Global+ | Hiver 2017/18

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Éc au lair dé ag ve e : lo la pp bo em nn en e c t, oo c’e pé st ra qu tio oi n ­   ?

NumÉro 66  |   HIVER 2017 /  1 8

Globalisation et politique Nord-Sud

Swissaid  |   Action de Carême  |   Pain pour le prochain  |   Helvetas  |   Caritas  |   Eper  |   www.alliancesud.ch

Big Data : la nouvelle domination du monde Droits humains : Vu ( e ) s de l’Équateur

Protection du climat : Le Bangladesh prend les devants

Agenda 2030 : La Suisse doit annoncer la couleur


News L’optimisation fiscale comme modèle d’affaires dh. La publication des Paradise Papers a pro­ voqué une vague d’indignation collective contre les pratiques de l’industrie de l’opti­ misation fiscale internationale. Il est d’au­ tant plus décourageant de constater la tié­ deur de la volonté politique de combattre sérieusement de telles pratiques. Un rapport du Conseil des ministres de l’UE a hésité à intégrer des pays membres ( ou des pays al­ liés comme la Suisse ) sur une liste noire des paradis fiscaux. En Suisse, la préparation du projet fiscal 17 semble indiquer qu’il pour­ rait devenir le revenant de la RIE III refusée par le peuple. Même l'impôt sur les béné­ fices corrigé des intérêts et la patentbox de­ vraient y figurer, bien que dans une forme légèrement modifiée. Non seulement des États, mais également, en Suisse, les cantons et les communes font un lobbying intensif pour maintenir leurs modèles d’affaires contestables. Plus d’informations sur la page web d’Alliance Sud. La décarbonisation avance js. Pendant que l’on débattait à la COP 23, à Bonn, de décisions politiques pour décarbo­ niser le monde, le fonds de pension norvé­ gien passait des paroles aux actes ; Norges Bank, qui gère le plus grand fonds souve­

rain au monde, de un milliard USD, exhorte son gouvernement à vendre toutes ses par­ ticipations dans des actifs liés à l’industrie fossile. Cela équivaut à 6 pour cent de l’en­ semble des investissements du fonds sou­ verain. Cela permettrait d’éliminer les risques de placement attendus d’un effon­ drement durable des prix du pétrole. Cet annonce a provoqué une chute immédiate des cours des actions fossiles et a motivé d’autres fonds de pension à suivre l’exemple norvégien. Selon Bloomberg, des fonds d’un montant additionnel de 670 milliards USD ont annoncé avoir retiré leurs placements des énergies fossiles. Un tribunal reconnait une respon­ sabilité pour des dommages climatiques js. Saúl Luciano Lliuya, un paysan des Andes péruviennes, a obtenu avec sa plainte contre le géant énergétique RWE un succès d’étape majeur : une cour d’appel allemande a donné suite à sa demande et reconnu pour la première fois un possible lien de causali­ té entre les émissions de CO2 de la multina­ tionale et de la menace d’inondations dans la ville natale de Lliuya, Huaraz. 50 000 ha­ bitants y sont menacés par la fonte des gla­ ciers due aux changements climatiques. Lliuya demande que RWE – historiquement, un des plus grands émetteurs de CO2 dans

le monde – paie 0,5 pour cent des frais né­ cessaires aux mesures de protection et d’adaptation climatiques à Huaraz, en pro­ portion de sa part aux émissions globales de CO2 causées par l’homme. Banque hollandaise épinglée pour son absence de reporting en matière climatique lm. En novembre, le Point de contact natio­ nal ( PCN ) des Pays-bas a accepté une plainte de Greenpeace, Oxfam, BankTrack et Mi­ lieudefensie pour violation des Principes ­d irecteurs pour les multinationales de l’OCDE contre ING Bank, pour son absence de rapports et de plan de réduction des mon­ tants d’émissions de CO2 liés à ses investis­ sements. Les ONG demandent qu’ING dé­ montre son engagement relatif à l’impact de ses investissements sur le climat en lien avec les Principes directeurs de l’OCDE et qu’elle définisse des objectifs ambitieux, concrets et mesurables de réduction. C’est la première fois qu’une plainte est ac­ ceptée par un PCN sur la base d’une menace pour le climat. Cela pourrait ouvrir de nou­ velles possibilités pour demander des ­comptes aux entreprises en lien avec leur empreinte carbone et leur impact clima­ tique.

Impressum

Alliance Sud en un clin d’œil

GLOBAL + paraît quatre fois par an.

Présidente Caroline Morel, directrice de Swissaid

Éditeur : Alliance Sud, Communauté de travail Swissaid | Action de Carême | Pain pour le prochain | Helvetas | Caritas | Eper E-Mail : globalplus@alliancesud.ch Site Internet : www.alliancesud.ch Médias sociaux politique :   www.facebook.com/alliancesud, www.twitter.com/AllianceSud Médias sociaux InfoDoc : www.twitter.com/doc_alliancesud Rédaction : Laurent Matile ( l m ) , Tél. + 4 1 21 612 00 98 Traduction : Daniel Hitzig Iconographie : Nicole Aeby Graphisme : Clerici Partner AG, Zurich Impression : s+z : gutzumdruck, Brig Tirage : 1500 Prix au numéro : Fr. 7.50 Abonnement annuel : Fr. 30.– Abonnement de soutien : min. Fr. 50.– Prix publicité /  e ncartage : voir site internet Photo de couverture : Vue du centre de distribution d’Amazon à Phoenix /  A rizona, États-Unis. © Ralph D. Freso /  Reuters Le prochain numéro paraîtra fin mars 2018.

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Direction Mark Herkenrath ( d irecteur  ) Kathrin Spichiger, Matthias Wüthrich Monbijoustr. 31, Case postale, 3001 Berne Tél. + 4 1 31 390 93 30 Fax + 4 1 31 390 93 31 E-Mail : mail@alliancesud.ch Politique de développement – Agenda 2030 Sara Frey, Tel. + 4 1 76 388 93 31 sara.frey@alliancesud.ch – C oopération au développement Eva Schmassmann, Tél. + 4 1 31 390 93 40 eva.schmassmann@alliancesud.ch – Politique financière et fiscale Dominik Gross, Tél. + 4 1 31 390 93 35 dominik.gross@alliancesud.ch – Environnement et climat Jürg Staudenmann, Tél. + 4 1 31 390 93 32 juerg.staudenmann@alliancesud.ch – Commerce et investissements Isolda Agazzi, Tél. + 4 1 21 612 00 97 isolda.agazzi@alliancesud.ch

– Entreprises et droits humains Laurent Matile, Tél. + 4 1 21 612 00 98 laurent.matile@alliancesud.ch – Médias et communication Daniel Hitzig, Tél. + 4 1 31 390 93 34 daniel.hitzig@alliancesud.ch Bureau de Lausanne Isolda Agazzi /  L aurent Matile /  Mireille Clavien Tél. + 4 1 21 612 00 95 /  Fax + 4 1 21 612 00 99 lausanne@alliancesud.ch Bureau de Lugano Lavinia Sommaruga Tél. + 4 1 91 967 33 66 /  Fax + 4 1 91 966 02 46 lugano@alliancesud.ch InfoDoc Berne Dagmar Aközel-Bussmann /  Simone Decorvet /  E manuel Zeiter Tél. + 4 1 31 390 93 37 dokumentation@alliancesud.ch Lausanne Pierre Flatt /  N icolas Bugnon /  C écile Mégard /  Amélie Vallotton Preisig ( e n congé ) Tél. + 4 1 21 612 00 86 documentation@alliancesud.ch


Paradisiaque volontarisme Photo : © D aniel Rihs

Après les élections parlementaires en automne 2015, le désenchantement régnait parmi la population qui s’engage pour une Suisse ouverte et solidaire. Les forces politiques qui prônent un égoïsme nationaliste et des intérêts econo­ miques à court terme avaient gagné. Économiesuisse, Swissholdings et d’autres représentants des intérêts des multinationales jubilaient : enfin un Parlement pour qui les intérêts des grandes entreprises sont plus importants que la solidarité avec les défavorisés et la tradition humanitaire de la Suisse. Mais cela fait déjà un moment. Entretemps, des signes apparaissent au sein de la population tendant à un renversement de tendance politique. En février 2017, le peuple suisse a coulé la réforme de l’imposition des entreprises III. Ceci est réjouissant d’un point de vue de la politique de développement. La réforme aurait créé de nouveaux incitatifs pour les entreprises de transférer leurs bénéfices des pays en développement, sans les y imposer, vers la Suisse. À la fin du mois d’octobre, dans un sondage, 77 pour cent des personnes interrogées soutenaient l’initiative pour des entreprises responsables. Et c’était avant la publication des Paradise Papers. Le soutien à l’initiative aurait vraisemblablement été encore plus clair après. Les Suissesses et les Suisses souhaitent une obligation légale contraignant les entreprises de respecter les droits humains et de protéger l’environnement, également à l’étranger. Mais il semble que le Conseil fédéral n’a pas encore perçu les signes des temps. La version révisée de la réforme de l’imposition des en­ treprises, envoyée en consultation, ressemble sur des points essentiels à la version précédente qui a été balayée. À l’ONU, à Genève, la Suisse se met en travers de la négociation d’un instrument contraignant sur les droits humains et les entreprises. Et se met ainsi les pays en développement à dos. Le Conseil fédéral combat l’initiative pour des entreprises responsables et invoque la responsabilité individuelle. Les entreprises doivent volontairement respecter les droits humains et protéger l’environnement. Les Paradise Papers démontrent comment fonctionne le volon­ tarisme : d’innombrables entreprises utilisent, de manière très volontaire, chaque petite faille légale pour maximiser leurs bénéfices. Les Paradise Papers traitent de l’évasion fiscale et non de violations des droits humains et de dégâts environnementaux dévastateurs. L’opposition massive d’Économiesuisse et de Swissholdings à l’initiative pour des entreprises responsables démontre par contre clairement que les multi­ nationales ont non seulement des problèmes avec la moralité fiscale, mais également avec le respect des droits humains. Il est dès lors d’autant plus réjouissant que la Commission des affaires juridiques du Conseil des États prenne au sérieux l’initiative. Elle veut en inclure des points essentiels dans un contre-projet parlementaire. Le contenu détaillé de ce contre-projet est encore ouvert. Les initiants, dont Alliance sud, ont fait part de leur intérêt. Ils sont ouverts au dialogue sur une loi qui apporterait des améliorations significatives par rapport au statu quo. Une diligence étendue en matière de droits humains ne doit pas être un acte volontaire pour les entreprises. Des violations des droits humains doivent entraîner des conséquences juridiques claires.

Photo : © I van Kashinsky /  Panos

Points forts

L’Équateur a fait l’expérience de l’opposition entre intérêts du profit et droits humains.

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Traité à l’ONU sur les droits humains  Le clivage Nord / Sud

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Conférence ministérielle de l’OMC  Les géants de l’IT s’emparent du monde

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Coopération au développement  Combattre les malentendus

Après la COP 23  10 Le mythe du Sud en retard Rapport de la Suisse sur l’Agenda 2030   12 Prendre enfin la cohérence au sérieux Migrations  15 E-dossiers d’Infodoc

Mark Herkenrath, directeur d’Alliance Sud

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Interview de Guillaume Long, Ambassadeur de l’Équateur auprès de l’ONU à Genève

« Le profit ne doit pas être une fin en soi » Laurent Matile

À la fin octobre, s’est tenue à Genève la 3e session du Groupe de travail

i­ ntergouvernemental de l’ONU (IGWG) chargé d’élaborer un « instrument interna­ tional juridiquement contraignant sur les sociétés transnationales et autres ­entreprises et les droits de l’homme », présidé par l’Ambassadeur Guillaume Long, Représentant permanent de l’Équateur auprès de l’ONU à Genève. Énormément d’intérêts sont en jeu, au vu du fait que l’on touche au cœur d’un système économique mondial qui a laissé beaucoup d’impunité au grand capital et aux grandes entreprises sans leur imposer de redevabilité ( accountability ). L’instrument en préparation ne doit pas être vu comme étant contre les investissements étrangers ( FDI ), dont le rôle est important dans le processus de développement. Mais l’investissement privé doit respecter les droits humains, les droits du travail et l’environnement, ce qui n’est pas toujours le cas. Des pas importants ont été franchis ces dernières années avec l’adoption de Principes directeurs – volontaires  – à l’ONU et à l’OCDE. Ce sont des dé­ veloppements importants, mais force est de constater qu’il semble toujours être tabou pour certains pays de parler de normes contraignantes en ce qui concerne les droits humains, à l’inverse d’autres domaines, comme le commerce

Photo : © Mark Henley /  A lliance Sud

Alliance Sud  : Monsieur l’ Ambassadeur, comment expliquez-vous que   les pays de l’OCDE, dont la Suisse,   ont fait preuve, à ce jour, d’une   position extrêmement défensive dans les discussions du Groupe de travail intergouvernemental de l’ONU ( IGWG ) que vous présidez ? ­Guillaume Long  : Il est vrai que l’on a été face à une attitude craintive, voire hostile, de certains pays de l’OCDE, depuis l’adoption de la Résolution 26/9 du Conseil des droits de l’homme en 2014. Mais après les sessions de 2015 et 2016, le climat est devenu plus amical et favorable lors de la 3e session de fin octobre 2017, même si les discussions restent tendues et difficiles. De nombreux pays n’avaient pas participé, respectivement avaient boycotté la 1ère session. Même si les États-Unis et le Canada ne sont pas présents, l’Australie a rejoint les discussions et l’UE est maintenant engagée sur ce dossier de façon beaucoup plus active.

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et l’investissement. Pour l’Équateur et d’autres pays, il s’agit de « deux poids, deux mesures » ( double standards ) et cette position représente une divergence majeure avec celle des pays de l’OCDE. De grands intérêts financiers et commerciaux empêchent le développement de normes contraignantes rela­ tives aux droits humains. À l’inverse des pays de l’OCDE, les grands pays émergents, dont la Chine, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du sud, soutiennent ce processus multilatéral. Ces pays n’ont-ils rien à craindre pour leurs grandes entreprises, devenues des acteurs majeurs dans les investissements et le commerce mondial ? Les États qui ont compris que ce traité n’est pas « contre les investissements », qu’il ne vise pas à décourager ou punir les investisseurs, le soutiennent. Les entreprises multinationales devraient pouvoir dire : nous n’avons pas peur d’un tel instrument. Il est dans notre intérêt d’investir de manière responsable et d’établir un level playing field pour assurer une concurrence à conditions égales. Plusieurs pays du Sud ont été victimes d’abus de la part d’entreprises multinationales, comme l’Inde ( catastrophe de Bhopal ) ou l’Afrique du Sud qui est ­marquée par son passé historique de l’apartheid, politique mais également économique qui a vu des entreprises bénéficier de ce système, notamment en termes de conditions de travail et d’exploitation de la main d’œuvre. La Chine, dont les entreprises sont actives dans les pays en développement, dont l’Équateur,


a, dans le passé, également vu des entreprises abuser de situations de pauvreté en Chine. Ceci dit, ces pays ont des positions divergentes sur certains aspects. Il est intéressant de relever que le volume des investissements étrangers est le plus élevé dans les pays à haute densité « normative », comme c’est le cas en Europe, qui présente le contexte le plus réglementé dans le monde en matière de droits du travail et de protection de l’environnement. Les investisseurs recherchent des opportunités ( à long terme ) dans les pays où la main d’œuvre est qualifiée, le système judiciaire n’est pas corrompu et les institutions marchent. En d’autres termes, où ils bénéficient d’un level playing field, de conditions propices. Les pays en développement qui ont identifié ce besoin, soutiennent le traité. Les milieux d’affaires ne devraient-ils pas plaider pour un global level playing field, alors que leurs représentants   ( ICC, IOE, BIAC, FTA-BSCI ) s’opposent avec fermeté à la négociation   d’un traité multilatéral, en alléguant, notamment, que ce dernier mettrait en péril la mise en œuvre des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme? Ce discours est regrettable. Il faut néanmoins relever que les positions de ces organisations ne font pas l’unanimité au sein des entreprises. Certaines n’ont en effet pas peur d’assumer leurs responsabilités. J’espère qu’elles se distancieront à l’avenir de leurs porte-paroles. On est ici face à une contradiction « civilisatrice ». Dans les années 1980, le droit de l’investissement s’est grandement renforcé, avec l’établissement de l’ISDS et des cours d’arbitrage prévues dans les Accords de protection des investissements (  « BITs » ) qui ont accordé beaucoup de poids aux investisseurs. L’investissement dans les pays en développement était considéré comme « vulnérable », la confiance dans les systèmes judiciaires faisait défaut. Des cours d’arbitrage internationales ont été mises sur pied, alors que lorsque l’on parle d’établir des juridictions compétentes en termes de droits humains, cela semble « très compliqué » et de nombreux obstacles sont dressés. C’est une contradiction flagrante, dénoncée par des pays comme l’Equateur. Il ne s’agit pas de suivre une approche anticapita-

liste, mais d’établir la suprématie de l’être humain sur le capital, ce qui veut dire de ne pas confondre la fin et les moyens. Le capital est un moyen – important – pour les pays de se développer, pour atteindre des objectifs humanistes, y compris en termes de plénitude et de bonheur des citoyens, mais son accumulation n’est pas une fin en soi. La Suisse a indiqué lors de la 3e session du Groupe de travail qu’elle souhaitait « identifier d’éventuelles synergies et complémentarités » avec la mise en œuvre des Principes directeurs de l’ONU et les « éléments » d’un projet d’instrument contraignant, tout en soulignant que la priorité doit être donnée à la mise en œuvre desdits Principes directeurs. Que vous inspire une telle position ? Cette position est la même que de nombreux pays de l’OCDE et de l’UE, notamment. Ceci dit, la Suisse n’a pas fermé ses portes à la discussion et n’a fait part d’aucune agressivité à ce sujet. Cela est positif. Cela étant, c’est une position de défense ( de principe ) des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et autres droits humains. Ces Principes directeurs comprennent des éléments importants que nous reprenons, de manière transversale, dans tout le document « d’éléments » discuté lors de la 3e session. Ils représentent un pas fondamental, un tremplin vers quelque chose de plus contraignant en droit international. Ces Principes directeurs ne doivent par contre pas devenir un moyen d’éviter nos responsabilités et faire obstacle à l’établissement d’un instrument contraignant. Cela pourrait devenir problématique si certains pays – qui considèrent le respect des droits humains par leurs entreprises comme important – s’enferment dans un « carcan volontariste » pour freiner le débat. La France a adopté en février 2017 une Loi sur le devoir de vigilance des sociétés ( … ) ; en Suisse, une initiative populaire a été déposée exigeant que les entreprises respectent les droits de l’homme et l’environnement. Ces développements sont-ils complémentaires avec l’élaboration d’un traité onusien ? Peuvent-ils servir d’inspiration dans vos négociations ? Certainement. La Loi française représente à cet égard un grand pas en avant,

dans un processus passant du volontaire au contraignant. Alors que l’on peut constater une accélération de l’adoption de Plans d’action nationaux depuis 2014 ( trois années après l’adoption des Prin­ cipes directeurs de l’ONU en 2011 ) – dont on peut, peut-être, supputer qu’elle visait à démontrer l’auto-suffisante des mesures volontaires – la France a établi son Plan d’action national ( prônant des mesures volontaires / CSR ) et adopté une loi sur le devoir de vigilance ( ... ), ce qui démontre la compatibilité entre mesures volontaires et contraignantes. Il sera important de voir si d’autres pays membres de l’UE et la Suisse adoptent de telles législations. L’élément central est le « devoir de vigilance » qui doit porter sur l’ensemble de la chaîne de valeur, dans la mesure où des partenaires commerciaux peuvent commettre des abus des droits de l’homme. Il est évident qu’un instrument contraignant doit résoudre ce problème de juridiction. C’est au cœur même de la problématique. Une entreprise multinationale qui viole les droits de l’homme dans un pays d’implantation doit, le cas échéant, faire face à des conséquences juridiques dans son pays de domicile. Il est important que si des pays accordent des incitations fiscales aux entreprises pour qu’elles s’établissent sur leur territoire – ce qui leur permet de payer moins impôts –, ces mêmes pays leur imposent des obligations. Cela fait partie du contrat social. Si ces entreprises commettent des méfaits dans les pays en développement, cela doit avoir des conséquences. La due diligence doit faire partie de ces contreparties.

Une carrière a ­ typique L’ Ambassadeur Long, d’origine franco-britannique, a été pro­ fesseur d’histoire et de relations internationales en Équateur, avant d’être nommé Ministre des Connaissances et du Talent Humain dans le gouvernement du Président Rafael Correa, puis Ministre de la Culture et du Patrimoine en 2015 et ­Ministre des affaires étrangères de l’Équateur en 2016.

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Photo : © B eawiharta /  Reuters

L’e-commerce prend aussi de l’ampleur dans les pays émergents et en développement. Photo : Au siège de ­Mataharimall.com à Djakarta, Indonésie.

Conférence ministérielle de l’OMC

La 4e révolution ­industrielle va amplifier le fossé numérique Isolda Agazzi

La libéralisation du commerce

é ­ lectronique avance ­masquée. Officiellement, seuls des sujets techniques et d’ap­ parence anodine pourraient être négociés  à la prochaine ministérielle de l’OMC.  Mais, à terme, c’est la régulation et la ­prise de pouvoir des géants high tech qui est en jeu.

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C’est le sujet le plus controversé de la 11e conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce ( OMC ), qui se tient du 10 au 13 décembre à Buenos Aires. Depuis 18 mois, ­plusieurs membres, dont les États-Unis, l’UE et le Japon ont présenté dans des « non papiers » leur vision de la libéralisation du commerce électronique. L’Inde, le Groupe africain et les Pays les moins avancés ( PMA ) s’opposent à toute négociation sur ce sujet, du moins tant que le cycle de Doha n’est pas terminé. La Suisse est prête à en discuter – ce qui, dans le jargon de l’OMC, revient à lancer des négociations tôt ou tard. Avant le début de la conférence, les positions des mem­ bres sont très éloignées : certains veulent négocier des règles contraignantes pour de nombreux aspects du commerce électronique, d’autres refusent. L’UE propose de créer un groupe de négociations, sans spécifier sur quoi. S’il y a un compromis, ce sera probablement un appel à échanger les bonnes pratiques en matière de facilitation du commerce ( comme la création de


zones franches et d’entrepôts douaniers ), la promotion du commerce informatisé et la mise en œuvre de l’accord sur la facilitation du commerce ; une approche plus coordonnée sur les signatures électroniques, l’authentification, les contrats et des mesures pour augmenter la transparence et promouvoir le développement et la coopération. Mais, tôt ou tard, les négociations sur le commerce électronique vont dépasser ce stade relativement anodin – que ce soit à l’OMC ou dans un accord plurilatéral, comme certains membres l’ont déjà laissé entendre. Bien que ne faisant pas l’objet de négociations dans la phase actuelle, le « non paper » des États-Unis 1 présente clairement leur vision – qui a déjà été proposée dans TPP, TISA et TTIP. Son but est d’accroître encore davantage le pouvoir déjà exorbitant des géants technologiques qui dominent le monde ( Amazon, Apple, Google, Facebook, Microsoft, etc. ) et qui sont tous américains ( à l’exception notable du chinois Ali Baba ). Il prévoit notamment de : • Interdire les taxes à la douane sur les produits digitaux ( musique, vidéos, software et jeux ) • Autoriser le mouvement transfrontalier des données et interdire l’obligation de stocker les données dans le pays Les données sont devenues l’une des principales richesses des États. Elles sont même la « matière première de l’économie digitale » 2. L’accès aux données et leur contrôle génèrent des revenus considérables pour ceux qui les recueillent et les analysent. Avec cette proposition, les États ne pourraient plus réclamer que les données ­restent à l’intérieur de leurs frontières, mais devraient les céder sans compensation aux multinationales ( améri­ caines ). Les données personnelles ( par ex. médicales, bancaires ), de sécurité nationale, militaires et du rensei­ gnement pourraient être déplacées partout dans le monde, sans entraves. Cela pose de graves questions en termes de souveraineté, de sécurité nationale et de protection de la sphère privée. Business Europe, le lobby des industries européennes, ne s’y est pas trompé. Dans une lettre adressée à la Commission européenne le 30 octobre 2017 3 , il soutient le mouvement transfrontalier des données et l’interdiction de l’obligation de les stocker dans le pays, en vue no­ tamment de la ministérielle de Buenos Aires. Il regrette l’absence de position commune de l’UE sur ce sujet qui avait été l’une des raisons de l’échec des négociations du TISA en décembre 2016. • Interdiction de l’obligation d’avoir une présence locale (  bureau, succursale, société ) Or, si un fournisseur étranger n’est pas physiquement présent dans un pays, comment son service sera-t-il ­réglementé ? Et taxé ? En cas de litige, les clients devront

1 https://docs.wto.org/dol2fe/Pages/SS/directdoc.aspx?filename=q:/ JOBs/GC/94.pdf 2 Cf. aussi Uni Global Union, Discussions inquiétantes à l’OMC, le fossé numérique risque de se creuser, Nyon, 5 mai 2017 3 http://www.bilaterals.org/IMG/pdf/businesseurope-letter.pdf

probablement poursuivre l’entreprise délocalisée devant les tribunaux des États-Unis ou de l’UE, principaux lieux de stockage des données. Cela est coûteux et long et primera sur les institutions nationales. Comme le fait remarquer le syndicat international Uni Global Union, le fournisseur de services étranger pourra déployer du personnel, qui ne sera pas soumis au droit du travail du pays hôte, mais à celui du pays d’origine de la multinationale, avec le risque de dumping salarial que cela entraîne ( cf. la récente polémique sur les travailleurs détachés au sein de l’UE ). Le nombre de travailleurs indépendants va augmenter, au détriment des travailleurs salariés, et accentuer encore davantage « l’ubérisation » et la précarisation de l’économie. Les entreprises nationales vont être mises sous pression par la concurrence des géants étrangers et elles vont devoir baisser les coûts. Les exigences de contenu local à la télévision, à la radio, au cinéma et à la télévision vont disparaître. • Interdiction de l’obligation de transférer la technologie, même pour les PMA C’est l’une des exigences traditionnelles des pays en ­développement pour surmonter la fracture numérique. Traditionnellement, ils ont consenti à des investissements étrangers à condition que l’investisseur aide les prestataires locaux à mettre à niveau leur technologie, qu’il s’engage à acheter une partie des pièces détachées auprès de fournisseurs locaux, etc. • Interdiction de l’obligation de dévoiler le code source, même à une autorité de régulation Cela renforcerait la protection de la propriété intellectuelle pour tous les membres de l’OMC, et poserait des ­problèmes de sécurité nationale, de protection de la sphère privée et de transfert des technologies. • Les multinationales étrangères auraient le droit de commenter à l’avance tout projet de loi et de ­règlement pour assurer la « transparence », dans l’idée d’une sorte de cohérence réglementaire. Comme le faisait remarquer Abdoullah Cissé, professeur de droit et avocat au barreau du Sénégal, lors d’une réunion sur le e-commerce organisée par la CNUCED à Genève : « Beaucoup d’États africains n’ont pas de lois sur la protection des données, le commerce électronique et la cyber criminalité. Les conséquences sont néfastes, car la fracture numérique se creuse et se banalise. Cela se traduit par une insuffisance des entreprises africaines dans la chaîne de valeur des entreprises numériques. La souveraineté numérique est menacée : la plupart des États africains ne sont plus responsables de rien chez eux, le monde fonctionne avec des données, mais ils n’ont pas de cloud, ne gèrent pas leur data centre. Les petites et moyennes entreprises sont basées en Afrique, mais elles travaillent pour des sociétés du Nord. Quant à la protection des données en Afrique, il n’y a aucune réglementation. Beaucoup d’États sont guettés par la cyber colonisation car lorsqu’on n’a pas de souveraineté sur les données, c’est la même situation qu’il y a quelques siècles lorsque le gouvernement tombait entre les mains des esclavagistes ! »

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Attentes exagérées vis-à-vis de la lutte contre la pauvreté

Lorsque les malentendus ­foisonnent Eva Schmassmann

La coopération au développement est censée

empêcher les migrations et prévenir le terrorisme. C’est une vision trop courte. Il n’est jamais trop tard de

Photo : © C hristian Bobst

clarifier ses limites et possibilités.

Un moment ludique en marge d’un projet de l’Eper soutenu par la DDC   dans le Soudan du Sud.

La critique la plus courante de la coopération au développement – partagée aussi par le Prix Nobel d’économie Angus Deaton – que l’on n’entend pas seulement au café du commerce, mais aussi au Parlement : elle soustrairait les gouvernements à leur devoir de promouvoir eux-mêmes des systèmes de formation et de santé convenables. Sauf que cette critique ne concerne pas du tout la coopération suisse, qui ne fournit qu’exceptionnellement de l’aide budgétaire aux gouvernements des pays partenaires. Et c’est bien ainsi. Dans les projets de coopération bilatérale, l’accent est mis sur le renforcement de la société civile. Le but est d’aider les personnes vivant dans la pauvreté et subissant des relations

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injustes à demander à leurs gouvernements de remplir leurs devoirs. C’est tout le contraire que de les décharger de leurs responsabilités vu qu’ils vont faire l’objet de davantage de contrôle de la part de la population. Priorités au lieu d’universalité L’un des reproches faits à la politique suisse de développement, exprimé aussi par le Comité d’aide au développement de l’OCDE dans une Peer Review 2013, est la large présence de la Direction du développement et de la coopération ( DDC ) dans trop de pays. Le conseiller fédéral Burkhalter y a opposé son credo de « l’universalité » de la coopération suisse. Du point de


vue d’Alliance Sud, plus un pays se disperse géographiquement, plus on risque que le travail de développement soit instrumentalisé à des fins diplomatiques. Aussi, une concentration des moyens sur moins de pays y renforcerait le rôle d’actrice de la DDC et augmenterait son efficacité. Cette concentration accrue devrait s’appuyer logiquement sur le mandat de base de la coopération suisse au développement ( cf. encadré ). Elle devrait se concentrer sur les pays pauvres et les plus pauvres et se retirer des pays à revenu intermédiaire. Il faudrait aussi demander combien d’autres pays sont déjà actifs dans un contexte donné car, pour avoir un plus grand poids politique, la Suisse devrait être parmi les prin­ cipaux donateurs. Il est aussi très important d’examiner si un contexte permet de faire des progrès dans le développement et de coopérer avec la société civile. Avec des régimes ­autoritaires comme l’Érythrée, il n’y a presque aucune marge de manœuvre. Si elle est trop limitée, la Suisse ne doit pas ­s’engager. La prévention moins chère que l’aide d’urgence L’aide humanitaire a été largement épargnée des trains d’économies des dernières années au Parlement. Lorsque des crises éclatent à l’improviste, que ce soit un tsunami ou un tremblement de terre, la détresse est à la une de tous les médias et la solidarité suit. Par contre, la coopération à long terme n’est pas très spectaculaire, elle nécessite un plus grand travail de persuasion au Parlement et dans l’opinion publique. Son utilité dans la prévention est pourtant indiscutable: l’amélioration des services de santé dans les pays en développement peut prévenir l’éclatement des pandémies et éviter, en plus de la souffrance humaine, de lourdes conséquences financières. Assurer la sécurité alimentaire des nourrissons, par exemple, est beaucoup moins onéreux que traiter les conséquences de la malnutrition. Depuis quelque temps, la coopération au développement est censée prévenir aussi l’extrémisme violent. Il est clair qu’elle y contribue par son engagement en faveur d’une répartition plus équitable des ressources, un meilleur fonctionnement des institutions et la participation politique. Mais elle ne peut pas forcément empêcher la violence d’éclater ( cf. aussi Global+ n 0 64 : « Qu’apporte la prévention de l’extrémisme violent ? » ) La coopération au développement pour lutter contre les ( causes des ) migrations ? Depuis 2016, le Parlement impose à la coopération suisse de s’orienter, en outre, en fonction des intérêts nationaux de politique migratoire. Pour certains partis, il faut surtout arrêter les flux migratoires vers l’Europe et la Suisse. Si on pousse le raisonnement jusqu’au bout, la coopération au développement ne devrait donc pas lutter contre les causes de la migration, mais contre la migration elle-même. Du point de vue d’Alliance Sud, cette approche pose problème car pour prévenir les migrations, la coopération devrait changer d’orientation tous les deux ans, selon les crises et les catastrophes. On ne pourrait plus mettre en œuvre des projets à long terme. Il est clair que la coopération au développement peut contribuer à réduire les causes des migrations en offrant des perspectives sur place, en promouvant la démocratie et l’État de droit et en augmentant la marge de manœuvre de la socié-

La coopération au déve­ loppement dans la Constitution   et la loi Le mandat de base de la coopération au développe­ ment repose sur la Constitution fédérale. Celleci confère à la Confédération un mandat clair : la coopération au développement « contribue no­ tamment à soulager les populations dans le besoin et à lutter contre la pauvreté ainsi qu’à promou­ voir le respect des droits de l’homme, la démocratie, la coexistence pacifique des peuples et la préserva­ tion des ressources naturelles. » La loi fédérale sur la coopération au développe­ ment et l’aide humanitaire internationales précise encore que les mesures « tiennent compte de la situation des pays partenaires ainsi que des besoins des populations auxquelles elles sont destinées ». La coopération doit en outre soutenir d’abord les pays en développement, les régions et les groupes de la population les plus pauvres.

té civile locale. Mais elle ne peut pas garantir que la fuite et la migration s’arrêtent. Les causes des migrations sont nombreuses. À côté d’une coopération au développement adéquate, la politique fiscale, commerciale ou climatique des pays industrialisés contribue notamment au développement durable. Concrètement, il faut prendre les mesures suivantes : • Juguler les flux financiers illicites. C’est une condition ­essentielle pour que les pays en développement aient assez de ressources pour fournir à leur population les services de base qu’elles attendent. • Réduire les subventions agricoles dans le cadre d’accords commerciaux équitables, qui donnent l’accès au marché des pays industrialisés et protègent les marchés des pays en développement. • Prendre des mesures efficaces pour lutter contre le ­changement climatique et aider financièrement les pays en développement à s’adapter à ses conséquences. Ce n’est que lorsque ces champs politiques seront coordonnés et décidés l’un en fonction de l’autre qu’on pourra parler de cohérence politique. Aujourd’hui, nous en sommes encore loin.

Le prospectus ci-joint se concentre sur des projets de développement d’organisations non gouvernementales (ONG). Il arrive souvent que des projets étatiques soient mis en œuvre par des ONG sur mandat de la DDC. Mais il faut une discussion qui aille au-delà d’une collaboration par projet et porte sur la façon dont la coopération au développement de l’État et des ONG se soutiennent et se com­ plètent mutuellement pour venir en aide aux habitants les plus pauvres et vulnérables des pays en développement.

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Alliance Sud a rencontré Saleemul Huq, chercheur sur le climat et le développement

Le Bangladesh, pays pauvre, va de l’avant Jürg Staudenmann

Le pays, pauvre et déjà très affecté par des change-

ments climatiques extrêmes, ne peut ni ne veut attendre les ­financements pour le climat du Nord, qui sont en retard. Le Bangladesh s’est préparé à temps à protéger le pays et sa population des changements climatiques. Un « Climate Change Strategy and Action Plan » ( CCSAP ) détaillé prévoyait déjà en 2009 six axes stratégiques pour les inter­ ventions les plus urgentes en matière d’adaptation climatique et de réduction de ses propres émissions. Pour mettre en œuvre le plan d’action, le gouvernement a été obligé de créer un fonds d’État. C’est ainsi que la population du Bangladesh finance ellemême, depuis des années, des mesures urgentes de protection du climat – comme par exemple le rehaussement des digues autour de Dhaka, qui datent des années 1960 – à hauteur de 100 millions USD par an. Entre-temps, les pays industrialisés continuent à temporiser. Selon L’ Accord de Paris, ils devraient pourtant couvrir ces dépenses par des contributions au ­financement climatique atteignant au moins 100 milliards USD par an. Comment Saleemul Huq, l’un des intellectuels les plus influents du Bangladesh, juge-t-il ce développement [et le rôle des responsables du changement climatique] ? Alliance Sud  : Comment se fait-il que le Bangladesh – l’un des pays les plus pauvres du monde – finance depuis 2009 les mesures d’adaptation au changement climatique sur son propre budget ? Saleemul Huq  : À cette époque, il n’y avait pas encore d’instrument majeur de financement du climat. Nous savions que nous avions besoin des financements internationaux, mais nous n’allions pas les attendre.

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Vu les changements climatiques extrêmes, le Bangladesh n’avait pas   le temps d’attendre non plus ... Exactement. La philosophie était : Nous allons de l’avant, tout en gardant notre exigence de soutien. Notre propre argent a été versé dans le « Climate Change Trust Fund ». À cela se sont ajoutés plus tard des contributions bilaté­ rales de pays donateurs comme le Danemark, la Grande Bretagne, les États-Unis, l’Australie ou l’UE dans le « Climate Change Resilience Fund ». C’est ainsi qu’à ce jour nous avons collecté environ 700 millions USD dans notre propre fonds, plus environ 300 millions USD dans celui des donateurs. Mais les deux fonds financent les mêmes mesures du plan d’action. Maintenant, enfin, le Green Climate Fund ( GCF ) est également prêt et les deux institutions pertinentes du Bangladesh sont accréditées ; nous avons déposé une première demande.

Ce modèle peut-il être appliqué   à d’autres pays ? Oui, je l’espère ! Tous les 48 pays réunis dans le Climate Vulnerable Forum ( dont le Bangladesh est l’un des fondateurs ) ont décidé de passer à 100 pour cent d’énergies renouvelables – et cela, sans conditions, c’est-à-dire sans dire « si vous nous donnez de l’argent ou de la technologie ». C’est notre promesse, notre aspiration ! Et nous voulons que les autres nous suivent. Les pays les plus vulnérables assument ainsi un leadership moral, ils prennent la transition au sérieux. Nous voulons emprunter ce chemin, car c’est le seul qui a de l’avenir !

Comment voyez-vous le lien   entre développement et protection   du climat ? Les pays en développement se sont battus pendant des années pour obtenir des moyens financiers nouveaux et additionnels pour des mesures de protection du climat et d’adaptation, qui aillent au-delà de l’aide publique au développement ( APD  ) promise. À mon avis, nous avons perdu ce combat. Chaque pays donateur a sa propre interprétation du financement du climat et il mélange les fonds.

Le Bangladesh a lancé à Bonn le Bangladesh Climate Finance Transparency Mechanism, qui réunit les ressources de l’État et des donateurs. Pourquoi ? Depuis peu, la société civile est impliquée dans le monitoring des activités. Nous nous efforçons ainsi d’améliorer la transparence et l’utilisation de l’argent destiné à financer le climat. L’idée n’est pas de rendre plus de compte aux pays donateurs, mais à notre propre population – nous appelons cela downward accountability. Installation lumineuse des activistes  de Greenpeace lors de l’ouverture  de la COP 23 sur la centrale au lignite de RWE,  à Grevenbroich, en Allemagne.


js.  Sur

le principe, la Suisse et le Bangladesh

p ­ ourraient même tomber d’accord :

la mise en œuvre de l’ Accord de Paris manque d’ambition et de sens des responsabilités. Mais c’est toujours la faute des autres ...

Cela veut dire que vous ne faites   plus la distinction entre financement du développement et du climat ? J’ai peut-être sur ce point une position un peu plus radicale que d’autres : certes, on a promis 0,7 pour cent ( du revenu national brut des pays riches pour financer le développement ), mais personne ne s’y tient. Et vous, les donateurs vous choisissez les pays et les priorités qui vous plaisent. Mais ça va. Tant qu’il s’agit de contributions volontaires, c’est légitime ; nous ne pouvons demander de comptes à personne. Par contre, le financement du climat fait partie d’un accord international, de la Convention cadre sur le climat et de l’Accord de Paris sur le climat. Il s’agit d’un paiement selon le principe du pollueur – payeur, pas de charité. L’ APD, c’est de la bienfaisance, le financement du climat, par contre, c’est une obligation contractuelle. Donc, lorsque la DDC vient au Bangladesh, la Suisse est une bienfaitrice. Mais lorsque la Suisse par­ ticipe aux négociations sur le financement du climat, nous lui demandons des comptes en tant que partie à un accord, car elle a contribué à provoquer un dommage. Photo : © S ascha Steinbach /  E PA /  Keystone

Photo : © m àd

Marre de temporiser !

Saleem Huq est Directeur de l’International Centre for Climate Change and Development ( ICCCAD ) à Dhaka, au Bangladesh, et Senior Fellow à l’International Institute for Environment and Development ( iied ) à Londres. Les changements climatiques et le développement durable vu des pays pauvres en Afrique et en Asie font partie de ses thèmes de recherche.

Doris Leuthard, la Présidente de la Confédération, n’a pas mâché ses mots devant la communauté internationale : nous avons besoin « de règles contraignantes et de transparence ». Le « temps des discussions » est terminé, il faut maintenant agir concrètement. Avant l’ouverture de la 23e conférence sur le climat, présidée par Fidji à Bonn, la délégation suisse avait déjà parlé de « COP technique », où serait simplement élaboré le corpus de règles de l’ Accord cadre de Paris sur le climat. Les attentes étaient donc sobres et rationnelles, comme si, depuis Paris, les États étaient sur la même longueur d’onde en matière de politique climatique. Les signaux des pays de plus en plus touchés par les changements climatiques avaient été ignorés. La Suisse et d’autres pays occidentaux semblaient donc être surpris de voir que, dès le premier jour de la conférence, des exigences politiques étaient mises sur la table. Elles ne portaient pas seulement sur la réduction des émissions après 2020, mais aussi sur le retard dans le soutien accordé aux pays en développement pour lutter contre le changement climatique. Les États insulaires voulaient aussi inscrire la question des loss and damage dans l’agenda de négociation : c’est-à-dire le soutien financier pour les dégâts climatiques et le risque de perte de territoires. Certains pays en développement ont été accusés par les pays industrialisés, dont la Suisse, de « saboter » les négociations et vouloir « réinterpréter » l’Accord cadre de Paris sur le climat, sous prétexte que les pays en développement ne sont pas prêts à se fixer à eux-mêmes des objectifs climatiques ambitieux. Ils veulent toujours plus d’argent et de concessions, alors même qu’ils n’ont pas de plans d’adaptation et ne savent pas comment utiliser les fonds climatiques dont ils disposent déjà. L’interview ci-jointe d’un pays directement touché par le changement climatique comme le Bangladesh démontre que cela n’est pas le cas. Les 47 autres pays en développement du Climate Vulnerable Forum ( CVF ) attendent toujours le soutien qui leur est dû, en vertu du traité, par les principaux responsables du changement climatique. D’une certaine façon, les membres du CVF peuvent souscrire à l’analyse de la Présidente de la Confédération : malgré une percée historique à Paris, les intérêts nationaux et les mouvements tactiques font encore obstacle au débat sur le climat et l’ambition et le sens des responsabilités manquent. Sauf que les gens au Sud – contrairement à nous – sentent de plus en plus que cela met leur vie en danger.

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Mise en œuvre de l‘Agenda 2030 en Suisse et par la Suisse

Il est temps de faire les choses correctement ! Eva Schmassmann

À la mi-2018, la Suisse va

p ­ résenter à New York un rapport sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Agenda 2030. Certes,   cela va permettre d’avoir une vue d’ensemble, mais le débat politique n’a pas ­encore commencé. Ce débat est pourtant urgent. En 2016, la Suisse a déjà présenté à l’ONU un premier rapport sur la mise en œuvre de l’Agenda 2030 ; six mois après l’entrée en vigueur du nouvel Agenda, celui-ci n’avait évidemment pas encore eu de résultats concrets. Il est d’autant plus remarquable que le Conseil fédéral veuille présenter en été 2018 un nouveau rapport au Forum politique de haut niveau ( HLPF ) du développement durable, dans le cadre de l’Assemblée générale de l’ONU. 44 pays, dont la Suisse, se sont portés volontaires ; par manque de temps – le forum dure neuf jours – il serait impossible d’en examiner plus. Dans son rapport, le Conseil fédéral veut aussi tenir compte du point de vue de la société civile suisse. L’été passé, différents acteurs de la société, de l’économie et de l’environnement ont pu soumettre leurs points de vue dans une consultation en ligne. Les organisations non gouvernemen­ tales, dont Alliance Sud, ont largement utilisé cette possibilité. En termes de sensibilisation, l’effort a sans doute valu la peine, même si le terme de consultation était quelque peu trompeur. Mais cela a permis à Alliance Sud de dire si les objectifs insérés par l’administration dans des secteurs politiques spécifiques sont trop modestes, corrects ou trop ambitieux.

La position d’ Alliance Sud Les pivots de la mise en œuvre de l’Agenda 2030 en Suisse et par la Suisse sont : l’amélioration de la cohérence politique pour le développement durable et le respect de la marge de manœuvre politique ( policy space ) de tous les autres pays dans leur propre mise en œuvre de l’Agenda 2030.

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Les questions portaient autant sur la cohérence que sur les grands défis, comme la contribution aux 169 sous-objectifs des objectifs de développement durable ( engl. Sustainable Development Goals SDG ). Cette procédure a notamment obligé les différents offices fédéraux à thématiser l’Agenda 2030 et ses objectifs et à placer les processus et objectifs existants dans le cadre global. Mais il n’y a pas encore eu de discussion politique sur ce que signifie, pour la Suisse, une mise en œuvre cohérente de l’Agenda 2030. Regarder au-delà des frontières ne peut plus se limiter à maximiser les chances d’exportation de l’économie. En matière de consommation, de production, mais aussi de droits humains, notre comportement a aussi des conséquences sur le plan international. Il faut en tenir compte, en menant une discussion élargie et en adoptant des mesures appropriées. Améliorer la cohérence de la politique de développement La cohérence de la politique de développement, exigée dans le sous-objectif 17.14, est un thème central d’Alliance Sud depuis des années. Elle signifie que la coopération au développement n’est pas le seul instrument de développement. Pour promouvoir le développement durable, il faut aussi demander à d’autres secteurs politiques – le commerce, la fiscalité, le climat, l’agriculture, la migration ou la sécurité – de rendre des comptes. Car, leur conception a une grande influence sur le potentiel de développement des pays du Sud. Jusqu’à présent le Conseil fédéral s’est contenté d’améliorer la cohérence de la politique dans son ensemble – ne voyant pas qu’il n’avait rien prévu en termes de cohérence de la politique de développement. Il faut, par conséquent, améliorer la cohérence dans tous les domaines avec la finalité de parvenir à un développement global durable. Ce n’est qu’ainsi qu’on pourra créer de nouveaux potentiels de développement et supprimer les obstacles à un développement décidé de manière autonome. Respecter la marge de manœuvre des États Le deuxième objectif central de l’Agenda 2030 est la protection du policy space des pays en développement. Aujourd’hui encore, leur marge de manœuvre est limitée par des accords commerciaux et de protection des investissements. Les pays en développement doivent pouvoir promulguer des lois, par exemple pour protéger l’environnement, la santé et les droits humains, sans risquer de faire l’objet d’une plainte à hauteur de milliards devant un tribunal arbitral. En parallèle, la société civile doit pouvoir s’exprimer librement dans ces pays. Seulement ainsi pourra-t-on garantir un gouvernement dans l’intérêt de la majorité de la population et promouvoir en conséquence la gestion participative, transparente et démocratique.


Photo : © N yani Quarmyne /  Panos

Clarifier le rôle du secteur privé Du point de vue de la politique de développement, la contribution du secteur privé à l’Agenda 2030 est une question centrale. On entend partout qu’il est impossible de le mettre en œuvre sans le secteur privé, mais l’Agenda est presque muet sur le rôle et la contribution concrète de celui-ci. Il faut, au minimum, respecter le principe du Do no harm. Cela implique qu’il faut examiner chaque contribution positive à un objectif de développement durable, car elle pourrait avoir un effet négatif sur un autre objectif. La production de denrées alimentaires, par exemple, peut constituer une contribution à l’ODD 2 « éliminer la faim ». Mais si on accapare des terres pour la production agricole et on y fait de la monoculture, la contribution totale sera négative, car des gens n’auront plus accès à la terre et la biodiversité en souffrira. Financement En matière de financement de l’Agenda 2030, la Suisse a trois devoirs : premièrement, elle doit prendre des mesures concrètes contre les flux financiers illicites. Deuxièmement, elle a réitéré la promesse d’allouer 0,7 pour cent du revenu national brut à la coopération au développement. Et troisièmement, ce cadre renforce aussi la promesse des pays industrialisés d’allouer 100 milliards USD par an, à partir de 2020, au financement international du climat. Ces fonds ne doivent pas être puisés dans le budget existant du développement, mais il faut trouver des moyens additionnels. Dans les trois cas, la Suisse rechigne à prendre les mesures nécessaires. Des modèles de financement alternatif ont pourtant été élaborés et le budget fédéral clôt chaque année avec des millions d’excédents.

Une éducation de qualité ( ODD 4 )  doit contribuer à l’égalité des sexes et ­autonomiser toutes les femmes  et les filles ( ODD 5 ). Photo : Aputiri Primary School à Tororo, en Ouganda.

Le processus de stratégie ­nationale et le feedback du rapport international Au niveau national, le Conseil fédéral mise sur la Stratégie de développement durable ( SDD ), définie à chaque fois pour les quatre ans d’une légi­s­ lature ( 2015 – 2019 ). Alliance Sud a déjà critiqué plusieurs fois la SDD : c’est une stratégie insuf­ fisante pour mettre en œuvre l’Agenda 2030, car elle a un fort accent national et ne tient pas ­assez compte des conséquences des politiques nationales à l’étranger. Au niveau international, le Conseil fédéral prévoit de présenter tous les quatre ans au High Level Political Forum de l’ONU un rapport sur l’Agenda 2030. Ce rapport tombera à chaque fois au milieu d’une stratégie de développement durable. La rédac­ tion du rapport pour le HLPF servira donc de feedback pour l’élaboration de la SDD suivante.

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Pause lecture

Le voyage contre le tourisme Nicolas Bugnon

Un essai de Thierry

Paquot résume en partie le ­programme InfoDoc 2017 sur le tourisme, qui sera clôt le 21 ­décembre par une promenade. En plus du vacancier qui se rend sans prétention toutes les années dans son même camping au bord de la mer, Thierry Paquot interroge nos pratiques en observant les différences entre voyageurs et touristes. Le plaisir de la route, l’absence de programme et de timing, une vraie ouverture à la découverte et l’inattendu, une transformation de soi pour s’adapter à une culture différente sont quelques éléments démarquant les traits d’un voyageurs à l’inverse du touriste qui a souvent son planning réglé et des attentes précises devant ­répondre au prix déboursé. Quoique parfois philosophique, cet essai de 90 pages se lit facilement et titille nos propres représentations !

Balade par des chemins de traverse avec Pierre Corajoud Date :

21 décembre, 18 h 30

Lieu de départ : Lausanne, Centre Pôle Sud  Lieu d’arrivée :  Alliance Sud InfoDoc

Ou comment se mettre dans la peau d’un-e aventurier-ère du proche et se souvenir que l’évasion est souvent au coin de la rue. Après la balade, visite de l’expo «  Touriste  ! Je t’aime ... moi non plus  » et vin chaud à Alliance Sud InfoDoc.

Av. de Cour 1, 1007 Lausanne Horaires d’ouverture : Lu – Ve 8 h 30 – 12 h, 13 h 30 – 17 h 30,   www.alliancesud.ch, documentation@alliancesud.ch

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Les multiples aspects de la migration

La migration comme symptôme Pierre Flatt  InfoDoc

consacrera sa thématique annuelle

2018 aux migrations. Trois e-dossiers documentaires sur le sujet sont déjà publiés en ligne.

« À la fin des années 80, un groupe d’experts et de hauts ­fonctionnaires de l’administration fédérale avait élaboré une Stratégie de politique d’asile et de migration préconisant de faire le lien entre politique d’asile et politique migratoire, de revoir la convention sur les réfugiés, d’harmoniser les ­procédures d’asile. D’agir sur place, de revoir la coopération bilatérale avec les pays d’origine des réfugiés d’alors. Aujourd’hui, le contexte a changé, mais les thèmes discutés il y a près de 30 ans à Berne sont plus que jamais d’actualité et n’ont toujours pas de réponse ... » 1.

« Asile et réfugiés » Il s’agit ici de poser certains jalons : quelle est la différence entre un migrant, un demandeur d’asile et un réfugié ? Qu’est-ce qu’un apatride, un sans-papiers ? La question des motifs des migrations est explorée pour constater que « le statut de réfugié semble de plus en plus problématique car il ne permet pas de rendre compte de la complexité des tra­ jectoires et des motifs qui contraignent les personnes à fuir leur pays. » Qui dit « migrations forcées » dit également « hébergement ». Où et dans quelles conditions ? Comme le souligne Michel Agier, « Camps de réfugiés ou de déplacés, campements de migrants, zones d’attente pour personnes en instance, camps de transit, centres de rétention ou de détention administrative, […] « jungles », hotspots... Ces mots ­oc­cupent l’actualité de tous les pays ­depuis la fin des années 1990. Les camps ne sont pas seulement des lieux de vie quotidienne pour des millions de personnes ; ils deviennent l’une des composantes majeures de la « ­société mondiale », l’une des formes de gouvernement du monde : une ­manière de gérer l’indésirable. » 2 Accès : www.alliancesud.ch/fr/infodoc/ asile-refugies

« Migration et développement » Comme le souligne le préambule au dossier, « depuis une vingtaine d’années, les organismes internationaux et les autorités étatiques portent une attention croissante à la relation entre migration et développement. L’idée selon laquelle les migrations seraient un ­instrument de développement des pays dits du Sud n’a de cesse de s’inviter dans les discours politiques ». Le renforcement de la coopération internationale s’est surtout illustré par la signature d’accords migratoires telles que l’accord entre l’UE et la Turquie en 2016 et l’accord entre l’Italie et la Libye, le Tchad et le Niger visant à « contenir l’afflux de migrants » 3 en 2017 ou la Suisse qui signait en 2012 déjà, un accord migratoire avec la Tunisie 4 . De nombreux autres aspects sont abordés dans le dossier comme la question des transferts de fonds. Accès : www.alliancesud.ch/fr/infodoc/ migration-developpement

« Migration et environnement » Un deuxième dossier aborde la question liant migration et environnement. Cette relation est complexe. La dimension environnementale de la ­migration n’est généralement pas la cause unique de la migration. ­Toutefois, les événements météorolo­ giques récents attestent de l’inten­ sification des phénomènes naturels ( cyclones, moussons, sécheresse, désertification, etc. ) qui rendent de plus en plus de régions du globe ­inhabitables. Selon l’ONU, les réfugiés climatiques devraient être plus de 150 millions en 2050. Existe-t-il une protection pour les réfugiés climatiques ? Quelles sont les implications pour la Suisse ? Accès : www.alliancesud.ch/fr/infodoc/ migration-environnement

1 Crise des migrations? Non, grave crise politique, Maud Krafft, Le Temps, 21 août 2016 https://www.letemps.ch/opinions /2016/08/21/crise-migrations-non-gravecrise-politique 2 La fabrique des indésirables, Michel Agier, Le Monde diplomatique, mai 2017 https://www.monde-diplomatique. fr/2017/05/AGIER/57491 3 L’Italie a signé un accord avec la Libye, le Tchad et le Niger pour contenir l’afflux des migrants, Jeune Afrique, 23 mai 2017 http://www.jeuneafrique.com/441266/ societe/litalie-a-signe-accord-libye-tchad-niger-contenir-lafflux-de-migrants/ 4 La Suisse et la Tunisie établissent un partenariat migratoire, Secrétariat d’État aux Migrations (SEM), 11 juin 2012 https://www.sem.admin.ch/sem/fr/home/ aktuell/news/2012/ref_2012-06-11.html

Il est aujourd’hui plus que jamais nécessaire de s’interroger sur la question migratoire. Elle nous concerne tous et s’imposera chaque jour un peu plus dans l’agenda mondial, et cela quelle que soit notre opinion à ce sujet. Alliance Sud InfoDoc propose ces trois dossiers pour éclaircir la situation.

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Photo : © Tomas Wüthrich

Regards suisses sur le Sud. Image du quotidien des Penan, derniers chasseurs et cueilleurs partiellement nomades, du village Long Tevenga dans la forêt ­tropicale encore intacte de la région de Limbang sur l’île de Bor­ néo, dans l’État du Sarawak en Malaisie. Les singes – comme ces macaques apprivoisés – sont des animaux domestiques ap­ préciés qui non seulement se nourrissent des restes, mais ­détectent les serpents et les étrangers.

Faits et chiffres sur la numérisation Sources : CNUCED, The Economist

Tomas Wüthrich a fait sa formation de photographe de presse au Centre de ­formation des médias (MAZ) à Lucerne, a été photographe de presse pour la Berner Zeitung et travaille depuis 2007 comme photographe indépendant dans le domaine du portrait et du reportage. Il a notamment publié pour GEO, Das Magazin, NZZ am Sonntag, Die Zeit, Beobachter, Schweizer Familie. www.tomaswuethrich.ch

25 000 000 000 000

60 %

Plus de 4 sur 10

ou 25 000 milliards USD : le chiffre d’affaires global du commerce électronique (2015).

de la population mondiale n’a pas d’accès à internet.

adultes en Afrique de l’Est paient leurs factures pour des services publics par téléphone mobile.

GLOBAL +   1, Avenue de Cour  |   1007 Lausanne  |   Téléphone + 41 21 612 00 86 E-Mail : globalplus@alliancesud.ch  |   www.facebook.com/alliancesud

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