NUMERO 44 | ETE 2012
Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | Eper | www.alliancesud.ch
135’000 signatures pour tenir les multinationales en laisse Droit sans frontières : Le bon pas au bon moment
Banque mondiale : Gros défis pour le nouveau chef
News Fin de l’Action Place financière suisse L’assemblée générale de l’Action Place financière Suisse (AFP) a décidé fin juin de dissoudre l’organisation. Le travail sur les contenus sera poursuivi par son membre principal, la Déclaration de Berne (DB). Selon son co-directeur Andreas Missbach, la DB s’est déjà déclarée prête à créer 20 pour cent de poste supplémentaire. De plus, une place de stage à durée déterminée devrait être financée avec le reste de la fortune de l’AFP et des dons. L’AFP a été fondée en automne 1978 par plusieurs organisations de politique de développement pour soutenir l’initiative du Parti socialiste sur les banques. Plus tard, elle s’est occupée de thèmes importants comme les affaires des banques suisses en Afrique du Sud, l’argent des potentats et la procédure d’insolvabilité des Etats très endettés. L’AFP a aussi été un partenaire important d’Alliance Sud. Elle se trouvait cependant depuis longtemps dans une situation financière difficile. Elle ne pouvait finalement financer qu’un poste à 60 pour cent, insuffisant pour fournir un travail efficace. Le décès inattenph
Impressum GLOBAL+ paraît quatre fois par an. Editeur: Alliance Sud Communauté de travail Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | Eper Monbijoustr. 31, Postfach 6735, 3001 Berne, Tel. 031 390 93 30, Fax 031 390 93 31 E-Mail: globalplus@alliancesud.ch Internet: www.alliancesud.ch Rédaction: Michel Egger (me), Isolda Agazzi (ia), Tel. 021 612 00 95 Concept graphique: Clerici Partner AG Mise en page: Frédéric Russbach Impression: s+z: gutzumdruck, Brig, 6-2011 Tirage: 1500 Prix au numéro: Fr. 7.50 Abonnement annuel: Fr. 30.– Abonnement de soutien: min. Fr. 50.– Prix publicité / encartage: sur demande Couverture: Philipp Rohrer. Dernière page: Picasa/Jan Madhyam Prochain numéro: septembre 2012.
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du de son responsable André Rothenbühler en janvier 2012 a mis un terme définitif aux activités de l’AFP. Une majorité pour augmenter l’aide 62 pour cent des citoyennes et citoyens suisses sont favorables à une augmentation de l’aide au développement – 5 pour cent de plus qu’il y a un an. C’est ce que montre l’étude Sécurité 2012 publiée récemment par l’Ecole politique fédérale de Zurich (EPFZ). Trois quarts des sondés souhaitent en outre un rôle plus actif de la Suisse dans les conférences internationales. Une confortable majorité soutient les bons offices dans les conflits (71%). Enfin, la relation à l’Organisation des Nations Unies s’est détendue : 68% trouvent que la Suisse devrait « s’engager activement et en première ligne pour les préoccupations de l’ONU » ; cela représente une augmentation de 11 pour cent par rapport à 2011. Cela dit, l’étude révèle également un fort besoin d’autonomie : 80 pour cent estiment que la Suisse devrait rester le plus possible indépendante – économiquement et politiph
quement – des autres Etats. Le rapport sur la sécurité de l’EPFZ paraît annuellement depuis 14 ans et repose sur un échantillon représentatif. Portail Internet sur les droits syndicaux L’ONG Business & Human Rights Resource Centre a lancé début juin un nouveau portail sur le thème Business & Freedom of Association. L’objectif est double. D’une part, créer plus de transparence en montrant quelles entreprises respectent ou non la liberté syndicale, les droits d’organisation, de grève et de négociation collective. D’autre part, montrer que les droits syndicaux et les droits humains fondamentaux ne font qu’un. Le site Internet fournira notamment des nouvelles sur les cas de violations et les bonnes pratiques des entreprises, des rapports et analyses ainsi qu’un guide pratique. Le contenu sera principalement en anglais, mais avec des matériaux dans d’autres langues comme le français et l’espagnol. www.business-humanrights.org/FreedomOfAssociationPortal/Home me
Alliance Sud en un clin d’oeil Présidente Caroline Morel, directrice de Swissaid. Direction Peter Niggli (directeur), Kathrin Spichiger, Andrea Blaser, Case postale 6735, 3001 Berne, Tél. 031 390 93 30, Fax 031 390 93 31, E-mail: mail@alliancesud.ch www.facebook.com/alliancesud https://twitter.com/AllianceSud Politique de développement – Coopération au développement Nina Schneider, Tél. 031 390 93 40, nina.schneider@alliancesud.ch –
Commerce / OMC Michel Egger/Isolda Agazzi, Tél. 021 612 00 95, lausanne@alliancesud.ch
– Finance internationale /Fiscalité Mark Herkenrath, Tél. 031 390 93 35, mark.herkenrath@alliancesud.ch
– Relations publiques Pepo Hofstetter, Tél. 031 390 93 34, pepo.hofstetter@alliancesud.ch – Développement durable / Climat Nicole Werner, Tél. 031 390 93 32, nicole.werner@alliancesud.ch Education Urs Fankhauser/Marianne Gujer, Tél. 031 390 93 39, school@alliancesud.ch Documentation Berne Jris Bertschi/Emanuela Tognola/ Renate Zimmermann, Tél. 031 390 93 37, dokumentation@alliancesud.ch Bureau de Lausanne Michel Egger/Isolda Agazzi/Frédéric Russbach, Tél. 021 612 00 95/Fax 021 612 00 99 lausanne@alliancesud.ch Documentation Lausanne Pierre Flatt / Amélie Vallotton Preisig / Nicolas Bugnon, Tél. 021 612 00 86, doc@alliancesud.ch Bureau de Lugano Silvia Carton/Lavinia Sommaruga Tél. 091 967 33 66/Fax 091 966 02 46, lugano@alliancesud.ch
Daniel Rihs
Eau : quels contrôles ?
Points forts 4
Partenariats public-privé Chasse aux clients subventionnée
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Matières premières Route de la soie convoitée
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Droit sans frontières Bon pas au bon moment
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Banque mondiale Défis pour le nouveau président
Lors d’une récente manifestation à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), Peter Brabeck, président du conseil d’administration de Nestlé, a présenté sa vision d’une politique durable de l’eau. Selon lui, les mécanismes du marché seraient le meilleur moyen de répartir les ressources en eau rares. Cela impliquerait deux choses. D’une part, des prix couvrant les coûts pour l’industrie et l’agriculture ainsi que pour les utilisations quotidiennes excédant les besoins fondamentaux personnels. D’autre part, des droits d’usage de l’eau commercialisables. Afin de réaliser le droit à l’eau comme droit humain, Brabeck postule – « pour les personnes qui n’en ont pas les moyens financiers » – la couverture gratuite d’un besoin fondamental correspondant à 25 litres par jour et par tête. Cette vision – à l’exception du besoin minimal – est aussi celle du Water Resources Group qui réunit des grandes multinationales avec une très haute consommation d’eau. Nestlé, Coca Cola, Rio Tinto et d’autres membres de ce groupe sont en réalité régulièrement en conflit avec des communautés locales, car ils pompent l’eau de leurs territoires. Les habitants et les familles de paysans se plaignent de la baisse de la nappe phréatique ou de phénomènes de pollution. Les usines d’eau en bouteille de Nestlé au Pakistan et au Brésil sont aussi confrontées à de telles plaintes. Une caractéristique de ces conflits est l’absence de mécanismes politiques et d’institutions publiques reconnues qui gèrent les ressources en eau et les distribuent selon des critères publics compréhensibles. A la manifestation de l’EPFZ, j’ai défendu l’idée que l’eau doit être soumise à une administration et à un contrôle publics. Les autorités publiques doivent, bien sûr, fixer un prix afin de pouvoir faire fonctionner les installations hydrauliques. Elles peuvent aussi subventionner la couverture des besoins fondamentaux à travers leur politique de prix. Finalement, elles devraient poursuivre une politique de prix qui n’offre pas de rabais aux gros consommateurs – ce à quoi conduirait le seul jeu du marché – mais au contraire leur facturer des prix croissants afin de les pousser à accroître leur efficacité. Brabeck a répondu qu’il importait peu de savoir qui assure l’approvisionnement en eau – la main publique ou privée – mais que quelqu’un doit le faire. Brabek devrait susciter une discussion dans le Water Resources Group qu’il dirige. Car celui-ci n’a fait jusqu’ici que promouvoir explicitement des partenariats public-privé dans l’approvisionnement en eau. Il est d’ailleurs soutenu en cela par la Société financière internationale de la Banque mondiale. Bien que la Banque mondiale ait reconnu depuis 2005 que les fournisseurs d’eau privé avaient déçu les attentes qu’elle avait placées en eux, elle continue à vouloir faire du secteur privé le principal acteur dans la gestion de l’eau. L’alternative à cette approche est évidente depuis des années: les agences de développement devraient investir dans la réhabilitation et l’extension des réseaux publics d’approvisionnement en eau en octroyant des possibilités de participation aux personnes concernées. La Suisse devrait s’engager pour un tel changement de cap au sein du Conseil des Administrateurs de la Banque mondiale. Peter Niggli, directeur d’Alliance Sud
Bolivie 10 La Paz dénonce ses accords
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Assurances privées ou réseaux publics
Eviter de nouvelles dépendances Les partenariats public-privé de développement ont de plus en plus la faveur des gouvernements occidentaux. Le Conseil fédéral n’est pas en reste. Dans son message sur la coopération internationale 2013-16, il envisage de travailler davantage avec des multinationales. Un trend qui pose beaucoup de questions.
La collaboration entre les agences de développement et les entreprises privées est controversée. Ses partisans estiment que les partenariats public-privé (PPP) – grâce au know-how et aux réseaux des acteurs sur le terrain – permettent, avec un engagement public réduit, de susciter d’importants investissements de grandes entreprises dans des activités signifiantes pour le développement. Ses opposants craignent au contraire que la recherche de profit du secteur privé – en particulier dans l’offre de biens publics comme la santé, la sécurité et l’éducation – contredise les besoins de développement des pays pauvres et restreigne les initiatives locales autodéterminées. La Suisse fait partie des partisans de ces PPP. Selon le nouveau message du Conseil fédéral sur la coopération au développement 2013-16, la Direction pour le développement et la coopération (DDC) entend travailler à l’avenir davantage avec les grandes entreprises suisses. Même si les moda-
Le filon des micro-assurances Ces dix dernières années, la DDC a développé – en collaboration avec des multinationales comme la Zurich, Swiss Re et Allianz Re – une large palette de micro-assurances contre la maladie, les accidents mortels, la grêle, les inondations ou encore la sécheresse. Les assurances-vie arrivent en tête de ces nouveaux produits. En règle générale, elles sont liées à des microcrédits et visent à protéger les proches des créanciers d’une dégringolade dans l’extrême pauvreté. A raison de 2 dollars US par an pour un crédit de 70 à 100 dollars, les coûts sont bas. Les polices ne valent cependant que pendant la durée du crédit et couvrent seulement les intérêts en cours ainsi que les coûts de l’enterrement. En Inde, de concert avec la Banque mondiale et l’Etat, Swiss Re propose depuis deux ans une assurancemaladie avec 63 millions de polices pour des personnes en dessous du seuil de pauvreté. L’Etat finance les cotisations à 100% et assure – pour 12 dollars US par an – jusqu’à quatre personnes par famille. Ces partenariats permettent aux multinationales avant tout de polir leur image et d’ouvrir de nouveaux marchés.
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lités sont encore floues, la DDC semble consciente des risques de telles coopérations. Dans un document de 2009, elle s’est engagée à ne soutenir que les PPP qui contribuent clairement à la réduction de la pauvreté, ne remplacent pas les initiatives locales et ont un effet positif sur les institutions publiques ainsi que sur leurs capacités à résoudre les problèmes. Miroir aux alouettes C’est ici, par exemple, qu’intervient la critique adressée aux micro-assurances, secteur privilégié et emblématique de ces PPP (voir encadré). Les experts de la société civile estiment que les personnes pauvres concernées ne reçoivent que des offres de seconde classe et une couverture de risques discutable. Les polices individuelles les rendraient responsables personnellement de leur situation. Elles libéreraient les gouvernements de leur obligation de mettre sur pied des filets de sécurité sociale solides ainsi que des bons systèmes d’éducation et de santé publique. D’une manière générale, il serait illusoire de croire qu’on peut assurer de manière privée les risques globaux qui frappent avant tout et de manière croissante les populations pauvres. Seuls des mécanismes de redistribution peuvent garantir une répartition équitable des charges au sein de la société. De plus, l’architecture des PPP ne prévoit pas de consultation des personnes concernées. Finalement, l’engagement des assurances privées générerait de nouvelles dépendances. Il contribuerait également à affaiblir non seulement les réseaux locaux comme les communautés de semences et les coopératives, mais aussi les liens familiaux. La DDC devrait donc prendre au sérieux ces critiques dans sa collaboration avec Swiss Re, Allianz Re et la Zurich. Avant la conclusion de nouveaux partenariats, elle devrait – avec la société civile locale – réaliser et publier des évaluations sur leurs impacts négatifs potentiels. Elle devrait aussi clarifier s’il ne serait pas plus judicieux de promouvoir des initiatives locales et des modèles traditionnels plutôt que des multinationales. Elle pourrait ainsi éviter de nouvelles dépendances envers des acteurs qui siègent dans les palais de verre du Nord, bien loin des populations concernées. Nina Schneider
Approvisionnement de la Suisse en matières premières
Mainmise sur la route de la soie ? L’USAM a renoncé à sa demande de lier l’aide au développement à l’accès aux matières pre-
La Suisse peut-elle amener les pays riches en matières premières d’Asie centrale à lui octroyer une sorte de « droits spéciaux » sur les matières premières, en particulier les métaux stratégiques ? La Suisse pourrait-elle – via la « nouvelle route de la soie » d’Asie centrale – développer des relations avec la Mongolie, nouvelle Mecque des multinationales de matières premières ? Le Kazakhstan serait-il prêt à s’engager dans un partenariat sur les matières premières avec la Suisse, selon le modèle de l’accord conclu avec l’Allemagne il y a un an ? Finalement, serait-il possible d’obtenir de la Pologne un « accès privilégié aux ports de la mer Baltique » ? Telles sont les questions que l’Union suisse des arts et métiers (USAM) entend clarifier de manière exploratoire avec le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) et le ministère des Affaires étrangères. L’USAM a présenté en février sa stratégie sur les matières premières. Elle a attiré l’attention en demandant que la Suisse utilise sa coopération au développement pour exiger des pays bénéficiaires un accès garanti à leurs matières premières. Deux parlementaires de l’Union démocratique du centre (UDC) avaient déjà fait en automne la même requête au Conseil fédéral. Celui-ci a toutefois dit non. L’une des raisons est que les récipiendaires de l’aide suisse ne recouvrent qu’en partie les pays riches en matières premières convoitées et en voie de raréfaction. Et une réorientation de l’aide suisse vers ces pays est hors de question. Le Seco craint en outre que des exigences supplémentaires (requérants d’asile, matières premières, et quoi encore ?) rendraient très difficiles, pour ne pas dire impossibles les négociations sur les accords économiques. Risque de détournement de l’aide C’est pourquoi l’USAM a, entre-temps, renoncé à lier de manière générale aide et accès privilégié aux matières premières. Elle se concentre maintenant sur la route de la soie. Il est vrai que les pays d’Asie centrale et la Pologne ont des liens particuliers avec la Suisse. Ils sont tous membres du groupe de droit de vote suisse au Fonds monétaire international (FMI) et à la Banque mondiale. Ils sont pour une part des pays prioritaires de la coopération au développement (Kirghizistan, Tadjikistan, Azerbaïdjan). La Pologne est le deuxième plus grand membre du groupe de droit de vote et elle reçoit la moitié de la contribution suisse à la cohésion européenne. Il y a peu d’objections à opposer à des discussions sur les desiderata de l’USAM, auxquels souscrivent aussi d’autres associations comme celle de l’industrie des
Photo: PeJo / Shutterstock.com.
mières. Elle se concentre désormais sur la route de la soie.
machines. Les membres du groupe de droit de vote avant tout peuvent négocier sur un pied d’égalité avec la Suisse, car ils lui permettent de conserver un siège au directoire du FMI. Il conviendra cependant de veiller à ce que l’argent du développement ne soit pas détourné pour satisfaire n’importe quel besoin en matières premières.
Gydnia (Pologne). L’USAM demande un accès privilégié de la Suisse aux principaux ports de la mer Baltique.
Peter Niggli
Haro sur les restrictions aux exportations ia Lors de la dernière conférence ministérielle de l’OMC à fin 2011, les pays industrialisés ainsi que le Groupe africain ont proposé de limiter les restrictions aux exportations agricoles. Ils ont pour cela invoqué la crise alimentaire de 2008, due selon eux en partie aux mesures restrictives adoptées par quelques grands exportateurs pour assurer leur approvisionnement domestique.
Cette proposition a été combattue par certains pays émergents. Pour plusieurs raisons. Primo, ils craignent que les produits agricoles ne soient qu’une excuse des pays industrialisés pour atteindre un autre objectif, à peine dissimulé : interdire les restrictions aux exportations de toutes les matières premières, à commencer par les ressources naturelles (terres rares, pétrole, gaz, etc). Secundo, les pays émergents veulent préserver leur espace politique, nécessaire pour promouvoir leurs industries de transformation. Les règles de l’OMC n’interdisent pas ces restrictions aux exportations. Tertio, la crise alimentaire est principalement la conséquence des spéculations sur les matières premières et des subventions agricoles des pays industrialisés, qui minent la paysannerie des pays en développement. Quarto, les pays émergents ne comprennent pas pourquoi ils devraient limiter les exportations de produits agricoles, alors que les pays industrialisés rechignent à discipliner les subventions aux exportations de ces mêmes produits.
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« Droit sans frontières » sous la loupe de l’éthique économique
« Bon pas au bon moment »
Un cadre juridique international est nécessaire pour rendre les multinationales comptables en matière de droits humains. Dans la mesure où un tel cadre n’est actuellement pas à l’ordre du jour, il ne reste à court et moyen terme que la voie des réglementations au plan national, ainsi que le demande « Droit sans frontières ». C’est ce qu’affirme Florian Wettstein,
Photo: Philipp Rohrer.
professeur d’éthique économique à l’Université de St-Gall. Entretien.
L’Université de St-Gall est une pépinière de cadres pour l’économie. Quelle place y occupe la thématique des droits humains ? D’une manière générale, les droits humains sont loin de figurer en tête des préoccupations. On en parlait certes en éthique économique, mais relativement peu. Ce n’est que récemment qu’ils ont gagné en importance, grâce aux travaux de John Ruggie1. Il y aurait donc un retard à rattraper dans la formation des futurs managers… Absolument. Aux Etats-Unis, où j’ai longtemps enseigné, c’est encore pire. Quand, au début du cours, je demandais qui connaissait la Déclaration des droits de l’homme, cinq étudiants au plus sur trente-cinq levaient la main. Les entreprises doivent-elles simplement veiller à ne pas violer les droits humains ? Pas seulement. D’un point de vue éthique, leur responsabilité va clairement plus loin. Le principe du « Do no harm » est le minimum absolu. Des milliards de personnes vivent, aujourd’hui encore, dans la pauvreté ; leurs droits humains ne sont pas réalisés. Les gouvernements touchent de plus en plus aux limites de leurs efforts. La question se pose dès lors de savoir qui d’autre a le pouvoir d’améliorer la situation. Etant donné les relations de pouvoir actuelles, les entreprises figurent au premier rang. En ce sens, les entreprises ne sont pas seulement responsables de leurs comportements directs, mais aussi du contexte où elles agissent ? Tout à fait. On a souvent encore une fausse image de l’entreprise. Elle n’est pas seulement au service d’un objectif privé, telle une machine à sous pour ses propriétaires. Elle a aussi un mandat public : elle doit contribuer à améliorer la vie des gens. Sinon, nous n’aurions pas besoin d’entreprises. Les firmes qui sont actives au plan global doivent aussi, globalement, créer une valeur ajoutée sociale. Quand on réfléchit globalement à ce que signifie être au service de l’humanité, on arrive relativement vite aux droits humains. Ceux-ci, fondamentalement, concernent la dignité et la qualité de la vie humaine.
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Les entreprises ont-elles simplement la responsabilité ou, plus encore, le devoir de respecter les droits humains ? C’est clairement une obligation. Mais il en va autrement chez John Ruggie : il parle de responsabilité et la limite par rapport à l’obligation qu’il attribue à l’Etat. Mais Kant, au XVIIIe siècle déjà, voyait un devoir – au plein sens du terme – dans la notion de responsabilité qu’il associait à des droits. La délimitation de Ruggie ne fait pour moi aucun sens. Les règles volontaires de responsabilité sociale des entreprises suffisent-elles pour rendre les firmes comptables en matière de droits humains ? Non. Bien sûr, il est important qu’elles existent. Mais elles ne résolvent pas le problème de fond. S’agissant d’une réalité fondamentale comme les droits humains, on a besoin de règles juridiques complémentaires, qui plus est à un niveau global. Tant que la possibilité existe d’échapper aux règles, ceux qui s’y tiennent sont souvent les dindons de la farce dans le jeu de la compétition. L’amélioration durable de la situation requiert un Level Playing Field, lequel n’est réalisable qu’avec des règles globales et contraignantes. Comment considérez-vous les travaux du représentant spécial de l’ONU John Ruggie ? Ils ont sorti de l’ombre le discours sur économie et droits humain et lui ont donné une place centrale. On le voit notamment dans les préoccupations de l’opinion publique et dans les débats d’éthique économique, où les droits humains occupent aujourd’hui le devant de la scène dans beaucoup de conférences. J’étais jusqu’il y a peu l’un des rares éthiciens économiques à thématiser ces questions dans les congrès scientifiques. Je recevais pour cela en général une tribune le vendredi soir entre 17h et 19h, quand tout le monde était parti. Quels sont les manques de Ruggie ? Il est malheureusement resté confiné dans le « Do no harm », affirmant presque catégoriquement que la responsabilité des entreprises ne va pas au-delà. Il est également frappant que Ruggie fait complètement l’impasse sur les arguments éthiques ou moraux. Ruggie attribue aux Etats l’obligation de protéger les droits humains, aussi par l’économie. Cela implique des dispositions juridiques. Sans elles, il est impossible à l’Etat d’assumer son devoir.
Photo: Action de Carême, Meinrad Schade.
Mine de cuivre et de cobalt de Kamatanda (RDC). Un cadre légal est nécessaire pour obliger les multinationales suisses à respecter les droits humains partout dans le monde, en particulier dans le secteur à risques de l’extraction minière.
Absolument. L’obligation de protéger (« Duty to protect ») dont Ruggie charge l’Etat suppose clairement qu’il doit y avoir, au plan national, des réglementations claires et juridiquement contraignantes. Il convient donc de réfléchir à l’application extraterritoriale du droit et à d’autres instruments. Que Ruggie oblige l’Etat à se préoccuper du comportement des entreprises qui y ont leur siège est très positif. Mais en même temps, le fait qu’il s’oppose avec détermination à un cadre juridique global est négatif. L’idée d’engager d’abord les Etats, ainsi que le propose « Droit sans frontières », est une voie qui peut être tout à fait praticable. Mais, un jour ou l’autre, on arrivera à un point où l’on ne pourra plus se contenter de faire les choses à moitié. Il faudra tôt ou tard œuvrer à un cadre juridique global. Etant donné les Principes directeurs de Ruggie, je ne pense pas cependant que cela sera possible à court ou moyen terme.
on discute avec des représentants d’entreprise, on entend souvent que les firmes préféreraient un cadre juridique clair aux campagnes imprévisibles de lobbies, car cela leur offrirait une certaine sécurité de droit. On a cependant peur que la Suisse fasse cavalier seul et qu’on se retrouve avec des désavantages compétitifs. On peut toutefois se poser la question du sérieux de l’engagement d’une entreprise qui s’oppose à rendre contraignant ce qu’elle fait sur une base volontaire. Cherchet-elle à garder ouverte une porte de sortie, histoire de pouvoir agir autrement le cas échéant ? Propos recueillis par Pepo Hofstetter
1. John Ruggie a été de 2005 à 2011 le représentant spécial des Nations Unies pour les questions droits humains et entreprises. En 2008, il a défini un cadre reposant sur trois piliers : l’obligation de l’Etat de protéger les
« Droit sans frontières » est donc un pas dans la bonne direction ? C’est le bon pas au bon moment. Dans la mesure où il est clair qu’il ne se passera rien au plan global ces prochains temps, il est logique de voir ce que l’on peut mettre en œuvre au plan national. Les réglementations à ce niveau sont le seul moyen avec lequel on peut construire quelque chose et avoir un certain impact. Pour l’instant, la Suisse n’a pas fait grand-chose pour la mise en œuvre des Principes directeurs de Ruggie. On ne sait pas encore comment les choses évolueront en Suisse. Une première réunion des acteurs intéressés s’est déroulée mimai. On verra où cela va mener. Il y a bien sûr des milieux qui vont appuyer sur la pédale des freins. J’espère que l’on s’efforcera de mettre en œuvre le cadre Ruggie de manière conséquente, avec des objectifs concrets, sans demi-mesures et en évitant d’aboutir à une nouvelle directive non contraignante. Les firmes qui, aujourd’hui déjà, prennent au sérieux les droits humains, n’ont-elles pas elles-mêmes intérêt à un cadre juridique clair ? En principe oui, et je pense que certaines l’ont, même si cela ne se reflète pas dans leurs positions publiques officielles. Quand
droits humains, la responsabilité des entreprises de respecter tous les droits humains partout dans le monde, l’accès des victimes à la justice et à des réparations. En 2011, le Conseil des droits de l’homme a adopté à l’unanimité ses Principes directeurs d’application qui doivent maintenant être mis en œuvre au plan national.
Succès de « Droit sans frontières » La pétition « Droit sans frontières » a été remise le 13 juin avec 135’285 signatures. Elle demande au Conseil fédéral et au Parlement de faire en sorte que les entreprises dont le siège est en Suisse soient obligées de respecter les droits humains et l’environnement partout dans le monde. Pour mettre en œuvre cette revendication au plan parlementaire, un petit groupe interpartite s’est constitué. Il réunit des membres de sept partis: PS, les Verts, PDC, Verts libéraux, PBD, Parti évangélique et PLR. Ces députés ont déposé pendant la session de juin six interventions parlementaires sur les questions droits humains et entreprises.
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Nouveau président, anciennes tâches
Les chantiers de la Banque mondiale Mark Herkenrath
Jim Yong Kim prendra début juillet ses fonctions de nouveau président
de la Banque mondiale. Des organisations non gouvernementales du monde entier lui demandent de mettre en œuvre sans tarder un certain nombre de réformes urgentes. Ce printemps, deux candidats très prometteurs des pays en développement étaient pour la première fois en lice pour l’élection à la présidence de la Banque mondiale. La course a cependant une fois de plus été gagnée par le poulain des Etats-Unis. Un signe qui confirme le caractère souvent superficiel des « progrès » de la Banque mondiale. Ces dernières années, la banque s’est davantage ouverte aux préoccupations des pays en développement, mais on ne saurait parler de virage fondamental. Le nouveau président a devant lui la tâche difficile de mettre en œuvre le plus rapidement possible diverses réformes qui piétinent. Une coalition internationale d’organisations non gouvernementales (ONG) – parmi lesquelles Alliance Sud – lui a transmis des propositions en avril déjà. Réforme de la gouvernance La nouvelle répartition des droits de vote est un véritable serpent de mer. La Banque mondiale vise à long terme l’égalité
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des voix entre pays en développement et pays industrialisés. La révision la plus récente n’a guère profité aux pays pauvres, mais a favorisé avant tout des Etats au PIB par habitant élevé comme l’Arabie Saoudite et la Corée du Sud. Alors qu’ils représentent plus de 80 pour cent de la population mondiale, les pays à revenu faible ou moyen n’ont toujours que 40 pour cent des droits de vote dans les diverses sous-organisations de la Banque mondiale. C’est pourquoi les pays en développement et les ONG exigent que, lors de la prochaine révision en 2015, les rapports de voix soient enfin définis au pro rata de la population. De plus, les ONG demandent que Kim crée davantage de transparence et de devoir de rendre des comptes dans le Conseil des Administrateurs. Directives claires pour la promotion du secteur privé On a longtemps reproché à la Banque mondiale – par les condi-
Filets de sécurité sociale solides La société civile salue l’engagement croissant de la Banque mondiale dans la construction de filets de sécurité sociale. Quelques voix critiquent cependant le fait que la banque atténue par là avant tout les effets des dures conditionnalités de crédit du Fonds monétaire international, lequel pousse souvent les pays en développement à des mesures d’économie draconiennes. De plus, une évaluation interne récente de la banque a révélé que les filets de sécurité qu’elle encourage n’ont généré qu’une protection limitée face aux conséquences de la crise économique mondiale. Ils ont certes aidé les personnes qui étaient déjà pauvres, mais négligé les ménages que la crise a précipités dans la pauvreté. Si la situation économique mondiale devait continuer à se dégrader, la Banque mondiale devrait rapidement développer de nouveaux instruments. Stratégie énergétique durable Un thème qui va bientôt occuper le nouveau président est la controverse en cours sur la politique énergétique de la Banque mondiale. Un projet de stratégie publié en 2011 propose qu’elle cesse de soutenir la construction de centrales à charbon – très dommageables pour l’environnement – dans les
pays en développement avancés. Les lobbies concernés sont cependant parvenus à mobiliser des pays émergents contre cette proposition soi-disant discriminatoire. Nombre d’ONG et quelques pays industrialisés réclament au contraire l’abandon de projets de centrales à charbon aussi dans les pays pauvres.
La banque s’est davantage ouverte ces dernières années, mais on ne saurait parler de virage fondamental. Les ONG appuient cette exigence dans leur lettre au nouveau président. Ils demandent à la Banque mondiale de se concentrer sur des petits projets énergétiques dans des régions périphériques ainsi que sur l’amélioration des réseaux de distribution. Cela permettrait aux ménages pauvres d’accéder plus facilement à de l’énergie propre. Révision rapide des « garde-fous » Une dernière exigence importante de la société civile concerne le renforcement des « garde-fous » environnementaux et sociaux. Il s’agit, par exemple, des directives pour la protection des peuples indigènes ou pour les déplacements forcés dans les grands projets financés par la Banque mondiale. Les ONG demandent ici en particulier que les populations concernées soient mieux consultées, déjà au stade de la planification du projet. La révision de ces directives est cependant en panne. Selon une information récente de la Banque mondiale, il ne faut pas attendre de résultats concrets avant la fin de 2012. En revanche, une nouvelle fenêtre de crédit a été ouverte avec le projet douteux de « prêt-programme pour les résultats » (P4R). Avec ce nouvel instrument, qui vise à soutenir des programmes publics de développement composés de plusieurs projets individuels, la Banque mondiale mine les directives en vigueur jusqu’ici. Grâce à la résistance de la société civile, ce programme a été limité à une phase-pilote de trois ans. La banque devrait alors procéder à une évaluation. Les ONG demandent qu’elle consulte également des voix indépendantes et les groupes de personnes directement concernés. Photo: Keystone.
tionnalités de ses crédits – de contraindre les pays en développement à des politiques de libéralisation et de privatisation. Cette critique ne vaut plus sous cette forme générale. Les conditionnalités sont, depuis leur révision en 2005, devenues plus souples. Elles conduisent moins que par le passé à des interventions macro-économiques sensibles. En revanche, la banque promeut toujours plus le secteur privé dans les pays en développement. Plusieurs études, notamment de l’ONG Eurodad, montrent que les principaux bénéficiaires de cette politique sont des filiales de multinationales. Ainsi, la Banque mondiale ne prétérite pas seulement le développement du secteur public, mais aussi les entreprises domestiques. Elle devrait au contraire les appuyer davantage. Les mesures de soutien aux grandes firmes étrangères devraient obéir à des directives claires comme le respect des droits humains et des standards environnementaux ainsi que la création d’emplois décents.
Le nouveau président de la Banque mondiale Jim Yong Kim, ici en visite au Pérou, aura de gros défis à relever.
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Protection des investissements
La Bolivie dénonce ses accords La Paz est en train de revoir sa politique d’investissement. Elle a dénoncé le CIRDI et renégocie tous ses accords. Une expérience positive qui lui permet de réorienter les investissements au profit du développement. A l’initiative de la Paz, le 10 juin a pris fin l’accord de promotion et protection des investissements (APPI) entre la Bolivie et les Etats-Unis, en vigueur depuis 2001. Les dispositions du traité vont s’appliquer encore pendant dix ans à tous les investissements américains en Bolivie déjà existants à cette date d’expiration – on ne connaît pas d’investissements boliviens aux Etats-Unis. Les relations entre le gouvernement d’Evo Morales et le grand voisin nord-américain ne sont certes pas au beau fixe, mais Washington n’est pas la seule à faire les frais de la nouvelle politique d’investissement de la Bolivie.
règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI). Cet organe de la Banque mondiale tranche – par voie d’arbitrage – la plupart des litiges liés aux investissements. Une procédure hautement controversée, par laquelle les investisseurs peuvent porter plainte contre l’Etat hôte, mais pas l’inverse. Il a certes fallu du courage pour dénoncer le CIRDI, mais un observateur proche du dossier nous confie qu’au bout du compte, cela a été positif. La Bolivie fait actuellement l’objet de « seulement » neuf plaintes connues, contre cinquante et une pour l’Argentine qui détient le record.
Rééquilibrer les droits En 2007, le petit pays andin a décidé de dénoncer tous ses APPI et de les remplacer par un nouveau modèle qui rééquilibre les droits des investisseurs et du pays-hôte. Il vise plusieurs choses : redéfinir l’investissement pour le limiter aux activités qui créent véritablement de la valeur dans le pays ; autoriser les « exigences de performance », c’est-à-dire l’obligation pour l’investisseur d’utiliser des intrants domestiques et d’opérer des transferts de technologie ; revoir le système de règlement des différends pour obliger les investisseurs à utiliser les tribunaux domestiques au lieu des instances internationales. Sur la même lancée, à l’instar également de l’Equateur et du Venezuela, la Bolivie a dénoncé le Centre international de
Investissements non porteurs de développement Ce changement radical s’explique par les très mauvaises expériences de la Bolivie en matière d’investissements directs à l’étranger (IDE). Après avoir fait des pieds et des mains pour les attirer, le gouvernement s’est aperçu que ceux-ci allaient presque exclusivement dans l’exploitation des ressources naturelles, comme les hydrocarbures et les mines. Très peu de produits étaient transformés localement. Quelques investisseurs s’étaient bien lancés dans les télécommunications, mais ce secteur était déjà rentable lorsqu’il était propriété de l’Etat. Au bout du compte, les flux financiers allaient davantage vers l’extérieur et très peu de moyens étaient réinvestis dans le pays même.
La Suisse revoit ses APPI à petits pas Selon Lukas Siegenthaler, chef de la section investissements étrangers au Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco), la Bolivie n’a pas (encore) dénoncé son APPI avec la Suisse. En 2010, les investissements directs de la Suisse dans ce pays andin s’élevaient à 59 millions de francs. Le 11 juin, le chef de l’Etat bolivien Evo Morales a annoncé la nationalisation d’une mine de Glencore. Des nationalisations avaient déjà eu lieu en 2007 et 2010. Le Seco ne savait pas si Glencore a porté plainte devant un tribunal arbitral.
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La Confédération, ainsi que le précise Luka Siegenthaler, revoit ses traités depuis des années et les adapte, si nécessaire, en fonction de la jurisprudence. Par exemple, la définition de l’investissement a été précisée suite à l’affaire Romak SA versus Ouzbékistan : faute d’élément de contribution, de durée et de risque, les arbitres ont estimé que la fourniture de blé à l’Ouzbékistan par l’entreprise suisse Romak SA ne constituait pas un investissement, mais une transaction commerciale1. Suite à ce jugement, la Suisse s’est rendue compte que la définition de l’investissement contenue dans son modèle d’APPI pouvait générer des malentendus. Dès lors, elle stipule dans ses récents APPI – comme ceux avec l’Egypte et le Kosovo
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– que les transactions commerciales pures ne constituent pas des investissements au sens de l’accord. « En réponse aux demandes du Parlement, nous avons introduit dans les préambules des références aux principes du développement durable, affirme Lukas Siegenthaler. Jusqu’il y a quatre ou cinq ans, le Parlement ratifiait les APPI sans de longues discussions, mais maintenant il pose des exigences dont nous devons tenir compte. Le Seco a d’ailleurs mis sur pied, avec d’autres offices intéressés de l’administration fédérale, un groupe de travail qui planche sur la meilleure façon d’inclure les clauses sur le développement durable dans les accords. » Selon lui, les pays en développement n’ont jamais demandé à la Suisse d’inclure des clauses spécifiques dans les traités, à l’exception notable de l’Egypte qui a exigé une référence au développement durable dans le préambule, laquelle lui a été accordée. « Nous savons que certains pays sont en train de revoir leurs APPI, mais nous n’avons pas reçu de demande formelle de renégocier les traités existants. Probablement, la Suisse n’est pas leur priorité », conclut Lukas Siegenthaler. 1. http://www.iisd.org/itn/2010/01/12/uncitral-tribunal-determines-that-wheat-supply-contracts-are-not-investments-underswiss-uzbekistan-bit/
Photo: Keystone.
Evo Morales dans l’ancienne mine d’étain de Glencore à Vinto (Bolivie). Après avoir été privatisée dans des circonstances douteuses, elle a été renationalisée en 2007.
Lorsque Evo Morales a été élu président, il a promu une approche différente. La nouvelle constitution de 2009 – fortement influencée par les ONG – favorise les investissements domestiques. Les IDE doivent être soumis au cadre légal national, sans exception et sans pouvoir bénéficier d’un statut plus avantageux que les investissements boliviens. Dès lors, la Bolivie est en train de renégocier tous ses APPI pour les rendre compatibles avec la Constitution et le nouveau Plan national de développement. La Paz est en voie d’élaboration d’un nouveau modèle d’accord. Sans surprise, l’Union européenne fait pression sur le gouvernement pour qu’il adopte rapidement un cadre légal susceptible de rassurer les investisseurs. Mais la Bolivie n’est pas pressée. Elle a constaté que les IDE ne vont pas là où les
investisseurs ont le plus de droits, mais là où ils peuvent générer le plus de profit. La preuve par le Brésil, qui n’a signé aucun APPI et draine le plus d’IDE en Amérique latine. Après une première diminution, les investissements dans les hydrocarbures et les banques sont en train de se redresser. La Bolivie cherche à trouver un équilibre entre ses intérêts et ceux des investisseurs. Les investissements sont jugés à l’aune de leur performance et de leur contribution à l’exploitation durable des ressources naturelles ainsi qu’à la fourniture de services garants d’un accès universel, à des prix abordables. La nouvelle Constitution considère l’énergie, la santé et l’éducation comme des droits humains et non comme des intérêts commerciaux. Isolda Agazzi
Les bons tuyaux de la doc Ingérence humanitaire Libéria, Irak, Somalie, Haïti, Kosovo, Libye… Tous ces pays ont pour point commun d’avoir subi une intervention « humanitaire » de la part des pays occidentaux. Aujourd’hui, la question qui est sur toutes les lèvres est de savoir quand l’Occident interviendra en Syrie. Quelques voix dérangeantes viennent troubler l’harmonie du chœur occidental. Parmi elles, celle de l’historien Tzvetan Todorov et celle de l’ancien président de Médecins sans Frontières Rony Brauman. Que disentelles ? Essentiellement une chose : la démocratie ne peut pas être imposée et encore moins par des bombes. « On ne peut pas rester les bras croisés pendant que la population civile se fait massacrer », leur rétorque-t-on. A quoi ils répondent par une question: « Les Occidentaux sont-ils les gendarmes du monde ? »
Lorsque l’on examine de plus près les interventions « humanitaires » des deux dernières décennies, force est de constater que leurs résultats ont souvent été douteux, voire désastreux. Quand cela tourne au vinaigre, la démocratie et les droits de l’homme sont disqualifiés et piétinés par ceux-là mêmes qui appellent à les respecter. N’esquivons pas la question: les interventions « humanitaires » sontelles vraiment motivées par la défense des droits humains ou sont-elles avant tout dictées par les intérêts des pays qui interviennent ? Les tuyaux « Une bombe n’est jamais humanitaire », Tzvetan Todorov, Marianne : http://goo.gl/aKoDC Rony Brauman, « Je suis contre l’ingérence humanitaire », Dailymotion : http://goo.gl/iUrgG
« Interventions humanitaires : principes, concepts et réalités », Centre tricontinental : http://goo.gl/P1KxP Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, « Qui d’autre que les Occidentaux aurait pu empêcher les massacres en Libye ? », Le Courrier : http://goo.gl/x3gUE « En Syrie, l’humanitaire confronté à ses limites. Issues de secours », Libération : http://goo.gl/t1KOD « Les fragiles limites de l’aide humanitaire », zoom du Centre de documentation d’Alliance Sud: http://goo.gl/ N7H6v
Centre de documentation d’Alliance Sud Avenue de Cour 1, 1007 Lausanne, doc@alliancesud.ch ou 021 612 00 86 www.alliancesud.ch/documentation.
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20 milliards
2,4 milliards
Faits et chiffres Flux Suisse-Sud
En 2010, l’aide au développement de la Confédération, des cantons et des communes s’est élevée à 2,4 milliards de francs.
En 2010, la balance commerciale de la Suisse avec les pays en développement a affiché un excédent de 20 milliards de francs.
Un repas pour notre avenir
Vive la Terre nourricière ! Samedi 15 septembre 2012, Lausanne, Genève, Vevey, Sion, Chambrelien,… Gaya, Cotonou, Douala, Bamako, Kinshasa, Bethléhem, Kaboul, Paris, Londres, mais aussi Zurich, Berne, Genève, Vevey et Lausanne. Toutes ces villes et bien d’autres lieux de la planète proposeront, le 15 septembre, un repas communautaire organisé pour la troisième année consécutive par le réseau The Meal. L’objectif de ce moment de partage est de soutenir les paysans d’ici et d’ailleurs, plaider en faveur de la souveraineté alimentaire et du droit d’accès des populations autochtones aux ressources naturelles. Une collecte sera organisée, entre autres, en faveur de la grande marche non violente pour la justice en Inde : durant le mois d’octobre, 100’000 démunis et paysans sans terre convergeront sur New Delhi pour faire valoir leurs droits. « D’une manière douce, nous pouvons secouer le monde », disait Gandhi.
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Chaque ville, village, quartier est invité à s’associer à ce projet en créant une grande tablée faisant honneur aux produits naturels du terroir. Pour manifester le caractère solidaire et planétaire de ce rendez-vous créatif, des vidéo-conférences sur Internet ainsi qu’une chaîne de télévision partenaire relayeront et relieront de manière simultanée les divers évènements.
L’évasion fiscale vers la Suisse fait perdre chaque année 5 milliards de francs aux pays en développement.
Alliance Sud participera au repas de Lausanne, qui se tiendra au Parc de Milan (proche de la gare CFF), à partir de 12h00. Des activités seront prévues pour les enfants. Bon de participation: 25 CHF (adultes) / 18 CHF (AVS, étudiants, chômeurs) / 10 CHF (enfants). Pour plus d’informations: www.the-meal.net
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