXHIBITION Paris tenu aux Galeries Deuxième Êdition pour Paris & CrÊation,la vitrine culturelle estivale des Galeries Lafayette. Cette annÊe : une carte blanche à Vanessa Bruno et un pignon sur rue pour huit institutions parisiennes. Au menu : le Gentil garçon pour Pompidou, Ernest T. en agent du MAM ou encore Giulana Zefferi hors les murs du Palais de Tokyo. _Par Anne-Lou Vicente

Avec l’ouverture en 2005 de la galerie des Galeries – oĂš ont rĂŠgulièrement lieu des expositions, notamment le cycle Antidote et, cet ĂŠtĂŠ, une carte blanche Ă la crĂŠatrice vanessa Bruno –, les galeries Lafayette ont enfoncĂŠ le clou de la liaison qui, depuis plusieurs annĂŠes, unit la mode et l’art contemporain. Dans cette lignĂŠe, Paris & CrĂŠation entend promouvoir la crĂŠation contemporaine en mettant les vitrines du grand magasin Ă la disposition de huit institutions culturelles parisiennes, du 12 juillet au 5 aoĂťt. Une exhibition, en somme‌ Si le Palais de Tokyo propose un Module hors les murs de l’artiste giuliana Zefferi, les autres lieux profitent de l’occasion pour communiquer sur leur actualitĂŠ estivale. En marge de l’exposition Voyage dans ma tĂŞte, la Maison rouge expose ainsi une sĂŠlection de coiffes ethniques dialoguant avec une enseigne lumineuse

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d’Olivier Babin (Coiff’Hair, 2008). Retransmise sur des ĂŠcrans, une vidĂŠo restitue le tracĂŠ effectuĂŠ sur une palette graphique par l’artiste le gentil garçon Ă partir d’œuvres issues de l’exposition Dreamlands au Centre Pompidou, revisitant ainsi divers thèmes architecturaux. Ernest T. fait quant Ă lui ĂŠcho Ă Seconde Main, l’exposition prĂŠsentĂŠe au musĂŠe d’Art moderne de la ville de Paris regroupant une sĂŠlection d’œuvres sosiesÂť rĂŠalisĂŠes entre 1960 et aujourd’hui. La CitĂŠ de l’architecture et du patrimoine, les Arts dĂŠcoratifs, le Lieu du design, mais aussi le parc de la villette sont ĂŠgalement de la partie. Ou comment rĂŠconcilier lèche-vitrines et amour de l’art contemporain‌

Paris & CrĂŠation : sĂŠquence vitrines du 12 juillet au 5 aoĂťt et carte blanche Ă Vanessa Bruno du 25 juin au 14 aoĂťt, galerie des Galeries, Galeries Lafayette, 40, boulevard Haussmann, 75009 Paris.

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Š Dector & Dupuy

LE CABINET DE CURIOSITÉS

CHEMIN FAISANT‌ A WALK AROUND THE BLOCK vous rĂŞvez de vous faire envoyer balader par des artistes ? Le centre d’art contemporain de la Ferme du Buisson prĂŠsente une exposition qui, si elle donne Ă voir de l’intĂŠrieur des Ĺ“uvres tangibles, propose en parallèle des promenades, visites guidĂŠes et autres dĂŠambulations dans Marne-la-vallĂŠe, imaginĂŠes par des artistes (CĂŠline Ahond, Dector & Dupuy, Jochen Dehn, ChloĂŠ Maillet & Louise hervĂŠ, Sofia hultĂŠn, Leopold Kessler‌) qui rĂŠinvestissent la figure du flâneur. L’espace urbain se mue alors en un territoire oĂš naissent toutes sortes de fictions. _A.-L.V.

Jusqu’au 25 juillet à la ferme du Buisson, allÊe de la Ferme-Noisiel, 77448 Marne-la-VallÊe.

AGENDA EXPOS

_Par A.-L.V.

LIVING ROOMS Quatorze artistes investissent le château du Domaine de Chamarande, construit en 1654. De nouveau ÂŤ habitĂŠ Âť, le lieu accueille des Ĺ“uvres fonctionnant comme les traces possibles, visibles et/ou audibles, de ses vies multiples, rĂŠelles ou fictives. Jusqu’au 3 octobre au Domaine dĂŠpartemental de Chamarande, 38 rue du Commandant-Arnoux, 91730 Chamarande.

DYNASTY En voisins, le Palais de Tokyo et le musĂŠe d’Art moderne de la ville de Paris s’allient pour ĂŠcrire un nouvel ĂŠpisode du feuilleton de la scène française ĂŠmergente. Quarante artistes, plus ou moins repĂŠrĂŠs, prĂŠsentent une pièce dans chacun des deux lieux. Jusqu’au 5 septembre au Palais de Tokyo et au musĂŠe d’Art moderne de la ville de Paris, 13 avenue du PrĂŠsident-Wilson, 75116 Paris.

PREVIOUSLY ON OPTICAL SOUND Le label Optical Sound a proposÊ à une soixantaine de personnes – artistes, critiques d’art et musiciens – de rÊaliser une œuvre au format A4 à partir des pochettes, titres, contenus sonores ou artistes ÊditÊs parmi son catalogue initiÊ en 1997. Du 6 au 24 juillet à la galerie frÊdÊric Giroux, 8 rue Charlot, 75003 Paris. JUIN 2010


Š GTG / GrÊgory Batardon

SPECTACLES

54 SORTIES EN VILLE

REQUIEM POURBallets UN BOND rocks et baroques Dans le cadre du festival Paris Quartier d’ÊtĂŠ, le ballet du Grand ThÊâtre de Genève offre un flash-back rare dans l’histoire de la danse contemporaine en prĂŠsentant Jours ĂŠtranges et So Schnell, deux chefs-d’œuvre du regrettĂŠ DOMINIQUE BAGOUET. Immanquable. _Par Ăˆve Beauvallet

ÂŤ La joie presque subversive de danser sans donner prise, le moins du monde, au fatal. Âť Ainsi Dominique Bagouet prĂŠsentait-il sa pièce So Schnell : un dernier pied de nez Ă la fatalitĂŠ de la mort. Ce chef-d’œuvre ultime, qui galopait avec une apparente insouciance entre la cantate BWv 26 de Jean-SĂŠbastien Bach et des arrangements sonores industriels, allait clore le parcours du chorĂŠgraphe et refermer, avec lui, un pan entier de l’histoire de la danse. La nouvelle danse française, ce sursaut vitaminĂŠ des annĂŠes 1980 Ă l’origine de l’institutionnalisation de la danse contemporaine, a sans doute expirĂŠ un soir de dĂŠcembre 1992 oĂš le sida emporta prĂŠmaturĂŠment Dominique Bagouet, Ă l’âge de 41 ans. Angelin Preljocaj, Michel Kelemenis, Catherine Diverrès, Christian Bourigault‌ difficile de trouver un seul de ses anciens danseurs – aujourd’hui chorĂŠgraphes majeurs – qui ne soit redevable Ă l’Êcriture tout Ă la fois raffinĂŠe et ĂŠlusive, rigoureuse et dĂŠcadente, de ce baroque contemporain, fou de cinĂŠma JUIN 2010

et de mignardises expressionnistes. Difficile, aussi, de manquer l’occasion de (re)dĂŠcouvrir ses Ĺ“uvres – rĂŠpertoriĂŠes dans les grands ballets internationaux – quand occasion il y a. Pour l’heure, le ballet du grand ThÊâtre de genève nous donne l’opportunitĂŠ d’apprĂŠcier communĂŠment Jours ĂŠtranges, dĂŠlire beatnik en hommage aux Doors, et So Schnell, sĂŠrĂŠnade pop art Ă l’Ênergie aigre-douce. Soit deux chefs-d’œuvre complĂŠmentaires pour prendre la mesure de ce ÂŤstyle BagouetÂť, empreint Ă la fois d’abstraction amĂŠricaine et d’exploration thÊâtrale : chorĂŠgraphies posturales hantĂŠes par les figures cinĂŠmatographiques, lĂŠgèretĂŠ oblique des dĂŠsĂŠquilibres, inventivitĂŠ graphique pour les extrĂŠmitĂŠs du corps‌ Bref, la fatalitĂŠ et l’acadĂŠmisme pris par-dessus la jambe. SoirĂŠes Bagouet Jours ĂŠtranges et So Schnell, par le ballet du Grand ThÊâtre de Genève, les 14, 15 et 16 juillet au PalaisRoyal, www.quartierdete.com WWW.MK2.COM


Š Cyril Weiner

LE SPECTACLE VIVANT NON IDENTIFIÉ

EVELYNE HOUSE OF SHAME Ils avaient mis sur scène un sacrĂŠ boxon avec leur remix gay et drĂ´lissime des Quatres Filles du docteur March dans Domestic Flight. Alors, lorsque l’on nous apprend que Christophe haleb et sa compagnie la Zouze s’apprĂŞtent Ă transformer la Machine du Moulin rouge en cabaret berlinois des annĂŠes 1930, on ne s’attend pas vraiment Ă un exercice policĂŠ. Evelyne House of Shame s’annonce comme un salon itinĂŠrant oĂš ressurgissent les figures les plus surannĂŠes et sexy de l’histoire du style. Le tout, pour une performance transgenre et transhistorique. _E.B.

les 23 et 24 juin Ă la machine du moulin rouge, dans le cadre du festival Jerk Off, www.myspace.com/jerkoffestival

AGENDA SPECTACLES

_Par E.B.

1 FESTIVAL IMPATIENCE Tremplin pour les jeunes compagnies, plate-forme pour les programmateurs, Impatience propose depuis trois ans de mettre en lumière des artistes ĂŠmergents sur les deux plateaux du ThÊâtre de l’OdĂŠon. Avec, Ă l’issue, prix du jury et prix du public. Du 9 au 18 juin au ThÊâtre de l’OdĂŠon et aux Ateliers Berthier, www.theatre-odeon.fr

2 FOI Dieu sait Ă quel point la spiritualitĂŠ guide l’œuvre du chorĂŠgraphe flamand Sidi Larbi Cherkaoui. On en trouve la preuve la plus brillamment mise en danse dans Foi, un opĂŠra ÂŤ mĂŠdiĂŠvo-contemporain Âť dans lequel les enjeux de dĂŠtermination et de transcendance sont doublement posĂŠs par la chorĂŠgraphie et par un ensemble de musique savante du XIve siècle, littĂŠralement encastrĂŠ dans le mur, en surplomb des danseurs. Du 17 au 19 juin au Parc de la villette, www.villette.com

3 LES GARÇONS ET GUILLAUME, Ă€ TABLE ! ÂŤ Ma mère me dit rĂŠgulièrement “Au revoir, ma chĂŠrieâ€? au tĂŠlĂŠphoneÂť, raconte guillaume gallienne, compagnon du Grand Journal et sociĂŠtaire de la ComĂŠdie-Française. Comment assumer d’être hĂŠtĂŠrosexuel dans une famille qui a dĂŠcrĂŠtĂŠ que l’on ĂŠtait homo? C’est cette aventure, ĂŠpique, qu’il a dĂŠcidĂŠ de mettre en scène dans une pièce qui renoue avec les plus nobles heures du one-man-show. Du 24 juin au 17 juillet Ă l’AthĂŠnĂŠe ThÊâtre louisJouvet, www.athenee-theatre.com

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Š Bruno Verjus

RESTOS

56 SORTIES EN VILLE

PÉCHÉ MITRON La flamme du boulanger Rencontre avec la passion selon CHRISTOPHE VASSEUR, boulanger sans artifice ni compromis. Voyage au temps du pain bÊnit, celui qui se dÊvore‌ comme de la brioche. _Par Bruno Verjus (www.foodintelligence.blogspot.com)

ÂŤ J’ai choisi ce mĂŠtier pour poursuivre un rĂŞve de gosse, par passion, pour sa tradition. Le boulanger est un magicien, il tutoie les anges ! Avec de la farine, de l’eau et du sel, il nourrit et offre un voyage aux sens. Âť Natif de haute-Savoie, Christophe vasseur rĂŠside Ă Paris depuis 1996. Après une formation commerciale et un parcours professionnel dans la mode, dont plus de trois ans Ă hongkong, il remise dĂŠfinitivement son costume-cravate en 1999 pour apprendre le mĂŠtier de boulanger chez Mathon, place d’Italie – l’un des derniers passionnĂŠs de pain. ÂŤJe vous ferai un pain comme vous n’en avez jamais vu‌ et, dans ce pain, il y aura de l’amour et aussi beaucoup d’amitiĂŠ Âť, ainsi s’exprimait Raimu chez Marcel Pagnol. Pour Christophe vasseur, cela vaut profession de foi : ÂŤ Il n’est pas de plus beau mĂŠtier que de donner du bonheur aux gens, un artisan travaillant avec sa tĂŞte et ses mains Ă la crĂŠation de l’unique. Âť

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Le pain des amis, façonnĂŠ Ă la main, cuit sur pierre comme autrefois, offre une croĂťte ĂŠpaisse qui fleure les arĂ´mes de châtaigne et de noisette. Un produit de racines, Ĺ“uvre d’excellence de l’artisan vasseur. Il confectionne les pains uniquement Ă partir de farines biologiques de blĂŠ, de seigle ou de châtaigne, de levain naturel et d’un peu de sel. Aux viennoiseries, il offre le meilleur, du beurre frais extrafin, des pralines, du safran, des raisins, des variĂŠtĂŠs de pommes rares, et c’est tout! Sublimes chaussons Ă la saveur d’enfance – une demipomme fraĂŽche cuite dans une pâte feuilletĂŠe ; escargots chocolat-pistache, praline ou citron-nougat, gourmands Ă l’addiction ; brioche mouna, petite merveille au goĂťt d’amande, originaire d’Afrique du Nord, infusĂŠe de fleur d’oranger et pavĂŠe de sucre cristal : au royaume de Christophe vasseur, la gourmandise vaut bien son pĂŠchĂŠ.

Du Pain et des IdĂŠes, 34 rue Yves-Toudic, 75010 Paris. TĂŠl. : 01 42 40 44 52

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Š DorothÊe De Koon

LE PALAIS DE‌ ARNAUD FLEURENT-DIDIER

CHARLOT, ROI DES COQUILLAGES ÂŤ Projet de dĂŽner avec le Texan Wes Anderson, je me vois faire du poisson, mais courses + cuisine, je suis vite pris de court. Charlot, roi des coquillages s’impose. Les produits de la mer y sont fameux, mais c’est surtout la dĂŠco qui vaut le dĂŠtour, la moquette, les glaces et les banquettes, et les tĂŞtes anachroniques du personnel. La vue imprenable sur la place Clichy du travelling de L’Amour Ă 20 ans (Doinel qui court après son bus) n’y est pour rien. Ou juste pour se dire que Paris change, et que c’est bien. Âť _Propos recueillis par A.T.

Charlot, roi des coquillages, 81 boulevard de Clichy, 75009 Paris. TĂŠl. : 01 44 91 90 18 // Arnaud FleurentDidier en concert Ă la salle Pleyel le 3 juillet

OĂ™ MANGER APRĂˆS‌ _Par B.V.

TOURNÉE À la RÊgalade Saint-HonorÊ pour la joyeuse faconde, à l’instar de la terrine de volaille offerte à l’apÊro ou de cette canaille poitrine de cochon de chez Ospital. Plus sage, le cabillaud accompagnÊ d’une salade d’herbes. Pour les vins, la carte offre le meilleur aussi : allez, tournÊe gÊnÊrale ! la RÊgalade Saint-HonorÊ, 123 rue Saint-HonorÊ, 75001 Paris. TÊl. : 01 42 21 92 40

L’ITALIEN Chez Olio Pane Vino pour l’ambiance italo chic de cette ĂŠpicerie cave Ă manger. Course autour de la Botte pour des produits impeccables. Mozzarella fumĂŠe, burrata, anchois, câpres, speck‌ et quelques pâtes. Une cuisine simplissime et ĂŠclatante en hommage aux produits transalpins. Olio Pane vino, 44 rue Coquillière, 75001 Paris. TĂŠl. : 01 42 33 21 15

LA TERRASSE Ă€ l’AgapĂŠ Bistrot, pour partager en terrasse une cuisine fraĂŽche comme l’instant, troussĂŠe autour d’une carte courte. veloutĂŠ maraĂŽcher (10 â‚Ź), tourteau tomates et pommes granny smith (18â‚Ź), belle pièce de bĹ“uf et pomme de terre de Noirmoutier (30â‚Ź), crème brĂťlĂŠe aux saveurs de saison (9â‚Ź). l’AgapĂŠ Bistrot, 75 avenue Niel, 75017 Paris. TĂŠl. : 01 42 27 88 44 JUIN 2010


58 LA ChRONIQUE DE



© Disney / Pixar


Torses bombés, chapeaux vissés, ailes déployées, Woody, Buzz L’Éclair et leurs amis reviennent squatter les salles obscures, près de quinze ans après leur dernière visite. Formellement virtuose, chantre d’une mélancolie ludique et bigarrée, Toy Story 3 permet d’apprécier le chemin parcouru depuis les débuts du cinéma d’animation en images de synthèse. Visite à San Francisco, dans les mythiques studios PIXAR, pour qui le jouet est moins une industrie qu’un art méticuleusement rétrofuturiste. _Par Auréliano Tonet


Š Deborah Coleman / Pixar

Jason Katz, scĂŠnariste en chef de Toy Story 3

C

e matin-lĂ , le bus municipal qui escalade les collines de San Francisco a fière allure : tout entier aux couleurs de Toy Story 3, il arbore sur son flanc gauche un portrait XXL de Buzz L’Éclair, dont l’aplomb semble sortir la ville de sa torpeur embrumĂŠe. Il y a quarantecinq ans, un autre bus, celui des ÂŤMerry PrankstersÂť, menĂŠs par l’hurluberlu Ken Kesey, chamarrait la citĂŠ d’impudentes volutes psychĂŠdĂŠliques ; puis il y eut les caravanes arc-en-ciel d’harvey Milk et ses combats pour la cause homosexuelle ; avant, donc, que Frisco ne se reconvertisse en capitale des nouvelles technologies, et customise ses navettes Ă la gloire de Toy Story.

des hĂŠros de la nouvelle production maison, quand ce ne sont pas de gigantesques peluches ou sculptures en Lego. Au cĹ“ur de l’allĂŠe principale, la maison du couple le plus glamour de Toy Story 3, Barbie et Ken, a mĂŞme ĂŠtĂŠ reconstituĂŠe sur plusieurs mètres de haut. Manière de dire Ă quel point le studio est solidaire, jusque dans ses propres murs, du film qu’il a conçu – comme si l’un et l’autre racontaient la mĂŞme histoire, celle d’une bande d’amis tiraillĂŠe entre rupture et continuitĂŠ. LE PLASTIQUE, C’EST FANTASTIQUE RĂŠalisĂŠ plus d’une dĂŠcennie après les deux premiers volets, Toy Story 3 est un film obsĂŠdĂŠ par la question du temps qui passe, de l’obsolescence : Ă l’heure d’entrer Ă la fac, Andy hĂŠsite Ă se sĂŠparer de ses

LE SIègE DE PIXAR SE TROUvE Ă€ MI-DISTANCE DE L’UNIvERSITÉ DE BERKELEY ET DE LA SILICON vALLEY. TOY BOYS Ă€ une trentaine de minutes du centre-ville se dresse le siège de Pixar, que certains employĂŠs appellent le ÂŤ campus Âť : situĂŠ Ă Emeryville, il se trouve Ă mi-distance de l’universitĂŠ de Berkeley et de la Silicon valley chère Ă Apple, google et autre Intel. Le lieu respire la ÂŤgreen techÂť : recouvert de nombreux panneaux solaires, laissant passer une lumière idĂŠale pour tout graphiste digne de ce nom (ni trop forte, ni trop faible), il s’organise autour d’un vaste atrium, oĂš se retrouvent, pour un cafĂŠ ou un burger, les salariĂŠs de la firme. ParticularitĂŠ de saison : sur les murs trĂ´nent, ici aussi, de larges tableaux Ă l’effigie

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anciens jouets – Woody le cow-boy, Buzz L’Éclair l’astronaute, et tous les autres. Lui veut les remiser au grenier ; sa mère songe Ă les offrir Ă un jardin d’enfant ; quant aux jouets, ils sont terrifiĂŠs par ces sinistres perspectives‌ ÂŤ Nous avons mis beaucoup de nous-mĂŞmes dans ce film, confie le rĂŠalisateur, Lee Unkrich. Il s’inspire de notre propre vĂŠcu – le dĂŠpart de mon fils Ă la fac, ou la perte de la collection de poupĂŠes de ma femme –, mais aussi, en un sens, des diffĂŠrentes problĂŠmatiques qu’a dĂť affronter le studio ces dernières annĂŠes. Âť Toy Story, en 1995, fut le premier long mĂŠtrage de Pixar (et accessoirement le premier long mĂŠtrage d’animation 100 % rĂŠalisĂŠ

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63 REPORTAGE PIXAR

TOY STORY 3 EST UN FILM OBSÉDÉ PAR LA QUESTION DU TEMPS QUI PASSE, DE L’OBSOLESCENCE. en images de synthèse); quinze ans plus tard, le troisième volet boucle la trilogie, et permet de mesurer le chemin parcouru. D’un point de vue technique, tout d’abord : ÂŤ Nos logiciels avaient subi tant de mises Ă jour que lorsque, au dĂŠbut de la confection de Toy Story 3, nous avons cliquĂŠ sur les vieux fichiers Buzz ou Woody datant de 1997, l’ordinateur n’arrivait pas Ă les ouvrir ! Âť, sourit Unkrich. Plus fluides, plus rĂŠalistes, mieux articulĂŠs, mis en relief Ă l’aide d’une 3D aussi discrète qu’intelligente, les personnages bĂŠnĂŠficient des avancĂŠes graphiques de la dernière dĂŠcennie : ÂŤ Ă€ l’Êpoque des premiers Toy Story, il ĂŠtait très compliquĂŠ de reprĂŠsenter en images de synthèse les humains, mais aussi les poils d’animaux, qu’ils soient vivants ou en peluche‌, admet le cinĂŠaste. C’est pour cela que nous avions jetĂŠ notre dĂŠvolu sur des jouets en plastique, une matière bien plus facile Ă dessiner. Avec le temps, tous ces obstacles ont ĂŠtĂŠ levĂŠs. Le film s’en ressent. Âť TRIPLE BUZZ D’un point de vue narratif, la saga a ĂŠgalement gagnĂŠ en ĂŠpaisseur. Alternant plages de pur divertissement et sĂŠquences plus mĂŠlancoliques, le scĂŠnario offre, comme aux grandes heures de Disney, plusieurs niveaux de lecture. Beau conte sur l’abandon, l’usure et la transmission, Toy Story 3 est comme nimbĂŠ du spleen des deux prĂŠcĂŠdentes productions Pixar, WALL-E et LĂ -haut, autour de cette question-clĂŠ : quel legs offrir aux gĂŠnĂŠrations futures ? Moins fleur bleue, et dĂŠgainant plus vite qu’El BuzzoÂť en personne, mes collègues sud-amĂŠricains ne me laissent guère l’opportunitĂŠ de titiller Unkrich & co sur ces larmoyants sujets, prĂŠfĂŠrant questionner l’Êquipe sur les aspects les plus fun du film : ÂŤMichael Keaton a-t-il injectĂŠ son passĂŠ d’homme-chauve-souris dans l’interprĂŠtation vocale de Ken ? Comment est nĂŠe l’idĂŠe du mode ÂŤ dĂŠmo Âť de Buzz, et de son hilarante transformation en latin lover patentĂŠ ? Quels ĂŠtaient vos jouets prĂŠfĂŠrĂŠs, enfants?Âť RĂŠponses, dans l’ordre : A) ÂŤNonÂť ; B) ÂŤEn discutant autour d’une tableÂť;C) ÂŤNo comment Âť (regards gĂŞnĂŠs vers le plafond). •••

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DANS LES CARTONS‌ ‌ DE PIXAR Depuis que Pixar a rĂŠcupĂŠrĂŠ la libertĂŠ de gĂŠrer son catalogue Ă sa guise vis-Ă -vis de Disney, la sociĂŠtĂŠ n’hĂŠsite plus Ă capitaliser sur son fabuleux vivier de personnages en dĂŠveloppant plusieurs suites. Flash McQueen ĂŠtant devenu l’un des hĂŠros les plus rentables de la firme, un Cars 2 sortira logiquement en juillet 2011, avec une intrigue qui nous emmènera tout autour du globe, tandis qu’à NoĂŤl 2012 nous retrouverons le duo Mike Wazowski et Sully dans Monstres et compagnie 2. Du cĂ´tĂŠ des projets originaux, si l’on peut regretter l’abandon du prometteur Newt, qui marquait les premiers pas dans le long mĂŠtrage de Gary Rydstrom (rĂŠalisateur du court ExtraTerrien), nous nous consolerons avec le conte mĂŠdiĂŠval Brave au mois de juin 2012, mais aussi avec la sĂŠrie documentaire Reign of the Dinosaurs, diffusĂŠe Ă la tĂŠlĂŠ Ă partir du printemps 2011. Enfin, il est Ă noter que le rĂŠalisateur de L’Étrange NoĂŤl de Mr. Jack, Henry Selick, travaille Ă son premier film au sein de Pixar. _J.D.

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64 REPORTAGE PIXAR

COURTS TOUJOURS Juste avant Toy Story 3, vous aurez le bonheur de dĂŠcouvrir le court mĂŠtrage Day & Night (Jour Nuit en VF). Pixar et les courts, c’est une longue histoire d’amour : avant que leur talent n’Êclate Ă la face du monde avec Toy Story, c’est grâce Ă ce format que Pixar a remportĂŠ ses premières victoires, dont un oscar avec Tin Toy. Quand la compagnie commence Ă prospĂŠrer, ses dirigeants, Ed Catmull et John Lasseter, continuent Ă produire des courts, manière de rĂŠvĂŠler de futurs talents ou de tester de nouvelles technologies. Contrat rempli sur les deux tableaux avec Day & Night : non seulement le rĂŠalisateur du film, Teddy Newton, a soufflĂŠ Lasseter, qui a approuvĂŠ son scĂŠnario en seulement trois rĂŠunions contre les six habituellement nĂŠcessaires, mais le film emploie le relief de façon inĂŠdite, en juxtaposant plusieurs couches d’images en 2D dont la profondeur varie selon l’humeur des personnages. _J.D.

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SPLEEN ET IDÉAL ZappĂŠe, par consĂŠquent, ma question sur le vĂŠritable gĂŠnie de Pixar selon moi : son maniement virtuose du mĂŠtalangage, c’est-Ă -dire sa propension Ă commenter, Ă travers chacun de ses films, les ambitions techniques, industrielles ou artistiques du studio. Prenons les trois derniers bijoux en date. Ratatouille (2007) : derrière l’histoire du rongeur gourmet, tombĂŠ par hasard dans la marmite de la grande cuisine, se lit l’histoire de Pixar, sociĂŠtĂŠ de matĂŠriel informatique haut de gamme qui, pour renflouer ses dĂŠficits abyssaux, se lance, dès son rachat en 1986 par le patron d’Apple, Steve Jobs, dans la rĂŠalisation de films animĂŠs par ordinateur (courts mĂŠtrages, publicitĂŠs), et y prend tellement goĂťt qu’elle se spĂŠcialise illico dans cette voie de traverse. WALL-E (2008) : rĂŠactivant le leitmotiv des deux premiers Toy Story, le film fait l’apologie d’un technicisme sentimental, oĂš les machines les plus performantes (robots, jouets, blockbusters) sont dotĂŠes d’une âme, d’un cĹ“ur, d’Êmotions – allĂŠgorie du positionnement de Pixar au sein de la culture de masse, firme d’auteur dont l’humanitĂŠ la distingue de l’entertainment standard. LĂ -haut (2009), enfin : l’histoire d’amitiĂŠ entre un gamin replet et un pĂŠpĂŠ asocial se double d’une fable sur l’alliance des contraires, techniques d’animation vintage et imagerie dernier cri, jeune et moins jeune public, spleen et idĂŠal. QUAND LARRY RENCONTRE WOODY Un art du consensus validĂŠ tant par le box-office que par les festivals. En quinze ans, Pixar a sorti une dizaine de longs mĂŠtrages : tous ont dĂŠpassĂŠ, parfois allĂŠgrement, les 200 millions de dollars de recette aux États-Unis. RĂŠcompensĂŠe pour l’ensemble de son Ĺ“uvre Ă venise en 2009, invitĂŠe en ouverture de Cannes la mĂŞme annĂŠe pour LĂ -haut, la compagnie a raflĂŠ cinq Oscars du meilleur film d’animation depuis la crĂŠation du prix, en 2001. ÂŤ Si tous les films Pixar sont des rĂŠussites tant commerciales que critiques, c’est parce qu’ils ne nĂŠgligent aucun stade du processus de crĂŠation, juge le comĂŠdien Jeff garlin, qui assurait la voix du capitaine dans WALL-E, et joue celle de la licorne dans Toy Story 3. Contrairement Ă d’autres studios, Pixar ne se risquerait jamais Ă produire un

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Š Deborah Coleman / Pixar

L’Êquipe de Toy Story 3 durant une rÊunion de travail

film dont il estime que l’histoire n’est pas assez forte. Âť garlin est cĂŠlèbre, aux États-Unis, pour son rĂ´le de manager dans Curb Your Enthusiasm, la nouvelle sĂŠrie comique de Larry David, co-crĂŠateur de Seinfeld : ÂŤ La trilogie Toy Story a fait appel Ă plusieurs ex-collaborateurs de Larry pour des doublages, comme Estelle Harris ou Wayne Knight, poursuit garlin. De mĂŞme que Seinfeld, Pixar est aux mains de gens brillants, crĂŠatifs, humains. C’est, je crois, la clĂŠ de leurs succès respectifs. Âť POMME D’APPUI Figurant elle aussi au casting vocal de Toy Story 3, Kristen Schaal (inoubliable Mel dans la sĂŠrie Flight of the Conchords) renchĂŠrit : ÂŤJ’ai ĂŠgalement travaillĂŠ pour DreamWorks, sur Shrek 4 par exemple, mais je n’y ai jamais senti l’esprit de famille qui règne Ă Pixar. Ce studio est unique. Âť Depuis sa fondation en 1994 par le triumvirat Steven Spielberg-David geffen-Jeffrey Katzenberg, DreamWorks a sorti une vingtaine de longs mĂŠtrages (le double de Pixar), dont une moitiĂŠ de flops. Le studio angelino compte environ 2 000 sala-

PIXAR A RAFLÉ CINQ OSCARS DU MEILLEUR FILM D’ANIMATION DEPUIS LA CRÉATION DU PRIX, EN 2001. riĂŠs, quand Pixar n’en dĂŠnombre que 850. Le modèle de croissance dĂŠfendu par John Lasseter, le patron de Pixar, se dĂŠmarque donc de la profusion spielbergienne, et se rattache davantage de la minutie laborieuse et raisonnĂŠe de george Lucas ou Steve Jobs, les deux premiers propriĂŠtaires de la sociĂŠtĂŠ, auprès desquels s’est forgĂŠe l’approche artistique et entrepreneuriale de Lasseter. ÂŤ Nous consacrons quatre ans minimum Ă la fabrication de chaque long mĂŠtrage Âť, prĂŠcise Darla K. Anderson, la productrice de Toy Story 3. Écriture du scĂŠnario, modĂŠlisation des personnages, enregistre-

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RENDERMAN‌ ‌ LE LOGICIEL MAISON John Lasseter : ÂŤ L’art met au dĂŠfi la technologie. Et la technologie inspire l’art. Tel est notre credo Ă Pixar. Âť Ă€ l’origine, Pixar ĂŠtait une compagnie chargĂŠe de dĂŠvelopper du matĂŠriel informatique destinĂŠ, notamment, Ă l’industrie mĂŠdicale. La prĂŠsence de John Lasseter au sein de ce groupe d’ingĂŠnieurs va pousser ces derniers Ă inventer des outils qui permettront la crĂŠation d’images de synthèse non par des informaticiens chevronnĂŠs, mais par des artistes, qui n’ont pas forcĂŠment l’esprit ultracartĂŠsien nĂŠcessaire. Parmi ces nombreux outils, le moteur de rendu RenderMan, inaugurĂŠ sur le court mĂŠtrage Tin Toy en 1988 et continuellement perfectionnĂŠ depuis, demeure certainement le produit phare de Pixar, puisqu’il a ĂŠtĂŠ rĂŠcompensĂŠ par un oscar et qu’il est aujourd’hui utilisĂŠ par la plupart des grands studios d’effets spĂŠciaux du monde. _J.D.

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66 REPORTAGE PIXAR

ÂŤ NOUS CONSACRONS QUATRE ANS MINIMUM Ă€ LA FABRICATION DE CHAQUE LONG MÉTRAGE. Âť DARLA K. ANDERSON DREAMWORKS, LE RIVAL Concurrents acharnĂŠs, Pixar et DreamWorks sont opposĂŠs sur bien des plans. Tandis que Pixar est dirigĂŠ par des cinĂŠastes (Lasseter) et des ingĂŠnieurs (Catmull), DreamWorks est nĂŠ de l’achat d’une sociĂŠtĂŠ d’effets visuels par l’un des businessmans les plus offensifs d’Hollywood : Jeffrey Katzenberg, dont les dĂŠbuts dans l’animation furent marquĂŠs par sa gestion d’un plan social historique chez Disney, dans les annĂŠes 1980. Si Pixar possède des locaux aux environs de San Francisco, DreamWorks a ĂŠlu domicile près d’Hollywood, Ă Glendale. Et, lorsque DreamWorks dĂŠlocalise en Inde pour produire Ă moindre coĂťt des sĂŠries d’animations dĂŠrivĂŠes de ses plus grands succès (Madagascar, Kung-Fu Panda), c’est au Canada, l’un des territoires les plus prometteurs en termes de crĂŠation d’images numĂŠriques, que Pixar ouvre une succursale. _J.D.

Toy Story 3 Un film de Lee Unkrich Avec les voix de Tom Hanks, Tim Allen‌ États-Unis, 2010, 1h40 Sortie le 14 juillet

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ment des voix, animation, postproduction : chaque ĂŠtape obĂŠit Ă une mĂŠthodologie stricte et minutĂŠe, empruntant autant Ă l’animation traditionnelle (croquis, story-boards, sculptures) qu’aux dernières prouesses numĂŠriques – c’est ainsi que j’assistai pour la première fois de ma vie Ă l’impression en 3D d’un fichier informatique (en l’occurrence, une reprĂŠsentation en volume du personnage de Woody). Équilibre entre classicisme et modernitĂŠ, donc ; ĂŠquilibre, aussi, entre imaginaire dĂŠbridĂŠ et rĂŠalitĂŠ : ÂŤ Il nous arrive de nous inspirer de certains de nos prĂŠcĂŠdents projets, affirme Lee Unkrich. Les scènes de dĂŠcharge de Toy Story 3 n’auraient pas ĂŠtĂŠ possibles sans les accomplissements graphiques rĂŠalisĂŠs sur WALL-E, par exemple. Mais nous voulons ĂŠviter de tourner en vase clos. C’est pourquoi nous sommes allĂŠs visiter des prisons, des jardins d’enfants et des dĂŠchèteries authentiques, en amont du tournage de Toy Story 3. Âť HAPPY TOGETHER Toy Story 3 est le premier long mĂŠtrage entièrement rĂŠalisĂŠ par Lee Unkrich, 42 ans. Jusque lĂ , il avait ĂŠtĂŠ monteur sur sept longs mĂŠtrages Pixar, et en avait co-rĂŠalisĂŠ deux (Monstres & Cie et Le Monde de Nemo). Une ĂŠvolution de carrière assez reprĂŠsentative de la mĂŠritocratie et de la polyvalence prĂ´nĂŠes par Lasseter au sein de l’entreprise. Dans la cafĂŠtĂŠria qui jouxte l’atrium, un ingĂŠnieur grisonnant dĂŠjeune avec un dessinateur tout juste sorti d’Êcole : ÂŤ Contrairement Ă d’autres studios, oĂš les postes sont plus prĂŠcaires, la longĂŠvitĂŠ est valorisĂŠe, ici, de mĂŞme que les doubles casquettes, estime le sĂŠnior. Pour ma part, j’organise des visites guidĂŠes du studio le week-end. Âť Autre vĂŠnĂŠrable vĂŠtĂŠran (dĂŠcouvrez sa pop caustique sur le joyau Nilsson Sings Newman, 1970), le gĂŠnie mĂŠconnu Randy Newman signe sa troisième partition pour la saga Toy Story. La plus belle chanson du cru 2010 s’intitule We Belong Together, et elle rĂŠpond Ă elle seule Ă l’enjeu posĂŠ par le film : rompre, oui, mais dans la continuitĂŠ, c’est-Ă -dire sans dĂŠfaire les liens prĂŠcieux qui se sont nouĂŠs avec le temps. La nuit tombe sur San Francisco. Ă€ la sortie du studio, la lampe gĂŠante de Luxo Jr., l’emblème de Pixar, salue les derniers visiteurs de son halo amical, et dirige ses feux vers un bus bleutĂŠ, aux couleurs de Buzz L’Éclair. Le slogan du cosmonaute plastifiĂŠ n’a jamais sonnĂŠ aussi juste : ÂŤ Vers l’infini, et au-delĂ . Âť

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© Cube créative productions

Extrait du court métrage Jean-François de T. Haugomat et B. Mangyoku


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LE LAC DÉSSINE ÂŤ Lapin ! Âť, la mascotte du terrier annĂŠcien, est de nouveau sorti toutes oreilles dressĂŠes et yeux rivĂŠs sur les images qui bougent aux quatre coins de la planète, dans les studios vĂŠtĂŠrans comme dans les clĂŠs USB d’Êtudiants aussi vrombissants qu’un essaim de vuvuzelas. Cinquante carottes cette annĂŠe sur le gâteau du Festival du film d’animation. Deux de nos journalistes s’en sont payĂŠ une très belle tranche. Un vrai conte de Festival. _Par Juliette Reitzer et Étienne Rouillon

C

inq cent paires de fesses mouillĂŠes s’impatientent dans la nuit, tout juste tombĂŠe sur la dernière projection en plein air. Leurs proprios ont relevĂŠ les cagoules et vissĂŠ les casquettes, non pour ĂŞtre raccord avec le film banlieusard du soir, Lascars, mais parce que ça pleuvasse sec. On est rincĂŠs de la tĂŞte aux pieds, embourbĂŠs dans la pelouse de l’esplanade du Pâquier, labourĂŠe la veille par le DJ jardinier Martin Solveig. Il faisait beau ce soir-lĂ , manque de pot nous on se faisait mener en bateau sur le lac, avec Patrice Leconte, nouveau venu dans l’animation, embarquĂŠ pour prĂŠsenter les premières images de son film attendu pour 2012, Le Magasin des suicides. Deux grenouilles, sans princesse, barbotent donc dans ce bĂŠnitier du dessin bien remuĂŠ par une semaine de festival. CoincĂŠs sur le mĂŞme nĂŠnuphar, on en a profitĂŠ pour se la raconter.

“ – Ça a pourtant commencĂŠ bien au chaud pour moi avec la première projection. J’atteins la place idĂŠale : pas trop loin de l’Êcran, au centre de la rangĂŠe. Pile dans la zone d’atterrissage d’une armĂŠe d’avions en papier venus des sièges du fond – repère des cancres d’un amphi cinĂŠphile. Serge Bromberg, le sĂŠmillant dĂŠlĂŠguĂŠ artistique du Festival, monte sur scène pour prĂŠsenter ÂŤ la course de voiture la plus mortelle de l’univers Âť, j’ai nommĂŠ le manga pop et foutraque Redline. Bromberg, tel un proviseur hilare, nargue un gamin dont l’avion en papier s’est minablement abĂŽmĂŠ. Une coutume maison, comme les bruits de marĂŠcage quand la lumière s’Êteint ou les hurlements ÂŤ LAPIN ! Âť Ă chaque fois qu’on en voit un Ă l’Êcran‌

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GÉANT VERT PrĂŠsentation en grande pompe par une huile de DreamWorks qui a passĂŠ de la pommade aux concurrents Pixar et Disney : ÂŤ Ensemble, nous avons popularisĂŠ un art qui n’a plus Ă rougir de la comparaison avec le cinĂŠma traditionnel Âť, oubliant presque que c’est le vert de lance du studio qui est ici Ă l’honneur pour un dernier tour de piste : Shrek 4, il ĂŠtait une fin. La fin justifiĂŠe par des moyens dantesques et une rĂŠalisation homĂŠrique servant une histoire dĂŠsormais familière mais habilement dĂŠconstruite par un scĂŠnario jouissif : lassĂŠ par la paternitĂŠ, l’ogre souhaite redevenir la brute d’hier. Un sorcier fallacieux va l’aider Ă tourner la page. Et le spectateur de refermer cet ultime tome d’un revers nostalgique. _E.R. Shrek 4 // Un film de Mike Mitchell // Distribution : Paramount // États-Unis, 2010, 1h33 Sortie le 30 juin

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70 FESTIVAL D’ANNECY

ÂŤ ON A COMMENCÉ LES SIMPSON SANS LE MOINDRE STORY-BOARD. NE FAITES SURTOUT PAS COMME MOI ! Âť Š 2009 Universal Pictures and Illumination Entertainment

MATT gROENINg

BELLE ÉTOILE Film amĂŠricain en 3D relief entièrement rĂŠalisĂŠ dans un studio français, Moi, moche et mĂŠchant, projetĂŠ en avant-première mondiale Ă Annecy, nous embarque dans le projet fou de l’affreux Mr. Dru : dĂŠcrocher la Lune – au sens propre. Largement Ă la hauteur des meilleures productions Pixar pour un budget deux Ă trois fois moindre (compensĂŠ par une imagination dĂŠbridĂŠe, un souffle d’audace et beaucoup de talent), le film lĂŠvite bien au-dessus des habituels blockbusters pour bambins : ÂŤ Pas besoin d’en faire des caisses pour transmettre l’Êmotion Âť, tempère son corĂŠalisateur français Pierre Coffin. Robots jaunes et stupides, gamines dĂŠlicieusement turbulentes, mĂŠchants ridicules mais motivĂŠs, comme chez Tex Avery, les personnages s’en prennent plein la tronche mais n’ont jamais mal : c’est le paradis. _J.R. Un film de Chris Renaud et Pierre Coffin Sortie le 13 octobre 2010

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– Le coup du lapin, c’est Pierre Coffin, l’un des rĂŠalisateurs du jouissif et rĂŠgressif Moi, moche et mĂŠchant, qui m’a vendu la bĂŞte : ÂŤ Ă€ une ĂŠpoque, le gĂŠnĂŠrique du Festival n’Êtait pas animĂŠ. C’Êtait un peu comme les publicitĂŠs pourries pour la charcuterie du coin dans les vieux cinĂŠmas des Champs-ÉlysĂŠes. Ă€ un moment, il y avait un plan sur un lapin. Au bout de quelques jours, tout le public criait ÂŤ lapin ! Âť avant mĂŞme que le fameux plan n’apparaisse‌ C’est restĂŠ. Âť Pour les avions, c’est plus nuageux : on m’a expliquĂŠ qu’une annĂŠe, le programme du Festival contenait des avions Ă dĂŠcouper... Quoi qu’il en soit, le but consiste Ă atteindre l’Êcran, promesse d’ovation digne de celle qui a accueilli Matt groening, venu donner une confĂŠrence Ă un parterre d’animateurs pendus Ă ses conseils messianiques : ÂŤ Ne faites surtout pas comme moi, on a commencĂŠ sans le moindre story-board, ni la moindre charte graphique. Le seul qui bossait avec moins de moyens que nous c’Êtait Bill Plympton‌ Âť – Plympton ? Lui m’a expliquĂŠ d’oĂš vient ce mĂŠlange de gags et de violence qui parcourt ses films : ÂŤ Un jour, Ă New York, je me suis pris un poteau en pleine poire. J’avais très mal puis je me suis repassĂŠ la scène mentalement, j’ai commencĂŠ Ă rire et j’ai oubliĂŠ la douleur. C’est exactement pour ça que c’est important de faire rire les gens. Âť L’autre mariage qui le botte, c’est la trinitĂŠ gore-ĂŠrotisme-humour qu’il partage avec un cinĂŠaste qu’il adore et qui l’adore, Quentin Tarantino. Les deux lascars se sont rencontrĂŠs au Festival de Sundance l’annĂŠe de Reservoir Dogs. Plus tard, c’est dans Kill Bill que Tarantino convoquera Plympton en donnant son nom au fiancĂŠ assassinĂŠ. – Un pont entre le film en prise de vue rĂŠelle et animation, j’en ai vu un autre se dresser avec Summer Wars de Mamoru hosoda, qui a prophĂŠtisĂŠ : ÂŤ Il y a encore beaucoup de champs cinĂŠmatographiques qui doivent ĂŞtre explorĂŠs par l’animation. Je considère l’animation comme une technique filmique, pas comme un genre Ă part entière. Âť Dans son long mĂŠtrage, plĂŠbiscitĂŠ par les salles annĂŠciennes, il oppose un Japon hyperconnectĂŠ, en images de synthèse, Ă un fĂŠodalisme Ă l’ancienne, issu du passĂŠ samouraĂŻ, dĂŠpeint en 2D traditionnelle. – Le dessin fait main, ça a longtemps ĂŠtĂŠ le prĂŠ carrĂŠ de l’empire Disney. J’ai vu leur documentaire Waking Sleeping Beauty. Un vrai ĂŠpisode de Dallas, une plongĂŠe dans l’univers impitoyable de l’Êquipe d’animation du studio, entre 1984 et 1994 – on y croise entre autres un gamin hagard et ĂŠchevelĂŠ, recroquevillĂŠ sur sa table Ă dessin et nommĂŠ Tim Burton. PĂŠriode de tensions fertiles oĂš

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FESTIVAL D’ANNECY 71

ÂŤ JE CONSIDĂˆRE L’ANIMATION COMME UNE TECHNIQUE FILMIQUE, PAS COMME UN GENRE Ă€ PART ENTIĂˆRE. Âť MAMORU hOSODA

– Travailler dans la contrainte, c’est gage de concision et d’efficacitĂŠ d’après le papa de Wallace & Gromit, Nick Park. Bien que membre du jury des films de fin d’Êtudes, il est arrivĂŠ timide comme un bachelier Ă l’oral. Avant de pester contre la tendance aux films ÂŤ un peu tous dans la mĂŞme veine, tristes et dĂŠsenchantĂŠs. Ce ton peut masquer l’incapacitĂŠ Ă tenir un rythme, une histoire. C’est comme la dĂŠbauche d’effets visuels de certaines grosses productions, qui se rĂŠpètent au fil des ans. Âť – Une tendance au pessimisme et au macabre qu’on a retrouvĂŠe dans les courts mĂŠtrages en compĂŠtition. De quoi faire remonter ceux qui prennent des chemins de traverse comme Love Mouse, japanime complètement trippĂŠ sur les amours d’une souris et d’un fromage. En parlant d’animaux barrĂŠs, t’as toujours pas vu Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson, qui a gagnĂŠ le Cristal du long mĂŠtrage‌ – Mais j’ai tout tentĂŠ ! J’ai fait le pied de grue dans le purgatoire du Festival : la bourse d’Êchange de billets. C’est comme au marchĂŠ, on plante les tickets esseulĂŠs sur un tableau et c’est ensuite au premier qui dĂŠgaine une place Ă troquer. J’ai beau avoir essayĂŠ de ruser, pas moyen d’obtenir un sĂŠsame pour le renard. Du coup, je me suis rabattu sur un autre marchĂŠ enivrant, vingt-cinq ans d’âge, le MIFA – marchĂŠ international du film d’animation. vĂŠritable orchestre de producteurs, animateurs, diffuseurs, dirigĂŠs Ă l’unisson par son responsable, MickaĂŤl Marin : ÂŤOn a toujours eu Ă cĹ“ur d’associer le business Ă l’artistique. Et ça marche : Aton Soumache, producteur de films comme Renaissance, me confiait ĂŞtre venu la première fois comme simple ĂŠtudiant. ’’ L’averse s’Êpuise et l’Êcran gĂŠant gonflable accueille enfin Lascars, exemple de la vitalitĂŠ de l’animation française. Pluie de rĂŠcompenses sur les hexagonaux Ă la fin d’un Festival ouvert par L’Illusionniste de Sylvain Chomet, ĂŠmouvant hommage Ă Jacques Tati, dont le rĂŠalisateur des Triplettes de Belleville a transposĂŠ un scĂŠnario inĂŠdit. Tom haugomat et Bruno Mangyoku, diplĂ´mĂŠs de l’École des gobelins, remportent le prix de la première Ĺ“uvre pour JeanFrançois. Dominique MonfĂŠry dĂŠcroche une mention spĂŠciale avec Kerity, la maison des contes. Signes d’un lac oĂš l’animation ne nous aura pas posĂŠ de lapin.

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Š Plymptoons

trois ĂŠgos gĂŠniaux – Michael Eisner, Jeffrey Katzenberg et Roy Disney – donnent naissance Ă certains des plus grands succès de la compagnie : La Petite Sirène, La Belle et la bĂŞte ou Le Roi lion‌ Une ĂŠcole Ă la dure oĂš les plus grands ont frottĂŠ leur fond de culotte.

BILL PLYMPTON‌ ‌ DOUBLE CHEESE ÂŤ Bill Plympton is God Âť : c’est Matt Groening, le crĂŠateur des Simpson, qui le dit. Grand habituĂŠ d’Annecy oĂš il a dĂŠjĂ raflĂŠ cinq prix, l’animateur culte, chantre de l’humour noir, y prĂŠsentait cette annĂŠe son nouveau court mĂŠtrage, The Cow Who Wanted to Be a Hamburger. ÂŤ Un jour, je passe près d’un prĂŠ et je vois une vache qui broute, hyperconcentrĂŠe sur son brin d’herbe comme si son but ĂŠtait de manger jusqu’à devenir un parfait hamburger Âť, nous confie le sexagĂŠnaire en mimant l’animal. PrĂŠdominance du noir, aplats de couleurs primaires inspirĂŠs par l’art de Kandinsky, le film est aussi tragique (c’est moche de finir Ă l’abattoir) qu’hilarant (la vache, jugĂŠe trop maigrelette par le boucher, se met Ă la muscu). Un vrai rĂŠgal oĂš rien n’est Ă prendre au sĂŠrieux, sauf le talent : Bill tient Ă nous prĂŠciser qu’il adore les hamburgers‌ _J.R.

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72 OLIVIER ASSAYAS /// CARLOS

La sĂŠrie d’OLIVIER ASSAYAS pour Canal+ s’est muĂŠe en film fleuve, qui explore, Ă travers le parcours de Carlos, l’histoire du terrorisme mondial. EncensĂŠ Ă Cannes, incarnĂŠ par l’impressionnant Edgar Ramirez, ce triptyque de cinq heures et demie sort ce mois-ci sur grand ĂŠcran dans une version rĂŠduite Ă 2h45. Entretien avec un metteur en scène plus alerte et dĂŠsenclavĂŠ que jamais. _Propos recueillis par ClĂŠmentine Gallot (avec AurĂŠliano Tonet)

Un film d’Olivier Assayas Avec Edgar Ramirez, Alexander Scheer‌ Distribution : MK2 Diffusion France, 2010, 2h45 Sortie le 7 juillet

L

e film attaque dans le vif du sujet, en pleine action, et ĂŠpargne au spectateur tout ĂŠlĂŠment biographique sur la jeunesse ou la formation de Carlos‌ Avec un film de cette durĂŠe et de cette complexitĂŠ, on est obligĂŠ d’adopter rapidement un parti pris. Il devait commencer lorsqu’il devient membre officiel et actif du FPLP et se terminer par son arrestation. vingt ans, c’est dĂŠjĂ beaucoup. MĂŞme si, de temps en temps, le film ĂŠvoque de façon transversale sa formation, j’avais envie d’être tout de suite au cĹ“ur de ce qui fait l’identitĂŠ de Carlos, c’est-Ă -dire le passage Ă l’acte terroriste.

Dans la version courte, vous avez conservĂŠ la longue scène de prise d’otages de l’Opep, qui semble constituer l’Êpine dorsale du film, le moment oĂš tout bascule pour Carlos. La version pour le cinĂŠma est Ă la fois une version rĂŠduite et une autre version. Le problème ĂŠtait d’arriver Ă raconter la mĂŞme histoire, avec une cohĂŠrence, et en conservant le mĂŞme arc : il faut adapter tous les paramètres, Ă´ter des chapitres entiers et, Ă l’intĂŠrieur de ceux que l’on conserve, utiliser toutes les ficelles du montage. J’ai conservĂŠ l’essentiel, tout en le condensant, mais, au fond, les deux films ont les mĂŞmes ĂŠquilibres. Au moment de l’Êcriture du scĂŠnario, pensiez-vous dĂŠjĂ Ă une version cinĂŠma ? Je n’ai jamais pensĂŠ que cinĂŠma, mais je savais que cela serait un film de cinq heures trente, et je suis lucide quant Ă la difficultĂŠ que pose, commercialement, cette durĂŠe sur grand ĂŠcran. Le triptyque pour Canal+ ĂŠtait destinĂŠ Ă la France, et une version cinĂŠma devait ĂŞtre diffusĂŠe dans le reste du monde. Cela faisait partie de la conception d’ensemble du film, dès le

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Š Jean-Claude Moireau / Film en stock / Canal +


Š Jean-Claude Moireau / Film en stock / Canal +

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dĂŠpart. Ensuite, je me suis rendu compte que la version triptyque fonctionnait bien auprès du public des salles. Et je me suis rendu Ă l’idĂŠe qu’au fond ce film avait deux versions.

LE MIRACLE RAMIREZ Comme le hasard fait bien les choses, Edgar Ramirez partage sa nationalitĂŠ (vĂŠnĂŠzuĂŠlienne) et son patronyme avec Carlos (Ilich Ramirez Sanchez). Il est aussi polyglotte, d’avoir suivi autour du monde un père militaire. RepĂŠrĂŠ Ă la fac par le cinĂŠaste Alejandro Gonzalez Iùårritu, qui lui offre un rĂ´le dans Amours chiennes, Ramirez refuse, prĂŠfĂŠrant ses ĂŠtudes diplomatiques. L’acteur de 33 ans est finalement lancĂŠ par le soap Cosita rica et enchaĂŽne avec des rĂ´les dans The Bourne Ultimatum et la jungle cubaine du Che de Steven Soderbergh. ÂŤ Je ne l’ai pas trouvĂŠ parce que je l’avais vu au cinĂŠma, mais Ă cause de la contrainte basique du film : il fallait un acteur latino-amĂŠricain qui ait la corpulence de Carlos, plutĂ´t 30 ans, la capacitĂŠ de tenir un premier rĂ´le oĂš l’on porte tout sur ses ĂŠpaules et qui parle couramment espagnol, français et anglais Âť, explique Olivier Assayas. ÂŤLes critères ĂŠtaient tellement restrictifs qu’il ĂŠtait le seul. C’est miraculeux qu’il ait existĂŠ ! Un paramètre manquait, et le film ĂŠtait bancal. Âť Le suave Ramirez devrait bientĂ´t incarner Pablo Escobar, king de la drogue colombien, dans le biopic de Joe Carnahan. _C.G.

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Comment avez-vous vĂŠcu la sĂŠlection du film hors compĂŠtition Ă Cannes ? C’Êtait compliquĂŠ et inutilement polĂŠmique. Disons que plus j’avançais dans le film, plus je me disais qu’il ĂŠtait purement cinĂŠmatographique et pas du tout tĂŠlĂŠvisuel. Je pensais qu’il aurait une vie dans des festivals, mais il ne pouvait ĂŞtre prĂŠsentĂŠ Ă Cannes, pour des raisons de calendrier. Thierry FrĂŠmaux l’a vu très tĂ´t, y a rĂŠflĂŠchi et a consultĂŠ Canal+, qui a acceptĂŠ d’en retarder la diffusion. La possibilitĂŠ de voir Carlos Ă Cannes dĂŠpassait dĂŠjĂ mes scĂŠnarios les plus optimistes. Et puis il y a eu une levĂŠe de boucliers de la profession, parce que le film est produit par la tĂŠlĂŠvision. J’ai suivi cela avec une certaine consternation, puisque, dès qu’il passera dans les festivals du monde entier, il redeviendra un film de cinĂŠma. C’est une sorte d’hypocrisie impossible, en somme. En Grande-Bretagne avec la BBC ou aux États-Unis avec HBO, la tĂŠlĂŠvision produit des programmes ambitieux. Selon vous, estce de plus en plus le cas en France avec des fictions comme Carlos ? En ce qui me concerne, je ne me dis pas que je fais un film pour la tĂŠlĂŠvision, cela me paralyse complètement. Ça serait l’inverse des raisons pour lesquelles je fais du cinĂŠma. Je n’ai jamais tournĂŠ une image sans me dire qu’elle ĂŠtait destinĂŠe au grand ĂŠcran. Je me fiche de savoir si c’est la tĂŠlĂŠvision qui paie ou quelqu’un d’autre. Je ne pense pas que les films soient dĂŠterminĂŠs par la traçabilitĂŠ de l’argent : leur genèse est ĂŠvidemment artistique et pas financière. Disons qu’a priori la tĂŠlĂŠvision est le mĂŠdium de la contrainte et du formatage ; mais, si elle offre une libertĂŠ absolue, cet espace-lĂ , pour moi, c’est du cinĂŠma. Parlons de la bande originale : vous avez insĂŠrĂŠ plusieurs morceaux new wave, au diapason de la mise en scène, nerveuse, en mouvement‌ De manière gĂŠnĂŠrale, je n’utilise pas de musique de film Ă proprement parler, je me sers uniquement de collages un peu hasardeux ; je ne sais jamais ce que je vais choisir comme bande-son. Je pensais que le film imposerait une B.O. plutĂ´t classique du fait

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CARLOS /// OLIVIER ASSAYAS 75

 LE FILM N’ABSORBAIT QUE LES MORCEAUX QUI PRODUISAIENT DE L’ÉNERgIE ET LE PROPULSAIENT EN AvANT. 

de sa matière documentaire et rĂŠaliste. Mais, finalement, rien ne marchait. J’ai fini par prendre au hasard des morceaux dans ma discothèque iTunes, et le film n’absorbait que ceux qui produisaient de l’Ênergie et le propulsaient en avant. Ces morceaux, mĂŞme placĂŠs Ă des moments improbables, ont une ĂŠnergie rock directe. La mise en scène semble accompagner le personnage : au dĂŠbut, la camĂŠra est rapide, puis, Ă mesure que le personnage s’enlise et s’avachit, elle ralentit. Le film posait plus de problèmes qu’un film normal en raison de sa durĂŠe. Cela nĂŠcessitait de constamment renouveler l’Êcriture et de changer de tempo. NĂŠanmoins, la forme s’est imposĂŠe sur le tournage: des scènes d’action comme la prise d’otages de l’Opep demandaient d’être rapides et très dĂŠcoupĂŠes, mais les moments d’attente devaient ĂŞtre des

lorsqu’ils sont contradictoires, pour que, progressivement, quelque chose se dessine : un individu complexe, multiple, qui se perd dans ses masques. Finalement, il y a très peu de matière romanesque dans la version courte. La masculinitĂŠ, Ă travers le corps de Carlos, constitue un autre motif du film. Vous avez conservĂŠ un plan oĂš il se contemple nu dans le miroir ; puis il est arrĂŞtĂŠ en pleine crise de virilitĂŠ, affaibli par une opĂŠration des testicules. L’histoire de Carlos raconte quelque chose sur la problĂŠmatique du machisme, qui est une question qui envahit la sociĂŠtĂŠ contemporaine, obsĂŠdĂŠe par la virilitĂŠ de façon malsaine. Carlos raconte cette histoire de façon cruelle, c’est une problĂŠmatique qui est mise en jeu dans un film d’action. Cela faisait partie depuis le dĂŠpart du champ du rĂŠcit.

ÂŤ CARLOS EST UN INDIvIDU COMPLEXE, MULTIPLE, QUI SE PERD DANS SES MASQUES. Âť longs plans-sĂŠquences. Il en y a plus que dans n’importe lequel de mes films. Du coup, les comĂŠdiens disposaient de plus de libertĂŠ : on tournait sans rĂŠpĂŠtition, ce qui marchait finalement mieux que si les scènes avaient ĂŠtĂŠ mises en place de manière rigide. Comment avez-vous abordĂŠ la question de l’hĂŠroĂŻsation, l’Êquilibre entre l’idĂŠal rĂŠvolutionnaire et le cynisme mercenaire de Carlos ? Carlos est tout cela Ă la fois : il est parfois un hĂŠros et parfois l’inverse, selon les moments du rĂŠcit. L’histoire de Carlos ne pose pas de dĂŠbat moral particulièrement complexe, n’importe quel spectateur peut avoir un point de vue sur ses actions, je ne suis pas obligĂŠ de le lui fournir. Ma mĂŠthode est de faire confiance aux faits, en en accumulant le plus possible, mĂŞme

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Vous ĂŞtes-vous senti obligĂŠ de vous situer par rapport Ă d’autres films de genre – comme Mesrine et Che, par exemple ? Ce sont des prototypes qui ont ouvert un espace et rendu concevables des choses qui ĂŠtaient impossibles auparavant, y compris Carlos. J’en bĂŠnĂŠficie par contrecoup. Mesrine prouve que, dans le cadre du cinĂŠma français, on peut tenir cette distance-lĂ avec un personnage qui n’est pas ÂŤ positif Âť ; et Che, que j’aime beaucoup, prend un personnage iconique sans raconter son histoire. C’est très fort de la part de Soderbergh de faire ce film en espagnol et de se servir du Che comme vecteur de l’histoire politique pour aborder des questions très techniques, jamais racontĂŠes au cinĂŠma.

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BOUDOIR ÉBATS, DÉBATS, CABAS : LA CULTURE DE CHAMBRE A TROUVÉ SON ANTRE

 AUCUNE ADAPTATION DE QUICHOTTE N’EST VRAIMENT BONNE, À PART LA MIENNE !  ALBERT SERRA

Š Romà n Yùà n

P. 78

DVD-THĂˆQUE

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CD-THĂˆQUE

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ALBERT SERRA, le prochain Quichotte ?

HARPER SIMON et SEAN LENNON tuent le père

BIBLIOTHĂˆQUE

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BD-THĂˆQUE

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Football et morale selon OLLIVIER POURRIOL

SUEHIRO MARUO, ou la plasticitÊ d’une Île

LUDOTHĂˆQUE Les turbines bien huilĂŠes de MACHINARIUM

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Š Éditions Capricci

78 LE BOUDOIR /// DVD-THĂˆQUE

DON QUI CHARME ALBERT SERRA, LE PROChAIN QUIChOTTE ? Pas de moulin Ă vent ni de scènes de bataille dans Honor de cavalleria d’ALBERT SERRA. Dans son adaptation du roman de Cervantès, le rĂŠalisateur catalan filme les gestes du quotidien. Conversation avec un artiste Ă l’esprit chevaleresque. _Par RaphaĂŤlle Simon

Deux hommes dans la campagne. L’un, vieux et osseux, les jambes, nage le crawl, fait bronzette. Ce qui compte, regarde le ciel. L’autre, replet, a les yeux rivĂŠs au sol. voici c’est le prĂŠsent du passĂŠ. Honor de cavalleria est un Don Quichotte et Sancho Pança. Du grand classique film charnel, sensuel, sensoriel. Sous leurs carcasses, espagnol, Albert Serra a extrait l’essence : ÂŤ Adapter fatiguĂŠe ou dodue, les personnages sont beaux, ils se formellement le roman aurait ĂŠtĂŠ ennuyeux touchent, s’aiment comme un vieux couet difficile, vu nos moyens. J’ai donc choisi ple. L’idĂŠe du film est d’ailleurs nĂŠe d’une de raconter ce qu’il n’y a pas dans le livre, pulsion physique:l’acteur principal ressemce qu’il se passe entre les chapitres. Âť Entre blait au Quichotte ! De mĂŞme, le caractère les chapitres, c’est l’aventure du quotidien. mutique de Sancho s’est imposĂŠ de luiQuichotte et Sancho coupent du fenouil, mĂŞme:ÂŤD’habitude, Sancho est un personmangent des noix au bord de l’eau, arpennage vulgaire, un peu sot. Mais l’acteur ĂŠtait tent la campagne dĂŠserte de l’aube au crĂŠcalme, silencieux, c’est d’ailleurs la clef de puscule, contemplent la nature. Les tirades son ĂŠlĂŠgance. Âť Serra filme l’errance, la folie de Sancho et le cliquetis des ĂŠpĂŠes font de Quichotte qui avance sans trajet, comme place Ă des dialogues rares, aux grinceau purgatoire, Ă l’instar du film, ni narratif ni ments d’une armure, aux caresses du vent. Honor de cavalleria gĂŠographique. Est-on dans la rĂŠalitĂŠ ou d’Albert Serra (Capricci) Pour Serra, la reconstitution littĂŠrale est un dans sa figuration ? C’est cette ambiguĂŻtĂŠ leurre : ÂŤAucune adaptation de Quichotte n’est vraiment qui fait le charme de ce film idĂŠaliste. On se retrouve bonne, Ă part la mienne! Les rĂŠalisateurs ont tellement bercĂŠ sur un fil, entre poĂŠsie et burlesque, trivialitĂŠ et de respect pour l’œuvre qu’ils tombent dans le clichĂŠ et transcendance, ciel et terre. Quichotte s’Ênerve que manquent de fantaisie. Les seuls moments fascinants Sancho ne remarque pas qu’il a plu, qu’il y a des escarsont ceux qui prennent de la distance avec le livre, gots. Parce que Sancho dort, parce qu’il ne voit pas comme dans le film de Welles oĂš Quichotte avance le chemin de sa quĂŞte. Celle de Serra consistait Ă redans le vent tel un hallucinĂŠ en regardant le ciel. Âť trouver l’esprit subversif des avant-gardes surrĂŠalistes ou rock, aujourd’hui disparues. Aussi fanatique que Serra s’amuse d’ailleurs avec des anachronismes, des son Quichotte, il y est parvenu. images figĂŠes que l’on a du passĂŠ : Don Quichotte croise

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LES AUTRES SORTIES AMOURS Ă MORT MAUVAIS SANG de Leos Carax (France TĂŠlĂŠvisions) LA REINE DES POMMES de ValĂŠrie Donzelli (MK2 Éditions) Dans un Paris sombre et onirique au ciel chamboulĂŠ par le passage de la comète de halley, des gangsters rivalisent pour mettre la main sur le germe d’un virus mortel touchant les amants qui font l’amour sans s’aimer‌ visage diaphane et cheveux courts, Juliette Binoche hypnotise la camĂŠra de Leos Carax. Face Ă elle, Denis Lavant fascine en clown tragique et reptilien. Sorti en 1985, ce grand film lunaire trouve ici sa première ĂŠdition DvD. Dans La Reine des pommes, Adèle croit mourir lorsque son homme la quitte. Sur les bons conseils de sa tante, elle dĂŠcide de se consoler dans les bras d’autres hommes. Une comĂŠdie musicale burlesque et inattendue, au bon goĂťt de fruit dĂŠfendu. _J.R.

MONSTRES ET COMPAGNIE LES VOYAGES DE GULLIVER de Dave Fleischer (Wild Side) THE DEVIL AND DANIEL WEBSTER de William Dieterle (Carlotta) Sorti en 1939, le film d’animation Les Voyages de Gulliver impressionne par son inventivitĂŠ et la qualitĂŠ de son dessin : il est l’œuvre de l’un des deux frères Fleischer, pionniers de l’image par image et ĂŠternels concurrents de leur contemporain Walt Disney. L’histoire touchante et musicale de gulliver, naufragĂŠ capturĂŠ par les minuscules Lilliputiens, Ă mettre entre toutes les mains. Petit joyau du studio RKO distribuĂŠ en 1941, The Devil and Daniel Webster revisite le mythe de Faust en l’ancrant dans la lĂŠgende de la naissance des États-Unis : au XIXe siècle, un paysan troque son âme contre la promesse de l’opulence‌

SI VOUS SOUHAITEZ COMMUNIQUEZ DANS NOTRE PROCHAIN NUMERO, CONTACTEZ-NOUS : 01 44 67 68 01 ou troiscouleurs@mk2.com

_J.R.

LE COUP DE CĹ’UR DU VENDEUR HADEWIJCH de Bruno Dumont (TF1 VidĂŠo) Cinquième long mĂŠtrage de Bruno Dumont, auteur entre autres de L’HumanitĂŠ, La Vie de JĂŠsus et Flandres, Hadewijch marque un tournant dans la carrière de ce cinĂŠaste. La violence propre Ă son univers ne s’exprime plus ici par l’intermĂŠdiaire de scènes chocs prenant le spectateur Ă la gorge – comme celle qui clĂ´turait Twentynine Palms (2003), par exemple. La dĂŠtresse de cette jeune fille, Ă la recherche de Dieu et d’elle-mĂŞme, l’obstination vertigineuse qui est la sienne sont avant tout palpables Ă travers le magnĂŠtisme de son visage. Moins dĂŠmonstratif, Hadewijch n’en est que plus mystĂŠrieux et troublant. _Florian Guignandon, vendeur Ă la boutique du MK2 Quai de Loire

LE 1ER MENSUEL CULTUREL GRATUIT www.mk2.com/troiscouleurs JUIN 2010


Š D.R.

80 LE BOUDOIR /// CD-THĂˆQUE

Harper Simon

FILS UNIQUES hARPER SIMON ET SEAN LENNON TUENT LE PèRE Ă€ l’heure oĂš les hĂŠritiers prennent d’assaut le rock, deux d’entre eux sortent du lot : loin de la pop Ă papa de leurs confrères, SEAN LENNON (fils de John et Yoko) et HARPER SIMON (fils de Paul) s’affranchissent en majestĂŠ. _Par AurĂŠliano Tonet

Gainsbourg, Buckley, Higelin, Chedid, Souchon, enregistrant peu (deux albums solo pour Sean) ou Veloso, Dutronc‌ Depuis quelques saisons, la RĂŠpudans l’ombre d’un groupe (les mĂŠconnus Menlo blique pop se transforme en un drĂ´le de royaume Park pour harper). L’envie d’ailleurs, enfin : quoique dynastique, oĂš le pouvoir se transmet de père en fils – restĂŠ proche de papa Paul, qui intervient dans l’ÊcriĂŠvolution d’autant plus ĂŠtonnante que l’attrait du rock ture ou l’instrumentation de plusieurs morceaux de a longtemps rĂŠsidĂŠ dans son caractère ontologiqueson album, harper dĂŠlaisse en grande partie le folk ment dĂŠmocratique et accessible‌ Difficile, Ă vrai dire, paternel pour s’aventurer dans des terrains country d’expliquer cette soudaine effusion de sang bleu : faciplus inattendus. Quant Ă Sean, si son nouveau projet, litĂŠ artistique et journalistique? Primat croisThe ghost of a Saber Toothed Tiger (un duo sant du marketing? Besoin de repères dans avec sa fiancĂŠe, le mannequin Charlotte un environnement musical branlant ? Kemp Muhl), ĂŠvoque les albums cosignĂŠs Sous les feux croisĂŠs de l’actualitĂŠ estivale, par John et Yoko, il poursuit la dĂŠmarcaharper Simon et Sean Lennon incarnent tous tion entamĂŠe dès son premier disque, Into deux Ă merveille les problĂŠmatiques que the Sun, en 1998 : hip-hop, bossa nova ou pose cette aristocratisation de la chose pop californienne, les humeurs musicales rock. L’endogamie, tout d’abord:ÂŤMa mère y sont toujours aussi ĂŠloignĂŠes de l’ADN et celle d’Harper ĂŠtaient très amies lorsque Harper Simon d’Harper Simon beatlesien. j’Êtais enfant, confie Sean Lennon, qui joue (Tulsi Records / PIAS) Le nouveau dada de Sean ? Serge gainsLes Jardins du Luxembourg de plusieurs instruments sur le premier album The Ghost of a Saber Toothed bourg, dont il livre une jolie reprise en face B Tiger (Chimera Music) solo d’harper. Nous vivions tous les deux du premier single de The ghost‌, le tout dans l’Upper West Side, Ă New York, puis Harper est aussi francophile et rĂŠussi Les Jardins du Luxembourg : parti ĂŠtudier la guitare Ă Boston, ce qui a eu un fort ÂŤ J’ai toujours adorĂŠ la subtilitĂŠ et la sophistication de impact sur moi. Nous sommes restĂŠs amis. Son album la culture française. La Planète Interdite est un de mes est formidable. Âť Le poids du père, ensuite : trentenaires films prĂŠfĂŠrĂŠs. Âť Sur la pochette de l’excellent disque avancĂŠs, dotĂŠs chacun d’un timbre ĂŠtrangement d’harper figure un avion : voyageurs, nullement enchaĂŽsemblable Ă celui de leur gĂŠniteur, Sean et harper se nĂŠs Ă leur trĂ´ne, Lennon et Simon juniors sont deux sont lancĂŠs dans la musique presque Ă reculons, princes on ne peut plus lĂŠgitimes.

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LES AUTRES SORTIES LE CONCUBINAGE INVINCIBLE FRIENDS de Lilly Wood and The Prick (Wagram / Cinq7) Une pincĂŠe de country-pop Ă la She and him, quelques ballades new wave façon The XX ou plus ĂŠlectriques dans la veine de The Kills : tournez manège, voici Lilly Wood and the Prick, un nouveau concubinage rock. Après un dĂŠtour par la Californie, ÂŤ Lilly Wood Âť (Nili hadida) pose ses bagages Ă Paris, oĂš la Franco-IsraĂŠlienne rencontre son ÂŤ Prick Âť (petit con), Benjamin Cotto. Naissance d’un premier album. Sur les traces party friendly de l’Anglaise La Roux, le duo injecte un groove ĂŠlectro Ă sa pop sucrĂŠe, tout en distillant, sous le fluo, un spleen post-ado : ÂŤ Nous voilĂ avec nos cheveux longs / Nous voilĂ avec nos tee-shirts en haillons / Nous voilĂ avec nos soirĂŠes d’ivresse / C’est nous, les gosses sans espoirs. Âť Prometteur. _E.V.

L’INSOMNIAQUE BEFORE TODAY d’Ariel Pink & Haunted Graffiti (4AD / Beggars) Ariel Pink, angelot freak folk de L.A., enregistre depuis le milieu des nineties et pendant ses insomnies, des mĂŠlodies rĂŞveuses sur des magnĂŠtophones 8 pistes Ă bout de souffle. Ces mille-feuilles sonores, ĂŠvoquant dans un flou de rĂŠminiscences, l’inconscient d’une bande FM bloquĂŠe sur les annĂŠes 1980, entre glam-rock fausset, synth-pop en falsetto, funk droguĂŠ et variète au mètre, ont sĂŠduit Animal Collective et leur label Paw Tracks, avant que 4AD ne mette le dormeur debout dans le studio du petit-fils de Quincy Jones, pour le faire accoucher de son plus bel album Ă ce jour, ce Before Today dont la production soigneuse n’Êvacue jamais la brume nostalgique, hypnagogique au-delĂ de la hype. _W.P.

LA BELLE INDÉCISE LOVE AND ITS OPPOSITE de Tracey Thorn (Strange Feeling / PIAS) MoitiĂŠ du duo ĂŠlectro-pop Everything But The girl, qu’elle forme avec son ĂŠpoux Ben Watt depuis le dĂŠbut des annĂŠes 1980, Tracey Thorn goĂťte de temps Ă autre aux joies et aux peines du cĂŠlibat, comme il y a vingt ans sur Protection de Massive Attack, ou comme ici sur Love and Its Opposite, troisième album solo en trois dĂŠcennies. D’une voix chaude, fragile et caressante, que soutiennent d’ÊlĂŠgants arrangements folk-pop, l’Anglaise dĂŠplie un somptueux traitĂŠ de dialectique amoureuse : de mariage en divorce, d’amour fou en tromperies, Thorn la bien nommĂŠe chante, indĂŠcise, la rose et l’Êpine. Cueillez-la. _A.T.

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Š Nil Éditions / illustration StĂŠphane Manel

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COUP DE TÊTE FOOTBALL ET MORALE Du coup de sang au coup de folie en passant par la triche caractÊrisÊe, le philosophe et cinÊphile OLLIVIER POURRIOL s’attaque au monde du ballon rond, dont il dÊcrypte la belle truanderie dans un essai en forme d’Éloge du mauvais geste. _Par Pablo RenÊ-Worms

Š Isabelle Negre

ÂŤLe football, ce n’est pas une question de vie ou de qui file seul au but, est dĂŠcoupĂŠ par le portier allemort. C’est bien plus important que cela Âť, avait coutume mand harald Schumacher. ÂŤ Au fond, le sale geste parde dire Bill Shankly, lĂŠgendaire manager du Liverpool fait. Commis par le parfait salaud. Âť Si Schumacher ne FC. La Faucheuse, justement, frappera 39 fois le 29 mai regrette rien, le grand homme ici est l’arbitre. C’est lui 1985 au heysel, juste avant la finale de la Coupe qui offre leur dimension historique aux ĂŠpisodes mard’Europe des clubs champions, qui opposait alors quants du football. Ne pas sanctionner cette agresLiverpool Ă la Juventus de Michel Platini, sion, comme plus tard la ÂŤmain de DieuÂť ou unique buteur du match, sur pĂŠnalty. Ollivier celle de Thierry henry, c’est leur donner toute Pourriol revient sur cet ĂŠpisode et l’exploleur splendeur, les inscrire dans l’inconssion de joie inappropriĂŠe du numĂŠro 10. cient collectif. Mais l’exemple de ces deux Pour lui, la rĂŠponse Ă apporter Ă ce geste mains montre une apprĂŠciation du public se trouve dans la dĂŠfinition du divertissediamĂŠtralement opposĂŠe. D’un cĂ´tĂŠ, la ment telle que l’envisageait Pascal : ÂŤJouer mano de Dios, de l’autre, celle de la honte. pour ne pas voir la mort. Âť L’aspect choAu fond, ce qui les diffĂŠrencie, c’est la façon quant serait donc Ă chercher ailleurs : ÂŤ Ce dont leurs auteurs les assument. Maradona n’est pas Platini le salaud. C’est ceux qui lui va ostensiblement chercher le ballon et en ont fait ça. Filmer sa joie et la monter, puis la Éloge du mauvais geste rit comme un enfant qui aurait mis les doigts montrer. C’est le montage parallèle entre d’Ollivier Pourriol dans le pot de confiture. henry, lui, ne coml’image de sa joie et l’image des cadavres (Nil Éditions) met pas vraiment le geste. Le ballon rebonqui est une saloperie.Âť dit sur sa main, comme si elle l’avait aimantĂŠ : ÂŤ Il a fait don de sa main Ă la France. Mais la France hĂŠsite L’injustice, Platoche l’a vĂŠcue quelques annĂŠes aupa- Ă la serrer, car son geste ĂŠtait condamnable, certes, ravant, quand, le 8 juillet 1982, il participe Ă l’ÊvĂŠne- mais insuffisamment.Âť Finalement, le football n’est pas ment qui va forger l’image de loser magnifique du un jeu moral, mais un sport qui se joue Ă 11 contre 11 football français : la demi-finale de Coupe du monde et oĂš, Ă la fin, c’est le plus ÂŤ mauvais Âť qui gagne. France-RFA. La scène, on la connaĂŽt : Patrick Battiston,

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LES AUTRES SORTIES LE MANIFESTE POLYGAME

LES TENTATIONS DU MĂ‚LE de Francesco Piccolo (Grasset, roman traduit de l’italien) ÂŤ Le jour oĂš Teresa est partie, j’avais une relation stable avec Valeria depuis neuf ans, avec Francesca depuis presque trois ans, et avec Silvia depuis un an et demi. Âť Bon père de famille, mari attentionnĂŠ et monteur de cinĂŠma passionnĂŠ, le narrateur de ce roman Ă la couverture ĂŠvocatrice (un somptueux corps de femme cabrĂŠ photographiĂŠ par Carla Cerati) n’a qu’un problème : son besoin compulsif de sexe et de partenaires multiples, qui lui rend la fidĂŠlitĂŠ impossible et ne lui donne mĂŞme pas mauvaise conscience. Des tribulations de ce polygame impĂŠnitent, Francesco Piccolo tire un roman Ă la fois torride, drĂ´le et ĂŠmouvant, oĂš perce une rĂŠflexion subtile sur le plaisir, la confiance et la tentation. _B.Q.

LA CURIOSITÉ LES NOUVELLES ARCHIVES DE L’ÉTRANGE d’Éric Yung (Le Cherche-Midi, chroniques)

Depuis les irrĂŠsistibles Nouvelles en trois lignes de FĂŠlix FĂŠnĂŠon et les savantes rĂŠflexions de Roland Barthes dans les annĂŠes 1960, plus personne ne doute du prodigieux matĂŠriau que sont les faits divers pour analyser le monde, source inĂŠpuisable pour les littĂŠrateurs. Chaque semaine, le journaliste Éric Yung raconte sur les antennes de France Bleu l’un ou l’autre de ces faits divers bizarroĂŻdes puisĂŠs dans les journaux français de toutes les ĂŠpoques, histoires de malchance accablante, de coĂŻncidences stupĂŠfiantes et d’anomalies statistiques. Il en a rassemblĂŠ une soixantaine dans ce gros volume qui ravira les amateurs d’insolite, lesquels savent bien que la rĂŠalitĂŠ dĂŠpasse souvent la fiction. _B.Q.

LE COUP DE CĹ’UR DE LA LIBRAIRE ARARAT de Frank Westerman (Christian Bourgois, rĂŠcit traduit du nĂŠerlandais)

Avec ce troisième opus traduit en français, le NĂŠerlandais Frank Westerman nous convie Ă une aventure tant intĂŠrieure qu’itinĂŠrante, celle de l’ascension du mont Ararat. Ă€ la fois haut lieu spirituel et plaque stratĂŠgique, Ă la frontière de la Russie, de la Turquie et de l’ArmĂŠnie, cette montagne se dresse comme un dĂŠfi pour l’auteur qui, se penchant sur son passĂŠ, dĂŠcide d’Êprouver ses acquis religieux, scientifiques et culturels Ă l’aune de ce pĂŠriple. Des prĂŠparatifs du voyage Ă son accomplissement, Westerman fait du lecteur son complice et lui dĂŠvoile toutes les facettes de cette quĂŞte, n’omettant rien du rĂŠel, du local et de l’universel, des paysages, des hommes. Intelligent et passionnant ! _Pascale Dulon, libraire au MK2 Bibliothèque

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Š Sueshiro Maruo/Casterman/Sakka

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ZONE LIBRE LA PLASTICITÉ D’UNE ĂŽLE Dernier-nĂŠ du culte SUEHIRO MARUO, L’Île Panorama tranche dans l’œuvre du mangaka japonais : le classicisme prend le pas sur l’EroGuro – mĂŠlange d’Êrotisme et de grotesque – et promet Ă son auteur de sortir des frontières de l’underground. _Par Joseph Ghosn (www.gqmagazine.fr)

On a dĂŠcouvert l’œuvre de Suehiro Maruo en France Or tout l’enjeu de Maruo est de faire croire Ă la plaugrâce au travail acharnĂŠ d’un petit ĂŠditeur, Le LĂŠzard sibilitĂŠ de ce qu’il reprĂŠsente ici : Ă savoir la construcnoir, qui a publiĂŠ une belle poignĂŠe de livres tĂŠmoi- tion d’une ĂŽle fantasmagorique, emplie de charmes et gnant de la vision radicale de ce dessinateur japonais. de secrets. La possibilitĂŠ d’une ĂŽle ? C’est exactement Une vision faite de sexualitĂŠ et de tension, de dĂŠviances cela : L’Île Panorama met en scène la construction d’une chimère Ă grande ĂŠchelle, d’un uniet d’anomie, mettant en exergue une forme vers joliment dĂŠcadent. Ce faisant, Maruo très baroque de cruautĂŠ, le plus souvent cite des rĂŠfĂŠrences de la fin du XIXe siècle dans des historiettes que n’auraient pas reniĂŠes les surrĂŠalistes les plus freudiens. Un comme le dessinateur Aubrey Beardsley, univers de brassages donc, qui situe nĂŠandont l’esthĂŠtique a marquĂŠ l’Angleterre vicmoins Maruo dans une zone oĂš la bande torienne finissante. Entre dĂŠmesure et homdessinĂŠe s’aventure assez peu. L’Île Panomage Ă ces maĂŽtres oubliĂŠs du dessin, L’Île rama le surprend dans un exercice moins Panorama sĂŠduit aussi par la beautĂŠ folle tranchĂŠ : l’adaptation d’un roman de facdu projet de son personnage principal : ce ture classique, dans lequel sexe et stupre ne dernier usurpe en effet l’identitĂŠ d’un mort sont que des appendices de l’intrigue. Autre dĂŠjĂ enterrĂŠ pour accomplir son rĂŞve. Prorupture : le rĂŠcit, qui, contrairement Ă ses L’Île Panorama de Ranpo blĂŠmatique identitaire – comment devenir ouvrages prĂŠcĂŠdents, adopte le temps long, Edogawa & Suehiro Maruo un autre pour se rĂŠaliser soi-mĂŞme? –, cette (Casterman/Sakka) pour prendre la mesure du roman initial quĂŞte constitue aussi une mise en abyme. sans chercher Ă le raccourcir ou Ă l’amoindrir. Ce qui Car on touche lĂ Ă la question de la singularitĂŠ de ne change pas, en revanche, c’est le trait : toujours aussi l’auteur:c’est bien en s’inspirant des autres (Beardsley, clair, aussi tranchant, illuminant de l’intĂŠrieur des consSade, la ligne claire europĂŠenne, etc.) que Maruo partructions graphiques aux airs faussement sages. En vient Ă s’accomplir. C’est-Ă -dire Ă devenir un grand optant pour une BD ÂŤ traditionnelle Âť, Maruo pousse sa auteur, tout simplement, et probablement une rĂŠfĂŠpropre dextĂŠritĂŠ graphique vers un classicisme ĂŠvorence pour tous les amoureux du dessin. quant les univers parallèles alambiquĂŠs, mais toujours fermement ancrĂŠs dans le rĂŠel, d’auteurs europĂŠens comme Moebius. JUIN 2010

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LES AUTRES SORTIES LE COMIC FUTURISTE

THE LAST DAYS OF AMERICAN CRIME de Rick Remender et Greg Tocchini (Emmanuel Proust)

violemment provocateur, ce thriller futuriste dresse le portrait d’une sociĂŠtĂŠ dans laquelle l’État sĂŠcuritaire a tentĂŠ l’impardonnable : exterminer toute volontĂŠ criminelle dans la population grâce Ă une invention qui agirait directement sur le cerveau. Le truand graham Brick y voit l’occasion de prĂŠparer ce qui pourrait rester comme le ÂŤ dernier crime amĂŠricain Âť. Le dessin aquarellĂŠ mais sanguinolent de greg Tocchini (dessinateur des comics X-Men, Star Wars‌) sert une intrigue captivante signĂŠe Rick Remender, dans une mise en scène cinĂŠmatographique impeccable. Un brillant rĂŠcit d’anticipation en trois ĂŠpisodes. _C.D.

LA FICTION SÉRIELLE CHRONOGRAPHIE de Dominique Goblet et Nikita Fossoul (L’Association) La bande dessinĂŠe commence-telle dès lors qu’on confronte deux dessins ? C’est la question posĂŠe par cet atypique Chronophagie dont l’histoire rĂŠside prĂŠcisĂŠment dans sa rĂŠalisation : pendant dix ans, entre 1998 et 2008, une mère – Dominique goblet – et une fille – Nikita Fossoul – vont se dessiner mutuellement et donc reproduire des centaines de fois les deux mĂŞmes dessins. Les mĂŞmes ? Pas vraiment, puisque de leur mise en regard ĂŠmerge peu Ă peu un rĂŠcit. Celui du lien entre la mère et la fille et de l’Êvolution de chacune. Dans ce volume dĂŠvorant, Ă la plastique hypnotique, se trouve l’un des plus beaux livres de ces dernières annĂŠes. _J.G.

LE COMIC GRIVOIS COMTESSE d’Aude Picault (Les Requins Marteaux/BD Cul)

D’abord paru sur un blog, ce conte licencieux est prĂŠsentĂŠ Ă la manière des petits formats de poche des annĂŠes 1970, un peu cheap et très sexy. Aude Picault y met en scène la rĂŞverie salace d’une bourgeoise en manque de sensations. Formellement minimaliste, son livre n’en est pas moins excitant. DrĂ´le, il ne sombre jamais dans le mauvais goĂťt, faisant une synthèse idĂŠale entre une reprĂŠsentation crue du sexe (les verges sont droites, les filles, poilues) et les moments les plus troubles de la jouissance. D’autres auteurs devraient bientĂ´t s’illustrer dans cette collection : après Aude Picault, on parle dĂŠjĂ de Riad Sattouf, Blutch ou Julien Carreyn‌ Ă€ suivre. _J.G.

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86 LE BOUDOIR /// LUDOTHĂˆQUE

MOTEUR ! LES TURBINES BIEN hUILÉES DE MACHINARIUM Une belle mĂŠcanique qui fait la nique aux studios mastodontes du loisir en pixels : voici Machinarium, humble production indĂŠpendante, qui ne pète pas plus haut que sa culasse. Dans ses rouages, le jeu vit des hauts. _Par Étienne Rouillon

Un jeu qui tue, sans faire de vous un assassin. Un impossible. Les arrière-plans de la ville, sales de coups rĂŠgal pur sucre, sans coĂťter bonbon. Un vrai bonbec, de Bic ou de crayons Ă la mine argile, sont baignĂŠs sans dec’ : Machinarium dĂŠchire sa mère et plaira Ă la dans une ambiance sonore signĂŠe TomĂĄĹĄ Dvořåk, comtienne. Après avoir gribouillĂŠ ses lettres de noblesse sur positeur Ă la croisĂŠe des partitions oniriques d’un Bonobo les plate-formes de tĂŠlĂŠchargement lĂŠgal, et d’un Aphex Twin. Une bande originale Ă l’aventure crayonnĂŠe profite d’une ĂŠdition savourer les doigts loin du clavier grâce au physique pour faire chavirer d’Êmoi les gonCD audio inclus dans le coffret. DĂŠpourvu doles, plus habituĂŠes aux tĂŞtes de pont d’une de dialogues, le rĂŠcit nous est livrĂŠ par des industrie qui mise sur la prouesse technique. flash-backs en animation traditionnelle dont Plus modeste, Machinarium peut tourner sur les silences sont aussi parlants que ceux du un ordinateur asthmatique, qu’il transforme mutique WALL-E. en machine Ă souffle emplissant les pouAu bout de la souris, on retrouve une jouamons du joueur avide de poĂŠsie : jackpot. bilitĂŠ des plus classiques – du genre ÂŤ pointe L’ÊpopĂŠe origami – dĂŠpliĂŠe en cinq heures et cliqueÂť –, basĂŠe sur la technologie Flash. – d’un petit robot en tĂ´le, Joseph, qui s’est Fort de l’expĂŠrience des petits jeux en ligne, pris une taulĂŠe par trois bandits. Non con- Genre : Pointe et clique le dĂŠveloppeur Amanita Design fait de ses Éditeur : Amanita Design tents de lui avoir piquĂŠ sa dame de fer, ils Plate-forme : PC/Mac moyens restreints un gage de simplicitĂŠ et projettent de faire exploser sa ville. Joseph, d’efficacitĂŠ. L’amanite fait mouche avec des loin d’être prophète en son pays, devra dĂŠjouer les tableaux qu’il faudra fouiller du regard pour passer Ă casse-mĂŠninges jetĂŠs entre lui et sa belle de mĂŠtal‌ l’environnement suivant, toujours exquis, comme autant Parfois bien pensante mais toujours bien pensĂŠe, l’in- de rĂŠcompenses pour votre ingĂŠniositĂŠ mise Ă rude trigue pourrait sortir des trousses des ĂŠtudiants en ani- ĂŠpreuve. Non que les ĂŠnigmes soient particulièrement mation de l’Êcole des gobelins. De main de maĂŽtre des- retorses, mais il faut faire sienne la mĂŠcanique d’un sinĂŠ, le canevas donne tout son sel Ă une trame uni- monde dĂŠpourvu d’affect organique, ne rĂŠpondant verselle, qui emprunte autant au Roi et l’Oiseau, pour qu’à l’implacable logique de coupe-circuits ĂŠlectriques, ses relectures boulonnĂŠes de la bergère et du ramo- rĂŠbus informatiques ou engrenages grippĂŠs. Mais telneur, qu’à M.C. Escher et ses escaliers Ă l’architecture lement humains, après tout.

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LES AUTRES SORTIES MILLE ET UNE NUITS PRINCE OF PERSIA : LES SABLES OUBLIÉS (Ubisoft, sur PC, PS3, X360‌) Après une escapade arty du cĂ´tĂŠ des estampes contemplatives, le sang bleu d’Orient retrouve une veine plus classique. Cet ĂŠpisode s’inscrit dans la trame dite des ÂŤ Sables du temps Âť et en reprend la structure : on fait le foufou Ă marcher sur les murs et enchaĂŽner les tractions en supination le long de donjons vertigineux, avant d’aller jouer les marchands de sable en couchant des chiĂŠes d’ennemis sur le tapis. En sus des retours dans le temps et autres capacitĂŠs offensives, on goĂťte l’apparition de deux pouvoirs : le gel de l’eau et la reconstitution d’ÊlĂŠments dĂŠtruits. Un titre ĂŠquilibrĂŠ Ă l’image de son royal funambule, un peu convenu mais très convenable. _E.R.

MILLE BORNES SBK X : SUPERBIKE WORLD ChAMPIONShIP (Milestone, sur PC, PS3, X360)

Las, rares sont les titres qui nous font tirer la poignÊe dans l’angle. guidon exigeant et boÎte de vitesse farouche, la sÊrie SBK continue de brÝler de la gomme sur des circuits difficiles à dompter pour peu que l’on supprime les aides à la conduite d’un mode arcade neurasthÊnique. BranchÊ sur le pignon simulation, le joueur ira souvent plonger du casque dans les plates-bandes de gravier avant de rÊussir à tenir la dragÊe haute à une I.A. virtuose. Encore limitÊ sur le plan graphique (mis à part les bolides), SBK reste la rÊfÊrence pour les abonnÊs au Solex qui veulent sentir un peu d’air entre les oreilles. _E.R.

DANS LE MILLE BLUR (Activision, sur PC, PS3, X360) Pour une fois c’est sa pub qui en parle le mieux. Le spot Tv montre des personnages cartoons tout droit sortis d’un Mario Kart, fichÊs sur de ridicules tacots orange fluo. Sur le circuit voisin, ils avisent des tires photorÊalistes pourtant douÊes des mêmes gadgets foutraques : bombes Êlectroniques, missiles à tête chercheuse de noises, rÊpulsifs sismiques. En transposant le principe des courses belliqueuses cher à Nintendo dans le monde des grands, Blur propose des parties en Êcran splittÊ qui taquinent la rÊtine et font vibrer le palpitant. Blur, c’est net, c’est fou. _E.R.

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89 hOLLYWOOD STORIES /// GRANDES ET PETITES hISTOIRES DU CINÉMATOGRAPhE

LE NOIR DESTIN DU SURHOMME La filmographie de MICHAEL CIMINO met Ă l’Êpreuve notre scrupule de ne pas confondre l’artiste et l’œuvre. Chacun des sept films tournĂŠs Ă ce jour raconte, avant l’heure ou après coup, son histoire : celle d’un maĂŽtre que sa passion de la maĂŽtrise a condamnĂŠ Ă la marge. Deuxième ĂŠpisode de notre feuilleton : L’AnnĂŠe du dragon, 1985.

ÉPISODE 2, SAISON 4 _Par François BĂŠgaudeau LA CHUTE

Š D.R.

The Deer Hunter (1978) racontait l’amère dĂŠcouverte du hasard par un hĂŠros qui entendait prĂŠsider au sort de la guerre et de son pays. Sourd Ă ses propres mises en garde, Cimino exige la maĂŽtrise totale sur son film suivant, La Porte du paradis. RĂŠsultat : cinq heures vingt-cinq que des producteurs ĂŠhontĂŠs charcuteront ; un fiasco critique et commercial ; la ruine de United Artists, structure crĂŠĂŠe, ça ne s’invente pas, pour assurer l’indĂŠpendance des rĂŠalisateurs Ă hollywood. La parabole est presque trop limpide : en poussant au maximum la souverainetĂŠ du director, Cimino le destitue, entraĂŽnant dans sa chute les francs-tireurs des annĂŠes 1970. Coppola ne s’en remettra jamais ; Scorsese traversera les annĂŠes 1980 en fantĂ´me ; Cimino met six ans Ă trouver un financier qui lui fasse confiance.

PAS CALMÉ Il revient donc en 1985 avec L’AnnÊe du dragon. Assagi ? Tu parles. Le flic jouÊ par Mickey Rourke est une rÊincarnation inaltÊrÊe du Mike de Deer Hunter. vÊtÊran du vietnam qui prend la lutte contre les triades pour une revanche de la guerre ( Envahis Chinatown comme si tu Êtais Gengis Khan ) et finira le film en veste de treillis. Mêmes sentiments, même tarif, en pire : non plus seulement l’impuissance mais un parfait carnage, des initiatives aussi hÊroïques que contreproductives, une douce mÊlancolie que dÊclinera la B.O., Êtrangement mimÊtique de celle de Deer Hunter. Toujours la même chanson : la folle ambition retournÊe en dÊgoÝt, en rêverie sur la vanitÊ de tout. Le combat devient un baroud d’honneur, le combattant, un ÊlÊgiaque. L’homme qui voulait soulever une armÊe contre la corruption finit seul et sans ami, marginalisÊ par ses supÊrieurs.

ANAR TENDANCE GRINCHEUX Soudain l’on se souvient que Cimino a fait jouer Eastwood dans son premier film, Le Canardeur (1974). Car c’est une leçon parfaitement eastwoodienne que rĂŠcite L’AnnĂŠe du dragon : lorsque les flics sont ripoux, dĂŠfendre la loi implique de se mettre hors la loi. Le petit facho devient un anarchiste. De droite ? Peut-ĂŞtre. Il y a dans l’Ênergie en surchauffe de Stan White quelque chose de l’ultime dĂŠfense de l’homme blanc contre les assauts migratoires et le politiquement correct (ÂŤFuck the civil rightsÂť) ; dĂŠfense du dernier mâle, contre les sans-couilles qui se liquĂŠfient devant l’invasion jaune. Son ÂŤ Be a cop again Âť sonne comme un ÂŤ Redeviens un mec Âť – et sonne un peu creux, dans un monde oĂš les grands affrontements s’effilochent en petits arrangements. Dès lors, Ă l’humeur anar, Stan emprunte surtout les ruminations misanthropes : ÂŤ Je voudrais ĂŞtre un mec sympa, mais je ne sais pas comment faire. Âť Stan s’est trompĂŠ d’Êpoque, il vient d’un temps hĂŠroĂŻque que Cimino s’acharne Ă perpĂŠtuer sous la perfusion de son gĂŠnie. Mais cette vie post-mortem en CinĂŠmascope aura aussi une fin. Retrouvez le prochain ĂŠpisode le mois prochain dans Trois Couleurs‌

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90 SEX TAPE /// L’INSTANT ÉROTIQUE

Š OcÊan Films

LE JOUJOU INDISCRET

PoupĂŠe nipponne bien huilĂŠe peut subir un usage rĂŠgulier. Après celui-ci, penser Ă retirer l’orifice et Ă le nettoyer. Avec un peu de chance, le physique de cette confidente muette et ĂŠconomique correspond Ă l’image de la femme idĂŠale. Mais, dysfonctionnement d’usine, ce sex toy Ă taille humaine ne manque pas d’air : Nozomi, poupĂŠe gonflable, a une âme, un cĹ“ur, et c’est bien douloureux. Le jour, elle sort, dĂŠcouvre la sociĂŠtĂŠ et commence mĂŞme Ă travailler dans un magasin de location de DvD. Le soir, elle retrouve la mĂŠcanique humaine, ĂŠcarte les jambes et redevient un objet sexuel. Peintre minimaliste, Kore-Eda adapte un manga de Yoshiie goda et questionne avec force notre rapport Ă la mort. _D.J. Air Doll d’Hirokazu Kore-Eda // Sortie le 16 juin




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