Acteurs Publics 99

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N°99

Octobre 2013 / 6,50€

www.acteurspublics.com

HAUTS FONCTIONNAIRES

CHERCHE NOUVEAUX

PROFILS

JEAN PISANI-FERRY

« La première responsabilité de l’État, c’est la cohérence »

SONDAGE Les Français sévères sur la protection sociale

ENQUÊTE

De tout petits pas pour la dépendance

DÉBROUSSAILLER LE MAQUIS DE L’ÉVALUATION EN SANTÉ



Édito

« Les dépenses publiques augmenteront quand même en valeur absolue, à quelque 1 100 milliards, mais à un rythme moindre par rapport aux années précédentes. » Par Pierre-Marie Vidal, directeur de la rédaction pmvidal@acteurspublics.com

Première version du PLF 2014 et première déception. Même avec une très hypothétique réduction du déficit à 3,6 points de PIB, la dette va continuer de croître. Au niveau de 95 % du PIB en 2014, elle peut à tout moment faire exploser le budget en cas d’augmentation des taux d’intérêts. Véritable épée de Damoclès, la charge de la dette menace donc la France plus que jamais. Une menace bien réelle alors qu’au regard du déficit, les 15 milliards d’euros d’économies annoncées en 2014 sont parfaitement virtuels puisqu’il ne s’agit que d’économies prévues par rapport à ce qu’aurait été l’évolution « spontanée » des dépenses. En clair, les dépenses publiques augmenteront quand même en valeur absolue, à quelque 1 100 milliards, mais à un rythme moindre par rapport aux années précédentes. Le caractère extrêmement relatif de cette promesse d’économie traduit parfaitement l’absence de volonté politique de réduire la dépense publique.

Avec un « trou » de près de 7,7 milliards d’euros cette année, l’assurance maladie reste la plus déficitaire des quatre branches de la Sécurité sociale. Pourtant, ces dernières années, la hausse des dépenses de santé a été systématiquement inférieure aux prévisions du budget. Ce sera encore le cas en 2013, où elles représenteront 175 milliards d’euros, soit 500 millions d’euros de moins que l’objectif soit + 2,7 %. Avec un objectif de croissance limitée à 2,4 % en 2014, l’assurance maladie devra continuer à faire des efforts d’économies sur les médicaments, les tarifs de certaines spécialités, la maîtrise médicalisée ou encore – et surtout – les hôpitaux. C’est dans ce domaine que les possibilités d’économies restent les plus importantes en raison de surcapacités chroniques qui freinent le développement de la pratique ambulatoire. 2014, année d’élections municipales ne devrait pourtant pas être favorable à un débat objectif et serein en la matière.

Le Haut Conseil des finances publiques qui entend jouer les « garde-fous » vient pour la première fois de donner son avis sur la copie budgétaire du gouvernement et de rendre un verdict imparable : « Sauf à modifier la loi de programmation et le calendrier de redressement des finances publiques, le mécanisme de correction sera déclenché mi-2014, appelant des efforts supplémentaires ». Car le Haut Conseil non seulement émet des réserves sur les hypothèses budgétaires pour 2014, mais note que, quand bien même elles seraient respectées, elles ne permettraient pas de rattraper le retard accumulé en 2013. Le déficit structurel serait encore supérieur de 0,6 point à l’objectif de convergence. En conséquence, si la France entend respecter sa signature de 2012 donnant autorité au Haut Conseil, celui-ci déclenchera quoi qu’il arrive des mesures de restrictions budgétaires. Autant dire que ce budget est déjà pour partie gelé et que 2014 sera bien plus contrainte qu’annoncé.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 3


SOMMAIRE

99 2013

PATRICK ALLARD/REA

octobre

JEAN PISANI-FERRY

VINCENT BAILLAIS

76

Économie solidaire : l’union fait la force dans les territoires

ALPHASPIRIT/FOTOLIA

L’économiste Jean Pisani-Ferry est depuis avril à la tête du Commissariat général à la stratégie et à la prospective, sous la tutelle de Matignon.

RICHARD DAMORET/RÉA

« La première responsabilité de l’État, c’est la cohérence »

18

Des monnaies couleur locale

52

La France pourrait compter un million de personnes âgées dépendantes de plus à l’horizon 2060. Mais le gouvernement hésite à lancer une réforme d’ampleur.

66

3

L’ÉDITO DE PIERRE-MARIE VIDAL

8

ACTUALITÉ

18 ENTREVUE

Jean Pisani-Ferry : « La première responsabilité de l’État, c’est la cohérence »

De tout petits pas pour la dépendance

ANALYSE

EXPERTISE

40 DOSSIER

66 AMÉNAGEMENT DURABLE

Haute fonction publique : les nouveaux profils

Paul Pasquali : « Les mesures d’ouverture partent d’un bon 24 OBSERVATOIRE sentiment… » Les dépenses de protection sociale sont inefficaces pour 7 Français sur 10 47 Le succès (relatif) des prépas intégrées

LA FRANCE DES POUVOIRS Marie-Anne Lévêque prend la tête de la DGAFP 33 François Jacq, nouveau directeur de l’Ifremer 34 Hélène Farnaud-Defromont, directrice de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger 30

38 RENCONTRE AVEC…

Anne Paugam, retour au sommet

4 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

46

48 EUROPE

Le budget français sous la loupe de la Commission

Économie solidaire : l’union fait la force dans les territoires 70 Un éclairage écolo à Valenciennes 66

72 SUR LE TERRAIN

Débroussailler le maquis de l’évaluation en santé 76 Des monnaies couleur locale 72

80 E-SERVICES PUBLICS

Le coût caché du logiciel libre

52 ENQUÊTE

De tout petits pas pour la dépendance 58 EMPLOI PUBLIC

Le virage politique du Fonds d’insertion 62 Apprentissage dans le service public : pourquoi ça coince 58

LES CLUBS 84 LE CLUB DES ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE 89 LE CLUB DES TERRITOIRES DURABLES


ROGER-VIOLLET

Air France prend son envol

98

LES NOUVEAUX PROFILS

40

EUGENESERGEEV/FOTOLIA

HAUTE FONCTION PUBLIQUE

Les écoles de la haute fonction publique s’ouvrent peu à peu à de nouveaux talents. Mais le chemin est encore long pour qu’elles représentent la société française dans toute sa diversité.

90 RESSOURCES 92 LIRE, ÉCOUTER, VOIR 94 Exposition : ces femmes

de la défense

96 IDÉES

Pourquoi il faut penser l’urbanisme de demain à une échelle intercommunale, par Daniel Delaveau, Estelle Grelier, Dominique Potier, Michel Piron et Bertrand Pancher 98 MÉMOIRE

1933 : Air France prend son envol

Acteurs publics www.acteurspublics.com 7 rue Auguste Gervais 92445 Issy-les-Moulineaux cedex Tél. : 01 46 29 29 29 Directeur de la rédaction Pierre-Marie Vidal (29 01) pmvidal@acteurspublics.com Rédacteur en chef Bruno Botella (29 20) bbotella@acteurspublics.com Rédacteur en chef adjoint Laurent Fargues (29 09) lfargues@acteurspublics.com Rédaction Sylvain Henry (29 27) shenry@acteurspublics.com Pierre Laberrondo (29 26) plaberrondo@ acteurspublics.com Xavier Sidaner (29 21) xsidaner@acteurspublics.com

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Ont également collaboré à ce numéro Jean-Bernard Gallois (à Bruxelles), Sabine Germain, Laurence Mauduit, Raphaël Moreaux

Secrétaire de rédaction Laure Berthier Rédacteur en chef technique Marc Bouder (29 03) mbouder@acteurspublics.com Rédacteurs graphistes Johnny Tymen Laurent Proy Abonnements Tél. : 01 46 29 29 19 Fax : 01 46 29 29 39 abonnement @acteurspublics.com Prix de ce numéro 6,50 € TTC 11 numéros d’Acteurs publics - 71,50 € TTC/an

Directeur de la publication Pierre-Marie Vidal Acteurs publics est édité par la Société d’Édition Publique SAS au capital de 200 000 € Actionnaires : CFSS - Pierre-Marie Vidal Impression Imprimerie SIEP - Z.A. Les Marchais 77590 Bois-le-Roi CPPAP 0216 T 84324 ISSN 1765-2022 Dépôt légal à parution Crédits couverture Fotolia, Vincent Baillais, Richard Damoret/REA, Jean-Claude

Partenariats et communication Bastien Brunis (29 24) bbrunis@acteurspublics.com Publicité Pascal Breton (29 02) pbreton@acteurspublics.com Secrétaire générale Margareth Régnier Tél. : 01 46 29 29 13 Fax : 01 46 29 29 39 mregnier@acteurspublics.com

Moschetti/REA

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OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 5


INNOVATION TERRITORIALE

RH

ÉTAT

ORGANISATION

HOSPITALIÈRE

SERVICE

COMMUNICATION


Un événement

LES VICTOIRES DES ACTEURS PUBLICS

2013 REMISE DES PRIX

LE 4 DÉCEMBRE à l’Assemblée nationale Sous le haut patronage et en présence de Claude Bartolone, président de l’Assemblée nationale


Actualité

■ OPEN DATA ■ SANTÉ

Un vade-mecum « pédagogique »

Les hôpitaux locaux sont-ils condamnés à disparaître ? Face à des élus qui tiennent à préserver leurs services de médecine de proximité, la Cour des comptes reconnaît que « le modèle de l’hôpital local (…) est fort de multiples avantages pour les patients, comme celui d’éviter une partie des passages aux urgences », mais elle estime son activité « menacée », dans son rapport annuel sur la Sécurité sociale, publié le 17 septembre. La Cour recommande un « pilotage plus dynamique et cohérent » et met en avant le rôle des agences régionales de santé (ARS) qui doivent « plus finement intégrer les anciens hôpitaux locaux dans l’organisation du parcours de soins ».

En bref

■ RÉMUNÉRATIONS

La catégorie C

Collectivités Mauvaise gestion des risques, effectifs en hausse… Dans un prérapport évoqué par Les Échos et qui sera rendu public mi-octobre, la Cour des comptes épingle sévèrement les collectivités locales et plus particulièrement le bloc communal, qui « aurait dû faire plus d’efforts ».

Grand Paris La commission des lois du Sénat a repris à son compte la position de l’Assemblée nationale de créer un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et à statut particulier pour la future métropole du Grand Paris.

JEAN CLAUDE MOSCHETTI/RÉA

Emploi Le directeur général de Pôle emploi, Jean Bassères, a affirmé, le 23 septembre, que l’opérateur public était « engagé dans les corrections des disparités territoriales », alors que la charge des conseillers varie du simple au double d’une région à l’autre.

revalorisée

Les agents de catégorie C vont bénéficier de deux revalorisations de salaire, a annoncé le ministère de la Fonction publique à l’issue d’une ultime réunion de concertation, fin septembre, avec les organisations syndicales. Selon les simulations du cabinet de Marylise Lebranchu, les agents de catégorie C rémunérés en échelle 3, c’est-à-dire les plus petits salaires, bénéficieront d’une augmentation moyenne de 45 à 46 euros brut par mois – selon le versant de la fonction publique auquel ils appartiennent – entre janvier 2014 et janvier 2016.

8 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

IGOR/FOTOLIA

BAZIZ CHIBANE/SIPA

L’avenir des hôpitaux locaux en question

Si ce n’est pas un rappel à l’ordre, cela y ressemble. Les ministres ont reçu, mi-septembre, un vade-mecum à l’appui d’une circulaire signée du Premier ministre concernant la politique d’ouverture de leurs données publiques. Depuis près de deux ans et le lancement d’Etalab – la mission chargée auprès du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP) de piloter ce chantier d’avenir –, la politique d’open data semble marquer le pas et les compteurs restent bloqués à quelque 353 000 jeux de données. Même si tous les ministères ne méritent sans doute pas un carton rouge, « il est important de faire œuvre de pédagogie », affirme une source proche du dossier. « Grâce à ce texte, nous pouvons mieux faire passer le message en interne auprès des services », complète un expert de l’open data, qui espère « lever les réticences ». Sur le fond, le vade-mecum alerte les ministères sur l’intérêt économique qu’il y a à libérer les données et à favoriser leur réutilisation. « C’est créer de grands référentiels partagés par tous les acteurs et encourager le développement de nombreux services à forte valeur ajoutée, par exemple dans le tourisme, le transport, la santé ou la maîtrise de la consommation d’énergie », précise le texte.


Actualité

■ EMPRUNTS TOXIQUES

Un guichet pour la rénovation des logements

Une nouvelle taxe

CHARLET-POOL/SIPA/SIPA

■ ÉCOLOGIE

pour aider

les collectivités Le gouvernement prépare en direction des banques une nouvelle taxe systémique (liée à la taille de leur bilan), qui servira à abonder le fonds de soutien aux collectivités locales ayant contracté des prêts « toxiques », selon le quotidien financier L’Agefi. Le mécanisme de soutien aura une capacité d’intervention de 1,5 milliard d’euros, avec une montée en charge de 100 millions par an pendant quinze ans. LIA Les banques devront FOTO apporter la moitié des fonds (soit 50 millions d’euros par an) le reste provenant de l’État, mais aussi de la Société de financement local (Sfil, le nouvel acteur public du financement des collectivités) et de Dexia. « BNP Paribas, première banque française par la taille du bilan, sera particulièrement pénalisée par cette mesure, d’autant qu’elle finance peu les collectivités », souligne L’Agefi. À l’inverse, l’État et le groupe BPCE, premier prêteur aux collectivités, devraient en sortir gagnants. Cette nouvelle taxe s’ajoute à la taxe systémique créée en 2011 (800 millions d’euros attendus cette année) et au nouveau fonds de résolution bancaire (1 milliard par an jusqu’en 2020). La création du mécanisme, dont le fonctionnement reste à définir, sera entérinée dans le projet de loi de finances.

Immigration Le conseil général du Bas-Rhin a suspendu l’accueil de nouveaux mineurs isolés étrangers sur son territoire, jugeant que ses capacités d’accueil étaient saturées et que l’État devait l’aider à remédier à cette situation Santé La ville de Strasbourg a annoncé qu’elle allait permettre aux patients ayant souffert d’un cancer de pratiquer gratuitement une activité sportive afin de réduire le risque de récidive, élargissant ainsi son dispositif de « sport sur ordonnance » lancé à la fin de l’année 2012. Travail Le ministre du Travail, Michel Sapin, s’est engagé à « clarifier » avant la fin de l’année le financement des missions confiées aux partenaires sociaux en matière de formation professionnelle. La loi devrait rebattre les cartes entre état, régions et syndicats.

« Je ne vais pas dire qu’on se sent humilié quand on nous impose la présence du préfet dans les conférences territoriales d’action publique, mais un peu... » Alain Rousset, le 20 septembre, en clôture du congrès de l’Association des régions de France qu’il préside, a évoqué le « problème de confiance » concernant la décentralisation.

SALOM-GOMIS

SEBA

STIE N/

SIP A

Afin de dynamiser le nombre de rénovations de logements, le gouvernement a lancé un « service public de la rénovation énergétique » avec 450 points d’information répartis sur le territoire. Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, la ministre du Logement, Cécile Duflot, et son homologue de l’Écologie, Philippe Martin, ont dévoilé cette forme de guichet unique lors d’un déplacement à Arras, sous le slogan « J’écorénove, j’économise ». Ce plan d’incitation aux travaux entraînant des économies d’énergie (isolation, chaudières économes, etc.) est « désormais opérationnel », selon le ministère du Logement. L’essentiel du plan, qui vise à atteindre l’objectif très ambitieux de 500 000 rénovations écologiques de logements par an d’ici 2017, avait déjà été dévoilé par François Hollande en mars. La principale mesure, déjà connue, concerne une prime accordée aux ménages. Les deux tiers des Français y sont éligibles, selon le gouvernement. Une subvention de 1 350 euros sera proposée aux ménages dont les revenus ne dépassent pas 25 000 euros pour une personne seule, 35 000 euros pour un couple et 50 000 euros pour une famille avec deux enfants.

En bref

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 9


HAMILTON/REA

Actualité

■ TRANSPORTS

GILLES ROLLE/RÉA

Les régions sur les rails

L’Association des régions de France (ARF) annonce la création d’une structure commune pour l’acquisition du matériel ferroviaire roulant, affirmant que lorsque les conseils régionaux s’occupent du transport par rail, « ça marche beaucoup mieux ». Cette initiative, lancée en marge du congrès de l’Association des régions de France organisé en septembre à Nantes, vise à « conforter le rôle des régions dans leur qualité d’autorité organisatrice des transports », selon un communiqué cosigné par 8 conseils régionaux, par l’ARF et par le Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif). Ils précisent qu’une « association d’étude » dont « les statuts seront déposés fin 2013 » étudiera la manière dont les régions pourraient acquérir du matériel roulant. Selon leurs chiffres, 5 700 trains express régionaux (TER) et 6 200 Transiliens en région parisienne « transportent au quotidien 3,9 millions de voyageurs ». C’est la SNCF qui est propriétaire des trains, ce qui complique les commandes, la gestion de l’après-vente et constitue une source de délais et retards. « Nous voulons assumer totalement la responsabilité de la définition de la politique des transports publics » sur les territoires et que cette responsabilité « soit reconnue par l’État et l’exploitant » (la SNCF), a déclaré Jacques Auxiette, président du conseil régional des Pays de la Loire, en charge des dossiers liés aux transports à l’ARF.

10 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

Près de 2 000 postes supprimés dans les ministères Les effectifs de l’État vont baisser en 2014 pour la deuxième année consécutive. Le projet de budget, présenté mercredi 25 septembre en Conseil des ministres par Pierre Moscovici, ministre de l’Économie, prévoit la suppression de 13 123 postes dans les ministères non prioritaires et la création de près de 11 000 postes dans l’éducation, la justice et la police. Quelque 2 000 postes seront donc supprimés, après un recul d’environ 1 000 postes en 2013 et alors que François Hollande s’est engagé à maintenir stables les effectifs de l’État sur la durée du quinquennat. L’effort concerne particulièrement la Défense (7 881 postes

supprimés), les Finances (2 564 postes) et l’Écologie (522 postes). La masse salariale de l’État est quasiment stabilisée et les dépenses de fonctionnement des ministères sont globalement réduites de 2 %, portant l’effort global à 2,6 milliards d’euros, précise le projet de loi de finances présenté en Conseil des ministres. Elle devrait s’élever à environ 81 milliards (contre 80,6 milliards en 2013), selon le ministère de la Fonction publique. Un maintien notamment permis par la limitation des mesures catégorielles à 270 millions d’euros en 2014, contre près de 550 millions par an entre 2008 et 2012 et 310 millions en 2013.


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Actualité

■ DROGUES ■ EMPLOI

Un plan contre les addictions

Six mois après le lancement du contrat de génération, seules 10 600 demandes d’aides ont été déposées pour l’embauche de jeunes en CDI et le gouvernement appelle les entreprises de plus de 50 salariés à s’emparer de ce dispositif, lourd à mettre en œuvre. Opérationnel depuis six mois, ce second outil – après les emplois d’avenir – devait répondre au double défi du chômage des jeunes (24,6 % au deuxième trimestre) et des seniors. Il prend la forme d’une aide financière pour l’embauche d’un jeune de moins de 26 ans en CDI. L’objectif était d’atteindre 75 000 signatures d’ici fin mars 2014.

HAMILTON/REA

En bref

■ JEUNESSE

Une clause « d’impact »

Éducation La réforme des rythmes scolaires a été « mal comprise » par les parents, a estimé la PEEP, deuxième fédération de parents d’élèves, jugeant qu’il aurait fallu expliquer qu’elle apporterait du « bienêtre » aux élèves.

Concession L’État a conclu un accord sur le contrat de concession du Stade de France, détenu par un consortium incluant les groupes Vinci et Bouygues. L’accord supprime pour quatre ans le versement d’une indemnité prévu au contrat.

XAVIER POPY/RÉA

Territoires Le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), synthèse de la Datar, de l’Acsé et du secrétariat général du comité interministériel des villes, verra le jour début 2014, à l’issue d’une période de préfiguration, a annoncé Cécile Duflot lors du Conseil des ministres du 18 septembre.

dans la loi

Valérie Fourneyron, ministre de la Jeunesse et des Sports, a proposé, dans son discours de rentrée prononcé au Forum français de la jeunesse (FFJ) en septembre, de mesurer l’impact des textes parlementaires sur la jeunesse. « Puisque la jeunesse est une priorité, nous devons obliger l’État et les parlementaires à évaluer les conséquences sur la jeunesse de chaque projet soumis au Parlement », a-t-elle déclaré. Elle a proposé la création d’une « clause d’impact jeunesse » qui serait un outil important d’aide à la décision publique.

12 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

PATRICK KOVARIK/AFP

Timide démarrage pour le contrat de génération

Mieux prévenir les consommations addictives des jeunes, renforcer la lutte contre les trafics de drogue en l’adaptant aux évolutions technologiques : tel est le plan présenté en conseil interministériel autour du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, le 19 septembre. Prévu pour cinq ans (2013-2017), il est « très orienté sur la prévention sanitaire, notamment en direction des jeunes », a expliqué à l’AFP Danièle Jourdain-Menninger, (photo) présidente de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt). « Rares sont les jeunes de 17 ans qui à cet âge n’ont expérimenté aucun des trois principaux produits que sont l’alcool, le tabac et le cannabis », souligne-t-elle. Pour y faire face, la présidente de la Mildt veut valoriser les consultations jeunes consommateurs (CJC), animées par des professionnels de la santé, qui accueillent les jeunes de moins de 25 ans, évaluent leur consommation addictive et les aident à y mettre fin. Ces CJC, au nombre de 400 sur le territoire, restent pour l’instant assez méconnues. « L’idée est de faire en sorte que les professionnels de ces consultations aillent vers les jeunes et leurs parents », dans les écoles, les lycées, les missions locales, précise Danièle Jourdain-Menninger.


Actualité

Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a annoncé début septembre avoir abandonné l’idée d’une vaste refonte de la carte des sous-préfectures. Seuls les départements de la Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin seront touchés par d’éventuelles fermetures. Les préfets devront faire leurs propositions avant le 31 octobre et la nouvelle carte des sous-préfectures concernées entrera en vigueur au 1er janvier 2015. De source syndicale, l’objectif serait de fermer une dizaine d’établissements.

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SCOTT HORNBY/THE SUN/SIPA

Des économies dans les ambassades Regroupements d’implantations, vente d’appartements, colocalisation… Le ministère des Affaires étrangères a engagé une rationalisation de son patrimoine immobilier et espère tirer 60 millions d’euros des ventes de ses biens à l’étranger en 2014. 22 millions seraient consacrés au désendettement de l’État et 10 millions à améliorer la sécurité des ambassades.

■ SANTÉ

Prévention des risques psychosociaux

DUCLOS ALEXIS/SIPA

BEBERT BRUNO/SIPA

Une dizaine de sous-préfectures fermées ?

Les syndicats doivent se prononcer avant le 10 octobre sur un projet d’accord-cadre relatif à la prévention des risques psychosociaux dans la fonction publique. Une mouture remaniée pour tenir compte des demandes des organisations, qui pourraient à l’unanimité la parapher. Ce document d’une vingtaine de pages érige la prévention des risques psychosociaux parmi les priorités de la gestion des ressources humaines. Les employeurs publics sont invités à mener des politiques « contribuant à supprimer ou à défaut, réduire les tensions au travail et les exigences émotionnelles qui pèsent sur les agents ». Les risques psychosociaux, souligne le projet d’accord, « peuvent se traduire par du désengagement au travail, un absentéisme accru, des conflits entre les personnes ». Les employeurs sont priés de faire preuve de « vigilance » dans « l’anticipation de l’évolution des organisations, en particulier les réorganisations ». Une traduction dans les textes des critiques formulées par la gauche sur les conséquences de la Révision générale des politiques publiques (RGPP) sur les conditions de travail des agents. Plus généralement, les cadres et les managers publics seront en première ligne. Le projet d’accord souligne ainsi la nécessité de redonner « plus d’autonomie et de marge de manœuvre aux agents et notamment aux cadres ». Et surtout de « conforter le rôle, la place et les moyens de l’encadrement ».

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 13


Actualité

■ ANALYSE

■ LYCÉES FRANCILIENS

Une nouvelle formation « indispensable »

JACQUES LOIC/AFP

Dans un rapport rendu public le 18 septembre, la chambre régionale des comptes (CRC) qualifie d’« élevé » et d’« onéreux » le taux d’absentéisme des quelque 8 000 personnels techniques des lycées d’Île-de-France employés par le conseil régional. La CRC constate que depuis plusieurs années, les agents des lycées sont absents en moyenne 30,5 jours par an, soit un taux d’absentéisme de 9 %. Dans « certains lycées » de Paris, de la petite couronne et quelques villes isolées les plus excentrées de la région, la moyenne peut atteindre 45 jours. La CRC a chiffré l’impact financier de l’absentéisme, en 2010-2011, à 40,35 millions d’euros soit environ 10,9 % des charges de personnels de la région en 2011. L’absentéisme recouvre toutes les absences légales : maladie ordinaire, accident du travail, longue maladie, congé maternité…

En bref

■ RECONNAISSANCE

Les enseignants aiment leur métier,

Vacances scolaires Le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, a indiqué en septembre que « des discussions s’ouvrir[aient] en 2015 » afin d’envisager la possibilité de raccourcir les vacances d’été. En février dernier, le ministre avait défendu l’idée de passer « au moins à 38 semaines » de cours par an contre 36 semaines aujourd’hui.

PIERRE ANDRIEU/AFP

Nouveaux rythmes Dans le cadre du passage à la semaine de 4 jours et demi à l’école, Paris a créé en septembre 1 500 postes d’animateurs, principalement par titularisation des vacataires, pour un coût de 12,3 millions d’euros. Le montant total du passage aux nouveaux rythmes scolaires pour les 137 000 écoliers de la capitale est fixé à 50 millions d’euros.

pas leur salaire

Dans le premier « baromètre des métiers de l’éducation » publié à la rentrée par l’Unsa, les enseignants et agents administratifs interrogés disent à 54 % ressentir un manque de reconnaissance et de respect dans leur pratique professionnelle. Certes, leurs missions ont du sens (82 %). Mais ils sont 57 % à juger leurs conditions de travail insatisfaisantes, 80 % à regretter un manque de perspectives de carrière et 83 % à considérer que leur rémunération n’est pas à la hauteur de leur qualification.

14 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

DR

L’absentéisme des personnels à l’index

« La réforme de la formation des enseignants était indispensable », juge Patrick Demougin, ancien président de la Conférence des directeurs d’IUFM, après l’ouverture en septembre des nouvelles écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espe). Pour lui, la réforme dite de la mastérisation, menée sous le gouvernement Fillon, « a provoqué une situation assez dramatique pour les futurs enseignants, qui se voyaient privés d’une année de “stagiarisation” rémunérée accompagnée de formation au moment où ils entraient dans la carrière ». Si la réforme n’est pas revenue sur l’attribution d’un master à l’issue des deux années de formation – « une bonne chose » –, elle a allongé la période de stage en classe par rapport à ce qui était en vigueur dans les IUFM. Un allongement qui pourrait rendre « compliqué pour ces étudiants de mener de front cette présence “sur le terrain” et le suivi du cursus universitaire », redoute Patrick Demougin. « Certes, la qualité de la formation des Espe jouera un rôle important dans l’attractivité des métiers de l’enseignement, mais elle ne fera pas tout : il faut aussi se pencher sur les conditions d’exercice du métier », ajoute-t-il. Retrouvez l’intégralité de l’interview sur www.acteurspublics.com


Actualité

HAMILTON/REA

Dynamiser la construction de HLM La ministre du Logement, Cécile Duflot, a exhorté les organismes HLM à « redoubler d’efforts » pour atteindre l’objectif, hors de portée en 2013, de construire 150 000 logements sociaux chaque année. « Il est décisif d’accélérer le rythme de financement des logements sociaux dès 2013 », a-t-elle déclaré à l’occasion du 74e congrès de l’Union sociale pour l’habitat, fin septembre, à Lille.

■ DÉFENSE

FRANÇOIS MORI/AP/SIPA

Louvois « pas stabilisé » Louvois est le « grand raté » de la réforme du ministère de la Défense lancée en 2008 au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, estiment les députés Geneviève Gosselin-Fleury (PS) et Damien Meslot (UMP) dans un rapport sur la réorganisation du ministère présenté en septembre devant la commission de la défense. « Pire : à mesure que l’on corrige des bugs, il en apparaît souvent d’autres. Les plus grands doutes sont permis sur la stabilité intrinsèque de l’outil et plus particulièrement de son calculateur », pointent les députés. La mise en place précipitée en 2011 du nouveau système informatique a entraîné d’importants dysfonctionnements dans le paiement des soldes, notamment dans l’armée de terre, affectant des dizaines de milliers de militaires. Les députés retiennent deux hypothèses de sortie de crise : « continuer avec Louvois » en concentrant tous les moyens pour redresser la situation à partir de ce système. Ou étudier le recours à un autre progiciel « dont le déploiement nécessiterait probablement un délai de trois ans ». Les audits en cours devraient permettre au ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, de prendre une décision dans les prochains mois.

11,2 C’est, en milliards d’euros, le coût que pourrait représenter l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) à l’horizon 2040, selon les projections de l’Insee qui table sur un nombre d’allocataires de 2 millions, contre 1,2 million en 2012.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 15


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Entrevue

JEAN PISANI-FERRY

« La première respo de l’État, c’est la cohé 18 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013


Entrevue JEAN PISANI-FERRY

Économiste influent, ancien directeur de l’institut Bruegel, Jean Pisani-Ferry est depuis avril 2013 à la tête du Commissariat général à la stratégie et à la prospective, sous la tutelle de Matignon. Chargé notamment de réfléchir à ce que sera la France dans dix ans, il appelle à la cohérence des choix publics, notamment en matière d’innovation et d’immigration. Propos recueillis par Bruno Botella et Laurent Fargues Photos : Vincent Baillais

nsabilité rence »

Quel est le rôle du Commissariat général à la stratégie et à la prospective, qui a succédé au Centre d’analyse stratégique ? Nous avons quatre métiers. L’anticipation dans les domaines économiques, sociétaux ou techniques, comme en témoignent nos travaux sur Internet 2030, les compagnies aériennes dans vingt ans ou la France dans dix ans. Les débats, car nous sommes, par tradition, une maison d’ouverture et de lien avec les partenaires sociaux, la communauté des experts, le monde universitaire, la société civile. L’évaluation, qui

est en train de se réaffirmer. Et enfin, bien sûr, le conseil au gouvernement. Sur l’évaluation, avezvous vocation à centraliser les évaluations des politiques publiques lancées dans le cadre de la Modernisation de l’action publique ? Nous n’avons pas vocation à être le grand évaluateur ! Mais nous pouvons jouer un rôle d’interface entre la recherche, qui a beaucoup progressé en ces matières, et l’action publique. Pour l’heure, nous expérimentons. J’ai été, par exemple, chargé par le Premier ministre …

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 19


Entrevue

1997 Conseiller 1977 Économiste

PARCOURS JEAN PISANI-FERRY

1951 Naissance à BoulogneBillancourt (Hauts-de-Seine)

« Nous n’avons pas vocation à être le grand évaluateur ! » … de présider le comité d’évaluation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Concernant la Modernisation de l’action p u b l i q u e (MAP), nous avons un rôle dans la sélection des politiques à

évaluer et puis, en aval, sur la concertation dans le cadre du processus MAP dans son ensemble. N’y a-t-il pas trop d’organismes publics de concertation et de réflexion en France ? Ne faudrait-il pas

1973 Ingénieur de l’École supérieure d’électricité

au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii)

que votre commissariat général fusionne les 8 organismes avec lesquels il travaille en réseau ? C’est une vision caporaliste dans laquelle je ne me reconnais pas. Ces organismes sont divers, certains sont connus et réputés, comme le Conseil d’orientation des retraites. Je ne vois pas pourquoi on changerait ce qui marche. Certains sont pourtant peu visibles… Certains sont encore très jeunes ! Ces organismes, qui mobilisent peu de moyens, sont thématiques et ont répondu à un besoin lors de leur création. Nous nous coordonnons pour travailler ensemble. Sur des sujets comme l’innovation ou le modèle social, n’a-t-on pas davantage besoin de mesures urgentes que de réflexion à dix ou vingt ans ? Il ne faut pas opposer l’un et l’autre. Les questions auxquelles conduit l’exercice « Quelle France dans dix ans ? » sont par nécessité plus ambitieuses que celles auxquelles conduit la logique du court terme. Sur le modèle social français, faut-il faire de la prévention plutôt que de la remédiation ? En matière de compétitivité, faut-il

20 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

auprès du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, Dominique Strauss-Kahn puis Christian Sautter

miser sur le réveil de l’industrie traditionnelle ou sur l’ouverture internationale de nouveaux secteurs ? Que faut-il faire pour que notre croissance soit « environnementalement » et financièrement soutenable ? Voilà des questions importantes. À un horizon plus long, vous êtes obligés de vous les poser et on peut donc les aborder sereinement. La réponse qu’on leur apporte peut nourrir la décision à court terme. L’exercice de prospective « Quelle France dans dix ans ? » a suscité quelques sarcasmes. Le regrettez-vous ? Il s’agissait de sarcasmes paresseux car les mêmes se plaignent souvent de l’absence de vision de l’État. Mais n’y a-t-il pas un décalage par rapport à l’urgence à laquelle sont soumis les responsables politiques ? Nous devons réfléchir au long terme et aider à la prise de décision immédiate. On parle beaucoup d’État « stratège ». Quelle définition en donneriez-vous ? Soyons modestes, l’État n’est pas toujours un bon stratège, et il n’est pas le seul stratège, surtout dans une France décentralisée avec la montée en puissance des collectivités locales. Et puis, il y a des


Entrevue

2013

2001 Président délégué du Conseil d’analyse économique

2002 Chargé de mission auprès du directeur du Trésor

2005 Directeur de l’Institut Bruegel à Bruxelles

Commissaire général à la stratégie et à la prospective.

Retrouvez l’intégralité de la biographie sur www.acteurspublics.com

de l’innovation à l’américaine et taxer lourdement les innovateurs. Un État stratège, c’est d’abord un État cohérent.

acteurs privés, des acteurs indépendants. Nous ne vivons plus dans le monde des années 1960. En matière stratégique, l’État a un rôle de carrefour, avec une vraie capacité de réflexion, d’impulsion, mais pas de monopole. La notion d’État stratège est donc dépassée, selon vous ? Bien sûr que l’État a des responsabilités stratégiques. Mais, avant tout, il a une première responsabilité : la cohérence. Prenez le vieux débat sur la politique industrielle, qui a été marqué par la controverse entre les tenants des politiques horizontales et les avocats des politiques sectorielles. « L’État ne doit pas choisir à la place des entreprises », clamait-on.

D’accord, mais dans le même temps, l’État a des responsabilités que nul ne lui conteste en matière de fiscalité, de recherche publique, d’infrastructures, de politique universitaire, d’immigration… Qu’on le veille ou non, tout cela dessine des choix. Vous ne pouvez pas vouloir faire de l’industrie lourde et avoir une fiscalité élevée sur le stock de capital. Vous ne pouvez pas faire

Pour favoriser l’innovation, la politique d’immigration est également importante… Cohérence là encore ! Vous ne pouvez pas dire « je veux une politique d’innovation ambitieuse mais je ne veux pas d’étrangers ». Aux États-Unis, à diplôme égal, les étrangers déposent deux fois plus de brevets. Pour innover, un pays doit être ouvert à des gens qui vont venir créer et donc accepter des immigrés qui auront des préoccupations différentes, qui ne vivront pas forcément comme vous… On ne peut pas être un pôle d’innovation et se fermer. Le Japon, par exemple, est très cohérent : il ne s’est pas ouvert et ne cherche pas à faire de l’innovation radicale. Son modèle, c’est plutôt l’innovation incrémentale. C’est un choix.

Le manque de cohérence des politiques publiques en France explique-t-il ses difficultés ? C’est l’un des facteurs. Vous avez eu en effet des situations d’instabilité ou d’incohérence. Il y a aussi des exemples de cohérence. Prenez l’un des thèmes en vogue en ce moment : le big data. C’est un domaine dans lequel la France a des atouts grâce à son extraordinaire école de mathématiques. Nous avons là les moyens de transformer notre avantage scientifique en avantage industriel. Mais …

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 21


Entrevue JEAN PISANI-FERRY

« La vraie fracture entre les économies avancées et émergeantes, c’est celle de la dette publique. » … pour cela, il faut favoriser

C’est évidemment plus difficile à faire. Une grande réforme fiscale va forcément faire des gagnants et des perdants. Si vous n’avez pas un peu d’argent pour dédommager les perdants, c’est compliqué. Mais cela reste nécessaire. Autre exemple : dans une période « normale », on se poserait la question du financement par la dette publique d’une part de la transition énergétique. Cela se justifierait car il s’agit une politique intergénérationnelle. On choisirait donc de faire payer plus à la

l’accès aux données et leur publication. C’est une affaire de droit. De la même manière, si l’on dit que la santé devient un domaine d’innovation majeure avec la médecine de précision, il faut réfléchir au lien entre notre système de santé et l’innovation. Je le redis, la cohérence des choix publics est capitale. Le niveau de la dette publique en France ne bloque-t-il pas la réflexion à long terme ? C’est un fait. Cette question, nous la partageons avec toutes les économies avancées. Car la vraie fracture aujourd’hui entre les économies avancées et émergeantes, c’est celle de la dette publique. Il y a vingt ans, la crise de la dette touchait les économies émergentes. Aujourd’hui, les économies avancées affichent en moyenne plus de 100 % de dette publique, les économies émergentes moins de 40 %. Notre dette publique est-elle trop élevée ? La dette publique, cela progresse par à-coups, à la suite d’un événement imprévu, d’une crise, d’un choc sanitaire. Et là, vous franchissez un palier. Après pour redescendre, c’est beaucoup plus lent. La

question qui se pose quand on est à 90 %, comme la France, ce n’est pas comment stabiliser ce ratio, mais comment le ramener à un niveau qui nous permette de faire face au prochain choc. Aujourd’hui, si la France devait être confrontée à un événement imprévu ou à une récession comme en 2009, qui imposerait de faire appel à l’État comme assureur en dernier ressort, elle ne pourrait pas faire face. Peut-on, dans ces conditions, lancer de vraies grandes réformes ?

22 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

génération future. Ce choix nous est fermé. Le choix de confier le commissariat général à un économiste comme vous plutôt qu’à un haut fonctionnaire a-t-il une signification, selon vous ? Il marque la volonté de faire venir quelqu’un du monde des think tanks, qui a une culture du débat d’idées. Le Premier ministre m’a dit : « Je veux un regard sans concession sur la France. » Je m’attacherai à lui donner satisfaction. ●


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Mardi 5 et mercredi 6 novembre 2013

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Observatoire

SONDAGE EXCLUSIF

Les dépenses de protection sociale sont inefficaces pour 7 Français sur 10 Les personnes interrogées par l’Ifop portent un jugement sévère sur les dépenses de protection sociale en France. Un résultat qui reflète l’inquiétude des Français sur le financement des retraites et la prise en charge de la fin de vie.

Q

uelques semaines après les annonces du gouvernement concer nant ses projets de réforme du financement des retraites, et alors que de premiers éléments sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS)

pour 2014 ont été présentés, l’Ifop a mené, pour le compte d’Acteurs publics et Ernst & Young, une enquête sur les perceptions des Français quant à leur système de protection sociale et de santé. Il ressort d’abord de cette étude qu’une large majorité

24 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

des personnes interrogées estime que l’argent public consacré chaque année par le pays à sa politique de protection sociale et de santé est utilisé de manière inefficace (71 %). À l’inverse, 29 % portent un jugement positif. À titre de

comparaison, rappelons que la même question posée lors de précédents Observatoires au sujet de la seule politique de santé engendrait un résultat d’efficacité perçue supérieur (35 %), de même que celle au sujet de la défense nationale (49 %) ; seule la

formation professionnelle donnait un score encore plus minoritaire (24 %). La « protection sociale » renvoie donc, chez nombre de Français, à une politique dispendieuse, ce qui ne semble guère étonnant dans un contexte où l’on convoque régulièrement …


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71 %

« La protection sociale renvoie chez nombre de Français à une politique dispendieuse. »

des 50-64 ans accepteraient de payer plus pour maintenir le niveau de couverture sociale

Damien Philippot (Ifop)

LES DÉPENSES DE PROTECTION SOCIALE ET DE SANTÉ REPRÉSENTENT PLUS DE LA MOITIÉ DE LA DÉPENSE PUBLIQUE EN FRANCE. SELON VOUS, L’ARGENT PUBLIC CONSACRÉ CHAQUE ANNÉE PAR LA FRANCE À LA POLITIQUE DE PROTECTION SOCIALE ET DE SANTÉ EST-IL UTILISÉ DE MANIÈRE EFFICACE OU INEFFICACE ?

JEAN CLAUDE MOSCHETTI/REA

Total inefficace : 71 %

Total efficace : 29 %

16 %

Tout à fait inefficace

3%

Résultats selon la profession de la personne interrogée 35

Tout à fait efficace

33 %

30

26 % 25

21 %

55 %

20

26 % Plutôt efficace

50

CSP +

Profession intermédiaire

Résultats selon la proximité politique

40

47 % 34 % 27 %

30

Plutôt inefficace

CSP –

17 %

20 10

10 % FG

PS

MoDem

UMP

FN

PLUS PRÉCISÉMENT, DIRIEZ-VOUS QUE LES DÉPENSES PUBLIQUES FAITES ACTUELLEMENT EN FRANCE DANS LE CADRE DE LA POLITIQUE DE PROTECTION SOCIALE PERMETTENT D’ATTEINDRE CHACUN DES OBJECTIFS SUIVANTS ? Prendre en charge les accidents du travail et les maladies professionnelles

67 %

Assurer une indemnisation correcte aux personnes qui perdent leur emploi

54 %

Améliorer la santé publique d’une manière générale

52 %

Alléger les charges liées à la présence d’enfants dans la famille

51 %

Garantir aux personnes malades ou très âgées une fin de vie de qualité Prendre en charge la dépendance des personnes âgées Offrir une retraite convenable aux personnes âgées

33 %

46 %

48 %

49 %

38 %

62 %

36 %

64 %

28 %

72 %

Oui, plutôt

Non, plutôt pas

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 25


Observatoire

47 %

des sympathisants PS estiment que les dépenses de protection sociale sont utilisées de manière efficace.

les abus, les dépenses inutiles voire la fraude sociale dans le débat public.

Dépendance et retraite Au-delà de ces considérations générales, une analyse, risque par risque, de l’efficacité de la dépense publique permet de mieux considérer les forces et faiblesses du système français de protection sociale aux yeux des personnes interrogées. Ainsi, une majorité d’entre elles estime que l’objectif d’une prise en charge des accidents du travail ou des maladies professionnelles est atteint (67 %). De même, les jugements sont plutôt positifs s’agissant de trois autres objectifs : l’indemnisation correcte des personnes perdant leur emploi (54 %), l’amélioration

28 %

des sondés estiment que les dépenses de protection sociale permettent d’offrir une retraite convenable aux personnes âgées.

de la santé publique d’une manière générale (52 %) et l’allègement des charges liées à la présence d’enfants dans la famille (51 %). Le constat s’avère beaucoup plus sévère s’agissant de trois autres grandes finalités du système de protection sociale : 36 % seulement des Français pensent qu’il permet de prendre en charge la dépendance des personnes âgées, 38 % de garantir une fin de vie de qualité ou 28 % d’offrir une retraite convenable aux personnes âgées. Une lecture des réponses selon la proximité politique illustre de nouveau le poids de l’affiliation partisane sur la perception du système de protection sociale : à l’exception notable de l’indemnisation du chômage, qu’ils jugent certainement trop généreuse,

les sympathisants de l’UMP se montrent systématiquement plus négatifs sur la capacité du système à atteindre ses objectifs que les proches de la gauche.

Divergences sur le financement Les Français semblent très partagés sur différentes propositions faites au sujet du financement de certains risques. Ainsi, 53 % adhèrent à l’idée qu’il faudrait financer par l’impôt ou la CSG, et non par les cotisations, les prestations dites universelles, à savoir la famille et la maladie ; 52 % penchent pour un financement exclusivement par les cotisations sociales des prestations dites contributives, retraites et chômage. L’opinion est en revanche beaucoup plus unanime sur

Accédez à l’intégralité du sondage sur www.acteurspublics.com

d’autres propositions : ainsi, l’accord est très minoritaire sur l’idée de laisser plus de place aux assurances privées et aux mutuelles pour permettre une réduction des déficits (33 %), ou encore sur la réduction des cotisations patronales quitte à relever celles des salariés en vue d’une plus grande compétitivité des entreprises (26 %).

D’accord pour payer plus S’ils se montrent majoritairement sceptiques au sujet de l’utilisation qui est faite par les pouvoirs publics des fonds consacrés par la nation à la politique de protection sociale et de santé, les Français s’avèrent majoritairement favorables à l’idée de payer plus pour la protection sociale afin de maintenir leur propre

niveau de couverture et celui de la population (66 %), une minorité choisissant à l’inverse une stabilisation ou une diminution des prélèvements en contrepartie d’une réduction du niveau de couverture (34 %). Au final, cette enquête traduit l’ambivalence du sentiment des Français au sujet de leur protection sociale et de santé, marqué à la fois par un attachement fort à la pérennité du système et par une défiance manifeste à l’égard de l’efficacité de la gestion par les pouvoirs publics des fonds qu’y consacrent salariés, entreprises et contribuables. ● Damien Philippot directeur des études politiques au département « Opinion et stratégies d’entreprise » de l’Ifop

DR

L’expertise d’

Hervé de La Chapelle, associé en charge du secteur « Protection sociale », EY Advisory

Depuis les années 1960, les dépenses de protection sociale ont évolué plus rapidement que l’économie. Elles consomment aujourd’hui un tiers du PIB (plus de 650 milliards d’euros) ce qui classe la France au premier rang des pays de l’OCDE. La préservation du modèle français – véritable amortisseur de crise – et sa pérennité financière imposent une maîtrise de la dépense et un renforcement de son efficacité. Les Français portent un regard critique sur l’efficacité de la politique de protection sociale mais restent profondément attachés au modèle national. Pour le préserver, ils semblent prêts à accepter de le faire évoluer même au prix d’une augmentation du niveau de prélèvement. Le grand nombre d’acteurs qui interviennent pour gérer des prestations pourtant assez similaires contribue à rendre notre système particulièrement complexe. Il faut en priorité simplifier et décloisonner le dispositif, pour renforcer à

26 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

court-terme l’efficacité de la politique de protection sociale et la maîtrise de la dépense, et pour poser les bases d’un système rénové, en ligne avec les enjeux de demain. Les enjeux sociétaux et l’évolution démographique – augmentation de l’espérance de vie à la naissance et stagnation voire régression de l’espérance de vie en bonne santé – font évoluer les besoins en matière de couverture sociale et conduisent à développer progressivement une « offre de services » plus transverse et « sur mesure ».


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LE FINANCEMENT DE NOTRE SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE REPOSE AUJOURD’HUI TRÈS LARGEMENT SUR LES REVENUS DU TRAVAIL VIA LES COTISATIONS SOCIALES PAYÉES PAR LES ENTREPRISES ET LES SALARIÉS. POUR CHACUNE DES PROPOSITIONS SUIVANTES, DIRIEZ-VOUS QUE VOUS ÊTES TOUT À FAIT, PLUTÔT, PLUTÔT PAS OU PAS DU TOUT D’ACCORD ? Les prestations dites universelles – famille et maladie – devraient être financées par l’impôt ou la CSG et non par les cotisations sociales

11 %

42 %

33 %

Les prestations dites contributives – retraites et chômage – devraient être financées exclusivement par les cotisations sociales

12 %

40 %

38 %

La priorité est de réduire les dépenses publiques de protection sociale et de laisser plus de place aux assurances privées et aux mutuelles Il faut réduire les cotisations patronales, quitte à relever les cotisations à la charge du salarié, pour améliorer la compétitivité de nos entreprises

8%

6%

25 %

20 %

Tout à fait d’accord

VOUS PERSONNELLEMENT, SI VOUS DEVIEZ FAIRE UN CHOIX ENTRE LES DEUX PROPOSITIONS SUIVANTES, À QUOI SERIEZ-VOUS LE PLUS PRÊT ?

38 %

Payer autant voire moins pour la protection sociale et réduire le niveau de couverture sociale des Français, dont le vôtre

10 %

29 %

41 %

33 %

Plutôt d’accord

Plutôt pas d’accord

66 % 34 %

14 %

Tout à fait d’accord

Payer plus pour la protection sociale et maintenir le niveau de couverture sociale des Français, dont le vôtre

Sondage Acteurs publics/Ernst & Young réalisé par l’Ifop pour l’Observatoire des politiques publiques auprès d’un échantillon de 976 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession de l’interviewé) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI - Computer Assisted Web Interviewing) du 18 au 20 septembre 2013.

Ainsi, en complément des politiques développées historiquement par grands domaines (retraite, couverture santé, retour à l’emploi, aides aux familles et handicap), se rajoutent des actions transverses sur de nouveaux enjeux (prévention et accompagnement de la dépendance, lutte contre la précarité) qui impliquent de fédérer l’ensemble des acteurs et de leurs moyens autour d’une problématique globale. Adresser ces nouveaux besoins ne doit pas venir ajouter de la dépense à un système dont l’équilibre financier n’est pas assuré. Pour cette raison, et au-delà de la réduction du nombre d’acteurs, l’effort doit porter en priorité sur la coordination des intervenants (retraite, maladie, famille, chômage, handicap, dépendance) ainsi que sur la mutualisation des actions et moyens dans les domaines où cela fait sens (action sociale, lutte contre la précarité). Parmi les pistes à suivre : t Proposer une offre coordonnée et adaptée en réponse aux besoins immédiats de l’usager en mettant l’accent sur une plus forte coopération des acteurs comme vecteur d’efficience et d’amélioration de la situation

t Exploiter toutes les opportunités offertes par les développements en cours pour mettre à disposition des acteurs concernés la connaissance de la situation de l’usager, des besoins et des prestations servies, afin de cibler plus efficacement les prestations (éligibilité et mutualisation des aides). Cela permettra de faire évoluer le système – fonctionnant actuellement en silos, par politique d’intervention – vers une organisation mettant en œuvre une politique globale de prestations centrée sur l’assuré, sa situation et ses besoins t Agir conjointement sur la sensibilisation et la prévention. Sensibiliser l’usager aux risques et aux situations auxquels il peut être confronté à l’avenir, et l’aider à s’y préparer, permet d’en minimiser l’impact et de réduire les dépenses futures. La transition en cours constitue une véritable opportunité de modernisation de notre système. Toutefois, elle ne se réalisera qu’avec une volonté politique forte de simplification et de transformation.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 27


CHAQUE JOUR

LA

FRANCE

DES POUVOIRS

SUR TOUS VOS ÉCRANS

ACTEURSPUBLICS.COM


VINCENT BAILLAIS

RENCONTRE AVEC…

> ANNE PAUGAM

P. 38

Le SGMAP change de tête

DR

Retour au sommet

JULIEN RENCKI

P. 30

MARIE-ANNE LÉVÊQUE

Matignon met la main sur la DRH de l’État

SANDRINE DUCHÊNE

La numéro deux du Trésor

LAURENT DE JEKHOWSKY

P. 32

Le nouveau SG de Bercy

P. 31

JÉRÔME MARCHAND-ARVIER

HÉLÈNE FARNAUD-DEFROMONT

Une dircab’ à la tête d’un opérateur

P. 30

P. 34

Une nouvelle vie en Paca

DANIEL LENOIR

CLAUDINE LEDOUX

Le gestionnaire des allocations familiales P. 36

Une ambassadrice très politique

P.32

P. 33


LA

OCTOBRE 2013

FRANCE DES POUVOIRS

Matignon met la main sur la DRH de l’État

BOUGENT

Marie-Anne Lévêque , conseillère « fonction publique » du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, vient d’être nommée directrice générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP). C’est dans cette direction – la direction des ressources humaines de l’État – que MarieAnne Lévêque faisait ses premières armes, fraîchement sortie de l’ENA, en 1993. Plus tard, cette haute fonctionnaire de 47 ans y fut cheffe de service

Équateur Ambassadeur de France en Ouzbékistan depuis trois ans, le diplomate François Gauthier part occuper les mêmes fonctions en Équateur. Normalien, agrégé d’histoire, énarque, François Gauthier a officié ces dernières années comme consul général adjoint (2004-2005), puis comme consul général de France à Boston, aux États-Unis (2005-2009). Il a aussi conseillé Jean-Pierre Raffarin à Matignon de 2002 à 2004.

(2007-2011). Elle avait ensuite officié comme cheffe de la mission « Gestion des ressources humaines et audit salarial du secteur public » au Contrôle général économique et financier, l’un des corps d’inspection de Bercy, avant d’accompagner Jean-Marc Ayrault à Matignon, dès son arrivée en mai 2012. Depuis, Marie-Anne Lévêque a suivi toutes les négociations comme celle sur la rénovation du statut des fonctionnaires. Douze ans plus tôt, elle

épaulait, déjà à Matignon, un autre Premier ministre de gauche, Lionel Jospin, comme conseillère technique, chargée de la fonction publique (2000-2002). Elle avait ensuite rejoint le ministère de l’Éducation nationale en tant que cheffe de service et adjointe au directeur des affaires financières (2002-2007).

DR

ILS

DU CABINET À L’ADMINISTRATION

Biélorussie

Le modernisateur

DR

DR

de l’État

Cameroun

DR

Ambassadrice de France au Sri Lanka depuis presque quatre ans, Christine Robichon, 60 ans, revient en Afrique pour prendre le poste d’ambassadrice au Cameroun. Cette diplomate a déjà dirigé une ambassade dans ce continent : au Soudan (2004-2008). Christine Robichon a aussi été, en 2009, ambassadrice chargée des relations avec les familles et les proches des victimes du vol 626 de la compagnie Yemenia.

30 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

En place depuis moins d’un an, le magistrat de la Cour des comptes Jérôme Filippini vient d’être remplacé par le « trésorien » Julien Rencki comme secrétaire général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP). Ce dernier, énarque, conseillait sur l’économie, les finances et les entreprises, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. Julien Rencki a occupé plusieurs postes à la direction du Trésor à Bercy. Adjoint au chef du bureau en charge du financement de la politique d’aide au logement et de la régulation de l’assurance en 1999, il part comme attaché financier à la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne en 2001. Chef du bureau « EDF et Gaz de France » à l’Agence des participations de l’État en 2003, il revient ensuite à la direction du Trésor. Chef du bureau « Endettement et financement international » en 2006, il est promu sous-directeur des affaires financières multilatérales et du développement en 2007. Julien Rencki a aussi été secrétaire général de cette direction.

Le juriste de Bercy Après quelques semaines d’incertitude, la sensible direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie et des Finances vient d’être confiée à un conseiller du ministre Pierre Moscovici : Jean Maïa . Il succède à la conseillère d’État Catherine Bergeal, en place depuis six ans et qui a réintégré en mai son corps d’origine. Jean Maïa, 43 ans, lui aussi membre du Conseil d’État, conseillait le ministre de l’Économie et des Finances, Pierre Moscovici sur les questions juridiques depuis l’alternance de 2012. Ancien élève de la promotion Marc Bloch de l’ENA, ce haut fonctionnaire a été rapporteur à la 8e sous-section du contentieux, puis responsable du centre de documentation du Conseil d’État (1997-2002). Conseiller pour les questions juridiques et parlementaires au secrétariat général des affaires européennes en 2002, Jean Maïa a dirigé le service de la législation et de la qualité du droit au secrétariat général du gouvernement de 2006 à 2012.

DR

Ambassadrice de France au Monténégro depuis trois ans et demi, la diplomate Dominique Gazuy, 59 ans, a été nommée ambassadrice en Biélorussie. Cette ancienne élève de l’IEP de Paris et de l’Inalco a été ambassadrice en Moldavie (1998-2003) et en Slovénie (2003-2006). Dominique Gazuy a aussi officié au Quai d’Orsay comme cheffe de la mission pour la valorisation des carrières (2008-2010).


LA

JUIL-AOÛT OCTOBRE 2013 2013

FRANCE Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

promu

Directeur général des services du conseil régional de Poitou-Charentes depuis la victoire de Ségolène Royal aux élections régionales de 2004, Jean-Luc Fulachier, administrateur civil, vient d’être nommé au tour extérieur conseiller maître à la Cour des comptes. Ce haut fonctionnaire de 51 ans, a été le directeur du cabinet de Ségolène Royal au ministère délégué à la Famille et à l’Enfance de 2000 à 2002.

Une énarque dans les

satellites

Conseillère pour les affaires européennes au cabinet du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, depuis l’alternance socialiste, Julia Maris, 38 ans, se voit nommée vice-présidente en charge des relations institutionnelles de Thales Alenia Space, le leader européen des systèmes satellitaires. Auparavant, Julia Maris, énarque, a travaillé en 2007-2008 comme rapporteure auprès du président de la commission chargée de l’élaboration du livre blanc sur la défense. Avant d’officier chez Défense Conseil International (DCI) comme directrice marketing, du développement et des relations extérieures.

LE STATISTICIEN DE METZ

L’ADJOINT DE LOUIS GALLOIS

Chef du service des ressources humaines au secrétariat général du ministère de l’Agriculture depuis quatre ans, Philippe Mérillon, 52 ans, prend le poste de directeur régional de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt de la région Languedoc-Roussillon. Auparavant, cet ancien élève de l’IEP Bordeaux et de l’école d’administration des affaires maritimes a été chef du service de la stratégie agroalimentaire et du développement durable à la direction générale des politiques agricole, alimentaire et des territoires (DGPAAT) au ministère de l’Agriculture, de 2006 à 2009.

Guy Bourgey, directeur régional de l’Insee en Alsace depuis 2007, prend la direction du centre statistique de Metz. Cet administrateur de l’Insee de 59 ans a dirigé le service « Études et diffusion » à la direction régionale de l’Insee en Champagne-Ardenne en 1997, avant de devenir chef adjoint du département « Programmation et gestion » à la direction générale de l’Insee de 2001 à 2007.

Chargé ces derniers mois par le ministre de l’Économie, Pierre Moscovici, de la rédaction d’un rapport sur l’avenir de la bourse de Paris, Thierry Francq vient de se voir nommé commissaire général adjoint à l’investissement en remplacement de Philippe Bouyoux. Thierry Francq a quitté en décembre 2012 le poste de secrétaire général de l’Autorité des marchés financiers (AMF), qu’il a occupé pendant la présidence de Jean-Pierre Jouyet (2009-2012). Auparavant, cet X-Ensae de 49 ans a été chef du service du financement de l’économie à la direction du Trésor (2004-2009).

Un banquier

Le nouveau SG

de Bercy

à Singapour À 40 ans tout juste, Benjamin Dubertret fait son entrée dans les hautes sphères de la diplomatie. Cet inspecteur des finances vient d’obtenir son premier poste d’ambassadeur. Il part représenter la France à Singapour, ville-État réputée mondialement pour sa place financière. Issu de Bercy, Benjamin Dubertret a déjà eu l’occasion de se frotter à la diplomatie économique comme adjoint au chef de la mission économique de Pékin (2005-2007). Il avait ensuite rejoint la Caisse des dépôts et consignations (CDC) comme directeur des prêts et de l’habitat à la direction

des fonds d’éparg n e , avant d’être promu directeur de la direction des fonds d’épargne du groupe public en 2010. C’est le poste qu’il occupait jusqu’ici. Cet ancien élève d’HEC, frère de Julien Dubertret – l’actuel directeur du budget et ancien conseiller de François Fillon à Matignon – est entré dans la haute fonction publique voilà douze ans, à sa sortie de la promotion Nelson Mandela de l’ENA. Sorti de l’école à l’inspection générale des Finances, il y a fait ses premières armes durant quatre ans (2001-2005).

Directeur du cabinet de la ministre de la Réforme de l’État, de la Décentralisation et de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, Laurent de Jekhowsky obtient un poste très en vue à Bercy : secrétaire général du ministère. À 58 ans, Laurent de Jekhowsky revient ainsi à Bercy. Il y a officié comme sous-directeur des politiques salariales et de l’emploi dans la fonction publique et le secteur public de 2002 à 2004. Il a ensuite occupé les postes de trésorier-payeur général de la Drôme (2004-2006), de la Haute-Savoie (20062011), puis de directeur départemental des finances publiques de ce même département (2011-2012). Auparavant, Laurent de Jekhowsky a débuté dans l’enseignement, en 1978. Il réussit ensuite le concours de l’ENA et rejoint à sa sortie de l’école, en 1990, la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP). D’abord adjoint au chef du bureau des personnels de conception et d’encadrement, il dirige le bureau des rémunérations, des pensions et du temps de travail de cette direction en 1990. Il rejoint ensuite la direction du budget notamment comme chef du bureau « Statuts et problèmes généraux de la fonction publique » (1994-1997). Laurent de Jekhowsky a ensuite conseillé, sur la fonction publique (1997-1999) puis sur les affaires budgétaires (1999-2002), Lionel Jospin à Matignon.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 31

P. BAGEIN

de Royal

UN DRH PART EN RÉGION

J.-M. PETTINA/CDC

Le bras droit

DES POUVOIRS


LA

OCTOBRE 2013

FRANCE DES POUVOIRS

ILS

PARCOURS

Diplomatie

La numéro deux du Trésor

La direction des affaires financières du ministère des Affaires étrangères est confiée à Bruno Perdu. Ce diplomate de 56 ans était depuis trois ans et demi le consul général de France à Genève. Bruno Perdu a conseillé Hubert Védrine en 2001-2002 au Quai d’Orsay. Consul général de France à Rabat, au Maroc, en 2002, il a aussi piloté la sous-direction de la politique des ressources humaines de ce ministère de 2006 à 2010.

DR

Le chef de l’État vient de nommer l’une de ses conseillères à la présidence de la République, Sandrine Duchêne, au poste de directrice générale adjointe du Trésor à Bercy. Sandrine Duchêne suivait la politique économique et les finances publiques au cabinet du Président depuis l’alternance. Cette X-Ensae de 43 ans effectue ainsi son retour à la direction générale du Trésor, où elle a occupé plusieurs postes. Cheffe du bureau « Politiques de santé et comptes sociaux » en 2004, puis sous-directrice des finances publiques en 2006, cette économiste a ensuite piloté la sous-direction « Service public de l’emploi » au service des politiques de l’emploi et de la formation professionnelle à la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle du ministère du Travail en 2008, avant de diriger le département de la conjoncture à la direction générale de l’Insee (2009-2012). Auparavant, à Bercy, Sandrine Duchêne a dirigé à la direction du Trésor le bureau « Politique économique » (2000-2002) puis, à la direction de la prévision, le bureau « Synthèse des finances publiques » en 2002.

Directeur de la stratégie de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) depuis 2010, le diplomate Rémi Maréchaux obtient son premier poste d’ambassadeur et part représenter la France au Kenya. Il avait rejoint la DGSE en 2010, après avoir conseillé Nicolas Sarkozy durant trois ans. Il a auparavant été sous-directeur de l’Afrique australe et de l’océan Indien à la direction de l’Afrique et de l’océan Indien au Quai d’Orsay, en 2004.

Une nouvelle vie en Paca

Transfert

dans la santé

DR

Directeur général de la santé depuis mai 2011, le praticien hospitalier Jean-Yves Grall va succéder à Daniel Lenoir au poste de directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) du Nord-Pas-de-Calais. Jean-Yves Grall, cardiologue de profession, a piloté de 2007 à 2011 l’agence régionale de l’hospitalisation de Lorraine, devenue en 2009 l’agence régionale de santé (ARS) de Lorraine. Au ministère de la Santé, il a été le conseiller de la directrice de l’hospitalisation et de l’offre de soins (DHOS) en 2006-2007.

DR

DR

Éric de La Moussaye, chef adjoint de la mission « Achats » à la direction générale de l’administration et de la modernisation du ministère des Affaires étrangères depuis 2011, obtient son premier poste d’ambassadeur et part représenter la France à Sainte-Lucie. Il a occupé ces dernières années plusieurs postes dans le corps préfectoral. Souspréfet de Rethel (Ardennes) en 2004, il fut sous-préfet de Coutances (Manche) en 2007, puis sous-préfet de Saint-Diédes-Vosges (Vosges) en 2010.

32 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

DR

BOUGENT

Jérôme Marchand-Arvier, 31 ans, maître des requêtes au Conseil d’État, devient le directeur régional adjoint de Pôle emploi en ProvenceAlpes-Côte d’Azur. Il est, depuis quelques jours, en charge de la stratégie, des relations extérieures et de la maîtrise des risques. Un choix de carrière peu courant pour un membre du Conseil d’État, mais en cohérence avec sa connaissance pointue en matière de questions sociales et d’emploi. Pendant presque un an et demi (de décembre 2010 à mai 2012), Jérôme Marchand-Arvier fut en effet un proche collaborateur de Xavier Bertrand au ministère du Travail : d’abord conseiller chargé des relations de travail au pôle « Travail-emploi » du cabinet, il a ensuite été le directeur adjoint de ce cabinet. Au lendemain de l’alternance de mai 2012, ce haut fonctionnaire avait quitté la Rue de Grenelle et réintégré l’institution du Palais-Royal, sa maison d’origine. Parallèlement, le jeune énarque s’est engagé en politique. Élu au conseil municipal de Nancy en 2008, il a été l’adjoint du maire André Rossinot, chargé du territoire de Nancy Nord. Jérôme Marchand-Arvier avait tenté en vain de reconquérir, en mars 2011, pour le compte de l’UMP, le canton de Nancy-Nord. En décembre dernier, il s’était mis en retrait de la vie politique nancéenne en démissionnant de son poste d’adjoint au maire, restant toutefois membre du conseil municipal. Il ne se représentera pas aux élections municipales de 2014.


LA

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FRANCE Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

LA VIGIE DE L’INDUSTRIE

DU CABINET À L’ADMINISTRATION

Une directrice de projet chargée de mettre en place le secrétariat général du Conseil national de l’industrie à Bercy a été nommée : Odile Kirchner. Cette nouvelle instance, vice-présidée par JeanFrançois Dehecq, doit conseiller les pouvoirs publics sur la situation de l’industrie et des services à l’industrie en France, aux niveaux national et territorial. Odile Kirchner, énarque, a fait l’essentiel de sa carrière chez Renault.

pêche, les risques naturels et l’agroenvironnement au ministère de l’Écologie de juillet 2012 jusqu’au départ de la ministre en juillet dernier. Auparavant, cette polytechnicienne de 34 ans, ancienne élève de l’École nationale des ponts et chaussées, a débuté comme adjointe au chef du bureau des risques naturels à la direction générale de la prévention des risques au ministère de l’Écologie, en 2005. Elle

Le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a nommé la maire PS de Charleville-Mézières, Claudine Ledoux, au poste d’ambassadrice, déléguée à la coopération régionale dans la zone de l’océan Indien. Une zone d’influence où la France est présente via l’île de La Réunion et Mayotte. L’élue succède à un haut fonctionnaire : Philippe Leyssene. Claudine Ledoux abandonne son mandat de maire. Elle était sur le point de terminer son second mandat à CharlevilleMézières (50 000 habitants), le chef lieu de la préfecture des Ardennes. Elle a indiqué qu’elle souhaitait garder son mandat de conseillère régionale. Elle est depuis 2004 vice-présidente du conseil régional de Champagne-Ardenne, en charge des relations internationales. Claudine Ledoux a enseigné les sciences de l’éducation en institut universitaire de formation des maîtres. La future ambassadrice a siégé au Palais-Bourbon de 1997 à 2002.

Le pilote

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Une ambassadrice très politique

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La cheville ouvrière de la transition écologique Une directrice de projet (groupe III) pour la transition écologique auprès du commissaire général au développement durable vient d’être nommée : Marie Renne. Cette ingénieure en chef des Ponts, des eaux et des forêts sera chargée d’assurer le pilotage, l’animation et la coordination du chantier gouvernemental de la transition écologique. Marie Renne a conseillé Delphine Batho sur l’eau, la chasse, la

a ensuite dirigé le bureau de la planification et de l’économie de l’eau à la direction de l’eau et de la biodiversité à ce même ministère (2010-2012).

UN HISTORIEN DEVIENT INSPECTEUR

de l’Ifremer

Débarqué début août de la direction de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), le magistrat de la Cour des comptes Jean-Yves Perrot a été remplacé par François Jacq. Cet ingénieur général des Mines de 47 ans dirigeait depuis plus de quatre ans Météo France. Après son éviction, Jean-Yves Perrot avait dénoncé, dans le quotidien L’Opinion, une « décision brutale » et fustigé des « syndicats [qui] prennent et tiennent le pouvoir ». « Je n’ai jamais eu de convictions partisanes dans l’exercice de la direction d’un grand établissement public », avait aussi dit cet élu, maire UMP de Marly-le-Roi. Son successeur, François Jacq, a conseillé, sur la recherche, l’industrie et l’environnement, François Fillon à Matignon de 2007 à 2009. Polytechnicien, François Jacq a débuté comme chercheur au centre de sociologie de l’innovation de l’École nationale supérieure des mines de Paris en 1993. Directeur du département « Énergie, transports, environnement, ressources naturelles » à la direction de la technologie au ministère de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie en 1997, François Jacq dirige l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) de 2000 à 2005. Il officie ensuite comme directeur de la demande et des marchés énergétiques à la direction générale de l’énergie et des matières premières au ministère délégué à l’Industrie (2005-2007).

DES POUVOIRS

Proche du chef de l’État François Hollande, l’historien et universitaire Benjamin Stora, 62 ans, a été nommé, en Conseil des ministres, au tour extérieur, à l’inspection générale de l’Éducation nationale. Cet intellectuel enseigne l’histoire du Maghreb contemporain, les guerres de décolonisation et l’histoire de l’immigration maghrébine en Europe, à l’université Paris-XIII et à l’Inalco.

LA SURVEILLANTE DU GRAND PARIS À LA RATP Conseillère pour le budget, l’industrie, l’environnement, les transports, l’agriculture, la pêche, l’éducation, la culture et les politiques structurelles au cabinet de Thierry Repentin au ministère délégué aux Affaires européennes, Camille BonenfantJeanneney, 32 ans, part à la RATP comme chargée de la mission « Grand Paris » auprès du directeur général adjoint. Cette polytechnicienne, ancienne élève l’École nationale des ponts et chaussées et de l’IEP de Paris, a travaillé pendant six ans à la représentation permanente de la France auprès de l’Union européenne.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 33


LA

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FRANCE DES POUVOIRS

Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

La gestionnaire

de l’immobilier

BOUGENT

Pyrénées-Atlantiques

DR

Numéro deux de l’agence publique pour l’immobilier de la justice, qui conçoit et gère pour le compte de la Place Vendôme des grands projets immobiliers relevant des différentes directions du ministère (services judiciaires, administration pénitentiaire, etc.), Marie-Luce Bousseton vient d’être promue directrice générale en remplacement de Jean-Pierre Weiss. Ce dernier est par ailleurs reconduit à la direction générale de l’établissement public du Palais de justice de Paris. Au cours de ces dernières années, Marie-Luce Bousseton, une ingénieure générale des Ponts, des eaux et des forêts de 51 ans, a présidé le directoire du grand port maritime de Bordeaux (2009-2011). Auparavant, elle a été adjointe au sous-directeur des services de la décentralisation au ministère de l’Équipement en 1999 avant de piloter la sousdirection du pilotage des services, du budget et du contrôle de gestion à la direction du personnel, des services et de la modernisation de ce ministère en 2002. Elle a aussi occupé le poste de directrice déléguée départementale de l’équipement de la Gironde (2004-2009).

DR

de la justice

Nord-Pas-de-Calais Didier Montchamp, secrétaire général de la préfecture des Hauts-deSeine depuis quatre ans et demi, vient d’être promu préfet délégué pour la défense et la sécurité auprès du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais. Cet énarque a auparavant dirigé la sous-direction de l’organisation des secours et de la coopération civilo-militaire place Beauvau et officié comme sous-préfet de L’Haÿ-lesRoses, dans le Val-de-Marne.

des ex-militaires Chargé de mission « cadres dirigeants » auprès du secrétaire général du gouvernement depuis mai 2010, le général de brigade Arnaud Martin se voit porté à la tête du service à compétence nationale Défense Mobilité, l’agence de reconversion de la défense. Arnaud Martin a débuté dans l’opérationnel militaire avant de se spécialiser dans les ressources humaines. Officier adjoint en escadrille d’hélicoptères d’attaque au 3e régiment d’hélicoptères de combat à Étain en 1987, il commande aussi, toujours dans ce régiment, une escadrille d’hélicoptères d’attaque de 1990 à 1992. Officier instructeur à l’École de l’aviation légère de l’armée de terre du Cannet-des-Maures en 1992, Arnaud Martin se spécialise ensuite dans les ressources humaines. Chargé d’études « politique RH » au bureau « Planification des ressources humaines » de l’état-major de l’armée de terre en 1997, il commande ensuite la base d’hélicoptères de l’École de l’aviation légère de l’armée de terre de Dax, en 2001. Adjoint au bureau « États-majors » à la direction des ressources humaines de l’armée de terre en 2003, il est aussi chef du bureau de gestion « Appui » à cette direction de 2008 à 2010.

DU CABINET À L’ADMINISTRATION

Creuse

Une dircab’ à la tête d’un opérateur

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Préfet de la Drôme depuis novembre 2010, Pierre-André Durand, 53 ans, obtient son troisième poste de préfet de département et part représenter l’État dans les Pyrénées-Atlantiques. Cet énarque a, ces dernières années, été préfet de la Haute-Saône (2008- 2010), avant de diriger, pendant quelques mois en 2010, le cabinet du ministre de l’Industrie Christian Estrosi.

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Préfet délégué pour la défense et la sécurité auprès du préfet de la région Nord-Pas-deCalais depuis presque trois ans, Christian Chocquet vient d’être promu préfet de la Creuse. Christian Chocquet est entré dans le corps préfectoral en 2010 après avoir fait pratiquement toute sa carrière dans la gendarmerie nationale. Il a notamment commandé la région de gendarmerie de Corse en 2009-2010.

La diplomate Hélène FarnaudDefromont , 43 ans, s’est vue confier la direction de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), un opérateur du ministère des Affaires étrangères qui recrute, rémunère et assure l’inspection des personnels titulaires de l’éducation nationale (6 500 personnes) qu’il affecte aux établissements dont il a la gestion directe (75 en 2012-2013) ou qui lui sont associés par une conven-

34 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

tion (156). Une belle promotion pour celle qui dirigeait depuis un an le cabinet du ministre délégué au Développement, l’écologiste Pascal Canfin. Ancienne élève de SciencesPo Paris et de l’Inalco, Hélène Farnaud-Defromont a conseillé, sur les relations bilatérales, les questions de sécurité et la francophonie, Lionel Jospin à Matignon en 1997. Première secrétaire attachée de coopération et d’action culturelle à

Amman, en Jordanie, en 1999, elle a piloté la sousdirection du français à la direction de la coopération culturelle et du français du Quai d’Orsay de 2002 à 2005. Elle a aussi officié comme chargée de la mission « coordination des directions et des services, calendriers des événements » auprès du directeur général de la mondialisation du ministère.

DR

ILS

Le DRH


TOUS LES CONGRÈS D’ÉLUS EN DIRECT SUR ACTEURS PUBLICS TV

La rédaction d’Acteurs publics se mobilise pour suivre les temps forts de la 24e convention nationale de l’intercommunalité les 2, 3 et 4 octobre à Montpellier

INVITÉS SUR LE PLATEAU Carole Delga, députée de la Haute-Garonne

Olivier Audibert-Troin, député du Var, président de la communauté d’agglomération dracénoise

Jacqueline Gourault, sénatrice du Loir-et-Cher

Claude Bérit-Débat, sénateur de la Dordogne, rapporteur du projet de loi Alur, président de la C. A. périgourdine Michel Piron, député du Maine-etLoire, président de la communauté de communes des Coteaux du Layon Jean-Luc Rotureau, vice-président d’Angers Loire Métropole Loïc Cauret, président de Lamballe Communauté Emmanuelle Wargon, déléguée générale à l’emploi et à la formation

Claude Raynal, président délégué de Toulouse Métropole Estelle Grelier, députée de Seine-Maritime, présidente de la communauté de communes de Fécamp Olivier Dussopt, député de l’Ardèche, rapporteur du projet de loi modernisation de l’action publique territoriale et affirmation des métropoles Dominique Braye, président de la communauté d’agglomération de Mantes-en-Yvelines

Martin Vanier, professeur en géographie et aménagement Institut de la géographie alpine, université Joseph Fourier, Grenoble

Charles Guené, sénateur de la Haute-Marne, président de la communauté de communes d’Auberive, Vingeanne et Montsaugeonnais

Françoise Descamps-Crosnier, députée des Yvelines, conseillère communautaire de la communauté d’agglomération de Mantes-enYvelines

Pascal Fortoul, président de l’ADGCF

Françoise Ribière, maire d’Igny et vice-présidente de la communauté d’agglomération du Plateau de Saclay Jean-Marc Nicolle, président de la communauté d’agglomération du Val de Bièvre Serge Morvan, directeur général des collectivités locales

Daniel Delaveau, président de l’ADCF, président de Rennes Métropole Jean-Pierre Moure, président de Montpellier Agglomération Bertrand Pancher, député de la Meuse, président de Décider ensemble Michel Lesage, député des Côtes-d’Armor

LA CHAÎNE QUI DÉCRYPTE LES POLITIQUES PUBLIQUES - ACTEURSPUBLICS.COM


LA

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FRANCE DES POUVOIRS

Par Pierre Laberrondo et le service Base de données

Un « trésorien »

ILS

BOUGENT Israël

Directeur adjoint de cabinet de Fleur Pellerin au ministère délégué aux Petites et Moyennes Entreprises, à l’Innovation et à l’Économie numérique, depuis l’alternance, Erol Ok prend la direction générale du musée Picasso, en remplacement du magistrat de la Cour des comptes Laurent Sorbier, parti en juillet après avoir occupé ce poste depuis un peu plus d’un an. Le musée est fermé pour rénovation depuis 2009 et jusqu’à la fin de l’année 2013. Ancien élève d’HEC, de l’IEP de Paris et de l’ENA, Erol Ok, 37 ans, a débuté à la direction du Trésor à Bercy. Chargé du secteur géographique « Amérique latine, Mercosur » en 2003, puis adjoint au chef du bureau « Assurance-crédit » en 2004, il part comme conseiller économique à l’ambassade de France à Rome (2007-2009). Il était ensuite retourné à la direction du Trésor comme chef du bureau de la criminalité financière, des sanctions internationales et de l’investissement (2009-2011), puis comme chef du bureau des crédits-export et des garanties à l’international (2011-2012).

Le poste sensible d’ambassadeur de France en Israël vient d’être confié au diplomate Patrick Maisonnave. Cet ancien conseiller de Pierre Moscovici au Quai d’Orsay et de Bertrand Delanoë à la mairie de Paris pilotait depuis 2009 la direction des affaires stratégiques, de sécurité et du désarmement du ministère des Affaires étrangères. Auparavant, il a officié comme chef du service de la politique étrangère et de sécurité au Quai (2007-2009).

Argentine Directeur de l’Union européenne au Quai d’Orsay depuis plus de quatre ans, le diplomate Jean-Michel Casa devient ambassadeur de France en Argentine. Cet ancien directeur de cabinet du ministre délégué chargé des Affaires européennes Pierre Moscovici sous l’ère Jospin a déjà occupé deux postes d’ambassadeur : en Jordanie et en Israël.

Le gestionnaire

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des allocations familiales

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Colombie Spécialiste de l’Amérique du Sud, le diplomate JeanMarc Laforêt, ambassadeur de France au Venezuela depuis quatre ans, vient d’obtenir une nouvelle affectation, toujours dans cette zone géographique : ambassadeur en Colombie. Cet énarque a auparavant été adjoint au directeur des Amériques et des Caraïbes du ministère.

Retrouvez l’intégralité des nominations sur www.acteurspublics.com

36 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

Le stratège de Thales

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au musée Picasso

En place depuis 2008, le magistrat de la Cour des comptes Hervé Drouet, ancien directeur adjoint de cabinet de Xavier Bertrand rue de Grenelle, vient d’être remplacé par un inspecteur général des affaires sociales, Daniel Lenoir, à la direction de la Caisse nationale des allocations familiales. Cet énarque de 58 ans pilotait depuis quatre ans l’agence régionale de santé (ARS) du Nord-Pas-de-Calais. Il a occupé de nombreux postes dans le champ social : directeur général de la Mutualité de la fonction publique (MFP) en 1994, directeur général de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) et délégué général de la Fédération nationale des employeurs de la mutualité sociale agricole (FNEMSA) en 1997. Directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) en 2002, Daniel Lenoir a aussi dirigé la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) de 2004 à 2009.

ILS PASSENT DANS LE PRIVÉ

Pierre Cunéo rejoint, avec le titre de directeur, la direction de la stratégie, de la recherche et de la technologie du groupe industriel spécialisé dans la défense Thales. Cet inspecteur des finances de 38 ans a été le directeur de cabinet de Delphine Batho au ministère de l’Écologie pendant les huit premiers mois de l ’ a l t e rnance. Pierre Cunéo, ancien élève de l’École nationale de la statistique et des études économiques (Ensae), a d’abord officié comme administrateur de l’Insee avant de réussir ensuite le concours de l’ENA. Il rejoint ensuite, en 2003, l’inspection générale des Finances. Directeur adjoint de cabinet du secrétaire d’État aux Affaires européennes Jean-Pierre Jouyet en 2007, Pierre Cunéo dirige ensuite le cabinet du président de la SNCF, Guillaume Pépy, en 2008. Directeur de la stratégie ferroviaire et de la régulation du groupe ferroviaire, il a aussi été responsable de la ligne C du RER (2010-2012).


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Rencontre avec… > ANNE PAUGAM

Retour au sommet

PARCOURS

Après avoir quitté l’Agence française de développement en 2010, Anne Paugam y a été nommé directrice générale en mai. Une consécration pour cette inspectrice des finances qui a débuté à la Banque mondiale.

1993 ENA, promotion Léon Gambetta, sortie à l’inspection générale des Finances

2001 Directrice 1997 Chargée de mission à la Banque mondiale

38 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

adjointe du cabinet du ministre de la Coopération, Charles Josselin

2004 Directrice du département « Développement humain » à l’AFD

2010 Inspectrice générale des finances


LA

OCTOBRE 2013

FRANCE VINCENT BAILLAIS

DES POUVOIRS

S

i elle a « toujours eu un tropisme pour les questions économiques et internationales », comme elle l’affirme d’emblée, Anne Paugam doit être au firmament. À 46 ans, elle vient de prendre la tête de l’Agence française de développement (AFD), après une carrière passée entre Bercy, la Banque mondiale et l’AFD. Une sorte de consécration pour cette inspectrice des finances grenobloise qui est la première femme à décrocher le poste. Et de revanche aussi, après les trois années durant lesquelles l’établissement a été dirigé par Dov Zerah, critiqué par les ONG comme proche des réseaux de la « Françafrique ». En 2010, lorsque ce proche d’Henri Guaino avait été nommé, Anne Paugam avait préféré partir, comme plusieurs autres membres de l’état-major. « En tant que secrétaire générale, j’étais très impliquée dans l’équipe précédente et je ne souhaitais pas être associée à ce changement d’époque », confiet-elle. Trois ans plus tard, nul doute qu’elle puisera davantage dans l’héritage de Jean-Michel Severino, directeur de l’AFD de 2001 à 2010, que dans celui de Dov Zerah. Déjà, elle défend le bilan de la décennie Severino qui a conduit à une explosion des prêts dans l’activité de l’agence. « Les prêts que nous octroyons aux pays émergents ne diminuent pas d’un centime la part des dons ou prêts préférentiels aux pays d’Afrique subsaharienne », assure-t-elle.

Social business

2013 Directrice

La nouvelle directrice se félicite de la diversité des outils dont dispose l’AFD pour venir en aide aux pays pauvres. Et regrette que certains dispositifs, comme les garanties offertes aux banques locales ou le soutien au social business, ne répondent pas aux critères internationaux de l’aide

au développement. « Le chiffre de l’aide, tel que défini par l’OCDE, n’est pas un indicateur pertinent pour évaluer les résultats d’une maison comme la nôtre ni même pour piloter son activité, juge-t-elle. La meilleure preuve est que lorsque les pays nous remboursent sans se réendetter auprès de nous, ce qui est un signe positif et une preuve d’enrichissement, le chiffre de l’aide diminue ! » Le pilotage stratégique, Anne Paugam connaît. Entre 2002 et 2004, c’est elle qui a monté le service chargé des tableaux de bord pour la direction et imaginé nombre des indicateurs prospectifs utilisés aujourd’hui. C’était son premier poste à l’AFD après avoir passé deux ans au cabinet du

lieux d’habitation des inspecteurs des finances pour en surveiller les migrations d’ouest en est. Du second, elle a été agréablement surprise par la féminisation des équipes et le recrutement de personnes plus expérimentées. Après ses quatre premières années de « tournée », Anne Paugam réussit un concours ultrasélectif de la Banque mondiale et s’envole pour Washington. C’est là qu’elle fait ses premiers pas, à 31 ans, dans le monde du développement. D’abord dans la capitale américaine, où elle est successivement chargée de mission pour la région Asie du Sud-est et chargée de projet pour la région Europe centrale. Puis à Rabat, où elle conseille

« J’ai toujours eu

un tropisme pour les questions économiques

et internationales. » ministre de la Coopération Charles Josselin dans le gouvernement Jospin et quatre ans à la Banque mondiale. Une double expérience qui lui a donné un regard à la fois hexagonal et international sur l’aide au développement. Sortie de l’ENA dans la « botte » en 1993 – la même promo que Nicolas Revel, secrétaire général adjoint à l’Élysée, et Ramon Fernandez, directeur du Trésor –, cette fille d’universitaires a choisi le prestigieux service de Bercy. Elle n’en a gardé que de bons souvenirs – « une ambiance familiale et sympathique » – qu’elle a retrouvés avec plaisir en 2010 après son départ de l’AFD. De son premier passage, elle retient l’habitude du chef de service de punaiser sur une carte de la région parisienne les

pendant trois ans les autorités marocaines sur l’amélioration du secteur public, « un sujet central dans le développement d’un pays ». Autant d’expériences qui nourrissent les réflexions de la nouvelle directrice de l’AFD. Elle se dit convaincue que l’une des forces de l’établissement est sa capacité à travailler avec tous les acteurs du développement et à apporter des financements au secteur privé via sa filiale Proparco. Comme ses prédécesseurs, Anne Paugam rêverait d’en faire davantage pour l’Afrique subsaharienne, mais se heurte aux contraintes budgétaires. Une gageure. À moins que le projet de loi sur la politique du développement promis d’ici la fin de l’année ne lui réserve des surprises. ● Laurent Fargues

générale de l’AFD.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 39


ANALYSE

48

52

58

Europe

Enquête

Emploi public

LE BUDGET FRANÇAIS À LA LOUPE

DE TOUT PETITS PAS POUR LA DÉPENDANCE

LE VIRAGE POLITIQUE DU FONDS D’INSERTION

HAUTE FONCTION PUBLIQUE

LES NOUVEAUX PROFILS 40 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013


Dossier ANALYSE

62 Emploi public

FOTOLIA

APPRENTISSAGE : POURQUOI ÇA COINCE

En faisant évoluer leurs modes de recrutement et en accompagnant des élèves venus de milieux défavorisés, les écoles de la haute fonction publique s’ouvrent peu à peu à de nouveaux talents. Mais il reste encore un long chemin à parcourir pour que les grands établissements du secteur public représentent la société française dans toute sa diversité.

L

CHRISTOPHE ENA/AP/SIPA

e cliché est bien connu. Celui d’une haute fonction publique devenue le monopole d’une caste de privilégiés issus d’institutions scolaires parisiennes d’exception et qui se reproduirait entre elle depuis des générations. L’étude que publiera en novembre l’École nationale d’administration vient sérieusement battre cette idée reçue en brèche. Sur les 8 dernières promotions de la plus prestigieuse des écoles de la fonction publique, un tiers des élèves ont obtenu leur baccalauréat en région parisienne, 40 % ont fréquenté un lycée comptant parmi le quart des meilleurs établissements de l’Hexagone et environ 25 % sont passés par Sciences-Po Paris.

Certes, plus de la moitié des élèves sont filles ou fils de cadres moyens ou supérieurs. Mais ce pourcentage tombe à un tiers pour leurs grands-parents. « On est très loin du stéréotype du Parisien issu d’un lycée prestigieux de la capitale ayant fait toute sa scolarité sur les bancs de Sciences-Po Paris », observe la directrice de l’ENA, Nathalie Loiseau. Les parcours et les profils des élèves ne sont pas uniformes, insistet-elle, on ne peut donc pas parler de reproduction sociale ni de formatage. CQFD. L’ENA, comme les autres établissements de la haute fonction publique, serait-elle pour autant la grande école de la méritocratie républicaine ouverte aux étudiants brillants venus de toutes les origines telle que l’avait imaginée le général de Gaulle en 1945 ? Un souhait originel qui ne s’est jamais confirmé dans les faits, à l’ENA comme à l’École des hautes études en santé publique (EHESP), à l’École nationale de la magistrature (ENM) ou à l’Institut national des études territoriales (Inet), quatre des plus grandes écoles du secteur public.

« Délit d’initié culturel »

« La diversité renforce la légitimité de la fonction publique. Elle permet de rassembler tous les talents. » Nathalie Loiseau, directrice de l’ENA

La preuve : 40 % des élèves de l’ENA ont au moins un parent enseignant, à en croire l’enquête de l’école, qui sera publiée à l’occasion d’un colloque organisé à Strasbourg sur le thème « Les emplois publics, accessibles à tous ? » Un chiffre certes spectaculaire mais à y réfléchir pas si surprenant. « Les enseignants connaissent les filières, les méthodes et suivent de près la scolarité de leurs enfants », remarque Christine Demesse, présidente de l’Association des anciens élèves de l’ENA. Ce que Nathalie Loiseau appelle joliment un « délit d’initié culturel » se vérifie aussi à l’école des directeurs d’hôpital de l’EHESP, où les élèves sont nombreux à être filles ou fils … OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 41


ANALYSE Dossier

… de professionnels de la santé. À l’ENM,

ils sont en majorité enfants de « CSP + ». « J’ai découvert l’existence de l’ENA après mon baccalauréat obtenu dans un lycée de province et j’étais persuadé que ce n’était pas pour moi, se souvient le député du Vaucluse Julien Aubert (UMP). Personne dans mon entourage ne connaissait cette école. » Julien Aubert est d’abord entré à Sciences-Po Paris sur dossier après avoir obtenu une mention très bien au bac. « Certains de mes collègues passaient l’ENA, poursuit-il. Je pensais n’être pas assez calé mais je ne voulais pas avoir de regret, alors j’ai tenté le concours. » Avec succès, surmontant à la fois un manque d’information initial sur le recrutement de l’école et une forme d’autocensure. Un double obstacle rédhibitoire pour nombre de potentiels postulants et que les écoles s’attellent depuis quelques années à lever.

Combattre l’autocensure Inquiets de constater la baisse des prétendants au concours de directeur d’hôpital, des élèves de l’EHESP se déplacent ainsi dans les universités et les instituts d’études politiques de province pour expliquer leur métier et ses nombreuses opportunités. « Je répète souvent que le concours de directeur d’école n’est pas inaccessible, comme beaucoup le pensent, à condition d’acquérir une bonne méthode de travail, confie l’un d’eux, Guillaume Caro. Trop d’étudiants n’osent pas, ce qui prive l’école de nombreux talents. » Un travail de communication que mène aussi l’ENM auprès des universités et des lycées. « Nos auditeurs sont longtemps venus principalement des universités de Bordeaux, Paris et Aix-

LES ÉLÈVES DE L’ENA Sur la totalité des 8 dernières promotions de l’ENA :

Ils ont passé leur bac en Île-de-France

57 % Ils ont travaillé avant le concours

Ils ont effectué leur scolarité à Sciences-Po Paris

Source : étude de l’ENA sur ses 8 dernières promotions, publiée en novembre 2013

Lyon, détaille Jean-David Cavaillé, directeur adjoint de l’ENM en charge des recrutements et de la formation initiale. Aujourd’hui, ils sont issus de 37 universités. » Il faut dire que l’ENM et le ministère de la Justice suscitent des vocations en allant aujourd’hui à la rencontre des étudiants et des lycéens pour décrypter les professions de la justice et leurs modes de recrutement. L’ENA et l’Inet se sont lancés dans des démarches similaires. Expliquer les voies d’accès, combattre les idées reçues sur la fonction publique. « Le stéréotype des technocrates incapables qui mettent la France par terre est trop souvent véhiculé par les médias, pointe Christine Demesse. Cela n’incite pas à s’orienter vers nos filières d’excellence. L’ENA et ses anciens élèves doivent être plus présents auprès des jeunes lycéens et étudiants. » « Le directeur d’hôpital est évoqué dans les journaux via les contraintes budgétaires, les accidents de santé ou

L’Inet cultive

les bagarres sociales, ce n’est pas vendeur, appuie Frédéric Boiron, président de l’Association des directeurs d’hôpital. Trop de personnes imaginent le directeur comme un médecin ou comme un intendant qui gère les gommes et les boîtes de conserve. Notre réalité est toute autre. »

Recrutement repensé à l’ENA Mieux communiquer, lever l’autocensure et la désinformation serait donc un premier pas pour attirer une plus grande diversité de prétendants et favoriser l’accès de tous aux concours. Car si le recrutement des écoles est présenté comme le meilleur garant de l’égalité d’accès aux emplois de la haute fonction publique, il peine à représenter la société dans sa diversité. « La diversité renforce la légitimité de la fonction publique, estime Nathalie Loiseau. Elle permet de rassembler autour de l’école tous les talents et pas seulement ceux formés d’une seule manière. » Cette prise de

sa différence

DR

L’Institut national des études territoriales parvient à attirer des étudiants aux parcours très différents. La plus récente des grandes écoles de la fonction publique échappe aux clichés « élitiste » et « techno » souvent accolés à l’ENA, à l’ENM ou à l’EHESP. Créée en 1990 pour former aux métiers de la haute fonction publique territoriale, l’Institut national des études

42 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

territoriales (Inet) attire autant d’hommes que de femmes (contre seulement 38 % de femmes à l’ENA). Moins d’un quart de ses étudiants est originaire d’Île-de-France et ses élèves sont à parts égales diplômés d’un baccalauréat scien-

tifique, littéraire et économique. Le gage d’une diversité que l’on ne rencontre peut-être pas ailleurs, souligne son président, Jean-Marc Legrand. « Nous faisons travailler l’ascenseur social en permettant à des agents territoriaux de réussir les concours


Dossier ANALYSE

Interview

Ils ont des grands-parents cadres moyens ou supérieurs

conscience – tardive – a contribué à la création, en 2009, de classes préparatoires intégrées (CPI) à l’ENA, à l’EHESP, à l’ENM et dans une vingtaine d’écoles du service public pour accompagner des jeunes issus de milieux défavorisés. L’objectif : « Que la fonction publique reflète mieux la diversité sociale et géographique de la population qu’elle sert. » Et ça marche (lire page 47). Cette quête vers davantage de diversité amène aujourd’hui les écoles à repenser leur recrutement. L’ENA planche ainsi à l’évolution de son concours d’accès pour la rentrée 2015. « Il faut créer un équilibre pertinent entre la vérification des connaissances d’un côté et les aptitudes, la motivation, le parcours du candidat de l’autre », détaille sa directrice. L’oral devrait s’enrichir d’une mise en situation. Une évolution qui, à en croire la présidente des anciens élèves de l’ENA, Christine Demesse, fait consensus. « La personnalité du candidat n’a …

internes », avance-t-il. Le concours externe a par ailleurs évolué ces dernières années pour mieux jauger la personnalité des candidats et leurs réactions en situation professionnelle. « Nous devons aujourd’hui mieux faire connaître l’Inet, observe Jean-Marc Legrand. C’est ainsi que nous attirerons de nouveaux profils. » L’école y travaille en incitant ses élèves à intervenir dans les universités et les instituts d’études politiques de province. S. H.

D.LARCHER /EHESP

Ils sont fils ou filles de cadres moyens ou supérieurs

LAURENT CHAMBAUD

« Nous sommes une école sociale républicaine » L’École des hautes études en santé publique (EHESP) doit représenter la France dans sa diversité, estime son directeur, Laurent Chambaud. Faut-il faire évoluer les concours de la haute fonction publique pour mieux tenir compte de la personnalité et du parcours des candidats ? C’est pour moi un sujet de réflexion. Nous devons être davantage dans l’évaluation de la capacité de travail, de la motivation et du parcours de la personne. C’est-à-dire dans la recherche de certains profils. L’EHESP a œuvré dans ce sens en faisant évoluer le concours de directeur d’hôpital. Mais attention : ce concours doit rester de très haut niveau. Comme les autres grandes écoles du

secteur public, l’EHESP souffre d’une image « techno » et élitiste… Les clichés figent des images qui sont en évolution. Notre école est souvent assimilée à la seule formation des directeurs d’hôpital alors que nous formons aussi des filières techniques, des médecins, des ingénieurs, des pharmaciens, etc. Par ailleurs, l’EHESP a rejoint la communauté des universités et a créé de nouvelles formations diplômantes plus accessibles. Cela nous distingue des autres grandes écoles du secteur public. Enfin, une part importante de nos étudiants nous a rejoints sur la base des concours internes. Cela

signifie qu’ils ont déjà travaillé et gravi des échelons. C’est une garantie de diversité, le signe que nous sommes une école sociale républicaine. Vos classes prépa intégrées contribuentelles à ouvrir l’EHESP à de nouveaux profils ? Ces classes préparatoires sont un élément majeur qui contribue à renforcer la diversité d’origine sociale des candidats qui accèdent au concours généraliste. Nos résultats en la matière sont bons. Plus généralement, l’EHESP doit représenter la France dans sa diversité. Nous y travaillons. Propos recueillis par S. H.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 43


ANALYSE Dossier

L’AVIS DE

Sylvain Henry

Xavier Ronsin, directeur de l’École nationale de la magistrature

« On est loin du formatage ! » « Si “élitiste” veut dire “qui se distingue par de grandes qualités” et que l’on évoque aussi bien nos élèves que la formation que nous dispensons, je m’en réjouis. Et je souhaite que l’école continue toujours et encore mieux à attirer les meilleurs étudiants en droit et les meilleurs professionnels du monde juridique, qu’elle demeure cette référence dans le monde en matière de formation judiciaire. L’idéal

44 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

Paris,

passage obligé

Pour réussir l’ENA, étudier dans la capitale serait un plus. L’ENA, la parisienne ? Une idée reçue, à en croire l’étude que publiera en novembre l’École nationale d’administration, puisqu’un tiers seulement de ses élèves a passé son baccalauréat en Îlede-France. La directrice, Nathalie Loiseau, admet toutefois : « Une grande partie des étudiants qui ont envie de réussir le concours viennent étudier à Paris généralement dans le cadre de la deuxième partie de leurs études supérieures. » Et d’ajouter : « Mais l’ENA n’est pas une école de Parisiens ! » Le député et énarque Julien Aubert (UMP) dresse u n c o n s t a t s i m i l a i re :

FREDERIC MAIGROT/REA

les concours précédents », juge-t-elle. Cette petite révolution a déjà été initiée à l’EHESP, où le grand oral du concours de directeur d’hôpital projette l’aspirant dans une situation de chef d’établissement. « On ne recrute pas des techniciens purs mais des individus qui s’engagent, approuve Frédéric Boiron. Nous gérons de l’humain, pas des tableaux de chiffres. Cela doit être appréhendé dans le concours. » « Notre jury se demande si le candidat ferait un bon DGS dans une collectivité, prolonge Jean-Marc Legrand, le directeur de l’Institut national des études territoriales. Ce travail sur la personnalité et le parcours du candidat est relativement nouveau. » « Nous recherchions auparavant à l’ENM d’excellents juristes, complète Jean-David Cavaillé. C’est toujours le cas. Mais nos auditeurs doivent aussi, désormais, faire preuve d’une capacité d’écoute, d’un esprit critique et d’un sens du collectif. » C’est le signe, dit-il, d’un établissement qui reste élitiste tout en s’ouvrant sur la société. Une manière de renouer avec la philosophie des concepteurs de l’ENA, qui entendaient permettre à tous les talents d’accéder à la haute fonction publique. Les mots ont changé mais le discours est (presque) le même. Dans les années d’après-guerre, on parlait de « démocratisation », aujourd’hui de « diversification ». L’ouverture est un très long chemin. ●

« C’est important de venir étudier à Paris pour réussir l’ENA car la préparation y est meilleure. Les instituts d’études politiques de province sont moins bien dotés en professeurs parce qu’il est plus prestigieux d’enseigner à Sciences-Po Paris. » Julien Aubert

de justice le mérite bien ! En revanche, je peux vous assurer que les auditeurs de justice, pour les côtoyer depuis trente ans et avoir la responsabilité de les former depuis deux ans, sont tout sauf formatés. Que ce soit à leur arrivée à l’école ou à leur sortie. Je suis frappé de constater que leurs parcours et leurs personnalités sont très diversifiés. Les promotions d’auditeurs de justice se composent à la fois d’étudiants et de professionnels âgés de 21 à 43 ans pour les derniers entrants. Certains ont fait de brillantes études. D’autres ont quatre ou huit ans d’expérience derrière eux, sont issus pour partie du secteur public et les autres du secteur privé. Ce qu’ont en commun les auditeurs de justice, ce sont leur motivation, leur goût du service public,

regrette ce « monopole » : « Il faudrait que l’ENA noue des partenariats avec des établissements de province pour instaurer des formations de très haut niveau. » Pour que les candidats, dit-il, ne se sentent plus « obligés » de venir étudier à Paris. S. H.

leur envie d’avoir une vie professionnelle riche de sens. Je souligne aussi le remarquable succès de nos trois classes préparatoires intégrées qui permettent chaque année à une quinzaine de ses étudiants de réussir le concours . On est vraiment loin du formatage ! »

DR

… pas été suffisamment prise en compte dans


© GettyImages - Clerkenwell

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ANALYSE Dossier

Interview PAUL PASQUALI

« Les mesures d’ouverture partent d’un bon sentiment… » Pour le sociologue Paul Pasquali*, les appels à l’ouverture sociale en direction des prétendants à l’ENA relèvent d’un « aveuglement » sur les mécanismes qui régissent les parcours dans la haute fonction publique. Les grandes écoles, accessibles sur concours, reproduisent-elle des élites socialement prédestinées ? Toutes les recherches en sociologie de l’éducation montrent que le fait d’être issu d’une famille culturellement et économiquement aisée renforce la probabilité d’intégrer une grande école et, en amont, d’être admis en prépa, de décrocher une mention ou d’obtenir un baccalauréat scientifique. Même si ce n’est pas le destin de tous les enfants des classes supérieures et même s’il a toujours existé des exceptions dans les milieux populaires. Au-delà du niveau scolaire, il faut être très tôt familiarisé avec les normes de l’excellence scolaire, qui sont souvent au centre des attentes et des conduites dans les familles aisées, pour espérer entrer en classe préparatoire et, éventuellement, intégrer une grande école. Ce constat ne date pas d’aujourd’hui… Non ! Si l’on regarde les statistiques entre les années 1950 et 1990, on observe certes un accroissement des inégalités, mais surtout la permanence de la sélectivité sociale à l’entrée des grandes écoles, alors que dans le même temps les effectifs de bacheliers et d’étudiants dans les universités ont explosé. Ceux qui dénoncent ces réalités aujourd’hui ou, comme on peut le lire dans le rapport de Michèle Pappalardo [ndlr : ancienne présidente du jury du concours de l’ENA], s’étonnent de trouver devant eux des candidats manquant d’originalité, oublient que c’est la logique de ce système profondément élitiste et conformiste qui veut ça.

46 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

De nombreuses mesures ont été prises, comme les prépas intégrées, le tutorat, etc. Qu’en pensez-vous ? Il faut être prudent, ici, car l’évaluation des dispositifs fait partie des enjeux de lutte entre les établissements concernés qui, derrière les discours consensuels sur « l’égalité des chances », sont en concurrence, par dispositifs interposés. Pour ce qui est de Sciences-Po, le dernier rapport de la Cour des comptes indique que, entre 2005 et 2011, la part des enfants de classes supérieures dans les effectifs scolarisés en premier cycle, a fortement augmenté (de 58,5 % à 63,5 %), tandis que celle des enfants d’employés ou d’ouvriers a stagné (de 7,5 % à 8,4 %). Le volontarisme de la Conférence des grandes écoles et de l’État n’a pas produit plus de miracles : entre 2001 et 2011, le recrutement social des classes prépas n’a pas changé, quelle que soit la filière considérée : 50 % des élèves sont issus d’un « milieu favorisé », contre 51 % il y a dix ans, 12 % d’un « milieu défavorisé », soit le même taux qu’au début de la décennie. Le bilan n’est guère flatteur ! Les appels à l’ouverture sociale ou à l’esprit d’initiative à l’égard des postulants à l’ENA témoignent, à mon sens, d’un aveuglement sur les mécanismes sociaux qui régissent les carrières dans la haute fonction publique et, plus largement, dans le monde des « décideurs ». Les mesures d’ouverture partent d’un bon senti-

ment mais le problème, c’est qu’elles préservent les principaux mécanismes de la reproduction sociale. Il ne faut pas oublier que la « fermeture » des « élites » est l’effet de la séparation entre écoles et facultés (hormis médecine et pharmacie). Il vaut donc mieux être diplômé d’une grande école que de l’université… En effet, malgré les tentatives de rapprochement, un diplômé d’une grande école accède à de meilleures conditions d’études et d’embauche qu’un diplômé d’une université de masse, à niveau scolaire comparable. Et ce dualisme produit des effets aussi néfastes que celui qui, en amont, sépare un secteur privé florissant et un secteur public sous-doté. ● Propos recueillis par Xavier Sidaner * Sociologue au centre Maurice Halbwachs (ENS-EHESS-CNRS), auteur d’une thèse intitulée Promoteurs et bénéficiaires de l’« ouverture sociale » des grandes écoles dans la France contemporaine


Dossier ANALYSE

L’essentiel Les classes préparatoires : – Soutien financier FREDERIC MAIGROT/REA

– Hébergement – Tutorat et « coaching » – Galops d’essai

LE SUCCÈS (RELATIF)

des prépas intégrées

Les écoles du service public aident depuis plusieurs années des jeunes venus de milieux défavorisés à préparer leurs concours via des classes préparatoires intégrées.

L

a haute fonction publique doit ressembler à la société française. C’est le leitmotiv qui a conduit une vingtaine d’écoles du secteur public à ouvrir en 2009 des classes préparatoires intégrées (CIP) pour permettre à des étudiants méritants venus de milieux défavorisés de préparer dans des conditions optimales les concours de la haute fonction publique. La création de ces CIP intervenait dans la foulée de la charte pour la promotion de l’égalité dans la fonction publique, signée en décembre 2008 entre le ministère de la Fonction publique et la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde). Quatre ans plus tard, ces internats d’excellence font aujourd’hui consensus et leurs résultats sont globalement positifs. Certes, aucun de la quinzaine d’étudiants de la dernière promotion de la classe prépa de l’ENA – la « CP’ENA » – n’a réussi le concours de la prestigieuse école. « La moitié a toutefois réussi un concours de catégorie A, précise la directrice, Nathalie Loiseau, et c’est considérable. » Ici, les élèves sont sélectionnés sur dossier puis sur entretien, bénéficient d’un logement, d’une aide financière et peuvent passer des galops d’essais en conditions réelles chaque

samedi dans le cadre d’un partenariat noué avec l’université Paris-I.

Donner confiance À la classe préparatoire de l’École des hautes études en santé publique (EHESP), à Rennes, la majorité des élèves de la dernière promotion a réussi le concours de directeur d’hôpital, de directeur d’établissement sanitaire, social et médico-social, d’inspecteur de l’action sanitaire et sociale ou d’attaché d’administration sociale. Et à l’École nationale de la magistrature (ENM), c’est un tiers des 45 élèves des

trois CPI de Bordeaux, Douai et Paris qui sont parvenus via cet accompagnement à pousser les portes de l’ENM. Pourquoi ça marche ? Jean-David Cavaillé, directeur adjoint de l’ENM en charge des recrutements et de la formation initiale, met en avant l’individualisation de l’accompagnement : « Nous nous adressons à des jeunes aux parcours de vie souvent très difficiles. Ils ont l’impression que les concours de la fonction publique sont réservés à une élite à laquelle ils n’appartiennent pas. » Les CPI relèvent autant de l’apprentissage que du « coaching ». Les classes prépas intégrées ont donc trouvé toute leur place sur le chemin de l’accès à la haute fonction publique. Un modèle que les établissements entendent pérenniser. Pour Frédéric Boiron, président de l’Association des directeurs d’hôpital, les classes prépas intégrées remplissent leur mission. « Il n’y a pas de solution miracle pour sortir des grands schémas sociaux, estime-t-il. Ce n’est pas dans une école de la haute fonction publique que l’on réglera tous les problèmes de la société. » Mais, dit-il, on peut la rendre plus représentative de la diversité. S. H.

CONCOURS : DES RÉSULTATS EN DEMI-TEINTE

ENA

Non admis

ENM A

50 %

50 %

Non admis

A+

17 % 50 % 33 %

Sources : ENA et ENM

Admis OCTOBRE 2013 3 N°9 N N°99 99 9 ACT ACTEURS TEURS PUBL PUBLICS LIC ■ 47 LIC


ANALYSE Europe GEERT VANDEN WIJNGAERT/AP/SIPA

Francois Hollande et le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, le 15 mai mai dernier, à Bruxelles.

Dès cette année, la Commission européenne examinera chaque projet de budget avant les parlements nationaux et pourra faire des observations. Mais ceux-ci demeureront souverains pour l’adopter.

LE BUDGET FRANÇAIS

sous la loupe

de la Commission

U

ne petite révolution silencieuse. » C’est ainsi que José Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, avait défini, en 2011, le pacte de stabilité qui visait à contenir la crise financière. Suivant le même style littéraire, l’un de ses porte-paroles considère, lui, que le « two-packs » , littéralement le « paquet de deux », adopté en mars dernier, est « une bombe atomique dont la défla48 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

gration n’a pas encore été perçue par les gouvernements européens ». Peu expliqué dans les médias depuis le printemps, ce dernier volet des réformes européennes issues de la tourmente financière renforce cependant sensiblement le pouvoir de la Commission européenne. Cet ensemble de deux règlements européens impose en effet aux États de soumettre à Bruxelles, d’ici le 15 octobre, leur projet de

budget pour 2014, avant même examen par leur parlement national. La Commission donne ensuite son opinion. Au pire, si elle constate « un manquement particulièrement grave » aux dispositions budgétaires du pacte de stabilité, elle peut demander à l’État concerné de faire une nouvelle proposition. Sans aller aussi loin, elle peut lui suggérer des modifications. Mais les parlements européens demeurent in fine


Europe ANALYSE

Une dizaine de pages de synthèse Dans son vaste bureau dominant les chantiers du quartier européen, Stéphanie Riso expose les ramifications de ce nouvel outil. C’est dans son unité, qui suit la politique fiscale et la surveillance à la direction générale « économie et finances » de la Commission (DG Ec-Fin), qu’a été travaillé le two-packs depuis deux ans. « Il était impossible d’en rêver il y a cinq ans, explique-t-elle. Même si tout le monde savait qu’il y avait une forte interaction entre les États de la zone euro, personne n’en avait réalisé l’ampleur jusqu’à la crise financière ». Le two-packs, selon elle, constitue le complément idéal du pacte de stabilité et du six-packs (lire encadré page suivante) : « Il nous permet, dès l’automne, d’avoir un droit de regard sur les projets de budget, au lieu d’intervenir une année plus tard. » Très didactique, elle détaille les avantages de la réforme qui va entrer en vigueur cette année. « Nous avons créé un format de transmission des budgets à la Commission qui va nous permettre de les lire et de les comparer plus facilement. » Au lieu d’une pile de documents d’un mètre de hauteur, les unités de la DG Ec-Fin recevront des 17 membres de la zone euro une …

« La Commission fera très certainement des recommandations au gouvernement français. »

DR

Alan Lemangnen, économiste Europe chez Natixis

Interview STÉPHANIE RISO

G.BOULOUGOURIS

pleinement souverains dans l’adoption définitive des budgets nationaux. « Ils ne seront pas liés par les recommandations de la Commission si cette dernière émet un avis sans demander une révision de la proposition budgétaire, explique Alan Lemangnen, économiste Europe chez Natixis. Tout au plus sauront-ils qu’ils s’exposent très certainement à des sanctions de Bruxelles. »

« Nous promouvons un débat éclairé dans les parlements » Pour la cheffe de l’unité qui a travaillé sur le « two-packs » au sein de la Commission européenne, cet outil accroît la transparence sur les budgets nationaux. Le « two-packs » renforce-t-il le pouvoir de la Commission sur les États membres ? En effet, le pouvoir d’influence de la Commission est plus important depuis l’entrée en vigueur du two-packs en mai dernier, puisqu’elle adoptera désormais une opinion sur les projets de budgets nationaux. Mais les parlements nationaux conservent toute leur souveraineté quant à l’adoption du budget. Ce qui change, c’est l’information des parlements. Quand on est parlementaire, on n’a pas toujours la capacité technique d’analyser les 500 pages de budget. Là, chacun aura le budget de toute l’administration publique en une synthèse d’une dizaine de pages et l’opinion de la Commission. En fait, on accroît la transparence. Nous souhaitons promouvoir un débat éclairé et non stérile. Tout de même, l’Europe impose un peu plus ses règles budgétaires… Pas du tout. Le two-packs vise à une meilleure appropriation des règles budgétaires au niveau national et à accroître la transparence. Par exemple, les prévisions économiques qui sous-tendent le budget français devront être produites ou approuvées par un conseil des finances publiques, qui est indépendant. L’un des problèmes était que les gouvernements gonflaient leurs prévisions de croissance pour avoir moins de mesures à prendre.

Et lorsque la croissance s’avérait plus faible que prévu, il était nécessaire d’adopter de nouvelles mesures dans la loi de finances rectificative en mai. Le two-packs, avec la création de ce conseil indépendant dans chacun des 17 États membres de la zone euro, va forcer au réalisme budgétaire au jour 1, pas six mois plus tard. Par ailleurs, les parlements nationaux peuvent inviter la Commission à venir présenter son opinion devant eux. On essaie ainsi de répondre à la critique de déficit démocratique de la Commission. On voit mal la Commission retoquer le budget de la France… C’est le premier exercice, nous jugerons dans la pratique. Il est impossible d’écrire tous les scénarios à l’avance. L’idée fondamentale de l’opinion que nous délivrerons après examen de chaque budget national est très simple. Nous adoptons en mai des recommandations en matière de politique budgétaire et nous allons évaluer les budgets par rapport à ces recommandations. Ce n’est pas un jugement imprécis, mais une grille de lecture objective. Concrètement, la France a tel objectif nominal à réaliser par rapport au déficit en 2014, qui correspond à tel effort budgétaire identifié en mai dernier. Au vu du projet de budget soumis par le gouvernement français et de nos prévisions, nous dirons si les projets sont en ligne avec ces efforts. ● Propos recueillis par J.-B. G.

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 49


ANALYSE Europe

ANTONIOL ANTOINE/SIPA

L’essentiel Avant le 15 octobre : la France soumet à la Commission son projet de loi de finances (PLF) 2014. 15 octobre : début de l’examen du PLF à l’Assemblée nationale.

Bernard Cazeneuve, ministre délégué au Budget, et Pierre Moscovici, ministre de l’Économie et des Finances, recevront l’avis de la Commission sur le budget 2014 vers la mi-novembre.

… synthèse d’une dizaine de pages compre-

nant quelques tableaux. Chaque unité, soit une dizaine de personnes qui suivent trois ou quatre pays tout au long de l’année, planchera sur ces projets. Charge à elles de faire leurs propres prévisions, tablées sur les recommandations déjà effectuées par la Commission au printemps, puis de les comparer avec les chiffres du budget national.

Organisme indépendant « Nous essaierons de sortir les opinions sur chaque État mi-novembre, poursuit Stéphanie Riso. Si notre opinion est positive ou qu’il n’y a que de petites choses à modifier, les gouvernements pourront aussi en discuter lors de l’Eurogroup à la fin novembre. » Et en cas de problème plus important ? Comment la Commission juge-telle qu’il y a « manquement particulièrement grave » d’un budget à ses recommandations, comme il est écrit dans le two-packs ? « C’est le curseur à surveiller avec attention à partir du mois d’octobre, prévient Alan Lemangnen. En utilisant cette expression, la Commission européenne se donne

une certaine marge d’interprétation. Clairement, si elle a une interprétation restreinte, elle augmente ses prérogatives. Si l’interprétation est plus relâchée, elle ne jouera pas à fond son rôle de contrôle qui se trouvera, de facto, diminué. » Stéphanie Riso refuse d’entrer dans le jeu des pronostics avant l’examen des budgets. « Notre grille de lecture est objective, ce n’est pas un jugement imprécis, dit-elle avec fermeté. Nous mettrons face à face nos recommandations du printemps et le projet de budget envoyé par le pays, dont les prévisions ont été élaborées par le Haut Conseil aux finances publiques, un organisme indépendant créé par le two-packs. » Plus audacieux, Alan Lemangnen indique que « la Commission fera très certainement des recommandations au gouvernement français, mais il est très improbable qu’il y ait un “retoquage” du budget. » L’intérêt de ce contrôle de la Commission sur les budgets nationaux est autant de les influencer que de pousser les gouvernements à travailler leur budget de manière plus réaliste à partir des hypothèses d’organes indépendants. Côté experts, le sentiment est que la Commission

5 novembre : prévisions globales de la Commission sur la zone euro. Mi-novembre : la Commission rend son avis sur le budget des 17 pays de la zone euro. Avant fin novembre : les 17 États discutent, lors de l’Eurogroup, des remarques de la Commission.

fait un – petit – pas de plus vers l’union budgétaire européenne. Côté Commission, Stéphanie Riso espère qu’il entraînera un dialogue au niveau des parlements nationaux et européen : « Avec le two-packs, nous n’avons pas créé un nouveau carcan budgétaire mais un outil de coordination. Il manquait cet aspect positif où les États membres prennent leurs responsabilités et discutent avec les parlements nationaux. » ● Jean-Bernard Gallois, à Bruxelles

Avant le « two-packs », le « six-packs » et la règle d’or Face à la crise, les États

en novembre 2011. Ce

février 2013, la France (et

adopté en mars 2012. Il a mis

membres n’ont pas réussi

paquet législatif de cinq

11 autres États européens)

en place la fameuse règle

à respecter les règles

règlements et une directive

ont ainsi été placés sous

d’or : principe de l’équilibre

strictes fixées par le pacte

renforce les sanctions

surveillance pour leur déficit

des budgets, limitation du

de stabilité et de croissance

en cas de déficit excessif

macroéconomique.

déficit structurel à 0,5 % du

adopté en 1997. Ce pacte

et ajoute un nouveau

Mais cet arsenal législatif

PIB et mise en place d’un

est donc renforcé par

cadre de surveillance

s’est avéré insuffisant. Un

mécanisme de correction

le « six-packs », adopté

macroéconomique. En

nouveau traité a donc été

automatique.

50 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013



ANALYSE Enquête

DE TOUT PETITS PAS

pour la dépendance La France pourrait compter un million de personnes âgées dépendantes de plus à l’horizon 2060. Face à ce phénomène prévisible, le gouvernement hésite à lancer une réforme d’ampleur. RICHARD DAMORET/RÉA

La ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’Autonomie, Michèle Delaunay, en visite à l’Ehpad de Bellerive-sur-Allier, en février 2013, accompagnée de Jean-Paul Dufrègne, président (PCF) du conseil général de l’Allier.

EN 2060,

IL Y AURA…

4,8

millions de Français de plus de 85 ans

Français de plus de 75 ans

12 1,85

millions

52 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

million

<

Personnes âgées dépendantes

Par Laurent Fargues

<

2,7 millions


Enquête ANALYSE

Mi-septembre, Jean-Marc Ayrault a envoyé un signal qui n’a guère rassuré les connaisseurs du dossier de la dépendance. Le projet de loi sur l’autonomie sera « préparé avant la fin de l’année », a certifié le Premier ministre. Mais il est resté flou sur la date de présentation du texte en Conseil des ministres et a prévenu que « son adoption dépendra du calendrier parlementaire ». Or l’agenda des députés et sénateurs est déjà bien chargé et beaucoup craignent que la réforme de la dépendance ne passe une fois de plus à la trappe. Il faut dire que l’expérience du quinquennat précédent a échaudé même les plus optimistes. Alors que Nicolas Sarkozy a plusieurs fois promis la création d’une nouvelle branche de la Sécurité sociale pour répondre aux pathologies liées au vieillissement de la société, le dossier a finalement été discrètement enterré au début de l’année 2012. Les groupes de travail et débats régionaux menés tambour battant par les anciennes ministres Roselyne Bachelot et Marie-Anne Montchamp ont certes débouché sur d’excellents rapports. Mais ceux-ci ont fini au placard… « L’ampleur des déficits publics rendait difficile une réforme d’envergure »,

FOTOLIA

Une réforme longue à venir

concède Pierre-Alain de Malleray, directeur de Santiane, une société de conseil en couverture santé, et ancien conseiller du ministre des Affaires sociales Xavier Bertrand. La priorité étant, aujourd’hui comme hier, au désendettement de l’État, il y a bien peu de chances pour que le gouvernement de JeanMarc Ayrault accouche d’une loi ambitieuse dans les prochains mois. « Les documents qui commencent à circuler au sein du ministère de la

Santé ne présagent pas de grands changements », confie un haut fonctionnaire de l’avenue de Ségur. La ministre déléguée aux Personnes âgées et à l’Autonomie, Michèle Delaunay, a beau brandir les trois rapports qui lui ont été remis en mars par le docteur Jean-Pierre Aquino, le conseiller général du Val-d’Oise Luc Broussy et la députée de Charente Martine Pinville, rien ne dit qu’elle sera entendue. ●

Une dépense publique maîtrisable

FOTOLIA

Le phénomène de la dépendance est largement connu et prévisible. La France compte quelque 15 millions de 60 ans et plus, en comptera 20 millions en 2030 et près de 24 millions en 2060. Les Français âgés de 75 ans et plus représentent, quant à eux, 5,7 millions de personnes et seront 12 millions à l’horizon 2060, dont

4,8 millions de plus de 85 ans. La bonne nouvelle, c’est que les Français vivent de plus en plus longtemps. La mauvaise, c’est que l’espérance de vie sans incapacité physique n’augmente pas proportionnellement et a même tendance à reculer pour les hommes. Selon les scénarios, plus ou moins optimistes, il y aurait entre 1,4 et 1,7 million de personnes dépendantes en 2030 et entre 1,85 et 2,7 millions en 2060. Le pic serait atteint autour de 2045 du fait du vieillissement de la génération des baby-boomers et un net ralentissement débuterait à partir de 2055. Face à ce phénomène, les experts plaident pour poser les bases d’un système de prise en charge des personnes âgées dépendantes. Et pour prévoir des moyens budgétaires en conséquence. En 2010, la dépense publique consacrée à la dépendance s’élevait à environ 24 milliards d’euros, dont 14 milliards de soins, 7,5 mil-

liards d’aide à domicile et 2 milliards de dépenses d’hébergement. Des montants qui dépassent largement la seule allocation personnalisée d’autonomie (5,3 milliards d’euros) distribuée par les conseils généraux. Quelles sommes faudra-t-il débourser dans le futur ? Dans un rapport de juin 2011, un groupe de travail piloté par l’ancien directeur de l’Insee, Jean-Michel Charpin, anticipait une progression relativement modérée des dépenses publiques. Ramenée à la valeur du PIB en 2010, l’augmentation représenterait environ 2,5 milliards d’euros à l’horizon 2025 et 9,4 milliards d’euros en 2040. Soit des sommes bien inférieures aux enjeux des retraites ou de l’assurance maladie. « Le problème, c’est que les gouvernements ont tendance à ne voir que ces urgences colossales et à négliger la dépendance », confie Pierre-Alain de Malleray. ● OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 53


ANALYSE Enquête

Les expérimentations de la « silver economy » C’est un peu le côté flamboyant de la dépendance et la meilleure manière de communiquer de manière positive sur le sujet. En avril, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, et la ministre déléguée aux Personnes âgées, Michèle Delaunay, organisaient à Bercy un grand raout sur la « silver economy », l’économie des seniors. Au programme : « Les seniors, une vision d’avenir », « Innovation pour anticiper le diagnostic », « Le pack autonomie en Corrèze »… Le leitmotiv ? Le vieillissement de la population est une formidable opportunité pour l’économie française en matière de recherche, d’innovation, de croissance et d’emplois et les entreprises ont tout intérêt à se positionner sur ce marché porteur.

D’autres pays montrent l’exemple. En Allemagne ou au Royaume-Uni, les labels se sont multipliés pour valoriser les produits adaptés aux personnes âgées, tandis que le Japon estime à 50 000 milliards de yens les richesses que l’industrie de la dépendance créera d’ici 2020. Le Danemark organise chaque année une journée pour présenter aux personnes âgées l’utilité des nouvelles technologies. « Il ne s’agit pas de promouvoir des gadgets, prévient Antoine Vial, expert en santé publique, mais de faire en sorte que les innovations des industriels répondent vraiment à la demande des personnes dépendantes. » Depuis deux ans, il anime avec Robert Picard, le spécialiste santé du conseil général de l’économie, une quinzaine de living labs réunissant innovateurs, médecins et associations de patients. ●

Une inquiétante guéguerre Les luttes intestines entre ministre et ministre délégué sont un classique des coulisses gouvernementales. Mais la guéguerre que se mènent Marisol To u r a i n e e t M i c h è l e Delaunay atteint des proportions inquiétantes. Sur certains sujets, la ministre de la Santé et ses conseillers interdisent carrément aux services administratifs de transmettre les documents au cabinet de la ministre des Personnes âgées. Consigne est parfois donnée aux directeurs centraux de rester sourds aux convocations

du cabinet de Michèle Delaunay. « L’entourage de Marisol Touraine refuse que la ministre des Personnes âgées mette un orteil dans les sujets de santé, se lamente un haut fonctionnaire. Le problème, c’est que répondre aux défis de la dépendance nécessite une réorganisation du système de santé et que ces rétentions systématiques d’information desservent la cause lorsqu’il s’agit de faire avancer le dossier auprès de Matignon. » Fin mai, les directeurs

54 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

des agences régionales de santé (ARS) ont eu un petit aperçu de cette absence de communication entre leurs ministres. Alors qu’ils étaient tous rassemblés avenue de Ségur et attendaient de savoir quelles seraient les régions expérimentatrices du nouveau dispositif « Personnes âgées en risque de perte d’autonomie », ils restent sur leur faim après l’intervention de Marisol Touraine qui, par simple oubli, quitte le séminaire sans en dire un mot. Vient ensuite Michèle Delaunay, qui

Michèle Delaunay, ministre déléguée aux Personnes âgées

n’évoque pas non plus le sujet. Impatients, les patrons d’ARS finissent par questionner directement la ministre déléguée. « Je ne peux pas vous répondre, car je n’ai pas reçu la liste », leur avoue-telle benoîtement avant de partir. Le choix des

Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé

régions est pourtant fixé dans le marbre depuis quelques jours et c’est finalement le secrétaire général du ministère qui dévoile la liste des territoires concernés… « À ce niveau-là, c’est carrément la guerre de tranchées », s’inquiète un participant à la réunion. ● L. F.

NICOLAS TAVERNIER – FRANCK MOREAU/RÉA

Entre les équipes de Marisol Touraine et de Michèle Delaunay l’entente n’est pas au beau fixe.


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ANALYSE Enquête

Des administrations trop cloisonnées

La carte de la prévention

FOTOLIA

FO

À ses visiteurs, l’ancien président du Sénat Gérard Larcher a l’habitude de dire qu’un tiers des conseils généraux risque la faillite à cause du dérapage de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Même si cette aide ne représente que 22 % des dépenses publiques liées à la dépendance, c’est la plus visible et celle dont la croissance alarme le plus. Entre 2002 et 2010, elle a progressé en moyenne de 12,8 % par an et le nombre de ses bénéficiaires a cru de 9,3 % par an. Pour améliorer l’utilisation des deniers publics, les experts appellent à une gestion plus globale de la dépense liée à la dépendance. « Ce qui plombe les comptes sociaux, c’est le cloisonnement des budgets entre les différents organismes, en particulier les conseils généraux et les hôpitaux », assure un connaisseur du dossier. À les entendre, nombre d’hospitalisations de personnes âgées pourraient être évitées si certaines mesures étaient prises en amont et les séjours seraient plus courts si davantage d’établissements existaient en aval. Sans compter les cas où les hôpitaux sont contraints d’accueillir le conjoint dépendant d’une personne hospitalisée… D’où l’idée d’organiser une meilleure coopération entre hôpitaux et conseils généraux pour accompagner les personnes dépendantes. En 56 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

2011, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie avait imaginé un système dans lequel les agences régionales de santé (ARS) passeraient des conventions avec les conseils généraux sur la prise en charge des personnes dépendantes et bénéficieraient d’une enveloppe spécifique pour inciter les acteurs à se coordonner. « Il faut que tout le monde ait intérêt à ce que les aides soient déclenchées plus tôt et mieux ciblées, car elles reviendront toujours moins cher que des séjours à l’hôpital », assure un haut fonctionnaire. Plusieurs pistes existent. Cela peut être la subvention de services à domicile pour les personnes dépendantes. La caisse de retraite propose déjà une allocation de ce type qui profite à plusieurs dizaines de milliers de personnes par an. Les hôpitaux doivent aussi fair e davantage pour accompagner la sortie de leurs patients dépendants en les orientant vers des places réservées dans les établissements d’accueil. Depuis mai 2013, le ministère de la Santé a lancé une expérimentation dans 8 régions pour améliorer la coordination des professionnels de santé sous l’égide des ARS. Le projet, baptisé « Personnes âgées en risque de perte d’autonomie » (PAERPA) a pour but d’apporter au meilleur coût les meilleurs soins aux personnes dépendantes. ●

TO

LIA

« Anticipation, adaptation, accompagnement, la future loi sur la dépendance comportera ces trois volets distincts. » Au cabinet de Michèle Delaunay, on martèle que la prise en charge des personnes dépendantes ne se réduit pas à la hausse d’une allocation ou à la construction de maisons de retraite, mais recouvre des enjeux bien plus larges. Cela passe par la lutte contre l’isolement des personnes âgées, par des visites préventives pour détecter les personnes en perte d’autonomie, par la promotion de l’activité physique, etc. L’un des objectifs du projet de loi en préparation serait d’encourager les médecins libéraux à dépister les personnes à risques et les orienter vers les services adéquats. Le ministère des Personnes âgées s’inspire également du Danemark et de la Finlande, deux pays qui proposent systématiquement des visites préventives aux plus de 75 ans. Des bilans de prévention plus ciblés et proposés à des âges clés pourraient ainsi être développés. Idéalement, le projet de loi intégrerait aussi une composante « logement ». L’enveloppe de l’Agence nationale de l’habitat pour rénover les habitations individuelles devrait progresser et les bailleurs sociaux devraient davantage prendre en compte les besoins des seniors dans leurs conventions. La ministre déléguée aux Personnes âgées souhaiterait également développer des habitats collectifs non médicalisés qui favorisent la vie collective et les échanges entre les seniors. Ou encore que les collectivités locales prennent mieux en compte les besoins des personnes âgées dans les transports publics. ●



ANALYSE Emploi public

FRANCK CRUSIAUX/REA

Le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique contribue à développer l’employabilité des agents souffrant de handicap.

LE VIRAGE POLITIQUE

du Fonds d’insertion Après une vacance de pouvoir inédite, le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) veut écrire une nouvelle page de sa jeune histoire. Moins administrative, plus politique.

58 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

entre septembre 2012 et avril 2013, le Fonds a vécu sans président ni exécutif, la nomination des membres du comité national – dans lequel siègent les représentants des employeurs publics, des personnels et des associations de personnes handicapées – tardant à venir.

Une vacance de pouvoir inédite, nouvel épisode chaotique dans la vie de cette institution créée par la loi de février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Et qui interpelle sur sa légitimité. Le Fonds est-il

TAUX D’EMPLOI DES AGENTS HANDICAPÉS

4,39 %

5,32 %

5,10 %

3,33 %

dans la fonction publique

dans la territoriale

dans l’hospitalière

dans la fonction publique d’État

Source : FIPHFP

L

e Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) est aujourd’hui en ordre de marche, prêt à franchir une nouvelle étape. C’est ce que martèle son nouveau président, André Montané, de sa voix chantante du Sud-Ouest. « Nous allons intensifier notre action pour favoriser l’emploi des personnes handicapées, insiste-t-il, et devenir une référence en matière d’accompagnement des employeurs des trois fonctions publiques ». Élu à la tête du FIPHFP au printemps dernier, le vice-président socialiste du conseil général de l’Ariège veut surtout tourner la page d’une transition mouvementée : pendant sept mois,


Emploi public ANALYSE

Un politique à la place d’un gestionnaire Le renouvellement tardif de l’instance dirigeante ne serait donc qu’un épisode administratif et sans conséquence. « Le Fonds est devenu un acteur incontournable en matière de handicap et son travail est reconnu », acquiesce Yvonnick Lavolée, représentant FO au comité national. « C’est une institution encore jeune, prolonge Agnès Duguet (FSU), vice-présidente du comité, mais qui a trouvé toute sa place dans les politiques publiques du handicap. » « La latence de pouvoir s’explique davantage par l’incurie de l’État, incapable de prendre une décision rapidement, que par un manque de crédibilité du Fonds, attaque de son côté Monique Escudié, représentante au FIPHFP de l’Union des amis et familles de personnes handicapées psychiques, ce qui a bloqué son fonctionnement pendant sept mois. » La critique est sévère et doit être nuancée car il semble que le gouvernement ait voulu se donner du temps pour choisir la personnalité la plus à même de donner un nouveau souffle au FIPHFP. Jusqu’alors occupée par un haut fonctionnaire – président entre 2007 et 2012, Didier Fontana vient de Bercy –, la présidence est aujourd’hui exercée par un politique. « Le poste de président du Fonds a fait l’objet d’une campagne au plus

L’éducation nationale

érigée en priorité Avec un taux d’emploi de travailleurs en situation de handicap à peine supérieur à 2 %, le ministère de l’Éducation nationale fait figure de cancre. Un enjeu érigé en priorité par le Fonds d’insertion, qui vient de signer une convention avec la Rue de Grenelle prévoyant le financement d’actions et de projets en faveur de l’emploi des agents handicapés à hauteur de 45 millions d’euros sur trois ans. La précédente convention ne portait « que » sur 25 millions d’euros. « Nous allons faire du travail de terrain, précise le président du FIPHFP, André Montané, dans le cadre d’une approche territorialisée menée en concertation avec les recteurs. »

YAGHOBZADEH RAFAEL/SIPA

considéré comme un interlocuteur crédible des pouvoirs publics sur la problématique sensible du handicap ? La question fait resurgir le souvenir de ses débuts ratés, lorsque la Cour des comptes pointait, en 2007, les « ambiguïtés » dans l’organisation du dispositif et les « lourdeurs » de son fonctionnement. Le Fonds était alors incapable de gérer les dizaines de millions de subventions collectés auprès des employeurs publics ne respectant pas l’obligation de faire travailler 6 % d’agents handicapés. Il a, certes, complètement redressé la barre depuis. « Les renouvellements des membres du comité national ont pris du temps pour des raisons qui nous dépassent, admet André Montané, mais cela n’a pas empêché le Fonds de travailler efficacement. » La faute, dit-il, au changement de majorité gouvernementale et au processus complexe des nominations au comité, qui doivent être validées par les 5 ministères, rien de moins, qui exercent une tutelle sur l’établissement : Affaires sociales, Intérieur, Réforme de l’État, Budget, Personnes handicapées. « On ne peut pas dire qu’avoir 5 tutelles fluidifie notre fonctionnement, observe André Montané, mais nous avons dans les faits deux ministères chefs de file, celui des Personnes handicapées et celui de la Réforme de l’État. »

Avec un taux d’agents handicapés à peine supérieur à 2 %, l’éducation fait figure de mauvais élève parmi les administrations publiques.

Pourquoi l’Éducation nationale est-elle à la traîne des autres ministères qui, pour la plupart, affichent un taux d’emploi de 5 % ? « L’Éducation nationale fait essentiellement travailler des enseignants, c’est-à-dire des cadres, observe Agnès

haut niveau, croit savoir Didier Marguery, représentant de la CGT au comité national. C’est un changement de cap. » « On passe d’un profil de président gestionnaire à celui d’un président politique volontariste, remarque Brigitte Carré de Lusancay (CFE-CGC). Sa voix portera peut-être davantage. » Ce que confirme André Montané à demi-mots : « J’incarnerai une autre forme de présidence. Je préside la maison départementale des personnes en situation de handicap de l’Ariège. Je tiens à conserver les mains dans le cambouis et les pieds dans la glaise. » De fait, le nouveau président vient d’obtenir de Matignon une décision toute politique avec la création de 4 postes supplémentaires affectés à la direction centrale. « Jusqu’à aujourd’hui seuls un directeur, son adjoint et une secrétaire travaillaient au siège, détaille André Montané. C’est largement insuffisant pour assumer toutes nos missions. Nous disposerons donc de 7 postes opérationnels en début d’année. » Ils sont …

Duguet (FSU), vice-présidente du comité national du FIPHFP, alors que 80 % des agents souffrant de handicap ont au mieux un niveau CAP. » La progression du taux de travailleurs handicapés suppose donc un gros effort de formation. S. H.

LES PRINCIPALES CONTRIBUTIONS DU FONDS EN 2012 Ministère de l’Économie .......... 7,9

M€

Ministère de la Justice ............... 6,5

M€

Assistance publique de Paris ... 4,5

M€

CNRS ............................................ 2,5

M€

Caisse d’assurance maladie des travailleurs handicapés .... 1,6

M€

Ministère de l’Agriculture......... 1,5 M€ Région Île-de-France, direction de l’administration générale .... 1,4 M€ Département des Bouches-du-Rhône .................... 1,2

M€

Total ............................................ 158

M€

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 59


ANALYSE Emploi public

… distincts de la cinquantaine de personnels de la Caisse des dépôts affectés au suivi des dossiers via une convention d’objectifs et de gestion – le Fonds dispose d’un budget de fonctionnement de 12 millions d’euros. Ces 4 postes, réclamés vainement par les syndicats et les associations depuis des mois, sont rendus nécessaires par l’activité croissante du FIPHFP. Ses interventions sont passées, depuis sa création, de 7 millions à 126 millions d’euros.

Avocat plutôt que gendarme André Montané marque donc son arrivée et le voilà résolu à multiplier les initiatives pour rapprocher le taux d’emploi des personnes handicapées dans les trois fonctions publiques des 6 % imposés par les textes, contre 4,39 % actuel-

lement (lire ci-dessous sa feuille de route). Un défi, tant certaines administrations peinent à appréhender l’enjeu du handicap dans leur gestion des ressources humaines. « Les employeurs publics ne jouent pas tous le jeu, regrette Jacques Zeitoun, représentant de l’Association des paralysés de France au comité national. Le FIPHFP donne certes de bons résultats, mais il reste encore beaucoup à faire. » « La fonction publique n’est pas exemplaire en matière de prise en compte du handicap, approuve Yvonnick Lavolée (FO). Le Fonds a beaucoup de travail. » L’institution pourra s’appuyer sur le 32e des 60 engagements de François Hollande formulés pendant la campagne présidentielle. Le candidat promettait : « Je renforcerai les sanctions en cas de non-respect des 6 % de travailleurs handicapés dans

les entreprises, les services publics et les collectivités locales. » Il ne serait pour autant pas nécessaire « d’armer » le Fonds d’insertion. « Notre rôle n’est pas d’être un gendarme et nous ne disposons d’aucune autorité sur les employeurs publics, estime André Montané. C’est par la conviction que nous contribuerons à faire changer le regard, la parole et l’attitude de la société sur le handicap. » Le président s’y attache, lui qui promet de créer l’événement, début 2015, pour marquer le dixième anniversaire de la loi sur l’égalité des chances. Ce proche du président PS du Sénat, Jean-Pierre Bel, comme lui élu de l’Ariège, a déjà prévu de faire intervenir le gratin de la classe politique. Ou comment appuyer le pilotage et l’action du Fonds d’insertion sur ses réseaux politiques. ● Sylvain Henry

LES FEUILLES DE ROUTE DU PRÉSIDENT Pour « prendre de la hauteur » et « donner du sens » à l’action du Fonds d’insertion, le président André Montané annonce la création d’un comité scientifique animé par son prédécesseur, Didier Fontana. « Ne faisons pas seulement du praticopratique, souligne-t-il, mais éclairons notre philosophie. Le comité scientifique nous aidera à définir des solutions innovantes au service des employeurs publics. »

MAILLAGE Pour multiplier les actions sur le terrain, le FIPHFP entend développer ses relais dans les régions. « Nous disposons aujourd’hui de 9 délégués interrégionaux, précise André Montané. Il faut doubler ce chiffre. Les délégués accompagnent

localement les pouvoirs publics dans leurs démarches et dans la mise en œuvre de nos conventions. Ils jouent un rôle essentiel. »

CONVENTIONS Le Fonds renouvellera dans les prochains mois une partie des conventions signées avec les employeurs des trois fonctions publiques. « Une convention permet à la collectivité, à l’hôpital ou au ministère de réfléchir sur le long terme à sa politique d’inclusion des personnes en situation de handicap, relève le président du FIPHFP. C’est un moyen d’action très efficace qui permet de débloquer des fonds immédiatement. »

APPRENTISSAGE En 2012, 1 723 contrats d’apprentissage ont été financés via des aides

60 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

SYLVAIN HENRY

UN CONSEIL SCIENTIFIQUE

André Montané (à gauche) et Jean-Charles Watiez (à droite), respectivement président et directeur du FIPHFP.

du Fonds d’insertion, soit une augmentation de 85 %. Un chiffre que le FIPHFP entend développer en 2013.

NOUVELLES TECHNOLOGIES Le Fonds a récemment conventionné avec la direction interministérielle des systèmes d’information

et de communication (Disic), avec le service d’information du gouvernement (SIG) et avec le Centre national d’éducation à distance (Cned). « Nous allons nous appuyer sur les opportunités offertes par les nouvelles technologies pour améliorer l’employabilité des handicapés », annonce André Montané.


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ANALYSE Emploi public

APPRENTISSAGE DANS

le service public : POURQUOI ÇA COINCE Alors que l’État cherche à développer l’apprentissage, la fonction publique fait figure de mauvaise élève avec seulement 9 200 contrats signés en 2011. Il suffirait pourtant de lever quelques contraintes financières et juridiques pour trouver un nouvel essor.

62 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

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n objectif : atteindre en cinq ans 100 000 jeunes formés en alternance dans le secteur public, soit 2 % de l’effectif total. » Cette ambition affichée dans le rapport du député Laurent Hénart, rédigé en 2009 à la demande du Premier ministre de l’époque, François Fillon, est malheureusement restée lettre morte. Les derniers chiffres publiés par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), le service statistique du ministère du Travail, montrent qu’en 2011, pour près de 300 000 contrats d’apprentissage signés dans le secteur privé, on en dénombre seulement 9 200 dans la fonction publique, alors même qu’elle représente 20 % de l’emploi en France. En raison de son grand nombre de fonctionnaires de catégorie C, la fonction publique territoriale est la première concernée et regroupe près de 80 % des apprentis du secteur public. « L’apprentissage est un outil de gestion des ressources humaines très fort pour les collectivités, mais le système tel qu’il existe aujourd’hui ne permet pas son développement », regrette François Deluga, président du Centre national de la fonction publique territoriale

(CNFPT). Analyse des cinq principaux obstacles au recours à l’apprentissage dans le secteur public.

1. Un coût prohibitif Là où le secteur marchand bénéficie d’argent des régions, à travers leurs cotisations à la taxe d’apprentissage, et d’une exonération fiscale sous forme de crédit d’impôt, les collectivités doivent prendre en charge elles-mêmes le

coût de la formation. « Un apprenti coûte à une entreprise privée entre 2 et 4 euros de l’heure, contre 11 à 12 euros pour une collectivité, c’està-dire l’équivalent d’un temps plein. On peut comprendre qu’avec les contraintes budgétaires actuelles, la formule ne marche par beaucoup », plaide le président du CNFPT, François Deluga, qui estime qu’une diminution du coût de moitié devrait permettre de doubler facilement les effectifs d’apprentis.


Emploi public ANALYSE

En chiffres AU 31 DÉCEMBRE 2010 :

8 060 apprentis dans les

75 %

collectivités territoriales (0,4 % du nombre total de postes)

des apprentis travaillent dans des communes et organismes communaux

Pour ce faire, plusieurs pistes sont évoquées. Le CNFPT propose par exemple de transférer la prise en charge de la formation aux régions, notamment par le biais de la loi de décentralisation. « Le coût de 20 000 apprentis dans la fonction publique est de 75 millions d’euros. Un surcoût marginal dans la contribution des régions fixée à 2 milliards », comparet-il. Dans l’entourage de la ministre de la Fonction publique, Marylise Lebranchu, on reconnaît qu’une « clarification sur le financement de l’apprentissage » s’impose et qu’elle pourrait aussi passer par une diminution de la contribution au CNFPT des collectivités qui embauchent des apprentis.

2. La concurrence des emplois aidés Du fait de ce coût prohibitif, il est plus avantageux pour une collectivité d’avoir recours à d’autres types de contrats pour embaucher des jeunes, notamment les emplois d’avenir. François Deluga prend ici l’exemple du Teich, commune de Gironde dont il est maire : « J’ai embauché 7 emplois d’avenir cette année. C’est un coût qui représente un équivalent 75 % temps plein. À ce prix-là, je n’aurais pu prendre que deux apprentis, qui en plus auraient travaillé à mi-temps. » La logique est implacable, même si l’on peut arguer que les deux contrats ne s’adressent pas au même public. D’un côté, des jeunes en situation d’échec ou de décrochage, de l’autre, des apprentis qui ont choisi leur métier et souhaitent l’apprendre sur le terrain.

3. Le passage obligé du concours En sortant du centre de formation, l’apprenti est sanctionné d’un diplôme d’État. Problème : il ne peut pas directement être employé comme titulaire et doit d’abord passer les concours de la fonction publique s’il veut être rémunéré à hauteur de ses qualifications. Une nouvelle étape à franchir qui peut en freiner certains. Sur ce sujet, s’il n’est pas question de supprimer le sacrosaint concours, « les organisations syndicales sont assez réceptives pour le modifier en un simple entretien, comme ce qui se fait déjà pour les infirmières par exemple », affirme-t-on au

ministère de la Fonction publique. « Il suffirait de dire que le CAP obtenu puisse valoir premier groupe d’épreuves, c’est-à-dire les écrits », plaide le CNFPT.

4. Une méconnaissance du dispositif « Il manque une information globale et détaillée sur les fonctions publiques auxquelles on peut accéder par l’apprentissage », regrettet-on au ministère de Marylise Lebranchu. Les collectivités ne semblent pas suffisamment informées du dispositif et paraissent même réticentes à s’engager sur un terrain habituellement associé au secteur privé. Il faut dire que l’ouverture de l’apprentissage au service public ne date que de 1992 et que l’idée a encore du mal à passer dans les administrations. Un point de vue que ne partage pas la présidence du CNFPT : « Nous avons publié un guide pratique de l’apprentissage pour aider les services de ressources humaines des collectivités. Mais tant qu’on ne touchera pas à la question du coût, rien ne bougera. Il nous manque les arguments pour convaincre. »

5. Un vide juridique Dernier hic : un vide juridique portant sur l’inspection du travail. Le code du travail indique que les apprentis ne peuvent pas utiliser des machines dangereuses qui n’ont pas été contrôlées par l’inspection. Or cette dernière n’est pas habilitée à faire ces contrôles dans le service public. « Cela veut dire qu’aujourd’hui, un apprenti aux espaces verts d’une commune ne peut pas utiliser la tondeuse, traduit François Deluga. Il suffirait pourtant de donner cette compétence à l’inspection, ou de permettre à l’autorité (le maire, le président de région…) d’autoriser cet usage à partir du moment où l’engin a été vérifié par une société de contrôle. » Si les obstacles paraissent donc nombreux, ils pourraient être levés assez rapidement. Deux véhicules législatifs permettront de s’attaquer au problème dans les mois qui viennent : la loi de décentralisation et celle sur la formation professionnelle, qui doit être proposée en fin d’année. Au gouvernement,

on indique que les discussions sont d’ores et déjà en cours entre le ministère du Travail et celui de la Fonction publique. Face à l’importance de la responsabilité de la fonction publique territoriale, le CNFPT participera également aux concertations. « Nos propositions devraient permettre de passer de 7 000 à 15 000 apprentis avec un décollage attendu en septembre 2014 ou 2015, selon la date du vote de la loi », estime son président. Une dynamique qui doit bénéficier à l’objectif fixé par l’État d’atteindre 500 000 apprentis, tous secteurs confondus, en 2017. ● Raphaël Moreaux

LES RÉGIONS QUI CONCENTRENT LE PLUS D’APPRENTIS Pas-deCalais

Île-deFrance

6%

18 %

Rhône-Alpes

13 %

Les domaines de formation concernés : services à la personne (30 %) espaces verts (26 %) communication et information (10 %) génie civil et construction (8 %) mécanique, électricité, électronique (6 %)

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 63


ANALYSE Emploi public

DR

UN CFA SPÉCIAL « fonction publique »

À

À lire Guide pratique « L’apprentissage dans la fonction publique territoriale » CNFPT 2010

64 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

À Issy-les-Moulineaux, les apprentis du CFA des métiers territoriaux suivent dix-huit mois de stages pratiques et d’immersion professionnelle sur leurs deux années de formation. DR

Issy-les-Moulineaux, le centre de formation des apprentis (CFA) des métiers territoriaux d’Île-de-France a formé près de 500 auxiliaires puéricultrices depuis sa création en 2008. En janvier, il ouvrira une nouvelle formation de cuisinier. Le premier centre de formation des apprentis (CFA) entièrement dédié à la fonction publique accueillait en septembre sa neuvième promotion d’étudiants. Initié par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) en 2008, il répond à l’époque aux besoins de la région Île-de-France en auxiliaires puéricultrices, une filière en forte carence. La différence avec un CFA « classique » ? « Une attention particulière à la gestion de l’alternance, soucieuse des besoins en ressources humaines des collectivités », explique Valérie Paumier-Bancel, sa directrice, mais aussi « des modules spécifiques pour préparer le concours et sensibiliser les jeunes à la fonction publique ». Un concours qui fait justement grincer des dents certains élèves. D’autant que pour un jeune diplômé en juin, il faut attendre le mois d’avril de l’année suivante pour le passer. « On a déjà été sélectionnés pour entrer au CFA et on sort d’une formation de deux ans qui nous a permis d’obtenir un diplôme d’État. C’est dur de se dire qu’il faut à nouveau passer un concours pour être vraiment reconnus », confie Hélène, apprentie de 22 ans, avant de filer à son cours de « culture territoriale ». Sur deux ans de formation, les élèves suivent cinq mois de cours théoriques dispensés à Issy-les-Moulineaux ou dans des instituts de formation à Montreuil et Vitrysur-Seine, six mois de stages cliniques et un an d’immersion professionnelle en collectivités.

Le travail de Xavier Decis, chargé du développement de l’apprentissage au CFA, consiste à démarcher les collectivités pour qu’elles accueillent un apprenti. Une mission pas toujours aisée. « Certaines n’ont pas encore la culture de l’apprentissage, d’autres évoquent un problème de coût par rapport à d’autres contrats, notamment les emplois d’avenir », évoque-t-il. Cette année, le nombre d’élèves qui sont toujours en recherche d’un employeur a triplé, passant à 12 sur une promotion de 70. « D’où l’intérêt d’expliquer que l’apprentissage est une solution efficace pour faire face aux pénuries de personnel qualifié, en montrant que le CFA propose un suivi et une aide aux collectivités durant tout le déroulement du contrat ».

Accompagnement C’est l’un des atouts du CFA des métiers territoriaux. « Nous sommes très attentifs à accompagner les collectivités, par exemple dans la formation des maîtres d’apprentissage », affirme la directrice. Un guide pédagogique leur est destiné, et ils sont conviés régulièrement à des réunions de formation. Un moyen pour eux de se sentir investis, et aussi de mettre à jour leurs connaissances. Les élèves aussi sont particulièrement encadrés. Avant même de commencer leur formation en septembre, ils réalisent avant l’été un « stage d’accès à l’apprentissage » où ils rencontrent des professionnels et sont déjà éveillés aux problématiques de la fonction publique territoriale. « L’objectif est de s’assurer de leur

motivation pour sécuriser les parcours. Les collectivités peuvent ainsi être confiantes lorsqu’elles nous prennent un apprenti », justifie Xavier Decis. Et la formule semble fonctionner. Le CFA s’apprête à ouvrir en janvier 2014 une nouvelle filière pour former des cuisiniers. « Il y a besoin d’une formation adaptée des cuisiniers aux spécificités du métier dans la fonction publique, notamment en termes de normes sanitaires et d’hygiène », assure Valérie Paumier-Bancel. Pour elle, le développement de l’apprentissage repose sur ces deux leviers : une meilleure communication avec les collectivités territoriales, en parallèle à la formation d’apprentis au fait des particularités de la fonction publique. ● R. M.

L’essentiel 451 apprentis formés depuis 2008 un taux d’emploi de 100 % à l’issue du diplôme plus de 85 % des apprentis qui choisissent de faire carrière dans la fonction publique territoriale Source : CNFPT


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EXPERTISE

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Aménagement durable

Sur le terrain

Sur le terrain

UN ÉCLAIRAGE ÉCOLO À VALENCIENNES

DÉBROUSSAILLER LE MAQUIS DE L’ÉVALUATION EN SANTÉ

DES MONNAIES COULEUR LOCALE

ALPHASPIRIT/FOTOLIA

À un moment charnière pour l’économie sociale et solidaire avec la loi Hamon, les acteurs du secteur tentent de se structurer avec la création de pôles de coopération territoriaux. Un travail de longue haleine.

Économie solidaire :

l’union fait la force dans les territoires

U

topiste », « sectaire », « trop éloignée des principes de l’économie de marché » : les a priori envers l’économie sociale et solidaire (ESS) ont la vie dure. Pour y faire face, le think tank Labo ESS anime depuis 2009 une démarche qui vise à structurer les initiatives locales et à soutenir l’émergence de pôles de coopéra-

66 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

tion territoriaux. « L’un des enjeux réside dans le changement d’échelle des structures de l’ESS. En amenant les différents acteurs à coopérer au sein d’un même pôle, on démultiplie les forces de travail, on privilégie l’intelligence collective pour construire un projet socio-économique », explique Françoise Bernon, déléguée générale du Labo.

En partenariat avec plusieurs acteurs du secteur, dont le réseau des collectivités territoriales pour l’économie solidaire (RTES), une vingtaine de pôles témoins sont identifiés en 2012. Parmi eux, le pôle « Éolienne en pays de Vilaine » est un fonds d’investissement solidaire qui mobilise l’épargne des citoyens pour la


Aménagement durable EXPERTISE

80 E-services publics

LE COÛT CACHÉ DU LOGICIEL LIBRE

3 questions à… construction de parcs éoliens. De l’autre côté de l’Hexagone, dans la Drôme, le pôle « Sud Archer » relance un atelier de production de chaussures « made in France », en associant les organismes de formation locaux, des chefs d’entreprise et le Coorace, fédération nationale de l’économie sociale et solidaire. Les profils apparaissent d’emblée très divers. « Tous les pôles de coopération n’ont pas le même modèle, c’est là la complexité de l’affaire, reconnaît Françoise Bernon, il a fallu en formaliser les contours pour éviter que l’idée soit dévoyée. » Car pour l’instant, la majorité d’entre eux sont en cours de construction et cherchent encore leur modèle.

Anne-Laure Federici, déléguée générale du RTES (réseau des collectivités territoriales pour l’économie solidaire)

Quelle a été la démarche de votre réseau dans la réflexion sur les pôles de coopération ? Nous nous inscrivons dans le cadre du travail mené depuis plusieurs années avec le Labo ESS. En constatant les importants moyens affectés aux pôles de compétitivité, le Coorace et le RTES se sont interrogés sur la possibilité d’engager la même dynamique pour l’économie sociale et solidaire. Contact avait été pris à l’époque avec le cabinet de Christine Lagarde [ministre de l’Économie de Nicolas Sarkozy, ndlr] où nous avions eu de bons retours. Depuis, nous n’avons cessé d’avancer dans la réflexion aux côtés de plusieurs collectivités sur les expériences d’ores et déjà menées sur le territoire.

Les collectivités en première ligne

le pôle lillois est une « grappe » de 19 entreprises composée de métiers de conseil, de formation et de communication reposant sur les valeurs de l’économie sociale et solidaire. En juin dernier, elles se sont installées dans des locaux

communs, mutualisant certains de leurs outils et services. « Nous avons réalisé 150 000 euros annuels d’économies grâce aux tarifs dégressifs rien qu’en mutualisant nos factures téléphoniques », indique Elena Fernandes. Une démarche qui …

GILLES ROLLE/RÉA

Suivant le principe d’une économie bottom up (du bas vers le haut), l’idée fait son chemin jusqu’aux plus hauts sommets de l’État. La définition d’un « pôle territorial de coopération économique » (PTCE) est inscrite dans le projet de loi ESS de Benoît Hamon, examiné au Sénat ce mois-ci. Le 18 juillet dernier, un appel à projets transversal est lancé par 4 ministères (Logement, Économie sociale et solidaire, Ville, Redressement productif). Trois millions d’euros de financement seront répartis sur une quinzaine de projets à l’horizon 2014. Si l’État s’empare aujourd’hui du sujet, les collectivités et les élus locaux sont depuis plusieurs années en première ligne de ce nouvel élan dans les territoires. « Ce sont des relais d’information primordiaux qui participent à notre rayonnement local et peuvent aussi nous confier des marchés publics liés à leur politique de développement durable », confirme Elena Fernandes, animatrice et coordinatrice du pôle « Initiatives & Cité » à Lille, qui fait figure de pionnier sur le sujet. Récompensé en 2011 par la Datar,

Quelle est la place des collectivités dans le développement des pôles territoriaux de coopération économique (PTCE) ? Les premiers résultats d’une étude menée par RTES montrent que, sur une cinquantaine de pôles identifiés, les collectivités participent à la quasi-totalité des projets, 94 % par exemple pour les régions. Dans un tiers des cas, il s’agit d’un appui financier mais cela passe aussi par une participation au comité de pilotage du pôle ou la mise en place d’un espace de concertation pour les différents acteurs. Elles peuvent aussi inciter à la coopération en lançant des appels d’offres publics qui exigent une réponse collective de plusieurs structures. Cela a été le cas par exemple à Saint-Étienne.

Benoît Hamon, ministre délégué à l’Économie sociale et solidaire, lance le premier appel à projets pour soutenir les pôles territoriaux de coopération économique, le 18 juillet dernier.

DR

« Les collectivités participent à la quasi-totalité des projets »

Êtes-vous satisfaite de l’inscription des PTCE dans la loi Hamon ? RTES se félicite de la reconnaissance des pôles dans la loi et du financement mis en place par l’appel à projets, mais nous avons deux regrets. D’abord, la place des collectivités, tout comme celle des centres de recherche, y apparaît facultative. Elle est seulement évoquée « le cas échéant ». D’autre part, le montant de l’appel à projets de 3 millions d’euros apparaît assez faible au regard du nombre d’initiatives locales et de l’intérêt que cela représente pour notre économie. Propos recueillis par R. M.

QU’EST-CE QU’UN PÔLE TERRITORIAL DE COOPÉRATION ÉCONOMIQUE ? Selon la définition inscrite dans le projet de loi : « le regroupement sur un même territoire d’entreprises de l’économie sociale et solidaire, qui s’associent à des entreprises, et le cas échéant à des collectivités locales, des centres de recherche et des organismes de formation pour mettre en œuvre une stratégie commune et continue de mutualisation au service de projets économiques innovants socialement et porteurs d’un développement local durable ».

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 67


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Aménagement durable EXPERTISE

En chiffres … n’aurait pas été possible avant

la structuration en PTCE. Acquérir plus de visibilité en fédérant les multiples acteurs, devenir l’interlocuteur privilégié des collectivités dans leurs politiques d’aménagement durable, infuser les idées d’innovation sociale dans l’économie classique : telles sont les ambitions affichées par ces pôles de coopération. Mais pour mener à bien ce parcours, il est encore nécessaire de faire preuve de pédagogie, notamment auprès des élus. « Notre attention porte sur le fait que toute réunion d’acteurs

ne soit pas intitulée PTCE. Le rôle des collectivités est important, mais elles ne peuvent décider de la création d’un pôle à partir de rien. Cela doit d’abord s’appuyer sur une réelle coopération des initiatives locales et cela ne se décrète pas, cela se construit », insiste la déléguée générale du Labo ESS. En raison de leur logique transversale qui peut concerner de nombreuses filières (industrie, culture, environnement, politique de la ville, etc.), les pôles interrogent aussi les collectivités sur leur mode d’organisation.

« Quand on recherche des soutiens financiers, on nous répond souvent que l’on ne correspond à aucune “case” des dispositifs publics, confirme Elena Fernandes. C’est très frustrant quand on se compare aux pôles de compétitivité. » L’objectif est-il justement de donner naissance aux cousins germains des pôles impulsés sous le mandat de Nicolas Sarkozy ? « Là où ils recherchent l’innovation technologique pour développer un marché mondial, nous sommes sur l’innovation sociale et le développement local. Le seul point commun, c’est

Les PTCE 22 pôles témoins identifiés dans 14 régions 1 projet de loi présenté en octobre au Sénat 1 appel à projets pour 3 millions d’euros de subventions de l’État

d’organiser une collaboration entre acteurs pour développer un projet », estime Françoise Bernon. À voir si l’avenir leur réserve la même place et les mêmes avantages qu’aux pôles de l’économie classique. ● Raphaël Moreaux

UN PÔLE NANTAIS

EN PLEINE MUTATION Près de dix ans après sa création, l’association des Ecossolies vit un moment charnière de son histoire. Dans quelques mois, une trentaine d’entreprises membres pourront installer leurs quartiers à l’extrémité ouest de l’île de Nantes, dans des hangars réhabilités. « Rassembler les acteurs dans un même lieu, c’est faciliter, initier, provoquer la coopération », résume le directeur de l’association, Marc Richard. Les Ecossolies ont été créées à l’origine pour préparer la première grande manifestation de l’économie sociale et solidaire (ESS) impulsée par Nantes Métropole en 2006. Face au succès de l’événement, les élus décident de pérenniser le dispositif. Les Ecossolies ont alors pour objectif

En chiffres Les Ecossolies, ce sont… 9 000 m2 d’espaces dédiés à l’ESS 30 entreprises hébergées Plus de 130 emplois Un objectif de 20 à 30 000 utilisateurs du pôle chaque année

d’élaborer un plan d’action et de coordination territoriale de l’ESS. « À ce titre, nous sommes en lien avec les quartiers de Nantes, mais aussi avec les 24 communes de la métropole et le département », explique Marc Richard. Pour fédérer ces acteurs, il est décidé de créer un pôle territorial de coopération économique (PTCE) qui trouve son incarnation concrète sur une friche de l’île de Nantes, cédée par la métropole pour un bail de douze ans. Au milieu d’un paysage industriel en pleine reconversion cerné par la Loire, 9 000 m2 d’espaces dédiés à l’ESS seront inaugurés en janvier 2014. « Nous avons réhabilité deux anciennes halles de stockage avec le souci de conserver tout ce qui pouvait l’être », décrit Damien Labrousse, coordinateur de l’association. Toilettes sèches, système de chauffage à bois centralisé, accès aux personnes à mobilité réduite : le projet se doit d’être responsable et durable… Mais le principal intérêt est ailleurs. « Ce bâtiment doit nous permettre de répondre aux 5 axes de notre projet politique pour l’ESS », affirme Marc Richard. Aider au développement d’entreprises socialement responsables, grâce à « un espace pépinière et incubateur » où les porteurs

DR

Le pôle territorial de coopération économique des Ecossolies, soutenu par Nantes Métropole, inaugurera en janvier son premier lieu d’hébergement des entreprises de l’économie sociale et solidaire. Une vitrine indispensable pour changer d’échelle.

Sur une friche industrielle de l’île de Nantes, d’anciens hangars ont été réhabilités pour héberger les entreprises du pôle des Ecossolies.

de projets pourront notamment bénéficier d’études de faisabilité. Commercialiser les produits issus du réemploi, du recyclage ou de l’agriculture locale dans un magasin collectif. Alimenter la réflexion en organisant des ateliers, débats et conférences dans un espace événementiel de plus de 900 m2. Et enfin, rendre visible l’ESS et mettre en réseau la grande diversité de ses acteurs qui pourront s’installer dans les 2 000 m2 de bureaux, d’open spaces et de salles de réunion mises à leur disposition. « Les entreprises et porteurs de projet pourront enfin disposer de services communs, d’une visibilité et pourront engager de nouveaux partenariats techniques et innovants pour le développement local », se félicite Marc Richard. Et s’il a fallu du temps pour arriver à monter le projet, il assure que c’était « une période de réflexion et de mobilisation des acteurs indispensable pour que le pôle trouve sa cohérence ». ● R. M. OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 69


PHOTOS : THOMAS DOUVRY

EXPERTISE Aménagement durable

Éclairage public

Un éclairage écolo à Valenciennes La cité nordiste vient d’inaugurer un nouveau dispositif d’éclairage public afin de limiter l’impact de la lumière sur la faune et la flore. Le parc de la Rhônelle sert de laboratoire.

S

oucieux de la vie nocturne des petits insectes, oiseaux, poissons qui pullulent dans le parc de la Rhônelle, la commune de Valenciennes vient d’inaugurer un nouveau système d’éclairage public. Moins nocif pour la santé à proprement parler que le charbon, ou le CO2, la lumière est pourtant la cause d’une pollution visuelle qui peut s’avérer néfaste pour la faune et la flore et perturber ainsi le cycle de la nature. L’usage intempestif de l’énergie pour éclairer l’ensemble du domaine public est aussi synonyme de gaspillage pour les collectivités, d’autant que les équipements, comme c’était le cas pour partie à Valenciennes, sont souvent vétustes. Pour cette double raison, la ville, poursuivant la dynamique lan-

cée depuis l’adoption en 1998 de son Agenda 21, a donc décidé de rénover totalement son éclairage urbain, en signant avec Bouygues, l’exploitant, un partenariat publicprivé (PPP) de 27 millions d’euros sur vingt ans, et dont l’expérimentation sur le parc de la Rhônelle est l’un des volets. « Ce parc, particulièrement fréquenté par les promeneurs, est une vitrine pour la ville, et un refuge pour la biodiversité », argumente Emmnauel Berrod, chargé du programme « Éclairage durable » pour l’association Noe Conservation. Partenaire de Bouygues, cette association, qui a élaboré une sorte de charte des 10 commandements du bon usage de l’éclairage urbain à destination des communes, s’est chargée, à la suite de visites sur le terrain, de dresser un diagnostic sur les

Le parc de la Rhonelle. Les différentes zones classées selon leur sensibilité à l’éclairage.

70 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

différentes zones du parc et d’arrêter avec le maître d’ouvrage un « plan lumière » adapté.

Écogestes Dans les zones définies comme sensibles, les cheminements seront éclairés en permanence à 50 % de leur puissance en couleur ambre,

afin de limiter les ultraviolets, qui attirent les insectes. Ces lampes sont couplées à un système de détection de présence, commandé et paramétré à distance, qui permet d’éclairer les lampadaires à 100 % au passage de riverains ou de réduire la lumière de manière à replonger le parc dans une quasi totale obscurité.


Aménagement durable EXPERTISE

Signature Nom du maître d’œuvre : Bouygues Énergies & Services conçoit, met en œuvre, entretient et exploite des réseaux (infrastructures d’énergies, infrastructures numériques, génie électrique et thermique, éclairage public, etc.)

Zonage. Le Parc de la Rhônelle est valorisé par le biais d’une mise en lumière esthétique, tout en respectant la biodiversité.

Signataires. Laurent Degallaix, le maire de Valenciennes (à gauche), avec, à ses côtés, les représentants de Bouygues et de Noe Conservation, partenaires du projet.

Ce système de gradation et de temporalité de l’éclairage urbain permet de laisser évoluer les écosystèmes : les berges de la rivière et la surface de l’eau, les arbres spécifiquement accueillants pour la biodiversité, comme ceux bordant le parc, où plusieurs oiseaux comme le pic vert, le grimpereau des jardins et la sitelle torchepot ont élu domicile. Par ailleurs, une prairie de fauche est maintenue dans une zone très sensible, avec un entretien réduit et là encore non éclairée. Cet ensemble d’écogestes, comme le prédiagnostic, sont deux des axes sur la dizaine inscrite dans la charte, que la ville, première cliente, a signé le jour de l’inauPromenade. Près de 200 personnes ont arpenté les allées du parc lors de l’inauguration, le 12 septembre dernier.

guration du parc, le 12 septembre dernier. L’objectif, dans un avenir proche, est de développer la même approche sur l’ensemble de la ville dans le cadre du PPP signé avec Bouygues et de porter l’accent sur la sensibilisation du public. Attentive à la préservation de la nature, la ville de Valenciennes devrait du même coup réduire sa consommation d’énergie et sa production de gaz à effet de serre de 33 % d’ici 2032. ● Xavier Sidaner

En chiffres 27 millions d’euros pour le partenariat public-privé 3 000 tonnes de CO2 économisées 12 zones du parc urbain prédiagnostiquées

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 71


EXPERTISE Sur le terrain URSULE/FOTOLIA

Débroussailler le maquis

de l’évaluation en santé L’amélioration du système de santé passe par son évaluation régulière. C’est le rôle de l’Agence nationale d’appui à la performance (Anap), créée en 2009. Les indicateurs existent, mais leur utilisation gagnerait à être clarifiée auprès des acteurs du terrain médical. elles comprises, les informations, collectées et surtout bien utilisées ? Pas si sûr. En consacrant sa troisième université d’été de la performance en santé au « bon usage des indicateurs », l’Agence nationale d’appui à la performance (Anap) prend le pouls des experts et acteurs de terrain, lesquels pointent du doigt quelques dérives.

72 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

Vers une production plus démocratique des indicateurs

FOTOLIA

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our mesurer le niveau d’organisation des professionnels, des établissements de soins et du système de santé dans son ensemble, les services de l’État ont mis au point, au fil des années, une batterie d’indicateurs qui génèrent des moyennes, des normes et des recommandations tous azimuts. Mais ces démarches sont-

Les médecins, les soignants et les directeurs d’établissement ne partagent pas forcément les mêmes points de vue sur ce qu’il convient d’évaluer et sur la manière de le faire. « C’est tout l’intérêt d’entamer un dialogue beaucoup plus transparent », estime Christian Anastasy, directeur général de l’Anap. Une idée bien accueillie par le professeur André Grimaldi, l’un des


Sur le terrain EXPERTISE

DR

3 questions à… Christian Anastasy, directeur général de l’Anap

« On finit par rendre les situations encore plus obscures » L’Agence nationale d’appui à la performance (Anap) crée depuis trois ans des instruments pour dialoguer, comprendre des situations et éclairer des décisions.

La multiplication des indicateurs ne risque-t-elle pas de devenir contre-performante ? Lorsqu’il y a trop de choses à analyser, on finit par rendre les situations encore plus

représentants du mouvement pour la défense de l’hôpital public. Il admet que les démarches d’évaluation sont utiles, mais déplore qu’elles soient « guidées par la seule justification des pratiques ». Redoutant de voir arriver « le juste soin, au juste coût dans une pure logique de rentabilité », André Grimaldi dénonce clairement « ce consensus du silence, ne cherchant qu’à plaire aux tutelles, même si cela aboutit surtout à ne soigner que la dette, pas le malade ». Alors, il lui paraît primordial de reconstruire d’abord la confiance

obscures. Il faut se limiter à des indicateurs informatifs et partagés qui permettent aux professionnels de comprendre une réalité. On peut par exemple utilement analyser le nombre de comptes rendus d’hospitalisation et les délais nécessaires pour le transmettre au médecin traitant, la réglementation impose un délai de huit jours après la sortie du patient. C’est très clair pour les professionnels et objectivement mesurable. Il y a par contre une frontière à ne pas franchir. Certains indicateurs n’ont qu’un but incitatif. La publication d’un taux de mortalité pour alerter le personnel ne permet pas de le faire baisser. Pour y parvenir, les médecins sont simplement tentés de ne pas prendre en charge certains patients à risques particuliers pour faire fléchir le mauvais résultat. Avec les indicateurs, il ne peut être question ni de récompense ni de sanction, sous peine de les faire dévier de leur rôle d’information sur le niveau de qualité de pratiques collectives. Quels sont vos conseils pour rapprocher l’évaluation de terrain de la prise de décision publique ?

entre les équipes médicales et la direction des établissements à travers un dialogue contradictoire. Christian Anastasy en convient : « Si on échappe à ce dialogue, rien ne peut fonctionner. Les tableaux de bord imposés dans un esprit de coercition ne fonctionnent pas. Il faut absolument nouer un dialogue avec les acteurs concernés. Dès le cadrage d’un projet, il convient d’y joindre les indicateurs qui permettront de juger de sa réussite ou de son échec. Les professionnels doivent participer à la définition des conditions d’évaluation, pour y adhérer pleinement. »

La construction des indicateurs doit être faite de façon concertée, avec les professionnels. L’Anap a par exemple conçu Hospidiag, qui limite l’évaluation à une soixantaine d’indicateurs élaborés avec les professionnels. L’objectif essentiel est de développer le dialogue de gestion entre l’agence régionale de santé et l’établissement. Un tableau de bord vient d’être développé pour le médicosocial avec l’ensemble des fédérations. Il s’agit de nourrir le dialogue de gestion entre l’État, les conseils généraux et les établissements médico-sociaux pour faciliter la connaissance mutuelle réelle de l’établissement par leurs financeurs et mieux faire comprendre les politiques de financement par les établissements. Ce dialogue de gestion est la condition première pour éviter les écarts de dotation, qui ne sont pas toujours faciles à objectiver. Des indicateurs de mesure permettent de comprendre la juste attribution des moyens affectés comme des ressources disponibles. Le dialogue de gestion permet d’y voir plus clair et le rôle de L’Anap est de créer ces instruments qui permettent aux acteurs de rapprocher leurs points de vue. Propos recueillis par L. M.

Pas de décision sans débat

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Comment identifiez-vous les initiatives locales prometteuses ? Nous avons recours à un outil inspiré de celui utilisé par la direction du budget pour les commandes publiques. Nous essayons de déterminer l’utilité des projets, s’ils relèvent bien de notre compétence et s’ils peuvent avoir une utilité collective importante. Nous n’accompagnons pas les initiatives qui ne concernent que deux établissements hospitaliers en France. Par contre, les projets d’envergure comme celui d’améliorer la gestion des lits à l’échelle de 150 hôpitaux font partie de ceux sur lesquels nous nous engageons. C’est l’utilité collective qui guide notre action et nous évaluons la possibilité de transposer à grande échelle les initiatives remarquables dont nous sommes informés. Lorsque c’est le cas, nous les soutenons et à l’heure actuelle, l’Anap concentre son action sur une cinquantaine de projets pluriannuels.

« Les indicateurs ne peuvent plus partir d’en haut. Il faut que les décideurs apprennent à les établir avec les acteurs », martèle André Grimaldi. Michel Cremadez,

membre du conseil scientifique et d’orientation de l’Anap, estime que cette demande est recevable à condition que le corps médical fasse un pas vers les administratifs. « La pratique médicale ne peut plus être individuelle. Une révolution s’est produite et chacun doit comprendre ce qui se passe en dehors de son service », ajoute-t-il. Ils s’accordent sur un dernier point : « On a trop parlé des moyens mis en œuvre, reléguant au second plan les besoins des patients. Pour motiver les médecins, il est désormais question d’intéressement. Ceci ne …

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 73


PHILIPPE HUGUEN /AFP

EXPERTISE Sur le terrain

Les pompiers amènent un patient au service des urgences de l’hôpital de Lens, en septembre 2013.

… doit pas les concerner individuel-

Selon lui, une simplification des évaluations s’impose aujourd’hui. Parmi les solutions existantes, l’étalonnage lui paraît même une voie intéressante pour apprécier l’optimisation des solutions à partager. « L’analyse des données et les cas d’organisation réussie doivent en priorité servir d’exemples permettant aux autres de s’améliorer », poursuit-il.

lement, mais collectivement sur la base d’objectifs intrinsèques », conclut André Grimaldi.

Mieux partager les résultats

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Créer des espaces de coconstruction

Étienne Minvielle, directeur de la qualité des soins de la gestion des risques et de la relation patient à l’institut Gustave Roussy, professeur à l’École des hautes études de santé publique

« La santé est entrée dans une logique de comparaison »

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L’exploitation des résultats de ces évaluations ne semble pas encore suffisante à bon nombre de professionnels, qui consacrent de plus en plus de temps à réfléchir sur leurs pratiques. Au-delà de l’objectif affiché, les acteurs se retrouvent un peu seuls avec leurs conclusions lorsqu’elles ne servent pas la stratégie des établissements. Les résultats les mieux exploités par les directions sont d’abord ceux qui permettent de tirer des enseignements en matière de gestion. Le professeur Claude Sicotte, responsable du département d’administration de la santé à l’université de Montréal, défend sur ce point l’idée d’accorder davantage de place à « une vision intégrée imposant plus de cohérence entre la mission de la tutelle, à travers la réédition de compte, et ceux qui gèrent les établissements de santé ».

spécialistes libéraux, tous volontaires, échangent plusieurs fois par an avec les tutelles et les collectivités locales, des élus, des mutuelles et des directeurs d’établissement dans le cadre d’un comité des programmes. Il s’agit de travailler ensemble, en dépassant les logiques de pouvoir pour mieux se comprendre et améliorer par exemple la prise en charge les personnes dépendantes ». Le docteur Gérard Mick, président de l’Union natio-

nale des réseaux de santé (UNL), souligne l’importance de ces initiatives : « Pour évaluer un dispositif coopératif comme un réseau de santé, il faut que tout le monde puisse y participer sans esprit de compétition. » Des idées entendues aux universités d’été de la performance par Jean-Luc Harousseau, président de la Haute Autorité de santé, qui affirme en tirer quelques enseignements. L’idée des débats contradictoires lui semble « une bonne piste, pour que l’évaluation prenne sa juste place dans les décisions publiques. » Il regrette que « l’impact clinique des indicateurs ne soit pas suffisamment démonstratif » et propose de renforcer cette dimension à l’avenir. « Les indicateurs ne sont qu’un outil parmi d’autres. Il ne faut pas tout en attendre », précise JeanLuc Harousseau, qui plaide pour une accréditation non pas des médecins, mais des équipes autour d’un projet. La mise en œuvre des dynamiques plus collectives ne fait que commencer. ● Laurence Mauduit

Pour apprendre à mieux partager ces modèles, l’évaluation est même devenue un terrain de recherche. Corinne Grenier, directrice scientifique du pôle « Santé social » d’Euromed Management, propose de généraliser « les démarches de recherche évaluative participative pour apprendre à se comprendre, admettre les contraintes institutionnelles respectives et produire ensemble des pratiques d’évaluation nouvelles. » En s’appuyant sur l’expérimentation menée depuis 2005 au CHU de Nice, elle explique que « des médecins hospitaliers, généralistes et

74 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

« Avec les indicateurs, le secteur de la santé est entré dans une logique de comparaison qui apporte un plus en termes de transparence et d’incitation à l’amélioration de la qualité au sein des établissements de santé. Les premiers classements proposés pour comparer les établissements entre eux ont ainsi complètement fait basculer le débat. Mais ces classements posent aussi des problèmes. Les palmarès publiés dans les magazines sont fondés sur des classements par rang sans grande signification statistique. Des scores agrégés, une seule mesure de la performance conduisent aussi à des classements différents en fonction des méthodes utilisées. Il y a également des doutes sur le fait que les patients utilisent ces informations pour s’orienter sur un hôpital. Enfin et surtout, les indicateurs devraient être mieux utilisés en termes de suivi pour mesurer les évolutions positives qui traduisent les réelles améliorations au sein des établissements. Cela suppose de s’assurer que les professionnels les utilisent vraiment. Or ce point n’est pas assuré. Nous devons en tirer plus d’enseignements sur la durée, car cette nouvelle industrie d’indicateurs a aussi un coût. »


Lancement du Club Santé publique à l’occasion de la 6e édition des Rencontres des acteurs publics et de l’intervention de Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé.

Un Club de la rédaction d’Acteurs publics pour associer experts et observateurs à la réflexion sur la rénovation du secteur de la santé et des affaires sociales

Pour toute information sur le Club Santé publique et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com


EXPERTISE Sur le terrain

PATRICK ALLARD/REA

Lancée en 2010, l’abeille est une monnaie locale acceptée dans plus d’une centaine de commerces de Villeneuve-sur-Lot.

Des monnaies couleur locale Nées en réaction à la crise financière, les monnaies locales complémentaires gagnent du terrain en France : 20 d’entre elles sont en circulation et une cinquantaine devrait l’être prochainement. Leur impact économique reste toutefois limité.

C

e jour-là, les « abeilles » de Villeneuve-sur-Lot ont joué les têtes d’affiche. Lancée en janvier 2010, la première monnaie locale créée dans une ville française est aujourd’hui acceptée par 112 commerçants, artisans ou PME de l’aggloméra-

tion (45 000 habitants). Et c’est tout naturellement dans cette ville du Lot-et-Garonne qu’ont eu lieu, en mai dernier, les premières Assises des monnaies locales complémentaires (MLC). 47 porteurs de projet sont venus échanger et rencontrer les repré-

76 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

sentants des monnaies déjà en place, ainsi que les trois « gourous » francophones des MLC : Philippe Derudder, fondateur de l’Association internationale pour le soutien aux économies sociétales*, Jean-Michel Servet, professeur d’études du développement à

l’Institut des hautes études internationales et du développement de Genève**, et Patrick Viveret, ancien conseiller référendaire à la Cour des compte, philosophe et essayiste altermondialiste***. « 97 % des transactions en monnaies “officielles” circulent dans les


Sur le terrain EXPERTISE

LAURENT CERINO/REA

ROMANS BAT LA MESURE

Succès limité pour les mesures de Romans, peu utilisées dans la soixantaine de commerces qui acceptent cette monnaie locale.

Des consommateurs encore réticents Pour accélérer la circulation des échanges, certaines monnaies sont « fondantes » : elles perdent une partie de leur valeur au fil du temps (de l’ordre de 2 à 3 % par semestre). « La question de la fonte est controversée, admet Philippe Derudder. Dans l’absolu, une monnaie doit suivre le même destin que la richesse qu’elle représente et, par exemple, se flétrir comme un légume. De plus, faire fondre la monnaie permet de lutter contre l’idée que l’argent peut faire de l’argent. Je reconnais toutefois qu’il y a une forme de paradoxe, dans la société actuelle, à pousser les citoyens à consommer. » Mais il est surtout difficile de faire admettre aux utilisateurs que l’argent qu’ils ont dans leur portefeuille peut perdre de la valeur. Philosophiquement favorable à la fonte, Anne Bruzec, qui vient de lancer le galleco à Rennes, Redon et Fougères, a préféré y renoncer : « Attendons de voir comment la monnaie circule avant de compliquer

les choses », explique la directrice de l’association Galleco. Séduisantes sur le papier, les monnaies locales peinent en effet à trouver leur public. « Nous n’avons aucun mal à convaincre les commerçants et artisans d’accepter la mesure, observe Annie Vital à Romans-sur-Isère (lire ci-dessus). En revanche, les consommateurs restent réticents. À commencer par les militants “classiques” (associatifs, syndicaux ou politiques), convaincus

à temps partiel. Son succès n’en reste pas moins limité : les 11 000 mesures mises en circulation sont acceptées par 60 commerçants, artisans et producteurs… mais elles ne sont utilisées que par une centaine d’adhérents à l’association Commune mesure. « C’est peu, admet Annie Vital, mais je suis convaincue que la monnaie locale est un puissant outil d’éducation populaire. Même s’il soulève encore davantage de questions qu’il ne donne de réponses. »

que cela ne sert pas à grand-chose. » Les clients prêts à jongler avec des euros et une monnaie locale (qu’il faut aller récupérer à un comptoir d’échanges) sont encore trop rares : entre 100 et 300 selon les villes. « Paradoxalement, les commerçants sont plus sensibles à ce type de projet que les consommateurs, confirme Bastien Yverneau à Montreuil (lire ci-dessous). En tant que patrons de PME, ils ont été révoltés par les dérives …

Les + et les + Initiative citoyenne + Support de réflexion sur le sens de la monnaie et des échanges commerciaux + Possibilité d’action sociale – Impact limité sur l’économie locale – Logistique difficile à gérer pour les initiateurs du projet aussi bien que pour les utilisateurs de la monnaie

MONTREUIL MÛRIT SA PÊCHE C’est dans le cadre du collectif Montreuil en transition qu’a été imaginée la pêche, monnaie nommée en référence au passé maraîcher de la deuxième ville de Seine-Saint-Denis. 70 000 billets sont mis en circulation durant ce mois d’octobre : « Sur les 1 500 commerçants de la ville, nous en avions démarché 200 à la mi-septembre, explique Bastien Yverneau, cofondateur de cette monnaie locale : 20 % ont été immédiatement partants, un tiers séduits mais attentistes. » En revanche, les élus locaux soutiennent clairement le projet : la municipalité EELV aussi bien que le député PS Razzy Hammadi. « Nous aimerions avoir le soutien des élus de tous bords en conseil municipal, poursuit Bastien Yverneau. C’est un gage d’indépendance et de pérennité : à Nanterre, le Sol a été conçu par des citoyens mais soutenu et financé par la municipalité. Le jour où la mairie a coupé son budget, tout s’est arrêté. » En l’occurrence, le budget de lancement de la

MAIRIE DE MONTREUIL

sphères spéculatives, contre seulement 3 % dans l’économie réelle, observe Philippe Derruder. Les monnaies locales permettent de sortir de cette spirale : elles ne peuvent servir à acheter que des produits ou des services réels et locaux. » C’est donc un outil de développement économique local.

« Nous sommes des objecteurs de croissance », explique Annie Vital, l’une des trois fondatrices de la mesure, la « monnaie citoyenne » lancée à Romanssur-Isère (Drôme) au printemps 2010, « juste après l’abeille de Villeneuve-sur-Lot ». Il s’agit clairement d’un projet politique, d’initiative citoyenne ; mais il est soutenu par la chambre régionale d’économie sociale et solidaire (Cress) de Rhône-Alpes et par la région, qui financent un emploi

À Montreuil, la pêche, éditée en 70 000 billets, est soutenue par les élus locaux.

pêche reste modeste : 10 000 euros pour l’impression des billets et 300 euros pour la publication d’une plaquette pédagogique… en plus des centaines d’heures bénévoles du collectif. OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 77


EXPERTISE Sur le terrain

SOLEIL SUR LE HAUT VAR

l’économie réelle. » Ce n’est, du reste, pas un hasard si deux monnaies locales ont été imaginées par des commerçants : l’occitan à Pézenas (Hérault) et la cigalonde à La Londe-les-Maures (Var). L’immense majorité des monnaies locales complémentaires restent des initiatives citoyennes. À ce jour, deux projets ont été initiés et soutenus financièrement par des élus locaux : le sol violette à Toulouse et le galleco en Bretagne. « Le conseil général d’Ille-et-Vilaine cofinance les deux salariés de l’association Galleco, explique Anne Bruzec. De plus, les 40 000 gallecos en circulation (équivalant à 40 000 euros) sont garantis par le Crédit coopératif. » Dans le 10e arrondissement de Paris, en revanche, le projet de monnaie locale initié par le centre social et culturel Le Paris des faubourgs ne cherche pas vraiment de soutien politique. « Avec la campagne des municipales, les candidats vont devoir se positionner, sourit Béatrice Sculier, son animatrice. Mais à l’heure actuelle, je préfère m’intéresser à l’accueil des habitants et des commerçants du quartier : j’avoue être très agréablement surprise ! »

Bercy en retrait Signe des difficultés manifestées par les élus pour trouver leur place dans ce type de projet, le ministère de l’Économie sociale et solidaire a opposé un silence aussi gêné que poli à nos demandes d’entretiens. « Nous sommes bien plus soutenus par le Cress (conseil régional de l’économie sociale et solidaire) que par le ministère, observe Annie Vital, à Romans. Les monnaies locales complémentaires ne font clairement pas partie des priorités de Benoît Hamon. » Quant au ministère de l’Économie et des Finances, il ne fait rien – c’est le moins que l’on puisse dire – pour encourager les trésoriers-payeurs généraux à intégrer le circuit des monnaies locales : « Dommage, car nos monnaies circuleraient beaucoup mieux si elles étaient

GUY BOUCHET/AFP

… financières et veulent privilégier

Les soleils pourront être utilisés à partir de 2014 dans les commerces du Var. L’objectif : promouvoir le développement durable.

« Nous n’allons pas laisser la finance internationale nous avaler sans réagir ! » tempête Dominique Knecht, initiatrice du soleil, la monnaie qui sera mise en circulation au printemps 2014 dans le haut Var (sur les communes de Flayosc, Lorgues et Salernes). Un territoire où l’agriculture reste assez dynamique pour que la monnaie tourne réellement : les commerçants pourront dépenser les soleils encaissés auprès des producteurs locaux, sans avoir besoin de les échanger régulièrement contre des euros. « Nous allons naturellement présenter notre projet aux élus locaux, mais sans nous lier à un parti pour rester indépendants, explique Dominique Knecht. De même, nous souhaitons promouvoir le développement durable, mais sans exclure les entreprises qui ne sont pas dans cette démarche : mieux vaut les sensibiliser et les accompagner dans le changement. » Si, de surcroît, les deux plus éminents cultivateurs du territoire, Brad Pitt et Angelina Jolie, viennent à adopter le soleil, son succès est assuré…

« Une façon de créer un réseau d’échanges locaux reposant sur la confiance tout en s’extrayant de la culture de l’usure. » Razzy Hammadi, député PS de Seine-Saint-Denis, soutient la pêche, lancée cet automne à Montreuil.

acceptées dans les transports en commun, les piscines, les bibliothèques… » regrette Annie Vital. Soutien déclaré à la pêche de Montreuil, Razzy Hammadi, député PS de Seine-Saint-Denis, croit savoir que Benoît Hamon viendra découvrir cette monnaie d’ici la fin de l’année : « Nous menons un véritable lobbying pour le sensibiliser à la question. Les monnaies locales n’ont clairement pas l’ambition d’ébranler le système monétaire international, mais elles

78 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

ont le mérite d’ouvrir une réflexion sur le rôle de la monnaie et de créer du lien social. » Ce sont, in fine, des outils plus pédagogiques qu’économiques. ● Sabine Germain (1) Auteur de Les monnaies locales complémentaires, pourquoi et comment, éditions Yves Michel, avril 2012. (2) Auteur de Les monnaies du lien, Presses universitaires de Lyon, 2012. (3) Auteur de La cause humaine, du bon usage de la fin d’un monde, éditions Les liens qui libèrent, mai 2012.

La synthèse 20 monnaies locales sont en circulation en France Une quarantaine de projets Seulement deux monnaies portées par des élus : toutes les autres sont d’initiative citoyenne www. monnaie-localecomplementaire. net est une plate-forme documentaire sur les MLC.



FOTOLIA

EXPERTISE e-services publics

Le coût caché du logiciel libre

Le logiciel libre, ou open source, est le produit tendance utilisé par un grand nombre d’administrations. S’ils ne coûtent rien à l’acquisition, ces logiciels engendrent néanmoins des dépenses difficiles à évaluer.

L

es logiciels libres sont utilisés en priorité. » Cette simple phrase, tirée de l’article 9 de la loi sur l’enseignement supérieur adoptée le 22 juillet dernier, marque un tournant dans

la courte histoire du « libre » en France. C’est en effet la première fois qu’une loi intervient pour donner clairement la priorité à ce type de produits, en l’occurrence, dans les académies et les uni-

80 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

versités. Les partisans de l’open source jubilent, d’autant qu’ils tiennent là une belle revanche sur les éditeurs de logiciels propriétaires comme Microsoft ou Oracle.

Quelques mois avant l’adoption de cette loi Fioraso, lors du vote de la loi dite Peillon sur l’éducation, les députés avaient osé mettre en avant le libre, avant que le lobby des grands groupes informatiques, représentés par l’Afdel et Syntec numérique, ne fasse son œuvre et ne torde le cou à cette initiative, horrifié de voir la loi intervenir pour imposer ce qu’il qualifie à tort de « technologie », le logiciel libre. Abattus mais pas vaincus, les militants du libre sont revenus à la charge, parvenant en quelques semaines à imposer le libre dans le texte sur l’université, avec la bienveillante compréhension d’une poignée de sénateurs. À l’April, association en pointe dans ce combat, on accueille ce texte comme « une bonne nouvelle ». « C’est la


e-services publics EXPERTISE

Les + et les –

DR

Mathieu Jeandron, chef de service à la Disic

première fois que la loi tranche en faveur du libre, même si la France a longtemps été leader sur le libre », appuie Jeanne Tadeusz, chargée de mission à l’April. Depuis des années, un combat de tranchées oppose les grands éditeurs, qui tirent une grande part de leur chiffre d’affaires de la vente des licences adossées aux logiciels, à la communauté de l’open source, incarnée par Linux ou Mozilla. Leurs logiciels, accessibles gratuitement, ont un niveau parfois supérieur à ceux des éditeurs classiques, mais faute de moyens marketing, sont en manque de reconnaissance.

Libre mais pas gratuit Avec cette loi, le gouvernement donne un nouveau coup d’accélérateur à l’open source, même si la portée de ce texte, en l’absence de décret d’application, reste difficile à mesurer. Le gouvernement, dans une circulaire datant de septembre 2012, exhortait déjà les administrations « à considérer le logiciel libre à égalité avec les autres solutions ». Mathieu Jeandron, chef de service à la direction interministérielle des systèmes d’information et de communication (Disic), fait cette analyse : « Nous ne sommes pas aux manettes pour imposer ou décider à la place des acteurs », sous-entendu, il y a toujours une place pour le logiciel propriétaire, ce qui est d’ailleurs le cas dans nombre d’administrations. « Notre démarche est d’amener l’administration à se poser les bonnes questions avant de choisir un logiciel et de créer les conditions de

succès lorsqu’elle choisit d’aller vers le libre », estime-t-il. Ce reflexe, consistant à peser le pour et le contre, l’administration l’a déjà acquis, permettant au logiciel libre de réussir ces dix dernières années une belle percée. À l’éducation nationale, les solutions « libres » sont déjà déployées dans les rectorats, où plusieurs centaines de serveurs tournent sous Linux. La défense, et plus particulièrement la branche « gendarmerie », a pris les devants et basculé un grand nombre d’applications utilisateurs sous ce même système d’exploitation, s’attelant encore à faire migrer près de 80 000 postes utilisateurs d’ici avril 2014. Le ministère de l’Écologie comme celui de l’Agriculture ne sont

pas en reste, et leur expertise développée en interne n’est pas ridicule, déployant des systèmes d’information et des logiciels libres dans un grand nombre de directions centrales. Enfin, pour citer un dernier exemple, le ministère de la Culture a lui aussi été parmi les pionniers en matière d’open source, multipliant ce type de système d’exploitation auprès des utilisateurs. Messagerie Thunderbird et suite Open office ont ainsi détrôné Outlook et bon nombre de logiciels type Word, Excel ou encore Photoshop, délaissé au profit de sa copie, Gimp. Et dans les data centers, on ne compte plus les serveurs Apache ou Tomcat, en service 24 heures sur 24, installés dans les années 2000, en pleine bulle Internet. Le libre séduit de toutes parts et rien ne laisse présager d’un retour en arrière. La raison est avant tout économique. Le coût d’acquisition des logiciels, égal à zéro, ne peut que pousser les administrations à trancher en faveur du « libre », en ces périodes de restrictions budgétaires. Pourtant,

+ Indépendance vis-à-vis des éditeurs + Souplesse à l’usage + Prix moins élevé + Source de revenus pour les start-up nationales – Des développements parfois inutiles – Un risque de perdre le lien avec la « souche » d’origine – Absence de mutualisation dans l’acquisition de logiciels libres communs à plusieurs administrations – Absence de compatibilité avec certains logiciels propriétaires

« libre » ne veut pas dire « gratuit ». Une fois téléchargé, le logiciel libre génère des coûts induits qui ne sont pas à minimiser. C’est le leitmotiv du Syntec numérique, qui met en avant le fait que derrière le logiciel libre, « il y a des coûts de développement et de maintenance qui peuvent être conséquents lorsque ces …

JEAN-CLAUDE MOSCHETTI/RÉA

« Nous ne sommes pas aux manettes pour imposer ou décider à la place des acteurs. »

OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 81


EXPERTISE e-services publics

… produits sont déployés à grande échelle, nécessitant une batterie d’informaticiens pour adapter le système au besoin de telle ou telle administration ».

Souplesse inégalable Côté gouvernement, on le reconnaît aussi. « Si les droits sur le logiciel libre ne sont associés à aucune compensation financière, cela ne veut pas dire qu’il n’en coûte rien de mettre en œuvre et d’utiliser du logiciel libre », peut-on lire dans la circulaire de 2012. « En effet, comme pour tout logiciel, poursuit le texte, il est nécessaire de l’intégrer dans son système d’information et de s’assurer de son maintien en conditions opérationnelles ainsi que de le faire évoluer en fonction de son besoin ». Si les administrations n’ont rien à débourser au moment de l’acquisition, elles doivent néanmoins débloquer des moyens au stade de l’intégration du système, pour corriger les bugs, former les personnels à l’outil, mais aussi pour la maintenance et le développement. Le logiciel a cette caractéristique d’être modulable en fonction des besoins exprimés par les utilisateurs, avides de nouvelles applications ou fonctionnalités, en termes de sécurité par exemple. Une souplesse inégalable et qui pèse dans la balance en faveur du libre. Les administrations sont moins dépendantes des multiples versions mises à jour par un éditeur propriétaire et du changement imposé des grilles tarifaires. Contrepartie de cette liberté, l’administration doit pouvoir

soit compter sur ses ressources internes, soit faire appel à des sociétés prestataires, lesquelles ont tendance à glisser vers un modèle économique proche de celui des éditeurs historiques (lire ci-contre). « On remplace donc un modèle coût de licence/coût de maintenance, par un modèle coût de service », comme l’indique la circulaire. À l’arrivée, la note risque de grimper. Par souci d’économie, les administrations ont pris les devants en mutualisant les fonctions « supports et maintenance » à travers des marchés publics forfaitaires, ce qui permet de faire diminuer les coûts d’intervention. Mais il reste encore difficile de calculer à combien se chiffre le maintien opérationnel d’un logiciel ou son développement. Globalement, « le calcul est très compliqué », admet Jean-Séverin Lair, directeur des systèmes d’information du ministère de la Culture.

LE RECUL DU « FREE-FREE » Le logiciel libre, c’est avant tout une philosophie, marquée par une certaine idée d’indépendance, de souveraineté et de souplesse pour les utilisateurs, libres d’accéder au code source pour le modifier et partager ensuite leurs innovations avec toute une communauté. Ce modèle, imaginé par Richard Stallman, le père de l’open source, fondé sur la liberté, s’oppose à celui développé par les éditeurs propriétaires. Ceux-ci monnayent un certain prix les licences d’utilisation de leurs logiciels. En réalité, cette distinction n’a plus vraiment sens, tant l’offre s’est diversifiée. Ainsi, des communautés ou fondations collectent des crédits afin de rémunérer des développeurs pour assurer l’évolution des logiciels. Mieux, des éditeurs proposent des produits pour partie sous licence classique propriétaire et pour partie sous licence libre, mais souvent en retard par rapport à l’autre version. Ce modèle appelé « freemium », aujourd’hui largement répandu, doit être utilisé avec prudence, selon la circulaire de Matignon. Le risque étant de rebasculer vers un modèle 100 % propriétaire, une fois le client fidélisé. Les administrations, pour s’en préserver, peuvent alors opter pour une solution 100 % open source de classe « industrielle ». Le distributeur de logiciels libres Red Hat propose, au-delà de la maintenance sur le long terme (jusqu’à treize ans), un support illimité en contrepartie cette fois d’un abonnement couvrant les serveurs.

Vision « impressionniste » Interrogés par la députée Isabelle Attard, via une série de questions parlementaires sur leurs dépenses de logiciels, les ministères ont botté en touche, incapables de dire clairement ce que leur coûte le libre par rapport au logiciel propriétaire. La même formule alambiquée revient en boucle dans les réponses ministérielles publiées dans le courant de l’été dernier : « Sur le plan comptable, les outils de recueil disponibles n’ont pas été conçus pour isoler spécifiquement ce type de dépense ». Certains ministères, parmi la dizaine qui a répondu, soulignant que « la struc-

ture et l’organisation du marché du logiciel ne facilitent pas une objectivation des coûts via le suivi des fournisseurs ». En clair, les outils comptables, malgré les avancées offertes par Chorus, ne permettent pas pour l’heure d’isoler les différents coûts des logiciels utilisés. Quelques ministères osent pourtant lâcher des chiffres sur les licences : les ministères de l’Écologie et de l’Égalité des territoires, qui partagent des systèmes d’information, affirment dans leur réponse à la députée dépenser environ 6 millions d’euros par an en logiciels

DR

« Les économies réalisées sur l’achat de licences permettent largement de couvrir les frais de maintenance et de support des logiciels libres. » Patrice Bertrand, président du Conseil national du logiciel libre

82 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

propriétaires depuis 2008. Au secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, on se contente aujourd’hui de cette vision « impressionniste », partielle des coûts du libre, en attendant que les outils de comptabilité analytique s’affinent en 2014. On en saura alors un peu plus sur ce que dépensent ou économisent les administrations. Mais nombre d’experts se sont fait leur religion, dans le sens où, pour eux, « les économies réalisées sur l’achat de licences permettent largement de couvrir les frais de maintenance et de support des logiciels libres », juge ainsi Patrice Bertrand, président du Conseil national du logiciel libre. Les écarts varient de 1 à 4, voire de 1 à 10, sur certains systèmes de messagerie ou de base de données, l’un des domaines où le libre n’a pas encore fortement percé dans les administrations. ● Xavier Sidaner


Le Club des Acteurs DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

RENCONTRES

Le Club organise tout au long de l’année des rencontres informelles entre ses membres et des acteurs publics de premier plan. Les membres du Club sont associés aux Rencontres des acteurs publics, point d’orgue annuel des activités du Club.

ÉCHANGE D’EXPÉRIENCE En toute indépendance, acteurs et observateurs de premier niveau y débattent du contenu et des effets de l’action publique.

ACTION

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TOUS ACTEURS DE LA PERFORMANCE PUBLIQUE

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AUX EXPERTS Retrouvez chaque mardi les tribunes des membres du Club des acteurs de la performance publique

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La parole

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dans La Newsletter d’Acteurs publics

Elsa Bourgeois représentera dorénavant Randstad au sein du Club de la performance publique. Elsa Bourgeois, diplômée d’HEC, a débuté sa carrière chez Nestlé et l’a poursuivie chez Decathlon au poste de responsable marketing communication puis chez Expectra comme directrice marketing. Depuis janvier 2011, elle était directrice innovation chez Randstad ● et vient d’être nommée directrice du secteur public de Randstad ●

et sur www.acteurspublics.com

elsa.bourgeois@randstad.fr

Moderniser via la certification Les opérateurs de l’État sont confrontés à un double objectif d’optimisation financière et de maintien d’un haut niveau de prestations. Dans le même temps, les Français s’interrogent sur l’efficacité de l’emploi des fonds publics. Pour répondre à cette attente légitime, l’État, depuis 2006, a mis en œuvre un dispositif, certes peu médiatique mais vertueux, de certification de ses comptes par la Cour des comptes. La France est ainsi actuellement le seul pays d’Europe à faire certifier ses comptes de la sorte. Une trajectoire qui devrait déboucher à terme sur une consolidation des comptes de l’ensemble du secteur public. De nombreux opérateurs publics se sont également engagés

depuis quelques années dans ce dispositif de certification par des commissaires aux comptes, comme les grands ports, les universités, les établissements de recherche… L’obligation de certification des comptes va grandissante avec de nouveaux opérateurs comme les hôpitaux, les agences nationales comme les agences de l’eau ou l’Ademe et d’autres opérateurs dans le domaine de la culture : la BNF, le Centre GeorgesPompidou, etc. Plus récemment, sous l’impulsion de la Cour des comptes et comme l’a rappelé le président de la République, les collectivités locales ont été incitées à se préparer à cette démarche. Ce processus de certification devrait être de nature à contribuer

MARC BOUDER

des comptes publics à « rassurer » les citoyens sur l’efficience de l’utilisation des fonds publics pour au moins trois raisons. Premièrement, le « brevet de bonne conduite » délivré par un professionnel indépendant confirme la fiabilité de l’information financière vis-à-vis des citoyens, de la tutelle et des financeurs publics et privés. Deuxièmement, le processus de certification, loin de n’être qu’une démarche « comptable », pousse les opérateurs à disposer d’outils de gestion et à piloter les activités. Enfin, la certification de l’information comptable et financière permet aux décideurs, tutelles, régu-

lateurs et autres tiers d’analyser la situation financière d’un opérateur en toute objectivité, de se doter de capacités de comparaison ou encore d’évaluer sur des bases fiabilisées l’efficacité des politiques publiques. Ainsi, l’extension de cette procédure de certification des comptes apparaît-elle comme une démarche constructive de modernisation de la sphère publique. ●

Serge Castillon, associé Mazars, secteur public, activité audit financier

serge.castillon@mazars.fr

Baromètre de la communication locale Epiceum – Harris Interactive

DR

Le journal des collectivités reste le moyen d’information sur la vie locale préféré des Français, alors que se consolide le site Internet officiel de la collectivité et qu’émergent de nouveaux supports digitaux. Les Français déclarent rechercher une information qui leur serve et apprécient celle émise par les échelons territoriaux les plus proches. Ainsi la mairie est, de loin, l’émet-

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teur qui donnerait la meilleure information (63 %), celle la plus crédible (66 %), la plus utile (70 %). Derrière la mairie, l’intercommunalité effectue une percée remarquée, devenant la collectivité donnant l’information la plus proche des habitants. Retrouver tous les résultats de ce baromètre sur : http://www.epiceum.com/barometre2013/ Resultats/formulaire-barometre.html


Acteurs de la performance publique LES CLUBS

Évaluation

Dialogue de gestion

des politiques publiques

Rappelons que c’est la Lolf qui a défini ce concept pour l’État et que les collectivités locales s’y sont très vite intéressées, confrontées elles aussi à l’augmentation de la contrainte financière qui touche l’ensemble des acteurs publics. La prise de conscience de son utilité dans les collectivités s’appuie sur la mobilisation collective des acteurs publics dans les processus de modernisation et de performance. Son déploiement dans un nombre croissant de collectivités illustre une évolution profonde du management public local de trois ordres. L’élément humain a été replacé au cœur du dispositif, les approches strictement « outils » ayant atteint leurs limites. Grâce au dialogue de gestion, véritable processus d’échanges, l’implication des acteurs est renforcée et la réussite des démarches de performance assurée. L’identification précise des acteurs mobilisés et la définition précise du rôle et de la contribution de chacun ont beaucoup progressé. Les nouvelles modalités de travail, instituées en règles du jeu pérennes et transversales, ont décloisonné les processus internes de la collectivité, notamment en matière d’élaboration budgétaire. Ceci a favorisé l’appréciation des ressources allouées, au regard des priorités stratégiques et du niveau de service rendu. Des temps forts ont été dédiés à l’échange autour des bilans, orientations, décisions et arbitrages. Le pragmatisme, en appuyant le processus de dialogue et d’échanges sur les dispositifs existants, la création d’outils spécifiques ou nouveaux prend appui sur les supports existants. Toutes ces bonnes pratiques sont exposées dans le guide pratique du dialogue de gestion* rédigé par un groupe de praticiens experts et coédité avec l’Afigese. ●

Yves Salery, associé, KPMG secteur public

ysalery@kpmg.fr *www.afigese.fr

A. P. : Pourquoi une telle publication ? J. E. : Pour nous, l’évaluation des politiques publiques est l’un des défis majeurs des administrations si elles veulent arriver à améliorer leur efficacité, leur efficience et leur performance dans le contexte actuel de redressement des finances publiques. C’est pourquoi nous accompagnons depuis très longtemps les acteurs publics dans l’analyse et la mise en place de leurs politiques. Cette étude comparative dresse un panorama des pratiques d’évaluation dans 6 pays (Australie, Canada, États-Unis, Espagne, Italie, et Royaume-Uni) et les met en perspective afin d’identifier les grandes tendances et bonnes pratiques. A. P. : Quels sont les enseignements que vous tirez de cette étude ? J. E. : L’étude permet de faire ressortir 4 enseignements majeurs pour la mise en place d’une démarche d’évaluation pérenne. Pour Deloitte, pour que cette démarche soit vertueuse, il faut rassembler un certain nombre de conditions essentielles. Premièrement, installer durablement une culture évaluative commune à l’ensemble des administrations et capitaliser sur les connaissances acquises. Puis mettre en place une véritable stratégie évaluative, basée sur la planification et la priorisation, et faire des évaluations un outil d’aide à la décision politique. Sans oublier de s’appuyer sur un dispositif de conduite des évaluations professionnalisé en y associant des experts issus du monde académique ainsi que des praticiens. Et enfin, mobiliser l’opinion publique avant, pendant et après la conduite des évaluations. A. P. : Quels enseignements en tirer pour la situation française ? J. E. : Le séminaire gouvernemental du 1er octobre 2012 relatif à la modernisation de l’action publique marque une rup-

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Rencontre avec Joël Elkaim, associé responsable « secteur public » du cabinet de conseil Deloitte, qui publie une étude internationale sur les démarches d’évaluation des politiques publique dans 6 pays.

ture par rapport à la période précédente et engage, selon la formule officielle, « un travail d’évaluation des politiques publiques partenariales avec l’ensemble des acteurs concernés (État, collectivités, organismes sociaux et opérateurs) pour construire une vision collective des enjeux, des finalités et des modalités de mise en œuvre de chaque politique publique ». Vous le constatez, cette démarche vise ainsi à installer une culture évaluative plus transparente et une communication accrue. Mais pour cela, il est essentiel d’assurer à la fois une vision partagée des objectifs et de la mise en œuvre des politiques publiques ; une orientation vers les bénéficiaires finaux ; l’adhésion et la mobilisation dans la durée de l’ensemble des acteurs concernés et la participation de l’opinion publique au débat sur les évaluations. ●

Joël Elkaim, associé responsable « secteur public », Deloitte

jelkaim@deloitte.fr

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JOEL SAGET/AFP

LES CLUBS Acteurs de la performance publique

Retraites : l’autre réforme La réforme des retraites qui a occupé les premières pages des journaux pendant des mois a abouti à un projet de loi qui a pris début octobre le chemin des assemblées pour une navette qui va durer jusqu’à fin décembre. Si l’essentiel des débats a porté sur les conditions d’équilibre financier des régimes de retraite, et plus précisément celles du régime général, il ne doit pas pour autant cacher l’autre volet, celui de l’organisation du système des retraites en France. L’un des axes promus par le gouvernement consiste, en effet, à simplifier et à rendre plus lisible pour l’usager un système

complexe : plus de 35 régimes de retraite couvrent les Français qui touchent, ou toucheront, en moyenne, 3,5 pensions par personne. Nous sommes tous, ou presque, des « polypensionnés ». Cette simplification passe par au moins deux mesures qui vont changer concrètement la vie de nos concitoyens. La création d’un guichet unique, avec un dossier en ligne, rassemblant toutes les informations, toutes les démarches et toutes les pièces justificatives, permettant au citoyen d’avoir une vision globale de sa retraite et d’effectuer une demande unique de retraite pour toutes ses pensions. La mise en place d’un simulateur,

86 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013

permettant à chacun d’anticiper, et donc d’optimiser sa retraite, entre décote-surcote, retraite progressive et tous les dispositifs offrant des marges de manœuvre au futur retraité. Pour cela, et c’est une nouveauté également, les moyens de mise en œuvre sont au rendez-vous, avec la création d’un organisme qui en prendra la responsabilité. Il s’appuiera et s’inspirera de l’exemple réussi du GIP Info retraite, qui a su, en moins de dix ans, créer pour tous les Français un droit effectif à l’information sur ce sujet. Des économies sont également à la clé puisque le gouvernement prévoit, grâce à ce guichet unique, des

économies de 200 à 300 millions d’euros par an dans la gestion des régimes de retraite. Dans l’ombre de la réforme « paramétrique » des retraites, ce bouleversement des services rendus aux usagers du système pourra donc démontrer, s’il répond aux attentes suscitées, l’importance du « choc de simplification » pour une politique publique de cette ampleur, puisque les dépenses liées aux retraites représentent près de 25 % des dépenses publiques en France. ●

Erik Linquier, directeur de l’activité de conseil d’Accenture auprès des organismes de retraite

erik.linquier@accenture.com


Acteurs de la performance publique LES CLUBS

La fonction publique est engagée depuis plusieurs années dans un vaste programme de modernisation qui touche tous les secteurs et en particulier la gestion des ressources humaines avec la mise en place d’une gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC). Le circuit de l’information de la paye des agents de l’État – par exemple – est aujourd’hui morcelé. Pour répondre à cette recherche d’efficacité, une chaîne continue d’informations, de la gestion administrative au calcul de la paye, gérée par l’Opérateur national de paye (ONP), doit être mise en place. Pour atteindre cette ambition, des changements de plusieurs ordres doivent être envisagés. Premièrement, une évolution de l’application de la réglementation pour plus d’équité et de transparence par un ensemble homogène de règles de gestion dans la fonction publique de l’État. Cette évolution permet une rémunération exacte et rapide des activités professionnelles des agents en les traduisant dès le mois courant en paye. Puis une évolution des organisations GA-Paye dans un pôle d’expertise dédié (PESE). En cible, un modèle plus mutualisé, fondé sur une forte automatisation et une mise en qualité globale de la chaîne RH-GA-Paye. Le gestionnaire de GA-Paye voit son métier s’enrichir et se professionnaliser par une maîtrise de bout en bout des dossiers dont il a la charge. Et enfin, une évolution des outils et des systèmes d’information. L’objectif étant de passer d’une double saisie des données RH-GA dans les SIRH et dans les systèmes de paye à des SIRH traitant l’ensemble des activités de RH, de GA et de paye en une saisie unique. L’important, dans les années à venir, sera donc la maîtrise de cette chaîne de bout en bout. L’atteinte de cet objectif ne sera possible qu’en ayant une parfaite connaissance des administrations et de leurs partenaires. Pour aider l’administration à se moderniser, il faut l’aider à décloisonner les organisations et à prendre le recul nécessaire à la bonne compréhension des enjeux des différentes parties prenantes d’un tel projet. ●

Jean-François Remy, vice-président « secteur public », Capgemini

jean-francois.remy@capgemini.com

Open innovation Rencontre avec Muriel Charbonnier, directrice grands comptes, gouvernement et institutions chez Orange. La donnée brute générée par les individus et les organisations permet de créer de nouvelles ressources pour les acteurs publics. A. P. : Quels sont les enjeux de l’ouverture des données pour l’État ? M. C. : Le premier enjeu est d’ordre économique : l’utilisation de ces données via l’open innovation doit permettre de faire émerger des start-up et contribuer à la croissance du pays. C’est également un nouveau levier du dynamisme des territoires, nombre de projets étant amenés à se développer au niveau local. Le deuxième enjeu est de renforcer la proximité avec les citoyens en favorisant, au travers de plates-formes de mise à disposition de données ouvertes, des échanges directs entre les collectivités, les administrations et les citoyens sur des forums, voire dans des communautés d’intérêts spécifiques, permettant ainsi de développer des services toujours plus adaptés. Enfin, cette ouverture doit constituer un vrai pas en avant dans la démarche de modernisation de l’État en contribuant à fluidifier les relations intra et interadministrations et en ouvrant la voie à de nouvelles perspectives en matière de simplification des procédures administratives. A. P. : Quels sont les facteurs clés de succès d’une telle démarche ? M. C. : Faciliter la réutilisation pour tous de ces données ouvertes requiert

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Moderniser la chaîne RH

d’abord de proposer la ressource dans un format exploitable, de fournir ensuite un middleware adapté aux besoins des différents utilisateurs et de rendre cet effort aussi ludique que possible. Nous sommes convaincus que l’État, au travers de la mission Etalab, a un rôle clé à jouer, celui de chef d’orchestre entre les dynamiques locales, nationales et globales. Etalab a aussi vocation à faciliter la standardisation par une nomenclature commune, des métamodèles, des standards imposés d’exposition des données et de formats ouverts et utilisés par d’autres, favorisant ainsi l’interopérabilité avec des services et plates-formes partenaires étatiques ou privées. A. P. : Quel rôle votre société veut-elle jouer dans ce contexte ? M. C. : Nous avons souhaité être un partenaire

de l’État dans cette démarche d’ouverture des données publiques en étant membre actif dans le jury Dataconnexions pour la sélection de projets innovants et en contribuant à des initiatives au niveau local (Mayenne, Caen, Bouches-duRhône) et international (D4D en Côte-d’Ivoire). Aujourd’hui, nous avons l’ambition d’aller encore plus loin dans le domaine en accompagnant les administrations dans cette démarche d’ouverture (conseil, formation, pilotage de projet), en enrichissant les données publiques par des données Orange et en mettant à disposition des capacités et des ressources technologiques (portails clés en main) pour stocker, traiter et analyser les données, facilitant ainsi leur réutilisation et leur enrichissement. ● muriel.charbonnier@ orange.com

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LES CLUBS Acteurs de la performance publique

Excellence du service

MYCHELE DANIAU/AFP

Open data, simplification des démarches, dématérialisation des services… Les services publics ne sont pas en reste dans la modernisation de la relation usagers-citoyensconsommateurs. Pour autant, c’est autour de la qualité de l’expérience vécue que se détermine la satisfaction des usagers. C’est à partir de ce constat que certains organismes publics européens, à l’instar du groupe La Poste, se sont engagés dans la rédaction d’une norme sur l’excellence du service au sein du Comité européen de normalisation.

QUESTIONS À… Michel Cottura, directeur de la gestion des risques de Pôle emploi agents, dans une période de crise où la qualité du service rendu par Pôle emploi doit être la meilleure possible. Quels sont les principes de mise en œuvre de cette stratégie de pilotage des risques ? S’interroger sur la finalité d’une telle stratégie est fondamental. Il ne s’agit pas d’éliminer tous les risques, au détriment de la souplesse de fonctionnement de l’ensemble de la structure. L’objectif consiste en réalité à améliorer la qualité de service en renforçant la liberté d’action, la confiance et l’autonomie des décideurs. Or c’est la connaissance de la réalité du terrain qui détermine la capacité des managers à prendre les bonnes décisions, quel que soit leur niveau hiérarchique. Plus concrètement, l’analyse des activités de Pôle emploi permet d’en identifier et d’en réduire les faiblesses potentielles. Pour bien évaluer et

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contrôler ces risques, plusieurs outils de quantification existent. Pôle emploi dispose ainsi de son propre système d’information, qui évalue la sensibilité par rapport à un risque donné, sa probabilité de réalisation et ses conséquences possibles. Établir la criticité d’un risque permet de savoir si on doit le traiter et, le cas échéant, les actions qu’il convient de mettre en place pour y parvenir. Comprendre son environnement pour prendre des décisions rapides et efficaces est donc plus important que de chercher à se protéger à tout prix. Quels résultats peut-on observer sur l’activité de Pôle emploi ?

DR

Comment la politique de gestion des risques s’élabore-t-elle chez Pôle emploi ? La stratégie de gestion des risques s’appuie sur les pratiques d’excellence observées dans les grandes entreprises. Les modèles classiques sont bien entendu ajustés aux spécificités des missions de Pôle emploi, par exemple, l’activité de versement des allocations impose de maîtriser les flux financiers (plus de 30 milliards d’euros par an). Les activités quotidiennes de Pôle emploi génèrent par ailleurs leurs propres risques : comment assurer la continuité des missions ? Comment garantir la sécurité des personnels, le bon traitement des demandes d’allocation ou encore la stabilité du système d’information ? Ces questions sont au cœur d’un pilotage des risques qui s’adapte à la fois aux grands projets stratégiques de transformation, mais aussi à la réalité quotidienne des

Pôle emploi s’appuie sur une approche d’autoévaluation portant sur ses activités sensibles qui se matérialisent par un « Référentiel de contrôle et de maîtrise de l’activité ». Celle-ci est associée à plus de 200 000 contrôles de dossiers qui sont ainsi effectués chaque année. Un réseau d ’ o b s e rvation de 42 agences permet en outre d’éva-

luer périodiquement les risques en matière de délivrance de service, de déploiement, de climat social, etc. S’il est difficile d’apprécier à ce jour quantitativement les résultats, nous constatons néanmoins un développement de la culture de la prise de risque, une culture qui doit essaimer dans l’ensemble de l’organisation à tous les échelons, comme une véritable valeur managériale. ● michel.cottura@ pole-emploi.fr


Territoires durables LES CLUBS

La parole

aux experts

Transition écologique : un défi à financer

L

Scénarios macroéconomiques

Pour toute information sur le Club des territoires durables et ses activités, contactez Bastien Brunis au 01 46 29 29 24 ou par e-mail : bbrunis@acteurspublics.com

Les citoyens pourront s’approprier la démarche de transition si elle est portée avec force et constance au plus haut niveau de l’État. Le cadre financier doit être construit dans le dialogue avec les représentants de la société civile organisée. Pour tracer le chemin, il sera nécessaire de disposer de

scénarios macroéconomiques aboutis, avec un spectre large permettant notamment de bien mesurer le nombre d’emplois net créés, les conséquences pour les entreprises et pour les ménages. Inciter les investisseurs à préférer la transition écologique peut se faire de deux façons. D’une part, en rendant la transition écologique économiquement attractive : le signal-prix permet ainsi de marquer les préférences collectives. Cependant, sa mise en œuvre demande de la finesse, en tenant compte de ses effets économiques et sociaux. Faciliter l’accès au crédit est une autre voie possible. Par exemple, la Banque européenne d’investissement peut jouer un rôle majeur au service de la transition écologique, par des prêts spécifiques, d’autant plus si elle est refinancée pour cela à un coût suffisamment bas par la Banque centrale européenne. D’autre part, une information environnementale objective doit être développée et rendue accessible pour que les investisseurs puissent mesurer les conséquences écologiques de leur choix. Préparé en 2008, le programme

d e s investissements d’avenir a été pour partie l’instrument d’une relance verte. Il est temps d’enclencher une nouvelle phase des investissements d’avenir, d’une ampleur au moins égale à la première et prenant en compte de manière transversale les enjeux de la transition écologique. Les annonces du Premier ministre, en juillet dernier, vont dans cette direction, mais demandent encore à être précisées. ● Gaël Virlouvet, rapporteur de l’avis du Conseil économique, social et environnemental « Financer la transition écologique et énergétique » gael.virlouvet@lecese.fr

Le prochain déjeuner du Club Le 15 octobre : MARC BOUDER

Acteurs publics a créé le Club des territoires durables. Véritable laboratoire où s’analysent les initiatives d’aujourd’hui et les stratégies de demain, le Club est une base pour l’action.

a transition écologique est un défi. Si les enjeux environnementaux sont à présent bien appréhendés, si la manière d’y répondre se construit peu à peu, au gré des conférences environnementales, la question du financement de la transition restait entière. Le CESE a donc travaillé pendant plusieurs mois sur le projet d’avis « Financer la transition écologique et énergétique ». L’approche s’est voulue large. Elle a porté à la fois sur le financement public et le financement privé. Elle a permis de confronter les enjeux environnementaux – climat, biodiversité, matières premières – aux questions de compétitivité, d’emploi et de bien-être. La transition écologique repose sur la mobilisation des acteurs, sur l’innovation et sur l’amélioration des infrastructures. Elle demande un effort financier important. Pour être accepté, celui-ci doit répondre à plusieurs conditions. D’abord, il doit être réparti de manière équitable entre les différents acteurs. Il doit également être compris, approprié par les citoyens. Il doit surtout s’inscrire au service d’une nouvelle prospérité, pourvoyeuse d’emplois, de dynamisme économique et de bien-être.

Cécile Duflot, ministre de l’Égalité des territoires et du Logement

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FOTOLIA

Ressources

Transports

MOBILE Open data

FOTOLIA

DOCUMENTS

Strasbourg vient de mettre en ligne un vaste ensemble de données publiques à la disposition du grand public et des entreprises : fréquentation des cantines, données financières, trafic routier, etc. Pour promouvoir les services sur smartphones qui pourraient être créés à partir de ces données, la collectivité organise jusqu’à fin octobre un concours d’applications. www.strasbourg.eu

Voyages connectés La régie départementale des transports des Bouches-duRhône équipe ses 31 navettes d’un réseau wifi gratuit accessible depuis les smartphones, tablettes ou ordinateurs portables des usagers. Le réseau permet aussi de diffuser en temps réel des informations sur le trafic (circulation, actualités…) sur deux écrans installés dans tous les autocars. www.rdt13.fr

Quelle rénovation urbaine ?

Auteur : Renaud Epstein Éditeur : Les Presses de Sciences-Po Nombre de pages : 384 Prix : 25 euros

Lancée au début des années 2000, la transformation des grands ensembles urbains – 500 quartiers rasés et reconstruits – s’est accompagnée d’une réforme institutionnelle sans précédent, la Réate, qui a entraîné le retrait de l’État des territoires. C’est donc aujourd’hui à distance, privé d’une partie de ses anciens relais dans les services déconcentrés et avec des moyens limités que l’État pilote la politique de la ville. Renaud Epstein, enseignant à Sciences-Po, tente d’esquisser ce que seront les grandes orientations des prochaines décennies dans ce contexte de « démolition-reconstruction » de l’État. Très instructif…

Avions, trains, bus, bateaux… La Commission européenne lance une application mobile gratuite sur les droits des voyageurs en matière de transport dans tous les pays de l’Union. Ou comment réagir en cas d’incident, quelle que soit sa destination, à l’intérieur d’un État membre ou à l’extérieur de l’Union. Transparence de l’information sur les prix, annulation d’un vol, retard, perte de bagages ou accident : l’application, disponible en français, balaye tous les désagréments possibles. www.ec.europa.eu

Auteur : préfecture de police Éditeur : Dila Nombre de pages : 156 Prix : 10 euros

ÉVÉNEMENTS 2 au 4

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9 au 11

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10 et 11

Intercommunalité

Climat

Départements

Numérique

Santé

Organisateur : ADCF Lieu : Montpellier Site : www.adcf.org

Organisateur : IGPDE Lieu : La Défense Site : www.institut.minefi.gouv.fr

Organisateur : ADF Lieu : Lille Site : www.departements.fr

Organisateur : FHF Lieu : Paris Site : www.fhf.fr

Organisateur : EHESP Lieu : Redon (Ille-et-Vilaine) Site : www.ehesp.fr

Les projets de territoire de la prochaine mandature (2014-2020) seront au menu de l’assemblée générale de l’Assemblée des communautés de France (ADCF) et de la convention nationale de l’intercommunalité. Le thème : « Nos ambitions ». Marylise Lebranchu devrait intervenir sur la décentralisation.

Dans le cadre de son cycle « Défi climat 2013 », l’Institut de la gestion publique et du développement économique et l’Institut de formation de l’environnement proposent un échange sur les politiques agricoles et forestières et le climat, ouvert aux fonctionnaires, aux élus, aux chercheurs…

Comment assurer l’avenir financier et institutionnel des départements ? C’est le casse-tête de Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des départements de France qui, à l’occasion du congrès annuel de l’ADF, évoquera l’enjeu de la réforme de la décentralisation et le poids budgétaire des allocations de solidarité.

« Hôpital numérique, enjeux et opportunités ». Tel est le thème de la « journée actualité » de la Fédération hospitalière de France, pendant laquelle sera abordée la montée en puissance des technologies de l’information et de la communication, présentée comme une réponse à la nécessité d’une gestion budgétaire efficace.

La chaire de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé de l’École des hautes études en santé publique organise un colloque, ouvert aux ARS, collectivités, et chercheurs sur les nouveaux modes de promotion de la santé des populations. Ou comment agir sur les « déterminants sociaux » de la santé.

90 ■ ACTEURS PUBLICS N°99 OCTOBRE 2013


Ressources Par Sylvain Henry FOTOLIA

FOTOLIA

CONNECTÉ

Auteur : Insee Téléchargement : www. insee.fr, document intitulé « Légère baisse des salaires nets moyens en euros constants dans les trois versants de la fonction publique en 2010 et 2011 »

Entrepreneuriat Bercy vient d’ouvrir un « espace contributif » en ligne pour donner la parole aux usagers sur son projet d’école de l’entrepreneuriat. www.redressement-productif.gouv.fr/ contributions-ecole-entrepreneuriat

Langue française Avec le site « Parlons français c’est facile ! », le Quai d’Orsay espère donner un nouvel élan à la francophonie dans le monde. http://parlons-francais.tv5monde.com

Départements Avec son nouveau site, l’Assemblée des départements de France entend valoriser les expériences innovantes menées par les conseils généraux. www.departements.fr

100 ans de PJ

Synchronisez votre agenda sur www.acteurspublics.com

5 et 7

Ruralité

Agriculture

Organisateur : AMRF Lieu : Port-sur-Saône (Haute-Saône) Site : www.amrf.asso.fr

Organisateur : ENA Lieu : Bruxelles Site : www.ena.fr

L’égalité des territoires, c’est pour quand ? Une question sensible débattue au congrès national de l’Association des maires ruraux de France. Des enjeux sensibles tels que la décentralisation, les rythmes scolaires, les contraintes budgétaires ou l’aménagement numérique seront évoqués.

RECRUTEMENT La police nationale vient d’ouvrir un site consacré à ses recrutements, qui détaille ses concours (inscription, préparation) et les emplois proposés. Les professionnels de la police peuvent échanger via un blog sur leurs missions et sur leur quotidien. www.lapolicenationalerecrute.fr

Créée en 1913, la direction de la police judiciaire fête son centenaire. Liaisons, le trimestriel de la « PJ », lui rend un hommage appuyé via un volumineux dossier spécial : « 100 ans de police judiciaire parisienne ». Un siècle d’affaires judiciaires et d’enquêtes qui ont mobilisé des dizaines de milliers d’agents et inspiré écrivains, cinéastes ou dessinateurs de bande dessinée. Parcourir cette histoire du 36 quai des Orfèvres, c’est plonger dans les arcanes d’une institution unique composée de brigades ultraspécialisées : crimes, stupéfiants, proxénétisme, délinquance économique…

12 et 13

Une étude sur les salaires

WEB

L’objectif du séminaire de l’ENA sur l’avenir de l’agriculture en Europe : rencontrer les acteurs politiques et institutionnels des secteurs agricole et environnemental, appréhender l’évolution des grandes politiques impactant l’agriculture, comprendre la conception des politiques publiques européennes.

PRÉVENTION Le conseil général et le service départemental d’incendie et de secours de l’Essonne diffusent des conseils de prudence via une nouvelle « Web-série ». Des vidéos – deux par mois – animées par deux officiers, Jessica et Arnaud, qui abordent la prévention des risques en matière de noyade, les accidents de transport scolaire, les blessures pendant une activité sportive, etc. www.sdis-91.fr, www.essonne.fr

MÉTRO La RATP investit les réseaux sociaux en ouvrant une page Facebook qui se veut ludique : diffusion d’informations sur les événements organisés autour de ses stations, bons plans sorties, etc. La Régie a par ailleurs lancé une application mobile à destination des touristes de la capitale, « Visiter Paris en métro ». www.ratp.fr

La dernière enquête de l’Insee sur les salaires dans la fonction publique fait apparaître une baisse des rémunérations en 2011. Les agents de l’État ont touché en moyenne 2 430 euros nets par mois, soit une réduction de leur pouvoir d’achat de 0,1 % en euros constants. Les agents territoriaux ont perçu en moyenne 1 820 euros (– 0,8 %) et les agents hospitaliers 2 210 euros (– 0,6 %). Des écarts de rémunérations qui s’expliquent par des structures différentes en matière de catégories statutaires, de sexe et d’âge, constate l’Insee. Un agent sur 10 appartient à la catégorie A dans les collectivités contre 6 agents sur 10 dans la fonction publique d’État.

Auteur : DGAFP Nombre de pages : 24 Téléchargement : www.fonction-publique. gouv.fr (taper « PFRH »)

Mobilités Action sociale, formation interministérielle, gestion prévisionnelle des ressources humaines de l’État en région… Le bilan d’activité 2012 des plates-formes régionales d’appui interministériel à la gestion des ressources humaines détaille toutes les initiatives de ces « PFRH » créées en 2009 pour accompagner les services déconcentrés dans la mise en œuvre de la réforme de l’administration territoriale de l’État (la Réate). À l’image de la plate-forme Nord-Pasde-Calais, qui développe des mobilités inter-fonction publique, ou de celle du Languedoc-Roussillon, qui œuvre à « dynamiser » la carrière des agents.

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Lire, écouter, voir

« Le Bien commun » Une arme qui bouleverse l’éthique militaire : le drone

PODCAST À NE PAS MANQUER

Magazine Durée : 30 minutes Présentateur : Antoine Garapon

Invité : Daniel Brunstetter, professeur de sciences politiques à l’université de Californie (UC Irvine)

Des robots en guerre

Genre : documentaire Réalisateur : Stéphane Mercurio Durée : 1 h 40 Prix : 15 €

LIVRES

FOTOLIA

DVD

frappes aériennes sur des bâtiments stratégiques en Irak : les attaques de drones se sont multipliées ces dernières années, faisant miroiter l’image d’une guerre « propre ». Cette nouvelle manière de gérer les

Peut-on faire la guerre sans soldats ? L’utilisation de drones peut-elle être considérée comme n’importe quelle autre intervention militaire ? Assassinats ciblés de terroristes présumés au Pakistan ou

Auteur : Dominique Porté Éditeur : Cairn Nombre de pages : 291 Prix : 18 €

À l’ombre de la République

Frêche, l’héritage sans partage

Pour la première fois, une équipe de tournage accompagne au quotidien les équipes du contrôleur général des lieux de privation de liberté, jeune institution chargée de veiller au respect des droits fondamentaux dans les prisons, les commissariats ou les hôpitaux psychiatriques. Une plongée parfois glaçante au cœur du monde carcéral, de ses codes et de ses acteurs méconnus. Voilà un documentaire remarquable, À l’ombre de la République, sorti en salles en 2012 et désormais disponible en DVD, qui loin des clichés met en lumière les vices des lieux d’enfermement – solitude, brimades, exiguïté, manque d’hygiène… – de la maison d’arrêt de femmes de Versailles, de la nouvelle prison de Bourg-en-Bresse, de l’hôpital psychiatrique d’Évreux et de la centrale de l’île de Ré. Pour mieux esquisser des pistes de réflexion sur l’évolution des conditions de détention en France. Visiblement, il y a urgence. S. H.

Qui en 2014 pour reprendre le flambeau du tonitruant Georges Frêche, dont l’ombre n’en finit plus de planer sur Montpellier ? À l’approche des municipales, adversaires et héritiers sont déjà en rangs serrés sur la ligne de départ. À gauche d’un échiquier divisé, Jean-Pierre Moure, président de l’agglo, Hélène Mandroux, la maire sortante de la ville, ou encore Philippe Saurel, son adjoint à la culture, sans oublier Christian Bourquin, le président du conseil régional, font face à une droite qui entend prendre sa revanche sur quarante ans d’hégémonie socialiste. Sur la place de la Comédie, s’écrit une nouvelle page de la vie politique de la cité languedocienne que s’attache à décrypter l’historien Dominique Porté. Plongeant tour à tour dans les profils, les forces et les faiblesses des personnages de cette pièce de théâtre, il donne les clés pour mieux comprendre l’enjeu d’un scrutin qui augure d’une nouvelle ère. X. S.

PLAY TV

conflits a pourtant bouleversé la notion du droit à faire la guerre – jus ad bellum – et d’éthique sur le champ de bataille – jus in bello –, imposant au droit international une nécessaire adaptation.

« L’argent, le sang et la démocratie » Le 15 octobre à 20 h 50

Auteur : Éric Normand Éditeur : Gascogne Nombre de pages : 115 Prix : 10 €

Bayonne 01.03.2012 Tout n’avait donc pas été écrit sur la défaite de Nicolas Sarkozy. Voilà maintenant qu’un journaliste cherche à expliquer cet échec au travers d’un déplacement raté à Bayonne. C’était le 1er mars 2012, au moment où le candidat de l’UMP commençait à refaire son retard sur François Hollande. Une visite improvisée dans une terre agitée politiquement, polluée par l’hostilité de plusieurs adversaires : des nationalistes et des opposants à la ligne LGV, notamment. Personne ne retiendra les timides promesses faites ce jour-là sur les prisonniers politiques ou les revendications institutionnelles. La France entière ne verra, sidérée, que les images d’un Président-candidat insulté, pris à partie et finalement débordé malgré la présence surabondante des forces de sécurité. Si le récit méticuleux de cette séquence met en lumière l’impopularité du candidat, il ne saurait cependant apporter les clés d’une défaite éminemment complexe à décrypter. P. L.

Documentaire inédit Durée : 1 h 25 Réalisateurs : Jean-Christophe Klotz et Fabrice Arfi

Sombre affaire Quel rapport unit l’attentat qui coûta la vie à 11 employés de la direction des constructions navales de Cherbourg, à Karachi (Pakistan) en 2002, au financement de la campagne présidentielle d’Édouard Balladur en 1995 ?

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Ce documentaire s’attache à démêler les entrelacs d’une affaire qui n’a pas encore trouvé sa conclusion, l’instruction étant toujours en cours. S’appuyant sur l’enquête du journaliste de Médiapart Fabrice Arfi, le film

donne la parole à bon nombre de protagonistes – juges, anciens ministres de la Défense, ex-agents secrets, familles de victimes – d’une affaire où se mêlent deux maux de notre époque : terrorisme et corruption.


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« Service public » À la bourse : la morale, une valeur en hausse ?

Magazine Durée : 51 minutes Présentateur : Guillaume Erner Invités : Georges Ugeux, ancien vice-président de la Bourse

de New York, Judith Assouly, sociologue, consultante en déontologie auprès d’établissements financiers, Marc Roche, correspondant du Monde à Londres.

Les leçons de la crise mieux contrôler le secteur bancaire fait consensus. A-t-on réussi à introduire plus d’éthique dans la logique financière ? De la City londonienne aux États-Unis, de plus en plus d’établissements font appel à des

Auteure : Nicole Borvo Cohen-Séat Éditeur : Les éditions Arcane 17 Nombre de pages : 106 Prix : 10 €

Génération VIe République Nicole Borvo Cohen-Séat, qui fut présidente du groupe communiste au Sénat avant de céder son siège à Pierre Laurent il y a un an, n’est pas la première à vouloir organiser l’enterrement de la Ve République. « Les partis de la gauche qui invoquent une VIe République ont des conceptions souvent divergentes », reconnaît l’ancienne élue, qui place son espoir dans l’émergence d’une « nouvelle génération “VIe République” » prête à « soulever des montagnes ». Le postulat de départ n’est pas nouveau : notre système institutionnel, aux mains d’une « oligarchie politico-financière », tient les citoyens éloignés de la décision politique. Pour les en rapprocher, il faut non seulement, estime l’auteure, changer les institutions en mettant fin à la « monarchie présidentielle » et en redonnant la main au Parlement, mais aussi réformer les collectivités territoriales, les entreprises, l’Europe, avec des maîtres mots comme « scrutin proportionnel », « initiative citoyenne », « auto-organisation » ou L. B. « souveraineté des peuples ».

« La crise grecque : une faillite européenne ? » Le 21 octobre à 22 h 30

« déontologues », mais le mouvement reste marginal. Si les législateurs réfléchissent encore à séparer les activités spéculatives de celles de crédit, la structure des marchés financiers semble avoir peu évolué.

Auteur : Bernard Fath Éditeur : L’Harmattan Nombre de pages : 259 Prix : 27 €

L’Intelligence territoriale, une nécessité Entre un jacobinisme à la dent dure et un vaste mouvement de décentralisation, la démocratie locale est contrainte d’évoluer et son administration de trouver de nouvelles solutions pour mener à bien ses projets de développement locaux. Dans un livre dense, parfois complexe, Bernard Fath profite de sa double expérience d’élu local – maire de Léognan – et de chercheur, docteur en science politique, pour définir l’« intelligence territoriale ». De l’importance de l’ingénierie locale pour l’aménagement du territoire à la formation des agents en passant par le développement d’un management participatif pour une meilleure gouvernance locale, il passe en revue tous les aspects de l’action des collectivités. En résulte un essai qui prône une plus grande coopération entre acteurs publics, élus, chercheurs et universitaires, pour faire de cette intelligence des territoires un moteur de la croissance économique et du progrès. R. M.

Auteur : Frédéric Denhez Éditeur : Actes Sud Nombre de pages : 228 Prix : 22 €

La Fin du tout-voiture « Le règne de l’auto est terminé, et c’est pour cela que j’ai écrit ce livre. » Journaliste et conférencier dans le domaine de l’environnement, Frédéric Denhez en est tellement persuadé que sa démonstration est imparable. Pour lui, la baisse des ventes de voitures dans les pays développés n’est pas conjoncturelle mais marque bien une évolution. Même la voiture électrique n’a pas d’avenir, plus précisément la voiture électrique propriété d’un individu. L’heure est aux nouveaux modes de mobilité. Avec rigueur, pragmatisme et parfois humour, Frédéric Denhez ne réclame pas la mise à mort de la voiture, qui sera toujours utile, notamment en zone rurale. Le transport de demain reste à inventer. Transport public bien sûr, sans infrastructure lourde, « une toile d’araignée de coopération, d’échanges de véhicules et d’idées, d’informations et de pratiques, tendue par le réseau numérique entre tous les nœuds du réseau de transport ». Avec toujours des voitures mais remises B. B. à leur place.

Documentaire Durée : 1 heure Réalisateur : Olivier Toscer

Talon d’Achille Fin 2009, l’Union européenne croit sa dernière heure arrivée. L’un des siens est à terre et tout l’édifice vacille. La Grèce, berceau de la civilisation occidentale, est au bord de la faillite. La faute aux dirigeants

grecs seuls ? L’enquête menée par Olivier Toscer remonte de manière implacable le fil des responsabilités. Première erreur : avoir ouvert avec complaisance les portes de l’Union à un pays ne remplissant pas

les critères requis. Puis avoir laissé négligemment pourrir la situation, permettant à Goldman Sachs d’endosser le rôle du cheval de Troie. La crise grecque, ou la tragédie d’une incompétence collective.

ANDRONICOU/NUR PHOTO/SIPA

« Mon adversaire, c’est le monde de la finance », déclarait François Hollande en 2012 lors de son premier meeting de campagne. Cinq ans après la faillite de Lehman Brothers, la nécessité de

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OCTOBRE 2013 N°99 ACTEURS PUBLICS ■ 93


SYLVAIN HENRY

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« Femmes de la Défense »

A. JEULAND/ARMÉE DE L’AIR

Lieu : à Paris, sur les murs du ministère rue Saint-Germain (7e arrondissement), puis dans plusieurs villes de France : Toulouse, ClermontFerrand, Grenoble, Poitiers… Dates : jusqu’en octobre à Paris, puis jusqu’en juin 2014 en régions Exposition gratuite

Jean-Yves Le Drian et Najat VallaudBelkacem, le 29 août, échangent avec Aurélie, mécanicienne en armement, l’une des 23 « Femmes de la Défense » de l’exposition.

A. JEULAND/ARMÉE DE L’AIR

EXPOSITION

Ces femmes

de la défense

Grenoble ou Poitiers jusqu’en juin 2014. L’objectif : balayer le stéréotype d’une armée complètement masculine.

Préjugés persistants « Le cliché du soldat prêt à en découdre avec sa mitraillette a vécu », sourit Sylvie, immortalisée lors d’une mission au Mali (photo en haut à droite). Convoyeuse de l’air rattachée à la base aérienne de Villacoublay, la jeune femme admet qu’un travail auprès du grand public est encore nécessaire. « Peut-être que certaines se disent que l’armée, c’est pour les hommes, acquiesce Margaux, conductrice de chien à la base aérienne 113 de Saint-Dizier. Les femmes ont au contraire toute leur place. » « Les femmes peuvent postuler dans tous les domaines de la défense et cette exposition contribuera peutêtre à les en convaincre », appuie Aurélie, mécanicienne armement à Orange, tout heureuse de saluer

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Jean-Yves Le Drian et Najat Vallaud-Belkacem devant son portrait lors de l’inauguration (photo ci-dessus). La ministre des Droits des femmes a applaudi la nomination récente d’un haut fonctionnaire à l’égalité des droits et la création d’un observatoire de la parité au sein du ministère de la Défense. « Cette exposition est la meilleure réponse aux préjugés », souligne-t-elle en saluant la constitution prochaine d’un vivier de femmes pouvant à l’avenir être nommées aux plus hautes responsabilités. Peut-être certaines d’entre elles figurentelles parmi les 23 « Femmes de la Défense ». Alors venez les admirer… ● Sylvain Henry

S. LAFARGUE/ECPAD

Elles sont pilote de chasse, infirmière, ingénieure civile, directrice de pont d’envol ou juriste et exposent leur quotidien de militaires et de personnels civils de la défense à l’occasion d’une exposition itinérante inédite. Inaugurée à la fin de l’été par les ministres de la Défense, JeanYves Le Drian, et des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, « Femmes de la Défense » raconte la féminisation des trois armées françaises en 23 portraits de femmes photographiées dans leur univers professionnel. « Notre armée est devenue l’une des plus féminisées au monde, observe Jean-Yves Le Drian. Les femmes représentent 38 % du personnel civil et 15 % du personnel militaire. Nous devons en être fiers. Cet événement leur rend hommage. » D’abord présentée boulevard SaintGermain, sur les murs parisiens du ministère, « Femmes de la Défense » se déplacera ensuite à Toulouse, Clermont-Ferrand,

L. BOUILLON/MARINE NATIONALE



Idées

MAIRES DÉMOGRAPHIE

COMMUNAUTÉS

PLU

PÉRIURBANISATION

AGGLOMÉRATION

TERRAINS

Pourquoi il faut penser l’urbanisme de demain à une échelle intercommunale

ROPIX/FOTOLIA

Par Daniel Delaveau, Estelle Grelier, Dominique Potier, Michel Piron et Bertrand Pancher*

« Près de 3 000 communes vivent déjà à l’heure du PLU intercommunal. Sont-elles mortes pour autant ? Bien sûr que non. » Parmi les orientations majeures du projet de loi relatif à l’accès au logement et à un urbanisme rénové présenté par Cécile Duflot, figure le transfert obligatoire de la responsabilité d’élaboration des plans locaux d’urbanisme (PLU) aux communautés de communes et d’agglomération, sur le modèle déjà en vigueur dans les communautés urbaines. Cette inscription à l’agenda parlemen-

taire est une bonne nouvelle, même si nous savons que les débats seront longs et mouvementés avant que le texte ne soit définitivement adopté. La question n’est pas de raisonner en termes de pouvoirs ou de lutte d’institutions, mais de débattre sereinement de l’échelle pertinente pour penser la planification des sols, à un moment où il faudra à la fois dégager des terrains pour construire, maîtriser les

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prix, limiter nos consommations foncières excessives et en finir avec la périurbanisation désordonnée des trois dernières décennies. Même si l’émergence des schémas de cohérence territoriale (Scot) a constitué un réel progrès et développé une approche intercommunale de la planification, parfois à des échelles géographiques très larges, les plans locaux d’urbanisme (PLU) restent néanmoins les seuls documents

directement opposables aux tiers et aux propriétaires. Ce sont ces documents qui décident ou non de la constructibilité d’un terrain, fixent les règles de densité et les formes architecturales, établissent des servitudes réellement protectrices de l’environnement. C’est bien au sein des PLU, et nulle part ailleurs, que s’opèrent les véritables arbitrages fonciers et que se dessine la forme de nos villes ou villages. Déjà depuis le rapport Guichard « Vivre ensemble », paru en 1976, il est question de réaliser des documents d’urbanisme (à l’époque les POS) à une échelle intercommunale. Les communautés urbaines l’ont préfiguré depuis 1966, sans que ne disparaissent pour autant en leur sein ni les communes ni les maires. C’est pourquoi il convient de dépassionner le débat et de lever certains malentendus. À ce jour, plus de 200 communautés urbaines, d’agglomération et de communes exercent la responsabilité de planification des sols, comme l’a montré une récente étude de l’Assemblée des communautés de France. Soit environ 8 % d’entre elles. Partout où cette compétence est intercommunale, les documents d’urbanisme restent le fruit d’une étroite coélaboration entre la communauté et ses communes. Dans 98 % de ces communautés, les maires préservent leur compétence de délivrance des permis de construire. Dans les rares autres cas, ils n’ont fait que la déléguer au président de communauté pour la durée du mandat. Il y a donc bien lieu de distinguer la compétence d’élaboration des règles d’urbanisme du pouvoir de délivrance des titres. Faire des PLU intercommunaux un épouvantail et voir en eux « la mort annoncée des communes » relève du pur fantasme. Près de 3 000 communes vivent déjà à l’heure du PLU intercommunal. Certaines depuis

longtemps. Sont-elles mortes pour autant ? Bien sûr que non. Pour nombre de nos communes, dont 27 000 ont moins de 1 000 habitants, le PLU intercommunal constitue au contraire le moyen indispensable pour reprendre en main leur destin. Au cours des prochaines années, nous aurons l’ardente obligation de construire vite et mieux pour parvenir à la production de 500 000 logements. Nous devrons dans le même temps construire de manière plus dense pour gaspiller moins de ressources foncières, préserver notre biodiversité, réduire les distances parcourues. Une tension inévitable aura lieu entre ces objectifs d’intérêt général et les stratégies de valorisation patrimoniale de certains propriétaires, les comportements spéculatifs d’acteurs institutionnels, les attitudes de rejet à l’égard de certains projets d’intérêt public. Réaliser les documents d’urbanisme à une échelle intercommunale, c’est avant tout encourager les maires et leurs équipes à partager un projet de territoire à l’échelle du bassin de vie. C’est aussi mutualiser les coûts élevés d’une expertise technique à hauteur des défis urbains du XXIe siècle. C’est enfin accepter de penser ensemble l’organisation d’un bassin de vie et les solidarités quotidiennes qui s’y nouent. Nous souhaitons pour toutes ces raisons que le Parlement fasse preuve de volontarisme et trace l’avenir. ● *Daniel Delaveau est président de l’Assemblée des communautés de France et président PS de Rennes Métropole, Estelle Grelier est députée PS de Seine-Maritime, Dominique Potier est député PS de Meurthe-et-Moselle, Michel Piron est député UDI du Maine-et-Loire, Bertrand Pancher est député UDI de la Meuse.


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ROGER-VIOLLET

Mémoire

Air France prend son envol La nouvelle compagnie naît de la fusion de 5 grands transporteurs aériens.

L

’histoire du mastodonte mondial de l’aviation qu’est devenue Air France commence il y a quatrevingts ans… avec une crevette. Le 7 octobre 1933, à l’aéroport du Bourget, a lieu la cérémonie d’inauguration de la nouvelle compagnie aérienne, en présence de l’enthousiaste ministre de l’Air – un portefeuille créé cinq ans plus tôt –, Pierre Cot, lui-même détenteur d’un brevet de pilote.

Le logo déployé devant le parterre d’officiels et de pionniers de l’aviation réunis pour l’occasion est celui de « l’hippocampe ailé à la queue du dragon d’Annam », plus communément dénommé « la crevette ». Cet emblème dont hérite Air France est celui d’Air Orient, l’une des 4 compagnies privées françaises fusionnées par une loi votée au Parlement l’été 1933, auxquelles vient s’ajouter

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ensuite l’Aéropostale après sa mise en liquidation judiciaire. La nouvelle compagnie est une société d’économie mixte dont l’État détient 25 % des parts. Air France dispose alors d’une flotte composée d’avions, dont l’un des fleurons est le Wibault 283 (photographié ci-dessus vers 1935), mais aussi d’hydravions*. L’objectif de la fusion est de créer « le cadre d’une action nouvelle, à la fois moins onéreuse et plus vigou-

reuse, qui doit procurer au transport aérien français, sur les grands itinéraires du globe, les avantages qu’ont retirés de leur monopole de fait, et de leur identification avec le pays qui les subventionne, des entreprises comme les Imperial Airways britanniques et la Lufthansa allemande », écrit la revue L’Illustration du 14 octobre 1933. ● Laure Berthier * 47 avions et 12 hydravions en 1938.


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