4 minute read

42 tonnes + 900 kWh = 500 km d’autonomie

Friderici Spécial, Avesco Rent, Galliker Transport et Futuricum ont dévoilé au Musée des Transports deux camions 100 % électriques. Clément Friderici, patron de l’entreprise éponyme, commente cette double première mondiale. Par Pierre Thaulaz

AUTO ACS: Deux camions vraiment identiques ?

Advertisement

Clément Friderici: Les véhicules tracteurs sont absolument identiques, par contre le camion Galliker va atteler une semi-remorque frigo. Une caisse frigorifique fait d’ailleurs l’objet d’une petite révolution puisqu’elle embarque sous l’essieu arrière une espèce de dynamo qui lui permet de créer l’énergie dont elle a besoin pour être autonome sur la semi-remorque. Pour notre part, nous sommes au service d’un client, Avesco Rent, une société spécialisée dans la location d’engins de chantier et de machines destinées au monde de l’événementiel et de l’industrie.

Vous êtes donc propriétaire de ce camion ?

Oui.

Une première mondiale ?

Pour un camion de cette taille, oui.

Qui a initié ce projet ?

On est l’un des transporteurs d’Avesco Rent depuis une vingtaine d’années. Depuis 5 ans, on fait pour eux ce que l’on appelle la navette, c’est-à-dire que l’on dessert leurs sites en Suisse à partir de leur siège de Puidoux. On monte par exemple jusqu’à Bâle en desservant toutes leurs agences de location. Cette navette est bien définie, avec des horaires et un tracé bien précis. Un jour, Vincent Albasini, le CEO d’Avesco, m’interpelle: «Est-ce que tu es capable d’imaginer de transformer notre navette en véhicule neutre en émissions de CO2?» Une demande préalablement formulée par l’un de ses clients, une société organisatrice de compétitions de golf en Valais. Avesco nous a donc confié le mandat et nous avons trouvé cette solution de camion électrique chez Futuricum, dont les membres fondateurs sont des passionnés d’électromobilité. Ils ont commencé par des camions à ordures, dès lors que ces derniers présentent l’avantage d’effectuer des tournées bien spécifiques. De notre côté, nous avions besoin de 500 km d’autonomie pour mener à bien ces tournées Avesco. Les gens de Futuricum sont venus à Tolochenaz en octobre 2020, le camion était encore à l’état de projet. On a travaillé main dans la main avec Avesco qui a joué le jeu. Car il faut savoir que c’est un camion qui demande un investissement conséquent.

On peut donner un prix ?

A peu près six fois le prix d’un camion habituel. Même si l’investissement de base est très important, les coûts d’utilisation sont nettement avantageux. Plus besoin de diesel, plus

besoin de payer la RPLP. Si vous 100 000 km par année, bien sûr que vous devez alimenter les batteries en électricité, mais l’addition des deux premières économies fait que ça devient un véhicule ça devient intéressant.

La grosse révolution, la batterie ?

Elle est issue du monde de l’automobile, mais le génie de Futuricum, c’est sa capacité à gérer la batterie.

Vous avez aussi bénéficié d’une dérogation de l’Ofrou ?

Le véhicule a droit en effet à un mètre en plus en longueur. Normalement, un tracteur avec semi-remorque mesurer 16,5 m du pare-choc avant au pare-choc arrière, et dans ce cas on peut passer à 17,5 m. Ça nous apporte un peu de souplesse sur le véhicule. Nous pouvons surtout placer les batteries entre la cabine et la semi-remorque, le chauffeur bénéficiant ainsi de davantage d’espace de vie. La deuxième dérogation a trait au poids. Le véhicule tracteur et le véhicule tracté ont droit chacun à une tonne en plus. Le camion passe donc à 42 tonnes.

Une semi-remorque allégée ?

Oui, ceci grâce à des aciers innovants développés par un constructeur italien, Bertoja, lequel a mis au point depuis plusieurs des systèmes de châssis extrêmement bien pensés et du coup relativement légers.

Intéressant aussi en termes d’image ?

C’est sûr que l’image est importante, mais pour moi le plus important est de ne pas me tromper. Je n’avais pas envie d’être le maréchal ferrant qui affirme que le pneu n’a aucun avenir. Il y a une bascule à faire, des énergies nouvelles à développer. Il faut en être, sinon va être sorti du marché. Ma principale motivation était d’explorer une terre inconnue, mais passionnante.

Le 26 octobre dernier, une date particulière ?

C’était en effet le départ de la première navette officielle

Pourrait-on imaginer un deuxième véhicule électrique ?

On va déjà valider ce camion, même si je dois vous avouer qu’on a été bluffé jusqu’à présent. Plusieurs clients nous questionnent sur des solutions électriques. Il faut prendre point après point, savoir dans quel cas il est intéressant de rouler en électrique et où si ça ne fait pas encore sens.

Une petite révolution pour votre entreprise ?

Je me souviens très bien de mon grand-papa qui racontait le départ du dernier cheval. Mon père se souvient encore de la vente aux enchères de tout le matériel lié aux chevaux, il y avait un pincement au cœur à l’époque. Le premier camion est arrivé dans la famille en 1926, et le dernier cheval doit être parti en 1961.

Combien de générations de Friderici ?

Avec mes deux cousins, on forme la 5e génération. On ne fait plus exactement le même métier que nos aïeux.

This article is from: