Apprentis citoyens - Relier droits et devoirs - extrait

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CLAUDINE LELEUX

Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans L’enseignement moral et civique comme l’éducation à l’éthique et à la citoyenneté supposent une méthodologie spécifique dans la mesure où ils se meuvent dans le registre de la normativité.

La démarche est illustrée par 31 leçons conçues pour des élèves de 5 à 14 ans. Elles sont le fruit d’une activité théorique et pratique, préparées et discutées en formation initiale avant d’être données en classe et évaluées sur le terrain. Ces leçons visent à développer des compétences transdisciplinaires et interdépendantes, tant cognitives, coopératives que participatives : questionner, apprendre à conceptualiser, classer, évaluer, choisir, juger, décider et répondre de ; apprendre à dialoguer, s’écouter, s’entendre, argumenter ; apprendre à se respecter, à se comprendre, à se coordonner, à se reconnaitre… Les dispositifs pédagogiques mis en place pour cet apprentissage sont variés : la pédagogie de la coopération par découpage, la philosophie pour enfants, la clarification et la hiérarchisation des valeurs, le débat régulé, le dilemme moral… au gré des sensibilités et des compétences de chaque (futur) enseignant et éducateur.

5 à 14 ans Claudine Leleux est philosophe de formation. Elle a enseigné à tous les niveaux : de l’atelier philo en maternelle aux étudiants de formation morale et sociale à l’Université de Luxembourg et aux futurs éducateurs sociaux, instituteurs et régents à la Haute École Defré à Bruxelles. Professeure de morale au départ, elle a développé tout au long de son expérience professionnelle une didactique de l’éducation à la citoyenneté et de la morale non confessionnelle. Elle a actuellement en charge la formation continue dans ces disciplines à Defré.

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www.deboeck.com ISBN 978-2-8041-9329-4

Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

Dans cet ouvrage, l’auteure aborde l’éducation à la citoyenneté dans la perspective de l’apprentissage des droits des enfants et des devoirs que ces droits supposent. En effet, le droit est ce qui nous est dû et dû aux autres. L’apprentissage à relier droits et devoirs des élèves se fait notamment lors de l’élaboration de chartes de droits et de devoirs, mais il se renforcera tout au long de l’année scolaire lors des conseils de la classe ou lors de discussions sur la question de droits particuliers.

Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans



Remerciements

Je voudrais remercier mes collègues, et en particulier Carine Dierkens, qui ont décidé d’inscrire à la grille de formation initiale des instituteurs de la Catégorie pédagogique Defré (HEB) un Séminaire d’éducation à la citoyenneté. Celui-­ci m’a obligée à transférer les hypothèses théoriques que j’avais développées dans Repenser l’éducation civique1 et à réfléchir à une méthodologie spécifique pour former nos étudiants à la didactique de cette discipline – abandonnée le plus souvent jusqu’ici à la bonne volonté des enseignants. Je voudrais remercier aussi les étudiants qui ont tenté avec moi de mettre en pratique cette méthodologie, parfois avec difficulté, mais souvent avec créativité et pertinence. Mes remerciements vont à tous ceux qui ont collaboré à l’édition du présent ouvrage pour leurs réflexions et leurs questions et, en particulier à Sarah Gigot qui a conçu et éprouvé une séquence didactique de débat régulé à ma demande pour les besoins de cet ouvrage ; et à Maud Delepière, alors maitre de morale non confessionnelle, qui m’a permis de tester dans une de ses classes la leçon no 19 pour mieux la rédiger. À l’exception de Frédéric Mathy, instituteur français que j’ai « rencontré » sur internet, ils ont tous été étudiants à Defré (Haute École de la Communauté française à Bruxelles) en section normale primaire où j’ai en charge la formation continue en didactique de l’éducation à la citoyenneté et de la morale non confessionnelle : Laurence Bihin, Laetitia Clerebout, Vanessa Debusschère, Valentine Delvaux, Mahaut Dewil, Ayano Everling, Céline Ghys, Sarah Gigot, Jérôme Jacques, Héloïse Jannin, Fabienne Kariger, Fabienne Lalieu, Aurélie ­Martiat, Muriel‑­Noltincx, Annick Perona, Aude Poukens, Anne Rémy, Claire Sand, Bérénice ­Sandron, Céline Simon, Nadine Van Ackere, Émilie ­Vandermeersch, Céline Vander Sande, Christelle Voorspoels, Léini Weber, Sandrine Woestad, Sandrine Wolf. Les leçons publiées en 2006, sans être dépassées, devaient cependant subir un petit lifting pour correspondre aux nouveaux besoins de préparation d’une leçon. Je remercie Chloé Rocourt, professeure de didactique de l’éthique et de la citoyenneté à Defré, pour sa relecture attentive et toutes ses propositions de 1. Claudine Leleux, Repenser l’éducation civique. Autonomie, coopération, participation, Paris, Éd. du Cerf, 1997, coll. « Humanités ».

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correction. Pour ne pas engager les auteurs de leçon dans ces modifications, j’ai choisi d’indiquer que les leçons qui figurent ici le sont sur la base des leçons originales. Tandis que certaines disparaissent, deux nouvelles leçons prennent place dans cette nouvelle édition. Je remercie Chloé Rocourt de me les avoir proposées ainsi que Nathalie Depreter et Valérie Croughs d’en avoir accepté la publication. C.L. juin 2015

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Préambule

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En Communauté française de Belgique, le cours de morale non confessionnelle est souvent l’occasion d’un apprentissage de la citoyenneté. Cela peut se justifier d’un point de vue conceptuel dans la mesure où la citoyenneté, en tant que reconnaissance de l’autre, suppose la moralité. Cependant, la citoyenneté ne relève que d’une partie de la moralité : la moralité publique, c’est-­à-­dire l’ensemble des obligations nécessaires en vue de vivre ensemble avec des personnes que l’on ne connait pas nécessairement et que l’on n’aime pas forcément, indépendamment des convictions subjectives.

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L’ouvrage que j’ai publié en 2000 dans la même collection et récemment réédité et augmenté, Hiérarchiser des valeurs et des normes de 5 à 14 ans, s’adressait prioritairement aux enseignants appelés à former leurs élèves à la moralité en général. Le présent ouvrage vise, en revanche, à circonscrire plus finement ce que serait une éducation à la citoyenneté proprement dite, comme apprentissage spécifique que devraient dispenser tous les enseignants, du moins à l’école fondamentale.

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La démarche pédagogique et les compétences principales visées ici sont grosso modo les mêmes que celles d’une éducation à la moralité en général tandis que les objectifs disciplinaires, eux, pourraient être résumés sous le titre générique d’apprentissage des droits et des devoirs, c’est-­à-­dire des normes (lat. norma, règle) juridiques (coulées dans la forme du Droit).

Former à l’autonomie, la coopération et la participation L’apprentissage de la citoyenneté – comme tout apprentissage scolaire d’ailleurs – vise aujourd’hui à faire acquérir des compétences plutôt qu’à transmettre des connaissances, comme j’ai essayé de le montrer dans un livre paru 7

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en 20012. Certes, on ne forme pas sans informations, mais une accumulation d’informations n’est pas en soi formative, ce qu’avait déjà compris Montaigne3 lorsqu’il disait qu’il valait mieux une tête bien faite qu’une tête bien pleine, d’autant plus aujourd’hui que nous avons dû renoncer à pouvoir maitriser l’ensemble des connaissances, nous obligeant à penser l’instruction comme une éducation où l’on apprend à apprendre tout au long de la vie. Je ne pense donc pas que l’école formera des citoyens responsables si elle se contente, comme on le faisait jusqu’ici, de cours civiques qui décrivent pour les jeunes toute la mécanique institutionnelle4.

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Quelles seraient, dans ce cas, les compétences à acquérir ? J’en vois trois qui sont interdépendantes et desquelles découlent toutes les autres : l’autonomie individuelle, la coopération sociale et la participation publique.

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Ces trois compétences font référence, d’un point de vue systématique, à trois dimensions de l’homme : la première se réfère à l’individu en tant qu’être singulier, unique, indivisible ; la deuxième fait référence à l’être-­pour-­autrui qui, à l’inverse de l’idée qui a prévalu pendant des siècles, ne peut se constituer une identité hors des interactions avec les autres et ne peut se construire qu’en tant qu’être social ; et enfin, bien que le rituel d’inscription du nouveau-­né à l’administration communale ne dispense qu’une citoyenneté passive tandis que la citoyenneté active n’est reconnue qu’à la majorité civile, la troisième compétence, la participation publique de l’individu, fait référence à sa dimension politique (et publique) de citoyen.

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Ces trois dimensions recoupent en outre les trois concepts sur lesquels s’articule la philosophie politique : l’Individu, la Société et l’État. La société étant comprise ici au sens de la « société civile », c’est-­à-­dire comme l’ensemble des rapports interpersonnels hors sphère publique, c’est-­à-­dire l’ensemble des relations privées ou particulières (les relations professionnelles, commerciales, mais aussi intimes, filiales, amicales et amoureuses), alors que l’État est compris, au sens du philosophe allemand, Friedrich Hegel5, comme l’instance de médiation qui exprime, régule et garantit l’ensemble des rapports interpersonnels publics6.

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Enfin, ces trois compétences renvoient aussi aux trois grandes valeurs de la démocratie moderne : la liberté se lie à la disposition à l’autonomie, la solidarité à la « coopération » sociale et l’égalité de droit à la participation publique. L’éducation à la citoyenneté par compétences que je propose pourrait être schématisée comme suit :

2. Claudine Leleux, L’école revue et corrigée. Une formation générale de base universelle et inconditionnelle, Bruxelles, De Boeck & Belin, 2001, coll. “Comprendre”. 3. Moraliste français du 16e siècle. 4. Claudine Leleux, Repenser l’éducation civique, op. cit. 5. Friedrich Hegel, Principes de la philosophie du droit [1821], trad. A. Kaan, Paris, Gallimard, 1940, coll. “Tel”. 6. Selon Hegel, la « société civile » est l’ensemble des individus en tant qu’ils sont unis par des liens juridiques et économiques dans des rapports de dépendance réciproque (Petit Larousse). L’État est, en revanche, l’ensemble des rapports de reconnaissance réciproque.

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Autonomie individuelle (Individu) Singularité Liberté

Coopération sociale (Société) Être social Solidarité

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Participation publique (État) Citoyen Égalité de droit

Figure I : Schéma d’une éducation à la citoyenneté par compétences

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Certains auteurs, dont les socioconstructivistes (appelés parfois aussi « pragmatistes »), tendent à privilégier le pôle coopération sociale réduisant ainsi l’éducation à la citoyenneté à la socialisation et à l’acquisition de comportements solidaires. D’autres (les « libéraux ») accentuent, à l’inverse, le pôle de l’autonomie individuelle jusqu’à totalement nier la coopération – pourtant nécessaire au développement de l’autonomie. Je pense pour ma part que ces trois compétences principales (autonomie, coopération et participation) sont interdépendantes et se déclineront en sous-­compétences. Par exemple, l’autonomie individuelle, prise au sens de Emmanuel Kant7 comme « le droit pour chaque individu de déterminer librement les règles auxquelles il se soumet8 », prend non seulement la forme de l’autonomie politique qui caractérise les citoyens des sociétés démocratiques qui se déclarent les auteurs du pouvoir, les souverains, et les bénéficiaires de droits, mais rassemble trois types d’autonomie (toutes nécessaires à l’autonomie politique) selon que les règles auxquelles l’individu se soumet librement sont des règles intellectuelles et d’intelligibilité, des règles de jugement et d’action ou des règles de maitrise ou d’émancipation de ses « passions » : l’autonomie intellectuelle, morale et affective.

La figure 2 récapitule un ensemble – néanmoins non exhaustif – de (sous-­) ­compétences que se propose de faire acquérir une éducation à la citoyenneté par compétences. Je voudrais maintenant avec le chapitre 2 entrer plus finement dans le champ des savoirs d’une éducation à la citoyenneté proprement dite.

7. 8.

Philosophe allemand du 18e siècle. Petit Robert.

Chapitre 1 • Préambule 9

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Sphère civile

Sphère publique

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Coopérer Dialoguer Discuter S’écouter S’entendre Se coordonner Se reconnaitre Se respecter

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Compétences transdisciplinaires (par ordre alphabétique et à titre indicatif)

Éducation scolaire à la moralité

Autonomie individuelle (Valeurs et préférences)

Sujet / Valoir

Coopération sociale (Normes techniques, éthiques et morales)

Participation publique (Normes juridiques)

Intersubjectivité / Validité

Intelligibilité concepts, logique, syntaxe, orthographe, coordonnées temps et espace

Argumenter Choisir Décider Évaluer Juger Justifier Raisonner Réfléchir Répondre de S’exprimer Se comprendre Se connaitre Se libérer Se maitriser Se respecter Vérifier

Sphère intime

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Essai de définition

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Qu’est-­ce que la citoyenneté ?

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Pour remplir sa mission d’éducation à la citoyenneté, l’école se devrait de préciser son objectif et, notamment, ce que recouvre la notion de citoyenneté. Celle-­ci n’est en effet ni univoque ni simplement sémantique. Elle est, dirait Peirce9, un « interprétant » dont la signification évolue dans des contextes pragmatiques. Pour tenter une « définition » de la citoyenneté, il importerait donc de repérer ces contextes. Par exemple, dans l’Antiquité, le citoyen est la personne qui jouit du droit de cité. Lorsque se forment les États-­nations et qu’adviennent les révolutions démocratiques, le terme de citoyen vient remplacer celui de « sujet (du Roi) » et, en France, les appellations de « madame » (Ma Dame) et de « monsieur » (mon Sieur). Par extension, le terme de citoyen vient dénommer « le membre d’un État démocratique considéré du point de vue de ses devoirs et de ses droits civils et politiques10 ». Dans cette dernière « définition », le recours au concept d’État (national) nous empêche de penser l’appartenance à l’Union européenne au point de devoir adjoindre à « citoyenneté » le qualificatif « européenne11 » ainsi que l’appartenance à une « Société des Nations » nous contraignant à parler de « citoyenneté du monde » ou de « citoyenneté cosmopolitique ».

En proposant de définir la citoyenneté comme souveraineté, il me suffira, au contraire, de mentionner à chaque fois la communauté juridique de référence : la Commune, la Région, l’État (national ou fédéral), l’Union européenne, la Communauté internationale… 9. Charles Sanders Peirce [1839‑1914] est un philosophe et logicien américain, fondateur du pragmatisme logique. 10. Le Petit Larousse. 11. Le Petit Robert.

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Dans le souci pédagogique d’une éducation actuelle à la citoyenneté, je prendrai ici pour synonymes les termes de « citoyenneté » et de « citoyenneté démocratique ». Au regard des contextes pragmatiques, je résume ci-­dessous, avant de les développer, les propriétés de la citoyenneté démocratique : •• La citoyenneté caractérise les rapports que l’homme entretient avec autrui dans leur dimension politique. Le citoyen, c’est l’homme en tant que membre d’une communauté juridique.

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•• Trait révolutionnaire de la démocratie moderne, le citoyen y conquiert d’être à la fois l’auteur du droit et le sujet ou le bénéficiaire de droits12. Ce qui me permet de limiter la portée historique du concept et de confondre ici, comme annoncé, citoyenneté et citoyenneté démocratique.

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•• Puisque les citoyens se déclarent à égalité de droits, tout droit suppose conséquemment un devoir à l’égard des autres bénéficiaires du même droit. Ma liberté s’arrête là où commence celle des autres. Il en va de même de ma sécurité, ma propriété, ma réputation… Comme les droits des enfants supposent des devoirs afférents, ne fût-­ce que les devoirs de parents qu’ils seront un jour…

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•• Le fondement humain (par opposition aux théocraties) du pouvoir démocratique renvoie à une nécessaire procédure de validation des normes (juridiques) qui régissent le vivre-­ensemble. En démocratie, comme le souligne le philosophe et sociologue allemand contemporain Jürgen Habermas, les normes juridiques sont valides au terme d’une discussion entre les citoyens qu’elles concernent. Pour le dire autrement, une « éthique de la discussion » est au fondement de la citoyenneté démocratique13.

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•• Les relations de citoyenneté, dans nos sociétés modernes et contemporaines, sont des relations anonymes dans le sens où nous reconnaissons l’autre sans le connaitre personnellement. Ces relations sont médiatisées par le Droit et l’État.

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•• Puisque le citoyen est l’auteur du Droit, celui-­ci peut évoluer : le citoyen peut s’octroyer de nouveaux droits comme les limiter, pour autant qu’il respecte les procédures qu’il s’est fixées pour innover, amender et abolir ceux-­ci.

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12. Claudine Leleux, La démocratie moderne. Les grandes théories, Paris, Éd. du Cerf, 1997, coll. “Textes en main”. 13. Habermas récuse l’idée d’une « validité » a priori, en soi ou foro interno : « (U) Chaque norme valide doit satisfaire à la condition selon laquelle les conséquences et les effets secondaires qui, de manière prévisible, résultent de son observation universelle dans l’intention de satisfaire les intérêts de tout un chacun peuvent être acceptées sans contrainte par toutes les personnes concernées. S’il est possible de déduire « U » du contenu normatif des présuppositions pragmatiques universelles de l’argumentation en général, l’éthique de discussion se laisse ramener à la formulation suivante, plus économe : (D) Chaque norme valide devrait pouvoir trouver l’assentiment de tous les concernés, pour peu que ceux-­ci participent à une discussion pratique. » (Jürgen Habermas, De l’éthique de la discussion [1991], trad. M. Hunyadi, Paris, Éd. du Cerf, 1992, p. 34). Voir aussi Jürgen Habermas, Droit et démocratie. Entre faits et normes, trad. Ch. Bouchindhomme et R. Rochlitz, Paris, Gallimard, 1997, coll. “nrf essais”. Titre original: Faktizität und Geltung. Beiträge zur Diskurstheorie des Rechts und des demokratischen Rechtsstaats, 1992.

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•• L’égalité formelle de droits que déclarent les révolutionnaires des 17e et 18e siècles semble contenir en elle-­même une dynamique vers une égalité effective de droits. •• Les Constitutions démocratiques prévoient les modalités de limitation du pouvoir et de ses abus : elles séparent les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire ; le pouvoir législatif travaille sous le contrôle d’un Conseil d’État14 ; au sein de l’exécutif, sont distinguées les prérogatives du pouvoir politique et celles du pouvoir administratif ; enfin, en déclarant la souveraineté du citoyen, les Constitutions démocratiques permettent de concevoir qu’un citoyen peut recourir aux tribunaux européens contre les abus de pouvoir de l’État national à son encontre.

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•• La citoyenneté démocratique est un concept juridique qui renvoie au légal mais elle est aussi un concept philosophique qui renvoie à la question de la justesse normative (qui fait d’une norme qu’elle soit juste ou non). En ce sens, il nous faut distinguer le légal et le légitime.

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Il me faut maintenant développer ces traits pour mieux cerner les attributs essentiels15 de la citoyenneté (démocratique).

Attributs essentiels de la citoyenneté

2.1

Être l’auteur et le bénéficiaire de droits

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La citoyenneté qui advient lors des révolutions démocratiques a ceci de spécifique que le citoyen y est déclaré l’auteur du pouvoir politique et le bénéficiaire de droits civils et politiques. En effet, en 1689, les Anglais limitent le pouvoir royal et déclarent, dans la Charte des droits (Bill of rights), leurs « anciens droits et libertés16 ». Aux États-­ Unis, avant de se doter d’une Constitution17, les citoyens déclarent le 4 juillet 1776 :

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« que leur Créateur les a dotés de certains Droits inaliénables, parmi lesquels la Vie, la Liberté et la recherche du Bonheur ; que pour garantir ces droits, les hommes instituent parmi eux des Gouvernements dont le juste pouvoir émane du consentement des gouvernés.18 »

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En France, la Constitution de 1791 est précédée d’une Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (1789)19 par laquelle les citoyens se déclarent naitre

14. Ce que Benjamin Constant appelait le « pouvoir préservateur ». Voir Claudine Leleux, La démocratie moderne, op. cit., p. 167. 15. Sans lesquels la citoyenneté ne serait pas démocratique. 16. Déclaration des droits de 1689 (Angleterre), citée dans John Locke, Traité du gouvernement civil [1690], trad. D. Mazel, Garnier-­Flammarion, 1992, no 408, pp. 359‑360 et repris dans le manuel de 5e (secondaire) : Claudine Leleux, Dans quelle société je veux vivre ?, Bruxelles, De Boeck, 2004, p. 75. 17. M.J.C. Vile, Le régime des États-­Unis, trad. M. Janin, Paris, Seuil, 1972, pp. 263‑285. 18. Déclaration d’indépendance rédigée par Thomas Jefferson et soumise avant adoption à ­Benjamin Franklin et John Adams. Citée en annexe par Jacques De Launay, La croisade européenne pour l’indépendance des États-­Unis. 1776‑1783, Paris, Albin Michel, 1988, pp. 216‑218 et repris dans le manuel de 5e (secondaire) : Claudine Leleux, ibid., p. 76. 19. Citée par Jacques Godechot, Les Constitutions de la France depuis 1789, Paris, Garnier-­ Flammarion, 1970, no 228, pp. 33‑35. Reprise aussi dans Claudine Leleux, ibid., p. 78.

Chapitre 2 • Qu’est-­ce que la citoyenneté ? 13

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et ­demeurer libres et égaux en droits (article 1er), de même que les auteurs du pouvoir politique (article 3). Aux 17e et 18e siècle, les droits civils sont approchés comme des droits naturels, soit qu’ils ont été de tout temps, comme en Angleterre, par la force de l’habitude (« anciens droits et libertés ») ; soit qu’ils soient le fait du Créateur comme aux États-­Unis. Aujourd’hui, nous dirions plutôt qu’ils sont construits, voire contrefactuels puisque l’égalité de droits est déclarée malgré les différences individuelles.

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La citoyenneté (démocratique) suppose l’autonomie : l’autonomie privée ou individuelle (détention de droits, comme celui d’être libre, par exemple) est corrélative de l’autonomie politique (le droit de s’octroyer des droits dont le droit à la liberté par exemple). Jürgen Habermas souligne cette corrélation lorsqu’il écrit que :

Droits et devoirs

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2.2

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« les personnes juridiques peuvent être autonomes dans la seule mesure où elles peuvent se comprendre elles-­mêmes, dans l’exercice de leurs droits civiques, comme les auteurs précisément de ces normes auxquelles elles sont supposées obéir comme destinataires.20 »

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La démocratie moderne se caractérise, par opposition à la démocratie athénienne par exemple, par le fait que les citoyens s’y déclarent « égaux en droits ». La conséquence en est – puisque tous doivent dès lors jouir des mêmes droits –, que des devoirs leur incombent. C’est le principe d’autolimitation volontaire (devoirs) des droits qu’énonce Thomas Hobbes21 : « et qu’on se contente d’autant de liberté à l’égard des autres qu’on en concéderait aux autres à l’égard de soi-­même. Car, aussi longtemps que chacun conserve ce droit de faire tout ce qui lui plaît, tous les hommes sont dans l’état de guerre22. »

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Principe mieux connu dans la formule postérieure attribuée à Montesquieu23 : « Ma liberté s’arrête là où commence celle de l’autre » et de celle de l’article 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 :

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« Article 4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi. »

Le droit est ce qui nous est dû tandis que le devoir se lie au droit comme ce qui est exigible de chacun pour la garantie des droits de chacun. Enfin, le Droit doit être compris comme la condition des droits.

20. Jürgen Habermas, « Note pour un débat sur le droit et la démocratie » dans Le Débat, Paris, Gallimard, novembre-­décembre 1997, no 97, pp. 42‑47. 21. Philosophe britannique du 17e siècle. 22. Thomas Hobbes, Léviathan. Traité de la matière, de la forme et du pouvoir de la république ecclésiastique et civile [1651], trad. F. Tricaud, Paris, Sirey, 1971, p. 129. 23. Philosophe français du 18e siècle.

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Pour Emmanuel Kant, le Droit est : « l’ensemble conceptuel des conditions sous lesquelles l’arbitre de l’un peut être concilié avec l’arbitre de l’autre selon une loi universelle de la liberté24 ».

2.3

Le pluralisme démocratique

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La citoyenneté, en ce sens, ne peut être confondue avec la moralité. Elle doit être comprise, de façon plus restreinte, comme acte de soumission libre aux normes25 juridiques. Le « libre », accolé à « soumission » (devoir) suppose un intérêt bien compris de la norme juridique comme ce qui permet le droit de chacun. Même si, depuis les révolutions démocratiques, nous différencions le caractère légal et le caractère légitime des normes juridiques. En effet, le fait d’avoir été votées par des personnes représentant les citoyens n’en assure pas forcément la légitimité ou la justesse.

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La citoyenneté démocratique découle de la séparation entre le pouvoir politique et le pouvoir religieux. Comme l’anticipe clairement Thomas Hobbes qui distingue, selon leurs principes, la République civile (le politique) et le Royaume de Dieu (le théocratique) : la première se fonde sur des principes naturels ou rationnels tandis que le second se fonde sur la parole surnaturelle de Dieu révélée aux hommes par les prophètes :

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« les droits des puissances suprêmes et les devoirs des citoyens ont été déduits de principes purement naturels, c’est-­à-­dire de définitions de vocables ratifiées par l’accord mutuel des hommes. Mais aux choses qui doivent maintenant être dites touchant la nature et les droits de la cité chrétienne, choses dont la connaissance dépend pour une grande part de révélations surnaturelles de la volonté divine, il faut appliquer d’autres principes, à savoir la parole prophétique.26 »

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La légitimité profane du pouvoir s’accompagne d’une neutralité de l’État par rapport aux convictions religieuses. Les révolutions démocratiques instaurent le droit à des convictions privées dans les limites de la moralité publique, comme en témoigne l’article 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 : « Article 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre établi par la loi. »

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Dans la communauté traditionnelle, pré-­moderne, les rapports que les hommes entretiennent entre eux sont des rapports de proximité : les gens se connaissent, s’entraident, partagent les mêmes valeurs et les mêmes normes culturelles, en ce comprises les normes religieuses. Le propre des sociétés modernes et démocratiques consiste, en revanche, à faire vivre des personnes ensemble, quelles que soient leurs convictions, du moins à l’échelle des États-­nations, autrement dit, à faire en sorte que des personnes se reconnaissent sans pour autant se connaitre. Le sociologue Tönnies

24. Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, vol. II, Doctrine du droit [1797], trad. A. Renaut, Paris, Garnier-­Flammarion, 1994, no 716, p. 17. 25. Norma en latin signifie règle. 26. Thomas Hobbes, Léviathan, op. cit., note 1, p. 395. Chapitre 2 • Qu’est-­ce que la citoyenneté ? 15

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introduit la distinction entre « Communauté » et « Société »27 pour rendre compte du bouleversement des révolutions démocratiques. Cette caractéristique des sociétés modernes et contemporaines a été, depuis ­Tönnies, confirmée et approfondie par de nombreux auteurs contemporains, dont Habermas, par exemple28. Les relations que les citoyens y entretiennent, même si elles sont anonymes, seront médiatisées par l’État (ou l’institution juridico-­administrative de référence) : par exemple, le nouveau-­né est accueilli et reconnu par la collectivité par l’intermédiaire de l’État (l’administration communale) ; les jeunes générations sont insérées dans le monde par l’intermédiaire de l’institution scolaire ; l’entraide prend la forme de la sécurité sociale pour que les citoyens dans le besoin soient aidés par les autres, c’est-­à-­dire soient reconnus sans être connus d’eux. Cette nouvelle fonction de l’État démocratique est la fonction de médiation qui consiste à dépasser le problème de l’anonymat ou de l’étrangeté des personnes dans les sociétés modernes et contemporaines. Cette nouvelle fonction prend, dans un premier temps, la forme du droit positif : la loi ou la règle (la norme) médiatise, permet aux citoyens de reconnaitre leurs semblables comme citoyens. Friedrich Hegel a montré, quant à lui, dès le 19e siècle, que la loi était insuffisante à jouer ce rôle de médiation, que celle-­ci devait être portée concrètement par des fonctionnaires de l’État : tels les enseignants qui, au nom de la collectivité, avaient pour fonction d’introduire les jeunes générations dans un monde commun de savoirs, de normes et de valeurs.

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La multiculturalité des sociétés démocratiques contemporaines nécessite peut-­ être de réaffirmer que le principe du pluralisme des convictions accompagne la citoyenneté pour autant, évidemment, qu’il n’entrave pas l’ordre public ou qu’il ne met pas l’égalité de droits en danger. Pour le dire autrement, la citoyenneté, si elle inclut le droit à la différence, exige que chacun soit traité à l’égal des autres. Les nouvelles formes de multiculturalité que connaissent nos sociétés ne peuvent sans risque démocratique suivre le chemin d’un retour régressif à la « Communauté » au sens de Tönnies.

2.4

Évolution des droits

Puisque les citoyens, en démocratie, sont souverains, ils peuvent quand ils le veulent s’octroyer de nouveaux droits, voire théoriquement en abolir certains.

Éd

Aux 17e et 18e siècles, les citoyens se dotent en premier lieu des droits-­libertés qui les préservent de toute immixtion arbitraire de l’État et des droits politiques qui leur garantissent la souveraineté et la participation aux affaires publiques. On dit de ces droits qu’ils sont de la première génération.

Avec la « question sociale » au 19e siècle, ces droits de la première génération semblent insuffisants, parfois même insignifiants, au regard de la précarité matérielle et des conditions de travail dégradantes dans lesquelles vit la majorité de la 27. Ferdinand Tönnies [1944], Communauté et société. Catégories fondamentales de la sociologie pure, trad. J. Leif, Paris, Reitz-­C.E.P.L., 1977, coll. “Les classiques des sciences humaines”. 28. Jürgen Habermas [1992], Droit et démocratie, op. cit.

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population. La revendication selon laquelle la société tout entière doit aider ceux qui sont dans le besoin aboutira progressivement à reconnaitre une deuxième génération de droits, les droits sociaux appelés aussi droits-­créances en ce qu’ils autorisent les citoyens dans le besoin à bénéficier d’une redistribution partielle de la richesse produite par toute la société. Enfin, après la Seconde Guerre mondiale et ses nombreux crimes contre l’humanité, les citoyens du monde déclarent bénéficier de droits de la troisième génération, les droits moraux (dignité et intégrité) et culturels, dénommés parfois aussi les droits-­personnalité en ce qu’ils visent à préserver la personnalité des citoyens dans sa dimension physique, morale et culturelle.

Évolution de l’égalité effective des droits

N

2.5

IN

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 rassemble l’ensemble des droits que les citoyens entendent garantir à tous.

VA

Lorsque les citoyens se déclarent à égalité de droits, comme en témoignent les Déclarations en Angleterre (1689), aux États-­Unis (1776) et explicitement en France (1789), ils n’ont sans doute pas conscience de la dynamique d’égalité qu’ils enclenchent. Le principe démocratique de l’égalité de droits rend toute inégalité intolérable alors même qu’elle fut acceptable pendant des siècles. Alexis de Tocqueville29 formule ainsi cette dynamique :

ns

« Quand l’inégalité est la loi commune d’une société, les plus fortes inégalités ne frappent point l’œil ; quand tout est à peu près de niveau, les moindres le blessent. C’est pour cela que le désir de l’égalité devient toujours plus insatiable que l’égalité est plus grande.30 »

iti o

L’égalité devant la loi ou l’égalité en droit est le principe selon lequel tout individu doit être traité de la même façon par la loi. Or, si le droit à l’égalité que déclarent les révolutionnaires des 17e et 18e siècles a longtemps été un droit formel, nous pouvons rétrospectivement constater qu’il a servi de base aux citoyens pour exiger, d’une part, un élargissement de l’égalité de traitement, vis-­à-­vis des hommes d’abord, des femmes ensuite et enfin à l’égard des enfants et, d’autre part, une effectivité de ce droit.

Éd

L’histoire de l’égalité de traitement n’est pas linéaire. Ainsi Alexis de Tocqueville, il est vrai, n’a pas prévu les régressions anti-­démocratiques – le nazisme et l’extermination de populations considérées comme « sous-­humaines ». À l’issue de cette tragédie, les pays démocratiques réaffirmeront de plus belle leur attachement à l’égalité de droits dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 et surtout ajouteront à l’égalité de droits l’égalité en dignité de tous les êtres humains et l’interdiction de soumettre quelqu’un « à la torture » et à « des peines ou traitements inhumains ou dégradants31 ». 29. Historien et homme politique français du 19e siècle. 30. Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique [1840], Paris, Garnier-­Flammarion, 1981, vol. II, no 354, p. 174. 31. Article 5.

Chapitre 2 • Qu’est-­ce que la citoyenneté ? 17

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Les révolutions démocratiques, bien que synonymes d’une conquête de l’égalité de droits, restent cependant sans incidence sur l’institution séculaire de la famille et sur les relations intrafamiliales. L’État démocratique moderne et libéral, en effet, est conçu comme ne pouvant pas s’immiscer dans la sphère familiale. Ce « droit d’ingérence » ne se justifiera qu’après une autre révolution, culturelle cette fois, lorsque l’égalité de traitement, d’un simple droit de cité gagnera les relations familiales.

VA

N

IN

Pendant longtemps en effet, sur le plan des relations amoureuses et familiales, la règle de comportement s’énonçait sous la forme d’un proverbe, maxime ou sentence : « Qui aime bien, châtie bien ». Le proverbe exprime un « conseil populaire », une « vérité de bon sens », celle de châtier pour leur bien32 ceux que l’on aime. Châtier, c’est corriger un mauvais comportement au sens encore où nous disons qu’un langage est châtié s’il est bon, correct. En ce sens, le châtiment fait signe vers le rapport d’autorité car « corriger » renvoie d’une manière ou d’une autre à ceux qui sont investis du pouvoir de correction. Ce fut pendant longtemps la responsabilité du père au sein de la famille et du maitre à l’école. C’est précisément cette autorité même qui, au sein des sociétés démocratiques, sera remise en question dans les années mille neuf cent soixante. Le fait est tellement important que certains observateurs parleront de « révolution culturelle ».

Éd

iti o

ns

Cette révolution culturelle, appelée parfois « Mai 68 » en référence aux bouleversements qui se sont produits en France en 1968, n’est significative que parce qu’elle cristallise des changements à l’échelle internationale. Sur le plan politique et social, la « révolution hongroise » de 1956 et le Printemps de Prague de 1968 mettent à l’avant-­scène les revendications démocratiques dans les pays de l’Est dits « communistes » ; dès 1955, les Noirs d’Amérique et Martin Luther King, obtiennent progressivement l’égalité des droits civiques et surtout la fin de la ségrégation entre Noirs et Blancs, notamment dans les transports, les universités et les écoles ; les femmes réclament l’égalité de traitement (un salaire égal pour un travail égal) et dénoncent la situation des « femmes battues » ; les étudiants exigent d’être considérés comme sujets de droit, de bénéficier de droits de recours et de participer aux décisions qui les concernent ; les travailleurs revendiquent d’être traités comme partenaires et non comme subordonnés… Bref, « Mai 68 », c’est non seulement l’exigence que l’égalité de droit formelle devienne effective, réelle ou substantielle mais, c’est en plus la mise en cause d’un modèle vertical de la démocratie, de sa conception de l’Autorité, derrière laquelle se cachent des abus de pouvoir et, en particulier, les abus de l’autorité au sein du couple entre l’homme et la femme, au sein de la famille entre les parents et les enfants, au sein de l’école entre enseignants et enseignés, au sein de l’entreprise entre « supérieurs » et travailleurs. 32. La psychanalyste Alice Miller, dans plusieurs de ses ouvrages, a relevé ces éléments de « pédagogie noire », comme elle l’appelle, qui associe éducation et « maltraitance ». Voir par exemple, Alice Miller, C’est pour ton bien. Racines de la violence dans l’éducation de l’enfant [1980], Paris, Aubier, 1984 ; Alice Miller, L’enfant sous terreur. L’ignorance de l’adulte et son prix [1981], Paris, Aubier, 1986.

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C’est notamment dans ce contexte qu’une Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies (ONU) adopte le 18 décembre 1979 une Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes33. Il faudra attendre encore dix ans supplémentaires pour que les pays démocratiques signent la Convention internationale des droits de l’enfant – le 20 novembre 198934 – et reconnaissent à l’enfant des droits, en tant que personne. Sept ans plus tard, la Marche blanche à Bruxelles, et bien que l’émotion et la révolte qui s’y soient exprimées peuvent être diversement interprétées, cristallise cette nouvelle indignation devant les crimes portés à l’enfance.

IN

Ce n’est que récemment qu’une attention se porte sur d’autres personnes afin qu’en toutes circonstances elles soient effectivement traitées à égalité en dignité et en droits : par exemple les personnes âgées placées en institution et les homosexuels qui veulent se marier civilement.

Évolution de la citoyenneté et de la démocratie

N

2.6

ns

VA

Que les citoyens se déclarent au fondement du pouvoir politique en démocratie, comme nous l’avons vu plus haut, au point de s’octroyer de nouveaux droits s’ils le décident, nous permet de comprendre le caractère évolutif de la citoyenneté et de la démocratie. Ainsi, dans un premier temps, si les citoyens deviennent formellement (dans les Déclarations) les auteurs du Droit, il ne leur parait pas pour autant indispensable de jouir pratiquement du suffrage électoral, sauf pendant une brève période en France. Raison pour laquelle la différence qu’opère ­Emmanuel Kant entre citoyens actifs et citoyens passifs35, comme le fait de considérer l’indépendance économique comme un attribut de la citoyenneté, paraissent se justifier. Kant écrit que pour être citoyen, la

iti o

« seule qualité qui soit nécessaire pour cela, hormis la qualité naturelle (n’être ni femme, ni enfant), c’est d’être son propre maître (sui juris), par suite, c’est de posséder quelque propriété (comprenant sous ce terme toute habileté, métier ou talent artistique ou science) lui permettant de pourvoir à son entretien […] il faut qu’il ne soit au service (au sens propre du mot) de personne d’autre que de la république. Or en ceci les corps de métier et les propriétaires (grands ou petits) sont tous égaux entre eux, en ce sens que chacun n’a droit qu’à une voix.36 »

Éd

Après la Première Guerre mondiale, en revanche, il semble inconcevable d’exclure le citoyen masculin du suffrage universel. Il faudra cependant encore attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale (1948) pour que les femmes bénéficient aussi du droit de vote. Aujourd’hui, le droit de suffrage pour des représentants semble insuffisant à caractériser la citoyenneté. De plus en plus de voix s’élèvent pour revendiquer une citoyenneté participative. L’adjectif vient souligner qu’une véritable citoyenneté

33. Résolution 34/180. 34. Voir en annexe. 35. Emmanuel Kant, Métaphysique des mœurs, vol. II, Doctrine du Droit, op. cit., § 46. 36. Emmanuel Kant, Théorie et pratique [1793], trad. L. Guillermit, Paris, Librairie Vrin, 1990, pp. 36‑37. Chapitre 2 • Qu’est-­ce que la citoyenneté ? 19

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passe par la jouissance du droit effectif à prendre sa part du pouvoir politique. Ce dont rend compte d’ailleurs l’étymologie du terme « participer » : du latin particeps, prendre sa part du pouvoir.

N

IN

L’évolution « postnationale » de l’Union européenne fait resurgir aujourd’hui l’ancienne controverse entre Allemands et Français à la fin du 19e siècle sur le fait de savoir si la citoyenneté suppose la nationalité et ce que l’on entend par nationalité. Dans la conception dite allemande, le concept de nationalité se fonde sur une communauté native, sur le droit du sang, de la culture et de la langue ; dans la conception dite française, la nationalité se fonde sur une communauté élective, sur un « plébiscite de tous les jours » ou sur le « désir de vivre ensemble » comme disait Ernest Renan37. Cette deuxième acception trouve sa filiation dans les idéaux de la Révolution française avec laquelle, rappelons-­le, les protestants français acquièrent leurs droits politiques en décembre 1789, les juifs du Midi en janvier 1790 et les juifs de l’Est en décembre 179138. En effet, « l’article 4 de la Constitution de 1793, traitant de la citoyenneté, accordait à tout étranger établi en France depuis plus d’un an non seulement la nationalité française, mais aussi les droits de citoyen39 ».

VA

L’hésitation actuelle à propos du droit de vote des non Européens ou la limite du droit de vote aux élections nationales témoigne de l’évolution du concept de citoyenneté dans le contexte de l’émergence d’une souveraineté « postnationale40 ».

Éd

iti o

ns

La légitimité profane – le fondement humain – du pouvoir politique, se caractérise par le fait qu’elle est toujours provisoire et susceptible d’être critiquée et révisée. Cette légitimité doit donc être appréhendée comme un processus (de légitimation). Cette possibilité de révision et de changement fonde le caractère historique de la démocratie moderne et contemporaine et nous permet d’en penser l’évolution. Bernard Manin, dans son livre Principes du gouvernement représentatif, reconstruit trois âges de la démocratie moderne et contemporaine : la démocratie parlementaire, la démocratie des partis et, aujourd’hui, la démocratie du public, chaque étape venant se substituer à la précédente tout en en gardant les traits essentiels (le Parlement, les partis). En effet, même si le lieu d’expression de la souveraineté populaire reste le Parlement qui délibère de l’intérêt général, la formation des partis politiques au 19e siècle et le regroupement des suffrages électoraux sur des listes partisanes, ont quelque peu modifié les données de la réflexion sur la légitimité démocratique : dans la démocratie des partis, la délibération réelle se déplace du Parlement vers les congrès de partis ou entre leurs états-­majors – de manière formalisée dans les commissions parlementaires ou de manière i­nformelle –, même si la décision politique relève, quant à elle, du

37. Écrivain et historien français du 19e siècle. 38. Vincent De Coorebyter, « Qui a peur de la révolution française ? » dans Le Journal des Procès, Bruxelles, 9 septembre 1988, no 133, p. 21. 39. Jürgen Habermas, « Immigration et chauvinisme du bien-­être » dans La Revue Nouvelle, Bruxelles, novembre 1992, p. 77. 40. Voir à ce propos Jean-­Marc Ferry, La question de l’État européen, Paris, Gallimard, 2000, coll. “nrf essais”.

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Parlement ; l’intérêt de « classes » de la démocratie des partis supplante l’intérêt public ou l’intérêt de la Nation de la démocratie parlementaire au moment où éclate, au 19e siècle, la « question sociale ». Aujourd’hui, même si les démocraties occidentales restent parlementaires et sont représentatives de valeurs et d’intérêts partisans, il semble bien qu’on observe un troisième âge démocratique, celui de la démocratie du public, dans laquelle les partis et les associations professionnelles traditionnels sont contestés dans leur représentativité, et dans laquelle l’opinion publique manifeste une volonté d’être partie prenante des grandes options législatives qui la concernent.

IN

Les symptômes les plus apparents de cette mutation étant, comme l’a montré Bernard Manin, l’existence d’un électeur flottant et informé et d’un nouveau lieu de délibération publique dans les médias : « la forme du gouvernement représentatif qui émerge aujourd’hui se caractérise par l’apparition d’un nouveau protagoniste de la délibération publique, l’électeur flottant et informé, et d’un nouveau forum de cette délibération, les médias.41 »

ns

VA

N

Le pouvoir politique en démocratie repose sur le consentement au moins implicite d’une fraction importante de l’opinion publique. Ce consentement ne peut toutefois être effectif qu’à la condition d’avoir été éprouvé dans une véritable discussion (au Parlement, dans les partis, dans les médias). La procédure du suffrage électoral et le processus législatif par le biais des partis, de même que le droit qu’un régime particratique a promu du temps d’un règne sans partage, paraissent actuellement bien insuffisants à assurer une discussion réelle des citoyens et, ainsi, à légitimer le pouvoir politique. Comme le pensait Rousseau, dans la démocratie des partis, la volonté peut certes être générale par rapport aux membres d’un parti ou de ses électeurs mais être particulière par rapport à l’État. D’où une délégitimation qui s’exprime aujourd’hui sous la forme du vote protestataire, voire du vote antidémocratique, de l’abstentionnisme électoral dans la plupart des pays démocratiques et/ou de l’émergence de nouveaux partis politiques.

Éd

iti o

Une éthique de la discussion, au sens de Jürgen Habermas, devrait permettre de raffermir la légitimité démocratique42 : nous devrions repenser les formes de représentation de la souveraineté et les conditions d’un espace public dans lequel se forme la volonté pour garantir, à côté du médium du droit, une interface entre les représentants et les citoyens. Dit autrement, pour relégitimer le pouvoir démocratique, le citoyen devrait aujourd’hui pouvoir participer plus directement aux grandes orientations politiques et prendre la part de pouvoir qui lui revient individuellement. La démocratie représentative contemporaine ne semble plus en mesure de faire l’économie de procédures ou d’éléments de démocratie directe43. En ce sens, elle ne peut redorer sa légitimité qu’à être plus participative : dans le concept de participation, entre pars (part) et capere (prendre), l’accent s’est déplacé sur capere : prendre sa part de pouvoir.

41. Bernard M anin , Principes du gouvernement représentatif, Paris, Calmann-­L évy, 1995, pp. 298‑299. 42. Jürgen Habermas, Droit et démocratie, op. cit. 43. Claudine Leleux, La démocratie moderne, op. cit. Chapitre 2 • Qu’est-­ce que la citoyenneté ? 21

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IN

Notons enfin que la révolution copernicienne et galiléenne, puis les révolutions démocratiques modernes, vont modifier en profondeur nos représentations du Vrai et du Juste. Désormais, ce qu’il en est du Vrai et du Juste, voire du Bien44, ne nous est plus donné tel quel : les énoncés constatifs (ou descriptifs) et les énoncés normatifs (ou prescriptifs) n’acquièrent une validité qu’à l’issue d’une discussion effective45. Dit brièvement : n’est Vrai, Bien ou Juste que ce qui a reçu l’assentiment des Discutants. Ainsi en va-­t‑il des normes juridiques qui acquièrent leur légitimité à l’issue d’un débat public (au Parlement, par exemple) comme des énoncés scientifiques dont l’exactitude est validée par la communauté des savants. À propos des normes juridiques, le concept d’interdit, lorsqu’on l’écrit en deux mots : inter-­dit, a le mérite de nous rappeler qu’il est le résultat de ce qui a été dit entre les parlementaires, ce qui fait la raison de la norme. Notons aussi que ces vérité et légitimité sont provisoires, c’est-­à-­dire susceptibles d’être rediscutées lorsqu’elles ne réunissent plus sur elles un consensus.

Éd

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ns

VA

N

Notre vision de l’homme s’en trouve profondément modifiée : désormais l’homme est appréhendé comme un être construit dans la communication avec autrui, capable d’esprit critique et qui construit avec les autres hommes la vérité, le bien et le juste. Le citoyen, lui, décide, avec les autres, ce qu’il en est du juste.

44. Je laisse de côté, pour ne pas alourdir mon propos, la question du Beau. 45. Comme l’a reconstruit Jürgen Habermas, notamment dans De l’éthique de la discussion [1991], op. cit. et dans Droit et démocratie, op. cit.

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Citoyen : être ou devenir ?

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3

Apprendre la citoyenneté

« On naît citoyen, on devient un citoyen éclairé46 » disait Jean-­Pierre ­Chevènement en 1985, alors Ministre français de l’Éducation nationale, pour justifier le retour de l’éducation civique dans les programmes scolaires.

Principes et programme

Éd

2

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ns

Le nouveau-­né est accueilli comme membre d’une communauté juridique et, à ce titre, il devient comme tout citoyen le bénéficiaire de tous les droits-­libertés, droits sociaux, droits moraux et culturels de l’homme et de l’enfant. Il lui faudra toutefois attendre la majorité civile pour bénéficier de ses droits politiques. Ce que veut dire Chevènement, c’est que l’exercice effectif de ces droits politiques suppose une formation qui n’attend pas la majorité civile et qui peut donc être initiée dès l’école fondamentale. Apprendre la citoyenneté nécessite donc d’avoir toujours en mémoire aussi bien les compétences dont devrait user un citoyen mûr, les droits et les devoirs des citoyens en herbe que leur niveau de développement cognitif et moral. Les leçons présentées dans cet ouvrage visent à rencontrer ce triple objectif.

Quelle que soit la forme institutionnelle choisie en vue de l’apprentissage de la citoyenneté47, il convient d’en établir le programme. Celui-­ci devrait toutefois s’inspirer de ce que nous entendons par « citoyenneté » et par « apprentissage ». J’aborderai cette dernière notion au point 3.

46. Jacqueline Costa-Lascoux, « L'enfant, citoyen à l'école » dans la Revue française de pédagogie, 2001, vol. 101, p. 73. 47. Eurydice, L'éducation à la citoyenneté en Europe, 2012.

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Sur la base du chapitre 2, dans lequel les propriétés essentielles de la citoyenneté ont été développées, je voudrais brièvement dériver quelques principes (déontologique et méthodologiques) et quelques objectifs programmatiques d’une éducation à la citoyenneté.

2.1

Principe déontologique Si la citoyenneté caractérise les rapports que l’homme entretient avec autrui dans leur dimension politique,

2.2

Principes méthodologiques

IN

→ Les compétences et objectifs disciplinaires d’une éducation à la citoyenneté doivent pouvoir être enseignés à tous les apprenants quelles que soient leurs valeurs et leurs convictions privées ou celles de leurs parents.

N

–– Si en démocratie, les normes sont valides au terme d’une discussion entre les citoyens qu’elles concernent,

VA

→ Une éducation à la citoyenneté devrait être conduite selon une « Éthique de la discussion ». –– Si les relations de citoyenneté, dans nos sociétés modernes et contemporaines, sont des relations « anonymes » médiatisées par le Droit et l’État,

ns

→ Outre une sensibilisation au Droit, un programme d’éducation à la citoyenneté devrait former les apprenants à se décentrer, à quitter leur particularité, pour adopter un point de vue général, voire universel. –– Si le citoyen est l’auteur du Droit, celui-­ci doit pouvoir être justifié et critiqué,

iti o

→ Une éducation à la citoyenneté devrait permettre de rechercher les raisons du Droit ou des interdits.

2.3

Objectifs programmatiques –– Si la citoyenneté démocratique se caractérise par le fait que le citoyen est à la fois l’auteur du droit et le bénéficiaire de droits,

Éd

→ Une éducation à la citoyenneté devrait inscrire à son programme la connaissance et l’exercice des droits et préparer l’apprenant à pouvoir en être l’auteur. –– Si tout droit suppose un devoir à l’égard des autres bénéficiaires du même droit, → Une éducation à la citoyenneté devrait former au lien systématique entre droits et devoirs. –– Si l’égalité formelle de droits contient en elle-­même une dynamique vers une égalité effective de droits,

→ Une éducation à la citoyenneté devrait permettre de différencier les droits formels et effectifs, en vue de contribuer à l’évolution des uns vers les autres. 24

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–– Si la souveraineté démocratique, et la citoyenneté afférente, suppose l’autonomie politique des citoyens, → Une éducation à la citoyenneté devrait permettre de développer les compétences à participer, débattre et exercer son esprit critique. –– Si la souveraineté démocratique, et la citoyenneté afférente, inscrit en son sein les modalités de limitation du pouvoir et de ses abus, → Une éducation à la citoyenneté devrait permettre de distinguer le légal et le légitime, de débusquer les abus de pouvoir et de comprendre la notion de désobéissance civile.

IN

–– Si la souveraineté démocratique, et la citoyenneté afférente, suppose l’entente des citoyens sur les principes et les lois qui régissent leur vivre-­ensemble,

Apprendre, comment ?

VA

3

N

→ Une éducation à la citoyenneté devrait développer les habiletés à s’entendre et coopérer dans un contexte multiculturel.

Avant d’aborder la méthodologie spécifique de l’éducation à la citoyenneté, je voudrais rappeler quelques principes pédagogiques généraux sur lesquels se fonde cette méthodologie.

3.1

Une pédagogie reconstructive

iti o

ns

J’utilise le terme de « reconstruction » pour signifier le processus méthodo­ logique d’apprentissage. Certains parlent de « auto-­socio-­construction » ou, tout simplement de « socioconstruction ». Les trois expressions rendent compte de l’aspect construit du savoir et de l’apprenant comme partenaire de l’apprentissage (du lat. cum : avec ; struere : bâtir).

Éd

L’expression « autosocioconstruction » insiste sur le fait qu’un apprentissage se construit à partir de soi (on s’approprie un savoir) avec les autres, la société. Le terme de « reconstruction » en revanche me permet d’ajouter le caractère historique et épistémologique de l’apprentissage. Le « re-­ » indique que ce que l’apprenant apprend, il ne l’a pas élaboré lui-­même, il l’a simplement (ou difficilement) intégré. Or, c’est précisément la fonction de l’enseignant dans le système éducatif moderne de faire s’approprier aux élèves le savoir établi hier et ailleurs et de vérifier la validité de celui-­ci. Fonction spécifique qui nécessite une formation spécifique : non celle d’un chercheur universitaire mais celle d’un transmetteur professionnel. Une pédagogie reconstructive peut dès lors être qualifiée d’art de transmettre professionnellement un savoir constitué aux jeunes générations ; transmission qui consiste à mettre à la disposition de l’apprenant les matériaux, situations-­ problèmes, éléments réflexifs… qui lui permettront de s’approprier activement, et dans l’interaction avec le maitre et les pairs, le savoir établi ailleurs.

Chapitre 3 • Apprendre la citoyenneté 25

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Cette « définition » me permet d’insister sur l’auto-­activité de l’élève mais aussi sur le rôle primordial et professionnel de l’enseignant. Les séquences d’apprentissage, qui illustrent ici la démarche théorique, témoignent de ce rôle et, en particulier, de l’importance de son travail de préparation pédagogique. En revanche, il n’est pas toujours évident de comprendre pour quelles raisons l’auto-­activité de l’apprenant est tellement indispensable.

IN

Dès le début du 19e siècle, Friedrich Hegel insiste sur cette nécessaire autoactivité qui différencie une pédagogie traditionnelle, l’instruction (du lat. in et struere) – forme d’ingurgitation –, de la pédagogie active préconisée au début du 20e siècle par ses pionniers Célestin Freinet et Ovide Decroly : « car ce n’est pas la réception, mais l’auto-­activité par laquelle on se saisit de quelque chose, et la faculté d’utiliser, à nouveau, une connaissance, qui, seules, en font notre propriété48 ».

N

Mais c’est surtout Jean Piaget qui nous a éclairés sur cette composante nécessaire de l’activité de l’apprenant en démontrant qu’apprendre, c’est abstraire et notamment abstraire à partir des actions :

ns

VA

« L’expérience physique consiste à agir sur les objets et à découvrir des propriétés par abstraction [l’abstraction empirique] à partir de ces objets : par exemple soupeser des objets et constater que les plus lourds ne sont pas toujours les plus gros. L’expérience logico-­mathématique (indispensable aux niveaux où la déduction opératoire n’est pas encore possible) consiste également à agir sur les objets mais à découvrir des propriétés par abstraction [réfléchissante] à partir, non pas des objets comme tels, mais des actions elles-­mêmes qui s’exercent sur ces objets : par exemple aligner des cailloux et découvrir que leur nombre est le même en procédant de gauche à droite et de droite à gauche (ou en cercle, etc.) ; en ce cas, ni l’ordre, ni la somme numérique n’appartenaient aux cailloux avant qu’on les ordonne ou qu’on les compte et la découverte que la somme est indépendante de l’ordre (= commutativité) a consisté à abstraire cette constatation des actions elles-­mêmes de dénombrer et ordonner, quoique la “lecture” de l’expérience ait porté sur les objets, puisque ces propriétés de somme et d’ordre ont été en fait introduites par les actions dans ces objets49 ».

iti o

La pédagogie reconstructive se doit, par conséquent, d’être active au sens où l’enseignant prépare les situations, les matériaux (à manipuler ou à penser), pour faire redécouvrir aux élèves ce que l’humanité a parfois mis tant de temps à s’approprier.

Il me reste à préciser deux choses :

Éd

a) lorsqu’il est question d’activité, celle-­ci ne peut et ne doit pas être réduite à une activité perceptive (observer) ou motrice (manipuler). L’enseignant veillera donc à mettre aussi l’apprenant en situation d’activité mentale ; dans l’esprit de Jean Piaget, l’auto-­activité ne renvoie ni à une simple manipulation de l’objet, ni à une didactique « concrète » qui n’apprendrait pas à abstraire, ni encore à un enseignement qui, s’appuyant sur la perception, privilégie l’image ou le figuratif comme matériel d’apprentissage ;

48. Friedrich Hegel, « Discours du gymnase du 14 septembre 1810 » dans Textes pédagogiques. La pédagogie de Hegel, trad. B. Bourgeois, Paris, Librairie Vrin, 1990, p. 95. 49. Jean Piaget, « Les méthodes nouvelles. Leurs bases psychologiques » [1935] dans Psychologie et pédagogie, Paris, Folio essais, 1968, no 91, pp. 57‑58.

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b) lorsque l’adolescent a acquis sa pleine maturité cognitive, il lui est possible de s’approprier, par « abstraction réfléchie50 », la théorie – moyen efficace et économe de transmettre et d’apprendre de manière accélérée ce que l’humanité a mis tant de temps à élaborer. Une des raisons pour lesquelles, soit dit en passant, les enfants d’aujourd’hui connaissent plus vite qu’hier, comme ils grandissent plus vite, ainsi que le constate Michael Cohen : « La trajectoire de développement reste la même et les enfants n’échappent à aucune phase de leur développement. Ils ne sont pas en train de devenir des “petits adultes”, mais ils sont en train de grandir plus rapidement que jamais auparavant51. »

IN

Une pédagogie active ne peut donc être assimilée à une pédagogie concrète ou empirique. Il s’agit simplement de faire entrer progressivement l’enfant dans le général et le théorique en respectant son rythme de développement.

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Pour illustrer une telle pédagogie active en éducation à la citoyenneté, nous pourrions prendre l’exemple de l’apprentissage du lien droits/devoirs. Ce lien est conceptuel et pourrait donc être transmis comme une notion à mémoriser. Le parti pris d’une pédagogie active, en revanche, est de faire reconstruire par l’élève, à la fois la notion de droit, de devoir et le lien qui les unit. De nombreuses leçons illustrent ici une démarche possible.

Cette pédagogie reconstructive se justifie d’autant plus dans une éducation à la citoyenneté qu’elle est nécessaire à faire acquérir aux enfants le sens du droit. Les droits fondamentaux ont en effet ceci de spécifique d’être « contrefactuels » : par exemple, dans les faits, les hommes ne sont pas égaux tandis que le Droit énonce que nous devons les considérer comme tels ; dans les faits, l’inculpé est souvent perçu comme coupable alors que le droit nous impose de le présumer innocent.

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Si nous voulons former les élèves à cette « quatrième grammaire » et à l’intelligence critico-­reconstructive, dont parle Jean-­Marc Ferry52, il nous faut progressivement leur faire distinguer le devoir-­être et l’être, leur faire comprendre que les droits sont des principes spécifiques construits, des normes juridiques acceptables et pour cela acceptées comme justes par les citoyens à l’issue d’une discussion.

Éd

50. Elle consiste pour Jean Piaget à thématiser la réflexion de la réflexion ou à construire une opération sur les opérations précédentes (Voir Jean Piaget et Evert W. Beth, Épistémologie mathématique et psychologie. Essai sur les relations entre la logique formelle et la pensée réelle, Paris, PUF, 1961, coll. « Études d’épistémologie génétique », XIV, p. 257 ; Jean Piaget et Bärbel Inhelder, De la logique de l’enfant à la logique de l’adolescent, Paris, PUF, 1955, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine » ; Jean Piaget et al., Recherches sur l’abstraction réfléchissante, vol. I, « L’abstraction des relations logico-­arithmétiques », Paris, PUF, 1977, coll. « Études d’épistémologie génétique »). 51. Dr. Michael Cohen, in « Getting Older Younger: Developmental Differences in Children and the Challenge of Developmental Compression », Montréal, Actes du colloque Médias-­Jeunes, 2000, Les nouveaux enjeux de la création jeunesse, p. 6, cité par Gilles Abel [2005], « À l’horizon de la philosophie avec les enfants : la démocratie comme attitude » dans Claudine Leleux (dir.), La philosophie pour enfants. Le modèle de Matthew Lipman en discussion, Bruxelles, De Boeck, 2005, coll. « Pédagogies en développement », p. 197. 52. Jean-­Marc Ferry [2004], Les grammaires de l’intelligence, Paris, Éd. du Cerf, coll. « Passages », chapitres 9 et 10.

Chapitre 3 • Apprendre la citoyenneté 27

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3.2

Une pédagogie par compétences J’ai déjà évoqué, dans le chapitre 1, les raisons qui nous poussent à recentrer l’apprentissage sur les compétences à acquérir plutôt que sur des connaissances à mémoriser. La figure 2 recensait les grandes compétences à viser dans une éducation à la citoyenneté. Celles-­ci ne peuvent toutefois se développer que corollairement à quelques grandes compétences transversales •• cognitives : questionner, conceptualiser, réfléchir, juger, argumenter ou justifier…

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•• affectives ou morales : se respecter – dans le double sens de se respecter soi-­même et de respecter les autres –, choisir, décider, répondre de… •• coopératives et participatives : s’écouter, dialoguer, se coordonner, s’entendre…

Une pédagogie par objectifs

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3.3

3.4

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Les compétences s’acquièrent dans des processus d’apprentissage dont l’objectif est déterminé par l’enseignant. En éducation à la citoyenneté, cet objectif peut être plutôt cognitif : amener les apprenants à définir une notion (Qu’est-­ce que ?) ou plutôt normatif : amener les élèves à se demander ce qu’il faudrait faire pour bien faire (objectif moral) ou pour être justes (objectif citoyen).

Des méthodes et des dispositifs

Éd

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Les méthodes et les dispositifs sont au service de l’objectif à atteindre et des compétences à faire acquérir et ne sont bien évidemment pas des fins en soi. Le chapitre 4 décrit les dispositifs utilisés dans les leçons proposées tandis que la grille de préparation de leçon – qui ouvre la partie méthodologique de cet ouvrage et qui sert de canevas pour les 31 leçons proposées – condense les caractéristiques d’une pédagogie reconstructive par compétences et objectifs

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Les méthodes et les dispositifs

CLARiFiER Et HiÉRARCHiSER DES VALEuRS

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1

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L’ordre de description des méthodes et dispositifs est arbitraire : aucun objectif et aucune méthode ne prévalent en soi. Le logo repris à gauche figurera aussi dans les leçons. Ceci pour permettre au lecteur de repérer rapidement les dispositifs utilisés et ne pas répéter dans les leçons l’ensemble des conseils méthodologiques pour leur utilisation.

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La citoyenneté, telle que je l’ai « définie », mobilise des valeurs. Tous les citoyens partagent un certain nombre de valeurs. Il en va ainsi des valeurs qui sont au cœur de la démocratie : liberté, égalité, solidarité, paix, dialogue, tolérance… ; d’autres valeurs ont une portée plus universelle (dans le sens où elles sont partagées par un grand nombre dans l’espace et le temps) comme l’amour et l’amitié ; d’autres valeurs encore sont étroitement liées aux convictions existentielles : vie, nature, argent, pouvoir, Dieu…

Éd

Apprendre et exercer sa citoyenneté, c’est apprendre à défendre les valeurs auxquelles on est attaché tout en respectant le pluralisme des valeurs. Un tel apprentissage peut se faire en développant l’aptitude des apprenants à clarifier leurs valeurs (c’est-à-dire à en prendre conscience dans un mouvement d’autoréflexion), à les hiérarchiser (généralement, de la plus importante à la moins importante) et à exercer leur jugement évaluatif. Le dispositif de clarification et de hiérarchisation des valeurs nous vient principalement de Simon, Howe et Kirschenbaum53 et s’opère en deux étapes : d’abord

53. Sydney B. simon, Leland W. Howe, Howard kirscHenbaum [1972], À la rencontre de soi-même. 80 expériences de clarification des valeurs, Québec, Éd. de l’Institut de Développement Humain, 400 p.

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la clarification, ensuite la hiérarchisation. Il permet de développer l’autonomie individuelle, aussi bien intellectuelle, morale qu’affective (se connaitre, se respecter soi-­même, s’aimer soi-­même, librement).

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Les apprenants communiquent alors aux autres leur choix et le justifient. Le rôle de l’enseignant consiste à tout mettre en œuvre pour que cet échange se passe dans le respect mutuel. L’attachement aux valeurs étant subjectif54, il ne se « discute » pas, comme, dit-­on, les gouts et les couleurs ne se discutent pas. Il n’y a pas, autrement dit, de bonne ou de mauvaise réponse. Les valeurs sont fonction d’un attachement personnel qui résulte d’une expérience biographique. Cette expérience nous amène à discerner ce qui vaut le plaisir d’être recherché et ce qui vaut la peine d’être évité. Notons que cet attachement peut être sensible avant d’être réfléchi, d’où l’intérêt de la phase de clarification.

N

Dans ce climat de tolérance, les élèves font l’expérience du pluralisme des valeurs. Ils le vivent et éprouvent pratiquement une des propriétés de la citoyenneté démocratique.

VA

Le dispositif de clarification et de hiérarchisation de valeurs peut être mis en place avec de nombreux supports : textes, citations, proverbes, images… Les leçons nos 20‑21‑22.

Le dispositif peut aussi s’opérer par choix restreint (un seul choix est permis) pour forcer la clarification de valeurs par dissonance cognitive. Par exemple :

ns

Je voudrais devenir : 1) infirmier 2) policier

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3) postier

parce que ma valeur principale est ....................................................................

Éd

Puisque la forme logique d’une valeur est celle d’un concept, reconstruire une valeur avec des enfants qui n’ont pas accès au concept doit donc se faire selon une méthodologie spécifique pour que ceux-­ci apprennent à conceptualiser (voir point 2).

54. Pour un développement et une approche théorique des valeurs, voir Claudine Leleux [2000], Hiérarchiser des valeurs et des normes de 5 à 14 ans, Bruxelles, De Boeck, 3e éd. revue et augmentée 2014, coll. « Apprentis Citoyens », chapitre 4.

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2

CoNCEPtuALiSER, GÉNÉRALiSER Et RÉFLÉCHiR Apprendre à conceptualiser et acquérir une pensée formelle est un objectif de l’enseignement en général. Cela permet aussi de développer une citoyenneté démocratique au sens où, dans nos sociétés contemporaines complexes, les règles du vivre-ensemble sont très générales et abstraites. Il en va ainsi, par exemple, du système de fiscalité ou de solidarité, où, comme je l’ai dit plus haut, les citoyens se reconnaissent sans se connaitre.

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Apprendre et exercer sa citoyenneté, c’est non seulement apprendre à conceptualiser mais aussi, à progressivement adopter un point de vue général, voire universel, sous la forme de principes. C’est le sens du célèbre impératif catégorique de Kant :

2.1

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« Agis de telle sorte que la maxime de ta volonté puisse toujours valoir en même temps comme principe d’une législation universelle.55 »

Conceptualiser

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Conceptualiser à l’école primaire suppose : a) une connaissance du développement de la pensée chez l’enfant et l’adolescent ; b) une stratégie d’apprentissage transférable pour éviter de donner aux enfants des définitions de concepts à mémoriser.

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a) Je voudrais d’abord évoquer le développement de la pensée et du concept chez l’enfant tel que Vygotski l’a admirablement décrit : – Au départ, la pensée de l’enfant est une pensée par image syncrétique : l’enfant tend à lier « sur la base d’une impression unique les éléments les plus différents et dépourvus de liaison interne, les fusionnant en une image indifférenciée56 ». Nous pourrions dire, nous référant cette fois à Jean-Marc Ferry, que l’enfant forme, par expérience perceptive, une « grammaire iconique57 » qui associe des images à d’autres – qui survivront sans doute encore à l’âge adulte et qui nous reviendront sous une forme que les psychanalystes appellent « inconsciente ». – L’enfant, en un second temps, pense par complexes. Il ne réunit plus, comme au premier stade, des éléments dépourvus de liaison interne sur la base des seules liaisons subjectives, mais les réunit sur la base des liaisons objectives qui existent entre ces éléments58. Cette construction de complexes s’opère par association (couleur, dimension ou forme identique, par exemple), par trait distinctif ou contraste et par transfert de

55. Emmanuel kant [1788], Critique de la raison pratique, trad. F. Picavet, Paris, PUF, 1943, coll. “Quadrige”, p. 30. 56. Lev Semenovitch Vygotski [1934], Pensée et Langage. Suivi de Jean Piaget, « Commentaire sur les remarques critiques de Vygotski », trad. F. Sève, Paris, La Dispute, 1997, p. 212. 57. Jean-Marc Ferry, Les grammaires de l’intelligence, op. cit. 58. Lev Semenovitch Vygotski, ibid., p. 215. Chapitre 4 • Les méthodes et les dispositifs

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Figure 3

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signification d’un maillon de la chaine à un autre. Nous pourrions dire que l’enfant forme, dans le langage de Jean-­Marc Ferry, une « grammaire indiciaire59 » qui nous permet, encore à l’âge adulte, de procéder par associations d’indices dont le brainstorming (non réfléchi) témoigne. La figure ci-­dessous permet d’illustrer cette construction par association : l’enfant associe un carré à un carré, puis, par exemple, la couleur de ce carré à la même couleur d’un triangle, puis à la même couleur qu’un cercle, etc.60 :

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–– Enfin l’enfant pense par pseudo-­concept. Cela signifie qu’il continue à penser par complexes mais que ceux-­ci ont l’allure de concepts. Un jeune enfant, par exemple, parlera de la solidarité comme « Ourson qui aide Julie », d’injustice comme « Calimero qui est maltraité »… Vygotski définit le pseudo-­concept comme la

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« réunion sous forme de complexe d’une série d’objets concrets, qui phénotypiquement, c’est-­à-­dire par son apparence extérieure, par l’ensemble de ses particularités externes, coïncide parfaitement avec le concept mais qui par sa nature génétique, par les conditions de son apparition et de son développement, par les liaisons causales-­dynamiques qui en sont la base, n’est nullement un concept. Extérieurement c’est un concept, intérieurement c’est un complexe. C’est pourquoi nous l’appelons pseudo-­concept. Dans les conditions expérimentales l’enfant forme un pseudo-­concept toutes les fois qu’il assortit à un modèle donné une série d’objets qui pourraient être assortis et réunis les uns aux autres sur la base d’un concept abstrait. Cette généralisation pourrait donc aussi bien s’effectuer sur la base du concept mais en fait elle apparaît chez l’enfant sur la base de la pensée par complexes. C’est seulement dans le résultat final que la généralisation par complexe coïncide avec la généralisation élaborée sur la base du concept. Par exemple, l’enfant assortit à un modèle donné – un triangle jaune – tous les triangles existant dans le matériel expérimental. Un tel groupe pourrait aussi bien apparaître sur la base de la pensée abstraite (du concept ou de l’idée de triangle). Mais en fait, comme le montre l’analyse, l’enfant a réuni les objets sur la base de leurs liaisons concrètes, empiriques, sur la base d’une simple association. Il n’a construit qu’un complexe associatif limité ; il est arrivé au même point mais par une tout autre voie61. »

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b) Pour permettre à l’enseignant de faire reconstruire un pseudo-­concept et tendre vers le concept, Britt-­Mari Barth propose une stratégie en deux grandes étapes62 : 1) Les élèves doivent découvrir les propriétés d’un concept à reconstruire par le biais d’exemples OUI (analogies) et d’exemples NON (contrastes).

59. Jean-­Marc Ferry, ibid. 60. Figure empruntée à André Lemoine et Pierre Sartiaux [1997], Des mathématiques aux enfants. Savoirs en jeu(x), Bruxelles, De Boeck, coll. “Outils pour enseigner”, p. 108, qui justifie aux yeux des auteurs une pédagogie appropriée pour l’introduction des concepts mathématiques et l’approche des ensembles. 61. Lev Semenovitch Vygotski, op. cit., pp. 225‑226. 62. Britt-­Mari Barth [1993], « De la pratique à la théorie : apprendre à construire son savoir » dans Claudine Leleux (dir.) [2005], La philosophie pour enfants, op. cit., pp. 161‑174.

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Plusieurs objets ou situations sont présentés à la classe. L’instituteur signale à chaque fois aux élèves s’il s’agit d’un exemple OUI (qui possède, dans un premier temps, toutes les propriétés du concept à reconstruire) ou d’un exemple NON (qui, dans un premier temps, ne possède aucune des propriétés du concept à construire63). Les élèves décrivent alors, avec l’aide de toute la classe, par le biais de la discussion, les propriétés des deux types d’exemples en deux colonnes (celles qui appartiennent au concept et celles qui en sont exclues). L’enseignant note ces propriétés au tableau « pour donner un support visuel64 ». À chaque exemple, les élèves et la classe ont la possibilité de remodeler leurs colonnes (effacer, préciser, ajouter), ce qui, soit dit en passant, permet aussi de dédramatiser l’erreur ou de former au « droit à l’erreur65 ». L’opération cognitive qui leur est proposée consiste donc essentiellement en une comparaison. Lorsque la présentation des exemples OUI et NON est terminée, les élèves se retrouvent avec les attributs essentiels du concept. Une première généralisation a pu être opérée. Et le concept est cette fois compris, ce que la simple mémorisation d’une définition permet rarement.

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2) Dans un second temps, l’enseignant va exercer la « déduction » ou, plutôt, la « subsomption66 » (par comparaison : analogie ou contraste) en montrant à la classe un objet ou une situation et en leur demandant si ceux-­ci sont des exemples OUI ou des exemples NON (c’est-­à-­dire si les propriétés de ceux-­ci coïncident ou non avec celles du concept reconstruit). Durant les deux phases, toute la classe participe à la recherche par la discussion. Britt-­Mari Barth insiste sur l’interaction verbale nécessaire à l’acquisition de concepts. Elle différencie, en effet, suivant en cela Jerome S. Bruner, la « formation de concepts » et l’« acquisition de concepts ». Dans le premier cas, les critères de regroupement sont subjectifs (les « catégories sont développées en tant que réponses à des expériences67 »). Dans le second cas, puisqu’il s’agit « d’identifier la combinaison d’attributs selon laquelle un concept est déjà défini », l’interaction verbale s’avère nécessaire pour « vérifier la règle de classification déjà déterminée par d’autres68. » Le dispositif de Britt-­Mari Barth permet ainsi de combiner efficacement les quatre grandes méthodes de reconstruction du pseudo-­concept : dans sa première étape, l’élève procède par « induction69 » et abstrait (sépare), par analogie ou contraste, les propriétés du pseudo-­concept à reconstruire en

63. Britt-­Mari Barth [1987], L’apprentissage de l’abstraction, Paris, Retz, 2001, 2e édition augmentée, pp. 70‑76. 64. Ibid., p. 170. 65. Ibid., p. 68. 66. Les termes de « déduction » et de « subsomption » sont mis entre guillemets parce qu’il s’agit, à cet âge, plutôt d’une « expérience logico-­mathématique », comme le dit J. Piaget, que d’une « déduction opératoire », requérant une pensée abstraite. 67. J.S. bruner, J.J. Goodnow, G.A. Austin [1956], A Study of Thinking, New York, Wiley and Sons, pp. 232‑233, 246, cité par B.-­M. Barth [1987], op. cit., p. 48. 68. Ibid., p. 47. 69. Voir la note 65.

Chapitre 4 • Les méthodes et les dispositifs 33

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recourant, de surcroit, à la discussion avec les pairs ; dans la deuxième étape, l’élève procède par « déduction », analogie et contraste, et discussion.   Les leçons nos 1 et 2 permettent d’illustrer la reconstruction du concept de droit par des « exemples OUI » et des « exemples NON ». La leçon no 6 d’Émilie ­Vandermeersch procède par contraste (par la notion de « droit bafoué »). Les leçons nos 7 et 13, par analogie et contraste. André Giordan et Gérard de Vecchi70, en vue de reconstruire des concepts scientifiques, proposent de passer par la déconstruction d’une représentation initiale. Celle-­ci peut être obtenue en recourant à un « Mur du silence » (point 7).

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Il est aussi possible de partir du concept à reconstruire sans en connaitre la signification et puis, à l’aide de supports ou d’une discussion, d’en rechercher les propriétés essentielles et de représenter le tout sous la forme d’une corole, fleur ou araignée. L’expérience en formation continue m’incite à conseiller au lecteur, pour mieux collecter les attributs essentiels, de formuler le concept au centre de la corole sous la forme : « Le concept, c’est… ». Dans l’exemple de la corole de la leçon no 29 d’Émilie Vandermeersch, je recommanderais la collecte suivante :

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L’opinion des autres, c’est… une forme de valorisation ou de dévalorisation ; une reconnaissance ; un jugement positif ou négatif posé par autrui ; quelque chose de constructif ou de destructif ; quelque chose d’inévitable, de variable…   Les leçons nos 13, 19, 22, 24 et 29 utilisent cette forme pour reconstruire une notion.

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En didactique du français, on utilise une corole (la « corole lexicale ») pour retrouver les significations d’un mot ou les actions d’un personnage de récit. Ici, l’objectif est, en revanche, de déterminer les attributs essentiels (et non accidentels) du concept.

2.2

Généraliser

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Généraliser est une opération nécessaire à l’usage d’une pensée formelle ou abstraite. Nous avons vu que la stratégie d’apprentissage de Britt-­Mari Barth permet d’acquérir une telle opération par l’intermédiaire de l’enseignant qui vise ce que Vygotski appelle la « zone prochaine de développement », c’est-­à-­dire le niveau qu’atteint l’enfant lorsqu’il résout des problèmes non plus tout seul mais en collaboration71. En « philosophie pour enfants » (voir point 8), lors de la « communauté de recherche », Marie-­France Daniel propose à l’enseignant 70. André Giordan, Gérard De Vecchi [1987], L’origine du savoir. Des conceptions des apprenants aux concepts scientifiques, Lausanne, Delachaux et Niestlé, éd. 1994 ; Gérard De Vecchi, Aider les élèves à apprendre [1992], Paris, Hachette Éducation. 71. Lev Semenovitch Vygotski [1934], op. cit., p. 351. Notons que « zone prochaine de développement » est utilisée par la traductrice F. Sève dans la 3e éd. revue.

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d’orienter l’élève par questionnement à généraliser son propos72. Par exemple, si l’élève s’appuie sur un exemple du type : « Mon frère n’écoute pas ce que je lui dis », l’enseignant peut l’orienter par une question du type : « Est-ce que tous les frères n’écoutent pas ce qu’on leur dit ? ». Marie-France Daniel donne quelques exemples de passage à la généralisation par le biais d’une question de l’enseignant : « PARTICULIÈRE : Pourquoi Mathilde dit que sa chambre a un plancher carré ? GÉNÉRALE : Les planchers de toutes les chambres sont-ils carrés ? Que signifie : être carré ?

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PARTICULIÈRE : Pourquoi Mathilde demande-t-elle si sa chambre peut vraiment être un cube ou si elle a seulement l’air d’un cube ? GÉNÉRALE : Quelles sont les différences/ressemblances entre être un cube et avoir l’air d’un cube ? ou Un cube parfait existe-t-il ?

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PARTICULIÈRE : L’enseignante de Mathilde connaît-elle tout sur la géométrie ?

2.3

Développer la réflexion

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GÉNÉRALE : Une enseignante peut-elle tout connaître ? Que signifie : connaître ?73 »

3

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Développer la réflexion, c’est permettre aux élèves de prendre conscience de la manière dont ils pensent : penser la pensée. Il est recommandé aux enseignants qui pratiquent la « philosophie pour enfants » d’insérer dans leurs plans de discussion et de recherche des moments « métacognitifs » à propos d’habiletés cognitives telles qu’une généralisation, une hypothèse, une cause, une conséquence, une analogie, un exemple, un contre-exemple, un argument, un ensemble, une partie…74

L’uSAGE Du tEXtE

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Le texte tient une place privilégiée dans l’éducation à la citoyenneté pour au moins trois raisons. D’abord, parce qu’il met les élèves à égalité devant un référentiel commun, ce que ne permet pas toujours la discussion ; ensuite, parce que la pensée des auteurs, parce qu’elle s’y est développée sous une forme cohérente et argumentative, permet d’initier les élèves à une pensée articulée. Enfin, parce que les textes des auteurs « classiques », les philosophes que l’histoire de la philosophie a sélectionnés comme « grands » – notamment parce qu’ils ont contribué à élaborer les concepts dont on a eu besoin pour penser le monde en évolution –,

72. Marie-France danieL et al. [2005], Pour l’apprentissage d’une pensée critique au primaire, Sainte Foy (Québec), Presses de l’Université du Québec, coll. “Éducation-Intervention”, p. 30. 73. Ibid. 74. Ibid., p. 77 s. Chapitre 4 • Les méthodes et les dispositifs

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Partie pratique

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Les 31 leçons présentées ici sont des démarches pédagogiques transférables : à d’autres niveaux de classe, sur d’autres sujets ou problématiques de citoyenneté. Le terme de « leçon » a été conservé pour rendre compte du caractère structuré de la démarche en vue d’atteindre le(s) objectif(s) pédagogique(s). Toutes ces leçons, à l’exception de la « leçon » no 8, ont été élaborées par les étudiants dans le cadre du Séminaire d’Éducation à la Citoyenneté qui figure à la grille de cours des futurs instituteurs en deuxième et troisième années103. Après correction, ces leçons ont été dispensées dans les classes de l’enseignement fondamental.

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Entre-­temps la réflexion didactique s’est poursuivie, et toutes les leçons publiées ont subi de légères améliorations. C’est la raison pour laquelle il est mentionné que ces leçons se fondent sur une leçon originale de leur auteur.

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Ces leçons ne sont pas des modèles. Plusieurs d’entre elles, par exemple, ne rendent pas compte de tout le travail de préparation à la réflexion et ne prévoient pas de plans détaillés de la discussion des problématiques. Ces leçons sont là à titre exemplatif d’une démarche pédagogique qui a été explicitée dans les quatre premiers chapitres. En outre, le choix de leçons différentes et d’auteurs différents ne permet pas de montrer comment ces leçons peuvent s’inscrire dans un projet cohérent d’activités de classe dans la durée, voire en lien avec l’actualité. Un titulaire de classe pourra s’inspirer des démarches évoquées pour construire ce projet dans la durée.

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Notons aussi que l’éducation à la citoyenneté peut difficilement être évaluée, en matière d’évolution du jugement et/ou du comportement de l’élève notamment. Selon les observations de Michel Rainville104, il y a toutefois une bonne corrélation entre le jugement et le comportement. Travailler à l’évolution du jugement vers un jugement « moral » et citoyen autonome peut ainsi contribuer à l’évolution de l’action citoyenne. Loin de viser une éducation civique traditionnelle d’imposition des normes, les leçons ici proposées visent à l’adhésion volontaire aux normes parce qu’elles sont justifiées.

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Dans ce contexte, l’évaluation, après la phase d’intégration, vise surtout à mesurer si ce qui devait être acquis au niveau cognitif, l’a bien été. Dans la leçon no 31, par exemple, apprendre à débattre suppose l’acquisition de compétences observables. Le référentiel no 5 permet ainsi à l’instituteur d’évaluer les élèves. D’une manière générale, cet aspect de la formation est laissée à l’appréciation du lecteur. Les pictogrammes renvoient à la méthodologie explicitée dans le chapitre 4. 103. La Catégorie pédagogique Defré (Haute École de Bruxelles) a inscrit ce Séminaire à la grille de la formation initiale des instituteurs en utilisant une partie des heures dont elle peut disposer de manière autonome. Ce Séminaire n’existe donc pas dans d’autres Catégories. 104. Michel Rainville, op. cit., p. 62.

Partie pratique 53

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Plan de la partie pratique I. Grille de préparation de leçon et commentaires II. Leçons de reconstruction du lien conceptuel entre droits et devoirs III. Leçons sur l’élaboration de « chartes » ou « règlements » (droits/permissions et devoirs/obligations ou interdictions) IV. Leçons de sensibilisation aux droits de l’enfant (en général ou certains droits en particulier)

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V. Leçons sur des problématiques de citoyenneté

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Titre problématisant de la leçon

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Grille de préparation de leçon

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[Le titre de la leçon doit, de manière synthétique, reprendre en « termes élèves » l’objectif moral/citoyen de la leçon, de préférence sous une forme interrogative pour ouvrir les apprenants à la réflexion et non à la restitution.] 1 Classe-­cible

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[Ce point de la préparation figure en premier lieu pour souligner l’importance d’adapter la leçon à la maturité cognitive, conative et affective de l’apprenant.] 2 Objectif moral/citoyen de la leçon

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[Les objectifs de la leçon doivent être ciblés en veillant à se situer dans le champ disciplinaire, de la morale ou de la citoyenneté, en réponse à la question normative/ prescriptive « Que dois-­je faire ? » ou « Que devons-­nous faire ? »] 3 Compétences principales visées (au centre de la phase formative)

Éd

[Formuler en langage adulte les compétences qui seront développées à l’occasion du déroulement pédagogique pour atteindre l’objectif moral/citoyen qui conduit la leçon. Les compétences principales et génériques visées sont l’autonomie individuelle (intellectuelle, morale et affective), la coopération sociale ou la participation publique. Elles peuvent être cognitives, conatives et affectives. Voir fig. 2] 4 Projet de conclusion de la phase formative au cahier

[Le projet de conclusion de la phase formative est à formuler en « termes élèves ». Par cette projection, l’enseignant s’assure de la cohérence entre ses objectifs d’apprentissage et le déroulement de sa leçon. La dynamique de la classe permettra à l’enseignant d’adapter si nécessaire son projet de conclusion en fonction des apports réels des élèves à la leçon. Notons qu’une généralisation peut aussi se formuler en termes d’alternative du type : « Certains d’entre nous pensent que… parce que…, tandis que d’autres pensent que… parce que… ». 55

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Soulignons enfin que la conclusion doit généralement être reconstruite tout au long de la leçon avec les élèves, après chaque étape de la leçon, sous la forme de « conclusions intermédiaires » et, à la fin de la phase formative, de « conclusion finale ».]

5 Démarche didactique pour atteindre l’objectif moral/citoyen de la leçon (point 2) et faire acquérir aux apprenants les principales compétences visées (point 3)

5.1. Phase d’intéressement (ou poser le problème)

IN

[Cette phase peut, bien évidemment comme les autres phases d’ailleurs, être décomposée en sous-­phases selon les besoins mais doit être conclue.

N

Elle a pour fonction de susciter l’intérêt des élèves pour la recherche et la réflexion à l’égard de l’objectif moral/citoyen choisi. En ce sens, elle doit être relativement brève et ne doit pas se substituer à la phase formative proprement dite. Pour mesurer cette brièveté, l’enseignant doit prévoir un minutage précis.

VA

Susciter l’intérêt peut se faire de différentes manières : rapprocher, voire raccrocher, le sujet de la leçon problématisé au vécu de l’élève, poser un problème sous la forme d’un jeu ou d’un défi, d’un dilemme (conflit sociocognitif), d’un texte (citation, extrait d’auteur, article, conte, témoignage), d’un mythe ou d’une fable (« leçon » de l’humanité ou morale de l’histoire)…]

5.2. Phase informative (éventuelle)

iti o

ns

[Cette phase est dite éventuelle parce qu’il n’est pas toujours nécessaire d’apporter ou de faire rechercher des éléments d’information. En revanche, la « fiche matière » de l’enseignant est toujours nécessaire et rassemble toutes les données et informations, ainsi que leurs références bibliographiques, utiles à étayer le propos et développer la réflexion des élèves].

5.3. Phase formative

Éd

[Cette phase, qui constitue, comme son nom l’indique, le corps de la leçon – là où l’enseignant atteint les objectifs de sa leçon – doit sans doute être décomposée en sous-­phases dont les conclusions intermédiaires et finale mettent en œuvre le projet de conclusion. Il s’agit donc, pour l’enseignant : – de faire dégager de la situation-­problème initiale le problème moral/citoyen, d’en faire analyser et approfondir les différentes facettes pour confronter les élèves à un choix ; – de faire reconstruire les attributs essentiels d’un concept pour répondre à la question (Qu’est-­ce que ?) en se servant par exemple d’une corole conceptuelle et/ou d’un tableau à double entrée (qui servira de référentiel au cahier) ;

56

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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de mener les élèves au projet de conclusion (généralisation) qui répond au « Dois-­je/Devons-­nous ? » de l’objectif moral/citoyen et qui se présente sous la forme d’une « leçon » de vie (règle d’action) justifiée]. 5.4. Phase d’intégration

[Cette phase vise, dans un premier temps, à vérifier si l’élève, à la fin de la phase formative (sous la forme du projet de conclusion et éventuellement d’une « sagesse ») a effectivement intégré (bien compris) ce qui devait être appris et, en un deuxième temps, s’il est capable de transférer ce qu’il a appris dans un autre contexte.

IN

L’enseignant peut aussi prévoir, dans cette phase, lorsque cela se justifie, des activités d’auto-­évaluation. Enfin, la phase d’intégration vise aussi, dans la mesure du possible, à mener l’élève à s’engager (à transférer dans la pratique ce qu’il a intégré) en passant de la décision de s’engager (jugement) à l’engagement (action).

N

Cette phase est prolongée ou non par un moment d’évaluation.]

VA

6. Bibliographie

[À rédiger en tenant compte des normes en la matière.] 7. Références au programme

[À rédiger en fonction du programme de référence.]

ns

8. Prolongements éventuels

Éd

iti o

[La périodisation en 50 minutes de cours ne doit pas nous empêcher de penser les leçons dans la continuité, un trimestre, une année, voire plusieurs années. Dans ce cas, une séquence de leçon peut servir d’amorce, de phase d’intéressement, à la séquence suivante].

I • Grille de préparation de leçon 57

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IN N VA ns iti o Éd Livre_241749XOF_EDUCIT2.indb 58

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IN

II

N

Les droits et devoirs de l’enfant

VA

Leçon no 1

Claudine Leleux et Chloé Rocourt105 1 Classe 4e primaire (9‑10 ans).

ns

2 Objectifs de la leçon Objectif cognitif : amener les élèves à reconstruire le lien entre les droits et les devoirs des enfants (Qu’est-­ce que le lien droit/devoir ?)

Éd

iti o

Objectif moral et citoyen : – amener les élèves à découvrir la Convention internationale des Droits de l’Enfant (1989) ou la Déclaration Universelle des Droits de l’homme (1948) selon les textes utilisés. – amener les élèves à redécouvrir que, dans un État de droit où nous sommes à égalité de droits, le devoir de chacun est la condition de possibilité du droit de chacun (qui lui est dû) : que dois-­je faire pour garantir mon droit et le droit des autres ? 3 Compétences principales visées (au centre de la phase formative) – Relier les droits et les devoirs – Évaluer, juger si les droits sont respectés – Répondre de ses jugements et de ses actes.

105. Cette leçon est le fruit d’une longue expérience en formation continue. Elle nous a été inspirée par la leçon de Muriel Noltincx qui a été publiée dans la première édition de cet ouvrage. En annexe 3, le lecteur pourra lire des situations problèmes que nous utilisons avec les travailleurs sociaux, par exemple.

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4 Projet de conclusion de la phase formative au cahier J’ai des droits, donc les autres doivent respecter ces droits. Mais les autres ont les mêmes droits que moi, donc je dois respecter les droits des autres. J’ai donc des devoirs vis-à-vis des autres, mais aussi vis-à-vis de moi-même. 5 Démarche didactique pour atteindre l’objectif de la leçon (point 2) et faire acquérir aux apprenants les principales compétences visées (point 3)

IN

5.1. Phase d’intéressement (ou poser le problème) Une petite introduction sur la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE) de 1989 (voir Annexe 1) est faite et il est précisé que la classe n’abordera ce jour que quelques-uns des droits repris dans cette Convention. 5.2. Phase informative (éventuelle)

N

Pour trouver le droit qui est violé dans la situation-problème, chaque binôme s’aidera d’extraits du texte simplifié de la (CIDE).

VA

5.3. Phase formative

L’enseignant distribue quelques articles numérotés de la CIDE (document 1). Des situations-problèmes illustrant chacune le non-respect d’un droit de l’enfant sont remises aux élèves (document 2). NB : l’enseignant peut avec des élèves plus âgés ou avec des adultes distribuer l’ensemble de la Convention en langage simplifié (voir annexe 2) ou la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme en langage simplifié106.

ns

Les devoirs des élèves sont distribués sous forme de bandelettes découpées et mélangées aléatoirement (document 3). L’objectif étant de leur faire redécouvrir le lien conceptuel entre le droit et le devoir de l’enfant. En effet, la Convention liste les droits des enfants mais souligne surtout les devoirs des États et des parents dans l’esprit d’une protection de l’enfant propre à la Convention. Tandis que du point de vue pédagogique, ce qui nous importe ici, c’est de faire redécouvrir aux enfants que leurs droits entrainent des devoirs afférents.

Éd

iti o

Sur le plan pédagogique en vue de favoriser la conceptualisation, la recherche du droit bafoué est un exemple NON tandis que la recherche du droit dans la Convention est un exemple OUI (voir la méthodologie du conceptualiser dans le chapitre 4)

106. Pour une version simplifiée, réalisée en 1978 par un groupe de chercheurs de l’Université de Genève dirigé par le professeur L. Massarenti à l’intention de l’ONG Association mondiale pour l’école instrument de paix, voir : http://www.ohchr.org/documents/publications/abcannexesfr.pdf

60

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Pour s’assurer de la bonne compréhension de l’exercice par la classe, la première situation-­problème est traitée en plénière :

Situation-­problème no 1. 1. « Je n’aime pas trop l’école, par contre j’adore les mangas. Je suis au fond de la classe et l’instit. ne voit pas qu’au lieu d’être attentif je regarde des mangas sur mes genoux. » ⇒  Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article no 28 dans la Convention (et le no 26 dans la Déclaration Universelle des Droits de l’homme). ⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant :

IN

Je dois fréquenter l’école jusqu’à mes 18 ans et être le plus disposé possible à apprendre ce qu’on m’y enseigne.

Éd

iti o

ns

VA

N

En effet, bien que j’aie droit à l’éducation scolaire, si je ne mets pas tout en œuvre pour apprendre (aller à l’école, participer activement au cours, faire mes devoirs…), ce droit ne sera pas garanti ou rendu effectif.

II • Les droits et devoirs de l’enfant 61

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Document 1 Extraits de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (version simplifiée) Article 2 Tu as le droit d’être traité de la même façon que tous les autres, quels que soient tes origines, ta couleur de peau, ta langue, ton genre…

IN

Article 8 Tu as le droit à la protection de ton identité. Article 12

N

Dès que tu en es capable, tu as le droit de donner ton avis à propos de tout ce qui te concerne. Tu peux par exemple demander à être entendu par le juge qui s’occupe du divorce de tes parents.

VA

Article 14

Tu as droit à la liberté de conscience et de convictions. Article 16

Article 19

ns

Tu as droit à la protection de ta vie privée.

Tu as le droit d’être protégé contre les mauvais traitements, c’est-­à-­dire contre toutes les formes de violence physique ou mentale.

iti o

Article 28

Éd

Tu as le droit de recevoir une éducation scolaire.

62

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

01/07/2015 15:33:02


Document 2 1.  « Je n’aime pas trop l’école, par contre j’adore les mangas. Je suis au fond de la classe et l’instit. ne voit pas qu’au lieu d’être attentif je regarde des mangas sur mes genoux. » ⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. : ⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant :

IN

Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué

N

2.  « J’ai 9 ans, je m’appelle Youssef et je suis Belge d’origine marocaine. Hier, j’ai voulu m’inscrire dans un club de tennis et on m’a dit que les inscriptions étaient clôturées pour la saison. Une heure plus tard, mon meilleur ami Sacha est allé au même club et on l’a laissé s’inscrire, lui aussi est Belge mais il a la peau blanche ! ». ⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. :

VA

⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant :

Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué

ns

3.  « Lors des récréations, j’ai peur d’aller dans la cour car je sais que la bande de Karl risque encore de me tomber dessus, de me frapper et de me racketter… » ⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. :

iti o

⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant : Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué

Éd

4.  « Je viens d’avoir 12 ans et mes parents sont divorcés. J’habite avec ma mère mais je préférerais vivre avec mon père, pour des tas de raisons… Ma mère me dit que je n’ai rien à dire à ce sujet… » ⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. : ⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant : Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué 5.  « J’ai 4 ans et demi et je m’appelle Kathy. Les autres enfants m’ont baptisée Titi. Je ne sais pas pourquoi et surtout je n’aime pas ça. Depuis hier, dans ma classe,

II • Les droits et devoirs de l’enfant 63

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il y a un nouvel enfant qui s’appelle comme moi. Du coup, voilà que ma Madame décide elle aussi de m’appeler Titi pour ne pas me confondre avec l’autre ! » ⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. : ⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant : Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué

IN

6.  « Je suis un garçon, j’ai 8 ans, je veux pratiquer la danse classique. Mes parents m’ont inscrit à l’Académie et je suis les cours de danse avec 5 filles de 3e année de mon école. Non seulement elles se moquent de moi mais elles en ont parlé à l’école et maintenant je suis la risée d’un grand nombre d’enfants. »

⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. :

N

⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant :

VA

Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué 7.  « Mon amie a dérobé dans mon cartable mon journal intime et l’a lu à la récré en compagnie d’autres filles. » ⇒ Le droit qui n’a pas été respecté est celui dont parle l’article …….............. :

ns

⇒ À ce droit correspond notamment le devoir suivant :

Éd

iti o

Colle ici la bandelette du devoir correspondant au droit bafoué

64

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Document 3 Bandelettes devoirs Je me dois de ne pas maltraiter physiquement et/ou moralement les autres, de n’être ni violent, ni cruel.

IN

Je dois avoir le courage de demander de l’aide si je suis victime de mauvais traitements.

N

Je dois fréquenter l’école jusqu’à mes 18 ans et être le plus disposé possible à apprendre. Je dois veiller à ne discriminer personne et à traiter les autres à égalité.

VA

Je dois donner mon avis sur les choses qui me concernent.

Je dois respecter les convictions de l’autre même si elles sont différentes des miennes.

ns

Je dois respecter la vie privée de l’autre. Je dois protéger ma vie privée.

iti o

Je me dois de respecter l’identité des autres et de ne pas leur attribuer un surnom sans leur consentement. Je dois rappeler aux autres que j’ai un prénom auquel j’ai droit. Je me dois de ne pas maltraiter moralement les autres et de ne pas me moquer d’eux.

Éd

Je dois essayer d’ignorer les moqueries dont je suis victime et clamer mon droit à la différence.

II • Les droits et devoirs de l’enfant 65

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Les binômes sont ensuite invités à continuer l’activité seuls en vue d’une mise en commun en plénière après. –

Mise en commun et explication de l’intrus

Situation-­problème no 2. Le droit bafoué est le droit à la non-­discrimination (article 2). Ce droit, nous l’avons tous à égalité. Mon devoir est donc de ne pas discriminer les autres comme le devoir des autres est de ne pas me discriminer. En ce sens, le devoir est la condition de possibilité du droit que j’ai.

IN

Je dois veiller à ne discriminer personne et à traiter les autres à égalité.

Situation-­problème no 3.

N

Le droit bafoué est le droit à ne pas être maltraité (article 19). Ce droit, nous l’avons tous à égalité. Mon devoir est donc de ne pas maltraiter les autres comme le devoir des autres est de ne pas me maltraiter. En ce sens, le devoir est la condition de possibilité du droit que j’ai.

Situation-­problème no 4.

VA

Je me dois de ne pas maltraiter moralement les autres et de ne pas me moquer d’eux.

ns

Le droit bafoué est le droit à donner ton avis, à t’exprimer, sur les choses qui te concernent (article 12). Comme dans la situation-­problème no 1, même si ce droit m’est octroyé, il ne sera effectif que si j’accomplis mon devoir. Mon devoir est ici, par exemple, de demander à être entendu par le juge. En ce sens, mon devoir est la condition de possibilité du droit que j’ai.

iti o

Je dois donner mon avis sur les choses qui me concernent.

Situation-­problème no 5.

Éd

Le droit bafoué est le droit à la protection de ton identité (article 8). Ce droit, nous l’avons tous à égalité. Mon devoir est donc de ne pas appeler les autres par un surnom sans leur demander leur avis et de signifier aux autres que je n’aime pas être appelé d’un surnom. En ce sens, le devoir est la condition de possibilité du droit que j’ai. Je me dois de respecter l’identité des autres et de ne pas leur attribuer un surnom sans leur consentement. Je dois rappeler aux autres que j’ai un prénom auquel j’ai droit.

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Situation-­problème no 6. Le droit bafoué est le droit à la protection contre les mauvais traitements (article 19). Ce droit, nous l’avons tous à égalité. Mon devoir est donc de ne pas me moquer des autres et le devoir des autres est de ne pas se moquer de moi. En ce sens, le devoir est la condition de possibilité du droit que j’ai. NB : ce n’est pas un problème de discrimination puisque ce petit garçon bénéficie de cours de danse à égalité avec les filles. Ce n’est pas non plus un problème de convictions qui ferait référence à la liberté d’opinion ou de pensée.

IN

Je me dois de ne pas maltraiter moralement les autres et de ne pas me moquer d’eux. Je dois essayer d’ignorer les moqueries dont je suis victime et clamer mon droit à la différence.

N

5.4. Phase d’intégration

VA

Le même exercice avec d’autres droits bafoués et d’autres devoirs afférents est remis aux élèves de façon qu’ils puissent faire la preuve qu’ils ont compris le lien conceptuel droit-­devoir. Le droit étant ce qui est exigible par tout un chacun à égalité, dont découle le devoir de tous les autres pour que ce droit soit garanti.

6 Bibliographie

ns

Pour bien intégrer cette leçon, l’enseignant peut décider juste après cette leçon d’élaborer une Charte des droits et des devoirs (voir partie III) de façon que les élèves comprennent bien qu’ils ont des devoirs pour garantir les droits de chacun, le leur y compris, et non parce qu’ils seraient des enfants qui doivent obéir à leur enseignant.

Michel Bastien, Marc Gourlé, Isabelle Hamaide, Bernadette Jospin, Découvrons la Convention des Droits de l’Enfant, Bruxelles, Labor, 1995.

iti o

Déclaration Universelle des droits de l’homme, version simplifiée :

Éd

http://www.ohchr.org/documents/publications/abcannexesfr.pdf

II • Les droits et devoirs de l’enfant 67

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Leçon no 2 sur la base d’une leçon originale de Nadine VAN ACKeRe 1 Classe 5e primaire (10-11 ans). 2 Objectifs de la leçon

IN

Objectif cognitif : amener les élèves à reconstruire la notion de droit et de devoir et le lien conceptuel entre les droits et les devoirs (Qu’est-ce que le droit, le devoir, le lien droit/devoir ?)

N

Objectif moral et citoyen : amener les élèves à redécouvrir que, dans un État de droit où nous sommes à égalité de droits, le devoir de chacun est la condition de possibilité du droit de chacun (qui lui est dû) : que dois-je faire pour garantir mon droit et le droit des autres ?

VA

3 Compétences principales visées (au centre de la phase formative) : – – – – –

Classer (dans un tableau à double entrée). Relier les droits et les devoirs Raisonner et réfléchir ; s’exprimer, choisir et justifier son choix. Se respecter, s’écouter et discuter. Coopérer.

ns

4 Projet de conclusion de la phase formative au cahier Tu as des droits donc les autres doivent respecter tes droits.

iti o

La réciproque est que les autres ont les mêmes droits que toi et donc que tu dois respecter les droits des autres. Le fait que tu as des droits implique aussi le fait que tu as des devoirs. La synthèse au cahier sera un tableau à double entrée (documents 4-5).

Éd

5 Démarche didactique pour atteindre l’objectif de la leçon (point 2) et faire acquérir aux apprenants les principales compétences visées (point 3) 5.1. Phase d’intéressement (ou poser le problème)

Les élèves reçoivent la copie d’un article qui traite du travail de jeunes enfants abusivement exploités (document 1) avec la consigne de souligner dans le texte tout ce qui leur semble choquant ou anormal.

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

01/07/2015 15:33:03


Document 1 Pendant que des enfants sont à l’école, d’autres, déjà, travaillent

IN

« “Le travail, c’est la santé” dit un proverbe. Pour les adultes, peut-­être. Mais pas pour les enfants. Ils ont de meilleures choses à faire comme jouer, étudier… Ils sont pourtant des millions à travailler dans des champs, des mines, des usines, des boutiques obscures ou sur des montagnes d’ordures. Ou bien ils vendent journaux, cigarettes, bonbons, dans la rue. Ils y sont souvent menacés, agressés, voire tués. Beaucoup d’enfants travaillent aussi sans qu’on le sache, comme ceux qui sont engagés dans des fermes et des plantations isolées ou comme les filles occupées à des tâches domestiques. 246 millions d’enfants

Tout le monde en profite

VA

N

L’organisation internationale du travail (qu’on appelle aussi OIT) estime qu’en 2004, plus de 73 millions d’enfants de moins de 10 ans travaillent dans le monde. Chaque année, 22.000 enfants meurent suite à des accidents de travail. Le plus grand nombre d’enfants au travail – 127 millions – âgés de 14 ans et moins sont dans la région d’Asie-­Pacifique. Aucun de nous n’est à l’abri ; il y aurait 2,5 millions d’enfants qui travaillent dans les pays riches. Au total, 246 millions d’enfants sont au travail dans le monde107.

ns

Chacun de nous a sûrement tenu entre ses mains un produit fabriqué par un enfant. Cela peut être des chaussures du Brésil, un tapis d’Afrique du Nord, d’Inde ou du Pakistan, des vêtements des Philippines, des jouets de Chine ou de Thaïlande… Ces objets viennent de pays pauvres, mais ils représentent à peine 5 % de ce que produisent les enfants de ces pays. Le reste est vendu sur place.

iti o

Des enfants travaillent aussi dans les pays industrialisés. Aux États-­Unis, en Espagne, en Italie ou au Portugal, par exemple, de nombreux enfants manquent la classe au moment des récoltes parce qu’ils travaillent aux champs. Enfants-­esclaves

Éd

8,4 millions d’enfants sont prisonniers de l’esclavage, de la traite, de la servitude pour dettes […], de la prostitution, de la pornographie et d’autres actions interdites. 1,2 million de ces enfants ont été victimes de la traite des êtres humains. Dans beaucoup de pays, surtout en Europe, il est interdit de faire travailler les enfants de moins de 16 ans. Leur travail est donc caché et ils ne sont pas protégés par des lois… Ils restent de longues heures dans des endroits peu aérés, humides, sans protection, sans être bien nourris… 107. Le nombre global d’enfants en situation de travail des enfants a diminué d’un tiers depuis l’année 2000, passant de 246 millions à 168 millions. Plus de la moitié d’entre eux, c’est-­à-­dire, 85 millions effectuent des travaux dangereux (ils étaient 171 millions en 2000). Source : http:// www.ilo.org/global/topics/child-­labour/lang-­-f­r/index.htm#a2 consulté le 26 octobre 2014.

II • Les droits et devoirs de l’enfant 69

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En Afrique, en Asie, en Amérique du Sud, des enfants sont employés dans des mines où ils respirent des gaz dangereux et portent de lourdes charges. Certains sont battus. Ces enfants ont une mauvaise santé et meurent parfois plus jeunes que les autres habitants de leur pays. Devenus adultes, ceux qui survivent continueront à mener une vie misérable parce qu’ils n’ont pas pu aller à l’école. Le travail domestique des enfants

Bangladesh

300.000

Brésil

559.000

Haïti

250.000

IN

(le travail domestique veut dire que l’enfant est exploité pour réaliser les tâches domestiques d’un foyer)

Kenya

200.000

Sri Lanka

100.000

lndonésie

700.000

N

Népal  43.000

VA

Source : Organisation Internationale du Travail, 2004. (L’Organisation internationale du Travail a été créée en 1919 pour améliorer la protection des travailleurs, les conditions de travail et les règlements. Elle regroupe 174 États membres). »

Éd

iti o

ns

Michel Torrekens, Droits de l’enfant d’ici et d’ailleurs dans Les Cahiers du Petit Ligueur, Bruxelles, De Boeck et La Ligue des Familles, 2005, p. 22.

70

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

01/07/2015 15:33:03


5.3. Phase formative

Première séquence Suite à la lecture du texte, je demande aux élèves de me dire ce qu’ils ont relevé de particulier et je note au tableau ce que les élèves disent sous forme de constellation. Voici ce que j’attends d’eux et vers quelle constellation je vais les conduire :

menacé

tué

travail à la ferme, à la plantation, au champ à la mine, à l’usine

l’enfant exploité

travail dans les pays industrialisés

agressé

tâches domestiques mal nourri

N

ne peut pas aller à l’école mauvaise santé

VA

sans protection

IN

battu

Reconstruction de la notion de droit (selon la méthode de Britt-Mari Barth).

iti o

ns

Je dis aux élèves que l’on va apprendre une nouvelle notion, celle de « Droit ». Pour ce faire, je donne des exemples et je leur demande si c’est un exemple « oui » (autrement dit, si c’est un droit) ou si c’est un exemple « non » (autrement dit, si ce n’est pas un droit) : → J’ai le droit de vivre (exemple OUI). → J’ai le droit d’être exploité (exemple NON). → J’ai le droit d’être menacé, agressé ou battu (exemple NON). → J’ai le droit à la protection contre l’exploitation (exemple OUI). → J’ai le droit au bien-être (exemple OUI). → …

Éd

Reconstruction des droits de l’enfant sur la base de ce qui précède et en revenant à la constellation issue de la lecture du document 1. Je place ces droits dans un tableau à double entrée sur panneau (de façon à pouvoir le réutiliser) en gardant la seconde colonne vierge (elle servira dans la séquence suivante).

II • Les droits et devoirs de l’enfant

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71

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Document 2 Mes droits

?

Tu as droit à la vie (Tué) Tu as droit au bien-­être (Enfant exploité)

IN

Tu as le droit d’être protégé contre les ­mauvais traitements (Menacé, agressé, battu) Tu as droit à une protection même si tu n’as pas de famille (Sans protection)

VA

N

Tu as droit à la santé et aux services médicaux (Mal nourri, mauvaise santé)

Conclusion en observant les droits :

Nous avons découvert quelques droits des enfants.

Deuxième séquence

ns

Je réaffiche le panneau (document 2) et fais remarquer aux élèves que j’ai laissé la deuxième colonne vierge pour y mettre les devoirs que ces droits impliquent.

iti o

Consigne : j’affiche au tableau des devoirs sous forme de bandelettes en rouge (document 3) et vous allez venir les classer en regard des droits indiqués en expliquant les raisons de votre choix. (Les élèves sont envoyés au TN).

Éd

L’objectif est que l’élève fasse le lien entre les droits et les devoirs. Il expliquera le lien qu’il fait entre le droit, déjà noté dans la première colonne et la bandelette du devoir qu’il a sous les yeux et qu’il doit placer en regard du droit correspondant. Chaque relation est réfléchie et justifiée. Les bandelettes ne seront pas placées au hasard par les élèves.

72

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Document 3 Les devoirs des enfants Tu as le devoir de respecter la vie, la nature et l’environnement.

Tu as le devoir de bien traiter les autres.

IN

Tu as le devoir de prendre soin de toi.

Tu as le devoir de respecter les adultes qui s’occupent de toi.

N

Tu as le devoir de prendre soin de ta santé et de te laisser soigner.

VA

Tu as le devoir d’aider à la maison en respectant ton besoin de repos, ton besoin de jouer et ton besoin d’étudier.

Conclusion

ns

Les droits et les devoirs sont des règles qui engagent tout le monde, soi et les autres. Le tableau à double entrée, que nous avons construit, rend compte du lien entre chaque droit et devoir. À chaque devoir, correspond un droit comme à chaque droit correspond un devoir. Nous avons tous des droits et nous avons tous des devoirs.

Éd

iti o

Synthèse au cahier : voir le document 4, « Les droits et les devoirs des enfants »

II • Les droits et devoirs de l’enfant 73

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Document 4 Prénom : …………………………..

Date : …………………………

Les droits et les devoirs des enfants DROITS

DEVOIRS Tu as le devoir de respecter la vie, la nature et l’environnement.

Tu as droit au bien-­être.

Tu as le devoir de prendre soin de toi.

Tu as le droit d’être protégé contre les mauvais traitements.

Tu as le devoir de bien traiter les autres

Tu as le droit à une protection, même si tu n’as pas de famille (protection de remplacement).

Tu as le devoir de respecter les adultes qui s’occupent de toi.

Tu as droit à la santé et aux services médicaux.

Tu as le devoir de prendre soin de ta santé et de te laisser soigner.

Tu as droit à la protection contre l’exploitation.

Tu as le devoir d’aider à la maison en respectant ton besoin de repos, ton besoin de jouer et ton besoin d’étudier.

VA

N

IN

Tu as droit à la vie.

Pour que tous aient les mêmes droits, chacun a des devoirs envers soi-­même et les autres.

iti o

ns

À chaque droit correspond ainsi un devoir. Et chaque devoir permet la garantie d’un droit.

5.4. Phase d’intégration

Éd

Le but de la phase d’intégration est de vérifier si les élèves ont compris qu’il faut faire un lien entre les droits et les devoirs en transférant la question du lien entre les droits et les devoirs des enfants à l’école.

Je trace au TN un tableau à double entrée (droits et devoirs). Sur le panneau de gauche, je place dans le désordre les bandelettes « Droits » ; sur le panneau de droite, les bandelettes « Devoirs ». Les élèves viennent à tour de rôle au tableau placer les bandelettes et faire le lien entre les droits et les devoirs. Ils auront la tâche de bien faire ressortir le lien droits/devoirs en justifiant le choix du placement de la bandelette dans une des colonnes du tableau et en expliquant le lien à faire. Le document 5 illustre le travail effectué.

74

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Document 5 Droits et devoirs de l’enfant en rapport avec l’école Tu as le devoir de grandir.

Tu as droit d’aller à l’école.

Tu as le devoir d’apprendre.

Tu as droit au repos.

Tu as le devoir de respecter ton sommeil et celui des autres.

Tu as droit à l’instruction.

Tu as le devoir de travailler de ton mieux à l’école.

Tu as droit à la non-­discrimination.

Tu as le devoir de traiter également les autres, quels que soient leur nationalité, leur sexe, leur religion.

VA

N

IN

Tu as droit à être éduqué.

6 Bibliographie

Éd

iti o

ns

Michel Torrekens, « Droits de l’enfant d’ici et d’ailleurs », dans Les Cahiers du Petit Ligueur, Bruxelles, De Boeck et La Ligue des Familles, 2005, p. 22.

II • Les droits et devoirs de l’enfant 75

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Leçon no 3 sur la base d’une leçon originale de Mahaut DeWIL 1 Classe 1re primaire (6-7 ans). 2 Objectifs de la leçon

IN

Objectif cognitif : amener les à reconstruire le lien entre droit et devoir (Qu’est-ce que le lien droit/devoir ?)

N

Objectif moral et citoyen : amener les élèves à redécouvrir qu’ils ont le droit aux loisirs et donc le droit de jouer et de s’amuser mais qu’ils ont le devoir de respecter des règles du vivre ensemble qui permettent aux autres enfants de jouer (que dois-je faire pour garantir le droit aux loisirs de chacun ?) 3 Compétences principales visées (au centre de la phase formative) Réfléchir (retrouver les raisons d’un interdit), se coordonner par le mime. Relier les droits et les devoirs Évaluer, juger si les droits sont respectés Répondre de ses actes.

VA

– – – –

4 Projet de conclusion de la phase formative au cahier

ns

Nous avons le droit de jouer mais le devoir de respecter le droit de jouer des autres. 5 Démarche didactique pour atteindre l’objectif de la leçon (point 2) et faire acquérir aux apprenants les principales compétences visées (point 3)

iti o

5.1. Phase d’intéressement (ou poser le problème) L’institutrice lit des situations illustrées de Francesco pittau, Les interdits des

Éd

petits et des grands ! : « On ne peut pas déchirer les pages d’un livre, c’est interdit » « On ne peut pas jeter ses déchets dans la rue, c’est interdit » « On ne peut pas piétiner les fleurs, c’est interdit » « On ne peut pas faire plein de bruit pendant la nuit, c’est interdit » « On ne peut pas faire pipi dans la piscine, c’est interdit » « On ne peut pas casser les carreaux du voisin, c’est interdit » « On ne peut pas abîmer les affaires des autres, c’est interdit » « On ne peut pas torturer les animaux, c’est interdit » « On ne peut pas lancer les cailloux sur les voitures, c’est interdit » « On ne peut pas frapper un plus petit que soi » « On ne peut pas pousser quelqu’un dans les escaliers » Une fois toutes les illustrations lues, elle demande aux enfants de quoi parle le livre → « De ce que l’on ne peut pas faire ». 76

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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5.3. Phase formative Étape 1. L’institutrice met en place une discussion afin de faire émerger, à partir des interdits, les droits qu’ont les enfants de jouer et de s’amuser mais aussi les devoirs qu’ils ont de respecter le droit des autres. La discussion a pour objectif de faire redécouvrir aux enfants les raisons de l’interdit. L’objectif n’est donc pas moralisateur : l’institutrice ne vise pas l’obéissance mais la compréhension des règles pour le vivre-ensemble.

IN

Exemple de questionnement : « On ne peut pas déchirer les pages d’un livre, c’est interdit » → Pourquoi est-ce interdit ? → Que pouvons-nous faire avec un livre ?

N

Projet de conclusion intermédiaire : « Nous avons le droit de consulter et de lire les livres à la bibliothèque. Nous avons tous ce droit. Nous devons donc respecter les livres et ne pas en déchirer les pages pour que tous puissent lire. » …

VA

Projet de conclusion finale : « Les interdits permettent de poser des limites. Ces limites qu’on peut appeler « devoirs », garantissent la jouissance des droits. À chaque droit correspond un devoir et chaque devoir permet le bénéfice d’un droit. » Étape 2

ns

L’institutrice propose des petits scenarii aux enfants afin de leur faire prendre conscience des limites à se donner dans le jeu et l’amusement. Avant chaque scénario, l’institutrice demande aux enfants de réfléchir si dans la saynète les règles du savoir-vivre ont été respectées ou non. L’institutrice lit le scénario et demande à des enfants de venir le jouer devant la classe.

Éd

iti o

Nous avons le droit de jouer, de nous amuser, de nous détendre, mais dans certaines limites : 1. Jamal joue au foot dans la cour de récréation. Son seul but est de gagner la partie. Pour marquer un but, il bouscule un enfant de l’autre équipe, le fait tomber par terre et marque un goal. → « J’ai le droit de jouer au foot mais le devoir de laisser jouer les autres partenaires » 2. Martine écoute de la musique dans sa chambre. Il est 21h00, elle décide de baisser un peu le volume de sa radio. → « J’ai le droit d’écouter la musique mais le devoir de laisser mes voisins écouter ce qu’ils veulent » 3. Isabelle demande à Jean si elle peut lui emprunter son crayon rouge pour faire un coloriage. Jean le lui prête avec plaisir. Deux jours plus tard, Jean cherche son crayon dans son plumier… il ne le trouve plus ! → « J’ai le droit d’emprunter mais le devoir de tout remettre à son propriétaire » 4. Julie prend son bain, elle s’amuse avec des petits canards dans l’eau. Elle ne fait pas fort attention et lorsque sa maman arrive dans la salle de bain, il y a de l’eau II • Les droits et devoirs de l’enfant

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77

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partout ! Par terre, sur le tapis, sur le miroir, sur le plafond et même dans le bac à linge ! Maman est très fâchée ! → « J’ai le droit au bien-­être et aux loisirs, je peux donc m’amuser avec l’eau du bain. Maman a les mêmes droits que moi donc, si j’éclabousse, c’est à moi d’essuyer et non à maman. Projet de conclusion : « Nous avons le droit aux loisirs et à l’amusement mais le devoir de respecter le droit des autres. ». La conclusion est écrite sur un grand panneau. 5.4. Phase d’intégration

IN

Les enfants sont invités à dessiner une nouvelle situation où ils ont le droit de jouer dans certaines limites. Si les enfants éprouvent des difficultés à trouver une nouvelle situation « interdit », l’institutrice leur proposera de dessiner l’une des situations déjà exploitées.

N

Une fois tous les dessins terminés, il seront accrochés au panneau sur lequel l’institutrice aura déjà noté la conclusion. Le panneau sera accroché au mur de la classe. 6 Bibliographie

Éd

iti o

ns

VA

Francesco Pittau, Les interdits des petits et des grands !, ill. Bernadette Gervais, Paris, Seuil Jeunesse, 2003.

78

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Leçon no 4 sur la base d’une leçon originale de Mahaut DeWIL – Claire SAND – Christelle VOORSPOeLS 1 Classe 5e primaire (10-11 ans). 2 Objectifs de la leçon

IN

Objectif cognitif : amener les élèves à reconstruire les concepts de « droit » et de « devoir » et du lien entre droit et devoir (Qu’est-ce que le lien droit/devoir ?)

Objectif moral et citoyen : amener les élèves à comprendre que le droit à l’éducation ne sera effectif qu’à certaines conditions (Que dois-je faire pour rendre mon droit à l’éducation effectif ?)

VA

N

3 Compétences principales visées (au centre de la phase formative) : – Classer dans un tableau à double entrée. – Rechercher une définition au dictionnaire. – Généraliser. – Relier deux concepts. – « Déduire ». 4 Projet de conclusion de la phase formative au cahier

ns

L’éducation est un droit. Ce droit est inscrit dans la Convention Internationale des droits de l’enfant (article 28). J’ai le droit d’aller à l’école jusqu’à ce que je puisse exercer un métier.

iti o

Le droit à l’éducation gratuite et respectueuse de ma personnalité implique des devoirs de ma part : devoir de travailler à l’école, devoir de faire ses devoirs, devoir de suivre les règles d’apprentissage, devoir de fréquenter l’école jusqu’à 18 ans ( = obligation scolaire)… 5 Démarche didactique pour atteindre l’objectif de la leçon (point 2) et faire acquérir aux apprenants les principales compétences visées (point 3)

Éd

5.1. Phase d’intéressement (ou poser le problème)

Lecture de l’éditorial du Soir Junior no 119, semaine du 16 au 22 décembre

2003 : « L’école… pour les filles aussi » (document 1) :

II • Les droits et devoirs de l’enfant

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79

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Document 1 Éditorial du Soir junior L’école… pour les filles aussi ! L’Unicef, une organisation internationale qui lutte pour les droits des enfants, vient de publier un rapport. Celui-­ci révèle que, dans le monde, 120 millions d’enfants, majoritairement des filles, ne vont pas à l’école.

IN

Ce problème concerne surtout les pays en voie de développement. Trop souvent, lorsqu’il n’y a pas assez de place dans les classes, on les réserve aux garçons.

Du coup, dans de nombreux pays, les femmes sont défavorisées par rapport aux hommes. Pourtant, si elles ont accès à l’éducation, elles sont capables de grandes choses.

N

Comme Shirin Ebadi, une Iranienne qui se bat pour le droit des femmes et des enfants dans son pays.

VA

Elle vient de recevoir le prix Nobel de la paix108. Ce prix récompense chaque année une personnalité pour sa lutte pour le respect de la dignité humaine. De quoi se réjouir (ou presque !) que l’école soit obligatoire chez nous.

5.2. Phase informative

Fiche Matières :

ns

Recherche du vocabulaire incompris dans l’article distribué aux enfants. UNICEF : Fonds des Nations unies pour l’Enfance.

Éd

iti o

ENFANT : Le mot enfant vient du latin infans qui signifie : « celui qui ne parle pas ». L’enfant n’avait que peu de droits au cours des siècles précédents. Ainsi les pères gaulois avaient le droit de vie ou de mort sur leurs enfants. De même, les lois romaines autorisaient les hommes à accepter ou à refuser un enfant à sa naissance. L’enfant refusé était alors abandonné ou tué, comme à Sparte, en Grèce, quand on le considérait trop fragile pour survivre ou pour être utile à la cité. Ce sont les philosophes du 18e siècle qui fondèrent notre réflexion actuelle sur l’éducation et l’épanouissement de chacun. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen date du 26 aout 1789 grâce à la Révolution française. En 1882 (en France) et en 1914 (en Belgique), l’enseignement primaire devient obligatoire et gratuit. 108. En 2003. En 2014, le prix Nobel de la paix a été conjointement attribué le vendredi 10 octobre à l’adolescente pakistanaise Malala Yousafzay (17 ans) et à l’Indien Kailash Satyarthi « pour leur combat contre l’oppression des enfants et des jeunes et pour le droit de tous les enfants à l’éducation ».

80

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Il faudra attendre le 20 novembre 1989 pour que l’ONU (Organisation des Nations Unies) adopte à l’unanimité (des États de l’ONU) la Convention Internationale des Droits de l’Enfant. En 2004, deux pays seulement n’avaient pas ratifié la Convention : les États-Unis (car elle interdit la peine de mort pour les mineurs) et la Somalie. IRAN : État de l’Asie occidentale – République islamique. PRIx NOBeL : voici la traduction française du testament de monsieur Nobel, daté du 27 novembre 1895 à Paris, rédigé en suédois dans sa résidence parisienne, et ouvert en janvier 1897 :

IN

« Tout le reste de la fortune réalisable que je laisserai en mourant sera employé de la manière suivante : le capital placé en valeurs mobilières sûres par mes exécuteurs testamentaires constituera un fonds dont les revenus seront distribués chaque année à titre de récompense aux personnes qui, au cours de l’année écoulée, auront rendu à l’humanité les plus grands services. Ces revenus seront divisés en cinq parties égales.

ns

VA

N

La première sera distribuée à l’auteur de la découverte ou de l’invention la plus importante dans le domaine de la physique ; la seconde à l’auteur de la découverte ou de l’invention la plus importante en chimie ; la troisième à l’auteur de la découverte la plus importante en physiologie ou en médecine ; la quatrième à l’auteur de l’ouvrage littéraire le plus remarquable d’inspiration idéaliste ; la cinquième à la personnalité qui aura le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion ou à la propagation des congrès pacifistes. Les prix seront décernés : pour la physique et la chimie par l’Académie suédoise des Sciences, pour la physiologie ou la médecine par l’Institut Carolin de Stockholm, pour la littérature par l’Académie de Stockholm, et pour la défense de la paix par une commission de cinq membres élus par la “Storting” norvégienne. Je désire expressément que les prix soient décernés sans aucune considération de nationalité, de sorte qu’ils soient attribués aux plus dignes, scandinaves ou non. »

iti o

5.3. Phase formative

Première séquence

Discussion sous forme de questions-réponses.

Éd

L’institutrice guide les enfants dans leur réflexion en leur posant des questions. Le but de cette discussion est de permettre aux enfants de se poser des questions par rapport aux droits de l’enfant et notamment au droit à l’éducation. → Qu’a-t-on appris à la lecture de cet article ? « Tous les enfants du monde ne vont pas à l’école, les filles notamment » « Que les filles aussi ont le droit de s’instruire » « C’est important d’aller à l’école car elle nous forme à la vie professionnelle » … → Trouvez-vous juste que des enfants ne puissent pas aller à l’école ? « Non, tous les enfants ont droit à l’éducation » → Aller à l’école, est-ce un droit ? … II • Les droits et devoirs de l’enfant

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Lecture de l’article 28 de la Convention Internationale des Droits de l’enfant (document 2), suivie d’un échange dans le but de s’assurer de la compréhension de tous les points de l’article.

Document 2 Article 28 : Tu as droit à l’éducation

VA

N

IN

1) Les États te reconnaissent le droit à l’éducation, sur la base du principe de l’égalité des chances. Pour cela : a. Tu dois pouvoir fréquenter gratuitement l’enseignement primaire. Cet enseignement est obligatoire. b. Tu as le droit d’accéder à l’enseignement secondaire. Il doit être gratuit, sinon, des aides doivent t’être accordées. c. L’enseignement supérieur t’est également accessible. d. Tu as le droit à une orientation scolaire et professionnelle. e. Tout doit être fait pour t’encourager à fréquenter l’école. 2) La discipline scolaire doit respecter tes droits et ta dignité.

3) Les États doivent coopérer pour éliminer l’ignorance et l’analphabétisme dans le monde pour développer l’accès aux connaissances scientifiques et techniques.

ns

Les pays en développement doivent être aidés.

iti o

Définir « Le Droit à… » par une recherche au dictionnaire par groupe de deux.

Document 3

Définitions « Droit(s) »

Éd

Larousse mini-débutants, mon premier dictionnaire (1990) : « Zoé a le droit de regarder la télévision, c’est-à-dire elle peut le faire, c’est permis. Tu n’as pas le droit de passer, c’est interdit » Larousse Sélection, Trois volumes en couleurs (1968) : « Ensemble des règles qui régissent les rapports des hommes constituant une même société » Le petit Robert Langue française (2001) : « Ce qui est exigible, ce qui est permis, dans une collectivité humaine. Ce qui est permis par conformité à une règle morale, sociale » Micro Robert de poche (1988) : « Ce que chacun peut exiger, ce qui est permis, selon une règle morale, sociale ».

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Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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Ensuite, chaque groupe essaye de définir avec ses propres mots le concept « DROIT » dans l’optique « droits de l’enfant ». La classe établit ensuite une définition du « droit à… ». Exemple : Le droit à l’éducation, c’est pouvoir exiger d’apprendre et d’aller à l’école.

Deuxième séquence Découverte de la notion de « devoir » par la relecture du point 1a de l’article 28 : pour que chacun puisse fréquenter gratuitement l’enseignement, il est rendu obligatoire. L’institutrice désigne cette obligation comme un « devoir ».

Document 4

N

Définitions « Devoir(s) »

IN

Définir « devoir » par une recherche au dictionnaire par groupe de deux.

VA

Larousse Sélection, Trois volumes en couleurs (1968) : « Ce à quoi l’on est obligé par la loi, la morale »

Le petit Robert Langue française (2001) : « L’obligation morale considérée en elle-­même et indépendamment de son application particulière »

ns

Micro Robert de poche (1988) : « Obligation morale générale. Ce que l’on doit faire, définie par le système moral que l’on accepte, par la loi, les convenances, les circonstances »

La classe établit ensuite une définition du mot « devoir ».

iti o

Exemple : « L’obligation de respecter des règles, des lois » Les enfants devront rechercher d’autres devoirs en rapport avec le droit à l’éducation.

Troisième séquence

Éd

L’institutrice propose un exercice pour montrer le lien entre DROIT et DEVOIR. L’institutrice distribue deux bandelettes de droits par paire d’élèves et une enveloppe avec les bandelettes de devoirs. Les enfants devront rechercher les devoirs correspondants aux droits. Pour être certaine de la compréhension de l’énoncé, l’institutrice donne un exemple de droits et de devoirs (par exemple l’énoncé no 1 dans le document 5). Mise en commun des propositions des enfants, l’institutrice affiche tous les droits au tableau et complète par les devoirs proposés par les enfants. Par la suite, les enfants écrivent sur une feuille les droits et les devoirs.

II • Les droits et devoirs de l’enfant 83

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Document 5 Droits et devoirs Devoirs

1.  Droit à une bonne alimentation et un logement correct.

1.  Devoir de ne pas gaspiller la nourriture et de ne pas détériorer les habitations.

2.  Droit à une bonne santé et donc à des soins médicaux.

2.  Devoir d’avoir une bonne hygiène de vie et de prendre soin de son corps.

3.  Droit à un cadre de vie agréable et enrichissant.

3. Devoir de respecter l’environnement.

4.  Droit à l’éducation gratuite et respectueuse de ta personnalité.

4.  Devoir de travailler à l’école et de respecter les enseignants.

5.  Droit à la protection contre la brutalité physique ou mentale.

5.  Devoir de ne pas brutaliser les autres par des coups ou des mots blessants.

VA

N

IN

Droits

6.  Devoir de ne pas utiliser les autres dans le seul but de son bien-­être.

7.  Droit de donner son avis et de participer à la vie sociale.

7.  Devoir de respecter l’avis des autres et d’accepter des choix différents des siens.

ns

6.  Droit à la protection contre l’esclavage (travail, guerres…).

iti o

5.4. Phase d’intégration

L’institutrice propose un exercice pour vérifier l’intégration des compétences visées. Pour ce faire, elle distribue aux enfants deux cartons (l’un, bleu, reprenant le référent « DROIT » ; l’autre, rouge, le référent « DEVOIR »).

Éd

Droit

Devoir

Les enfants devront lever le bon carton à la suite d’un énoncé dicté par l’institutrice. Celle-­ci donnera la réponse attendue après avoir relevé la majorité des propositions des enfants. Exemples : 1. « Réparer les dégâts que je cause » → DEVOIR 2. « Faire les efforts nécessaires à apprendre le mieux possible » → DEVOIR 3. « Ne pas gaspiller l’eau et la nourriture » → DEVOIR 4. « Exprimer mes idées et être différent des autres » → DROIT 5. « Avoir des affaires personnelles » → DROIT

84

Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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6. « Être secouru » → DROIT 7. « Jouer pendant les temps de loisir » → DROIT 8. « Jouer sans détruire, ennuyer et voler » → DEVOIR 9. « Respecter les lieux où je me rends » → DEVOIR 10. « Aller à l’école jusqu’à l’exercice d’un métier » → DROIT Retrouver deux paires de droit et devoir correspondants. Par exemple : 2 et 10 ; 7 et 8 ; 5 et 9.

6 Bibliographie « L’école pour les filles aussi ! » dans Le Soir Junior, 16‑22 décembre 2003, no 11, p. 1.

IN

Francesco Pittau, Les interdits des petits et des grands !, ill. Bernadette Gervais, Paris, Seuil Jeunesse, 2003.

Michel Torrekens, « Droits de l’enfant d’ici et d’ailleurs », dans Les Cahiers du Petit Ligueur, Bruxelles, De Boeck et La Ligue des Familles, 2005, p. 26.

Éd

iti o

ns

VA

N

Site : http://www.ecoles.cfwb.be/eespcfmariembourg/droits_et_devoirs.htm.

II • Les droits et devoirs de l’enfant 85

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IN

Table des matières

5

1 Préambule..........................................................................................

7

N

Remerciements..............................................................................................

VA

Former à l’autonomie, la coopération et la participation.........................

7 11

1

Essai de définition............................................................................

11

2

Attributs essentiels de la citoyenneté................................................

13

3 Apprendre la citoyenneté............................................................

23

ns

2 Qu’est-­ce que la citoyenneté ?....................................................

Citoyen : être ou devenir ?................................................................

23

2

Principes et programme...................................................................

23

3

Apprendre, comment ?.....................................................................

25

iti o

1

29

1

Clarifier et hiérarchiser des valeurs...................................................

29

2

Conceptualiser, généraliser et réfléchir.............................................

31

Éd

4 Les méthodes et les dispositifs....................................................

3

L’usage du texte...............................................................................

35

4

Discuter...........................................................................................

36

5

La pédagogie de la coopération.......................................................

41

6

Le dilemme moral............................................................................

43

7

Le mur du silence.............................................................................

46

8

La philosophie pour enfants.............................................................

46

227

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01/07/2015 15:33:10


I

Partie pratique ������������������������������������������������������������������� 51 Grille de préparation de leçon..................................................

55

II Les droits et devoirs de l’enfant...............................................

59

Leçon n 1.............................................................................................. Claudine Leleux et Chloé Rocourt

59

Leçon no 2.............................................................................................. Nadine Van Ackere

68

IN

o

76

Leçon no 4.............................................................................................. Mahaut Dewil – Claire Sand – Christelle Voorspoels

79

N

Leçon no 3 ............................................................................................. Mahaut Dewil

86

Leçon no 6.............................................................................................. Émilie VANDERMEERSCH

89

Leçon no 7.............................................................................................. Nathalie DEPRETER

92

III Chartes et règlements...................................................................

99

Leçon no 8.............................................................................................. Frédéric Mathy

100

Leçon no 9.............................................................................................. Vanessa DEBUSSCHÈRE

104

Leçon no 10............................................................................................ Héloïse JANNIN et Bérénice SANDRON

109

Leçon no 11............................................................................................ Valentine DELVAUX

114

IV Sensibilisation aux droits de l’enfant......................................

119

Leçon n 12 Sensibilisation aux droits de l’enfant................................................ Anne REMY

119

Leçon no 13 Droit à la non-­discrimination........................................................... Céline Vander Sande

124

Éd

iti o

ns

VA

Leçon no 5.............................................................................................. Valérie Croughs

o

228

Livre_241749XOF_EDUCIT2.indb 228

Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

01/07/2015 15:33:10


Leçon no 14 Droit à la non-­discrimination...........................................................

128

Annick Perona Leçon no 15 Droit à la liberté de pensée et de conscience...................................

132

Sandrine Woedstad Leçon no 16 Droit à la protection contre les mauvais traitements.........................

136

Fabienne LALIEU et Céline SIMON

IN

Leçon no 17 Droit à l’éducation........................................................................... Laetitia Clerebout

N

Leçon no 18 Droit à l’éducation........................................................................... Sandrine WOLF

Muriel Noltincx

VA

Leçon no 19 Droit à la présomption d’innocence.................................................

138

141

144

V Problématiques de citoyenneté.................................................

153

Leçon n 20 Pluralisme des valeurs......................................................................

153

ns

o

Fabienne KARIGER

iti o

Leçon no 21 Pluralisme des valeurs......................................................................

159

Jérôme Jacques

Leçon no 22 Relativité des valeurs........................................................................

162

Éd

Aude POUKENS

Leçon no 23 Propriété privée, bien public ?..........................................................

166

Léini WEBER

Leçon no 24 La coopération.................................................................................

170

Céline GHYS Leçon no 25 La coopération.................................................................................

174

Aurélie MARTIAT Table des matières 229

Livre_241749XOF_EDUCIT2.indb 229

01/07/2015 15:33:10


178

Leçon no 27 S’intégrer au groupe......................................................................... Sarah GIGOT

181

Leçon no 28 Se conformer au groupe ?................................................................. Fabienne KARIGER

185

Leçon no 29 Opinion des autres et reconnaissance.............................................. Émilie VANDERMEERSCH

188

Leçon no 30 Prévention du racisme...................................................................... Laurence BIHIN

191

Leçon no 31 Apprendre à débattre ?..................................................................... Sarah GIGOT

196

VA

N

IN

Leçon no 26 L’entraide......................................................................................... Ayano EVERLING

ns

Annexe 1 Titres des 42 articles de la Convention internationale des droits de l’enfant.........................................................................

iti o

Annexe 2 Convention Internationale des Droits de l’Enfant texte accessible à tous.........................................................................

205

207

215

Situations où le droit est bafoué..............................................................

215

Liste des devoirs afférents aux droits ......................................................

217

Documents cités et utilisés......................................................................

219

Aspects théoriques et pédagogiques.......................................................

219

Albums pour enfants...............................................................................

224

Ressources web (décembre 2014)...........................................................

225

Éd

Annexe 3 Situations-­problèmes adaptées à la leçon no 1 pour être utilisées par des travailleurs sociaux........................

230

Livre_241749XOF_EDUCIT2.indb 230

Relier les droits et les devoirs de 5 à 14 ans

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