CHASSEURS DU 22°BCA AU MAROC

Adjudant-Chef

Jean-Marie Buquet ** 139

Céation de notre amie Marie-Josée Torre de Bravura

Chasseurs au Maroc Événements de 1955 Témoignage Nice - Juin 1995

JEAN - MARIE BUQUET

LES GUERRES DU XXe SIÈCLE À TRAVERS LES TÉMOIGNAGES ORAUX ** Collection Michel El Baze réalisée dans le cadre de l’Association Nationale des Croix de Guerre et des Croix de la Valeur Militaire 2 Place Grimaldi - 06000 Tél. 0493878677

Récits de vie des Anciens Combattants, Résistants, Internés, Déportés, Prisonniers

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Ministère des Anciens Combattants - Délégation à la Mémoire et à l’Information Historique - Paris.

Sénat de la République - Département de la Recherche Historique de la Bibliothèque Paris.

Department of Defense - Department of the Army - Federal Center of Military History Washington - U.S.A. Imperial War Museum - Departement of Documents - London - Great Britain.

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Ville de Nice - Cabinet du Maire-Adjoint aux Anciens Combattants.

Musée de la Résistance Azuréenne.

Le Témoin.

Analyse du témoignage

139

- Adjudant Chef Jean-Marie BUQUET - : Route de Lux - Tilchatel - 21120 - Is sur Tille CHASSEURS AU MAROC Avec le 22e B.C.A. MAINTIEN DE L’ORDRE AU MAROC Écriture : 1994 - Édition Mai 1995 - 38 pages POSTFACE DE MICHEL EL BAZE

Le 22ème Bataillon de Chasseurs Alpins part de Nice en Septembre 1955 pour un court séjour au Maroc qu’il quittera en Janvier 1956, pour continuer sa mission de maintient de l’ordre en Algérie.

Ce séjour nous est raconté par Jean-Marie Buquet qui s’appuie sur le Journal de Marche du Bataillon qu’il tenait dans ses fonction d’adjoint à l’Officier de Renseignements.

The 22th Alpine Hunter Battalion leaves Nice in September 1955 for a short stay to Morocco which it will leave in January 1956, to continue its mission in upkeep of the order in Algeria.

This stay is told us by Jean-Marie Buquet with the supports of the Newspaper of Step of the Battalion which he held in his function of attached to the Officer of Information.

JEAN - MARIE BUQUET

Index

Algérie -27 Bastide Jules Chef de Bataillon -15 -26 -27 Beauvais Adjudant -19 - 22 Beni Snassen Cercle des -18 -24 -26 Berguent -17 - 18 - 23 - 26 - 27 Berkane -17 - 23 - 24 Bigot Sous Ingénieur -20 Bou Arfa -23 - 26 - 27 Boubekeur -18 - 26 - 27 Bourgund Général de Division -25 Boutin Ferme -23 Braquet Sous Lieutenant -20 Buquet Adjudant-Chef-20 Camp Roze -17 - 27 Carrète Sous Lieutenant -23 Colomb Béchar -18 Dallier Louis contrôleur civil -26 Djenane Krater -27 Drier De Laporte François Capitaine 15 -24 Figuig -18 Flahaut Georges Capitaine -15 Franceschi Chasseur -18 Gambaccini Chasseur -25 Gardère Jean Médecin Lieutenant -15 Gaston Roger Jean Lieutenant -15 Genfouda mine -17-18 -26 Harispe Ferme -23 Héraut Sergent -27 Ich El Moukdi massif d’-19 Isly Monument de l’ -22 -24 Jerada mine de -17 -18 -20 - 21 - 26 27

Larosa Ferme -23 -25 Lecomte de Lisle S/S -15 Madagh -17 Maillet Sergent Major -22 Maroc -16 - 25 - 28 Maroc Espagnol -18 - 19 Marro Chasseur -18 Marseille -15 Martimprey route de -17 Mistral Chasseur -26 Mondoloni Jacques Capitaine -15 Moreno Ferme -27 Moreno Toro -23 Mozan Chasseur -26 Navarro Docteur -24 Nice -15 - 16 Oran -15 Oued El Heimer -17 - 26 Oued Moulouya -18 Oujda -16 - 17 - 18 - 22 - 23 - 24 - 26 27 - 28 Parisot Lieutenant Colonel -15 -16 - 18 - 23 - 26 Pénicaut Colonel -19 - 22 - 27 -28 Pennachioni Capitaine Joseph -15 Priou Ferme -17 Pujol Lieutenant -26 Raymond Lieutenant -23 -25 Ribette Sous Lieutenant -23 Rossigneux Sous Lieutenant -20 SAïDIA -24 Taforalt Gorges -17 - 18 - 19 - 22 - 23 Tendrara -26 - 27 Tiouli -18 Toboul -23 Touissit -26 - 27

Trarirt 17 - 23 - 26 - 27

Vigoureux Roger Capitaine -15 -23 -24

Vautherot Ferme -23 Vicq Ferme -23

Zegzel gorges du -18

JEAN - MARIE BUQUET

Adjudant-Chef

Jean-Marie Buquet **

Chasseurs au Maroc L a mé m o i r e

L a mé m o i r e : se u l ba g a g e i n c e s s i b l e Jacques ATTALI

Au Maroc Septembre 1955 - Janvier 1956

Mis à la disposition du Général Commandant Supérieur des Troupes du Maroc, le 22ème B.C.A. embarque par voie ferrée, dans la nuit du I5 Septembre I955, en gare de Nice - Saint Roch, à destination de Marseille.

L’encadrement du bataillon est le suivant : Chef de Corps

Lieutenant Colonel Serge Parisot

Commandant Adjoint

Chef de Bataillon Jules Bastide

Capitaine Major

Capitaine Joseph Pennachioni

Médecin Chef

Médecin Lieutenant Jean Gardère (R)

Cie de Commandement

Capitaine Georges Flahaut

1ère Compagnie

Capitaine François Drier de Laforte

2ème Compagnie

Lieutenant Roger Jean Gaston

3ème Compagnie

Lieutenant Roger Vigoureux

Compagnie d’Accompagnement

Capitaine Jacques Mondoloni

Arrivé à Marseille le I6 au matin, le bataillon est dirigé sur le D.I.M. où il prend le repas de midi avant de gagner le port et d’embarquer sur le S/S Lecomte de Lisle.

Départ de Marseille à I6 heures à destination d’Oran.

JEAN - MARIE BUQUET

Septembre La soirée du I6 et la nuit du I6 au I7 se passent en mer, par temps calme. Le débarquement s’effectue à Oran à partir de I6 heures.

Aucun ravitaillement n’a été prévu.!

Or, le I7 Septembre est un samedi et c’est déjà la fin de l’après midi d’où quelque retard pour mettre en branle les organes administratifs chargés de cette formalité essentielle au maintien de la bonne forme physique et morale de la troupe.

Dans la soirée, départ par voie ferrée pour Oujda (Maroc), où le convoi arrive le I8 à 5 Heures 30.

Le bataillon est mis à la disposition du Colonel Panicaut, commandant la Subdivision Autonome d’Oujda (S.A.O.) Il défile dans la médina avant d’aller prendre ses cantonnements sur le stade de la ville.

Le Lieutenant Colonel Parisot se présente au commandant de la subdivision et prend contact avec les divers bureaux et services de la subdivision de la Place d’Oujda.

L’arrivée de ce bataillon de chasseurs, dits “alpins”, alors qu’ils viennent de Nice, et de plus composé de rappelés de diverses armes, ne déchaîne pas l’enthousiasme des officiers. Malgré tout il faut l’utiliser au mieux des besoins !

Dès le 2I Septembre les compagnies sont réparties sur le terrain : P.C. et Compagnie de Commandement

Jerada

Capitaine major et services du Bataillon

Camp Roze à Oujda

1ère Compagnie

P.C. à Madagh, au Nord de Berkane.

Sections au Café Maure, à la Ferme Priou et route de Martimprey

2ème Compagnie

Cie d’intervention au profit de la S.A.O. basée au camp Roze à Oujda.

3ème Compagnie

Taforalt.

C.A.

P.C. à Guenfouda, Sections à Berguent (Fanfare) Oued El Heimer (Mortiers), et Trarirt (Mitrailleuses)

Le Lieutenant Colonel Parisot prend le commandement du secteur sud de la S.A.C. Il a sous ses ordres : - La Compagnie de Commandement à Jerada - La C.A. à Guenfouda.

- Le 50ème Goum, à Berguent.

- La IIème Cie du 3/4ème R.T.M. à Boubekeur et Tiouli.

En même temps que les travaux d’installation, les patrouilles et reconnaissances ont commencé.

Le secteur imparti au 22ème B.C.A. est délimité au nord par la Méditerranée, l’Oued Moulouya et le Maroc Espagnol à l’ouest, la frontière Algérienne à l’est, et au sud par une ligne indéterminée, à mi chemin entre Berguent et Figuig.

La zone nord où se trouvent les 1ère et 3ème Compagnies est constituée par la très fertile plaine du Maroc Oriental et les contreforts nord du massif très tourmenté des Beni Snassen, qui la séparent d’Oujda. L’agglomération de Taforalt, où cantonne la 3ème Compagnie est un noeud de pistes au milieu des gorges abruptes du Zegzel qui traversent le massif du nord au sud.

En zone sud, dès que l’on a dépassé la région des mines de charbon de Genfouda et Jerada, se présente d’abord une succession de collines dénudées jusqu’à Berguent.

Passé Berguent, vers le sud, le paysage est strictement plat et monotone, tranché de deux lignes parallèles au milieu des touffes d’alfa : la piste et la voie ferrée qui mènent à Colomb Béchar.

Le 27 Septembre le Chasseur Marro de la 1ère Compagnie est accidentellement blessé par le Chasseur Franceschi.

Le 30, un renfort de 2 sergents chefs, 6 sergents, 3 caporaux et 60 chasseurs rejoint le corps et est réparti entre les compagnies.

Octobre Le 4 Octobre à O heure 45, les chasseurs du poste de garde installé par la 3ème Compagnie sur le stade de Taforalt voient arriver un groupe d’hommes armés, revêtue de treillis et casqués, qui cherchent à pénétrer dans l’agglomération.

Pour éviter toute méprise, car il y a des patrouilles amies dans le secteur, le chef de poste procède aux sommations d’usage. Des coups de feu lui répondent.

Pas de confusion possible.

La riposte est immédiate.

L’Adjudant Beauvais et sa patrouille rallient aussitôt et prennent à revers les assaillants qui se dispersent après un accrochage rapide et violent. Une balle a entamé l’épaule de Beauvais et lui a arraché la patte d’épaule et le galon d’adjudant... Le Bulletin Officiel reçu le lendemain apportera sa nomination au grade d’Adjudant Chef à compter du 1er Octobre !!!!

Tandis que la 2ème Section se porte en protection du home d’enfants situé dans le village, la fouille du terrain permet de ramasser un mort porteur d’un fusil anglais Enfield 303 et de I42 cartouches de fusil, plus 11 cartouches de colt 11,43 et d’une grenade anglaise Mills. Deux autres grenades du même type sont ramassées un peu plus loin.

Dès le lever du jour, les 2ème et 3ème sections, en liaison avec les éléments du Détachement d’Intervention Rapide (D.I.R.) d’Oujda se livrent au ratissage du

JEAN - MARIE BUQUET

massif d’Ich El Moukdi, au cours duquel sont retrouvés deux cadavres et un blessé.

Un fusil mitrailleur Barr et un pistolet mitrailleur Thomson sont récupérés. La bande venait du Maroc Espagnol.

La cote du bataillon remonte d’un coup.

Le Colonel Pénicaut adresse au chef de corps la note suivante : A partir du I5 Octobre, les compagnies reçoivent de nouvelles implantations et de nouveaux terrains de chasses.

Et les patrouilles et embuscades continuent, souvent décevantes, à la recherche du salopard qui a coupé la ligne téléphonique ou incendié des meules.

Le I6, la 1ère Compagnie quitte Berkane pour Oujda, où elle est mise à la disposition du D.I.R. Elle rejoindra d’ailleurs très vite la région de Berkane (P.C. Ferme Harispe, sections Ferme Vautherot et Ferme Boutin).

La 2ème Compagnie a occupé dès le 16, les cantonnements laissés vacants par la 1ère.

Le I8, la 2ème Compagnie quitte Taforalt pour Berguent, sections à Bou Arfa et Trarirt.

Le 25, le Lieutenant Colonel Parisot prend le commandement du secteur de Berkane. Il a sous ses ordres : - P.C. au contrôle Civil de Berkane.

- Cie de Commandant au Lazaret.

- 1ère Compagnie : Fermes Harispe, Vautherot, Boutin.

- 2ème Compagnie : Fermes Larosa, Vicq.

- Le I6ème Goum.

- Un peloton du 2ème Régiment Étranger de Cavalerie.

- Un peloton de Gendarmerie Mobile.

Au cours des jours suivants, la Compagnie d’appui s’installe dans les fermes de la frontière algéro - marocaine à l’ouest d’Oujda : Toboul, Moreno Toro.

L’activité de patrouilles et embuscades s’intensifie. Plusieurs accrochages de produisent avec des éléments très fluides qui disparaissent dans la nuit.

Lorsque le 25 Octobre, le Lieutenant Colonel Parisot se présente à Berkane au bureau du contrôleur civil, chef du cercle des Béni Snassen, les bâtiments administratifs abritent un petit détachement du 2ème Régiment Etranger de Cavalerie.

Les légionnaires bivouaquent sous la tente dans le parc.

L’un d’eux, nue tête et torse nu se dore sur l’herbe lorsqu’il voit descendre de Jeep le Lieutenant Cl qui porte sur le bras gauche le galon vert de légionnaire de 1ère classe. L’homme plonge sous sa tente, en ressort presque aussitôt, chemise et ceinturon en place, képi en tête, un quart de vin bleu cerise plein à ras bord dans la main gauche.

Trois pas, un salut impeccable, et, le quart tendu il annonce : “De la part de la Légion à un légionnaire, mon colonel.”

Et le colonel dut s’exécuter... avec le sourire.

Novembre Le 3 Novembre, entre Berkane et SAïDIA, des rafales de pistolets mitrailleur sont tirés contre la voiture (civile) du Docteur Navarro, qui est légèrement blessé.

La fanfare du bataillon participe aux cérémonies du 11 Novembre à Oujda, ainsi que deux sections de la 1ère Compagnie. La Croix de Chevalier de la Légion d’Honneur est remise au Capitaine Drier De Laporte.

La compagnie d’appui, une section de la 3ème Compagnie et deux sections de la 2ème Compagnie prennent part à une prise d’armes au monument de l’ISLY. Le Capitaine Vigoureux y est fait Chevalier de la Légion d’Honneur.

Décembre Le soir du 3 Décembre, la patrouille de la Ferme Larosa (section du Lieutenant Raymond de la 2ème Cie) quitte son cantonnement. A I50 mètres de la ferme, au détour d’une haie d’épineux, un groupe rebelle, camouflé en retrait à quelques mètres de la route, ouvre le feu. Le Chasseur Gambaccini se porte en avant de son chef de groupe et s’avance vers l’adversaire en tirant à son tour. Il tombe mortellement blessé, alors que les assaillants prennent la fuite.

Le Général de Division Bourgund, commandant supérieur des troupes des Territoires du Maroc, cite à l’ordre des Troupes du Maroc à titre posthume le Chasseur Gambaccini Henri du 22ème B.C.A. “Chasseur d’un courage et d’un sang froid remarquables.

Toujours volontaire pour les postes dangereux et les missions délicates. La patrouille de nuit dont il faisait partie étant tombée dans une embuscade, s’est immédiatement porté en avant pour protéger son chef de groupe. A été tué d’une rafale d’arme automatique au moment où, debout, au mépris du danger, il ouvrait le feu sur ses agresseurs.”

Cette citation comporte l’attribution de la Médaille militaire.

Rabat, le I2 Décembre I955.

Signé : Bourgund.

Dans la nuit du 6 ou 7, une embuscade de la 2ème Compagnie ouvre à son tour le feu sur un groupe qui laisse sur le terrain six morts et un blessé.

Le I7 Décembre la 3ème Compagnie est relevée de la région de Berguent où elle a effectué un très gros travail de reconnaissances de pistes, qui lui vaut une lettre de félicitations du commandant de la subdivision autonome d’Oujda.

Elle est regroupée à Berkane.

JEAN - MARIE BUQUET

Au cours des jours suivants, le bataillon est redéployé dans la région sud d’Oujda : P.C. et Cie Commandant 1ère Compagnie

de

Touissit Berguent - Trarirt - Tendrara - Bouarfa

2ème Compagnie

Jerada - Guenfouda - Oued El Heimer

3ème Compagnie

Boubekeur

- La compagnie d’appui, seule, conserve son secteur des fermes à la frontière algéro-marocaine.

Le I3 Décembre, le Chasseur Mozan se blesse sérieusement au cours d’une chute de moto provoquée par une rupture de direction.

Le lendemain, les libérables de la classe 53/2 sont dirigés sur Oujda en vue de leur rapatriement en métropole.

Ces déplacements et péripéties n’influent en rien sur le rythme des patrouilles et embuscades.

La Compagnie d’Appui est transformée en Compagnie G.V. normale et devient 4ème Cie. La compagnie de commandement du bataillon prend en charge les sections de mortiers et mitrailleuses.

Le Lieutenant Colonel Parisot partant en permission, le commandement est assuré par le Chef de Bataillon Bastide.

Avant de partir, le Lieutenant Cl Parisot a élevé... “à compter du I4 Décembre I955, à la dignité de 1ère classe honoraire, Mr Dallier Louis, contrôleur civil, chef du Cercle des Beni Snassen”... Le Chasseur de 1ère classe Dallier est affecté pour ordre à la 2ème Compagnie.

Le 2I Décembre, la 3ème Compagnie est mise en alerte à la suite du déclenchement d’une grève générale aux mines de Boubekeur.

L’année I955 se termine dans la neige et le froid qui rendent encore plus pénibles les embuscades de nuit, mais n’en ralentissent pas le rythme.

Le 24, au cours d’une patrouille sur véhicules, dans la région de Tendrara, le Chasseur Mistral se tue accidentellement d’un coup de feu. Le Dodge roulait sur une très mauvaise piste, un cahot plus violent projeta les passagers les uns sur les autre.

Mistral accrochait alors malencontreusement la détente de son arme. Le projectile l’atteignait au niveau du coeur.

Nuit de Noël sur la piste de Berguent à Tendrara.

Dans l’après midi du 24 Décembre l’annonce du décès accidentel du Chasseur Mistral du poste de Tendrara est parvenue au P.C. du bataillon à Touissit.

Le Commandant Bastide a chargé le médecin sous Lieutenant Pujol de se rendre à Tendrara avec l’ambulance et une Jeep d’escorte pour ramener la dépouille mortelle à l’hôpital d’Oujda.

Le toubib tient une fièvre carabinée et grelotte de fièvre. De fièvre et d’émotion..., car, en se rendant au P.C., alors qu’il longeait une baraque du camp, il a entendu claquer une rafale de pistolet mitrailleur, en même temps qu’il voyait à sa gauche juste devant lui, la tôle de la baraque se consteller de perforations dues aux projectiles, et, sur sa droite, des pointillés symétriques se dessiner sur une chemise pendue à des fils et raidie par le gel.

Deux pas de plus... et... Tout cela parce qu’un maladroit manipulait son arme à tort et à travers.

Il embarque dans l’ambulance avec le chauffeur et deux infirmiers.

Moi-même et deux hommes d’escorte grimpons dans la Jeep que conduit le Sergent Héraut, plus connu de tous sous le surnom de Robic.

Jusqu’à Berguent tout va bien. Prise de contact avec la brigade locale de gendarmerie. Puis la piste vers le sud.

Deux kilomètres plus loin l’ambulance tombe en panne. Demi tour de la Jeep qui retourne à la gendarmerie. Les gendarmes se chargent de remorquer le véhicule en panne jusqu’à leur caserne.

Il y a encore 115 kilomètres jusqu’à Tendrara.

Le docteur monte à la place d’un des chasseurs dans la Jeep qui continue seule dans la nuit glaciale. Les étoiles scintillent au ciel d’un bleu profond. Les kilomètres s’égrainent Un repère, l’unique arbre de la région, vers Djenane Krater. De nouveau la piste entre les touffes d’alfa, puis, soudain, au bout de la ligne droite, les lumières du poste.

Un coup de café chaud, tandis que les chasseurs du poste attachent sur le capot de la Jeep le brancard sur lequel, enveloppé d’une toile de tente, repose le corps de leur camarade. Un dernier salut, et la voiture repart vers Oujda, dans la nuit.

Arrêt à Berguent pour signaler le passage.

Hôpital d’Oujda.

Qu’il est difficile de trouver les infirmiers de service en cette nuit de NOEL pour leur confier notre camarade.

Demi-tour vers Touissit. Depuis Tendrara nous n’avons pas prononcé chacun dix paroles.

Le Commandant Bastide nous attendait, inquiet de notre randonnée solitaire dans la nuit hostile. Le réveillon est terminé depuis longtemps. Notre part a été conservée, mais nous n’avons pas faim. Çà ne passerait pas.

Un grog très chaud et très fort et nous allons dormir.

Nous avons dû parcourir 500 Kilomètres depuis notre départ.

Le 3 Janvier I956, le Commandant Bastide effectue une visite des postes de la 1ère Compagnie : Trarirt, Bou Arfa, Tendrara, Berguent.

Dans la nuit du 4 au 5, les sentinelles de la Ferme Moreno ouvrent le feu sur un groupe qui se replie en Algérie.

JEAN - MARIE BUQUET

Le 5 Janvier à 17 heures arrivent au P.C, des éléments du 2/342 ème Dragons qui viennent assurer la relève du 22e B.C.A..

Arrivées, à Trarirt de l’escadron d’appui qui relève la 1ère Compagnie, à Boubekeur de l’escadron relevant la 3ème Compagnie. Le passage des consignes s’est effectué dès le début de l’après midi dans les postes tenus par 1a 4ème Compagnie. Celle-ci regroupée, est transportée au Camp Roze. Un groupe de combat a été laissé dans chaque poste pour faciliter la mise en oeuvre des gardes et des patrouilles.

Par voie ferrée la 1ère Compagnie arrive à Oujda le 6 à 17 heures. L’escadron qui doit relever la 2ème Compagnie arrive le même jour à Jerada.

Le 7 Janvier à 7 heures du matin, le P.C. Bataillon, la Compagnie de Commandement et la 1ère Compagnie, embarquent par voie ferrée en direction de l’Algérie.

A 11 heures, les 2ème, 3ème et 4ème compagnies embarquent dans une deuxième rame.

Le Colonel Pénicaut, commandant la S.A.O. a adressé au Commandement du 22ème B.C.A. l’ordre du jour suivant : Ordre Général N° I. “Au moment où le 22ème B.C.A. quitte la Subdivision Autonome d’Oujda après un séjour de quatre mois, le Colonel Commandant la Subdivision tient à lui adresser ses remerciements pour le bon travail effectué, ainsi que ses félicitations pour sa discipline, sa tenue et son entrain.”

“Il souhaite à tous, Officiers, sous Officiers et Chasseurs, un bon séjour en Algérie et il est sûr que le 22ème B.C.A. sera là bas à la hauteur de ses traditions.”

Oujda, le 7 Janvier I956.

Signé : Pénicaut.

Le séjour au Maroc a été un excellent rodage pour le bataillon.

Au contact d’un encadrement d’active, Officiers et sous Officiers, ayant effectué deux ou trois séjours en Indochine, Officiers de réserve et petits gradés du contingent ont acquis une expérience qui s’est montrée payante au cours des accrochages.

Les sections ont assuré leur cohésion. Les chasseurs appelés et rappelés se sont révélés disciplinés, ardents et solides, malgré le dépaysement et la forme inhabituelle du combat.

Les pertes du bataillon sont minimes par rapport à celles d’un adversaire habitué à son terrain et possédant l’avantage de la dispersion dans la nature.