Hauts-de-France, terre de marins

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Des villes ports À la Libération, les trois grands ports du nord de la France, Dunkerque, Calais et Boulogne, sont entièrement détruits, leurs liaisons ferroviaires anéanties et la majorité des villes en ruines Leur physionomie d’aujourd’hui doit bien sûr beaucoup aux artisans d’une Reconstruction rapide et globalement réussie, des ingénieurs, urbanistes et architectes qui ont pour nom Théodore Leveau, Jean Prouvé, Pierre Vivien ou le ministre Raoul Dautry. Pas de reconstitution à l’identique comme en 1918, mais une conception d’après de réelles préoccupations de rationalisation urbanistique, d’amélioration de l’habitat et d’accompagnement d’une économie à ranimer. Néanmoins, les villes ont su garder leur caractère façonné par l’histoire.

Le port de commerce de Dunkerque. Photo Marc Demeure/La Voix du Nord.

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Boulogne a toujours la pêche Ancienne Gesoriacum devenue Bononia au IVe siècle, Boulogne est l’une des plus importantes villes antiques du nord de la Gaule. Dès le règne d’Auguste elle est au nœud d’un important réseau de voies maritimes et terrestres reliant la Bretagne – la Grande- aux marchés méditerranéens et à l’armée de Germanie. À partir de Claude la Classis Britannica s’installe dans l’estuaire de la Liane et la ville dispose, en conséquence, d’un poste de douane qui contrôle l’ensemble des cargaisons transitant en Manche. Le promontoire de la ville fortifiée abrite alors le camp militaire de la flotte tandis que le port se développe en contrebas de l’escarpement appelé « sautoir » dans l’anse de Bréquerecque. Longtemps, la séparation physique entre la basse et la haute ville se double d’une division sociale. La haute ville abrite la demeure des militaires, des ecclésiastiques, des nobles, des rentiers et de leurs domestiques, tandis que la basse ville, trois fois plus peuplée, héberge les marins, les artisans et les négociants liés à la mer. Cette marine boulonnaise naît vraiment en 932 lorsque le Comte de Boulogne Adalophe et l’abbé du monastère de SaintPierre concèdent par charte aux marins le droit de traîner la wade – un filet à poche – tout au long du littoral. Cet essor de la pêche est accompagné en 1055 d’un tribunal maritime de l’Amirauté dont la compétence s’étend d’Étaples à Wissant.

La flottille artisanale étaploise pêche à elle seule la moitié des apports vendus à la criée de Boulogne, la plus importante de France en volumes. Photo Guy Drollet/La Voix du Nord.

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Les Anglais tirent parfois les premiers

Dans le port de Calais, l’extension du bassin Carnot. Archives La Voix du Nord.

Le bassin Carnot est la première extension vers le sud-est pour permettre une activité de petit cabotage européen et d’échanges fluvio-maritimes avec le réseau à grand gabarit du nord de la France via le canal de Calais. Initialement conçu pour accueillir des navires minéraliers, le bassin Président Henri-Ravisse en eau profonde est surtout à l’origine, en 1990, de l’extension du terminal transmanche et de la modernisation du chargement de câbles sous-marins (1). Un terre-plein de 55 hectares est doté de cinq passerelles d’accostage pour des car-ferries de 180 mètres de long. Mais cela ne suffit pas. (1) Calais est le premier port câblier français.

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Nos voisins d’Outre-manche se sont toujours intéressés au port de Calais. En 1347, après l’avoir conquis, Édouard III investit dans sa modernisation. Un demi-siècle plus tard, les Anglais creusent le Grand-Paradis et rénovent le PetitParadis puis construisent deux jetées au pied du Risban et un arrière-port protégé par un barrage. De 1363 à 1558, ils fixent à Calais « l’Étape des laines » (Merchants of the Staple), une compagnie disposant du monopole du commerce de la Couronne britannique et notamment de l’export de la laine. Vers 1550, Henri VIII installe une grande écluse de garde au Fort Nieulay. Après la seconde abdication de Napoléon, débarquent des artisans de la région de Nottingham et leurs métiers à tulle Leavers (du nom de leur inventeur), venus en fraude avec l’intention d’introduire l’art de la dentelle mécanique ; cela fait naître rapidement une industrie florissante qui va transformer le visage économique et sociologique de la ville, avec l’expansion de la commune de Saint-Pierre (qui sera absorbée par Calais en 1885). Avant le boom du transmanche. En février 2003, le Traité du Touquet prévoit une aide substantielle du Royaume-Uni pour sécuriser l’accès au Tunnel et au port. En 2016, ce sont 22 millions d’euros qui sont de nouveau débloqués par Londres pour améliorer la protection des frontières.

Le phare de navigation de la jetée de Calais, d’où l’on voit sortir et entrer les ferries Calais-Douvres. Photo Johan Ben Azzouz/La Voix du Nord.

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