Extrait "Valence Rouge" Ana Martínez Muñoz

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ANA MARTÍNEZ MUÑOZ VALENCE ROUGE

roman traduit de l’espagnol par Amandine Py

VALENCE ROUGE

“Actes noirs”

Titre original : Valencia roja

Éditeur original :

© Penguin Random House, Barcelone, 2023

© Ana Martínez Muñoz, 2023

© ACTES SUD, 2025 pour la traduction française

ISBN 978-2-330-20355-9

ANA MARTÍNEZ MUÑOZ

Valence Rouge

roman traduit de l’espagnol par Amandine Py

À
Alberto, à qui je dois tant.
À Marcos et Vega, à qui je dois tout.

Les monstres existent vraiment, les fantômes aussi… Ils vivent en nous, et parfois ils gagnent…

Stephen King

Le remède à tous les maux est l’eau salée : la sueur, les larmes ou la mer.

Karen Blixen (Isak Dinesen)

L’éducation est l’arme la plus puissante qu’on puisse utiliser pour changer le monde.

Nelson Mandela

PREMIÈRE PARTIE

Les premières fois, le maître me mettait le couteau sous la gorge. À présent il me suffit de le voir sur la table pour comprendre.

Je prenais ça pour une punition au début, le prix à payer pour mes actes. Comme une peine supplémentaire, une sorte d’œil pour œil qui s’ajoutait au reste. Avec le temps j’ai appris que c’était autre chose, une hiérarchie dans laquelle ma place était en dessous. Une histoire de domination, oui, c’est bien ça.

Aujourd’hui j’ai cessé de me battre. Je me laisse faire dans un acte de soumission totale. J’ai compris quel était mon rôle dans ce jeu où, pour survivre, je dois séparer l’âme du corps.

Un filet de lumière jaunâtre filtre de la fenêtre à ma droite. Il ne m’en faut pas plus, je connais cette cellule par cœur. Je suis là depuis si longtemps que le temps même s’évanouit, et chaque jour ressemble à la veille. Ça sent la sueur, l’urine et la peur, ma propre peur. Je ne sais pas si je sortirai d’ici vivant, mais si j’y arrive, je ne serai plus jamais le même. Je me sens incapable de me reconnaître dans la personne que j’étais, tout en elle me répugne. Je ne sais même plus qui je suis en réalité.

Le couteau m’observe depuis la table sale et ébréchée, je le regarde à mon tour. En fait de couteau, c’est une sorte de pointe bricolée, un manche de brosse à dents surmonté de lames de rasoir. Les trous au centre des lames ressemblent à des yeux, des yeux qui me scrutent et me dépouillent de toute valeur.

Je sais ce que je dois faire.

Je sens l’haleine fétide contre mon oreille puis cette douleur qui me déchire de part en part ; ce n’est pas seulement mon corps qu’on met en pièces, mais aussi mon âme, ma dignité et mon existence.

Sur la scène du fond, on démarre avec un anal entre Peter et Alexa. Sandra entre juste après avec Fredy et Nacho pour performer un trio classique : Fredy et Sandra en levrette, Nacho qui se place devant Sandra pour se faire sucer. Faites gaffe par contre, pas d’éjac faciale, je veux rien dans la bouche non plus, au stand d’à côté il y a des tables rondes sur le porno éthique et l’orgasme féminin : je les vois venir, ils nous diront qu’on respecte pas la femme et toutes ces conneries. Faudra vraiment se tenir à carreaux, j’ai vu des anti-pornos frigides à l’entrée et comme demain c’est le grand jour, elles vont monter au créneau avec leurs pancartes à la con.

Rebeca, plus connue sous le nom de Queca, suit son chef en consignant ses directives dans son petit carnet. Elle a un physique ordinaire, on ne peut pas dire qu’elle soit vraiment belle, mais elle compense par sa réactivité et sa sollicitude.

Demain c’est samedi, jour d’affluence à Valence Rouge, le premier festival de ciné porno de la capitale du Turia, qui a pour slogan : “Le porno, c’est de la culture.” Des activités variées sont au programme toute la semaine : expositions, ateliers, tables rondes, défilés…, mais c’est surtout ce week-end que des centaines de personnes iront à Feria Valencia profiter des différents spectacles.

Miky Moore – mécène, acteur et réalisateur de films – et sa maison de production ne pouvaient pas manquer l’événement.

Miky a la cinquantaine délabrée, un ventre proéminent qui déborde de son pantalon à pinces et un double menton qui brouille les limites entre sa tête et son torse. Pour quelqu’un

qui le croiserait dans la rue, il évoquerait à peu près tout sauf l’érotisme.

Quand l’ambiance se réchauffe, continue Miky, vous appelez les gars qui se sont présentés au casting et vous les envoyez se préparer en coulisse. Pendant ce temps, Mary fait son entrée avec le gode, le grand violet, et elle s’arrange pour capter le public.

Tu veux qu’ils fassent quoi les jeunes, cette fois ?

Bah comme d’habitude. D’abord, tu les fais parler à la caméra quand ils se désapent pour voir un peu ce qu’ils donnent à l’écran. Après, tu leur envoies Rubi. Ceux qui bandent en moins d’une minute et qui tiennent l’érection plus d’une minute passent en finale. On verra plus tard comment ils gèrent le trac, les jeunes premiers, quand il faudra baiser Alexa sur scène devant tout le monde. Si tu en repères un qui tient le coup sans ramollir, tu prends son numéro. De toute façon, s’il y en a qui assurent c’est top, mais sinon c’est pas grave, nous, on aura fait le show.

Et le glory hole ?

Sur l’autre scène, la petite. Vous préparez tout pendant les performances, et vous demandez qui est volontaire juste après le casting, quand les mecs auront le trouillomètre à zéro. Tant pis si je me répète, mais tu leur dis bien qu’il n’y aura pas d’éjaculation faciale. Les volontaires qui iront faire le glory devront se démerder pour la sortir du trou avant de gicler, qu’on vienne pas nous casser les couilles après. Moi, je veux pas d’emmerdes.

Entendu, Miky. On finit par le trio lesbien ?

Oui, bien sûr, c’est ce qui les excite le plus. Mary fait son show de pole dance, puis tu fais entrer Sandra et Rubi. ok, eh bien je crois qu’on a fait le tour.

Je serai pas loin, mais comme tu sais, je viens sur tout pour le réseau, il s’agit de voir des nouvelles têtes et de me faire prendre en photo ; l’organisation des performances est entre tes mains.

Oui, tout est sous contrôle.

L’enseigne lumineuse, qui affiche le mot club en rose fuchsia entre deux grands palmiers verts posés sur des vagues bleues, indique le chemin. Miky prend la sortie et se gare sur le terrain vague qui sert de parking à l’occasion.

Rubio est à la porte, comme toujours. Si cet homme corpulent et parfaitement imberbe est surnommé Blondinet, c’est à cause de son nom de famille, pas de ses cheveux.

Ça alors, Miky ! Ça fait un bail qu’on t’a pas vu par ici ! l’accueille-t-il avec un large sourire.

J’ai rendez-vous avec ton chef, il m’a appelé la semaine dernière. Paraît qu’il y a de la marchandise toute neuve. Miky accompagne ces mots d’une poignée de main vigoureuse.

Oui, entre, il t’attend.

C’est vendredi soir et, à l’intérieur du club, Miky tombe sur une bande de jeunes visiblement venus pour un enterrement de vie de garçon. Quelques-uns sont accoudés au comptoir, ces nigauds n’ont pas l’air de trop savoir quoi faire ni où regarder. D’autres semblent plus enthousiastes : ils discutent avec les filles et se vannent entre eux. Le point commun, c’est qu’ils ont tous l’air d’avoir bu un coup de trop. Un gars est déguisé en mariée, le fiancé sans doute : il porte une écharpe de miss en bandoulière et des mollets poilus dépassent de sa robe. Il tient deux nanas par la taille : une métisse spectaculaire qui ne doit pas avoir plus de dix-neuf ans et une petite blonde aux yeux bleus du même âge.

Miky essaie de passer inaperçu. Si l’un des jeunes le reconnaît, il voudra prendre des selfies et tout le monde lui demandera des autographes, ce dont Miky se passerait bien. Il réussit par miracle à arriver au comptoir sans se faire remarquer. Marta est là. Miky la connaît bien, elle a travaillé toute sa vie pour Pochele. À cinquante ans passés, elle a gardé sa ligne et sa beauté intactes. Cela fait quelques années qu’elle a décroché la double place de ser veuse et mère maquerelle, un poste de confiance qui n’est pas à la portée de toutes les filles. Elle n’a plus besoin de vendre son corps, elle se contente de s’occuper des filles et de servir des verres aux clients. Marta secoue ses longues boucles et le regarde arriver de ses yeux verts trop maquillés.

Salut, beau gosse ! Qu’est-ce que tu racontes ? Ça fait longtemps qu’on ne t’a pas vu ici.

C’est vrai, on est sur le festival porno en ce moment, je te raconte pas le bordel. T’es toujours à couper le souffle, toi. Ton chef m’a appelé, il dit qu’il a des nouvelles filles pour moi.

Oui, il est dans son bureau. Tu peux y aller. Je ne t’accompagne pas, c’est la folie ici avec cet enterrement de vie de garçon. Il n’y a rien de pire que ces petits cons qui veulent la totale tout en payant le moins possible.

Pochele ne se lève pas pour le saluer ; il le reçoit à son bureau, les jambes croisées sous la table, un whisky à la main. C’est un homme sec au physique ingrat et au caractère très basique. Il est dans le métier depuis toujours et au club Las Palmeras personne ne bouge d’un iota sans qu’il donne son aval. Miky fait appel à lui depuis des années. Pour les bukkakes, il a besoin de filles endurantes et les siennes sont les meilleures, il fait ce qu’il faut pour les dresser.

Qu’est-ce que t’as pour moi, Pochele ?

T ’y vas pas par quatre chemins, toi. Assieds-toi au moins, je t’offre un verre ?

J’ai pas de temps à perdre avec ce festival. J’aurais voulu passer plus tôt, mais là vraiment, je suis sous l’eau. Alors voilà, j’ai besoin de filles pour la semaine prochaine. Il y a un bukkake de prévu à l’appart, j’ai déjà soixante inscrits.

J’ai deux petites qui vont te plaire. Des perles – Pochele embrasse son pouce et son index réunis. Les clients en sont très contents, et moi aussi. Des poupées je te dis, soumises, le minou tout rose comme tu les aimes. Et j’ai aussi une black sublime, mais là attention, c’est un canon : une grande nana, presqu’un mètre quatre-vingts, avec un cul impressionnant et des seins énormes.

Montre-moi les gamines, pour le bukkake ça ira. La black, je la garde pour une scène, dans un anal les gros culs ça marche toujours. Tu me les fais à combien ?

C’est du bon matos, tu vas avoir du mal à trouver mieux ailleurs. Je te les laisse à cent de l’heure, de la seconde où elles passent cette porte jusqu’à ce que tu me les ramènes.

Sans déconner, Pochele. T’es pas un peu gourmand ?

L’autre hausse les épaules :

Je dois faire tourner mon business moi aussi, et je risque ma peau pour t’apporter les filles. C’est à prendre ou à laisser.

C’est bon, fais voir.

Pochele passe la porte et revient aussitôt avec deux très jeunes filles, probablement mineures, de seize ou dix-sept ans. Un détail qui n’arrêtera pas Miky : elles n’iront pas porter plainte. Pas un vêtement ne couvre leur corps : peau fine et blanche, très minces, petits seins fermes.

Écartez les cuisses et montrez ce que vous avez à mon copain, indique Pochele.

Les filles obéissent et Miky siffle entre ses dents.

T ’as raison, elles valent chaque euro que tu demandes. Il me les faut pour jeudi prochain, décide-t-il, je passerai les chercher vers quatre heures et à vingt heures, grand max, elles seront de retour pour te faire la nuit.

Miky sort de là satisfait : si Pochele prend cent euros de l’heure pour cha que fille, ça fera qua tre cents pour qua tre heures, fois deux huit cents. Et chaque participant du bukkake va payer soixante ; le bénef est évident. En prime, il va tout filmer. Les filles vont lui faire gagner du fric pendant des mois et lui n’aura pas à se salir les mains : il passe les prendre, il paie, elles bossent et il les ramène, point. La black était avec un client mais il la verra jeudi quand il ramènera les autres.

À cette heure-là, il y a pas mal de voitures garées sur le terrain vague qui jouxte le club, mal éclairé par le reflet de l’enseigne lumineuse et les rares lampadaires de la route, mais il n’y a pas âme qui vive, les gens sont au club en train de profiter des filles. Miky a laissé la sienne au fond, comme d’habitude : la discrétion est la clé pour quelqu’un d’aussi célèbre que lui, a fortiori dans ce genre d’endroit. Chaque fois qu’il vient ici, il oublie de demander à Pochele de lui faire un double de la porte de service ; même si, méfiant comme il est, il serait capable de refuser de lui filer les clés et de lui demander d’entrer par la grande porte comme tout le monde. C’est un brave type, Pochele, et il a le meilleur matos de tout Valence, mais sur certains trucs il est un peu borné. Miky ne se plaint pas, il fait de bonnes affaires avec lui et cela lui suffit.

Quand il sent la piqûre dans sa nuque et le coup sur sa tête, il n’a pas le temps de réagir. Il n’était plus qu’à trois mètres de sa voiture, il tenait déjà la télécommande dans la poche de son pantalon tout en rêvant de la quantité de fric que ces filles lui feraient gagner. Il a seulement conscience que ses jambes ne le portent plus, qu’on le traîne. Puis, tout devient noir.

Un cou ple jaillit sur la minuscule piste de danse improvisée, incapable de résister à l’appel du swing. Devant la petite scène du pub Blanco y Negro, il y a juste la place de se laisser entraîner par la musique. Une trentaine de personnes les regardent danser depuis leurs sièges autour des tables rondes en marbre de ce bar accueillant de la rue Roteros, en plein quartier du Carmen. Au centre de chaque table, une bougie éclaire subtilement les visages qui reflètent les bonnes vibrations de la mélodie.

Nela reprend de plus belle, cette chanson marche toujours. Elle lève le pavillon de sa clarinette, ses doigts parcourent avec brio les clés et les trous de l’instrument. Dans le public, les gens suivent le rythme du pied, de la tête ou en tapant des mains sur leurs cuisses, comme si la musique traversait leurs corps.

La chanson terminée, la salle applaudit à tout rompre. Les gens sifflent et ovationnent les stars de la soirée.

Bu-to-ni ! Bu-to-ni ! Bu-to-ni !

Une autre ! Une autre ! Une autre !

Le groupe Butoni et ses reprises des standards de la première période du jazz, dont les origines remontent aux années 1920 et 1930, fait un triomphe.

La dernière était géniale, Nela ! lui crie Eva à l’oreille pour se faire entendre dans le brouhaha.

Oui, Jubilee Stomp, c’est une valeur sûre.

Depuis son retour à Valence et surtout depuis qu’elle a repris le groupe, Nela se sent rajeunir de dix ans. Elle avait besoin

de se sentir à nouveau vivante. Sur scène, c’est comme si elle devenait quelqu’un d’autre ; elle oublie tous ses problèmes : son ex, Madrid, son père qui lui manque tellement et même les regards dédaigneux de certains de ses collègues.

Je meurs de soif. On va s’abreuver au comptoir ?

Sebas, t’es vraiment qu’un animal, rit Nela. D’accord, mais juste une bière et je pars. J’ai fait une séance d’aviron cet aprèm au port et je suis au bout de ma vie.

Ah là là, tu te fais vieille, Neli !

Pas plus que toi, lui répond-elle en riant.

Sebas, le trompettiste du groupe, lui ressort toujours la même vanne. Et c’est vrai qu’il n’a pas complètement tort, les années commencent à peser.

Josevi et moi, on ne va pas tarder non plus. Demain on doit passer chercher Paulita assez tôt, elle a dormi chez ses grands-parents ce soir. Si tu veux, on te ramène tout à l’heure.

Eva, toujours aux petits soins, toujours aussi serviable. Dans le groupe, c’est elle qui fait les percussions et qui chante sur certains morceaux. Josevi et Eva sont ensemble depuis leurs dix-sept ans : des couples comme eux, il n’en reste pas beaucoup. Ils partagent leur vie, leur passion pour la musi que – Josevi joue du trombone dans le groupe – et une petite fille craquante de cinq ans.

Oui, moi non plus je ne rentrerai pas trop tard, la petite a une grosse crève et Maria sera contente que je prenne la relève. La pauvre. Courage Pascual ! La première année de crèche c’est la pire, les enfants tombent tout le temps malades, répond Eva.

Mais vous êtes graves ! –  Ximo secoue la tête. – Gnagnagna je suis fatiguée et je vais pas tarder à rentrer, gnagnagna ma petite est malade, gnagnagna je dois passer chercher Paulita hyper tôt… C’est samedi soir, merde ! Qu’est-ce qu’on est en train de devenir ?

Pardon, Peter Pan. C’est pourtant ça la vie d’adulte : se lever tôt, être crevé, fonder une famille, un foyer… j’adore faire des concerts mais j’ai plus vingt ans ; moi j’ai des responsabilités à assumer.

C’est bien pour ça que j’aurai jamais d’enfants, et que je ne veux pas d’attaches. Vous vous êtes fait avoir. Le système vous a manipulés pour vous faire croire qu’il vous faut le package complet : une baraque, une voiture, des mômes, des vacances à la plage au mois d’août… et tout ça pour quoi ?

Parce qu’ils ont besoin de vous pour consommer la merde qu’ils produisent, et aussi que vous vous sentiez obligés de vendre votre temps contre de l’argent pour continuer à consommer le restant de vos jours. Comptez pas sur moi, les gars : je tiens trop à ma liberté pour me soumettre à ça. Et je ne les laisserai pas me tenir par les couilles.

Ximo, le guitariste, est le rebelle du groupe. Nela a toujours eu un bon feeling avec lui, mais elle doit reconnaître qu’il est un peu râleur. Entre lui et Pascual, le saxophoniste, c’est à qui renchérira pour monter dans les tours.

Bon, allez… Vous réfléchissez trop, on dirait que vous cherchez la bagarre alors que vous n’avez pas picolé encore. Que chacun vive sa vie comme bon lui semble et qu’il laisse les autres faire pareil, tranche Bruno, le tubiste du groupe.

Même s’ils se disputent de temps en temps, Nela adore ce groupe. Ces amis du lycée sont sa planche de salut. Pendant les cinq ans qu’elle a passés à Madrid, elle a coupé les ponts, et pourtant ils l’ont accueillie comme si rien ne s’était passé, comme si elle n’avait jamais quitté le groupe.

Eva lui donne un coup de coude en tournant la tête vers le fond du pub.

Le br un là-bas, il ne te quitte pas des yeux, lui criet-elle à l’oreille.

Arf, pas le courage.

Elle est de mieux en mieux toute seule, sans attaches, sans compte à rendre à personne. Elle sent qu’aujourd’hui, à quarante-deux ans, elle commence enfin à vivre. Elle sourit, elle vient de se rappeler que, demain, c’est son jour de repos. Ce ne serait peut-être pas une si mauvaise idée de suivre Ximo pour une virée à deux dans le Carmen. Comme au bon vieux temps.

LE POINT DE VUE DES ÉDITEURS

Le producteur Miguel Murillo, alias Miky Moore pour l’industrie du X, met la dernière touche à l’organisation du premier festival du genre, qui se tient à Valence.

Son cadavre est retrouvé dans une mise en scène qui interpelle : des larmes noires mêlées de rouge à lèvres maculent les joues de l’homme agenouillé. On suppose une vengeance et le milieu craint un déballage de ses sordides petits secrets. L’inspectrice Ferrer, qui a fui Madrid pour le calme provincial de la ville de son enfance, est mise sur l’affaire. Quand les pistes semblent toutes graviter autour de la personnalité sulfureuse de l’entrepreneur, l’apparition du corps sans vie d’un respectable conseiller fiscal vient rebattre les cartes.

Un page turner nerveux et efficace qui aborde frontalement deux fléaux actuels : les violences faites aux femmes – dans la sphère conjugale ou le milieu pornographique –, et l’addiction d’un public de plus en plus jeune à des images stéréotypées sexistes, agressives et dégradantes.

Ana Martínez Muñoz est née à Valence en 1982. Elle est ingénieure en informatique. Valence Rouge est son premier roman.

www.actes-sud.fr

DÉP. LÉG. : AVRIL 2025 / 23,50 € TTC France ISBN 978-2-330-20355-9

Photographie de couverture
© Nathalie Rozé

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