Une étude de la Roya et de ses habitants - Valentine Chauvet & Alice Roux - Rapport de PFE part. 1

Page 1

i. Comprendre le territoire Une étude de la Roya et de ses habitants



Livret n°1

Un temps pour habiter, à temps pour s’abriter Reconstruire le village de Breil-sur-Roya après la tempête

Valentine Chauvet Alice Roux

Projet de fin d’études sous la direction de Catherine Rannou, Vincent Laureau, Marc Dilet, Edith Akiki Rapport de PFE DE Expérimental : &co-systèmes ENSA Paris Val-de-Seine - JUILLET 2021

3


Remerciements

Nos remerciements s’adressent à tous ceux qui, directement ou indirectement, nous ont aidées et soutenues dans la réalisation de ce travail. Nous souhaitons remercier en particulier nos familles, nos amis, nos camarades de classe, qui nous ont accompagnés dans l’orientation et la réflexion de nos recherches, ainsi que tous ceux qui ont répondu à nos interrogations lors de nos entretiens ou nos séjours dans la vallée.

4


Sommaire Avant-propos

7

Introduction

9

I. Le territoire de la vallée de la Roya

11

- Un territoire transfrontalier - Un climat hybride, entre Alpes et Méditérannée - Un développement marqué par une histoire forte - L’arrivée du train, «ligne de vie» de la vallée - L’affaiblissement économique et démographique de la vallée - Une attractivé majoritairement saisonnière - Des traditions agricoles ancrées - La Roya, une véritable terre d’accueil II. Un territoire soumis aux risques

49

- La notion de bassin versant - La rivière de la Roya - Les épisodes méditérannéens, des phénomènes de plus en plus fréquents - La tempête Alex, catastrophe naturelle dévastatrice - Des dégâts impactant l’intégralité du territoire Conclusion Bibliographie Annexes

69 70 71

5


6


Avant-propos

Ce présent travail constitue l’aboutissement d'un an de recherches et de réflexions sur le territoire de la vallée de la Roya, et plus précisément sur le village de Breil-sur-Roya, touché en octobre dernier par de violentes inondations. C'est par le prisme de cette catastrophe que nous avons entendu parler pour la première fois de cette région reculée, que nous l'avons analysée, puis parcourue à trois reprises lors de séjours sur place, en immersion. Mais si nous voulions au départ comprendre la cause de ces inondations et proposer des solutions pour rendre la vie encore possible dans la vallée, la complexité du territoire et de ses problématiques nous a rattrapée. Pendant deux semestres, nous avons cherché à l'apprivoiser, à comprendre la diversité des réalités et des destins de ses habitants, et à synthétiser les innombrables informations récoltées en cours de route. Entre flux migratoires, épisodes méditerranéens, patrimoine délaissé et traditions agricoles, nous avons tenté de dessiner un projet cohérent qui répondrait aux problématiques variées de la Roya, et offrirait à tous ses habitants, qu'ils soient permanents ou de passage, un refuge face aux dangers du climat et de l'exil.

7


Fig. 1 : Le village de Tende après la tempête Fig. 2 : Les dégâts dans la vallée de la Vésubie Photographies : Jeanne Frank / Divergence

8


Introduction

Notre site d'études est la commune de Breil-sur-Roya, située dans la vallée de la Roya, à l'Est des Alpes-Maritimes, à quelques kilomètres de la frontière italienne. C'est quelques jours après les inondations du 3 octobre 2020, dont le lourd bilan humain et matériel a été relayé par toute la presse nationale, que nous avons décidé de faire de ce territoire, alors inconnu pour nous, le terrain d'étude de notre diplôme. Ces inondations, arrivées dans la nuit du 2 au 3 octobre, ont été provoquées par la tempête Alex, qui s'est formée au-dessus de l'Atlantique avant de traverser l'Europe centrale. En se décalant vers l'Est, elle a causé un phénomène d'épisode méditerranéen exceptionnel, engendrant des orages stationnaires violents dans les Alpes-Maritimes, qui ont conduit aux crues de plusieurs cours d'eau d'altitude. En quelques heures à peine, les vallées de la Tinée, de la Vésubie et de la Roya ont été particulièrement touchées : une dizaine de morts, une centaine de bâtiments détruits et de nombreux ponts et routes emportés. Pour des raisons surtout pratiques - nous voulions nous rendre le plus rapidement possible sur place -, nous avons choisi la Roya parmi ces trois vallées. En effet, elle était à la fois la plus accessible depuis Paris (à peine 1 heure de TER depuis la gare de Nice) et celle qui, dans l’urgence des débuts, semblait s’être le mieux organisée (appels à dons, hébergement des bénévoles, communication en direct de la part de la mairie, etc).

9


Le train nous a déposées à Breil-sur-Roya un jeudi matin, et nous avons instantanément pris part à l’effervescence post-catastrophe. Sans même nous poser la question, nous avons alors choisi cette petite commune en ébullition de 2200 habitants comme site de notre futur projet. Nous avons alors tenté d’analyser et de comprendre ce territoire, qui est celui du bassin versant de la Roya, ainsi que la situation particulière du village de Breil dans cette vallée.

10


I. Le territoire de la vallée de la Roya

Fig. 3 : Carte sensible de la vallée C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

11


Fig. 4 : Situation de Breil-sur-Roya dans la vallée Reproduction personnelle

12


Un territoire transfrontalier La vallée de la Roya est une région naturelle d'environ 600 km2 à cheval entre la France et l’Italie, qui se situe à l’Est du département des Alpes Maritimes et à l’Ouest de la province italienne d’Imperia. La rivière de la Roya prend sa source au col de Tende (frontière franco-italienne) à 1870 mètres d’altitude et s’écoule sur 60 km vers le Sud en passant la frontière italienne, jusqu’à atteindre la Méditerranée à Vintimille (Italie). Plusieurs petits villages se sont développés dans le cours de sa vallée depuis le Néolithique, vivant essentiellement d’agriculture et assez isolés des centres urbains de la côte méditerranéenne. Breil-sur-Roya est l'un d'entre eux : la commune s'étend sur une surface de 81,3 km2 limitrophe avec l'Italie. Très peu urbanisée, son centre ancien s'est développé dans un des méandres de la Roya.

Un climat hybride, entre Alpes et Méditerranée Du fait de sa situation géographique entre Alpes et littoral, la vallée de la Roya bénéficie d’un climat particulier, dû à la rencontre entre les vents de la mer de Ligurie et ceux descendant des sommets alpins (2000 mètres de dénivelé environ du haut de la vallée à son embouchure). Les hivers y sont plutôt doux, les étés secs et les précipitations y sont très irrégulièrement distribuées (maximales en automne mais déficit estival important).

13


Fig. 5 : Les différentes étagements de la vallée Internet, consultables sur

14


Il faut aussi comprendre qu’en fonction de l’altitude, de l’exposition des versants et de la présence ou non de vent, tous les vallons, petites vallées et cuvettes qui forment le bassin versant de la Roya ont un microclimat particulier. Cette multitude de microclimats est à la base d’une richesse floristique et faunistique importante : en effet, toutes les combinaisons différentes de facteurs climatiques (température, altitude, exposition au soleil et aux vents) et extra climatiques (pente, potentialité et nature des sols) favorisent la croissance d’un type particulier de végétation, constituant l’habitat de certaines espèces et non de certaines autres.

Au niveau de la flore on trouve ainsi des espèces de fleurs endémiques, des feuillus typiques du bassin méditerranéen (oliviers, chênes pubescents, châtaigniers) ainsi que des conifères divers (pins, mélèzes, sapins, épicéas), tandis qu’au niveau de la faune, la région est connue pour héberger dans son extrême-nord quelques loups, des chamois et bouquetins, des marmottes, des gypaètes ainsi que de nombreux troupeaux de brebis Brigasques. C’est pour cette raison que la vallée de la Roya et les territoires transfrontaliers qui l’entourent constituent un point chaud de la biodiversité. Une partie du bassin versant est d’ailleurs intégrée au Parc National du Mercantour.

15


Fig. 6 : Carte de la végétation du bassin versant Reproduction personnelle

16


Fig. 7 : La végétation de la vallée en fonction des étagements montagneux Yann de Natale / La vallée de la Roya, l’éloge de la lenteur

17


La commune de Breil-sur-Roya, étant donné sa surface étendue et sa forte proportion en espaces naturels, englobe une grande diversité de paysages en fonction des étagements (cultures d’oliviers, pinède, chêneraie, bois de mélèzes et de sapins), même si son altitude reste relativement basse par rapport aux villages plus au Nord de la vallée. Le centre ancien est en effet situé à 300 mètres par rapport au niveau de la mer : le village est donc encore surtout sous influence méditerranéenne, avec des étés très secs et des hivers doux où la neige est rare.

Un développement marqué par une histoire forte On a retrouvé des traces d’occupation humaine de la vallée de la Roya antérieures à l’Âge de Bronze sur l’actuelle commune de Tende, sous la forme de près de 50 000 gravures rupestres en extérieur, sur des affleurements rocheux. Ces représentations très particulières forment ce que l’on appelle la Vallée des Merveilles, aujourd’hui considérée comme un patrimoine archéologique unique en son genre, perché à plus de 2000 mètres d’altitude. La partie française du bassin versant de la Roya est néanmoins toujours restée une région assez sauvage et peu anthropisée : ce sont les forêts et les prairies d’altitude qui dominaient, même si quelques villages se sont historiquement développés aux abords directs de la rivière. Ils sont au nombre de sept. En allant du nord vers le sud : Tende, La Brigue, Fontan, Saorge, Breil-sur-Roya, Sospel et Moulinet.

18


Fig. 8 : La Vallée des Merveilles Internet, consultable sur https://www.mongr.fr

Fig. 9 : Les villages de la vallée (de gauche à droite : Tende, La Brigue, Fontan, Saorge, Sospel, Le Moulinet, Breil-sur-Roya) Internet, consultable sur https://www.wikipédia.fr

19


Ces villages ont longtemps constitué des étapes de la “route du Sel” ou route Royale, ancien chemin commercial de muletiers transformé au XVIIIème en itinéraire routier stratégique reliant le comté de Nice à Turin, via le col de Tende. La région étant annexée tour à tour par la France et la Savoie au fil des siècles, l’architecture de ces villages reste fortement marquée par le style vernaculaire ligure, avec des bâtiments hauts et étroits en pierre calcaire accrochés à la pente de la montagne. Au niveau des édifices religieux, très nombreux dans toute la vallée, on observe également une tradition ancrée du baroque italien au niveau des façades et des intérieurs. La Roya est donc une vallée à la géographie, l’identité, l’histoire et le dialecte profondément transfrontaliers : certains territoires, comme les villages de Tende et La Brigue, n’ont été rattachés à la France qu’en 1947. Cependant, bien qu’historiquement reliés par la route aux centres urbains français et italiens, les villages de la vallée sont finalement toujours restés isolés du reste de la région, de par leur situation géographique particulièrement enclavée et les conditions climatiques assez rudes du nord de la vallée.

L'arrivée du train, “ligne de vie” de la vallée Après l’annexion de la Moyenne Roya à la France en 1860, le rôle frontalier stratégique de la vallée est reconnu et elle commence donc à faire l’objet d’aménagements importants, comme des

20


Fig. 10 : Les églises remarquables de la Route du Sel Internet, consultable sur https://www.wikipedia.fr

21


Fig. 11 : Les églises de Tende, Piène Haute, Breil sur Roya Photos personnelles

Fig. 12 : Chapelle Sainte Catherine, Breil Photos personnelles

22


équipements hydroélectriques, mais surtout l'ouverture de deux lignes de train franco-italiennes en 1928. L’une relie Nice à Cuneo en passant par tous les villages de la vallée, et une seconde relie le village de Breil-sur-Roya à Vintimille, sur le littoral. Passant par des zones montagneuses très tourmentées comprenant rivières, gorges étroites et cols, la ligne Nice-Cuneo a nécessité la construction de nombreux ouvrages d’art (ponts suspendus au-dessus du vide, tunnels hélicoïdaux, arches), véritables prouesses techniques pour l’époque. La Compagnie des chemins de fer Paris-Lyon-Méditerranée (PLM) a également construit dès le début des années 1920 une gare pour chaque village de la vallée. Leurs architectures, toutes différentes et inspirées des constructions régionales traditionnelles, constituent aujourd'hui un patrimoine important de la vallée, bien qu'elles n'accueillent plus autant d'usagers et d'activités qu'autrefois et qu'elles soient souvent en partie inoccupées. Cette ligne porte aujourd'hui le nom de “Train des Merveilles” car elle mène à la vallée des Merveilles et ses gravures rupestres, et est beaucoup empruntée par les touristes, qui sont assez nombreux l’été à séjourner dans la vallée. Aujourd’hui, la population active du village de Breil-sur-Roya et de l’ensemble de la vallée reste très dépendante de ces infrastructures ferroviaires, en particulier pour les déplacements pendulaires vers Nice et Vintimille. Ces deux lignes de train permettent ainsi de réduire le trafic international sur la RD 6204, qui traverse le fond de la vallée et dessert tous les villages. Et si le coût de son entretien a longtemps joué en sa défaveur et

23


Fig. 13 : Le Train des Merveilles Reproduction personnelle

24


Fig. 14 : La construction du plateau de la gare de Breil-sur-Roya Internet, consultable sur https://www.geneanet.org/

25


Fig. 15 : La ligne de train de la Vallée Internet, consultable sur https://www.nicetourisme.com/

26


que plusieurs trains quotidiens ont été supprimés ces dernières années, la ligne Nice-Cuneo a pourtant joué un rôle décisif pour la vallée au lendemain de la tempête Alex. Toutes les routes reliant le nord de la vallée à Breil-sur-Roya étant détruites, elle est devenue le seul accès terrestre aux communes de la vallée, permettant l’acheminement de vivres et de matériels aux sinistrés, mais aussi leur évacuation vers Breil et Nice, où la plupart ont été relogés sur le court terme. La ligne de chemin de fer est donc ainsi devenue la “ligne de vie”, le “cordon ombilical” de la vallée en attendant que les routes soient reconstruites, ce qui prendra probablement entre 2 et 3 ans.

L’affaiblissement économique et démographique de la vallée La partie française du bassin versant de la Roya est aujourd’hui peu peuplée par rapport à l’étroit littoral mentonnais très urbanisé situé à une dizaine de kilomètres plus au sud. Ses sept communes représentent en tout près de 600 km carré et comptaient en 2018 environ 9900 habitants : la densité démographique de ce territoire (17 habitants / km carré) est donc extrêmement faible, et est même en déclin, du fait de l'attrait économique grandissant de Nice et Menton. Ce dépeuplement progressif est amené à s’accentuer avec la

27


14

Fig. 16 : Carte sensible des villages de la vallée C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

28


Fig. 17 : Comparaison entre la superficie de la Vallée de la Roya avec la petite couronne de Paris Reproduction personnelle

Fig. 18 : La densité de population dans la vallée C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

29


catastrophe de la tempête Alex, qui a condamné certains sinistrés à partir définitivement, et convaincu plusieurs autres familles de s’installer ailleurs. En 2017, le village de Breil-sur-Roya compte 2158 habitants, un chiffre en baisse depuis 4 ans. La population de la vallée de la Roya est plutôt vieillissante (près de 40% d’habitants de plus de 60 ans) et avec de faibles revenus (18 796€ de revenu médian annuel à Breil-sur-Roya en 2018 pour 21 730€ à l’échelle nationale). Le taux de pauvreté pour le village de Breil est de 18%, contre 14,5% à l’échelle du pays. Au niveau du secteur de l’emploi, 1/4 des actifs de la vallée travaillent en dehors du territoire de la vallée, principalement sur le littoral : le tissu économique local ne fournit visiblement pas assez d’opportunités pour les habitants de la Roya. 88% de ces emplois sont dans le secteur tertiaire, tandis que l’agriculture, autrefois activité principale des Royasques, ne représente plus que 8% environ des emplois. Quant au domaine de l’éducation, la vallée connaît aujourd’hui une pénurie d’établissements scolaires. En effet, si les jeunes peuvent effectuer la première partie de leur scolarité dans la vallée, qui compte quelques écoles primaires et un seul collège à Breil-sur-Roya, ils sont contraints dès le lycée d’intégrer un internat et de poursuivre leurs études sur le littoral.

30


Une attractivité majoritairement saisonnière Aujourd’hui, en terme du parc de logements, la vallée est statistiquement plus le terrain de jeu des touristes et des Niçois aisés que des résidents permanents : on compte davantage de résidences secondaires (50% environ) que de résidences principales (40%). La grande majorité de ces résidences principales sont néanmoins occupées par leurs propriétaires, et non des locataires : ce taux de propriété élevé s'explique par un coût assez bas du foncier, le territoire étant rural et enclavé. Le village de Breil-sur-Roya, à l'image de tous les autres villages de la vallée, est très peu dense, et peu construit : les zones urbanisées représentent moins d’un kilomètre carré sur les 81,3 km² de l’ensemble de la commune. De plus, on constate depuis quelques dizaines d’années, à Breil comme dans toute la Roya, une désertion des centres-villes historiques : bien que présentant un intérêt patrimonial certain, la plupart d’entre eux sont en mauvais état. Certaines maisons tombent en ruine et deviennent dangereuses pour le voisinage, les rues sont souvent étroites et escarpées du fait de la typologie de ces villages à flanc de falaise, et la plupart des habitants préfèrent se tourner vers des logements plus récents hors des centres-villes, où ils peuvent profiter d’une vue dégagée, de plus de lumière, et d’un jardin. Le centre ancien de Breil, particulièrement dégradé et mal exposé (Nord-Ouest) est également sujet à une autre problématique : de nombreuses maisons du nord du village ont été construites sur un sol alluvionnaire instable appartenant autrefois au lit de la Roya ayant été asséché par l’homme au cours du temps.

31


Fig. 19 : Le centre ancien de Breil-sur-Roya Reproduction personnelle

Fig. 20 : La typologie de logements du centre-ville historique Reproduction personnelle

32


Fig. 21 : Les façades de centre-ville historique Photographies personnelles

33


Ces sols s’enfoncent aujourd’hui sous le poids des lourdes habitations de pierre qui y ont été construites, et ces tassements fragilisent les maisons, les rendant peu à peu inhabitables. A l’instar de la maison Guidi, construction emblématique du village aujourd’hui étayée pour éviter qu’elle ne s’effondre, plusieurs maisons en bordure de la Roya ont été placées sous arrêté de péril imminent, et il est prévu qu’on les détruise dans un futur proche. Les inondations du 3 octobre n’ont fait qu’accélérer le processus : la boue a envahi les places Brancion et Biancheri, ainsi que les sous-sols et caves de toutes les maisons proches de la rive. Plusieurs ont été évacuées définitivement et seront à terme détruites.

Des traditions agricoles ancrées Les habitants de Breil ont longtemps vécu essentiellement d’agriculture : l’élevage (ovin et caprin) constituait alors l’activité principale de la vallée et occupait une place importante dans son économie. On y pratiquait également (et on y pratique encore) l’oléiculture, la castanéiculture, le maraîchage et la culture d’arbres fruitiers, mais en moindre proportion étant donné le relief montagneux de la région.

34


Fig. 22 : La maison Guidi et autres bâtiments de la place Brancion en arrêté de péril imminent Photos personnelle

Fig. 23 : Fiche d’arrêté de péril imminent Photographies personnelles

35


Fig. 24 : La place Biancheri le 3 octobre 2020 Internet, consultable sur

36


Ce sont ces activités qui ont modifié le paysage de la vallée de la Roya, au travers d’aménagements destinés à faciliter la culture sur les pentes : les restanques. Il s’agit de terrasses retenues par des murs de soutènement en pierres sèches, traditionnellement dédiées à la culture des oliviers et des arbres fruitiers. La plupart des jardins et domaines agricoles de la vallée sont aujourd’hui encore aménagés ainsi, les restanques permettant en plus de lutter contre l’érosion et de maximiser l’infiltration des eaux de pluie dans le sol. L’olivaie breilloise représente donc un atout paysager et social fort pour la commune. Au-delà de la valorisation des récoltes, elle structure le paysage jusqu’à 700 m d’altitude, par les lignes des murs de restanques, soulignant le moutonnement des frondaisons gris-vert caractéristiques. Elle constitue également un rempart contre la propagation des incendies. Les secteurs agricoles breillois résultant d’une forte occupation familiale,- et non professionnelle -, permettent aujourd’hui de sauvegarder une partie des paysages de restanques et de l’olivaie. La pratique du pastoralisme traditionnel a elle aussi permis d’aménager et d’entretenir certains territoires de la vallée, notamment ceux des alpages d’altitude. Le principe est que les bêtes hivernent dans la vallée (voire sur le littoral) où les températures sont plus clémentes, et transhument dans les alpages d’altitude dès le début de l’été, pour profiter d’herbages plus jeunes et plus nutritifs. Les troupeaux permettent ainsi à la fois de limiter le développement de la forêt, qui “grignote” petit à petit les milieux ouverts des prairies d’alpages et d’entretenir les prairies de fauche, utilisées par les bergers pour constituer le stock hivernal de fourrage. Avec le déclin de ce mode d’élevage saisonnier, les prairies d’altitude se sont fortement refermées en

37


un demi-siècle, rattrapées par les forêts de conifères. Et pour les éleveurs qui ont conservé cette tradition de la transhumance, elle s’effectue aujourd’hui le plus souvent par la route, en bétaillère, et non plus à pied à travers la montagne comme autrefois. Aujourd’hui, le dénominateur commun entre tous les habitants de la vallée, quelle que soit leur origine, c’est l’auto-construction et l’agriculture vivrière destinée à l’autoconsommation, du fait de la difficulté d’acheminement et d’accès dans la vallée. Cette relative autonomie constructive des habitants donne ainsi lieu à des architectures de bric et de broc, réalisées avec ce qui est disponible sur place et sans connaissances techniques particulières. De manière générale, et de ce que nous avons pu voir sur place, la population royasque est marquée par un certain manque d’identité, lié au changement répété de nationalité de la vallée, mais aussi lié au fait que ses habitants ne sont que très rarement originaires de la région. De plus en plus de jeunes urbains, français ou étrangers viennent en effet s’y installer pour développer des micro-communautés alternatives tournées vers un mode de vie décroissant, sur le modèle des «soixante-huitards» qui sont venus s’y implanter dans les années 1970.

38


Fig. 25 : Coupe d’une restanque Reproduction personnelle

Fig. 26 : L’intégration des restanques à l’environnement de la vallée Photographies personnelles

39


Fig. 27 : Les éléments traditionnels de la vallée : la culture de l’olivier, le maraîchage en restanques, le stockage de l’eau dans l’aiguier Reproductions personnelles

40


Fig. 28 : Les activités traditionnelles des habitants de Breil : l’auto-construction, l’agriculture vivrière, le pastoralisme Reproduction personnelle

Fig. 29 : Les autoconstructions dans les montagnes de Breil Photographies personnelles

41


La Roya, une véritable terre d’accueil

La vallée de la Roya, par son climat méditerranéen, son isolement et ses paysages naturels préservés, est donc aussi une terre d’accueil, qui attire entre autres un certain nombre de touristes. A la haute saison, les villages se remplissent, et de nombreuses activités sportives en plein air sont proposées aux touristes, presque toutes autour de la Roya et de ses affluents : canyoning, rafting, kayak, randonnée, via ferrata, etc. La vallée représente également aujourd’hui dans l’imaginaire collectif un bastion de résistance et de fraternité, portée par de nombreuses associations locales créées dans le but d’imaginer le futur de la vallée : Roya Citoyenne, Les Ami.e.s de la Roya, Défend ta citoyenneté, Festival des Porteurs d’Humanité, etc. Composées aussi bien de membres locaux que de néo-arrivants qui ont quitté la ville pour s’installer ici, ces associations promeuvent l’agriculture biologique, les circuits courts, l’autosuffisance, mais surtout l’aide aux migrants, qui sont nombreux à affluer à pied depuis l’Italie. Depuis 2015 en effet, la Roya est devenue une souricière pour celles et ceux qui cherchent à contourner les contrôles du postefrontière de Menton, sur la côte, espérant entrer en France pour y demander l’asile et y trouver refuge, ou bien continuer leur route vers la Grande-Bretagne. Par l’emploi des militaires de l’opération Sentinelle et de nombreux représentants des forces de l’ordre, la vallée a été militarisée, et aujourd’hui des contrôles d’identité ciblés fréquents, voire systématiques dans le village

42


de Sospel ont été mis en place dans toute la vallée, au point de pousser les migrants à prendre toujours plus de risques, parfois jusqu’à la mort. Aujourd’hui, s’ils sont contrôlés, ils sont systématiquement renvoyés dans des camps en Italie, qu’ils soient majeurs ou mineurs. Plusieurs particuliers se sont opposés à ces mesures, en aidant les migrants à traverser la frontière jusqu’en France, en leur proposant un logement dans des bâtiments désaffectés, ou bien en les conduisant jusqu’à Nice pour régulariser leur situation. Ces habitants ont par la suite formé plusieurs associations pour organiser la solidarité et se synchroniser au mieux dans leurs actions. Cédric Herrou est l’un d’entre eux : après avoir été condamné à quatre mois de prison pour avoir aidé quelques 200 migrants à traverser la frontière italienne, et en avoir hébergé jusqu’à 60 en même temps chez lui, il a créé l’association “Défend ta citoyenneté” (Emmaüs Roya depuis 2019) qui loge et nourrit une petite dizaine de sans-papiers en échange de leur aide sur l’exploitation agricole. En participant aux activités de maraîchage, d’élevage de volaille et d’oléiculture, ces exilés bénéficient d’une allocation de 355 euros/mois et peuvent cotiser à la Sécurité Sociale, tout en apprenant le français et en s’intégrant peu à peu à la population du village de Breil-sur-Roya, où se situe la ferme. s’installer pour de bon dans la vallée. C’est pour l’instant une initiative isolée, et elle rencontre encore de nombreux détracteurs dans la vallée et ailleurs (en première ligne E. Ciotti, député des Alpes Maritimes et C. Estrosi, maire de Nice), qui voient l’arrivée des migrants d’un mauvais œil, en faisant le lien avec les récents attentats de Nice. Mais le défi d’intégration, ou tout du moins d’hospitalité commence néanmoins, peu à peu, à être relevé, et une petite minorité de

43


printemps

été

automne

hiver

Fig. 30 : Les flux de population en fonction des saisons Reproduction personnelle

44


Fig. 31 : Les trajets des migrants dans la vallée Reproduction personnelle

45


Fig. 32 : La vie agricole communautaire de l’association Emmaus Roya Denis Meyer

46


Fig. 33 : La vie agricole communautaire de l’association Emmaus Roya Denis Meyer

47


migrants a aujourd’hui fini par s’installer pour de bon dans la vallée. Aujourd’hui, la vallée est ainsi traversée par de nombreux flux intermittents, en plus de ses habitants permanents : les touristes et randonneurs en été, les néo-ruraux qui quittent les villes, les bergers qui remontent traditionnellement dans le nord de la vallée l’été et qui redescendent en automne, et enfin les migrants, qui sont installés dans les camps de Vintimille et cherchent à rejoindre la France par la frontière montagneuse.

48


II. Un territoire soumis au risque

Fig. 34: Les différents risques du bassin versant Reproduction personnelle

49


Comme on a pu le voir plus haut, le territoire de la vallée de la Roya est toujours resté peu anthropisée du fait de son contexte géographique accidenté et difficile d'accès. Les risques auxquels il est soumis ont également joué en défaveur de son développement démographique : les glissements de terrain sont nombreux dans le nord de la vallée (dû à l'érosion des pentes raides des montagnes pré-Alpines), ainsi que les éboulements et chutes de blocs, favorisés par des précipitations importantes, la fonte des neiges et le phénomène du gel-dégel. C'est également une région qui, par sa proximité avec la Méditerranée, est sujette à de violentes précipitations qu'on appelle les épisodes méditerranéens, étant notamment à l'origine des inondations du 3 octobre 2020. C'est l'eau, qu'elle provienne de la fonte des glaciers et des neiges, des lacs et affluents de la Roya, des nappes phréatiques ou bien des précipitations, qui a façonné le visage actuel de la vallée et qui continue à la transformer, en redessinant le lit des cours d'eau, en faisant glisser des pans de terrain ou en inondant des villages. Pour analyser la vallée d'un point de vue hydrographique, nous sommes entrées en contact avec Stéphanie Bidault, membre du CEPRI (Centre Européen de Prévention du Risque Inondation) et Pierre Brigode, hydrologue et maître de conférences à l'Université Côte d'Azur. Nous avons ainsi pu comprendre les composantes des phénomènes climatiques particuliers de la région, et orienter peu à peu notre projet vers un propos global à l'échelle du bassin versant tout entier.

50


Fig. 35 : Plan de prévention des risques naturels (mouvements de terrain) Documents de la mairie de Breil

51


Fig. 36 : La maquette du bassin versant Photo personnellle

Fig. 37 : Coupe du bassin versant Reproduction personnelle

52


La notion de bassin versant

Le bassin versant de la Roya (d'une surface totale de 680 km2) correspond au territoire drainé par la Roya et ses affluents sur un ensemble de versants : ses limites sont celles des lignes de crêtes au-delà desquelles les eaux de pluie ne convergent plus vers la Roya, mais vers un autre cours d’eau. La topographie de ce bassin versant (pentes, vallons, gorges et crêtes) découle donc directement du trajet emprunté pendant des millénaires par les eaux de ruissellement pour rejoindre leur exutoire (point de sortie vers lequel convergent toutes les eaux d’un même bassin versant). En emportant avec elles les sédiments dû à l’érosion des sols, les eaux (de pluie et des glaciers) finissent ainsi par modifier les reliefs du bassin versant, en le creusant et en s’y infiltrant, et lui donnent l’aspect qu’il a aujourd’hui.

La rivière de la Roya La Roya et ses 20 affluents principaux sont caractérisées par un régime torrentiel, c’est-à-dire influencé de manière prépondérante par les précipitations et le dégel du printemps. Cela se traduit par de gros débits et des crues rapides et parfois dévastatrices au printemps et en automne, tandis que l’hiver et l’été se caractérisent par des étiages (basses eaux) importants. Cette inégalité de la répartition en eau selon les saisons est donc une composante essentielle de ce territoire et influence

53


directement la vie et les activités de ses habitants. Le nord de la vallée, qui atteint les 1870 mètres d’altitude, est également caractérisé par la présence de plusieurs lacs d’altitude, aussi bien naturels qu’artificiels. Ces derniers ont été créés avant la 1ère Guerre mondiale pour l’alimentation hydroélectrique des villes et villages en contrebas, et jouent encore aujourd’hui un rôle capital de châteaux d’eau pour le département dans son ensemble. Ils sont dotés de vannes pour réguler les réserves d’eau en fonction des besoins et alimentent les cinq centrales hydroélectriques de la Roya : les Mesches, Saint-Dalmas, Paganin, Fontan et Breil-sur-Roya. De l’état de conservation de ces lacs et de la gestion de leurs ressources hydriques dépend l’approvisionnement en énergie électrique de 100.000 personnes environ. En tout, 8 millions de m3 d’eau sont stockés par les barrages tout le long de la vallée. Le village de Breil-sur-Roya est également doté d’un lac de retenue depuis les années 1930, dont les travaux ont été entrepris par la Société hydro-électrique du Sud-Est. L’eau est retenue par un petit barrage situé au sud du centre ancien, dans un méandre de la Roya, et alimente la centrale EDF de Breil, située en contrebas du village dans un de ses hameaux.

54


Fig. 38 : Diagramme des activités et du climat en fonction des saisons Reproduction personnelle

Fig. 39 : Diagramme de la ressource en eau en fonction des saisons Reproduction personnelle

55


Fig. 40 : Les lacs d’altitude, naturel ou artificiels (Lac Saorgine et Lac des Mesches) Internet, consultable sur https://breil-sur-roya.fr/

56


Fig. 41 : Carte des installations du réseau hydroélectrique de la Roya Internet, consultable sur https://breil-sur-roya.fr/

57


Fig. 42 : Les infrastructures hydroliques du village de Breil Reproduction personnelle

58


Les épisodes méditerranéens, des phénomènes de plus en plus fréquents Le contexte climatique particulier de la Roya, caractérisé par une répartition très inégale des précipitations au cours de l'année, est soumis au phénomène fréquent des épisodes méditerranéens, remontées d’air chaud et humide en provenance de la Méditerranée qui entrent en conflit avec l’air froid d’altitude, et provoquent des orages stationnaires violents. L’équivalent de plusieurs mois de précipitations tombe alors en seulement quelques heures au même endroit, et les nappes phréatiques, incapable d'absorber cette quantité d'eau, se retrouvent rapidement saturées. L'eau ruisselle alors jusqu'aux cours d'eau les plus proches, sa vitesse étant accentuée par la pente. On assiste alors à des crues très violentes des torrents de montagne, puis des rivières qu'ils alimentent. L'eau emporte tout sur son passage : arbres, terre, pierres, routes, ponts, bâtiments. Charriés par la rivière, ces matériaux s'accumulent ensuite en travers du cours d'eau pour former des embâcles (sortes de petits barrages) qui, lorsqu'ils cèdent sous le poids de l'eau, créent des vagues incontrôlables et très dangereuses. C'est ce qui s'est passé dans la nuit du 2 au 3 octobre 2020 au-dessus des Alpes-Maritimes. Avec le dérèglement climatique, il est prévu que ces épisodes s’accentuent, aussi bien en termes de fréquence que d’intensité.

59


Fig. 43 : Le phénomène d’épisode méditérranéen Reproduction personnelle

60


61


La tempête Alex, catastrope naturelle dévastatrice Le 3 octobre 2020, un de ces épisodes, le plus violent enregistré jusqu'ici dans la région, est causé par l’arrivée de la tempête Alex en provenance de l’Atlantique, qui frappe la vallée de la Roya et ses trois voisines l'Estéron, la Tinée et la Vésubie. 560 millions de tonnes d'eau s'abattent en quelques heures sur la région, l'équivalent environ de 3 mois de précipitations en temps normal. Le bilan est très lourd dans ces vallées : 9 morts, 9 disparus et des dégâts matériels très importants (plus d’une centaine de maisons détruites, des ponts et routes emportés). Le village de Breil-sur-Roya, dans lequel nous nous sommes déplacées moins d’un mois après la catastrophe, fait partie des plus touchés. La mairie, la gendarmerie, de nombreux terrains de sports, le camping, les deux églises principales, le Café des Alpins (le seul du village), la station-essence, et des dizaines de logements (entre autres) ont été évacués et rendus inutilisables par la crue, sans compter les kilomètres de routes et de chemins qui longeait la Roya et ses affluents, ainsi que plusieurs ponts reliant les deux rives du village. Une organisation particulière, celle de l’urgence, s’est alors mise en place dans le village, chapeautée par l’adjointe au maire.

62


Fig. 44 : Cumul de pluies du vendredi 2 octobre, en mm Météo France

Fig. 45 : Diagramme de pluies du vendredi 2 octobre à Tende, en mm Météo France

63


Des dégâts impactant l’intégralité du territoire La première des conséquences de la tempête Alex est la perte de vies humaines. Sur les trois vallées touchées, elle a causé le décès de 9 personnes dont 3 dans la Roya, et la disparition de 9 personnes, dont 3 également dans la Roya. L’impact psychologique est beaucoup plus difficilement quantifiable. Il a trait aux traumatismes vécus pendant la tempête (isolement, danger...) pouvant générer un stress post-traumatique. Cet impact psychologique tient également à la perte qui a suivi la tempête, vécue ou ressentie : la perte matérielle pour certains (habitations, véhicules, terrains...), mais aussi la perte de repères pour l’ensemble des habitants (paysages modifiés, voies de communication coupées...). Le tissu économique de la vallée de la Roya est fragilisé par les dommages matériels subis par les entreprises : destruction de locaux professionnels, perte de matériel... Mais, au-delà des dégâts matériels, c’est la perte d’exploitation qui a les conséquences les plus importantes : elle est liée aux difficultés d’approvisionnement ou d’accès à l’outil de travail suite à la tempête, et est bien moins systématiquement indemnisée que les dégâts matériels. Ainsi, les entreprises (commerçants, artisans, agriculteurs) sont fortement impactées par la destruction des voies de communication, limitant fortement leur approvisionnement , leur accessibilité et leur déplacement. En ce qui concerne le secteur du tourisme, de nombreux professionnels sont impactés par la destruction ou l’endommagement des sites naturels ne leur permettant plus de proposer des activités de plein air : sentiers de randonnée, canyons, cours d’eau (pratique des sports d’eau vive)...

64


Fig. 46 : Plan des dégâts de la tempête sur le village de Breil SERTIT

65


La destruction de nombreuses capacités d’accueil touristiques (hôtels, campings) et les difficultés de déplacement dues à l’endommagement des voies d’accès à la vallée et aux sites touristiques font de l’accueil touristique dans la Roya un véritable défi requérant des capacités d’adaptation du territoire et de la part des professionnels. La tempête Alex a de fortes conséquences sur le plan social, engendrant une précarisation des habitants de la vallée de la Roya. Les difficultés de transport d’abord, humain comme matériel, ont un impact social fort et inégal d’un village à l’autre. Les habitants sont entravés dans leurs déplacements, que ceux-ci soient professionnels (travailleurs en dehors de la vallée), scolaires (accès aux lycées sur la côte méditerranéenne), médicaux, alimentaires (accès aux commerces), de lien social (visite de proches)... De même, l’approvisionnement des commerces de première nécessité est fortement impacté par les difficultés de transport, entraînant un report de nombreux habitants sur les dispositifs d’action sociale comme l’aide alimentaire. Par ailleurs, l’impact social est fort pour les personnes dont l’habitat a été détruit ou fragilisé, entraînant départ du domicile, hébergement d’urgence et relogement dans des communes différentes de leur commune d’origine dans la plupart des cas.

66


Fig. 47 : L’impact de la tempête sur les constructions Photographies : Jeanne Frank

67


Fig. 48 : L’impact de la tempête sur les constructions Photographies : Jeanne Frank

68


Conclusion

Cette analyse de l’ensemble du territoire, couplée à notre immersion sur le site, nous a permis de comprendre la diversité de ses enjeux complexes et imbriqués, et de les synthétiser en deux problématiques principales autour desquelles nous avons axé notre travail de toute l'année : > Comment continuer à habiter ce territoire en s’adaptant aux risques naturels du climat ? > Comment rendre la vallée accueillante et hospitalière pour ses habitants actuels mais aussi pour ceux qui la traversent à la recherche d'une vie meilleure ? A la première de ces questions, il nous semble impératif de répondre à l'échelle du territoire, celle du bassin versant de la Roya, pour avoir à terme, un impact sur les inondations. Il s'agit donc d'un travail paysager de grande ampleur, celui de la gestion de la ressource en eau dans tout le bassin versant, qui se déploiera à tous les étagements de la montagne. A la deuxième question, nous répondons par un projet à l'échelle plus architecturale, au sein du village de Breil-sur-Roya, tourné vers l'hébergement à court terme des personnes en demande d'asile qui passent par la vallée, ainsi que leur intégration à terme au reste de la population royasque.

69


Bibliographie

BOTTON Charles, Histoire de Breil et des Breillois. Editions du Cabri, 1996 DE BEAUCHANP Philippe, L'architecture rurale des Alpes-Maritimes. Edisud, 1992 BANAUDO José, BRAUN Michel, DE SANTOS Gérard, Les trains du Col de Tende (volumes 1 et 2). Association de l'Ecomusée du Haut Pays et des Transports, 2020

70


Annexes

Fig. 49 : Les dégâts de la tempête C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

71


Fig. 50 : Les dégâts de la tempête C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

72


Fig. 51 : Les dégâts de la tempête C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

73


Fig. 52 : Les dégâts de la tempête C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

74


7

Fig. 53 : La Roya, fleuve de vie C. Debackere, A. Migeon, Emmaus Roya / Le journal du débord

75


76




Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.