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Hors-sĂŠrie City magazine Gratuit
Circuler autrement Construire ensemble Consommer mieux
En partenariat avec
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Crédit photo : Getty Images - shapecharge
Le pouvoir d’agir ensemble sur l’essentiel.
La Macif est une entreprise de l’économie sociale. Sans actionnaires à rémunérer, la Macif réinvestit ses profits au bénéfice de ses 5 millions de sociétaires et dans l’intérêt commun. Ainsi, les sociétaires ont le pouvoir d’agir ensemble pour une économie plus sociale et plus solidaire.
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chicmedias * c'est Ott ! * chicmedias imprime tous ses magazines, livres et autres publications en Alsace (chez Ott Imprimeurs à Wasselonne) et met en avant les talents de la région.
Le bureau 12, rue des Poules 03 67 08 20 87
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Z U T CIT IZ
Ours
Zut team
Contri— buteurs
Directeur de la publication et de la rédaction Bruno Chibane
Rédacteurs Emmanuel Abela Cécile Becker Marie Bohner Juliette Comte Sonia de Araujo Sylvia Dubost Paul Kempenich Caroline Lévy Séverine Manouvrier Aurélien Montinari
Rédactrice en chef Cécile Becker Cheffe de projet Céline Loriotti Design graphique Clémence Viardot Relectures Léonor Anstett Sylvia Dubost
Zut x Citiz
Photographes Dorian Rollin Christophe Urbain Henri Vogt Sandro Weltin Illustratrice Claire Perret
Ce hors-série est co-réalisé par chicmedias et Citiz Alsace et édité par chicmedias chicmedias 12, rue des Poules 67000 Strasbourg 03 67 08 20 87 www.chicmedias.com Citiz Alsace 5, rue Saint-Michel 67000 Strasbourg 03 88 23 73 47 www.alsace.citiz.coop Tirage : 7000 exemplaires Dépôt légal : mars 2017 ISSN : 1969-0789 Administration administration@chicmedias.com Contact contact@chicmedias.com Zut team prenom.nom@chicmedias.com
Diffusion Team Citiz
Comité éditorial Emmanuel Abela Cécile Becker Sylvia Dubost Céline Loriotti Jean-Baptiste Schmider Jean-François Virot-Daub
Impression sur papier Offset Coral Book 1.2 blanc certifié PEFC 100% Ott imprimeurs Parc d’activités « Les Pins » 67319 Wasselonne cedex
Commercialisation Bruno Chibane Arthur Janus Caroline Lévy Céline Loriotti Jean-Baptiste Schmider Jean-François Virot-Daub
10-31-1436 PEFC Certified www.pefc.org
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Pour votre satisfaction, nous nous sommes engagés au quotidien avec de nombreux producteurs régionaux.
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QUALITÉ & PROXIMITÉ
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Sommaire
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Circuler autrement les mobilités alternatives
10 12
29
CONTEXTE
32
PORTRAITS
36
INITIATIVES
ÉDITORIAL GLOSSAIRE RESPONSABLE
14
Citiz des valeurs
et des hommes
14
18 20
INTERVIEW CROISÉE
Jean-Baptiste Schmider, co-fondateur et directeur du réseau national Citiz, et Jean-François Virot-Daub, directeur de Citiz Alsace.
CITIZ EN CHIFFRES ET EN LETTRES LES 3 FAMILLES CITIZ
Le conseil d’administration, l’agence et l’équipe technique.
24 26
CITIZ ET YEA! Mode d’emploi illustré.
CITIZ VU PAR SES UTILISATEURS
6
42
Voiture et politiques de transport, avec Olivier Razemon, journaliste spécialiste des mobilités urbaines.
Valérie Bach, François Colin, la famille Roy et Stéphane Becker : quatre utilisations de Citiz pour quatre profils mobilités.
Le cas Strasbourg, les mobilités transfrontalières en Alsace, Rustine et Burette, Lignes de ville, Samocat, Congrès ITS Europe, les vignettes Critair, des trucs et des astuces…
CITIZ VU PAR SES UTILISATEURS
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DANS LES PARKINGS PARCUS DE STRASBOURG DES PLACES SONT DÉDIÉES À L’AUTOPARTAGE CITIZ.
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Sommaire
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Consommer mieux
le carnet d’adresses 44
Construire ensemble
60 62
l’économie sociale et solidaire
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CONTEXTE
L’ESS à Strasbourg, avec Jeanne Barseghian, conseillère de l’Eurométropole, déléguée « soutien à l’économie sociale et solidaire ».
PORTRAITS
Gros plan sur deux partenaires de Citiz : l’AJA et la Maison de l’emploi.
68 70
REPORTAGE
Au petit marché d’Alsace.
BOIRE, MANGER
Le Maquis, Le bocal, Coffee Stub, La torré, Le Comptoir à manger, les supermarchés responsables et les bonnes adresses du vin.
SE POMPONNER
Magic Pyq Pyq.
DÉCORER, S’HABILLER, AMÉNAGER Le générateur, Fibres & Formes, Forgiarini.
72 74
APPRENDRE Le Shadok.
CITIZ VU PAR SES UTILISATEURS
INITIATIVES
Pierre Hoerter, les coopératives, les Jardins de la montagne verte, Libre objet, Idée Alsace, Alsace Active, Vortex X, Horizome, Crésus, des trucs et des astuces…
56 CITIZ VU PAR
SES UTILISATEURS
Rêver demain un futur meilleur 76
80 8
REPORTAGE
Championne du monde en transition écologique, Ungersheim est réinventée chaque jour par son maire, Jean-Claude Mensch et ses habitants. Reportage.
FICTION
Récit d’anticipation sur un avenir possible.
> agir au cœur de vos vies
à l’Hôtel du département à strasbourg Programme et inscription sur : bas-rhin.fr/smart-city-day
CD Bas-Rhin • ©fotolia
chefs d’entreprises, dirigeants associatifs, élus de collectivités, Le département du Bas-rhin et ses partenaires vous invitent au premier
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Édito
Vivre autrement Par Cécile Becker / Zut et Jean-Baptiste Schmider, co-fondateur et directeur de Citiz
I
l y a un peu plus de 17 ans, une idée germait dans la tête de quelques illuminés strasbourgeois : « Et si on se débarrassait de nos voitures ? » Il s’agissait d'en partager l’usage pour y avoir recours uniquement en cas de besoin. Illuminés, mais pas fous ! Le projet Auto’trement était né, il grandira et deviendra bientôt Citiz, le premier réseau d’autopartage coopératif de France. Ce hors-série Zut, construit en partenariat avec Citiz Alsace, revient sur cette belle aventure. Il a été pensé comme un manifeste rassemblant toutes les valeurs de la coopérative. Il s’agissait évidemment de parler de ces hommes et ces femmes qui, quotidiennement, font de Citiz ce qu'elle est, mais aussi de rendre hommage autant à ses utilisateurs – dont certains ont adhéré au service depuis ses débuts – qu’à ces porteurs de projets et d’idées qui s’activent pour construire un monde plus respirable, plus juste et plus solidaire. Parce que choisir Citiz, c’est non seulement renoncer à la sacro-sainte voiture solo, mais aussi repenser nos manières de nous déplacer, privilégier la proximité, relocaliser ses activités près de chez soi ou de son travail, sentir et vivre la ville plus intensément, consommer autrement aussi. On choisit Citiz, et puis on en vient à dire à ses amis que le partage est parfois plus important que la possession, qu’il est possible de choisir d’habiter la ville en partageant des espaces communs, une buanderie, un atelier ou une salle de réunion… On devient un citadin citoyen. À deux pas, il y a des commerçants, des initiatives, des restaurants, des habitants qui chaque jour font la ville. Célébrer la ville, ses talents et ses particularités, cet art de la vivre, de sortir, de s’habiller, d’aller à la rencontre de l’autre, c’est justement l’objet de Zut, city-magazine qui a aussi fait le choix d’imprimer chacun de ses numéros en Alsace – Ott imprimeurs à Wasselonne –, à l’heure où la presse favorise les voisins européens pour rationaliser ses coûts. Zut se construit avec et pour ses habitant.e.s. Citiz a choisi Zut pour ce regard urbain, Zut a choisi Citiz pour sa vision d’une autre ville : une ville à vivre pour longtemps !
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Avant-propos
Glossaire responsable Par Cécile Becker
Dans les pages de ce hors-série, se décline tout un vocable lié à la coopérative Citiz, au développement durable et à la solidarité. Éclairage nécessaire sur des notions pas toujours très claires.
— AMAP
Association(s) pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne. Partenariat entre un groupe de consommateurs et un producteur basé sur un système de distribution de paniers composés des produits d’une ferme – parfois plusieurs. Ce partenariat est une forme de contrat solidaire : le consommateur s’engage et paye à l’avance une partie de la production sur une période définie, en échange de produits frais, de saison et généralement – pas toujours – bio. C’est un moyen de participer au commerce de proximité et surtout, de garantir des revenus justes au paysan.
— Démocratie participative
Dispositif fourre-tout de plus en plus adopté et mis en avant par les institutions et les collectivités. Elle peut prendre différentes formes – conseils de quartier, conseils de développement, conseils consultatifs, votes de budgets, concertations sur des projets urbains, etc. – censées transformer l’action publique par la participation citoyenne. Les effets de cette participation sont difficilement mesurables et bien souvent limités par un certain nombre de questions : les participants sont-ils politisés ? Les différentes classes sociales sont-elles représentées ? S’expriment-elles de la même façon ? Que devient la place de l’élu.e ? Comment arrêter une décision ?
— Développement durable
« Répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs.» Rapport Brundtland, 1987. Le développement durable vise à concilier intérêt économique, préservation de l’environnement et des ressources naturelles et amélioration des conditions sociales.
— Circuit court
Mode de commercialisation, notamment de produits agricoles, qui s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur, soit par la vente indirecte, à condition qu’il n’y ait qu’un seul intermédiaire.
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— Économie sociale et solidaire
Ce terme, difficile à circonscrire en une définition immuable tant ses manifestations sont diverses, regroupe acteurs (collectivités, particuliers, entreprises…) et organisations (associations, SARL, coopératives…) menant des activités variées allant de l’insertion professionnelle aux manifestations culturelles et sportives, en passant par le commerce équitable ou l’aide aux personnes âgées. De manière générale, l’ESS vise à encourager la solidarité entre les citoyens. Depuis la crise financière de 2008, cette économie tend à se développer de manière exponentielle. L’ESS représente aujourd’hui 2,3 millions de salariés (200 établissements) et 10% de l’emploi en France, et concerne particulièrement les secteurs du social, de la santé, du commerce, des services (banque, assurance, administration) ou du développement durable.
— Empreinte carbone
Indicateur qui vient mesurer la pression exercée par une population en termes d’émissions de gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, perfluorocarbures, etc.). Le résultat est présenté en tonnes équivalent carbone ou dioxyde de carbone : t eq. C ou t eq. CO2.
— Habitant
« Quelqu’un qui, de l’intérieur, participe au monde en train de se faire et qui, en traçant un chemin de vie, contribue à son visage et à son maillage. Même si ses lignes sont généralement sinueuses et irrégulières, leur entrecroisement forme un tissu uni, aux liens serrés. » (Tim Ingold, anthropologue)
— Mobilités alternatives
Tous moyens de déplacements permettant de transférer le trafic automobile vers des modes de transport respectueux de l’environnement humain et naturel. Derrière cette notion, il s’agit aussi d’intervenir sur l’espace public pour prévoir des lieux attractifs et conviviaux. Lorsqu’on parle de mobilités alternatives (ou écomobilités, ou mobilités durables), on parle donc aussi d’aménagement urbain.
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Team C i t iz Citiz | Interview | Boire, manger
Vers un nouveau paradigme Par CĂŠcile Becker Photo Christophe Urbain
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Citiz n’est pas une entreprise comme les autres. Pionnière française en lançant à Strasbourg un service d’autopartage aujourd’hui étendu à plus de 80 villes, elle est aussi une coopérative œuvrant, en marge de l’hypercapitalisme, pour les mobilités alternatives, une consommation responsable, un mode de pensée plus solidaire. Interview croisée de Jean-Baptiste Schmider, co-fondateur et directeur de réseau national, et de Jean-François Virot-Daub, directeur de Citiz Alsace.
Quelles étaient vos intentions lorsque vous avez créé l’association Auto’trement ? Jean-Baptiste Schmider — D’abord de me débarrasser de ma voiture ! Je l’utilisais tellement peu que je ne me souvenais jamais de là où je l’avais garée. Je me suis dit que c’était complètement irrationnel d’avoir un objet qui coûte si cher, qui encombre l’espace, qui passe son temps à dormir et qui pollue. Ma deuxième intention était, en partageant les voitures, d’en rationnaliser l’usage, de réduire leur nombre et d’améliorer la qualité de vie en ville. En province, ça paraît compliqué de se passer totalement de voiture. À quel moment la création d’une « entreprise » s’est-elle imposée ? J-B.S. — C’est venu assez vite : avec quelques amis, on s’est rendu compte que l’autopartage existait en Suisse et en Allemagne, on est allé voir à Freiburg et à Lucerne. On a mis à peu près un an pour définir nos fonctionnements : rechercher les premières subventions éventuelles, les parkings, l’assurance… Peu à peu, nos réunions à 7 à la Perestroïka se sont étendues à une vingtaine de personnes. Une succession de choix déterminants a donné le ton : est-ce qu’on utilise nos voitures ? Est-ce qu’on les achète ? Pour moi, il fallait casser le lien de propriété. Le service a démarré avec trois voitures, une station et une gestion « manuelle », ça a plutôt bien pris. Au bout d’un an, on a voulu passer à la phase supérieure : si on voulait toucher les gens, il fallait avoir un réseau de stations, donc automatiser le système. J’ai quitté mon boulot et j’ai pris la direction de la structure. J’ai eu assez vite la vision d’un réseau national. Je me suis retrouvé en contact via
Internet avec des personnes qui avaient les mêmes projets à Lyon, à Marseille et à Grenoble. On s’est dit qu’il serait efficace de s’équiper d’une technologie et de se mettre ensemble pour partager les frais de mise en place. France Autopartage était né. L’idée était aussi de se dire que les gens, en allant d’une ville à l’autre, pouvaient prendre le train et bénéficier du service dans les villes intégrées au réseau. Quelles sont vos valeurs ? J-B.S. — La finalité, c’est l’environnement : réduire les nuisances de l’automobile, moins produire, mieux utiliser les ressources. Une voiture partagée remplace neuf voitures particulières, autant de voitures produites en moins, autant d’espaces en ville utilisés à d’autres fins : mieux vivre, mieux se loger, pouvoir faire du vélo, se sentir plus en sécurité, mieux respirer... Notre idée est aussi de favoriser les circuits courts. Les gens ne viennent pas au départ parce qu’ils sont écoloconvaincus, mais ça les amène à le devenir. L’exemple typique, c’est les courses : beaucoup adhèrent pour pouvoir faire leurs courses chez Cora et, en général, au bout de trois mois, ils arrêtent parce que le service leur coûte quand même 10 euros, qu’ils sont obligés de bloquer la voiture trois heures. Ils perdent trois heures, donc ils arrêtent, retournent au marché, adhèrent à une AMAP… Jean-François Virot-Daub — À partir de la mobilité, on bouleverse un mode de vie : faire plus de marche, plus de vélo, changer son mode de consommation, changer son alimentation. Derrière Citiz, il y a toutes ces valeurs-là : la relocalisation de l’économie, la redynamisation du centre-ville. 15
Strasbourg était-elle la bonne ville pour lancer l’autopartage ? J-B.S. — Oui, parce qu’il y a une plus grande sensibilité aux questions environnementales que dans le reste de la France, à la fois de la part des habitants et des élus. La configuration de la ville – son réaménagement avec le tramway, le réseau cyclable, moins de parkings, plus de piétons – est une des raisons pour lesquelles j’ai voulu créer Auto’trement. Ce plan urbanistique assume clairement le fait de vouloir limiter l’accès aux voitures au centre-ville, ça nous a mis la puce à l’oreille. À Strasbourg, on peut vivre sans voiture, c’est ancré dans l’esprit des gens. J-F.V-D. — On voit que plus une ville est ouverte aux autres mobilités, plus il y a une réflexion sur l’aménagement de la ville, plus la place de la voiture est remise en question et plus il y a de place pour un service d’autopartage. Aujourd’hui, vous êtes associés à la politique des mobilités de la ville… J-F.V-D. — Ça va dans les deux sens : la collectivité est intéressée par le service dans le cadre d’un réaménagement d’une rue ou de l’extension du stationnement payant. On s’y intègre naturellement quand la voiture devient une contrainte et que les gens ont l’envie de passer à l’autopartage, les habitants eux-mêmes nous sollicitent, par exemple ceux qui intègrent des éco-quartiers. Comment vous intégrez-vous au territoire alsacien, une région où l’on passe très vite d’une zone urbaine à une autre, périurbaine ? J-B.S. — C’est sûr que l’autopartage est très lié à un mode de vie urbain, mais le fait qu’on soit une coopérative
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Citiz | Interview
fait qu’on ne raisonne pas de la même façon : on essaye de pousser le modèle le plus loin possible et de faire en sorte que les voitures soient disponibles également en zones périurbaines… avec, tout de même, une limite : il faut plusieurs utilisateurs pour une voiture. Mais on sonde le terrain, on fait des réunions dans certaines communes. J-F.V-D. — Il faut que les gens, localement, choisissent d’abandonner leur voiture, et pour ça, il faut un réseau de transports en commun performant et un réseau cyclable. Si dans une ville, il n’y a pas d’alternatives à la voiture et qu’il y a très peu de contraintes au stationnement, Citiz ne répond à aucun besoin. J-B.S. — On essaye, on fait des tentatives. Au Neuhof, il y a 10 ans, ça n’a pas marché, et on est revenu quand le tram est arrivé. On ne vient pas se substituer aux transports publics : on vient s’adosser au réseau de transports en commun quand celui-ci ne répond pas à toutes les demandes, mais il faut que les déplacements de routine puissent déjà être faisables sans voiture. Contrairement aux idées reçues, par exemple, une grève des transports n’est jamais bonne pour nous. On se développe en cercles concentriques, du centre-ville aux quartiers, de la ville aux faubourgs et ainsi de suite. On est présent dans des villes d’environ 10 000 habitants, parfois, ça ne marche pas très bien, comme à Obernai, Cernay ou Erstein, mais on y est parce que la mutualisation peut être intéressante pour un Strasbourgeois et puis c’est notre vocation de participer au réaménagement du territoire. J-F.V-D. — Une voiture qui tourne beaucoup à Strasbourg peut contribuer à financer une voiture qui ne marche pas très bien ailleurs.
À quel moment et pourquoi le modèle de la coopérative s’est-il imposé ? J-B.S. — Au bout de trois ans, l'association avait 3 000 € en réserve et devait investir plus d’un million d’euros pour acheter des voitures, ça pose problème… Il y avait aussi la question de la responsabilité : il fallait retrouver le lien entre le pouvoir de décision et l’engagement financier. Quand s’est posée la question de la forme, on a donc choisi la SCIC, la coopérative d’intérêt collectif qui correspondait vraiment à notre ADN, à notre philosophie. La finalité de notre société, ce n’est pas le profit mais l’environnement. On pourrait, dans un cadre très encadré, redistribuer l’argent, mais notre activité, d’abord, ne génère pas de profits monstrueux. On pense que les gens viennent au sociétariat pour bénéficier du meilleur service et faire en sorte qu'il s’étende. On voulait aussi associer toutes les parties prenantes : salariés et utilisateurs – qui sont majoritaires par rapport aux salariés –, les collectivités, qui nous ont subventionné les trois premières années, d’autres partenaires de la mobilités : la CTS, Parcus. Ça a été amplement débattu en 2003 et on a basculé en 2004. Pourquoi était-ce important pour vous de ne recourir aux subventions que les trois premières années ? J-B.S. — Notre choix a été de rechercher l’indépendance : le but n’était pas de faire financer l’usage de voitures par de l’argent public mais de trouver un modèle économique. Mon point de vue, c’est qu’on travaille mieux en partenariat avec les collectivités quand on n’est pas dépendant.
« À partir de la mobilité, on va bouleverser un mode de vie : faire plus de marche, plus de vélo, changer son mode de consommation, son alimentation. » Jean-François Virot-Daub
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Citiz est traversée par plusieurs paradoxes : vous vendez l’usage d’une voiture mais dans le même temps, vous militez pour qu’on s’en débarrasse. Vous faites partie de ces « entreprises » qui permettent aux utilisateurs d’avoir recours à un service par le biais de votre propre technologie ; la « tendance » voudrait qu’on parle d’uberisation, mais à la différence d’Uber, vous faites réellement partie de l’économie du partage. Comment y voir clair ? J-B.S. — Il y a des paradoxes dans les mobilités. Quand il y a un embouteillage, la solution de facilité voudrait qu’on rajoute une voie de circulation, mais ça ne fonctionne pas. Nous, nous pensons que pour lutter contre l’usage de la voiture en solo, il faut proposer des voitures, des alternatives. Au fur et à mesure, on amène les gens à utiliser moins nos services : on doit donc toujours avoir de nouveaux clients pour avoir autant d’usages. Notre modèle est pensé comme ça. Aujourd’hui on a 200 voitures, mais rapporté au nombre de voitures en Alsace, on reste une niche ! On parle d’uberisation quand les plateformes sont mondialisées et s’enrichissent très vite, ce qui est incompatible par essence avec l’économie sociale et solidaire, avec nous, nos valeurs. Les entreprises de l’économie sociale et solidaire grandissent moins vite. Et puis, la différence fondamentale, c’est qu’on recherche le lien, on ne cherche pas à devenir n°1. Entre Auto’trement, Citiz, Yea!, France Autopartage, la confusion est parfois possible : comment faciliter la lecture de votre coopérative ? J-F.V-D. — La coopérative Auto’trement a créé le service et, aujourd’hui, elle exploite deux marques : Citiz et Yea!. Citiz ce sont les voitures en boucle, avec la garantie, la réservation, plusieurs tailles de voiture, et Yea!, c’est du free-floating en libre dépose, sans réservation. Yea!, était une façon de toucher une nouvelle clientèle. Il y avait toute une génération ultra-connectée qui avait envie de pouvoir bénéficier d’un système moins contraignant, un système qui permette de déposer la voiture à peu près n’importe où, le mot « réservation » avait une connotation négative pour certains. Il y a des clients qui n’utilisent qu’un seul service sur les deux, d’autres qui ont recours aux deux. On utilise de moins en moins Auto’trement, même si c’est encore la raison sociale de la coopérative.
CITIZ, LA TIMELINE « On recherche le lien, pas à devenir n°1. » Jean-Baptiste Schmider
J-B.S. — Auto’trement est devenue Citiz Alsace et France Autopartage est devenu le réseau Citiz. Au niveau du réseau, on était 15 indépendants et l’idée était d’avoir une marque commune pour que les gens comprennent qu’ils ont accès à 1 000 voitures partout en France et nous donner de la visibilité. Ce nom reflète nos valeurs : la volonté de changer le milieu urbain, de vivre autrement en ville. Comment fonctionne le réseau national ? J-B.S. — Aujourd’hui, on est 3 co-gérants du réseau national à temps partiel. Le réseau montant en puissance, il faut mutualiser encore un peu plus les moyens, au-delà de la technologie et du centre d’appels. Je vais m’en charger à temps plein et devenir directeur du réseau, et Jean-François dirigera Citiz Alsace. Le réseau se réunit chaque mois et chaque trimestre et réfléchit à des problématiques : comment sortir du diesel ? Les voitures électriques, pourquoi, comment ? Les tarifs communs ? C’est de l’échange d’expériences et de bonnes pratiques. Il n’y a pas de coercition, on cherche la convergence. On n’ouvre pas systématiquement d’agence : certaines sont gérées à distance, car on s’est rendu compte qu’on n’arrivait pas forcément à faire vivre une agence avec un salarié. On a par exemple le projet de regrouper les agences de Dijon et Besançon. Avec la région Grand Est, on est en train de se poser la question d’arriver à Reims, qui sera peut-être gérée par Citiz Alsace. Quelles sont les perspectives de développement au niveau local et au niveau national ? J-B.S. — Notre but, c’est qu’il n’y ait plus que des Citiz et des Yea! à Strasbourg. [Rires] J-F.V-D. — À court terme, c’est renforcer Citiz et surtout Yea! avec une augmentation du nombre de voitures (de 30 à 60 voitures d’ici un an) et une zone qui devrait s’élargir au-delà du centreville. Aujourd’hui, on a une voiture tous les 500 mètres dans l’agglomération, à
terme on peut imaginer une voiture par pâté de maison. Il y a encore un beau potentiel de développement. J-B.S. — Au niveau national, c’est d’être présent dans toutes les villes de plus de 200 000 habitants d’abord, donc de combler les trous sur la carte : l’ouest de la France, la Normandie, la Bretagne, et de faciliter le passage d’une ville à l’autre pour nos utilisateurs. 1% des Suisses utilisent l’autopartage, on aimerait faire aussi bien en doublant le nombre d’abonnés dans les 5 ans. J-F.V-D. — Atteindre la taille critique n’est pas évident parce qu’il faut dépasser le cercle des utilisateurs déjà convaincus. Arriver dans une nouvelle ville, c’est convaincre les utilisateurs potentiels d’abandonner leurs voitures, et ça ne suffit pas de faire de la communication. Vos utilisateurs sont-ils votre meilleure publicité ? J-B.S. — Oui effectivement, ils sont très prescripteurs. Même si j’imagine qu’il est plus facile aujourd’hui de convaincre un potentiel public, plus sensibilisé qu’hier aux questions écologiques, on constate que l’écologie en France n’est pas vraiment un réflexe sur le terrain politique. Ça vous contrarie ? J-B.S. — Oui, ça explique en grande partie notre retard par rapport à nos voisins suisses ou allemands. On rend les gens schizophrènes. On dit : il ne faut pas polluer, mais achète une nouvelle voiture pour sauver l’industrie automobile… Il y a un problème de conjoncture économique qui fait que la priorité c’est le court terme, pas le moyen terme. On a eu 3-4 années pendant lesquelles le carburant n’a jamais été aussi peu cher, et là, notre discours était moins audible. Dans le même temps, le prix du billet de train augmentait… Comment convaincre les gens d’abandonner la voiture avec ce genre de contradictions ? Ce n’est pas simple… Ça vient, doucement… Le côté positif c’est qu’à Strasbourg, on est plus avancé qu’ailleurs ! — Citiz 5, rue Saint-Michel, à Strasbourg www.citiz.coop
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1999 Création de l’association. 2000 Démarrage du service en décembre : 15 utilisateurs, 3 voitures, 1 station, 1 salarié. 2002 Création du réseau national France Autopartage avec Lyon, Grenoble et Marseille. Mise en place du système de gestion à distance des véhicules. 2004 Auto’trement devient une SCIC. Premier abonnement combiné autopartage + transports en commun avec la CTS. Premières stations en gares de Mulhouse et Sélestat. 2006 Le développement régional devient officiellement stratégique. 2008 20e station à Strasbourg. 2009 Premières stations à Erstein et Haguenau. Lancement de Mobilib, véhicules adaptés aux personnes à mobilité réduite dans le Haut-Rhin. 2010 Abonnements combinés aux transports en commun à Mulhouse. 2011 Premiers véhicules hybrides rechargeables en autopartage (projet Kléber). 2012 Véhicules adaptés aux personnes à mobilité réduite à Strasbourg et Illkirch. 2013 Auto’trement devient Citiz : marque nationale créée en commun avec les autres opérateurs du réseau coopératif France Autopartage. 2014 Dédieselisation du parc : 15% de voitures hybrides en +, - 50% de véhicules diesel. Lancement du Pass Mobilité à Strasbourg (transports publics, vélo, autopartage). 2015 Lancement de Yea!
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Citiz | Des chiffres et des lettres
Réseau Citiz
Citiz Alsace
6000
100 villes 1 450 000
euros de chiffre d’affaires
utilisateurs
17
véhicules
accessibles à tous les utilisateurs Citiz en France
11
salariés
villes
90
1000
510
sociétaires
stations
60 000
locations par an
200
voitures dont 30 Yea!
1800 tonnes équivalentes CO2 économisées en 2015
10%
hybrides
18
7000
voitures en moins sur les routes
25 000 utilisateurs
Les utilisateurs de l’autopartage en France 17%
92%
28%
71% des parcours se font sur
sont Strasbourgeois
adoptent l’autopartage par nécessité de
en parlent à leurs amis
remplacer - de leur 50 km voiture 78%
ne possèdent plus de voiture personnelle
Après le passage à l'autopartage, ils parcourent 41% de kilomètres en moins en voiture
52%
possèdent un abonnement de
transport collectif
Sources : Chiffres Citiz, 2016 + enquête nationale sur l’autopartage menée par 6t Bureau de recherches, sur un échantillon de 2000 personnes, janvier 2013
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Citiz | 3 familles
À deux pas de la gare de Strasbourg, l’agence Citiz regroupe la direction du réseau national et Citiz Alsace. À Citiz Alsace, trois familles se croisent : le conseil d’administration, l'agence et l'équipe technique. Par Cécile Becker Photos Christophe Urbain
— Citiz
Le C.A
Signes distinctifs
Qui ? (de gauche à droite)
- Depuis 2004, supervise l'activité de la Société Coopérative d’intérêt collectif (SCIC), forme d'entreprise à vocation non lucrative. - Gère un capital détenu majoritairement par les utilisateurs. - Fédère des utilisateurs, des salariés et les partenaires publics et privés, représentés par collèges. - Chaque collège élit son représentant au conseil d’administration. - Les utilisateurs ayant intégré le conseil d’administration sont élus par les autres « coopérateurs » ayant investi 500 € de parts sociales (20 parts sociales = un véhicule acheté). - En conseil d’administration (tout comme en assemblée générale) : 1 personne = 1 voix.
Pascal Jacquin (Parcus) Patrick Fender (Ville d’Illkirch) Antonio Lagala (utilisateur) Michel Vilar (membre fondateur) Jean-Baptiste Schmider (salarié) Marie Schlichtig (salariée) François Guyon (membre fondateur) Chantal Fabing (utilisatrice) Yvette Berger (membre fondatrice) Jean-François Virot-Daub (salarié) Yves Gantner (Président et membre fondateur) Camille Janton (partenaire public CTS)
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Les absents Catherine Viain (utilisatrice) Jean-Michel Schalk (utilisateur) Jean-Baptiste Gernet (Eurométropole de Strasbourg)
— Citiz
L’agence
Signes distinctifs
Qui ? (de gauche à droite)
- L’agence strasbourgeoise gère les territoires alsaciens et lorrains. - Les membres de l’équipe accueillent le public, répondent aux utilisateurs alsaciens ou lorrains qui appellent l’agence strasbourgeoise – hors appels à la centrale ouverte 24h/24 –, scellent des partenariats, gèrent les mésaventures techniques ou perte d’objets trouvés (on parle d’une poussette pour poupée ou d’un hélicoptère télécommandé oubliés dans le coffre d’une voiture !) - Les salariés de l’agence consacrent une bonne partie de leur temps à échanger avec les nouveaux utilisateurs pour les accompagner dans le changement de leur comportement vis-à-vis des mobilités. - On raconte qu’on y boit le meilleur café de Strasbourg…
Aina Rasoamanana (chargée de clientèle) Adriano Ferreira (responsable comptabilité – finance) Stéphanie Blum (chargée de clientèle) Perine Schmuck (chargée de clientèle en apprentissage) Arthur Janus (chargé de développement stagiaire) Marie Schlichtig (responsable administratif – facturation)
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— Citiz
Citiz | 3 familles
L’équipe technique
Signes distinctifs
Qui ? (de gauche à droite)
- Installée à la station Avia à Neudorf. - Les 5 membres se partagent la flotte alsacienne Citiz et Yea! - Surnommés les « gentlemen » par l’agence strasbourgeoise. - Actions : nettoyage des voitures, changement des pneus, menues réparations, chargement des batteries… - Ils entretiennent en moyenne 5 voitures chacun par jour et effectuent leur suivi grâce à un bureau mobile (en l’occurrence des tablettes). - La plupart des voitures sont amenées à la station. - Pour les voitures stationnées en dehors de l’Eurométropole, l’équipe dispose de son propre utilitaire muni d’un groupe électrogène. - Les techniciens sont capables d’intervenir dans la demi-heure, directement auprès de l’utilisateur si celui-ci subit une panne. - Bonne moyenne de 6 blagues à la minute.
Préparateurs de véhicules : Pascal Gutapfel Issam Zelmad Emrehan Soysal Gaetan Begue
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Responsable d’exploitation : Laurent Chevaux
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Citiz | Mode d'emploi
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Citiz vu par
Georges-King Njock-Bôt ADHÉRENT DEPUIS 2009
Artisan du web Par Caroline Lévy Photo Christophe Urbain
— Son utilisation Citiz
— Son anecdote Citiz
« Mon utilisation a évolué au fil des années. Aujourd’hui, j’opte principalement pour les Yea!, ces voitures offrent une souplesse horaire et me permettent de stationner devant chez moi, ce qui est très pratique pour installer – ou emporter – son siège bébé personnel par exemple. Mais c’est aussi le moyen que je préfère pour me rendre à mes matchs de foot le week-end ou tout autre loisir ! »
« Pour mon mariage, dont la fête était organisée à environ 30 kms de Strasbourg, j’ai choisi Citiz pour transporter nos invités ! C’était la solution idéale pour leur permettre un maximum de souplesse dans leurs déplacements. Un vrai facilitateur pour accompagner cet événement heureux ! Autre anecdote : pour convaincre mes amis, j’ai imaginé un tableau pour leur prouver que le service est vraiment économique. »
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Guillaume Brocker ADHÉRENT DEPUIS 2007
Accompagnateur en moyenne montagne et ingénieur en informatique Par Cécile Becker Photo Dorian Rollin
— Son utilisation Citiz
— Pourquoi Citiz ?
« J’en ai un usage professionnel et personnel. Lorsque je suis en ville, à Mulhouse, j’utilise majoritairement le service VéloCité, mais j’ai régulièrement besoin d’une voiture pour mon activité d’accompagnateur, notamment le weekend. J’ai déjà pu me rendre en Autriche ou en Suisse avec Citiz, ça ne me coûte pas plus cher si je lisse tout ce qu’une voiture me coûterait sur une année, et puis j’impute ces charges à mon entreprise individuelle. »
« Parce que le service me simplifie la vie. C’est aussi un geste militant : c’était important pour moi, notamment dans une logique de préservation de l’environnement, de trouver une alternative au tout-voiture. Et puis il faut dire qu’à l’échelle de la région, on a la chance d’avoir un grand réseau de stations Citiz, ce qui n’est pas le cas ailleurs en France. »
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Facebook : Randonner vers les cimes
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Mobilités alternatives | Contexte
Circuler autrement Par Sylvia Dubost Illustration Claire Perret
Journaliste spécialiste des mobilités urbaines, auteur notamment du blog « L’interconnexion n’est plus assurée » sur le site du Monde, Olivier Razemon est un observateur avisé des politiques de transport à l’échelle de la ville. Pour lui, le sujet n’est pas encore suffisamment pris au sérieux, et les solutions souvent inadaptées.
Quelles tendances observez-vous en termes de mobilités urbaines ? En fait, j’ai surtout l’impression que cela reste un sujet assez compliqué à aborder. Dès qu’on évoque cette question, on tombe très vite sur beaucoup d’objections, de la part des décideurs, des techniciens dans les services, de la population. Quand la maire de Nantes par exemple dit qu’elle va mettre en place un plan vélo, elle ajoute « mais on n’oppose pas les modes de transport. » Mais c’est faux ! Forcément, on oppose les modes de transport ! Ce n’est jamais assumé. Quand on augmente le prix du stationnement dans une ville, parce que l’espace public n’est pas gratuit, ce n’est pas dit comme ça, ce n’est jamais présenté comme une mesure qui bénéficie à d’autres usagers que les automobilistes. La grande place d’Arras par exemple va enfin devenir piétonne, et l’on présente ça sous l’angle de l’embellissement. Au niveau national, on dit qu’on encourage des déplacements ferrés, en même temps on continue à construire des autoroutes alors que le choix doit être fait entre chemin de fer et route. Si l’usager bénéficie de tout le confort possible par la route, forcément, il va choisir la route. Par ailleurs, et je suis désolé d’être négatif, on ne conçoit aujourd’hui la mobilité que pour les 10% de la population qui sont mobiles et maîtrisent les outils. On construit des gares TGV, des lignes TGV, en communiquant par exemple sur une nouvelle ligne de Paris à Brest, sans prendre en considération que des gens vont peut-être dans l’autre sens, ou 28
empruntent d’autres trajets. C’est vrai aussi pour les transports urbains, où les applications se multiplient alors que cela ne concerne que les gens qui vont se servir de leur smartphones. Dans la vraie vie, ça ne se passe pas comme ça. En même temps, il y a beaucoup d’initiatives, d’idées, et on se rend compte, au niveau des villes en tout cas, que cette affaire des transports est importante. Ce n’est pas invisible, cela coûte beaucoup d’argent, cela a des conséquences sur l’environnement, les modes de vie, la société… Y a-t-il des modes en termes de politiques de transport ? Il y a tout le temps des modes. En ce moment, tout le monde veut un téléphérique. Même Orléans, et on se demande bien pourquoi… Avant, il y avait la mode du vélo en libre service, on pensait que cela suffirait pour que les gens se mettent à faire du vélo. Or ce n’est pas une bonne idée pour les villes moyennes, et puis dans certaines il y a moyen de faire moins cher. Puis la mode de la voiture électrique, qui n’est pas la réponse à tout, car il vaut mieux une voiture polluante occupée par 4 personnes que trop de voitures électriques occupées par un seul passager. Autolib, la voiture électrique en libre service, tout le monde trouvait ça très bien et aujourd’hui on s’aperçoit que c’est un gouffre financier. Et encore, la mode des applis smartphones, alors que Keolis [leader mondial du métro automatique, ndlr] a montré que 10 à 15% des
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Circuler autrement | Contexte
gens seulement utilisent leur smartphone pour se déplacer. Pendant un temps, toutes les villes voulaient aussi leur site de co-voiturage, imaginant que les gens iraient chercher des informations pour se déplacer sur les sites des collectivités. Une autre mode en ce moment, c’est le co-voiturage de proximité. On imagine que les gens sont prêts à se détourner de leur trajet pour prendre quelqu’un et éventuellement être en retard pour gagner un peu d’argent. Le problème c’est qu’on aborde toutes les questions sous l’angle de l’offre et de la concurrence – c’est la même chose avec Uber et les taxis – et qu’on ne prend jamais en compte la question de l’usage. Pour quelles raisons, selon vous ? Par paresse intellectuelle. Et par croyance en des solutions toutes faites. Il y a un manque flagrant d’ouverture : on ne va pas voir dans les autres pays ce qui fonctionne, ou on considère ça comme folklorique. C’est sidérant ! C’est très simple pourtant. Ce matin j’étais à la gare de Grenoble, il y a beaucoup de flux, beaucoup de gens en tram, en train, à vélo, peu de voitures. Cela m’a rappelé des villes allemandes et suisses, comme Lausanne, Cologne. Ça fonctionne bien même si ce n’est pas simple à mettre en place. Pour arriver à cela, il faut batailler en permanence contre l’idée reçue que les gens ne vont pas accepter de prendre le tram, le vélo, qu’il faut qu’on accède à tout en voiture. Cela veut dire que les élus ont toujours le réflexe du tout-voiture ? On entend souvent le discours de la liberté absolue, où l’on confond libre circulation et liberté de circuler. On oublie que se déplacer ça prend du temps, ça coûte de l’argent, ça peut être stressant, et parfois ça ne marche pas toujours comme on veut. On continue à faire comme si tout devait être parfaitement fluide, et on refuse de dire aux gens que pour ce trajet-là, en voiture, ce ne sera pas possible, mais qu’il y a d’autres solutions. Pour les commerçants, y compris de Strasbourg, la piétonisation fait fuir les clients : est-ce vrai ? Dans toutes les villes, des commerçants ont compris que leur sort ne dépendait pas du stationnement. Mais il y a encore le réflexe chez certains décideurs et commerçants de la voiture comme unique moyen de se déplacer. On entend toujours : « On ne peut pas se garer ! » Dans toutes les villes, à tous les niveaux. Il suffit que quelqu’un dise cela pour que le débat s’arrête. Quand on observe une ville, on se contente souvent de regarder les commerces de centre-ville, alors que la ville, ce n’est pas seulement le centre-ville, et pas seulement les commerces. Et on oublie de dire que s’il y a plus de circulation, les voitures feront tout sauf faire 30
marcher le commerce, car la plupart ne font que traverser la ville. Quand on interroge les commerçants, on se rend compte que pour eux, la bonne voiture c’est celle qui s’arrête devant chez eux, dont l’usager achète quelque chose de cher, et repart vite. Les mauvaises voitures, ce sont toutes les autres, y compris celles des salariés des autres commerces et celle du client qui achète mais profite du stationnement pour faire autre chose. Quand on commence à y réfléchir avec eux, les commerçants se rendent compte que les gens pourraient aussi venir autrement. Cela nécessite une discussion assez longue, et de partir de leur demande. Une fois que c’est fait, qu’on a limité l’espace de la voiture, que les gens ont réinvestit la ville, c’est très rare qu’on remette en cause la piétonisation. Par ailleurs, cette piétonisation n’est pas forcément la solution, et on confond souvent piétonisation et cheminement piéton. Il est plus important de permettre au piéton de se déplacer facilement, dans son quartier d’abord, or on s’aperçoit que ce chemin n’est pas toujours facile. Y a-t-il un danger de revenir en arrière en terme de politique de transports ? J’en ai eu peur car en 2014, beaucoup de maires ont voulu faire revenir la voiture en ville, en se basant notamment sur le développement du co-voiturage et de l’autopartage pour dire : « Regardez, la voiture revient en ville ! » Mais les nuisances du tout-voiture sont évidentes : obésité, sécurité, manque de relations sociales, pollution… il y en a tellement qu’on peut arriver à convaincre. Là où un retour en arrière est possible, c’est que tant qu’il n’y aura pas de vraie réflexion sur le sujet, il est facile pour un ou une politicien.ne populiste de surfer sur le sentiment de perte de liberté. Mais une fois qu’on a dû s’adapter, finalement ça passe. Personne n’a envie de refaire de la place Stanislas à Nancy un parking, même pas les défenseurs de la voiture. On ne voit plus les évolutions, on les oublie. Je parie que concernant les voies sur berges de la rive droite à Paris, d’ici un an non seulement les voitures se seront évaporées, mais le débat aussi. À Strasbourg, le tram n’a jamais été remis en cause. Quant à l’autopartage, encore minoritaire, il demande une vraie démarche. Dans sa voiture, on stocke des choses, on y répète ses cours de chant, elle sert de confessionnal. Il faut vraiment réfléchir à l’objet voiture ! — Le blog d’Olivier Razemon : www.transports.blog.lemonde.fr À lire : Comment la France a tué ses villes et Le pouvoir de la pédale, éditions Rue de l’échiquier
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La passerelle des Deux-Rives Ă Strasbourg / Photo : Christophe Urbain
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Circuler autrement | Portraits
Par Aurélien Montinari Photos Christophe Urbain
VALÉRIE BACH, L’HYPERACTIVE C’est entre deux coups de téléphone que nous retrouvons Valérie. La gérante de l’épicier Grand Cru est très prise, surtout depuis l’ouverture de sa seconde boutique. Pour cette jeune entrepreneuse, être mobile est plus qu’un concept, c’est une nécessité. Elle a besoin de se déplacer rapidement en centre-ville, mais aussi en périphérie, elle a donc choisi le PassMobilité – l’abonnement Citiz est inclus –, jonglant entre les voitures Citiz et Yea! en fonction de ses envies ou de ses besoins. Abonnée depuis plus de deux ans au service d’autopartage, elle avoue avoir été réticente au départ : « Les deux premiers mois, je n’ai pas touché à la voiture, je n’osais pas parce que ce n’était pas la mienne. » Passée la première appréhension, ce mode de transport est apparu comme une évidence, « Yea!, la voiture à la minute, je suis une grande fan ! » Elle qui est toujours à court de temps, n’a pas à s’occuper de l’entretien de la 32
voiture, ni de la réservation. Ce système de transport lui offre également une flexibilité en toutes occasions, que ce soit pour ses sorties personnelles en dehors de Strasbourg, ou pour l’aspect professionnel comme les courses pour la boutique ou des rendez-vous chez des producteurs ailleurs en France. Malgré un rythme d’enfer, Valérie reste toujours organisée et planifie ses déplacements facilement, combinant la voiture avec les transports en commun et le vélo pour les distances plus courtes. « Ce système d’autopartage est génial quand on n’a pas besoin de voiture au quotidien, il y a suffisamment de véhicules et il ne m’est jamais arrivée d’être bloquée. » Une utilisatrice sous le charme donc, et qui, quand on lui parle de racheter une voiture, répond du tac au tac : « Non, oh non ! » Une évidence. — www.lepiciergrandcru.com
FRANÇOIS COLIN, L’AUTONOME C’est un sympathique monsieur qui nous accueille devant chez lui à Colmar. Un magnifique portail orne l’entrée d’une petite cour où nous garons la voiture – empruntée chez Citiz ! Il y avait là jadis l’atelier d’un serrurier, l’enseigne est toujours accrochée mais désormais le lieu sert de salle pour des petits concerts organisés par l’association Hiéro. « Les voisins ne se plaignent pas », garantit François Colin. Ce retraité de 73 ans utilise, de mémoire, le service d’autopartage depuis 2010 : « Ce système est une très bonne idée ! » Son épouse était commerciale pour une entreprise et, une fois à la retraite, il a fallu restituer la voiture de fonction. François Colin avait conservé les factures liées à l’entretien courant du véhicule, et c’est après calculs et comparaisons qu’il en est venu à la conclusion qu’il était préférable de choisir l’autopartage plutôt que de racheter une
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voiture. « On faisait très peu de kilomètres et la voiture c’est stressant et fatiguant », voilà d’autres raisons qui ont poussé le couple de retraités à préférer Citiz, ou le train, suivant la durée des déplacements. Sans parler de la météo : « Quand il pleut, je prends une Citiz à la place du vélo », confie François. Pour madame et monsieur Colin, la solution de l’autopartage c’est aussi conserver une forme d’autonomie : « Chacun peut emprunter une voiture si besoin, on n’a jamais été coincés. » En revanche, il regrette qu’il n’y ait pas plus de bornes de retrait dans la ville de Colmar : « Il me faut un petit quart d’heure de marche pour aller la récupérer à la gare. » Conquis par l’autopartage, il va même jusqu’à en faire la promotion : « J’essaye de vendre la formule à des amis, nous déclare-t-il, et on peut même réserver sa voiture avec son portable ! » Une retraite connectée et qui bouge.
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Circuler autrement | Portraits
FAMILLE ROY, LES RADICAUX Pour Sabrina et Antoine Roy, trentenaires, l’autopartage est devenu, au fil des années, une histoire de famille. Les deux psychologues vivent et travaillent en ville. Pour eux « l’achat d’une voiture était plus une contrainte qu’autre chose ». Antoine passe le permis en 2009 car il faut pouvoir emmener Sabrina à la maternité, mais sans passer le cap de l’achat automobile, le couple est déjà adepte du système Citiz. Même après la naissance de leur seconde fille, ce n’est toujours pas d’actualité : « Nos amis nous disaient qu’il nous faudrait une voiture personnelle, mais on a réussi à agencer toute notre vie autour de Citiz. » Pour le couple, c’est là un véritable enjeu, pas seulement écologique mais surtout une démarche anticonsumériste. Favorisant les courses de proximité et les services de livraison pour l’aspect pratique, ils passent au vélo pour les courtes distances et au train pour les grandes vacances (combiné au service de bagages à domicile). En revanche, la
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location de voiture est la solution qui convient le mieux pour les sorties les week-ends ou de petits séjours en France. Pour les enfants, c’est toujours une surprise : ce sera quelle voiture aujourd’hui ? Sabrina et Antoine piochent en effet à leur guise dans la gamme de véhicules que propose Citiz. Décapotable pour un mariage, 4x4 pour la montagne ? Antoine résume fièrement : « On n’a pas une voiture, on a cent voitures ! » Leur borne de retrait est à deux pas de la maison, la formule d’autopartage n’est pas envisagée par défaut, au contraire, elle est perçue comme un vrai soulagement : « Je suis stressé par l’idée-même de posséder une auto, nous confie Antoine. C’est un confort de ne pas avoir de voiture et surtout de ne pas se sentir obligé de la prendre pour le moindre déplacement. » Et de finir par nous rappeler, en bon psychologue, qu’à force de posséder des objets, les objets finissent par nous posséder.
STÉPHANE BECKER, L’ÉCOLO « La formule m’a plu et je me suis lancé. » Stéphane Becker ne fait pas de mystère de sa préférence pour le service Citiz. Pour cet entrepreneur, automobiliste repenti, posséder une voiture était « cher et inutile, car 95% du temps, elle était devant chez [lui] et ne servait à rien ». Sa société de développement de serious games étant basée à Rivetoile, il se déplace effectivement majoritairement à vélo. Il n’est d’ailleurs pas le seul : au sein de son équipe de huit salariés, sept sont sans véhicule, seul un motard résiste encore. Pour ses rendez-vous professionnels, Stéphane utilise le train – quand il doit aller à Paris – ou un véhicule Citiz pour ses trajets en dehors de l’Eurométropole. Utilisateur depuis 2012, il a l’avantage d’avoir une borne de retrait à deux pas de ses bureaux, au parking de l’UGC Ciné-Cité : « Il y a même un véhicule électrique », nous apprendil, enthousiaste. Pour Stéphane, l’autopartage 35
est plus qu’un mode de transport, c’est « une véritable démarche écologique » qui pousse à « repenser sa mobilité et ce qu’est un déplacement utile ». L’entrepreneur nous avoue tout de même que d’un point de vue professionnel, le véhicule de location le prive « du statut que confère une voiture personnelle ou de fonction », mais les avantages reprennent très vite le dessus. Flexibilité, coût, simplicité, il reste conquis : « La possession d’une voiture est un sentiment qui m’est complètement étranger maintenant… » Et Stéphane d’ajouter pour conclure : « Il est temps de repenser la place de la voiture dans l’urbanisme, parce qu’un parking, personne ne trouve ça beau. » C’est ce qu’on appelle un avis tranché ! — www.methodinthemadness.eu
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UN AUTRE MODE DE VILLE Par Cécile Becker Photos Christophe Urbain
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En tant que maire de Strasbourg de 1989 à 1997, Catherine Trautmann a mené un plan de déplacement urbain tambour battant. Elle est aujourd’hui vice-présidente à l’Eurométropole en charge notamment de la stratégie économique. Jean-Baptiste Gernet est, entre autres, adjoint au maire en charge des mobilités alternatives. Interview croisée.
Catherine Trautmann, vous avez bouleversé le paysage urbain strasbourgeois, quelles ont été vos priorités ? Jean-Baptiste Gernet, comment se saisit-on de cet héritage-là ? Catherine Trautmann — La première campagne municipale en 1989 s’est faite sur deux choses : la non-cohérence des réformes qui avaient été enclenchées et l’étouffement du cœur de l’agglomération. Nous avons gagné sur une campagne pour le tramway et pour un nouveau plan de déplacement. Le précédent maire avait abandonné l’option du tramway pour celle du métro léger souterrain. Il avait fait des réserves financières. Les deux premières lignes de tram ont donc été réalisées dans les temps… avec une enveloppe pas désagréable ! Il fallait qu’on puisse passer facilement d’un mode de transport à l’autre – piéton, vélo, voiture, transports publics – et pour cela, partir de la situation la plus fragile, celle du piéton. Si j’ai décidé de doubler la piétonisation et de rendre la place Kléber complètement piétonne, c’était parce que les personnes âgées ne pouvaient même plus la traverser ! La voiture était prioritaire, le piéton ne traversait pas ; le vélo avait ses pistes cyclables, mais était réservé aux loisirs et inclus dans la circulation. Jean-Baptiste Gernet — Pour se saisir de cet héritage, il faut prendre la mesure des changements qui sont intervenus. Je suis né en 1988, je n’ai donc pas connu la place Kléber avec des voitures. Le visage du centre-ville a complètement changé avec la redistribution des modes de transport. Nous vivons l’une des villes où les mobilités alternatives à la voiture sont les mieux organisées. Nous sommes aussi la ville où l’on parle le plus de ces fameux conflits entre les piétons et les cyclistes… Les politiques menées ont été et sont un succès qu’il faut aussi gérer. Où en est-on aujourd’hui ? C.T. — Aujourd’hui, l’intégration de la politique de déplacement comme élément d’urbanité et de traitement équitable des habitants de l’agglomération les rend plus revendicatifs, et c’est justement pour moi un succès. 37
J-B.G. — L’idée est que les habitants aient une carte mentale de leur territoire. Le tramway l’a redessinée, mais il a ses limites. Il faut trouver d’autres modes de déplacement et accompagner les habitants avec le numérique, tout en optimisant l’utilisation des infrastructures existantes. C.T. — Aujourd’hui, c’est l’application smartphone qui fait le déplacement. Nous intégrons les nouvelles mobilités dans notre stratégie économique parce qu’elles sont une source de création de start-ups et de services. À ce changement de paradigme, particulièrement visible, on va devoir intégrer de la logistique. La collectivité a une responsabilité concernant le développement de la plateforme portuaire. Nous allons devoir travailler sur le transport de marchandises sur la longue et courte distance en intégrant à la fois le e-commerce et le commerce en centre-ville. Il faudrait voir si ce que nous apportons comme service aux personnes pourrait avoir une utilité pour le transport des marchandises. C’est un sujet très intéressant qu’on n’a pas encore traité jusque-là.
« Si je prends l’exemple du vélo, il est devenu un mode de vie à Strasbourg : on n’est pas enfermé, on rencontre plus de gens, on s’arrête boire un coup en terrasse… » Jean-Baptiste Gernet
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Il faut rappeler aussi que si nous avons adopté cette politique des mobilités, ça a été pour remédier au problème de pollution de l’air. Nous pouvons faire une politique extrêmement exigeante et ne pas obtenir les résultats voulus à cause de l’organisation du trafic national et international, et c’est là que le travail de la logistique est des plus importants pour séparer les flux. Comment change-t-on les habitudes des habitants ? J-B.G. — Je pense que l’élément fondamental est l’accompagnement presque individualisé des habitants dans leur mode de déplacement. Si je prends l’exemple du vélo, il est devenu un mode de vie à Strasbourg : on n’est pas enfermé, on rencontre plus de gens, on s’arrête boire un coup en terrasse, on regarde ce qui se passe dans les vitrines, on s’arrête acheter un bouquin… En même temps, on se
rend compte qu’en deuxième couronne ou dans des quartiers plus populaires à proximité du centre-ville, la part du vélo chute très vite alors qu’il y a des aménagements et du stationnement. Vélhop va d’ailleurs engager des actions sociales dans les quartiers avec le déploiement de vélos-écoles, de l’accompagnement personnalisé, pour encourager la pratique du vélo. Il faut aussi continuer à développer des infrastructures existantes. En cela le travail de Citiz est précieux : leurs voitures sont efficaces pour démotoriser les villes et ils ne cessent de faire évoluer leur modèle. — www.strasbourg.eu www.velhop.strasbourg.eu www.passmobilite.eu
Play mobile En 2012, un Plan piéton est voté notamment pour promouvoir la marche, désamorcer les conflits piétons-vélos ou renforcer le réseau reliant centre-ville et quartiers. Deux ans plus tard, le PassMobilité est créé et se décline en trois abonnements ouvrant l’accès aux services Vélhop, Citiz, au réseau TER dans le périmètre de l’Eurométropole, au tram, au bus ainsi qu’aux parkingsrelais. Côté vélo, Strasbourg tend à réaffirmer sa position de première agglomération cyclable française en annonçant début 2017 un réinvestissement à hauteur de 6 millions d’euros dans ses infrastructures cyclables. Si 8% des déplacements se font à vélo à l’échelle de l’agglomération, la Ville souhaite doubler ce chiffre et « exporter » la culture vélo dans les quartiers périphériques. Pour cela, elle compte sur un réseau cyclable à grande vitesse (Vélostras) éclairé la nuit, une séparation des cyclistes lents et rapides, et s’appuie sur les associations – dont certaines qu’elle subventionne – qui encouragent le recours à la petite reine (CADR67) via, notamment, l’autoréparation (Bretz’Selle, A’CRO…). Des mesures fortes mais pour l’instant insuffisantes pour remettre en question la 4e position de Strasbourg dans le classement des villes… les plus polluées de France. (A.M. + C.B.)
Le tram D à l'essai, à Strasbourg.
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Trucs & astuces
FRANCHIR LE RHIN
Offres cumulées
Par Sylvia Dubost
L’Alsace et les écomobilités transfrontalières : beaucoup de possibilités, des projets, et quelques points à améliorer. Rapide état des lieux.
• Alsa+ : ticket unique pour ter+tram+bus+car dans toute l’Alsace, sur une zone choisie. Différentes formules possibles, en semaine ou les week-ends, en solo ou en groupe. Infos disponibles sur vialsace.eu et dans les guichets SNCF ou CTS. • PassMobilité : tram + bus + Vélhop + Citiz et Yea! + parkings à Strasbourg. 51,50€ en plein tarif. www.passmobilite.eu
En train Généralités L’Alsace bonne élève 71% des lignes TER traversent la frontière. C’est plus que dans n’importe quelle autre région transfrontalière. Les réseaux de transports urbains sont souvent interconnectés et les passerelles sur le Rhin pour piétons et vélos se multiplient. La topographie (et la prospérité de la région) est un avantage : en dehors du Rhin, pas d’obstacle majeur à traverser.
Vers le Nord Encore un effort La ligne de train HaguenauWissembourg se prolonge jusqu’à Neustadt, mais la correspondance en gare de Wissembourg pose souci depuis des années, les Allemands se déplaçant plutôt le week-end, les Français plutôt en semaine… La ligne StrasbourgLauterbourg-Wörth est connectée avec le réseau urbain de Karlsruhe mais le trajet nécessite une correspondance…
Strasbourg Tout roule
Saint-Louis Bâle mon amour
Depuis la prolongation de la ligne de tram jusqu'à Aristide Briand, la fréquentation du bus 21 a augmenté de 30%. À partir du 28 avril, il est remplacé par une ligne de tram. En 2020, la ligne de train Strasbourg-Offenburg verra sa cadence augmenter à 1 train par heure.
Deux lignes de bus urbains relient les deux centresvilles. En décembre 2017, la ligne 3 du tram de Bâle sera prolongée jusqu’à la gare de Saint-Louis. Le raccordement ferroviaire de l’EuroAirport devrait voir l’ouverture d’une nouvelle ligne en dérivation de la ligne Strasbourg-Bâle à l’horizon 2020-2025. En revanche, pas de liaison entre Saint-Louis et sa voisine Weil-am-Rhein (D).
Vers Freiburg Le point noir Depuis la destruction du pont de chemin de fer entre Neuf-Brisach et Breisach en 1939, il n’y a plus de liaison ferroviaire de Colmar à Freiburg (214 000 habitants). Un bus à haut niveau de service vers Breisach sera mis en place en 2018. Depuis Strasbourg, il faut changer à Offenburg…
Mulhouse À fond de train La seule ville d’Alsace à bénéficier d’une liaison ferroviaire directe avec Freiburg. Reliée à Bâle par le structurant axe Strasbourg-Bâle, Mulhouse a vu en 2011 la réouverture de la ligne vers Müllheim (D), fermée depuis 1939.
Les passerelles Toujours plus Entre Strasbourg et Kehl, la passerelle des DeuxRives, conçue par Marc Mimram et inaugurée en 2004, marque un jalon dans l’histoire des transports transfrontaliers dans la région. La passerelle des Trois Pays entre Huningue et Weil-am-Rhein (Dietmar Feichtinger, 2007) est la plus longue du monde dédiée aux vélos et piétons (238m). Celle entre Gambsheim et Rheinau sera inaugurée en 2019.
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• Carte réflexe TER : 29€/an, réduction de 30% en semaine et 70% le week-end. Pour le bénéficiaire et 3 accompagnants. • Carte Tonus TER : 19€/an, réduction de 50% sur tous les trajets en Alsace (+ Belfort, Bâle, Saint-Dié, Sarrebourg et Sarreguemines). www.sncf.com/fr/trains/ter • TGV Pop (SNCF) : trajets en TGV à tarifs attractifs. On vote pour un trajet et lorsqu’il y a assez de voyageurs, le TGV part. www.tgvpop.voyages-sncf.com
Services
• L’association Astus (Bischheim) travaille avec les collectivités et les entreprises pour améliorer les services de transports collectifs. www.astus67.fr • Vialsace : planifier tous vos déplacements en Alsace. Site web + appli. www.vialsace.eu
En Allemagne • Bad Wurtemberg ticket : 23€ sur l’ensemble des transports de la région pendant 24h. • Ticket week-end : voyage illimité pendant 24h sur tous les trains régionaux. 1 voyageur : 40€ + 4€ par voyageur supplémentaire. www.bahn.de
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Circuler autrement | Initiatives
LE FUTUR IS HERE
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trasbourg accueille du 19 au 22 juin 2017 au Palais de la Musique et des Congrès, le 12e Congrès Européen sur les Systèmes de Transport Intelligents (ITS) organisé par ERTICO (réseau qui promeut la recherche dans ce domaine). 3 000 participants venus des secteurs publics, de la recherche et de l’industrie sont attendus. Le thème de cette année, « ITS
Roulez jeunesse !
Beyond Borders » (au-delà des frontières), interrogera, à travers des conférences et des démonstrations, les enjeux des transports autour du passage des frontières, Strasbourg étant un territoire-laboratoire en la matière. (A.M.) — www.strasbourg2017. itsineurope.com
— www.samocat.io
FRESH AIR
Au-delà des lignes
À
l’occasion de l’extension de la ligne de tram D vers Kehl, Data Projekt (agence de création digitale) et Red Revolver (société de production audiovisuelle) lancent Lignes de ville, une application iOS et Android qui accompagne vos trajets en tram. Des contenus géolocalisés : web-séries, short docs, courts-métrages, illustrations, archives, et textes pour traverser la ville autrement
L
La start-up strasbourgeoise Samocat propose un système d’autopartage de trottinettes, centralisé sur une application pour smartphone. On débloque une trottinette sur l’une des bornes placées en ville, et en avant la musique ! Une solution de déplacement simple et écologique en passe de conquérir le monde. Lancé en 2016 et déjà testée à Moscou et Paris, ce nouveau moyen de transport devrait bientôt arriver à Strasbourg. (A.M.)
À
l’automne 2017, Strasbourg part à la chasse aux véhicules polluants en instaurant les vignettes Crit’Air. Cette initiative gouvernementale vise, à terme, à « décorer » tous les véhicules d’un autocollant établissant de façon claire sa classe environnementale en fonction de leurs émissions de polluants atmosphériques. Basé sur les informations figurant sur la carte grise, ce classement de 0 à 5 devrait en théorie – on ne connaît pas encore les modalités d’application à Strasbourg – restreindre l’accès à certaines zones et impacter le prix du stationnement. Si vous ne faites pas partie des conducteurs « clean », plutôt que d’acheter une nouvelle voiture, c’est peut-être l’occasion d’envisager Citiz… (A.M.)
et redécouvrir son patrimoine. Une très belle initiative saluée par le dispositif Tango & Scan visant à stimuler l’économie créative. (C.B.) — www.lignesdeville.eu
— www.certificat-air.gouv.fr
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Trucs & astuces À vélo, à Strasbourg • Acheter/réparer : CityZenBike, Esprit Cycles, Le Maquis, Rustine et Burette… • Louer : Esprit Cycles, Rustine et Burette, Le Maquis, Vélhop • Auto-réparer/fabriquer : Bretz’selle, Vélostation, A’CRO • Réparation à domicile : Cyclofix www.cyclofix.com • Plombier à vélo : www.plombieravelo.com
SI T’ES VÉLO Par Cécile Becker Photo Henri Vogt
Services
À Strasbourg, les boutiques et lieux associatifs dédiés à l’achat, la location, la réparation, voire l’autoréparation de vélos ne manquent pas. Exemple : Rustine et Burette.
S
i 16% des Strasbourgeois se rendent au travail à vélo selon une enquête INSEE, qu’est-ce qui empêche les 84% restants de s’y mettre ? Le baromètre vélo mis en place en janvier 2016 par l’Eurométropole (4 300 participants) répondait partiellement à cette question en révélant que près d’un Strasbourgeois sur deux invoquait des problèmes de santé, d’âge ou de handicap, l’insécurité à vélo mais aussi la crainte du vol, la non-possession d’un vélo ou son entretien. Pour Jean-Luc Kaeuffer, gérant de Rustine et Burette, au-delà des réponses directes qu’il peut apporter en termes d’achats et de réparations, il s’agit aussi de faire comprendre aux utilisateurs que « le vélo est un moyen de transport efficace, bon pour la santé et pas cher si on le rapporte aux années d’utilisation qui suivent l’achat ! » Il se souvient de Strasbourg lorsqu’il était enfant : « Il y avait des vélos partout, parce que c’était le moyen le plus économique pour les ouvriers d’aller au travail.Puis la voiture a été accessible,et le vélo a disparu pour finalement revenir, encouragé par la politique de la ville. » « Les gens commencent à
• La Jar’telle : pour faire du vélo en jupe ou en robe sans craindre le coup de vent. Créée par Véronique Bertrand, créatrice strasbourgeoise. www.lesfillesavelo.fr
comprendre tout ça, il y a une vraie tendance de fond. » Poussé par ce « phénomène de société » et après avoir été ingénieur dans l’aéronautique à Toulouse, il décide d’ouvrir sa propre boutique en 2012, « un rêve d’enfant ». Il ne se voit pas comme un commerçant : « Je suis un artisan, je ne pousserais jamais quelqu’un à acheter quelque chose dont il n’a pas besoin.On est là pour accompagner. Il y a une vraie notion de service. Ma philosophie c’est appliquer le prix juste et être honnête avec la clientèle : il faut comprendre qu’un bon vélo qui tient longtemps est un vélo plus cher. » En plus de la vente de vélos – pliables, hollandais, de voyage, vintage, électriques, minimalistes… – et d’accessoires, à tous les prix, l’équipe de Rustine et Burette prodigue de bons conseils pour entretenir son vélo et se charge de toutes les réparations. De quoi convaincre les quelques réfractaires qui n’auraient aucune notion de bricolage ou de mécanique. — Rustine et Burette 1, rue des Sœurs www.rustineetburette.fr
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• L’association CADR67 a promeut le vélo sur l’ensemble du Bas-Rhin. Elle propose de marquer les vélos, organise des sessions vélo-école et des animations comme les bourses aux vélos. Les usagers peuvent également proposer leurs remarques pour l’amélioration des services. www.cadr67.fr • Alsace à vélo : site + appli avec itinéraires, conseils, hébergements, restaurants… • EuroVelo routes : découvrir l’Europe à vélo www.eurovelo.com
À savoir • L’employeur doit prendre en charge 50% des abonnements transports en commun (sans charges sociales). • Indemnités kilométriques possibles lorsqu’on va en vélo au travail 0,25€/km, max : 200€/an. • 200€ max de subventions lors d’un achat de vélo électrique. www.asp-public.fr
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Circuler autrement | Citiz vu par
Philipp Pollaert ADHÉRENT DEPUIS 2002 (AVEC UNE PAUSE !)
DJ et organisateur d’événements Par Caroline Lévy Photo Christophe Urbain
— Son utilisation Citiz
— Son astuce mobilité
« Je n’utilisais mon véhicule que 2-3 fois par mois pour des virées à la campagne et quelques courses en Allemagne. Financièrement, je me suis vite rendu compte que Citiz était beaucoup plus intéressant et je n’ai plus de soucis de stationnement dans le quartier de la Krutenau. Aujourd’hui, mon utilisation est à la fois personnelle et professionnelle : des petites voitures pour déposer ma fille à la danse et des utilitaires pour chercher des musiciens à la gare et transporter leur matériel. »
« Alterner vélo et Citiz ! Les distances paraissent parfois longues alors qu’en se motivant pour les faire à vélo, on se rend compte que c’est beaucoup plus accessible. Les quartiers de la Coop et de la Meinau, où je dois me rendre régulièrement, sont finalement à deux coups de pédales ! »
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Pascale Richter
ADHÉRENTE DEPUIS 2013
Architecte Par Caroline Lévy Photo Christophe Urbain
— Son utilisation Citiz
— Son action mobilité
« C’est toute l’agence Richter architectes et associés qui est convertie à Citiz ! Pour commencer, aucun collaborateur n’arrive en voiture au travail. Ensuite, pour nos rendez-vous ou chantiers difficilement accessibles en train, tram ou vélo, nous utilisons Citiz depuis la station Gutenberg. À titre personnel, j’utilise le service pour me rendre en Allemagne, pour aller nager ou pour faire des expos ! »
« L’agence a été impliquée dans la mise au point stratégique des mobilités douces de l’éco-quartier Danube, en tant que co-urbanistes associés à l’agence Devillers et associés. Un projet d’aménagement qui a été lauréat dans la catégorie Mobilité de l’appel à projet éco-quartier 2009 du ministère de l’Écologie et du Développement durable. »
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Économie sociale et solidaire | Contexte
Construire ensemble Par Marie Bohner Illustration Claire Perret
Si l’économie sociale et solidaire (ESS) se développe au travers de l’engagement des associations, coopératives, entrepreneurs ou citoyens, l’implication des collectivités est cruciale pour engager des chantiers durables – d’un point de vue social et environnemental –, notamment à l’échelle de la ville. Pour Jeanne Barseghian, conseillère de l’Eurométropole, déléguée « soutien à l’économie sociale et solidaire », il en va de l’intérêt général. Cette économie, encore parallèle, ne saurait être envisagée sans un travail en commun d’acteurs d’horizons divers.
Comment l’institution que vous représentez peut accompagner des initiatives qui sont à la fois des projets de société et des projets entrepreneuriaux ? Un territoire a des besoins, les personnes qui y habitent ont des aspirations… Comment répondre à ces besoins ? Le but de la politique devrait être d’améliorer le bien-être des citoyens. Pour que les politiques publiques soient au plus près des besoins des personnes, il faut les faire avec elles. Habitants, acteurs associatifs ou entrepreneurs, on a besoin de travailler avec l’ensemble de ces acteurs. Parce que chacun détient une partie de la solution. La collectivité a son rôle à jouer dans la coordination des actions. Elle doit faciliter les initiatives citoyennes, ce qui émerge sur le territoire. Elle ne détient pas la vérité suprême, par contre elle a des moyens à sa disposition et une vision globale pour mailler le territoire par un ensemble de solutions. Avec l’ESS, c’est possible.
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Quelle est la place de l’ESS à Strasbourg ? Nous avons mis les acteurs de l’ESS au cœur de notre stratégie Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage (TZDZG). J’ai un très bon exemple de collaborations entre différents acteurs qui date de 2015 : la mise en place d’un service d’intérêt économique général (SIEG) sur la collecte des textiles. On cherchait un moyen de savoir exactement qui pose les conteneurs que l’on trouve sur l’espace public et où vont réellement les vêtements qui y sont collectés. Monter cela était un peu compliqué juridiquement. On s’est appuyé sur un article de droit européen qui encadre les SIEG. Nous avons été les premiers à le faire en France sur la question des déchets. Cet article permet à la collectivité de fixer le cadre de sa demande – critères sociaux, critères environnementaux, critères partenariaux, etc. –, à laquelle tout le monde peut répondre. Mais ce sont les acteurs historiques de l’ESS, des structures d’insertion par l’activité économique, qui ont proposé les projets les plus pertinents,
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Construire ensemble | Contexte
puisqu’on avait fixé des critères basés sur les réalités du territoire. Quatre structures ont été retenues, au lieu d’une seule entreprise : Emmaüs, le Relais Est, Vetis et Horizon Amitié. Et là, nous avons tout gagné. Non seulement nous avons réglé notre question de collecte des textiles – autant de choses qui ne partiront pas à la poubelle – et en plus nous avons généré de l’activité économique, de l’emploi à fort impact social.
« Nos collectivités ont tout à gagner à s’inspirer de ces modes de gouvernance à la fois horizontaux et ascendants, dans le dialogue et la co-construction. » Comment, en tant que collectivité, rester en veille sur des projets innovants et émergents en termes d’ESS ? Nous avons établi une sorte de cartographie avec les éléments qui permettaient de générer, favoriser ou identifier un projet d’innovation sociale. Aujourd’hui, l’Eurométropole est partenaire d’un projet qui s’appelle « Boostinno, boosting social innovation », un projet européen URBACT [programme d’échanges pour un développement urbain durable, ndlr]. Cela nous permet de travailler à l’échelle européenne sur ce qu’est l’innovation sociale. J’ai été à Turin l’année dernière et j’ai été bluffée par ce qu’ils ont pu mettre en place. Ce qui m’a vraiment frappée, c’est que c’est à la fois simple et compliqué. Les détonateurs sont des grands espaces réhabilités où se rencontrent, se frottent en permanence des acteurs de sphères très différentes : culturelles, économiques, scientifiques, universitaires… C’est de ce frottement qu’émergent les innovations. Ce qui était intéressant aussi, c’était de voir que l’écosystème est structuré. De ce frottement informel entre acteurs jusqu’à la réalisation, toutes les étapes sont pensées et, à chaque stade du cycle, il y a des structures en capacité d’accompagner les projets, de l’émergence à la réflexion sur le modèle économique, et in fine sur le changement d’échelle et la généralisation. C’est très inspirant pour nos projets, des lieux comme KaléidosCOOP (lire page 49). Nous travaillons sur notre propre écosystème de l’innovation sociale en voyant ce que nous avons et où sont les trous dans la raquette.
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Le Conseil de l’ESS est aussi l’outil stratégique de ces frottements à l’Eurométropole. Quelles ont été les actions majeures de ce Conseil ? Ce qui est intéressant, c’est que le Conseil de l’ESS irrigue l’ensemble de nos politiques publiques. Il a produit de nombreuses contributions à la feuille de route de développement économique pilotée par Catherine Trautmann. On retrouve donc l’ESS de façon transversale : dans l’entrepreneuriat, dans l’emploi et les compétences, dans l’innovation, avec un fort focus sur l’innovation sociale, dans des projets phares comme le Pôle territorial de coopération économique KaléidosCOOP… Une autre contribution du Conseil de l’ESS concerne la gouvernance. Je crois que nos collectivités ont tout à gagner à s’inspirer de ces modes de gouvernance à la fois horizontaux et ascendants, dans le dialogue et la co-construction. En plus des outils comme le Conseil de l’ESS, y a-t-il d’autres modèles coopératifs, comme celui de Citiz, qui peuvent inspirer l’Eurométropole ? La forme juridique des SCIC est déjà en soi un modèle de gouvernance qui change tout. Là, ce qui est intéressant, c’est que les usagers sont directement partie prenante de l’évolution d’une politique. Cela fait le succès de la démarche. Les partenaires publics se sont donc demandés : « Comment faire de l’autopartage l’un des maillons de notre politique globale de mobilité ? » Cela se combine parfaitement avec un abonnement CTS. Et plutôt que de réserver une partie de l’espace public à du stationnement classique, la dédier à l’autopartage permet d’éviter la prolifération de la voiture en ville et inciter les gens, peu à peu, à se déplacer autrement. Je connais bien l’équipe de Citiz. Il faut rendre grâce à Jean-Baptiste Schmider : je le vois partout. Il a des antennes partout et est presque en anticipation, à l’affût de l’évolution du territoire et des nouveaux besoins qui peuvent émerger. C’est évidemment le modèle gagnant pour assurer le développement du service. Ne jamais s’endormir sur ses lauriers. Toutes les présentations de Citiz commencent par : « Notre but c’est qu’à terme il y ait de moins en moins de voitures en ville, avec une utilisation toujours plus réduite. » Cela montre bien que l’objectif de Citiz, c’est le changement de la politique de mobilité globale. Et cela rencontre directement l’intérêt général et la politique de la collectivité.
L'autopartage, Strasbourg pionnière !
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Construire ensemble | Portraits
L’AJA : les guides engagés Par Paul Kempenich Photo Dorian Rollin
Depuis 1989, la coopérative de tourisme AJA œuvre pour faire découvrir le patrimoine régional à travers un tourisme solidaire, participatif et ouvert à tous, adapté aux envies des voyageurs. Elle regroupe 27 adhérents – dont Citiz – implantés sur l’ensemble du territoire alsacien et qui partagent les mêmes valeurs. « Nous proposons de l’hébergement dans des organismes du tourisme social et solidaire pour des groupes allant de la classe découverte au séminaire d’entreprise, en passant par des séjours séniors ou des groupes de touristes familiaux plus classiques. Nous avons également au sein de la coopérative des guides touristiques et même une association qui met en place des jeux de piste historiques permettant de faire découvrir aux touristes certains quartiers de Strasbourg à travers leur histoire et leurs éléments architecturaux caractéristiques. » L’AJA se veut
également d’utilité publique en veillant à s’ouvrir à tous : « Nous avons vraiment la volonté de faire profiter de notre offre de séjours à des personnes en difficulté, qui ne sont jamais parties en vacances ou alors il y a très longtemps. Par exemple, notre programme Séniors en vacances permet à des séniors non imposables, qui ont très peu de revenus, de rompre leur solitude et de partir une semaine grâce à la participation des collectivités et des caisses de retraite. » L’idée est aussi de “former” des touristes responsables : « Grâce au tourisme participatif, les personnes sortent de leur statut de simple visiteur pour s’impliquer et travailler aux côtés de différents acteurs de la vie quotidienne du territoire. Par exemple, en participant à la rénovation d’un château fort, à la cueillette de fruits et légumes avec un agriculteur ou à la préparation de ces produits sous la supervision d’un chef réputé… » 48
Les différents adhérents qui rejoignent la coopérative bénéficient par ailleurs d’un accompagnement professionnel et du réseau constitué autour de l’AJA : ainsi, les professionnels du tourisme sont plus sensibilisés à l’impact de leur activité, peuvent mettre en place un plan d’actions concrètes pour préserver l’environnement et adapter leurs offres à tous. — www.aja-tourisme.fr Mélanie Kuntz, responsable communication et Sandra Fourcade, directrice générale de l’AJA, adhérente Citiz, à Mittelwihr.
La Maison de l’emploi : les coopérateurs Par Paul Kempenich Photo Christophe Urbain
Agathe Binnert, directrice adjointe de La Maison de l'emploi, et Guillaume Kieffer, chef de projet, travaillent ensemble depuis 2011 pour coordonner les acteurs de l’emploi et de la formation. Permettre la rencontre entre les collectivités territoriales, les organismes d’accès au travail et une quinzaine d’entreprises dynamiques et créatrices d’activité, « c’est notre moyen de favoriser le retour vers l’emploi ». « Il y a de grandes inégalités. Dans certains quartiers strasbourgeois, le taux de chômage chez les jeunes est quatre fois plus important que sur le reste du territoire. C’est une forte préoccupation pour La Maison de l’emploi. Notre priorité c’est de ramener vers l’emploi des personnes qui n’ont pas connu le monde du travail depuis longtemps. » Il s’agit donc de reconstruire des liens, mais aussi d’en créer de nouveaux avec les territoires voisins : « Les besoins de notre
voisin allemand sont complémentaires avec les nôtres. Avec un taux de chômage très bas, 3,5%, le bassin de l’Ortenau est très demandeur en main-d’œuvre venue de France, où les offres d’emploi se font rares. C’est cet esprit de travail en commun, de coopération, qui a posé les jalons du projet KaleidosCOOP. » Censé voir le jour en 2020 sur un terrain de 2 800m2, KaleidosCOOP est un projet mûrement réfléchi, en collaboration avec la Chambre Régionale de l’Économie Sociale et Solidaire et la coopérative Cooproduction. « Depuis longtemps, nous avions le projet de rassembler dans un lieu commun les différents acteurs avec qui nous travaillons. Quand on a eu l’opportunité de s’installer à la Coop, le projet a pris une toute autre dimension. On a imaginé des espaces de co-working, un espace dédié à l’innovation sociale et la proposition d’une offre de services plus développée. Nous avons aussi la 49
volonté de faire de KaleidosCOOP un véritable pôle du travail transfrontalier, une dernière étape pour les travailleurs avant leur passage Outre-Rhin. » Au-delà d’un simple espace de travail, le projet a pour vocation de devenir un véritable lieu de proximité où les habitants du quartier du Port du Rhin pourront se retrouver, échanger, se détendre, profiter d’expositions et d’animations et trouver des produits de l’économie sociale et solidaire. « Nous espérons que les habitants du quartier se l’approprieront aussi comme un lieu de flânerie familiale. » — www.maisonemploi-strasbourg.org Guillaume Kieffer et Agathe Binnert de La Maison de l'emploi, adhérente Citiz, à la Coop, à Strasbourg.
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Construire ensemble | Initiatives
Sérial-entreprises apprenantes Par Marie Bohner Photo Henri Vogt
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ierre Hoerter est le PDG de la SCIC Solivers, société créé en 2012 réunissant des entreprises œuvrant pour plus d’inclusion dans le monde du travail. Les activités de la coopérative s’étalent de l’appui aux entreprises de l’économie sociale et solidaire, à l’entretien des espaces verts jusqu’aux métiers de la bouche. L’enfance de Pierre Hoerter l’a baigné dans le monde paysan, de la vigne à la polyculture. Pour lui, aller vers les personnes en situation de handicap répondait à la fois à une logique de ressources humaines, à une période – révolue – de plein emploi dans l’agriculture, et à un projet sociétal alliant solidarité et dignité. Ces appétences lui ont fait questionner les process, les compétences, la capitalisation. « Une entreprise se doit d’apporter des acquis à ses salariés. Si on n’est pas en mesure d’être apprenant dans toutes les sphères de l’entreprise, on a peu de chances d’être durable. » Pierre Hoerter est donc sans cesse en collaboration, à la recherche d’innovations qui pourraient venir consolider sa démarche. « Il y a deux piliers : le travail formant et la concurrence équitable. L’objet final est et reste que les personnes en situation de handicap trouvent un boulot dans nos entreprises, et dans les autres. Et ça, ce serait très immodeste de penser qu’on peut y arriver seul. » — Solivers 46 route Ecospace | Molsheim www.solivers.fr
Pierre Hoerter, PDG de Solivers.
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Trucs & astuces
Les coopératives, pourquoi ? Par Paul Kempenich
Organisations agricoles, de consommateurs, d’artisans ou de salariés, les coopératives revêtent aujourd’hui toute sortes de formes et se développent dans l’ensemble des secteurs d’activités et plus spécialement au sein de l’économie sociale et solidaire.
L
es coopératives sont des organismes autonomes d’entraide gérés par leurs membres. Elles sont le résultat d’un regroupement de personnes autour d’un idéal, de valeurs, « pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels », précise l’Union régionale des SCOP et SCIC, tout en adhérant à une éthique fondée sur l’honnêteté, la transparence et la responsabilité sociale. Profondément démocratiques, les coopératives ont pour vocation d’impliquer leurs membres en les faisant participer activement aux prises de décisions et à la mise en place des politiques, en appliquant la règle d’un homme = une voix. Très en vogue actuellement, l’organisation coopérative permet à certains secteurs en crise de trouver une nouvelle dynamique, notamment dans le domaine de l’agriculture où les projets de cultures vivrières ou de fermes pédagogiques fleurissent abondamment. Mis en place afin d’aider les coopératives à faire aboutir leur projet, le réseau des Unions Régionales propose un accompagnement et des conseils sur des sujets tels que « l’étude de la faisabilité économique d’un projet, l’organisation juridique des membres ou encore l’appui pour le montage d’un plan de financement ». « Nous mettons en place des outils de suivi adaptés et proposons également une formation sur la gestion coopérative en rendant visite aux organisations au minimum 2 fois la première année, puis au minimum une fois pour les année suivantes. » Deux formes de coopératives existent, les SCOP (sociétés coopératives et participatives) et les SCIC (sociétés coopératives d’intérêt collectif), ces dernières se démarquent par leur objectif et par leur fonctionnement. Leur activité présente un caractère d’utilité sociale et permettent d’associer différents types d’acteurs, qui ne se croisent d’ordinaire que rarement, autour d’un même projet. C’est une des rares formes d’organisations où vont pouvoir échanger, au sein du même comité d’administration, salariés, bénéficiaires, collectivités territoriales, bénévoles ou associations afin d’œuvrer dans la même direction. Un modèle d’avenir ! — www.les-scop.coop 51
• Envie collecte les appareils électroménagers usagés, les répare et les revend, accompagnés d’une garantie d’un an. L’association a par ailleurs le statut d’entreprise d’insertion. En achetant chez Envie, on participe donc à l’emploi, tout en achetant de l’excellent matériel à des prix intéressants. L’association livre vos achats et récupère votre ancien équipement. www.envie-strasbourg.com • Fondé par un collectif d’habitants, L’Accorderie de Strasbourg est un système solidaire d’échanges de savoirs et de services entre personnes à partir d’une banque de temps. www.accorderie-strasbourg.fr • Chez Carijou à Strasbourg, on trouve une ribambelle de beaux jouets d’occasion réparés et préparés par des personnes éloignées de l’emploi. www.carijou.fr • Qui ne connaît pas encore Emmaüs ? Ce mouvement engagé pour combattre la pauvreté pense des lieux d’accueil et de vie qui fonctionnent grâce à la récupération et la revente d’objets. Au-delà de ces espaces où on aime aller chiner, l’association lutte contre l’illettrisme, gère, construit et réhabilite des logements sociaux, héberge et accueille. www.emmaus-france.org • Le Stück est la monnaie citoyenne de Strasbourg. Pourquoi ? Pour encourager le commerce local, faire en sorte que la monnaie soit échangée en circuit court et sans l’intervention des banques, pour saluer les démarches responsables, entre autres. www.lestuck.eu
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Construire ensemble | Initiatives
VALORISER LA VIE
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Prendre racine Par Paul Kempenich Photo Henri Vogt
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oilà 16 ans que l’association Les Jardins de la Montagne Verte est au service d’une double cause : la réinsertion sociale et l’agriculture biologique. Chaque année, une centaine de personnes en situation de détresse sociale ou professionnelle sont accueillies pour faire fonctionner l’une des rares exploitations agricoles urbaines de France. L’activité de l’association s’inscrit dans une logique de développement durable en proposant à ses adhérents des produits frais, issus d’une production de proximité et de l’agriculture biologique de manière certifiée. Aux Jardins, pas de gaspillage, les invendus sont transformés
en confitures ou coulis. Destinés à être consommés par des citadins proches de l’exploitation, les produits sont distribués sous forme de paniers de légumes de saison ou en vente dans l’épicerie de l’association où sur leur marché mensuel. Pour les adhérents, c’est aussi une manière de soutenir la réinsertion de ces personnes qui, en plus de la pratique d’une activité valorisante, bénéficient d’un suivi social et professionnel pendant les 6 mois de leur contrat de travail, qui peut être renouvelé jusqu’à 2 ans. — Les Jardins de la Montagne verte 5, avenue du Cimetière www.jardins-montagne-verte.com
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ibre Objet est une belle idée née dans un lieu peu propice aux perspectives d’avenir : le milieu carcéral. À l’origine appelé Objets Détenus, le projet permettait aux détenus de la maison d’arrêt de l’Elsau de s’évader un moment par la création d’œuvres artistiques. En 1997, quand les subventions viennent à manquer, le projet fait sa mue et sort des murs de la prison tout en restant fidèle à sa vocation. Aujourd’hui, l’idée est simple : en passant par l’art et la création, il s’agit de créer une structure d’accompagnement et d’insertion dans le monde du travail pour les personnes les plus démunies. Une soixantaine d’artistes créent et mettent à disposition leurs œuvres dans le but qu’elles soient reproduites manuellement en petites séries et vendues par les salariés de l’association. L’équipe propose dans un premier temps un suivi socioprofessionnel à ces personnes en grande difficulté, mais Libre Objet est avant tout la promesse de l’exercice d’une activité valorisante avec, à la clé, l’assurance d’un statut professionnel, un CDD de 6 mois renouvelable jusqu’à 2 ans maximum. En plus, l’équipe pédagogique assure des formations dans différents domaines comme le perfectionnement de la langue française, les mathématiques ou encore l’aide dans la recherche d’emploi. (P.K.) — Libre Objet 91, route des Romains www.libreobjet.com
Trucs & astuces
Photo : Gérard Dumora
• L’association Zéro Déchet Strasbourg lance le Défi Foyers Zéro Déchet. L’idée ? Accompagner bénévolement les foyers sélectionnés (diagnostic, contraintes, ateliers, etc.) pour réduire d’au moins 30% leur part de déchets. www.zerowastestrasbourg. wordpress.com
Tisser l’espace
L’
association Vortex X s’est créée autour de Gérard Dumora, éco-designer, et d’une idée : valoriser le recyclage et sensibiliser le public à la protection de l’environnement en passant par la création artistique. À partir de rebuts de l’industrie textile fournis par des entreprises volontaires, les membres de l’association donnent vie à une installation faite de bandelettes, tendues
d’un point à un autre. La multiplicité de ces fils aboutissent à une toile, à la manière de celle d’une araignée. Investissant monuments, espaces publics ou friches, ces créations éphémères interpellent le public qui, curieux, se laisse attraper dans ses filets. Tisser une toile pour tisser du lien. (P.K.)
FAIRE LE LIEN
démarches de développement durable ». Les adhérents bénéficient de tous les avantages d’un réseau d’entreprises : échanges de compétences, mises à disposition d’outils (comme la mise en place d’un bilan carbone) ou encore accompagnement par des professionnels du développement durable. Chacune de ces sociétés doit signer un contrat, rendu public, l’engageant à s’impliquer et à s’améliorer dans le domaine du développement durable avec des objectifs « chiffrés et mesurables ». Cet engagement est aussi une vitrine pour les entreprises, leur permettant de se démarquer de la concurrence par les valeurs qu’elles transmettent. (P.K.)
A
ccompagner les entreprises pour un changement de pratiques et d’état d’esprit vis-àvis de la protection de l’environnement, assurer le progrès social et garantir l’efficacité économique, voilà les leitmotivs de Idée Alsace. Ce réseau, qui regroupe plus de 100 sociétés – dont Citiz – dans un grand nombre de secteurs d’activité, de l’artisanat à l’énergie en passant par l’industrie agroalimentaire, se définit comme un « laboratoire permanent de
— www.vortex075.com
— www.ideealsace.com
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• Le Marché Bus a été créé en mars 2017 par un groupement de sept producteurs alsaciens. Il sillonne chaque jour les communes de l’Alsace du Nord et propose des produits locaux, issus de l’agriculture biologique ! www.marchebus.eu • Pour entretenir sa chaudière, on fait appel à la coopérative Génie climatique de l’est, une des rares moyennes entreprises responsables qui encouragent la solidarité et la responsabilité de chacun de ses salariés. www.gce67.fr • SYNE est une toute jeune start-up strasbourgeoise qui a développé une plateforme web et mobile où des parents peuvent se mettre en relation avec des professionnels de la petite enfance, des baby-sitters et bénévoles compétents pour faire garder leur(s) enfant(s). Un concept social et solidaire pensé par des parents ! www.gardedenfantspourtous.fr • Antigone est une coopérative d’activités et d’emploi (CAE) qui propose aux porteurs de projets de devenir entrepreneursalarié. Chacun peut tester, développer et pérenniser son projet d’entreprise tout en étant salarié de la CAE. Une alternative aux start-ups. www.antigone.coop
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FABRIQUER, INVENTER, PARTAGER
Vaincre la précarité
C
résus (Chambre régionale du surendettement social) est une association née en Alsace il y a 25 ans, réunissant juristes et bénévoles qui s’attachent à venir en aide aux ménages en situation de surendettement. Aujourd’hui, 25 associations similaires sont fédérées par un réseau national et sont réparties sur 18 régions. Bien souvent dépassées par la situation et engagées dans la spirale de l’isolement, les personnes surendettées trouvent chez Crésus une oreille attentive pour les accueillir, les informer, les accompagner afin d’identifier les meilleures solutions à leurs problèmes. Au-delà d’un suivi personnalisé par téléphone ou directement dans les bureaux de l’association, Crésus c’est aussi des émissions de radio régulières construites par des journalistes, artistes, juristes et DJs visant à écouter, encore et toujours, et sensibiliser le grand public. L’association propose également des groupes d’échanges et de paroles afin de mettre en commun l’expérience de chacun et d’ouvrir le dialogue. Un travail ultra-bienveillant mené par une équipe formidable ! (P.K.) — www.cresusalsace.org
FINANCER L’EMPLOI
A
lsace Active est un financeur solidaire pour l’emploi. Membre du réseau national France Active, l’organisme apporte son soutien aux personnes en difficulté : chômeurs de longue date ou en situation de handicap, pour les aider dans la création de leur entreprise. Il propose également son expertise aux organismes de l’économie sociale et solidaire. Sa devise, « mettre la finance au
service de l’emploi », se traduit concrètement par une expertise financière, un apport en fonds propre ou encore la possibilité de fournir une garantie bancaire en prévision d’un prêt. Les résultats sont là : après 5 ans, 80% des entreprises soutenues réussissent leur lancement. (P.K.) — www.alsaceactive.fr
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I
nstallé à Hautepierre, le collectif Horizome se bat depuis 2009 pour recréer un imaginaire collectif de ce quartier, autour de projets d’urbanisme participatifs et d’actions artistiques dans l’espace public. L’association regroupe des personnes issues du monde de l’art, de la recherche ou encore de l’architecture. Ce partage de compétences aboutit à la création de projets originaux comme la mise en place de résidences d’artistes dans le quartier, ou le déploiement d’outils numériques, véritables vecteurs de décloisonnement pour Hautepierre. En 2015, l’événement Fabriquer, inventer, partager, co-construit autour des métiers et des usages du numérique avec AV.Lab et le Shadok, est un des projets phares d’Horizome. Le collectif propose des actions culturelles qui recréent du lien entre les habitants, associations et institutions, tout en améliorant durablement la vie quotidienne. Pendant trois ans, tous ont travaillé dans la convivialité pour réaménager la place Erasme avec de multiples structures en bois qui créent un jardin public et une aire de jeu pour les enfants. (P.K.) — www.horizome.org
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Construire ensemble | Citiz vu par
Fanny Pruvost Elisabeth Kulus Matthieu Bafaro ADHÉRENTS DEPUIS 2007
Animatrice « Alimentation durable » Directrice de l’équipe permanente Animateur « Nature » Association SINE Par Paul Kempenich Photo Christophe Urbain
— Leur utilisation Citiz
— Leur pierre à l’ESS
« Le parti pris de l’association est, depuis 2007, de soutenir le système d’autopartage à Strasbourg qui contribue à la cohérence de notre association vis-àvis de la protection de l’environnement. On sort de plus en plus de la ferme Bussière pour faire des interventions, dans les écoles par exemple, souvent avec du matériel pas facile à transporter à vélo, c’est donc très pratique pour nous d’avoir accès à un véhicule quand on en a besoin. »
« À la ferme Bussière, notre public historique, c’est le scolaire. Ce que nous souhaitons apporter, en plus de notre mission de sensibilisation et d’éducation à l’environnement, c’est une approche différente qui vienne compléter le programme scolaire. De la maternelle au lycée, on propose à l’enseignant des activités qu’il pourra choisir en fonction de la thématique qu’il souhaite aborder en cours. Tout à l’heure, un groupe de CE1 a pu venir observer les crapauds dont ils avaient étudié l’évolution en classe. » www.sinestrasbourg.org
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Eve Chrétien ADHÉRENTE DEPUIS 2007
En charge du pôle logement et assistante sociale pour l’association l’Étage Par Paul Kempenich Photo Christophe Urbain
— Son utilisation Citiz « Je n’ai pas de voiture, j’utilise le vélo pour aller travailler. Citiz me permet d’être plus mobile et flexible sur des trajets où je perdrais beaucoup de temps à vélo ou en transports en commun. J’ai également été attirée par la dimension écologique de la coopérative. Le fait de devoir réserver la voiture permet un usage plus raisonné, on est moins tenté de l’utiliser pour un déplacement qu’on pourrait faire à vélo, par exemple. »
— Citiz, un atout pour l’aide à la personne ? « Notre métier, c’est de fournir un logement aux personnes sans domicile et de les accompagner au quotidien pour qu’elles puissent retrouver une autonomie locative. On passe donc beaucoup de temps à traverser l’Eurométropole pour rencontrer les bénéficiaires de l’association, faire des courses avec eux, visiter des appartements… Avec Citiz, on peut se rendre très facilement dans les quartiers périphériques. » www.association-etage.fr
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Carnet d'adresses
CONSOMMER MIEUX Par Cécile Becker Illustration Claire Perret
Sensibles à la protection de l’environnement, les Français ne modifient pas (ou peu) leurs comportements, même si leur alimentation devient plus responsable, avec l’arrivée massive du bio dans la grande distribution. Mais comment repenser nos modes de vie de manière globale et durable ?
est un fait et il est incontestable : le modèle de consommation bâti au cours de la seconde moitié du XXe siècle trouve ses limites dans l’épuisement des ressources naturelles. Si les consommateurs, déçus d’un système – consumériste et même politique –, s’en détournent peu à peu, l’application d’un mode de vie totalement responsable prend du temps. Plus qu’un choix, c’est un vrai engagement fait de compromis et, il faut le dire, de restrictions et d’investissements financiers plus ou moins conséquents. La frontière entre le réfléchir et le faire reste immense. Pourtant, Pierre Charlemagne, éco-organisme chargé du traitement des déchets ménagers toxiques, le confirmait au journal Le Monde : « Désormais, l’urgence n’est plus celle de la prise de conscience, mais celle du passage à l’acte. » Reste que le nouvel urbain, construit de paradoxes, reste très attaché à son confort et au bien-être matériel offert par le capitalisme. Qu’elle ait 25 ou 40 ans passés, cette créature est mariée, pacsée, divorcée, avec ou sans enfants, au chômage, indépendante, salariée, au télé-travail. Elle avale un McDo le dimanche à 16h, et le lundi déguste une salade vegan parsemée de graines achetées en vrac et sans emballage, pratique indistinctement le yoga et le lever de canettes, voudrait consommer plus de fruits et légumes et profiter du marché du coin mais adore traîner au lit, regarder une série ou préfère se consacrer à sa.es progéniture.s. Ce nouvel urbain a peu de temps et l’industrie mondialisée et connectée lui sert toutes sortes de produits, tout de suite, sur un plateau d’argent, à des prix très raisonnables, très souvent au détriment de ceux qui les fabriquent. Quelques signes restent cependant encourageants : en 2016, dans 34% des foyers français, au moins une personne tendait à réduire sa consommation de produits d’origines animales – particulièrement 58
énergivores –, quand 54% des Français attendent des produits naturels dans leur assiette et 45% d’entre eux préfèrent les produits sans OGM. La part de l’alimentation bio a bondi de 20%, en témoignent les rayons de plus en plus complets consacrés à cette alimentation dans les supermarchés. Mais il y a bio et bio. Les importations par avion représentent par exemple plus de 10% des consommations d’énergie et 24% des gaz à effet de serre sont générés par le transport des fruits et légumes importés en France. La loi Hamon de 2014 sur l’économie sociale et solidaire encourage cependant la réappropriation de l’économie locale et favorise les circuits courts. De plus en plus d’éleveurs et producteurs se lancent, certains en territoires urbains, et investissent parfois des lieux improbables comme des parkings désaffectés, des tunnels ou des friches industrielles en s’appuyant sur les nouvelles technologies. Force est de constater que les Français commencent leur aventure responsable par l’assiette. Un besoin indispensable. Et c’est ça dont il est question. Peut-être devrions-nous commencer par nous demander de quoi nous avons réellement besoin ? Qu’est-ce qui nous est essentiel ? Qu’est-ce qui au contraire est artificiel ? Au-delà de ces besoins matériels, André Gorz, l’un des grands penseurs de l’écologie, parlait de la nécessité de se cultiver, de faire preuve d’autonomie et de créativité manuelle et intellectuelle, autant que de celle de prendre part à la vie de la cité. Un besoin qu’il appelle « qualitatif » et qui rappelle aussi l’exigence d’une politique plus ascendante, plus inclusive et participative pour construire un imaginaire collectif loin des discours moralisateurs. Consommer mieux, oui, mais aussi impliquer pour un futur positif.
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Consommer mieux | Reportage
LOCAL À DOMICILE Par Cécile Becker Photos Christophe Urbain
Adossé à la production de L’Îlot de la Meinau, Christophe Moegling propose avec Au petit marché d’Alsace un maraîchage local livré à domicile et chez certains restaurateurs, en Citiz, s’il vous plaît ! Reportage.
E
n longeant la route de la Fédération,on a beau lorgner à droite, à gauche : aucun indice ne témoigne de la présence d’une ferme urbaine, juste une succession de murs gris où vient résonner le tintamarre des voitures. Quand soudain, apparaît sur notre droite un panneau puis une succession de serres, nous y voilà : L’Îlot de la Meinau. 11 hectares de terres, 6 000 m2 sous serres, 40 variétés de fruits et légumes cultivés et préparés sur place dans le respect de l’environnement (agriculture raisonnée) et du personnel qui y travaille. Une boutique, des partenariats avec des producteurs environnants pour les produits laitiers, les jus de fruits et la viande, un système de paniers à récupérer en drive ; le tout pensé par Geoffroy Andna, Jean-Nicolas et Daniel Hoerlé. Ami des trois agriculteurs, Christophe Moeglin a développé Au petit marché d’Alsace, un service qui permet aux professionnels et particuliers de se faire livrer les productions de L’îlot, directement chez eux. « Je travaillais auparavant dans la logistique autour de produits alimentaires pour le compte de sociétés de transports allemandes, raconte-t-il. J’avais envie de revenir au produit, de pouvoir toucher la marchandise et de participer au commerce de proximité. » Dans la boutique,et aidé par le personnel, le voilà finalisant les dernières commandes à livrer ce matin aux restaurants du centreville, avant de nous faire visiter l’exploita-
tion – probablement la seule offrant une vue si majestueuse sur la cathédrale. S’il ne fait « que » livrer les produits de L’Îlot, il connaît sur le bout des doigts l’agenda des cultures et les produits qu’il vend. Là, il nous parlera de la mâche cueillie sous nos yeux et livrée quasiment dans l’heure au restaurant Chez Yvonne, plus loin des asperges récoltées dès le mois d’avril et du goût inimitable des tomates en été. Dès le début, Christophe Moegling a fait le choix de livrer en Citiz : « Je voulais rester dans un circuit totalement responsable et faire en sorte que mon activité soit moins génératrice d’empreinte carbone. L’autopartage me paraissait la bonne solution. Les avantages ? On adapte la voiture au chargement – même si finalement, j’utilise quasiment toujours la même –, et à la fin du mois, on a une facture globale très précise. Quand on gère une entreprise, ce genre de détail a son importance. » En bon gestionnaire, il nous confiera plus tard : « Sur 10 000 kilomètres par an et en comptant l’amortissement d’un véhicule, l’assurance, l’entretien, l’essence, la location d’un garage, on fait une économie d’environ 100 € par mois… » Christophe Moegling y trouve son compte et le consommateur aussi : « Là, on est vraiment sur du circuit court puisqu’on livre dans un rayon de 7 kilomètres maximum. C’est même du porte-à-porte, sans intermédiaire, sans revendeur. Les clients bénéficient du tarif producteur augmenté de 2,50 € pour le service de livraison. » Du mardi au vendredi, notre livreur est sur la route : le matin pour assurer les commandes des restaurants, le soir et le samedi matin pour les 60
particuliers. Nous l’accompagnons pour sa tournée de livraison aux restaurants : « Ces restaurants jouent le jeu, on a lié de vraies relations avec eux. Beaucoup nous consultent avant d’élaborer leurs cartes. » Bien plus qu’un livreur, Christophe Moegling est un partenaire, ce que l’on constate en arrivant Chez Yvonne, aux trois enseignes Pur etc., et à la Solidarité. En théorie et en fonction des quantités, un allerretour suffit à honorer ses commandes, en pratique, il arrive – comme ce matinlà – que Christophe Moegling, se rendant compte d’une erreur, revienne au point de départ pour se ravitailler. Son organisation est relativement flexible mais tout de même suspendue à l’autorisation d’accès au centre-ville pour les livraisons, facilitées jusqu’à 11h. S’il connaît Strasbourg comme sa poche, à le suivre Grand’Rue pour livrer carottes et pommes chez Pur etc. (elles serviront à concocter des jus frais, les plats étant préparés en laboratoire avec les produits de L’Îlot), on comprend très vite à quel point cette contrainte peut être génératrice de stress. Lui garde son calme : « Les livreurs sont tous pressés, mais ça ne sert à rien de s’énerver. Je prends toujours le temps. » Impliqué dans le commerce local, Christophe Moegling se place néanmoins, par ses attitudes, ses choix et son discours engagé, en dehors d’un système obnubilé par le profit et la rationalisation. Il envisage, dans un futur proche, de livrer fruits et légumes en bateau. Affaire à suivre…
Ils lui font confiance… (… et sur la base de ce choix responsable, on leur fait confiance aussi.)
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Le Crocodile 1741 Pur etc. Chez Yvonne La Solidarité La Particule Les 2 Gourmandes Umami Café Berlin La Hache Le Caillou Doo En voiture Simone Le Jardin de l’Orangerie…
— L’Îlot de la Meinau 36, route de la Fédération www.lilotdelameinau.fr Au petit marché d’Alsace www.aupetitmarchealsace.fr 61
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Consommer mieux | Boire, manger
Le Bocal
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urfant sur la tendance éco-responsable, Le Bocal aligne farines (y compris sans gluten) et céréales en tout genre, pâtes, graines, fruits et légumes secs, épices et huiles. Le tout vendu en vrac avec comme objectifs : manger sainement et produire 0 déchet. On vient avec son contenant et on paye son contenu au poids. Le + ? Ceux qui ne seraient pas pourvus ou auraient envie de pimper leur cellier peuvent repartir avec des bocaux made in US Mason Jar. (S.D.) — 21, rue de la Krutenau Facebook : Le Bocal
Coffee Stub
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llier café et vélo, deux plaisirs quotidiens, c’est le pari de Vincent (ancien d’Esprit Cycles) et Ivan, les deux fondateurs du Maquis, le premier café-vélo à Strasbourg ouvert en février 2017. Ces deux amoureux de la bicyclette, et entrepreneurs avertis, se sont installés place d’Austerlitz dans une boutique à l’architecture bien pensée : bar et atelier au rez-de-chaussée, salle à l’étage où s’installer confortablement et observer les mécanos à l’œuvre à travers un sol de verre. Ici, c’est le relationnel qui prime : « Le but, c’est de rester comme on est, d’optimiser bien sûr mais de rester à échelle humaine », explique Ivan. Comme dans des lieux similaires à La Haye ou Londres, on peut faire réparer son vélo sans rendez-vous, acheter des pièces ou des vélos (neufs ou d’occasion) et même en louer. Voilà pour la partie deux roues ; pour le reste, nos mécanos sont aussi des amateurs de café. Formés par les baristas de la célèbre maison Lomi à Paris, ils parlent avec passion de leur blend des maquisards, à siroter en dégustant les pâtisseries de belle-maman et de Cassy’s Bakery. À venir : une belle terrasse où s’attabler près de sa monture. De quoi donner envie de prendre le maquis.
radi et trendy : c’est l’esprit Coffee Stub en deux mots. Avec ses chaises alsaciennes réinventées par Alix Videlier et Malo Mangin, ses tables gravées façon colombages signées du très arty Collectif-Butane, ce coffee shop strasbourgeois est l’impeccable vitrine de notre Alsace chérie. On y déguste des grands crus des cafés Sati, confectionnés par un barista formé au latte art avec une machine Reneka – fabricant installé à Rosheim. Sur le comptoir, on craque pour d’alléchantes pâtisseries (à partir de 2,50 €) : carrot cake, cheesecake mais aussi bretzel concoctés par Arnaud Massin, le maître de ces lieux. Il régale les clients de ses bons petits plats faits maison, avec les légumes de saison du plus couru des maraîchers : le toqué Jean-Michel Obrecht. Il prépare tajines, pot-au-feu, galettes qu’il présente dans des terrines de Betschdorf, créations de la céramiste Catherine Remmy. Du made in Alsace encore une fois. Nouveauté ? Les délicieux brunchs du samedi. (S.D.A.)
— 10, place d’Austerlitz Facebook : Le Maquis
— 12, quai des Pêcheurs Facebook : Coffee Stub
LE MAQUIS Par Aurélien Montinari Photo Christophe Urbain
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Consommer mieux | Boire, manger
SUPER MARCHÉS Par Paul Kempenich Photo Henri Vogt
Qui a dit que supermarché et production locale ne faisaient pas bon ménage ? Petit florilège d’enseignes responsables qui ont fait le choix du circuit court et de la qualité. Hop’la Hop’la est un magasin qui propose des produits fermiers locaux, frais et de qualité. Géré par des agriculteurs qui ont décidé de s’organiser en coopérative, son objectif est d’assurer une traçabilité maximale des produits, pour regagner la confiance des consommateurs. — 196, route de Saverne Oberhausbergen www.hopla-ferme.com
Biocoop Strasbourg Biocoop Strasbourg propose des fruits et légumes de saison, des produits locaux tous certifiés issus de l’agriculture biologique et sans OGM. Une grande partie des produits sont vendus sans emballage, une manière de militer pour la sauvegarde de l’environnement ! — 6, rue de Sébastopol www.biocoop.fr
U Express Greif - Quartier des Quinze Plus qu’un supermarché, ce U Express est une véritable institution de quartier qui a fêté l’année dernière son 100e anniversaire. Le magasin a traversé les changements d’enseigne – Codec puis U express –, de modes de vie ou de consommation. Ne disposant pas d’une très grande surface, seulement 400m2, ni d’une très bonne exposition, le supermarché a choisi de se démarquer des concurrents de la grande distribution et propose des produits du terroir en travaillant en étroite collaboration avec les producteurs de la région. L’idée est que chacun, client comme agriculteur, y trouve son compte et puisse vivre de son travail. Comme quoi, certaines grandes enseignes peuvent faire des choix responsables ! — 51, rue de l’Yser 67, rue Boecklin www.magasins-u.com/ uexpress-strasbourgyser
Rayon fruits et légumes d’Alsace chez U Express, rue de l’Yser
Le Marché Frais de Stéphane Biot Ce grand marché couvert propose des produits de grande qualité dans tous les domaines de l’alimentation, de la boulangerie à la boucherie en passant par les fruits et légumes et les poissons. Son créateur, Stéphane Biot, affiche la volonté de permettre à un maximum de gens de manger bon et sain à des prix raisonnables. Pour redonner le goût de cuisiner, des idées repas sont proposées, et une fois à la maison, il ne reste plus qu’à suivre la recette sur le site Internet ! — 51, rue de Strasbourg Mittelhausbergen www.sbiot.fr
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La Nouvelle Douane Cette supérette dédiée aux produits locaux permet aux citadins d’avoir accès à des produits fermiers, au cœur de la ville. Grâce aux 22 producteurs qui fournissent et font tourner le magasin, La Nouvelle Douane propose des produits frais et de saison, pour une consommation plus responsable. — 1a, rue du Vieux marché aux poissons www.lanouvelledouane.com
+ Des marchés de producteurs locaux dans les quartiers de l’Eurométropole, liste disponible sur www.marches-strasbourg.fr
1, rue des Soeurs Strasbourg 03 88 24 42 87 • 06 83 97 08 78 www.rustineetburette.fr
Cuisine Latino-Américaine Ouvert du lundi jeudi
vendredi & samedi
12h00 - 14h00 19h00 - 22h00
12h00 - 14h00 19h00 - 22h30
Restaurant Santa Elena 11, rue Sainte-Hélène - 67000 Strasbourg - 03 88 22 88 96
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Consommer mieux | Boire, manger
LA TORRÉ
Le Comptoir à manger
Par Cécile Becker Photo Henri Vogt
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orsqu’Olivier Wernert et Ny Aina Bernardson des Café Bretelles et Suspenders Coffee Shop quittent tout pour ouvrir leur premier coffee shop à Strasbourg, c’est auprès du torréfacteur lyonnais Mokxa qu’ils se forment au métier de barista. Bretelles et Suspenders se fournissent dès lors, quasiment exclusivement chez Mokxa (hors torréfacteurs invités) qui sélectionne avec soin les producteurs de cafés – agriculture raisonnée, cueillette des grains à maturité, à la main –, veille à leur rémunération juste et prend le temps d’expérimenter chaque torréfaction de grains de cafés pure origine (Rwanda, Guatemala, Costa Rica, Panama…) pour en tirer les goûts les plus fins. Olivier Wernert explique : « Il y a trois dates importantes pour le café : la date de la cueillette, la date de la torréfaction et la date de la mouture, tous ces éléments contribuent à un très bon café. » Passionnés, Olivier et Ny Aina ont donc décidé de s’associer avec
Par Juliette Comte Photo Sandro Weltin
Mokxa et Valérie Egele (une ancienne de Reneka, le fabricant alsacien de machines expresso) pour ouvrir leur propre atelier de torréfaction, juste en face de Café Bretelles. Ils torréfient le mardi, goûtent et empaquettent le mercredi, le reste du temps, avec Valérie, ils prospectent pour fournir restaurants et cafés alsaciens. Premiers clients ? In Vino Veritas, Le Maquis, la boulangerie-salon de thé L’Eden libre de gluten à Obernai. Ils proposent également des formations à leurs clients et des ateliers dégustation pour les particuliers. Parce que « la concurrence c’est bien, elle contribue à diffuser la culture du café de qualité » ! Classe.
B
érengère Pellissard et Carole Eckert proposent une cuisine responsable et instinctive. Fruits et légumes ? Ils proviennent des fermes de Marthe Keren ou Jean-Michel Obrecht. Les truites ? Des Sources du Heimbach. Le fromage ? C’est Antony à Vieux-Ferrette. Les assiettes ? De l’atelier L’Objet Tourné à Strasbourg. La liste est longue et permet d’élaborer un menu unique, midi et soir, à prix tout doux. La cuisine de Bérengère a ce qu’il faut pour vous mettre sur le grill de l’inattendu. Elle n’utilise ni poivre, ni épices, mais des herbes aromatiques ou le fumage – comme son mentor, Florent Ladeyn, de l’auberge du Vert Mont. Elle ne se dit pas pâtissière, mais enchante les tablées avec ses desserts aux notes acides, un peu sucrées mais pas trop. Carole accueille et décline avec précision, mais “à la cool”, un menu en 5 temps et suggère des accords vins ou bières qui tombent à pic. Exclusivement des vins nature, choisis pour leur structure et leur justesse, fournis par Jean Walch d’Au fil du vin libre. Ou des bières locales et artisanales, comme celle de la toute jeune micro-brasserie 3 Mâts, à Strasbourg. En seulement quelques mois, Le Comptoir à Manger s’est imposé comme une adresse feel good : nature, terroir, simple et actuelle. Réservation vivement conseillée !
— 56, rue de Zurich Café Bretelles 2, rue Fritz www.cafe-bretelles.fr
— 10, petite rue des Dentelles www.lecomptoiramanger.com
Suspenders Coffee Shop 36, rue du Bain aux plantes www.suspenders.fr www.cafemokxa.com
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LE GRAFFALGAR Par Sonia de Araujo et Cécile Becker Photos Henri Vogt
38 chambres décorées par 38 artistes, un rez-de-chaussée ouvert sur la ville, des brunchs toute la semaine, trois à quatre événements par semaine… l’hôtel Graffalgar ne dort jamais.
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e Graffalgar à Strasbourg est à l’image du nouvel urbain : un être hybride, difficilement réductible à une seule typologie, ni même à une seule génération. Foutraque et arty, il ambitionne de devenir un lieu de vie, ancré dans sa ville, dans son quartier et dans son temps, au-delà d’être un simple hôtel au concept déjà original en soi. En plus des 38 chambres, chacunes décorées par des artistes – photographes, illustrateurs, street-artists, etc. – la plupart locaux, le rez-de-chaussée et la Graffateria accueillent une multitude d’événements organisés avec les associations et structures de la ville : expositions, conférences, concerts, fêtes, DJs sets, lectures, ateliers. Ni cafétéria, ni salle de petit-déjeuner, ni salle de concert, mais tout à la fois, la Graffateria est une cantine sans chichis, où l’on peut manger des saucisses-lentilles, des tartes au mojito, des brunchs vegan ou non (et ce du mercredi au dimanche, preuve de l’adaptation sans faille de l’équipe à l’air du temps), préparés par la sémillante Élise Hausherr. La Graffateria est un lieu où l’on mange, où l’on se détend mais résolument fait pour l’échange. Pour Vincent Faller, comédien et directeur de
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l’établissement, l’hôtel ne doit pas ressembler à un « no man’s land pour touristes ». Son déclic ? Un séjour au Mama Shelter à Paris. « Le lobby était blindé. Il y avait une ambiance incroyable. Tout le monde y venait boire un verre, écouter de la musique », se souvient-il. Cette ambiance libre, décontractée et jamais dénuée de fantaisie déteint forcément sur l’hôtel qui affiche très souvent complet. On ne vient pas seulement au Graffalgar pour dormir mais aussi pour vivre la ville et ressentir sa vitalité. Le tout dans un espace contemporain – mélange de bois brut, de métal et de béton, habillé de luminaires finement ciselés, de cordages aux lignes graphiques, conçu par les designers des Ateliers Bah et le Fablab du Shadok – qui évolue en fonction de l’heure de la journée. Ainsi, habitants et touristes se croisent sans cesse dans une atmosphère détendue qui sied particulièrement au cosmopolitisme du quartier. Un hôtel très particulier où il fait bon vivre ensemble. — 17, rue Déserte www.graffalgar.com
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Consommer mieux | Boire, manger
Consommer mieux | Se pomponner
Du pain, du vin et encore du vin 5 adresses où se mettre du (très bon) rouge (ou blanc) aux lèvres.
Au fil du vin libre
Oenosphère
Personnifiée par l’esprit libre Jean Walch, cette cave est un passage incontournable pour les curieux et amateurs de vins naturels. On y trouve pas mal de pédagogie, beaucoup de bonne humeur, d’excellentes quilles d’ici et d’ailleurs et parfois même, s’il en reste encore, de très bons cubis nature.
Dix années que Benoît Hecker, caviste alternatif et maître des lieux, s’est consacré à ce qui l’anime le plus : le partage, la convivialité et la transmission. Oenosphère est une cave de bon goût et un bar à vins qui propose également petite restauration et des cours d’œnologie le mercredi soir.
— 26, quai des Bateliers www.aufilduvinlibrestrasbourg.com
— 33, rue de Zurich www.oenosphere.com
Verre de terre
Jour de Fête
Tout pour le bio, la biodynamie et le naturel. Avec passion et émotion, Florence Brouillard rend hommage aux terroirs, aux hommes et aux femmes qui cultivent le bon vin.
On y mange délicieusement bien, on y boit des vins qui sortent de l’ordinaire, on y fête régulièrement les vignerons, on y achète aussi des bouteilles… Bref, dans cette caverestaurant, l’assiette et le verre saluent le produit, le plus authentique et naturel possible, et tout est prétexte à un jour de fête.
— 28, rue des Juifs www.verredeterre.gandi.ws
Entre deux verres On le dit caviste militant. Alexis Quelqueger met un point d’honneur à ce que ses vins soient les plus naturels possibles, et surtout qu’ils puissent être accessibles à toutes les bourses.
MAGIC PYQ PYQ Par Séverine Manouvrier Photo Henri Vogt
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près avoir été le premier salon strasbourgeois à proposer un espace enfants, Magic Pyq Pyq se distingue depuis 2010 par son label « Développement durable, mon coiffeur s’engage », en obtenant le plus haut niveau de qualification (3 étoiles). Marc Musiol, Élisa et Cécile vous invitent dans un espace dédié aux produits naturels, déserté par la presse people et les champs électromagnétiques ! Vous pouvez opter pour une coloration végétale, des soins aux huiles essentielles (utilisés à bon escient et avec précaution), profiter d’une séance de luminothérapie pendant le temps de pose ou lire des ouvrages sur les plantes et les massages. Entre deux passages, le bar à shampooing vous permet de recharger vos bouteilles vides, avec la satisfaction de réduire vos déchets et le coût de vos produits. Pour tout achat d’une couleur Gaïa, la marque reverse une partie de ses bénéfices aux associations Un Toit pour les abeilles et Un Arbre champêtre, tandis que le salon consacre 1% du chiffre d’affaires généré par les colorations végétales à l’association Haies vives Alsace. Un salon écoresponsable qui a tout compris !
— 6, rue Sainte-Catherine www.jourdefete-strasbourg.fr
— 6, rue de l’Yser www.magicpyqppyq.fr
— 9, rue Rathsamhausen www.entredeuxverres.fr
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Z U T CIT IZ
Consommer mieux | Décorer, s'habiller
Consommer mieux | Aménager
FORGIARINI
Le Générateur Boutique de créateurs
Par Paul Kempenich
L’
Par Cécile Becker Photo Henri Vogt
L’
association Art & Matières et le collectif J’te laisse l’appart’ accueillent les créations d’une bonne vingtaine d’artistes et artisan.e.s, la plupart locaux, surtout attentifs aux matériaux qu’ils.elles travaillent. À la vente ? Une brouette de pépites dont les céramiques d’Emmanuelle Giora et de Clément Petibon, les bijoux d’Annie Sibert, les bougies Le Chat dans l’armoire, des carnets, des dessins, des trousses, des luminaires… Le tout vendu par les auteur.e.s eux-mêmes, qui assurent chacun leur tour la permanence. On adore !
histoire de l’entreprise Forgiarini commence en 1958 lorsque Jérôme Forgiarini, un paysan italien arrivé en Alsace pendant la Seconde Guerre mondiale, lance sa première affaire : une scierie à Kogenheim. 59 ans plus tard, 80 personnes travaillent ici, 13 sont de la famille. En plus de la scierie, l’entreprise s’est développée et est aujourd’hui spécialisée dans les matériaux de décoration, carrelage ou parquet. Leur fierté, c’est la qualité de leurs produits, certifiés par le label PEFC [Programme de reconnaissance des certifications forestières, ndlr], ce qui les engage à avoir une forte traçabilité des produits qu’ils proposent. Les Forgiarini veillent à mettre en avant le bois de pays plutôt que des bois tropicaux, pourtant très demandés par les clients. « Ce qu’on fait pour nos clients, c’est comme si
Juste en face… …la boutique Fibres & Formes propose une large sélection de vêtements éthiques, en matières naturelles et issus du commerce équitable. Chanvre, coton bio ou lin, chemises, robes, t-shirt ou pantalons aux coupes actuelles… Il y a là de quoi faire pour celles et ceux qui souhaiteraient appliquer un mode de vie responsable à leur dressing. — Fibres & Formes 15-17, rue Sainte-Madeleine www.vetementbio.com
— 8, rue Sainte-Madeleine Facebook : Boutique de créateurs Strasbourg
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on le faisait pour nous, affirme Jérôme Forgiarini, petit-fils du créateur de l’entreprise. Ma propre maison, celles de ma famille sont équipées avec notre bois, nos produits. Certains de nos clients viennent depuis trois générations, on a connu les grands-parents et maintenant on reçoit leurs petits-enfants. On se doit de proposer les meilleurs produits, les plus sains, pour eux comme pour nous. On essaie de rechercher le meilleur, pour le meilleur prix, pour tout le monde. » Conscients de l’importance du commerce local, les Forgiarini ont déposé le label Made In Elsass qui certifie la provenance des produits. — 4 showrooms en Alsace, à Vendenheim, Lampertheim, Kogenheim, Sausheim www.forgiarini.net
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Consommer mieux | Apprendre
LE SHADOK Par Cécile Becker Photos Henri Vogt
Focus sur cette fabrique du numérique ouverte il y a deux ans.
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omment simplifier l’action du Shadok alors qu’elle touche au vaste sujet de la culture numérique, dont on retrouve les applications partout ? Géraldine Farage, directrice de ce lieu, explique : « Notre rôle est d’accompagner les porteurs de projets, qu’ils soient artistes, entrepreneurs, ingénieurs ou chercheurs, de les mettre en réseau et de questionner l’outil numérique. » Il s’agit, par le prisme des nouvelles technologies, de participer à la fabrique de la ville, de penser le monde d’aujourd’hui et d’imaginer celui de demain. Deux mots essentiels ? « Transversalité et collaboratif. » À chaque nouvelle proposition, l’équipe du Shadok prend le temps de questionner le projet et d’établir des connexions avec d’autres acteurs pour le développer. Les résultats ne sont donc pas mesurables immédiatement. D’où l’idée, cette année, d’insister
sur « la narration autour de chaque projet » et d’impliquer plus encore les habitants en révélant « le processus de travail par le biais d’expositions, de conférences, d’ateliers ou de concerts. » « La difficulté, c’est que le Shadok n’est pas une médiathèque ou un théâtre, on ne sait pas toujours quand on peut venir », concède Géraldine Farage. Charge à chacun de se créer « un parcours utilisateur » à travers les différents temps de programmation dédiés à diverses thématiques. Grâce à un fab lab géré par AV.Lab, un espace de co-working animé par Alsace Digitale, un espace d’expositions et un tout nouveau Fab Café, le Shadok, adossé aux services de la Ville, se place en « laboratoire des usages ». Exemple ? Chaque mois, le projet Territoire zéro déchet, zéro gaspillage (URBACT) est débattu pour élaborer un guide des bonnes pratiques qui sera diffusé à l’échelle de la ville, puis de l’Europe. La programmation de ces prochains mois labellisée Strasbourg 72
Laboratoire de Demain s’attache à défricher trois thèmes croisés : la mobilité et les énergies renouvelables, la nourriture et les agricultures en ville, les objets et savoir-faire du quotidien à travers résidences, ateliers et conférences. Strasbourg dans 20 ans ? « Rayonnante, encore plus européenne, répond Géraldine Farage. Ici, l’avantage c’est qu’on ne se laisse pas avoir par l’appât du “pionnier”, on a le recul, on prend le temps de réfléchir aux usages car le bon outil n’est pas toujours numérique. » Une future Strasbourg que le Shadok prototype chaque jour. — Les dock’s 25, presqu’île André Malraux www.shadok.strasbourg.eu
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2017
la Corde à Linge fête ses 10 ans !
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Consommer mieux | Citiz vu par
Thierry Schmitt & Martial Deboeuf ADHÉRENTS DEPUIS 6 MOIS
Directeur Général & Président Sérue Ingénierie Par Paul Kempenich Photo Christophe Urbain
— Leur utilisation Citiz
— Ce que Citiz permet
« Nous avons une borne Citiz sur le parking de notre entreprise : nous sommes vite arrivés à la conclusion qu’avoir un véhicule à l’entière disposition de nos employés et collaborateurs permettait une utilisation plus pratique et intensive. Citiz est en cohérence avec les valeurs de notre entreprise, nous travaillons sur des projets de plus en plus respectueux de l’environnement, de plus en plus économes en énergie. C’était donc normal que l’on sollicite la coopérative. »
« Nous souhaitons changer cette habitude qu’ont les gens d’effectuer leurs trajets domicile-travail en voiture, et ce système nous permet d’être plus conscients de nos déplacements. En mettant à disposition ce véhicule sur le parking de notre entreprise, nous permettons à nos collaborateurs de venir en train ou à vélo et d’utiliser Citiz pour les différents déplacements qu’ils auraient à faire dans la journée. »
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Frank & Juliette Guéné ADHÉRENTS DEPUIS 2001
Autopartageurs de père en fille Par Paul Kempenich Photo Christophe Urbain
— Leur utilisation Citiz Franck : « Je suis devenu adhérent très tôt après le démarrage de l’association. Elle devait avoir 6 mois d’existence et s’appelait encore Auto’trement. J’ai dû faire partie des 15 premiers utilisateurs ! On a toujours habité en ville et, bien que nous possédions une voiture à l’époque, on ne l’utilisait que très rarement. Quand elle est tombée en panne, à la vue des frais de réparation, on s’est dit qu’on pourrait donner sa chance à ce nouveau service. Depuis, on n’a toujours pas racheté de voiture ! » 75
— Une utilisation familiale ? « Excepté ma femme, dans la famille on utilise tous Citiz. Juliette a fait ses premiers pas en tant que jeune conductrice avec les voitures de l’association : que des bons souvenirs ! En plus, il y a plusieurs modèles disponibles donc on peut choisir celui qui nous va le mieux. Quand c’est possible, on essaie de toujours prendre la même. Mon fils Lucien habite actuellement à Lille, mais grâce à sa carte Citiz d’ici, il peut aussi utiliser un véhicule là-bas, par le biais de Lilas, une entreprise affiliée au réseau Citiz. »
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Rêver demain | Reportage
Ungersheim : le paradis ? Par Cécile Becker Photos Christophe Urbain
Alors que bon nombre d’entre nous en sommes encore au stade de la prise de conscience, Ungersheim est passée à l’acte depuis plus de 15 ans et fait figure d’exemple. Entraînée par un maire aux idées moins révolutionnaires que pragmatiques, Ungersheim fait, tout simplement. Et fait aussi rêver.
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I
l ne nous reste que quelques mètres avant de franchir le panneau indiquant l’entrée de ce village de 2 500 âmes, dans le bassin historique de la potasse. Soudain, un arc-en-ciel fait son apparition, barrant les monts vosgiens. Un symbole qui force le sourire. Ce sera le seul : Ungersheim est un village alsacien en apparence comme les autres. Pour trouver ce champion international des villes en transition écologique – selon Rob Hopkins, fondateur du mouvement des villes en transition et habitant de Totnes en Angleterre, pionnière en la matière –, il faudra prendre le temps de le parcourir. Découvrir ses terrains d’agriculture vivrière, son parc photovoltaïque, ses chevaux ou son éco-hameau. Et se laisser guider, notamment, par son maire depuis 1989 (!), Jean-Claude Mensch, figure qui a pris le temps de faire infuser ses idées, pour laisser ses habitants s’en saisir. Comment ? En quelques verbes élémentaires.
Penser Jean-Claude Mensch est un ancien mineur passé par la CGT, qui a notamment éprouvé ses convictions écologiques en militant contre la centrale nucléaire de Fessenheim. Son credo ? « Prendre conscience, penser par soi-même, sortir du politiquement correct et de la pensée unique pour pouvoir se construire sereinement et durablement. » Et sortir d’un « système croissanciste basé sur un PIB qui ne tient pas compte de l’aspect social et environnemental et ne fonctionne que si l’homme en est dépendant. » « Ce système-là nous aliène comme aucune dictature n’a jamais réussi à le faire. » Pour en sortir, il a rapidement l’idée d’engager une transition intellectuelle, citoyenne, énergétique et alimentaire.
Jean-Claude Mensch, maire d'Ungersheim.
Rassembler
Éduquer
Lors de son premier mandat, Jean-Claude Mensch s’est concentré sur l’aspect social en créant la Maison des Jeunes qui propose des activités culturelles, sportives et artistiques. « Il s’agissait de créer du lien et un capital confiance. » Rapidement, le nombre d’adhérents passe à 2 000, dépassant le nombre d’habitant.e.s de la commune. Écouter, échanger, réfléchir ensemble puis agir. « Le courage politique est validé par l’électeur, contrairement à ce qu’on pense. On parle beaucoup et on n’agit pas suffisamment, c’est un mal français. »
Mais depuis 2009, Jean-Claude Mensch fait aussi en sorte que l’école soit sensibilisée et intégrée à ce grand chantier de transition globale. « L’équipe enseignante en est partie prenante » et fait participer les enfants à diverses actions et toutes sortes de défis : ils ont pu choisir la façon dont l’éolienne construite par les habitants allait être décorée, sont impliqués dans le défi Économie d’eau, de chauffage et d’électricité et gardent le lien à la terre en entretenant un jardin pédagogique. Plus impressionnant encore, ils sont conduits à l’école par l’un des chevaux municipaux, Richelieu, également chargé, avec un autre cheval, des travaux agricoles, de l’arrosage ou du transport d’outils. La cantine scolaire sert des repas 100% bio aux enfants de la commune et des environs.
Impliquer Le « point d’orgue » de cette transition est atteint en 2009 avec l’instauration de la démocratie participative. Dès lors, le conseil municipal implique « les citoyens dans la vie de la cité » et les responsabilise par le biais de cinq commissions participatives découlant du programme Vingtet-une actions pour le XXIe siècle. Chaque habitant.e peut les intégrer à condition qu’elle.il signe une charte qui atteste de son souci pour le bien commun. 50 habitant.e.s participent à ces commissions « qui sont à l’origine des changements et agissent directement », une centaine d’autres travaillent avec les diverses associations du village. Le maire pose les jalons, celles et ceux qui le souhaitent poursuivent. 77
Nourrir L’association La Potassine est en charge du développement de la filière De la graine à l’assiette. Cette démarche a donné naissance aux Jardins du Trèfle Rouge, gérés par le réseau Cocagne, dont le métier principal est l’insertion. « On se sert du maraîchage, de l’agriculture bio et de toute la logistique autour des cultures pour accompagner 25 salariés vers l’emploi et recréer du lien », raconte Laura Lersch, accompagnatrice socio-professionnelle. Les fruits et légumes sont vendus chaque semaine
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Rêver demain | Reportage
C’est vrai ça, qu’est-ce qu’on attend ?
Lili et Christophe Moyses, agro-boulangers.
en paniers – payables en Radis, la monnaie locale utilisée par 7% de la population, ce qui est très honorable par rapport à d’autres – ou fournissent la cantine bio. Le reste est mis en conserves ou en bouteilles par la Conserverie, où travaillent aussi des bénévoles. Des citadins font le déplacement pour acheter ces paniers, ainsi que les incroyables pains de Lili et Christophe Moyses, préparés avec des variétés de blés anciens cultivées par leurs soins, ils ne sont même pas sortis en rayon qu’ils sont déjà tous vendus. Prochain projet ? De l’agriculture participative pour que les habitants subviennent à leurs propres besoins.
Habiter Séduite par tous ces projets, Anne-Catherine Dounovetz, ex-Colmarienne, a intégré l’éco-hameau – zéro émission de carbone, zéro déchet, économie d’eau et protection de la biodiversité, etc. – en 2015. « L’implication du maire et ses convictions, sa conception de la politique tournée vers l’humain, l’énergie véritable d’une belle poignée d’habitant.e.s, et le fait qu’on ait eu envie de vivre dans une habitation totalement écologique et autonome énergiquement, tout ça nous a convaincu de déménager à Ungersheim. » Elle fait partie du comité de pilotage du label Éco-école et met aujourd’hui un point d’honneur à convaincre celles et ceux qu’elle croise. Car tous les habitant.e.s ne sont pas convaincu.e.s : un peu moins de 10% agissent véritablement, contre 2% à Totnes, la ville exemple.
Alimenter Ce qui convainc, ce sont souvent les chiffres. Depuis 2005, une centaine d’emplois a été créée, 120 000€ de frais de fonctionnement ont été économisés, le village a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 600 t/an et… les impôts locaux n’ont pas augmenté. Comment ? En 1998 – c’est la première action concrète du maire –, une centrale solaire thermique est installée sur le toit de la piscine municipale, vient ensuite la réduction de la consommation en énergie des équipements municipaux, des associations et de l’école (gradateurs sur l’éclairage public, installation d’une chaufferie bois, label Éco-école…). La distribution de l’eau est reprise en régie municipale : son prix baisse de 10% et enfin, un parc photovoltaïque – le plus grand d’Alsace – a été construit sur une friche industrielle qui couvre la consommation de chauffage des habitant.e.s. Fin 2016 s’est créée une coopérative d’énergies. Il semblerait que l’autonomie énergétique soit pour bientôt… Fin 2016, Ungersheim a été reconnue comme Territoire à énergie positive pour la croissance verte. Un titre qui, alors que « les caisses étaient vides » a permis à la commune de toucher des subventions « assez conséquentes – autant que l’agglomération mulhousienne toute entière ». « C’est une reconnaissance », termine Jean-Claude Mensch. Une reconnaissance amplement méritée.
La journaliste et réalisatrice MarieMonique Robin produit des documentaires et reportages passionnants, notamment pour Arte (on se souvient du Monde selon Monsanto, de Notre poison quotidien ou de Sacrée Croissance !) En 2014, elle découvre Ungersheim et décide d’y passer une année, étalant la réalisation de son documentaire sur les quatre saisons de 2015, une année charnière pour le village. Qu’est-ce qu’on attend ? se construit au travers des différentes réalisations du maire et d’une galerie de personnages (les habitants), tous à des stades divers de prise de conscience et d’engagement. Aussi instructif que touchant, le documentaire réussit le tour de force de résonner chez le spectateur qui, inspiré par l’action – et non, comme on en a l’habitude, par les discours moralisateurs – questionne ses propres fonctionnements. Indispensable ! —
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Eco-écho Par Emmanuel Abela
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Geert Goiris, Mammatus, 2010, présenté en 2016 dans le cadre de l’exposition Sublime. Les tremblements du monde au Centre Pompidou-Metz
Z U T CIT IZ Rêver demain | Fiction
Alors qu’il s’apprête à présenter sa soutenance, un homme se souvient de lui-même, enfant, en train d’attendre le lever du jour. Une jeune femme l’observe, lui. Récit d’anticipation sur un avenir possible.
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eci est l’histoire d’un homme qui se souvient. Tout petit, il guettait le début du jour du fond de son lit. Les volets fermés, il ne pouvait pas s’assurer que la lumière qu’il percevait au travers était bien celle du soleil. Seul le son le renseignait : l’aube s’accompagnait d’un murmure croissant, lequel finissait par devenir un grondement assourdissant. Tel un rugissement. Imaginant la bête qui pouvait surgir des entrailles de la Terre, il aimait se protéger derrière sa couverture. Il s’interrogeait cependant sur la provenance de ce bruit à l’aube, quotidien, indicateur du début de la journée, rassurant mais ô combien troublant. Dans son imaginaire enfantin, les choses devenaient simples : la Terre opérait son mouvement tournant ; le bruit, c’était cela, la résultante de sa lente rotation comme la mécanique d’une pendule. Là, bien des années plus tard, assis sur un banc, l’homme garde les yeux fermés pendant un long moment. Alors qu’il révise ses notes et parcourt quelques images en mode b-Medit, il ne se rend pas compte de la présence d’une jeune femme qui lui fait face et l’observe. Il cligne des yeux pour passer en revue les b-Lists de son ‘Inside’ b-Sound dernier cri. À l’écoute, une chanson française du passé : « Envoie toutes sortes de messages / Aux inconnus et lucioles de passage / Prends le parti du risque de l’erreur / Le silence est toujours complice ou trompeur / Raconte-toi. » La b-Data ne le renseigne pas sur l’auteur de l’interprète. « C’est bien dommage, se dit-il, j’aimerais tant savoir. » Il susurre le refrain « Raconte-toi » lorsqu’il reçoit la petite impulsion de l’appli interne b-Connect. Comme sorti d’un rêve, il se redresse brusquement et ouvre grand les yeux. « Je n’ai trouvé que ce moyen pour vous signaler ma présence, j’espère que vous ne m’en voudrez pas, lui dit la jeune femme avec un sourire désarmant. – Généralement, il n’y a personne alentour, c’est l’endroit idéal pour lire et écouter de la musique. – Vous sembliez loin, plongé dans vos pensées… – J’étais surtout bercé par la musique, j’en ai profité pour consulter mes archives : quelques photos de mon enfance. » 81
Il contemple le visage presque familier de la jeune femme : « Ne suivions-nous pas des cours ensemble ? – Vous êtes visiblement plus physionomiste, les yeux ouverts ! – Ça n’est qu’une question de résolution de mon b-Scan oculaire, je vais en parler à mon ophtal. » Tous deux éclatent de rire, mais au moment où il fait mine de reprendre sa veste pour partir, elle le saisit par le bras : « Vous sentezvous prêt pour votre soutenance, demain ? » Il comprend dès lors que la présence de la jeune femme ne doit rien au hasard. Oui, il se sent prêt, même s’il manifeste une plus grande fébrilité à l’approche de l’événement. Ça fait bien longtemps qu’il travaille sur le sujet : dans la littérature et le cinéma d’anticipation du XXe, il puise les éléments de compréhension de The Great Awareness, cette prise de conscience planétaire qui fit suite aux événements survenus dans les mégapoles, en commençant par Pékin et les grandes villes asiatiques, à l’automne 2029. « Oui, lui confirme-t-elle, j’ai vu que vous vous appuyez sur des exemples choisis parmi ces classiques qu’on peut downloader en b-Video. – Je ne cherche pas tant les signes avant-coureurs du drame que des raisons de contredire ces funestes prédictions. – Pourtant, vos choix ne présentent rien d’innocent. Du dystopique, vraiment hard ! Avec Metropolis de Fritz Lang, Ravage de Barjavel, La Jetée de Chris Marker ou Soleil vert de Richard Fleischer, nulle rémission possible. » Elle rit de bon cœur. Surpris par l’attitude singulière de la jeune femme et la précision de détails dont elle ne devrait pas avoir connaissance, il lui dit en souriant : « Dites moi, vous avez b-Hacké toutes mes données ! » Sans attendre de réponse de sa part, il lui retrace l’histoire de ce temps où le regard de l’homme se portait sur les étoiles. Il lui rappelle qu’il fallut du temps pour comprendre que la Terre se “mouvait” et qu’il fallut plus de temps encore pour constater qu’elle “s’émouvait”. Et surtout qu’elle “s’émouvait” de ce que l’homme lui faisait subir.
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Rêver demain | Fiction
« L’Awareness est née là de ce constat-là, insiste-t-il. Tout comme la révolution silencieuse. – Oui, on sait tout cela, dit-elle en manifestant un semblant d’impatience comme si elle attendait autre chose. Ça a commencé avec la nécessité de limiter les dangers liés à la pollution et donc de repenser nos déplacements. On connaît la suite : l’homme est acculé, mais de sa situation désespérée naît une chaine continue d’initiatives à l’échelle mondiale appuyée par les politiques, les scientifiques et les philosophes, initiatives alimentaires, sanitaires et médicales, en relation avec les technologies nouvelles. Tout cela nous a permis de nous ré-ancrer sur notre planète, de reconsidérer notre lien à la nature et au monde animal. On a repensé confort de vie, bonheur et même goût… Est-ce cela la révolution silencieuse ? – Souvenez-vous que quand les premières voitures électriques sont apparues les gens ont pris peur. – Oui, on m’a raconté cela. Ils avaient peur parce qu’on ne les entendait pas ! – Exactement, leur silence était perçu comme un danger. Les gens ont pris peur de la même manière quand au XXe on leur a imposé des dimanches sans voitures à la suite du premier choc pétrolier. – Au début des années 70, en pleine guerre froide, c’est bien cela ? – Oui, des mesures contraignantes furent décrétées pour économiser l’énergie. Le monde occidental découvrait sa dépendance vis-à-vis des pays de ce qu’on appelait le Tiers Monde ou les pays émergents. Il avait le sentiment qu’on s’attaquait à sa liberté. Et pire que cela, à son confort. – Le mythe de la société d’abondance, dit-elle avec un air songeur. – La révolution silencieuse, c’est une simple intuition. N’y voyez ni théorie universelle ni mystique particulière. Rien de contraignant pour personne, juste un état d’esprit. » Il lui raconte l’histoire de ce garçon qui croyait au bruit de l’aube. « Ce garçon a-t-il fini par découvrir de quoi il s’agissait ?, l’interroge-t-elle en feignant de n’avoir pas compris qu’il parle de lui-même. – Oui, le garçon a cru longtemps à cette histoire de rotation jusqu’au jour où on lui l’expliqua que ce grondement au loin n’était autre que l’arrivée massive des voitures sur l’autoroute à proximité. Loin d’incriminer ces voitures ni leurs usagers si pressés, je me suis mis à fantasmer le silence de l’aube… »
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Mais il se ravise comme s’il en avait trop dit. Il la regarde avec insistance, et lui découvre de bien jolis traits. « Mais vous-même qui m’interrogez de manière si précise, sur quoi travaillez-vous au juste ? – Je travaille sur Le Paradis perdu du poète anglais du XVIIe John Milton. Comme vous, je m’intéresse au silence. Celui d’après la Chute. À ce moment précisément où Adam et Eve découvrent les plaisirs de la connaissance. The Great Awareness, notre prise de conscience, je cherche à l’interpréter ainsi. Peut-être l’avezvous compris, mais la “révolution silencieuse”, pour moi, se situe là, comme un mouvement vers une plénitude retrouvée. Au contact de la Terre, une révolution des sens. Elle reste à construire, la vôtre comme la mienne. La nôtre, à nous tous. » Il la dévisage longuement. Sans chercher à se dérober, elle le fixe en retour, avec un regard attendri : « Je constate que ton regard prend bien des détours avant d’enfin se poser sur moi, mais peut-être es-tu resté cet enfant au fond de son lit à chercher la lumière du soleil et à espérer le silence de l’aube ? Ne change rien. »
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