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Chanter-Jouer-Résister

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Stop suicide

Stop suicide

Qu’on soit petit joueur de fifre, tambour de longue date, trompettiste imbattable ou chanteur-se ténor, il a bien fallu subir une pause forcée due à notre actualité à tous bousculée depuis un an et demi. Mais il a bien fallu résister aussi, peut-être par désir que notre vie quotidienne redevienne normale, ou par refus de relations sociales réduites à s’exprimer uniquement par écran.

La vie d’avant Les six sociétés de fifres et tambours (Chandolin, St-Luc, Mission, Ayer, Grimentz et St-jean), les six chorales (de Chandolin, de Ayer/St-Luc/Zinal, de Grimentz, de Vissoie, le chœur Clin d’œil, le chœur des chasseurs), ainsi que la fanfare l’Echo des Alpes de Vissoie incarnaient la vie sociale locale lors des fêtes, célébrations, cérémonies, animations touristiques, théâtres, festivals, anniversaires, mariages, prestations diverses. Les responsables étaient chargés de maintenir la motivation en proposant des sorties, des participations à des festivités hors vallée, des répétitions originales. Au cours du temps, les effectifs ont fluctué, parfois à la limite du hors-jeu, souvent de taille moyenne, parfois même en XXL. Dans certaines sociétés, les cheveux blancs dominent, dans d’autres c’est la jeunesse qui mène le bal. La relève chancelle de temps à autre, mais elle tient bon et traverse le temps : il suffit de voir que les quelques irréductibles jeunes de la fin du 19ème siècle qui ont créé la fanfare, ont réussi à déjouer les craintes des autorités religieuses d’alors, en promettant que non, la jeunesse ne serait pas pervertie par la musique… Les sociétés de fifres et tambours se sont constituées au cours du 20ème siècle, ainsi que les chorales. Certains mayens se souviennent encore de quelques bals improvisés, avec un bon goût d’interdit…

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Dès le début du printemps, on entendait claironner les fifres et rythmer les tambours, des deux côtés de la Navisence : on s’entraînait à ajuster le pas aux méandres des partitions pour faire bonne figure dans les festivals.

Les chorales, elles, répétaient plutôt à l’intérieur. En se promenant le soir à travers les villages, on pouvait les entendre près de l’église ou du local de répétition et se réjouir de bientôt en profiter en vrai, à la Fête-Dieu, au concert annuel ou pendant l’été. La musique, le chant, comme un écho de vie festive côtoyée en toute légèreté sans y penser, tellement ancrée dans notre quotidien d’avant. tance aussi pour entretenir le lien social, mais chut, ceci est une autre histoire.

De longs mois différents, à part Et voici qu’a sonné le glas de mars 2020, tout partage social s’est vu stoppé net : plus de chant ni de musique en groupe ou en public. Alors les président-e-s de ces sociétés ont visé une priorité imposée d’emblée: garder le contact malgré tout. Chacun a trouvé les astuces nécessaires, l’envoi d’une carte de vœux à tous les membres pour préserver le lien, les retrouvailles par Zoom, par WhatsApp.

Pas d’autre choix que de gérer l’incertitude ; chaque semaine annonçait un lot de nouveaux obstacles provoquant prises de têtes mêlées d’espoir. L’été 2020 est apparu presque libre, mais l’automne venu, il a fallu déchanter encore, devenir à nouveau plus prudent, apprendre à mieux com-

Choeur de l’Etoile de Chandolin

Fifres et tambours de St-Luc

muniquer, imaginer des nouveaux stratagèmes: la fanfare, par exemple, a inventé les répétitions en quatuor, en formats différents, les générations séparées selon les risques, dans des locaux distincts. En toile de fond, la polémique sur le danger des instruments à vent pour la transmission du virus se poursuit, alors distance, distance… A Ayer, les fifres et tambours ont été invités à jouer chacun sur son balcon, lors d’une « journée musicale ». A St-Luc, on les conviait à tester le nouveau fifre à domicile, à Grimentz, on a proposé un défi aux plus jeunes : une vidéo à rendre chaque semaine, à St-jean on a répété à Prarion en espérant que le rythme de croisière reprenne rapidement. A Chandolin, on a été heureux de collaborer avec St-Luc grâce au même type de fifres et à Mission, on a fait honneur à la Madeleine en se préparant à l’extérieur.

Les chorales aussi ont trouvé des ruses, à Grimentz, on a chanté dehors à la messe à Bendolla, à Vissoie, on s’est réjoui lors d’une raclette au couvert de Niouc, malheureusement suivie par une quarantaine imposée à deux personnes, ça plombe la motivation ! Le chœur Clin d’œil a mobilisé les plus jeunes en préparant Un homme debout de Claudio Capéo et Beau-papa de Vianney. A Ayer/St-Luc/Zinal, on chante ensemble depuis avant la pandémie. A Chandolin, en saison touristique, des hôtes soucieux d’apporter leur pierre à l’édifice renforcent l’effectif, et les chorales de Grimentz et Vissoie ont animé ensemble le spectacle La vitesse de la lumière en août dernier, ainsi que des fifres et tambours.

Et toujours, pour tous les responsables, le souci de maintenir une activité, surtout pour les jeunes.

Personne n’était préparé à cet apprentissage, la gestion des situations a été chancelante parfois, tout dire par message peut prêter à confusion, il manque le ton de la voix, joyeux ou grave, douteux ou assuré, interrogatif ou affirmé. Il faut alors désamorcer une interprétation mal comprise et renseigner mieux pour ne pas laisser place aux déceptions. Zoom ça aide, mais en présentiel ça paraît nettement plus commode. jouer du fifre ou chanter avec un masque? non merci, des essais se sont achevés sur des commentaires peu stimulants…

Lors des relâchements accordés par les autorités, quelques prestations ont pu avoir lieu, en faisant preuve de bon sens, en animant des cérémonies à deux ou trois personnes, avec les autorisations nécessaires et la cohérence en point de mire. Les tensions entre volontés, souhaits et obligations ont été rudes. Et puis, il a fallu assurer la gestion administrative, malgré tout.

Oh ! là ! Avant de lâcher… Et l’hiver s’est invité, il s’est déroulé difficilement avec quelques petits échos musicaux par-ci, par-là, une poignée de notes

Fifres et tambours de St-Jean et la Fanfare Echo des Alpes Vissoie-Anniviers

s’entrecroisant, à peine audibles. Le printemps a laissé poindre l’espoir, quelques corvées bourgeoisiales ont eu lieu, avec ou sans fifres et tambours. Les répétitions chorales et musicales ont doucement repris, à distance et dans le respect des règles. La plupart ont apprécié les retrouvailles en direct, parfois l’impact de la covid a sévi : certains ont préféré des occupations familiales différentes plutôt que de consacrer plusieurs dimanches par an aux sociétés locales, d’autres ont privilégié la douce chaleur du foyer, surtout l’âge venant. Et les écrans ont joué leur rôle, des habitudes ont choisi un autre aiguillage.

Les responsables entreprennent le maximum pour tenir à flot ces sociétés qui se donnent tant de mal. La pandémie a mis un coup dans l’aile de certains effectifs, quand trois ou quatre membres ne participent plus, la survie du groupe cherche un nouvel équilibre. Heureusement, l’entraide entre sociétés permet de passer un cap compliqué, de se soutenir.

A Grimentz, les fifres et tambours préparent le 51ème Festival de l’Association des Tambours et Fifres du Valais Romand repoussé au premier week-end de juin 2022, après deux reports. Un comité externe y travaille. Sûr qu’on pourra entendre des morceaux d’ensemble de tout Anniviers ! En été, les fêtes patronales ont pu se dérouler avec les animations musicales traditionnelles, comme le 1er août, le Firong et autres rencontres. Mais le vacillement sanitaire est toujours bien présent, toutes nos activités en sont heurtées, mais oh ! là ! avant de lâcher...

L’implication des jeunes Les fifres et tambours d’Anniviers ont mis en place des cours auxquels prennent part une vingtaine d’enfants. De plus, une formation de moniteurs organisée par l’Union Romande des Tambours et Fifres permettra aux jeunes participants de diriger ensuite des groupes et d’instruire à leur tour des moniteurs. La dynamique est réelle et d’excellente augure pour le futur musical de notre vallée.

Ce voyage anniviard en compagnie des président-e-s des sociétés de fifres et tambours, des chorales et de la fanfare m’a impressionnée et j’admire l’engagement dont ils font preuve et la foi en l’implication de leur troupe pour continuer à nous émouvoir et à nous réjouir. J’ai eu la sensation de survoler une fourmilière où

chaque individu tient son rôle très à cœur, connaît son importance pour le fonctionnement du groupe et lui offrir son élan. Chanter, jouer, résister toujours. Merci, merci à toutes et tous, bonnes notes et bon vent !

Simone Salamin © photos albums privés des sociétés

Gérard Revey participant à «La vitesse de la lumière» Rive gauche Grimentz: présidente des fifres et tambours, Ludivine Savioz

président de la chorale: Christian Vouardoux

St-Jean: présidente des fifres et tambours: Fabienne Cordona - Zufferey

Rive droite Vissoie: présidente du chœur d’enfants Clin d’œil: Nadine Theytaz

président de la chorale: Charly Zufferey

président de la fanfare: Etienne Savioz président du chœur des chasseurs: jean-Marc Caloz

Ayer: président des fifres et tambours: Mathias Melly

Mission: président des fifres et tambours: Fabien Viaccoz

St-Luc: président des fifres et tambours: Samuel Rion

Ayer/St-Luc/Zinal: président de la chorale: Samuel Rion

Chandolin: présidente de la chorale: Danièle Zufferey-Gasparini

président des fifres et tambours: Christian Kessler

Choeur Clin d’oeil

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