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Michiel Alferink – Athlon

« Nos clients attendent de nous qu’on joue un rôle dans leur multimodalité »

Michiel Alferink Athlon Belux

Après 18 ans passés à Barcelone, le Néerlandais Michiel Alferink a échangé le poste de vice-président du commerce et des ventes internationales d’Athlon pour celui de directeur général d’Athlon Belux. Cet entretien porte évidemment – difficile d’y échapper – sur l’année 2020 chamboulée, mais aussi sur la vision d’avenir d’Athlon sur la mobilité.

Philip De Paepe – philip.depaepe@effectivemedia.be

« Il y a des entreprises qui sortent de l’ornière mais qui trouvent la situation trop fragile pour s’engager à long terme. »

Vous avez vécu, travaillé à Barcelone pendant 18 ans. Vous y avez exercé une fonction internationale. Comment se passe le travail au niveau national maintenant ?

MA : J'étais très heureux de le faire. Mais revenir dans une filiale, faire des choix avec une équipe et les mettre en œuvre le lendemain, c'est aussi fantastique. On me pose souvent la question : comment se passe la transition de Barcelone à Bruxelles ? En ce qui concerne la météo, il s'agit d'un sacré changement. Surtout pour ma femme. Elle est Espagnole (rires). Mais Bruxelles a son propre charme. J'aime le sport et le plein air. Je découvre donc la Forêt de Soignes et le Bois de la Cambre, où je vais me promener. La nourriture et les boissons en Belgique sont également meilleures que dans de nombreux autres pays. C'est encore quelque chose à découvrir à la sortie du confinement.

Puisque nous évoquons le confinement : quel est l’impact de la Covid sur les activités d’Athlon ?

MA : Le premier obstacle que nous avons dû franchir – comme tout le monde – a été le passage au télétravail lors du premier confinement. En fait, tout s’est bien passé et les clients n’ont rien remarqué de spécial. La deuxième phase a porté sur l’impact du confinement sur les clients et les défis financiers qu’il a posés à certains. Notre objectif était de proposer des solutions rapides, flexibles et efficaces. Des exemples concrets ? L’ajustement du kilométrage dans les contrats de leasing ou une réflexion sur la manière dont les clients peuvent optimiser leur gestion de trésorerie dans ces circonstances difficiles. Certains de ces clients sont actifs dans des secteurs qui ont été encore plus touchés que les nôtres : commerce de détail, restauration, aéroports, … Je pense que nous avons réussi à les soutenir autant que possible.

Après la crise, il faudra regarder vers le futur. Quelles recettes Athlon BeLux propose-t-elle à ses clients ?

MA : Cette crise a eu un impact majeur sur notre mobilité. Il est clair que le télétravail va rester une habitude à une certaine échelle. Je suis convaincu que notre mobilité sera différente. Nous adopterons tous une approche plus pragmatique de nos déplacements et de l'utilisation de la voiture. Nous irons au bureau si c'est nécessaire et utile, et pas parce que la norme le dicte. C'est en soi l'une des conséquences positives de cette crise. Réduire ses trajets est bénéfique pour l'environnement, diminue les embouteillages et présente également des avantages pour la productivité et l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des employés. C'est pourquoi nous examinons avec nos clients la manière dont ils veulent donner forme à ce projet et comment nous pouvons les aider à le faire. Comment envisagent-ils la voiture, en combinaison ou non avec d'autres formes de mobilité ? Par le biais du conseil, nous aidons nos clients à développer une vision à long terme plus structurée. Par définition, il s'agit d'un travail sur mesure car il existe de nombreux paramètres pour arriver à une solution qui convienne à une entreprise et à ses employés.

Dans certaines entreprises, l'utilité des voitures de leasing est remise en question. Estce une menace pour le modèle commercial du leasing ?

MA : Dans le package salarial, la voiture est envisagée de manière moins dogmatique. Mais d'un autre côté, le nombre de contrats de leasing prouve que nous ne sommes pas dans un marché en déclin. Au contraire. Je suis d'accord : nous assistons à une transition de la simple voiture à un ensemble de mesures de mobilité plus large. Mais cela ne rendra pas la voiture superflue. Elle ne sera utilisée que de manière plus judicieuse. Et comme je l'ai déjà dit, c'est une bonne chose. Vous voyez que les entreprises s'intéressent de plus en plus à ce dont leurs employés ont besoin pour une mobilité efficace. Juste une voiture, un vélo, une combinaison des deux, les transports publics. Pour de nombreuses entreprises, cette multimodalité est plus difficile à mettre en œuvre que cette seule voiture. D'où notre soutien dans cette démarche.

Le concept de mobilité flexible est en vogue. Comment cela est-il concrètement mis en œuvre par Athlon ?

MA : Tout d’abord, ce n’est pas quelque chose que nous avons commencé hier, pour ainsi dire. Nous étions à l’origine de Railease il y a dix ans, avec Accenture et la SNCB. A la même époque, nous avons lancé Bikelease. Nous avons également été la première société de leasing en Belgique à proposer des voitures électriques en 2011. Nous sommes donc en constante évolution. Aujourd’hui, nous constatons une demande croissante de flexibilité. En ce qui concerne la mobilité automobile, nous proposons des solutions de location pour un jour, une semaine, un mois, … Il existe également le Rent & Roll, qui est une formule « hybride » combinant le renting et le leasing opérationnel. Avec toutes ces solutions, nous donnons des réponses différentes à la même question : de quoi le client a-t-il besoin maintenant ? Il y a des entreprises qui sortent de l’ornière mais qui trouvent la situation trop fragile pour s’engager à long terme. D’autres veulent le faire pour une partie de la flotte mais pas pour une autre. Nous répondons à tous ces besoins grâce à notre offre flexible.

Je suis certain que notre mobilité sera différente. Nous adopterons tous une approche plus pragmatique de nos déplacements et de l'utilisation de la voiture.

Les applications de mobilité et les solutions permettant de combiner différents modes de transport ont une valeur ajoutée pour le client. Mais est-ce aussi un modèle commercial rentable ? Fournisseur de leasing ou fournisseur de mobilité, ce n’est quand même pas la même chose...

MA: Dans les années à venir, la voiture restera un pilier très important dans le mix multimodal et aussi dans notre modèle commercial. En ce qui concerne le passage à la multimodalité, ce sera un défi pour chaque entreprise. Nous pouvons offrir une valeur ajoutée en fournissant des conseils, en réunissant les

Michiel Alferink: « Dans le package salarial, la voiture est envisagée de manière moins dogmatique. »

bons fournisseurs, en proposant des solutions techniques telles que des applications de mobilité avec une facturation simple. Et oui, c'est un modèle commercial viable. Plusieurs études montrent d'ailleurs que les entreprises attendent de leur société de leasing qu'elle joue un rôle de premier plan dans ce domaine. Nous faisons également partie de Daimler. Et au sein du groupe, nous travaillons également sur de nouveaux produits et services en matière de mobilité, de connectivité et de durabilité. Cela ne sera à notre avantage que si nous pouvons en faire profiter nos clients.

Vous en avez déjà parlé : Athlon a été un pionnier dans le domaine de la location de vélos. Comment cette branche se porte-t-elle aujourd'hui ?

MA : Nous constatons une croissance régulière. Que ce soit en nombre ou en montants d'investissement, l'augmentation des speed pedelecs est constante. Tout comme pour la voiture, notre force, c'est la valeur ajoutée : financement, entretien, dépannage, assurance. Nous travaillons également avec un réseau sélectionné afin de donner la même garantie de qualité en termes de service que pour nos voitures. Nous amortissons également nos vélos à une valeur résiduelle de zéro. Pour l'utilisateur, c'est donc intéressant de le reprendre par la suite. Cette possibilité existe également pour nos voitures en fin de contrat, mais alors à des valeurs résiduelles conformes au marché. Quoi qu'il en soit, je pense que le vélo, et certainement le speed pedelec, est une solution partielle importante pour une mobilité plus durable. J'en ai un moimême et j'habite à 21 km de notre bureau. Avec un vélo ordinaire, c'est une sacrée distance, mais pas avec un speed pedelec.

Le leasing d'occasion est également en hausse. Est-ce aussi un marché en croissance pour Athlon ?

MA : Je doute que ce soit un grand marché ici en Belgique. Nous avons de bonnes solutions de location qui sont au moins aussi rapides, mais avec des voitures plus récentes.

Le private lease est-il une piste pour Athlon ?

MA : Nous ne faisons pas de leasing pour particuliers classique, mais les plans cafétéria représentent une activité importante chez nous. Il s’agit généralement de personnes qui n’ont pas droit à une voiture de société mais qui peuvent remplacer leur ancienne voiture par un modèle plus récent. Cela contribue à rendre le parc automobile plus écologique. Dans le cadre de cette formule, les clients sont plus enclins à opter pour l’électrique ou l’hybride (rechargeable) car ce choix ne comporte aucun risque pour eux. Une entreprise doit toujours faire des choix. Nous optons pour des solutions de mobilité qui s’inscrivent dans le cadre de l’entreprise. Mais de cette façon, nous touchons aussi une partie des dirigeants privés.

En Belgique, l’objectif est de rendre toutes les voitures de société électriques d’ici 2026. Comment voyez-vous cette période de transition ? Six ans, cela semble long, mais en fait ce n’est pas le cas avec les contrats de location qui s’étendent souvent sur quatre ans…

MA : Je trouve que c’est formidable que notre secteur prenne cela très au sérieux. Nous avons été les premiers à proposer Tesla en leasing en Europe, de même que les Renault électriques. Pour nous, il s’agit d’une stratégie à long terme qui prend maintenant de l’ampleur, en partie grâce à ce que le gouvernement belge a décidé. Et nous nous en réjouissons. Mais notre secteur ne doit pas être le seul à jouer un rôle dans cette transition. Le fait que la Flandre investisse désormais 30 millions d’euros dans 30.000 bornes

Nous amortissons également nos vélos à une valeur résiduelle de zéro. Pour l'utilisateur, c'est donc intéressant de le reprendre par la suite.

D'ici un an, il y aura une offre de VE dans chaque segment. L'autonomie augmentera et les doutes sur la durée de vie des batteries ne seront plus un problème.

Michiel Alferink : « Nous examinons avec le client qui parmi ses employés a déjà un profil auquel le VE, l'hybride ou l'hybride rechargeable peut être adapté. » de chargement est un bon signal. Mais tout cela peut être fait un peu plus rapidement. Une transition prend des années. Il faut faciliter la vie des early adopters, car ce sont les ambassadeurs. Ce sont eux qui convaincront les autres.

Les autres acteurs importants sont les constructeurs automobiles. Est-ce que ça va assez vite de ce côté-là ?

MA : La gamme électrique n'est pas encore très étendue. Mais d'ici un an, il y aura une offre de VE dans chaque segment. L'autonomie augmentera et les doutes sur la durée de vie des batteries ne seront plus un problème. Les VE deviennent une option réaliste pour de plus en plus de conducteurs, mais pas pour tous aujourd'hui. C'est pourquoi nos activités de conseil sont si importantes. Avec le client, nous examinons qui parmi ses employés a déjà un profil auquel le VE, l'hybride ou l'hybride rechargeable peut être adapté.

N’est-ce pas un peu dogmatique que de penser que ça doit absolument prendre cette direction ?

MA : Non, nous envisageons cela de manière purement pragmatique, ce qui signifie qu'il y aura aussi des moteurs à combustion interne. N'oublions pas que la génération actuelle est plus respectueuse de l'environnement que jamais.

Et qu'en est-il des services de soutien aux VE ? C'est autre chose qu'une simple carte carburant...

MA : À cet égard, nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour faciliter au maximum la vie de nos clients. Avec des solutions de recharge dans l'entreprise et à domicile. Et une facturation claire et fractionnée. C'en effet différent qu'une carte carburant et objectivement plus compliqué. Mais c'est notre travail de veiller à ce que les entreprises et leurs employés ne le remarquent pas.

Sur le marché des infrastructures publiques de recharge, nous voyons des cartes, des apps, des jetons, etc. mais peu de transparence des prix. Est-ce un problème pour vos clients ?

MA : Il est vrai que l'offre est importante, mais nous avons une solution pour cela grâce à des accords de roaming avec de grands fournisseurs. Les clients peuvent utiliser leur carte de recharge avec autant de souplesse qu'une carte carburant. Nous contrôlons aussi les recharges. Tout comme pour le carburant, l'électricité est généralement plus chère le long de l'autoroute. Si nous constatons, par exemple, qu'il y a beaucoup de recharges sur les chargeurs rapides (et coûteux), nous le signalons au client. Si la situation est inévitable, tant mieux que l'infrastructure soit en place. Sinon, des économies sont possibles. Ainsi, en termes de TCO des VE, nous réagissons aussi vite que pour les voitures à moteur à combustion.

Comment voyez-vous l'évolution du marché de la mobilité dans les mois et les années à venir et quelle sera encore l'importance de la voiture dans le mix de mobilité ?

MA : Dans les entreprises, elle sera sans aucun doute multimodale. Nous pouvons déjà le constater aujourd'hui avec, par exemple, la forte augmentation des vélos de société. Mais ce n'est que le début. Si nous examinons la combinaison des modes de transport, la connectivité jouera un rôle de plus en plus important. Le moment où nous choisissons un mode de transport sera de plus en plus déterminé par les informations dont nous disposons. Y a-t-il des embouteillages sur mon itinéraire ? Si oui, quelle alternative puis-je utiliser pour y arriver plus rapidement ? Car aujourd'hui, nous savons quand il y a des embouteillages. Mais à l'avenir, les big data permettront de les prévoir vant qu'ils ne se produisent. Va-t-il pleuvoir ? Alors peut-être que je ferais mieux de prendre la voiture plutôt que le vélo. Nous allons sortir de nos schémas fixes et choisir la mobilité qui est la meilleure à ce moment-là. La voiture sera toujours importante dans ce mix multimodal. Les voitures individuelles mais aussi les voitures partagées joueront leur rôle. Aujourd'hui pas encore, à cause du coronavirus, mais je suis convaincu que cette formule a aussi un avenir. Dans ce mix de tous les modes de transport, notre rôle est de faciliter au maximum la vie des clients.

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