Acteurs Publics 100

Page 1

N°100/101

Numéro double / 13 €

NU MÉ

www.acteurspublics.com

SONDAGE EXCLUSIF

LES FRANÇAIS JUGENT L’ÉCOLE

Ces pays qui réussissent leurs politiques publiques

RO 100

INTERVIEW

Didier Migaud : « Il serait possible de faire mieux avec moins »


MÉDIA GLOBAL AU CŒUR DE L’ÉTAT ET DE SES SATELLITES, DANS LES COLLECTIVITÉS, À L’HÔPITAL…


Édito

« La France ne doit pas à ses équilibres financiers d’emprunter à bon compte, mais plus à sa capacité reconnue à collecter l’impôt. » Par Pierre-Marie Vidal, directeur de la rédaction pmvidal@acteurspublics.com

Le gouvernement finira-t-il par comprendre que tenter de faire passer l’indécision pour de l’écoute est un exercice peu convaincant qui, de plus, est en train de se retourner contre lui ? Car à force de reculades en forme « d’écoute », le gouvernement brouille tous ses messages et devient inaudible. Y compris pour sa propre majorité, chez qui le doute s’installe. En attendant l’hypothétique inversion des courbes ou le retour de la croissance, que peut faire le gouvernement pour sortir de ce gouffre d’impopularité ? Changer de gouvernement sans changer de cap et de méthode ne produirait qu’un effet trompel’œil vite dissipé. À moins que la dégradation de la situation qui conduit aussi sûrement à la promotion du FN qu’à la défaite aux municipales ne soit – comme en d’autres temps – une stratégie basée sur l’hypothèse d’un sursaut républicain. Pire que l’indécision, cette stratégie, consciente ou non, entraînerait le pays sur des chemins dont personne ne sait s’il aurait la capacité à en revenir.

Et si la France était le prochain homme malade de l’Europe ? Bernard Cazeneuve a beau marteler que le redressement des finances publiques passera exclusivement par des coupes dans les dépenses de l’État et des régimes de Sécurité sociale, ni Bruxelles ni les agences de notation n’y croient. Avec une dépense publique à 55 % du PIB – 10 points de plus que l’Allemagne –, tout le monde comprend au contraire qu’elle ne peut se sevrer de cette situation rapidement sans troubles sociaux. Et c’est cette perspective liée au rejet de décisions en matière d’impôt du type écotaxe qui pourrait inquiéter les places financières plus que la dégradation de notre note. Car la France ne doit pas à ses équilibres financiers d’emprunter à bon compte, mais plus à sa capacité reconnue à collecter l’impôt et à celle de sa population à l’accepter. Tout changement d’attitude sur ce dernier point pourrait inspirer des craintes à nos créanciers et avoir des répercussions très négatives sur nos taux d’emprunt.

Nous avons choisi de célébrer ce centième numéro d’Acteurs publics par la publication d’un grand dossier sur quelques bonnes pratiques de politiques publiques en dehors de nos frontières. Ce fut parfois une découverte et ces premiers pas rédactionnels en dehors de l’Hexagone seront suivis par d’autres, puisque nous comptons désormais vous offrir plus systématiquement ce regard ailleurs. Car si l’on comprend les effets de la mondialisation en matière économique, on mesure moins bien les effets de la mondialisation des pratiques de management public. Pourtant, sous nos yeux, des continents entiers font des pas de géant en matière de modernisation de leur secteur public. De petits pays sont en train d’acquérir des avantages compétitifs décisifs grâce à des politiques de services publics innovantes. Puissent ces exemples aider nos acteurs publics à qui, numéro après numéro, nous consacrons nos colonnes ! Puissent-ils y retrouver une part d’inspiration !

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 3


N°100

www.acteurspublics.com

SPÉCIAL N°100

100 numéros, 10 ans au cœur des transformations du secteur public Pour ce numéro 100 exceptionnel, nous avons choisi de republier les 100 couvertures qui ont fait Acteurs publics depuis janvier 2004. Elles sont révélatrices, année par année, de l’évolution du secteur public, des inquiétudes et des espoirs, de l’émergence de nouvelles tendances, d’une certaine continuité dans les

réformes aussi. La couverture est un exercice journalistique compliqué : c’est la vitrine du journal. Sa une doit donner envie de l’ouvrir. Elle doit attirer l’œil, interpeller le lecteur, susciter sa curiosité, le faire réagir. Tout cela sans sombrer dans la caricature. Nos 100 couvertures ont souvent vu

juste. Open data, e-administration, villes intelligentes, normes, transparence de la vie publique, crise des finances locales ont fait la une d’Acteurs publics avant de faire la une partout. Ce sera notre feuille de route pour les 100 prochains numéros. Bruno Botella

2005 Alors que le concept n’était pas encore popularisé, Acteurs publics enquêtait pour savoir si, derrières les discours, les ministères avaient fait de la stratégie de développent durable leur feuille de route. Bilan : peu satisfaisant, alors que les collectivités locales donnent l’exemple.

05

L’image a neuf ans mais semble encore plus datée. Et ce n’est pas à cause du noir et blanc choisi pour illustrer le vieux serpent de mer du service minimum dans les transports. Le débat agite encore la France en 2004. Un rapport remis en juillet, les menaces des syndicats, l’hypothèse d’une loi si on ne trouve pas d’accord. La loi sera finalement votée en 2007 juste après l’élection de Nicolas Sarkozy à l’Élysée. Cette couverture d’Acteurs publics revient sur les « stratégies ministérielles de réforme » lancées en 2003, juste avant les « audits de modernisation », la RGPP, puis la MAP en 2012.

20

20

04

N°100

SPÉCIAL N°100

2004


20

06


N°100

www.acteurspublics.com

SPÉCIAL N°100

2006

2007 À la veille de l’élection présidentielle, Acteurs publics s’interroge sur les futurs changements qui ne manqueront pas d’intervenir à la tête de la haute administration et pose la question du « spoil system » à la française. Une manière peut-être de sortir de l’ambiguïté et de l’hypocrisie. Près de sept ans plus tard, le débat est loin d’être tranché…

20

07

N°100

SPÉCIAL N°100

Marqué par la tempête Outreau, le système judicaire est passé au crible par Acteurs publics avec, en appui, un sondage exclusif qui confirme le malaise de la justice et sa mauvaise perception par les Français.

004-013-LB-Couv retro.indd 6

13/11/13 17:32


20

08


N°100

www.acteurspublics.com

SPÉCIAL N°100

2008

2009

09

Un peu effacé par les grands élus suite aux lois de décentralisation, le préfet revient en force en 2009. Face à la crise et aux contraintes budgétaires, l’État entend revenir en première ligne. Le préfet toutpuissant a pour mission de réorganiser l’administration territoriale et de revoir la carte des intercommunalités. Son rôle sera réaffirmé en 2013 par le Premier ministre et conforté par les nouvelles lois de décentralisation.

20

N°100

SPÉCIAL N°100

Où il était déjà question de réforme et de malaise dans l’éducation. La RGPP allait-elle épargner l’école ? Acteurs publics consacrait notamment un dossier au futur mode de recrutement des enseignants et décelait les premières failles. La formation des enseignants version Sarkozy a été remise en cause en 2012 mais sans tout effacer.


20

10


N°100

www.acteurspublics.com

SPÉCIAL N°100

Cette couverture d’Acteurs publics fut diversement appréciée dans la police nationale et la gendarmerie. Cette illustration et le titre qui l’accompagnait jetaient une lumière crue sur l’une des réformes importantes de l’ère Sarkozy. Un choc des cultures et un redécoupage des zones qui ont fait – et font encore – grincer des dents chez les policiers, les gendarmes et les élus.

2011

11

Moins d’un an après l’entrée en vigueur des agences régionales de santé, créées par la loi Bachelot « Hôpital, patients, santé et territoires », Acteurs publics dresse un premier bilan mitigé et pointe le risque bureaucratique engendré par cette réforme d’ampleur. Le magazine enquête notamment sur la nouvelle gouvernance des hôpitaux.

20

N°100

SPÉCIAL N°100

2010


20

12


N°100

www.acteurspublics.com

SPÉCIAL N°100

2012

N°100

SPÉCIAL N°100

Avant le début de la mission Lambert-Boulard qui alerte l’opinion, en mars 2013, sur l’avalanche de normes qui assaillent les élus locaux, avant le « choc de simplification » annoncé par François Hollande au printemps, Acteurs publics fait sa couverture et son dossier sur le trop-plein de normes qui exaspère les collectivités territoriales.

2013 Une carcasse de poisson pour illustrer des administrations « à l’os ». À l’heure de la rigueur budgétaire et salariale pour les fonctionnaires, Acteurs publics fait parler les patrons de grandes administrations. Leurs marges de manœuvre sont minces et le contentieux salarial, vieux de plusieurs années, s’aggrave. Les syndicats de la fonction publique semblent résignés.


20

13


100-101

NovembreDécembre 2013

Le Web, nouvel espace de participation à la réforme de l’État

PRÉFECTURE DE L’ORNE

SOMMAIRE

DIDIER MIGAUD

130

MARC BOUDER

« Il serait possible de faire mieux avec moins »

30

Villes intelligentes, une gouvernance à la carte

112

DZIANIS KAZLOUSKI/FOTOLIA

Décentralisation, déficits, efficience des politiques publiques… Dans un entretien exclusif, le Premier président de la Cour des comptes livre son diagnostic.

Le gouvernement s’apprête à remplacer la prime de fonctions et de résultats des fonctionnaires par un « nouveau » régime indemnitaire.

120

3

L’ÉDITO DE PIERRE-MARIE VIDAL

4

100 numéros, 10 ans au cœur des transformations du secteur public

18 ACTUALITÉ 30 ENTREVUE

Didier Migaud : « Il serait possible de faire mieux avec moins » 38 OBSERVATOIRE

Les Français veulent des enseignants mieux formés et évalués

LA FRANCE DES POUVOIRS Martin Hirsch à la tête de l’AP-HP 49 Vincent Monadé, président du Centre national du livre 54 Éric Lucas, nouveau secrétaire général du ministère de la Justice 46

56 RENCONTRE AVEC…

Marie-Anne Lévêque, une DRH de l’État très politique

La fausse sortie de la prime au mérite

ANALYSE

108 EUROPE

Qui succédera à José Manuel Barroso ?

58 DOSSIER

Ces pays qui réussissent leurs politiques publiques 60 Gestion des hauts fonctionnaires : la Norvège 64 Grandes infrastructures : les Pays-Bas 68 Santé : le Royaume-Uni 74 E-administration : l’Irlande 78 Expérimentation des politiques sociales : les États-Unis 82 Politique d’éducation : la Corée du Sud 88 Lutte contre le chômage : le Danemark 92 Dépendance : le Japon 96 Ouverture des données : la Suisse 100 Accès au logement : Hong Kong 104 Et demain, réinventer l’État

112 ENQUÊTE

La fausse sortie de la prime au mérite 116 EMPLOI PUBLIC 118

Les agents « jeunesse et sports » en perte de repères

EXPERTISE 120 AMÉNAGEMENT DURABLE 120 Villes intelligentes,

une gouvernance à la carte 124 La première école en paille 126 SUR LE TERRAIN 126 L’Île-de-France fait le ménage

dans ses opérateurs 128 Les élus d’Auvergne à la conquête

de l’Unesco 130 E-SERVICES PUBLICS

Le Web, nouvel espace de participation à la réforme de l’État

14 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

014-015-LB_Sommaire.indd 14

13/11/13 17:33


AFP

Le patrimoine sous protection

162

CES PAYS QUI RÉUSSISSENT

FOTOLIA/RÉA/SIPA/AFP

AG VISUELL – FOTOLIA.COM

LEURS POLITIQUES PUBLIQUES

58 Haute fonction publique, grands travaux, santé, éducation… Acteurs publics a recensé, thème par thème, les champions en matière de politiques publiques dans le monde.

LES CLUBS 134 LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE 146 LE CLUB DES TERRITOIRES DURABLES 148 RESSOURCES 150 LIRE, ÉCOUTER, VOIR 154 Cinéma : Quai d’Orsay, une comédie du pouvoir 156 IDÉES

Il faut réformer la fonction publique, par Jean-Ludovic Silicani 158 Intelligence économique, une révolution culturelle pacifique, par Claude Revel 160 Les hauts fonctionnaires ne croient-ils plus au mythe de la réforme ? par Philippe Bezes et Gilles Jeannot

156

162 MÉMOIRE

Le patrimoine sous protection

Acteurs publics www.acteurspublics.com 7 rue Auguste Gervais 92445 Issy-les-Moulineaux cedex Tél. : 01 46 29 29 29 Directeur de la rédaction Pierre-Marie Vidal (29 01) pmvidal@acteurspublics.com Rédacteur en chef Bruno Botella (29 20) bbotella@acteurspublics.com Rédacteur en chef adjoint Laurent Fargues (29 09) lfargues@acteurspublics.com

Secrétaire de rédaction Laure Berthier Rédacteur en chef technique Marc Bouder (29 03) mbouder@acteurspublics.com Rédacteur graphiste Johnny Tymen Abonnements Tél. : 01 46 29 29 19 Fax : 01 46 29 29 39 abonnement @acteurspublics.com Prix de ce numéro 6,50 € TTC 11 numéros d’Acteurs publics - 71,50 € TTC/an

Rédaction Sylvain Henry (29 27) shenry@acteurspublics.com Pierre Laberrondo (29 26) plaberrondo@ acteurspublics.com Xavier Sidaner (29 21) xsidaner@acteurspublics.com

Partenariats et communication Bastien Brunis (29 24) bbrunis@acteurspublics.com

Ont également collaboré à ce numéro Jean-Bernard Gallois (à Bruxelles), Sylvain Giovagnoli, Raphaël Moreaux, Valérie Segond

Secrétaire générale Margareth Régnier Tél. : 01 46 29 29 13 Fax : 01 46 29 29 39 mregnier@acteurspublics.com

Publicité Pascal Breton (29 02) pbreton@acteurspublics.com

Directeur de la publication Pierre-Marie Vidal Acteurs publics est édité par la Société d’Édition Publique SAS au capital de 200 000 € Actionnaires : CFSS - Pierre-Marie Vidal Impression Imprimerie SIEP - Z.A. Les Marchais 77590 Bois-le-Roi CPPAP 0216 T 84324 ISSN 1765-2022 Dépôt légal à parution © L’usage professionnel des contenus et services requiert obligatoirement l’autorisation préalable de l’éditeur. La liste des opérateurs autorisés de panoramas de presse, piges, clipping

Abonnez-vous

PAGE 161

et usages professionnels est disponible sur le site du GIE qui gère les droits : www.ppmp.fr. Membre adhérent de la

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 15


INNOVATION TERRITORIALE

ÉTAT

RH

ORGANISATION

HOSPITALIÈRE

SERVICE

COMMUNICATION


Un événement

LES VICTOIRES DES ACTEURS PUBLICS

2013 REMISE DES PRIX

LE 4 DÉCEMBRE à l’Assemblée nationale

Sous le haut patronage et en présence de Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale


Actualité

■ OPEN DATA

Les freins des

« Les politiques salariales ont été conduites depuis une dizaine d’années sans perspective d’ensemble ». C’est le constat sans concession formulé dans le rapport sur la fonction publique piloté par le conseiller d’État Bernard Pêcheur, remis début novembre au Premier ministre, JeanMarc Ayrault. En quelque 240 pages, ce rapport propose bien davantage qu’un simple toilettage du fonctionnement de la sphère publique. Certes, le choix d’une fonction publique statutaire demeure pertinent, est-il écrit, mais tellement de choses ont changé depuis l’instauration du statut en 1983 que « le statu quo n’est pas possible ». Ces propositions, précise-t-on du côté de Matignon, n’engagent pas le gouvernement. Charge à la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, d’initier une concertation avec les organisations syndicales et les employeurs publics pour proposer des premières orientations avant la fin de l’année 2013. Un large chapitre se penche sur le volet hautement explosif de la rémunération des agents publics et formule plusieurs préconisations pour « définir un cadre salarial motivant et assurer des parcours professionnels de qualité ». Il s’agit notamment de poser comme principe que « la fonction publique n’a vocation ni à être privilégiée, ni à être décrochée par rapport au secteur privé » et que par conséquent, « le gel du point en vigueur depuis 2010 est tout à fait légitime dans le contexte budgétaire actuel mais il ne saurait tenir lieu de boussole unique en matière de politique salariale ». Il sera par ailleurs pertinent de recourir aux différents leviers de la politique salariale que sont la rémunération indemnitaire, les mesures catégorielles et les mesures générales ; de « conserver aux divers employeurs publics une marge de négociation salariale propre » et de développer les échelons fonctionnels et les échelons spéciaux. Lire l’intégralité du rapport sur www.acteurspublics.com

DR

Des propositions pour refondre la grille salariale des agents

administrations

Comment lever les derniers blocages à l’ouverture des données publiques (open data), ouverture fixée comme une priorité par le gouvernement ? La question est au cœur d’un rapport rendu public par Matignon début novembre. Le magistrat de la Cour des comptes Mohammed Adnène Trojette (photo) cible notamment les exceptions au principe de gratuité. Des redevances, pratiquées par certains opérateurs – IGN et Insee –, qu’il estime « diversement motivées et parfois faiblement légitimes » et dont les recettes s’élèvent à 35 millions d’euros en 2012. « Il faut mettre en place des modèles économiques plus justes pour le citoyen et plus rentables pour l’administration », explique-t-il à Acteurs publics. Si la France fait partie des pays précurseurs de l’open data, dont « les opérateurs sont reconnus à l’étranger pour leur qualité »,le magistrat préconise « plus de pédagogie et d’accompagnement pour s’assurer que les administrations emploient les bonnes méthodes ». Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, présentera au prochain comité interministériel de la modernisation de l’action publique, en décembre, la doctrine d’ensemble du gouvernement en la matière. Retrouvez le rapport et l’interview de Mohammed Adnène Trojette sur www.acteurspublics.com

■ EMPLOI PUBLIC

Une obligation de mobilité pour les fonctionnaires ? Introduire « des obligations de durée minimale et/ou maximale sur un poste ». C’est l’un des scénarios retenus dans le rapport « Affectation et mobilité des fonctionnaires sur le territoire » rédigé par l’inspection générale des Finances (IGF), l’inspection générale de l’Administration (IGA) et l’inspection générale des Affaires sociales (Igas). Leur mission, commandée voilà près d’un an par le comité interministériel pour la modernisation de l’action publique (Cimap) : proposer des pistes d’amélioration pour doper la mobilité des fonctionnaires sur le territoire, « en particulier dans les régions, départements ou zones rurales et urbaines peu attractifs ». Les agents publics de l’État sont 5 % chaque année à changer de poste et même jusqu’à 10 % dans certains ministères. Mais ils ne sont que 1 % à changer d’employeur. Ces chiffres sont révélateurs des freins qui bloquent la mobilité des fonctionnaires

18 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

RICHARD DAMORET/RÉA

■ RAPPORT PÊCHEUR

à l’intérieur et entre les trois versants de la fonction publique. Les obligations de mobilité, qui existent déjà dans certaines professions (forces de l’ordre, magistrats…), pourraient être inscrites dans les statuts des corps et « faire l’objet d’engagements individuels quasi contractuels notamment pour les zones souffrant d’un déficit d’attractivité, ou être négociées collectivement ». Consulter l’intégralité du rapport sur www.acteurspublics.com


Prix du meilleur article 2013 à Également nominé dans les catégories : meilleure photo, meilleure newsletter, meilleur article en ligne « Le palmarès de cette édition 2013 fait la part belle à l’audace, au courage, et à l’innovation. Trois leviers clés qui accompagnent au quotidien les éditeurs dans leur quête de performance, et qui expliquent pourquoi l’information Nathalie Auburtin, présidente de Presse PRO* professionnelle n’a jamais été autant lue et utilisée qu’aujourd’hui ». *L’association Presse PRO regroupe une centaine d’éditeurs publiant plus de 200 titres et autant de sites, souvent leaders sur leur marché. Qualité, Communauté, Marque Média sont les « mots valeurs » de l’association Presse PRO. Face à l’hyperinformation issue de sources de plus en plus incertaines, les communautés professionnelles ont de plus en plus besoin de partenaires plurimédias experts et indépendants. www.presse-pro.com

Acteurspublics N° 95 (mai 2013)

De gauche à droite :

Sylvain Henry, rédacteur en chef adjoint, et Bruno Botella, rédacteur en chef d’Acteurs publics, à la remise des prix Presse PRO, le 16 octobre 2013.

« Les douanes, usine à champions » Un fraudeur qui planifierait d’introduire sur le territoire national une marchandise de contrebande a intérêt à entretenir dès à présent sa condition physique s’il esp ère s emer un jour le sprinteur Jimmy Vicaut en passant la frontière. Car à l’instar de Jason Lamy-Chappuis, champion o l y mpi qu e e t c h a mpi on du monde de combiné nordique, ou

de Marion Rolland, championne du monde de descente de ski alpin, l’athlète fait partie des 40 sportifs qui composent l’équipe de France douane, véritable usine à champions qui recrute depuis plus de cinquante ans nos meilleurs représentants nationaux dans le cadre d’un contrat d’ambassadeur d’u n a n r e n o u v e l a b l e . Un e démarche de pure communication

qui vise à donner une image positive et moderne des douanes. Pour écrire son article, Sylvain Henr y est allé à la rencontre de ces athlètes sur leur terrain d’entraînement, afin de mieux comprendre leur motivation à intégrer une profession enviée, qui traverse une période de restrictions budgétaires depuis plusieurs années et dont le nombre d’agents

a reculé, en vingt ans, de 22 500 à 17 000. Sans complaisance, l’article a le mérite d’aborder les bons comme les mauvais aspects du statut privilégié de ces douaniers « factices » trop éloignés des services opérationnels aux yeux de certains représentants syndicaux. Le jury a tenu à saluer l’angle courageux de l’article. Le Jury des prix Presse PRO 2013


Actualité

Achat « patriotique »

APESTEGUY/SIPA

Le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg (à droite), a appelé à une « réorientation de l’achat public » vers plus d’« esprit patriotique », lors de la présentation, le 25 octobre, d’un guide de la commande publique destiné à inciter les PME à répondre aux appels d’offres publics. « On est les dépositaires de l’intérêt général et notre intérêt n’est pas que les acheteurs publics fassent le carnet de commandes de nos concurrents », a déclaré le médiatique ministre.

GILLES ROLLE/RÉA

Bercy frôle la saturation L’administration fiscale a reçu plus de 3 000 demandes depuis la publication, le 21 juin, d’une circulaire encadrant la procédure de régularisation des dossiers d’évasion fiscale. Or, selon le sénateur communiste Éric Bocquet, rapporteur de la commission d’enquête sur le rôle des banques dans l’évasion des ressources financières, il faudrait vingt-cinq ans pour régulariser les dossiers en souffrance.

Alain Lambert, président du conseil général de l’Orne et ancien ministre du Budget

La mission que vous a confiée François Hollande vise à moderniser l’action publique et à s’attaquer au niveau « sans précédent » atteint par la dépense publique. Votre tâche consistera donc à traquer les économies possibles ? La dépense publique atteint le niveau inédit de 56 % de la richesse nationale. La lettre de mission du président de la République est très claire : le niveau de dépense publique dégrade nos comptes, freine la compétitivité et met en cause la préservation du modèle français de service public.

Beaucoup de rapports ont déjà été publiés en matière de lutte contre les dépenses publiques. Quelle sera votre plus-value ? C’est en effet une mission qui intervient après de nombreuses publications sur le sujet. Nous sommes partis dans l’idée, avec Martin Malvy, que nous ferions nôtres les rapports antérieurs. Il ne s’agit surtout pas de faire du copiercoller mais de traiter différemment les informations déjà rassemblées. Notre mission vise à étudier en priorité les politiques qui sont partagées entre les trois sous-secteurs de l’action publique, c’est-à-dire l’État, la protection sociale et les collectivités locales.

20 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

Ces politiques sont-elles nombreuses ? Elles touchent en effet de nombreux secteurs. Sur les 1 200 milliards d’euros de dépenses publiques, on peut considérer que 800 milliards d’euros couvrent des politiques sur lesquelles interviennent plusieurs acteurs publics. Il serait très intéressant de détailler qui gouverne, qui gère et qui paye quoi sur ces politiques. Probablement faudra-t-il à la fin suggérer de poser un grand principe, celui du « prescripteur payeur ».

Retrouvez l’intégralité de l’interview sur www.acteurspublics.com

LUDOVIC/RÉA

« Poser le principe du prescripteur payeur »


COMMUNIQUÉ

SANTÉ ET ASSURANCE

Protégez au mieux votre capital santé

L

a santé occupe une place de plus en plus importante dans le budget des ménages, à tel point que près d’un tiers des Français renoncent à des soins faute d’argent. Consciente de cette tendance, la GMF a conçu SANTE PASS, une complémentaire santé de qualité, particulièrement compétitive. Souple et modulable selon les besoins, le contrat SANTE PASS réserve un ensemble d’avantages tarifaires : jusqu’à 18% de réduction selon le nombre de personnes assurées (1), 6 mois gratuits pour les bébés (2)… Le tout pour une protection étendue : les dépassements d’honoraires, de plus en plus fréquents, sont remboursés jusqu’à 220% ; pratiquement tous les médicaments – y compris ceux remboursés à 15% par la Sécurité sociale (3) – sont pris en charge. De plus, vous avez accès à des tarifs négociés et des services privilégiés (en optique, dentaire…) grâce aux réseaux Santéclair (3), qui rassemblent plus de 5 000 professionnels de la santé.

PROTÉGEZ VOS REVENUS Et parce que les fonctionnaires ne sont pas forcément bien couverts en cas d’arrêt de travail pour maladie ou accident de la vie privée, la GMF a conçu Protection Revenu. Cette garantie vous permet de maintenir votre niveau de vie en cas de coup dur : l’indemnisation est calculée sur la base de votre traitement, mais aussi de vos primes. Protection Revenu peut être souscrit avec le produit SANTE PASS ou de façon totalement indépendante. Pensez-y !

Protection Revenu en pratique POUR QUI ? Protection Revenu est accessible à tous les fonctionnaires et contractuels de la Fonction publique âgés de 18 à 65 ans. Une simple déclaration de bonne santé est demandée à partir de 30 ans. COMMENT ÇA MARCHE ? En cas d’arrêt de travail, le contrat permet à l’assuré de conserver un revenu moyen similaire à ce qu’il percevait l’année précédente. Il choisit son montant garanti et peut le faire évoluer. LE PLUS ? L’indemnisation tient compte aussi des primes. POUR QUELLE DURÉE ? Jusqu’à 5 années consécutives d’indemnisation.

Ludovic Champenois, Responsable Produit à la GMF

«Le choix d’une complémentaire santé est libre» « On dit souvent que la santé est ce qu’il y a de plus important. Raison de plus pour passer à la loupe son assurance complémentaire santé et faire jouer la concurrence. Rappelons que le choix d’une complémentaire est libre, une règle qui vaut aussi pour les fonctionnaires. Insistons aussi sur le fait qu’au bout d’un certain temps, en général à partir du 4ème mois d’arrêt de travail, les fonctionnaires ne perçoivent plus que la moitié de leur traitement. Mieux vaut donc avoir anticipé ! C’est ce qui nous a guidés dans la conception de Protection Revenu, le complément prévoyance du contrat SANTE PASS ».

(1)

Ensemble des assurés avec une seule et même formule au contrat. Si l’inscription de l’enfant a lieu dans les 3 mois qui suivent sa naissance ou son adoption. (3) Sauf formule Eco. (2)

Pour en savoir plus sur ces deux contrats : appelez le 0 970 809 809 (n° non surtaxé) ou connectez-vous sur www.gmf.fr

SEREC Communication / juillet 2013 - Photo Getty Images - GMF : 76 rue de Prony 75857 Paris Cedex 17

GRÂCE À SANTE PASS ET PROTECTION REVENU, DEUX CONTRATS CONÇUS PAR LA GMF, VOUS ASSUREZ VOTRE SANTÉ ET PRÉSERVEZ EFFICACEMENT VOTRE NIVEAU DE VIE.


Actualité

Gendarmerie et police « à sec »

La ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, a signé, le 22 octobre, un protocole d’accord sur la prévention des risques psychosociaux avec la majorité des syndicats de fonctionnaires. « Un point d’appui important » pour la FSU, qui pointe « une perte d’identité professionnelle de nombreux agents ». Mais un texte qui « ne sera pas à même d’apporter des changements réels et concrets sur les conditions de travail », selon Solidaires qui, avec FO, ne l’a pas signé.

général de la gendarmerie nationale, Denis Favier, a évoqué à l’Assemblée nationale une « situation difficile » et des problèmes « pour assurer les paiements incontournables ». De leur côté, les syndicats de police dénoncent une « disette » et affirment que les policiers n’ont plus les moyens de travailler. La faute selon eux au gel puis au « surgel » des crédits imposés par Bercy. Les conséquences seraient nombreuses : services de police « en cessation de paiement », véhicules immobilisés « faute d’essence » ou enquêtes « abandonnées car trop coûteuses », déplore le syndicat Synergie Officiers. Un officier confirme à Acteurs publics ces difficultés. « Nous assurons les urgences, mais pour les patrouilles et la prévention en général, nous en faisons moins et devons justifier nos déplacements », explique-t-il. Face à ces cris d’alarme, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a annoncé aux députés, le 31 octobre, le déblocage de 111 millions d’euros pour assurer le fonctionnement courant des services et de 10 millions supplémentaires pour répondre « aux besoins immobiliers les plus pressants dans la gendarmerie nationale » et notamment le « lancement de travaux urgents dans les logements des gendarmes les plus dégradés ». Un geste qui « était éminemment attendu », a expliqué une source proche du dossier.

ROLAND BOURGUET/AMF

LOÏC VENANCE/AFP

La grogne monte dans les rangs des agents du ministère de l’Intérieur. Le directeur

PASCAL SITTLER/RÉA

Mieux vaut prévenir

■ BUDGET

L’Agence France locale enfin créée Onze élus locaux étaient réunis le 22 octobre au premier conseil d’administration de l’Agence France locale (AFL), « créée par et pour les collectivités » pour couvrir 25 % de leurs besoins en liquidités. Jacques Pélissard, maire UMP de Lons-le-Saunier (Jura) et président de l’Association des maires de France (cinquième en partant de la droite) a salué « le résultat de plusieurs années d’un travail acharné ».

22 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013



Actualité

En bref Conférence Valérie Fourneyron, ministre des Sports, de la Jeunesse, de l’Éducation populaire et de la Vie associative, a proposé l’organisation d’une conférence sur la jeunesse en janvier prochain sur le modèle de la dernière conférence environnementale.

Identité Un an après la publication de son rapport relatif aux relations entre police et citoyens et aux contrôles d’identité, le défenseur des droits, Dominique Baudis, a décidé de constituer un groupe de travail pour poursuivre la réflexion sur la question des contrôles d’identité et leurs modalités.

■ BUDGET

Une association

L’Élysée réduit son train de vie

Une vingtaine de collectivités à la pointe de l’open data, la mise en ligne gratuite d’un vaste ensemble de données publiques, se sont regroupées au sein d’une association nationale, le 9 octobre, à Toulouse, baptisée « Open data France ». Depuis 2010, plusieurs collectivités se sont lancées dans l’ouverture et le partage de données publiques, ainsi mises à disposition du grand public, de chercheurs ou de toute entreprise ou association qui souhaiterait les réutiliser pour en tirer des bénéfices économiques. La « libération » de données a notamment permis à des innovateurs ou à des entreprises de développer des applications de services à la personne pour smartphones ou tablettes. Il s’agit désormais de faire en sorte que chaque membre « libère ses jeux de données » de manière uniforme. Concrètement, une application pour smartphone ou tablette développée à partir des données « libérées » qui était pour l’instant limitée à une ville pourrait désormais être étendue à d’autres collectivités. Open data France (OPF), avec son propre site Internet, regroupe des collectivités comme Toulouse, Bordeaux, Rennes et Nantes, ainsi que leur communauté urbaine, la ville de Paris ou la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, afin de les soutenir dans leur démarche.

« En 2012, les femmes représentent 25 % des cadres dirigeants et supérieurs de la fonction publique d’État, alors qu’elles sont 52 % parmi les agents. Heureusement, les choses sont en train de changer. »

24

A RE OL/ PO N/ TO OU EM S. L

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, le 15 octobre, lors d’un colloque sur l’égalité professionnelle organisé à l’ENA.

BERTRAND GUAY/AFP

voit le jour

FOTOLIA

Pays basque Les membres du conseil des élus du Pays basque ont adressé une lettre au Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, pour lui demander les raisons qui motivent le rejet de toute collectivité basque par l’État. Ils soulignent leur « déception » face au « mépris » de l’État.

■ OPEN DATA

La présidence de la République réduira de 2 % son train de vie en 2014 pour donner l’exemple en cette période de disette budgétaire. L’année prochaine, l’Élysée s’appropriera très officiellement la Lanterne, près de Versailles, mais délaissera le fort de Brégançon, dans le Var. Avec un budget qui doit être ramené à 101,6 millions d’euros, la Présidence affirme vouloir s’inscrire « résolument dans la trajectoire de redressement des comptes publics ». Depuis 2012, les économies s’élèvent à 13,8 millions d’euros, avec un objectif de « stabilisation » du budget à 100 millions d’euros à compter de 2015. À cette fin, la Présidence entend poursuivre « la maîtrise de l’évolution » de ses emplois, des rémunérations de ses collaborateurs mais aussi de ses achats ainsi que le « renforcement du contrôle interne ». À l’été 2013, la Cour des comptes avait décerné un satisfecit à la gestion des services de l’Élysée pour la période suivant l’investiture de François Hollande. Les magistrats de la Rue Cambon avaient loué tout particulièrement la « compression des charges du personnel », la « réduction des dépenses liées aux déplacements présidentiels » et la « suppression de celles jusqu’ici consacrées aux sondages » chers à Nicolas Sarkozy. François Hollande lui-même avait réduit de 30 % sa rémunération.


IL NE PEUT PAS Y AVOIR DES PERSONNES BIEN COUVERTES ET D’AUTRES QUI NE LE SONT PAS, VOILÀ POURQUOI LA MNT

S’OUVRE À TOUS

Mutacité, la mutuelle santé issue de la MNT, 1ère mutuelle territoriale avec plus de 1 100 000 personnes protégées en santé et prévoyance.

DEMANDEZ VOTRE ÉTUDE PERSONNALISÉE

Forte de près de 50 ans d’expérience, la MNT protège aujourd’hui plus de 1 100 000 personnes. Avec Mutacité, vous bénéficiez de ce savoir-faire unique, avec une couverture santé de qualité qui s’adapte aux besoins de chacun, des solutions concrètes pour maîtriser votre budget santé et des services qui vous facilitent la vie.

www.mutacite.fr


Actualité

La note de la France abaissée

BERNARD BISSON/JDD/SIPA

Les réformes initiées par le gouvernement depuis le printemps 2012 se poursuivront parce qu’elles sont la seule voie qui permette à la France d’assurer sa crédibilité. C’est en substance la réponse de François Hollande à la dégradation de la note française début novembre par Standard & Poor’s pour la seconde fois en deux ans. L’agence a justifié sa décision d’abaisser d’un cran, à « AA », la note de la France, fixée depuis début 2012 à « AA+ », par le fait que le pays n’était pas en mesure de se réformer davantage en raison du maintien d’un chômage élevé.

■ DÉFENSE

ÉTIENNE LAURENT/DAPD/SIPA

Plan d’urgence pour l’armée Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé le 25 octobre à Castelnaudary (Aude) un plan d’urgence exceptionnel de 30 millions d’euros pour les bases de défense françaises. Ce ballon d’oxygène est « un plan d’amélioration des conditions de travail en base de défense à mise en œuvre immédiate », a déclaré le ministre, lors d’une visite au 4e régiment étranger de parachutistes. Sur le fond, ce plan ne bouleverse pas l’architecture du budget général des armées, marquée par une réduction de 33 675 équivalents temps plein (ETP) d’ici 2019. Rien que pour 2014, un peu moins de 7 900 postes seront supprimés. L’une des priorités du projet de loi de programmation militaire (LPM) étant de préserver les forces opérationnelles, la plus grande part des suppressions touchera la fonction de soutien à hauteur de 14 500 hommes, l’autre tiers concernant les forces armées proprement dites, soit près de 9 000 hommes. « La Marine paraît épargnée mais le budget de l’armée de terre subit une pression drastique », a déclaré Gérard Larcher, sénateur UMP, pour qui « une armée de terre en capacité opérationnelle permanente est pourtant indispensable au service de notre pays ». 26 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

10 000 C’est le nombre d’allocataires âgés de 18 à 25 ans en situation de grande précarité qui toucheront la « garantie jeunes » (450 euros mensuels) mise en place pour une première vague de test du dispositif dans 10 départements. Une fois généralisé, en 2016, ce dispositif pourrait concerner 100 000 jeunes.



Multigaranties professionnelles des agents publics

POUR SEULEMENT 24 € PAR AN (1)

Une sécurité essentielle face aux risques du métier Offre tarifaire soumise à conditions disponibles en Agences. Document non contractuel. (1) Tarif valable jusqu’au 31/12/13. AMF Assurances - Société anonyme à directoire et conseil de surveillance au capital de 69 416 644 € entièrement libéré - n° 487597510 RCS Rouen. Entreprise régie par le Code des Assurances. Siège social : 66 rue de Sotteville, 76100 Rouen. Crédit photo : © Brendan Byrne - Digitalvision, © Itstockfree, © Phovoir, © Dauf - Fotolia.com


COMMUNIQUÉ

REJOIGNEZ UN ASSUREUR QUI VOUS COMPREND AMF Assurances propose une large gamme de contrats HQULFKLV GH JDUDQWLHV UĂ’SRQGDQW Âż YRV VSĂ’FLĂ° FLWĂ’V professionnelles, incluses sans supplĂŠment de cotisation.

RĂŠduction sur la cotisation RĂŠsidence Principale pour les agents logĂŠs par nĂŠcessitĂŠ absolue de service. Garanties mutation et dĂŠmĂŠnagement sans supplĂŠment de cotisation.

VÉHICULES : AUTO, MOTO‌ Des garanties d’assurances claires pour s’engager en toute connaissance de cause. Des rĂŠponses complètes sans option WV\Y \UL JV\]LY[\YL WS\Z Ă„ HISL L[ plus ĂŠtendue. Une protection du conducteur jusqu’à 1 300 000 â‚Ź en cas de blessures. Un accès Ă l’ensemble des services du Groupe Matmut : rĂŠparateurs agrĂŠĂŠs, stages prĂŠvention‌ Des rĂŠductions Ă cumuler.

HABITATION : RÉSIDENCE PRINCIPALE, SECONDAIRE, DONNÉE EN LOCATION‌ Un contrat adaptĂŠ Ă votre mode de vie : locataire ou propriĂŠtaire, maison particulière ou appartement, logĂŠ par nĂŠcessitĂŠ de service, fonctionnaire stagiaire‌ Les garanties indispensables pour protĂŠger votre cadre de vie : dĂŠgâts des eaux, vol, incendie, bris de glaces, dommages ĂŠlectriques, gel, inondation‌ Des solutions pour une protection renforcĂŠe : rĂŠĂŠquipement Ă neuf, couverture de vos amĂŠnagements extĂŠrieurs, piscine, ĂŠquipements de dĂŠveloppement durable‌

Couverture sans supplĂŠment de cotisation des trajets effectuĂŠs pour besoin de service. RĂŠduction motard professionnel de la Fonction Publique. Suppression de franchise en cas de dĂŠgradations sur votre vĂŠhicule personnel en lien avec vos missions.

ACCIDENTS CORPORELS : MULTIRISQUES ACCIDENTS DE LA VIE Un contrat qui vous protège en cas d’accidents de jardinage, de bricolage, de sport, mĂŠdicaux, du travail‌ Des prestations pouvant aller jusqu’à 1 500 000 â‚Ź en cas de blessures.

En complĂŠment de votre protection statutaire, garantie des pertes de revenus professionnels dès le 1er jour d’arrĂŞt de travail, incluant la perte de primes et d’indemnitĂŠs soumises Ă l’impĂ´t sur le revenu.

Extension sans surcoÝt de l’assurance du logement mis à disposition et des biens emportÊs (ordinateur, bagages‌) en Êcole de la Fonction Publique.

amf-assurances.fr SociĂŠtĂŠ du Groupe Matmut dĂŠdiĂŠe aux agents publics

Document non contractuel. L’ensemble des garanties ĂŠvoquĂŠes dans ce document s’applique dans les limites et conditions dĂŠfinies au contrat. * Minimum de 15 â‚Ź par prĂŠlèvement. AMF Assurances - SociĂŠtĂŠ anonyme Ă directoire et conseil de surveillance au capital de 69 416 644 â‚Ź entièrement libĂŠrĂŠ - n° 487597510 RCS Rouen. Entreprise rĂŠgie par le Code des Assurances. Siège social : 66 rue de Sotteville, 76100 Rouen.


Entrevue

DIDIER MIGAUD

« Il serait possible de mieux avec moins » 30 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013


Entrevue DIDIER MIGAUD

Déficits, décentralisation, efficience des politiques publiques, Dexia… Dans un entretien exclusif à Acteurs publics, le Premier président de la Cour des comptes livre son diagnostic. Didier Migaud appelle notamment à agir plus vigoureusement pour réduire le déficit de la Sécurité sociale, une anomalie, selon lui. Propos recueillis par Bruno Botella et Sylvain Henry Photos : Vincent Baillais

faire

En juillet 2012, lors de la remise de l’audit des finances publiques effectué à la demande du gouvernement, vous aviez qualifié la situation de préoccupante. Qu’en est-il aujourd’hui ? Elle l’est toujours. Dans son rapport de juin 2013, la Cour a constaté que le redressement des comptes engagé en 2011 s’est poursuivi en 2012. Mais la France est encore à mi-chemin de la consolidation budgétaire et le desserrement du calendrier, justifié par le ralentissement économique, n’autorise pas de relâchement. L’effort structurel programmé pour 2012 et 2013 devrait être réalisé, mais celui prévu pour 2014 et 2015, bien qu’inférieur, reste important. Il doit désormais porter pour l’essentiel sur la dépense publique afin que, comme le prévoient les pouvoirs publics, sa croissance en volume ralentisse significativement et se rapproche de 0 %.

Quelles sont les améliorations ? L’effort structurel, je l’ai dit, est respecté. En outre, pour la troisième année consécutive, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie n’a pas été dépassé. Un certain ralentissement de la dépense peut être constaté par rapport à son évolution en moyenne période, mais il reste en deçà de ce qui est réalisable. État, Sécurité sociale, collectivités locales : quel pilier de la dépense publique vous inquiète-t-il le plus ? Toutes les composantes de la dépense publique doivent contribuer aux efforts de redressement. Cela étant, le déficit des comptes sociaux constitue une anomalie particulière, qui perdure en France alors que nos voisins ont résorbé le leur. Pire, la dette sociale est actuellement de plus en plus financée par des emprunts à court terme, …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 31


Entrevue

PARCOURS

1952 Naissance à Saint-Symphorien (Indre-et-Loire)

DIDIER MIGAUD

1995 Président 1988 Député PS de l’Isère

de la communauté d’agglomération Grenoble Alpes Métropole

« L’État n’a pas suffisamment tiré les conséquences de la décentralisation. » … ce

qui est dangereux en cas de remontée des taux d’intérêts. Que faut-il faire pour remédier à cette « anomalie » ? Cette question regarde le législateur. La Cour a identifié des gisements d’économies qui permettraient un retour

à l’équilibre. Elle appelle à prendre des mesures plus volontaristes, nécessaires pour préserver notre modèle de Sécurité sociale. Le seuil des 100 % de dette publique peut-il être atteint ? Cela peut-il créer un électrochoc ? La dette publique continue d’augmenter. Si la trajectoire de réduction du déficit n’est pas tenue, il n’est pas exclu qu’elle atteigne 100 % du PIB dans les années qui viennent. Les créanciers de l’État pourraient être enclins à demander des taux d’intérêts plus élevés, ce qui rendrait encore plus difficiles le ralentissement des dépenses publiques et la réduction du déficit. Mieux vaut se garder d’un tel scénario.

Vous insistez, ces derniers temps, sur la nécessité de réduire les dépenses. Où voyez-vous le plus de marges de manœuvre au sein de l’État et des opérateurs ? Si la France figure sur le podium des pays ayant le niveau de dépense publique le plus élevé, les résultats de ses politiques publiques ne la placent pas toujours, loin s’en faut, sur le podium en termes d’efficience et d’efficacité. Ainsi, en matière d’éducation, malgré un effort budgétaire très significatif, notre pays se situe au 18e rang de l’OCDE pour la performance de ses élèves, et cette situation s’aggrave ! D’autres exemples pourraient être donnés. Les Français, qui constatent une augmentation des prélèvements obligatoires, en ont-ils pour leur argent aujourd’hui ? Trop souvent, non. Dans nombre de politiques publiques, il serait possible de faire mieux avec moins, d’où la nécessité d’évaluer beaucoup

32 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

plus que la France ne l’a fait jusqu’à présent. En matière d’efficience des politiques publiques, y aurait-il des exemples à suivre chez nos voisins de l’étranger ? La France aurait intérêt à regarder davantage autour d’elle. Les comparaisons sont instructives en matière de coûts et d’efficacité. C’est le cas, par exemple, des dépenses de médicaments, anormalement élevées en France sans avantage en termes d’indicateurs de santé. Supprimer des postes de fonctionnaires est-il le bon moyen de faire des économies ? S’agissant de l’État, la règle posée est celle de la stabilité globale des effectifs, ce qui implique nécessairement des diminutions dans certaines administrations. Ce principe de stabilité globale impose aussi de maîtriser les évolutions de rémunération. Vous avez appelé à plusieurs reprises à une clarification des compé-


Entrevue

1997 Rapporteur

2007 Président

général de la commission des finances de l’Assemblée nationale

de la commission des finances de l’Assemblée nationale

tences entre l’État et les collectivités territoriales et entre les collectivités elles-mêmes. En prendon le chemin, notamment grâce aux textes de décentralisation du gouvernement ? Il ne m’appartient pas de commenter des textes en cours de discussion. Dans le contexte budgétaire actuel, la Cour estime que l’État doit adapter son organisation territoriale et repenser ses missions. Simplifier et adapter l’État territorial suppose de supprimer les doublons de compétences – au sein de l’État mais aussi avec les collectivités – et de réduire les domaines de compé tences partagées. La Cour constate que la clause de compétence générale ne

contribue pas à la simplification et à la clarification. Sur ce point, le choix fait par le Parlement est différent. Dont acte, le dernier mot revenant toujours au législateur.

2010 Premier président de la Cour des comptes.

Retrouvez l’intégralité de la biographie sur www.acteurspublics.com

conclusions opérationnelles et à les mettre en œuvre, comme beaucoup d’autres pays l’ont fait. L’accent mis sur les évaluations doit être salué, mais il est trop tôt pour juger des suites.

les constats pour mieux réformer ensuite. L’implication des fonctionnaires, mais aussi des parlementaires et des usagers, est un facteur essentiel de réussite.

Comme la RGPP, la MAP reste pilotée par le gouvernement. Faut-il y associer d’autres acteurs ? La RGPP a souffert d’une insuffisante association des différentes parties prenantes. Il faut savoir faire partager

La Cour des comptes a dressé, en juillet, un tableau très mitigé de la réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate). Faut-il recommencer ou poursuivre cette réforme ? L’État n’a pas suffisamment tiré les conséquences de la décentralisation. Pour adapter son action à la bonne échelle du territoire, les circonscriptions administratives devraient être mises en cohérence autour de l’échelon de référence qu’est devenue la région, voire, pour certaines fonctions, …

Que pensez-vous de la démarche de Modernisation de l’action publique (MAP) ? Réformer l’action publique en s’appuyant sur l’évaluation systématique des politiques publiques est un objectif largement partagé. Quel que soit le nom donné à la démarche – RGPP ou MAP –, la réussite dépend de la capacité des responsables publics à en tirer des

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 33


Entrevue DIDIER MIGAUD

« Il faut calculer les dotations en tenant compte des efforts faits par les collectivités. » … l’interrégion.

La fusion des directions régionales et départementales, dans les départements chefs-lieux de région, serait bienvenue, comme la réduction du nombre de sous-préfectures et de tribunaux de commerce. Le périmètre des services de proximité doit être modulé en fonction des territoires et des besoins.

Les associations d’élus ont protesté suite à la publication du récent rapport de la Cour des comptes sur les finances locales. La question de la gestion des personnels est-elle vraiment la cause des dérives observées ? La Cour n’a pas parlé de dérives et a rappelé la situation globalement saine des collectivités. Elle dit simplement

que les collectivités locales constituent une composante de la dépense publique, sur l’évolution de laquelle le gouvernement et le Parlement s’engagent. Or leurs dépenses de fonctionnement sont dynamiques et le gouvernement ne dispose pas des outils permettant de modérer cette évolution. La rémunération du personnel représentait 35 % des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales en 2012, et plus de 50 % pour les communes. Son dynamisme repose surtout sur des décisions locales, même si 40 % de l’évolution résulte de mesures législatives

34 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

et réglementaires prises au plan national. Il est donc légitime que les juridictions financières s’y intéressent et soulignent l’existence de marges de manœuvre importantes. Comment expliquer cette situation ? La générosité des élus vis-à-vis de leurs personnels ? Une mauvaise gestion ? Aujourd’hui, le taux de croissance de la France n’est plus de 3 ou 4 %. Il faut pouvoir s’adapter et ne pas rester sur des schémas anciens de gestion du personnel. Bon nombre de collectivités l’ont d’ailleurs compris. L’État peut-il et doit-il contraindre les collectivités à rentrer dans les clous ? Faudrait-il l’équivalent d’une loi de finances locales votée par le Parlement, comme il existe la loi de financement de la Sécurité sociale ? Les collectivités locales représentent 9,5 % de la dette publique et plus de 20 % de la dépense publique. Par ailleurs, les dotations que l’État leur verse participent à son déficit. À la suite du traité européen de mars 2012, la loi organique de décembre 2012 et les lois de programmation des finances publiques ont intégré la responsabilité globale du gouvernement et du Parlement dans la gouvernance des finances publiques, dont les finances locales sont une composante. Des prolongements sont nécessaires. L’instauration d’une loi de finances … locales est une option.


Les politiques publiques décryptées en un seul volume Formation Administration

C o n c o u r s

Les politiques publiques

Sous la direction de Suzanne Maury Bertrand Alessandrini Blandine Barreau Nadège Bouquin Fabrice Bretéché Samuel Charlot Pascal Desrousseaux Christine Rimbault Vincent Thulard

La documentation Française

19 € 240 pages

Réf. 9782110094315

33 fiches synthétiques et actualisées présentant chacune une politique publique (Défense, emploi, gestion des finances publiques...) En vente chez votre libraire, sur www.ladocumentationfrancaise.fr et par correspondance : DILA 29 quai Voltaire - 75344 Paris cedex 07


Entrevue DIDIER MIGAUD

« L’implication des fonctionnaires, des parlementaires et des usagers est un facteur essentiel de réussite. » … Faut-il instaurer un bonus-malus pour les dotations – bonus pour les collectivités qui gèrent bien, malus pour les autres ? Il est souhaitable d’apporter des solutions différenciées selon les collectivités. Cela passe par le renforcement de la péréquation, car les situations sont très hétérogènes. Quant aux dotations de l’État, elles doivent être calculées en tenant compte des efforts faits par les collectivités.

Estimez-vous que les conséquences de l’affaire Dexia, pour les collectivités notamment, sont derrière nous ?

Contrairement aux craintes exprimées, les conditions d’accès à l’emprunt des collectivités se sont révélées favorables en 2012, permettant de maintenir le niveau de l’investissement public local. Le rapport de la Cour a montré qu’au-delà d’un coût important pour le contribuable (6,6 milliards d’euros), la défaillance de Dexia se traduisait par des risques élevés et durables pour l’État et pour les collectivités qui doivent rembourser des prêts structurés. Les conséquences sont donc encore, pour de nombreuses années, devant nous. Comment la certification des comptes de l’Assemblée nationale et du Sénat va-t-elle se mettre en œuvre ? C’est un travail de certification des comptes, pas de contrôle de la gestion. À compter de l’exercice 2013, nous vérifierons la conformité des comptes au référentiel comptable applicable à chaque assemblée. Cela donnera lieu à la formulation d’une opinion motivée. N’est-il pas souhaitable d’aller plus loin et d’auditer, comme c’est le cas par exemple pour la présidence de la République ?

36 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

La Cour des comptes n’est pas compétente pour en décider. C’est du ressort du Parlement. La certification des comptes contribuera à plus de transparence. Où en est la mise en œuvre de la réforme des juridictions financières ? Elle a pu aboutir dans les conditions et le calendrier prévus. Toutes les situations individuelles ont été prises en compte. Les chambres, sièges des nouveaux ressorts, ont bénéficié de travaux de modernisation leur permettant d’accueillir les nouveaux effectifs et de moderniser leurs conditions de travail. Par ailleurs, les moyens de contrôle des chambres régionales sont ou vont être renforcés, leurs présidents étant fortement encouragés à concentrer les recrutements ouverts sur les fonctions de contrôle, en réduisant le volume des fonctions supports. Ainsi, les chambres régionales rempliront dans de meilleures conditions leurs missions essentielles de contrôle. Par ailleurs, les relations de travail entre la Cour et les chambres régionales des comptes ont été facilitées. L’efficacité de l’ensemble des juridictions financières se trouve ainsi améliorée. ●


VOUS NE VOYEZ QU’UNE PAGE VIDE? NOUS VOYONS UNE SURFACE À VALORISER.


Observatoire

SONDAGE EXCLUSIF

Les Français veulent des enseignants mieux formés et évalués Moins d’un tiers des personnes interrogées par l’Ifop estime que la dépense publique d’éducation est trop élevée. La principale mission assignée à l’école est la transmission des valeurs. Les Français restent attachés à une juste répartition des moyens sur le territoire.

R

éalisée quelques semaines après la rentrée et en pleine polémique sur les rythmes scolaires, l’enquête de l’Ifop pour Acteurs publics met en lumière les représentations de l’opinion sur trois dimensions essentielles du

fonctionnement de l’école : son efficacité, au regard de l’importance de ce poste dans le budget de la nation, sa finalité et les réformes qu’il faudrait prioritairement engager pour l’améliorer. Le jugement sur la manière dont l’école de la République

remplit sa mission dépend considérablement du niveau scolaire auquel on s’attache. Ainsi, les personnes interrogées sont une large majorité (85 %) à estimer que l’école maternelle remplit bien sa mission, un quart (24 %) pensant même qu’elle le fait

38 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

« très bien ». L’unanimité se brise déjà s’agissant de l’école élémentaire, pour laquelle les jugements positifs reculent à 66 %, et le doute s’installe véritablement au sujet du collège (50 % pensent qu’il remplit bien sa mission, une part exactement équiva-

lente pensant l’inverse), et plus encore au sujet du lycée (47 % versus 53 %).

Divergences sur les dépenses Si l’opinion apparaît relativement partagée quant à la capacité de l’école à …


En partenariat avec

« Il n’est plus question pour les Français de tailler dans les effectifs ni de décentraliser davantage l’éducation. » Damien Philippot (Ifop)

Ensemble des Français Trop importante Pas assez importante

29 %

19 %

L’ÉTAT ET LES COLLECTIVITÉS DÉPENSENT 115 MILLIARDS D’EUROS PAR AN POUR L’ÉDUCATION (ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR COMPRIS). LA DÉPENSE MOYENNE PAR ÉLÈVE ET PAR AN EST DE 5 870 EUROS POUR UN ÉLÈVE DU PREMIER DEGRÉ, 8 370 EUROS POUR UN COLLÉGIEN, 11 470 EUROS POUR UN ÉLÈVE DE LYCÉE GÉNÉRAL ET TECHNOLOGIQUE, ET 11 840 EUROS POUR UN ÉLÈVE DE LYCÉE PROFESSIONNEL. DIRIEZ-VOUS QUE CETTE DÉPENSE PUBLIQUE POUR L’ÉDUCATION EST… ? Sympathisants de gauche

52 %

8%

des sympathisants UMP estiment qu’il faut recruter plus d’enseignants pour améliorer le système.

Sympathisants de l’UMP

Sympathisants du FN

22 % 20 %

10 %

58 %

À un juste niveau

43 %

38 %

12 %

52 %

45 %

SELON N VOUS, QU QUELLES UELLES DOIVENT NTT ÊÊTRE LES DEUX PRINCIPALES MISSIONS DE L’ÉCOLE ? EN PREMIER ? EN SECOND ? 30 %

Transmettre aux jeunes des valeurs : respect de l’autre, politesse, égalité

56 % 25 %

PHILIPPE HUGUEN/AFP

Donner aux jeunes les connaissances nécessaires pour comprendre le monde

49 % 23 %

Préparer les jeunes à entrer sur le marché du travail et leur apprendre un métier

Apprendre aux jeunes à penser par eux-mêmes

51 %

47 %

12 % 36 %

25 %

28 %

Apprendre aux jeunes le respect de l’autorité et de la hiérarchie

10 %

23 %

En premier

Total des citations

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 39


Observatoire

44 %

des 18-24 ans estiment que le collège remplit bien sa mission.

remplir ses missions, elle l’est tout autant s’agissant du niveau de la dépense publique consacrée par la France à l’éducation. Une courte majorité (52 %) pense que l’investissement est suffisant, 29 % qu’il est trop important et 19 % pas assez important. Sans surprise, les divergences sont avant tout politiques : ainsi, 41 % des proches de la droite regrettent une dépense trop élevée, quand 17 % seulement des sympathisants socialistes font le même constat.

Valeurs Dans ce contexte, les missions assignées par l’opinion publique à l’école apparaissent relativement éclatées. Trois d’entre elles se détachent néanmoins et sont évoquées par une part importante des personnes

22 %

des sympathisants de gauche jugent « pas assez importante » la dépense publique d’éducation.

interrogées, traduisant la multiplicité des objectifs fondamentaux donnés par les Français à l’éducation nationale : 56 % évoquent la transmission des valeurs (respect de l’autre, politesse, égalité, etc.), 49 % le fait de donner aux jeunes les connaissances nécessaires pour comprendre le monde et 47 % leur préparation à l’entrée sur le marché du travail, l’apprentissage d’un métier. On constate ainsi que la mission de l’école est double : intellectuelle et sociale d’un côté, l’école conservant indiscutablement de ce point de vue une mission humaniste aux yeux des Français ; opérationnelle de l’autre, l’école devant aussi former concrètement à l’exercice d’un métier, à l’intégration effective dans la vie adulte.

Deux autres missions, l’une d’obédience assez libertaire, l’autre plus conservatrice, sont moins souvent évoquées : le fait d’apprendre aux jeunes à penser par eux-mêmes (25 %) et l’apprentissage du respect de l’autorité et de la hiérarchie (23 %). La comparaison avec une enquête menée en 2011 par l’Ifop ne montre pas d’évolution significative dans cette hiérarchie que font les Français des missions essen tielles qu’il convient d’attribuer à l’école.

Formation des enseignants Enfin, en termes d’organisation, lorsqu’ils sont appelés à prioriser quelques éléments d’amélioration des performances du système éducatif français, les interviewés font

Accédez à l’intégralité du sondage sur www.acteurspublics.com

un choix assez clair. Le premier objectif, cité par deux tiers des répondants (66 %), réside dans une meilleure formation et une meilleure évaluation des enseignants. Trois autres propositions, plus clivées politiquement, sont évoquées par un tiers ou plus des Français : le recrutement de davantage d’enseignants (32 % au global, 41 % à gauche, 29 % au FN, mais 8 % seulement parmi les proches de l’UMP), le fait d’accorder aux chefs d’établissement plus d’autonomie, notamment pour le recrutement des enseignants (35 % au niveau de l’ensemble des Français, mais 48 % à droite et seulement 23 % à gauche), une meilleure répartition des moyens entre territoires (38 % au total, 53 % à gauche et 25 % à droite).

La réduction du nombre d’enseignants (12 %) ne figure pas parmi les priorités des Français, de même que le fait d’accorder plus de place à l’enseignement privé (10 %), ou encore de nouveaux transferts de compé tences aux collectivités locales (8 %). Très clairement, certaines des orien tations parfois envisagées par les pouvoirs publics ces dernières années sont remises en cause par les Français : il n’est plus question pour eux de tailler dans les effectifs de la sphère éducative ni de décentraliser davantage l’éducation. ● Damien Philippot, directeur des études politiques au département « Opinion et stratégies d’entreprise » de l’Ifop

DR

L’expertise d’

Bruno Gérard, associé Ernst & Young

Réforme des rythmes scolaires, efficacité des apprentissages élémentaires, niveau de la dépense publique pour l’éducation, recrutement et formation des enseignants tentent d’apporter des réponses à la nécessaire adaptation de l’école. Mais quelles missions, avec quels objectifs et quels moyens ? Le spectre des missions de l’école s’élargit et s’adapte aux besoins du monde actuel. Le fondement de l’école de la République est l’accès et l’acquisition du savoir. L’évolution de la société, par exemple de la cellule familiale, mais aussi du monde économique, ajoute des exigences à la mission originelle de l’école : on attend d’elle, comme cela apparaît dans les résultats du sondage, qu’elle soit aussi un lieu de transmission des valeurs et d’apprentissage des relations économiques et sociales. La récente installation du Conseil

40 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

national éducation économie (CNEE) témoigne de la volonté des pouvoirs publics de connecter encore davantage l’école au monde réel, celui des relations sociales et économiques. La démarche initiée doit permettre une meilleure prise en compte des enjeux de l’insertion professionnelle et de l’adaptation des formations, elle doit assurer une transition naturelle entre l’école et les formations professionnelles et universitaires, créer les conditions de l’innovation, de la croissance et donc de l’emploi.


En partenariat avec

AUJOURD’HUI EN FRANCE, DIRIEZ-VOUS DE L’ÉCOLE QU’ELLE REMPLIT BIEN OU MAL SA MISSION AU NIVEAU... ? Total … de l’école maternelle

Total … de l’école élémentaire

10 %

4%

43%

Bien : 50 %

6%

Très bien

11 % 4 %

Mal : 34 %

56 %

Bien : 47 %

Total … du lycée

61 %

Bien : 66 %

Total … du collège

Mal : 15 %

Bien : 85 %

24 %

44 %

Assez bien

QUE FAUDRAIT-IL FAIRE SELON VOUS EN PRIORITÉ POUR AMÉLIORER LES PERFORMANCES DU SYSTÈME ÉDUCATIF FRANÇAIS ? EN PREMIER ? ET EN SECOND ?

27 %

7%

41 %

12%

38 %

Assez mal

16 %

Accorder plus d’autonomie aux chefs établissements scolaires, notament en matière de recrutement des enseignants

14 %

Réduire le nombre d’enseignants tout en leur assurant une meilleur rémunération Accorder plus de place à l’enseignement privé

Mal : 50 %

12%

Très mal

66 %

Mieux répartir les moyens entre territoires favorisés et territoires défavorisés

Recruter davantage d’enseignants

Mal : 53 %

39 %

Mieux former et mieux évaluer les enseignants

Transférer davantage de compétences aux collectivités locales En premier

38 %

35 % 18 % 32 % 6% 12 % 5% 10 % 2% 8% Total des citations

Sondage Acteurs publics/Ernst & Young réalisé par l’Ifop pour l’Observatoire des politiques publiques auprès d’un échantillon de 1 004 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession de l’interviewé) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI - Computer Assisted Web Interviewing) du 16 au 18 octobre 2013.

Les territoires, acteurs de proximité Les collectivités territoriales constituent des acteurs essentiels des dispositifs d’éducation, notamment en contribuant à cette dépense publique au sein d’un système de compétences partagées avec l’État. On doit néanmoins préserver la capacité de piloter ce système, malgré une complexité et une diversité croissantes des relations entre l’institution scolaire et les représentations des territoires. En particulier, une approche territoriale des formations à l’école peut être développée encore, par exemple dans le cadre du plan régional de formation professionnelle, pour mieux faire converger les enjeux de formation et les besoins professionnels pour chaque territoire. La formation des enseignants Il est couramment opposé le nombre des enseignants et leur rémunération. Or il apparaît, en tête des priorités exprimées dans le sondage, que le plus

important, et de loin, pour améliorer le système éducatif est la qualité et l’adéquation de la formation des enseignants. La création des écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE), qui ont ouvert leurs portes à la rentrée 2013, doit répondre à cette préoccupation. Leur intégration au sein de l’université permet un accès à des ressources pédagogiques innovantes et de qualité. Outre les aspects disciplinaires, la mise en capacité des enseignants « d’apprendre à apprendre », alternant théorie et pratique, est primordiale, la réussite scolaire en dépend. Cette réflexion doit s’accompagner d’une remise en question des modes d’enseignement traditionnels, mettre l’accent sur des méthodes participatives, mettant à profit les nouvelles technologies. Les ESPE proposent également un parcours de formation continue pour les enseignants, ce qui rejoint l’enjeu qualitatif mis en évidence dans les résultats du sondage.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 41


CHAQUE JOUR

LA

FRANCE

DES POUVOIRS

SUR TOUS VOS ÉCRANS

ACTEURSPUBLICS.COM 042-043-LB-ouv-FDP.indd 42

13/11/13 17:46


VINCENT BAILLAIS

RENCONTRE AVEC…

JEAN-MAURICE RIPERT

L’œil «hollandais» de Moscou

DR

> MARIE-ANNE LÉVÊQUE

Une DRH de l’État très politique

P. 44

JEAN-PHILIPPE VACHIA

Le contrôleur du régalien

P. 56

P. 48

HUGUES PARANT

Un préfet à l’Epadesa

P.52

ÉRIC LUCAS

Un militaire au cœur de la justice

MARTIN HIRSCH

Aux commandes de l’AP-HP

042-043-LB-ouv-FDP.indd 43

P. 54

JEAN-PHILIPPE COTIS

P. 46

Un économiste part dans la banque

P. 54

13/11/13 17:46


LA

NOV.-DÉC. 2013

FRANCE DES POUVOIRS

Directeur régional et interdépartemental de l’environnement et de l’énergie de la région Île-de-France depuis cinq ans, Bernard Doroszczuk part diriger le Comité français d’accréditation (Cofrac). Il remplace Daniel Pierre, en place depuis 1994, au poste de directeur général de cette instance chargée de délivrer les accréditations aux organismes intervenant dans l’évaluation de la conformité en France.

Matignon Le gouvernement vient de nomme Luc Paraire délégué à la mobilité et aux carrières (DMC) pour les emplois de directeur de l’administration territoriale (Date) des services du Premier ministre et de chargé de mission dans les secrétariats généraux des affaires régionales (Sgar). Il officiait depuis trois ans et demi comme directeur de projet « relations avec les réseaux » auprès du directeur des affaires financières, informatiques, immobilières et des services à l’administration commune des ministères sociaux.

C. SAIDOU/MIN. AGRI

Agriculture Le poste de chef du service des ressources humaines au secrétariat général du ministère de l’Agriculture vient d’être confié à un cadre de la maison : Jacques Clément. Ce dernier pilotait depuis quatre ans le service de la modernisation de ce ministère. Cet ingénieur de 50 ans a piloté la sousdirection des systèmes d’information au service de la modernisation au secrétariat général (2005-2009).

Le Président François Hollande place l’un de ses proches à la tête de l’ambassade française en Russie : le diplomate Jean-Maurice Ripert. Il était depuis deux ans le chef de la représentation européenne en Turquie. Ami de longue date du chef de l’État, avec qui il a fondé durant leur scolarité, au sein de la promotion Voltaire de l’ENA, le

Comité pour la rénovation démocratique de l’ENA, ou Carena, syndicat prônant une profonde réforme de l’école, Jean-Maurice Ripert a depuis mené une brillante carrière au Quai d’Orsay et a déjà occupé trois postes d’ambassadeur : en Grèce (2000-2003), puis comme ambassadeur, représentant permanent de la France auprès de l’Office

des Nations unies à Genève et des organisations internationales en Suisse (2005-2007), et enfin comme ambassadeur à l’ONU à New York (2007-2009). Il a aussi piloté la direction des Nations unies et des organisations internationales du Quai d’Orsay de 2003 à 2005. Jean-Maurice Ripert a été le conseiller diplomatique à Matignon de deux

DR

Conformité

Premiers ministres : Michel Rocard en 1988 puis Lionel Jospin en 1997.

aux affaires

Un nouveau stratège pour les finances publiques

Patron de l’Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss) de 2007 à avril dernier, Pierre Ricordeau, inspecteur général des affaires sociales, prend le poste nouvellement créé de directeur, secrétaire général adjoint des ministères chargés des Affaires sociales. Cet énarque de 48 ans, qui sera l’adjoint de Pierre-Louis Bras, arrivé à la fin de l’été au poste de secrétaire général, a fait l’essentiel de sa carrière à la direction de la Sécurité sociale, dont il a été l’adjoint au directeur de 2003 à 2005.

Chef du service du contrôle fiscal, à la direction générale des finances publiques (DGFIP) à Bercy, depuis mars 2012, Alexandre Gardette quitte son poste et se voit nommé chef du service du budget et de la performance de cette même direction générale. Cet énarque de 43 ans, qui a conseillé deux ministres du Budget de l’ère Sarkozy, est remplacé par Olivier Sivieude passé, lui, par plusieurs cabinets de gauche, a révélé le quotidien L’Opinion, y voyant une « purge » sur fond d’affaire Cahuzac et jugeant que « tous les postes de chef d’administration centrale échoient à des hommes proches de la majorité. » Visiblement agacé, le ministre des Finances, Pierre Moscovici, a dénoncé un « amalgame » et a indiqué que le nouveau poste pris par l’intéressé était « essentiel pour conduire la stratégie et le pilotage des moyens de la DGFIP, en période d’effort budgétaire. » Alexandre Gardette a débuté au service de la législation fiscale, en 1997. Directeur adjoint à l’agence du revenu du Canada, chargé des programmes de recouvrement de l’impôt au bureau des services fiscaux de l’Est du Québec en 2002, il revient ensuite à Bercy comme chef du bureau de la fiscalité directe des entreprises à la direction de la législation fiscale (2004-2008). Promu sous-directeur en charge de l’encadrement et des relations sociales à la DGFIP en 2008, il est ensuite le conseiller social de François Baroin, puis de Valérie Pécresse au ministère du Budget.

Un renfort sociales

44 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

DR

BOUGENT

L’œil « hollandais » de Moscou

DICOM/J.-D. FRESNOY

ILS



LA

NOV.-DÉC. 2013

FRANCE DES POUVOIRS

DU CABINET À L’ADMINISTRATION

ILS

La vigie de l’industrie l’Aménagement du territoire et de l’Environnement. À sa sortie du cabinet, Raymond Cointe avait été nommé secrétaire général adjoint du comité interministériel sur les questions de coopération économique européenne (SGCI) – devenu aujourd’hui le secrétariat général aux affaires européennes, basé à Matignon – et avait occupé ce poste jusqu’en 2007. Raymond Cointe a débuté comme ingénieur de recherche à l’Institut français du pétrole

Hirsch aux commandes

Directeur de la protection et de la sécurité de l’État au secrétariat général à la défense et à la sécurité nationale (SGDSN), Yann Jounot se voit promu préfet des Hauts-deSeine. Cet énarque, ancien chef de cabinet de Pierre Joxe au ministère de la Défense, succède à Pierre-André Peyvel, qui est parti à la retraite.

avant de travailler pour la mission interministérielle de l’effet de serre (1993-1997). Il a ensuite dirigé le secteur « Industrie, télécommunications, environnement, CECA » au SGCI, de 1997 à 1999.

Social Le poste de sous-directeur de l’animation interministérielle des politiques de ressources humaines à la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) vient d’être confié à Christian Nègre. Ce haut fonctionnaire formé sur les bancs de l’ENA et de l’ENSPTT pilotait depuis presque quatre ans la sous-direction des politiques de ressources humaines et des relations sociales au ministère de la Culture.

Afin de remplacer JeanYves Grall, en place depuis mai 2011 et nommé en septembre directeur de l’agence régionale de santé (ARS) du NordPas-de-Calais, la ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, vient de choisir le professeur Benoît Vallet pour le poste de directeur général de la santé. Il était, depuis 2010, responsable de la clinique d’anesthésie-réanimation de l’hôpital Jeanne de Flandre au centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Lille. Après des études de médecine à Paris-Ouest de 1978 à 1985, ce médecin de 55 ans a été diplômé de la faculté de médecine de Lille en 1990. Il a pris, en 2005, la responsabilité de la fédération d’anesthésie-réanimation du CHRU de Lille, puis celle du pôle en 2010. Il préside par ailleurs, depuis novembre 2011, la commission médicale d’établissement de cet hôpital. Le professeur Benoît Vallet est également à la tête de la collégiale française des enseignants en anesthésie-réanimation.

Culture

DR

DR

MARC BOUDER

Intérieur

Un anesthésiste à la direction de la santé

de l’AP-HP Le très médiatique conseiller d’État Martin Hirsch, ancien président d’Emmaüs, prend la tête de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), en remplacement de Mireille Faugère, dont l’éviction, réclamée par une partie des syndicats et par les opposants à la restructuration de l’Hôtel-Dieu, était dans l’air depuis plusieurs semaines. À 49 ans, Martin Hirsch connaît bien le premier CHU d’Europe, pour en avoir été le directeur de la pharmacie centrale entre 1995 et 1997. Cet énarque a été, en 2007, l’un des symboles de l’ouverture à gauche voulue par Nicolas Sarkozy qui l’avait enrôlé comme haut commissaire aux Solidarités actives. Père du revenu de solidarité active (RSA), ce haut fonctionnaire a au cours de sa carrière conseillé Bernard Kouchner à plusieurs reprises dans des gouvernements de gauche. Directeur général de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) de 1999 à 2005, Martin Hirsch est connu pour son engagement dans la lutte contre la pauvreté et a présidé pendant plusieurs années Emmaüs France.

BOUGENT

DR

Conseiller spécial des ministres de l’Écologie Delphine Batho puis Philippe Martin, Raymond Cointe se voit promu à la direction générale de l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris). Ce polytechnicien de 51 ans a dirigé, de 2008 à 2012, la direction des affaires européennes et internationales du ministère de l’Écologie, qu’il avait auparavant préfigurée. Il a aussi conseillé, de 1999 à 2001, Dominique Voynet puis Yves Cochet au ministère de

L’Institut français, opérateur de l’action culturelle extérieure de la France, vient de procéder à la nomination de Lazare Paupert au poste de directeur de son département « Développement et partenariats ». Ce normalien agrégé de lettres modernes pilotait depuis quatre ans la direction régionale des affaires culturelles (Drac) de Franche-Comté. Il a auparavant dirigé le Centre d’information et de documentation jeunesse (CIDJ) entre 2001 et 2005. Il a ensuite été directeur de l’Institut français et conseiller de coopération et d’action culturelle à l’ambassade de France à Sarajevo, en Bosnie-Herzégovine, de 2007 à 2009.

46 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

046-LB-En vue.indd 46

13/11/13 17:36



LA

NOV.- DÉC. 2013

FRANCE DES POUVOIRS LE PATRON DE LA BANQUE POSTALE

Le contrôleur DR

La présidence de la 4e chambre de la Cour des comptes, chargée de contrôler les services du Premier ministre, les activités régaliennes de l’État et d’assurer le jugement des appels des chambres régionales des comptes (CRC) est confiée à Jean-Philippe Vachia, conseiller maître. Cet

LA « DIPLOMATE » DE L’ÉCOLOGIE Le poste de directeur des affaires européennes et internationales au ministère de l’Écologie vient d’être confié à une magistrate de la Cour des comptes : Sylvie Lemmet. Cette énarque de 54 ans dirigeait depuis plus de six ans la division « Technologie, industrie et économie » du Programme des Nations unies pour le développement. Passée par HEC, Sylvie Lemmet a débuté dans le privé avant de rejoindre la haute fonction publique.

énarque de 60 ans était affecté à la 4e chambre depuis deux ans et en présidait la section « Pouvoirs publics constitutionnels ». Rue Cambon, ce magistrat a occupé les fonctions de secrétaire général adjoint (19911995), puis d’avocat général (1995-1999).

Promotion

LA VIGIE DU SAUVETAGE EN MER

Directeur de cabinet de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, depuis mai 2012, Lionel Collet vient d’obtenir une promotion. Il se voit nommé au tour extérieur conseiller d’État en service ordinaire. Il quitte ainsi le cabinet de la ministre après avoir bouclé le vote du projet de loi sur l’enseignement supérieur et la recherche. Ce praticien hospitalier a présidé l’université Lyon-I de 2006 à 2011. Entre 2008 et 2010, il a aussi présidé l’influente Conférence des présidents d’université (CPU). Au cours de sa carrière, Lionel Collet a dirigé le laboratoire « Neurosciences et systèmes sensoriels » (CNRS U.M.R. 5020), de 1991 à 1996. Il a également dirigé le service d’audiologie et explorations orofaciales aux hospices civils de Lyon entre 1999 et 2012. Au cabinet de Geneviève Fioraso, Lionel Collet est remplacé par Jacques Fontanille, ancien président de l’université de Limoges, de 2007 à 2012, qui était jusqu’ici l’un des plus proches collaborateurs de la ministre.

48 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

Affecté à la 6e chambre en 2005, il y a assumé la responsabilité du secteur « Certification des comptes du régime général de Sécurité sociale » de 2005 à 2009 et a été le rapporteur général des trois premiers rapports de certification. Jean-Philippe Vachia a aussi présidé une CRC,

celle de Midi-Pyrénées, entre 1999 et 2005. Ce haut fonctionnaire a commencé sa carrière en 1976 à la ville de Paris en tant qu’attaché d’administration, avant de réussir le concours de l’ENA et de sortir à la Cour des comptes à l’issue de sa scolarité, en 1986.

Un renfort pour

Augustin de Romanet

au Conseil d’État

DR

La présidence de la Société nationale de sauvetage en mer (SNSM), vacante depuis la démission du vice-amiral Olivier Lajous en raison de divergences de vues stratégiques avec les instances dirigeantes sur son programme prévoyant la gratuité complète des secours en mer, a été confiée à Xavier de La Gorce. Il a officié comme secrétaire général de la mer à Matignon de 2004 à 2008.

du régalien

CHRISTOPHE BOULZE

L’État, le groupe Caisse des dépôts et consignations ainsi que le groupe La Poste se sont mis d’accord sur le nom de Rémy Weber, le patron de CIC Lyonnaise de banque (groupe Crédit mutuel), pour prendre la direction de La Banque postale. Il remplace à ce poste Philippe Wahl, choisi début août pour prendre la tête de la maison mère, le groupe La Poste, en remplacement de Jean-Paul Bailly. Rémy Weber, 55 ans, est un spécialiste de la banque de détail, étant entré en 1993 à la Lyonnaise de banque, l’une des grandes banques régionales du CIC, lui-même filiale du Crédit mutuel.

Le président-directeur général d’Aéroports de Paris et ancien patron de la Caisse des dépôts et consignations, Augustin de Romanet, vient de procéder au recrutement d’un directeur général délégué, en la personne de Patrick Jeantet. Sa nomination prendra effet au plus tard lundi 6 janvier 2014. Il rejoindra le comité exécutif d’Aéroports de Paris, entreprise publique qui chapeaute les aéroports de Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly et Paris-Le Bourget. Cet ancien élève de l’École polytechnique et de l’École nationale des ponts et chaussées (ENPC) était, depuis 2005, l’un des cadres de Keolis, société spécialisée dans le transport et détenue majoritairement par la SNCF. Patrick Jeantet en a ainsi été le directeur général adjoint, puis le directeur général délégué en charge de l’international. Il en est, depuis février 2011, le directeur général délégué « France ». De 1986 à 1993, Patrick Jeantet, 53 ans, a travaillé chez Bouygues, où il a notamment participé en tant qu’ingénieur à la construction du tunnel sous la Manche. Entre 1993 et 1997, il occupe le poste de directeur du développement international et directeur des filiales Afrique de l’Est et australe de Sogea S.A. Patrick Jeantet a ensuite officié, de 1997 à 2005, comme directeur des sociétés de distribution d’eau potable et d’assainissement Manila Water Company (Philippines) et comme directeur général « opérations » de la société International Water, à Londres.


LA

NOV.JUIL-AOÛT DÉC. 2013 2013

FRANCE DES POUVOIRS

Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

Un médecin à inspection

Un nouveau

de l’éducation

DR

BOUGENT

Conseillère diplomatique au cabinet de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, depuis mai 2012, le médecin rhumatologue Anne Bisagni-Faure a été promue au tour extérieur inspectrice générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche de première classe. Ancienne interne des hôpitaux de Paris, Anne Bisagni-Faure, 53 ans, a occupé de nombreux postes à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Médecin coordinateur des centres d’investigation clinique de l’Inserm en 1995, elle est chargée de mission pour l’animation de la recherche clinique et thérapeutique (1998-2001). Directrice adjointe du département de l’animation et des partenariats scientifiques de l’Inserm en 2001, elle y dirige aussi le service de la politique régionale de 2003 à 2005. Promue directrice du département de la politique régionale et européenne de l’Inserm en 2005, Anne Bisagni-Faure officie ensuite comme directrice du département des partenariats et des relations extérieures (2010-2011), puis comme directrice déléguée auprès de la présidence (2012).

Bulgarie Chef adjoint du protocole au ministère des Affaires étrangères et européennes depuis trois ans, le diplomate Xavier Lapeyre de Cabanes, 49 ans, obtient son premier poste d’ambassadeur et part représenter la France en Bulgarie. Il connaît très bien la Bulgarie pour avoir officié à Sofia au début de sa carrière comme troisième (1991-1992), puis comme deuxième secrétaire (1992-1995).

DR

La présidence du Centre national du livre (CNL), organisme chargé de soutenir, grâce à différents dispositifs et commissions, tous les acteurs de la chaîne du livre, est confiée à Vincent Monadé. Ce normalien était, depuis juillet 2012, le conseiller politique chargé des relations avec les organisations non gouvernementales au cabinet de la ministre du Commerce extérieur, Nicole Bricq. Vincent Monadé a dirigé, de 2008 à 2012, l’observatoire du livre et de l’écrit « Le Motif » en Île-de-France, un organisme associé de la région mis en place pour renforcer le lien entre les professions du livre et proposer des politiques publiques pertinentes, adaptées aux évolutions en cours. Avant de prendre ce poste, Vincent Monadé a conseillé Jean-Paul Huchon à la présidence de la région Île-de-France, d’abord sur les lycées (1998-2001), sur les discours (2001-2004), puis sur la culture (2004-2005). Il avait ensuite quitté Paris et pris le poste d’attaché culturel à l’ambassade de France en République du Congo (2005-2008). Auparavant, il avait débuté comme libraire dans les magasins du groupe Gallimard.

DR

« M. Livres »

ILS

Danemark

De Matignon au renseignement

Liberia

sociaux, des violences urbaines ou de la détection de salafistes, se voit ainsi restructurée. Estimant que la réforme du renseignement en 2008 avait « en partie négligé » la SDGI, le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a décidé de rebaptiser cette filière « Renseignement territorial ». Le ministre avait insisté sur la nécessité de valoriser cette filière, dont l’organisation doit être « renouvelée », mais qui restera au sein des

commissariats. Commissaire de police de formation, Philippe Bertrand, 44 ans, conseille Jean-Marc Ayrault à Matignon depuis un an. Ce policier a officié comme adjoint au chef du service de protection des hautes personnalités place Beauvau, avant de partir comme directeur de la sécurité publique de NouvelleCalédonie (2011-2012).

Ambassadeur de France au Surinam ces trois dernières années, le diplomate Joël Godeau vient de se voir nommé ambassadeur au Liberia. Cet ancien élève de l’Inalco a auparavant officié comme consul général de France à Beyrouth, au Liban, en 2004, avant d’être chargé de mission pour les questions diplomatiques et de coopération régionale au cabinet du préfet de La Réunion en 2006.

DR

Le nouveau service central du renseignement territorial au sein de la direction centrale de la sécurité publique (DCSP) va être mis sur pied par un haut gradé de la police nationale : Philippe Bertrand. Il est nommé, pour cette mission, sous-directeur de l’information générale et préfigurateur du service. La sous-direction générale à l’information (SDGI), qui regroupe policiers et gendarmes, chargée notamment des mouvements

PIERRE CHABAUD

DR

DU CABINET À L’ADMINISTRATION

Ambassadeur de France pour les droits de l’Homme de 2008 à 2013, l’avocat François Zimeray, proche du chef de la diplomatie, Laurent Fabius, obtient son premier poste d’ambassadeur à l’étranger et part représenter la France au Danemark. François Zimeray, avocat de profession, contractuel du Quai d’Orsay, entré dans la diplomatie sous l’ère Kouchner en 2008, a été député européen PS de 1999 à 2004.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 49


COMMUNIQUÉ

Risques et menaces dans l’hypermodernité

D

es technologies autorisant des transactions financières à très haute fréquence ; des algorithmes prédictifs permettant de devancer la décision humaine ; des États dont la souveraineté est menacée par des puissances financières évasives ; des capitaux numérisés échappant à tout contrôle… Partout, les logiques destructurantes du monde hypermoderne s’intensifient jusqu’à devenir non maîtrisables et paradoxales, porteuses de tensions exacerbées. Le marché a envahi toutes les sphères de l’existence. Les révolutions scientifiques actuelles sont vécues autant comme porteuses de progrès que de risques majeurs pour l’humanité. Sur le plan politique, les droits de l’Homme et un certain modèle de démocratie gagnent en universalité mais se heurtent à des conservatismes et des replis identitaires, parfois de véritables résistances, particulièrement violents. Et, dans un Occident angoissé, l’individu tend à se retrouver isolé, écouté, intercepté, livré aux limites de sa propre

050-051_Publi CSFRS.indd 16

liberté et socialement défini par sa seule capacité personnelle dans un univers 2.0 dont il découvre peu à peu qu’il ne maîtrise pas grand-chose. Identifier les risques et les menaces liés aux incessantes mutations d’un monde difficilement lisible dans sa complexité, telle est l’ambition des IVes Assises nationales de la recherche stratégique qui se tiendront le 13 décembre prochain. La première table ronde portera sur les vulnérabilités liées à l’hyperconnexion du monde. Le big data et les algorithmes qui lui sont associés enserrent progressivement l’individu et les entreprises dans des systèmes opaques de surveillance et d’analyse comportementale, dessinant une « géopolitique du Net » et de nouveaux rapports de puissance. Supports potentiels de manipulations de toute sorte, ils modifient progressivement la notion même de propriété intellectuelle, de réputation, de mémoire et même d’identité. En début d’après-midi, trois tables rondes en parallèle développeront des thématiques transversales.

La première analysera l’évolution des menaces criminelles liée aux nombreux désordres du monde : la réactivité des entreprises criminelles, la plasticité de leurs méthodes et l’hybridation de leurs acteurs ne cessent de profiter des divergences entre les approches nationales ainsi que des faiblesses de la coopération policière et judiciaire internationale. La seconde s’attachera à cerner les enjeux des sauts technologiques actuels. Pour la première fois, l’Histoire connaît non pas une mais quatre révolutions technologiques simultanées : le numérique, mais aussi les biotechnologies, la robotique et les nanotechnologies. L’extrême difficulté à les réguler, pour en tirer le meilleur bénéfice commun, peut faire craindre à certains qu’elles ne mettent en question la notion même d’humanité. La troisième table ronde portera sur les modèles de gestion des crises, appelés à évoluer considérablement dans les années qui viennent, qu’il s’agisse des crises sanitaires, industrielles, climatiques… L’enjeu

consiste à mettre la puissance publique dans la meilleure posture d’anticipation et de réaction face à des difficultés aussi soudaines que violentes, alors que les exigences de l’individu citoyen, tant en termes de protection que de transparence, sont devenues les nouveaux paramètres de la gouvernance de ces risques. Notre environnement en perpétuelle mutation, caractérisé par la simultanéité d’opportunités exceptionnelles, de crises lentes et continues, de « cygnes noirs » et de ruptures soudaines, doit nous conduire à combiner anticipations rationnelles et créativité audacieuse. La dernière séance plénière des Assises analysera ce lien entre contexte d’imprévisibilité et décisions d’action et d’investissement, lien qui n’est autre, in fine, que la pensée stratégique d’aujourd’hui. Alain BAUER, professeur de criminologie au Conservatoire national des arts et métiers, New York et Beijing, président du CSFRS

13/11/13 17:38


IV ASSISES NATIONALES DE LA RECHERCHE STRATÉGIQUE es

RISQUES ET MENACES DE L’HYPERMODERNITÉ organisées par le CSFRS

en partenariat avec l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN)

et l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ)

PROGRAMME DÉTAILLÉ DU VENDREDI 13 DÉCEMBRE 2013 8 h 45

14 h 20 TABLE RONDE 2 :

Accueil Amphi Foch, École militaire

9 h 30

DÉSORDRE DU MONDE, STRUCTURATION DU CRIME

Ouverture

Animation

par Alain Bauer, président du CSFRS

par Christophe Moulin, directeur adjoint et rédacteur en chef, Police Justice, chaîne LCI

Introduction générale et remise du « Prix 2013 de la réflexion stratégique »

Géoéconomie criminelle à horizon prévisible

Anticipation et gestion des crises industrielles par Jean-Luc Wybo, maître de recherche à Mines Paris Tech Évolution prévisible de la dimension sanitaire des crises : moyens de détection, gestion de l’urgence, impact sur la population par Brigitte Lacroix, conseillère santé/sécurité, département « Risques et crises », INHESJ

par Manuel Valls, ministre de l’Intérieur

par David M Luna, département d’État américain*

10 h 30

Fraude financière : anticipation

Rôle de l’externalisation et de la privatisation de la sécurité dans la prévention des crises

par Charles Prats, magistrat à la cour d’appel de Paris

par Jean-Claude Viollet, coauteur du rapport parlementaire sur les sociétés militaires privées

Hybrides et facteurs temporels : une question de perception par Xavier Raufer, criminologue

Évolution du rôle des organisations internationales dans la gestion des crises par Thierry Tardy, docteur en sciences politiques, GCSP-CERI

Exposé introductif : « À quoi devons-nous résister ? »

par Erik Orsenna, écrivain et académicien français

10 h 50

Futur des phénomènes criminels

Présentation de la méthodologie du CSFRS

par Jean-François Gayraud, commissaire divisionnaire

par Éric Danon, directeur général du CSFRS et Philippe Baumard, président du conseil scientifique

14 h 20 TABLE RONDE 2.1 :

11 h 30 TABLE RONDE 1 (PLÉNIÈRE) :

ENJEUX LIÉS AUX SAUTS TECHNOLOGIQUES

MONDES CONNECTÉS, MONDES VULNÉRABLES

Animation

Animation par Yolaine de La Bigne, journaliste, Néoplanète/ Europe 1

Les menaces contre l’identité des personnes, l’évolution des concepts d’identité, de vie privée et de propriété intellectuelle par Isabelle Falque-Pierrotin, présidente de la Cnil

« Internet des objets » et menaces à la sécurité par Michel Riguidel, professeur honoraire chez Télécom Paris Tech Entreprises : vol et manipulation de données, risque d’image et de réputation par Alain Juillet, président de l’Académie de l’intelligence économique

Enjeux géopolitiques du cyberespace

par Chantal Houzelle, journaliste aux Échos*

Génome – sécurité des informations par Catherine Bourgain, docteure en génétique épidémiologique, Inserm

Robotique par Philippe Bidaud, directeur de l’Institut des systèmes intelligents

Enjeux des nanosciences et anotechnologies : dualité bénéfices-risques, dualité connaissance-ignorance par Alain Fontaine, directeur de la Fondation Nanosciences

L’interconnexion Homme-technologie entre progrès et menace Nicholas Ayache, professeur au Collège de France

14 h 20 TABLE RONDE 2.2 :

par Frédérick Douzet, directrice de la chaire Castex de cyberstratégie

MODÈLES DE GESTION DES RISQUES ET DES CRISES À L’HORIZON PRÉVISIBLE

13 h 00 BUFFET

Animation par Pierre Verluise, directeur du site Diploweb

16 h 10 TABLE RONDE 3 (PLÉNIÈRE) : MONDES COMPLEXES, INVESTISSEMENTS RISQUÉS Animation par Nicolas Beytout, fondateur de L’Opinion*

De la « crise lente » aux « cygnes noirs » : qu’est-ce qui demeure prédictible aujourd’hui ? par Raphaël Douady, cofondateur de Riskdata

Les investissements scientifiques (intervenant en cours de confirmation)

Économie de la défense par Nicole Chaix, directrice du CEDRE

Quels investissements stratégiques pour la France ? Par Nicolas Dufourcq, directeur général de BPI group

17 h 40 INTERVENTION DE CLÔTURE « Dans quelles mesures les stratégies de l’État et des grandes entreprises sont-elles compatibles dans le contexte de la globalisation ? » Carlos Ghosn, p-dg de Renault

PARTENAIRE MÉDIA

FRQÀ UPDWLRQ HQ FRXUV


LA

NOV.-DÉC. 2013

FRANCE DES POUVOIRS

DU CABINET À L’ADMINISTRATION Jacques-Pierre Gougeon, 52 ans, universitaire spécialiste des relations francoallemandes et par ailleurs conseiller auprès du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, vient d’être promu recteur de l’académie de Strasbourg. Il succède à Armande Le Pellec Muller, en place depuis presque trois ans et nommée rectrice de Montpellier. Proche de Jean-Marc Ayrault, Jacques-Pierre Goujeon a été son conseiller à la présidence du groupe socialiste à l’Assemblée nationale en 2011 et

Angola Consul général de France à Rio de Janeiro, au Brésil, ces trois dernières années, le diplomate Jean-Claude Moyret prend son troisième poste d’ambassadeur et part représenter la France en Angola. Jean-Claude Moyret, 58 ans, a déjà été ambassadeur à Saint-Domingue (2002-2006), puis en Uruguay (2006-2009). Il a auparavant été directeur de l’action audiovisuelle extérieure à la direction générale culturelle, scientifique et technique au ministère des Affaires étrangères (1996-2002).

Philippe Franc se voit promu ambassadeur de France au Guatemala. Cet ancien élève de l’IEP de Paris était, depuis 2010, ministre conseiller à l’ambassade de France au Brésil. Il avait obtenu ce poste après avoir été le chef adjoint du cabinet de Bernard Kouchner au Quai d’Orsay (2007-2010). Il a auparavant été premier conseiller à l’ambassade de France aux Émirats arabes unis (2003-2006), puis chargé de mission auprès du secrétaire général adjoint du ministère en 2006-2007.

DR

Unesco En place depuis un peu plus d’un an, Philippe Lalliot, le directeur de la communication du Quai d’Orsay, se voit nommé ambassadeur, délégué permanent de la France auprès de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco). Cet énarque de 47 ans a été consul général de France à New York de 2009 à 2012.

aux services déconcentrés Secrétaire général de Bercy depuis 2008 – un poste où il vient d’être remplacé par Laurent de Jekhowsky –, Dominique Lamiot, 57 ans, se voit nommé à l’un des postes les plus importants des services déconcentrés de la direction générale des finances publiques (DGFIP) : directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine. Il prend également la présidence de l’Établissement de retraite additionnelle de la fonction publique (Erafp). Au passage, cet administrateur civil hors classe est nommé et titularisé dans le grade d’administrateur général des finances publiques de première classe. Cet énarque a accompli une large partie de sa carrière à la direction générale de la comptabilité publique : sous-directeur « recettes de l’État » (1998-2001), sous-directeur des études, de la coordination et du réseau (20012004), chef de service, adjoint au directeur général (2004), chef du service des ressources de l’État (2004-2005), avant d’en devenir le directeur général (2005-2008).

52 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

2009), Où va l’Allemagne ? (Flammarion, 1998), L’Identité allemande (Hachette, 1997), La social-démocratie allemande de la révolution au réformisme (Aubier, 1996).

Un préfet

DU « SG »

DR

DR

Guatemala

2012. Cet agrégé d’allemand, professeur des universités a, au cours de sa carrière, été conseiller culturel à l’ambassade de France en Allemagne et chef de la mission culturelle, éducative et universitaire française. Directeur de recherche à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), Jacques-Pierre Gougeon a publié plusieurs ouvrages, dont L’Allemagne du XXIe siècle, une nouvelle nation ? (Armand Colin, 2009), Allemagne : une puissance en mutation (Gallimard, 2006, Reed, actualisée

PIERRE CHABAUD

Un conseiller de Matignon promu recteur

BOUGENT

à l’Epadesa C. COURTOIS/ASA-PICTURES

ILS

Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

L’exécutif vient de confier la direction générale de l’établissement public d’aménagement de La Défense Seine Arche (Epadesa) à Hugues Parant, l’ancien préfet de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (Paca). Il remplace Philippe Chaix, que son profil très sarkozyste plaçait sur un siège éjectable depuis l’élection de François Hollande. Hugues Parant, un énarque de 58 ans, a officié comme préfet délégué pour la sécurité et la défense auprès du préfet de la région ProvenceAlpes-Côte d’Azur en 1998, puis comme préfet de l’Orne en 2001, du Vaucluse en 2004, de Meurthe-et-Moselle en 2007 et du Var en 2009, avant d’être promu préfet de région en 2010. Il a dirigé le cabinet du secrétaire d’État chargé de la Jeunesse et des Sports Christian Bergelin sous la cohabitation Chirac-Mitterrand. Hugues Parant a aussi conseillé le ministre de l’Équipement, des Transports et du Tourisme Bernard Bosson en 1993, avant de se voir confier le poste de directeur du tourisme (1994-1998).



LA

NOV.-DÉC. 2013

FRANCE DES POUVOIRS

MJ/DICOM/CAROLINE MONTAGNÉ

au cœur de la Justice

Le contrôleur général des armées, Éric Lucas, 53 ans, devient le secrétaire général du ministère de la Justice. Il était le directeur de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la Défense depuis plus de six ans. À ce ministère, Éric Lucas a aussi occupé des fonctions importantes au secrétariat général, une expérience qui lui sera utile place Vendôme. Il a ainsi été directeur et adjoint au secrétaire général pour l’administration (SGA) de 2004 à 2007. Auparavant, cet ancien élève de l’IEP de Paris et du commissariat de la Marine a officié comme adjoint au chef du bureau « Droit de la mer » à la direction centrale du Commissariat de la Marine de 1990 à 1995. Admis au concours du Contrôle général des armées en 1995, il devient chargé de mission au Commissariat à la réforme de l’État en 1997. Avant d’occuper les fonctions de chargé de mission (1999-2000), puis d’adjoint au directeur à la direction des affaires financières du ministère de la Défense (2000-2003).

Une retraite active

DR

pour Henri Masse

Le préfet Henri Masse, 66 ans, qui a quitté cet été la direction de l’administration pénitentiaire place Vendôme, vient d’être nommé délégué ministériel à la mise en œuvre territoriale de la réforme du ministère de la Défense. Il est chargé d’animer et de coordonner, au regard de la réforme qui s’opère, l’action des services compétents du ministère. Avec pour objectif de mettre de l’huile dans les rouages. Docteur en histoire, Henri Masse a pris au mois d’août sa retraite du corps préfectoral. Il a auparavant occupé plusieurs postes importants : préfet de la région et du département de la Guyane en 1999, préfet du Lot-et-Garonne en 2002, puis de la Drôme en 2004. Directeur de la défense et de la sécurité civiles place Beauvau en 2006, cet ancien attaché de préfecture a aussi été préfet de la Charente-Maritime (2008-2011). Il a également officié comme secrétaire général de la préfecture du Var en 1992, puis comme sous-préfet de Valenciennes, dans le Nord (1994-1999).

ILS

BOUGENT

Le chercheur de BNP Paribas

Portugal Le diplomate Jean-François Blarel, actuel secrétaire général adjoint du ministère des Affaires étrangères, vient d’obtenir son troisième poste d’ambassadeur. Jean-François Blarel a déjà représenté la France au Vietnam (2004-2007), puis aux Pays-Bas (2008-2011). Ce diplomate issu des rangs de l’ENA a été secrétaire général de la commission du livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France en 2007.

Uruguay Directeur du cabinet de la ministre déléguée aux Français de l’étranger, Hélène Conway-Mouret, Sylvain Itté part représenter la France en Uruguay. Ce diplomate de 54 ans a été consul général de France à São Paulo, au Brésil, en 2009. Sylvain Itté, a dirigé ces dernières années un opérateur du Quai d’Orsay, France coopération internationale, de 2006 à 2009, avant d’officier comme consul général de France à São Paulo, au Brésil (2009-2012).

Paris Ambassadrice de France en Irlande depuis trois ans, la diplomate Emmanuelle d’Achon devient adjointe au secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, Pierre Sellal. Elle a occupé plusieurs postes dans l’administration du Quai d’Orsay : sous-directrice des personnels culturels et de coopération en 1996, sous-directrice des affectations et des personnels locaux en 1998.

Retrouvez l’intégralité des nominations sur www.acteurspublics.com

54 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

ILS PASSENT DANS LE PRIVÉ

DR

Un militaire

Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

Directeur général de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) de 2007 à 2012, JeanPhilippe Cotis, 56 ans, rejoint BNP Paribas comme responsable de la recherche économique du groupe. Jean-Philippe Cotis rapportera à Philippe Bordenave, directeur général délégué et chief operating officer du groupe bancaire. Il remplace Philippe d’Arvisenet, nommé conseiller auprès de la direction générale de BNP Paribas. Jean-Philippe Cotis avait été remplacé, en février 2012, par Jean-Luc Tavernier à la tête de l’Insee et nommé dans la foulée conseiller maître à la Cour des comptes. Au cours de sa carrière, cet énarque, également formé sur les bancs de l’Essec, a officié comme économiste au Fonds monétaire international (FMI), à Washington, de 1986 à 1988. Directeur de la prévision à Bercy de 1997 à 2002, JeanPhilippe Cotis a aussi été économiste en chef de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) de 2002 à 2007. Il a aussi conseillé, sur les affaires macroéconomiques et les finances publiques, Edmond Alphandéry à Bercy en 1993.


DILA

Direction de l'information légale et administrative Q Q Q Q Q Q Q Q

Le droit à la source Le JOURNAL OFFICIEL et sa version électronique authentifiée www.journal-officiel.gouv.fr LÉGIFRANCE www.legifrance.gouv.fr

La transparence économique BODACC www.bodacc.fr BOAMP www.boamp.fr INFO-FINANCIERE.FR www.info-financiere.fr

L’information administrative SERVICE-PUBLIC.FR www.service-public.fr 3939 ALLO SERVICE PUBLIC

L’édition publique LA DOCUMENTATION FRANÇAISE LES ÉDITIONS DES JOURNAUX OFFICIELS www.ladocumentationfrancaise.fr VIE-PUBLIQUE.FR www.vie-publique.fr

Et aussi La librairie du citoyen Le Centre de documentation 29, quai Voltaire - Paris 7e Q Q Q Q Q Q Q Q

www.dila.premier-ministre.gouv.fr


Rencontre avec… > MARIE-ANNE LÉVÊQUE

Une DRH de l’État très politique

PARCOURS

En septembre, Marie-Anne Lévêque a pris la tête de la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP). Une mission sur mesure pour cette ancienne conseillère de Jean-Marc Ayrault, grande spécialiste des ressources humaines et des questions budgétaires.

1993 Adjointe au chef du bureau du statut général à la direction générale de l’administration et de la fonction publique

2000 Conseillère

2002 Cheffe de service,

2007 Cheffe de

technique « fonction publique » au cabinet du Premier ministre, Lionel Jospin

adjointe au directeur des affaires financières du ministère de l’Éducation nationale

service, adjointe au directeur général de l’administration et de la fonction publique

56 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

2012 Conseillère « fonction publique et réforme de l’État » au cabinet du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault


LA

NOV.- DÉC. 2013

FRANCE VINCENT BAILLAIS

DES POUVOIRS

L

a direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) a connu cet automne une tranquille alternance avec l’arrivée à sa tête de MarieAnne Lévêque, jusqu’alors conseillère « fonction publique » de JeanMarc Ayrault – depuis mai 2012. « Une succession sereine », s’est publiquement félicitée la ministre de tutelle, Marylise Lebranchu, qui avait sans doute en tête d’autres nominations moins consensuelles dans la haute fonction publique depuis le changement de majorité. La transition s’est de fait déroulée sans histoire, avec l’exfiltration – très correcte – à l’inspection générale des Finances du titulaire du poste, Jean-François Verdier, proche de l’ancienne majorité. Il est vrai qu’avec la nomination de Marie-Anne Lévêque, cette petite mais très stratégique direction d’état-major – 115 personnes – voyait le retour au bercail de l’une de ses cadres historiques. Pas vraiment de rupture sur le fond donc, si ce n’est le choix d’une femme pour ce poste. Une première symbolique à l’heure où la féminisation de l’élite administrative commence enfin à dépasser le stade des bonnes intentions. « Contrairement à ce que l’on a pu écrire dans certains articles, je ne rêve pas de ce poste depuis des années », lâche d’emblée Marie-Anne Lévêque quand on évoque ses états de service. Il faut dire qu’elle a officié, de 2007 à 2011, comme cheffe de service et adjointe des deux précédents DGAFP (Paul Pény, puis Jean-François Verdier).

Refonte des grilles statutaires

2013 Directrice générale de l’administration et de la fonction publique.

Une opportunité que cette fille d’universitaires âgée de 48 ans a saisie par goût du management. « J’ai besoin de voir l’utilité sociale immédiate du job que je fais », ditelle, dans son style à la fois direct

et prudent. Mettre en œuvre l’agenda social de la fonction publique et œuvrer à la refonte des grilles statutaires, un projet ambitieux initié avec la remise début novembre du rapport du conseiller d’État Bernard Pêcheur – auprès duquel elle débuta à la DGAFP en 1993 – constituaient une source de motivation supplémentaire. Énarque, spécialiste des questions « RH » et des enjeux budgétaires, Marie-Anne Lévêque connaît par cœur les règles du jeu de rôles des négociations sociales. Pour l’heure, les troupes syndicales, conscientes de la crise budgétaire majeure qu’affronte le gouvernement, se sont montrées relativement calmes, applaudissant

retraite et par des retours catégoriels pas toujours équitables entre ministères, la nouvelle DRH sait parfaitement que la (très) relative bienveillance syndicale prendra fin dès les premiers frémissements d’un retour durable de la croissance. Il lui faudra donc toute son expérience de la négociation syndicale pour aborder les sujets qui fâchent, comme le dégel du point d’indice des fonctionnaires. Pour autant, Marie-Anne Lévêque, ancienne conseillère du ministre de la Fonction publique Émile Zuccarelli, puis de Lionel Jospin à Matignon, ne sera plus autant en première ligne, au sens politique du terme, qu’au temps de son bail au cabinet de Jean-Marc Ayrault,

« J’ai besoin de voir l’utilité sociale immédiate du job que je fais. » timidement la promesse de supprimer le jour de carence, l’accord sur les risques psychosociaux, voire la revalorisation des salaires de la catégorie C. Les organisations ont certes salué le changement de discours depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir, mais la concertation affichée a ses limites alors que les rémunérations indiciaires sont entrées dans une ère de glaciation. « Dans le contexte que l’on connaît en termes de finan ces publiques, les choses se sont quand même bien passées et des réformes importantes ont été engagées », estime la nouvelle directrice, depuis peu installée dans son bureau parisien du boulevard Diderot. Instruite par les années Sarkozy qui, dans le domaine de la fonction publique, ont été marquées au fer rouge par le « un sur deux » appliqué aux départs des agents en

elle que l’on disait puissante sur ces sujets. « Je fais la part des choses entre ce qu’est le rôle d’un directeur et ce qu’est le rôle du politique. On a tout intérêt, y compris d’un point de vue institutionnel, à ne pas trop mélanger ces rôles. J’anime le dialogue social, je propose des réformes, mais il ne m’appartient pas de construire la ligne politique », assure cette administratrice civile, décidément fine politique, qui en vingt ans de carrière n’a sauté aucune des étapes professionnelles du cursus honorum que les passages auprès des ministres permettent parfois de contourner. L’année 2014 sera chargée pour la fonction publique. L’occasion pour Marie-Anne Lévêque de déployer des compétences patiemment acquises. Un précieux atout (administratif donc) pour le pouvoir politique… ● Pierre Laberrondo

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 57


108

ANALYSE

112

116

Europe

Enquête

Emploi public

QUI SUCCÉDERA À BARROSO ?

LA FAUSSE SORTIE DE LA PRIME AU MÉRITE

L’ONF PROMET « RESPECT » ET « POLITESSE » À SES AGENTS

CES PAYS QUI

LEURS POLITIQ

58 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013


Dossier ANALYSE

118 Emploi public

LES AGENTS « JEUNESSE ET SPORTS » EN PERTE DE REPÈRES

RÉUSSISSENT

UES PUBLIQUES Sortir de France et de nos guerres intestines pour comprendre ce qui, en matière de politiques publiques, se fait de mieux dans le monde. Les meilleures pratiques, en somme. Pour servir cette ambition, Acteurs publics a voulu multiplier les visites hors de nos frontières, décortiquer les expériences de nouvelle société et croiser les regards, en sollicitant ambassadeur en poste, ancien ministre ou équivalent, mais aussi spectateur engagé, conseiller expatrié, économiste expert, chercheur passionné, journaliste de terrain, tous épris de curiosité et guidés par une exigence et une seule : l’intérêt général. Un voyage riche d’enseignements sur la transformation des relations entre l’État et le citoyen, que l’on observe sous toutes les latitudes. Et qui partout passe par le recours à de nouveaux outils, par une évaluation systématique des dépenses publiques, par une stricte évaluation, enfin, de la performance des acteurs clés, AFP

/SIPA/

A/RÉA

FOTOLI

sans craindre d’écorner la sacro-sainte liberté des parties prenantes. Une excursion qui recèle aussi ses jolies surprises et permet de faire quelques découvertes contre-intuitives. Dossier coordonné par Valérie Segond et Bruno Botella

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 59


ANALYSE Dossier

GESTION DES HAUTS

JOERG MODROW/LAIF-RÉA

FONCTIONNAIRES

NORVÈGE LA STABILITÉ DE L’ADMINISTRATION AU SERVICE D’UNE DÉMOC

É

lections ? Faites vos cartons ! C’est au son du canon qu’évolue désormais la carrière de nombreux hauts fonctionnaires en France, jouets systématiques d’une alternance politique qui déclenche un jeu de chaises musicales national, où les puissants d’hier au mieux échouent dans le placard étroit d’une autorité administrative, au pire retournent résignés à leur corps d’origine. Pourtant, ce ne fut pas toujours le cas : c’est avec l’administration de la IVe République que

de Gaulle lança la Ve. Et jusqu’au début des années 1980, les hauts directeurs de l’administration centrale regardaient impassibles changer les têtes ministérielles sans que leur destin ne s’en trouvât changé… Dans un monde qui, il est vrai, n’avait pas connu d’alternance politique depuis plus de vingt-cinq ans. Si nos mœurs politico-administratives ont tant évolué à la faveur d’un pouvoir de plus en plus personnalisé et changeant, ce n’était pas une fatalité. En particulier dans

60 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

un monde plus technique qu’hier, plus vaste aussi, donc forcément plus complexe, où la maîtrise des grands sujets de politique publique requiert mieux qu’une allégeance partisane : une expertise forgée au cours des ans et des expériences. C’est peut-être le concours de l’Histoire qui a conduit la Norvège, pays de 5 millions d’habitants, à privilégier la stabilité de sa haute administration plutôt que les caprices de ses élus. Mais c’est aussi la conviction que, les enjeux de long terme devant guider


Dossier ANALYSE

UNE HAUTE ADMINISTRATION RESPECTÉE POUR SON EXPERTISE Le 14 octobre dernier, un nouveau gouvernement, issu des élections législatives du 4 septembre, s’est installé à Oslo. Pour la Norvège, gouvernée depuis 2005 par une coalition de gauche, c’est l’alternance. Et pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la coalition de droite et de centre-droit intègre le Parti du progrès (Fremskrittspartiet, FrP), auquel ont été attribués deux ministères de poids, le ministère des Finances et celui du Pétrole. Pourtant, ce changement de gouvernement n’en entraînera pas à la tête de l’administration et de la gestion des affaires. Le gouvernement sortant Stoltenberg comprenait, Premier ministre inclus, 20 ministres, 45 secrétaires

d’État et 21 conseillers politiques. Le gouvernement Solberg, qui vient d’être élu, est encore en cours de formation, mais le fait qu’il soit composé de 18 ministres et non 20 démontre bien qu’une augmentation significative du nombre de postes politiques n’est pas envisagée. Seule une minorité de ces postes sera donc concernée par l’alternance : chaque ministre, son ou ses secrétaires d’État, un conseiller politique. Si le Premier ministre a souvent un secrétaire d’État chargé des Relations avec la presse, donc choisi par ses soins, dans les autres ministères, ce n’est pas courant. En général, ni les porteparole chargés des relations avec la presse, ni les cabinets des ministres, ni les directeurs

généraux de l’administration ou de tout autre organisme d’État ne sont remplacés lors d’un changement de gouvernement. Ainsi, les postes politiques ne représentent qu’une petite minorité au sein de cabinets eux-mêmes fort restreints : 5 à 6 personnes tout au plus. Cabinets où la majorité des conseillers, déjà présents dans le cabinet du ministre précédent, ont un rôle coordinateur. Il faut dire que les cabinets ministériels n’ont pas pour vocation de faire office de filtre entre le ministre et son administration. Lorsque le ministre veut lancer une réforme ou s’engager dans un sujet, c’est aux hauts fonctionnaires compétents que lui-même ou son plus proche conseiller s’adressent directement.

RATIE ACTIVE les choix de politique publique, il fallait une administration solide, donc respectée. Et parfaitement neutre car mue par le souci constant de l’intérêt général, donc stable. S’il n’est pas facilement transposable à un pays abritant une population douze fois supérieure, le modèle norvégien est fascinant par son exceptionnelle cohérence, où la stabilité de l’administration va de pair avec la recherche du consensus sur les grandes questions, le respect de toutes les parties prenantes sans exception et la

diversité des viviers de recrutement pour la haute fonction publique. Et l’on finit par se demander si une partie de sa force ne réside pas dans le fait de ne pas avoir d’ENA… On sait François Hollande et Jean-Marc Ayrault plus attirés par les vertus apaisantes de ce modèle social-démocrate que par celui de Gerhard Schröder, auteur de réformes audacieuses et qui ne craignait pas la confrontation. Mais sauront-ils transformer ce qui n’est encore qu’une tentation scandinave en véritable modernisation du fonctionnement de l’État ? V. S.

DR

Par Tarald Brautaset, ambassadeur du royaume de Norvège en France

« Les cabinets ministériels n’ont pas pour vocation de faire office de filtre entre le ministre et son administration. » L’indépendance et la stabilité de la fonction publique est une tradition ancienne en Norvège, plus ancienne encore que la démocratie elle-même, laquelle a été progressivement introduite au XIXe siècle, avec la Constitution en 1814, le système parlementaire en 1884 et le suffrage universel direct en 1898 pour les hommes, en 1913 pour les femmes. C’est sous la domination du royaume du Danemark, entre 1380 et 1814, que l’indépendance et l’inamovibilité des hauts fonctionnaires a pris corps face à la toute-puissance du monarque. Aussi, en 1814, lorsque la Norvège reprit son indépendance, elle inscrivit l’inamovibilité des hauts fonctionnaires dans sa constitution. C’est donc en vertu de la constitution norvégienne qu’un fonctionnaire ne peut être remercié, sauf à être jugé coupable par un tribunal pour un délit. Les hauts fonctionnaires sont donc juridiquement protégés et il ne viendrait à l’esprit d’aucun ministre de demander à son arrivée …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 61


ANALYSE Dossier

UNE HAUTE ADMINISTRATION RESPECTÉE POUR SON EXPERTISE

HAKON MOSVOLD LARSEN/AFP

Par Tarald Brautaset

… le remplacement de l’un d’eux. S’il y a, au cours de son mandat, des changements d’équipes, ce n’est que petit à petit. Plusieurs raisons sont à l’origine de cette stabilité de la haute administration : outre la résistance originelle à la domination royale, la fonction publique fut envisagée comme devant être au service du bien commun et de la nation. Elle se caractérise par une grande continuité dans son mode d’intervention, y compris lorsque la Norvège obtint son indépendance totale, en 1905. La seule exception fut lors de l’occupation allemande entre 1940 et 1945 : un certain nombre de hauts fonctionnaires furent révoqués par le régime nazi. Aussi, les nominations pendant cette période furentelles le plus souvent considérées comme illégitimes. Continuité de l’État Si l’Histoire a avancé, les raisons d’être de l’indépendance de l’administration conservent tout leur intérêt. Pour un pays de la taille de la Norvège, l’indépendance de l’administration présente un grand avantage : chaque ministre peut compter sur l’intégrité et les conseils professionnels qu’il ou elle reçoit de son administration. Laquelle est chargée de lui présenter de façon la plus professionnelle qui soit les alternatives des politiques publiques et leurs conséquences. Ce mode de gouvernance assure une grande continuité de l’État et de la prévisibilité dans ses décisions. Mais il n’empêche pas que le ministre prenne, in fine, en

Entré en fonction mi-octobre, le nouveau gouvernement norvégien, dirigé par la conservatrice Erna Solberg (au centre, avec un bouquet blanc), a succédé à une coalition de gauche.

« La permanence de ce mode opératoire s’inscrit dans une particularité de la social-démocratie norvégienne : la construction permanente d’un consensus sur les sujets majeurs pour la société. » son âme et conscience, une fois menée l’instruction du dossier, des décisions de nature politique. Il est vrai que la constance de ce mode opératoire s’inscrit dans une particularité de la social-démocratie norvégienne : la construction permanente d’un consensus sur les sujets majeurs pour la société et qui l’engagent dans la durée. Ainsi en est-il de la réforme des retraites ou de l’utilisation des ressources du Fonds souverain norvégien, deux sujets politiques d’envergure dont l’enjeu s’inscrit dans le très long terme. Aussi les décisions politiques de cette importance ne sont-elles prises qu’après examen approfondi des différents points de vue des parties concernées. En fait, tout projet de loi en Norvège est soumis à un large panel d’organisations, de partis politiques, de syndicats et d’institutions. Aussi, quelle que soit la couleur politique d’un gouvernement, cette approche lui confère une grande légitimité,

même lorsqu’il prend des décisions contraires aux avis de certains groupes. Grande variété de profils Pour assurer la compétence des hauts fonctionnaires, ceuxci sont recrutés parmi les diplômés d’un certain nombre d’institutions d’enseignement supérieur de Norvège. Mais il n’y a pas d’École nationale d’administration, même si le niveau de compétence exigé pour l’administration de l’État est généralement élevé. De nombreux cursus permettent d’accéder à des postes de responsabilité dans l’administration et plusieurs universités et écoles d’enseignement supérieur dispensent également une formation spécialisée dans l’administration publique. D’où la grande variété des profils, qui permet d’assurer une véritable expertise à tous les niveaux de l’administration. Certains, d’ailleurs, sont recrutés dans

le secteur privé pour leur expérience de la « vraie vie ». Les risques de conflits d’intérêts issus des allers-retours entre le privé et le public sont, eux, strictement encadrés par une très grande transparence sur les décisions publiques et sur les liens d’amitié pouvant exister entre acteurs publics et privés. Tout va vers plus de mobilité. Il faut dire que si les salaires sont en général inférieurs à ceux du secteur privé, être fonctionnaire comporte certains avantages : la protection contre le licenciement, de bons congés et de bons régimes de retraite, à la visibilité assurée. Certes, cette stabilité n’a pas que des avantages. Dénonçant parfois le trop grand conservatisme de l’administration et la rigidité du système, certains ministres ont le sentiment de ne pas avoir le pouvoir d’opérer des changements importants d’orientation politique. Pourtant, ceux qui ont un véritable projet à défendre, sortant des priorités du passé, ont toujours eu la possibilité de réorganiser le ministère et d’y faire entrer de nouvelles personnalités. L’histoire de la Norvège a montré que la stabilité n’exclut pas le changement.

62 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

060-062-LB-Dossier N1-DI-Administration.indd 62

13/11/13 17:37


TBWA\CORPORATE - © Paul Chesley / Getty Images

Pour recruter vos talents et connaître les dispositifs d’aide à l’embauche, appelez votre conseiller Pôle emploi au

39 95 (0,15€/min)

N OT R E M I S S I O N , VO U S S I M P L I F I E R L E T R AVA I L


ANALYSE Dossier

GRANDES BACHMANN/SIPA

INFRASTRUCTURES

PAYS-BAS COMMENT SE PRÉMUNIR CONTRE LES « ÉLÉPHANTS BLANCS » ?

A

lors que la France lançait encore récemment des projets d’infrastructures à la rentabilité incertaine, qui ont conduit la commission Mobilité21 à faire un tri radical dans les projets à maintenir prioritairement, dès les années 1960, les États-Unis, le Royaume-Uni et la Suède ont été de véritables pionniers de l’évaluation ex-ante des infrastructures de transport. Même l’Allemagne lança dès 1980 les premières analyses coûts-bénéfices de ses projets

d’infrastructures, pour y intégrer à partir de 2004 l’impact sur l’aménagement du territoire et sur l’environnement. Au même moment, Londres jetait les bases d’un cadre d’évaluation unifié et simplifié. En clair, le souci de la rentabilité des investissements pour la collectivité et son impact socio-économique ont été depuis trente ans un aiguillage constant de la décision publique, même si chacun développa ses méthodes et les adapta au gré des nouvelles exigences.

64 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

Mais c’est aux Pays-Bas que l’exercice de l’évaluation socio-économique préalable à la décision d’investissement a été le mieux étudié lors d’une démarche politique qui, en 1998, réunit dans un même programme d’études bureau de planification, consultants privés, professeurs et chercheurs : toute la matière grise s’y est mise. Et c’est encore là qu’il a été le plus développé, jusqu’à être appliqué à l’évaluation du développement urbain, de l’environnement, de la sécurité et même de la santé.


Dossier ANALYSE

BIEN ÉVALUER Par Jan Anne Annema, professeur en analyse des politiques de transport à l’université de technologie, politique et management de Delft (Pays-Bas) Aux Pays-Bas, depuis l’an 2000, il n’est plus possible de construire une infrastructure d’envergure sans avoir mené au préalable une évaluation socio-économique rigoureuse. Dès 1998, les ministères néerlandais des Transports, des Travaux publics, de la Gestion de l’eau et des Affaires économiques décidèrent de concert de réaliser un état des lieux de la connaissance des effets économiques des infrastructures. Constatant que jusque-là, l’évaluation économique des grands projets avait été menée selon les méthodes les plus diverses et fort éloignées des méthodes scientifiques, ils lancèrent un programme de

recherche sur les méthodes d’évaluation économique, intitulé en néerlandais « OEEI* ». La décision d’arriver coûte que coûte à un accord sur la méthode constitua une étape clé du programme OEEI. Plusieurs approches furent étudiées, dont l’approche multicritères, mais devant ses défauts multiples, une seule fut retenue : l’analyse coûts-bénéfices, dotée d’une méthodologie définie dans le rapport final. En clair, aux Pays-Bas, tout dossier d’infrastructure doit répondre à trois questions autour du projet : son efficacité, sa légitimité et son efficience. Efficacité selon trois axes : le projet répond-il aux besoins et aux problèmes soulevés ?

*Onderzoeksprogramma Economische Effecten Infrastructuur

Bien sûr, la méthode est perfectible : l’évaluation des hypothèses elles-mêmes, la mesure plus qu’imparfaite des effets indirects et un certain manque de transparence chez ceux qui finissent par prendre les décisions font que ce n’est jamais totalement satisfaisant. Mais cette analyse coûts-bénéfices a permis d’apporter de la rationalité dans les discussions, de présenter l’information de façon systématique et objective, de choisir la meilleure solution et de diminuer les risques d’investissements aberrants. V. S.

S’inscrit-il dans la politique nationale de développement économique ? Contribue-t-il au développement régional ? Légitimité : la construction d’une infrastructure par l’État est-elle la meilleure solution pour répondre au problème ? Efficience enfin : le bilan coûtsavantages est-il positif ? 110 évaluations en treize ans C’est sur cette dernière question que les progrès de la gouvernance néerlandaise issue des travaux de 1998 furent les plus significatifs. La méthode préconisée est celle de l’analyse classique coûts-bénéfices devant permettre de sortir un ratio, un chiffre synthétique résumant l’intérêt du projet. En clair, s’il est supérieur à 1, les bénéfices attendus sont supérieurs à son coût, et inversement s’il est inférieur à 1. Sachant que le rapport final de l’OEEI reconnaît qu’il n’est ni possible ni souhaitable de résumer un grand projet à une valeur unique. Aussi est-il coutumier de signaler, dans chaque document final de l’évaluation menée, les effets qui ne peuvent être présentés en termes monétaires, tels que les effets environnementaux et les effets sur le paysage. Et de les présenter à part, pour que les responsables politiques n’oublient pas, au moment de prendre leurs décisions, d’en tenir compte.

DR

AVANT DE CONSTRUIRE « Tout dossier d’infrastructure doit répondre à trois questions autour de l’efficacité du projet, sa légitimité, et son efficience. » Entre 2000 et 2004, 13 projets nationaux d’infrastructures d’envergure, ferroviaires et portuaires pour l’essentiel, ont fait l’objet d’une évaluation conforme à la méthode préconisée par le rapport de l’OEEI. Depuis 2008, elle est aussi obligatoire pour les projets plus petits. Au total, depuis l’an 2000, on estime qu’environ 110 évaluations socioéconomiques ont été menées, y compris sur des politiques tarifaires. Certaines évaluations ont été radicales. En témoigne celle menée en 2003 sur le projet de train à grande vitesse reliant Amsterdam à Groningen. L’objectif affiché de ce projet à plusieurs milliards d’euros était d’améliorer l’accès au nord des Pays-Bas, région qui souffre d’un faible développement économique ainsi que d’un taux de chômage élevé, et dont Groningen est une des villes principales. Plusieurs projets concurrents furent évalués : un train à grande vitesse classique et un train à lévitation magnétique, de type MagLev. Avec un écart d’investissement très large, allant de 3,5 à 8 milliards d’euros (prix de 2003). La question posée …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 65


ANALYSE Dossier

BIEN ÉVALUER AVANT DE CONSTRUIRE Par Jan Anne Annema

attendue du projet : en d’autres termes, les bénéfices sociaux attendus du projet seraient-ils supérieurs à son coût global ? Étude faite, il s’avéra que le projet de train à très grande vitesse avait pour bénéfice principal le gain de temps de déplacement, mais une amélioration seulement modeste du marché du travail. Tandis qu’il présentait deux inconvénients majeurs : un investissement initial comme un coût de maintenance très élevés, sans oublier l’impact négatif sur le paysage. Même si on ne sait encore évaluer financièrement l’impact négatif sur le paysage, ni en termes de consentement à payer du citoyen pour éviter ce désagrément, ni en termes de capacité de la population à supporter ses inconvénients. Pas de train à grande vitesse Quoi qu’il en soit, l’évaluation, menée selon des scénarios les plus variés, conclut à la faible efficience du projet. Même avec les projections les plus optimistes en termes de demande future de voyage ferroviaire vers le nord du pays, le ratio bénéfices sur coûts était, dans tous les scénarios, toujours inférieur à 1. Devant l’évidence du très faible bénéfice du projet et devant l’incapacité à atteindre les objectifs politiques de développement économique du nord et de son marché de l’emploi, la décision politique fut prise de ne pas mener à bien le projet de train à grande vitesse

VW PICS/ZUMA-RÉA

… était celle de l’efficience

Un ambitieux projet de train à grande vitesse reliant Amsterdam (ici, une vue de la gare) au nord du pays fut écarté après avoir été jugé plus coûteux que bénéfique.

« L’évaluation ne remplace pas la décision politique, elle vient surtout la soutenir ou l’éclairer. » entre Amsterdam et Groningen. L’évaluation joua ainsi un rôle clé dans le processus de décision de la construction d’un grand projet d’infrastructure. Bien sûr, ce ne fut pas toujours le cas, car au fond, elle ne remplace pas la décision politique, elle vient surtout la soutenir ou l’éclairer. D’ailleurs, l’exercice de cette évaluation a déjà gagné en maturité. Les expériences

66 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

menées ont nourri de nombreux débats sur les forces et faiblesses de la méthode. Parmi ces dernières, une évaluation très dépendante des hypothèses retenues, l’incertitude qui entoure tout de même les résultats, la prise en compte très partielle des effets indirects de ces infrastructures, en particulier les effets de réorganisation des territoires et de redistribution des revenus, enfin la faible transparence sur les calculs de ceux qui prennent les décisions et qui, le plus souvent, ne sont pas des économistes. Il n’empêche que ces débats ont nourri de nombreuses réflexions sur la manière la plus efficace de

corriger ses points faibles. Dès 2004, le guide méthodologique a été amélioré. Car l’évaluation est un mécanisme qui ouvre une dynamique de correction permanente : une démarche d’actualisation est aujourd’hui en cours. Toute la communauté des experts qui travaillent à ces évaluations, à savoir les consultants, les instituts publics de recherche, les universitaires et les responsables politiques, cherchent ensemble à en améliorer la qualité. Au point que c’est aujourd’hui une méthode éprouvée et reconnue comme nécessaire dans le pays et qui, chacun en est convaincu, continuera à jouer un rôle clé dans la politique des transports.



ANALYSE Dossier

ANTONIO GAUDENCIO / FOTOLIA

SANTÉ ROYAUME-UNI À LA RECHERCHE DU SYSTÈME OPTIMAL

T

oujours plus vieux, plus capricieux, plus gâté par des technologies elles-mêmes plus gourmandes en capitaux. Tel est le portrait du patient des pays riches, pour lequel la santé n’a pas de prix. Si la santé coûte en moyenne, dans les pays de l’OCDE, 6 % de la richesse produite (et 11,6 % en France), elle devrait coûter, d’ici 2050, entre 9 et 12 % du PIB, selon l’organisation internationale. Si nul n’est épargné par ces tendances lourdes, certains pays ont jugé que pour limiter la charge sur les épaules des actifs en bonne santé, il

fallait impérativement améliorer l’efficience du système de santé. Celui des Britanniques ne brille pas par l’espérance de vie à la naissance, où le pays est en 18e position loin derrière la France (7e). Ni par la densité médicale, le Royaume-Uni ne comptant que 2,5 médecins pour 1 000 habitants, contre 3,4 en France. Et il n’est pas le plus efficace globalement, la palme revenant à la Suède. Le National Health Service (NHS) est d’ailleurs systématiquement diabolisé par nos médecins, qui pointent l’absence de

68 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

liberté d’installation et de prescription de leurs confrères, ou par les patients, qui dénoncent la longueur des listes d’attente pour consulter un spécialiste au Royaume-Uni. Alors, pourquoi l’avoir choisi ? Depuis quelques années, c’est lui qui inspire la plupart de nos réformes : le parcours de soins efficient, le médecin traitant, la délégation de responsabilité à nos agences régionales de santé, la rémunération des médecins au résultat, etc. Bref, on le déteste autant qu’on l’imite. On le décrie autant qu’on le copie. N’y a-t-il au fond plus bel hommage ? Car s’il est remarquable, c’est pour être resté fidèle à ses principes fondateurs, que l’on n’attendait guère d’un pays réputé si libéral :


Dossier ANALYSE

Par Lise Rochaix, présidente de la commission « Évaluation économique et de santé publique » à la Haute Autorité de santé et professeure à l’université d’Aix-Marseille, et Sandy Tubeuf, maître de conférence à l’université de Leeds, Royaume-Uni Le National Health Service, alias NHS, occupe une place paradoxale parmi les systèmes de santé : souvent décrié, il est cependant source d’inspiration pour nombre de réformes mises en œuvre dans d’autres pays, y compris la France. Mis en place en 1948 par Beveridge, ce système est financé par l’impôt, à la différence des systèmes « bismarckiens », fondés sur les cotisations sociales, comme en France, où même la CSG joue un rôle croissant dans le financement. Alors que dans les années 1980, le secteur de la santé anglais était sousfinancé, ne représentant qu’environ 5 % du PIB, il a connu une augmentation massive de ressources budgétaires au cours des dix dernières années,

atteignant un dixième du PIB en 2010. À titre comparatif, la France consacrait 8,4 % du PIB au secteur de la santé en 1990 et 11,6 % en 2010. Cette augmentation massive de ressources budgétaires s’est accompagnée d’une constante évolution du système : le NHS vit actuellement une refonte complète de son organisation. Pour mieux répondre aux besoins locaux, et être ainsi plus efficient, le système de santé britannique a été fortement décentralisé, donnant aux niveaux régional et local de réelles responsabilités en matière de financement et de distribution des soins. Jusqu’en 2013, 152 centres de santé primaires (PCTs, ou Primary Care Trusts) qui organisaient le parcours de soins localement distribuaient 75 % de l’enveloppe

la gratuité d’accès aux soins et plus encore l’équité entre régions dans l’allocation des ressources, avec un effort plus soutenu dans les coins d’Angleterre les plus pauvres où les maladies sont les plus répandues, sans oublier le souci d’équité des performances du système. Autant de principes que la France n’assure plus vraiment. Et sur lesquels le fameux « NICE », (National Institute for Health and Clinical Excellence) veille depuis près de quinze ans avec ses évaluations menées de façon systématique pour optimiser toujours plus le système. Évaluations qui ont guidé ses réformes incessantes, sur la base de priorités définies en toute transparence. V. S.

du NHS. Depuis, le système a été réorganisé autour de quatre commissions régionales qui financent directement les médecins généralistes (GPs) et délèguent à 212 commissions cliniques (CCGs, ou Clinical Commissionning Groups) l’organisation des autres soins primaires et les soins secondaires. La mise en place en France des agences régionales d’hospitalisation (ARH), devenues agences régionales de santé (ARS), s’est inspirée du système britannique de délégation de responsabilité. Fonds annuel pour le cancer L’un des principes fondateurs du NHS est de garantir une gratuité complète des soins pour tous les résidents, dont l’ensemble du parcours de soins est, dès le début, pris en charge par cette instance. Mais pour accéder au spécialiste ou à l’hôpital, les patients doivent en passer par un GP, soit le general practitioner, véritable gatekeeper du système. Très contraignante au départ, avec une inscription du patient sur la liste d’un GP de quartier, lié au lieu de résidence, ce mode d’accès aux soins a été largement assoupli. Désormais, le patient est libre de changer de GP, peut choisir librement l’hôpital s’il est « référé » par son GP et choisit parmi trois options alternatives pour des soins secondaires. C’est cette forme

DR

DU CHANGEMENT

CYRIL-BAILLEUL

UN LABORATOIRE L. Rochaix

S. Tubeuf

« Les différents centres de soins de santé primaire sont évalués quatre fois par an par les commissions régionales. » modérée du gatekeeping qui a été adoptée en France en 2009, avec l’instauration du médecin traitant. Autre principe fort du NHS : le souci de l’équité d’accès aux soins, comme de l’équité des résultats de santé. C’est ce qui a présidé à la création du NICE, le National Institute for Health and Clinical Excellence, mis en place en 1999 pour réduire les inégalités régionales de distribution des soins, dans une mission générale visant à définir, de manière transparente, les priorités en santé du RoyaumeUni, afin de mieux guider l’allocation des ressources. Comme l’explique bien le rapport de la mission Quinet*, Le NICE a joué un rôle clé dans la définition du « panier de biens et services », ces médicaments et prestations intégralement pris en charge par le NHS, en définissant de manière transparente ses méthodes de choix des priorités. Une manière de procéder qui a inspiré la Haute Autorité de santé en France pour établir le « panier de biens et services » et au-delà, le parcours de soins efficient. En fonction de l’apparition de certains besoins, le système peut être assoupli. En témoigne …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 69


ANALYSE Dossier

UN LABORATOIRE DU CHANGEMENT Par Lise Rochaix et Sandy Tubeuf

n’étaient pas recommandés dans le panier de biens du NHS au vu de leur pauvre rapport coûtefficacité. L’affaire fit grand bruit car les mêmes anticancéreux étaient disponibles pour les patients d’autres pays d’Europe ou d’Amérique du Nord. Aussi, en 2011, un fonds annuel pour le cancer de 200 millions de livres sterling fut mis en place pour permettre à certains patients de bénéficier d’anticancéreux exclus du panier de biens du NHS, si ces médicaments étaient jugés par l’oncologue plus efficaces cliniquement pour le patient. Initialement planifié pour trois années, le fonds vient d’être prolongé jusqu’en 2016. Incitations financières Parmi les nombreuses réformes du système britannique amorcées dans les années 1990, les rémunérations mixtes des professionnels et établissements de santé. Ces rémunérations comprennent une part fixe et une part variable indexée sur la performance au sens large, mesurée par des indicateurs de volumes de soins, de qualité des soins et de résultats en termes d’amélioration de la santé. Un mode de rémunération qui a depuis inspiré de nombreux pays, dont la France avec les contrats d’amélioration des pratiques individuelles (Capi), mis en œuvre en 2009 sur une base volontaire et généralisés depuis. La mesure de la performance est la clé du système de santé britannique : les différents centres de soins de santé primaire sont évalués quatre fois par an par les commissions régionales sur un certain

GETTY IMAGES/AFP

… l’affaire des anticancéreux, qui

Les centres de soins britanniques sont évalués quatre fois par an.

« Pour accéder au spécialiste ou à l’hôpital, les patients doivent en passer par un GP, soit le general practitioner (généraliste), véritable gatekeeper du système. » nombre de critères de qualité des soins et de résultats sur la santé des patients. De fortes incitations financières ont même été mises en place, les centres de santé les plus performants étant récompensés pour leurs résultats. À titre illustratif, le dépistage des maladies cardiovasculaires, du diabète et de l’hypertension, proposé depuis

70 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

2009 aux Britanniques entre 40 et 74 ans dans le cadre du NHS Health Check, est comptabilisé et fait l’objet d’une rémunération directe pour les GPs. De même, des rémunérations à la performance ont été mises en œuvre sur des indicateurs de santé publique pour impulser le changement. Ainsi en est-il de la réduction des listes d’attente dans les hôpitaux. Le NHS a mis en place des guidelines avec échéancier du parcours de soins : entre la première visite chez le GP et la seconde chez le spécialiste, il ne peut se passer plus de dix-huit semaines. Et en cas de cancer suspecté, la visite au spécialiste se fait sous un maximum de quinze jours. Ainsi, le système de santé britannique ne saurait constituer un modèle, dans la mesure où il reflète fidèlement les

valeurs du pays qu’il sert, et celles-là seulement. Mais les différentes réformes récentes et les évaluations menées tant du point de vue de l’efficience que des résultats en termes d’équité et de santé publique nous invitent à réviser notre jugement. Ce système ne saurait plus aujourd’hui constituer le repoussoir ou l’alibi permettant d’invalider toute réforme visant l’amélioration de la performance. C’est plutôt un laboratoire du changement, avec un nombre important de réformes structurelles mises en œuvre et évaluées de manière systématique.

* « Évaluation socioéconomique des investissements publics », rapport de la mission présidée par Émile Quinet pour le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, septembre 2013.


Dossier ANALYSE

UN REGARD ÉCONOMIQUE SUR LE SYSTÈME DE SANTÉ Par Luc Baumstark, doyen de la faculté de sciences économiques et de gestion de l’université Lumière, Lyon-II Les Britanniques furent les premiers à avoir évalué les dépenses de santé à l’aune du gain de vie en bonne santé qu’elles permettent. Depuis 1999, le National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE), placé sous la tutelle du National Health Service (NHS), s’appuie systématiquement sur l’analyse économique pour évaluer l’opportunité des dépenses de santé. Objectif général de la démarche : garantir que ces dépenses améliorent le bien-être collectif. L’idée fut donc d’introduire

l’effort que la collectivité est prête à consentir pour gagner une année de vie supplémentaire en bonne santé. Bien sûr, la question de la qualité de la vie se pose immédiatement. Une année de vie en bonne santé ne saurait être équivalente à une année de vie avec un handicap majeur. C’est pourquoi les économistes utilisent un indicateur, le « qaly » – pour quality-adjusted life-year, ou années de vie ajustées sur la qualité –, qui pondère la durée de vie par l’état de santé. Ainsi, le « qaly » est une mesure du gain en santé.

un regard économique sur le système de santé. En le soumettant à la question centrale de l’évaluation : ces dépenses créent-elles de la richesse, au sens large, pour la collectivité ? Lorsqu’il s’agit d’apprécier un effet sur la santé, la question se pose de savoir comment valoriser le gain santé supplémentaire. Dans ce secteur, la pratique habituelle consiste à raisonner davantage sur l’espérance de vie et donc sur l’année de vie gagnée. On cherchera alors à apprécier

JOHN HARRIS/REPORT DIGITAL-RÉA

« Au-delà de 30 000 livres par année d’espérance de vie gagnée grâce à la thérapie, le NHS n’est plus prêt à payer. »

Seuil de dépense acceptable Une fois que l’on connaît le gain en santé offert par une thérapie, reste à le rapporter au coût supplémentaire qu’il faut consentir pour l’obtenir. Ce ratio « coût-efficacité » peut être comparé à celui des thérapies existantes pour le traitement de la pathologie. Et l’on retiendra l’option qui maximise le « qaly » pour la dépense la plus faible possible. Ce faisant, on raisonne sur une valeur monétaire par « qaly » gagné. Et l’on en vient à poser la question du seuil de dépense acceptable pour la collectivité. Le NICE a ainsi défini une limite : le seuil d’acceptabilité ou de rejet d’une nouvelle technologie médicale pour la collectivité se situe au Royaume-Uni entre 20 000 et 30 000 livres

sterling par « qaly ». En termes moins « technos », au-delà de 30 000 livres par année d’espérance de vie gagnée grâce à la thérapie, le NHS n’est plus prêt à payer. On peut ne pas aimer la méthode, qui a suscité de nombreux débats en Angleterre et qui a conduit à des révisions régulières. En particulier dans les situations de fin de vie ou dans le cas des maladies orphelines, pour lesquelles l’application stricte de ce seuil posait des problèmes politiques évidents. C’est pourquoi cette méthode est en réalité appliquée avec souplesse : il s’agit moins d’un seuil couperet automatique que d’une zone dans laquelle le processus de discussions et de négociations sera plus ou moins engagé. Au-dessus d’un « qaly » à 30 000 livres, on discute. Ce n’est qu’à 70 000 livres que le couperet s’impose. Mais pour la gestion de l’ensemble du système de santé, la méthode présente certains avantages. D’abord, elle introduit de la transparence et permet d’harmoniser les pratiques, donc de créer les conditions d’une efficacité de la dépense. Ensuite, elle renforce le dialogue contradictoire avec les laboratoires et les autres acteurs de la société, tout en promouvant l’utilisation des technologies les plus efficaces, les plus efficientes et les plus innovantes.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 71

068-071-LB-Dossier-Santé.indd 71

13/11/13 17:37


ANALYSE Dossier

SANTÉ Un modèle efficace mais peu flexible C’est une véritable obsession nationale. Pas un dîner entre amis ou une réunion entre collègues où le sujet du National Health Service (NHS) ne soit pas abordé. Les Britanniques parlent en permanence de cette énorme institution (1,4 million d’employés) dont ils sont extraordinairement fiers et qu’ils critiquent sans arrêt. Le système de santé britannique est un cas à part. Créé en 1947, il est entièrement gratuit pour les patients. Personne n’a à débourser le moindre centime, à quelques exceptions près (soins dentaires, lunettes, certains médicaments…). La contrepartie de cette gratuité est l’absence presque totale de flexibilité pour les patients. Il faut dans un premier temps s’enregistrer auprès de son GP (general practitioner), c’est-àdire le médecin généraliste le plus proche de chez soi. Les règles se sont légèrement assouplies ces dernières années, et particulièrement dans les grandes villes, où beaucoup de médecins sont installés, un

Britannique peut bénéficier d’un choix limité. Mais il n’est pas question d’aller s’inscrire à l’autre bout de sa ville, encore moins dans une autre ville, ni dans un lieu proche de son travail : c’est l’adresse résidentielle qui compte. Rares sont les docteurs installés seuls, à la façon de la médecine libérale française. En règle générale, ce sont des cabinets regroupant entre 5 et 10 généralistes, qui comptent souvent une infirmière. GARDE-FOU DU SYSTÈME

Les GPs servent de garde-fou de l’ensemble du système : eux seuls peuvent orienter les patients vers les spécialistes. Impossible d’en consulter un directement. Ce rôle de gardien du temple est profondément ancré dans les esprits des médecins. Dans la mesure où tout est gratuit pour le patient, ils savent que c’est leur décision de « référer » ou non un malade qui va coûter de l’argent au système de santé. Cette responsabilité se traduit par une attitude souvent assez désagréable des médecins, qui

72 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

ZUMA/RÉA

Le système de santé britannique est entièrement gratuit, mais les médecins sont pressés et les listes d’attente, longues…

ont tendance à faire comprendre aux patients qu’ils leur font perdre leur temps. Ce défaut est aggravé par l’ordre imposé par le gouvernement britannique de limiter les consultations à dix minutes. Cette durée peut s’avérer suffisante pour une simple grippe, mais elle est complètement inadéquate pour des cas plus compliqués, qu’il s’agisse d’un dépressif ou d’une personne âgée ayant plusieurs pathologies. Du coup, les malades se retrouvent généralement face à des docteurs pressés et peu aima bles. Ce système a cependant un avantage important par rapport à la France : les médecins n’ont aucun intérêt à prescrire des médicaments de confort, simplement parce que les patients les leur demandent. Une fois le cap du GP passé, il faut faire la queue. C’est

l’un des principaux défauts du NHS : le temps d’attente pour se faire traiter par un spécialiste atteint deux mois en moyenne, parfois beaucoup plus. Le problème s’est cependant en grande partie résorbé pendant les années 20002010, les gouvernements travaillistes de Tony Blair et Gordon Brown ayant injecté beaucoup d’argent et recruté des centaines de milliers d’infirmières et de médecins. C’est à cause de ces listes d’attente qu’un système de santé privé existe. Il est assez peu utilisé (7% de la population y a recours), puisque le NHS est entièrement gratuit, mais il permet de voir un médecin beaucoup plus vite. Souvent, il s’agit d’ailleurs des mêmes médecins, qui reçoivent dans les mêmes hôpitaux, mais à des horaires différents. Éric Albert, à Londres


Une seule déclaration sociale pour les remplacer toutes ! C’est la DSN. Pour en savoir plus, rendez-vous vite sur

DSN-info.fr

LA DSN ! ARTI C’EST P


ANALYSE Dossier

SUPERSTOCK/SIPA

E-ADMINISTRATION

IRLANDE UNE FORTE INTERACTION ENTRE CITOYENS ET ADMINISTRATION

F

aciliter l’accès aux services publics et réduire les coûts de traitement pour tous, y compris pour l’administration. En somme, faire plus avec moins. Ce double objectif a poussé tous les gouvernements de l’OCDE à investir massivement dans les services en ligne. Et partout, les citoyens, mais surtout la quasi-totalité des entreprises, davantage connectées au très haut débit, s’y sont mis. Là aussi, c’est dans les pays du nord de l’Europe – Finlande, Danemark, Suède – que le pli

a été pris le plus rapidement. La France n’est pas franchement en retard, figurant en sixième position dans l’OCDE en ce qui concerne l’état d’avancement de l’e-government. Mais l’offre y a un bon train d’avance sur la demande. En d’autres termes, alors que la France est plutôt avancée en matière de développement de services, qu’elle dispose notamment d’un portail d’information unique, Servicepublic.fr, depuis 2000, elle continue d’accuser un retard dans l’utilisation par ses

74 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

citoyens, puisque moins de 40 % d’entre eux avaient recours aux services en ligne en 2010. Un fort contraste, donc, avec l’Irlande qui a été, avec le Danemark et la Slovénie, l’un des pays où la croissance de l’utilisation des services en ligne a été la plus vigoureuse depuis le début des années 2000 : 68 % des particuliers y avaient recours en 2010, contre 18 % en 2005. À l’origine de cette performance, une prédisposition des Irlandais d’abord, jeunes, ouverts et passionnés de nouvelles


Dossier ANALYSE

LES RECETTES DU Par Benjamin Carnec, responsable des nouvelles technologies, de l’innovation et des services à Ubifrance Irlande Surnommée il y a peu le « Tigre celtique », l’Irlande a été aux prises en 2008 avec une crise financière qui a durement touché son économie et ses banques. Si ce pays a aujourd’hui sorti la tête de l’eau et renoué avec la croissance, l’État a été contraint de mettre en place un ajustement budgétaire de plus de 30 milliards d’euros entre 2008 et 2015. L’e-government, un sujet déjà connu en 2000, a fait partie des outils privilégiés pour à la fois améliorer le service rendu et en réduire le coût. Aussi le service dédié à l’e-government qui a été créé au sein du ministère des Dépenses publiques et de la Réforme met-il un véritable coup d’accélérateur dans le développement des services publics en ligne, coup d’accélérateur auquel

la population a vite répondu. Il faut dire que le terrain était particulièrement favorable : une population très jeune grâce à un fort taux de natalité (35 % de la population a moins de 25 ans, contre 30 % en France et 27 % au sein de l’Union européenne) ; une immigration régulière qui maintient une proportion élevée d’habitants nés à l’étranger (17 % de la population) et partant, une large ouverture culturelle sur le monde ; un taux de pénétration des smartphones très élevé (57 % contre 42 % en France début 2013) ; une culture technophile qui a contribué à attirer les sièges européens des leaders du secteur des technologies de l’information et de la communication (Microsoft, IBM, Apple, Google, Amazon,

technologies. Une politique très active du gouvernement, en quête d’économies substantielles après la crise de 2008. Une stratégie de communication qui récompense les ministères les plus innovants et incite chacun à rechercher ce qui pourrait être le plus utile pour ses administrés. Une philosophie globale, enfin, qui vise à favoriser l’implication des utilisateurs et à créer une véritable interaction entre les citoyens et l’administration. Des services publics version 2.0. V. S.

Facebook...) ; enfin, un fort lien social, quasi consubstantiel à la culture locale, qui fait des Irlandais l’une des populations les plus à l’aise sur Facebook ou Twitter. Quant aux entreprises irlandaises, elles sont aussi très actives sur les réseaux sociaux. Bref, la population était prête à recevoir, expérimenter, puis régulièrement utiliser ces nouveaux services publics online. Aussi le gouvernement a-t-il vite compris le parti qu’il pourrait tirer de ces avantages. Dès 2005, il lance plusieurs programmes de dématérialisation des services dont le plus grand succès est le « Revenue online services », qui permet de déclarer et de collecter les impôts en ligne. Alors qu’aujourd’hui, 90 % des entreprises l’utilisent pour le paiement de leurs impôts, le Trésor irlandais est considéré comme l’un des plus efficaces au monde, selon une étude de PricewaterhouseCoopers (PwC). Par la suite, tous les appels d’offres publics sont mis en ligne par le service E-tenders, avec toutes les informations sur les cahiers des charges et les gagnants des compétitions. Un grand outil de transparence, qui ne cesse d’être amélioré. Plus de 400 services en ligne Le site www.motortax.ie propose un service de règlement de la vignette auto, prête à être imprimée chez l’automobiliste.

DR

« TIGRE NUMÉRIQUE » « Si l’e-government a nécessité d’importants investissements initiaux, il a entraîné une forte baisse des coûts de fonctionnement. » Sans oublier le site Citizen information qui apporte une réponse à toutes les questions que les Irlandais sont susceptibles de se poser dans leurs relations avec l’administration. Chacun de ces services – dont certains furent développés en version mobile – fut poussé par une activité intense des différentes administrations sur les réseaux sociaux et rencontra un succès immédiat dans la population. Dans ce pays où simplicité, pragmatisme et efficacité prévalent dans l’environnement des affaires, où les formalités administratives sont toujours plus simples qu’ailleurs, les entreprises comme les citoyens saisirent immédiatement les bénéfices qu’ils allaient tirer de ces services. D’autant que le gouvernement, qui revendique plus de 400 services accessibles en ligne n’oublia pas de déployer de puissantes campagnes de communication, ciblées et percutantes. Campagne au coût global maîtrisé, alors que l’Irlande, qui s’étend sur 70 000 kilomètres carrés, compte moins de …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 75


ANALYSE Dossier

LES RECETTES DU « TIGRE NUMÉRIQUE » Par Benjamin Carnec

… 5 millions d’habitants. Une

Implication croissante des utilisateurs Aussi, continuant sur sa lancée, le gouvernement lança-t-il, en 2012, un plan sur trois ans, intitulé « E-government Strategy 2012-2015 ». Pour les entreprises françaises de logiciels ou de services, c’est une véritable opportunité qui mérite d’être regardée, tant les entreprises irlandaises sont ouvertes aux innovations utiles. Parmi les projets en cours, le renouvellement en ligne des cartes d’identité, passeports et permis de conduire, l’enregistrement en ligne des

Le gouvernement irlandais a lancé dès 2005 plusieurs programmes de dématérialisation des services publics, accueillis par une population réceptive.

FOTOLIA

communication bien amplifiée par un système d’awards, des prix récompensant les meilleures pratiques des différents ministères publics, et vantant par là même les innovations les plus percutantes. Ainsi, en 2012, le ministère de la Santé a été récompensé pour son site Get Ireland Active, ayant pour objectif de promouvoir les activités physiques ; ce site très ludique contient jeux, quizz, conseils, informations pratiques et permet aux citoyens d’être tenus informés par notifications ou de communiquer et d’échanger sur des événements à caractère sportif dans leur région. Pour l’administration irlandaise aussi, ce fut un véritable levier d’économies : si l’e-government a nécessité d’importants investissements initiaux, il a entraîné une forte baisse des coûts de fonctionnement.

« La population était prête à recevoir, expérimenter, puis régulièrement utiliser ces nouveaux services publics online. » terrains auprès du cadastre, l’einvoicing, système de facturation en ligne pour tous les achats de l’État et des collectivités locales ou l’attribution des prestations sociales en ligne. Mais parmi les projets du plan triennal les plus originaux, car reposant sur l’interactivité et l’implication des citoyens, figure « Fix my street » : un système d’alerte en ligne des dégâts constatés localement par les citoyens et qui permet aux communes de

76 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

régler le problème beaucoup plus rapidement. Au plan local aussi, beaucoup d’innovations ont été lancées. Dans le comté de Wexford, les citoyens peuvent recevoir, à leur demande, les informations locales de leur collectivité territoriale, telles que des alertes aux inondations, les routes barrées, mais aussi les événements culturels. Un type d’initiative qui, comme le « Fix my street » précité, montre bien la voie vers laquelle tend l’e-government 2.0 : au-delà de la compréhension immédiate de l’utilité du service rendu, une implication croissante des utilisateurs, donc une interaction croissante entre les citoyens, acteurs de la cité, et l’administration. Ces interactions sont illustrées par la forte présence du service public sur

les médias sociaux. Par exemple, les principaux ministères, agences gouvernementales et administrations ont tous des comptes Twitter, dont la liste est disponible sur le portail du gouvernement. Pour autant, même après 2015, il restera d’autres grands chantiers sur la route de la numérisation des services publics irlandais. Les citoyens n’ont pas encore de dossiers uniques, partagés par toutes les administrations, lesquelles sont encore cloisonnées. L’appétit pour les facilités offertes par les nouvelles technologies est tel pour ces early adopters qu’il y a fort à parier que, si des entreprises viennent leur proposer des solutions innovantes et apportant de la valeur ajoutée, ils y regarderont de très près.


Agir pour la transformation de l’action publique KPMG intervient sur les métiers du conseil en management et propose à ce titre des axes d’amélioration de l’action publique par la promotion de services usagers innovants, dans une logique d’acceptabilité sociale des réformes. z

Conseil en organisation et en transformation,

z

Evaluation des politiques publiques : Etat Central / Déconcentré / Santé,

z

Excellence opérationnelle des processus métiers RH / Achat / Supply Chain / Soutien et MCO Défense,

z

Optimisation des fonctions supports et de la gestion financière et comptable,

z

Maîtrise des risques et contrôle interne,

z

Amélioration de la performance des systèmes d’information.

Par ailleurs, KPMG s’appuie sur des Centres d’Excellence mondiaux pour réaliser des benchmarks dans les domaines de la Défense, la Sécurité/Justice, l’Enseignement Supérieur, l’Innovation, les mutations économiques et la revitalisation territoriale.

KPMG, premier groupe français d’audit, d’expertise comptable et de conseil

kpmg.fr


ANALYSE Dossier

EXPÉRIMENTATION

RRODRICKBEILER – FOTOLIA

DES POLITIQUES SOCIALES

ÉTATS-UNIS UNE DÉMARCHE AUSTÈRE MAIS PAYANTE

T

outes les grandes démocraties sont aux prises avec un casse-tête qui paralyse les gouvernements et perturbe les élections : comment aider les personnes les plus vulnérables, sans encourager les mécanismes qui entretiennent la pauvreté ? Si la France a multiplié, depuis le rapport Schwartz de 1981, les plans d’insertion, avec ses deux volets de lutte contre la pauvreté et d’accès à l’emploi, jusqu’à la création du revenu de solidarité active (RSA) en 2009, elle n’a jamais su – ou jamais osé – mener jusqu’au bout une

évaluation des coûteux dispositifs avant de les généraliser. Même après leur adoption, leurs bénéficiaires sont peu ou pas suivis. Au mieux, nos évaluations sont menées a posteriori par la Cour des comptes, et leurs résultats ne sont connus que lorsque la réforme suivante est déjà intervenue. Tout se passe comme si, la dépense sociale étant légitime dans une société en mouvement, elle pouvait donner lieu à la création d’un guichet ouvert, sans que l’on s’interroge au préalable sur son efficacité réelle. L’enjeu de l’expérimentation en France

78 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

n’est pas tant de remettre en cause le principe même de la politique sociale que d’obtenir de meilleurs résultats pour les dizaines de milliards d’euros qui lui sont consacrés chaque année. Pourtant, les acteurs de terrain comme les chercheurs sont convaincus de l’intérêt de ces expérimentations à condition que leurs conclusions servent véritablement la décision politique, comme le montre depuis au moins trente ans l’exemple américain. Et qu’elles conduisent à l’abandon de dispositifs démontrés inefficaces, ou a contrario, à la généralisation des interventions qui ont fait leurs preuves. Le problème vient plutôt des


Dossier ANALYSE

TOUJOURS TESTER

Comment éviter que l’assistance ne se transforme en assistanat ? Si le dilemme des politiques sociales est ancien, il est plus aigu encore aux États-Unis, où domine une forte hostilité à la dépense publique et où les interventions sociales de l’État sont a priori suspectes. Expliquant d’ailleurs que les trois principaux piliers de la politique sociale (la santé, les retraites et l’éducation), à l’exception de programmes spécifiques à destination des plus pauvres, aient été maintenus hors de son champ. Aussi, la seule manière de mener une politique sociale dans un pays où l’aide sociale est présumée perverse et contre-productive est d’apporter la preuve de son efficacité. Pas une efficacité théorique ou redistributive, mais une efficacité

au regard du coût engendré et d’un objectif de réduction du besoin d’intervention sociale. Depuis le début des années 1970, les Américains ont multiplié les programmes d’expérimentation de l’effet sur la reprise d’emploi des aides à différentes catégories de population : femmes élevant seules leurs enfants, jeunes, anciens détenus. Certaines aides du gouvernement fédéral sont même conditionnées à la mise en œuvre préalable d’expérimentations contrôlées. Mais ces évaluations, décidées par les États, sont menées par des organismes à but non lucratif financés par le budget fédéral. Ces expérimentations, qui ont survécu avec difficulté à la période Reagan et qui ont permis à l’administration Clinton

décideurs politiques, qui restent largement insensibles à ces modes d’élaboration des politiques. Ou pire, qui les redoutent. De fait, ces expérimentations n’ont, pour leur carrière, pas que des avantages : relevant du travail austère et besogneux de la recherche de preuves, elles empêchent les effets d’annonce si prisés dans un monde surmédiatisé. Elles nécessitent un lourd travail partenarial entre politiques et experts. Enfin, elles exigent plus que des coups de boutoir et autres effets de manche : une véritable persévérance dans la conduite des politiques publiques et une capacité à reconnaître ses premières erreurs pour rapidement les corriger. V. S.

DR

Par Bruno Crépon, directeur de recherche au Crest, et Martin Hirsch, ancien haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté, directeur général de l’AP-HP

MARC BOUDER

AVANT DE DÉPENSER B. Crépon

M. Hirsch

de refonder les aides pour les populations vulnérables, sont ainsi devenues un pilier des politiques de retour vers l’emploi. Un livre récemment publié aux États-Unis* montre qu’elles n’existeraient plus si n’avaient pu être produits devant le Congrès des résultats probants sur l’effet des programmes.

« La seule manière de mener une politique sociale dans un pays où l’aide sociale est présumée perverse et contre-productive est d’apporter la preuve de son efficacité. »

Éviter les guerres de tranchées Que sont ces expérimentations sociales ? L’idée des expérimentations sociales est que la politique économique a besoin d’évidence pour progresser, mais doit aussi pouvoir innover pour répondre aux nouveaux défis de la société en testant l’efficacité de ses interventions. Mieux : en apportant des mesures d’impact ayant quasi-valeur de preuves, ces expérimentations permettent d’éviter que les débats publics ne s’enferrent dans des guerres de tranchées, où chacun s’arc-boute dans des convictions inébranlables. Alors se pose la question de fond : comment apporter des évidences ? L’idée est finalement simple et lumineuse. C’est celle des expériences contrôlées, utilisées par l’industrie pharmaceutique pour mesurer le service rendu par les traitements médicaux selon des règles strictes. Prenons une population éligible à une nouvelle politique. La moitié de cette population, tirée au hasard, bénéficie du programme envisagé, l’autre

non. Reste à observer et comparer les comportements des deux populations. La contrainte est bien sûr de déployer un dispositif en même temps que le pilote ou que la politique mise en œuvre. L’écueil à éviter étant de se poser la question de l’impact d’une politique une fois qu’elle a été mise en œuvre. Aux États-Unis, la méthode a été éprouvée sur des politiques très variées. Exemple, le programme « Moving To Opportunity », conçu pour réduire ségrégation et ghettoïsation. La politique consiste à donner à ses habitants les moyens financiers de déménager pour aller s’installer ailleurs, l’hypothèse étant que certains ménages sont piégés dans des ghettos éloignés des zones d’emploi. L’expérimentation a consisté à tirer au sort une partie de la population et à lui proposer, au cas où elle souhaiterait s’installer ailleurs, une aide d’un montant donné. Autre exemple, le programme Job Corp, un strict accompagnement des jeunes aux marges de la société, …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 79

78-80-LB-Dossier-Pauvreté.indd 79

13/11/13 17:40


ANALYSE Dossier

TOUJOURS TESTER AVANT DE DÉPENSER

… proche du programme « Défense de la deuxième chance » développé en France. Le design de cette expérience était particulièrement souple : à la moitié d’une population éligible à l’accompagnement, fut simplement proposé de participer au programme, tout en laissant les individus appartenant à l’autre groupe libres d’y entrer s’ils le souhaitaient. La simple différence de traitement par l’existence ou non d’une proposition est en fait suffisante pour mesurer les effets de l’accompagnement. Financer l’offre ou la demande Les politiques d’emploi aux États-Unis ont fait l’objet de nombreuses expérimentations sociales. La question de l’assurance chômage, et de ses effets sur la recherche d’emploi, a été particulièrement examinée. Notamment l’attribution d’une prime à la reprise d’emploi, testée dans l’Illinois, l’une des expérimentations les plus riches d’enseignements. Elle a permis de montrer que la prime au retour à l’emploi accélérait la recherche d’emploi, signe que les demandeurs d’emploi réagissent fortement aux incitations financières. Plus les revenus de l’emploi étaient élevés par rapport aux allocations chômage, plus l’effort de recherche d’emploi était intense. Et plus la situation financière des demandeurs d’emploi s’améliorait. Deuxième conclusion de l’expérimentation : pour l’assurance chômage, le coût du versement de la prime excédait les économies d’allocations. En revanche, pour la collectivité toute entière, le bilan financier de la prime pour l’emploi se révélait neutre. Les résultats

MICHAEL FRANCIS MCELROY/ZUMA/RÉA

Par Bruno Crépon et Martin Hirsch

Certaines aides sociales du gouvernement fédéral américain sont conditionnées à la mise en œuvre préalable d’expérimentations contrôlées.

« Les expérimentations sociales peuvent aussi permettre de faire le diagnostic d’une situation, quand celle-ci fait question. » de ces expérimentations ont permis de prendre des décisions sur la base d’évidences, là où des débats sans fin auraient pu s’instaurer. Les expérimentations sociales peuvent aussi permettre de faire le diagnostic d’une situation, quand celle-ci fait question. Exemple, le chômage américain au début des années 1980. Un vif débat sur l’origine de ce chômage divisait les économistes : résultait-il d’un problème d’offre de travail ? En d’autres termes, les revenus du travail étaient-ils insuffisants pour motiver les demandeurs d’emploi dans leur recherche ? Ou au contraire, le chômage venait-il d’un problème de demande de travail, les chômeurs étant devenus difficilement employables, notamment à l’issue de restructurations ? On comprend que selon le diagnostic posé, deux types d’interventions radicalement différentes doivent êtres envisagées : pour combattre le chômage, faut-il subventionner l’offre ou la demande de travail ? L’expérimentation menée avait distingué trois groupes de chômeurs : au premier, une

80 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

prime au réemploi était offerte. Au second était remis un bon à remettre à leur employeur potentiel, pour qu’il touche luimême la prime. Une subvention à l’emploi en somme. Au troisième, rien. L’expérience a montré que le deuxième groupe ne voyait pas sa situation s’améliorer en termes d’emploi par rapport au troisième. Conclusion : la difficulté provient davantage d’un problème d’offre que de demande de travail. Pourtant, malgré la force des expérimentations, surgit un étrange paradoxe. Bien que les méthodes américaines pour tester le rapport coût-efficacité de leurs interventions sociales soient plus rigoureuses que les méthodes françaises, le coût global de ces politiques est supérieur aux États-Unis à ce qu’il est en France. En témoigne le système de santé américain, dont le coût, en proportion de la richesse nationale, est bien supérieur à celui que connaissent les Européens, alors que la proportion de personnes non couvertes par une assurance reste (avant les effets encore hypothétiques de l’Obamacare) bien supérieure à ce qu’elle est

en France, et que les indicateurs de santé y sont plutôt plus médiocres. Les résultats en termes de pauvreté ne sont pas, non plus, plus avantageux. Et les problématiques de violence sociale y sont très présentes. Mais si la capacité d’un pays à expérimenter ses politiques sociales ne garantit pas leur efficacité, elle doit permettre d’améliorer les résultats obtenus des politiques sociales. C’est tout l’enjeu en France, où des sommes gigantesques leur sont consacrées. C’était précisément l’objet du fonds d’expérimentation de 200 millions d’euros créé en 2009, qui a permis de mettre en œuvre des programmes pour répondre à des questions telles que : le financement public du permis de conduire est-il efficace sur l’insertion dans l’emploi ? Un revenu garanti pour les jeunes augmente-t-il la probabilité de trouver un emploi ? Quelle est l’efficacité de l’accompagnement à la création d’entreprise ? De même pour les collectivités territoriales qui engagent des milliards de dépenses sociales : il est urgent qu’elles se dotent de moyens mutualisés d’expérimenter les voies d’évolution d’intervention, sans cesse plus coûteuses. * Fighting for reliable evidence, par J. M. Geron et H. Rolston, Russel Sage foundation, New York, 2013


8h34 6DELQH /DXUHQW HW 1LFRODV RXYUHQW OH PrPH GRFXPHQW 3RZHU3RLQW j GLVWDQFH /DXUHQW PRGLÀH

O·LQWURGXFWLRQ GDQV OH EXV 'DQV OH WUDLQ 1LFRODV DMXVWH OHV GHUQLqUHV GRQQpHV ÀQDQFLqUHV 6DELQH RUJDQLVH XQH UpSpWLWLRQ HQ YLGpR FRQIpUHQFH (OOH SDUWDJH OH GRFXPHQW GDQV OH &ORXG 8h37

TOUT VOTRE OFFICE DANS LE CLOUD. ([FHO 2XWORRN 3RZHU3RLQW« 0HVVDJHULH SUR *R 9LGpR FRQIpUHQFH +' $GPLQLVWUDWLRQ VLPSOLILpH $FFqV j GLVWDQFH j YRV GRFXPHQWV www.office365.fr

Microsoft France - RCS Nanterre B327 733 184.

Totalement synchronisés


ANALYSE Dossier

POLITIQUE PIERRE BESSARD/RÉA

D’ÉDUCATION CORÉE DU SUD

L’EXCELLENCE, POUR LE MEILLEUR ET POUR LE PIRE

L

’école : la racine de tous nos maux. Si Jules Ferry avait su créer une école qui instruit et intègre, qui assimile l’immigré de fraîche date et construit l’adulte, qui élève enfin l’Homme dans la société, nous ne la reconnaissons plus dans les lacunes de nos adolescents et moins encore dans l’inemployabilité de nos jeunes diplômés. Si la France a réduit les ressources allouées à l’école pour suivre les courbes de la démographie, cette gestion d’abord comptable a eu un impact que

nul n’avait anticipé : les piètres performances de nos élèves dans les tests internationaux de compétences. Depuis la première enquête du Programme international pour le suivi des acquis des élèves (Pisa), les scores de la France stagnent au niveau de la moyenne des pays de l’OCDE. Alors que la proportion des élèves les plus faibles est passée de 15 % en 2000 à 20 % en 2009, la France se singularise en plus par de fortes inégalités scolaires, ethniques et de genres. En effet, le pays de Jules Ferry et de

82 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

l’égalité d’accès à l’éduction fait aujourd’hui partie de ceux où les écarts de réussite entre les plus forts et les plus faibles, entre les jeunes d’origine étrangère et les autochtones, entre les filles et les garçons sont les plus amples. Et pourtant, l’éducation fait partie de ces politiques publiques qui chez nous suscitent le plus de zèle réformateur de leur ministre : loi Haby de 1975 qui instaure le collège unique, loi Jospin de 1989 qui place l’élève « au centre du système éducatif », loi Fillon de 2005 qui


Dossier ANALYSE

LE CONFUCIANISME Par Aurélie Lecocq, Ph. D., chercheuse au groupe de recherche sur les enseignements scolaires (université de Montréal) En un demi-siècle, la Corée a atteint l’un des plus hauts niveaux de développement et d’équité en se dotant de l’un des systèmes éducatifs les plus performants qui soient. La proportion de jeunes Coréens ayant un diplôme d’études secondaires est passée progressivement de 43 à 98 % en l’espace de cinquante ans, soit la proportion la plus élevée au monde. Ce bond de 55 points constitue la plus forte progression des pays de l’OCDE, où la hausse constatée a été en moyenne de 20 points, passant de 61 % à 81 %. Comparativement, la France connaît une augmentation de 29 points (de 55 % à 84 %). Et ce n’est pas tout : la Corée présente aussi l’un des plus hauts scores au test du Programme international pour le suivi des acquis des élèves, le Pisa, en lecture, mathématiques et lecture sur support électronique. De plus, près de 71 % des jeunes

Coréens vont aujourd’hui à l’université, contre 56 % dans les autres pays membres de l’OCDE. C’est au lendemain de la guerre de Corée (1950-1953) que le système éducatif se reconstruit, dans un pays sous présence militaire américaine faisant face au péril communiste du Nord. La rapide expansion de l’enseignement primaire, couplée à l’urbanisation du pays due à un exode rural, conduit le pays à définir les grandes orientations de l’éducation. Le National Charter of Education de 1968 engendre une augmentation massive du nombre d’établissements (multiplié par trois en trente ans), une hausse du niveau et du nombre d’enseignants et favorise l’accès au secondaire sans restriction. Depuis 1968, tout enfant âgé de 7 à 16 ans est dans l’obligation d’aller à l’école : six années au primaire, puis trois ans en middle school, suivis de trois ans en high school. Et s’il le peut,

instaure le « socle commun de connaissances »… Tous les dix à quinze ans, on revoit tout. Le problème a donc été identifié depuis longtemps. Ce sont les solutions choisies qui ont raté leur cible. Dans un cadre il est vrai centralisé à l’extrême, avec un ministère qui veut garder la haute main sur les programmes enseignés, les méthodes pédagogiques et les carrières des enseignants. Et avec un personnel – directeurs d’établissements et enseignants – qui refuse l’évaluation, et plus encore la publicité

le jeune est ensuite scolarisé au supérieur, généralement pendant quatre ans. Plusieurs années d’avance sur les programmes Si le calendrier est somme toute assez proche de celui qui prévaut dans les pays de l’OCDE, le système coréen est très particulier : il est marqué par une forte concurrence entre élèves et entre établissements, une tendance à la privatisation et l’existence d’un système d’enseignement parallèle. Parallèlement, la gouvernance, définie par la politique de décentralisation mise en place en 1991 et renforcée en 2006, a assuré une grande autonomie aux écoles, appuyées par les bureaux provinciaux de l’éducation du ministère de l’Éducation, de la Science et de la Technologie (MEST). L’existence d’un véritable système éducatif parallèle,

faite autour, des performances de leur direction comme de leurs méthodes d’apprentissage. C’est pour toutes ces raisons que l’exemple de la Corée, qui s’est hissée en moins de cinquante ans au rang de grande puissance économique et de pays de culture, grâce à l’enseignement poussé de ses enfants et à une évaluation permanente de ses écoles, mérite d’être regardé. Bien sûr, on ne saurait ignorer les travers d’une culture de l’excellence et de la compétition qui tourne à l’obsession. Mais avant cela, regardons humblement ce qui fonctionne… V. S.

DR

EXACERBÉ PAR LA COMPÉTITION « La conception de la réussite ou de l’échec scolaire est intimement liée à la notion d’effort, plus qu’à celle de capacités. » constitué d’instituts de formation pour la plupart privés, est sans conteste la caractéristique la plus frappante du système coréen. Avant même l’entrée à l’école élémentaire, la majorité des Coréens est capable de lire, écrire, compter et commence à parler anglais. Les enfants de maternelle fréquentent des camps d’anglais et les mères, qui assurent en grande partie l’éducation des enfants avant leur scolarisation, sont assistées par des edu-sitters, employées d’entreprises privées et diplômées en éducation des jeunes enfants. Cette pratique se décline en de nombreuses spécialités : english-sitter, booksitter, math-sitter, artssitter, etc. Et dès l’âge de 7 ans, un grand nombre d’élèves suit des cours particuliers après l’école, dans des hagwons, souvent jusque tard dans la nuit pour prendre de l’avance – parfois plusieurs années – sur les programmes scolaires. En 2010, 72,2 % des étudiants de premier cycle du secondaire recevaient des cours particuliers. En primaire, ils étaient 86,8 %. Si dès le primaire, les élèves sont prêts à endurer des journées de quinze heures de cours, c’est pour préparer les concours d’entrée aux lycées et à l’université, concours … ultrasélectifs. Au niveau

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 83


ANALYSE Dossier

LE CONFUCIANISME EXACERBÉ PAR LA COMPÉTITION Par Aurélie Lecocq

les élèves sont généralement scolarisés dans une école proche de leur domicile. Ensuite, ils doivent décider dans quel établissement ils veulent s’inscrire. Si certaines régions de la Corée ont mis en place un système de tirage au sort (Séoul, Busan, Daegu et Gwangju), les autres sélectionnent les meilleurs élèves, sur la base de leurs bulletins de notes et de leurs résultats aux tests d’admission. Après le lycée, ils doivent se soumettre au College Scholastic Ability Test (CSAT), l’examen d’entrée à l’université appelé le Sooneung, dont les résultats ont un impact majeur sur les perspectives d’admission aux grandes universités. Quels sont les facteurs clés de la réussite éducative coréenne ? La présence très ancrée du confucianisme, le sens de l’effort et le respect de l’ordre n’y sont pas étrangers. Le prestige de l’éducation et de la réussite scolaire sont des valeurs très prégnantes, considérées comme la clé de l’ascension sociale. La conception de la réussite ou de l’échec scolaire est intimement liée à la notion d’effort, plus qu’à celle de capacités. Ainsi, la société coréenne tout entière est convaincue que tout enfant peut réussir, à condition qu’il travaille. Salaires élevés Mais la Corée a également massivement investi dans l’éducation et récolte aujourd’hui le fruit de cet investissement. Car cette éducation hors normes résulte surtout d’une puissante politique volontariste : en 2008, l’État coréen a investi 7,6 %

JUNG YEON-JE/AFP

… du primaire et du collège,

En 2008, l’État coréen a investi 7,6 % de son produit intérieur brut dans son système éducatif, l’un des plus performants au monde.

« L’existence d’un véritable système éducatif parallèle, constitué d’instituts de formation pour la plupart privés, est sans conteste la caractéristique la plus frappante du système coréen. » de son PIB dans l’éducation – soit l’effort le plus élevé après l’Islande, et bien au-dessus de la moyenne de 5,9 % de l’OCDE. Parallèlement, la France a investi 6 % de son PIB en 2008, contre 6,6 % en 1995. Plus décisive encore fut la manière dont les ressources furent allouées : plutôt que de diminuer la taille des classes, le gouvernement a choisi de bien payer ses enseignants. En 2009, le salaire annuel d’un professeur de second cycle du secondaire avec quinze ans d’expérience est de 52 699 dollars US convertis sur la base des parités du pouvoir d’achat (PPA) en Corée, contre une moyenne de 43 711 $ PPA dans les pays de l’OCDE et un salaire annuel de 36 145 $ PPA en France. Investir dans les enseignants est l’une des caractéristiques des pays les plus performants de l’OCDE. Pour arriver à ce niveau, les Coréens ont soumis leur système scolaire à une évaluation régulière, sur la base d’objectifs

84 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

clairs internationalement comparables. Depuis 2008, les apprentissages de tous les élèves sont évalués à l’échelle nationale par le National Assessment of Educational Achievement (NAEA). Le College Scholastic Ability Test (CSAT) évalue leurs performances scolaires avant l’entrée à l’université. Professeurs, directeurs d’établissements scolaires et écoles sont eux aussi régulièrement évalués. Toutes ces évaluations, y compris les tests internationaux comme Pisa et TIMSS, sont utilisées comme outil de diagnostic. Elles servent à élaborer de nouvelles politiques éducatives, à modifier les programmes scolaires, les objectifs, les manuels, mais aussi la formation des professeurs, des directeurs, la gouvernance des établissements… Le KICE (Korean Institute of Curriculum & Evaluation) recommande que les curricula et les manuels scolaires soient révisés sur la base d’une inspection méticuleuse des programmes en vigueur dans

les autres pays ayant un fort taux de rendement scolaire afin d’accroître les scores à Pisa. Mais cette exigence d’excellence a aussi sa part d’ombre. Rythmes scolaires éprouvants, surcharge de travail, manque d’heures de sommeil, stress, dépression… Les étudiants paient cette performance au prix de leur santé psychologique et physique. La Corée a le taux de suicide le plus élevé de l’OCDE (31,7 suicides pour 100 000 personnes en 2011). De plus, les familles fournissent un effort financier hors pair dans l’OCDE : 19 % des coûts de l’éducation au niveau primaire et secondaire sont pris en charge par les familles, contre une moyenne de 7 % dans l’OCDE. Dans l’enseignement supérieur, les fonds privés couvrent même près de 78 % des coûts de l’éducation, contre une moyenne de 31 % dans l’OCDE. In fine, dans ce pays qui fut si soucieux d’équité, la privatisation du système éducatif et la multiplication des hagwons risquent d’accentuer les inégalités sociales de réussite scolaire. Et le niveau d’éducation ne protège pas toujours sa jeunesse contre le chômage : le taux d’emploi des jeunes (23 %) y est très inférieur à celui de l’OCDE (43 %).


Dossier ANALYSE

POLITIQUE D’ÉDUCATION Avant et après la classe, il y a cours… En cours de maths en classe équivalente au cours préparatoire français, les élèves assis sagement ont l’air de s’ennuyer ferme. « Quelqu’un connaît-il la réponse ? » demande la maîtresse, en pointant l’opération inscrite au tableau noir : « 15 moins 5 égale ? » « Trop facile, je l’ai déjà apprise », répond un élève. « Alors que l’école obligatoire commence à l’âge de 7 ans, dit Roh Eun-jin, 40 ans, qui enseigne à 38 élèves à l’école élémentaire de Soongin, au nord de Séoul, la plupart des enfants apprennent toutes les bases, telles que compter, l’alphabet hangul ou coréen, et les couleurs avant même d’y être entrés. » Nam Young-hee, une autre enseignante de la même école, affirme elle aussi que la plupart de ses élèves « savaient lire et écrire avant même d’entrer au primaire. Et bien que l’apprentissage de l’anglais ne

commence qu’en équivalent du CM1, la plupart ont commencé en maternelle avec des cours particuliers ». Pour les élèves de CP, la journée commence ainsi : lever à 7 heures 30, arrivée à l’école à 8 heures 40, assis dès les premiers instants. La lecture d’un livre ou une chanson en chœur donnera le ton de la journée. Mais la journée de classe à proprement parler ne commence qu’à 9 heures et se poursuit jusqu’à 13 heures 40, cinq jours par semaine. Chaque cours dure quarante minutes, avec dix minutes de pause entre deux cours. Le déjeuner, offert par l’État, se prend en cinquante minutes, soit en classe, soit à la cafétéria. L’année scolaire se déroule en deux temps : un premier semestre de cinq mois du début mars à la fin juillet, le second du début septembre au

ADAM DEAN/PANOS-RÉA

Le gouvernement coréen commence à faire marche arrière après des années d’éducation par le stress et la compétition à l’école.

« La plupart des enfants apprennent toutes les bases avant d’entrer à l’école. » Roh Eun-jin, enseignante à Séoul début février, avec un mois de vacances en août et un mois en février. ZÈLE ÉDUCATIF DES PARENTS

À l’âge de 7 ans, les élèves passent déjà 1 680 heures en classe dans l’année, et ce sans compter le travail à la maison,

en cours particulier, le soir et le samedi. « Nous animons des classes après l’école jusqu’à 17 heures, pour les élèves qui le souhaitent, dit Roh Eun-jin. Et dans ma classe, 10 élèves, soit un quart d’entre eux, y assistent jusqu’au bout. Mais, ajoute-telle, après 17 heures, la plupart des enfants suivent encore des …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 85


ANALYSE Dossier

des cours à leurs enfant, le président Park Geun-hye Park projette d’interdire aux écoles primaires et secondaires de faire des interrogations portant sur des sujets abordés dans les classes supérieures. Des projets de financement public des études du soir sont également à l’étude, mais l’importance du coût budgétaire pose la question de la faisabilité.

JUNG YEON-JE/AFP

SPECTRE DE LA SURQUALIFICATION

« Pour peu que leur enfant ait raté une dictée que son voisin a réussi, les mères deviennent ultrastressées et leur mettent une incroyable pression. » Nam Jin-Hee, enseignante en école primaire … cours privés. Car les élèves prennent en moyenne deux ou trois cours privés, même s’il s’agit aussi de leçons de piano pour les filles et de cours de taekwondo pour les garçons. Quoi qu’il en soit, la journée ne s’arrête pas là. Car après le dîner, les enfants passent encore deux heures à faire leurs devoirs à la maison. » Voilà pourquoi, dans les évaluations mondiales, telles que les TIMSS ou les tests Pisa, les jeunes Coréens dépassent les enfants du monde entier en mathématiques ou en sciences comme en lecture. Les enseignants y voient le résultat de l’extraordinaire zèle éducatif des parents. Mais il y a une face sombre de cette excellence coréenne, perceptible même à l’école :

« Ils savent tellement de choses avant d’entrer à l’école que certains s’y ennuient et ne parviennent pas à se concentrer », confie la maîtresse Nam. « Ils savent que 15 moins 5 font 10, mais ils ne comprennent pas le vrai sens de la soustraction, car ils ont appris des tables de soustraction par cœur », ajoute Roh. « La concurrence entre parents alourdit un peu plus la charge sur leurs épaules », estime Nam Jin-hee, une enseignante en école primaire à Séoul. Qui ajoute : « Les parents passent leur temps à comparer leurs enfants avec ceux des autres. Pour peu que leur enfant ait raté une dictée que son voisin a, lui, réussi, les mères deviennent ultrastressées et leur mettent une incroyable pression. » Elle conclut : « En Corée,

86 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

l’éducation est désormais affaire de compétition entre mères. » Au point que, prenant conscience des risques d’une telle pression aussi jeune, le gouvernement coréen a allégé les programmes, en réduisant le nombre de matières étudiées à l’école. À partir de cette année, les enfants de 7 ans n’en étudient plus que trois : le coréen, les mathématiques et un ensemble composé d’histoire, de géographie et de sociologie, censé stimuler l’imagination et le raisonnement des élèves. « Par exemple, le mois dernier, nous avons abordé l’automne, le temps qu’il y fait et les coutumes traditionnelles de cette saison », dit Nam, de l’école de Soongin. Et pour dissuader les parents de payer

En Corée, l’école n’est obligatoire et gratuite que jusqu’à l’âge de 16 ans. Mais 98 % des élèves vont au-delà et 82 % suivent un enseignement supérieur, soit plus que dans n’importe quelle autre économie avancée. Certains experts estiment toutefois que trop d’étudiants vont à l’université et que leurs attentes en termes de salaire et d’emploi, plus élevées que jamais, ne peuvent être que source de déception. Alors que pas plus de 50 % des jeunes diplômés décrochent aujourd’hui un travail à temps plein, le spectre de la surqualification et de l’inéquation de l’offre et de la demande de travail est en train de miner une génération. « Une nouvelle réalité sociale qui amène certains parents à penser différemment, dit Nam. Ceux-là veulent que leurs enfants soient heureux plutôt qu’ultraperformants au prix d’un stress élevé. Parviendrontils à défendre leurs vues, alors que toute la société pousse nos élèves à la compétition ? » Oh Kyu-wook, grand reporter au quotidien The Korea Herald, à Séoul


DEMAIN commence ici.

©2013 Cisco Systems, Inc. Tous droits réservés.

Aujourdȝhui, on mesure avec émerveillement tout le chemin parcouru. Nos téléphones communiquent avec nos téléviseurs pour enregistrer nos émissions préIérées. Des médecins en Estonie soignent des patients au Danemark. Les entreprises sȝappuient sur les réseaux sociaux pour améliorer leur service client. Et pourtant, plus de 99 % du monde nȝest toujours pas connecté à Internet. Mais nous y travaillons. Et demain, nous pourrons donner vie à nȝimporte quel objet. Les arbres parleront à des réseaux qui eux-mêmes parleront du changement climatique avec les scientiIiques. Les Ieux de signalisation parleront aux voitures qui parleront aux capteurs routiers de manière à mieux réguler la circulation. Les ambulances parleront aux dossiers médicaux qui parleront aux médecins pour sauver plus de vies. Une nouvelle ère sȝannonce : celle de lȝInternet des objets. Cȝest une opportunité sans précédent qui sȝoIIre aux entreprises dȝaujourdȝhui. Demain ? Nous réveillerons le monde. Et nous observerons, les yeux grands ouverts, comment les choses prennent vie. #tomorrowstartshere


ANALYSE Dossier

LUTTE CONTRE

SUPERSTOCK/SIPA

LE CHÔMAGE DANEMARK UNE RÉVOLUTION EST POSSIBLE

L

a plaie vive du chômage a poussé, dans les grands pays avancés, à de nombreux travaux de recherche sur les différents systèmes d’accompagnement vers l’emploi. Au Royaume-Uni, en Allemagne, des réformes ont eu lieu pour « activer » la recherche d’emploi, avec un certain succès. En France, il y a bien eu des tentatives de réformes, notamment avec la fusion de l’ANPE et de l’Unedic et la création de quelques obligations aux demandeurs d’emploi, mais

sans que le système ne change réellement dans les faits. C’est au Danemark que la réflexion et l’action ont été poussées le plus loin. Il faut dire que c’est avec les employeurs et les employés que les réformes sociales ont été menées et les mesures anticrise imaginées. Ce partenariat tripartite, à la base de toutes les réformes structurelles et du consensus qui lie les Danois, n’est pas une véritable cogestion : il donne seulement la prépondérance aux conventions

88 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

collectives – en particulier d’entreprises – sur la loi. Aux organisations syndicales de veiller à leur respect. Mais ce faisant, les puissants partenaires sociaux sont force de proposition et cherchent eux aussi la voie du consensus. Avec une conviction : la protection sociale est indispensable, y compris pour la productivité du pays, mais elle doit être financièrement et socialement soutenable. Aussi, si le système de protection sociale danois est extrêmement généreux, entraînant un taux de prélèvements obligatoires parmi les plus élevés de l’OCDE, à 49 % du PIB, il s’inscrit dans une logique de


Dossier ANALYSE

LES CLÉS DU Par Fabrice Perrin, conseiller social pour les pays nordiques (Danemark, Finlande, Norvège et Suède) à l’ambassade de France à Stockholm Le modèle danois n’a pas constitué un rempart efficace contre la crise qui a balayé l’Europe à partir de 2008. Même si le royaume avait réalisé dès 2007 des réformes structurelles destinées à maîtriser ses dépenses publiques, à restaurer sa compétitivité par la modération salariale et à densifier son marché du travail, le Danemark a été lui aussi frappé de plein fouet par la crise : il est passé d’une situation de quasi plein emploi en 2008 (taux de chômage de 3,2 %) à un chômage frappant 8 % de la population active en 2012. Et aujourd’hui, contrairement

à son voisin la Suède, il est encore convalescent, avec une croissance qui, d’après le FMI, ne devrait pas dépasser 1,2 % l’année prochaine. À première vue, la fameuse « flexisécurité » mise en place au début des années 1990 n’aura donc pas été d’une grande utilité. Pourtant, à y regarder de plus près, ce sont bien les piliers de ce modèle danois – à savoir des partenaires sociaux puissants, grâce à un taux de syndicalisation proche de 70 %, et qui recherchent le compromis, un système de protection sociale généreux, et une ferme politique « d’activation » et d’incitation à la reprise d’activité des

droits et de devoirs : ses bénéficiaires sont soumis à de nombreuses obligations. Mais ce n’est pas la seule clé de compréhension du modèle danois. Là où la France tente de mettre en place une politique nationale définie de manière centralisée à Paris, le Danemark a fait le choix de décentraliser ses politiques sociales, de l’éducation à l’accompagnement des chômeurs. Ce sont les communes qui recrutent directement les enseignants du préscolaire au secondaire et ce sont elles aussi qui, connaissant au plus près leur bassin d’emploi, adaptent pour chaque chômeur son parcours d’intégration. V. S.

chômeurs – qui auront adouci les effets de la crise sur ses habitants et singulièrement les plus jeunes. Car c’est cette capacité à créer un consensus autour d’une politique qui a permis à l’État danois d’élaborer une véritable politique à destination des jeunes, bâtie en trois volets : garantie jeunes doublée d’un accompagnement vers l’emploi, recours aux emplois aidés et formation professionnalisante. Plan individuel d’orientation La garantie jeunes, d’abord, repose sur un ensemble de droits, définis sous conditions, et de devoirs. Dès l’âge de 18 ans, les jeunes sans emploi et non indemnisés par l’assurance chômage, qui résident au Danemark depuis au moins sept ans dans les huit dernières années, touchent depuis la mi-2009 une aide sociale, proche du RSA. Et ce si leurs ressources globales étendues aux revenus mobiliers et immobiliers n’excèdent pas 10 000 couronnes danoises (soit 1 345 euros) par an pour une personne et le double pour un couple. Une allocation donc réservée aux Danois ou assimilés et à ceux qui sont sans ressources. En contrepartie, ils doivent être pris en charge par une agence de l’emploi, sous la responsabilité de la commune, sont contraints de suivre une

DR

VOLONTARISME DANOIS « L’efficacité du système repose sur sa décentralisation : à chaque commune d’adapter ses offres à ses candidats bien sûr, mais surtout à son bassin d’emploi. » formation, d’accepter une offre de stage ou de participer à un cursus de recherche d’emploi. Une activation de la recherche d’emploi qui est particulièrement suivie pour les jeunes « décrocheurs », ayant quitté prématurément le système éducatif après le collège : 5 % d’entre eux, entre 15 et 17 ans, sont directement suivis par les communes, très impliquées dans la démarche, et doivent faire l’objet d’un plan individuel d’orientation mis au point entre les élèves de troisième, leurs parents et les institutions communales. Lequel plan doit inclure au mieux une offre d’emploi, sinon une offre de stage ou de travail bénévole. Si l’offre est généreuse, tout écart de conduite sera sanctionné : le non-respect, sans motif valable, de ce plan individuel d’orientation entraîne la suspension du versement des allocations familiales par les communes (2 558 couronnes danoises par trimestre, soit 340 euros, pour les enfants âgés entre 7 et 17 ans). Signe que les familles elles-mêmes sont largement impliquées …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 89


ANALYSE Dossier

LES CLÉS DU VOLONTARISME DANOIS Par Fabrice Perrin

de leurs jeunes vers l’emploi et directement intéressées au respect du plan d’orientation. Il n’y a pas que les très jeunes qui sont pris en main par le système : les demandeurs d’emploi de moins de 30 ans sans formation bénéficient dans les agences pour l’emploi de moyens pour renforcer leur suivi. Ceux qui maîtrisent peu ou pas la lecture et la rédaction, en particulier, ont droit à des cours de mise à niveau systématiques. Deuxième volet du plan anticrise mis en place avec les partenaires sociaux et intégré dans les conventions collectives, le recours accru aux emplois aidés, en particulier pour les personnes sans emploi depuis plus de six mois. Et au Danemark, ce sont d’abord dans les entreprises que ces emplois sont créés. Une entreprise peut ainsi percevoir 70 couronnes danoises par heure (environ 10 euros) pour un emploi dans le secteur privé (18 euros pour un emploi dans le public). Un dispositif que les entreprises ont beaucoup utilisé : en 2010, une entreprise sur trois, contre une sur cinq en 2008, avait recours à des emplois aidés, selon une étude du Danish National Centre for Social Research (SFI). Système d’accompagnement décentralisé Mais le troisième volet sur lequel le plan de sortie du chômage s’est concentré est sans doute le plus durable : car avec le plein emploi qu’a connu le Danemark pendant la « période dorée » – 2004-2007 –, les jeunes étaient peu incités à suivre une formation : alors que 80 % des 15-25 ans ont un diplôme

SCANPIX DANEMARK/SIPA

… dans l’accompagnement

« La garantie jeunes, d’abord, repose sur un ensemble de droits, définis sous conditions, et de devoirs. » de l’enseignement secondaire, cette proportion stagne. On est loin de l’objectif de 95 % que s’était fixé le gouvernement. Aussi, l’actuelle Première ministre, Helle Thorning-Schmidt, a-t-elle indiqué vouloir porter la proportion de jeunes optant pour la formation en alternance de 19 % en 2012 à 25 % en 2020 et à 30 % en 2025. Avec un principe : mieux sélectionner les « candidats » à l’apprentissage. Tout en créant une filière d’apprentissage professionnelle réservée aux plus de 25 ans.

90 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

Même frappé de plein fouet par la crise, le Danemark conserve un taux de chômage des moins de 25 ans parmi les plus bas d’Europe.

L’efficacité du système danois de l’accompagnement des chômeurs vers l’emploi repose sur sa décentralisation : à chaque commune d’adapter ses offres à ses candidats bien sûr, mais surtout à son bassin d’emploi. C’est bien l’un des objectifs de la réforme du service public de l’emploi entrée en vigueur depuis le 1er août 2009 – au cœur de la crise – qui a consisté à confier aux 98 communes que compte le Danemark la gestion des agences de l’emploi. Ainsi, les communes ont désormais entre leurs mains l’essentiel des politiques sociales et d’éducation (du préscolaire au secondaire), ce qui permet tout à la fois de rendre celles-ci plus cohérentes, mais aussi de prévenir sans doute plus rapidement la précarisation des jeunes quittant prématurément le

système scolaire sans diplôme. Le Danemark n’a certes pas encore retrouvé le chemin de la croissance. Mais le taux de chômage de ses jeunes âgés de moins de 25 ans est l’un des plus bas d’Europe, à l’exception de l’Allemagne : il atteint 14,1 % en 2012, contre 24,7 % en France, 23,7 % chez son voisin suédois et 23 % pour la moyenne de l’Union européenne à 28, une moyenne il est vrai tirée vers le haut par l’Espagne et la Grèce, où le chômage frappe un jeune sur deux. Plus que tout autre pays européen, le Danemark a, lui, fait le choix de sa jeunesse, qu’il souhaite formée. C’est en cela qu’il est sans doute un modèle à suivre, pour lequel le Premier ministre français, Jean-Marc Ayrault, en visite officielle à Copenhague le 21 octobre dernier, a montré un réel intérêt.



ANALYSE Dossier

CHRIS STOWERS/PANOS-RÉA

DÉPENDANCE JAPON LES PAYS DÉVELOPPÉS FACE À L’ARMÉE DES CHEVEUX BLANCS

V

oilà toute l’OCDE aux prises avec l’armée montante des cheveux blancs et devant faire face à l’explosion d’un nouveau risque : la dépendance. Un risque qui, dans l’ensemble des pays de l’OCDE, absorbe déjà 1,6 % du PIB. Mais qui ne peut que progresser, sachant que les plus de 80 ans, qui représentaient 4 % de la population mondiale en 2010, en représenteront 10 % en 2050. Un risque qui, en France, se traduit pour les départements par une envolée mal anticipée de l’alloca-

tion personnalisée d’autonomie, la fameuse APA, attribuée aux personnes dépendantes sans condition de ressources ni recours sur succession. Alors qu’aucun gouvernement n’a encore osé créer un cinquième risque, d’autres, il est vrai frappés plus tôt par le vieillissement de leur population, ont sauté le pas : près de nous, l’Allemagne, et plus loin, le Japon, pays où se pressent le plus grand nombre de grands vieillards. Un exemple fascinant où, loin de concevoir la prise en charge au coup par coup, la poli-

92 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

tique de la dépendance a été abordée dans une vision globale : financement avec le souci de maintenir l’équité entre les générations et mise en place de soins à domicile généreux mais au coût maîtrisé. Car l’enjeu est bien de maintenir le plus longtemps possible les personnes dépendantes à domicile, le coût en établissement étant beaucoup plus lourd aussi bien pour les familles que pour la collectivité. Mais pour maîtriser le coût global de la dépendance, encore faudra-t-il avoir la main d’œuvre. Alors que dans


Dossier ANALYSE

LA PRISE EN CHARGE « MADE IN JAPAN »,

UN MODÈLE POUR L’OCDE Doté d’une longévité record depuis 1980, soit depuis plus de trente ans, le Japon fut l’un des premiers pays de l’OCDE à s’être préparé à la prise en charge de ses personnes dépendantes. Il faut dire que le problème s’annonçait incontournable puisque d’ici 2050, la part des personnes âgées de plus de 80 ans devrait presque tripler, passant de 6 % en 2010 à 16 % en 2050. Dès 2000, Tokyo mit en place, comme l’Allemagne, un système obligatoire d’assurance dépendance pour les personnes âgées, dont l’objectif était de maîtriser les dépenses hospitalières de soins de longue durée, mais qui était distincte de l’assurance maladie. L’assurance dépendance fut ainsi, dès le démarrage, une nouvelle branche du système de protection sociale japonais. Cette assurance obligatoire et

universelle est financée à 45 % par les recettes générales perçues par l’État et les gouvernements locaux (comme dans le modèle suédois) et à 45 % par des cotisations sociales (comme dans le modèle allemand). Des cotisations sociales qui ne pèsent pas sur tous les actifs, mais sur toutes les personnes de plus de 40 ans, y compris les retraités, pour lesquels les cotisations sont fixées en fonction de leurs capacités contributives. Enfin, les assurés eux-mêmes participent à hauteur de 10 % par le biais d’un copaiement. Autre particularité du système japonais : les prestations sociales versées aux personnes dépendantes comprennent exclusivement des prestations en nature car le gouvernement a choisi de ne pas verser de prestations en espèces. Des prestations qui comprennent

l’ensemble de l’OCDE, ce secteur emploie entre 1 et 2 % de la population, de nombreux pays devraient voir cette proportion plus que doubler d’ici 2050. Une pression qui ne manquera pas de tirer les salaires vers le haut et de contribuer à faire exploser le coût pour la collectivité. Il est urgent d’aborder partout le problème dans sa globalité, sans oublier les aidants familiaux, pilier de tout système de prise en charge de la dépendance. Faire face donc, en regardant ce que d’autres ont déjà fait. V. S.

les services de soins à domicile et en institution, mais aussi l’aménagement du logement en équipements compensant la perte d’autonomie. Des prestations attribuées aux personnes âgées de 65 ans et plus selon une grille d’évaluation du degré de dépendance comparable à la grille française AGGIR. Et qui couvrent également certains traitements pour les personnes âgées de 40 ans et plus souffrant de maladies chroniques spécifiques (telles que la maladie de Parkinson ou la démence précoce). 90 % du coût pris en charge Le système d’assurance dépendance japonais est donc remarquable. D’abord par sa générosité, en ayant adopté une définition très large de la perte d’autonomie, bien plus large qu’en Allemagne ou en Corée par exemple. Et en prenant en charge 90 % du coût de la dépendance, le reste étant à la charge des ménages. Et lorsqu’une personne est admise en institution, l’assurance couvre partiellement les frais de séjour, selon le contrat d’assurance et la capacité contributive des individus. La couverture financière est donc très généreuse. Ensuite, en orientant davantage les patients vers une prise en charge à domicile. C’est au Japon que la proportion de personnes dépendantes restant à domicile est la plus élevée : 76 % des personnes dépendantes couvertes par

DR

Par Francesca Colombo, analyste senior des politiques de santé, OCDE

l’assurance font appel à des prestataires de soins à domicile, contre 68 % pour la moyenne des pays de l’OCDE. De plus, depuis 2009 un système de services de prévention a été mis en place pour les personnes ayant une dépendance faible. Ce nouveau système, organisé dans des centres d’accueil de jour, se décompose en de nombreux dispositifs de prévention tels que des conseils nutritionnels, des programmes de renforcement musculaire ou de prévention à la santé mentale. Des aides précoces qui permettent de maintenir les personnes faiblement dépendantes en bonne santé. Autre caractéristique du système japonais : s’il répartit l’effort financier entre les générations, il protège les plus jeunes, en dispensant les moins de 40 ans de payer pour les plus vieux. Quant aux retraités, ils doivent eux aussi, contrairement au système allemand, s’acquitter de cotisations sociales proportionnelles à leur pension de retraite. Enfin et surtout, l’un des aspects les plus remarquables du système japonais est qu’il est parvenu, malgré sa générosité, à contenir les dépenses de soins de longue durée à des niveaux inférieurs à ceux des autres systèmes publics …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 93


ANALYSE Dossier

Au Japon, les plus de 80 ans représentaient 6 % de la population en 2010, une proportion qui devrait atteindre les 16 % en 2050.

LA PRISE EN CHARGE « MADE IN JAPAN »,

UN MODÈLE POUR L’OCDE Par Francesca Colombo

que ceux des pays nordiques). En 2011, ces dépenses représentaient au Japon, comme en France, 1,8 % du PIB, soit un niveau seulement légèrement supérieur à la moyenne de 1,6 % des pays de l’OCDE, qui s’élève à environ 1,6 % du PIB, et très inférieur au niveau constaté en Suède (3,6 %) comme aux PaysBas (3,7 %). L’efficacité du contrôle des prix des soins, mais aussi de la rémunération des prestataires, ainsi que la dérégulation du marché visant à accroître la concurrence, ont réussi à limiter la croissance des dépenses et à tirer le coût des soins vers le bas. Sans oublier que le dispositif de prévention permet d’orienter la plupart des ressources vers les personnes dépendantes ayant les besoins les plus lourds. Indicateurs et normes de qualité à développer Bien sûr, tout n’est pas parfait. Le système public d’assurance dépendance souffre de certaines carences majeures, en particulier du côté du personnel employé. Si dans certains pays de l’OCDE, les travailleurs étrangers assurent un rôle important en occupant des postes vacants, leur nombre est restreint au Japon en raison d’une politique migratoire très restrictive. C’est un défi de taille pour Tokyo dans la mesure où l’on estime qu’en 2050, seulement une personne sur deux sera en âge de travailler au Japon. Aussi, il sera encore plus difficile de recruter du personnel pour les soins de longue durée, ce qui ne manquera pas de tirer

SAIGO-JONES/SINOPIX-RÉA

… d’assurance dépendance (tels

« Autre caractéristique du système japonais : s’il répartit l’effort financier entre les générations, il protège les plus jeunes, en dispensant les moins de 40 ans de payer pour les plus vieux. »

les salaires vers le haut. Autre défi, la qualité des services de santé de longue durée. À ce jour, elle est assurée au travers d’une politique de gestion du personnel et une régulation de la formation du personnel soignant. Toutefois, et contrairement à d’autres pays de l’OCDE tels que les États-Unis, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, l’Allemagne ou encore la Finlande, le Japon n’a pas suffisamment développé ses indicateurs et normes de qualité des soins. Il doit donc entamer

94 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

une démarche en ce sens. Enfin, autre faille du système japonais, sa politique de soutien aux aidants familiaux. Si certains pays de l’OCDE ont instauré des dispositifs de soutien très variés tels que des structures de répit, la mise en place des congés spécifiques et de prestations en espèces versées aux aidants, le Japon ne laisse que très peu de place aux politiques de soutien aux aidants informels. Tout se passe comme si l’assurance publique dépendance suffisait à satisfaire

l’ensemble des besoins de soins. Or, au Japon comme dans les autres pays de l’OCDE, l’aide informelle représente un pilier incontournable de la prise en charge de la dépendance. Les pays européens ont donc beaucoup à apprendre de l’expérience japonaise. La place accordée à la prévention, qui permet de limiter les dépenses de soins de longue durée, et la politique de strict contrôle des prix sont autant d’atouts qui font du modèle japonais un exemple. Exemple toutefois perfectible : face à une demande croissante et devant la complexité des besoins physiques et cognitifs d’une population vieillissante, le Japon doit moderniser son système de suivi et de contrôle de la qualité des soins. Sans oublier, c’est une priorité, d’améliorer sa gestion du personnel.


Dossier ANALYSE

DÉPENDANCE Un marché extrêmement encadré Dans chaque ville japonaise, le degré de dépendance des personnes est d’abord évalué et classé par un médecin et un comité local de spécialistes, sur une échelle comportant habituellement cinq niveaux. Lorsqu’elle a découvert, au printemps, que sa mère, qui vivait depuis plusieurs années avec sa famille, était atteinte de la maladie d’Alzheimer, madame Yasuda a dû se résoudre à envisager un recours à une aide extérieure. « Très vite, nous avons compris que nous ne pourrions pas nous permettre de financer un séjour permanent dans une maison de retraite privée », confie cette secrétaire de direction. Comme la plupart des autres Japonais, elle s’est donc tournée vers sa mairie, dans une cité de la banlieue de Tokyo, qui se retrouve, comme les autres collectivités de l’archipel, au centre de la nouvelle stratégie de gestion de la dépendance. Depuis l’application d’une nouvelle loi sur la dépendance en 2000, les familles sont accompagnées, dans leur municipalité, par un care manager ou « gestionnaire de soins », qui leur présente les différentes options locales de prise en charge. « Auparavant, les fournisseurs des services étaient limités aux communes, aux personnes mora les d’assistance sociale ou aux personnels médicaux

délégués par l’administration. Désormais, la loi assure le libre choix de services aux personnes âgées dépendantes », explique Yojiro Shibata, un spécialiste du secteur, professeur de droit à l’université Chukyo. ACCUEIL À LA JOURNÉE Dans chaque ville, la gravité de la dépendance des personnes est d’abord évaluée et classée, par un médecin et un comité local de spécialistes, sur une échelle comportant habituellement cinq niveaux. Un plan de prise en charge est ensuite établi. Il comprend une éventuelle entrée dans une maison de retraite, pour un séjour court ou long, ou l’installation d’équipements à la maison, le passage régulier de personnes donnant le bain, préparant les repas ou accompagnant des exercices physiques. Les accueils à la journée dans des services spécialisés, avant un retour en soirée à son domicile, sont aussi très souvent proposés. Les prestataires de services, publics comme privés, sont ensuite contactés et une facture mensuelle de soins est

établie avec le care manager, en suivant une grille tarifaire déterminée localement avec tous les services ou entreprises accrédités. Dans la ville de Yokohama, une aide à la toilette est par exemple facturée, en moyenne, 1 355 yens, soit 10 euros. L’ensemble de ces dépenses est remboursé à hauteur de 90 % et les 10 % restants sont à la charge du patient. Également planifiés avec le gestionnaire de soins, les travaux nécessaires à l’aménagement de son domicile – qui sont systématiquement encouragés pour éviter au maximum les prises en charge totales dans des maisons de retraite – sont aussi remboursés à hauteur de 90 % s’ils sont effectués par des sociétés se trouvant sur des listes validées par la mairie. PRÉLÈVEMENT SUR LES SALAIRES ET PENSIONS Pour financer ces prestations, le gouvernement prélève, sur les salaires de toutes les personnes de plus de 40 ans, mais aussi sur les pensions de retraite des plus de 65 ans, une cotisation servant à financer

une assurance dépendance. Cette assurance bénéficie à toutes les personnes de plus de 65 ans mais peut aussi être mobilisée par les personnes âgées entre 40 et 64 ans qui seraient prématurément touchées par une maladie liée au vieillissement. Ces cotisations doivent, en théorie, couvrir la moitié des dépenses du régime d’assurance dépendance quand le reste du financement est assuré par des versements des différents échelons des pouvoirs publics. L’État central alimente à hauteur de 25 % cette caisse dépendance, le gouvernement de la préfecture en finance 12,5 % et la mairie, les 12,5 % complémentaires. Mais le déséquilibre démographique du pays va contraindre, dans les prochaines années, l’État japonais à augmenter progressivement sa part et à se dégager de nouvelles sources de financement. Il devra aussi aider à la formation de davantage de personnel de soins pour répondre aux pénuries de main-d’œuvre annoncées dans ce secteur. Serge Sargasse, à Tokyo

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 95


ANALYSE Dossier

OUVERTURE GÉRARD GUITTOT/RÉA

DES DONNÉES SUISSE LE « BIG DATA » AU SERVICE DE L’INTÉRÊT GÉNÉRAL

A

vant même Google et nos bonnes vieilles banques, les administrations du monde entier possédaient un trésor insoupçonné et fort peu exploité : des données sur les citoyens aussi nombreuses que variées, aussi précises qu’anciennes. Bien qu’elles restent souvent inaccessibles ou inabordables pour la majorité des gens, ces données sont en train de devenir l’un des biens publics les plus précieux : le big data, au service de l’intérêt général. Permettre que ces données soient publiées et réutilisées, c’est découvrir un impor-

tant potentiel d’amélioration de la transparence de l’administration, pour à la fois améliorer son efficience, son rapport qualité-coût et ouvrir un nouveau champ de création de valeur, un monde d’initiatives publiques et privées. Cette conviction a donné naissance à deux mouvements de la société civile en faveur de l’ouverture de ces données : le premier, qui milite en faveur de l’accès simple à ces données, le revendique au nom de la transparence, de la responsabilisation et de l’autonomisation du citoyen érigé en vigie de l’élu. Le second,

96 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

qui prône l’open government data, va plus loin : il prétend ainsi favoriser une société plus inclusive et plus participative, où l’accès aux données publiques transforme à terme le rapport du citoyen à l’État ou à ses émanations. Et où ce nouveau rapport devient source de valeur économique par l’émergence de nouvelles initiatives. Au moment où toutes les grandes démocraties cherchent à réinventer cette relation, l’open data devient plus qu’un outil informatique : un levier de transformation de la société. C’est bien cette conviction-là qui se répand au


Dossier ANALYSE

UN MODÈLE D’OUVERTURE DR

COMMUN À TOUTES LES ADMINISTRATIONS Par Barbara Ubaldi, cheffe de projet « e-gouvernement » à l’OCDE* Pour la Suisse, la publication des données produites et traitées par l’administration est déjà une tradition. Le gouvernement fédéral et les cantons n’ont donc pas attendu l’émergence de mouvements de la société civile qui militent pour un meilleur accès public aux données et aux informations gouvernementales. Leur publication fait déjà depuis longtemps partie des tâches principales de plusieurs offices, tels que les Archives fédérales suisses (AFS), l’Office fédéral de la statistique (OFS), Swisstopo, le centre de cartes géographiques de la confédération, ou MétéoSuisse. De même en est-il de l’administration territoriale. Les cantons, les villes et les communes mettent aussi des données à la disposition du public dans le cadre de l’exécution de leurs tâches administratives. Le pli est donc pris. Mais le gouvernement entend aller plus loin et veut établir une véritable stratégie d’ouverture

des donnés, basée sur le mouvement « Open government data », alias OGD. Ce mouvement, qui s’est renforcé dans tous les grands pays ces dernières années, vise à favoriser l’accès aux données publiques pour améliorer la qualité et l’efficacité des services publics. Mais son objectif est plus large encore : en permettant à chacun l’accès et la réutilisation des données publiques, cette stratégie entend inclure davantage le citoyen dans une démocratie fonctionnant sur un mode plus participatif. Enfin, elle vise à permettre la création de nouveaux services, créer de nouvelles opportunités commerciales au service de la croissance. Une stratégie ambitieuse donc, au service de trois objectifs : satisfaction de l’usager des services publics, amélioration du contrôle des élus pour une meilleure participation des citoyens à la vie publique, soutien de la croissance économique enfin, par la création

cœur de toutes les grandes démocraties. Ces dernières années, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, la Corée, le Mexique et la France ont pris des mesures visant à exploiter ce potentiel. Pour accélérer le mouvement, les membres du G8 ont également signé en juin 2013 une « Charte pour l’ouverture des données publiques ». Pourtant, toutes ces démocraties ne vont pas au même rythme : il y a les pionniers – en tête, les États-Unis, le Royaume-Uni, et même plus inattendue, l’Espagne –, qui avancent sans réelle méthode

de nouvelles opportunités. On comprend qu’une telle stratégie exige beaucoup plus qu’une mise à disposition technique. Ouvrir les données, c’est les rendre accessibles à tous. En d’autres termes, téléchargeables par tous et partout, susceptibles d’être utilisées, réutilisées et rediffusées sans frais. Et ce quel que soit l’objectif de cette utilisation. L’aspect technique n’est pas la question centrale d’un bon système d’open data. C’est plutôt la manière dont l’ouverture est menée qui en fera le succès. Aussi, pour clarifier sa stratégie d’open government data, le gouvernement fédéral a-t-il défini une feuille de route à la cyberadministration. En décembre 2011, le Conseil national [la chambre basse du parlement suisse, ndlr] publiait le « Wasserfallen 11.3884 », un document officiel posant comme priorité stratégique le libre accès aux données publiques,

ni coordination. Tous les pays non plus ne poursuivent pas les mêmes objectifs avec la même intensité : entre bonne gouvernance, ambitions économiques et visées sociales, chaque pays place son curseur là où son histoire et sa sensibilité le conduisent. Tous enfin ne suivent pas les mêmes méthodes de mise à disposition des données. Sans être pionnière ni véritablement audacieuse dans son ouverture – ce qui est sans surprise au pays du secret bancaire –, la Suisse a ceci d’intéressant qu’elle ouvre de façon systématique et coordonnée l’ensemble de ces données. Un cas d’école en somme. V. S.

« L’aspect technique n’est pas la question centrale d’un bon système d’open data. C’est plutôt la manière dont l’ouverture est menée qui en fera le succès. » et chargeait le Conseil fédéral [l’organe exécutif, ndlr] de répondre à plusieurs questions de fond sur les OGD et de faire un état des lieux de la question. Le 4 avril 2012, le comité de pilotage de la cyberadministration suisse intégrait le projet « B2.12 Open Government Data » dans le catalogue des projets prioritaires, le but étant, dans un premier temps, de créer les bases du modèle OGD en Suisse et de mener des expérimentations à travers des projets pilotes. Coordination des acteurs L’accent est vite mis sur une stratégie d’ensemble, liant clairement les moyens et les objectifs, la philosophie générale et les différents niveaux de gouvernement, en créant des synergies entre eux. D’où l’importance aussi d’une « stratégie de gestion de l’information et des données publiques », essentielle pour assurer que les systèmes ont des fonctionnalités intégrées permettant la diffusion des données ouvertes sans effort ou investissement supplémentaire. Voilà pourquoi le gouvernement suisse a jugé nécessaire de développer une approche particulière de mise en œuvre de la stratégie d’open government …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 97


ANALYSE Dossier

UN MODÈLE D’OUVERTURE COMMUN

À TOUTES LES ADMINISTRATIONS Par Barbara Ubaldi

approche qui consiste à appliquer à toutes les administrations et à tous les échelons de l’État un modèle commun d’ouverture des données. Pour assurer la coordination des acteurs, le Conseil fédéral a chargé l’Unité de pilotage informatique de la confédération (Upic), en collaboration avec les Archives fédérales suisses, de définir la stratégie d’ouverture des données et d’en assurer la mise en œuvre, de continuer à exploiter le projet pilote existant (OGD@Confédération) en vue de sa transformation en 2014 en portail national et d’accélérer les travaux de normalisation. De plus, il est prévu de créer un service spécialisé en OGD, doté de compétences et de ressources suffisantes et vraisemblablement gérées conjointement par l’Upic et les AFS. Impact financier Ainsi, toutes les émanations de l’État sont-elles tenues, pour l’ouverture de leurs données, de mettre en œuvre les mêmes actions au même moment afin d’assurer une coordination parfaite entre tous les niveaux de gouvernement : même standard, même méthode, même choix de données à ouvrir en priorité. Avec quelques objectifs intermédiaires clés : créer un portail national d’accès à toutes les données publiques, concevoir des normes de préparation des données, éliminer les disparités des dispositifs d’utilisation en fonction des différents services et trouver un mode de financement de la mise à disposition des données transposable à tous les services.

FOTOLIA

… data sur des bases claires. Une

Toutes les administrations de l’État helvétique sont tenues de mettre en œuvre simultanément des actions identiques en matière d’ouverture des données.

« L’avantage est de faire avancer toute l’administration à la même vitesse, et ainsi de pouvoir interconnecter plus rapidement et plus efficacement les bases de données. » L’avantage de la méthode est de faire avancer toute l’administration à la même vitesse, et ainsi de pouvoir interconnecter plus rapidement et plus efficacement les bases de données entre elles. Et c’est cette interconnection qui permettra de tirer plus de valeur ajoutée de l’ouverture des données. En septembre dernier, un rapport était publié sur l’état des lieux et les premières expérimentations, qui sert de base au développement de l’open data en Suisse. Parmi les nombreuses conclusions du rapport, l’analyse relative aux risques de l’ouverture des données. Le rapport conclut qu’il n’y a pas de risque majeur pour justifier une opposition au développement des open government data. Ce sont les autorités compétentes qui sont les mieux placées pour juger si certaines données peuvent être publiées ou non, et en attendant, l’administration devra définir et prendre des mesures

98 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

préventives de protection des données. Ainsi, la Suisse reconnaît-elle que le modèle fondé sur l’OGD présente un risque en termes de sécurité des données : bien qu’elles soient anonymisées, les données en libre accès pourraient par recoupement être associées à des personnes identifiées. Enfin, les droits d’utilisation des données publiques et les licences devront être définis au niveau fédéral et appliqués uniformément par toutes les administrations. Autre question à laquelle la Suisse se montre très attentive : la dimension financière de l’ouverture des données. Actuellement, l’administration fédérale suisse a un régime en place déterminant un prix moyen de chargement basé sur le principe de l’avantage économique et le principe de couverture des coûts. Le passage à un régime de coût marginal impliquerait que l’administration fédérale suisse renoncerait aux

chiffres d’affaires annuels qui viennent aujourd’hui de la vente des données. Idéalement, la perte des revenus due à l’introduction de l’OGD devrait être inférieure au chiffre d’affaires généré par les impôts et aux bénéfices économiques. Selon une étude récente sur l’impact économique de l’OGD, celui-ci serait de l’ordre de 0,9 à 1,2 milliard de francs suisses (de 730 à 975 millions d’euros)… sans tenir compte de la perte de revenus actuels liés à la vente de données. En mettant ensemble revenus, recettes fiscales, gains d’efficacité et coûts de commutation des données dans un format ouvert, il y aurait un bénéfice net annuel de 2,9 à 20,3 millions de francs suisses sur trois ans pour l’administration fédérale suisse. Un petit bénéfice économique donc. Ce qui fait de la décision d’aller de plain-pied dans l’open government data une décision d’abord politique. C’est pourquoi adopter la bonne stratégie, assurer la coordination des acteurs et la participation des cantons et des communes pour garantir le « buy-in », et relier l’approche stratégique à la création de valeur sont actuellement les priorités. *auteure de « Open government data, towards empirical analysis of open government data initiatives » (OCDE, mai 2013)



ANALYSE Dossier

PHOTONONSTOP

ACCÈS AU LOGEMENT HONG KONG LE LOGEMENT SOCIAL AU SERVICE DE L’ÉCONOMIE

V

ous êtes bac + 5, faites une carrière honorable et vous ne pouvez pas vous loger à Paris avec vos deux enfants ? De part et d’autre d’une frontière, un même revenu pourra assurer ici une vie tranquille et décente, là une vie harassante, faite de déplacements chronophages et du sentiment de ne pas joindre les deux bouts. Tout dépend du prix de l’immobilier, qui change l’appréciation d’une situation et constitue une composante clé de la compétitivité d’une économie.

À la politique de logement social d’effacer ces différences et d’assurer un habitat décent à ceux qui ne peuvent s’offrir les prix du marché. Bien que la France ait un parc locatif social parmi les plus importants d’Europe avec 4,5 millions de logements, soit 20 % de l’ensemble du parc, l’accès au logement social reste un privilège : il pâtit d’une inadéquation de l’offre à la demande, d’une définition trop large du public pouvant y prétendre (les deux tiers des Français) en raison d’un

100 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

plafond de revenus trop élevé, et de la faible transparence des attributions. Des vices devenus criants avec la création, en 2007, du droit au logement opposable (Dalo), généralisé en 2012. Ce sont ces travers qu’à une époque, le gouvernement de la colonie britannique Hong Kong a voulu éviter, tout en répondant aux besoins changeants du territoire. Car ce qui est fascinant dans cette politique de logement social, c’est comment elle a changé


Dossier ANALYSE

LA PIERRE ANGULAIRE Par Duncan Pescod, secrétaire d’État aux Transports et au Logement du gouvernement de Hong Kong Année 1953. Hong Kong venait de célébrer le couronnement de la reine Elizabeth II, et sortait tout juste d’une année de typhons et de glissements de terrain. Le soir de Noël, un incendie ravageur dans la zone de squatters de Kowloon, Shek Kip Mei jeta à la rue plus de 50 000 personnes. L’incendie à peine éteint, il devint évident qu’il fallait intégralement repenser le logement des plus démunis. On construisit rapidement 8 campements pour les victimes. Mais il fallait aller au-delà : le gouvernement se lança dans un programme de logements sociaux qui devint l’un des plus ambitieux au monde. C’est la Hong Kong Housing Authority (HKHA) qui, depuis 1973, met en œuvre l’essentiel des programmes de logements sociaux. Plus de 3,3 millions de personnes, soit 46 % de la population, vivent en logements sociaux ou en logements subventionnés

à l’achat. Là-dessus, plus de 2 millions de personnes, soit un tiers de la population, louent leur logement, tandis que plus d’1 million vivent dans des appartements dont elles sont devenues propriétaires avec l’aide financière de l’État. Créée par ordonnance en 1973, la HKHA jouit depuis ses débuts d’une véritable autonomie juridique et a acquis son autonomie financière en 1988 : si ses fonds propres initiaux lui ont été fournis par l’État, elle s’autofinance depuis. En clair, les investissements massifs réalisés depuis vingt-cinq ans, qui s’élèvent à environ 5 % du total des dépenses publiques de Hong Kong, ont été intégralement autofinancés. L’objectif de cette politique publique est clair : fournir un logement décent aux familles aux revenus modestes, qui ne peuvent s’offrir un loyer au prix du marché. Pour la construction de logements sociaux destinés à

de visage : depuis soixante ans, elle n’a cessé de renouveler sa vocation, s’adaptant en temps réel à la mutation du territoire, aux à-coups de la conjoncture et aux transformations de sa population. Conçue à l’origine pour offrir un simple abri aux plus pauvres fuyant les rigueurs du communisme, alors fort nombreux, elle a favorisé l’émergence d’une classe moyenne, maind’œuvre qualifiée indispensable au bon fonctionnement d’une plate-forme commerciale

la location, le foncier est fourni gratuitement par le gouvernement. Un programme de construction de logements sociaux détermine la planification, la construction et l’allocation des ressources. Dans le plan actuellement en cours, allant des années 2012-2013 à 2016-2017, il est prévu de construire 79 000 appartements destinés à la location. Et pour le plan 2017-2018 à 2021-2022, le foncier a déjà été gelé pour la construction d’au moins 100 000 nouveaux appartements. Loyers indexés aux revenus L’attribution des logements aux familles inscrites sur la liste d’attente se fait de façon équitable, en tenant compte des priorités exprimées par les candidats, de la taille de la famille et de son choix de localisation. Les candidats doivent répondre aux critères d’éligibilité, leurs revenus et leur

ultracompétitive, pour ensuite répondre à l’aspiration montante de celle-ci à devenir propriétaire. Ce qui a guidé ce souci constant d’adaptation, c’est l’exigence de cohérence entre l’objectif économique, la croissance du territoire et une vraie vision sociale au service de cet objectif. Une cohérence assurée par une puissante planification… au pays du capitalisme triomphant, tout à la fois son paradoxe et sa force. C’est en cela que la leçon de Hong Kong est intéressante pour nous. V. S.

DR

DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE « Au fil des ans, la politique de logements sociaux est devenue l’un des fondements de la stabilité et de la prospérité de Hong Kong. » patrimoine ne pouvant dépasser les limites prescrites. Les loyers, toutes charges comprises, des logements sociaux sont fixés à des niveaux très accessibles : actuellement, le loyer mensuel va de 287 dollars de Hong Kong (HK$), soit 27,30 euros, à 3 877 HK$, soit 369 euros. Et le loyer mensuel moyen est de 1 540 HK$, soit 146,70 euros. Des loyers qui font l’objet d’une révision tous les deux ans, à la hausse ou à la baisse, selon les changements intervenus dans les revenus du foyer. En cas de difficultés financières temporaires, un système d’aide au versement du loyer est même activé. Pour garantir l’utilisation rationnelle des ressources du logement social, les locataires installés depuis au moins dix ans doivent faire une nouvelle déclaration de revenus tous les deux ans. Si leurs revenus dépassent le plafond, elles devront payer 1,5 à 2 fois leur loyer. Ceux qui choisissent de ne pas déclarer leurs revenus subissent un doublement automatique de leur loyer. Mais ils devront, deux ans plus tard, déclarer le montant de leur patrimoine. Ceux qui s’y refusent devront, …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 101


ANALYSE Dossier

LA PIERRE ANGULAIRE DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE Par Duncan Pescod

appartement. Pour répondre à la pression de la demande, le gouvernement a accéléré la construction et accru le volume de logements sociaux. La HKHA n’a cessé de rationaliser la construction, en adoptant la technologie du préfabriqué, sans compromettre la qualité ni la sécurité du logement, ce qui a permis de réduire le temps de construction dans les zones sans risques de sept à cinq ans. Et elle explore tous les terrains sur le territoire pour optimiser l’utilisation du foncier, maximiser sa rentabilité et sa durabilité. Lorsque la planification et les infrastructures le permettent, la HKHA cherche auprès du gouvernement à obtenir des assouplissements des plans d’urbanisme et à lever les limitations de hauteur. Enfin, elle réévalue ses logements déjà anciens pour en améliorer l’efficacité. Vente subventionnée À ses débuts, la politique de logements sociaux visait à loger les plus modestes. Avec la croissance des années 1970, de plus en plus de Hongkongais purent gagner des revenus stables et accumuler de l’épargne. Aussi, beaucoup aspirèrent à devenir propriétaires de leur logement. En 1976, le gouvernement forma un groupe de travail pour mettre en œuvre un programme d’accession à la propriété. Un premier lot de 8 373 logements fut mis en vente en 1978. Par la suite, d’autres programmes furent lancés pour répondre à la

MICHAEL WOLF/LAIF-RÉA

… sans attendre, rendre leur

À Hong Kong, la construction de logements sociaux fait l’objet d’une planification quinquennale. Pour la période 2012-2017, le programme prévoit 79 000 nouveaux appartements destinés à la location.

« Pour la construction de logements sociaux destinés à la location, le foncier est fourni gratuitement par le gouvernement. » demande, y compris des ventes aux occupants des logements en location. Depuis 1978, 467 800 appartements ont été vendus à des ménages à revenus faibles ou intermédiaires à un prix largement subventionné par l’État. En 1997, le marché immobilier connut une crise aiguë. Les prix du marché s’effondrant, la différence avec les prix des logements subventionnés à l’achat se rétrécit. Aussi, en 2000, le gouvernement opéra une réduction de son programme de ventes et y mit un terme en 2002, seuls les occupants pouvant encore choisir d’acheter l’appartement qu’ils louaient. Cela permit à la HKHA d’allouer toutes ses ressources à la location de logements sociaux. Mais avec la forte croissance et la flambée des prix immobiliers depuis 2003, les appels à relancer ce programme de vente subventionnée se firent plus nombreux. Aussi en 2011,

102 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

le gouvernement décida de relancer cette politique et en chargea naturellement la HKHA. Depuis deux ans, cette politique de vente subventionnée est donc redevenue l’un des axes forts de notre politique du logement. Dans le plan en cours, quelque 17 000 nouveaux appartements seront mis en vente dans les quatre années à compter de 2016-2017. Et, par la suite, il est prévu que soient construits en moyenne 5 000 appartements par an. Le prix des appartements est fixé en appliquant une décote sur les prix du marché, décote liée à la capacité contributive des foyers, définie au sein de certaines limites. Pour être éligibles, les ménages doivent être déjà locataires d’un logement social, sur une liste d’attente ou être, en termes de revenus et de patrimoine, dans les limites déjà citées. Et la revente de ces appartements subventionnés n’est possible qu’à certaines conditions très strictes.

Au fil des ans, la politique de logements sociaux est devenue l’un des fondements de la stabilité et de la prospérité de Hong Kong. Prévue à l’origine pour offrir un simple abri aux plus démunis, cette politique a évolué dans ses ambitions pour fournir aux habitants de Hong Kong un logement stable et abordable leur permettant de vivre dignement tout en réalisant leurs rêves. Stratégie à long terme Ce programme n’a pas seulement amélioré le cadre de vie de millions d’habitants, il a été le tremplin de leur ascension sociale et a changé le visage de Hong Kong. Car ces programmes massifs de logements sociaux ont déclenché le lancement de nouvelles infrastructures, lesquelles ont contribué à accélérer la croissance économique du territoire. C’est pourquoi cette politique de logement, visant à fournir des logements de qualité et à un prix abordable à ceux qui ont en besoin, fait intégralement partie de la stratégie à long terme de Hong Kong. Elle constitue même le prochain chapitre d’une histoire dont les Hongkongais sont si fiers.


ANALYTICS

Exploitez les big data : l’une des clés pour renforcer l’efficacité des politiques publiques Exploiter les big data pour maîtriser les dépenses publiques, améliorer la qualité du service rendu à l’usager et lutter contre la fraude

www.sas.com/france/public

SAS et tout autre nom de produit et de service SAS Institue Inc. sont des marques déposées de SAS Institu Inc. pour les USA et tout les autres pays. Indique un dépôt aux USA. Les autres marques et nom de produits sont des marques déposées de leurs entreprises respectives. Copyright © 2013 SAS Institute Inc. Tous droits réservés.


ANALYSE Dossier

ET DEMAIN, RÉINVENTER L’ÉTAT

FOTOLIA

L’ÉTAT ET LES CITOYENS :

UNE NOUVELLE HISTOIRE

E

n politique publique comme en politique tout court, il y a les mots d’un jour comme les slogans d’une campagne. Et parfois, il y a des idées, de celles qui mobilisent les initiatives, réveillent les utopies, catalysent les énergies. La « Big Society » de David Cameron fut de celles-là : slogan d’un jour, puis moteur d’une transformation de l’État à marche forcée dans un moment de déficit public abyssal. Même si ses premiers effets sont regardés avec méfiance ou ironie de l’autre côté de la Manche. Et si, dans la coalition qui règne sur Londres, personne n’ose plus s’en réclamer. Reste la question de fond : la Big Society peutelle être source d’inspiration pour la France de François Hollande ? Portant sur une politique promue par des Tories (conservateurs), qui

n’osent même plus la revendiquer comme telle, la question ne manque pas de piquant. Mais peut-être mérite-t-elle d’être regardée au-delà du clivage partisan. En témoignent la manière dont certains travaillistes sont en train de se la réapproprier au Royaume-Uni et la popularité que rencontra, ici même en 2007, la « démocratie participative » promue par la candidate Ségolène Royal. Car dans nos pays qui croulent sous la dette publique et recherchent désespérément la sortie de secours pour les générations futures, toute nouvelle voie doit être explorée. Surtout lorsque cette voie s’appuie sur un mouvement de fond de nos sociétés : une société civile de plus en plus dynamique qui aspire à être davantage consultée, mais aussi plus active dans la gestion de la cité. Car il ne

104 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

s’agit pas seulement de transférer des services sur le citoyen pour réduire les coûts. Face à des gouvernements qui ont essuyé beaucoup d’échecs, le citoyen ne veut plus être passif. Il entend participer. Et ceci est vrai dans toute l’Europe, quelle que soit la nature du régime : dans un discours récent à l’occasion de la présentation du budget 2014, le roi WillemAlexander des Pays-Bas a défendu « une société de participation », destinée à remplacer « l’État Providence classique de la deuxième moitié du XXe siècle ». Il a même exhorté le citoyen à « prendre ses responsabilités pour sa propre vie et celle de son entourage ». Dans toutes les langues et sous toutes les cultures, les dirigeants ne disent pas autre chose que ce qu’avait lâché, en 1999, le Premier ministre Lionel Jospin aux syndicalistes de Michelin : « l’État ne peut pas tout. » Une réponse inaudible si elle n’est accompagnée d’une réforme du mode d’intervention de l’État. C’est bien ce qu’ont compris David Cameron et d’autres dirigeants européens. En somme, nous n’avons d’autre choix que de réinventer l’État. V. S.


Dossier ANALYSE

ÉTAT, MODE D’EMPLOI Par Eudoxe Denis, responsable des études à l’Institut de l’entreprise Élu en 2010 sur le concept de « Big Society », David Cameron entendait transformer radicalement les rapports entre l’État et la société civile et réformer les services publics en s’appuyant sur les citoyens eux-mêmes. Une promesse née du constat que le dérapage des dépenses publiques sous ses prédécesseurs ne s’était pas accompagné d’une plus grande satisfaction des usagers, que la dépendance accrue des individus vis-à-vis de l’aide sociale n’avait réduit ni les inégalités ni la pauvreté et que la réforme permanente de l’État n’avait pas amélioré la productivité de la sphère publique, et qu’elle avait même contribué à bureaucratiser ses interventions. En clair, c’était le modus operandi de l’État qu’il fallait intégralement repenser. Au-delà des observations, une conviction forte : si la réforme du service public menée par le New Labour a été perçue comme contre-productive, démoralisante et autoritaire par les citoyens, c’est qu’elle s’est révélée incapable de prendre en compte la société civile. En bref, ce « troisième secteur », ni étatique ni marchand, qui recouvre tout à la fois les familles, les « communautés », les associations, les fondations, les églises. Le sujet n’est plus seulement de réconcilier l’État et le marché comme le promettait le New Labour, mais de promouvoir la participation de la société aux services publics. Une promotion qui ne se fait pas sans l’État, bien

au contraire. Il doit jouer un rôle actif, en se posant en catalyseur des initiatives sociales : « We must use the state to remake society »*, répétait à l’envi le promoteur en chef de la Big Society, David Cameron. Alors, comment ? Trois grands principes ont guidé le programme du Premier ministre britannique : primo, la décentralisation. Le pouvoir doit s’exercer au plus près du citoyen, tout en étant limité dans son ambition et modeste dans l’exercice de son autorité. Secundo, la participation. Le citoyen n’est plus cet usager passif que l’État doit servir, il doit s’impliquer et contrôler la manière dont le service est rendu, gage de son amélioration. Tertio, l’ouverture et le partenariat : faciliter l’accès aux marchés publics pour permettre à la société civile de fournir certains services publics encore monopolisés par l’État. Décentralisation, participation, ouverture Les principes étant posés, comment ont-ils été mis en œuvre ? Dans les services publics, l’État a délégué la prestation, en se limitant à sélectionner les prestataires de service, tout en les régulant. Pour favoriser l’innovation, il garantit l’égalité d’accès au marché à tous les acteurs, quel que soit leur statut. Par exemple, sur le service de l’accompagnement des chômeurs vers l’emploi, le Work Programme, opérationnel depuis avril 2011, rémunère les prestataires sur le résultat. Avec

un objectif double : améliorer le retour à l’emploi des chômeurs, tout en réalisant des économies. Sans oublier le transfert de risque de l’État au prestataire, lequel n’est rémunéré que s’il parvient à trouver un emploi au chômeur dont il a la charge. Autres exemples, plus régaliens. La justice d’abord : le suivi des personnes en conditionnelle est lui aussi externalisé et payé au résultat. Mais c’est sur l’école que l’innovation de la Big Society est allée le plus loin : s’inspirant de la Suède, le gouvernement a introduit des free schools. Des groupes de parents d’élèves, des universités, des associations caritatives ou religieuses peuvent être candidats auprès du ministère de l’Éducation pour établir une école, un collège ou un lycée. Attention, contrairement à la Suède, le secteur lucratif est exclu de cette ouverture. Si le dossier est accepté, l’école bénéficie du financement par l’État, tout en restant en dehors du contrôle de l’autorité locale en matière d’éducation. Elle est ainsi dotée d’une autonomie considérable de fonctionnement, de programme, de recrutement du personnel administratif et enseignant, de rythmes scolaires, etc. Autre champ d’application de la Big Society, la décentralisation. Fin 2011, le Localism Act est voté pour donner certains leviers à la communauté, le community empowerment. Là est le cœur de la philosophie, proche cousine de la démocratie participative. Une communauté de quartiers peut désormais

DR

LES PROMESSES DE LA « BIG SOCIETY » « Un véritable marché de l’investissement social prend corps. » gérer certains services locaux ou participer à la décision sur des sujets de portée locale ; outre l’élection au suffrage universel direct du maire dans les grandes villes, ces communautés ont désormais un droit de veto sur les décisions des autorités locales en matière d’impôt, peuvent demander des référendums d’initiative locale, participer directement aux décisions d’urbanisme ou encore préempter des achats de locaux. Acteurs associatifs ou privés Pour que la société civile puisse se mobiliser, la Big Society a prévu de lui apporter une aide financière. Déjà en 2010, un projet pilote de Social Impact Bond autour de la prison de Peterborough visait à apporter le soutien financier d’investisseurs privés à des associations à but non lucratif, spécialisées dans l’assistance aux délinquants condamnés à des peines de prison courtes (douze mois maximum). Avec un objectif quantitatif : diminuer de 7,5 % ou plus le taux de récidive des 3 000 prisonniers pris en charge. En cas de réussite, l’État s’engageait à reverser aux investisseurs jusqu’à 13 % des économies liées à la diminution du taux de récidive. En avril 2012, le gouvernement va plus loin en généralisant l’approche : une Big Society Capital, dotée de 600 millions …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 105


ANALYSE Dossier

ÉTAT, MODE D’EMPLOI LES PROMESSES DE LA « BIG SOCIETY » ANDREW PARSONS/ZUMA/RÉA

Par Eudoxe Denis

… de livres, spécialisée dans le financement des acteurs émanant de la société civile, est créée. On voit par là que dans la Big Society, le transfert de la fonction étatique se fait tantôt vers des acteurs associatifs à but non lucratif, tantôt vers des acteurs privés, en fonction de leur capacité à fournir un bien public, strictement défini par l’État. Et à produire un résultat : aussi les subventions données sans condition aux associations ont-elles fait l’objet de coupes claires. Avec quels résultats ? Le bilan de la Big Society est complexe à dresser, parce que sa mise en œuvre a été influencée par l’aggravation brutale de la crise en 2010. Cette année-là, le déficit public britannique est le plus prononcé des pays développés. Le gouvernement a donc privilégié les coupes budgétaires ayant le plus d’impact sur le déficit. Ainsi, par exemple, il a privilégié la désindexation de l’aide sociale et le durcissement des règles d’éligibilité. En revanche, l’Universal Credit, visant à responsabiliser les bénéficiaires de l’aide sociale, n’est véritablement mis en place qu’en 2013. Difficile, dans ces conditions, de dresser un bilan honnête. En revanche, cela explique la réserve de l’opinion publique sur la Big Society, qui reste avant tout pour elle un slogan

Promouvoir la participation de la société aux services publics est l’idée force de la « Big Society », projet phare du programme de David Cameron en 2010.

« Une communauté de quartiers peut désormais gérer certains services locaux ou participer à la décision sur des sujets de portée locale. » visant à masquer les coupes budgétaires. Tout n’est pourtant pas noir. La révolution de l’éducation par exemple, conduite par Michael Gove, est d’ores et déjà visible. 174 free schools étaient déjà ouvertes à la rentrée 2013, soit 130 000 places. Et la première vague ouverte en 2011 – déjà évaluée par l’organisme d’inspection des établissements scolaires, l’Ofsted – a des performances supérieures à l’ensemble des écoles publiques. La West London Free School est même devenue une vitrine des free schools. Autre bilan, celui des Social Impact Bonds (SIB), pour lesquels le Royaume-Uni fait aujourd’hui figure de pionnier mondial : 14 projets sont actuellement mis en œuvre. Un véritable marché de l’investissement social prend

106 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

corps, qui a cru de près d’un quart entre 2010-2011 et 2011-2012. Pour certains, les SIB pourraient même être au financement du social ce que les partenariats publicprivé sont au financement des infrastructures. Quant à l’externalisation des services publics, elle est considérable : « Près d’une livre de dépense publique sur 3 irait désormais vers un prestataire externe », selon the Institute for Government. Et il semble, si l’on en croit certains sondages, que la satisfaction des usagers est en hausse. Pour le Work Programme, en revanche, c’est moins probant : seuls 130 000 demandeurs d’emploi sur 1,2 million ont retrouvé un emploi pérenne grâce à ce dispositif. En 2013, le gouvernement fait voter le Public Services Social

Value Act, qui impose aux responsables publics de prendre en compte non seulement le « coût », mais aussi la plus-value sociale et environnementale de l’offre fournie par le prestataire de service. Par ailleurs, les mutuelles de service public se sont développées : 71 ont été créées depuis 2010, dont la moitié dans la santé et un tiers dans l’action sociale. On en attend 12 autres d’ici 2014. Paradoxalement, au moment où la Big Society commence à produire ses premiers fruits, le terme a comme disparu des discours publics. Trop vague pour certains, trop conceptuel pour d’autres, il est devenu tantôt le cache-sexe d’une politique d’austérité, tantôt le visage de ces bénévoles qui viennent prendre le relais des politiques publiques. Quoi qu’il en soit, le discrédit de l’expression n’entraîne pas celui des idées qu’elle recouvre. Car depuis 2010, il faut bien reconnaître qu’elles ont inspiré des réformes d’ampleur. * « Nous devons recourir à l’État pour refonder la société. »


VOTRE STOCKAGE VOUS LIMITE? la solution de stockage de Red Hat

Archivage à valeur probante

Partage de fichiers

Virtualisation

Red Hat Storage, la solution logicielle open source de stockage de Red Hat, vous permet de répondre à tous ces défis en vous appuyant sur du matériel de commodité x86, avec à la clé: • Réduction des coûts • Évolutivité sans perte de performance • Sécurité • Performance Pour plus d'informations, consultez red.ht/rhs-fr ou contactez Alexandre Kusic, votre contact Red Hat Storage, au 06 89 63 33 42, akusic@redhat.com

RED HAT® CLOUDFORMS® OPENSHIFT® BY RED HAT® RED HAT® OPENSTACK® RED HAT® ENTERPRISE LINUX® RED HAT® ENTERPRISE VIRTUALIZATION RED HAT® JBOSS® MIDDLEWARE RED HAT® STORAGE Copyright © 2013 Red Hat, Inc. Red Hat, Red Hat Enterprise Linux, le logo Shadowman et JBoss sont des marques déposées de Red Hat, Inc. aux États-Unis et dans d'autres pays. Linux® est une marque déposée de Linus Torvalds aux États-Unis et dans d'autres pays.


ANALYSE Europe

QUI SUCCÉDERA à José Manuel Barroso ? Le traité de Lisbonne a changé les règles du jeu pour désigner le président de la Commission européenne. Portrait robot du prétendant idéal à huit mois des élections.

T

ous derrière Martin Schulz. Et lui devant. Seul. Les élections européennes se dérouleront dans seulement huit mois, mais le socialiste allemand s’est glissé, depuis début octobre, dans la peau d’un favori pour la présidence de la Commission européenne. Pourquoi une telle vélocité de la part de l’actuel président du Parlement européen ? C’est que ce scrutin sera plus disputé que jamais. Alors que, jusqu’ici, le nom du

président de la Commission européenne se décidait dans les salons feutrés des grandes capitales, une nouvelle donne vient politiser et personnaliser la campagne électorale. « Il est prévu, depuis le traité de Lisbonne, signé en 2009, que les partis européens désignent leur candidat aux fonctions de président de la Commission. En tenant compte des élections au Parlement européen, le candidat désigné par le parti majoritaire aux élections européennes

Zoom sur les prétendants à la présidence

VIRGINIA MAYO/AP/SIPA

José Manuel Barroso, président de la Commission européenne Les plus : au cas où aucune personnalité ne se dégagerait du Parti populaire européen, il peut être un recours. Polyglotte brillant, il a évité toute position radicale et a tenu la « maison Europe » durant la crise financière. Les moins : son nom est attaché à l’austérité de la crise financière. La personnalisation des prochaines élections européennes ne convient pas à son style tout en nuances.

FRÉDÉRIC MAIGROT/RÉA

Martin Schulz, président du Parlement européen Les plus : il est le candidat le plus crédible des socialistes européens. Il a réussi à moderniser le Parlement et à le faire exister aux côtés de la Commission et du Conseil. Il a très envie de faire campagne pour être président de la Commission. Les moins : les sondages ne prédisent pas la victoire des socialistes et les États membres ne voudront peut-être pas choisir quelqu’un qui n’a jamais eu de haute fonction gouvernementale dans son pays.

108 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

WIKTOR DABKOWSKI/ZUMA-RÉA

Donald Tusk, président du Conseil des ministres polonais Les plus : il est chef de gouvernement et la Pologne fait partie des nations ambitieuses en Europe. Il est vu d’un bon œil par les Allemands. Les moins : la Pologne n’appartient pas à la zone euro et il ne parle aucune langue étrangère.


Europe ANALYSE

deviendrait président de la Commission, explique Pascale Joannin, directrice générale de la Fondation Robert-Schuman. Cette mesure vise à rendre ces élections plus intéressantes. » Le départ canon de Martin Schulz a pour objectif de distancer les éventuelles candidatures au sein de son propre camp, les socialistes européens. Elles sont closes depuis fin octobre et le candidat sera seulement investi en février prochain. Autant dire que les discussions vont aller bon train d’ici là, mais qu’elles tourneront toutes autour de l’ancien libraire allemand. Ce dernier veut aussi s’imposer comme un présidentiable solide auprès des chefs d’État et de gouvernement des 28. S’il est un vieux routier des joutes européennes, élu pour la première fois en 1994, l’Allemand est un inconnu hors de ses frontières. Avant même son probable adoubement par le Parti socialiste européen, il mène donc une campagne intense dans tous

les États membres pour gommer son principal défaut : il n’a jamais été ministre. « Une règle non écrite veut que les chefs d’État et de gouvernement choisissent un candidat issu de leurs rangs, quelqu’un élu au suffrage universel direct, en son nom propre, souligne Pascale Joanin. Avoir été Premier ministre était le sésame idéal ».

Deux noms à droite D’autres compétences sont désormais exigées. Le conservateur polonais Donald Tusk, président du Conseil et très populaire dans son pays, a le profil idéal. « Petit » problème, la Pologne ne fait pas partie des 17 membres de la zone euro. Une absence dommageable alors que la récession économique frappe toujours l’Europe. « En outre, il ne parle aucune langue étrangère, confie un habitué des hémicycles européens. Venir après José Manuel Barroso, qui passe couramment de l’anglais à l’espagnol et au français, et ne parler

WARTNER/20 MINUTES/SIPA

qu’une seule langue, c’est mission impossible. » Ce handicap disqualifie quasi automatiquement le Premier ministre irlandais, Enda Kenny, également conservateur qui, lui aussi, ne parle que sa langue maternelle. Les projections les plus récentes montrent que les forces de droite du Parti populaire européen (PPE) devraient l’emporter en mai prochain aux élections. En attendant, le processus de désignation de son candidat, qui doit aboutir officiellement en mars 2014, fait du sur-place. Le long des couloirs de Bruxelles, deux noms reviennent fréquemment : Viviane Reding et Michel Barnier. La femme politique luxembourgeoise a l’expérience suffisante – trois mandats de commissaire – pour occuper le poste. Et le fait d’être l’une des rares femmes d’envergure européenne pourrait l’avantager si aucun candidat ne sort du lot d’ici la fin de l’année. … Parité oblige.

WIKTOR DABKOWSKI/ZUMA/RÉA

Michel Barnier,

Viviane Reding,

commissaire européen au Marché intérieur

commissaire européenne à la Justice

Les plus : pour son deuxième mandat comme commissaire européen, le Français a fait l’unanimité sur son travail acharné et son pragmatisme à toute épreuve, au cœur de la crise financière. Les moins : son dernier projet, faire adopter « l’union bancaire », peut lui coûter des électeurs, méfiants depuis la crise. Outre un anglais perfectible, il ne fait pas partie du cercle des « ex-Premiers ministres », prisé par les chefs de gouvernement.

Les plus : elle achève son troisième mandat de commissaire et a l’expérience des affaires européennes. Sa personnalité ouverte et son caractère pugnace peuvent séduire les électeurs. La parité pourrait faire d’elle la première présidente de la Commission européenne. Les moins : sa personnalité, justement. Souvent frontale, elle peut brusquer les capitales européennes, qui pourraient lui préférer un profil moins aiguisé.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 109


ANALYSE Europe

Le bâtiment de la Commission européenne à Bruxelles.

L’essentiel Février 2014 : le PSE investit son candidat. 6-7 mars 2014 : le PPE investit son candidat. 22-25 mai 2014 : élections européennes. Juillet 2014 : désignation des commissaires européens.

RAINER UNKEL/RÉA

Été 2014 : audition des commissaires européens par le Parlement européen.

… Le Français, dont le travail acharné et le pragmatisme suscitent des louanges de ses collègues, organise, depuis plusieurs semaines, un discret lobbying auprès des journalistes de la capitale européenne. Il distille les petites phrases et laisse dire que lors d’une réunion informelle du groupe parlementaire du PPE qui s’est tenue à Bruxelles à la mi-octobre, les députés l’auraient placé en tête devant… Viviane Reding.

Un troisième mandat ? Reste le président de la Commission européenne. Très apprécié au sein de sa famille politique, José Manuel Barroso n’a pas renoncé à faire un troisième mandat. Mais il est perçu comme l’un des responsables de l’austérité économique qui sévit en Europe et son ton monocorde ne convient pas à la campagne très personnalisée qui va s’ouvrir dans les prochaines semaines. En fait, tous les postulants attendent de savoir quel aspect aura la grande coalition au pouvoir en Allemagne. Si, comme les observateurs le croient, le CDU d’Angela Merkel, grand gagnant des dernières élections, fait alliance avec les socialistes du SPD, tout est possible. « Il semble qu’Angela

Merkel souhaiterait conserver le portefeuille des Finances, qui devrait être confié au SPD, explique un haut fonctionnaire français de la Commission. Dans ce scénario, elle favoriserait l’accession de Martin Schulz à la présidence de la Commission européenne. » On verrait alors un accord entre les socialistes et les conservateurs allemands au sein du Parlement européen. Du jamais vu ! Une chose est certaine, la personnalité des candidats devra être soigneusement policée. « L’époque du style Delors, avec un seul engagement européen très poussé, est terminée, commente Pascale Joanin. Dans le passé récent, les candidatures de Jean-Luc Dehaene et Guy

« L’époque du style Delors, avec un seul engagement européen très poussé, est terminée. » Pascale Joannin, directrice générale de la Fondation Robert-Schuman

110 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

1er novembre 2014 : la Commission européenne prend ses fonctions.

Verhofstadt, deux Premiers ministres belges très engagés pour l’Europe, ont été retoquées par les Britanniques. »

Jeu d’équilibre Avec les nouvelles règles, le choix du président de la Commission européenne constitue, plus que jamais, un subtil jeu d’équilibre. Certes, la tête de liste du parti vainqueur des élections européennes a de bonnes chances de figurer dans le dernier carré des prétendants au trône. Mais les États membres n’ont pas dit leur dernier mot et resteront incontournables au moment du choix final. « La responsabilité des partis politiques européens est de susciter des candidatures du plus haut niveau possible qui aient un profil suffisamment consensuel pour qu’aucun pays n’y mette son veto », décrypte Pascale Joanin. D’autant que l’année prochaine, d’autres postes seront aussi à pourvoir : le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, passe la main, tout comme la haute représentante pour les affaires étrangères, Catherine Ashton. Les tractations ont d’ores et déjà commencé entre Paris et Berlin et s’intensifieront d’ici mai 2014. ● Jean-Bernard Gallois, à Bruxelles


Sodexo Solutions de Motivation France - S.A. - RCS Nanterre 340 393 065 - Création : Sodexo - Visuel : © Philippe Catano- ANNONCE ACTEURS PUBLICS / 112013

CHOISIR SODEXO, C’EST OPTER POUR UNE EXPERTISE INTERNATIONALE DANS LA GESTION DES DISPOSITIFS COMPLEXES.

SERVICES AVANTAGES & RÉCOMPENSES

Sodexo accompagne à travers le monde les administrations et agences gouvernementales dans la dématérialisation de leurs aides publiques (agents et administrés). Quelques exemples : Argentine : carte “Social Pass” - Chili : carte “JUNAEB” - Grande-Bretagne : “Card Asylum Seeker ” - Turquie : “Assistans Pass Card” - France : carte “Picardie Cursus”

Une question, besoin d’un conseil ?

01 41 97 07 01

www.sodexoavantages.fr


ANALYSE Enquête

LA FAUSSE SORTIE

de la prime au mérite Le gouvernement s’apprête à remplacer la prime de fonctions et de résultats par un nouveau régime indemnitaire s’appuyant en partie sur « la manière de servir » des fonctionnaires. La rémunération à la performance s’impose malgré tout dans la fonction publique.

112 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013


Enquête ANALYSE

syndicats ironisent : « C’est de la cosmétique ! » Une évolution toute politique, disent-ils, qui ne changera presque rien sur le fond. Taboue il n’y a pas si longtemps, la rémunération à la performance a fait son apparition dans la sphère publique avec l’instauration de la prime de fonctions et de résultats fin 2008. Il s’agissait alors pour le ministre de la Fonction publique Éric Woerth (lire l’interview pages 114115) de créer une rémunération fondée sur la reconnaissance des talents des agents publics. Présentée comme un élément de simplification et de meilleure prise en compte du mérite individuel, la PFR comporte deux parties. La première dépend des fonctions occupées et de la cotation du poste – partie fonctionnelle, fixe –, c’est-à-dire une gradation selon les difficultés

Une « indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise » Un bonus annuel lié « à l’engagement professionnel et à la manière de servir »

et les responsabilités liées à l’emploi exercé. La seconde, dite « de résultats », est variable et repose sur l’atteinte d’objectifs fixés à l’agent. Le dispositif était destiné à couvrir progressivement les trois versants de la fonction publique. Cinq ans plus tard, on est très loin du compte puisque la PFR concerne aujourd’hui seulement 70 000 agents, à en croire les estimations du cabinet de Marylise Lebranchu et de certains syndicats. De nombreuses administrations n’ont pas suivi, la jugeant trop complexe à mettre en œuvre. Et elle est très loin de faire l’unanimité là où elle a été instaurée. « À emploi, fonctions et responsabilités équivalents, le montant de la PFR peut aujourd’hui varier entre les agents au sein d’un même service », pointe Guy Barbier, secrétaire général Unsa Fonction publique. Une incohérence souvent constatée dans les services déconcentrés où travaillent des fonctionnaires issus de ministères différents.

Des concepts du privé mal digérés

AG VISUELL/FOTOLIA.COM

P

erformance n’est plus un gros mot dans la fonction publique. Décriée par la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, comme « le symbole de la performance individuelle et de la concurrence entre les fonctionnaires », la prime de fonctions et de résultats (PFR) instaurée sous l’ère Sarkozy sera certes supprimée avant la fin de l’année. Mais pour être progressivement remplacée, à partir du mois de janvier, par un nouveau régime indemnitaire en partie basé, lui aussi, sur « l’engagement professionnel » des agents publics. Concrètement, la controversée PFR va laisser place à une « indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise » et à un bonus annuel. Alors quand une prime au mérite remplace une autre prime au mérite, les

LE NOUVEAU RÉGIME

« Chaque ministère semble avoir adopté ses propres critères », s’étonne Vincent Hacquin (CFE-CGC), qui dénonce une « distorsion du système ». « Le déploiement de la prime s’est fait dans une certaine opacité », prolonge ue a adopté ces dernières années des concepts venus du privé qui ont été plus ou moins bien digérés », résume Brigitte-Véronique Bouquet, présidente de l’Union générale des administrateurs civils. Un constat que confirme un rapport de trois inspections (IGF, IGA, Igas) sur la mobilité des fonctionnaires, rendu public en octobre. « La prime de fonctions et de résultats n’a pas eu d’effet sur la transparence et l’harmonisation des régimes indemnitaires, indique le document, puisque chaque administration continue à fixer le niveau indemnitaire en fonction de sa stratégie propre et de sa capacité financière. » …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 113


ANALYSE Enquête

L’agent en surcharge de travail pour des raisons exceptionnelles sera mieux rétribué.

28,5 % C’est la part du traitement indemnitaire dans le traitement des fonctionnaires de l’État en 2010, contre 17 % en 2000. Avec l’instauration du nouveau régime à partir de janvier 2014, les syndicats rappellent qu’il est urgent de remettre la rémunération indemnitaire, qui ne compte que faiblement pour le calcul de la retraite, « à sa juste place ». « Nous partageons avec les syndicats le constat de la montée de l’indemnitaire, répond le cabinet de Marylise Lebranchu. Ce sujet fait partie des thèmes de discussion qui seront abordés dans le cadre des travaux consécutifs au rapport sur l’évolution de la fonction publique remis par Bernard Pêcheur. »

WITT/SIPA

PRESSMASTER/ FOTOLIA

Interview

… Si la mise en musique a multiplié les fausses notes, la PFR aurait aussi provoqué quelques dérives sur le fond. « Adosser la prime à l’atteinte d’objectifs fixés à l’agent en début d’année entraîne des effets pervers, estime le cabinet de la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu. Cela signifie qu’on se focalise sur certaines politiques publiques et certains indicateurs quantifiables et que l’on en délaisse d’autres. Par ailleurs, la gestion par objectifs se décline difficilement pour les agents de catégories B et C qui n’ont souvent aucune maîtrise sur l’organisation de leur service. »

Absorber 1 800 primes Si la PFR a failli, l’idée de rémunérer les agents à la performance n’est pas abandonnée pour autant. Concrètement, le nouveau système prévoit une fusée à deux étages avec, d’une part, la création d’une « indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise » (IFSE) et de l’autre, un complément indemnitaire annuel lié, précise le projet de décret, « à l’engagement professionnel et à la manière de servir ». L’IFSE offrira un cadre plus simplifié que la PFR via quelques critères seulement de cotation : fonctions d’encadrement, « qualification nécessaire à l’exercice des fonctions », « degré d’exposition du poste au regard de son environnement professionnel »… Elle s’appuiera sur l’expérience de l’agent qui, selon son ancienneté, sera « débutant », « confirmé » ou « expert ». Pas de place, à cet étage, pour des logiques individuelles. En revanche, la performance garde toute sa place au second étage, celui du bonus annuel. « L’engagement de l’agent sera pris en compte », reconnaît le ministère, qui s’empresse d’ajouter : « Cela signifie notam-

114 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

Le gouvernement affirme que la PFR a désorganisé les administrations. Fallait-il la supprimer ? Cette décision de suppression est ridicule ! En créant cette prime au début du mandat de Nicolas Sarkozy, nous voulions diffuser dans la fonction publique une culture nouvelle, celle du résultat. D’autres pays avaient adopté des dispositifs similaires. En France, c’était très

ment la participation à la vie d’une équipe et pas seulement le respect des objectifs. » Le nouveau régime devrait contribuer à une meilleure lisibilité des rémunérations puisque tous les agents publics seront progressivement concernés, à l’exception des contractuels, par ce dispositif destiné à se substituer d’ici 2017 aux quelque 1 800 primes – rien de moins ! – qui couvrent le champ des fonctionnaires. La fonction publique vit depuis plusieurs années une profonde évolution. Les parcours professionnels sont individualisés, les offres de formation à destination des agents se multiplient et les « passerelles mobilité » entre et à l’intérieur des trois versants de la fonction publique se développent. Dans ce contexte de grande mutation, il n’est pas surprenant de voir la rémunération individuelle des fonctionnaires s’imposer. C’est même souhaitable, selon certains syndicats, certes divisés sur le sujet. Si aucun d’entre eux ne se dit opposé au fait que les fonctionnaires les plus méritants devraient être mieux


Enquête ANALYSE

ÉRIC WOERTH

« Il fallait que les agents les plus méritants

soient mieux rémunérés » L’ancien ministre de la Fonction publique avait instauré la prime de fonctions et de résultats (PFR) en 2008. novateur. La PFR tenait compte de la difficulté du poste occupé et de l’investissement professionnel de l’agent. Il me semblait souhaitable que les agents les plus méritants soient mieux rémunérés. Pour la fonction publique, la PFR était synonyme d’attractivité et d’efficacité. Sa mise en œuvre n’a pas entraîné l’harmonisation des régimes indemnitaires souhaitée. Partagez-vous ce constat ? Il faut en effet harmoniser les régimes statutaires et indemnitaires des agents publics, particulièrement dans les services

déconcentrés de l’État, où travaillent ensemble des agents issus de ministères différents. Nous avions initié ce chantier. Créée fin 2008, la PFR s’est progressivement développée dans la fonction publique. Il était prévu que son déploiement concerne d’abord les fonctionnaires de catégorie A, puis les agents des catégories B et C. Il fallait donc lui laisser le temps suffisant pour s’installer et procéder ensuite aux ajustements nécessaires. Mais le gouvernement s’empresse aujourd’hui de supprimer ce régime indemnitaire innovant pour des raisons purement politiciennes.

rétribués, les inquiétudes sont nombreuses. « La qualité doit être rémunérée, affirme Denis Lefebvre (CFTC), mais à condition de dépasser le stéréotype du bon et du mauvais fonctionnaire. » « La performance ne peut pas être définie selon des algorithmes d’ordinateur, prolonge Vincent Hacquin (CFE-CGC). Elle doit prendre en compte la situation de chacun. » « Il faut développer un cadre clair », acquiesce Brigitte Jumel (CFDT) qui, comme ses homologues de la CFTC et de la CFE-CGC n’est « pas hostile à la reconnaissance individuelle ». « Celui qui encadre un bureau de Sécurité sociale l’année

Dans le futur système, l’esprit de la PFR semble en partie préservé… Mais que de temps perdu ! Il faut comprendre que le modèle français de service public est en plein bouleversement. Dans un contexte budgétaire contraint, il faut repenser l’organisation et le management de notre fonction publique pour être en capacité de répondre aux attentes des citoyens. Il faut aussi repenser ses modes de rémunération et donner plus d’espoir aux fonctionnaires les plus méritants. La PFR y contribuait en incitant les agents à s’investir davantage. Le gouver-

d’une loi réformant la Sécu aura une charge de travail phénoménale, analyse BrigitteVéronique Bouquet. Cette charge ne sera pas la même l’année suivante. La rémunération à la performance doit permettre de tenir compte de cette évolution d’une année sur l’autre. » C’est ce que devrait prévoir le dispositif. Beaucoup plus critiques, la CGT, la FSU et Solidaires craignent l’attribution de primes à la tête du client. « Le versement de l’indemnité reposera en grande partie sur l’entretien professionnel, relève Anne Feray (FSU), pendant lequel les objectifs de l’agent seront déterminés avec le

DR

« La performance ne peut pas être définie selon des algorithmes d’ordinateur. » Vincent Hacquin, de la CFE-CGC Fonction publique

nement l’a certainement compris s’il s’appuie sur les éléments de la PFR pour créer son nouveau dispositif. Les syndicats étaient très critiques envers la PFR… En tant que ministre de la Fonction publique, j’ai toujours associé les organisations syndicales à la mise en place des nombreux dispositifs que nous avons instaurés. Elles vont comprendre que le nouveau régime indemnitaire ne permettra pas de satisfaire les demandes légitimes des agents en matière de pouvoir d’achat. Propos recueillis par S. H.

supérieur direct. Cela ne met pas à l’abri de l’arbitraire. » Voire, dit-elle, du copinage. De son côté, la CGT s’alarme d’une possible perte d’indépendance des fonctionnaires soumis au bon vouloir de leur hiérarchie. « Le nouveau régime indemnitaire est une PFR bis ! s’étrangle de son côté Thi-Trinh Lescure (Solidaires). Il n’est pas concevable de développer des primes modulables qui remettront forcément en cause le travail d’équipe indispensable à toute mission de service public. » Les interrogations sont aussi financières. « Uniformiser les régimes indemnitaires si possible par le haut coûtera de l’argent », remarque Denis Lefebvre. Et en la matière, les marges de manœuvre du ministère sont quasi inexistantes. Présenté au Conseil supérieur de la fonction publique de l’État le 6 novembre, le texte a été rejeté par toutes les organisations syndicales, à l’exception de la CFE-CGC, qui s’est abstenue. L’avis du Conseil n’étant « que » facultatif, le projet va poursuivre sa route… ● Sylvain Henry

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 115


ANALYSE Emploi public

L’Office national des forêts, qui emploie aujourd’hui quelque 9 000 agents, a commencé à réduire ses effectifs en 2002.

LES ACTIONS « RH » DE L’ONF Privilégier le dialogue Respecter les règles statutaires Mieux accompagner les suppressions de postes Établir des parcours professionnels

ÉRIC CABANIS/AFP

Contribuer à la résolution des situations de conflit

Source : volet « ressources humaines » du plan d’actions de l’Office national des forêts

L’ONF PROMET « respect » et « politesse » À SES AGENTS Pour tenter de redresser une gestion des ressources humaines en crise, l’Office national des forêts lance un plan d’actions.

D

ésormais, à l’Office national des forêts (ONF), la gestion des ressources humaines doit être guidée par des « maîtres mots » déclinés au quotidien : respect, bienveillance, simplicité, écoute, dialogue ou politesse. Cette recommandation, qui semble relever de l’évidence, figure parmi les « principes fondamentaux » édictés dans un plan d’actions que la direction vient de rédiger à partir des conclusions d’un récent audit « socio-organisationnel ». Elle traduit l’immense malaise qui frappe les personnels de l’ONF depuis 2002, lorsque cet établissement public placé sous la double tutelle des ministères de l’Agriculture et de l’Écologie a commencé à réduire ses effectifs. Des restrictions budgétaires et de personnels très mal vécues par les quelque 9 000 agents concernés, à tel point qu’elles ont entraîné, ces dernières années, une série de suicides d’agents forestiers. Il s’agit donc pour la direction de redresser une gestion « RH » en crise profonde. « La prise de conscience de l’ONF est très forte »,

affirme Pascal Viné, le directeur général de l’Office, qui salue la démarche « sans précédent » menée pour « rétablir la confiance ». « Le plan d’actions balaye tous les aspects de la gestion des ressources humaines, détaille-t-il, du management aux conditions de travail en passant par le dialogue social ou l’organisation interne. »

Le management visé Dans ce document d’une cinquantaine de pages, l’ONF souligne qu’il est nécessaire de donner au personnel « un projet d’avenir clair et de long terme » dans lequel il puisse « se reconnaître et se projeter ». Le management est particulièrement visé. L’Office constate ainsi : « Aujourd’hui, le management par objectifs pratiqué au sein de l’ONF apparaît comme ciblé sur la seule atteinte des objectifs quantitatifs. » Cela devrait changer. Ces objectifs devront par ailleurs être « précis, clairs et atteignables » et « compris des personnels », ce qui semble en effet préférable… Pour les syndicats, la situation de l’ONF témoigne des ravages qu’ont pu provoquer

116 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

les coupes claires de la Révision générale des politiques publiques dans les administrations et les opérateurs publics. Les agents seraient « traumatisés ». Si l’EFA-CGC et le SNTF-FO ont signé le document, le Snupfen-Solidaires, la CGT Forêt et le Snaf-Unsa l’ont rejeté parce que le texte, regrettent ces organisations, n’est « pas à la hauteur des enjeux », notamment en matière d’emploi, pointé comme la cause majeure de tous les maux. Le plan de la direction sera malgré tout appliqué dans les prochains mois. « Il est de notre responsabilité de le mettre en œuvre parce que nous ne pouvons pas re ster inactifs », estime Pascal Viné, qui promet cependant de rester très à l’écoute des demandes des syndicats. En laissant grande ouverte la porte de son bureau. Pour les accueillir avec respect et politesse. ● Sylvain Henry

Retrouvez le détail du plan d’actions de l’ONF sur www.acteurspublics.com


Randstad, au cœur du secteur public trouve pour vous les meilleurs profils Randstad, spécialiste du recrutement, peut sélectionner, évaluer, déléguer et gérer pour vous le personnel le mieux adapté aux besoins de vos administrations ou de vos collectivités pour vous aider à assurer la continuité du service public. s plus de proximité : des coordinateurs dédiés au secteur public en région, animent un réseau de 700 agences s plus d’expertise : des spécialistes métiers qui assurent la continuité du service public par la sélection du bon profil s plus de savoir-faire : une compétence reconnue en RH pour répondre à vos besoins en recrutement s plus d’innovation : des outils exclusifs (Misivias, Agile Profile) pour recruter et évaluer vos agents

confiez-nous vos recrutements au 0810 380 380 ou sur polepublic@randstad.fr


ANALYSE Emploi public

Les fonctionnaires du ministère des Sports aimeraient quitter le giron des ministères sociaux.

NICOLAS TAVERNIER/RÉA

des ministères sociaux, certains agents des sports doivent aujourd’hui effectuer des tâches qui ne relèvent pas de leurs compétences », appuie Serge Chabrol, secrétaire général du Snep-FSU. Voilà quelques mois, l’Unsa, la CGT et la FSU ont demandé à Valérie Fourneyron de « rapatrier » les personnels au sein, au choix, d’une DRH des sports ou d’une DRH que piloterait le « grand pôle éducatif ». Aucune des deux options ne verra le jour. Le cabinet de Valérie Fourneyron précise : « La sortie des personnels de la jeunesse et des sports du secrétariat général des ministères sociaux n’est pas d’actualité. Cette organisation a été dictée par le rapprochement qui s’est effectué au sein des mêmes services régionaux et départementaux de personnels issus de différents ministères. » Et cette organisation ne serait, ajoute-t-on, « pas incompatible avec les missions du ministère qui relèvent très clairement du champ éducatif ».

LES AGENTS « JEUNESSE ET SPORTS »

en perte de repères En constituant un comité technique ministériel propre aux agents de la jeunesse et des sports, la ministre Valérie Fourneyron entend répondre à leur « détresse professionnelle ».

E

n créant un comité technique ministériel « jeunesse et sports », Valérie Fourneyron, ministre des Sports et de la Jeunesse, espère restaurer le dialogue social avec les organisations syndicales de son ministère et répondre aux inquiétudes des personnels. Un geste destiné à calmer la « très vive déception » des syndicats qui ne décolèrent pas après avoir applaudi en chœur la perspective d’intégrer le ministère des Sports au sein d’un « grand pôle éducatif » évoqué par François Hollande pendant la campagne présidentielle. « Un acte manqué », regrettent-ils. Il faut dire que depuis janvier 2010 et leur rattachement au secrétariat général des ministères sociaux, les quelques milliers de professeurs de sport, d’inspecteurs de la jeunesse et des sports et de personnels éducatifs seraient dans une « détresse professionnelle ». « Les fonctionnaires du ministère des Sports ont été particulièrement impactés par la réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate), pointe Laurent Escure, secrétaire général de

l’Unsa Éducation. De nombreux postes ont été supprimés dans les services déconcentrés. »

Dilution des missions Les anciennes directions régionales et départementales de la jeunesse et des sports ont été regroupées au sein de nouvelles directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS). Ce qui a entraîné, selon les syndicats, une dilution de leurs missions éducatives. « Dans ce trop grand ensemble

100 millions d’euros

Redonner du sens Le ministère reconnaît toutefois que des mesures sont nécessaires pour garantir un « réel dialogue social » et pour renforcer la prise en compte des métiers propres au champ de la jeunesse et des sports. Ce sera la mission du comité technique ministériel – une instance de préfiguration a déjà été créée – qui semble d’autant plus indispensable que les syndicats ont plusieurs fois boycotté le comité technique ministériel commun aux ministères sociaux. Les questions d’effectifs, de primes, de conditions de travail, de formation continue ou d’organisation des services y seront abordées. Une manière de redonner sens et identité aux missions des agents. Et de répondre, dit-on, aux dégâts provoqués par les suppressions de postes de la Réate et de la Révision générale des politiques publiques. Et aussi d’anticiper les conséquences des restrictions de personnels imposées par la Modernisation de l’action publique (MAP) ? ● Sylvain Henry

C’est l’augmentation des crédits du ministère des Sports, de la Jeunesse, de l’Éducation populaire et de la Vie associative prévue dans la loi de finances 2014. Les crédits du ministère grimpent ainsi à

0,56 milliard d’euros, contre 0,46 milliard en 2013. Un montant qui couvre la dotation exceptionnelle, prévue dans le deuxième volet du programme d’investissements d’avenir (PIA), allouée aux crédits jeunesse.

118 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013


Monster, votre partenaire public ! Depuis 1997, Monster accompagne les institutions du secteur public - territorial, hospitalier et d'Etat - dans le déploiement et le suivi de leurs stratégies RH. Une expertise métier qui les aide à recruter et à fidéliser les meilleurs talents dans des domaines aussi divers que la santé, l'urbanisme, l'environnement, la culture, le social. Profitez à votre tour de la puissance de nos solutions adaptées à vos besoins et du savoir faire de nos consultants dédiés au secteur public ! Contactez nos conseillers au 0 800 050 060 et étudions ensemble sans plus tarder votre projet.


EXPERTISE

124

126

128

Aménagement durable

Sur le terrain

Sur le terrain

LA PREMIÈRE ÉCOLE EN PAILLE

L’ÎLE-DE-FRANCE FAIT LE MÉNAGE DANS SES OPÉRATEURS

LES ÉLUS D’AUVERGNE À LA CONQUÊTE DE L’UNESCO

DZIANIS KAZLOUSKI/FOTOLIA

Villes intelligentes, une gouvernance à la carte D’ici 2050, les villes accueilleront 70 % de la population mondiale. D’ores et déjà, les municipalités se cherchent un nouveau modèle d’organisation, associant au mieux l’usager et dépassant le « tout-techno ». Exemples avec Bordeaux, Grenoble et Vannes. Par Xavier Sidaner 120 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013


Aménagement durable EXPERTISE

130 e-services publics

LE WEB, ESPACE DE PARTICIPATION À LA RÉFORME DE L’ÉTAT

La communauté urbaine présidée par Vincent Feltesse a lancé un programme prospectif de développement de son territoire. Fondé sur le numérique, il associe les usagers.

À

Bordeaux, la révolution numérique est en marche. Depuis un peu plus d’un an, la communauté urbaine, présidée par le socialiste

Vincent Feltesse, s’est lancée dans la mise en œuvre de son programme Métropole 3.0, qui doit concourir à donner un nouveau visage à la cité bordelaise

NICOLAS TUCAT/RÉA

BORDEAUX

DES ATELIERS PARTICIPATIFS SUR LA MOBILITÉ À Bordeaux, la ville intelligente s’affiche en mode participatif. La communauté urbaine s’est lancée depuis 2010 dans une vaste concertation, associant usagers, habitants, start-up, pour imaginer ce que devrait être la métropole 3.0. Car, pour Béatrice de François, l’élue en charge du dossier, « le numérique n’est qu’une dimension de la ville intelligente ». « Pour se construire, poursuit-elle, la ville a besoin des usagers, lesquels doivent participer à la coconstruction des nouveaux services ». Des ateliers sous forme de « métro-labs » ont été montés en associant entreprises, services de la collectivité et usagers pour travailler sur la mobilité et aux nouveaux modes de participation. À ce titre, les réseaux sociaux et autres blogs citoyens sont aujourd’hui un espace de parole dont se nourrit la métropole pour faire naître de nouveaux usages.

Pédagogie Une bonne moitié des agents travaille sur les infrastructures de réseau et suit attentivement la délégation de service public sur le très haut débit. Trois personnes viennent en soutien sur le volet des « usages » et deux autres planchent plus spécifiquement sur la notion de ville intelligente. En plus de sa petite équipe, la direction a des relais dans l’ensemble des autres directions. La direction des systèmes d’information, associée de près aux réflexions en amont sur les usages exprimées par les usagers (lire ci-contre), joue aussi son rôle pour recenser et exploiter les données publiques, vivier de la ville numérique. « Ce lien entre tous les services est essentiel », estime Béatrice de François, l’élue qui porte le dossier du numérique. Cette « petite » équipe œuvre en interne pour faire de la pédagogie, préalable indispensable pour pouvoir espé rer donner vie aux nouveaux usages numériques. Essentielle pour la métropole, cette organisation offre aussi un point d’entrée et des interlocuteurs de poids aux opérateurs. Rien de tel pour confronter les points de vue et contrebalancer la vision purement technocratique des experts privés. ●

Jean Haëntjens, urbaniste

« Le grand public n’est pas trop consulté. Il s’agit donc de gouvernances fermées, c’est-à-dire de partenariats techniques entre entreprises et services techniques. »

DR

au numérique

à l’horion 2030. Pour en assurer la mise en œuvre, l’intercommunalité s’est dotée d’une direction du numérique. Avec sa dizaine d’agents, cette direction a beau être « modeste » selon sa directrice, Pamela Ferra-Cabrillat, elle n’en tient pas moins un rôle stratégique. Rattachée au sein d’un pôle « Développement durable et rayonnement métropolitain », en charge de la stratégie, de l’innovation et de la participation, cette direction du numérique joue un « rôle transverse par rap port aux directions métiers traditionnelles », souligne Pamela Ferra-Cabrillat.

Jean-Baptiste Galland, directeur « stratégie et smart grids », ERDF

« Le problème n’est pas tant l’organisation en silos, que la sédimentation des réglementations. Aujourd’hui, des simplifications devraient être étudiées car il devient compliqué d’appréhender les articulations entre les différentes échelles d’un projet. »

ROMAIN BOUTILLIER

Une direction dédiée

DR

Paroles d’experts

Philippe Sajhau, président du comité « ville numérique » de Syntec numérique*

« Le portage politique par les élus est très important. Mais les silos existent encore et nous sommes encore loin de la transformation en profondeur des organisations. » * Groupement des entreprises du numérique, qui a publié le « Guide des bonnes pratiques de la ville numérique »

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 121


FRANCOIS HENRY/RÉA

THIERRY.MARZLOFF

EXPERTISE Aménagement durable

GRENOBLE

Une approche « durable »

Bruno Marzloff

D

ans la vallée grenobloise, les projets « intelligents » fleurissent en ordre dispersé. L’électricité et le gaz sont confiés à une société d’économie mixte, entreprise locale de distribution très impliquée dans un programme de smart grid (réseau intelligent) – Greenlys – porté avec Suez sur le modèle lyonnais. Côté transports, la ville a lancé un « pass’mobilité » qui permet à l’usager d’utiliser les divers modes de transport de la ville (tram, bus) et de bénéficier de tarifs préférentiels sur d’autres réseaux comme le TER. Cette approche en faveur de la mobilité se retrouve enfin au travers d’un service numérique baptisé « Mon groom », une plateforme qui permet aux Grenoblois de télécharger leurs tickets de tram et de téléphérique à partir de leur mobile en un seul geste et de manière sécurisée. Et dans un avenir proche, d’autres applications, touchant aux domaines du tourisme ou de la culture, permettront avec la même facilité d’acheter un billet de spectacle. C’est en tout cas ce que promet

Xavier Normand, chargé de mission « Villes durables » à la ville de Grenoble. La municipalité a beau mener des projets de développement numérique, c’est par une approche encore très marquée « développement durable » que la ville est pensée. Les projets de transports, d’écoquartiers et plus encore d’écocité, financés avec l’aide des investissements d’avenir, confirment cette approche. Ces projets occupent une large place dans l’emploi du temps de Xavier Normand et de la petite équipe qui l’assiste. Expert en conduite de projet urbain, celui-ci s’est trouvé propulsé à ce poste sur une idée soufflée par l’adjoint au maire en charge du développement durable, Stephane Siebert.

Direction commune Rattachée depuis mai dernier au directeur général adjoint « environnement urbain », la mission « Ville durable » est chargée d’assurer le suivi opérationnel de l’écocité et de promouvoir l’action de la ville. Pour l’heure, « la conduite de

122 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

« Favoriser la circulation de la donnée publique est nécessaire mais insuffisant » Ce sociologue, qui dirige le cabinet d’études Chronos, estime que le numérique seul ne peut dessiner la ville intelligente et appelle à une participation plus active du citoyen.

tels projets n’a pas impliqué de bouleversement dans les organigrammes, mais on y vient doucement », souligne Xavier Normand. D’ores et déjà, la ville s’est dotée d’une direction des systèmes d’information commune avec l’agglomération, sur laquelle s’appuie régulièrement l’équipe « Ville durable ». Et ce n’est qu’un début. Grenoble fonde beaucoup d’espoirs dans la loi de décentralisation, qui devrait permettre à la commune d’accéder au statut de métropole. Car pour l’heure, entre la communauté d’agglomération et ses 28 communes, qui ont la main sur l’urbanisme, la voirie et le stationnement, difficile pour l’agglomération grenobloise de porter une vision intégrée de la ville intelligente. ●

VANNES

B.R. PRODUCTIONS/SIPA

Malgré de multiples projets numériques, la ville dauphinoise n’a pas bouleversé sa gouvernance. Le nouveau statut de métropole devrait changer la donne.

Interview

de la ville intelligente


Aménagement durable EXPERTISE

Que vous inspirent les « intelligences » qui participent de ce que l’on nomme la smart city (ville intelligente) ? Les solutions industrielles smart cities des grands groupes consistent à qualifier les données, à les compiler et à proposer des systèmes prédictifs via des algorithmes. Cette optimisation des ressources, c’est beaucoup, et peu compliqué dès lors que les outils sont là. Pourtant, ces solutions clés en main ne sont que des substituts aux infrastructures. Certes, en matière de déplacements, des applications facilitent la mobilité. Mais il n’en reste pas moins que la demande continue de croître plus vite que l’offre d’infrastructures. Résoudre l’équation offre-demande, aucun système n’y est parvenu

par les seules vertus des « intelligences ».

La ville intelligente ne se réduit donc pas au tout-numérique ? Non ! La solution se construit autrement. Le big data (analyse de masses de données), au cœur des stratégies marketing des acteurs privés, n’est que le premier étage de la fusée de la ville intelligente. Le second, qui l’accompagne nécessairement, est une réflexion sur la réduction de la demande (moins de déplacements motorisés, de consommation d’énergie, de déchets, etc.). Sans doute en faudrait-il un troisième qui nourrisse l’imaginaire de la ville que nous voulons.

de proposer une vision politique de la métropole, d’en dessiner le modèle de gouvernance et de repenser les fonctions régaliennes de la donnée afin d’éviter que d’autres s’approprient la ville à leur place à partir de solutions toute faites. Veut-on une ville assujettie au numérique ou celui-ci ne doit-il être que la matière première d’une autre vision ? Pour maîtriser l’énergie, ne faut-il pas encourager les usagers à diminuer la demande plutôt que d’optimiser l’offre au travers des systèmes intelligents, qui ne parviennent pas à éviter les impasses productionconsommation ?

Comment s’y prendre ?

De nombreux observateurs prônent un autre modèle de développement…

Il revient à la puissance publique et aux élus

Certes, les villes sont dans l’inertie d’un

modèle où perdure une politique en silos. Mais avant de nommer un « Chief Data Officer », les politiques pourraient s’interroger sur l’équation difficile qui concilie leurs missions avec moins de budget et plus d’injonctions environnementales ! Se positionner en faveur de la circulation de la donnée publique, c’est nécessaire mais insuffisant. La donnée la plus importante, c’est l’usager qui la produit. Google l’a compris en rachetant « Waze », l’application pour mobile qui relève les incidents de circulation à partir des informations des 50 millions d’abonnés à travers le monde. Mobiliser les individus pour être les capteurs des informations qui fabriquent les services de la ville dont ils sont aussi les consommateurs

est aussi à la portée des collectivités.

La ville intelligente s’invente-t-elle avec la participation du citoyen ? Cet objet économique et sociologique neuf qu’est le réseau social ne se résume pas à la somme des individus qui le composent. Il dessine une économie du partage à partir de l’utilisation d’un flux considérable de données. Google ou Facebook ont fait la démonstration de sa pertinence. À la puissance publique d’inventer un mode de circulation de ses données dans le respect de ceux qui les produisent. Nous ne sommes qu’aux prémisses d’une gouvernance dans laquelle l’usager citoyen jouera son rôle pour dépasser le premier étage de la fusée. Propos recueillis par X. S.

Un pilotage « ad hoc » La ville du Morbihan promeut une approche intégrée de la ville intelligente. Les élus sont en première ligne pour porter les projets en lien avec les directions opérationnelles.

A

vec ses 57 000 habitants, Vannes n’a pas à rougir de son statut de ville moyenne tant elle semble en avance dans son approche de la ville intelligente par rapport à certaines collectivités appartenant aux strates supérieures. La municipalité a pris le virage des nouvelles technologies avant même l’envolée de la bulle Internet du début des années 2000, au point de devenir l’une des premières collectivités en pointe dans les services admi-

nistratifs en ligne. Un simple clic dans l’espace « Technologies de l’information » du site de la commune atteste de cet engouement pour les TIC. Quinze ans plus tard, labellisée « Ville Internet », membre de la plate-forme régionale d’administration électronique e-mégalis, la ville n’a de cesse, comme le souligne Anne Le Dirach, adjointe au maire en charge du numérique, « d’intégrer cette notion d’intelligence dans les projets urbains », profitant ainsi du « terreau »

d’origine. Avec pour mot d’ordre « transversalité ».

Partenariats Qu’il s’agisse d’éclairage urbain ou de réseaux d’énergie, à chaque fois, « la ville adopte une démarche partenariale en lien avec les opérateurs pour mobiliser chacun autour d’un projet commun », insiste Anne Le Dirach qui, avec le maire, David Robo (UMP), impulse ces projets. « Sinon, on perd trop de temps », souffle l’élue. Une instance ad hoc présidée par

le maire est chargée pour chaque projet de tracer la ligne, en lien avec la direction générale des services et les directeurs adjoints opérationnels. La direction des systèmes d’information est aussi mise dans la boucle. « C’est une direction dont la position évolue », souligne l’adjointe au maire, qui reconnaît s’appuyer sur cette « supra-infrastructure ». Les élus proposent, les directions techniques disposent, en concertation avec les opérateurs, grâce à cette impulsion au plus haut niveau. ●

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 123


STUDIO 9

EXPERTISE Aménagement durable

École Louise Michel

Une école composée de bois et de paille a vu le jour en septembre sur le site du fort numérique d’Issy-les-Moulineaux. Une première en France pour un bâtiment public.

La première école en paille

L

’ancien site du Fort d’Issy-les-Moulineaux poursuit sa mue. Après les bureaux de la direction générale de la gendarmerie et un quartier

Façade. L’immeuble a été conçu pour laisser pénétrer au maximum la lumière naturelle.

124 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

pavillonnaire, une école maternelle et primaire a été inaugurée à la rentrée de septembre sur un terrain de deux hectares jusqu’alors occupé par un parking et d’anciennes carrières. Ce bâtiment de deux étages est conçu en bois. Épicéa, douglas, mélèze : en tout, près de 3 000 mètres cubes composent la charpente et les façades de cette école. Excepté les clôtures métalliques réparties tout autour de la cour située sur le toit de l’école maternelle, le bois est omniprésent. Le maître d’ouvrage, la Semads, s’est laissé convaincre par l’audace d’un tel projet. « Nous souhaitions que l’école s’insère parfaitement dans le nouvel écoquartier d’Issy-les-Moulineaux », affirme son directeur

général, Raymond Loiseleur, qui se dit attentif à ce « qu’un équipement public ne ressemble jamais à un autre ». Les architectes et le bureau d’étude se sont montrés particulièrement inventifs. En plus du bois, ils ont eu l’idée d’utiliser… de la paille. « C’est un isolant très écologique », souligne Sonia Cortesse, l’une des deux architectes en charge du projet. Sèche, non traitée, la paille ne craint pas l’humidité, insistet-elle, et n’est donc pas un nid à parasites. Invisible, inodore, elle provient d’un champ de blé du Loiret, a été stockée dans des caissons de 36 centimètres d’épaisseur, lesquels ont été assemblés dans la région de Toulouse. L’ensemble a ensuite été rapatrié sur le chantier d’Issyles-Moulineaux pour être monté directement sur place.

Très basse consommation Une première en France. Jamais un bâtiment public de cette taille n’a été conçu de la sorte. Et pour


Aménagement durable EXPERTISE

Signature Cabinet d’architectes : Sonia Cortesse et Bernard Dufournet Réalisations : Reconstruction des logements de fonction du lycée Gué Réhabilitation du centre de recherche de l’Institut de médecine environnementale

cause : la réglementation n’autorise pas ce type de construction en bois. Pour obtenir l’agrément des bureaux de contrôle, les concepteurs ont dû se lancer dans un test grandeur nature pour mesurer la résistance au feu. Une maquette, sorte de façade d’un étage factice, a été montée avec l’appui du Centre scientifique et technique du bâtiment,

avant d’être incendiée durant trente minutes. Ce n’est qu’à l’issue du test, passé avec succès, que le projet a pu être véritablement lancé. Achevé début septembre après quasiment deux ans de travaux, c’est un bâtiment particulièrement performant sur le plan énergétique – puisqu’il dépasse les critères de basse consommation – qui a été livré.

Tout a été pensé pour réduire au maximum l’impact de la construction sur l’environnement et la santé. Hormis les matériaux, choisis selon ce critère, la construction est percée de puits de lumière pour limiter

Feu. Un test de résistance au feu, d’un coût de 60 000 euros, a été réalisé pour valider le projet.

la consommation d’électricité. Des stores se ferment et s’ouvrent automatiquement en fonction de l’ensoleillement. Enfin, une attention particulière a été portée à la ventilation et à l’acoustique pour ce bâtiment raccordé à la collecte pneumatique des déchets. Une école d’un tout nouveau genre. ● Xavier Sidaner

En chiffres 5 000 mètres carrés 2 étages 12 millions d’euros

Mobilier. Peinture, revêtements, équipements ludiques… Les concepteurs ont fait appel à des matériaux écologiques.

14 classes 400 élèves

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 125


EXPERTISE Sur le terrain

En chiffres Les opérateurs 28 organismes associés 190 millions d’euros de budget 120 millions d’euros financés par la région (sur un budget régional de 4,7 milliards d’euros)

VALINCO/SIPA

1 200 employés pour 2 000 agents territoriaux

L’Île-de-France fait le ménage dans ses opérateurs Le conseil régional d’Île-de-France veut regrouper et fusionner ses organismes publics associés, très critiqués pour leurs budgets et leurs effectifs en hausse.

O

bservatoire du bruit, agence des espaces verts, comité régional du tourisme… Le conseil régional d’Île-de-France annonce son intention de rationaliser la gestion de ses 28 organismes publics. Une réponse aux critiques persistantes sur leur efficacité et sur leur développement continu : la

dotation des opérateurs régionaux a doublé en huit ans pour atteindre 120 millions d’euros en 2012 et, dans le même temps, leurs effectifs ont grimpé de 58 %. Un comble alors que la région doit faire face, comme la plupart des collectivités françaises, à de sérieuses restrictions budgétaires. Les organismes rattachés

126 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

rassemblent aujourd’hui près de 1 200 employés, principalement contractuels, contre 2 000 agents territoriaux travaillant pour le conseil régional. Délégué à la Modernisation de l’action publique au conseil régional, par ailleurs maire PRG de Carrières-sous-Poissy, Eddie Aït a été chargé par le

président PS, Jean-Paul Huchon, de réduire cette galaxie des opérateurs franciliens. « L’objectif, c’est la rationalisation, détaille le “M. Simplification” du conseil régional. Sur la forme, avec le regroupement des organismes et la mutualisation de certains services. Sur le fond, avec un pilotage plus fort de la région et la création d’une charte fixant des règles de gestion budgétaire. »

Enjeu électoral Côté regroupement, 7 organismes œuvrant dans le domaine du développement durable fusionneront au sein de la Cité de l’environnement, qui doit ouvrir ses portes à Pantin en 2014. C’est une première étape. Et 3 structures de soutien à l’économie – l’agence régionale du développement, La Fonderie et le Centre francilien de l’innovation – devraient bientôt faire adresse commune dans le 19e arrondissement de Paris. Eddie Aït semble faire siennes les conclusions du rapport de Roger Karoutchi, sénateur UMP des Hauts-de-Seine et président de la commission des finances de la région qui, en 2012, pointait « un sentiment de dispersion et de dilution de l’action régionale ». Dans les rangs de l’opposition, on parle du « système Huchon ». Le président francilien est accusé d’avoir multiplié les organismes associés pour mieux distribuer des postes sans plus-value en matière d’efficacité de l’action


Sur le terrain EXPERTISE

Jean-Michel Thornary

Audits en cours La problématique du coût est essentielle. D’abord parce que les dotations de l’État baisseront de 80 millions d’euros en 2014. Ensuite et surtout parce que l’efficacité et l’opacité de certaines structures sont régulièrement mises en cause, particulièrement en matière d’embauches.

KARINE WENDER/ASPECT STUDIO

« Des lois imposent le recours à ces structures partenaires » Le directeur général des services de la région Île-de-France fait le point sur ses opérateurs. Pourquoi la région recourt-elle à des organismes associés ?

Interview

publique. Le sujet est hautement politique à moins de deux ans des élections régionales. Le rapport Karoutchi recommande la création d’une charte et le regroupement d’une vingtaine de structures en 4 ou 5 agences. « Nous nous sommes inspirés de ce rapport. Nous avons d’ailleurs collaboré avec M. Karoutchi à chaque étape de notre travail », reconnaît Eddie Aït. Ce qui ne convainc pas Valérie Pécresse. L’ancienne ministre, aujourd’hui députée UMP et cheffe de file de l’opposition en Île-de-France, est lancée dans la bataille des régionales de 2015. Le rapprochement des opérateurs du conseil régional ? Ce n’est qu’un « catalogue de bonnes intentions, martèle-t-elle. On a surtout l’impression d’assister à une course de lenteur qui ne traite pas le problème du gaspillage de l’argent public ». L’impact budgétaire du grand ménage n’est pas chiffré. Et quand Roger Karoutchi préconise dans son rapport une réduction des subventions aux organismes associés de 10 à 15 % d’ici 2015, Valérie Pécresse va beaucoup plus loin : « On peut facilement faire 25 % d’économies sur l’enveloppe globale, soit 30 millions d’euros. » Plus prudent, Eddie Aït botte en touche : « Les élus régionaux arbitreront en assemblée plénière dans le cadre des prochaines orientations budgétaires. Ils prendront la responsabilité politique de cette réorganisation. »

Ce sont souvent des lois ou des obligations réglementaires qui imposent le recours à des structures partenaires telles que l’agence des espaces verts ou le comité régional du tourisme. L’État est d’ailleurs présent dans les trois quarts de ces organismes. C’est aussi un statut juridique particulier. Il permet d’associer des partenaires qui partagent nos ambitions mais qu’il est difficile d’intégrer à l’action publique autrement qu’à travers une structure extérieure. On ne peut pas dire que Jean-Paul Huchon est le seul responsable, puisque près de la moitié

L’ h e b d o m a d a i r e L e C a n a r d enchaîné dénonçait ainsi, en août 2012, « un système de piston géant » au comité régional du tourisme. Qu’en pensent les syndicats ? « Il faut assurer un meilleur contrôle de l’argent investi », réclame Michel Angot, secrétaire national FSU au conseil régional. Il en appelle à « davantage de déontologie ». De son côté, Vincent Callies, président du syndicat FA-FPT/Synper, estime que cette réorganisation « oublie les vraies questions » : « Pourquoi la recherche d’efficacité passe-t-elle par un démembrement de l’administration ? L’exécutif ne s’intéresse qu’au mode de pilotage ». À l’écouter,

des organismes associés ont été créés avant son arrivée à la présidence.

Que répondez-vous aux élus qui dénoncent un manque de transparence ?

Comment évaluez-vous leur travail ?

Les élus sont présents dans les instances de gouvernance de tous les organismes associés. Dès l’instant où la région dispose d’au moins 3 sièges dans ces conseils, un représentant de l’opposition est présent. Les conseillers régionaux ont donc accès au bilan d’activité de ces structures et à une évaluation si l’on est en période de renouvellement des conventions. Ils ont donc une responsabilité directe sur le travail engagé.

Par les instruments classiques de tutelle, c’est-à-dire un contrôle de gestion qui fonctionne dans toutes les unités qui participent aux instances de gouvernance des organismes associés. Tous les trois ans, une convention d’objectifs et de moyens fixe les conditions dans lesquelles ils doivent mener leur action. La chambre régionale des comptes est aussi présente. Elle contrôle la situation financière de la région et examine les relations avec ses partenaires.

faire travailler 1 200 contractuels serait une manière de privatiser la fonction publique régionale. « Nous n’avons aucune visibilité sur ces structures, ni sur les embauches ni sur leur fonctionnement. Les Franciliens attendent des économies et de l’exemplarité », appuie Valérie Pécresse. Au conseil régional, Eddie Aït ne nie pas « l’existence de marges d’amélioration ». « Des audits sont en cours sur 18 organismes pour évaluer l’adéquation des organisations actuelles aux missions confiées, leur efficacité et proposer des pistes d’optimisation », souligne-t-il. Les étapes successives de décentralisation

Propos recueillis par R. M.

auraient amené la collectivité à réfléchir à une gestion différente de ses compétences. « Il est temps de montrer à l’opinion publique que la région s’engage dans un meilleur contrôle des structures associées », estime le délégué à la Modernisation de l’action publique. « La simplification est en marche, le ton a été donné. Les arbitrages se feront en fin d’année et nous verrons des progrès dès 2014 », promet-il, en ajoutant que « les usagers seront les seuls juges de cette réorganisation ». Dans la majorité comme dans l’opposition, le sujet a une véritable portée électorale. ● Raphaël Moreaux

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 127


EXPERTISE Sur le terrain

Les élus d’Auvergne

nous ont rejoints par la suite. » Il s’agissait, dans un premier temps, de confirmer la « valeur scientifique » du site et son « importance esthétique exceptionnelle » pour répondre aux critères de l’Unesco.

à la conquête de l’Unesco Acteurs publics et privés se mobilisent pour porter la candidature de la chaîne des Puys au patrimoine mondial de l’Unesco. Un projet qui transcende les clivages politiques.

L

ment main dans la main en faisant taire leurs divergences. L’enjeu est d’importance puisqu’aucun site naturel en France métropolitaine ne bénéficie du fameux « label » de l’Unesco, synonyme de moyens accrus pour sa préservation et sa mise en valeur. Mais aussi (surtout ?) de retombées médiatiques, touristiques, et donc économiques. La chaîne des Puys, c’est un paysage unique de quelque 80 volcans

PIERRE SOISSONS

e pays des volcans inscrit au patrimoine mondial ? C’est le grand espoir des élus du Puy-de-Dôme, sur le pont depuis plusieurs mois pour promouvoir la candidature de la chaîne des Puys à la prestigieuse liste de l’Unesco. Dans l’attente du verdict final, qui sera connu au printemps, et alors que les experts internationaux se succèdent pour évaluer « la valeur exceptionnelle » du site, acteurs publics et privés travaillent locale-

Très rapidement, la candidature suscite l’adhésion des élus. « C’est un véritable engouement qui dépasse les clivages politiques », témoigne Christian Bouchardy, vice-président (Europe Écologie-Les Verts) de la région Auvergne, qui a accompagné des évaluateurs internationaux dans leur ascension du puy de Dôme en septembre. « La démarche fait l’unanimité », confirme Jean-Marc Boyer, chef de file de l’opposition UMP au conseil général du Puy-de-Dôme. La preuve : sur les 470 communes du département consultées, 468 se sont prononcées en faveur de la candidature. « Ce type de projet qui vise à valoriser le territoire en reconnaissant son caractère exceptionnel est par essence fédérateur », estime le patron du département, JeanYves Gouttebel. Maire sans étiquette de la commune de Saint-Ours, au pied de la chaîne des Puys, Sylvie Ligoux est « la première étonnée » d’une telle symbiose des acteurs institutionnels. « C’est rare et ça fait plaisir à voir. Le plan de gestion est efficace et on se sent écoutés », expliqueelle. Ce « plan de gestion », c’est le cœur de la gouvernance instaurée par le département. Préconisé dans une charte de l’Unesco qu’ont signée les ministères de la Culture et de l’Écologie – les ministères référents de l’Unesco –,

au cœur de l’Hexagone que l’État a retenu en début d’année pour concourir au « patrimoine mondial » et autour duquel gravite une multitude d’acteurs : le département, la région, le parc naturel des volcans d’Auvergne, l’université d’Auvergne, 5 intercommunalités, 30 communes mais aussi des propriétaires, des éleveurs, des forestiers, des opérateurs de tourisme… Classé « grand site de France », le volcan du Puy-deDôme s’intègre par ailleurs au site naturel de la chaîne des Puys. Un casse-tête de normes et un millefeuille institutionnel. Pas facile, dans ces conditions, de piloter le projet. Le département s’y attelle. « J’ai constitué une équipe départementale à laquelle nous avons d’abord associé le parc naturel régional et le pôle universitaire clermontois, détaille Jean-Yves Gouttebel, le président (PRG) du conseil général du Puy-de-Dôme. Les grandes collectivités et les communes

Une vue aérienne de la chaîne des Puys.

128 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

4 étapes pour l’ins

JODIE WAY

Les enfants de l’association Sports jeunes posent, à l’occasion des 30 ans du comité départemental olympique et sportif, pour soutenir la candidature de la chaîne des Puys.

1

Janvier 2013 : sélection nationale par l’État sur proposition du Comité national des biens français

DR

Projet fédérateur


Sur le terrain EXPERTISE

En chiffres La chaîne des Puys 80 volcans 32 km de longueur 4 km de largeur 350 millions d’années d’évolution géologique ont façonné ce paysage Plus de 400 km2 de site 700 pages de dossier de candidature 6 ans de travaux et de recherches scientifiques

Le puy de Dôme, volcan emblématique de la chaîne des Puys, a donné son nom au département.

Gouvernance partagée « Compte tenu de la diversité des acteurs concernés, nous avons décidé de recourir à une gouvernance ad hoc et tripartite », précise Cécile Olive-Garcia, responsable du projet au conseil général. La création d’un syndicat mixte a été très vite écartée, jugée trop coûteuse et préjudiciable au fonctionnement du parc régional, au profit d’une commission locale qui regroupe 75 membres, représentants des acteurs publics et privés, qui se réunit une à deux fois par an. Les échanges sont foisonnants. « Entre universitaires, propriétaires, élus locaux et représentants de l’État, c’est un vrai choc des cultures », sourit Danielle Fournioux, la responsable du plan de gestion. Chaque échelon agit ensuite dans son propre domaine de compé-

tence. « Malgré la période de vaches maigres, le conseil régional cofinance la restauration des chemins du parc naturel, la création d’un atelier rural d’urbanisme et le maintien des postes de gardes nature, avance le viceprésident de la région, Christian Bouchardy. Des aides ont également été débloquées pour le pastoralisme qui permet de maintenir un paysage ouvert mettant en valeur les cratères des volcans. » Autant d’aménagements destinés à muscler le dossier de candidature. L’État a lui aussi son mot à dire via la gestion de ce site, classé en 2000. « Avec la préfecture, nous veillons à montrer que l’État a pris des mesures de protection et de réglementation, par exemple en ce qui concerne les carrières de pierres présentes dans le périmètre du bien », confie Hervé Vanlaer, qui pilote la direction régionale de

JODIE WAY

il veille à harmoniser les politiques territoriales pour assurer la conservation du caractère exceptionnel du bien.

Photo de soutien à la candidature réalisée au conseil général. Au centre, son président, Jean-Yves Gouttebel.

l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal). Le rôle moteur revient toutefois au département. « Nous avons voulu garder cette position de chef de file tout en respectant les compétences de chaque collectivité », assure JeanYves Gouttebel, qui veille tout particulièrement à la « conciliation des usages » entre les habitants, les agriculteurs et les entreprises du secteur pour une meilleure articulation aux flux touristiques. Et ce n’est pas toujours tâche aisée, les propriétaires étant prompts à réagir pour prévenir toute dégradation de leurs terrains.

Mais les tensions sont maîtrisées et le dossier avance. Au point que l’Unesco vient de demander au conseil général de faire bénéficier d’autres candidatures de son expertise, notamment dans l’hémisphère sud, en Éthiopie. En Auvergne, toutes les pensées sont aujourd’hui tournées vers juin 2014 et le 38 e comité du patrimoine mondial, qui se réunira au Qatar. On saura alors si les volcans d’Auvergne entrent au patrimoine de l’Unesco. Les élus locaux de gauche, de droite et du centre retiendront leur souffle. ● Raphaël Moreaux

cription

2

Mars 2013 : le centre du patrimoine mondial, organe de l’Unesco, estime le dossier de candidature complet et le déclare « admissible »

3

D’avril 2013 à juin 2014 : phase d’évaluation, en chambre et sur le terrain, par des experts de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui émettent un avis commun

4

Juin 2014 : les 21 pays membres du 38e comité du patrimoine mondial réuni au Qatar rendent leur décision finale : inscrire, renvoyer, différer ou ne pas inscrire la chaîne des Puys au patrimoine mondial

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 129


PESHKOVA/FOTOLIA - MONTAGE

EXPERTISE e-services publics

Le Web, nouvel espace

de participation à la réforme de l’État Innover-simplifier, puis Faire-simple.gouv.fr… Les plates-formes collaboratives sur Internet pour améliorer et simplifier le service public sont devenues le marqueur de la réforme de l’État. Un exercice qui peut être utile, à condition de respecter la parole des agents. 130 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

U

ne proposition pour améliorer le service public ? En quelques clics, les fonctionnaires peuvent déposer leurs contributions, suggestions ou idées sur une plate-forme à cet usage dont le nom est à lui seul tout un programme : Faire-simple.gouv.fr. Lancé le 2 octobre dernier, ce site Web, lointain descendant du « Médiateur et vous », se distingue d’autres projets tels que Ensemble-simplifions, initié il y a quelques années, du temps de la RGPP. Au-delà des appellations, l’idée de départ est un peu toujours la même : plutôt que de partir de l’administration elle-même,


e-services publics EXPERTISE

oublier les cinq années de RGPP et leur lot de réformes imposées d’en haut, avec une certaine brutalité parfois, que n’ont pas manqué de dénoncer les syndicats et les agents. « Il y a un vrai besoin de prise de parole sur le terrain », insiste Frédéric Petitbon, consultant du cabinet de conseil IDRH.

Volonté de rupture

le parti pris est de consulter la population pour réfléchir à la manière d’améliorer le fonctionnement du service public. Ensemble-simplifions, porté par Éric Woerth et mis en musique par l’ancienne direction générale de la modernisation de l’État (DGME), était cantonné aux usagers, sollicités autour d’un spectre très large de thématiques couvrant tous les domaines de la vie quotidienne : état-civil, déménagement, renouvellement de carte d’identité, etc. Cette démarche « participative » est aujourd’hui reprise par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, qui l’étend aux agents. Une manière sans doute de faire

L e g o u v e r n e m e n t Ay r a u l t , conscient des limites inhérentes à la démarche RGPP, le sait et multiplie les démarches bottom up (littéralement « de bas en haut ») à travers « sa » Modernisation de l’action publique, la « MAP ». Ainsi que l’exprime Nicolas Conso, chargé de piloter ces programmes de transformation au secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP), « la participation est inscrite dans les gênes de la modernisation de l’État ». Preuve que l’affaire n’est pas prise à la légère, le gouvernement en est d’ailleurs à sa deuxième initiative de

brainstorming sur le Web en huit mois à peine. La précédente plate-forme, ouverte entre le l er mars et le 30 avril derniers, dénommée Innover-simplifier, symbolisait déjà la volonté de rupture exprimée par le gouvernement dans la manière d’aborder la réforme de l’État. Au moment du lancement de ce site participatif, à Alençon le 1er mars, Marylise Lebranchu, ministre de la Réforme de l’État, résumait ainsi l’esprit de la démarche : « Cette participation ne doit pas se limiter, comme auparavant, au stade de la mise en œuvre des décisions prises. Je souhaite qu’elle s’ouvre aussi au stade des propositions. » La ministre soulignait la nécessité de l’implication des fonctionnaires : « Plus encore que les usagers, les agents, en contact direct avec eux, sont les mieux à même de proposer des pistes d’amélioration, de simplification, d’innovation ». Dont acte. Reprenant le modèle adopté pour Ensemble-simplifions, ouverte

« Il y a un vrai besoin de prise de parole sur le terrain. » Frédéric Petitbon, directeur général d’IDRH

aux particuliers, Faire-simple permet aux agents de faire des propositions, de les commenter, de donner leur avis et de relayer les propositions sur les réseaux sociaux. En cela, cette nouvelle plate-forme se veut plus ouverte encore que ne l’était Innoversimplifier, aujourd’hui fondue dans ce nouvel espace. D’ailleurs, le gouvernement prolonge la logique collaborative jusqu’à permettre aux agents d’échanger avec les usagers sur des solutions communes par le biais d’un espace spécifique. « La fabrique de solutions », accessible depuis un onglet, sera ainsi ouverte dans les prochaines semaines. Pour l’heure, la plateforme Faire-simple, comme l’ancienne Innover-simplifier, permet aux agents de déposer leurs contributions et de soutenir telle ou telle idée émise par un confrère. Mais en avant de poster une idée, chaque agent doit s’identifier et choisir un pseudonyme. Le filtre de l’identification peut-il freiner les ardeurs de la participation ? Pour Nicolas Conso, nullement : « La confidentialité est garantie aux agents », insiste ce dernier, qui se félicite des chiffres de la première …

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 131


EXPERTISE e-services publics

En chiffres Innover-simplifier en chiffres

DES ATELIERS PRATIQUES MONTÉS DANS DES PRÉFECTURES

4 000 agents inscrits

Les plates-formes Web ne sont pas le seul canal utilisé pour récolter les bonnes idées des agents. Dans les territoires, ces initiatives se sont prolongées par des ateliers collaboratifs associant physiquement les agents des préfectures et des services déconcentrés autour du chantier de la réforme de l’État. L’Orne, le Calvados, le Rhône, la Manche ont servi de départements expérimentateurs lors du lancement de la campagne « Innoversimplifier ». L’expérience s’est révélée positive pour Benoît Lemaire, sous-préfet du Calvados : « On pensait que les agents allaient prendre ça comme un gadget, et puis finalement ils se sont bien pris au jeu », se félicite ce dernier, qui avait constitué trois groupes métiers. Dans le département voisin de l’Orne, où un groupe de travail de 15 personnes avait été monté, la sauce de la participation a également bien pris et la démarche a été bien perçue pour Amaury Lebreton, chef du bureau des élections et des collectivités locales. Ces deux départements ont mené une consultation interne, avant de faire remonter leurs propositions au gouvernement. Le champ est large : dématérialisation des actes, mutualisation des services, etc. Certaines de ces propositions d’application locale seront mises en œuvre, avant d’essaimer, qui sait, dans d’autres départements.

3 000 contributions 61 % de propositions sur le fonctionnement interne 21 % de propositions sur la simplification 18 % de propositions sur l’amélioration du service aux usagers

… campagne

tion est très bas » et surtout, « on peut très vite descendre à un niveau de contributions du type café du commerce ». Trois semaines après l’ouverture de Faire-simple.fr, les contributions se montaient à seulement quelques dizaines, loin de la saturation… Mais plutôt que de s’arrêter au bilan chiffré, sans doute encore prématuré, ce qui compte avant tout est de bien calibrer l’exercice, puis de se livrer à un bilan qualitatif. Dessiner en amont un cadre de la consultation est

JACQUES DEMARTHON/AFP

au printemps dernier. Plus de 15 000 visites en deux mois, 4 000 agents inscrits : pour le SGMAP, le succès d’Innover-simplifier semble plutôt au rendez-vous, malgré les barrières de connexion. Du côté des syndicats, l’avis n’est pas le même. Simple « boîte à idées » pour la CFDT ou « sorte de sondage grandeur nature », l’idée des platesformes collaboratives n’est certes pas perçue négativement par les syndicats qui, comme la CGECGC, jugent l’initiative « intéressante ». Mais pour l’Unsa, à l’arrivée, « le niveau de participa-

un préalable nécessaire. Mais à condition de faire en sorte que la participation ne se transforme pas, comme le dit la CFDT, en « un exercice de communication ».

Campagnes ciblées Faire de la simplification de l’État par petites touches selon des campagnes ciblées, comme c’est le cas aujourd’hui, est ainsi plutôt bien vu des consultants. Bien pensé, l’exercice peut s’avérer porteur pour l’administration et les agents, dès lors que ceux-

Pour la ministre de la Réforme de l’État, Marylise Lebranchu, les agents sont les mieux à même de proposer des pistes d’amélioration.

132 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

ci auront le sentiment d’avoir été consultés selon les « règles de l’art de la participation », précise Frédéric Petitbon. À la limite, peu importe que toutes les propositions ne soient pas retenues ou le soient en nombre limité. C’est extrêmement variable d’une campagne à l’autre. À l’issue des périodes de consultation, un tri s’opère ainsi pour ne retenir que les propositions les plus réalistes. Dans le flot des réponses, certaines seront retoquées. Soit parce que le contexte socio-économique ne permet pas d’envisager de les mettre en œuvre, soit parce qu’elles ont déjà été arrêtées par ailleurs. Que les idées émises soient retenues ou pas, les agents doivent en être informés. Un exercice délicat, en forme de reconnaissance, dont l’administration n’est malheureusement pas toujours coutumière. Pour la petite histoire, le SGMAP avait promis de faire un retour nominatif à tous les agents qui avaient participé à la démarche Innover-simplifier. Mais cette bonne volonté ne s’est pas concrétisée, le gouvernement ayant buté sur la solution technique pour le faire. Les agents, au final, n’ont été destinataires que d’une synthèse globale, accessible à tous. La démarche de participation est un exercice qui ne s’improvise pas. ● Xavier Sidaner


Le Club des Acteurs DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

RENCONTRES

Le Club organise tout au long de l’année des rencontres informelles entre ses membres et des acteurs publics de premier plan. Les membres du Club sont associés aux Rencontres des acteurs publics, point d’orgue annuel des activités du Club.

ÉCHANGE D’EXPÉRIENCE En toute indépendance, acteurs et observateurs de premier niveau y débattent du contenu et des effets de l’action publique.

ACTION

Véritable laboratoire où s’analysent les initiatives d’aujourd’hui et les stratégies de demain, le Club est une base pour l’action. RETROUVEZ LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE sur club.acteurspublics.com

DR

LE PROCHAIN RENDEZ-VOUS DU CLUB

Vincent Mazauric, secrétaire général des ministères de l’Écologie et du Logement Modernisation du droit de l’environnement, simplification des procédures, transition écologique, regroupement des opérateurs : les ministères du Logement et de l’Écologie poursuivent leur transformation. Vincent Mazauric sera l’invité du Club des territoires durables le 15 novembre.

LES MEMBRES DU CLUB

VOTRE CONTACT : BASTIEN BRUNIS AU 01 46 29 29 24 - BBRUNIS @ACTEURSPUBLICS.COM


146

Le Club des acteurs

Le Club des territoires durables

TOUS ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

INITIATIVES D’AUJOURD’HUI ET STRATÉGIES DE DEMAIN

IBM : un nouveau visage au Club

AUX EXPERTS Retrouvez chaque mardi les tribunes

DR

La parole

LES CLUBS

134

des membres du Club des acteurs de la performance publique dans La Newsletter d’Acteurs publics

Marie-Noëlle Muller, nouvelle directrice « secteur public » d’IBM France, représentera dorénavant IBM au sein du Club des acteurs de la performance publique. Diplômée de l’ICS et d’un mastère en gestion marketing à l’Essec, elle a fait l’essentiel de sa carrière chez IBM, où elle a assumé de nombreuses responsabilités commerciales et managériales, tant en France qu’au niveau européen. ●

Marie-Noëlle Muller, directrice « secteur public », IBM

et sur www.acteurspublics.com

mn-muller@fr.ibm.com

Le rapide développement de sa population a imposé au gouvernement des îles Canaries d’entreprendre une transition numérique de ses services publics. Dans un contexte de restrictions budgétaires croissantes, le choix de logiciels open source lui a permis de réaliser une réduction drastique des coûts de virtualisation et une vraie prédictibilité des budgets. Un choix qui lui a également offert un accès permanent aux innovations technologiques développées par la communauté sans la contrainte du renouvellement de licences propre aux éditeurs propriétaires. Le choix de Red Hat Enterprise Virtualization, la solution de virtualisation open source la plus avancée

du marché, s’est imposé après avoir réalisé qu’elle lui assurerait 70 % d’économies par rapport à l’offre de virtualisation propriétaire initialement déployée par le gouvernement. Le gouvernement des îles Canaries a ainsi conduit la migration de 100 serveurs, supportant 1 000 machines virtuelles propriétaires, vers notre centre de virtualisation sans aucune interruption de service ni impact sur les utilisateurs, qui ont retrouvé une interface ergonomique très proche de celle de la solution précédente. Pour assurer la montée en charge de ses ressources informatiques, il recourt à la virtualisation, une technologie permettant d’optimiser l’efficacité des serveurs informatiques tout en procurant

KEBOX/FOTOLIA

Îles Canaries : virtualisation et modernisation

plus de flexibilité budgétaire. Un exemple pour les administrations françaises qui hésiteraient encore à libérer leur pratique de la virtualisation. Car d’autres voies auparavant dévolues au matériel propriétaire s’ouvrent maintenant à l’open source, conjugué à des serveurs classiques. C’est la nouvelle étape sur le chemin de la libéra-

HALEY/SIPA

Allemagne : open government Dans le cadre de l’e-government Summit qui s’est tenu dernièrement en Allemagne, les débats sur la modernisation de l’État se sont amplifiés. Simplification de la communication électronique avec l’administration, implication des citoyens dans les processus de décision politique et création de nouveaux modèles économiques offrant des perspectives pour les entreprises sont autant de nouvelles tendances. L’une des principales priorités auxquelles les administrations publiques et la classe politique doivent se consacrer est la modernisation des administrations, pour parvenir à un open government. D’un point de vue

134 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

tion du système d’information des infrastructures propriétaires, et des coûts associés. C’est dans cet esprit de réduction des coûts, de transparence et de sécurité que la circulaire Ayrault recommande aux administrations de développer l’usage de solutions libres dans leurs choix technologiques. Alors qu’une large majorité du secteur public français utilise encore des solutions propriétaires, le passage à la virtualisation open source offre, à fonctionnalités égales, des performances supérieures à celles de toutes les autres solutions du marché. ●

Jean-Christophe Siouffi, directeur « secteur public », Red Hat France

jsiouffi@redhat.com

informatique, il est nécessaire de se concentrer sur les critères d’automatisation et sur la création de portails self-service faciles à utiliser pour les citoyens. D’un point de vue technologique, il n’y a aucun obstacle à ce que des organisations géographiquement éloignées sur le territoire allemand utilisent les mêmes services informatiques. C’est au niveau organisationnel que la tâche est la plus complexe. En Allemagne aussi l’open data continue de crisper de nombreux représentants du secteur public. Pourtant, il s’agit simplement de l’accès et de l’utilisation libres de données déjà publiques. Seuls les utilisateurs dûment autorisés peuvent atteindre et modifier ces données sans risque de manipulation. Le défi aujourd’hui est de savoir jusqu’où doivent et peuvent aller


Acteurs de la performance publique LES CLUBS

emploi en ligne Dans le cadre du partenariat passé avec le département de l’emploi et des services à la famille de l’État de l’Ohio, nous avons mis en place une solution technologique en marque blanche permettant de présenter aux chômeurs de l’État toutes les opportunités de carrières. Depuis sa mise en ligne, ce site, « Ohio Means Jobs », a ainsi permis de centraliser plus de 200 000 C.V. de candidats vivant dans l’Ohio ou souhaitant s’y installer et permis à près de 8 000 recruteurs de

conduire des recherches de profils. Suite à ce premier succès, l’État de l’Ohio nous a confié la conception, le développement et la mise en place d’un portail d’emploi baptisé « One Stop ». Objectif : offrir aux utilisateurs la possibilité de rechercher non seulement des emplois, mais également des programmes d’enseignement, de formation et de nouvelles opportunités de carrière, ainsi qu’un accès à d’autres ressources clés étatiques ou locales se rapportant à l’emploi. De la même façon, nous avons pour le ministère britannique de l’Emploi et des Retraites (DWP) créé un service entièrement numé-

Afrique SAP, la société européenne de logiciels de gestion d’entreprises, dont la filiale pour l’Afrique est basée à Johannesburg, rafle la première place du classement des meilleurs employeurs du continent, établi par Top Employers Africa 2014. Sur un continent ou un tiers des pays ont un taux de croissance qui dépasse les 6 %, SAP a été « certifiée » dans quatre pays africains : la Côte-d’Ivoire, le Kenya, le Nigéria et l’Afrique du Sud.

les normes pour bâtir un cadre optimal tant économiquement que techniquement, sans mettre en péril la flexibilité, l’ouverture et les besoins individuels des différentes institutions. La modernisation du secteur public passe par le cloud computing, qui n’est désormais plus perçu comme une menace en termes d’intégrité et sécurité des données mais comme une solution sérieuse et peu onéreuse pour l’utilisation de services informatiques. L’hôpital universitaire de Leipzig ou bien encore le Bibliothèque nationale de Berlin l’ont récemment démontré. ●

Horst Robertz, directeur « secteur public », VMware Allemagne

hrobertz@vmware.com

rique d’aide à la recherche d’emploi, à la fois évolutif, moderne et riche en contenu, convivial pour les candidats comme pour les employeurs et les recruteurs. Ce type de partenariats entre opérateurs privés et organismes publics en charge de l’emploi permet de rassembler les expertises des deux parties au service de la rencontre entre candidats et recruteurs. En France, après avoir fait le choix en 2009 de solliciter les opérateurs privés de placement (OPP) pour accompagner les demandeurs d’emploi, Pôle emploi a cette année, pour la première fois, permis l’indexation sur son site d’offres

d’emploi publiées sur d’autres plates-formes. Pour toutes les personnes à la recherche de nouvelles opportunités professionnelles, c’est une petite révolution qui se traduit concrètement par du temps gagné dans la phase d’identification des offres, un temps qu’elles pourront mettre à profit pour mieux travailler leurs candidatures et gagner ainsi en employabilité. ●

Gilles Cavallari, directeur général de Monster France, Espagne, Belgique et Luxembourg DR

États-Unis et

Gilles.cavallari@ monster.fr

Belgique : fraude à la TVA La fraude à la TVA de type « carrousel » est un système sophistiqué permettant de récupérer les trop-perçus de TVA via la création puis la suppression rapide de sociétés fictives dans plusieurs pays de l’Union européenne. En 2012, sur un montant total de fraude à la TVA de 107 milliards d’euros dans l’UE, 42 milliards étaient imputables au « carrousel ». En France, 32 milliards d’euros manqueraient à l’appel chaque année, dont près de 13 milliards directement liés à ce type de fraude. Sa complexité vient de ce que plusieurs pays et secteurs d’activité sont impliqués, de son caractère dynamique, du nombre d’intermédiaires impliqués, du contraste avec la simplicité avec laquelle les fraudeurs parviennent à leurs fins. Face à cela, les États mettent en place des stratégies de détection plutôt que de prévention qui reposent principalement sur des processus manuels avec des délais de traitement très longs. Cette faiblesse permet aux fraudeurs de persévérer impunément. Pourtant, il existe des solutions car les administrations fiscales peuvent s’appuyer sur la puissance de l’analytique pour optimiser les processus de détection, mais aussi de prévention et de recouvrement. Il existe des solutions pour collecter, classifier et gérer les données nécessaires à l’indus-

KENDRYSDALE - DABOOST/FOTOLIA

trialisation de la lutte antifraude. Ces solutions permettent de vérifier que tous les cas ont été vérifiés, de partager les informations avec d’autres pays, de s’assurer du bon fonctionnement des scénarios de lutte contre la fraude et de communiquer sur l’évolution des fraudes, les actions mises en place et les montants recouvrés. Mise en œuvre en Belgique, une solution de ce type a aidé l’administration fiscale à récupérer plus d’1 milliard d’euros de fraudes. Le taux de faux-positifs a été réduit pour aboutir à un taux de réussite de 80 %. La réussite de ce projet, largement relayée par la communication gouvernementale et les médias locaux, décourage et déstabilise les fraudeurs. Côté opérationnel, le délai de préparation des investigations, qui atteignait trois semaines, est passé à 5 minutes. En quelques années, la fraude au « carrousel » a pratiquement disparu de Belgique.

Alexandre Kurtz, Business Solution Manager, risque et fraude, SAS France

Alexandre.kurtz@sas.com

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 135


LES CLUBS Acteurs de la performance publique

L’État et les associations cipalement du secteur public. En matière de santé : aux États-Unis, plus de la moitié des hôpitaux sont privés, sans but lucratif, et représentent 46 % du secteur non lucratif américain. En Belgique et en Allemagne, le secteur de la santé est fortement représenté dans le secteur associatif. En matière de défense des droits civiques : cette part est importante en Suède, où de nombreuses organisations de consommateurs, souvent liées aux syndicats, existent. De même qu’en Afrique du Sud où la défense des droits civiques est bien plus importante que dans les autres pays.

Cette étude recense certaines « bonnes pratiques » qui méritent d’être retenues, telles que le fundraising de type anglo-saxon décomplexé et efficace, l’évaluation des performances liées aux services rendus par l’association, des contrôles adaptés à la taille de la structure avec un renforcement du contrôle interne. Sur le plan fiscal, on peut distinguer une exonération des recettes lucratives dans la mesure où elles profitent pleinement à l’accomplissement de l’objet associatif et une déductibilité fiscale des dons accrue ou adaptée en fonction de programmes d’activité jugés

prioritaires. Sur le plan juridique, de nouveaux modèles qui ont fait leurs preuves comme les coopératives sociales italiennes devraient être étudiés. Enfin, la constitution de réserves obligatoires pour les associations afin de financer leur fonds de roulement et les contrats de leurs salariés ou la création d’agences de promotion du bénévolat retiennent l’attention. ●

Jean-Pierre Vercamer,

DR

Les résultats de notre étude comparative des structures associatives de 20 pays présentés à l’occasion du 8e Forum national des associations et fondations permettent d’apprécier les principales différences existantes sur le plan juridique et fiscal en termes de gouvernance, de sources de financement et de rôle de l’État. Le rôle de l’État se fait sentir de façon variable dans le budget global du secteur associatif dans trois secteurs en particulier. En matière d’éducation : en Belgique, l’éducation est un secteur prédominant alors qu’en Allemagne et en Suède, ce secteur relève prin-

associé responsable du secteur associatif chez Deloitte

jvercamer@deloitte.fr

PIT-FAL/FOTOLIA

Grande-Bretagne : performance publique En Grande-Bretagne, le Plan stratégique pour une nouvelle génération de services partagés défini par l’État a pour objectif de générer des gains de productivité en amenant les ministères à partager des fonctions supports telles que les ressources humaines, les achats, la comptabilité ou encore la paie. C’est dans ce cadre qu’à Swansea, dans le sud du Pays de Galles, nous avons racheté un ancien centre de services du ministère des Transports britannique et repris près de 200 employés. Ce centre fournira des services administratifs à ce ministère ainsi qu’à d’autres agences gouvernementales selon les termes d’un contrat de sept ans renouvelable par périodes de trois ans permettant ainsi à l’administration de réaliser des économies d’échelle significatives et à notre société de développer son activité en répondant aux appels d’offres d’externalisation d’autres entités gouvernementales. Cet accord est le fruit d’années de collaboration avec le conseil d’arrondissement des métropoles de Sefton, de Chesterfield ou de Slough, pour lesquelles nous avons généré des gains de productivité et apporté des améliorations en continu. Ce partenariat avec ces institutions locales a ainsi ouvert la 136 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

voie à ce partenariat avec le gouvernement central. Appuyée sur la plate-forme de planification des ressources d’entreprise (ERP) Agresso, notre solution offre un nouveau mode opératoire dédié aux fonctions de back-office, elle est basée sur les meilleures pratiques du marché, les économies d’échelle et les processus standardisés, pour créer de la valeur et offrir des services de grande qualité. Au-delà de cette solution technique, nous avons accompagné avec attention le transfert du services et surtout celui des personnels du ministère des Transports. Tous ont été formés à la méthode Lean Six Sigma, une technique éprouvée qui donne aux salariés les compétences nécessaires pour identifier où et comment améliorer leurs propres systèmes de travail. Parallèlement, des ateliers de cartographie des process ont permis d’identifier toutes les pistes d’optimisation relatives aux services transférés – une méthode qui sera le ciment d’une nouvelle culture de l’amélioration permanente. ●

Debra Maxwell, directrice générale du département « Service public » d’arvato UK Debra.Maxwell@arvato.com


Acteurs de la performance publique LES CLUBS

En Inde, la mise en place d’une carte d’identité à l’échelle de tout le pays implique pour les autorités la création de la plus grande base de données biométriques mondiale, regroupant les informations personnelles de plus d’un milliard d’individus. Une révolution est en marche. Un numéro d’identifiant unique sera bientôt attribué à chacun des 1,2 milliard de résidents indiens, ce qui n’a jamais été tenté ailleurs dans le monde. Cette démarche audacieuse et nécessaire permettra aux Indiens d’accéder à des services de base, tels que l’ouverture d’un compte bancaire, mais aussi d’améliorer la transparence et l’intégrité du service public. Sous l’autorité d’une nouvelle institution dédiée, l’UIDAI (Unique Identification Authority of India), une plate-forme en ligne sécurisée a été mise en place avec l’objectif de collecter à terme 12 milliards

SANJIT DAS/PANOS-REA

Inde : la révolution numérique de l’administration

d’empreintes digitales, 2,4 milliards de captures d’iris et 1,2 milliard de photographies, et de fournir à chaque Indien un numéro unique d’identité à 12 chiffres. Depuis le lancement de cette politique en septembre 2010, l’UIDAI a accéléré la cadence et attribue désormais un million de numé-

ros d’identité par jour. La base de données biométriques indienne est aujourd’hui la plus importante du monde, avec plus de 400 millions de résidents déjà enregistrés. Cette nouvelle infrastructure centrale d’identification, dont les équipes d’EY en Inde ont accompagné le développement, porte en

elle de nombreuses opportunités de progrès économique et social. L’UIDAI a ainsi créé des platesformes numériques où le numéro d’identité permettra les paiements via téléphone mobile ou tablette, les transferts d’argent ou le versement de prestations sociales (bourses, allocations retraite ou paiements liés aux soins de santé). Au-delà du secteur public, le système intéresse les acteurs privés, qui y voient de possibles applications dans le domaine éducatif, médical ou bancaire. À terme, on ne peut que souhaiter que cette vaste plate-forme – et l’écosystème qu’elle est en train de faire naître – permette au plus grand nombre d’Indiens de s’associer à la dynamique de croissance économique et sociale de leur pays. ●

Guru Malladi, associé EY India Government & Public Sector (GPS) Advisory Leader

guru.malladi@in.ey.com

Europe : m-santé précoce des maladies chroniques et en limitant le coût des traitements associés, la m-santé permettrait, d’ici 2017, à 815 000 patients atteints de maladies chroniques d’être diagnostiqués plus tôt, soit une économie de 3,7 milliards d’euros pour les États européens. Le recours à la m-santé permettrait l’administration de soins à distance, réduisant le nombre de jours d’hospitalisation. Cela aiderait 141 millions de patients à gérer plus simplement leur santé. Alors que de nombreux États membres de l’UE souffrent d’une pénurie de médecins et d’infirmières, en mettant à disposition un système d’informations et d’analyses plus performant, la m-santé initierait le traitement de 24,5 millions de patients supplémentaires à nombre de médecins et d’établissements équivalents en 2017.

Selon notre étude, l’atteinte de ces effets positifs suppose l’intégration rapide de la m-santé dans la stratégie de santé publique de l’Union européenne. Pour ce faire, les États membres doivent lever de nombreux freins d’ordre réglementaire, économique, structurel et technologique, qui limitent son développement, tels qu’une absence de modèle économique pérenne, de réglementation cohérente sur la m-santé et de normes technologiques, ce qui nuit à l’innovation et réduit les investissements. ●

Élisabeth Hachmanian, associée PwC

elisabeth.hachmanian@ fr.pwc.com DR

Selon notre dernière étude « Socio-economic impact of mHealth », le déploiement de la technologie mobile dans le domaine de la santé, ou m-santé, permettrait d’économiser 99 milliards d’euros sur les dépenses de santé en 2017 et d’augmenter le PIB de l’Union européenne de 93 milliards d’euros grâce à l’amélioration de l’état de santé qui réduirait la perte de jours de travail et les retraites anticipées. Avec plus de 300 millions d’Européens fumeurs, en situation d’obésité ou souffrant d’hypertension, la m-santé peut contribuer à renforcer la prévention et sensibiliser les citoyens à l’adoption d’un mode de vie plus sain. La m-santé éviterait ainsi 589 000 maladies chroniques et permettrait d’économiser 2,6 milliards d’euros. En accélérant le processus de diagnostic

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 137


LES CLUBS Acteurs de la performance publique

En Europe, il existe de nombreuses formes d’interaction entre la jeunesse et le secteur public via le médecin généraliste ou le pédiatre qui surveille son développement physique et les travailleurs sociaux qui évaluent les risques ou enquêtent sur les allégations et étudient les plaintes visant les familles. Chacun de ces acteurs détient des pièces du puzzle qui permettent d’assurer, une fois assemblées, la protection de l’enfance. Toutefois, la fragmentation de l’information entre les différentes instances, sur un plan organisationnel et géographique, est l’un des plus

AMAURY MILLER/HH-RÉA

Pays-Bas : aide sociale à l’enfance

grands défis auxquels doivent faire face les services sociaux de tous les pays d’Europe. À défaut d’être rassemblées, les pièces du puzzle, bien que présentes, ne permettent pas d’apprécier l’ampleur de la situation, à savoir si l’enfant court un danger quelconque.

Le Conseil néerlandais de protection de l’enfance a relevé le défi de rassembler les informations sur les mineurs, les familles et les partenaires de cet ecosystème ainsi que sur les modalités d’intervention et de gestion, disséminées entre les 22 sites du Conseil. L’objectif était de relier les systèmes et les bases de données, pour simplifier la gestion des dossiers. Grâce à nos solutions Oracle Public Secteur, le Conseil néerlandais de protection de l’enfance est désormais capable de centraliser les dossiers et de les traiter de manière uniforme. Une solution qui nous permet de mieux protéger les enfants qui nous sont confiés, n’hésite pas à souligner Peter Siebers, directeur du Conseil néerlandais de protection de l’enfance.

Cette solution progicielle permet d’aider les acteurs sociaux dans l’amélioration de la prise en charge des cas grâce à l’accès instantané au dossier par les utilisateurs autorisés, la détermination des modalités d’intervention et de gestion, la réactivité accrue assurée par les liens entre les partenaires de la chaîne agissant pour la protection de la jeunesse. C’est aussi le cas au Danemark où le National Child at Risk system a déployé la même solution sur 60 municipalités, leur permettant ainsi de se transmettre les dossiers en un clic. ●

Christian Wernberg-Tougaard, directeur, Social Welfare Industry Lead Global Public Sector Industry Business Unit (GPS IBU), Oracle

christian.wernberg-tourgaard@ oracle.com

Monde : pratiques de santé La tentation est grande, quand on travaille dans plus d’une soixantaine de pays au monde, de prendre le meilleur de chacun et de former le système de santé idéal qu’il suffirait ensuite d’appliquer partout. Cette démarche est utopique mais elle recèle néanmoins quelques éléments de vérité car le benchmarking, l’innovation, la bonne gouvernance sont autant de domaines et d’outils dont l’universalité et l’efficacité sont réelles. Notre recherche* a mis en lumière les meilleures pratiques de gestion de la santé et de l’e-santé dans 15 pays d’Europe, en Asie et dans le Pacifique et aux États-Unis, et nous pensons que l’on peut en tirer les conclusions suivantes. La comparaison de pratiques et de prises en charge médicales peut se heurter à des différences culturelles même si partout, la meilleure façon d’utiliser le temps médical est de le consacrer à la clinique, au geste technique et non à l’administration. L’innovation en santé se propage relativement vite quand il s’agit d’une molécule, d’un vaccin ou d’un matériel: La pose de nouveaux stents, la propagation de la résonnance magnétique ou les robots chirurgicaux en sont des

témoins évidents. A contrario, ce qui relève des pratiques humaines et des habitudes demande beaucoup plus de temps. Dans le domaine des nouvelles technologies appliquées à la santé, on connaît désormais les facteurs de réussite : atteindre rapidement une masse critique, piloter l’e-santé comme un projet métier (et non informatique), faire correspondre l’intérêt des acteurs (l’alignement collaboratif) et provoquer une rupture dans les pratiques. Ce qui est réconfortant pour des pays en développement car ils n’ont pas forcément à passer par les étapes qu’ont connues les pays développés. En matière de gouvernance, on est tenté de

SASHKIN/FOTOLIA

138 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

penser que les structures nationales d’entreprises ou d’administration s’imposent au domaine de la santé. L’étude des meilleures organisations mondiales démontre au contraire que quatre éléments constitutifs sont essentiels : une culture entièrement tournée vers la qualité, une obligation de rendre compte et une responsabilité individuelle clairement établie, l’optimisation et la normalisation des processus et enfin la mesure systématique de la qualité, autrement dit, l’évaluation. ●

Mark Britnell, chairman of global health practice KPMG, UK mark.britnell@kpmg.co.uk Benoît Pericard, directeur des activités santé France, KPMG

benoit.pericard@kpmg.fr * «Accelerating Innovation : The power of the crowd – Global lessons in eHealth implementation» «The More I know,the less I sleep – Global Perspectives on clinical governance» http://www.kpmg.com


Acteurs de la performance publique LES CLUBS

Sénégal :

Espagne :

digital et santé

Les besoins des patients chroniques sont aujourd’hui un des principaux défis du système de santé car ils représenteront environ 80 % des coûts de l’assurance maladie en 2015. Pour y répondre, la Stratégie nationale de santé présentée par la ministre de la Santé, Marisol Touraine, le 23 septembre dernier, pose les principes d’un nouveau mode de prise en charge centré sur le patient et la coordination des soins. Par ailleurs, notre système de santé est complexe et les processus doivent y être repensés, les parcours décloisonnés et les financements adaptés à des prises en charge continues et multiprofessionnelles, à l’image de ce qui a été fait dans d’autre pays européens. À titre d’illustration, Accenture a accompagné le gouvernement du Pays basque espagnol dans la mise en œuvre d’une stratégie complète, pour faire face à l’enjeu de la chronicité, dans laquelle les technologies de l’information et l’organisation des services occupent un rôle majeur. Face à des dépenses de santé en croissance constante depuis 2005, le Pays basque espagnol propose, selon une approche populationnelle et en complément de l’offre de soins traditionnelle, une prise en charge personnalisée des patients chroniques, des téléconsultations pour les soins de premiers recours et une gamme de services en ligne comme le conseil médical, la prise de rendez-vous ou l’éducation thérapeutique par exemple. L’utilisation des outils numériques optimise la prise en charge et la coordination du parcours du patient, facilite les échanges entre malades et professionnels, réduit l’impact des traitements sur le quotidien des patients et assure une meilleure flexibilité et réactivité des professionnels. En outre, au-delà des bénéfices qualitatifs perçus par le patient et les professionnels de santé, le premier rapport (2009-2012) de cette politique présente des résultats sans équivoque : une stabilisation des dépenses de santé après une croissance continue entre 2005-2008, une augmentation des hospitalisations à domicile de + 48,9 %, une diminution des hospitalisations non programmées, des réhospitalisation ou du passage aux urgences. ●

Kiryakos Chebel, directeur de l’activité de conseil d’Accenture secteur santé

kiryakos.chebel@accenture.com

DAVID SNYDER/ZUMA/RÉA

FRANCOIS PERRI/REA

e-gouvernement Au Sénégal, de nombreux enfants ne sont pas déclarés à leur naissance, leurs parents habitant trop loin des centres d’état-civil. Or les certificats de naissance sont nécessaires pour l’inscription à l’école et pour bien d’autres démarches administratives. Pour résoudre ce problème, nos avons développé une application, testée avec succès dans la région de Kolda, permettant aux chefs de village de déclarer la naissance des enfants depuis un téléphone mobile standard. La téléphonie mobile a connu un développement extraordinaire en Afrique au cours des dix dernières années, avec un taux de pénétration estimé à 63 % en 2013 et continuant sa progression. Si l’Afrique reste loin derrière les autres continents dans le développement de services d’e-gouvernement et dans la numérisation de ses administrations (enquête e-Gouvernement 2012 de l’ONU), le continent s’affirme comme un véritable laboratoire de nouveaux usages de la téléphonie mobile, notamment pour les services aux citoyens. À Madagascar, un projet de coopération avec le ministère de l’Éducation nationale, cofinancé par l’AFD et l’AUF, a permis de sécuriser le paiement des salaires des enseignants, grâce à l’utilisation des services bancaires mobiles « Orange Money », et d’améliorer l’encadrement pédagogique à distance. Au Sénégal, le Réseau national des laboratoires a renforcé sa capacité de surveillance des épidémies et formé ses techniciens par des applications mobiles de collecte de données et de « m-learning » (projet Voices). Outre ces services développés en partenariat avec les institutions gouvernementales, une nouvelle génération de services publics digitaux de citizensourcing est en train d’émerger, basée sur la mobilisation de l’intelligence collective. Initiés par des acteurs privés ou des ONG, de tels services ont été développés au Kenya lors des élections de 2008 pour rapporter les actes de violence, au Ghana ou en Tanzanie pour permettre de cartographier les ressources naturelles et les points d’eau. Afin d’encourager de telles initiatives, certains gouvernements (Kenya, Afrique du Sud, etc.) rendent disponibles des données publiques dans le cadre d’initiatives open data. L’e-gouvernement permet ainsi d’espérer une amélioration radicale de la sphère publique en Afrique d’ici quelques années : accès aux services publics pour le plus grand nombre d’usagers, amélioration sensible des services urbains dans les grandes métropoles, efficacité et meilleure productivité pour l’ensemble de l’administration nationale et locale. Une révolution à laquelle nous sommes fiers de participer. ●

Muriel Charbonnier, directrice « secteur public », Orange Business Services muriel.charbonnier@orange. com

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 139


LES CLUBS Acteurs de la performance publique

Royaume-Uni : sécurité des événe

ODD ANDERSEN/AFP

L’été 2012 a été riche en événements de portée internationale pour le Metropolitan Police Service (MPS) londonien : jeux Olympiques et Paralympiques, sans oublier le jubilé de la reine ! Tirant les leçons de quatre jours d’émeutes en 2011, lors desquels les réseaux sociaux avaient fortement contribué à attiser le feu, le MPS avait décidé de se doter d’une solution d’analyse des médias sociaux (Social Media Analysis). À l’approche des J.O., l’objectif était de se concentrer sur l’analyse d’une trentaine de médias sociaux clés (dont Twitter, YouTube,

Paroles d’élus

L’époque actuelle connaît une accélération des changements économiques et sociaux : l’urbanisation croissante, le vieillissement de la population, les préoccupations de certains pays en matière de développement économique et d’endettement, leur aspiration à mieux vivre ensemble… Tous ces bouleversements impactent les modes de vie des populations. L’Internet of everything (IoE) peut jouer un rôle prépondérant dans ce contexte.

BEBOY/FOTOLIA

Rappel : le nouvel opus de Paroles d’élus vient de paraître. Un ouvrage qui apporte aux décideurs et acteurs locaux une vue d’ensemble sur les initiatives digitales des territoires. Une démarche éditoriale fédérée par Orange qui regroupe 9 associations nationales d’élus locaux représentatives de la diversité des territoires : AMF, ADCF, AMGVF, A M R F, A n e m , A P V F, CNER, Fédération des EPL, FVM et Orange. Car aujourd’hui, du plus petit village à la métropole, être élu, c’est nécessairement être numérique !

Villes monde

140 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

les blogs influents et locaux) et d’identifier les contenus et les personnes « à risque ». Mais comment retrouver une aiguille au milieu d’une botte de foin ? Pour ne parler que de Twitter, le pic d’activité a frôlé les 3,3 millions de tweets émis depuis la ville de Londres le jour de la cérémonie d’ouverture des J.O. Grâce à la solution HP Autonomy, le MPS a pu faire une analyse en quasi-temps réel de l’activité des réseaux sociaux, identifier les influenceurs néfastes, collecter immédiatement les messages inappropriés, désamorcer les fausses rumeurs…

Internet connecte de plus en plus d’objets, capte les événements instantanément et en tous lieux, transporte un volume de données considérable, des données qui associées les unes aux autres apportent de la valeur et contribuent à offrir un meilleur service aux citoyens. De l’éclairage public aux réseaux énergétiques, du stationnement à la gestion des déchets, de la planification urbaine à l’infrastructure, les enjeux sont considérables. Le défi n’est pas que systémique. Rio de Janeiro, Barcelone, Nice, Amsterdam et Chicago sont d’excellents exemples de villes qui ont pris l’initiative de traiter simultanément les questions d’efficience de gestion et d’amélioration des services à la population. L’Internet of Everything doit permettre de réconcilier avancées citoyennes et efficacité économique. S’agitil d’un choix de société ou d’un choix d’organisation ? Une stratégie de territoire intégré est essentielle pour répondre aux défis des mégalopoles. Transformer la ville au bénéfice du citoyen passe assurément par une évolution de la gouvernance vers une plus forte synchronisation des acteurs et une meilleure convergence des infrastructures. La capacité à saisir les opportunités immenses représentées par la connexion de milliards d’objets à la vitesse de la nouvelle génération d’Internet est à ce prix. ●

Wim Elfrink, Executive Vice President Industry Solutions Group & Chief Globalization Officer, Cisco Member of the US India Business Council, of the Silatech Board in Qatar and of the New Cities Foundation Board welfrink@cisco.com


Acteurs de la performance publique LES CLUBS

Espagne :

ments s’enrichit de sa propre expérience, apporte un soutien indispensable à la surveillance de centaines d’écrans de contrôle et économise des interventions inutiles. Avec ce système, le MPS a pu mieux comprendre les mécanismes d’engagement des réseaux de délinquance, identifier plus rapidement des problèmes potentiels et donner aux forces de l’ordre les bons éléments pour agir plus promptement et plus efficacement. ●

Philippe Roux, responsable « marketing cloud », HP France philippe.roux@hp.com

Maroc : le capital humain, ami de l’organisation L’optimisation d’une organisation consiste à modéliser une chaîne de valeur pour rationaliser ses processus, le cas échéant suggérer des investissements et rédiger des manuels de procédures afin que chacun sache ce qu’il a à faire pour que son travail ait la meilleure complémentarité avec celui de ses collègues. Le facteur humain risque ainsi d’être écarté de cette démarche, comme un grain de sable, un élément perturbateur dans une mécanique bien huilée. L’ingénierie des processus a fait ses preuves depuis la révolution industrielle et ses gains de productivité demeurent importants, y compris dans le secteur des services. Elle repose sur les principes tayloriens de division du travail et de séparation des fonctions de décision et d’exécution, où le capital humain se résume à une mesure transparente et objective de l’adéquation poste-profil, au moyen de diplômes, d’examens, ou d’années d’expérience. Or on sait aujourd’hui qu’une organisation totalement rationnelle reste un idéal type, qui ne tient pas compte des motivations et de la personnalité des agents. Et qu’aucune transformation n’est possible sans l’adhésion de ceux qui devront la mettre en œuvre. Leur connaissance des opérations au quotidien font de la conduite du changement un véritable défi de leadership. Seul le management participatif permet d’identifier les bons interlocuteurs, trouver la bonne alchimie entre charisme et compétence, intelligence et dévouement et actionner tous les leviers de motivation psychologique. La transformation obtenue sera le résultat d’interactions et d’échanges autant que de modélisation théorique. Davantage qu’une somme de compétences, le capital humain est ainsi une dynamique de groupe, qui se construit tout au long de l’aventure commune, pour former la culture d’entreprise. Quel que soit le secteur considéré, industrie ou services, public ou privé, le conseil en organisation, pour réussir, doit trouver la synthèse entre la technicité du métier et la sociologie de ceux qui l’exercent. ●

Nabil Bayahya, Executive Partner de Mazars Maroc nabil.bayahya@mazars.ma

JRSTOCK/FOTOLIA

Les moteurs d’analyse de cette application permettent de scruter des flux de données structurées et non-structurées (les vidéos, les photos, les tweets, les SMS…) afin de détecter au sein de ce déluge permanent d’informations des tendances comportementales, d’identifier des relations entre thèmes de débat ou certains groupes d’expression. Les résultats de ces analyses sont filtrés et mis en forme dans des tableaux de bord personnalisés pour chaque équipe de surveillance et d’intervention, accessibles sur le terrain depuis des tablettes et des smartphones. Ce système

l’innovation au service de la ville

Les villes sont des poumons économiques qui contribuent à 80 % du PIB mondial. Elles sont toutefois confrontées à des défis majeurs comme leur densité croissante, la modernisation des infrastructures, l’adaptation aux ressources naturelles ou la protection en termes de santé, sur fond de contraintes financières fortes. Avec le potentiel des nouvelles technologies et la popularisation de leurs usages, les villes ont désormais les moyens de répondre à ces enjeux et offrir de nouvelles opportunités, économiques et sociales, aux citoyens. Je voudrais citer en exemple la ville de Barcelone, longtemps reconnue comme un innovateur numérique. Elle a exploité avec succès le cloud, le potentiel des données et les applications afin d’augmenter l’efficience administrative, mieux interagir avec les citoyens et être plus transparente. La ville a mis en place des outils collaboratifs de dernière génération pour les agents mobiles comme la police et les pompiers, un outil de GRC pour les actions sociales. Elle a lancé OpenData BCN, une initiative visant à mettre les données à la disposition des citoyens. Une multitude de données sur la ville, comme la densité de population ou les chiffres du chômage, est réunie sur une base centrale dont la sécurité a été renforcée. Les habitants ont ainsi la possibilité de télécharger l’application Bigov Better City Indicators, un véritable tableau de bord qui permet de connaître les chiffres de la ville en temps réel. Les Barcelonais disposent ainsi d’informations utiles pour prendre toute sorte de décisions, notamment où implanter une entreprise et où s’installer en famille. Partenaire des villes pour accélérer l’innovation, notre entreprise a lancé une initiative mondiale : Microsoft CityNext. Grâce à notre réseau international de partenaires et à nos experts fournisseurs de solutions, nous proposons une approche centrée sur l’individu et conçue pour aider les villes à mettre en œuvre des solutions technologiques répondant aux besoins en matière de transports publics, d’énergie, de santé ou d’éducation, tout en impliquant les citoyens, les entreprises et les administrations. ●

Laura Ipsen, Corporate Vice President, Public Sector, Microsoft Corporation citynextfrance@microsoft.com

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 141


LES CLUBS Acteurs de la performance publique

Cisco lance le Défi Cisco PIAI/FOTOLIA

Le Défi Cisco est un concours qui récompense des étudiants ayant développé un projet entrepreneurial répondant à des enjeux sociaux et environnementaux au moyen de solutions collaboratives. Objectif : stimuler l’innovation sociétale avec le support des technologies de l’information Ciscoet aider les jeunes talents d’aujourd’hui à construire les organisations de demain. Candidature avant le 1er décembre sur : www.cisco.com/web/FR/events/ledeficisco

VINCENT BAILLAIS

RENCONTRE AVEC Jean Bassères

« Donner plus de marges de manœuvre aux agents »

Jean Bassères, directeur général de Pôle emploi, était l’invité du petit déjeuner du Club des Acteurs de la performance publique. L’occasion de détailler les transformations de l’établissement : accompagnement des demandeurs d’emploi, services aux entreprises…

la lutte contre le chômage est l’un des principaux objectifs du gouvernement, Pôle emploi se transforme : accompagnement des demandeurs d’emploi, services aux entreprises, réorganisation interne… Une nouvelle offre de services a été arrêtée en quelques mois par la direction pour donner davantage de marges de manœuvre aux agents sur le terrain dans un souci de plus grande proximité avec les usagers.

Trois types d’accompagnement Avec son plan stratégique couvrant la période 2013-2015, Pôle emploi entend se placer au plus près des attentes des employeurs et des demandeurs d’emploi. C’est ce qu’a détaillé Jean Bassères, le directeur général de l’établissement, devant les membres du Club des Acteurs de la performance publique, réunis le 25 septembre au dernier étage du siège des bureaux de Pôle emploi (photos). Alors que

L’activité de Pôle emploi mesurée depuis Paris via une batterie d’indicateurs, c’est fini. Désormais, les agents, dont la professionnalisation se poursuit, peuvent décider plus librement des modalités de l’entretien avec chaque demandeur d’emploi. Celui-ci bénéficie, en fonction de son profil, de trois types d’accompagnement : accompagnement « renforcé », « guidé » ou « de suivi et d’appui à la recherche d’emploi ». Plus lisible, ce nouveau

142 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

système facilite la prise en charge dans une période de grande tension sur le marché du travail. Il s’est accompagné de moyens accrus. Ces derniers mois, quelque 4 000 agents ont ainsi été recrutés en CDI, dont la moitié financée par Pôle emploi. Une bouffée d’air bienvenue pour une administration confrontée à un équilibre délicat entre « charge et ressources ». La politique de lutte contre le chômage se jouant au plus près des bassins d’emploi, les agences réparties sur le territoire ont davantage de latitude. Les aides sont désormais « fongibles » pour offrir une plus grande souplesse aux directeurs d’agence dans l’emploi des crédits qui leur sont alloués. Pôle emploi doit maintenant affiner ses partenariats avec les missions locales et les collectivités locales. L’organisme doit aussi poursuivre la réduction de ses coûts de fonctionnement en maintenant la qualité de son dispositif. La direction s’y attache. ●


Lancement du Club Santé publique à l’occasion de la 6e édition des Rencontres des acteurs publics et de l’intervention de Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé.

Un Club de la rédaction d’Acteurs publics pour associer experts et observateurs à la réflexion sur la rénovation du secteur de la santé et des affaires sociales

Pour toute information sur le Club Santé publique et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com


sas forum ®

-9(5*, TRAITER LA DONNÉE POUR COMBATTRE LA FRAUDE OU DÉVELOPPER LA RECHERCHE Retrouvez les acteurs du pass secteur public au SAS Forum 2013. « DATA ET MODERNISATION » Ouvrir l’information pour donner du pouvoir aux citoyens par Caroline Denil, 1

DataWareHouse Program manager du service public fédéral Économie belge.

1

2

2 Delphes : comment construire un référentiel de traitements et de métadonnées par Romain

Fouray, inspecteur analyste, DGFIP.

La modernisation de l’action publique passe par l’open data. Rencontre animée 3

par Acteurs publics au café de l’événement avec Alexandre Quintard-Kaigre, chargé des affaires publiques et juridiques, mission Etalab, et Marcel Lemahieu, principal business solution manager, SAS.

5

Sylvie Billard, chargée de mission, Asip Santé. 4

5 David Faggionato, consultant MOA, CNAMTS.

« DATA ET FRAUDE » L’analytique au service de la lutte contre la fraude ðVFDOH HW VRFLDOH Rencontre 6

animée par Acteurs publics au café de l’événement avec Jennifer Bouaziz, directrice du projet fraude, direction de la Sécurité sociale,

8

9

10


Le pass secteur public en partenariat avec Les 5 et 6 novembre 2013

AU CNIT PARIS LA DÉFENSE PHOTOS : VINCENT BAILLAIS

Nadia Joubert, chargée de mission, délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF), et JeanLoïc Berthet, responsable de l’offre Lutte contre la fraude et les crimes ÄUHUJPLYZ :(:.

3

4

7 Nicolas Thomas, responsable MOA Maîtrise des risques, Pôle emploi. 8 Lutte antiblanchiment HW IUDXGH ðVFDOH par Jean-Loïc

Berthet, responsable de l’offre « Lutte contre la fraude et les crimes ÄUHUJPLYZ ® :(:

Maîtrise des risques de fraudes et paiements indus 9

par Daniel Buchet, responsable du département « Maîtrise des risques L[ S\[[L JVU[YL SH MYH\KL ® n SH *UHM

« DATA ET SANTÉ » 6

Le traitement statistique des bases de données de l’assurance maladie : son intérêt pour la recherche en santé par le docteur Philippe 10

Ricordeau, département des études en santé publique, direction de la stratégie, des études et des statiques, CNAMTS.

Visualisation des données hospitalières. Rencontre animée 11

7

11

par Acteurs publics au café de l’événement avec le professeur Didier Sicard, président du comité d’experts de l’Institut des données de santé (IDS), ancien président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique (CCNE), Francis Destin, responsable des solutions santé et pharma, SAS, et Denis Raynaud, adjoint au sous-directeur de l’observation de la santé et de l’assurance maladie, DREES, ministère des Affaires sociales et de la Santé.


LES CLUBS

Territoires durables

La parole

Acteurs publics a créé le Club des territoires durables. Véritable laboratoire où s’analysent les initiatives d’aujourd’hui et les stratégies de demain, le Club est une base pour l’action.

DINO FRACCHIA/REA

aux experts

Pour une éducation artistique et culturelle tout au long de la vie

L

Pour toute information sur le Club des territoires durables et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com

’enseignement artistique est la seule discipline permettant de réunir un apprentissage cérébral, sensible et corporel. Pourtant il ne concerne que 10 % des jeunes de la période scolaire. De plus, malgré tous les efforts, les pratiques culturelles restent encore trop marquées par l’héritage familial et le diplôme. Sans compter que les initiatives en matière d’éducation artistique dans les territoires dépendent de la volonté politique des élus et de la capacité financière des collectivités, ce qui crée des déséquilibres. Pour changer la donne, l’avis du CESE « Politique de développement du spectacle vivant : l’éducation artistique et culturelle tout au long de la vie » recom-

146 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

mande, entre autres, d’encourager la présence des artistes du spectacle vivant à l’école ; de généraliser l’offre d’éducation artistique et culturelle (EAC) dans tous les lycées ; ou de dynamiser l’éducation populaire comme outil de transformation des territoires (en valorisant l’amatorat). L’avis recommande aussi de soutenir et développer les actions des comités interentreprises dans le domaine de l’EAC ; et de généraliser le volet culturel des projets d’établissements hospitaliers, des établissements dédiés à l’accueil des personnes âgées, et des maisons d’arrêt… Sans oublier de rappeler que le développement de l’EAC ne sera réellement possible qu’en formant les interve-

nants, qu’ils soient enseignants, artistes ou amateurs. Surtout, une conviction guide cet avis. Une plus grande place doit être donnée à l’éducation artistique et culturelle tout au long de la vie, des études, des périodes professionnelles, de la maladie ou de l’enfermement. C’est un acte politique dans le sens le plus noble du terme : participer à un projet de société et réfléchir à ce qui donne du sens en profondeur à notre vie. ● Claire Gibault, rapporteure de l’avis du Conseil économique, social et environnemental « Pour une politique de développement du spectacle vivant : l’éducation artistique et culturelle tout au long de la vie » claire.gibault@lecese.fr


Territoires durables LES CLUBS

Les études régionales de l’Apec sur l’emploi cadre Provence-Alpes-Côte d’Azur Comment la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, a-t-elle réussi à atténuer les impacts de la crise de 2008-2009 grâce à un secteur tertiaire dynamique et à un tissu industriel centré autour d’activités de pointe. Malgré ses nombreux atouts, cette région – qui emploie 215 000 cadres du secteur privé – conserve d’importantes poches de précarité et un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale. Pour en savoir plus : http://recruteurs.apec.fr/Recrutement/MarcheEmploi/Enquetes-Apec/Enquetes-2013

Rhône-Alpes La région Rhône-Alpes, deuxième en France par sa superficie, est aussi la plus peuplée après l’Îlede-France. À côté d’un secteur industriel solide et diversifié, le secteur tertiaire tient une place

SNCF

Information CO2

prépondérante avec une offre de services étoffée. Avec ses 311 000 cadres du secteur privé, elle se caractérise donc par un taux d’encadrement élevé et un taux de chômage plus faible que la moyenne nationale. Pour en savoir plus :

Depuis le 1 er o c t o b r e , tous les transARAHAN/FOTOLIA porteurs (aériens, ferroviaires, maritimes, routiers) doivent donner une information à leurs clients, avant l’achat de leurs billets, sur les émissions de CO2 générées par leur trajet. Responsable de 27,3 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France en 2011, le transport est le secteur le plus émetteur. Dès 2006, le site Voyages-sncf. com avait été précurseur avec un écocomparateur développé avec l’Ademe qui permettait de comparer les émissions pour un trajet en train avec celle du mode aérien. L’information est également disponible depuis 2009 sur les factures des chargeurs confiant leurs marchandises à Fret SNCF. L’information sera désormais disponible pour tous les voyageurs, leur permettant ainsi de choisir le mode de transport en fonction des émissions de CO2. Et pour permettre à chacun de faire un choix éclairé, Transilien et TER proposent la comparaison des émissions de CO2 avec un déplacement en voiture.

http://recruteurs.apec.fr/Recrutement/MarcheEmploi/Enquetes-Apec/Enquetes-2013

Nord-Pas-de-Calais La région Nord-Pas-de-Calais a vu son tissu économique se transformer et se tertiariser. Elle a su se diversifier en s’appuyant sur des activités clés (grande distribution, vente à distance, numérique…). Elle peut, par ailleurs, compter sur une métropole lilloise dynamique, qui concentre des emplois qualifiés. Résultat : les entreprises du secteur privé de la région emploient 153 500 cadres. Pour en savoir plus : http://recruteurs.apec.fr/Recrutement/MarcheEmploi/Enquetes-Apec/Enquetes-2013

THIERRY RYO/FOTOLIA

Île-de-France Première région de France en matière d’emploi cadre, l’Île-de-France a su s’appuyer sur une grande diversité d’activités tant industrielles que tertiaires. Pour en savoir plus : http://recruteurs.apec.fr/Recrutement/MarcheEmploi/Enquetes-Apec/Enquetes-2013

Le prochain déjeuner du Club

et du financement de la MDE l’une de ses priorités. Aux côtés des collectivités, des professionnels du bâtiment et des structures de conseil, la banque imagine des solutions pour diminuer les coûts inhérents aux consommations énergétiques des ménages et des entreprises, dans les logements comme dans les locaux d’activités. Elle apporte ainsi aux collectivités des solutions innovantes en termes d’ingénierie financière. ●

FOTOMEK/FOTOLIA

La Caisse d’épargne Bretagne Pays de Loire et le conseil régional viennent de signer deux conventions pour financer la maîtrise de la demande en énergie. Des opérations de rénovation thermique de l’habitat privé, parmi lesquelles Vir’Volt-Ma-Maison, dispositif expérimental lancé au printemps 2013 dans le Pays de Saint-Brieuc. L’objectif est de réduire la croissance annuelle de la consommation d’électricité, de 2,6 % actuellement à moins de 1,4 % sur la période 2011-2015, puis à 1 % sur la période 20152025. La Caisse d’épargne Bretagne Pays de Loire, de son côté, a fait des enjeux énergétiques

MARC BOUDER

Enjeu énergétique en Bretagne

Cécile Duflot, l’une des deux ministres écologistes du gouvernement, sera l’invitée du club des territoires durables le 18 novembre. Projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), territoires et services publics, décentralisation… La ministre détaillera sa feuille de route et ses projets.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 147


FOTOLIA

Ressources

Orientation Avec l’application « Mon orientation en ligne », l’Onisep propose un service personnalisé d’aide à l’orientation pour les collégiens, les lycées, les étudiants ou leurs parents. Des conseillers de cet établissement public sous la tutelle du ministère de l’Éducation nationale et du ministère de l’Enseignement supérieur répondent à toutes les questions par « chat », par mail et par téléphone sur les concours, les secteurs professionnels, les débouchés, les métiers, etc. www.onisep.fr

MOBILE Arts de la rue

FOTOLIA

DOCUMENTS

Localiser en un clic une centaine d’œuvres de rue dans la capitale et quelques-unes de ses villes voisines (Montreuil, Bagnolet, Les Lilas, Évry…) et découvrir la genèse de leur conception. C’est ce que permet l’application « My Paris street art », lancée par la ville de Paris pour rendre accessible un art encore méconnu. Les riverains sont invités à prendre en photo les graffs pour enrichir une carte interactive. www.paris.fr

Culture Lille métropole lance une « carte pass » offrant un accès illimité aux 5 musées et centres d’art de son territoire. Cet abonnement proposé sous la forme d’un support sans contact peut être chargé via un dispositif sur lequel les usagers s’abonnent par ailleurs aux titres de transports, à la location de vélos, aux voitures en libre-service, etc. www.lillemetropole.fr

L’imagination managériale

Auteur : collectif Éditeur : Scérén Prix : 9,90 euros Nombre de pages : 216

L’imagination managériale conduit à une plus grande performance des administrations publiques. C’est la conclusion de cet ouvrage collectif préfacé par Anne-Marie Idrac, qui préconise d’offrir aux cadres du secteur public une plus grande latitude pour « provoquer, conduire et susciter l’expérimentation collective » en s’affranchissant des contraintes venues « du haut ». L’ouvrage détaille des initiatives menées localement. Pour mieux conclure : à leur niveau, sur le terrain, les cadres sont les artisans de la réforme des trois fonctions publiques.

Auteur : Conseil d’État Éditeur : La Documentation française Prix : 18 euros Nombre de pages : 200

ÉVÉNEMENTS 1 18 au 2

2 21 et 2

Maires

Communautés

Organisateur : AMF Lieu : Paris Site : www.amf.asso.fr

Organisateur : Acuf Lieu : Marseille Site : www.communautesurbaines.com

À quelques mois des élections municipales et alors que les projets de décentralisation divisent les élus locaux, le congrès annuel des maires de France invite à réfléchir sur le rôle des maires, « au cœur de l’action ». 36 769 maires en France : une chance ou une faiblesse pour la République ?

Les journées de l’Association des communautés urbaines de France (Acuf) se focaliseront sur plusieurs sujets sensibles : finances, culture et économie, « solidarité et territoires ». Élus, cadres et techniciens échangeront sur les conséquences de l’évolution de l’action publique locale.

6 25 et 2

Développement durable Organisateur : région Paca Lieu : Marseille Site : http://andd2013. regionpaca.fr

« Le développement durable, levier de sortie de crises ? » sera au programme de la 7e édition des Assises nationales du développement durable. Un texte de référence sera produit à l’occasion de cet événement organisé par la région Paca en partenariat avec l’ARF.

148 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

26

9 27 au 2

Management

Transport

Organisateur : FHF Lieu : Paris Site : www.fhf.fr

Organisateur : Gart et UTP Lieu : Bordeaux Site : www.rencontrestransport-public.fr

Organisées par la Fédération hospitalière de France, les Rencontres du management de pôles feront le bilan de la mise en œuvre des pôles depuis leur création et débattront sur le dialogue de gestion, le fonctionnement interne et le rôle du chef de pôle. Un rendez-vous ouvert aux praticiens, cadres, présidents de CME…

Aménagement, offres de transport, accessibilité, « gare de demain », réforme ferroviaire… Autant de sujets abordés pendant les Rencontres nationales du transport public, organisées par le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) et l’Union des transports publics (UTP).


Ressources Par Sylvain Henry FOTOLIA

FOTOLIA

CONNECTÉ Action publique Avec le site « Faire simple », le ministère de la Fonction publique propose aux internautes d’être force de proposition pour moderniser l’action publique. www.faire-simple.gouv.fr

Cours en ligne La première plate-forme française de cours en ligne ou MOOCs (Massive Open Online Courses) a ouvert au début de l’automne. www.france-universite-numerique.fr

Données publiques La base de données publiques des médicaments a été inaugurée début octobre, première marche vers la création d’un service public d’information en santé. www.medicaments.gouv.fr

Le droit souple Le Conseil d’État recommande dans cette étude annuelle fouillée d’avoir davantage recours au droit souple. Il permet, estime l’institution, « d’oxygéner » l’ordre juridique et de contribuer à la politique de simplification des normes sans contredire à l’exigence de qualité du droit. Directives, circulaires, avis, chartes, recommandations d’autorités de régulation administratives, résolutions : le périmètre du droit souple ne cesse de croître. Une tendance qui doit se poursuivre, estime le Conseil d’État.

Synchronisez votre agenda sur www.acteurspublics.com

5

2 10 au 1

Disparités

Communication

Organisateur : CESE Lieu : Paris Site : www.lecese.fr

Organisateur : Cap’com Lieu : La Rochelle Site : www.cap-com.org

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) invite pour la troisième fois à débattre sur le thème « Entre richesse et pauvreté ». Une journée d’interventions et de confrontations autour des problématiques d’argent, de santé ou de sécurité. Comment vivre ensemble malgré les disparités ?

Les perspectives ouvertes par le big data, le poids des réseaux sociaux, l’importance des outils numériques : autant d’enjeux qui seront abordés au forum Cap’com de la communication publique. Le rendez-vous des responsables de la communication des administrations.

WEB ART ÉQUESTRE Lancé par le ministère de la Culture avec le partenariat de l’Institut français du cheval et de l’équitation, de la Garde républicaine et de l’École nationale vétérinaire d’Alfort, un nouveau site consacré au cheval entend mettre en lumière la richesse des patrimoines liés aux cultures équestres en France. www.cheval.culture.fr

Auteur : Insee Téléchargement : www. insee.fr, taper « La prise en compte du développement durable dans les territoires »

Des données publiques au service des territoires Pour améliorer le fonctionnement de la démocratie locale, il est nécessaire de renforcer la vitalité du débat local, de réguler la communication des collectivités territoriales et d’améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux. Telles sont les grandes pistes avancées par le député du Var Jean-Pierre Giran (UMP) dans un rapport remis en février 2012 à Nicolas Sarkozy. Le parlementaire suggère notamment d’améliorer la transparence de la fonction d’élu et de « favoriser l’exemplarité ».

PROMOTION Le nouveau site Vivapolis porte le projet soutenu par le gouvernement destiné à promouvoir à l’international le savoir-faire français en matière de développement urbain dans des filières telles que l’eau, les déchets, l’air, la mobilité ou l’efficacité énergétique. www.vivapolis.fr

AMBASSADEURS Pour montrer la diversité des missions des diplomates, le Quai d’Orsay met en ligne les témoignages de 14 ambassadeurs qui se souviennent d’un événement phare dans l’exercice de leurs fonctions. Des vidéos qui racontent une négociation, une intervention humanitaire, une aide aux Français de l’étranger… www.diplomatie.gouv.fr

Auteur : Cour des comptes Téléchargement : www.ccomptes.fr Nombre de pages : 115

Un rapport sur le patrimoine hospitalier Dans un rapport sur la gestion du patrimoine immobilier des centres hospitaliers universitaires (CHU) affecté aux soins, la Cour des comptes constate que le suivi de ce patrimoine est insuffisant et qu’un pilotage « plus ferme » de la part des instances régionales et nationales est nécessaire. Voilà un rapport éclairant pour mieux appréhender l’immense patrimoine des établissements de santé alors que la loi de financement de la Sécurité sociale prévoit des investissements accrus en faveur des hôpitaux. Mais des zones d’ombre perdurent puisqu’il paraît impossible d’établir des données précises sur la surface ou l’état de vétusté de certains biens.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 149


Lire, écouter, voir

« Planète Terre »

PODCAST

Magazine Durée : 56 minutes Présentateur : Sylvain Kahn

Sommes-nous égaux face au changement climatique ?

À NE PAS MANQUER

Invités : Hervé Le Treut, climatologue et membre du Giec, Martine Tabeaud, climatologue géographe

Inégalités planétaires et territoriales

Sur le papier, il avait de bonnes raisons de l’emporter, avec son look de baroudeur et son aura médiatique sans égale conquise après quarante années passées à arpenter la planète. Un capital très vite balayé par la violence d’une campagne ultrapolitique. Nicolas Hulot, l’animateur vedette d’Ushuaïa, a été broyé par la machine écolo et dépassé par ceux qui dans son propre camp l’ont vilipendé avec une violence qu’il n’imaginait pas. L’histoire est connue : Nicolas Hulot échoua à capitaliser sur son nom le vote des électeurs écologistes lors de la primaire du parti EELV. La blessure visiblement à vif, le voilà qui revient dix-huit mois plus tard sur cet épisode douloureux de sa vie et retrace minutieusement le calendrier des événements. L’occasion de régler quelques comptes avec les Duflot, Lhomme, Joly ou Cohn-Bendit. Cette épreuve, dit-il, ne lui aura en rien retiré ses convictions écologistes. Son combat continue. Autrement. X. S.

PLAY TV

Néanmoins, raisonner en termes de « risques » d’« aléas » et de « fourchettes » ne doit pas empêcher la mise en place de politiques de prévention, en particulier dans les zones que l’on sait vulnérables.

Auteur : Éric Freysselinard Éditeur : Belin Nombre de pages : 590 Prix : 25 €

Auteur : Nicolas Hulot Éditeur : Calmann-Levy Nombre de pages : 325 Prix : 18,50 €

Plus haut que mes rêves

lisation » permet-elle d’y voir plus clair quant aux actions à engager dans les territoires ? Pas vraiment, à entendre les invités de l’émission Planète Terre du 30 octobre, tant demeurent de larges incertitudes.

Albert Lebrun, le dernier Président de la IIIe République Le préfet Éric Freysselinard, directeur des stages de l’ENA, consacre une biographie à son illustre arrière-grand-père : le dernier président de la IIIe République, Albert Lebrun. Un X-Mines dont l’Histoire n’a souvent retenu que l’impuissance lors de la défaite de 1940 et la prise de pouvoir du Maréchal Pétain qui a suivi. Fort de l’accès aux archives privées de la famille, l’auteur plonge avec une précision d’universitaire dans la complexité d’une époque et les soubresauts d’une république institutionnellement à bout de souffle, rongée de l’intérieur, minée par les turpitudes de ses serviteurs, et dont Albert Lebrun devint l’un des commodes boucs émissaires. Le désir de réhabilitation, qui ne transparaît qu’à la fin de l’ouvrage, n’enlève rien à la force de la démonstration. Une mise en lumière convaincante d’un destin aux prises avec de sombres réalités et terriblement utile pour comprendre notre confortable présent. P. L.

« Faux semblants ou trop semblables ? »

Auteurs : Dominique Albertini et David Doucet Éditeur : Tallandier Nombre de pages : 360 Prix : 20,90 €

Histoire du Front national Un programme fluctuant mais un objectif de dédiabolisation constant depuis la création du parti en 1972. Voilà ce qui ressort de cette Histoire du Front national. Formé à partir de groupuscules nostalgiques de l’Algérie française, nationalistes et anticommunistes, le Front national n’a cessé de s’adapter au contexte électoral. Décrit comme un « Reagan français » dans les années 1980, Jean-Marie Le Pen l’ultralibéral finira par devenir le chantre du protectionnisme. L’ouvrage, extrêmement bien documenté, ne fait l’impasse sur aucune des problématiques du mouvement. Bilan des maires et députés FN, éternelles difficultés à se doter de cadres compétents, relations poreuses avec la droite… Avec toujours en filigrane le défi de la dédiabolisation, mis en danger par les saillies médiatiques du monstre sacré du parti, dont la fille, Marine Le Pen, poursuit toujours les mêmes objectifs, allant jusqu’à nier sa situation à l’extrême droite de l’échiquier politique. R. M.

Le 24 novembre à 14 h 05 Documentaire (2013) Durée : 52 minutes Réalisateur : Bertrand Delais

Subtil équilibre La bonne marche du pouvoir exécutif sous la Ve République réside-t-elle dans l’alchimie entre deux personnalités ? Ce documentaire qui interroge la pertinence du couple Hollande-Ayrault, en émettant l’hypothèse

150 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

que les deux hommes se ressemblent peutêtre trop pour être complémentaires – et donc efficaces ? –, revient sur quelques tandems emblématiques parmi les 7 présidents de la République et les 19 Premiers minis-

MICHEL EULER/AP/SIPA

LIVRES

FOTOLIA

Mesurer les conséquences du réchauffement climatique à l’échelle de la planète est une gageure. Le climatologue Hervé LeTreut, membre de l’éminent Giec, l’a fait à l’échelle de l’Aquitaine. Cette « régiona-

tres que la France a connus depuis 1958. Le film est suivi d’un débat, auquel participe notamment Henri Guaino, ancien conseiller de l’Élysée, sur la question « À quoi sert le Premier ministre ? »


notre territoire change avec Orange

Mayotte

Guadeloupe

Réunion

Martinique

Guyane

Chez Orange, avec plus de 100 000 salariés en France, nous investissons et innovons pour déployer et entretenir les réseaux qui apportent les usages et services d’aujourd’hui et de demain. ■ ■ ■ ■

Orange réseau mobile n° 1 (1) 2,7 milliards d’euros investis en 2012, dont plus de 50 % dans les réseaux fixes et mobiles plus de 29 000 femmes et hommes au service de l’exploitation et de la construction des réseaux 39 000 salariés en relation avec le client et plus de 1 100 points de vente, dont 18 Très Grandes Boutiques

www.orange.com (1) Rapport ARCEP novembre 2012 sur la qualité de service mobile Orange n°1 ou n°1 ex æquo sur 192 critères sur 223


Lire, écouter, voir

« Questions sur l’Europe »

PODCAST

Quelle politique faut-il adopter en matière d’immigration ?

À NE PAS MANQUER

Magazine mensuel Durée : 37 minutes Présentateur : Stéphane Leneuf Invités : Niccolo Rinaldi, eurodéputé

italien (groupe ADLE), Yannick Jadot, eurodéputé français (groupe des Verts), Bruno Gollnisch, eurodéputé français (non inscrit)

Politique de l’autruche

FOTOLIA

Si la question de l’immigration s’est invitée à bon nombre de sommets européens, les réponses ne se bousculent pas au portillon. Malgré les drames récurrents – depuis vingt ans, pas moins

de 25 000 réfugiés se seraient noyés en Méditerranée en tentant de rejoindre les côtes européennes –, c’est la politique du chacun pour soi qui prévaut. Face à un « processus irréversible », il faudrait

Auteur : Gilles Berhault Éditeur : L’Aube, collection « L’urgence de comprendre » Nombre de pages : 144 Prix : 15,90 €

Auteur : sous la direction de Michel Foucher Éditeur : Robert Laffont Nombre de pages : 180 Prix : 29 €

Propriétaire ou artiste ? Tout posséder pour se rassurer, surtout l’inutile et le jetable… Pour Gilles Berhault, la qualité de vie repose au contraire sur la légèreté de l’usage des biens et services. Et cela tombe très bien puisque ce vouloir-posséder a toutes sortes d’impacts environnementaux et sociaux. Mais ce changement de modèle ne se décrète pas. Changer les comportements demande de mettre chacun en capacité de s’exprimer, de créer pour assumer un développement positif de l’humanité et de soigner son nid écologique et culturel. Gilles Berhault est président du Comité français pour le développement durable, de l’association Communication et innovation pour le développement durable. Ancien président du pavillon de la France du Sommet de la terre Rio + 20, il est par ailleurs l’auteur de Développement durable 2.0. L’Internet peut-il sauver la planète ? et coauteur des ouvrages collectifs La Métamorphose numérique et L’Atlas du développement durable et humain. P.-M. V.

Le modèle de l’École nationale d’administration se diffuse partout dans le monde : en Chine, où a été créée une Académie de la gouvernance, au Maroc, où un Institut royal d’administration a récemment vu le jour, au Cambodge, au Brésil, en Afrique de l’Ouest et centrale, en Corée du Sud ou en Indonésie. C’est l’un des sujets détaillés dans l’excellent Atlas de l’influence française au XXIe siècle, ouvrage collectif qui promeut les nombreux atouts français en matière d’influence internationale. L’ouvrage décrypte le poids de la France dans des problématiques aussi diverses que la santé, le cinéma, la langue, le luxe, la gastronomie, l’attractivité universitaire, les bandes dessinées où les jeux vidéos. À consulter ces cartes, ces chiffres et ces données, le lecteur conclut que le rayonnement français porte encore très loin sur la scène internationale. Un livre bienvenu, à offrir pour Noël aux pessimistes de tous bords. S. H.

« Tous au Larzac » Le 26 novembre à 20 h 50

Auteur : Jean-Louis Sanchez Éditeur : Les liens qui libèrent Nombre de pages : 153 Prix : 17 €

La Promesse de l’autre Peut-on rester passif face au déclin démocratique ? Dorénavant s’affichent sans pudeur le refus de l’autre, l’obsession sécuritaire. Et le phénomène se banalise car la peur endurcit l’individualisme, stimule la violence, pervertit la démocratie. Or il est illusoire et dangereux de penser qu’il puisse y avoir de la sécurité sans altérité. Car une société désunie est une société désarmée. C’est ce que rappelle Jean-Louis Sanchez dans son dernier ouvrage, La Promesse de l’autre, en s’appuyant sur son expérience de fondateur et de délégué général de l’Observatoire national de l’action sociale (Odas). Il nous invite à refuser la déliquescence suicidaire du vivreensemble en transformant l’énergie du rejet en énergie du changement. Et c’est possible, car aux quatre coins de la France, se développent des initiatives particulièrement prometteuses, mais qui restent désespérément marginales, parce que méconnues. P.-M. V.

Documentaire (2011) Durée : 117 minutes Réalisateur : Christian Rouaud AD VITAM

PLAY TV

Atlas de l’influence française au XXIe siècle

Désobéissance civile Le Larzac, mot évocateur de nostalgie autant que de paysages. Entre 1970 et 1981, ils furent un peu plus d’une centaine, bientôt soutenus par des dizaines de milliers de sympathisants, à refuser

152 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

pourtant avoir la volonté de « se doter de règles communes » et mettre en place de vraies politiques d’intégration, insiste l’eurodéputé italien Niccolo Rinaldi au micro de Stéphane Leneuf.

l’expropriation que leur imposait le gouvernement pour permettre l’extension d’un camp militaire. Trente ans plus tard, ce sont de paisibles paysans retraités qui évoquent devant la caméra les souvenirs de cette

lutte pacifique mais résolue, et finalement victorieuse, contre les pouvoirs publics. Des souvenirs aux accents joyeux, donc, qui font poser à certains un regard malicieux sur l’éveil de leur conscience militante.


COMMUNIQUÉ

Les politiques publiques dĂŠcryptĂŠes en un seul volume Tous les candidats prĂŠparant des concours de la fonction publique sont dĂŠsormais interrogĂŠs, Ă l’Êcrit ou Ă l’oral, sur les politiques publiques. De nouvelles ĂŠpreuves sont apparues dans les concours de recrutement des attachĂŠs, comme une composition sur la place des pouvoirs publics et leur rĂ´le dans les grands domaines d’intervention publique. Les traditionnelles ĂŠpreuves de culture gĂŠnĂŠrale ou de note de synthèse s’orientent de plus en plus en ce sens.

Les politiques publiques 2013, La Documentation française Collection  Formation administration concours 

240 pages, 21 x 27 cm RĂŠf. : 9782110094315 19 â‚Ź En vente en librairie et sur ladocumentationfrancaise.fr Â

L’ouvrage de La Documentation française sur les politiques publiques a ĂŠtĂŠ conçu pour aider les candidats Ă aborder ces questions, jugĂŠes souvent GLIĂ€FLOHV /¡RXYUDJH est collectif, rĂŠdigĂŠ par des praticiens des politiques publiques qui participent ou ont participĂŠ aux dĂŠcisions publiques et qui ont WRXV O¡H[SpULHQFH de la prĂŠparation de concours Ă un haut QLYHDX

ComposĂŠ de 33 ÂŤ dossiers Âť, il balaie un champ large : institutions HW RXWLOV GH O¡DFWLRQ publique (rĂŠforme de O¡eWDW FKRL[ Ă€VFDX[ politiques sectorielles (ĂŠducation, dĂŠfense, retraites, protection de O¡HQYLURQQHPHQW HWF ou transversales (lutte contre la pauvretĂŠ, JHVWLRQ GHV Ă€QDQFHV SXEOLTXHV Ă€QDOLWpV HW YDOHXUV GH O¡DFWLRQ publique (dĂŠmocratie sociale, lutte contre OHV GLVFULPLQDWLRQV Il fait aussi une place aux relations DYHF O¡(XURSH et Ă la politique internationale de la )UDQFH

L’objectif est pĂŠdagogique : donner au lecteur les clĂŠs pour comprendre, de manière synthĂŠtique et simple mais en ĂŠvitant tout VFKpPDWLVPH &KDTXH dossier contient une prĂŠsentation de la politique concernĂŠe – avec si nĂŠcessaire une perspective historique –, de ses acteurs, des mesures prises (dont les SOXV UpFHQWHV GHV FKLIIUHV VLJQLĂ€FDWLIV EUHI GH O¡HVVHQWLHO des connaissances Ă possĂŠder avec, souvent, des comparaisons LQWHUQDWLRQDOHV

L’ouvrage comporte de multiples encadrĂŠs, illustrations, tableaux et graphiques et, pour ceux qui veulent aller plus loin, de courtes bibliographies indiquent les rĂŠfĂŠrences des quelques ouvrages RX UDSSRUWV HVVHQWLHOV $X Ă€QDO XQ RXYUDJH très riche, Ă la fois sĂŠrieux et critique, qui reste cependant accessible Ă un large SXEOLF


Lire, écouter, voir

Quai d’Orsay

CINÉMA

« Quai d’Orsay », une comédie du pouvoir En portant à l’écran la bande dessinée à succès de Blain et Lanzac, Bertrand Tavernier s’essaye à un genre inhabituel pour lui, la comédie. Sa jubilation est communicative. Colossal succès de librairie, la bande dessinée de Christophe Blain et Abel Lanzac*, inspirée de la vie de cabinet au temps où Dominique de Villepin était ministre des Affaires étrangères (de 2002 à 2004), ne pouvait échapper à la consécration sur grand écran. Des trois projets en concurrence pour son adaptation, celui du réalisateur d’Un dimanche à la campagne a facilement emporté l’adhésion des auteurs. Sa carrière n’étant plus à faire, Bertrand Tavernier a manifestement pris plaisir à une adaptation coup de cœur. Son Quai d’Orsay est une comédie déjantée dans laquelle le saint des saints de la diplomatie française devient un théâtre où le burlesque surgit à chaque coin de porte. Au détour d’une scène où le ministre sort furieux de l’Assemblée nationale, reprochant à sa plume de lui écrire des discours qui « ne passent pas à l’oral », apparaît furtivement Bruno Le Maire, ancien collaborateur de Dominique de Villepin, dont l’unique réplique pourrait devenir culte dans les cabinets ministériels.

Regards superposés

Laure Berthier

* Une réédition regroupant les deux tomes agrémentés de 12 pages de planches inédites est sortie en octobre en librairies (Quai d’Orsay, Lanzac & Blain, Dargaud, 30 €).

PHOTOS : ÉTIENNE GEORGE

Thierry Lhermitte, en avatar cinématographique du tourbillonnant Alexandre Taillard de Vorms, ministre « en permanence en mouvement face aux crises

du monde », ne rappelle finalement que de très loin l’avatar réel. À la tête d’un casting de conseillers assez réussi – l’acteur de théâtre Bruno Raffaelli fait merveille aux côtés de Thomas Chabrol, Julie Gayet et Thierry Frémont –, Niels Arestrup, tout en placidité, révèle une force comique qu’on ne lui connaissait pas dans le rôle de l’attachant directeur de cabinet. Quant au personnage d’Arthur Vlaminck, jeune conseiller chargé du « langage » et héros de la B.D., il incarne, sous les traits de Raphaël Personnaz, le candide découvrant un monde qui le surprend, on le devine, autant que le réalisateur. Comédie, donc, où Tavernier superpose son regard de non-initié au récit « vécu de l’intérieur » de l’ancien conseiller du ministre Antonin Baudry (alias Abel Lanzac) et glisse ce qu’il faut d’ironie au milieu de dialogues et de scènes scrupuleusement fidèles à l’œuvre originale. Mais on ne se refait pas et le réalisateur de L.627 laisse aussi parler sa fibre engagée. « Est-ce que ton ministre peut faire quelque chose de concret ? » demande la petite amie d’Arthur. Aider une famille de sans-papiers menacée d’expulsion par exemple. Ainsi enrichi de la réflexion politique du cinéaste, le film gagne en humanité ce qu’il perd de la causticité de la bande dessinée. ●

Réalisateur : Bertrand Tavernier Scénario et dialogues : Antonin Baudry, Christophe Blain et Bertrand Tavernier Avec : Thierry Lhermitte (Alexandre Taillard de Vorms), Raphaël Personnaz (Arthur Vlaminck), Niels Arestrup (Claude Maupas), Bruno Raffaelli (Stéphane Cahut), Julie Gayet (Valérie Dumontheil)… Genre : comédie Durée : 1 h 53 Sortie en salles : 6 novembre

154 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013



Idées

TITULAIRES CADRES GRADE

PROPOSITION

DÉROGATOIRE

IMPARTIALITÉ

DÉBATS

RÉNOVER DÉBAT

BOURSE

GÉNÉRALISER

ÉCHELON

RÉFORM

DIAGNOS

DÉCLO DÉONTOLOGIE

Il faut réformer la fonction publique Par Jean-Ludovic Silicani Dans son récent rapport sur la fonction publique, Bernard Pêcheur insiste sur la nécessité d’une réforme et écarte tout immobilisme. Je faisais le même diagnostic dans le livre blanc sur l’avenir de la fonction publique en 2008. La réussite même des politiques publiques menées dans tous les domaines implique un service public et une fonction publique rénovés et efficaces. Ce sont les voies et moyens de cette rénovation que Bernard Pêcheur et moi-même avons cherché à identifier, à cinq ans d’intervalle, chacun avec nos expériences et nos convictions respectives. Nous convergeons sur bien des points mais nous différons sur certaines propositions. La méthode que nous avons suivie a été différente : en 2008, le livre blanc a été le fruit de

Donner aux agents publics un régime moderne et simple afin que leurs intérêts, ceux de leurs employeurs et ceux des citoyens convergent. Jean-Ludovic Silicani est conseiller d’État, président de l’Arcep, ancien commissaire à la réforme de l’État et auteur du livre blanc sur l’avenir de la fonction publique (2008).

travaux menés pendant sept mois, en association avec un comité consultatif composé des employeurs publics, des organisations syndicales de la fonction publique et de personnalités de la société civile, après trois séries de rencontres avec chacune des organisations syndicales des trois fonctions

publiques, et à l’issue de nombreuses tables rondes et débats publics. Bernard Pêcheur a dû mener son travail, dont je souligne la grande qualité, en un temps plus restreint et l’une de ses propositions au gouvernement est précisément d’ouvrir maintenant des assises. Mais les deux méthodes se

156 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

conçoivent tout à fait. Sur le fond, Bernard Pêcheur et moi-même faisons le même diagnostic : nous ne pensons pas qu’il faille remettre en cause l’existence, à titre principal en tout cas, d’une fonction publique de carrière qui assure le professionnalisme et l’impartialité de l’action publique. Nous sommes par ailleurs conscients que les administrations ont besoin d’agents contractuels et que ça n’est pas un hasard s’il y en a aujourd’hui plus d’un million. En revanche, nous différons sur le rôle de ces agents contractuels. Pour moi, ils sont un complément indispensable au bon fonctionnement des administrations. C’est pour cela que j’ai proposé en 2008 qu’au sein de la fonction publique, « l’espace contractuel » soit complémentaire et non plus dérogatoire de « l’espace statutaire ». Bernard Pêcheur reste sur la conception classique du régime dérogatoire. Le problème, c’est que les dérogations n’ont cessé de croître, tout simplement parce qu’aucune administration ne peut se passer de contractuels, sauf à disparaître

(je pense aux hôpitaux, à de nombreux services nationaux ou décentralisés, aux établissements publics, aux autorités administratives indépendantes). À un moment, le principe de réalité doit l’emporter. En outre, les contractuels des administrations sont des salariés qui ne sont couverts aujourd’hui ni par le statut de la fonction publique ni par le code du travail : une telle situation ne me paraît pas tenable. D’où la proposition que j’ai faite dans le livre blanc que chaque administration détermine, après consultation des représentants du personnel, compte tenu de sa situation initiale et de ses besoins prévisionnels, les parts respectives des agents titulaires et contractuels dans ses recrutements futurs. Bourse de l’emploi public Mais sur beaucoup d’autres sujets, nos préconisations convergent. Bernard Pêcheur reprend ainsi ma proposition de créer une grande bourse de l’emploi public, sur laquelle devront être obligatoirement publiés tous les emplois


ME

STIC

HARMONISER

Idées

CARRIÈRE PROCESSUS

ÉVALUER

OISONNER vacants, ainsi que celle de généraliser et d’harmoniser les répertoires des métiers et des fonctions de toutes les administrations (fonction publique nationale, territoriale, hospitalière), afin de faciliter la mobilité et de mettre en place un véritable marché de l’emploi public et, ainsi, de faciliter et enrichir les parcours professionnels. De même, nous recommandons, l’un et l’autre, le renforcement des outils de gouvernance de la fonction publique (direction générale de l’administration et de la fonction publique, conseil commun aux 3 fonctions publiques, afin notamment de mieux prévoir et évaluer l’emploi public) mais aussi les secrétaires généraux des ministères, structures stables, face aux inévitables variations des portefeuilles des ministres. Enfin, nous proposons l’un et l’autre des actions précises, afin de mieux assurer le respect des valeurs et des règles de déontologie dans la fonction publique. Nous sommes aussi convaincus, et nous en avons souvent parlé, qu’il faut, en termes statutaires, donner un caractère

de plus en plus interministériel à la fonction publique de l’État et décloisonner les trois composantes de la fonction publique, alors qu’à l’inverse, il faut, en termes de gestion des ressources humaines, aller vers plus de proximité, c’est-à-dire rapprocher les employeurs et les agents. Nous différons, en revanche, au moins partiellement, sur la façon d’y parvenir. Mon diagnostic, qui est ancien, est que la gestion des personnels dans l’administration a une dimension beaucoup trop juridique et n’est pas assez axée sur la gestion des ressources humaines. Ceci est dû à l’incroyable complexité des textes applicables (malgré les simplifications de ces dernières années, il existe encore des centaines de statuts et des milliers de textes indemnitaires !). L’objectif numéro un doit donc être la simplification statutaire. Cela signifie que, s’il faut conserver un régime statutaire, celui-ci doit être extrêmement simplifié, en le limitant, conformément à la Constitution, à l’essentiel, c’est-à-dire à l’organisation générale de la fonction publique ainsi qu’aux

droits et obligations des agents publics. Le reste doit relever de la gestion. C’est dans cette optique que j’ai proposé de structurer la fonction publique de l’État, comme c’est déjà le cas pour la fonction publique territoriale, autour d’un nombre limité de cadres statutaires (50 à 100), contre actuellement encore plus de 300 corps et environ 150 statuts d’emplois ! Ces cadres statutaires ne seraient plus liés à une administration donnée, comme le sont les corps, mais auraient tous un caractère interministériel. En revanche, la gestion se ferait au plus près des personnels, grâce à des commissions paritaires de proximité. Par ailleurs, le rapprochement de l’architecture de la fonction publique nationale et territoriale que j’ai proposé faciliterait la mise en place, progressive, de cadres communs aux deux fonctions publiques, voire avec la fonction publique hospitalière. Fusion des corps Bernard Pêcheur propose lui aussi d’importantes évolutions. Elles consistent d’abord à poursuivre le processus de fusion des corps engagé depuis une dizaine d’années. Mais on connaît la difficulté croissante de ce processus, car il concerne désormais les corps les plus sensibles, c’est-à-dire ceux d’encadrement (catégorie A), et demande donc une énergie considérable. Il propose aussi de compléter le système actuel, par des « statuts-passerelles » (cadres professionnels ou statuts d’emplois) entre les corps de la fonction publique de l’État et entre les trois versants de la fonction publique, pour résoudre des problèmes qui existent mais qui ne se pose-

raient plus du tout si la réforme que j’ai proposée, qui consiste à supprimer le lien entre un cadre statutaire et une administration donnée, était mise en œuvre. En matière de rémunération, j’ai proposé une simplification considérable du régime actuel. La rémunération de tout agent public (fonctionnaire ou contractuel) serait composée de deux lignes et deux seules : d’une part, une rémunération de base, correspondant à son niveau de qualification qui, pour les titulaires, serait constituée par un traitement évoluant dans le temps de façon similaire pour tous les cadres statutaires d’un même niveau ; d’autre part, une rémunération complémentaire, de nature indemnitaire, avec une partie fixe, correspondant à la fonction exercée, et une partie variable, correspondant au mérite et à la manière de servir de l’agent, évalués chaque année. Cette rémunération complémentaire unifiée remplacerait les quelque 2 000 régimes indemnitaires actuels. Toutefois, comme le propose Bernard Pêcheur, une partie (celle correspondant aux indemnités ayant un caractère de complément fixe de salaire) devrait être intégrée dans la rémunération indiciaire de base. L’évolution dans le temps de la rémunération serait, elle aussi, simplifiée et harmonisée : l’avancement d’échelon correspondant à l’expérience acquise se ferait donc à l’ancienneté, sauf si l’évaluation annuelle de l’agent est réputée insuffisante, ce qui simplifierait considérablement la gestion ; l’avancement de grade se ferait de façon sélective en tenant compte des résultats de l’agent et de la formation continue qu’il a suivie, ainsi que, pour l’accès au grade terminal,

à la condition que l’agent ait exercé un poste difficile pendant une certaine durée (d’où l’importance de la cotation des postes évoquée ci-dessus). L’indemnité fonctionnelle serait elle aussi fixée selon la difficulté objective du poste. Son existence et sa fixation à un niveau significatif rendraient sans objet les actuels statuts d’emplois. Bernard Pêcheur semble vouloir maintenir voire accentuer la différenciation de l’avancement d’échelon. Pourtant il en dénonce, à juste titre, la lourdeur. Il propose, bien sûr, le maintien des conditions sélectives d’avancement de grades, y compris celle d’avoir occupé des fonctions difficiles, mais suggère d’ajouter des échelons fonctionnels ou spéciaux. Il me semble que le régime actuel risque ainsi d’être complexifié plutôt que simplifié. En revanche, nous proposons tous les deux une simplification et une harmonisation des régimes indemnitaires entre les différents statuts et les différentes administrations, condition sine qua non d’une réelle mobilité des agents : les inégalités actuelles sont, pour la plupart, injustifiables, contreproductives et même coûteuses. En conclusion, je voudrais souligner que l’objectif est de donner aux agents publics un régime moderne et simple, afin que leurs intérêts, ceux de leurs employeurs et, en définitive, ceux des citoyens et usagers des administrations, convergent. C’est une réforme d’envergure qui constitue un investissement d’avenir : elle a donc un coût au départ mais elle va générer très vite d’importants gains. L’État doit avoir une vision à long terme non seulement du pays mais aussi de lui-même. ●

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013 N°100-101 ACTEURS PUBLICS ■ 157


Idées

ÉTHIQUE VOLONTARISME VOLONTARISM CONCEPTUEL

Intelligence économique, une révolution culturelle pacifique

N/REA

ANTICIPATION

Claude Revel est déléguée interministérielle à l’intelligence économique depuis mai 2013

HAMILTO

INFLUENCE

ALLIANCE

CULTUREL

Par Claude Revel L’intelligence économique (IE) et ses volets « formation », « anticipation », « influence » et « sécurité économique » sont aujourd’hui des priorités stratégiques pour l’État. Il s’agit peut-être – nous l’espérons – du début d’une révolution culturelle pacifique. Bonne nouvelle, quand on pense aux années passées pour montrer le caractère opérationnel et la pratique éthique que l’on peut et doit faire de l’IE. Il a fallu se battre pour convaincre qu’elle est avant tout une approche de son environnement (forcément international) et une forme de gouvernance par l’anticipation et le volontarisme. Nos efforts ne sont pas terminés : si la sécurité économique semble admise aujourd’hui, il va falloir désormais convaincre qu’une démarche d’influence réussie requiert une expertise et une ingénierie spécifiques,

que peut contribuer à délivrer la délégation interministérielle à l’intelligence économique (D2IE), désormais placée auprès du Premier ministre. L’influence peut et doit être pratiquée sur la base d’un travail préalable rigoureux, d’une connaissance aussi parfaite que possible du théâtre d’opérations, de ses acteurs clés, de leurs alliances ouvertes et dissimulées, des réseaux existants, à commencer par les siens, de ses adversaires et de leurs stratégies… Qu’on l’appelle soft ou smart power, public diplomacy ou même lobbying, l’influence est d’abord du traitement de l’information, matière première de notre monde, qu’il s’agisse de technologies, de commerce ou de règles mondiales. L’IE et l’influence en sont le produit raffiné, devenu une arme de compétition au service des États, des entreprises, des organismes de recherche, des

ONG, des syndicats et des think tanks divers et variés. Elles se déclinent en actions sur les marchés, sur les règles et normes, sur notre image, sur les modèles de pensée et les cultures… Et où trouve-ton cette fameuse information stratégique ? Certes dans la masse informe du big data et des échanges facilités par les technologies de l’information, mais aussi dans notre réseau de compétences et d’alliances. Être professionnel L’influence est largement portée par une image « durable », qui se construit sur le long terme (pas de « coups » isolés ou sans suite) et en combinant tous les terrains, l’économique avec le culturel, par exemple. Une influence réussie s’inscrit d’abord dans une stratégie et elle repose sur un contenu conceptuel (tels sustainable development, transparence,

158 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

Qu’on l’appelle soft ou smart power, public diplomacy ou même lobbying, l’influence est d’abord du traitement de l’information. level playing field) accompagné d’un bon packaging et d’une diffusion professionnelle ; les messages doivent être transmis aux bons interlocuteurs, au bon moment et aux bons endroits, notre présence doit être active dans les enceintes européennes et internationales. Il ne faut pas se limiter aux amis : l’une des règles de l’IE et de l’influence est la « coopétition », c’est-àdire la coopération éventuelle avec des concurrents, sous certaines conditions. L’intelligence économique demande enfin une approche transversale devant laquelle les frontières des structures doivent savoir momentanément céder. La simple coordination ne suffit plus. Pour réussir – des activités

économiques et des emplois en découlent –, il nous faut, projet par projet, être unis sous une même direction et avec un même suivi. En bref, être professionnel, ou ne rien faire. Un grand espoir : cette approche est au cœur du décret du 22 août 2013 qui fixe les attributions du délégué interministériel à l’intelligence économique et rénove le dispositif de la politique publique d’IE. La D2IE a l’intention de mettre en œuvre cette démarche et de contribuer à une gouvernance par l’anticipation et l’action sur l’environnement, qui n’est en aucune manière une logique de pouvoir mais au contraire une logique de projets en commun. ●



Idées

SERVICE

RÉFORMES

IMPACT

RÉORGANISATION FONCTIONNAIRES DR

AGENCES

Philippe Bezes (Cersa, CNRS) et Gilles Jeannot (Latts, École des ponts ParisTech) sont responsables de la partie française de l’enquête européenne du consortium Cocops (programme de recherche) www.cocops.eu

PESSIMISME

Les hauts fonctionnaires ne croient-ils plus aux mythes de la réforme ? Par Philippe Bezes et Gilles Jeannot Les réformes administratives sont porteuses, les sociologues le savent bien, de « mythes rationnels » qui véhiculent l’idée que l’État, au terme du processus de changement, sera une organisation mieux dirigée, plus efficace, moins coûteuse, mieux coordonnée, marquée par les figures idéales du contrôle, de la clarté et du service des citoyens-usagers. La Lolf (loi organique relative aux lois de finances, ndlr), puis la Révision générale des politiques publiques (RGPP) n’ont pas échappé à ces rhétoriques de la réorganisation : la responsabilisation et l’autonomie gestionnaire des « managers publics » pour la première, le recentrage des administrations sur leurs missions à travers un « État réorganisé et allégé » pour la seconde, sont des figures bien connues.

Ils sont une large majorité à dresser un bilan social sévère pour les agents, avec la vision d’un impact négatif des réformes sur la motivation des fonctionnaires et sur l’attractivité des emplois. Mais qu’en est-il des effets réels de ces réformes et de leurs impacts sur les activités des agents publics ? Les hauts fonctionnaires semblent dubitatifs, selon une enquête européenne menée par des universitaires et chercheurs de 10 universités à partir de mai 2012 auprès des cadres dirigeants des administrations de 10 pays européens dans le cadre du consortium Cocops (Coordinating for Cohesion in the Public Sector of the future). Les résultats obtenus sur la France ne manquent pas d’interpeller. Sur la base de quelque 600 réponses obtenues à un

questionnaire auprès de cadres supérieurs de l’administration d’État des premiers niveaux, plusieurs résultats retiennent l’attention. Interrogés sur les impacts des réformes, les répondants soulignent tous les efforts de réduction des effectifs et des coûts ainsi que l’importance des réorganisations menées, notamment dans le cadre de la réforme de l’administration territoriale de l’État (Réate), par une série de fusions. Si les avis sont partagés sur l’effectivité de l’amélioration de la qualité du service, ils sont en revanche nombreux à identifier

160 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

un accroissement de la bureaucratisation, sans doute lié aux rigidités associées à la Lolf, aux instruments de pilotage par la performance et aux difficultés posées par les fusions. Les cadres français sont aussi les plus pessimistes parmi leurs homologues européens sur l’amélioration pour le client ou le citoyen et partagent avec eux une vision négative de l’impact sociétal (cohésion sociale, confiance des citoyens dans les institutions). Surtout, ils sont une large majorité à dresser un bilan social sévère pour les agents, avec la vision d’un impact négatif des réformes sur la motivation des fonctionnaires et sur l’attractivité des emplois dans le secteur public. Pessimisme général Un autre résultat, lorsque l’on compare les différentes réponses, attire l’attention. Les directeurs des services déconcentrés indiquent globalement avoir des marges de manœuvre plus faibles dans leurs activités de « managers publics », plus prosaïquement de gestionnaires. Même les directeurs régionaux, pourtant censés être devenus plus autonomes après la Lolf et la Réate, se déclarent moins autonomes que les cadres des administra-

tions centrales ou des établissements publics sur des sujets comme le budget ou la gestion des personnels. Les seules marges de manœuvre jugées plus significatives dans les services déconcentrés concernent les enjeux de réorganisation des structures, comme si la délégation de l’autonomie n’avait finalement porté que sur le « sale boulot ». Ce pessimisme général au plus haut niveau et ce sentiment de faible maîtrise dans les services les plus proches de la population suggèrent que les enjeux larges de « fonction publique » (autonomie des agents, effets sur le travail, gestion des ressources humaines, attrait des professions publiques, etc.) ont finalement été peu au cœur des réformes administratives menées depuis plus de dix ans. Il est également frappant de constater combien les réformes ont été peu pensées à partir d’une compréhension des enjeux et des problèmes structurant les activités des agents, quand bien même ceux-ci appartiennent aux cercles de l’encadrement supérieur de l’État. Ne serait-il pas temps de mieux prendre en compte ces écarts, des promesses réformatrices aux réalités têtues de l’État au concret ? ●


Chaque mois,

LE MAGAZINE QUI DÉCRYPTE, COMMENTE ET ANALYSE LES POLITIQUES PUBLIQUES

Le magazine Acteurs publics (11 numéros/an)

Entrez dans l’univers de la fonction publique : actualité, France des pouvoirs, analyse, expertise. Tout ce qu’il faut savoir…

ABONNEZ-VOUS

71,50€ / AN Chaque jour, La Newsletter L’actualité de l’action publique

RENSEIGNEMENTS ET ABONNEMENTS :

SATISFAIT OU REMBOURSÉ

tél. : 01 46 29 29 19 fax : 01 46 29 29 39 abonnement@acteurspublics.com abon ab onne neme ment nt@a @act cteu eurs rspu publ blic icss.co com m www.acteurspublics.com

Vous bénéficiez, à tout moment, de la possibilité d’annuler votre abonnement sans avoir à vous justifier. La partie de votre abonnement non servie vous sera immédiatement remboursée. Annulation exclusivement par mail à : abonnement@acteurspublics.com

Je souscris un abonnement d’un an à Acteurs publics au tarif de 71,50 € TTC (70,03€ HT) comprenant la newsletter quotidienne, le mensuel. Adresse d’expédition (n’oubliez pas d’indiquer votre e-mail) Organisme

Adresse de facturation (si différente) Organisme

❑ M. ❑ Mme ❑ Mlle

❑ M. ❑ Mme ❑ Mlle

Prénom

Nom

Prénom

Fonction

Fonction

Service

Service

Adresse

Adresse

Code postal

Ville

Tél.

Fax

E-mail (impératif) Date

Code postal Tél.

Nom

Ville Fax

E-mail Signature

Pour les particuliers et les entreprises, paiement joint à la commande. Règlement par chèque à l’ordre de SEP ou par virement bancaire : RIB : 30056 00643 0643323 7921 14. Pour les administrations : paiement par mandat administratif. Dans ce cas, joindre la commande administrative à ce bon de commande. Conformément à la loi informatique et libertés du 6 janvier 1978, vous disposez d’un droit d’accès et de rectification pour toute information vous concernant.

ABOMAGAP94

Abonnement en ligne sur Acteurspublics.com ou à l’aide de ce bulletin d’abonnement à renvoyer avec votre règlement par chèque à l’ordre de SEP à Acteurs publics, 7 rue Auguste Gervais, 92130 Issy-les-Moulineaux


AFP

Mémoire

Le patrimoine sous protection La loi « originelle » sur les monuments historiques a 100 ans.

I

l y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde. » Victor Hugo en a rêvé en 1825, Aristide Briand et son ministre des Beaux-Arts Maurice Faure l’ont fait près de quatre-vingt dix ans plus tard. Promulguée le 31 décembre 1913, la loi destinée à sauvegarder les bâtiments hérités du passé a été présentée devant la Chambre des députés… trois ans plus tôt. Elle s’appuie sur un rapport du député

de Savoie Théodore Reinach, historien et archéologue érudit. Ce texte fondateur, devenu l’une des clés de voûte du code du patrimoine créé en 2004, est le fruit d’une prise de conscience qui a mûri tout au long du XIX e siècle. En 1840, une première liste d’édifices à sauvegarder en priorité est établie, sous l’égide de l’inspecteur général des monuments historiques Prosper Mérimée. La cité médiévale de Carcassonne (photo) en fait partie. Par son « sauvetage », puis sa

162 ■ ACTEURS PUBLICS N°100-101 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2013

restauration sous Napoléon III par l’architecte Eugène Violletle-Duc, elle est emblématique de cette mise en place progressive d’une politique de protection du patrimoine.

Édifices privés Le texte de 1913 complète les dispositions, insuffisantes, d’une première loi adoptée en 1887. Elle donne un cadre juridique aux dispositifs et pratiques en matière de protection, prévoit des sanctions

pénales en cas d’infraction à la loi, permet des sauvegardes d’urgence et surtout rend possible le classement d’un édifice privé au titre des monuments historiques sans l’accord de son propriétaire. Cent ans après, la loi de 1913 est en quelque sorte victime de son succès : de 4 800 cette année-là, le nombre de monuments historiques est passé à quelque 43 000 aujourd’hui. Une protection de plus en plus lourde à assumer pour les pouvoirs publics. ● Laure Berthier



© GettyImages - Clerkenwell

CHOISIR L’UGAP, C’EST AUSSI SOUTENIR PLUS DE 400 PME ET L’EMPLOI LOCAL

Avec près de 2/3 de ses fournisseurs qui sont des TPE-PME-ETI, l’UGAP est une passerelle privilégiée entre commande publique et entreprises locales. En vous approvisionnant à l’UGAP, vous soutenez l’économie et l’emploi dans les territoires.

POUR PLUS D’INFORMATIONS :

www.ugap.fr/pme


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.