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ChloéLopes Gomes

La Danseuse Fran Aiseraconte Sonparcours

d’excellence,del’Académie du Bolchoï,àMoscou, au StaatsballettBerlin, dans sonlivre Le Cygnenoir.Elleyconfieses épreuves familiales,ainsi queson combat contre la précarité et le racisme. proposrecueillispar AstridKrivian

À8ans,j’aiété émerveillée parleballet Le Lacdes cygnes : lescorps desdanseurs, leur jeu, le maquillage, lescostumes, l’histoire…J ’avais trouvé ma vocation !J ’aiprismon premiercours de danse, puis j’ai intégréleconservatoire de Nice, et ensuitel’École nationalesupérieurededanse de Marseille. Enfant de la DDASS, ma mère se rêvait peintre. Elle croyaitenl’épanouissement et la réussite àtravers lesarts. Ellenousainitiés àlamusique et àladanse classique, aux arts plastiques.Celam’a donnéune sensibilitéetune intelligenceémotionnelle. Àlamaison, monpèrenousmaltraitait,alorsjemefocalisaissur cesactiv ités.C’était moncocon

À14ans, j’ai étéreçue àl’AcadémieduBolchoï. J’yaiappris la rigueur, la discipline, le dépassementdesoi.Endanse classique, on vise sans cessel’excellence, le perfectionnement Je ne prends jamais rien pour acquis.J ’y ai aussitrouvéune deuxième famille, unemère et dessœurs dans la danse, au-delàdes différences de culture, de couleurdepeau. Nousétionstous unis dans ce butd’excellerdansnotre art, stimulés parune belleetsaine compétition. La dansem’a enseignélaposture,ainsi queles règles d’une société. Quandonest issued’unmilieutrèsmodeste,elleest égalementunmoyen de s’élever socialement, de côtoyer dessphères élitistes. Au niveau artistique,onpeutincarnerdes rôlestrèsdivers: sorcière,femme fatale,reine…Nousnesommespas seulementdes beauxcorps,maisaussi desartistesqui procurentdes émotions au public en racontantune histoire Monretourenrégionparisiennefut compliqué. Ma mère aété placée en détention pour desfaits graves.Enrupture avecmon père,j’étais la seuleà pouvoir« sauver » ma fratrie, tous mineurs àl’époque.Mon frère de 6ans aété placéàlaDDASS du jour au lendemain.J’aialorsmis ma carrière en sourdine pendantquatreans :jecumulaistrois jobs,jetravaillais 22h/24hpourréunirlasomme me permettant de loueruntrois-pièces et d’yaccueillir mon frère.Celaa étéleparcours du combattant.Onparle peudelaprécaritésociale en France, pourtant bien réelle et violente.Jemesuisaussi battuepourpayer lesfrais d’avocat de ma mère.J’avais si peur de perdre ma famille. Être admise au StaatsballettBerlin futunaccomplissement : leur répertoiremêle classiqueetcontemporain !Hélas,j’aiété la cibled’une maîtressedeballet raciste, en charge de distribuer lesrôles et de nous faireévoluer.Àses yeux,ilnefallait pasd’une femmenoire dans un corpsdeballet. Commeelleétait protégée paruncontrat àv ie,soitjerestais et subissais, soit je partais. J’ai tenu bon, mais sonharcèlement et sesproposouvertement racistes m’ont beaucoup affectée. Aprèsmoult rebondissements, j’ai intentéunprocèsàcette institutionpourlicenciementabusif. Et j’ai obtenu gain de cause. Monhistoire aété relayéedansles médias anglo-saxons,puis dans le mondeentier. La directrice en question adû s’excuserdevantlapresseinternationale. En me battantpourmes droits fondamentaux,j’aicréé un précédent en Allemagne: de nombreusespersonnes ontà leur tour pris la parole pour dénoncer le racisme. ■

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