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La course à pied comme on n’en parle jamais
Zatopek
N°36 - trimestriel - février - mars - avril 2016 - France : 5.50 € - Canada : 8.50 $
Le 1
er
Magazine Running & Santé de votre Région
5 sens
En état d’alerte
Récupération Toutes les méthodes sont nulles, sauf une
Polémique
Pourquoi interdit-on la course aux enfants ?
VIE DE COUPLE
COURIR OU TROMPER
IL FAUT CHOISIR ! Cahier Volodalen
- Tout savoir sur la VMA - Actus science
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ZATOPEK EST UNE PUBLICATION DES Editions Sport et Santé sprl 177 rue Vanderkindere B-1180 Bruxelles (Belgique) TVA: BE 0882 202 726 Tel: 00 32 (0)2 538 54 58 Fax: 00 32 (0)2 537 13 38 Email: info@zatopekmagazine.com Site web: www.zatopekmagazine.com SERVICE ABONNEMENTS Sur le site www.zatopekmagazine.com ou par téléphone: 00 33 (0)4 32 80 26 83 (France & Suisse) et 00 32 2 538 54 58 (Belgique et autres pays). EDITEUR RESPONSABLE Gilles Goetghebuer 177 rue Vanderkindere B-1180 Bruxelles DIRECTEUR DE PUBLICATION Jean-Paul Bruwier jpb@zatopekmagazine.com CONCEPTION ET GRAPHISME Denis Thiry denis@perfecto.be REDACTEUR EN CHEF DU MAGAZINE Gilles Goetghebuer gilles@zatopekmagazine.com SECRETAIRE DE REDACTION Anna Muratore anna@zatopekmagazine.com ICONOGRAPHIE Olivier Beaufays olivier@zatopekmagazine.com ONT COLLABORE A CE NUMERO: Olivier Beaufays, Aurore Braconnier, Alain Coltier, Jean-Paul Bruwier, Louise Deldicque, Luca Endrizzi, Marc Francaux, Roger Igo, Hilde Meesters, Anna Muratore, Igor Risbane, Naïm Schneyders CREDITS PHOTOS bowie15: 5; Scc Events: 13,17; Weltklasse Zürich: 24; Spomeidis/triathlon.org: 25; Silent 47: 30; Aalphaspirit: 31; Belga image: 35; Asics: 36; Olivier Beaufays: 40; Stefano Torriono 44; Korperwelten: 44; Guilain Grenier: 45; Soloviova Liudmyla: 50; Mari Lizarraga:54; DPPI/Presse:56; Jiro Mochizuki: 58; Aurore Braconnier: 62; George Herringshaw: 62; Bruce Tulloh:65,66; Dumas/DR: 10,12,13,18,19,20,21,22,23,24,26,32,34 36,37,38,39,40,44,45,46,48,49,51,52,53,54 55,56,57 REGIE PUBLICITE Toutes éditions, Belgique et Luxembourg: Ghislaine De Drijver et Isabelle Crutzen Podium Media Europe SA Mobile: 0032 473 93 41 28 Tel: 00 352 26 90 86 69 info@podium-media.biz Skype: jpodium Pour la France et la Suisse: Pascal Leost pub@zatopekmagazine.com 7 lot. Les Cigales Chemin Georges Brassens 84210 Pernes-les-Fontaines Tél: 00 33 (0)4 32 80 26 83
SOMMAIRE_
EDITORIAL
P
ablo Neruda était un poète chilien. Il était même bien plus que cela. Sa mort douze jours après le coup d’état militaire du 11 septembre 1973 fait de lui un martyr de la démocratie au même titre que Salvador Allende, le président déchu, ou Victor Jara, le guitariste populaire qui fut exécuté après qu’on lui avait coupé les doigts d’un coup de hache. Dans les autres pays, cette barbarie suscita évidemment beaucoup d’indignation. Des foules se constituèrent et, aux noms des opposants assassinés ou disparus, elles répondaient chaque fois par «presente» signifiant ainsi que tous ces héros restaient présents dans les mémoires et dans les cœurs. Présent, Pablo Neruda ne l’a pourtant pas été auprès de sa fille handicapée. Malva Neruda est née hydrocéphale en 1934. Son père écrit à son propos: «Ma fille -ou ce que je nomme ainsi- est un être parfaitement ridicule, une espèce de point virgule, un vampire de trois kilos». Quelques temps, plus tard, il abandonne à la fois la mère et l’enfant qui mourra huit ans plus tard dans une famille d’accueil en Hollande. Cette histoire ressemble un peu à celle d’Albert Einstein se détournant d’Eduard son enfant schizophrène; ou encore celle d’Arthur Miller délaissant Daniel, son fils trisomique. On songe aussi à la veulerie de Jean-Jacques Rousseau confiant à l’assistance publique ses 5 enfants (cinq!). Cela remet-il en question les contributions respectives de ces hommes à la grande marche de l’humanité? Certes, non! Ces exemples sont simplement là pour dire que personne n’est fait d’une pièce. L’admirable côtoie le détestable. Le courage copine avec la lâcheté. On peut être à la fois hypocrite et sincère, égoïste et généreux, drôle et lugubre. Tout est possible! Dans ce numéro vous trouverez beaucoup d’exemples de ces dualités invraisemblables et pourtant bien réelles. La course à pied chez les enfants? A la fois dangereuse et épanouissante (lire page 18). L’adultère dans un couple? Libérateur et mortifiant (lire page 30). L’intelligence dans le sport? Un leurre et une réalité (lire page 48). Le dopage en Afrique? Systématique et accidentel (lire page 58). De cette lecture, on ne sort pas habité de certitudes mais de doutes et, à une époque qui inciterait plutôt chacun à s’enfermer dans ses convictions, un peu de flottement dans la voile, oui, vous verrez, cela fait du bien.
Gilles Goetghebuer, rédacteur en chef
COMMISSION PARITAIRE: 1120 U 89417 IMPRESSION Imprimé en Belgique/Printed in Belgium Imprimerie Bietlot rue du Rond-Point 185 B-6060 Gilly Belgique DISTRIBUTION Belgique: Tondeur Diffusion Patrick Malotaux 9 Avenue Van Kalken 1070 Bruxelles Tel: 02 555 02 11 Luxembourg: MPK – Elisabeth Biever 11, rue Ch. Plantin – B.P. 2022 L-1020 Luxembourg Tel: 00 352 499 888 306
04_AJOUTEZ À MON PANIER
35_SCIENCE DE SOI
10_COURRIER DES LECTEURS
42_ TÉMOINS
Tout ce qu’il faut pour courir à la page Comment dites-vous?
12_LA MUSE DU COACH
Posez vos questions à l’entraîneur
France et la Suisse: MLP ZA de Chesnes -55 bd de la Noirée F-38070 Saint Quentin Fallavier Tel: 04 74 82 39 56
14_CULTURE-CLUB
Trimestriel Février, mars, avril 2016
N° ISSN 1783-4104 La reproduction des textes et photos publiés dans ce numéro est interdite LA LOCOMOTIVE (toutes éditions) Est un supplément gratuit au trimestriel Zatopek et ne peut être vendue séparément Rédacteurs Belgique: Olivier Beaufays olivier@zatopekmagazine.com Eric Cornu eric@zatopekmagazine.com Jean-Paul Bruwier jpb@zatopekmagazine.com Rédacteurs France et Suisse: Cyrille Gindre cyrille@volodalen.com Sophie Sartet sophie@zatopekmagazine.com
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La page des bleus de lecture
Quand le sport réveille les sens
Les coureurs parlent aux coureurs
48_ DES CHERCHEURS QUI CHERCHENT Une étude qui contredit le Petit Nicolas
52_ MÉTHODES DE RÉCUPERATION
16_ZOOM
18_DÉBAT D’IDÉES
Pour ou contre les enfants dans la course
Claudio Berardelli, l’homme de l’ombre de l’athlétisme kényan
26_ENQUÊTE
62_ MACADAM PEOPLE
Les semelles se font la malle
Que sont les petits marathoniens devenus?
On a tout essayé
58_ VOYAGE, VOYAGE
Bruce Tulloh, le tout premier des va-nu-pieds
30_ SOCIÉTÉ
L’adultère contre la course à pied
ATTENTION
Ne ratez pas notre supplément à détacher au centre du magazine.
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AJOUTEZ_À MON PANIER CHAQUE SAISON VOIT FLEURIR SON LOT DE NOUVEAUTÉS. VÊTEMENTS, CHAUSSURES ET AUTRES GADGETS POUR RENDRE LA COURSE À PIED PLUS MODERNE. TOUJOURS PLUS MODERNE. ASICS METARUN La chaussure la plus chère du monde
Rubrique réalisée par Olivier Beaufays
LA FORCE EST AVEC LUI
INSOLITE
L
a sortie du septième opus de Star Wars a manifestement inspiré Gene Lu. Ce jeune Américain s’est amusé à dessiner dans sa ville de Portland (Oregon) toutes sortes de parcours de 8 à 26 kilomètres décrivant les personnages de la saga. D’autres internautes les ont téléchargés et la mode consiste désormais à emprunter ces circuits pour courir déguisés!
ODLO EVOLUTION BLACKCOMB WARM Un rien les habille Ces sous-vêtements sont à la fois remarquablement soignés et aussi étonnamment chauds, si bien qu’on éprouve très vite l’envie de ne rien porter d’autre.
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A 250 euros la paire, cette chaussure fait clairement partie des plus chères du marché. Qu’est-ce qui peut justifier un tel investissement? La question brûlait toutes les lèvres de l’assemblée venue assister à la présentation européenne de la MetaRun à Londres en novembre dernier. Visiblement, Tsuyoshi Nishiwaki s’y attendait. Le directeur de l’institut des sciences du sport d’Asics a expliqué que pour créer ce modèle il avait délibérément refusé toutes les habituelles concessions que le fabricant est obligé de faire pour réduire les coûts de production. Ainsi, la création d’une nouvelle chaussure repose en général sur les acquis des modèles précédents. Ce n’est pas le cas ici. Tout est nouveau! Le mesh, la semelle de propreté, l’exosquelette: chaque pièce a été entièrement repensée, ce qui explique aussi les trois ans de délai de développement. Au bout du compte, la MetaRun pèse 310 grammes, soit 20 de moins que la Kayano, tout en jouissant d’une meilleure stabilité à l’arrière (+28%) qu’au milieu (+15%)du pied. Asics a également travaillé sur de nouveaux matériaux. Toujours du gel. Mais celui-ci présente une qualité d’amortissement augmentée de 20%. Enfin, Asics reconnaît que le prix est égaPlus les gens achètent une lement lié à la rareté des chaussure cher, plus ils sont pièces. A ce jour, il n’existe déçus! Telle est la conclusion à que 60.000 paires de ces laquelle est parvenu Jens Jakob chaussures dans le monde. Andersen qui a réuni sur son site Ces modèles sont donc à quelque 1.234.867 avis de mi-chemin entre des procoureurs. Une analyse plus fine totypes et les fruits d’une des résultats laisse tout de même poindre un peu de scepticisme. production de masse. Cette remontée de l’info Le docteur Nishiwaki implique en effet une démarche attend impatiemment volontaire, ce qui filtre évidemles retours des utilisament le type de message. Si teurs afin de se servir vous êtes déçu de vos chausdes avancées techsures et que vous les avez nologiques pour payées 40 euros, vous ne en équiper les perdrez probablement pas votre autres modèles temps à le dire sur Internet. A 250 euros, c’est autre chose. de la gamme qui seront alors www.runrepeat.com vendus meilleur marché.
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Moteur!
Où sont les femmes?
Dans vos articles, vous utilisez souvent des termes comme «diésel» ou «turbo» pour qualifier le profil énergétique des coureurs. N’étant pas particulièrement féru de mécanique, ces nuances carburatives m’échappent totalement. Merci d’éclairer ma lanterne.
Notre réponse:
Olivier Dartois
Cela fait référence à ce que les spécialistes désignent par le terme endurance, c’està-dire la diminution de la vitesse en fonction de la distance. Ainsi la vitesse maximale aérobie (VMA) des coureurs «turbos» est supérieure à celle des «diésels». Mais elle décline plus rapidement, si bien que sur les longues distances, les coureurs du second groupe finissent pas rattraper ceux du premier. Et même à les dépasser!
Un cœur à la dérive J’ai lu avec attention votre article concernant la dérive cardiaque dans le Zatopek numéro 32. Pourriez-vous, s’il vous plaît, confronter votre explication à celle donnée par Kenney, Wilmore et Costill dans leur livre de référence Physiologie du sport et de l’exercice (Ed. De Boeck) qui me semble plus correcte?
Dans votre dernier numéro, vous évoquez les différences physiologiques entre les hommes et les femmes et leur impact sur la performance sportive. Puis vous écrivez: «l’écart se réduit à mesure qu’on augmente les durées d’effort jusqu’à disparaître totalement dans les épreuves d’extrême endurance». C’est une proposition que j’avais déjà pu lire par ailleurs et qui m’avait laissé circonspect. J’ai relevé les différences dans trois courses importantes du calendrier: les derniers championnats du monde à Annecy (85 kilomètres et 5300 mètres de D+), l’UTMB et le Grand Raid de la Réunion. Les écarts étaient de 14%, 16% et 19%. Tout à fait comparables à ce que l’on trouvera sur les autres distances.
Stéphane Battaglia
Pierre Ficher
Notre réponse:
Rien ne va plus!
La dérive cardiaque désigne l’augmentation progressive de la fréquence cardiaque lors d’un effort à intensité constante. Dans l’article, nous expliquions qu’elle résultait d’une fatigue musculaire qui exigeait le recrutement de fibres plus gourmandes en énergie. Dans un chapitre de leur excellent bouquin, les trois physiologistes mentionnés mettaient plutôt en avant la redistribution du sang dans l’organisme et la diminution du volume circulant pour cause de déshydratation. L’un n’empêche pas l’autre. On pourrait même évoquer d’autres pistes comme la détérioration du geste au fil du temps. On reviendra là-dessus dans un prochain papier. Promis!
1/ Impardonnable! A la page 61 du dernier numéro nous avons attribué la nationalité norvégienne au quadruple champion olympique Lasse Viren alors qu’il est évidemment Finlandais! Merci à Milou Blavier de nous lire si attentivement!
ERRATA
2/ Page 53, une erreur s’est glissée dans le texte sur le sens de rotation des escaliers. On écrit: «Il est moins dangereux de poursuivre un homme armé dans des escaliers qui tournent à droite en montant que dans des escaliers qui tournent à gauche.» Or c’est le contraire. Espérons qu’entretemps, aucun lecteur n’aura payé cette coquille de sa vie.
Nathalie Mauclair, lauréate à l’UTMB 2015. Madame 19%
Notre réponse: Très juste. D’ailleurs lorsqu’on ne retient que les records du monde, on s’aperçoit que la différence entre les sexes (± 10%) est la même sur 100 mètres ou 100 kilomètres. Reformulons le passage. «L’écart entre les sexes ne bouge pas en fonction des distances. Mais les épreuves d’ultra-endurance sont les seules où il arrive qu’une femme s’impose au classement général.» Ce fut le cas de la Britannique Eleanor Adams dans la première édition de la Badwater de 1987. L’exploit fut réédité à deux reprises par Pam Reed (2002 et 2003). On se souvient aussi de la victoire de Corinne Favre dans la première édition de la CCC (Courmayeur-Champex-Chamonix) ou plus récemment des performances d’Isabelle Ost et de son conjoint Stéphan Bero dans la PTL (Petite Trotte à Léon).
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LA MUSE_DU COACH ENVOYEZ-NOUS VOS QUESTIONS ET NOTRE ENTRAÎNEUR ROGER IGO PRENDRA SA PLUS BELLE PLUME POUR VOUS RÉPONDRE. Le courrier doit être adressé à la rédaction: info@zatopekmagazine.com ou directement via notre site www.zatopekmagazine.com. Vous pouvez y poster directement vos questions en cliquant d’abord sur l’onglet «vos réactions» et puis sur «exprimez-vous». Face à l’abondance de courriers, seuls les abonnés auront désormais le privilège d’une réponse longue et personnalisée. Il suffit de mentionner vos noms et prénoms. L’ancien sous-officier d’élite Roger Igo exerce le métier d’entraîneur depuis plus de trente ans. A 62 ans, il compte de nombreux titres et distinctions en cross, sur route et en montagne.
NE PARLEZ PAS AUX ADDUCTEURS
Je suis un ancien footballeur. J’ai 56 ans et je cours depuis plus de dix ans. Surtout des trails. Malheureusement, je suis souvent victime de crampes violentes à l’intérieur des cuisses qui me contraignent à l’abandon. Ensuite, il me faut plusieurs jours pour m’en remettre. J’ai consulté un spécialiste qui m’a fait passer plusieurs analyses de sang et même procédé à une biopsie: rien! Tout est normal. Je ne sais plus quoi faire. Philippe Beaumont Notre réponse Souvenir de ma vie Les crampes peuvent être provoquées par de très nombreux facteurs. Lorsqu’elles surviennent à l’effort, c’est souvent lié à un problème de déshydratation et de déséquilibre minéral. Pour le corriger, on doit alors tester différentes recettes jusqu’à trouver la solution idéale. Ceci dit, les boissons ne sont pas toujours en cause et certaines crampes très douloureuses résultent d’une mauvaise irrigation des masses musculaires comme dans le syndrome des loges. Dans d’autres cas, la faute incombe à une infection larvée, un défaut de la commande nerveuse, une carence alimentaire chronique (vitamines B et E) et mille autres causes encore. Enfin, il arrive que l’on confonde crampes et contractures. La douleur est similaire. Mais la crampe apparaît et disparaît de façon sporadique alors que la contracture demeure. Dans le cas présent, plusieurs éléments laissent penser qu’on se trouve face à un problème du deuxième type, notamment la persistance de la douleur, sa localisation à l’intérieur des cuisses et le passé de footballeur. Ce sport sollicite beaucoup les adducteurs. Souvent ils gardent des séquelles d’anciennes blessures. La contracture survient alors quand le muscle fragilisé se sent en danger. Il se On se détend! contracte pour éviter l’aggravation des lésions. Il faut voir cela comme une mesure de protection. Cette réaction s’étale effectivement sur plusieurs jours. La solution? Réduire les distances, varier les sols et les reliefs, suivre parallèlement un programme de renforcement et d’assouplissement musculaire. Patience!
Parcourez aussi notre grande bibliothèque de questions et de réponses. Vous y trouverez peut-être votre bonheur! www.zatopekmagazine.com
L’ai-je bien descendu?
Lors d’un cross régional, nous étions plusieurs à discuter sur ce qui faisait consommer le plus d’énergie à la minute d’effort: la montée ou la descente?
Gharib Abdelatif
de footballeur
NOTRE RÉPONSE
A vitesse égale, les montées sont incomparablement plus dures. Il faut hisser son propre poids jusqu’au sommet. La dépense énergétique est 4 à 5 fois plus élevée. Si la question se pose, c’est évidemment parce qu’on n’est jamais à vitesse égale. On va beaucoup plus vite en descente! A partir de là, on pourrait conclure que les efforts se valent ou même que la descente est plus épuisante. Tout dépend du choix des paramètres. En montée, on est limité par sa production énergétique. En descente, on rencontre plutôt des problèmes de coordination et de fatigue. L’exercice abime aussi les muscles! Les contractions excentriques «cassent» les fibres musculaires notamment au niveau du quadriceps et surtout quand les réserves énergétiques sont faibles comme cela se produit dans les épreuves au long cours. Donc, oui, les descentes sont exigeantes et méritent qu’on leur porte une attention toute particulière. D’ailleurs, on remarque qu’entre traileurs de l’élite, on se lâche plus souvent en descente qu’en montée.
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CULTURE_CLUB Rubrique réalisée par Aurore Braconnier et Olivier Beaufays
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VIDÉO
es six millions de coureurs en France sont-ils libres ou prisonniers de leur passion? Cette question forme la trame de cet essai et l’on sent aussi qu’elle tourmente l’auteur qui ne peut s’empêcher d’aller courir dans le Bois de Boulogne plusieurs fois par semaine et qui a calculé que, sur les 40 dernières années, ces «promenades» (pour reprendre un terme utilisé en prison) totalisaient tout de même trois tours du monde! A commander sur www.lebagnedelaliberté.fr
Langtang De Sébastien Montaz (51 min.) n avril 2015, Kilian Jornet s’apprêtait à partir en reconnaissance sur l’Himalaya en vue de sa tentative de record de l’ascension de l’Everest lorsqu’il apprit qu’un séisme d’une magnitude de 7,8 sur l’échelle de Richter était survenu, ravageant la vallée du Langtang et causant la mort de plus de 9000 Népalais. Le traileur catalan et son équipe décidèrent d’y aller tout de même. Mais le défi sportif s’est mué en une opération humanitaire. Sur place, Kilian Jornet et l’alpiniste espagnol Jordi Tosas se transformèrent en facteurs pour porter des messages dans des endroits reculés et coupés du monde après la destruction des voies de circulation. Ils se rendirent aussi à l’épicentre de la catastrophe. Le film les montre en train de faire des photos pour relever précisément la position des cadavres ou ramasser des objets personnels pour les rapporter à leurs familles. Détail troublant: ces images récentes et dramatiques alternent avec d’autres plus anciennes qui montraient la vallée avant le séisme à l’époque où elle était connue comme le «Paradis du Trek». Puisse-t-elle le redevenir un jour! Tous les bénéficies seront versés dans un fonds pour financer la reconstruction des 116 maisons détruites.
E
Infos et dons sur www.summitsofmylife.com
LIVRE
Pourquoi tu cours, Alex? De Sandrine Morier Ed. Baudelaire
Q
uand Alex rejoint le club de course à pied de sa nouvelle boîte, ses autres membres ne peuvent s’empêcher de fixer du regard la vilaine cicatrice qu’elle porte à la cuisse droite. Que révèle-t-elle? L’anecdote sert de point de départ à un roman introspectif où Sandrine Morier, psychologue de formation, s’interroge sur les ponts qui pourraient exister entre la douleur physique que l’on s’impose parfois lorsqu’on court et des désordres comportementaux beaucoup plus graves comme l’anorexie ou l’automutilation. Ces deux types de souffrance procèdent-ils d’une même frustration? Et l’un peut-il servir de remède à l’autre?
Tu mourras moins bête… Mais tu mourras quand-même!
INTERNET
ESSAI
Le bagne de la liberté De Marc Desmazières
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st-ce utile de mettre du PQ sur les lunettes des WC avant de poser ses fesses dessus? Pourquoi a-t-on envie de vomir quand on se prend un coup dans les testicules? Les questions paraissent absurdes. Elles le sont! Mais elles sont aussi scientifiques. Et l’on peut y répondre de manière très drôle et instructrice. La preuve est donnée sur le blog intitulé «tu mourras moins bête…» et sous-titré «mais tu mourras quand même» où le professeur Moustache et son assistant Nathanaël, deux énergumènes de pixels nés de l’imagination d’une certaine Marion Montaigne expliquent des phénomènes de la vie ordinaire qui touchent un peu à tout – de l’aéronautique à la zoologie en passant par la médecine et la physique en vulgarisant la science de façon absurde et trash. C’est réussi! Le blog a donné naissance à une bande dessinée en quatre tomes publiée aux éditions Delcourt et, depuis janvier, on retrouve les histoires sous forme de série animée tous les soirs à 20h45 sur la chaine Arte avec la voix de François Morel pour le professeur Moustache. Rire assuré! (*) tumourrasmoinsbete.blogspot.com
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ZOOM_PHOTO UNE PHOTO EN DIT SOUVENT BEAUCOUP PLUS QU’ON NE LE PENSE. À CONDITION DE LA SCRUTER D’UN ŒIL EXPERT. DANS CE NUMÉRO, NOUS AVONS DEMANDÉ À KOEN WILSSENS, SPÉCIALISTE DE LA CHAUSSURE DE COURSE À PIED DE DONNER SON AVIS SUR CELLES-CI. LES PAUVRES!
_DE KOEN WILSSENS Voici le vainqueur du dernier marathon de Berlin, le Kényan Eliud Kipchoge (31 ans). C’était la 42ème édition de l’épreuve. Cela signifie quelque chose pour un marathonien. Ce jour-là, il avait battu son compatriote Emmanuel Mutai. Surtout, il terminait en deux heures et 4 minutes tout juste, soit à 63 secondes du record de l’épreuve établi par Dennis Kimmeto sur ce même parcours, un an auparavant. Eliud Kipchoge a commencé sa carrière sur la piste. Il est monté sur le marathon en 2013 alors qu’il avait déjà 29 ans. Depuis lors, il en a disputé 6. Et il en a gagné 5. C’est dire s’il est doué! Il sera le grand favori des prochains Jeux de Rio. Cette image est incroyable. Je n’ai jamais vu un truc pareil et je ne comprends toujours pas ce qui a pu se passer. Normalement, la semelle intérieure ne peut pas bouger d’un millimètre. Alors, soit il s’agit d’un énorme défaut de fabrication, soit on a manipulé les semelles avant le départ ou peut-être qu’on a voulu remplacer celles d’origine sans prendre le soin de coller correctement les nouvelles. Cela ne se voit pas sur la photo. Mais Kipchoge s’est plaint de s’être fait d’énormes ampoules, tandis que le gros orteil gauche était en sang. Il faut dire que les semelles se sont mises à bouger dès le premier kilomètre de course. Kipchoge a vérifié à ses dépens l’adage selon lequel il ne faut jamais essayer quelque chose de nouveau le jour de la course! Le porte-parole de Nike a répondu que ces chaussures étaient des prototypes et donc qu’un bug de ce genre peut arriver. De prime abord, on pourrait se dire que, pour eux, la situation serait vécue comme très embarrassante. Mais je me suis entretenu avec un représentant de la marque deux jours plus tard. En fait, ils n’étaient pas mécontents du buzz de cette affaire. «C’est tellement gros comme coup marketing qu’on n’aurait pas pu l’imaginer nous-mêmes.»
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DÉBAT_D’IDÉES
ENFANTS (N N) ADMIS “JE M’APPRÊTE À PARTICIPER À UNE ÉPREUVE SUR 10 KILOMÈTRES. PUIS-JE COURIR AVEC MON ENFANT DE 10 ANS?” CETTE QUESTION MET RÉGULIÈREMENT DANS L’EMBARRAS LES ORGANISATEURS DE COURSES. ELLE DIVISE AUSSI LES SPÉCIALISTES DE SANTÉ COMME ON LE CONSTATE À LA LECTURE DE CE PETIT DÉBAT D’EXPERTS OÙ L’UN EST POUR, ET L’AUTRE CONTRE. Par Gilles Goetghebuer
Si l’enfant est demandeur, pourquoi pas? Un dix kilomètres à dix ans, cela n’a rien d’excessif. Des études ont montré que des enfants pré-pubères parcourent spontanément des distances de cet ordre en une seule après-midi de jeu. Pourquoi pas lors d’une course? POUR
Cela n’a rien à voir. Les distances parcourues lors d’une CONTRE après-midi de jeu ne sont pas réalisées à vitesse constante. Ce sont des alternances de sprints, de marche et de repos. Cela se produit dans un registre énergétique qui n’a absolument rien à voir avec l’effort continu d’un dix kilomètres sur route. POUR
ces précautions que l’on prend à l’égard des enfants me paraissent très exagérées. Ils ne sont pas en verre, tout de même! Cela me fait penser aux mises en garde qu’on érigeait autrefois à l’encontre du sport féminin pour s’apercevoir en fin de compte qu’elles ne reposaient sur rien! Athlètes en herbe
Mais s’ils sont demandeurs, au nom de quoi devrait-on les en empêcher? Toutes
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par
CAHIER TECHNIQUE
DEMOCRATIE LA VIE Jeune étudiant, s'est pressé en moi le besoin de comprendre et d'ordonner la vie. Que la physiologie déclare qu'il faille courir 20 secondes pour développer telle filière d'énergie et 40 secondes pour activer telle autre filière, j'expédiais loin de moi toute course rapide de 30 secondes. 40 n'est pas 30. 30 secondes est un néant. J'avais appris la vérité physiologique, il me fallait l'imposer à moi et au monde. Ma pensée était fondamentale. Le malaise fit son nid quand un savoir tout aussi grand, m'apprit qu'en termes d'énergie, 30 pouvait être aussi grand que 40. Le malaise ressemble à s'y méprendre à une pomme bien ronde qui se veut carrément carrée. Mais que voulez-vous, il me fallait un ordre universel, j'allais le chercher.
Sommaire 1 ÉDITO
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DEMOCRATIE LA VIE Du ressenti à la biologie
10 ACTUALITES SCIENCE
Plus fragile et plus fort à la fois
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OSSIER D La VMA avec perte et fracas
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QUATRE IMAGES COMMENTEES Contrology
Zatopek n° 37 I février / mars / avril 2016
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LE 1ER MAGAZINE RUNNING & SANTÉ DE VOTRE RÉGION LA LOCOMOTIVE CAHIER TECHNIQUE VOLODALEN 24 pages
ENQUÊTE_ AUJOURD’HUI, LA PLUPART DES MARATHONS SONT INTERDITS AUX JEUNES PARTICIPANTS. CE N’ÉTAIT PAS LE CAS À L’AVÈNEMENT DU JOGGING DANS LES ANNÉES 70 AUX ETATS-UNIS. CERTAINS ENFANTS MULTIPLIAIENT AINSI LES PRESTATIONS. ILS SE RACONTENT! Par Anna Muratore Source: Children of the Marathon recall a forgotten time, par Liz Robbins, Octobre 2009, The New York Times
Marathoniens en culo W
esley Paul est né en 1969 à Taïwan où il a passé ses premières années sous la garde de ses grandsparents. Il a quatre ans lorsque la famille est à nouveau réunie dans le Missouri où ses deux parents travaillent comme professeurs à l’Université d’état de Columbia. Nous sommes au début des années 70. Séduit par une nouvelle mode en provenance de Nouvelle-Zélande, le jogging, le père de Wesley se met à la course à pied. Son fils lui demande de l’accompagner. Pourquoi pas? Son père pense qu’il se lassera vite. Mais les choses ne se déroulent pas comme prévu. Le petit garçon se pique au jeu et, quelques mois plus tard, il a
déjà pris l’habitude de régler le réveil à 5 heures 30 du matin pour boucler un 10 miles (16 kilomètres) avant d’aller à l’école. Cet entraînement porte ses fruits. A l’âge de 8 ans, Wesley Paul boucle le marathon de Chicago en 3 heures 15 minutes. Le récit de ses exploits dépasse alors les frontières et parvient jusqu’à Taïwan, son île natale. Le gouvernement taïwanais propose de sponsoriser sa participation au marathon de New York. Nous sommes en 1977. La course ne compte encore que 5000 coureurs. Parmi eux, le petit Wesley qui reste à ce jour -et probablement pour toujoursle plus jeune concurrent jamais répertorié dans les annales de l’épreuve. Il en profite pour
abaisser encore son meilleur chrono (3 heures tout juste), ce qui fait de lui la coqueluche de sa ville d’adoption, Columbia. Les années passent. Il persévère. A l’âge de 15 ans, il signe d’excellents chronos aux marathons à Houston (2 heures 38) puis à Boston (2 heures 32) qu’il court sans dossard. Parallèlement, il poursuit de brillantes études à Harvard. Il donne l’impression de vivre sereinement cette double vie. «Pour moi, c’était un défi personnel, celui d’accomplir quelque chose que personne n’avait réalisé auparavant.» Aujourd’hui, Wesley est avocat à New York et il a conservé cette habitude de débuter ses journées en courant entre 5 et 8 kilomètres parce que, dit-il, cela l’aide à être plus productif. Il est père d’une petite fille de trois ans qu’il se promet d’emmener courir avec lui… Dans un an ou deux!
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INCROYABLE_MAIS VRAI EN 2006, BUDHIA SINGH AFFOLAIT LE MONDE ENTIER EN ENCHAÎNANT LES MARATHONS. IL AVAIT 4 ANS. IL EN A 13 AUJOURD’HUI. QU’EST-IL DEVENU?
L’odyssée de Little Budhia S
Star malgré lui
on histoire avait fait le tour de la planète. Il est vrai qu’elle contient tous les ingrédients d’un bon film Bollywoodien (1). Budhia Singh n’a jamais connu son père. A l’âge de deux ans, sa mère l’a vendu à un marchand ambulant pour 800 roupies, soit moins de 20 euros. «Je me suis dit qu’ainsi, il
aurait à manger tous les jours» justifie-t-elle quelques années plus tard au micro de France 2. Battu par son nouveau tuteur, Budhia trouve refuge chez Biranchi Das, un entraîneur de judo qui accueille ceux que l’on surnomme «les chiens des bidonvilles». C’est là que son destin va basculer. Pour le punir d’avoir
Dans les bras de feu son entraîneur, Biranchi Das
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AMOUR, SEXE_ET COURSE À PIED
Tromper ou courir, il POUR REDONNER DU «PEPS» À SA VIE, VAUT-IL MIEUX TROMPER SON CONJOINT OU SE METTRE À LA COURSE À PIED? SI VOUS TROUVEZ QUE LA QUESTION EST IDIOTE, ON NE PEUT PAS VOUS DONNER TORT. PASSEZ LES PAGES QUI SUIVENT. POUR LES AUTRES, C’EST ICI.
U
ne fois n’est pas coutume, commençons par une petite blague. Cela se passe un dimanche matin très tôt. Dehors, il fait un temps de chien. Un homme se lève pourtant sans faire de bruit pour ne pas réveiller sa femme. Il se change et part faire son jogging dominical. D’ordinaire, il ne se laisse pas abattre par les conditions météo difficiles. Mais ce jour-là, il pleut, il vente, il fait froid: c’en est trop! Après quelques minutes d’effort, il décide de rebrousser chemin et regagne la chambre toujours plongée
dans la pénombre. Il se déshabille et se recouche discrètement auprès de son épouse endormie. A sa grande surprise, celle-ci vient alors se blottir dans ses bras. «Il fait vraiment un temps infect» dit-il. Elle répond: «Je sais. Et mon imbécile de mari est tout de même parti courir!»
Suce aux infidèles
Cette blague n’est pas la seule façon de relier les deux thèmes de notre article: adultère et course à pied. Pensez aussi aux mots «coureur» et «coureuse» qui désignent tout à la
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SCIENCE_DE SOI
Cinq sens en ébullition! STUTTGART 1993
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our la première fois de leur courte histoire, les championnats du monde d’athlétisme font escale en Allemagne. Stéphane Diagana vient de fêter ses 25 ans. Il progresse à chaque compétition. Sur 400 mètres haies, il a déjà repris plus d’une seconde à l’ancien record de France, celui de JeanClaude Nallet. Le jour de la finale, il descendra encore la marque de quelques dixièmes, signant un chrono de 47 secondes 64 centièmes qui aurait dû le ravir. Pourtant, le soir de la course, c’est le sentiment de regret qui prédomine. Diagana ne pouvait pas savoir qu’il serait plus tard, double champion du monde et recordman d’Europe (NB: en 1995, il a battu de onze centièmes le vieux record d’Europe du 400 de l’Allemand Harald Schmid qui datait de 1982). Sur le coup, il était seulement déçu d’avoir loupé la médaille de bronze d’un cheveu! «Sur la fin de la course, je reprenais du terrain au Jamaïcain Winthrop Graham» raconte-t-il. Un ou deux mètres de plus et il l’aurait devancé, c’est sûr! Au passage de la ligne, les deux ath-
lètes donnent l’impression d’être parfaitement à égalité. En fait, deux centièmes de seconde les séparent. Cela fait quelques centimètres à peine. «Mais je savais que j’avais été battu» reprend Diagana. «Les gens doutaient autour de moi. Ils se demandaient si je n’avais pas quand même accroché la médaille. Mais j’étais sûr de ne pas me tromper. Quand on termine une course comme celle-là, on rentre vraiment dans une dimension différente. Le temps, l’espace, tout se déforme! Un dixième, un centième de seconde, cela veut vraiment dire quelque chose. A Stuttgart, j’étais deux centièmes derrière. Je le savais. Je ne l’aurais pas cru si l’on m’avait annoncé le contraire. C’est fascinant comme expérience». Beaucoup de sportifs se reconnaîtront dans ce témoignage. Le sport possède effectivement cette faculté de plonger les êtres dans un état de vigilance accrue. Tous les sens sont en éveil! Et ce qui paraît diffus et brouillé en d’autres circonstances s’éclaire soudain d’une lumière éclatante. Dans les pages qui suivent, nous verrons comment l’effort exacerbe les sens. 37_ZATOPEK 35
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TÉMOINS_
On se dit TOUT! La course à pied rend-elle plus sensible à l’environnement? Les témoignages sur le sujet vont vraiment dans tous les sens!
Dossier réalisé par Olivier Beaufays
PAROLE DE PSY NICOLAS DURUZ Professeur honoraire de psychologieclinique à l’université de Lausanne et auteur du livre Dis-moi pourquoi tu cours aux éditions Médecine & Hygiène «J’ai découvert la course à pied, il y a douze ans, alors que je venais de fêter mes 60 ans. Récemment, j’ai écrit un livre où je me sers de mon expérience de psychologue et de coureur à pied pour décrire à la fois différents états de corps que l’on éprouve en courant et faire la distinction entre quatre styles de course: le contactuel, le performant, le collectif et le motivé. Bien sûr, on peut être un peu de tout cela. Mais il y a toujours une motivation qui domine. Pour ma part, je me sens surtout «contactuel». C’est-à-dire qu’en courant, je cherche cette explosion des sens et la syntonie qui l’accompagne (nb: «syntonie» signifie qu’on est parfaitement intégré dans son environnement). Parler de «sens» est aussi très intéressant pour le coureur à pied car, du point de vue étymologique, le mot «sens» renvoie à la fois au latin «sensus» (la sensation) et au germain «sen» (le chemin, la direction). Courir contactuel, c’est une façon de s’adonner pleinement à sa passion et d’éprouver dans l’instant le sentiment basique d’exister. Tout s’intensifie avec l’effort. Par exemple, lorsque j’affronte une montée, c’est pour moi un moment privilégié pour prendre mieux conscience de la poussée des pieds sur le sol. Le souffle aussi se fait plus court. Un nouvel échange s’établit entre le «dedans» et le «dehors». J’ai l’impression parfois que mon corps ne fait qu’un avec l’environnement et même que la colline ou les sapins participent à me hisser jusqu’en haut.»
LA PREMIÈRE GORGÉE DE BIÈRE OLIVIER
«Les sensations ressenties après une sortie longue me font parfois penser à ce que décrit Philippe Delerm dans son livre La première gorgée de bière, sur toutes ces petites choses de la vie qui prennent une autre saveur dès qu’on se trouve en position de les apprécier vraiment. Ainsi le dimanche, j’enchaîne souvent une longue sortie d’entraînement et des concerts de blues ou de jazz qui se donnent dans une petite chapelle désacralisée. A chaque fois, je suis envoûté. Et à chaque fois, je me pose la même question. Serait-ce le fait d’avoir couru qui me rendrait ainsi plus réceptif à la musique?
330.000 Soit le nombre de sons d’intensité et de fréquences différents que l’oreille est capable de percevoir.
AVEUGLE, ET ALORS? SIMON
«Malgré une rétinite pigmentaire qui m’a laissé aveugle à 17 ans, j’ai toujours continué à courir. D’abord sur un tapis de course puis sur le terrain de football situé à l’arrière de la maison. J’enchaînais alors les allers-retours entre les deux goals. J’en ai eu marre au bout d’un temps. J’ai eu envie de grands espaces. Près de chez moi, j’ai dégoté une route déserte avec un accotement en gazon qui me permettait de courir sans danger. De fil en aiguille, je me suis aventuré de plus en plus loin en m’aidant notamment du GPS et du logiciel Runkeeper. A force, j’ai mémorisé un tas de parcours et je peux désormais courir sans l’aide de personne. Je suis attentif à tout: le relief, la souplesse du terrain. J’essaye de deviner les obstacles. Bien sûr, cela ne suffit pas toujours pour éviter les chutes. Mais cela ne fait rien. Quelques gamelles sont un prix insignifiant pour les heures de liberté et d’indépendance que ces séances me procurent.»
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DES CHERCHEURS_QUI CHERCHENT DANS L’IMAGINAIRE COLLECTIF, ON SE REPRÉSENTE SOUVENT LE PREMIER DE LA CLASSE COMME UN ENFANT CHÉTIF. LES ÉTUDES SCIENTIFIQUES NE VÉRIFIENT PAS CETTE ANCIENNE REPRÉSENTATION DE LA DISTRIBUTION DES TALENTS. PAS DU TOUT!
Le sport rend intelligent NTIFIQ U E ME SC
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énies sont les personnes qui n’ont encore jamais lu Les aventures du Petit Nicolas de René Goscinny. Pourquoi? Parce qu’elles peuvent encore le faire, pardi! Les sept recueils existent en poche et viennent aussi d’être réédités en coffret chez Imav Editions. Ce sont des chefs-d’œuvre de drôlerie, de sensibilité
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et d’imagination. Rares sont les livres qui font rire. Donc si, par extraordinaire, vous ne connaissez pas encore les aventures du Petit Nicolas et de «sa bande de chouettes copains», précipitez-vous! Vous ne le regretterez pas. Quant aux autres, ils peuvent toujours lire et relire ces histoires, jusqu’à les apprendre par cœur et retenir aussi quelques répliques cultes comme «on le saura» de Geoffroy dans «On a parlé dans la radio» ou «elles sont fraîches vos langoustes?» dans «On a fait le marché avec Papa». Puis on découvre à chaque fois des détails qui avaient échappé aux précédentes lectures et qui permettent de mieux cerner les personnages de la saga: Rufus
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LE 1ER MAGAZINE RUNNING & SANTÉ DE VOTRE RÉGION DES CHERCHEURS_QUI CHERCHENT 4 pages
MÉTHODES_DE RÉCUPÉRATION
COMMENT FAIRE POUR RETROUVER DES FORCES DANS LES JOURS QUI SUIVENT UNE GROSSE COMPÉTITION? ET SI LA RÉPONSE ÉTAIT TOUT SIMPLEMENT: RIEN!
Les
lendemains de la v «A
quoi pensent les joggeurs du dimanche», s’interroge Miossec dans sa chanson éponyme. Il propose un tas de pistes de réflexion. Seulement, il en oublie une. La plus importante! Beaucoup de ces joggeurs du dimanche songent à préparer les courses à venir ou à récupérer des épreuves passées. Les premiers suivent alors les consignes de leur programme d’entraînement. Les seconds se contentent de trottiner, persuadés qu’un effort modéré permettra d’accélérer l’élimination des déchets de l’organisme produits en masse lors de l’effort. Ne dit-on pas dans le jargon qu’il s’agit de séances de «décrassage»? On court. Mais c’est comme s’il s’agissait de remettre de l’ordre dans la maison après une grosse teuf! L’idée est plaisante. Mais appartient-
elle au monde de la science ou de la croyance? Un peu les deux, sans doute. Plusieurs études montrent en effet qu’en élevant légèrement son débit circulatoire, on fait baisser l’acidité musculaire, ce qui permet une meilleure restauration des réserves de glycogène. Celles-ci peinent effectivement à se constituer lorsque le pH sanguin s’éloigne de sa valeur de référence 7,4. Cette régénération plus rapide peut jouer un rôle dans les sports où l’on doit enchaîner les performances au cours de la même journée. Le judo par exemple. En course à pied, en revanche, il est rare qu’on fasse deux épreuves à quelques heures d’intervalle. De ce fait, la vitesse de reconstitution du glycogène ne devrait pas trop nous préoccuper. De fait, ce n’est pas la préoccupation principale de ceux qui s’adonnent à ces séances de décrassage. La plupart pensent qu’ils échapperont ainsi aux courbatures du lendemain de veille ou qu’ils en diminueront l’intensité. Et là, c’est beaucoup moins évident!
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VOYAGE_VOYAGE LE VOILE EST LEVÉ SUR L’ATHLÉTISME KÉNYAN. SES CHAMPIONS SONT CERTES, TRÈS DOUÉS, PARFOIS, ILS SONT AUSSI TRÈS DOPÉS! NOUS AVONS DISCUTÉ DE CETTE DÉRIVE AVEC L’UN DE CEUX QUI CONNAÎT LE MIEUX LE DESSOUS DES CARTES: L’ENTRAÎNEUR ITALIEN CLAUDIO BERARDELLI.
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Propos recueillis par Luca Endrizzi
LA VÉRITÉ SI JE MENS
AU DÉBUT DU MOIS D’OCTOBRE, VOUS ÊTES ÉCARTÉ DU GROUPE DE GABRIELE ROSA. «BERARDELLI AURAIT DÛ ÊTRE PLUS ATTENTIF AVEC NOS ATHLÈTES QUI ONT ÉTÉ ÉPINGLÉS PAR DES CONTRÔLES ANTIDOPAGE» DIT UN COMMUNIQUÉ. PLUSIEURS ATHLÈTES DU GROUPE VIENNENT EFFECTIVEMENT DE SE FAIRE PINCER POUR DOPAGE (3).
laudio Berardelli est un jeune entraîneur italien qui s’occupe de quelques-uns CIl comptait des meilleurs athlètes du monde, alors que lui-même provient du milieu du vélo. parmi les bons coureurs de sa catégorie chez les moins de 23 ans.
Mais la généralisation du dopage à la fin des années 90 a fini par le dégoûter de poursuivre dans ce sport. Après des études à l’Université de Milan, Berardelli rencontre Gabriele Rosa qui l’invite à rejoindre son écurie de champions au Kenya (1). Au sein de la société “Rosa & Associati” il s’est d’abord occupé de la marathonienne Margaret Okayo, victorieuse à Londres, à Boston et deux fois à New York où elle détient toujours le record de l’épreuve (2 heures 22 minutes et 31 secondes). Beaucoup d’autres champions et championnes sont ensuite passés par ses mains (2). Rosa et Berardelli donnaient l’impression de travailler en bonne entente, si bien que l’annonce de leur séparation à l’automne passé a surpris pas mal de monde dans le petit milieu de l’athlétisme. D’autant que les raisons données par l’un et l’autre diffèrent du tout au tout!
Les choses ne se sont pas du tout passées comme ça! En juin de cette année, j’avais déjà annoncé mon départ au fils de Gabriele Rosa, Federico, qui fait partie de l’équipe et s’occupait personnellement de plusieurs athlètes pincés pour dopage. Je préfère ne pas commenter sur les raisons qui motivaient mon envie de changer d’air. Elles sont personnelles. J’avais aussi prévenu mes athlètes de mon départ et d’ailleurs 24 d’entre eux ont choisi de me suivre. J’ai fondé une nouvelle structure où je m’occupe de l’entraînement et c’est mon partenaire Gianni Demadonna qui gère le management. La famille Rosa a voulu présenter les choses à sa manière et prétendre que la décision venait d’eux. C’est faux!
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ruce Tulloh prend soin de me prévenir par texto: il m’attendra à la sortie de la bouche de métro londonienne Camdem Town, haut-lieu des cultures alternatives. «Pourriez-vous vous décrire afin que je vous reconnaisse?» me demande-t-il ensuite poliment. «Moi, je ressemble à un vieux monsieur tout mince.» A peine ai-je franchi les portes automatiques de la station qu’il s’élance à ma rencontre, me tend une main ferme et me propose d’aller boire un cappuccino dans un coffee-bar du coin. Quelques semaines auparavant, il avait fêté son 80e anniversaire en marchantcde sa ville natale de Marlborough
à Londres, soit 80 kilomètres en six jours, escorté de sa femme et de ses petits-fils. Aujourd’hui, Bruce déambule avec entrain au milieu des marchés du quartier. Je songe alors à la description qu’il a faite de lui. «Je ressemble à un vieux monsieur…» Quelle blague! Propos recueillis par Aurore Braconnier
é en 1935 à Datchet, village Nbritannique au bord de la Tamise, l’athlète Bruce Tulloh s’est fait
connaitre dans le monde de la course à pied principalement pour deux raisons. De un, il a décroché la médaille d’or sur le 5000 mètres du championnat d’Europe à Belgrade en 1962. De deux, il a accompli cette performance les pieds nus, à une époque où le barefoot n’avait encore rien d’une mode! Professeur de biologie pendant vingt ans à l’Université de Marlborough et coach, il a publié plusieurs ouvrages sur l’entraînement parmi lesquels Four Million Footsteps en 1970, soit le nombre de foulées qu’il a effectuées pour traverser les Etats-Unis de part en part (1, 2).
Bruce et Sue Tulloh, 54 ans de complicité
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