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Zatopek
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N°54 - trimestriel - mai - juin - juillet 2020 - France : 5.50 € - Canada : 8.50 $
Le Magazine Running & Santé de référence en France
Société
“Big Pharma” à la conquête du sport
Pratique
Comment muscler ses fesses
Science
Les sportifs ont-ils une meilleure mémoire ?
Orientation
Une chouette façon de courir
ITRA
LE DOSSIER NOIR
DU TRAIL L 16992 - 54 - F: 5,50 € - RD
ACTUALITÉS SCIENCE PAR VOLODALEN
ZATOPEK EST UNE PUBLICATION DES Editions Sport et Santé sprl 177 rue Vanderkindere B-1180 Bruxelles (Belgique) TVA: BE 0882 202 726 Tel: 00 32 (0)2 538 54 58 Fax: 00 32 (0)2 537 13 38 Email: info@zatopekmagazine.com Site web: www.zatopekmagazine.com SERVICE ABONNEMENTS Sur le site www.zatopekmagazine.com ou par téléphone: 00 33 (0)4 32 80 26 83 (France) et 00 32 (0)2 538 54 58 (Belgique et autres pays). EDITEUR RESPONSABLE Gilles Goetghebuer 177 rue Vanderkindere B-1180 Bruxelles DIRECTEUR DE PUBLICATION Jean-Paul Bruwier jpb@zatopekmagazine.com CONCEPTION ET GRAPHISME ILOVE MEDIA bvba REDACTEUR EN CHEF Gilles Goetghebuer gilles@zatopekmagazine.com SECRETAIRE DE REDACTION Anouk Ramaekers anouk@zatopekmagazine.com ICONOGRAPHIE Olivier Beaufays olivier@zatopekmagazine.com ONT COLLABORE A CE NUMERO: Olivier Beaufays, François Borel-Hänni, Aurore Braconnier, Alain Philippe Coltier, Roger Igo, Julien Legalle, Hilde Meesters, Laurent Mourot CREDITS PHOTOS Platzer/Red Bull content pool: Cover France: Philip; Luis Vidales/Red Bull content pool; Cover Suisse, Belux, 54; Belga image: 10; Agence Dumas: 12,14,15,19,20,22,23,50,56,58,5 9; Jan-Otto/iStock:14; AFCP:14; Tom-Tom:15; Bauerfeind:15; Domaine public: 18,55; New wave image: 19; Korperweilten:20; David Brandon:21; INEOS 1:59 Challenge: 26; Astrid Hoeken: 26; Expat Vine: 30; Damien Rosso/Red Bull content pool: 31; Jordi Saragossa: 32; Franck Oddoux/UTMB: 34; J-P Sedran:35; Le Descente de la Lesse: 35,37; Marvejols-Mande: 35,36; Cédric Malherbe: 37; La montée du Poupet: 35,39; Free ro run: 37; Course de l’Escalade: 40,41; Vtm nieuws medialaan: 42; Les Arènes: 43; Bo VanSpilbeeck:44; Sporta: 44 Grasset: 48; Gaumont: 48; @ajwilldesign: 49; Adidas: 49,60; Cyril Crespeau/Obivwak: 52,53,54,59; Picsart:55; Stefano Jeantet/Tor de Géants:56; Neil Lockhart/123RF:56; Université libre de Lausanne: 57; S.Myshkovsky/Shutterstock: 57; Garmin:59 REGIE PUBLICITE Toutes éditions, Belgique et Luxembourg: Ghislaine De Drijver et Isabelle Crutzen Sport Consulting & Education & Medias SA Mobile: 0032 (0)477 63 01 44 isabelle@zatopekmagazine.com Pour la France et la Suisse: Pascal Leost Email: pub@zatopekmagazine.com 7 lot. Les Cigales Chemin Georges Brassens 84210 Pernes-les-Fontaines Tél: 00 33 (0)4 32 80 26 83 COMMISSION PARITAIRE: 1115 U 89417 IMPRESSION Imprimé en Belgique/Printed in Belgium Imprimerie Bietlot Rue du Rond-Point 185 B-6060 Gilly Belgique DISTRIBUTION Belgique: Tondeur Diffusion Patrick Malotaux 9 Avenue Van Kalken 1070 Bruxelles Tel: 0032 (0)2 555 02 11 Luxembourg: MPK – Elisabeth Biever 11, rue Ch. Plantin – B.P. 2022 L-1020 Luxembourg Tel: 0035 (0)2 499 888 306 France, Suisse et Québec: MLP ZA de Chesnes -55 bd de la Noirée F-38070 Saint Quentin Fallavier Tel: 0033 (0)4 74 82 39 56 Trimestriel Mai, juin, juillet 2020 N° ISSN 1783-4104 La reproduction des textes et photos publiés dans ce numéro est interdite LA LOCOMOTIVE (toutes éditions) Est un supplément gratuit au trimestriel Zatopek et ne peut être vendue séparément Rédacteurs Belgique: Olivier Beaufays. Email: olivier@ zatopekmagazine.com Eric Cornu. Email: eric@zatopekmagazine.com Rédacteurs France et Suisse: Cyrille Gindre cyrille@volodalen.com Sophie Sartet sophie@zatopekmagazine.com
SOMMAIRE_
EDITORIAL «
Le chapitre des maladies infectieuses est clos», déclarait le secrétaire d’Etat américain à la Santé William Stewart dans les années 60. Au royaume des prédictions idiotes, la sienne vaut bien celle du président américain Rutherford Hayes à propos du téléphone en 1876 («Qui voudrait se servir d’un tel appareil?») ou celle du célèbre producteur américain de cinéma Darryl Zanuck qui, en 1946, dit à propos de la télévision que «les gens se lasseront vite de regarder tous les soirs une boîte en contre-plaqué». Ces erreurs de jugement font sourire aujourd’hui. A l’époque, ces déclarations constituaient pourtant des avis parfaitement sensés et on aurait plutôt eu tendance à considérer comme des hurluberlus tous ceux qui auraient osé dire le contraire. Car William Stewart n’était pas le seul à penser ainsi. Après la Deuxième guerre mondiale, on a largement cru en l’avènement d’une humanité débarrassée de toutes ses anciennes maladies. L’OMS (Organisation mondiale de la santé) s’était d’ailleurs choisi un slogan qui affichait cette ambition: «la santé pour tous en l’an 2000!». Sous la présidence du médecin danois Halfdan Mahler, l’agence onusienne ira même jusqu’à inscrire la santé comme un droit inaliénable de l’individu au même titre que la liberté de culte ou d’expression. Bref, les plus hautes autorités médicales de la planète entretenaient l’illusion que la fièvre, les maux de tête, les vomissements et la diarrhée ne seraient bientôt plus que des mauvais souvenirs. Alors s’il fallait trouver un seul mérite aux récentes épidémies, ce serait de nous rappeler que, dans un scénario de collapsologie, la suffisance des experts constitue probablement la pire des menaces. «Pour la science, le monde est désormais sans mystère», proclamait même le chimiste français Marcellin Berthelot en conclusion d’un discours à l’Académie des sciences
en 1887. On devrait plus souvent rappeler ces sottes prétentions, surtout à l’heure de choix déterminants pour l’avenir sur les OGM, la transmission 5G, le nucléaire, les échanges internationaux ou l’électrification des moyens de transport. Le lien avec la course à pied? Il n’est pas évident à établir. Pourtant, on sent bien qu’il existe. Faites courir un expert. Il redeviendra soudainement modeste. C’est que l’effort physique ne se nourrit pas de fantasmes. Il nous rappelle aussi qu’il n’existe pas de progrès sans sacrifice et qu’on n’est jamais à l’abri d’imprévus. Il faut être un peu sportif pour percevoir toute la subtilité de cette phrase attribuée au Néerlandais Jan van de Snepscheut, l’un des pères de l’informatique. «En théorie, il n’y a pas de différence entre la théorie et la pratique. En pratique, si!» Bref, le monde n’était pas ce qu’en tant qu’expert, il aurait voulu qu’il soit! Cette pensée l’obsédait et le faisait souffrir à un point difficile à imaginer. En février 1994, il s’est suicidé après avoir mis le feu à sa maison et attaqué son épouse à la hache. Gilles Goetghebuer Nécrologie Une triste nouvelle est tombée ce vendredi 13 mars 2020: Dana Zatopkova est décédée dans un hôpital de Prague. Elle était âgée de 97 ans. L’occasion est belle de relire sa longue interview publiée en trois parties dans les trois premiers numéros de Zatopek, il y a 13 ans. Depuis lors, on a réalisé beaucoup d’autres rencontres passionnantes. Celle-ci reste la plus belle! Lire «Madame Zatopek» par Guillaume Narguet dans les numéros 1, 2 et 3 du magazine Zatopek (à partir de janvier 2007).
04_AJOUTEZ A MON PANIER
35_DECOUVERTES
10_ZOOM
40_SUISSE
Tout ce qu’il faut pour courir à la page Wuhan, le virus du marathon
12_COURRIER DES LECTEURS La lettre d’un coureur courroucé
14_LA MUSE DU COACH
Le bon sens près de chez vous
16_CULTURE CLUB
Elle court, elle court, la Corée du Nord
18_DES CHERCHEURS QUI CHERCHENT Peut-on mettre le sport en pilule?
24_MUSCULATION
Bombez les fesses!
30_TRAIL
Trois courses de légende qui sont nées quelque part L’extraordinaire ascension de la Course de l’Escalade
42_SEXE ET SOCIETE
Le jour où Baudouin devint Bo
48_RENCONTRE
Claude Fugain au chevet de nos voix
52_COURSE D’ORIENTATION Un peu plus à l’ouest
60_NEUROLOGIE
Courir améliore-t-il la mémoire?
62_HISTOIRE VRAIE
Peter Snell, l’homme à tout faire!
Sous le règne de l’ITRA 54_ZATOPEK 3
CHAQUE SAISON VOIT FLEURIR SON LOT DE NOUVEAUTÉS. VÊTEMENTS, CHAUSSURES ET AUTRES GADGETS POUR RENDRE LA COURSE À PIED PLUS MODERNE. TOUJOURS PLUS MODERNE.
L’AVIS D’UN PRO
AJOUTEZ_À MON PANIER
Rubrique réalisée par Olivier Beaufays
SALOMON SONIC 3 Après le hérisson, la chaussure On connaissait déjà Sonic le hérisson, le personnage de jeu vidéo capable de se déplacer à la vitesse du son (340 mètres/seconde). Voici à présent Sonic la chaussure, qui se targue pour sa part d’absorber un maximum de vibrations à chaque foulée, lorsque le pied tape sur le sol, grâce au concept dit «Optivibe». Celui-ci consiste à associer deux types de mousses, l’une pour annihiler l’onde de choc, l’autre pour propulser le pied. Lors de sa mise au point, 80 combinaisons ont été testées. Une seule a été retenue et équipe aujourd’hui les trois modèles de la marque: Confidence, Balance et Accelerate, distingués par la diminution de leur drop (de 10 millimètres chez la Confidence à 6 chez l’Accelerate) et par la quantité de mousse sous le pied.
Sébastien Spehler, double vainqueur des Templiers (2017 et 2018)
www.salomon.com
PANIER SCIENCE
140 €
POUR LE PLAISIR, MOUAIS
«P
our le plaisir», répondent souvent les coureurs lorsqu’on les interroge sur leurs motivations au moment d’aller s’entraîner. Pour le plaisir, vraiment? Le psychologue américain Blair Evans (Université de Pennsylvanie) a mené une enquête plus approfondie auprès de 25.000 utilisateurs de Strava et il apparaît que seulement 8% des sondés «aiment» l’activité en tant que telle (1). Quant aux autres? Ils courent pour conserver le moral et l’estime de soi. Et ils ont bien raison! En 2018, une étude parue dans The Lancet montrait que les personnes très actives avaient tendance à se sentir mal dans leur peau environ 35 jours par an contre 53 pour les sédentaires (2)! Références: (1) Why we Run, par Blair Evans, février 2020, à lire sur whywerun.strava.com. (2) Association between physical exercise and mental health in 1,2 million individuals in the USA between 2011 and 2015: a cross-sectional study, dans The Lancet Psychiatry, septembre 2018
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«La Sonic 3 n’a plus grand-chose à voir avec les modèles précédents qui étaient davantage des chaussures d’entraînement. Celui-ci est très compétitif. J’avais d’ailleurs la version Accelerate aux pieds lorsque j’ai récemment amélioré mon record personnel sur marathon (2 heures 22 minutes). Avec ce résultat, j’aurais fini aux alentours de la 20e place au marathon de Paris. Grâce au système Optivibe, j’éprouve les mêmes sensations sur le bitume que sur les sols meubles en pleine nature. C’est très agréable.»
Une fausse intuition Notre façon de courir augmenterait-elle les risques de blessure? Intuitivement, on serait enclin à le penser. Mais Richard Brindle, responsable du laboratoire de biomécanique de l’Université de Caroline du Nord, a voulu le vérifier dans les chiffres en analysant les résultats de 1927 articles scientifiques reliant les paramètres de la foulée (longueur, cadence, temps de contact au sol) et leur incidence sur les lésions. Conclusion? Notre intuition nous trompe. La première n’explique pas l’autre. Référence Correction to: Association Between Temporal Spatial Parameters and Overuse Injury History in Runners: A Systematic Review and Meta-analysis, dans Sports Medicine, novembre 2019.
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ZOOM_PHOTO EN OBSERVANT ATTENTIVEMENT UNE IMAGE, ON DÉCOUVRE UN TAS DE DÉTAILS QUI ÉCLAIRENT PARFOIS LE SPORT SOUS UN TOUT AUTRE PROFIL. CETTE PHOTO DATE DE L’ANNÉE PASSÉE. ELLE A ÉTÉ PRISE PENDANT LE MARATHON DE WUHAN EN CHINE. LA DERNIÈRE ÉDITION EN DATE PUISQUE CELLE DE 2020, PRÉVUE LE 12 AVRIL, A ÉTÉ LOGIQUEMENT ANNULÉE. POUR CAUSE D’ÉPIDÉMIE!
C
ette tour sert de repère aux habitants de Wuhan. Avec ses 311 mètres, elle est presque aussi haute que la Tour Eiffel (324 mètres) et fait office d’antenne-relais pour la télévision. Elle est construite au sommet de l’une des deux collines qui surplombent la ville: la butte de la Tortue et la butte du Serpent. Au pied de cette tour, on trouve un temple sacré, toujours habité par des moines bouddhistes. Ce voisinage entre spiritualité et technique de pointe est à l’image de cette cité tout en contrastes: très ancienne (Wuhan a été fondée sous la dynastie Han au IIIe siècle de notre ère), elle a connu ces dernières décennies un extraordinaire développement économique grâce au commerce et à la sidérurgie. Wuhan, qui compte aujourd’hui onze millions d’habitants, est le chef-lieu de la province de Hubei, 59 millions d’âmes.
_MARATHON DE WUHAN
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uhan est une ville d’eau. Elle a été construite à l’endroit précis où la rivière Han rejoint le Yang-Tsé-Kiang, le troisième fleuve le plus long du monde après l’Amazone et le Nil. On a du mal à le croire mais ces eaux grises viennent de l’Himalaya et se jettent dans le Pacifique à 500 kilomètres de là. Wuhan ne se situe pourtant qu’à trente mètres d’altitude. C’est dire le manque de relief des plaines alluviales de l’est de la Chine. La faiblesse du courant favorise évidemment le trafic fluvial. Chaque année, environ un million de containers transitent par le port de Wuhan!
L
e marathon de Wuhan existe depuis cinq ans. Il fait partie des 25 marathons organisés en Chine et chacune de ses précédentes éditions avait réuni environ 10.000 participants. Le tracé présente cette particularité de n’emprunter quasiment que des voies sur berges et de gigantesques ponts comme celui qui traverse le lac de l’Est au centre-ville ou celui-ci, long de 1670 mètres, qui enjambe le Yang-Tsé.
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a province de Hubei fut la plus touchée par l’épidémie du coronavirus Covid-19. L’immense majorité des 3000 victimes chinoises résidaient dans la province. Au plus fort de la crise, les autorités chinoises ont donc pris la décision d’isoler cette population du reste de la Chine et de leur interdire toute activité sportive, culturelle ou économique. Même les trains ont été arrêtés (NB: en temps normal, ceux-ci circulent à l’étage inférieur du pont). Selon
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LA MUSE_DU COACH ENVOYEZ-NOUS VOS QUESTIONS ET NOTRE ENTRAÎNEUR ROGER PRENDRA SA PLUS BELLE PLUME POUR VOUS RÉPONDRE.
IGO
Le courrier doit être adressé à la rédaction: info@zatopekmagazine.com ou directement via notre site www.zatopekmagazine.com. Vous pouvez y poster directement vos questions en cliquant d’abord sur l’onglet «vos réactions» et puis sur «exprimez-vous». Face à l’abondance de courriers, seuls les abonnés auront désormais le privilège d’une réponse longue et personnalisée. Il suffit de mentionner vos noms et prénoms. L’ancien sous-officier d’élite Roger Igo exerce le métier d’entraîneur depuis plus de trente ans. Fort de ses nombreux titres et distinctions en cross, sur route et en montagne, il vous apportera ses réponses.
Parcourez aussi notre grande bibliothèque de questions et de réponses. Vous y trouverez peut-être votre bonheur!
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LE MYSTÈRE DES MOLLETS DURS
Je me suis mis à courir en avril 2019, convaincu par tous les arguments en faveur du sport d’entretien. Aussitôt, cela s’est traduit par de terribles douleurs aux mollets qui m’ont d’abord fait boiter puis m’ont contraint à m’arrêter. Au toucher, mes muscles soléaires étaient durs comme de la pierre. Un médecin du sport m’a fait passer des tests qui mirent en évidence une raideur anormale des muscles postérieurs de la jambe. Je suis incapable de m’accroupir sans lever en même temps les talons du sol. On m’a prescrit des étirements, qui restent sans résultats jusqu’à présent. Mes mollets me font toujours autant souffrir. Que puis-je faire? Franck Notre réponse Rassurez-vous! Plein de gens sont incapables de se tenir accroupi en gardant les talons au contact du sol. En Asie et en Afrique, la position accroupie est très répandue et adoptée naturellement, quand on attend le bus par exemple. Ce n’est pas le cas en Europe et en Amérique, sans que cela soit le signe d’un quelconque problème articulaire. C’est juste une question d’âge, d’habitude, de souplesse naturelle et peut-être aussi de morphologie. Les personnes brachycormes (longues jambes, torse court) parviennent généralement moins bien à s’accroupir que les macrocormes (courtes jambes, torse long). Pour y arriver tout de même, il suffit soit de s’accrocher à un support, un banc par exemple, soit de prévoir des cales sous les talons comme on le fait souvent lors des squats. Cela dit, l’étirement des mollets est plus efficace en recourant au protocole de Stanish qui
Au nom de tous les gastrocnémiens
recommande, en cas de lésion, de ne pas laisser le muscle au repos et de le solliciter au contraire par beaucoup d’exercices excentriques (on en trouve beaucoup sur internet). William Stanish disait: «pas de douleurs, pas de progrès». Enfin, vous nous parlez de votre problème de contraction anormale des soléaires à l’effort. Plus vraisemblablement, il s’agit d’un problème aux muscles jumeaux (interne et externe) qui recouvrent le soléaire. Ces muscles sont parfois à l’étroit dans leur enveloppe aponévrotique et cette suppression empêche leur bonne perfusion sanguine. Les tissus sont asphyxiés, c’est ce qu’on appelle le syndrome des loges. Cette affection touche souvent des sportifs très entraînés en raison d’un phénomène de grossissement du muscle. Chez le sédentaire, elle connaît d’autres causes: thrombose, facture, compression exagérée de la jambe. Il faut poursuivre les investigations. Pour diagnostiquer un syndrome des loges, on compare les mesures de pression intramusculaire au repos (environ 15 millimètres de mercure) et après l’effort (30 et plus).
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CULTURE_CLUB MARATHON AU PAYS DU «GRAND SOLEIL»
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ans le monde de l’édition, il est assez rare que deux auteurs aient la même idée au même moment. C’est pourtant ce qui est arrivé au journaliste du Point Marc Nexon et à l›écrivain bisontin Jacky Schwartzmann. Tous les deux ont eu envie de participer au marathon de Pyongyang en Corée du Nord et de relater ensuite cette expérience. Leurs ouvrages sont sortis à quelques mois d’intervalle. Ils éclairent d’un jour assez angoissant le régime du «solaire» Kim Jong-un. Pourquoi solaire? Parce que les références à l’astre du jour sont légion dans la logorrhée des caciques du Parti du travail de Corée, qui décrivent leur président comme «le soleil de la nation», «le soleil du socialisme» ou carrément «le soleil du XXIe siècle». Première surprise: le marathon de Pyongyang n’est pas une création récente comme on pourrait le croire. Sa première édition a eu lieu en 1981. Certes, seuls les ressortissants nord-coréens et quelques Russes avaient le droit d’y participer au début. Depuis 2014, l’épreuve est néanmoins ouverte aux coureurs amateurs étrangers, ce dont profitèrent nos deux compères. «Si vous aviez la possibilité de voir de l’intérieur une dictature communiste post-soviétique, vous n’iriez pas, vous?», nous interroge Jacky Schwartzmann qui, pour ajouter un peu de piment à son aventure, précise qu’il n’avait jamais couru une aussi longue distance. Marc Nexon est un peu plus expérimenté en course à pied mais le concernant, l’inquiétude vient du fait qu’il a caché sa profession de journaliste au moment de sa demande
de visa, sans quoi celle-ci aurait probablement été refusée. Aux prises chacun avec leurs propres angoisses, les voici l’un et l’autre dans un bus affrété par un tour-opérateur britannique installé à Pékin pour une petite visite de la capitale. Sous haute surveillance, cela va de soi. La Corée du Nord compte cinq militaires pour cent habitants. Les consignes sont claires: interdiction de prendre en photo ces factions omniprésentes. Interdiction de chiffonner un journal qui aurait une photo de Kim Jong-un dans ses pages (mais ils en ont tous!). Pas question non plus d’aborder des questions politiques ou tout autre sujet qui fâche comme l’existence de camps de redressement, les essais d’armes nucléaires ou les purges au plus haut niveau de l’Etat. Enfin, quand les visiteurs sont invités à prendre en photo les imposantes statues du leader Kim Jong-un, de son père Kim Jong-il ou de son grand père Kim Il-sung, attention à ne pas leur couper une jambe ou un bras. Ce serait considéré comme un crime de lèse-majesté! On risque alors de cruelles représailles. Ici on pense évidemment au triste sort d’Otto Warmbier, un étudiant américain de 22 ans, condamné à quinze ans de travaux forcés pour avoir volé une affiche de propagande (*). Mystérieusement tombé dans le coma en cours de détention, il sera rapatrié aux Etats-Unis au bout d’un an et demi de détention et décédera six jours plus tard.
Dans ce contexte oppressant, on comprend que le marathon proprement dit ait été vécu par les deux auteurs comme un moment de libération. «Après ces journées d’enfermement, courir est un pur délice», racontent les protagonistes. Chacun à sa façon, ils décrivent pourtant une impression de grande solitude, renforcée par le silence des larges avenues de Pyongyang pratiquement désertées de toute activité. En guise d’encouragements, les coureurs n’entendent que le martèlement de leurs propres pas sur le bitume. Finalement, Marc Nexon se contentera du semi. Quant à Jacky Schwartzmann, il terminera en quatre heures et trois minutes, soit trois minutes de trop pour avoir le droit de pénétrer dans le stade Kim Il-sung rempli de 50.000 personnes. Paraît-il. Julien Legalle (*) Otto Warmbier a-t-il été victime de mauvais traitements? Les autorités nordcoréennes prétendent qu’il a perdu connaissance après une attaque de botulisme. L’autopsie pratiquée aux EtatsUnis n’a pas permis de trancher cette question.
A lire La traversée de Pyongyang, par Marc Nexon, éd. Grasset, 2020 Pyongyang 1071, par Jacky Schwartzmann, éd. Paulsen, 2019
LA DIPLOMATIE DU HOCKEY SUR GLACE Depuis son accession au pouvoir, Kim Jong-un utilise le sport à la fois pour moderniser l’image de son pays et pour renouer des relations avec son puissant voisin du sud. Aux Jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang en 2018, les deux Corée ont d’ailleurs engagé une seule et même équipe en hockey sur glace féminin. Le basket-ball féminin (aux Jeux d’Asie) et le handball masculin (aux Mondiaux) ont suivi, tandis qu’en tennis de table, les deux équipes ont fusionné juste avant les quarts de finale des Mondiaux 2018 qui auraient dû les opposer. Mieux encore: les deux Corée ont remis une candidature commune pour accueillir les Jeux olympiques de 2032. «Le sport est effectivement utilisé comme symbole d’un possible rapprochement», commente Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique. «Mais qu’on ne s’y méprenne pas. Les sportifs eux-mêmes n’ont rien à dire. Ils font juste partie de la mise en scène.» OB
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DES CHERCHEURS_QUI CHERCHENT
LE SPORT EN PILULE C’EST ÉVIDEMMENT LE RÊVE DE TOUTES LES ENTREPRISES PHARMACEUTIQUES: METTRE LA MAIN SUR LA MOLÉCULE QUI PERMETTRA DE COPIER LES BIENFAITS DU SPORT SANS DEVOIR EN FAIRE. CELA VOUS PARAÎT IMPOSSIBLE? LISEZ PLUTÔT!
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ans l’histoire de la pharmacologie, il arrive très souvent qu’en cherchant quelque chose, on découvre tout autre chose. Imaginez-vous la situation: vous avez perdu vos lunettes et vous retrouvez vos clés. Eh bien, c’est la même chose qui s’est produite quand on s’est aperçu que le sildénafil que l’on testait comme remède
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pour les angines de poitrine était surtout efficace contre les défaillances érectiles. Le viagra était né! Pour la petite histoire, sachez qu’on a failli passer à côté de cette étonnante découverte. On la doit à un chercheur un peu plus curieux que les autres qui demanda aux sujets mâles engagés dans les études sur le sildénafil pourquoi ils insistaient tant pour poursuivre le traitement,
quand bien même celui-ci était décevant sur le plan thérapeutique. Et ce chercheur ne s’est pas contenté des explications évasives données par les premiers consommateurs. C’est en poursuivant ses investigations jusqu’à l’exacte vérité qu’il a abouti à la création du viagra. Cette aventure surprenante n’a rien d’inédit. Un tas d’histoires similaires président à la commercialisation d’un tas de médicaments comme le minoxidil (contre la chute des cheveux), l’acide valproïque (contre l’épilepsie) ou le propranolol (contre les taches de vin). En histoire des sciences, on appelle «sérendipité» ces conjonctions d’heureux hasards. Le terme vient d’un très ancien conte
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MUSCULATION_
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ON NE BOUGE
PLUS!
VOYEZ COMME CETTE POSTURE EST BIZARRE. ET POURTANT, MINE DE RIEN, ELLE POURRAIT AMÉLIORER NETTEMENT VOS PERFORMANCES EN COURSE À PIED. EN TOUT CAS, CE FUT LA CONCLUSION D’UNE ÉTUDE MENÉE EN IRLANDE SUR LA MEILLEURE FAÇON DE MUSCLER LES COUREURS.
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n 2017, des chercheurs de l’Université de Limerick en Irlande se sont interrogés sur les vertus de la musculation en course à pied. On le sait bien, celle-ci a longtemps eu très mauvaise presse auprès des coureurs dont l’obsession est de rester le plus léger possible. Ils craignent que les heures passées à soulever de la fonte ne se traduisent en une prise de poids qui les pénaliserait. Ils ont tort! Pour prendre de la masse, la musculation seule ne suffit pas. Il faut aussi des doses massives de protéines et d’hormones. Nous sommes tous
impressionnés par les corps sculpturaux des culturistes alors que ceuxci n’ont rien de naturel! Impossible de produire autant de muscle sans le recours aux poudres de protéines et aux hormones de synthèse. Cette assertion fera peut-être hurler au sein du cénacle herculéen, mais c’est l’exacte vérité. Alors que sans protéines ni hormones, les exercices transforment bel et bien la musculature et accroissent la force, mais sans modifier le poids de forme (*).Voilà pourquoi la musculation ne pénalisera pas les coureurs qui s’y adonnent.
Au contraire! Plusieurs études montrent qu’elle peut se révéler très bénéfique. Un exemple? Pour l’étude irlandaise évoquée plus haut, vingt bons coureurs d’endurance ont été divisés en deux sous-groupes (1). (*) Lorsqu’on s’entraîne avec des poids, on voit sa force croître à raison d’environ un pourcent par séance. Cette progression rapide est difficile à expliquer. On suppose que cette amélioration est due à une meilleure commande neuromusculaire. Avec l’entraînement, on serait plus apte à mobiliser efficacement un grand nombre de fibres musculaires.
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COUP_DE GUEULE
HOLD-UP
SUR LE TRAIL!
A L’ORIGINE, ON S’EST MIS À COURIR DANS LA NATURE POUR FUIR LES CODES TROP STRICTS DES INSTITUTIONS SPORTIVES. C’EST DIRE S’IL EST DÉSOLANT DE VOIR LE TRAIL PRIS DÉSORMAIS EN OTAGE PAR UNE POIGNÉE DE DÉCIDEURS CUPIDES. COUP DE GUEULE!
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hassez le naturel, il revient au galop», dit une expression populaire. Elle s’applique admirablement à l’histoire du trail qui, dans un premier temps, a voulu s’affranchir de la tutelle encombrante des fédérations et qui se retrouve, quelques décennies plus tard, dans une situation inextricable où une femelle chamois ne retrouverait plus ses petits. Dans cet article, nous démontrerons que la faute incombe principalement à une organisation connue sous l’acronyme d’ITRA (Association internationale de trail running). Officiellement, l’ITRA se présente comme une association sportive internationale chargée de promouvoir le trail. Dans la réalité, c’est devenu une grosse machine à faire du cash. Son histoire débute en septembre 2012, lorsqu’il devint évident que le succès du trail nécessitait un encadrement plus solide, ne
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serait-ce que pour se mettre d’accord sur un calendrier commun et décider d’une nomenclature sérieuse pour les grands championnats internationaux. Notez qu’à sa naissance, il existait déjà des institutions comme l’Association mondiale d’ultra (IAU) ou l’Association mondiale de course en montagne (WMRA). Les pionniers de l’ITRA auraient pu se servir de leur expérience. Mais non. Ils ont préféré partir de zéro et, dans un premier temps, prirent donc langue avec tout le petit monde du trail: organisateurs, équipementiers,
athlètes, fédérations. Dans le lot, on trouvait même des associations sans lien direct avec le sport mais qui avaient perçu tout ce que le trail pouvait leur apporter, par exemple sur un plan touristique. Au départ, l’initiative était clairement francofrançaise mais, très vite, ceux qui la soutenaient se sont efforcés de rallier à leur cause des acteurs venus d’autres pays et d’autres continents afin de former, tous ensemble, cinq groupes de travail qui se sont donné pour objectif de structurer la discipline. Le projet prenait donc bonne figure puis, soudain, tout est devenu très opaque. Aujourd’hui, l’ITRA fonctionne en vase clos. L’association s’apparente à un club privé avec 14 membres choisis selon des critères totalement arbitraires (*). Les mandats ne sont pas limités dans le temps. En cas de départ de l’un des leurs, les statuts précisent qu’il sera remplacé par une personne cooptée
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CAH I E R TECH N IQU E
SOMMAIRE
Édito On court pour se sentir bien. Cela n’a pas toujours été le cas.
1 Édito 2 Actualités Science 6 À vos agendas
Au tournant des années 1980, le capitalisme triomphant dessine les contours d’une société d’extrême concurrence. Dans la vie, on gagne ou on perd. Dans le sport aussi. Le temps de la course liberté est passé. On est entré dans l’air des frappeurs. On vit pour gagner. La compétition est une valeur sociale cardinale. 40 années sont passées. Les vainqueurs ont prospéré. 26 familles détiennent autant d’argent que 3 milliards 700 millions de personnes. En mars, les championnats d’Europe de biathlon se sont déroulés à Taubichi. Ils devaient se tenir à Otepää en Estonie, mais le manque de neige a contraint les organisateurs à déplacer la com-
COUREZ OU
MARCHEZ
POUR
PARTOUT EN FRANCE
à Paris et en région le 17 mai à Toulouse et Marseille le 24 mai à Bordeaux le 7 juin
pétition en Biélorussie où il n’y avait… pas de neige. Juste un fin bandeau blanc entouré de vert, posé là par quelques centaines de camions dont on se dit qu’ils n’aident pas que tombe la neige. Les années 80 sont passées. La neige "y’en a plus". Le stress "y’en a trop". 52 % des Français se rendent au travail dans un état élevé d’anxiété. Trop d’informations à traiter, trop complexes, trop vite. Une étude mondiale menée par l’application Strava révèle qu’à
L'EAU
présent, on court moins vite pour se sentir bien. 80 % des coureurs citent au moins une motivation liée au bien-être et à la santé.
Chaque pas que vous ferez, c’est un de moins qu’elle aura à faire i À partir de 16 €, déductible de vos impôts à hauteur de 66%. Inscrivez-vous sur : www.visiondumonde.fr/global-6k-for-water
Peu avant, on courrait pour se dépenser. À présent, on court pour récupérer. Comme on perçoit un lien pas si lointain qui unit les centimètres de neige et les kilos de stress, on change nos motivations. On dit que l’intelligence est la capacité à s’adapter bref à favoriser ce qui nous construit contre ce qui nous détruit. Il serait sympa qu’on le soit, en courant, lentement. Cyrille Gindre
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MAI JUIN JUILLET 2020 LOCOMOTIVE
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VOYAGE_VOYAGE
TROIS COURSES DE LÉGENDE A LA FIN DU MOIS D’AOÛT, LA DESCENTE DE LA LESSE FÊTERA SA QUARANTIÈME ÉDITION. POUR CÉLÉBRER CET ANNIVERSAIRE, UN CHALLENGE A ÉTÉ CRÉÉ QUI ASSOCIE CETTE ÉPREUVE À DEUX AUTRES COURSES MYTHIQUES DU CALENDRIER: LE MARVEJOLS-MENDE ET LA MONTÉE DU POUPET. PAS BESOIN DE S’INSCRIRE IL SUFFIT DE PARTICIPER AUX TROIS ÉPREUVES. A DINANT, À L’ISSUE DE LA 3E, LE PREMIER CONCURRENT MASCULIN, LA PREMIÈRE FÉMININE ET UN PARTICIPANT AUX TROIS MANCHES TIRÉ AU SORT SERONT RÉCOMPENSÉS. POUR NOUS, C’EST SURTOUT L’OCCASION DE REMONTER LE TEMPS ET NOUS APERCEVOIR À QUEL POINT CE QU’ON APPELAIT «JOGGING» A CHANGÉ EN QUARANTE ANS! Olivier Beaufays
MARVEJOLS-MENDE
LA DESCENTE DE LA LESSE
LA MONTÉE DU POUPET 54_ZATOPEK 35
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HISTOIRE_VRAIE
LES HELVÈTES UNDERGROUND LA SUISSE AUSSI A MILITÉ ACTIVEMENT EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DES COURSES HORS-STADE. DANS LES VILLES, BIEN SÛR, MAIS SURTOUT EN MONTAGNE!
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ans un numéro précédent, nous avions conté l’histoire de la course MoratFribourg, créée en 1932 à l’instigation de l’artiste bernois Adolf Flückiger qui courait le jour et peignait la nuit (*). D’abord réservée aux membres du ski-club local, elle sera ouverte à tout homme dès 1933 puis aux femmes et aux plus jeunes à partir de 1977. Elle ne sera annulée qu’à une seule occasion, en 1939 en raison du déclenchement de la Deuxième guerre mondiale. Aujourd’hui, chaque édition de la Morat-Fribourg accueille plus de 6000 participants. Cela fait du monde! Pourtant, elle ne peut pas prétendre au titre de course la plus populaire de Suisse. Cet honneur revient à une de ses consœurs romandes, genevoise pour être plus précis. En effet, chaque année au début du mois de décembre, plus de 45.000 coureurs sillonnent les rues du vieux Genève dans le cadre de la célèbre Course de l’Escalade. Un tel succès est miraculeux quand on pense que l’événement a vu le jour en 1977 pour renflouer les finances du Stade de Genève, un club d’athlétisme alors tout proche de mettre la clé sous le paillasson. «Nous avons d’emblée créé une école des jeunes,
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mais il fallait trouver un moyen de la financer», raconte Jean-Louis Bottani qui, avec quelques autres athlètes, tenta à l’époque de sauver le club. Que faire? «On a d’abord voulu créer un meeting d’athlétisme», se souvient-il, «mais nos voisins lausannois avaient eu la même idée un an plus tôt. Pas question de marcher sur leurs plates-bandes.» C’est alors qu’un des adhérents du Stade suggéra la création d’une course… hors-stade. «Etant moi-même abonné depuis le premier numéro à la revue Spiridon, j’ai trouvé l’idée No Pasaran
excellente. A une condition toutefois: que cette nouvelle course contraste avec l’austérité souvent affichée des autres épreuves du calendrier. Que ce soit quelque chose de vraiment festif! Voilà comment est venue l’idée de l’adosser à la principale fête de la ville de Genève, celle de l’Escalade.» Chaque année, cet événement commémore la victoire en décembre 1602 des Genevois sur les troupes de Charles-Emmanuel Ier duc de Savoie, qui ne parvinrent jamais à escalader les enceintes de la ville. Le nom était donc tout trouvé: ce sera la Course de l’Escalade! Mais malheureusement… «nous avions déjà reçu toutes les autorisations nécessaires et imprimé les flyers quand le comité d’organisation des Fêtes de l’Escalade a mis son veto», raconte Jean-Louis Bottani. Sous quel prétexte? Selon cette institution, l’esprit carnavalesque que le comité du Stade de Genève souhaitait donner à l’épreuve se mariait difficilement avec la rigueur toute calviniste de l’Escalade. Décision fut donc prise de déplacer la course d’une semaine. Dès la première édition, ce fut un succès, d’autant que les organisateurs eurent l’heureuse surprise de recevoir des coureurs britanniques, ce qui donna d’emblée un petit cachet
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SEXE_ET SOCIÉTÉ
DAME
NATURE AUTANT LE DIRE TOUT DE SUITE, IL FAUDRA APPRENDRE À VIVRE AVEC DEUX NOUVEAUX SUFFIXES DANS LE MONDE DE DEMAIN: «TRANS» ET «CIS». LA NUANCE? DISONS QUE LES HOMMES ET LES FEMMES «CIS» SE SENTENT BIEN DANS LEUR SEXE BIOLOGIQUE DE NAISSANCE. POUR LES «TRANS», C’EST L’INVERSE.
B
o Van Spilbeeck (61 ans) portait autrefois le prénom de Boudewijn (Baudouin en français) et travaillait comme grand reporter à la VTM, une chaîne de télévision belge néerlandophone. Son changement de sexe, il y a deux ans, eut un énorme retentissement. Pas seulement en Belgique, du reste. Les médias du monde entier s’en sont fait l’écho tellement il est rare qu’une personnalité publique ose dévoiler un problème aussi intime qu’une dysphorie de genre. Boudewijn couvrait l’actualité de pays en guerre. Il était spécialiste des questions d’armement. Il faisait beaucoup de sport. Autant d’activités présumées viriles, mais il ne s’aimait guère en homme. Il a donc choisi de changer de sexe et raconte cette métamorphose dans son livre Comment je suis devenue Bo (éd. Les Arènes, 2019).
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RENCONTRE_
MÉDECIN DES VOIX
CLAUDE FUGAIN EST PHONIATRE, AUTREMENT DIT MÉDECIN SPÉCIALISÉE DANS LES PROBLÈMES DE VOIX. AU COURS DE SA LONGUE CARRIÈRE, ELLE A SOIGNÉ DE NOMBREUSES PERSONNALITÉS COMME JEANNE MOREAU, MURIEL ROBIN, PHILIPPE NOIRET, ANNE PARILLAUD, GUILLAUME GALLIENNE OU QUELQUES TRANSGENRES. ET MÊME DES SPORTIFS!
QU’EST-CE QUI FAIT LA DIFFÉRENCE ENTRE VOIX D’HOMME ET DE FEMME?
C’est une question de volume, dont dépend la tonalité. Les voix masculines, plus graves en général, tournent autour de 100 hertz et les voix féminines, plus aiguës, autour de 200 hertz. Evidemment, ce sont des moyennes. Il existe des femmes à la voix grave et des hommes à la voix aiguë. C’était le cas de Guillaume Gallienne que j’ai reçu dans mon cabinet quand il avait 18 ans à peine. Il n’était pas le comédien que l’on connaît aujourd’hui. A l’époque, c’était encore un jeune homme très pâle et à l’attitude générale plutôt maladroite. Il se caractérisait surtout par une voix légère comme une plume, sans timbre, et d’une grande immaturité. Il était aussi capable de parler exactement comme sa mère Melita qu’il aimait beaucoup et à laquelle il voulait absolument ressembler. Il raconte tout cela dans sa pièce de théâtre Les Garçons et Guillaume, à table! (ndlr: dont il a tiré un film à succès sorti en 2013). Son exemple montre
bien que la voix n’est pas seulement une affaire d’appareil vocal. La psychologie joue un très grand rôle. PEUT-ON DIRE QUE LA VOIX REFLÈTE AUSSI L’HUMEUR DE LA PERSONNE?
Bien sûr. La voix trahit notre état d’esprit. On perçoit ça au téléphone. On peut deviner l’état psychique de la personne juste à sa façon de dire «allô?». C’est suffisamment explicite pour qu’on puisse répondre «dis donc, tu as l’air en forme!» ou au contraire «ah ben alors, qu’estce qui ne va pas?».
EST-IL POSSIBLE DE TRICHER?
On peut toujours essayer de tricher. C’est ce que font les acteurs lorsqu’ils montent sur scène et changent d’humeur à volonté. Mais maîtriser vraiment les inflexions de la voix est très difficile. Il faut savoir que les sons qu’on émet dépendent de l’activité de quelque 300 muscles et que cela implique tout notre être: notre posture, notre respiration, nos émotions. Tout compte dans la voix.
Guillaume Gallienne, la voix de sa mère EXISTE-T-IL UNE VOIX DE SPORTIF?
Les sportifs ont du souffle. Cela devrait les doter d’une voix puissante qui portera loin. Mais dans la réalité, ce n’est pas toujours le cas. C’est même souvent le contraire. J’ai soigné un coach de rugby qui trouvait sa voix trop haut perchée pour assumer correctement sa fonction. Cette voix de tête le desservait pour asseoir son autorité auprès des joueurs. Le problème peut se poser aussi pour des footballeurs. Je pense ici à David Beckham qui a changé de voix par rapport à ses débuts. Même chose pour l’entraîneur des Bleus, Didier Deschamps. Il avait une voix de canard en début de carrière, nasillarde, un peu aiguë, assez désagréable. Elle est plus posée aujourd’hui. Je suis pratiquement sûre qu’il a réalisé un travail vocal et un travail de prise de parole.
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COURSE_D’ORIENTATION
LA TRIB
DES DÉSOR
A L’HEURE OÙ L’ON CONÇOIT DES APPAREILS DE GÉOLOCALISATION D’UNE ADMIRABLE PRÉCISION, UN SYSTÈME D’ORIENTATION CONSERVE ENCORE TOUS SES SECRETS: LE NÔTRE! 52 ZATOPEK_54
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e 8 juin 2019 à La Chapelle-en-Vercors, commune située dans le Parc naturel régional du Vercors au pied des Alpes, un petit groupe de trentenaires assis dans l’herbe se prélasse au soleil en se passant chips et saucisson au-dessus d’une grande carte IGN qui leur sert de nappe. Ils s’apprêtent à prendre part à une course d’orientation d’une trentaine de kilomètres affichant environ mille mètres de dénivelé positif. Les discussions tournent naturellement autour du sens de l’orientation. «Facile!», dit le plus aguerri à ses camarades. «La première chose est de savoir décrypter la carte. Pour cela, les couleurs jouent un rôle central: le bleu pour l’eau, le vert pour les parties boisées, l’orange pour le terrain à découvert. Puis il y a les repères faciles comme les ruisseaux ou les lignes de crête. Rappelez-vous que l’eau coule toujours du haut vers le bas. Donc le sens opposé des lignes des crête.» L’eau coule du haut vers le bas, on promet de s’en souvenir. «Ensuite, il faut repérer les courbes de niveau, en orange sur la carte. Plus elles sont rapprochées, plus elles indiquent une pente raide.» Tout le monde acquiesce. Et que fait-on de la boussole? «Il faut la placer le long de la ligne entre le point de départ et le point d’arrivée et bien vérifier que la flèche de visée indique la direction suivie. Dans certains cas, on devra utiliser la stratégie du biais ou de l’erreur volontaire. C’est-àdire qu’on prend une direction erronée pour venir volontairement buter un élément de terrain remarquable puis, en y arrivant, selon le point cardinal qu’on avait suivi, on sait si l’on doit partir à gauche ou à droite. Par exemple, on suit une rivière de manière à tomber sur le point voulu.» Là, vraiment, le participant aguerri impressionne tout le monde. «C’est intelligent ce que tu dis!», intervient une des filles du groupe. «Ouais, j’ai lu ça sur les forums», répond-il.
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SPORT_ET CERVEAU
COURIR AMÉLIORE-T-IL
LA MÉMOIRE?
A PRIORI, ON NE VOIT PAS BIEN LE RAPPORT ENTRE LA COURSE À PIED ET LA MÉMOIRE. POURTANT CE LIEN EXISTE BEL ET BIEN. LES ÉTUDIANTS PEUVENT MÊME S’EN SERVIR POUR MIEUX RÉUSSIR LEURS EXAMENS. LE SECRET? IL FAUT APPRENDRE LA MÉTHODE DES LOCI.
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u sein de notre espèce, mémoire et mouvement sont indéfectiblement liés. «Je pense d’abord avec mon corps», disait Léonard de Vinci. A moins que ce ne soit Einstein, Sigmund Freud ou encore Henri Poincaré. C’est le genre de citation qu’on prête facilement aux grands génies du passé, peu importe leur auteur véritable. Intéressons-nous plutôt au sens de cette expression plutôt sibylline. «Je pense d’abord avec mon corps» signifie que lorsqu’on demande à quelqu’un d’imaginer quelque chose, une pomme par exemple, il y a de fortes chances pour qu’il prenne en compte le poids de la pomme en question, sa texture, la façon dont elle se calera dans la main, la force qu’il faut appliquer pour enfoncer ses dents dans sa chair et éventuellement son goût. Bref, une pomme est indissociable d’un ensemble de sensations charnelles et il
en ira de même pour presque toutes les autres idéations. «La pensée n’est pas dans le cerveau comme la confiture dans un pot», résume Alain Prochiantz, directeur du Collège de France. «Elle appartient à l’ensemble du corps.»
Vous êtes ici Lorsqu’on en vient à parler de mémoire, la relation avec le corps est plus évidente encore. Notre mémoire se bâtit avant tout sur des sensations. En tout cas, c’est comme cela qu’elle s’est construite au fil des millénaires. Vous en doutez? Imaginez-vous un instant à l’époque préhistorique à la poursuite d’une grosse proie. Un mammouth laineux, par exemple. Vous traquez la bête pendant des heures, parfois des jours. Puis vous la tuez. Vous pourriez croire que votre boulot est terminé. Pas du tout! Il va vous falloir la dépecer puis vous coltiner les morceaux de viande jusqu’au camp et pour cela retrouver votre chemin dans la brousse. Sans GPS, sans plan, sans boussole! Au
fil des générations, notre espèce a donc acquis une formidable capacité à graver des détails de l’environnement dans sa mémoire afin de se tirer d’affaire dans presque toutes les situations. Par le passé, cette faculté était vitale. Aujourd’hui, on possède des outils perfectionnés pour faire le travail à notre place et cette mémoire géographique ne nous sert plus à rien. Sauf évidemment si on la détourne de sa fonction originelle et qu’on s’en sert pour d’autres usages comme le font tous ceux qui participent aux championnats du monde de la mémoire. Si, si, ça existe!
Cinq cartes à la seconde! Depuis plus de 25 ans, de grands concours internationaux sont organisés, dans lesquels des concurrents s’affrontent pour savoir lequel possède la meilleure mémoire. Comme en athlétisme, on peut choisir sa discipline ou tenter plutôt de briller au classement général. Les disciplines en question consistent par
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PETER SNELL, LE SURDOUÉ
LA DISTRIBUTION DES TALENTS EST L’UNE DES CHOSES LES PLUS INÉQUITABLES SUR TERRE. LA PLUPART DES GENS EN SONT DÉPOURVUS. D’AUTRES LES COLLECTIONNENT. COMME PETER SNELL.
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o Bugles No Drums (Sans tambour ni trompette): le titre que le Néo-Zélandais Peter Snell a choisi pour son autobiographie parue en 1965 en dit long sur sa personnalité. Le triple champion olympique (800 mètres en 1960, 800 et 1500 mètres en 1964) y raconte son histoire, celle d’un enfant avide de reconnaissance qui, par chance, excelle dans presque toutes les disciplines sportives: tennis, rugby, golf, cricket, badminton et hockey sur gazon. La course à pied? Il n’y pensera pas jusqu’au jour de sa rencontre avec l’entraîneur Arthur Lydiard dont le nom deviendra indissociable de
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Excellent pongiste, Snell a remporté le championnat du Texas dans la catégorie "Seniors" en 2017.
celui du futur champion. Mais n’allons pas trop vite en besogne. Au début de leur collaboration, le jeune Peter Snell ne songe pas à faire carrière sur la piste. Pour lui, les entraînements en course à pied ne sont qu’un moyen de s’aguerrir et d’augmenter ses chances de percer ensuite dans un de ses autres sports de prédilection: le tennis peut-être, ou mieux encore, le rugby! Comme tous les petits Néo-Zélandais, Peter Snell rêve d’intégrer un jour l’équipe nationale de rugby, les redoutables «All Blacks». Chose curieuse pour un futur coureur de demi-fond, son gabarit n’aurait pas dépareillé avec celui des rugbymen. Peter Snell mesurait 1,80 mètre pour 80 kilos.
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