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Design your career

Bien-être au travail (3/6) Troubles musculo-squelettiques, pathologies professionnelles, burn-out, suicides... Face aux dégâts du management par le stress, votre magazine Références prend le contrepied et met l’accent sur le bien-être au travail. Cet été, nous épinglerons des initiatives positives, parfois surprenantes par leur simplicité… Pour en finir avec la souffrance au boulot.

L’esprit start-up Entretenir sa forme, celle de ses troupes, développer le team building et la rentabilité de son entreprise d’un même mouvement, c’est possible. Grâce au vélo. Depuis 2009, le « Beci Bike Project » permet aux entreprises de se mettre au deux-roues. Voxbone, une jeune PME bruxelloise active dans la téléphonie sur internet, s’y est convertie.

employés à se rendre au travail à vélo », explique Sébastien d’Ursel, chief operating officer de Voxbone et juste au-dessus de la moyenne d’âge de ses collègues (27 ans). « Nous avons été les premiers à l’adopter, et finalement, la formule présente encore plus d’avantages que nous le pensions. » Gain de temps, impact positif sur l’environnement et sur la santé des collaborateurs, et une image d’entreprise tout à fait profitable : « L’objectif est de maintenir du lien social et de procurer du bien-être. Les recherches ont démontré que rouler une demi-heure par jour réduit fortement le risque de maladies cardiovasculaires. Nos équipes sont encore jeunes. Mais nous avons beaucoup gagné en convivialité », confie le COO. Participer au projet Beci Bike est tout bénéfice pour les travailleurs. « Nous ne leur demandons aucune contribution, précise Sébastien d’Ursel. Beci prend en charge toute la gestion de la flotte de vélos - location, assurance vol, entretien et fourniture d’un casque et d’un cadenas à chaque cycliste - pour un montant mensuel fixe avoisinant les 20 euros par vélo, entièrement pris en charge par Voxbone. » Seul engagement demandé en retour

aux collaborateurs qui profitent de la formule : venir au boulot en moyenne un jour sur deux à vélo. « Ce qui semble être une contrainte au départ se mue très vite en réel plaisir, affirme Sébastien d’Ursel. Les bénéfices pour la santé sont clairs, et les effets positifs agissent aussi sur la rentabilité, avec des employés moins souvent malades, à l’heure et moins stressés », relève le COO. L’enjeu est aussi environnemental : « à Bruxelles, 4 % seulement des trajets sont effectués à vélo, alors que 60 % d’entre eux représentent des distances inférieures à cinq kilomètres. J’étais moi-même convaincu de la nécessité de prendre ma voiture pour aller travailler, alors qu’en réalité j’économise du temps grâce au deux-roues. Et quelle satisfaction au bout du compte ! » Ceux qui habitent en dehors de la capitale ne sont pas en reste, puisque Beci peut également fournir des vélos pliables. Plus d’un an après le lancement de l’initiative chez Voxbone, dix-sept collaborateurs sur trente-cinq ont fait le choix de la bicyclette. « Certains se croisent en cours de route et effectuent ainsi une partie du chemin ensemble, souligne Sébastien d’Ursel. On se

retrouve ensuite dans le garage, à commenter nos performances et l’état de la route : cela peut paraître anodin, mais c’est en réalité très agréable ! » De là à jouer copain-copain avec les employés ? « On essaie d’être cool et à l’écoute. Et ouvert, y compris aux critiques. Chaque semaine, nous essayons de passer 1 heure avec chaque employé, commente Sébastien, mais on se doit aussi d’être exigeant au niveau de la précision des employés car on développe un opérateur international, ce qui nécessite de la structure. On ne peut pas se permettre d’être juste une bande d’amis.» Ce ne sont évidemment pas vingt personnes motivées qui limiteront la pollution et désengorgeront les routes bruxelloises. Mais la démarche peut cependant constituer un bon point de départ pour une politique de gestion RH plus durable. « En plus d’avoir du sens, ces initiatives ne peuvent que renforcer nos liens internes et notre pouvoir d’attraction auprès des jeunes talents, dont nous avons cruellement besoin », conclut Sébastien d’Ursel. Car le vélo, ça fait du bien. Même à ceux qui n’en font pas.

RAFAL NACZYK

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« La révolution passera par le vélo, camarade ! », clamait, il y a 40 ans, le chansonnier wallon Julos Beaucarne. Sans se douter que de la « julosophie » utopiste au management, il n’y avait qu’un coup de pédale. Car le vélo, c’est l’arme contre les maux de Voxbone, une jeune PME bruxelloise active dans la téléphonie sur internet. « Il y a un an, nous avons voulu adhérer au projet Beci Bike, qui encourage les

à bicyclette

Entretien

« C’est le travail qui est mis en souffrance » Yves Clot, chercheur français en psychologie du travail au sein du Cnam, dénonce dans son dernier livre les dangers d’une approche victimologique des salariés en souffrance et propose de mettre en discussion la qualité du travail. Comment peut-on définir l’état de stress au travail ? On dit qu’il y a un consensus : il y a du stress quand le salarié a le sentiment de ne pas avoir assez de moyens pour répondre aux exigences de l’organisation. Je mets en discussion cette définition pour la compléter. Les organisations n’ont pas les ressources pour répondre aux exigences des salariés pour faire un travail de qualité. C’est cette qualité empêchée qui est la source du stress. C’est ce que le salarié voudrait faire et ce à quoi il a dû renoncer. Dans votre livre « Le travail à cœur », vous dénoncez de fausses solutions et un risque de « despotisme compassionnel » face à la souffrance au travail. Qu’entendez-vous par là ? C’est

le travail qui est mis en souffrance, mais on gère celle des salariés. Ces derniers ne se reconnaissent plus dans ce qu’ils font, parce que le travail est sacrifié dans des organisations rongées par des critères de rentabilité immédiate. Depuis une dizaine d’années, le conflit s’est exacerbé entre l’obsession financière et le souci du travail bien fait, souvent présenté comme de la « surqualité ». Et aujourd’hui, on fait dans la « victimologie ». On multiplie les écoutes, les soutiens psychologiques, les plans d’action… On cautérise, on pasteurise. Je parle de « despotisme compassionnel », parce que la souffrance au travail devient un domaine de gestion comme les autres, avec ses protocoles et ses indicateurs. Les salariés sont alors « victimisés », poussés encore à la passivité, alors que leur initiative au nom du travail bien fait est possible. S’ils ne prennent pas en charge cette question, ils seront pris en charge par les managers de l’âme. Il

n’y a pas de collectif possible sans assumer cette responsabilité. Ce seraient donc les entreprises qui seraient fragiles et non les salariés ? Oui, dans le sens où les critères de qualité du travail tels qu’ils sont définis par les directions ne sont plus en phase avec l’idée du travail bien fait. Il faut s’attaquer au fonctionnement de l’organisation, revenir sur la définition de ce qu’est un bon travail. L’entreprise doit redevenir un lieu où l’on accomplit un travail dans lequel on se reconnaît. Il faut prendre du temps. Pour réfléchir sur les tâches, pour délibérer avec les collègues et pour échanger. Les salariés ne discutent plus de leur travail. Les organisations, par leurs objectifs de performance, empêchent de faire un travail de qualité. C’est une atteinte à la dignité profesPropos recueillis par RN sionnelle.

« Le travail à cœur. Pour en finir avec les risques psychosociaux », par Yves Clot, La Découverte, 2010.


Les acrostiches du créateur d’entreprise (3/8)

Cultivez votre différence

Chaque semaine, durant l’été, Références livre aux jeunes entrepreneurs en herbe le conseil spécifique d’un expert sous la forme d’un acrostiche. Histoire de mettre toutes les chances de leur côté.

Alain Zimmerlin anime les « Ateliers du Marketing » : accompagnement à la création et au développement de projets d’entreprise.

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alton. Tout le monde connaît Joe et Averell : ils ont une personnalité bien marquée dont chacun se souvient sans effort. Mais qui connaît les prénoms des Dalton du milieu ? Faites bien « comme tout le monde » et vous serez assuré de passer inaperçu de vos futurs clients parce que vos concurrents sont déjà dans la place alors que vous êtes à peine installé. Construisez plutôt votre projet sur un « Dalton fort », apportez autre chose.

Pour y arriver, voici ma recette :

I

dentifiez les attentes insatisfaites de vos prospects : ils doivent trouver chez vous ce qu’ils ne trouvent pas ailleurs. Produit ? Service ? Conseil ? Sourire ? Je ne le sais pas : c’est à eux qu’il faut poser la question.

F

aites le tour des concurrents pour en repérer les points forts et les points faibles tels que la clientèle les perçoit.

F

aites connaître votre Dalton par tous les moyens : vos futurs clients

ne devineront pas tout seuls que vous leur apportez LA réponse qu’ils attendent !!!

é

vitez de vous faire plaisir : un bon Dalton doit d’abord interpeller vos clients, répondre à leurs souhaits parfois informulés. ça ne peut pas être un simple « private joke » qui n’amuse que vous.

R

epoussez la tentation de construire votre Dalton dans votre tête. Entre votre logique et la réalité du terrain, il y a sans doute un écart… Et c’est à vous de le combler car vos clients ne le feront pas !

é

coutez votre entourage… mais pas trop. À vos amis il manque peut-être deux qualités : l’objectivité à votre égard et la connaissance concrète de votre marché. Et puis, finalement, c’est vous qui devrez décider parce que c’est votre projet et celui de personne d’autre…

N

e refusez pas une information émanant du marché, surtout si elle bouscule vos certitudes. Soyez toujours capable de vous remettre en cause : c’est le marché qui a raison parce que, si vous ne l’écoutez pas, c’est vous qui payerez les pots cassés.

C

onservez un bloc de glace à portée de main, histoire de tempérer votre enthousiasme et de rester aussi lucide que possible face à ce beau rêve qui se concrétise peu à peu.

E

t pour finir, un conseil : ne dites pas « Dalton »… Dites « avantage concurrentiel ». ça fait quand même plus sérieux… Recueilli par LF

www.aerograf.be

J’ai fait un break

Anne Dubois

En tant que consultante SAP, Anne Dubois mène une carrière passionnante, et très (trop) remplie. En avril, elle a concrétisé son besoin de faire une pause. D’abord les Etats-Unis, en mode tourisme. Puis le Bangladesh, en mission humanitaire. Nous l’avons interviewée la veille de la reprise de son boulot, il y a quelques jours. Trois mois de pause carrière, ça remue, ça transforme.

Photo dr

à la recherche de l’humain caché Anne Dubois est ingénieur commercial. Elle travaille comme consultante SAP, « un boulot très intéressant, mais qui ne fait pas tellement avancer le monde… ». Pendant vingt ans, elle s’est investie dans le scoutisme. « J’y trouvais le côté humain que je ne trouve pas forcément dans le travail. » Ce « hobby » l’occupait énormément. Et donc, le jour où elle a décidé d’arrêter parce qu’elle estimait « avoir fait son temps », ce furent vingt heures supplémentaires consacrées au boulot. « Cela s’est mis comme cela, j’avais envie de bien travailler. » En même temps, Anne Dubois sent depuis un temps une envie de « faire autre chose de sa vie». Réelle, mais imprécise. « J’avais besoin d’une pause pour réfléchir, mais j’étais très investie dans mon travail », raconte-t-elle. L’occasion se présente finalement : le projet sur lequel elle travaillait allait se terminer. Alors, elle a opté pour trois mois de pause carrière. D’avril à juin, elle a partagé son temps entre tourisme et humanitaire. Avec d’abord six semaines aux Etats-Unis. « J’étais tellement fatiguée qu’il fallait que je commence par des vacances. Mon objectif était de m’en mettre plein les yeux et de marcher. » Ce qu’elle a fait. « Au bout des six semaines, j’étais cependant très contente de rentrer. Même si je suis quelqu’un d’assez solitaire, je n’étais jamais partie aussi longtemps seule et j’avais besoin de parler à des gens proches. » Juste le temps de fêter la St-Roch, à Thuin. « Pendant trois jours, mais avec le décalage horaire ça tombait bien ! » Puis très vite, la seconde mi-temps a repris avec

Référencé par

Les plus de 50 ans abusent-ils du crédittemps comme préambule à leur prépension ? C’était le récent constat sans détour du directeur général de la FEB, Pieter Timmermans. Ce fut également l’objet d’un sondage sur references.be. Vous avez été nombreux à réagir. À propos du rythme de travail à plus de 50 ans : « Je travaillerai à temps plein tant que je le pourrai car j’en ai encore l’envie. Mais quand cela ne sera plus possible, que mon corps et mon esprit ne le permettront plus, j’aimerais pouvoir lever le pied.» Le débat jeune-vieux n’aurait pas lieu d’être. « Qu’est-ce que cela change qu’un employé prenne son crédit-temps jeune ou vieux ? Il doit le prendre quand cela l’arrange le mieux.» Et cette situation serait positive pour la nouvelle génération. Venez aussi débattre sur references.be !

Serge Dehaes

Lu sur

tout de même une petite envie de faire marche arrière… Le Bangladesh sera pourtant la plus belle tranche de son périple. « Je voulais faire de l’humanitaire depuis longtemps, expliquet-elle. Après avoir cherché tous azimuts, je suis tombée sur la Fondation Damien, une des rares ONG qui accepte des bénévoles sur le terrain. » Sa mission sur place sera d’aider à la construction d’une nouvelle aile dans un hôpital situé à 150 km au nord de Dhaka, la capitale. « Quand nous sommes arrivés, avec les cinq autres Belges, nous avons trouvé les conditions très difficiles : très chaud et très humide, beaucoup de poussière… » Mais ses a priori sont vite dissipés. « Dhaka fut notre première belle surprise. Malgré les conditions de vie difficiles, les gens nous souriaient en permanence. » Ces impressions se sont renforcées à l’hôpital. « Je m’attendais à être submergée de pitié et d’horreur mais c’était tout sauf glauque. Bien entendu nous avons eu le cœur serré à de multiples occasions, mais nous avons aussi vécu beaucoup de moments d’amitié. » Pendant quatre semaines, Anne Dubois et son équipe vont travailler comme manœuvres sur le chantier. « C’était également intéressant de voir comment eux travaillent. Absolument tout est effectué manuellement. » Pour elle, cependant, le contact qui s’est noué avec les Bengalis constitue le vrai ressourcement. « Et c’est ce qui a fait de ce voyage une expérience extraordinaire. »

Sur place l’équipe a également effectué quelques visites… Comme des camps de réfugiés situés dans la bande sud du Bangladesh. Une expérience extrêmement marquante. « Nous avons notamment vu un camp accueillant 13.000 personnes sur une superficie prévue pour à peine quelques centaines. Ces gens n’ont rien. Ils ne sont pas reconnus et sont parqués sur un terrain perpétuellement inondé, sans aucune perspective d’avenir. Certains sont là depuis quinze ans. » Un étudiant a demandé à Anne Dubois si elle était venue uniquement pour visiter… « Nous avons décidé de faire quelque chose en rentrant en Belgique. Nous allons nous informer, puis essayer de conscientiser, et demander à Médecins sans frontières pourquoi ils ont quitté la zone. C’est tellement étonnant ! Bien sûr on se rend bien compte qu’on ne peut pas faire grand-chose. Je me sens clairement impuissante et je ne sais pas quoi faire avec cette impuissance. Mais si j’y pense, je ferai encore moins. » Aujourd’hui, Anne Dubois vient de reprendre son travail. « Je ne suis pas mécontente de recommencer. Je crois que j’ai appris un truc : au lieu de vouloir changer tout, je pense que c’est peut-être dans les petites choses que je peux faire quelque chose. Comme continuer mon boulot tout en y apportant une touche d’humanité. » Autre changement pour cette cadre de 38 ans : elle se sent plus ouverte au changement, « dans le sens où je suis plus prête à renoncer à des choses ou des relations que je croyais plus importantes». LILIANE FANELLO


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