Supplément au Palazzi A Venezia Décembre 2020

Page 1

Peintures Rupestres Colombia Barbara Crane Navarro L’Art de la Manipulation#2 Fabrizio Pessi Mickael Bethe-Selassié Fondazione De Fornaris Sofonisba Anguissola Handiedan Ferdinand II de Bourbon Les deux Siciles Sheida Soleimani Alexandra Leese Prix du Livre Photo 2020 Art Explora Camille Claudel Encherissez pour le Louvre Supplément au Palazzi A Venezia Décembre 2020


Publication périodique d’Arts et de culture urbaine de l’association homonyme régie par la Loi de1901 ISSN/Commission Paritaire : en cours Distribution postale/digitale Président Directeur de la Publication Vittorio E. Pisu Comité de Rédaction Marie-Amélie Anquetil Arcibaldo de la Cruz Vittorio E. Pisu Rédacteur S’Arti Nostra Demetra Puddu Supplément à l’édition de Palazzi A Venezia du mois de décembre 2020 Tous droits reservés Projet Graphique Maquette et Mise en Page L’Expérience du Futur Correspondance vittorio.e.pisu@free.fr palazziavenezia@gmail.com https://www.facebook.com/ Palazzi-A-Venezia https://www.vimeo.com/ channels/palazziavenezia

Foto marieclairethomas

PALAZZI A VENEZIA

vec ce numéro nous allons clore les publications de l’année 2020 qui s’est révélée bien calamiteuse, nous imposant un bouleversement assez important de nos habitudes de vie. Mais comme tout a une fin, même cette pandémie finira par nous lâcher la grappe, en attendant qu’un autre virus ne décide de migrer vers la population humaine, qui reste quand même une population animale, et comme les hôtes traditionnels de ces engeances tendent à disparaître, soit parce que l’on s’ingegnie à détruire leur habitat naturel, soit parce-que on les mène à l’extinction pure et simple ne laissant pas d’autre choix aux virus et autres saloperies de trouver un autre élément vivant pour continuer à se reproduire. Je croyais que le confinement de ce printemps nous aurait amené à réfléchir sur notre mode de vie, qui visiblement nous mène dans le mur et lorsque ce ne sont pas les pandémies qui nous rappellent à l’ordre, d’autres catastrophes toutes aussi «naturelles» se chargent de nous faire comprendre que peut-être on a tout faux et qu’il va falloir changer de méthode. Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel parait-il mais il y en a qui ne l’entendent pas ainsi et croient que dans un monde fini on peut croitre à l’infini. Pendant ce temps là les Artiste continuent vaille que vaille à travailler même avec des moyens limités ou même sans moyens de tout et tirant profit jusque du confinement nous proposent sans arrêt des thèmes de réflexion qui ne me paraissent pas émouvoir outre mesure ceux qui devrait soi disant nous gouverner et qui dernièrement n’ont pas trouvé de mieux que de fermer musées, galeries, spectacle et toute manifestation culturelle et artistique au prétexte (sic) qu’elles seraient superflues, carrément inutiles pendant que l’on y est, en oubliant que le produits des siècles qui nous ont précédé c’est exactement ce qui nourris notre vie même. Alors dans ce numéro j’ai même cru utile de reporter un petit rappel de l’histoire pas si lointaine (presque un peu moins que cent soixante années) de l’unification (sic) de l’Italie et de la création de son règne, devenue, depuis 1946, une république. J’écris ces lignes le 8 décembre et j’ai voulu faire un clin d’oeil à Camille Claudel née en ce jour. Pour le reste mes choix toujours éclectiques et disparates vous proposent de vous déplacer, mais parfois seulement assis sur votre canapé avec votre tablet ou votre computer portable, pour visiter certaines des initiatives qui, malgré tout, continuent à nous être proposées. Je vous propose aussi la suite de texte extrêmement intéressant de Barbara Crane Navarro qui nous éclaire sur la stratégie pas si virtuose du mécénat de l’Art, opéré par les grandes maisons du commerce du luxe, qui savent utiliser à bon escient la bonne conscience générée par le soutien à des artistes européens, pour mieux cacher les ignominies qu’elles sont capables de infliger à la terre et a ses habitants. Toute cela pour de l’or. Plus près de nous l’arbre de Noël pour Venise nous démontre que la créativité des artistes est sans limites et que même dans la grisaille de nos temps un rayon de soleil arrive toujours à percer. Ils ne manquent pas les héroïnes du passé et du présent qui nous rappellent que l’Art n’est pas un domaine réservé aux petits garçons, au contraire et ce depuis la nuit des temps, puisque il est prouvé que la plus part des peintures pariétales, jusqu’à quatre vingt cinq pour cent sur certains sites, a été réalisées par des mains féminines et que cela n’a pas arrêté, même si l’Histoire officielle (voir le Mezzogiorno italien) s’évertue à nous raconter des bobards arrangés à l’air du temps. Manque de pot on arrive toujours à découvrir la vérité. Heureusement certaines artistes contemporaines s’échinent à nous mettre les points sur les i et nous leur en sommes particulièrement reconnaissants. J’écris ces quelques ligne de Paris, où une atmosphère étrange s’est installée, bien que cela a été un vrai plaisir de retrouver tant d’ami(e)s véritables et de faire des nouvelles rencontres qui peutêtre le deviendrons (ami(e)s). Le futur s’est fait, parait-il, la malle, alors c’est difficile de faire des prévisions, mais moi même et toute mon équipe espérons que cette fin des année dix de ce siècle et le début des années vingt du même, soit le signe d’un renouvellement profond et que ces vicissitudes passées nous aident à comprendre qu’il faut vraiment changer le logiciel. Joyeux Noël e Sant Sylvestre itou. A l’année prochaine. Vittorio E. Pisu

es animaux disparus comme le mastodonte, le paléolama et le paresseux géant, les chevaux de la période glaciaire puis les poissons, les tortues, les lézards, les oiseaux et les figures anthropomorphiques qui semblent danser et se tenir la main. Une séquence de 12 kilomètres de long de peintures rupestres datant d’il y a 12 500 ans a été découverte dans l’une des parties les plus inaccessibles de la forêt amazonienne, dans une zone située sur le territoire de la Colombie. Une sorte de chapelle Sixtine sur une paroi rocheuse, qui raconte de façon vivante ce que les êtres humains ont vu au Magdalénien, la dernière culture du Paléolithique supérieur selon la datation européenne. Les peintures ne sont pas aussi anciennes que celles des grottes Chauvet, qui remontent à environ 35 mille ans, ou comme celles de l’île de Sulawesi, datées d’environ 44 mille ans, mais la découverte est néanmoins très précieuse, tant pour l’énorme quantité de dessins que pour la position géographique, si l’on considère que c’est vers 12 800 avant J.-C. que l’on enregistre la présence de l’Homo sapiens en Amérique précolombienne, qui est resté depuis 25 000 avant J.C. comme le seul représentant de l’espèce humaine sur Terre. Pour annoncer cette incroyable découverte, une équipe britanno-colombienne, financée par le Conseil européen de la recherche et dirigée par José Iriarte, professeur d’archéologie à l’université d’Exeter et l’un des principaux experts de l’histoire de l’Amazonie précolombienne. En fait, la découverte remonte à un an mais n’a été révélée au public que maintenant, pour donner l’occasion de tourner Jungle Mystery : Lost Kingdoms of the Amazon, une série consacrée aux peintures rupestres de Colombie, qui sera diffusée en Grande-Bretagne en décembre. Bien sûr, ce n’est pas exactement le meilleur du point de vue d’une diffusion libre et transparente de la culture, mais tellement.

La présentatrice du documentaire, Ella Al-Shamahi, archéologue et exploratrice, a déclaré à l’Observer que «le nouveau site est si récent qu’ils ne lui ont pas encore donné de nom». Le site est à quatre heures de marche de San José del Guaviare, dans la région de Colombie connue sous le nom de Serranía de la Lindosa, dans le parc national de Chiribiquete, où d’autres peintures rupestres ont également été trouvées. Les peintures, réalisées principalement dans des couleurs rougeâtres et ocres, sont si nombreuses et raffinées, précises dans chaque détail, qu’il faudra des années pour les étudier toutes en profondeur : «Elles sont si détaillées qu’il est possible de voir même le crin des chevaux», a déclaré Iriarte, qui n’a pas caché l’émotion d’observer des images aussi complexes, datant de milliers d’années. L’une des figures anthropomorphiques porte un masque qui rappelle un oiseau à long bec. On y trouve également de nombreuses empreintes de mains et des figures géométriques. Beaucoup de ces peintures ont été réalisées à plusieurs mètres de hauteur et, sans échafaudage approprié, elles ne peuvent être vues qu’avec des drones. «Il est intéressant de noter que beaucoup de ces grands animaux apparaissent entourés de petits hommes aux bras levés, qui les adorent presque», a déclaré Iriarte. «L’une des choses les plus fascinantes était de voir la mégafaune de l’ère glaciaire, car elle est un signe du temps. Je ne pense pas que les gens se rendent compte que l’Amazonie n’a pas toujours été cette forêt tropicale. Un cheval ou un mastodonte n’aurait pas pu vivre dans une forêt. Ils sont trop grands. Ces peintures nous donnent non seulement des indices sur les personnes qui les ont peintes, mais aussi sur ce que cette région aurait pu être, plutôt une savane», a ajouté Shamahi. Mario Francesco Simeone h t t p s : / / w w w. e x i b a r t . c o m / archeologia/colombia


communication. » 2015 À Miami, les procureurs fédéraux ont enquêté et dénoncé une opération de blanchiment d’argent de plusieurs milliards de dollars par des employés de NTR Metals, une importante société américaine de négoce de métaux précieux. Trois commerçants ont plaidé coupables d’avoir acheté de l’or «sale» illégal à des narco-trafiquants et à d’autres éléments du crime organisé, extrait de mines en Amérique latine. L’un des clients de NTR Metals était Cartier. double photo - sites miniers jeunes enfants orpailleurs au Venezuela - Edo, 2020 mineurs d’or dans une fosse minière - O Globo, 2020 (détail)

Foto barbara crane navarro

2016

L’ART DE LA MANIPULATION #2 epuis 1995, date de la parution de ce livre, la marque de luxe Cartier s’emploie à cultiver de nouvelles cibles à «sponsoriser» afin d’acquérir «le positionnement prestigieux de sa marque à dimension sociale. » C’est-à-dire: Arbres! Yanomami! Une chronologie choisie: 1998 A la Biennale de São Paulo, Hervé Chandès, directeur général de la Fondation Cartier, découvre les photos des Yanomami de Claudia Andujar. 2000

Une première version du manuscrit en développement est apparue dans le catalogue de l’exposition Cartier de 2003 «Yanomami, l’esprit de la forêt. » En lisant le livre enfin publié en 2010 par PLON « La chute du ciel », il est évident qu’il n’y a rien dans les 412 pages relatant les paroles du porte-parole et chaman Yanomami Davi Kopenawa qui permettrait à quiconque de penser que les Yanomami apprécient l’or ou les marchandises faites avec de l’or. Absolument toutes les références à l’or et à ceux qui admirent l’or dans le livre révèlent le point de vue de Davi Kopenawa: «Ils veulent trouver de l’or . Leur avidité est ce qui a fait mourir la plupart de nos aînés il y a longtemps! » « L’amour de la marchandise. La valeur que les blancs donnent à l’or qu’ils convoitent tant » « L’or n’est rien de plus que de la poussière brillante dans la boue, pourtant les blancs peuvent tuer pour ça! » « L’or cannibale »et bien d’autres encore…

Hervé Chandès rencontre l’anthropologue Bruce Albert qui lui présente Davi Kopenawa et les Yanomami. Chandès propose ensuite un événement artistique à la Fondation Cartier à Paris combinant le travail d’artistes contemporains, les photos de Claudia Andujar et les Yanomami - organisé en partenariat avec l’ONG Survival. Chandès a également contribué à encourager Bruce Albert à publier un livre sur les Mais j’ai sauté quelques anpensées de Davi Kopenawa. nées ici ...

2004

Un an après l’exposition «Yanomami, l’esprit de la forêt», Hervé Chandès a détaillé dans une interview pour parisart à quel point la Fondation Cartier est supervisée par le marchand de montres et bijoux en or de luxe Cartier: «Pour nous donner une idée, quels sont les coûts de fonctionnement requis par un tel établissement? La Fondation est privée, entièrement financée par Cartier pour ses communications. Pour donner une estimation large, le budget général fonctionnement et programmation - varie autour de cinq millions d’euros. Quelle relation la Fondation entretient-elle avec la société Cartier? «C’est une relation très étroite, simple et structurée. La Fondation a une mission à remplir pour laquelle elle a été confiée et un cahier des charges à respecter. La Fondation rend régulièrement compte de ses activités à l’entreprise avec laquelle elle travaille main dans la main. Nous entretenons des relations étroites avec Cartier et ses filiales étrangères, notamment dans le domaine de la PALAZZI 3 VENEZIA

Dans une interview à ALUMNI SUP DE LUXE, Alain-Dominique Perrin affirme que «Le luxe est un vrai métier! » C’est au huitième étage de la Fondation Cartier, qu’il préside et a créée, que nous reçoit le fondateur de Sup de Luxe et président d’EDC Paris Business School, Alain Dominique Perrin. Parce qu’avant de racheter l’EDC, dont il est diplômé, avec d’autres anciens en 1995, Alain-Dominique Perrin a présidé Cartier puis été vice-président du deuxième groupe mondial du luxe, Richemont. Une passion du luxe et du beau qu’il entend plus que jamais aujourd’hui transmettre aux jeunes. L’Institut Supérieur de Marketing du Luxe a été créé par Cartier en 1990 pour répondre aux nouveaux besoins du secteur en termes de développement commercial et de présence mondiale. « Imaginer les nouveaux marchés : aujourd’hui les Australiens arrivent au luxe et on voit fleurir des centres commerciaux magnifiques avec toutes les grandes marques. » 2018

Plus de 500 ans après que la conquête des Amériques par l’Europe a déclenché des Ce texte prolonge celui publié dans siècles de pillage de la naPalazzi A Venezia de décembre 2020 ture et de déplacement, d’esclavage et d’horreur pour les sous le titre peuples autochtones, le pape L’Art de la Manipulation pages 34,35 François a visité la région par Barbara Crane Navarro (suit page 4)


Foto barbara crane navarro

(suit de la page 3) de Madre de Dios au Pérou et a déclaré que l’industrie minière de l’or était devenue une «Faux dieu qui exige le sacrifice humain» parce qu’il détruit les hommes et la nature et «corrompt tout. … Je veux que tout le monde entende le cri de Dieu. » «Où sont ta sœur et ton frère esclaves?» a demandé le pape en évoquant la traite des êtres humains qui fournit des mineurs et des travailleuses du sexe à l’industrie de l’or. «Il y a tellement de complicité. Et c’est une question pour tout le monde. » Le pape a déclaré que jamais auparavant dans l’histoire les cultures traditionnelles de l’Amazonie n’avaient été aussi gravement menacées. La demande d’or et d’autres ressources de la forêt tropicale de la part des consommateurs des pays riches est à l’origine de la dévastation incessante et continue de la nature et de la dégradation des vies autochtones. Alors que le pape parlait au Pérou, deux des négociants en or de NTR Metals à Miami ont été condamnés à des années de prison. Le juge a déclaré qu’ils contribuaient à «la déforestation… l’empoisonnement des travailleurs… les maux sociaux.» Mais ce ne sont pas les seules personnes impliquées qui sont coupables… La même année, Alain-Dominique Perrin, co-président du comité stratégique du groupe Richemont, déclare dans une interview à Entreprendre: «Nous (Cartier) avons ouvert la porte au financement de l’art par le luxe. … Toutes les grandes entreprises du secteur du luxe se sont embarquées dans le mécénat de l’art contemporain, que cela soit Louis Vuitton, Pinault, Prada, Hermès ou récemment les Galeries Lafayette. Nous avons tracé le sillon en étant les pionniers. Le mécénat est comparable au sponsoring … en contrepartie, la Fondation reçoit des éloges de la presse, des médias et des réseaux sociaux, ce qui profite nécessairement à l’entreprise. L’entreprise dépense et injecte de l’argent mais en tire un profit à travers une notoriété supplémentaire et le positionnement prestigieux de sa marque teintée d’une dimension sociale. »

2019

2020

Le PDG de Cartier, Cyrille Vigneron, a été interviewé dans Fashion Network. L’article précise que « Cartier fait partie du groupe de luxe suisse Richemont, qui contrôle également Van Cleef & Arpels, Montblanc, IWC, Piaget, Alfred Dunhill, Chloé, James Purdey, Azzedine Alaïa, Shanghai Tang ou encore Yoox NetA-Porter. Richemont, qui appartient à la riche famille sud-africaine des Rupert, ne détaille pas les revenus de chacune de ses marques, mais le chiffre d’affaires de Cartier est estimé à plus de 7 milliards d’euros. » «Net-A-Porter est une plateforme très puissante, avec une clientèle solide. Et sur le plan de la visibilité et de l’attrait pour Cartier, tout s’est très bien passé. Nous constatons que la pénétration du circuit e-commerce dépasse les questions de prix et que les articles coûteux sont de plus en plus acceptés sur Internet», se réjouit Cyrille Vigneron «qui fait remarquer que l’article le plus cher vendu dans le cadre de cette collaboration était une montre panthère pavée de diamants vendue pour 140 000 euros à un client britannique. »

Le 11 mars marque le début de l’extraordinaire épisode «Dirty Gold» (l’or sale) de la série documentaire «Dirty Money» sur Netflix. Le film explore en détail le blanchiment d’argent chez NTR Metals, l’implication avec les cartels de la drogue et les raffineries de Miami qui ont été fermées pour trafic d’or illégal en provenance d’Amérique latine. Prenant de grands risques personnels, des civils et des agents fédéraux ont enquêté et révélé le bilan dévastateur et tragique de l’extraction de l’or sur la nature et la vie des peuples autochtones «qui vivent avec la menace quotidienne d’être exécutés…»… «Un employé de la raffinerie - fier que Cartier était un client… »Jusqu’à 75% de l’or extrait chaque année est utilisé pour des bijoux, des montres, des accessoires et d’autres symboles de statut ostentatoires et triviaux vendus par Cartier et d’autres dans l’industrie de l’or. Toujours en mars, JOAILLERIE publiait: «Cartier dévoile les nouveautés de sa collection Clash!

La célèbre maison de joaillerie française a lancé sa collection «Clash» en avril 2019, qui est très vite devenue incontournable. Cartier dévoile aujourd’hui de nouveaux bijoux en or blanc ou gris, qui embrasse les nuances turquoise de l’amazonite. » La photo publicitaire de «Clash» de Cartier rappelle terriblement le riche Capitole de Panem dans l’univers de The Hunger Games. Propagande perverse pour une industrie meurtrière? Je ne connait pas l’amazonite, mais il n’existe pas de moyen durable d’exploiter l’or dans les quantités requises par l’industrie mondiale du luxe, ni même celles concernant les bijoux en or à prix réduits. Combien de temps encore les habitants des pays riches vont-ils continuer à prétendre ne pas être responsables de la désolation et du désespoir que provoque l’extraction de l’or et des diamants? Bruce Albert, l’anthropologue et apologiste de Cartier, dans un échange sur Twitter, m’a informé que «Cartier a la garde complète d’une partie de sa chaîne d’approvisionnement en or» et a envoyé un lien vers un article avec ce


Foto barbara crane navarro

leur cause…», mais aussi Cyrille Vigneron, le PDG de la société Cartier «Cliniques mobiles pour Yanomami, reboisement» ainsi que le ministre Franceschini «L’Europe c’est un producteur et consommateur important de contenus culturels », et l’Ambassadeur Masset« protection de la nature et des écosystèmes… », etc., etc.

titre en professional jeweller qu’il ne doit pas avoir lu au préalable. L’article cite une évaluation de Human Rights Watch qui indique que Cartier n’a pas réellement un bon bilan en matière d’environnement et de droits humains. J’ai répondu: «J’ai lu: ‘On ne sait pas si Cartier applique cette disposition ... a une chaîne de possession pour certains, mais pas tous, de son or ... n’indique pas pour les diamants ... la traçabilité pour une fraction de son or. Selon la maison mère Richemont: la traçabilité est un objectif à long terme et un axe d’amélioration.’?? » (Novembre 2020 la mise à jour de Human Rights Watch intitulée «La pandémie de Covid-19 dévaste les communautés minières, augmente les risques pour les droits» indique que Cartier n’a fait aucun progrès pour améliorer leur triste bilan.) Bruce Albert a poursuivi sur Twitter avec «Mais ce que je sais de première main, c’est que @ Fond_Cartier et #CartierPhilanthropy ont donné depuis avril dernier environ 135 000 USD aux Yanomami au Bré-

sil pour acheter équipement médical pour se protéger du Covid-19 (dont 65 pompes d’oxygène médical). » J’ai répondu: «Vous parlez du Covid-19 propagé par les orpailleurs en territoire Yanomami (et ailleurs en Amazonie)? Peut-être que @Fond_ Cartier pourrait envoyer du matériel médical à d’autres communautés autochtones décimées par l’orpaillage ou réviser leur modèle d’affaires #l’or de sang à la place ?? » Aucune réponse… Les motifs mercantiles de Cartier sont évidents. L’empire commercial de ce fournisseur de bibelots en or et en diamants existe et prospère parce que les consommateurs ont soif de symboles de « réussite ». Mais quand Stephen Corry et autres représentatives de l’ONG Survival (qui soutien les peuples indigènes), et l’anthropologue Bruce Albert tentent de convaincre le monde que le leader de l’industrie de la joaillerie en or de luxe Cartier fait des bonnes oeuvres? Comment interpréter une position si dénuée de fondement dans la réalité? Naïve? Mercenaire?

Que pensent exactement les Yanomami de l’or, des marchandises faites avec de l’or et du consumérisme effréné? C’est expliqué ici dans un court métrage réalisé par l’ONG brésilienne Socioambiental: Voici un petit extrait: «Mais tu as toujours été si gourmand -Trop primitif - Trop sauvage Pour comprendre. Maintenant tu apportes encore des malédictions sur les Yanomami - Maladies. Et encore une fois nous en mourrons . Et toutes les terres indigènes sont être transformé en cendres et boue » Aujourd’hui, la Fondation Cartier présente l’exposition «La lutte Yanomami» à la Triennale Milano jusqu’au 7 février. «La Fondation Cartier pour l’art contemporain et la Triennale Milano se sont associées pour une période de 8 ans. Cette collaboration sans précédent représente un nouveau modèle de partenariat culturel en Europe entre les institutions publiques et privées. » Cette fois, non seulement Hervé Chandès s’est exprimé lors du vernissage «exposition consacrée aux Yanomami et à PALAZZI 5 VENEZIA

Le parrainage est une tentative discursive de transformer la réalité et de nous faire détourner l’attention d’un contexte à un autre. Les «communications» sont des exercices de narration, de mythe; vantant les mérites de marques spécifiques. Ces publicités s’accompagnent de fictions, qui contribuent à désamorcer le vrai caractère d’un « business model » pour forger une série d’associations positives dans l’imaginaire collectif. Le conte trouve son « happy end » avec le «transfert d’image» et le produit acquiert sa légitimité. Malheureusement, pour le scénario de Cartier qui dépend des Yanomami et encore plus malheureusement pour des Yanomami, la destruction de leur territoire pour l’industrie aurifère et les maladies propagées par les mineurs d’or et les décès dus au coronavirus est difficile à transformer en une fantaisie envoûtante. Barbara Crane Navarro Légendes des photos «Leur vraie nature # 1 Triennale Milano - Gianluca Di Ioia / site minier d’or - João Laet photo de Yanomami, Alto Orinoco, Amazonas, Venezuela et photomontage Barbara Crane Navarro «Leur vrai nature #2 photo publicitaire de la collection de bijoux «Clash» de Cartier «Leur vrai nature #3 Fondation Cartier / site minier d’or - João Laet photo de Yanomami, Alto Orinoco, Amazonas, Venezuela et photomontage - Barbara Crane Navarro voir la vidéo de la ONG Socioambiental https://barbara-navarro. c o m / 2 0 2 0 / 11 / 2 1 / e c o uter-le-message-du-chaman-yanomami/ https://barbara-navarro. com/2020/09/06/colonialisme-du-21e-siecle-mis-enoeuvre-par-quelques-ong-dequi-est-la-survie-en-jeu-icisurvival-la-survie-des-foretstropicales-et-des-peuples-autochtones-ou-de-lindustriedes-bijoux-de/


Foto fabrizioplessi

Foto fabriziopessi

’eau a pris une place centrale dans la pensée créatrice de Plessi dès son installation à Venise, à la fin des années 1960 : « cette même eau qui, changeante, charmante et ambiguë, vue de la fenêtre de mon atelier de Venise, pénètre à l’intérieur et dissout toute chose en une lumière liquide et fluorescente, devenant peu à peu mais avec obstination, irrésistiblement, le véritable protagoniste de mon travail ». La vidéo lui sert d’abord à enregistrer ses actions et performances, « à la limite de l’inutile », qui résultent de ce foisonnant répertoire d’idées et lui permettent de s’afficher comme un artiste proche du mouvement Fluxus. C’est ainsi qu’à l’automne 1973 à Paris, par une série d’actions intitulée Plessi-­sur Seine, il entreprend de vider la Seine avec un arrosoir. « Eau et vidéo sont toutes deux liquides et ont pour fonction de transporter quelque chose […] Sur l’écran, quelque chose s’écoule ; tout ne cesse de s’y transformer. Il en va de même pour l’eau. Toutes deux sont intimement liées à la lumière qui leur confère leur beauté ». En faisant de la vidéo un élément à part entière de sa création, Plessi se réfère explicitement aux pionniers de cette technique, qui réagissent depuis les années 1960 à l’intrusion massive des médias dans la société. Au flux accéléré des images de la télévision, il répond par ses propres images ralenties à l’extrême. Il développe ainsi d’emblée un vocabulaire apaisé, limité aux seules structures de l’eau et à ses mouvements, engendrant une atmosphère méditative. Il s’agit pour Plessi « d’augmenter la température de la vidéo en la chargeant de sens et d’émotions.» Dans des œuvres fréquemment conçues en fonction d’un contexte spatial particulier, l’artiste cherche dorénavant à « se mesurer à un espace, un environnement, une histoire, un contexte socio-­politique ». Cette démarche postmoderne, habitée par le besoin de s’inscrire dans une tradition, s’illustre de façon spectaculaire avec Roma, œuvre majeure créée en 1987 pour la documenta 8. Cette évolution s’accompagne d’un nouveau rôle donné au temps, élément par nature fondamental à l’art vidéo. (extraits) Viktoria von der Brüggen

NOËL A VENISE / F. PESSI DANS LES ESPACES PUBLICS DE VENISE, NOËL EST CÉLÉBRÉ PAR L’ART VOICI LES PHOTOS DE L’ARBRE EN CLÉ CONTEMPORAINE, INSTALLÉ SUR LA PIAZZA SAN MARCO, ET LES IMAGES DE L’HISTOIRE VÉNITIENNE PROJETÉES SUR LA SURFACE D’UN DES LIEUX SYMBOLIQUES DE LA VILLE. https://www.artribune.com/ arti-visive/

algré les difficultés de cette année 2020, Venise ne renonce pas à célébrer les fêtes de Noël avec divers projets publics disséminés dans les lieux symboliques de sa ville. La première est l’œuvre de Fabrizio Plessi, Natale Digitale (Noël numérique), installée sur la Piazzetta San Marco, placée entre les deux colonnes. Une sorte d’arbre de vie composé de 80 modules rectangulaires de murs lumineux à leds, qui reposent sur une structure de 9 mètres et demi de haut. Une installation complexe, totalement «made in Venice», qui unit symboliquement la terre, l’eau et le ciel, ce qui en fait un message d’espoir pour la communauté. «L’idée de cette installation est venue de mon grand amour pour Venise : j’ai imaginé une gigantesque mosaïque dorée - qui rappelle l’or de la Basilique - dans laquelle chaque pièce vit sa propre vie», a commenté l’artiste Fabrizio Plessi (Reggio Emilia, 1940). «Pour la première fois dans mon travail, j’ai fait en sorte que le flux lumineux de chaque élément aille dans des directions différentes, créant un entrelacement de contaminations comme métaphore, d’une part,

de la dynamique des relations interpersonnelles et, d’autre part, pour valoriser la mémoire historique de cette ville, lieu de rencontre et d’échange entre différentes cultures par excellence. L’utilisation de la technologie numérique dans ce contexte devient une émotion spirituelle qui s’exprime dans le seul langage possible aujourd’hui, nous permettant d’atteindre les autres même à distance physique». L’œuvre sera visible jusqu’au 6 janvier en même temps que l’intervention «L’âge d’or» sur la façade de l’aile napoléonienne du musée Correr, installée en septembre et agrandie pour l’occasion. Dans le cadre de la revue de Noël de Luce 2020, il sera possible de visionner jusqu’au 31 décembre 2020 une cartographie vidéo sur le pont du Rialto, réalisée par Alessandro Toso Fei de Etra Comunicazione. Un jeu de lumières projette sur le pont les images de certains des grands protagonistes de l’histoire de l’art et de l’architecture de Venise : de Vittore Carpaccio à Jacopo de’ Barbari, d’Antonio da Ponte à Vincenzo Scamozzi à Canaletto. La projection vidéo, promue

par la ville de Venise et Vela Spa avec le partenariat du Consortium pour la protection du Prosecco DOC, a été conçue pour marquer le 1600ème anniversaire de la fondation de Venise - qui sera le 25 mars 2021 - et sera répétée plusieurs fois par jour, du crépuscule à la fin de la soirée. «Tradition et innovation sont les mots clés de Venise, d’autant plus pour ce Noël 2020», a commenté le maire de Venise Luigi Brugnaro, «le jeu des projections et des fondu enchaîné qui illuminera le pont du Rialto va précisément dans ce sens. La ville, malgré les mois sombres qu’elle affronte, veut repartir à zéro et le début, également à travers cette installation, des célébrations de ses 1600 ans, montre sa force de résistance. C’est pourquoi voir l’un des symboles de la ville devenir le protagoniste de ce Noël est un hommage important à l’histoire de tous les Vénitiens. Des images qui feront certainement le tour du monde pour raconter l’histoire d’une ville qui continue de vivre et qui sera prête à accueillir de nouveaux visiteurs». Giulia Ronchi


Foto thierryborredon artension

Mais non, c’est bien plus que cela : celui qui revendique son éthiopianité et qui avoue être devenu plasticien quasiment par hasard est un artiste universel ; né dans le berceau de l’humanité, il véhicule à lui seul toute une cosmogonie, faite de mythologies multiples, joyeusement rassemblées dans un maelstrom culturel dans lequel on se laisse entraîner et d’où émergent des formes à la fois puissantes et fragiles, totems, patriarches, rois mages, déesses et autres animaux fantastiques et des couleurs à la fois mystérieuses et intenses, chaudes et profondes, déformations fantaisistes de la réalité selon ses propres expressions. Dans son innocence créatrice (il ne réalise jamais de dessin préparatoire), Mickaël Bethe-Selassié s’exprime avec cette simplicité qui caractérise les grands artistes : se faisant successivement architecte, ouvrier, alchimiste, il façonne de ses mains le papier mâché, «construit» des œuvres qui restent à jamais, pour lui, des esquisses, renouvelant sans cesse un processus de création laborieux, qui aboutit à des œuvres qui s’adressent directement à leur spectateur, dans un langage que Selassié affirme comme multisensoriel. Dans un entretien avec le magazine Artension réalisé en 2015 il déclarait: «Ma techinque du papier maché est constitué d’abord d‘un squelette, l’armature, une structure légère avec des baguettes de bois ou de rotin. Parfois dans le cas de pièces monumentales, des tiges de métal pour renforcer l’en,semble. Ensuite il y a une enveloppe en grillage, que je découpe, pour épouser la forme qui va accueillir la chair des personnages. Cette peau est constituée de papier maché, papier journal uniquement, malaxé, mélangé à la colle cellulosique. Et l’habit c’est la peinture, parfois complétée par des éléments divers. Pour en revenir à la notion d’artisanat, oui, tout est très bien fait. C’est un véritable boulot d’ouvrier. Mais je ne fais jamais de croquis préparatoires et je ne sais jamais ce qui va sortir.» Mickael Bethe-Selassié est décedé en décembre 2020 à Paris. http://magazine-artension.fr http://www.parisetudiant. com/etudiant/sortie/exposition-mickael-bethe-selassie. html

MICKAEL BETHE-SELASSIE ickaël Bethe-Selassié est né à DireDawa, une petite ville d’Éthiopie en 1951 ; il vit et travaille à Paris. Il évoque très librement son parcours personnel, en dehors de tout académisme, parcours qu’il décompose en cinq périodes. La préparation Au début des Années 1950, le père de Mickaël Bethe-Selassié travaille en Ogaden, une terre désertique immense à l’est de l’Éthiopie, non loin de Dire-Dawa. Mickaël est le cadet de trois enfants ; il connaît peu son père, décédé en 1953. Il passe son adolescence à Addis-Abeba où il fait ses études secondaires au lycée franco-éthiopien Guebre-Mariam. L’intégration Une fois son bac scientifique en poche, il quitte l’Éthiopie et arrive en France à 20 ans en 1971 où il entame des études de physique-chimie, d’abord à Bordeaux puis à Orsay. Mais le jeune Mickaël n’est pas à l’aise dans ce cursus et il interrompt ses études au bout de trois ans. La situation en Éthiopie évolue rapidement en 1974 : Haïlé Selassié est déposé et arrêté suite au coup d’État de

la junte militaire dirigée par Mengistu, il disparaît en 1975 à 85 ans. La mère de Mickaël Bethe-Selassié vient de décéder et il prend la décision de ne pas retourner dans son pays natal. La gestation En France, les années 1970 sont celles du début de la crise économique. Commence une période d’activités diverses pour Mickaël : entre petits boulots et diverses missions d’intérim, il voyage et se forge une personnalité qui va l’orienter vers des choix de vie qui n’avaient pas été calculés… La révélation Mickaël Bethe-Selassié le dit lui-même : «Je suis devenu artiste le 25 décembre 1981». Une journée de Noël dans l’ennui et durant laquelle il décide soudain de peindre un paravent pour sa chambre sur des sets de table en paille. «C’était magnifique, imaginatif et décoratif en même temps; avec des couleurs superbes. Pour moi, ce fut la révélation, et je me suis dit : C’est ça que je veux faire !» La renaissance Cette première expérience créatrice toute en couleurs fût donc annonciatrice d’une

renaissance, à 30 ans, pour Mickaël Bethe-Selassié : il s’orientera très rapidement vers la sculpture qu’il pratique en utilisant du papier mâché. Sans apprentissage, et comme «touché par la grâce» ; 35 ans après, Mickaël Bethe-Selassié apparaît comme un représentant majeur de la scène artistique «africaine» ; prolifique, il expose dans le monde entier (Autriche, Belgique, Brésil, Allemagne, Madagascar, Namibie, Pays-Bas, Espagne, Afrique du Sud, Corée, Suisse, Tunisie, Royaume-Uni, ÉtatsUnis…) ses œuvres sont présentes dans de nombreuses collections publiques, au National Museum of African Art à Washington, dans le Fond Municipal d’Art Contemporain de la ville de Paris ou encore au musée d’art contemporain de Ouidah au Bénin. En 2017 au Chateau de La doucette il expose plus de 70 oeuvres réparties dans 8 salles, il s’agit d’une importante rétrospective qui présente le travail de l’artiste sur quasiment une trentaine d’années de création. Le choc émotionnel est réel : voici la synthèse des arts africains d’hier et d’aujourd’hui, une œuvre forte, naviguant entre tradition et modernité. PALAZZI 7 VENEZIA


Foto fondazionedefornaris

a Fondation De Fornaris a acquis un important patrimoine d’œuvres - peintures, sculptures, installations et feuilles graphiques - de 1982 à nos jours, mais ne possède pas son propre musée. L’ensemble de la collection est en effet confié à la GAM - Galerie d’art moderne et contemporain de Turin, où les œuvres sont exposées uniquement par rotation et pour des périodes limitées. Afin de permettre aux amateurs du monde entier de connaître certaines des pièces les plus significatives des collections, un musée virtuel innovant a été créé, où il est possible de se promener dans les différentes salles et d’apprécier les chefs-d’œuvre avec les mêmes critères qu’un «vrai» musée. À l’intérieur du musée virtuel, dont l’architecture s’inspire des salles du GAM, toutes les peintures sont visibles en haute définition et les sculptures peuvent être explorées à 360 degrés. En près de quarante ans d’activité dans le monde de l’art, la Fondation De Fornaris n’a jamais eu son propre musée «physique», où sa riche collection est exposée en permanence. D’où l’ambition de concevoir «Le Musée qui n’existe pas» à partir de zéro : un musée virtuel innovant qui présente, valorise et rend accessible à tous les travaux les plus précieux de la Fondation. Un des rares exemples dans le monde d’un musée non présent dans la réalité, mais conçu spécifiquement pour être visité et apprécié uniquement sur le web. La collection De Fornaris compte des milliers de peintures, de sculptures, d’installations et de collections graphiques, avec des chefs-d’œuvre d’auteurs de premier plan du XIXe siècle à nos jours : de Hayez à Morbelli et Pellizza da Volpedo, de Chirico à Morandi et Casorati, de Burri à Carol Rama et Paolini, jusqu’à Merz, Pistoletto et Penone. En vertu de la loi, les œuvres sont prêtées gratuitement à la GAM, Galleria Civica d’Arte Moderna e Contemporanea de Turin, qui les expose à tour de rôle et uniquement pour des périodes limitées. La Fondation De Fornaris, présidée par Piergiorgio Re, aura désormais son propre musée : le projet s’est accéléré et a pris de l’importance pendant la période de fermeture, ce qui a changé les scénarios du monde, y compris en ce qui concerne les musées. Le musée virtuel De Fornaris a été créé par Infinity Reply, une

FONDAZIONE DE FORNARIS

Fondazione De Fornaris Via Magenta 31 10128 Torino TELEFONO/FAX +39 011 542491 fdf@fondazionedefornaris.org www.fondazionedefornaris.org/

entreprise italienne leader dans le secteur numérique, qui utilise les technologies 3D de dernière génération. Grâce à ceux-ci, il a été recréé, dans un contexte muséal qui rappelle l’architecture du GAM, une expérience de visite aussi proche que possible de la réalité. Les œuvres du musée virtuel sont présentées avec des critères scientifiques par Riccardo Passoni, directeur du GAM et président de la commission artistique de la Fondation De Fornaris. «Aujourd’hui, les nouvelles technologies sont de plus en plus au service de l’art. C’est donc une grande fierté pour nous d’inaugurer un musée virtuel innovant, «Il Museo che non c’è», grâce auquel la Fondation De Fornaris pourra présenter sa prestigieuse collection au monde entier», déclare le président Piergiorgio Re, «ce qui permettra aux chercheurs et aux amateurs de découvrir ses chefs-d’œuvre à distance grâce à l’utilisation de la 3D et de la réalité virtuelle. Il y a 6 salles qui peuvent être visitées par les utilisateurs, qui peuvent accéder au Musée par un véritable atrium et aussi admirer les œuvres placées à l’extérieur du bâtiment, comme «In

limine» de Giuseppe Penone. La salle 1 est un hommage au mécène, artiste et collectionneur Ettore De Fornaris et contient une série d’œuvres qui lui ont appartenu, dont «Novembre» d’Antonio Fontanesi. La salle 2 est consacrée au XIXe siècle et aux toutes premières années du XXe siècle et comprend des œuvres telles que «L’Angelo Annunziatore» de Francesco Hayez et «L’Amore nella vita» de Giuseppe Pellizza Da Volpedo. La salle 3 se concentre sur les protagonistes de l’art italien dans la première moitié du XXe siècle et commence le voyage avec une série de portraits féminins pré-futuristes de Balla et Boccioni. Dans la salle 4, vous pouvez voir des exemples significatifs de la peinture turinoise de l’entre-deux-guerres, avec des tableaux de peintres tels que Felice Casorati, Carlo Levi et Francesco Menzio. La salle 5 présente 11 œuvres des plus grands artistes du XXe siècle, dont Bianco d’Alberto Burri et Natura Morta de Giorgio Morandi. La salle 6 a finalement été conçue pour mettre en lumière les points forts de l’art contemporain, de 1960 à nos jours : du

conceptuel Giulio Paolini, à l’expérimentateur Aldo Mondino, aux représentants de l’art analytique Marco Gastini et Giorgio Griffa. Toutes les peintures sont visibles en haute définition et les sculptures peuvent être explorées à 360 degrés : chaque œuvre est décrite en détail et certaines d’entre elles sont équipées de points d’accès qui permettent d’avoir un aperçu des détails individuels de l’œuvre elle-même. «Le musée qui n’existe pas» n’est pas une construction statique : il peut en effet être mis en œuvre dans un avenir avec de nouvelles pièces pour abriter d’autres parties de la collection. Vous pouvez accéder au «Musée qui n’est pas là» via le site de la Fondation De Fornaris ou en téléchargeant l’application «Musée virtuel De Fornaris» sur l’App Store ou Google Play. Vous pouvez également explorer le musée en téléchargeant l’application Oculus sur le site Fondation pour vivre une expérience immersive passionnante en 3D, grâce à la visionneuse de réalité virtuelle Oculus Rift Le Musée virtuel de la Fondation De Fornaris a été créé par Infinity Reply, une société du groupe Reply. www.fondazionedefornaris.org/


Foto wikipedia

SOFONISBA ANGUISSOLA ofonisba Anguissola née à Crémone vers 1532 et morte à Palerme en 1625 est une artiste peintre italienne maniériste. Spécialisée dans les portraits, elle arrive en 1559 à la cour d’Espagne de Philippe II et devient dame d’honneur d’Élisabeth de Valois. Professeure de la reine et peintre officielle de la cour jusqu’en 1573, elle peint de nombreux portraits, dont ceux du roi, d’Élisabeth de Valois, d’Anne d’Autriche, du poète de Crémone Giovanni Battista Caselli. Née dans une famille de petite noblesse, du mariage d’Amilcare Anguissola et de Bianca Ponzoni, Sofonisba Anguissola a été l’une des premières femmes peintres à atteindre, de son vivant, les sommets de la scène artistique européenne. Sofonisba est l’aînée et la plus connue des six sœurs Anguissola (Sofonisba, Elena, Europa, Lucia, Anna Maria, Minerva). La famille compte également un frère, Asdrubal (né en 1551). Humaniste imprégné de culture antique, son père, Amilcare Anguissola, encourage tous ses enfants à développer leurs talents artistiques.

Entre 1546 et 1549, il fait étudier la jeune Sofonisba Anguissola et sa sœur Elena auprès du peintre lombard Bernardino Campi, alors connu pour ses portraits et ses tableaux religieux. Celui-ci, bien que n’appartenant pas à la famille crémonaise, plus connue, des Campi (Vincenzo, Giulio et Antonio), possède un style proche des maîtres du maniérisme, en vogue en Italie du Nord entre le xvie et le xviie siècle. Bernardino Campi exerce ainsi une forte influence sur le style de la jeune Anguissola, qui en reprendra les traits essentiels dans son travail de prédilection, celui du portrait. Quand Campi quitte Crémone pour Milan, les sœurs suivent l’enseignement de Bernardino Gatti (il Sojaro), un peintre originaire de Pavie, mais actif entre Crémone et Plaisance. Impresario inlassable des talents de sa fille, Amilcare Anguissola travaille sans relâche, durant les années 1550, à la faire connaître auprès des ateliers de Mantoue, Ferrare, Parme, Urbino et Rome. Il est certain que Sofonisba se rendit à la cour de Mantoue, auprès des Gonzague, où elle côtoya les élèves de Jules Romain.

Il est probable qu’elle ait séjourné à Parme, auprès des Farnese, et qu’elle y ait connu Giulio Clovio, peintre en miniature renommé, qui l’initia à cette technique. Même si l’on n’a pas de trace de miniatures de la main de Sofonisba Anguissola postérieures à sa période crémonaise, les sources de l’époque indiquent qu’elle continua à pratiquer cet art tout au long de sa vie. Elle est citée dans Vite de Giorgio Vasari grâce à Michelangelo Buonarroti qui soutenait que la jeune fille possédait un certain talent. Le père de Sofonisba Anguissola avait en effet écrit à Michel-Ange pour lui présenter le travail de sa fille. Parmi les dessins qu’il lui avait soumis, figurait «Bambin mordu par une écrevisse», dans lequel l’artiste, alors âgée d’un peu plus de vingt ans, avait saisi l’expression de la douleur enfantine d’une manière qui plut beaucoup au maître florentin. On retrouve d’ailleurs cette même grimace dans le «Garçon mordu par un lézard» du Caravage. Le duc Sessa, gouverneur de Milan, lui obtient une recommandation auprès de la cour d’Espagne. PALAZZI 9 VENEZIA

En 1559, Sofonisba Anguissola quitte définitivement la Lombardie pour rejoindre la cour de Philippe II. Elle arrive juste à temps pour assister, à Guadalajara, au mariage du roi avec Élisabeth de Valois, dont elle devient rapidement dame d’honneur et à laquelle elle enseigne le dessin. Cette charge vaut à la famille restée à Crémone une rente annuelle de 200 écus qui, bien qu’adressée nommément à Sofonisba Anguissola, sera toujours encaissée par Amilcar, puis par Asdrubal. Jusqu’à la mort de sa protectrice en 1568, Anguissola réalise de nombreux portraits des membres de la famille royale et de leurs familiers. Cependant, son statut particulier — elle est noble, dame de compagnie, professeur de dessin et peintre de cour — l’empêche de vendre ces toiles et d’avoir un atelier. Ces raisons, ainsi que l’incendie de l’Alcazar, peuvent expliquer l’oubli qui a longtemps entouré son travail pictural à la cour d’Espagne. Ce n’est que grâce à un long travail de recherche qu’un grand nombre de portraits a pu lui être progressivement réattribué, souvent au détriment du peintre Alonso Sánchez Coello (1642-1693). À la mort d’Isabelle de Valois, ses suivantes regagnent leurs cours d’origine, sauf Sofonisba Anguissola, dont le retour à Crémone s’avère difficile à organiser et qui reste donc attachée, pendant que la cour lui cherche activement un époux et réunit sa dot, aux infantes Isabella Clara Eugenia et Caterina Micaela. Redevable envers l’ancienne dame de compagnie de la reine, la cour d’Espagne se met à la recherche d’un mari pour Sofonisba Anguissola, qui a exigé qu’il soit italien et non espagnol. Les recherches finissent par aboutir et, en mai 1573 elle épouse à Madrid, par procuration, un jeune noble sicilien, Fabrizio Moncada, cadet du prince de Paternò. Elle le rejoint en Sicile à l’automne, apportant dans ses bagages la dot réunie par la cour d’Espagne, à savoir une somme importante, des bijoux et une pension annuelle de 1 000 ducats. Le couple vit alors dans des déplacements incessants entre le palais de la famille Moncada à Paternò (environs de Catane) et Palerme. (suit page 10)


Foto wikipedia

(suit de la page 9) Il n’existe pas de trace d’activité picturale concernant cette période, si ce n’est un écrit contemporain qui indique que le travail de Sofonisba « ne consistait pas en portraits, mais plutôt […] quelques petites toiles religieuses tellement rares9. » En 1578, don Fabrizio Moncada périt en mer, au large de Capri, lors d’un voyage à la cour d’Espagne. Il semble que cette disparition ait mis la belle-famille dans l’embarras et que les relations se soient tendues autour de questions juridiques regardant la restitution de la dot. La cour d’Espagne propose de recueillir Sofonisba Anguissola, mais celle-ci préfère, avec l’aide de son frère Asdrubal, quitter la Sicile et rejoindre sa Lombardie natale. Les vicissitudes du voyage de retour la conduisent à faire étape en Ligurie. Elle passe quelque temps à Livourne, puis à Pise, où elle rencontre, vers la Noël 1579, Orazio Lomellini, jeune capitaine de navire et enfant naturel d’une grande famille génoise. Elle l’épouse, en secondes noces, malgré les objections de son frère, de la cour d’Espagne et du grand-duc de Toscane, auquel elle répond, dans une lettre écrite de sa main «les mariages se font d’abord au ciel et, ensuite, sur terre ». Le mode de vie du couple sera dès lors lié aux navettes incessantes qu’Orazio effectue, pour les besoins de son négoce, entre Gênes et la Sicile, tout d’abord comme capitaine d’un vaisseau de la République (La Patrona), puis à son propre compte, assumant progressivement des fonctions de plus en plus élevées au sein de la « nation génoise » installée à Palerme. Malgré les accrocs à l’étiquette (Orazio n’était pas noble et le mariage avait eu lieu très peu de temps après la mort de son premier mari), les relations de Sofonisba avec la cour d’Espagne se recomposèrent assez rapidement. Dès 1583, elle reçoit un paiement una tantum en dédommagement de la perte de don Fabrizio. Un an plus tard, une troisième pension annuelle lui est adressée, qu’elle peut percevoir en Sicile. En 1615, elle revient à Palerme où son mari a désormais la majeure partie de ses intérêts. Le couple y acquiert une mai-

The Marvelous Miss Anguissola! by Melissa Muldoon https://melissamuldoon. com/ https://www.amazon. com/Melissa-Muldoon/e/ B01LYC7163 https://www.artlovingitaly. com/sofonisba-anguissola-italy-novel-michelangelo-vasari/

son dans l’ancien quartier arabe de Seralcadi. Elle continue à y peindre, malgré la baisse importante de sa vision, qui finira par lui faire abandonner la peinture. À l’été 1624, Sofonisba Anguissola reçoit la visite du célèbre peintre Antoine van Dyck, appelé à Palerme pour faire le portrait du vice-roi Emmanuel Philibert de Savoie. Le jeune peintre croque alors dans ses carnets le portrait de la vieille femme et note que, malgré sa vue très diminuée : « elle eut le goût de disposer les toiles devant elle et, à grand effort et en mettant le nez dessus le tableau, parvint à discerner quelque peu », pendant que « de mémoire, et d’esprit très vif et très courtois », elle « tenait d’autres bons discours et me conta une partie de sa vie », ainsi que «la grande peine qu’elle avait de la perte de sa vue et de ne plus pouvoir s’adonner à la peinture. » Sofonisba Anguissola meurt l’année suivante, le 16 novembre 1625. Elle est inhumée à Palerme, dans l’église de San Giorgio, appartenant à la « nation génoise ». La pierre tombale apposée

quelques années plus tard par son époux porte la mention suivante :

Sophonisbae uxori ab Anguissolae combitus ducenti origine [M] nobilitate, forma extraordinariisque ‘natura dotibus in illustres mundi mulie res relatae ac in exprimendis hominum imaginibus adeo insigni ut pare[m] aetatis suae nemine habuisse sit aestimata Horatius Lomellinus ingenti affectus maerore decus hoc extremum et si tantae mulieri exiguum mortalibus vero maximu[m] dicavit 1632. Les archives espagnoles concernant Sofonisba Anguissola ont brûlé dans l’incendie qui a totalement détruit l’Alcazar royal de Madrid, entre le 24 et le 28 décembre 1734.


’art de l’artiste néerlandais Handiedan consiste en un mélange complexe de collages numériques et de collages sculpturaux très détaillés, découpés à la main, complétés par des cadres ornementaux antiques consciencieusement collectés. La technique de collage accomplie et raffinée d’Handiedan lui permet un voyage artistique à travers le passé, le présent et le futur. Le résultat est une exploration visuelle presque kaléidoscopique dont les découvertes sont parfois immédiatement visibles et parfois cachées à la vue de tous. L’univers artistique d’Handiedan tourne autour de quelques motifs visuels majeurs et pourtant il étonne par sa complexité, tant au niveau de la composition formelle que de la technique qu’elle utilise pour les réaliser. Ces deux aspects réunis déterminent le charme irrésistible de son art. Protagonistes incontestés des collages sculpturaux de Handiedan, ses pin-up vintage rappellent immédiatement le genre burlesque. Cependant, si l’on y regarde de plus près, de nombreuses sources d’inspiration se ré-

vèlent : le néo-classique et l’époque victorienne, la Belle Époque parisienne, jusqu’aux années 1940 et l’imagerie sexy de l’après-guerre. Mais aucun des «modèles» d’Handiedan n’a vraiment existé. En fait, chacun d’entre eux est composé par l’assemblage de parties anatomiques de différentes images préexistantes. La femme nouvellement formée est le résultat d’un processus complexe de superposition qui donne à l’art d’Handiedan une qualité tridimensionnelle et fait de chaque œuvre un bas-relief collagé. Ses créatures joyeusement sexy semblent se plier à leur environnement. Malgré la théorie du «moins c’est plus» si répandue dans la culture néerlandaise, l’art d’Handiedan répond davantage à une fascination pour les petits détails ornementaux. Dans chaque œuvre, l’arrière-plan est aussi intrigant que les créatures féminines qui en émergent. Rempli de petits détails exquis, l’arrière-plan comprend de vieux timbres-poste, des monnaies anciennes, des cartes à jouer, des partitions de musique et toutes sortes d’antiquités bizarres, même des bagues de ci-

gares. Ils sont composés de manière à créer des motifs et des motifs élégamment décoratifs. Une fois que Handiedan a rassemblé tous les fragments visuels et qu’elle a à l’esprit une atmosphère plutôt qu’un sujet spécifique, elle «joue» avec eux sur l’ordinateur. Lorsque la conception numérique la satisfait, elle imprime sur papier les éléments qui formeront le collage en couches. Elle utilise également du vieux bois et même du zinc comme toile de l’image finale. Son travail, d’une grande complexité, est complété par ses propres dessins et gribouillages au stylo qui marquent à la fois le fond et les parties du corps des pin-ups. Montées dans des cadres antiques ornés, les œuvres sont enfin prêtes dans toute leur exubérante vivacité. Si les pin-up d’Handiedan ressemblent à quelque chose entre une femme fatale d’un film noir ornée de motifs orientaux, une pin-up sexuellement joyeuse d’un calendrier des années 1950 et une fille de rockabilly tatouée, chaque œuvre fonctionne également comme un trésor de symboles dispersés sur le fond sous forme de détails décoratifs. PALAZZI 11 VENEZIA

Par exemple, ses travaux les plus récents portent sur la cosmologie, la philosophie de Pâques et les géométries sacrées. Bien qu’elle ait opté pour un traitement monochrome, sa nouvelle série confirme la complexité et la profondeur provenant de cette forme de collage en couches, où tout est coupé à la main et assemblé avec grand soin. Les nouvelles pièces sont autant de preuves de la technique accomplie de Handiedan que les précédentes (si ce n’est plus). Margherita Dessanay TAXIE GALLERY est une galerie d’art spécialisée en graffiti historique européen et américain. Fondée par Valériane Mondot en 2001 (dp TAXIE2019) elle se positionne en référence historique et experte dans l’histoire du mouvement. Jusqu’en 2007 elle sera installée dans le 17ème arrondissement de Paris et étendra ses expositions tant en province, qu’en Belgique. Elle est une des premières à présenter le travail d’artistes aujourd’hui mondialement reconnus comme les français Bom.K, Brusk, Jaw, GrisOne, Mist, Tomas Canto, Kongo, Zeky, Tilt, Fafi, Der ; les allemand Stohead, Daim (Mirko Reisser), Daddy Cool (Heiko Zalhman), Darco les américains Lady Pink, Cope2, Tkid et les photographes historiques Henry Chalfant et Martha Cooper. En 2006 avec l’ouverture du marché sur le Street Art, Valériane Mondot devient expert auprès de maisons de ventes publiques (Artcurial, Digard Auction, Tajan, Piasa) et de collectionneurs privés. Elle reprendra les expositions dés 2016/17 et s’installera avenue Matignon (Paris 8ème), qu’elle quittera en juillet 2019 pour se concentrer essentiellement sur la défense du Graffiti historique.

HANDIEDAN du jeudi 3 décembre 2020 au dimanche 31 janvier 2021 ouvert du mardi au dimanche 11h - 20h (sans interruption)

TAXIE GALLERY 19 rue de Turenne Paris 75003

Valériane Mondot +33(0)6 84 48 85 70 valeriane@taxie-gallery.com http://taxie-gallery.com/ handiedan.com https://vimeo.com/368086248


Foto vesuviolive.it

erdinand II de Bourbon, né à Palerme le 12 janvier 1810 et mort à Caserte le 22 mai 1859, est devenu roi des deux Siciles en novembre 1830, alors qu’il n’avait que 20 ans, à la fin du très bref règne de son père, François Ier. Surnommé «Re Bomba», ce surnom remonte à tort au bombardement de Messine en 1848, puisque les sources les plus certaines et récemment mises au jour le datent d’une bataille qui a eu lieu à Palerme quelques mois plus tôt, où il n’y a pas eu de pertes humaines importantes. Son règne peut être divisé en deux grandes phases : l’une caractérisée par les réformes et la prévoyance, l’autre par l’isolement international pour n’avoir pas pu bien réagir aux exigences libérales et au sabotage international, facteur qui a ensuite conduit à la chute des Deux Sicile. Le jeune Ferdinand s’est d’abord révélé être un roi énergique et entreprenant, selon beaucoup de personnes les plus dynamiques après le roi Charles, son arrière-grandpère et premier roi de la dynastie des Bourbons dans le futur Royaume des Deux Siciles. Les dix premières années de gouvernement ont été brillantes, telles qu’elles ont été reconnues tant par ses contemporains que par les historiens modernes : la nation dont il a hérité venait de sortir des émeutes napoléoniennes qui ont secoué toute l’Europe et souffrait encore de l’équilibre précaire conféré par le Congrès de Vienne, mais il a pris la situation en main et mis en œuvre une série de réformes qui ont placé les deux Sicile parmi les grandes nations européennes. Le déficit de l’État, au moment de sa prise de contrôle, était de 4 millions 345.251 ducats avec un vide d’un peu plus de 1.128.000 ducats. Pour rétablir la situation désastreuse des finances de l’État, le roi, le 8 novembre 1830, expose son programme. Il commence par lui-même et par son propre tribunal, en réduisant sa liste civile de 370 000 ducats par an (décret du 9 novembre 1830), en diminuant de moitié les salaires des ministres (décret du 4 février 1831), en réduisant les dépenses pour la guerre et la marine, et en réduisant les dépenses de tous les autres ministères.

FERDINANDO II DE BOURBON Il a ainsi économisé plus de 1.241.000 ducats, comblant ainsi le vide du Trésor public par quelques astuces qui ont directement affecté les coûts de la politique. D’autres mesures concernaient la récupération de l’administration judiciaire, l’expulsion des courtisans et des policiers corrompus qui s’étaient enrichis derrière l’État, une large amnistie pour les exilés et les prisonniers politiques, et l’affectation des meilleurs hommes à des postes clés dans l’armée, les choisissant même parmi ceux qui avaient été fidèles à Murat. Révolutionnaire fut la mesure, avec un décret du 29 septembre 1838, par lequel il partageait entre les citoyens les plus pauvres les terres appartenant à la propriété de l’État et qui, cependant, étaient exploitées avec arrogance par les «gentlemen» locaux, faisant ainsi référence aux idéaux démocratiques de la Rome antique. En récupérant et en canalisant le lac de Fucino, près de L’Aquila, il a rendu des terres arables aux agriculteurs et a fait de même dans le Tavoliere delle Puglie. Selon certaines sources, le vo-

lume des échanges a été multiplié par 50 en 30 ans. Il a rejoint la ligue contre la traite des esclaves. Afin de mieux comprendre les besoins de ses sujets, il multiplie les audiences et voyage beaucoup dans ses provinces, inspectant en personne les hôpitaux et les lazarets lors de l’épidémie de choléra de 1836. Il a donné l’impulsion au développement industriel, à tel point que presque chaque nouvelle invention a été mise en œuvre en Italie, d’abord à Naples, puis dans le reste du pays. Parmi les archives, on trouve la première ligne de chemin de fer, le pont sur le Garigliano, l’éclairage au gaz de la ville de Naples, l’usine Pietrarsa «parce que le bras étranger pour fabriquer les machines mues par la vapeur, le Royaume des Deux Sicile n’avait plus besoin», le premier centre volcanologique du monde et d’autres (Toutes les archives du Royaume des Deux Sicile). Une telle politique enflammait les âmes de ceux qui voulaient unir toute la botte, demandant à Ferdinand II de mener les luttes pour chasser les Autrichiens du nord de l’Italie et

procéder progressivement à l’unification de l’Italie. D’autre part, l’Autriche ellemême et surtout l’Angleterre et la France ne voient pas d’un bon œil la figure de Ferdinand, qui risque de compromettre l’hégémonie anglo-française dans l’ordre politique européen. Sur son lit de mort, il avoua qu’il avait renoncé à la couronne d’Italie pour ne pas porter atteinte aux droits des autres souverains italiens, en particulier du pape, par respect pour le sens religieux profond avec lequel il avait été éduqué. En 1833, cependant, il avait proposé à Charles Albert de Savoie, au grand duc de Toscane Léopold II et au pape Grégoire XVI de réaliser une union entre les États italiens, sans recevoir de réponse. Le faux pas, comme l’admettent les historiens et récemment aussi Paolo Mieli sur les colonnes du Corriere della Sera, a été de contrarier Londres qui craignait, à l’approche de l’ouverture du canal de Suez, qu’il y ait aussi qu’il pourrait aussi y avoir une autre grande puissance en Méditerranée. On sait en effet que le débarquement des Mille à Marsala


Foto vesuviolive.it

la Sicile devenue indépendante, Ferdinand II n’a pas su profiter de cette situation pour se rendre plus «sympathique» aux yeux de ses sujets et des autres petits Etats de la péninsule, s’isolant et se fermant à toute relation de politique étrangère, montrant un désintérêt total pour ce qui se passait en dehors des frontières napolitaines et siciliennes. Malgré la concession de la Constitution, le peuple le plus révolutionnaire était toujours mécontent et exigeait de plus en plus ; la Sicile, qui avait demandé l’autonomie, en vint à demander l’indépendance. Ferdinand II a commis l’erreur de ne pas comprendre que les desseins des autres puissances étaient derrière lui, résolvant tout avec l’absolutisme et suspendant la Constitution. Il a fait le jeu des Britanniques. Vittorio Emanuele II, au contraire, en sortit beaucoup mieux grâce aussi aux machinations du sournois comte de Cavour, qui comprit qu’en exploitant la situation géopolitique il pouvait résoudre les problèmes économiques de sa banque et du royaume de Savoie ; le bilan excédentaire et les réserves du royaume des deux Siciles étaient idéaux pour donner de l’oxygène aux caisses dévastées de Turin, qui avait des dettes envers l’anglais et le français. La dette publique de la Savoie de cette époque est aujourd’hui reconnue comme l’une des principales causes de la faiblesse économique et politique de l’Italie d’aujourd’hui. La suite de l’histoire est connue: le 8 décembre 1856, lors d’une visite au Champ de Mars après la cérémonie de l’Immaculée Conception, Agesilao Milano perça le roi avec la lame de sa baïonnette. Milano est condamné à mort pour une tentative d’assassinat du roi, Ferdinand se sauve mais la blessure, mal soignée, continue à lui causer des problèmes de santé jusqu’à sa mort. Au début de 1859, Ferdinand n’écoute pas les médecins et part accueillir le 3 février Maria Sofia de Bavière, soeur de la célèbre princesse Sissi, la nouvelle épouse du premier-né et héritière du trône François, mais au cours du voyage, sa santé se dégrade. C’est une infection purulente qui menace de mort le souverain, rendant l’opération nécessaire : la reine et la cour sont horrifiées par cette perspective, (suit page 14)

en 1860 a été protégé par des navires anglais, tout comme les nombreux épisodes anglais qui ont déstabilisé le royaume de Ferdinand dont il a malgré tout réussi à garder les rênes: dès sa mort, les opérations d’invasion piémontaises ont commencé, en accord avec la France et l’Angleterre. En 1838, un fait extrêmement important est constaté, à savoir la signature d’un accord avec la société Taix-Aycard de Marseille pour l’extraction en Sicile du soufre indispensable à la production de la poudre à canon, sur laquelle il existe un monopole britannique important. Les protestations de Lord Palmerston, Premier ministre britannique, ont été violentes au point de provoquer la démission du ministre des Affaires étrangères napolitain, ordonnant aux navires britanniques d’effectuer des manœuvres en vue de la guerre du Golfe de Naples. Ferdinand II, très jaloux de l’indépendance des Deux Siciles, aurait été prêt à la guerre s’il n’y avait pas eu Vienne et Paris : le roi de France Louis-Philippe a révoqué le privilège de la Taix-Aycard, rendant nul le contrat entre celle-ci et le royaume des Bourbons.

Lorsque Ferdinand s’est isolé politiquement des autres États, la grande impulsion réformatrice qui l’avait caractérisé dans les premières années de gouvernement a également connu une involution. La vague de scandale qui a frappé Ferdinand II entre 1850 et 1851, lorsque des lettres de Lord Gladstone, en visite à Naples, envoyées à Lord Aberdeen, ont dépeint la société bourbon comme «la négation de Dieu érigée en système de gouvernement» en raison de la violation systématique de toutes les lois humaines et divines, remonte à Lord Palmerston. Toute l’Europe commença alors à haïr Ferdinand II, jusqu’à ce que Gladstone admette qu’il avait écrit ces lettres sans jamais avoir visité le royaume, mais en les compilant en pratique sur les diktats des hommes à qui Lord Palmerston l’avait confié. L’honnête Lord Aberdeen, au Parlement, a été le protagoniste d’une furieuse oraison de condamnation contre ces calomnies. Entre-temps, cependant, les problèmes étaient réglés, puisque Ferdinand était entouré d’un halo de suspicion. C’est également à partir des

travaux du Parlement anglais, après 1861, qu’apparaissent les condamnations du soutien britannique à la conquête piémontaise du Royaume des Deux Siciles, jugées comme une violation du droit international et la cause de crimes plus horribles et plus graves que ceux attribués à Ferdinand II. La gestion des soulèvements de 1848, et en particulier de la question sicilienne, est totalement inadéquate de la part de Ferdinand II. Cette année-là, qui est entrée dans l’histoire comme le Printemps des peuples, a enflammé les deux Siciles, la France et l’Autriche, ayant des répercussions, dans les années suivantes, également en Russie et en Hongrie, ainsi que dans le processus d’unification de l’Allemagne et de l’Italie. L’Angleterre habituelle, au contraire, a jeté du bois sur le feu parce qu’elle pouvait protéger et accroître son hégémonie. Après 1850, les «incidents diplomatiques» sont très fréquents, habilement provoqués par le gouvernement britannique de Sa Majesté. Bien qu’il ait maintenu l’unité du Royaume des Deux Siciles, en reconquérant en 1849 PALAZZI 13 VENEZIA


Foto vesuviolive.it

(suit de la page 13) car il est peu pratique d’opérer un roi. Lorsque l’infection s’est propagée dans tout son corps, l’opération a été pratiquée, mais il était trop tard. Entre-temps, le navire qui emmenait quelques exilés politiques en Argentine a été détourné vers l’Irlande, afin qu’ils puissent retourner en Italie, tandis qu’en avril, l’Autriche a envahi le Piémont : c’est ce que Cavour voulait faire intervenir les Français. Sur son lit de mort, Ferdinand II a ordonné que les deux Siciles restent neutres, insistant sur l’isolement jusqu’à la fin. Avant de mourir, le 22 mai 1859, il avoue avoir refusé la couronne d’Italie pour ne pas vivre avec le remords d’avoir fait du tort aux autres souverains italiens. «Ce n’était pas l’Unité ! C’était l’occupation piémontaise, et si le royaume de Naples, qui était beaucoup plus riche et plus puissant, l’avait fait, cela se serait passé différemment. La mentalité savoyarde n’était pas italienne. Cavour parle français. Et les Italiens détestaient ce nouvel État» : c’est l’opinion d’Eugenio Scalfari, fondateur du journal La Repubblica. En réalité, nous ne saurons jamais ce qu’aurait été l’Italie si Ferdinand II avait été plus peu scrupuleux. Cependant, si l’on considère sa ferme volonté d’affirmer l’indépendance de son royaume vis-à-vis des interférences extérieures, on peut dire sans risque que l’Italie ne serait pas née pour être un État vassal des autres puissances, comme c’est tragiquement le cas aujourd’hui. Francesco Pipitone Sources : - Antonio Ghirelli, Histoire de Naples ; - Paolo Mencacci, Histoire de la révolution italienne ; - Harold Acton, Les derniers bourbons de Naples. - Alphonse Balleydier, La vérité sur les affaires de Naples, réfutation des lettres de m. Gladstone - Eugenio Di Rienzo, Le Royaume des deux Siciles et les puissances européennes https://www.vesuviolive.it/ cultura-napoletana/i-figli-illustri-di-napoli/149396-ferdinando-ii-borbone voir aussi h t t p s : / / w w w. v e s u v i o l i v e . it/cultura-napoletana/storia/7368-primati-napoli-capitale/

e 20 mars 1861, le royaume des deux Sicile a cessé d’exister. De violentes batailles, des plébiscites antidémocratiques et une série de calomnies contre le gouvernement Bourbon ont mis fin à l’un des plus puissants États italiens de ce siècle. Il existe de nombreux documents historiques qui témoignent de la puissance économique et du progrès social de Naples, du Sud et de tout le royaume du Sud. La conquête piémontaise a bouleversé la situation au point de générer ce que l’on appelle la «question du Sud» et un mouvement d’hommes et d’idées est né qui s’est battu pour redonner du lustre à un Sud tourmenté et exploité. Le mouvement a pris le nom de «Southernism». S’il y a encore des gens qui ne sont pas convaincus de tout ce qui a été écrit jusqu’à présent, Vesuviolive.it a rassemblé une série de primates du Royaume des Deux Siciles comme preuve d’une réalité historique étouffée par la dictature du Nord encore actuelle. A la fin de cette description qui entend réfuter la thèse de ceux qui soutiennent l’extrême retard du Sud au moment de l’Unité, vous trouverez la liste de tous les

primates que nous avons traités de manière plus large, et en cliquant sur eux vous pourrez lire leur histoire. En 1861, un recensement effectué par le nouveau Royaume d’Italie a montré que le Royaume des deux Siciles était l’État le plus industrialisé de tous les temps avant la réunification, puisqu’il comptait en fait environ 1 600 000 travailleurs sur environ 3 130 000 habitants, soit 51 % des travailleurs industrialisés. Le Royaume pouvait s’enorgueillir de posséder le plus grand complexe d’ingénierie industrielle d’Italie, grâce surtout à l’usine sidérurgique de Mongiana, l’usine Ferdinandea et l’usine ferroviaire de Pietrarsa, qui employait 1125 ouvriers, a reçu la visite du tsar Nicolas Ier et du pape Pie IX. Elle a été voulue par Ferdinand Ier pour que le Royaume ne dépende d’aucun autre pays et c’est l’usine qui a produit les premiers trains à vapeur, les rails et une immense statue de Ferdinand II, toujours conservée au Musée national des chemins de fer. Le Pôle sidérurgique de Mongiana produit en moyenne 1 442 cannes pour fusils et 1 212 cannes pour pistolets par jour, toujours grâce à l’intervention des Bourbons qui améliorent les moyens de production, en les ac-

tualisant par l’envoi de quelques savants en Europe pour étudier les méthodes anglaises et françaises de production du fer. Naples et Castellamare avaient également à leur disposition la plus grande industrie de construction navale d’Italie. Autres documents : première flotte marchande d’Italie et deuxième en Europe après la flotte anglaise ; premier navire à vapeur d’Europe continentale, le Ferdinand I ; premier transatlantique à vapeur d’Italie, le Sicilien, construit en 1854 ; première compagnie de navigation de la Méditerranée; premier code maritime italien, le code De Jorio, rédigé en 1781 pour le gouvernement royal par Michele De Jorio, juriste de Procida ; troisième flotte militaire d’Europe après les britanniques et les français. Les souverains Bourbon ont également su être à l’avant-garde de ce que nous appelons aujourd’hui «l’État providence». Après la chute de Napoléon, le seul à laisser les codes français en vigueur fut le souverain Ferdinand Ier, qui chargea quelques juristes du Sud de les réviser. En 1819, le Code du Royaume des deux Sicile fut mis au jour, ce qui plaça le Royaume à la première place également du point de vue judiciaire et civil, puisque grâce à ce texte, le tout premier


Foto vesuviolive.it

sont organisés ; les travailleurs du monde du spectacle sont protégés du point de vue de la sécurité sociale. L’Observatoire sismologique vésuvien a été fondé (le premier au monde), créé par le physicien Macedonio Melloni et développé par Luigi Palmieri avec une station météorologique et Palerme est devenue célèbre grâce à la présence de l’astronome Giuseppe Piazzi. En 1778, le roi Ferdinand de Bourbon institue un service de protection des monuments en Sicile avec deux gardes royales dirigées par le prince Ignazio di Biscari et le prince de Torremuzza. Biscari est l’auteur de nombreuses découvertes archéologiques près de Catane (un amphithéâtre, un théâtre, une ancienne curie et quelques thermes), il promeut les fouilles de Camarina, Syracuse, Lentini et Taormina en décrivant ses découvertes archéologiques dans un volume intitulé «Viaggio per tutte le antichità della Sicilia», publié à Naples en 1781 ; il finance ensuite la construction d’un pont sur le Simeto et fonde et finance l’Accademia degli Etnei. La renommée du Prince est très étendue et de nombreuses académies italiennes et étrangères le désignent comme partenaire. Torremuzza, au contraire, était un passionné de numismatique, à tel point qu’en 1762, il publia un volume intitulé «Les inscriptions anciennes de Palerme». Il a fait don d’environ 12 000 volumes aux Jésuites, qui ont géré ce qui est devenu plus tard la Bibliothèque nationale, aujourd’hui la Bibliothèque régionale centrale de la Région de Sicile. Les habitants du sud avaient la charge fiscale la plus faible de toute la péninsule italienne, et le Royaume des deux Séries était le premier État italien de la richesse. Les revenus de l’État étaient cotés à la Bourse de Paris à 120 %. Le Royaume des Deux Séries a donc pu combiner le bien-être de l’État avec celui de ses citoyens, dont le niveau, pour l’époque considérée, était très élevé et était en tout cas supérieur à celui des citoyens des autres États préunitaires. Contrairement à ce qu’affirment les livres d’histoire contenant les mensonges officiels, le Royaume Bourbon était loin d’être arriéré, tyrannique, inefficace, étranger : il était juste ennuyeux, il devait donc cesser d’exister et devenir une colonie interne, un réservoir d’hommes et de ressources bon marché. Domenico Romano .(suit page 16)

système de pension fut établi. On attribue également à Ferdinand la fondation d’un des rares noyaux socialistes, capable de survivre entre réalité et utopie : Ferdinandopoli, plus connu sous le nom de San Leucio. À la base de cette petite réalité, il y avait un des premiers statuts socialistes, qui reposait sur trois principes modèles : l’éducation, considérée comme l’origine de la tranquillité publique ; la bonne foi, c’est-à-dire la première des vertus sociales ; le mérite, seule distinction entre les individus ; le luxe et les testaments n’étaient pas non plus prévus, tous devaient être égaux devant la loi et l’État et il n’y avait donc aucune différence entre les hommes et les femmes et entre les classes sociales. Cette petite réalité institutionnelle a concrètement réussi à faire vivre des idéaux socialistes anachroniques qui sont encore considérés comme utopiques aujourd’hui. Le Royaume des deux Sicile a le plus haut pourcentage de médecins et d’amnisties politiques, et le plus faible pourcentage de mortalité infantile. En février 1828, François Ier de Bourbon chargea l’ingénieur d’État Luigi Giura de construire un pont suspendu en fer sur le Garigliano, également le pre-

mier en Italie, malgré le scepticisme, entre autres, des Anglais, qui furent les premiers à en construire un mais le virent céder peu de temps après. Pour son inauguration, le souverain se place au milieu de la travée et ordonne que deux escadrons de lanciers et seize equipages d’artillerie passent sur le pont, démontrant ainsi la solidité de la construction. De nombreux travaux publics ont été réalisés : le premier télégraphe électrique de la peninsule, le premier réseau de phares avec système lenticulaire, la première ligne de chemin de fer et la première gare en Italie, la Naples Portici, créée en 1839. Puis sont apparus les premiers Monti di Pegno et Frumentari, qui ont prêté de l’argent à des taux d’intérêt très bas. En 1751, Charles de Bourbon, souverain éclairé, fonde le premier Albergo dei poveri, où sont accueillis 8 000 indigents et déshérités, vainquant le fléau de la mendicité, plus tard aussi des «femmes perdues» et des «jeunes à rééduquer». Des soins de santé ont été mis en place pour les personnes âgées et les handicapés ; de nombreux jeunes ont été initiés à une profession et ont reçu un enseignement de divers arts en plus de l’étude de la grammaire et de

l’arithmétique. De nombreuses écoles militaires ont été créées et sont encore en activité aujourd’hui, dont la Nunziatella, l’une des écoles de formation militaire les plus connues encore des nos jours. En 1737, il a été construit à Naples, sur ordre de Charles de Bourbon qui a fait don à la structure d’un fonds de 2 500 ducats, l’un des plus importants théâtres d’Europe : le Real Teatro di San Carlo, construit en seulement 270 jours, le plus ancien opéra encore en activité en Europe. La création du musée archéologique et de l’atelier des papyrus reflète la période qui a traversé le XVIIIe siècle napolitain, lorsque les souverains se sont engagés à enrichir la culture de leur peuple; à cette époque, le royaume a formé Giovanbattista Vico, Gaetano Filangieri, Antonio Genovesi, Ferdinando Galiani, Giacomo Della Porta, Pietro Giannone, Mario Pagano. Le Royaume compte quatre universités et le plus grand nombre d’étudiants universitaires. 55% des livres publiés en Italie le sont par des maisons d’édition napolitaines. Des bibliothèques, des académies culturelles (dont la plus célèbre est l’Ercolanense, fondée en 1755) et le Cabinet de physique du roi sont ouverts et de fréquents congrès scientifiques PALAZZI 15 VENEZIA


Foto sheidasoleimani

(suit de la page 15) Voici la liste des primates du Royaume des deux Siciles : Vers 1000 Trotula de Ruggiero, première femme médecin de l’histoire 1231 L’école de médecine de Salerne, la première université médicale de l’Ouest 1300-1400 Naissance des premières banques 1522 L’Hôpital des Incurables, le premier hôpital moderne du monde 1630-1650 Francesco Fontana est le premier à dessiner Mars et à saisir sa rotation 1737 Construction de San Carlo di Napoli, le plus ancien opéra du monde encore en activité 1751 Premier exemple d’État providence, l’hôtel royal des pauvres 1754 Première chaire d’économie au monde 1762 Cimetière des 366 fosses. Premier cimetière pour les pauvres 1770-1771 Ferronnerie royale et ateliers à Mongiana 1781 Premier code maritime au monde, le code De Jorio 1783 Première fabrique de bateaux en Italie, chantier naval Cantiere di Castellammare di Stabia 1783 Première réglementation sur les tremblements de terre en Europe 1789 Le rêve de San Leucio : Ferdinandopoli 1801 Le premier musée minéralogique en Italie 1813 Le premier hôpital psychiatrique 1818 Premier navire à vapeur en Méditerranée, le «Ferdinand I». 1819 Premier observatoire astronomique italien à Capodimonte 1832 Premier pont suspendu, le pont du Garigliano 1839 La première ligne de chemin de fer italienne, la ligne Naples-Portici 1839 Premier éclairage au gaz dans une ville italienne, la troisième après Paris et Londres 1840 Première usine de locomotives en Italie, Pietrarsa 1841 Premier centre volcanologique au monde 1851 Première machine à laver 1853 Premier bateau à vapeur d’Italie, le «Sicilia». 1856 Premier prix pour les pâtes à l’exposition de Paris 1860 Naples. Première ville d’Italie pour le nombre de théâtres 1872 Naples. La station zoologique de Dohrn, le plus ancien aquarium d’Europe 1888 L’Oriental a été la première université de langues en Europe 1892 Le Matin et la primauté de Naples aussi dans le journalisme https://www.vesuviolive.it/cultura-napoletana/storia/7368-primati-napoli-capitale/

Sheida Soleimani

HotBed jusqu’au

23 décembre 2020 Tuesday – Saturday 11 am to 6 pm New York

Denny Dimin Gallery 39 Lispenard Street, New York, NY 10013 Phone + 1-212-226-6537 elizabeth@dennydimingallery.com robert@dennydimingallery.com https://dennydimingallery.com/

’artiste irano-américaine présente son dernier travail, «Hot Bed», à la galerie Denny Dimin de New York Le travail de Sheida Soleimani combine la photographie, la sculpture, le collage et le cinéma pour commenter des questions sociopolitiques historiques et contemporaines. Elle aborde des questions éthiques sur le pouvoir et l’exploitation en se référant aux crises actuelles, offrant un récit plus large centré sur la politique mondiale et la corruption. L’exposition actuelle de l’artiste irano-américaine, à la Denny Dimin Gallery de New York, présente son dernier travail, Hot Bed, un commentaire sur la réponse de l’Iran à la pandémie de Covid-19. Soleimani mélange des découpages de dirigeants politiques avec des images satellites de fosses communes, et des références aux sanctions imposées par les États-Unis à l’Iran, qui ont plongé le pays dans la dépression économique au début de l’année. L’exposition présente également l’examen approfondi de Soleimani sur la manière dont l’exploitation, la corruption et les abus influencent les relations entre les dirigeants, les

institutions et les gouvernements du Moyen-Orient et de l’Occident. Chaque image cible un événement spécifique, retraçant les moments critiques de l’histoire de l’Iran et des relations internationales des États-Unis, à commencer par le coup d’État iranien de 1953. Sombre, humoristique et sarcastique, l’œuvre de Soleimani se situe à l’intersection de l’art et de l’activisme, invitant les spectateurs à établir de nouvelles connexions et à lire de nouveaux documents sur les questions politiques de notre époque. Basée dans le Rhode Island, à Providence, Soleimani travaille dans une grange-studio reconvertie derrière sa maison victorienne. Sheida Soleimani est née en 1990 à Indianapolis, Indiana et elle a grandi à Cincinnati, Ohio. Ses parents sont des réfugiés politiques qui ont été persécutés par le gouvernement iranien au début des années 1980 pendant la Révolution iranienne. Mme Soleimani a fait part de son expérience personnelle en tant qu’Iranienne ayant grandi en Amérique, qui l’a sensibilisée très tôt aux «stéréotypes de la culture du Moyen-Orient

par l’Occident». Soleimani a obtenu un BFA en photographie à l’Université de Cincinnati en 2012. Elle a poursuivi ses études et a obtenu un MFA en photographie à la Cranbrook Academy of Art en 2015. L’œuvre de Soleimani met en lumière les relations entre les personnes, groupes politiques, gouvernements et entreprises puissants, afin de susciter des questions chez le spectateur. Les thèmes de son œuvre sont des sujets peu abordés en Occident, par exemple, la mise en évidence des femmes exécutées en Iran, et la relation entre le pouvoir, l’exploitation et le pétrole, entre autres. L’œuvre est souvent présentée sous forme de photographie ou de vidéo d’une image mise en scène. Soleimani utilise divers matériaux dans son travail, notamment des «poupées» de sculpture douce, des photographies, des accessoires, des masques et des découpes de tirages numériques Soleimani est actuellement professeur assistant de Studio Art à l’Université Brandei. Elle a auparavant enseigné à la Rhode Island School of Design (RISD) www.1854.photography/


Foto alexansraleese aimons, dans une société qui nous dit constamment comment faire», explique Leese du zine. «Il s’agit de reconnaître que tout le monde est différent, et donc de ne pas se comparer les uns aux autres, mais aussi de pouvoir trouver une unité en sachant que nous partageons une compréhension de ce que signifie être une femme qui traverse les cultures». Me + Mine est une publication simple mais puissante. Elle est composée d’une préface, écrite par Leese et l’un des sujets du livre, Xoài Pham, et d’une série de nus de femmes du monde entier. Ceux-ci ont été photographiés à distance, souvent avec un zoom, puis rephotographiés avec un appareil photo 35 mm Leica ou Polaroid. Le projet, que Leese a lancé en avril, quelques semaines après le verrouillage mondial, coopte un genre traditionnellement au service du regard masculin. Dans Me + Mine, le nu devient un espace dans lequel les sujets peuvent se connecter avec eux-mêmes. «J’ai commencé par me photographier moi-même», explique Leese. «J’étais seul avec mon corps et mes pensées beaucoup plus que d’habitude et je voulais explorer la relation

que j’avais avec lui». Par opposition à la pose ou à la représentation devant un public, la femme photographiée doit se sentir belle et en sécurité, même si ce n’est que pour un instant, et, ce faisant, inspirer les autres à ressentir la même chose. «Il s’agit d’accepter qu’un système est en place qui place le concept de beauté du regard masculin au-dessus du nôtre, et j’espère donc que nous pourrons continuer à aborder et à remettre cela en question», poursuit M. Leese. Tous les bénéfices de Me + Mine, qui est auto-publié, seront reversés au Black Trans Femme in the Arts Collective, au Trans Law Center, et au Rape and Sexual Abuse Support Centre ; des organisations dans lesquelles plusieurs des sujets sont impliqués. Ci-dessous, plusieurs des femmes réfléchissent à leurs expériences. [Participer au projet] a été très enrichissant. Je me suis sentie connectée à un groupe de femmes qui cherchaient toutes des choses différentes de l’expérience ; un changement collectif de perspectives personnelles sur soi et son corps. C’était une évasion au milieu de tant d’incertitudes dans le PALAZZI 17 VENEZIA

ALEXANDRA LEESE

es portraits granuleux de Leese, réalisés sur Zoom pendant le verrouillage mondial, cooptent un genre traditionnellement au service du regard masculin En tant que femmes, il est radical de reconnaître que notre corps n’appartient à personne d’autre que nous : ni aux hommes, ni à la publicité, ni à la mode ; ni à la famille, ni aux partenaires, ni aux amis. Les influences extérieures s’efforcent de nous forcer à adopter des formes et des tailles spécifiques, à adhérer à des normes malsaines qui nous rendent malheureuses et, en fin de compte, identiques. Le zine Me + Mine d’Alexandra Leese, disponible sur Antenne Books à partir d’aujourd’hui, est une subversion de cette convention. Il reconnaît la complexité des relations des femmes avec leur corps physique. Cette autonomisation ultime découle de l’amour de soi. Mais le chemin qui mène à cette autonomie est souvent difficile et continu. «Le sentiment de Me + Mine concerne notre relation avec notre corps, en reprenant le contrôle sur la façon dont nous nous percevons et nous

monde entier. Mais le fait de parler à Alex, qui vivait une expérience complètement différente de la mienne, m’a vraiment ouvert les yeux. Alex a un œil impeccable et l’émotion nécessaire pour comprendre comment mettre à l’aise les personnes qu’elle photographie. Elle m’a donné une confiance douce mais solide. Vous lui faites confiance parce que vous avez l’impression qu’elle a votre meilleur intérêt à cœur et que vous travaillez avec un maître de son art. Cela m’a permis de m’ouvrir un peu, de me sentir vulnérable et, en cela, j’ai eu du pouvoir. Je n’ai jamais été photographiée nue, donc après l’insécurité initiale, j’ai ressenti une liberté. J’ai apprécié le processus. Je me suis sentie] fabuleuse. Mes sentiments et mes émotions entourant mon corps tout au long du confinement ont fluctué depuis qu’il a commencé en mars. Je me suis sentie satisfaite de moi parce que j’ai fait du jogging un peu plus longtemps que d’habitude, parce que j’ai pris une journée entière consacrée à l’«autogestion de la santé» (suit page 18)


Foto alexansraleese (suit de la page 17) ou parce que j’ai sorti mon tapis de yoga pour une séance d’entraînement rapide à la maison. J’avais l’impression de mettre en place des routines bénéfiques pour mon esprit et mon corps. Cependant, le fait d’avoir autant de temps libre m’a amené à regarder avec curiosité ce que je sentais devoir être amélioré. Pendant cette période, j’ai travaillé avec la talentueuse et attentionnée Alexandra Leese qui m’a mis à l’aise et m’a donné l’introspection nécessaire pour être un peu plus gentille avec mon corps et moi-même. Elle est partie avec moi avec des photos que je peux regarder, me rappelant un moment que je n’oublierai jamais et un voyage avec moi-même qui est en cours. J’ai toujours ressenti une grande alchimie artistique avec Alex, nous partageons beaucoup de pensées similaires sur l’anatomie et la connexion métaphysique que nous avons avec les nôtres, en tant que femmes. Nous sommes toutes deux de la diaspora asiatique et cela nous permet de comprendre beaucoup de choses inexprimées.

ALEXANDRA LEESE Me + Mine

https://www.antennebooks. com/product/me-mine/

Pour certaines personnes, ce sujet peut sembler sans rapport, mais ce n’est absolument pas le cas, c’est tout. Il faut un sentiment de confiance silencieux mais vif pour se permettre de communiquer avec quelqu’un avec son corps nu, et c’est quelque chose que je suis reconnaissante de pouvoir partager avec mon amie. Notre projet précédent, où je posais nue, faisait référence à une autre période de calme dans ma vie, où je faisais également face à la mortalité, au chagrin et à un sentiment de renaissance. Ces conversations nous sont bien sûr revenues avec le recul de la plus grande expérience de solitude et d’autoréflexion qui nous a envahis [globalement] en réponse à la pandémie. Cela a été profondément significatif pour moi. Nous sommes confrontées à de nombreux défis uniques avec notre corps de femme. Mais par-dessus tout, je suis profondément reconnaissante pour ce vaisseau physique qui est le mien et celui qui m’a donné naissance. Je viens d’une culture où le bain collectif (onsen) est un rituel fréquent et thérapeutique. J’ai grandi en voyant tous les types de corps féminins de tous

âges. Avec le recul, je pense honnêtement que c’est ce qui m’a permis de connaître la vérité. Le sentiment de compréhension que j’ai avec mon corps, qui pour moi est vif dans mes nus avec Alex, est de pure capitulation. Pour moi, mon corps est «elle». Elle est une partie de moi que je possède et sur laquelle j’ai simultanément tout et peu de contrôle, puisqu’elle travaille péniblement, qu’elle sait tout et plus sur moi et qu’elle fait parfois des choses inexplicables. Je ne peux que lui accorder ma confiance et mon affection. Mais, avec cela, je peux aimer la voir grandir, se produire dans toute sa gloire et vivre des moments comme ceux-ci. J’ai aimé faire un projet de collaboration créative parce qu’à l’époque, nous étions dans un isolement strict et je vivais seule. Cela a été implacable et très solitaire et a eu un impact très négatif sur ma santé mentale. Donc, le fait de me connecter avec Alex et de créer une belle image ensemble était excitant et répondait à certains de mes besoins. J’en étais à un point où je commençais à modéliser par le biais de prises de vue vir-

tuelles, et c’était une manifestation intéressante du verrouillage de Covid-19 que d’être photographié à travers mes appareils. Je me sentais en sécurité avec Alex, et le concept qui soustend le projet correspond à mes valeurs. Je suis à un moment de ma vie où l’expression de soi par la nudité est quelque chose que j’explore dans mes autoportraits et dans la représentation des autres dans mes peintures. L’opportunité est venue au bon moment. Mon corps a été un champ de bataille ; j’en ai abusé, je l’ai détesté, et il a été maltraité et violé. C’est aussi un champ de bataille dans le sens où le monde a des vues extrêmement polarisées, oppressives et obsessionnelles sur ce que je devrais être autorisée à faire avec mon propre corps, en tant que femme. Je me sens hésitante à mettre au monde cette image de nu, mais je pense que c’est mon droit en tant que femme adulte de montrer mon corps comme je le souhaite. Cela me semble audacieux et libérateur. Hannah Abel-Hirsch https://www.1854.photography/


Foto buckellison vec leur nouveau partenaire DELPIRE & CO, Paris Photo et Aperture ont annoncé les lauréats du Prix du livre photo de cette année Le public international n’ayant pas pu se rendre au Grand Palais cette année, la liste des finalistes des Prix du Livre Photo de la Fondation Paris Photo-Aperture a exposé à DELPIRE & CO, la nouvelle librairie et espace artistique au cœur de Saint-Germain- désPrés à Paris. Le jury final qui a sélectionné les lauréats de cette année était composé de Damarice Amao (Centre Pompidou), Lucy Conticello (M le magazine du Monde), Laurel Parker (Laurel Parker Book), Nicolas Poillot (directeur de création et consultant en image), et Stéphanie Solinas (artiste). Buck Ellison a remporté le premier livre photo de l’année et 10 000 dollars pour Living Trust, tandis que Gloria Oyarzabal a remporté le livre photo de l’année pour Woman Go No’Gree. Imaginer la vie de tous les jours: Engagements with Vernacular Photography, édité par Tina M. Campt, MarianneHirsch, Gil Hochberg et Brian Wallis, est devenu le catalogue photographique gagnant, tandis

que LIKE de Ryan Debolski a obtenu une mention spéciale du jury. Premier livre photo : Living Trust par Buck Ellison Publié par Loose Joints Publishing, le livre gagnant d’Ellisons examine et questionne les langages visuels du privilège. A travers des écrits personnels et une série de photographies, Ellison enquête sur les expériences partagées et les expériences d’accès au privilège des Blancs. Ellison ne s’appuie pas seulement sur des portraits pour illustrer le monde de la classe moyenne blanche, mais montre leur vie à travers des objets de tous les jours tels que les vêtements, la nourriture, les animaux de compagnie, le tout avec une grande minutie. Dans cette première monographie du photographe basé à Los Angeles, la blancheur ne se trouve pas seulement sur la couleur de la peau, mais dans toute leur vie, en public et en privé. ivre photo de l’année : Femme Go No’Gree par Gloria Oyarzabal Fusionnant archives, images trouvées et sa propre photographie, le photobook de Gloria Oyarzabal interroge la possibilité d’un discours féministe universel face au colonialisme et au féminisme blanc.

Publié par Editorial RM et Images Vevey, «le fond et la forme du livre sont convaincants - l’artiste propose un excellent dialogue autour de la déconstruction de l’idée du regard et de «l’autre»», explique le juré final Damarice Amao. A travers «Woman Go No’Gree», le spectateur est interrogé et forcé d’aborder ses propres préjugés, son regard et son rapport à l’héritage colonial. Fruit d’une collaboration entre la Walther Collection et Steidl, ce catalogue de photos réunit des universitaires et des critiques pour discuter de l’impact culturel des images vernaculaires : les clichés de tasses, les albums de photos de famille, les images scientifiques et architecturales qui constituent la masse culturelle des images. Imaginer la vie quotidienne : Engagements avec la photographie vernaculaire pose des questions sur la façon dont ces images façonnent nos identités et nos sociétés. À travers l’image et l’essai, l’agence du créateur d’images de tous les jours est examinée par rapport à un objectif culturel plus large. Lucy Conticello, membre du jury, a déclaré : «Le poids et la profondeur de PALAZZI 19 VENEZIA

la recherche, ses contributions frappantes et perspicaces provenant d’un grand nombre d’archives et de collections, ainsi que ses fantastiques reproductions font de ce livre un ouvrage de référence sur la photographie vernaculaire qui existera encore longtemps». Enfin, LIKE de Ryan Debolski (Gnomic Book, Brooklyn), nominé pour la Mention spéciale du jury pour le premier livre photo, documente la vie des travailleurs migrants vivant à Oman. Au lieu de documenter le travail de ces travailleurs d’une manière attendue, Debolksi se concentre sur l’agence et la communauté que les ouvriers trouvent sous leur forme mutuelle. «La position que prend ce travail est très singulière», mentionne la jurée Stéphanie Solinas. «Un livre sur les travailleurs migrants en Oman, où l’on retrouve une grande présence des corps avec une forme de sensualité où l’on s’attendait à trouver des murs de briques et des déserts. Le tissage entre le texte et l’image, les corps et l’architecture offre une entrée nouvelle et inattendue dans le sujet». Isaac Huxtable www.1854.photography/


Foto françoisroelants

e premier prix européen Art Explora «pour encourager le partage des arts et de la culture» est décerné le 3 décembre à Paris. Il s’adresse à tous les musées d’Europe qui ont un projet novateur pour conquérir de nouveaux publics, même les plus éloignés, isolés ou défavorisés : enfants, personnes âgées, jeunes de banlieue, malades, prisonniers ou handicapés... Les candidatures ont été clôturées le 25 septembre avec une grande participation : les organisateurs ont reçu environ 350 projets provenant de grandes institutions de 20 pays, comme le British Museum à Londres et le MaXXI à Rome, le musée Van Gogh à Amsterdam et le Prado à Madrid. Un premier écrémage a permis de sélectionner 23 projets finalistes (pour l’Italie uniquement la Fondation Burri de la Città di Castello), parmi lesquels le jury international, composé de 12 personnalités du monde de la culture (dont Sam Stourdzé, directeur de la Villa Médicis, la chorégraphe Blanca Li et l’architecte Jean-Michel Wilmotte), a choisi les trois projets gagnants. Le prix est le résultat de la collaboration originale d’une institution laïque telle que l’Académie des Beaux-Arts, créée en 1816, et d’une jeune fondation, Art Explora, dont le slogan est une phrase bien connue de Dostoïevski : «La beauté sauvera le monde». Son manifeste dit : «La culture libre est une passerelle vers l’autre. Elle atténue les différences. Et puis, ce n’est plus une question de sexe, d’environnement social, de nationalité, de religion ; il s’agit seulement d’une question de rencontre, avec soi-même et avec l’autre». Le fondateur d’Art Explora est Frédéric Jousset, 50 ans, entrepreneur français à succès (dont le patrimoine a été estimé en 2019 par l’hebdomadaire économique français «Challenge» à 230 millions d’euros), mais aussi mécène et collectionneur. En 2019, Jousset, qui était il y a vingt ans l’un des fondateurs de WebHelp, une société de centre d’appel de premier plan avec un chiffre d’affaires annuel de 1,5 milliard d’euros, a décidé de mettre son sens des affaires au service de l’art et a donc créé Art Explora, une fondation sans collection, mais avec un capital de 6 millions d’euros et un budget annuel de 2 millions d’euros, dans le but de rendre l’art accessible au

ART EXPLORA

plus grand nombre. «La Fondation est née de l’hypothèse que, dans le domaine de l’art, l’Europe n’a pas un problème d’offre, mais de demande, explique Jousset à «Il Giornale dell’Arte». Dans un pays aussi riche en histoire que l’Italie, on n’est jamais trop loin d’un monument ou d’un musée. La France n’est pas non plus un pays sans lieux d’intérêt culturel, et pourtant, selon les données du ministère de la culture, seul un Français sur deux visite un musée ou un site culturel chaque année. Notre mission est donc de faire entrer l’art et la culture dans la vie du plus grand nombre de personnes possible, en aidant les institutions muséales à rencontrer leur public et à en acquérir de nouveaux. La Fondation, ajoute M. Jousset, a une ambition universelle et c’est aussi pour cette raison qu’elle ne porte pas mon nom. Elle entend être un «multiplicateur» d’idées et de partenariats. Dans le cas du prix européen, elle a rejoint l’Académie des Beaux-Arts, qui fournit au projet son nom, son sérieux et un lieu magique comme la «Coupole» de l’Institut de France, à Paris, pour la cérémonie de remise du prix, tandis que nous PALAZZI 20 VENEZIA

fournissons le financement et l’équipe d’entrepreneurs. En quelques mois, nous nous sommes fait connaître dans toute l’Europe. La plupart des projets que nous avons reçus s’inscrivent dans notre philosophie en proposant des projets dans des écoles, des hôpitaux, des prisons. Par exemple, le Mucem, le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée à Marseille, a proposé de mettre en place une navette gratuite pour aller chercher les jeunes des banlieues difficiles et les inciter à visiter le musée. Pendant le voyage, ils se voient proposer une médiation personnalisée qui prépare la visite dans une atmosphère conviviale. Un autre beau projet du Musée Van Gogh proposait d’utiliser la réalité virtuelle pour rapprocher les personnes âgées des maisons de retraite de l’œuvre de Van Gogh. Nous avons réalisé que ce sont souvent les innovations les plus simples qui sont aussi les plus efficaces. Mais c’était surtout un plaisir de voir que les musées ne sont pas indifférents au problème et qu’ils savent qu’ils peuvent jouer un rôle actif dans la vie sociale et en tant que vecteurs

de connaissances pour les jeunes générations. Que l’art peut vraiment rendre la société plus unie». Le Prix européen n’est qu’une des activités de la Fondation. Quels autres projets menez-vous ? Nous finançons la première rétrospective de JR, le célèbre artiste et photographe français au carrefour de l’art et de l’action sociale, qui s’ouvre ce mois-ci à la Saatchi Gallery de Londres. Nous allons également agir en faveur des écoliers de la banlieue de Londres afin qu’ils puissent visiter l’exposition. Nous finançons également le nouveau «musée mobile» du Centre Pompidou, le MuMo, un camion qui, à partir de la fin 2021, parcourra les rues de France, avec des arrêts dans les villes et les banlieues, réalisant 25 œuvres, choisies dans sa collection. Dans un deuxième temps, l’idée est de traverser les frontières et, pendant trois mois par an, en Suisse, en Belgique et, pourquoi pas, en Italie. Le 15 janvier, nous inaugurons également une résidence d’artistes dans le quartier Montmartre à Paris, en collaboration avec la Cité internationale des arts, avec 10 ateliers, entourés


Foto Philippe-Piron-scaled

archéologiques au Soudan suspendues depuis des années, de collections de livres d’art pour les enfants. J’avais 35 ans et mon entreprise fonctionnait déjà très bien. J’ai donc décidé de m’engager. Le dernier financement que j’ai fait pour le Louvre était d’un million d’euros. De ce montant, 800 000 euros ont été utilisés pour la création d’une œuvre cinétique de l’artiste vénézuélien Elias Crespin, «L’Onde du Midi», qui est installée de façon permanente dans le musée depuis le début de l’année 2020. Les 200 000 euros restants ont servi à rénover le site web du musée. Il est lui-même collectionneur d’art. Quels sont les artistes que vous collectionnez ? Même si j’achète régulièrement des œuvres d’art, je ne peux pas dire que je suis un collectionneur. Pour moi, collectionner, la vraie chose, implique la notion de recherche et l’exhaustivité de la collection. J’achète principalement en fonction des circonstances, à la suite de réunions. Et j’ai une limite : les murs de la maison ! Je ne collectionne que des artistes contemporains encore vivants, pas pour des raisons spéculatives et certainement pas parce que je considère l’art contemporain supérieur. Pour moi, il n’y a pas de hiérarchie dans l’art. Mais parce que les œuvres contemporaines me parlent du monde dans lequel je vis et que je m’y reconnais davantage. J’accorde beaucoup d’importance à la couleur. Parmi les derniers achats, on trouve des œuvres de l’artiste afro-américain Rashid Johnson, de l’Américain Sterling Ruby, du Thaïlandais Korakrit Arunanondchai et de l’Espagnol Secundino Hernández. En 2016, vous avez acheté le mensuel «Beaux-Arts Magazine» à Thierry Taittinger pour 5 millions d’euros. Est-il important que vous soyez également présent dans l’édition ? En fait, c’était un «coup de coeur». Je n’avais pas prévu d’acheter le magazine. Le propriétaire de l’époque tenait à ce que le magazine soit entre les mains de quelqu’un qui, en plus du projet d’entreprise, portait l’ADN de la culture. Et je corresponds à ce profil. À l’époque, les Beaux-Arts n’existaient qu’en format papier, (suite page 22)

d’un beau jardin. Les bourses, d’une durée de trois à six mois, seront attribuées à des projets d’artistes, seuls ou en duo avec un chercheur, sélectionnés en fonction de leur dimension sociale et sur des thèmes d’exploration scientifique et technologique. L’idée est de rompre avec les stéréotypes liés à l’image de l’art élitiste et de l’artiste isolé. Les candidatures ont été clôturées le 6 novembre et nous avons reçu plus d’un millier de projets d’artistes de 60 pays. En octobre, en pleine crise sanitaire, une autre structure a été lancée, ArtNova, un fonds de 100 millions d’euros. Il s’agit d’un fonds «d’investissement à impact». Elle n’a pas de mission philanthropique. L’objectif est de collecter des ressources en investissant dans des entreprises et des projets, mais à deux conditions seulement. La première est que le modèle commercial prévoit un investissement dans le secteur culturel. Par exemple, nous avons investi dans Artsper.com, une plateforme en ligne qui permet aux galeries d’art de dématérialiser leurs inventaires, de présenter leurs œuvres en ligne

et d’entrer en contact avec des acheteurs potentiels. Seuls les travaux à petits budgets, entre mille et deux mille euros, sont proposés. Le projet s’inscrit dans notre vision de la démocratisation du marché de l’art, qui s’ouvre ainsi à de nouveaux acheteurs, des gens qui n’auraient jamais acheté dans une galerie. La deuxième condition est que 50 % de la valeur ajoutée réalisée soit versée au capital permanent d’Art Explora, afin d’alimenter les caisses de la Fondation et de financer ainsi ses actions philanthropiques. Pourquoi avez-vous décidé de quitter votre poste de PDG de WebHelp pour vous consacrer à l’art ? Si j’ai quitté les fonctions opérationnelles, je suis toujours actionnaire de WebHelp, une société qui a beaucoup grandi en 20 ans. Elle compte aujourd’hui 55 000 employés et est présente dans 40 pays. Je sais que c’est un luxe, mais je peux dire que j’ai atteint mes objectifs professionnels et je suis fier du chemin que j’ai parcouru jusqu’à présent. Mais j’ai aussi confiance dans l’avenir et, à 50 ans, j’ai les moyens, le temps, l’énergie et la volonté de relever de nouveaux défis. Bill Gates, auquel

je ne me compare certainement pas, mais qui est un modèle absolu pour moi, a quitté Microsoft quand il avait mon âge. Autour de moi, je vois un monde qui souffre et les mois d’enfermement ont peut-être accéléré la prise de conscience. Mon choix a sûrement dû aussi se fonder sur la paternité. Avoir un enfant de quatre ans vous fait vous demander quel genre de monde vous voulez laisser à vos enfants. Enfin, je crois que pour être efficace, il ne faut pas faire deux boulots en même temps. Depuis plusieurs années,vous etes le «Grand Mécène» du Louvre. Quelle est votre collaboration avec le musée ? Un jour, en 2006, j’ai rencontré par hasard Henri Loyrette, le directeur du Louvre de l’époque. Nous avons parlé du mécénat. À l’époque, je me disais encore: pourquoi le Louvre, le plus grand musée du monde, aurait-il aussi besoin de l’argent de mécènes privés ? Au lieu de cela, Loyrette m’a montré une série de projets «hors les murs» qui ont été laissés dans le tiroir par manque d’argent. Il m’a parlé de conférences sur l’histoire de l’art dans les prisons et les hôpitaux, de fouilles PALAZZI 21 VENEZIA

Premier prix éuropean Art Explora Les primés 1 MUCEM Destination MUCEM 2 Museo Nacional Thyssen-Bornemisza #VersionaThyssen 3National Gallery: Jan van Huysum Visits… voir la vidéo https://artexplora.org/ edition-2020-du-prix -europeen-art-explora -academie-des-beaux-arts/


Foto wikipedia

CAMILLE CLAUDEL

(suite de la page 21) n’offraient pas de services supplémentaires et n’avaient pas encore accompli leur révolution numérique. J’ai tout de suite compris le fort potentiel de la marque, lié à sa notoriété. La visite de la rédaction, dirigée par Fabrice Bousteau, m’a définitivement séduit. Nous avons retroussé nos manches. Contrairement à de nombreux journaux qui, en période de crise, coupent la rédaction et la mise en page, nous avons fait exactement le contraire. Nous avons renouvelé le graphisme, enrichi le contenu. Aujourd’hui, le journal est plus épais et plus luxueux et attire de nouvelles publicités. Les ventes ont augmenté. Nous avons mis en place le site et la présence sur les médias sociaux et lancé plusieurs services au profit des professionnels du monde de la culture et des particuliers. Par exemple, nous avons créé une société de conseil avec des conférences dans des musées ou des entreprises. En 2018, vous avez participé au lancement du Pass Culture, destiné aux jeunes de 18 ans. En octobre 2020, le budget du projet était de 50 millions d’euros et 100 000 jeunes étaient inscrits. Quel est le budget pour cette expérience ? Je tiens à souligner que je n’ai plus de rôle opérationnel car j’ai quitté le Comité stratégique il y a plus d’un an. En 2018, le gouvernement m’a demandé d’apporter une logique entrepreneuriale au projet : il fallait développer des pistes en termes de technologie, de méthodes de remboursement et de financement. Je suis heureux que cela ait bien fonctionné. Pour la première fois, le ministère de la culture est entré dans une logique fondatrice, c’est-à-dire s’intéresser non pas à l’opérateur mais au public, et subventionner non pas l’offre mais la demande. Et pour la première fois, il a mis sur le même plan public et privé : c’est-à-dire que peu importe que le jeune aille dans un théâtre public ou privé, il importe qu’il aille au théâtre pour la première fois. C’est une véritable révolution dans la culture publique française. Luana De Micco Il Giornale dell’Arte Dicembre 2020 www.ilgiornaledellarte.com/

amille Claudel (1864–1943) se classe parmi les plus importantes artistes femmes du XIXe siècle. Virtuose dans la taille du marbre, élève et praticienne d’Auguste Rodin, elle a également été sa maîtresse et son modèle. Sa manière et son esthétique sont toujours restées proches de celles de son mentor, quoique versant plus franchement dans le symbolisme. Elle a dit « Je réclame la liberté à grand cri. » Camille Claudel naît le 8 décembre 1864 à Fère-en-Tardenois. Elle est la fille de Louis Prosper Claudel (né à La Bresse, dans les Vosges, le 26 octobre 1826), conservateur des hypothèques, et de Louise-Athanaïse, née Cerveaux, fille du médecin et nièce du prêtre du village. En raison de la disparition à seize jours du premier-né du couple, Charles-Henri (né en août 1863), Camille Claudel devient l’aînée d’une future fratrie de trois. Par la suite, le couple s’installe à Villeneuve-sur-Fère, petit village proche de FèrePALAZZI 22 VENEZIA

en-Tardenois (Aisne). Camille Claudel y passe son enfance entourée de Louise, née en février 1866 et de Paul, né en août 1868. Le presbytère qui a vu naître Paul Claudel à Villeneuve-surFère, est devenu la Maison de Camille et Paul Claudel. La famille Claudel s’installe ensuite pour trois années à Nogent-sur-Seine (Aube), de 1876 à 1879. Camille Claudel y fait ses premiers pas d’artiste si bien que son travail attire l’attention d’Alfred Boucher, jeune sculpteur originaire des alentours de Nogent-sur-Seine et vivant à Paris, qui lui reconnaît des dons exceptionnels, mais le choix de la carrière d’artiste est difficile à admettre pour la mère de celle-ci. En effet, le succès est hasardeux, et les femmes n’y sont pas nombreuses. Finalement convaincue, elle accepte de s’installer à Paris avec ses enfants pour que Camille poursuive sa formation. Les trois enfants et leur mère habitent au no 135 bis boulevard du Montparnasse, de 1882 à 1886. La jeune artiste entre à l’Académie Colarossi, qui accueille d’autres élèves de sexe féminin.

Celui-ci est à Paris pour mettre en place La Ruche, un phalanstère, une communauté d’artistes. Mais, lauréat du prix du Salon, il doit partir pour Rome et s’installer à la Villa Médicis afin d’honorer des commandes (il n’a jamais gagné le prix de Rome, étant toujours arrivé second ; c’est seulement à l’aide de la fortune amassée grâce aux commandes de l’État qu’il peut entreprendre ce voyage). Il demande à Auguste Rodin de le remplacer pour son cours de sculpture qu’il donne au groupe de jeunes filles. Ainsi Camille Claudel, après avoir rencontré Rodin en 1882, intègre l’année suivante l’atelier parisien du maître au dépôt des marbres de l’État, no 182 rue de l’Université. En 1888, elle reçoit une mention honorable au Salon des artistes français puis une médaille de bronze à l’Exposition universelle de 1900 La passion qui a uni Camille Claudel à Auguste Rodin est célèbre. Mais la jeune femme est d’abord sa praticienne et elle participe à l’élaboration de certaines œuvres majeures du maître, dont les Bourgeois de Calais.


Foto newsdujour.fr

ENCHÉRISSEZ POUR LE LOUVRE, C’EST L’ÉVÉNEMENT ORGANISÉ PAR CHRISTIE’S AVEC LE SOUTIEN DE LA MAISON DE VENTE AUX ENCHÈRES DROUOT : DES ŒUVRES OFFERTES PAR DES ARTISTES ET DES EXPÉRIENCES UNIQUES SONT À SAISIR POUR CEUX QUI VEULENT PARTICIPER À LA VENTE AUX ENCHÈRES. LES RECETTES SERONT UTILISÉES POUR UN NOUVEAU CENTRE ÉDUCATIF DANS LE MUSÉE.

Les premières œuvres que Camille Claudel montre à son maître Rodin « lui font forte impression », comme «Vieille Hélène» et «Paul à 13 ans». Vers 1884, elle intègre son groupe de praticiens, et elle participe à plusieurs sculptures des œuvres de Rodin, comme l’imposant groupe statuaire Les Bourgeois de Calais14 dont la légende veut que Camille Claudel fut chargée des mains et Jessie Lipscomb des drapés. Très vite, la connivence puis la complicité artistique s’installent ; Camille Claudel, par son génie, l’originalité de son talent et sa farouche volonté, devient indispensable à Rodin; tel qu’il le dit lui-même : « Mademoiselle Claudel est devenue mon praticien le plus extraordinaire, je la consulte en toute chose». Elle est aussi son modèle. Sur fond d’atelier, le couple se forme. Mais au-dessus de l’idylle plane l’ombre de Rose Beuret, la compagne officielle de Rodin… Camille Claudel « exerce une certaine influence sur son maître », et elle lui inspira «L’Éternelle idole», «Le Baiser», sculpture à laquelle ils travaillèrent ensemble, et à la

«Porte de l’Enfer», œuvre inachevée d’Auguste Rodin. Suivront également des œuvres comme «La Danaïde», dont le praticien est Jean Escoula, ou «Fugit Amor». Rodin, « fasciné » par le visage de Camille Claudel, en réalise plusieurs portraits, comme «Camille aux cheveux courts», «Camille au bonnet» ou «Masque de Camille Claudel», ou en « reprend des traits dans des portraits allégoriques, comme «L’Aurore» ou «La France», après la rupture des amants. En 1899, Henrik Ibsen s’inspire de l’histoire d’amour de Rodin et de Camille Claudel dans «Quand nous nous réveillerons d’entre les morts», pièce de théâtre considérée comme le testament du dramaturge norvégien par la réflexion qu’il fait sur la création et les artistes. Ils vivent leur passion amoureuse durant une dizaine d’années, mais leur histoire d’amour se termine en drame. Camille Claudel doit interrompre une grossesse, et Rodin ne veut pas se séparer de sa première compagne, son ancien modèle Rose Beuret, avec qui il vit depuis plus de deux décennies et qu’il a rencontrée en 1864, année de

naissance de Camille Claudel,. En 1898, c’est la rupture définitive entre les deux amants, rupture que Camille vit très mal. Rodin prend alors pour maîtresse son élève et sculpteur Sophie Postolska de 1898 à 1905. Rodin finira par épouser Rosa Beuret à 76 ans, quelques mois avant sa mort, en 1917. Camille Claudel continue malgré tout à sculpter et se forge une indépendance financière. Pourtant, sa situation se dégrade car l’artiste souffre de troubles paranoïaques, qui conduisent à son internement en 1913. Elle y demeure trente ans jusqu’à son décès en 1943. Plusieurs cinéastes ont porté à l’écran la vie de Camille Claudel : en 1988, elle est magistralement incarnée par Isabelle Adjani dans le film éponyme de Bruno Nuytten. Plus récemment, en 2013, Juliette Binoche a endossé le rôle de l’artiste dans un film centré sur son internement (Camille Claudel, 1915, de Bruno Dumont). https://www.beauxarts.com/ grand-format/camille-claudel PALAZZI 23 VENEZIA

e Louvre organise une vente aux enchères pour la création de Studio, un nouveau département éducatif. Depuis l’avènement du Coronavirus, l’éducation muséale a été parmi les premières à périr dans le système de l’art. Cela s’est produit dans de petites réalités, mais aussi dans les plus importantes du monde comme le MoMA à New York, où des licenciements soudains ont révélé la fragilité d’un secteur de travail principalement à la merci de contrats précaires et «sacrifiables». Pour que le secteur soit une ressource et non plus le maillon faible de la chaîne, il doit être renforcé et institutionnalisé, comme c’est le cas actuellement au Louvre à Paris. En ce moment même de fermeture forcée due à la seconde vague de la pandémie, il a décidé de relancer sa didactique, en mettant en place le Studio, un nouvel espace de 1150 mètres carrés dédié à l’éducation artistique et culturelle qui ouvrira à l’automne 2021, pour accueillir les familles, les écoliers, les handicapés, les précaires et leurs compagnons. Pour réaliser ce projet, Enchérissez pour le Louvre, une vente aux enchères en ligne organisée par Christie’s, avec le soutien d’une autre importante maison de vente aux enchères, Drouot, a été lancée. L’événement se poursuit jusqu’au 15 décembre et rassemble la générosité d’artistes internationaux et de partenaires du musée. Le catalogue de la vente aux enchères est accessible sur les sites web de Christie’s et de Drouot. Giulia Ronchi https://www.louvre.fr/en https://www.christies.com/ https://www.drouotonline. com/


Foto whitecube

racey Emin (née le 3 juillet 1963 à Croydon). D ’ o r i g i n e chypriote turque, Tracey Emin, dont le père marié à deux femmes partage sa vie entre deux familles, passe son enfance à Margate. Elle suit une formation au Maidstone College of Art et au Royal College of Art de Londres. En 1994 se tient sa première exposition à la White Cube Gallery de Londres, ‘My Major Retrospective’, où elle expose des photographies personnelles. Un an plus tard, Tracey Emin fait parler d’elle avec son exposition ‘Everyone I Have Ever Slept With 1963-1995’: elle propose une tente bleue sur laquelle sont cousus les noms de toutes les personnes avec lesquelles elle a dormi, amants ou autres, de ses avortements, mais aussi de son viol, lorsqu’elle était mineure. Cette exposition lui amène la notoriété. Inclassable et iconoclaste, Tracey Emin, surprend, choque. Nominée pour le Turner Prize, avec ‘My Bed’(1999) elle affole la critique. Elle tire des aventures et mésaventures de sa vie, son univers trash et poétique, marqué par la douleur. Elle est celle par qui le scandale arrive. Créatrice, elle utilise vidéos, installations, dessins presque naïfs, broderies, néons. Complice de Sarah Lucas et des Young British Artists (YBA), Tracey Emin nous propose à chaque fois, une page de sa vie intime. Réalisant des expositions à travers le monde, elle est l’artiste britannique la plus médiatisée. Membre de la Royal Academy of Arts, et représentante de la Grande-Bretagne lors de la Biennale de Venise de 2007, elle est un mélange complexe et sensible, dérangeante, déroutante. C’est en suivant l’adage “Fais de ta vie une oeuvre d’art” (Warhol) que Tracey

TRACEY EMIN du 7 décembre 2020 au 30 janvier 2021 Monday - Sunday 10am - 4pm

WHITE CUBE MASON’S YARD

25 – 26 Mason’s Yard London SW1Y 6BU Tel: +44 (0) 20 7930 5373 https://whitecube.com/

du 7 décembre 2020 au 28 février 2021 ROYAL ACADEMIE OF ARTS The Gabrielle Jungel Winkler Galleries Burlington Gardens 6 Burlington Gardens, London, W1S 3ET tickets@royalacademy.org.uk.

Emin fonctionne et expose sa façon d’être comme mode d’expression. Emin obtient sa maîtrise à la Royal Academy of Art de Londres, où elle est désormais académicienne et docteur honorifique. Elle s’est fait connaître du public britannique par deux scandales médiatiques : un esclandre sur le plateau d’une émission culturelle de Channel 4 alors qu’elle était totalement ivre et son installation de 1999 pour le prix Turner, «My Bed». Emin utilise différentes formes d’expression comme la couture et la sculpture, le dessin, la vidéo et les installations, la photographie et la peinture. Elle est en conflit avec son ancien petit ami, l’artiste Billy Childish, à propos du stuckisme notamment. Elle est connue pour son travail qui explore des détails autobiographiques à travers des peintures, des dessins, des photos, des vidéos, des textiles, des sculptures et des installations. Membre important des Young British Artists qui connaissent la gloire à la fin des années 1980, ses œuvres «Everyone I Have Ever Slept PALAZZI 24 VENEZIA

With 1963–1995» (1995) et «My Bed» (1998), son propre lit défait installé à la Tate Gallery, contribuent de façon provocante à un discours féministe en montrant la nature brute de son art. Elle cite Edvard Munch et Egon Schiele comme source d’inspiration à son style expressionniste d’auto-représentation. Elle est nominée au Prix Turner en 1999, a été élue membre de la Royal Academy of Arts de Londres le 27 mars 2007. et est faite Commandeur de l’excellentissime Ordre de l’Empire britannique en 2013. Tracey Emin a révélé qu’elle avait reçu un diagnostic de cancer plus tôt cette année et qu’elle était maintenant en rémission après une opération en été. Elle a dit que l’expérience et le vieillissement n’avaient pas diminué son désir de travailler. «À mon âge maintenant, l’amour est une dimension et un niveau de compréhension complètement différents», dit-elle. «Je ne veux pas d’enfants, je ne veux pas de toutes les choses dont tu as envie inconsciemment quand tu es jeune.

Je veux juste de l’amour. Et autant d’amour que je peux en avoir. Je veux y être étouffé, je veux être dévoré par elle. Et je pense que c’est correct.» Elle a également déclaré qu’elle trouvait que le verrouillage était une période productive pour elle tout en faisant la promotion de son émission «I Thrive on Solitude», qui était au «White Cube» cet été. Moins de six mois après que son cancer a été diagnostiqué, Tracey Emin inaugure non pas une, mais deux expositions à Londres : celle tant attendue en duo avec l’expressionniste norvégien Edvard Munch, à la Royal Academy of Arts (7 décembre 2020-28 février 2021), et celle de ses nouvelles peintures dans l’espace de Mayfair de la galerie White Cube (jusqu’au 30 janvier 2021). La galerie londonienne a aussi participé la semaine dernière à l’édition en ligne d’Art Basel Miami Beach, où elle a présenté l’installation Feeling Pregnant III (2005) de Tracey Emin. Emin vit et travaille à Londres. wikiart.org/fr/tracey-emin/ www.fr24news.com/fr/


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.