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2. Exacerbation des iniquités dans le contexte de la pandémie à la Covid-19
from Racisme Systémique, Discriminations Intersectionelles et Iniquitiés dans le Système de Santé en Fran
Women of Color in Peace, Security and Conflict Transformation The Race Across the Pond Initiative: Women of Color in the Healthcare System Series
Par exemple, l’utilisation des données ethno-raciales en Amérique du Nord a permis de mieux appréhender les disparités qui existent dans les traitements proposés aux femmes ayant des fibromes utérins. Un article américain datant de 2010 (Jacoby et al.,) et un article canadien plus récent (Murji et al.,), démontre que les femmes noires et celles provenant d’Asie de l’Est seraient plus exposées au développement de fibromes utérins sévères et à des âges plus jeunes que la population féminine générale, en particulier les femmes blanches. L’ampleur et le risque de la maladie chez ces femmes nécessite une surveillance accrue comparativement aux autres groupes de femmes.
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En France, pourtant, contrairement aux États-Unis ou à la Grande-Bretagne la collecte de données ethno-raciales n’est pas d’usage, car elle contrevient à l'article 1er de la constitution qui stipule « l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion.» En conséquence, il existe une forte limitation juridique à l’utilisation de statistiques ethno-raciales. Comme mentionné dans la première partie de ce document, bien que certaines dérogations à des fins statistiques et de recherches soient possibles sous certaines conditions bien délimitées, ce contexte légal décourage fortement l'inclusion de ce type de données dans le domaine de la recherche médicale française.
2. EXACERBATION DES INIQUITÉS DANS LE CONTEXTE DE LA PANDÉMIE À LA COVID-19
Depuis le début de la pandémie, de nombreux pays utilisant des données ethno-raciales dans le cadre scientifique, ont permis de documenter les iniquités relatives à la Covid-19, qui a touché plus sévèrement les populations racisées, minorisées et les personnes migrantes, en particulier les femmes. La littérature scientifique disponible montre également que le fardeau de la maladie de la COVID-19 chez les travailleurs issus de ces groupes est bien plus important que celui des travailleurs blancs. Le rapport de recherche américain publié par le Urban Institute (2020) ainsi que l’article scientifique britannique du SN Comprehensive Clinical Medicine (2020) indiquent que ce phénomène s'explique notamment par la surreprésentation de travailleurs racisés et minorisés dans les métiers difficiles qui ont représenté les postes de première ligne, c’est à dire considérés comme essentiels pour le fonctionnement de la société, en dépit des mesures sanitaires restrictives (confinement total ou partiel). Or nombre de ces métiers de première cordée - aux contrats souvent précaires et exigeants (aides-soignant.e.s, infirmier.e.s, hôte.sse.s de caisse, personnel d’entretien et de ménage…), considérés comme étant les plus à risques d’exposition au virus, sont
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majoritairement occupé par des femmes. Cette surreprésentation des femmes et hommes non blancs sur ces postes semble avoir joué un rôle prépondérant sur l’ampleur des contaminations et à contribué à la sur-morbidité et sur-mortalité à la COVID-19 au sein des ces groupes de populations.
En France, la crise sanitaire du COVID-19 a contribué à rouvrir le débat sur la nécessité d’inclusion de données ethno-raciales dans les recherches et d’une meilleure parité femmes/hommes dans les échantillons cliniques. Ceci permettrait de documenter l’influence de la COVID-19 sur la santé des populations dans leur diversité et de réduire les iniquités structurelles et comportementales dans les soins thérapeutiques proposés.
En 2021, une tribune en faveur de l’utilisation de données ethniques dans l’hexagone a été publiée dans la Revue d’épidémiologie et de santé publique. Cet écrit appuie ses recommandations sur les disparités révélées par la pandémie. Malgré le peu de données disponibles en France, la documentation existante constate que la mortalité (toutes causes confondues) des personnes nées en France a augmenté de 22% entre Mars et Avril 2020 6 Sur cette même période, la mortalité chez les personnes nées à l’étranger a été largement plus importante. Elle a augmenté de 54% pour les individus nés en Afrique du Nord, de 91% pour ceux nés en Asie, et de 114% pour les personnes nées en Afrique sub-saharienne, soit cinq fois plus que la population générale.6
Plus d’un an après le début de la crise sanitaire, il est temps de dresser le bilan quant à la gestion de la pandémie faites par les autorités concernées. Le fardeau subi par les communautés racisées et minorisées, particulièrement les femmes non-blanches, est indéniablement questionnable et reprochable. Si les iniquités de santé avaient été, avant même la pandémie, mieux appréhendées et que les groupes vulnérables avaient été correctement identifiés, étudiés et protégés, il est fort probable que les risques de surexposition à la COVID-19 auxquels ils ont été exposés auraient pu être limités.
Recommendations:
La crise sanitaire étant toujours d’actualité, il est essentiel de documenter son influence sur les populations les plus vulnérables, notamment les populations racisées et minorisées, particulièrement les femmes, les personnes en situation de grande précarité, et les personnes migrantes. Cette documentation permettrait non seulement d’identifier l’ensemble des groupes vulnérables encore mal appréhendés, mais aussi d’interpeller les instances décisionnelles françaises avec des données scientifiques et
6 Rey G. (2021). Éditorial [Éditorial]. Revue d'épidémiologie et de santé publique, 69(2), 63–64. https://doi.org/10.1016/j.respe.2021.02.001